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Université de Montréal - Thèse numérique
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1. Dupuis Fr res travers le Qu bec en ligne http experience hec ca dupuis et freres le magasin du peuple quebe page consult e le 6 janvier 2012 La succursale de Trois Rivi res est en fait l acquisition d un magasin d j existant J L Fortin Lt e Les succursales de la Plaza St Hubert et des Galeries d Anjou taient des boutiques 11 moment o le magasin fait d finitivement faillite En effet aucun n aura su relever l entreprise de fa on d finitive malgr l appui ind fectible du clerg de qui les dirigeants du magasin ont toujours t tr s proches En outre le gouvernement provincial n a pas consenti l aider financi rement Malgr tout Dupuis Fr res a eu une influence notable sur le d veloppement du commerce dans la partie est de la rue Saint Catherine Le cas de Dupuis Fr res a t assez peu t tudi par les historiens jusqu ici En 2004 Josette Dupuis Leman publie un livre en grande partie bas sur des souvenirs personnels mais n anmoins tr s int ressants Elle y retrace selon son point de vue de membre de la famille l volution du magasin de ses a eux en se concentrant toutefois essentiellement sur l histoire de la famille Dupuis le contexte de l ouverture du premier magasin les moments importants dans l volution chronologique de ce dernier la carri re des divers membres de la famille qui ont t la t te de l entreprise les relations e
2. Transforming Labour Woman and Work in Post War Canada Toronto UTP 2010 p 108 144 Sangster Joan The Softball Solution Female Workers Male Managers and the Operation of Paternalism at Westclox 1923 60 Labour Le Travail vol 32 1993 p 167 200 Shreve Sandra Telephone Operator Labour Le Travail vol 11 printemps 1983 p 182 Strong Boag Veronica Keeping House in God s Country Canadian Women at Work in the Home dans Heron Craig et Robert Storey sous la dir de On the Job Confronting the Labor Process in Canada Montr al McGill Queen s University Press 1986 p 124 151 Tremblay Martine La mise en sc ne de l amour La photographie de mariage dans la deuxi me moiti du XX si cle Enfances familles g n rations vol 7 2007 p 76 92 Willis John Cette manche au syndicat La gr ve chez Dupuis Fr res en 1952 Labour Le Travail vol 57 2006 p 43 91 Yesil Bilge Who Said This is a Man s War Propaganda Advertising Discourse and the Representation of War Worker Women During the Second World War Media History vol 10 n 2 2004 p 103 117 Sites Internet et autres documents Archives HEC Montr al Site de l Exposition virtuelle du fonds Dupuis Fr res Limit e en ligne http experience hec ca dupuis et freres le magasin du peuple page consult e en 2011 et 2012 Eichler M Site de L Encyclop die Canadienne Trava
3. D ailleurs durant la pr sidence de son mari et m me apr s le d c s de ce dernier Henriette sera tr s d vou e envers les employ s elle parle en leur nom son mari et aux autres hommes de la direction elle organise des activit s pour eux parfois m me dans sa propre maison et les incite participer l action de nombreux organismes de charit dont elle s occupe En bref elle sera tr s appr ci e par les employ s jusqu son d c s en 1960 3 AHEC FDFL P049 Dossier Spicil ge 1924 1944 Article de La Presse Une f te de famille chez DF 14 janvier 1939 3 LD vol 4 n 6 mars 1930 p 72 Nous soulignons 29 d offrir les v ux du nouvel an de la part du personnel Albert Dupuis est tr s vocateur La grande famille Dupuis Fr res r unie autour de son p re veut offrir son pr sident ses souhaits pour le nouvel an Il faut dire que les strat gies de gestion paternalistes semblent fonctionner avant et m me jusqu un certain point apr s l poque de la gr ve car les travailleurs manifestent bel et bien un profond attachement leur employeur comme en t moigne l attitude de certains d entre eux au moment de la faillite en 1978 Joseph employ depuis 34 ans en pleurs se confie alors un journaliste en ces termes 5 x 3 5 89 Je viens de perdre ma raison d tre mon gagne pain ma famille alternative 5 9 2 1 3 R glements aver
4. The Clerking Sisterhood Rationalization and the Work Culture of Saleswomen in American Department Stores 1890 1960 Radical America vol 12 n 2 1978 p 41 55 Porter Benson Susan Palace of Consumption and Machine for Selling The American Department Store 1880 1940 Radical History Review vol 21 1979 p 199 221 Porter Benson Susan The Cinderella of Occupations Managing the Work of Department Store Saleswomen 1900 1940 Business History Review vol 55 n 1 1981 p 1 25 Preston Joanne Domestic Ideology School Reformers and Female Teachers Schoolteaching Becomes Women s Work New England Quarterly vol 66 n 4 1993 p 531 551 Roberts Mary Louise True Womanhood Revisited Journal of Women s History vol 14 n 1 2002 p 150 155 Robertson Emma Harmonious Relations Music at Work in the Rowntree and Cadbury Factories Business History vol 49 n 2 2007 p 211 234 Sangster Joan Queen of the Picket Line Beauty Contests in the Post World War II Canadian Labor Movement 1945 1970 Labor Studies in Working Class History of the Americas vol 5 n 4 2008 p 83 106 Sangster Joan Representations and Realities The Shifting Boundaries of Women s Work Transforming Labour Woman and Work in Post War Canada Toronto UTP 2010 p 16 52 114 Sangster Joan Souriez pour les clients Retail Work Dupuis Fr res and Union Protest
5. activit s d crits notamment par Joan Sangster et Susan Porter Benson elles accordent autant d importance la famille que les travailleuses am ricaines voqu es par Leslie Tentler et elles ont su comme les Montr alaises l emploi de Bell pr sent es par Emmanuelle Minnie Bouvie tirer profit de situations dans lesquelles leurs employeurs les ont confin es En outre comme dans d autres entreprises qui publient un journal dans lequel elles exposent leur bienveillance le personnel semble chez Dupuis Fr res bien trait En effet si on se fie au contenu v hicul par Le Duprex la direction du magasin est tout a fait bien intentionn e face a son personnel Toutefois en r alit les patrons encadrent de pr s leurs employ es pour assurer le bon fonctionnement de leur commerce pour bien para tre aupr s du public et pour s assurer de cr er des liens solides entre tous les membres de la grande famille Dupuis ceux ci exploitent les loisirs et de mani re plus large la culture de travail des femmes en leur faisant une large place dans son journal soulignant la tenue d un shower ou l organisation d un piquenique La direction encourage aussi le d veloppement d une culture de travail f minine en multipliant les v nements sp ciaux et les activit s sociales susceptibles de la consolider Par cette offre vari e de divertissements Dupuis Fr res s assure du m me coup que la moralit et la f minit
6. mais celle ci montre leur d sir d instaurer des rapports plus intimes avec leur lectorat Dans Les journalistes qu b coises 1880 1930 tudes et documents n 7 Montr al Collection RCHTQ 1995 p 101 103 Les collaboratrices de LD ont sans doute voulu imiter cette pratique observ e dans la presse populaire certaines d entre elles ont cach leur v ritable identit pour pouvoir s exprimer librement sans crainte d tre d masqu es On peut en effet croire que certaines adoptent un pseudonyme car elles sont timides comme le montre cette citation tir e d un article de Mercantila Je n ai pas l habitude d crire L on me pardonnera ma mani re d exprimer ce que je pense LD vol 3 n 4 janvier 1929 p 3 Par ailleurs il faut mentionner que la participation des employ s au journal d entreprise et par cons quent sa qualit ne se maintiennent pas tout au long de la p riode l tude En effet sa richesse de m me que sa fr quence de parution s affaiblissent au fil des ann es d s le milieu des ann es 1930 environ Plusieurs facteurs pourraient expliquer cela notamment un manque de financement voir ce sujet LD vol 12 n 3 janvier 1944 p 142 ou peut tre aussi une diminution graduelle de l esprit d entreprise 93 dans les premi res ann es de parution du journal d entreprise quelques chroniques dans lesquelles des femmes ressentent le besoin de prendre ou de d fendre leur plac
7. 79 La mode sienne An Age eA A ape oe A 79 La culture de la beaut et le corps ns Aces teisativsatecasiwaditiscedeaslacdamaraes 83 Ee SPORE a a E E ola ea ak 88 3 2 2 LC d sir des ER DETTES SL A Su re de 92 3 2 3 Pouvoir et mancipation os remain en then EA 98 3 3 CONCIUSION immense ni de Renan eme ena aay RE ea 101 Conelusions ss te en Aes eos es ed Re a a Se 103 PDN OST ap NIG fa 5 cee ANR a sce toca era Galea ean ese en A Ne eck een ete 106 Liste des illustrations ILLUSTRATION 2 1 ILLUSTRATION 2 2 ILLUSTRATION 2 3 ILLUSTRATION 2 4 ILLUSTRATION 2 5 ILLUSTRATION 3 1 ILLUSTRATION 3 2 ILLUSTRATION 3 3 ILLUSTRATION 3 4 ILLUSTRATION 3 5 Quatre g n rations de femmes Dupuis cccecccetceteeeteeeteees 43 L amiti chez les EMpIGY eS 1e TL nn er ueass 46 Les employ es du petit train de No l 49 BANC DANCE Sr Sd ne 58 Les dames aussi savent p cher et chasser ccccesceesseeeteeees 59 La proximit physique entre employ s et employ es 00 71 Mariage d un Couple en 1986 hante 73 Tenue de vacances d une Mplo v rins Rennes 84 Marthe Fleury reine des sports 1954 88 Les championnes de la saison de quilles 1938 39 oe eeeeeeeees 89 vi Liste des abr viations AAAD Association athl tique amateur Duprex APEM Association professionnelle des employ es de magasin CSN Conf d ration des syndicats nationaux CTCC Conf d ration des trava
8. Le Louvre Le Printemps ainsi que La Samaritaine Linteau p 55 des services tr s abondants et diversifi s r partis en au moins trois rayons la possibilit de circuler librement parmi les rayons de marchandise des prix fixes tr s concurrentiels une architecture grandiose une d coration somptueuse et une utilisation abondante d innovations technologiques une attention particuli re aux displays de marchandise et la disposition des vitrines un nombre consid rable d employ s hommes et femmes une gestion des ressources humaines de plus en plus scientifique des profits faramineux etc Les grands magasins sont galement des lieux de divertissement o les clients surtout des femmes peuvent venir admirer des marchandises exotiques se d tendre dans une salle de lecture socialiser avec leurs amies dans un salon de th assister des parades de mode etc En outre ces commerces ont r volutionn plusieurs choses la fa on de consommer certes en d mocratisant la consommation et en offrant plus de libert aux femmes en tant que consommatrices mais aussi la fa on de vendre en favorisant notamment l int gration verticale Les plus petits commer ants ont d ailleurs t les victimes des grands magasins et de leur puissante concurrence Tout au long de leur histoire les grands magasins se sont attir s des critiques de leur part et de la part d autres d tracteurs 16 Selon Porter Benson
9. Manifestations de la culture populaire Montr al 1928 1940 M moire de ma trise Montr al McGill d partement d histoire 1974 152 pages Matthews Mary Catherine Working for Family Nation and God Paternalism and the Dupuis Fr res Department Store Montreal 1926 1952 M moire de ma trise Montr al McGill d partment d histoire 1997 118 pages Pinard Yolande Le f minisme Montr al au commencement du XX si cle 1893 1920 M moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 1976 246 pages S Malino Sarah Faces Across the Counter A Social History of Female Department Store Employees 1870 1920 Th se de doctorat New York Columbia d partment d histoire 1982 359 pages 108 Monographies Abelson Elaine S When Ladies Go A thieving Middle class Shoplifters in the Victorian Department Store New York Oxford University Press 1989 292 pages Anctil Pierre Le rendez vous manqu Les Juifs de Montr al face au Qu bec de l entre deux guerres Qu bec IQRC 1988 366 pages Bailey Beth L From Front Porch to Back Seat Courtship in Twentieth Century America Baltimore John Hopkins University Press 1988 181 pages Baillargeon Denyse M nag res au temps de la crise Montr al Editions du remue m nage 1991 311 pages Barry Francine Le travail de la femme au Qu bec L volution de 1940 1970 Montr al Les Presses de l Universit
10. although in general departmentization was by merchandise type in larger stores it was by price as well and later merchandise was occasionally grouped by theme or function The actual number and type of departments in a given store varied with the seasons and the business cycle Dans Palace of Consumption p 210 17 Tamilia p 4 10 18 Selon Porter Benson les grands magasins deviennent en quelque sorte pour les femmes l quivalent d un men s downtown club De plus elles se sentent privil gi es car the palace of consumption suggested to the customer that she was a sort of royalty Dans Palace of Consumption p 205 1 C est en effet au moment de l apparition des grands magasins qu il devient acceptable pour une femme seule c est dire non accompagn e par son mari de sortir de chez elle pour aller magasiner La grande superficie et les foules de clients caract ristiques des magasins rayons de m me que l atmosph re d anonymat que cela cr e aura son effet sur les femmes excit es d entrer dans ces luxueux palais de consommation effectivement parall lement au d veloppement des grands magasins naitra le probl me du vol l talage chez beaucoup de consommatrices m me celles des classes plus ais es de la soci t ce sujet voir Elaine Abelson When Ladies Go A thieving Middle class Shoplifters in the Victorian Department Store New York Oxford University Press
11. celle des travailleuses en milieu urbain mais galement en ce qui a trait Dupuis Fr res une entreprise qu b coise majeure qui a profond ment marqu l histoire du XX si cle et qui reste malgr tout encore m connue plusieurs gards 106 Bibliographie Sources Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Archives de la CSN Fonds CSN Le Duprex Le Travail Ouvrages g n raux Barbeau Marius Le rossignol y chante Premi re partie du r pertoire de la chanson folklorique fran aise au Canada Ottawa Mus es nationaux du Canada 1979 485 pages Lemieux Denise et Lucie Mercier Les femmes au tournant du si cle 1880 1940 Ages de la vie maternit et quotidien Qu bec IQRC 1989 398 pages Nora Pierre sous la dir de Les lieux de m moire 3 tomes Paris Gallimard c1984 1992 4751 pages Statistiques Canada Les grands magasins au Canada 1923 1976 Ottawa Statistiques Canada 1979 137 pages Tamilia Robert D Origin and Evolution of the Department Store Montr al UQAM Centre de recherche en gestion 2002 28 pages Tamilia Robert D The Wonderful World of the Department Store in Historical Perspective A Comprehensive International Bibliography Partially Annotated Cahier de recherche N 02 02 Montr al HEC 2002 77 pages Young Brian et John A Dickinson Br ve histoire socio conomique du Qu bec Sillery Septentrion 2003 452 pages 107 Th se
12. chaque Saint Jean Baptiste lors des fameuses parades d j voqu es et d autre part par sa proximit avec des personnages reconnus comme tant parmi les plus nationalistes de l poque notamment Lionel Groulx Le chanoine est effectivement pr sent au banquet du 75 anniversaire de la maison en 1943 en compagnie de deux autres grands nationalistes Esdras Minville et douard Montpetit m Les valeurs de fiert et de d vouement envers la patrie n manent pas que de la direction du magasin mais galement du personnel comme en t moignent certains articles publi s dans Le Duprex notamment par Ang lique Dans ses textes outre qu elle souligne l importance de la langue fran aise et de la foi catholique parties int grantes de la culture canadienne fran aise elle incite ses coll gues vendeuses travailler avec ardeur en 110 Dossier Historique reportages 1914 1975 Feu J Narcisse Dupuis Ml Pierre Anctil Le rendez vous manqu Les Juifs de Montr al face au Qu bec de l entre deux guerres Qu bec IQRC 1988 p 234 243 244 Selon cet auteur le mouvement appara t avant 1930 mais est surtout le produit de la crise conomique et des angoisses qu elle fit na tre dans la soci t Anctil en parle comme d un mouvement essentiellement pr sent dans les ann es 1930 mais qui a eu somme toute peu d impact Le slogan officiel du magasin Ach te bien qui ach te chez Dupuis fait sa
13. des soutanes et des ornements d glise notamment Selon l article les couturi res fabriquent aussi des drapeaux mais on ne mentionne ni la confection de v tements pr t porter ni d autres 162 articles du m me genre 2 3 La vie socioculturelle et les activit s 2 3 1 v nements sp ciaux et r ceptions La vie sociale et culturelle des travailleuses est tr s anim e comme en fait foi une multitude d articles du Duprex qui relate les activit s organis es par la maison pour son personnel Ainsi chaque ann e le journal fait mention d v nements planifi s par le magasin qui prennent la forme de grandes r ceptions ou de banquets accueillant des 160 La grande majorit des femmes voulant travailler dans un grand magasin tente n anmoins de se diriger vers la vente car c est ce qu il y a de plus payant Belisle Retail Nation p 162 161 Dossier Organigrammes 1946 Auxiliaires de vente et personnel des services tableaux 1 et 2 1 LD vol 9 n 4 juillet 1937 p 61 54 centaines d invit s autant de la maison que de l ext rieur Plusieurs occasions sont susceptibles d en faire l objet l anniversaire de fondation du magasin du pr sident ou d un autre membre important de la direction ou encore la fin de la saison des activit s sportives organis es par l AAAD l Association athl tique amateur Duprex Les employ es semblent appr cier ces r ceptio
14. la nation et la langue des travailleuses repr sente le theme principal de cette recherche Dans ce m moire nous nous int ressons donc l volution de la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res entre 1920 et 1960 Comme il sera possible de le constater plus loin celle ci englobe autant leurs mentalit s que leurs rituels leurs pratiques leurs go ts et leurs loisirs De plus dans la mesure o nous croyons que le genre est parmi les facteurs qui influencent le plus la formation de la culture de travail nous nous pencherons galement sur les changements qui surviennent la m me poque au plan de la construction des normes de la f minit dominante Graduellement au XX si cle on remarque effectivement un largissement des normes de la f minit respectable si au d but du XX si cle celle ci tait synonyme de domesticit de mariage de soumission de douceur ou de modestie au fil des ans et plus forte raison partir de la Deuxi me Guerre mondiale dans le cas des employ es de Dupuis elle se red finit l aide de nouveaux param tres tels l mancipation la vivacit la valorisation du corps le sport etc Nous tenterons donc dans ce qui suit de mettre en parall le ces deux ph nom nes c est dire l volution de la culture de travail de ces travailleuses et l apparition de nouvelles normes agissant dans la construction de la f minit Dans le chapitre un nous mettrons en p
15. 143 0 climat se d t riore compter de la fin des ann es 1940 surtout avec l pisode de la gr ve qui exacerbe les divergences de vues entre les employ es une situation qui perdure y Sy Di 144 au d but des ann es 1960 avec l arriv e d une nouvelle administration 1 Voir ce sujet le t moignage de Rollande Monette qui affirme qu elle n a jamais regrett les cinquante ann es pass es chez Dupuis car lJ ambiance y tait tellement sympathique Dossier Correspondance entre les employ s et la direction 1968 1978 Article de La Patrie par Ren Bataille Rollande Monette prend sa retraite de chez DF 5 septembre 1976 Par ailleurs en ce qui a trait Pint gration des nouvelles employ es il est difficile de savoir si DF diff re ou ressemble aux autres grands magasins o les anciennes peuvent faire la vie dure aux nouvelles Plusieurs auteures ont en effet crit sur l importance des rites initiatiques chez les employ es de grands magasins Pour notre part nous n avons trouv nulle part de mentions claires de ce genre de comportement dans LD ou dans le reste des archives Toutefois cela ne signifie pas que les employ es de DF ne se sont pas adonn es de telles pratiques peut tre que le journal officiel a plut t volontairement omis de mentionner l existence de ces rites pour ne pas nuire la bonne r putation des employ es et l image familiale de l
16. 1996 p 251 275 Lambert Maude Emmanuelle Qu b coises et Ontariennes en voiture L exp rience culturelle et spatiale de l automobile au f minin 1910 1945 RHAF vol 63 n 2 3 2009 2010 p 305 330 Lamphere Louise Bringing the Family to Work Women s Culture on the Shop Floor Feminist Studies vol 11 n 3 1985 p 519 540 Leach William R Transformations in a Culture of Consumption Women and Department Stores 1890 1925 Journal of American History vol 71 n 2 1984 p 319 342 Lowe Graham S Women Work and the Office The Feminization of Clerical Occupations in Canada 1901 1931 Cahiers Canadiens de Sociologie vol 5 n 4 1980 p 361 381 113 Morton Suzanne The June Bride as the Working Class Bride Getting Married in a Halifax Working class Neighbourhood in the 1920 s dans Bradbury Bettina sous la dir de Canadian Family History Toronto Copp Clark Pitman 1992 p 360 379 O Donnell Lorraine Le voyage virtuel Les consommatrices le monde de l tranger et Eaton Montr al 1880 1980 RHAF vol 58 n 4 2005 p 535 568 Porter Benson Susan Customers ain t God The Work Culture of Department Store Saleswomen dans Frisch Michael et Daniel J Walkowitz sous la dir de Working class America Essays on Labor Community and American Society Urbana University of Illinois Press 1983 p 185 211 Porter Benson Susan
17. 3 1 3 Soumission aux hommes et respect des hi rarchies de genre Un autre aspect de la f minit traditionnelle perceptible dans la culture de travail des employ es surtout avant le milieu des ann es 1940 est la soumission aux hommes de m me que le respect des hi rarchies de genre Selon Donica Belisle l id e de l inf riorit des femmes est dans la premi re moiti du XX si cle largement admise et les travailleuses doivent faire face cette r alit dans leur emploi Joan Sangster ajoute que celles ci contestent rarement les hi rarchies sexuelles omnipr sentes au travail et int grent de fait 225 l cet aspect de la f minit dominante dans leur culture de travail Chez Dupuis on remarque que les employ es d veloppent une attitude de subordination parfois extr me dans leurs rapports avec les dirigeants du magasin en tr s grande majorit des hommes En effet la lecture d articles du Duprex ou de lettres d employ es adress es la direction surtout avant 1939 on constate que bon nombre d entre elles font montre d un d vouement presque sans bornes lui t moignant de leur ind fectible attachement et la remerciant pour toutes ses bont s Bien que cette d votion soit grandement min e d s la deuxi me moiti des ann es 1940 certaines femmes restent fid les leur employeur et continuent de ai A 22 le couvrir d loges m me dans les ann es 196077 Aussi dans
18. Historical Studies of Social and Legal Regulation in Quebec Montr al 1996 Montr al Montreal History Group 1998 p 160 34 L av nement du pouvoir m diatique d s les ann es 1920 n est probablement pas tranger l accroissement de l importance de la mode pour les femmes selon Suzanne Marchand Cette derni re croit en effet que les nouveaux m dias surtout le cin ma ont de plus en plus l opportunit de rejoindre une majorit de gens au Qu bec comme ailleurs et que le septi me art influence grandement les pratiques esth tiques en donnant envie aux femmes d imiter les vedettes de leurs films favoris Suzanne Marchand Rouge l vres et pantalon Des pratiques esth tiques f minines controvers es au Qu bec 1920 1939 LaSalle Hurtubise 80 quand Am dine Forgues devient r dactrice de mode fid le collaboratrice du Duprex elle proc de par exemple a des interviews notamment avec Rosario Trudel le directeur des achats et de la mode en janvier 19387 Il est int ressant de voir que Forgues dans ses propos prend clairement pour acquis que son lectorat n est compos que de femmes et se donne pour mission de les instruire en leur transmettant l information acquise aupr s de Trudel expert en ce qui a trait aux nouvelles tendances Elle se fait donc l interm diaire entre cet homme qui repr sente l autorit en mati re de mode au magasin et les vendeuses g ae 236 qui visiblement ont b
19. New York Columbia d partment d histoire 1982 p 191 Selon elle c est la meilleure option et ce malgr les conditions de travail d plorables 138 Selon Belisle de 1890 1940 la plupart des employ es de grands magasins ne sont pas mari es Retail Nation p 164 139 Club sp cial que les employ s joignent automatiquement apr s 25 ans de services Il en sera question plus loin 14 Dossier M moires d une poque entrevue de Mlle Eglantine Richer par R Michaud 1982 p 19 141 Ang lique mentionne qu elle en parle beaucoup sa famille dans LD vol 5 n 11 ao t 1931 p 124 46 2 2 2 La vie des vendeuses Il est possible de dresser grace aux informations tir es des archives un portrait approximatif de la vie des vendeuses chez Dupuis Fr res de 1920 a 1960 Le sujet de ambiance de travail d abord est souvent abord par les employ es tout comme par la direction qui en profite du m me souffle pour vanter les bonnes conditions dans lesquelles travaille son personnel Malgr les divisions qui existent entre les rayons l ambiance de travail parmi les vendeuses semble agr able du moins dans les premi res d cennies de la p riode l tude Des articles tir s du Duprex en t moignent notamment les rubriques humoristiques ou les rubriques potins o des auteurs espi gles taquinent leurs coll gues au sujet de leurs manies ou de leurs amours Il semble toutefois que le
20. Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 14 n 2 d cembre 1949 p 65 15 LD vol 6 n 5 f vrier 1932 p 66 Une telle histoire de g n rosit peut sembler tonnante a t elle t cr e de toutes pi ces Nous n avons pas les moyens d en v rifier l authenticit SI L attention accord e l apparence des employ es est galement perceptible dans certains documents produits pour aider le personnel des ressources humaines embaucher les meilleures candidates aux postes combler Ainsi les filles d ascenseur doivent r pondre aux crit res suivants 5 2 5 3 110 Ibs bonne apparence bilingue Dossier Formation initiation d un employ 1965 1966 Analyse d un travail pour l initiation d un employ Embaucher personnel f minin pour ascenseurs passagers 51 On constate par ailleurs que les vendeuses font souvent de longues carri res chez Dupuis Fr res Plusieurs indices en t moignent notamment le nombre croissant d adh sions f minines au Club des 25 Membre de ce groupe Eliane Plaisance est la 153 glantine premi re femme y c l brer en 1955 sa 50 ann e l emploi de Dupuis Richer connait un parcours similaire celui de Mlle Plaisance On m a engag e pour 3 jours on m a demand si j aimais a et si a faisait mon affaire j ai dit oui j aime bien a et j aime
21. avec les outils appropri s car le contenu sous entendu est essentiel la pleine compr hension d un message Ainsi l analyse de contenu s av re dans le cadre d une tude historique essentielle Celle ci poss de toutefois comme toute m thode ses limites La principale est sans doute que le chercheur risque de livrer une interpr tation qui puisse diff rer du sens du message de l intention de son auteur Dans le cas de la pr sente recherche une des principales difficult s rencontr es a t la raret des sources En effet cette r alit a compliqu voire rendu impossible la compr hension de certains aspects de la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res Pour pallier ce probl me particulier et les limites de l analyse de contenu en g n ral il est de mise de consulter des sources compl mentaires ou similaires d utiliser d autres tudes historiques pertinentes etc C est ce que nous avons fait dans le cadre de notre recherche o l analyse du Duprex a constamment t mise en parall le avec l historiographie Il convient aussi de mentionner qu afin de faire la lumi re sur certains aspects de la culture de travail des femmes employ es par Dupuis Fr res certaines donn es chiffr es ont t compil es dans un tableau statistique Ainsi nous avons recens pour chaque dition du Duprex le nombre de mentions de mariages de mariages entre employ s du magasin de fian ailles de f
22. de progr s 70e anniversaire Banquet 1938 M Le pr sident Albert Dupuis remercie le personnel au nom de la maison et au sien et accorde une semaine de cong additionnel 147 Sharon Strom Beyond the Typewriter Gender Class and the Origins of Modern American Office Work 1900 1930 Urbana University of Illinois Press 1992 p 375 148 LD vol 7 n 6 d cembre 1933 p 87 49 mariage car on y constate que les coll gues de travail servent de t moins ou comptent parmi les invit s alors que ces c l brations ont un caract re plut t familial l poque Des travailleuses continuent entretenir leurs amiti s m me apr s avoir quitt leur emploi que ce soit pour se marier ou prendre leur retraite Par exemple la nouvelle mari e retourne l occasion voir ses anciennes coll gues de travail pour leur montrer ses photos de voyage de noces ou bien elle les invite dans sa nouvelle demeure pour un brin de jasette La solidarit entre les vendeuses semble galement tre pr sente au cours de la p riode du moins si on se fie un article d Ang lique qui rappelons le semble non seulement peu critique l gard du magasin mais galement prompte le vanter et le d fendre Celle ci fid le collaboratrice du Duprex durant les ann es 1930 relate dans l dition de f vrier 1932 un bel exemple de solidarit dont elle a t t moin chez deux de ses coll gues de travail La premi re
23. du Qu bec 1977 80 pages Belisle Donica Retail Nation Department Stores and the Making of Modern Canada Vancouver UBC Press 2010 308 pages Bradbury Bettina Familles ouvri res Montr al Age genre et survie quotidienne pendant la phase d industrialisation Montr al Bor al 1995 368 pages Coates Colin M et Cecilia Morgan Heroines and History Representations of Madeleine de Verch res and Laura Secord Toronto UTP 2002 368 pages Cooper Patricia Once a Cigarmaker Men Women and Work Culture in American Cigar Factories 1900 1919 Urbana University of Illinois Press 1987 350 pages Crossick Geoffrey et Serge Jaumain sous la dir de Cathedrals of Consumption The European Department Store 1850 1939 Aldershot Ashgate 1999 175 pages Dupuis Leman Josette Dupuis fr res le magasin du peuple Plus d un si cle de fiert qu b coise Montr al Stank 2004 290 pages Du Berger Jean et Jacques Mathieu sous la dir de Les ouvri res de Dominion Corset Qu bec 1886 1988 Ste Foy PUL 1993 148 pages Girard Denise Mariage et classes sociales Les Montr alais francophones entre les deux guerres Sainte Foy IQRC 2000 203 pages Gosselin Line Les journalistes qu b coises 1880 1930 tudes et documents n 7 Montr al Collection RCHTQ 1995 160 pages 109 Ingraham Chrys White Weddings Romancing Heterosexuality in Popular Culture New York Routledge 1999 2
24. jeune veuve m re de deux enfants est convoqu e au bureau du directeur du personnel qui veut la cong dier Elle clate en sanglots et attire par le fait m me l attention d une coll gue elle aussi convoqu e par le directeur pour recevoir son titre de vendeuse r guli re La seconde consciente du fait qu elle habite encore chez ses parents et qu elle n est pas dans le besoin d cide de c der sa place la premi re qui la remercie de lui faire une telle faveur Un autre aspect central de la vie des vendeuses qui a galement t maintes fois trait ailleurs est celui de l importance de leur apparence Outre le code vestimentaire auquel elles doivent ob ir Le Duprex publie souvent des articles qui leur livrent des conseils pour devenir de meilleures vendeuses conseils qui soulignent toujours l importance des soins accorder son apparence autant sur le plan du langage que de la propret des mains ou du Par exemple dans LD de septembre 1932 une employ e mentionne avoir t invit e chez une ancienne coll gue ayant d m nag Blainville apr s son mariage LD vol 6 n 10 septembre 1932 p 147 50 sourire Chez Dupuis Fr res comme dans d autres magasins l apparence des femmes doit toujours tre soign e et comme ailleurs on choisit les plus jeunes et les plus jolies pour les positions les plus strat giques ILLUSTRATION 2 3 Les employ es du petit train de No l
25. l ments principaux qui d finissent ce type de f minit sont visiblement encore au c ur de la vie de ces femmes jusqu en 1960 notamment le travail domestique le mariage la maternit et le respect des hi rarchies li es au genre Par contre nous avons galement tent de prouver qu au cours de cette p riode de nouvelles dimensions de la f minit ont t int gr es progressivement cette culture surtout apr s la Deuxi me Guerre mondiale ce qui s est manifest par l apparition graduelle chez les travailleuses de nouveaux comportements et mentalit s en lien avec la mode la beaut le corps et le sport De plus il a t possible de voir comment bon nombre d entre elles ont de plus en plus ext rioris leurs opinions et leurs tats d me en composant chroniques po mes chansons et autres crits litt raires Par ailleurs la p riode 1920 1960 a galement t t moin d une importante prise de conscience de la part de ces femmes et cela s est traduit par une certaine forme d mancipation ainsi qu un militantisme accru surtout dans le contexte de la gr ve de 1952 Cela dit m me si de nouvelles normes de f minit apparaissent au fil des ans celles ci ne remplacent pas le poss dent pas suffisamment de connaissances ce sujet et ne comprennent pas le syndicalisme ou la signification de leur geste Dans Retail Nation p 213 312 ACSN FCSN Le Travail op cit 102 mod le dominant
26. offertes quilles tennis tennis sur table natation patinage golf sacs de sable mississippi etc Dossier Spicil ge 1904 1978 Article de La Presse Miss Canada Mlle Doroth e Moreau chez Dupuis Fr res 2 octobre 1956 Il n est pas pr cis si l activit s adresse davantage aux clientes ou aux employ es c est sans doute plus pour les premi res mais il n est pas exclu que les secondes aient aussi particip 6 Selon Soland d s les ann es 1920 la jeunesse devient un autre id al en lien avec la f minit Dans Becoming Modern p 21 267 Thid 268 Le but de PAAAD dont le slogan est S amuse bien qui s amuse chez Dupuis est de donnefr l occasion de s amuser gaiement et sainement Dossier Spicil ge 1946 1955 Soir e r cr ative annuelle de P AAAD au chalet de la montagne 24 mai 1947 2 S land p 46 et 48 89 ILLUSTRATION 3 4 Marthe Fleury reine des sports 1954 Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 15 n 2 mars 1954 p 21 Le ski est galement un sport pris comme en t moigne la popularit des exp ditions en montagne mais l activit la plus populaire parmi les employ s de Dupuis hommes comme femmes semble r ellement tre les quilles Des tournois sont organis s chaque ann e et quelques reprises l AAAD planifie m me des rencontres entre les employ s et 2 Fe 7 Dans les d
27. pour les jeunes filles une sorte de rite de passage vers la vie adulte Chez Dupuis le mariage est effectivement vu par beaucoup de femmes comme un l ment capital dans une vie D ailleurs selon Leslie Tentler la culture de travail f minine promeut la plupart du temps le mariage avant la poursuite d une carri re Ainsi a la lecture du Duprex on constate que celui ci est tr s valoris et que par cons quent beaucoup de place lui est accord e On compte d s 1926 plusieurs articles abordant ce th me de pr s ou de loin Par exemple en ao t 1929 un article promeut le mariage en argumentant que les gens mari s ont une meilleure digestion que les c libataires Plus tard en avril 1940 Pauline Hudon compose une rubrique intitul e Anniversaires de mariage et les cadeaux appropri s pour chacun dans laquelle elle dresse une liste de 210 L ann e suggestions de cadeaux pour des couples mari s depuis dix vingt ou trente ans suivante un article crit par un auteur anonyme d taille les comportements adopter pour devenir un e conjoint e exemplaire Ces suggestions sont vari es allant des compliments que le mari doit faire sa femme pour sa cuisine la discr tion dont cette derni re doit faire preuve quant leur vie intime aupr s de ses amies Tout comme pour le travail domestique on peut supposer que l insistance du Duprex par rapport au mariage vise encourager les femmes
28. 5 Les dames aussi savent p cher et chasser LES DAMES AUSSI SAVENT PECHER ET CHASSER La photo ci dessus nous montre Mme J Labelle Mlle Rose Comtois de la confection pour dames et Mme C Milot du bureau g n ral au re tour de la chasse Dans le m daillon Mme C Milot exhibant le beau maskinong qu elle a pris en septembre dernier 60 Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 10 n 11 octobre 1940 p 253 2 4 Conclusion Dans ce chapitre nous avons tent de dresser un portrait le plus complet possible des employ es de Dupuis Fr res et de leurs activit s tout en d crivant le contexte dans lequel elles s inscrivent Comme il a t possible de le constater leur vie est bien remplie elles prennent part aux activit s organis es par leur employeur suivent des cours voyagent participent leur journal d entreprise etc Certes en surface si on se fie au contenu v hicul par Le Duprex la direction du magasin semble bienveillante et bien intentionn e face son personnel Toutefois en r alit les patrons encadrent de pr s leur employ es pour assurer le bon fonctionnement de leur gestion paternaliste pour bien para tre aupr s du public et pour s assurer de cr er des liens solides entre tous les membres de la grande 61 famille Dupuis ceux ci exploitent les loisirs et de mani re plus large la culture de trav
29. Duprex de voir que m me apr s la guerre le travail domestique est encore mis de l avant dans le journal on peut supposer que dans un contexte o les femmes sont de plus en plus nombreuses sur le march de l emploi il devient encore plus important pour les entreprises qui en embauchent de rappeler leur f minit Lors de son allocution visant f liciter les participantes ce concours pour leurs chef d ceuvres culinaires Henriette Dupuis formule des propos qui font en m me temps r f rence au mariage un autre aspect de la f minit dominante de l poque elle souhaite toutes les jeunes filles cuisini res de se 202 trouver de bons maris Des divisions existeraient donc entre ces deux groupes comme dans le cas des employ es de bureau d crites par Sharon Strom dans Beyond the Typewriter Gender Class and the Origins of Modern American Office Work 1900 1930 Urbana University of Illinois Press 1992 p 387 20 LD vol 13 n 9 novembre 1948 p 331 701 Sangster affirme la m me chose au sujet des concours de beaut tenus par plusieurs entreprises dans l apr s guerre Dans Queen of the Picket Line Beauty Contests in the Post World War II Canadian Labor Movement 1945 1970 Labor Studies in Working Class History of the Americas vol 5 n 4 2008 p 83 106 Thid 69 3 1 2 Le mariage Plusieurs auteures notamment Jill Matthews avancent qu au XX si c
30. Fond par Albert Dupuis en 1933 l ODOD acquiert ses membres en fonction de leurs aptitudes la vente LD vol 7 n 7 mars 1934 p 106 108 M me si selon une photo parue dans LD de juin 1938 vol 9 n 11 p 243 plusieurs femmes sont membres de ce club selon la liste des promotions de l ODOD parue dans le journal de septembre 1937 vol 9 n 5 p 79 peu d entre elles y obtiennent des postes honorifiques Sur 57 tous les employ s est sans aucun doute le Club des 25 avec sa filiale le Club des 50 r serv aux employ s qui acqui rent respectivement 25 et 50 ann es d exp rience a l emploi de Dupuis Fr res Fond en juin 1944 par Albert Dupuis le club a pour but de remercier les employ s de longue date de leurs loyaux services Sous la pr sidence d Albert et de Raymond Dupuis Fr res tient un banquet biannuel lors duquel des parrains et des marraines pr alablement d sign s pr sentent les nouveaux candidats Les membres du Club des 25 ont galement droit certains privil ges notamment celui de voir leur biographie publi e dans Le Duprex Le nombre de membres du club ne cesse de cro tre au fil des ann es au d but en 1944 on en compte une quarantaine dont environ la moiti sont des femmes en 1950 il y en a 70 dont 30 femmes en 1953 le nombre s l ve 181 membres et plus tard en 1965 221 IE 2 3 5 Les associations d employ es Plusieurs employ es de Dupuis
31. Heather Gender Work and Working class Women s Culture in the Veracruz Coffee Export Industry 1920 1945 International Labor and Working class History vol 63 2003 p 102 121 112 Frager Ruth Class Ethnicity and Gender in the Eaton Strikes of 1912 and 1934 dans Iacovetta Franca et Mariana Valverde sous la dir de Gender Conflicts New Essays in Women History Toronto UTP 1992 p 189 228 Guerm s Sophie Pr face Le po me de l activit moderne dans Zola Emile Au Bonheur des Dames Paris Fasquelle 1998 1883 p 5 42 Howard Vicki At the Curve Exchange Postwar Beauty Culture and Working Women at Maidenform Entreprise and Society vol 1 n 3 2000 p 591 618 Jeacle Ingrid Emporium of Glamour and Sanctum of Scientific Management The Early Twentieth Century Department Store Management Decision vol 42 n 9 2004 p 1162 1177 Johansen Peter Where s the Meaning and the Hope Trends in Employee Publications Journal of Popular Culture vol 29 n 3 1995 p 129 138 Johnson Val Marie The Rest Can Go to the Devil Macy s Workers Negotiate Gender Sex and Class in the Progressive Era Journal of Women s History vol 19 n 1 2007 p 32 57 Korinek Val rie J Mrs Chatelaine vs Mrs Slob Contestants Correspondents and the Chatelaine Community in Action 1961 1969 Journal of the Canadian Historical Association vol 7 n 1
32. Kate Neither Forget nor Remember Your Sex Sexual Politics in the Early Twentieth century Canadian Office Journal of Historical Geography vol 29 n 2 2003 p 212 229 Boyer Kate et Kim England Women s Work The Feminization and Shifting Meanings of Clerical Work Journal of Social History vol 43 n 2 2009 p 307 340 Comeau Michelle talages vitrines services et nouveaux espaces Trois grands magasins de Montr al durant les ann es 1920 dans Jaumain Serge et Paul Andr Linteau sous la dir de Vivre en ville Bruxelles et Montr al XIX et XX si cle Bruxelles Peter Lang diteur 2006 p 259 285 Cullum Linda It Was a Woman s Job I spose Pickin Dirt outa Berries Negotiating Gender Work and Wages at Job Brothers 1940 1950 Newfoundland amp Labrador Studies vol 23 n 2 2008 p 185 213 Dagenais Mich le Itin raires professionnels masculins et f minins en milieu bancaire Le cas de la Banque d Hochelaga 1900 1929 Labour Le Travail vol 24 1989 p 45 68 Detellier Elise Bonifier le capital humain Le genre dans le discours m dical et religieux sur les sports au Qu bec 1920 1950 RHAF vol 62 n 3 4 2009 p 473 499 Dubuc Elise La rectitude corporelle ou l int gration des contraintes L exemple du corset le v tement qui fait corps Bulletin d histoire politique vol 10 n 2 2002 p 72 83 Fowler Salamini
33. Limit e P049 Le Duprex vol 16 n 3 f vrier 1957 p 39 employ es de bureau Il y a donc une nette distinction sociale entre les employ es et les dirigeants issus pour leur part de la petite bourgeoisie Tout comme la direction essentiel des vendeuses est d origine canadienne frangaise En effet aucune mention de travailleuses d une autre origine ethnique n apparait dans Le Duprex De plus les patronymes des employ s mentionn s dans le journal d entreprise sont typiquement canadiens fran ais Gingras Boucher Charbonneau Poitras etc Par ailleurs nous n avons pu trouver dans les archives de donn es pr cises concernant la proportion de vendeurs et de vendeuses et ce pour aucune des ann es comprises dans la p riode l tude Certaines d ductions peuvent n anmoins tre mises de l avant Ainsi dans la mesure o de nombreuses tudes sur l histoire des grands magasins font tat de la forte pr sence de femmes au sein du 45 personnel vendeur il est tout a fait plausible de penser que la grande majorit des vendeurs chez Dupuis Fr res taient en fait des vendeuses Selon certaines auteures ce type d emploi tait l une des meilleures options qui s offrait une jeune fille issue des ads Pe classes populaires poss dant une ducation limit e D autres allusions laissent croire qu un nombre consid rable de vendeuses sont c libataires et habitent soit seule
34. Montr al se donne galement pour mission d am liorer leurs conditions de travail de les orienter 58 physique par exemple r unions mensuelles conf rences go ters causeries sorties culturelles soir es de cartes r ceptions etc Comme le note Yolande Pinard APEM galement prise en charge par Henriette Dupuis la femme d Albert n a toutefois jamais vraiment cherch am liorer les conditions de travail des vendeuses elle aspire plut t agir comme interm diaire entre le patron et les employ es de mani re viter les conflits de travail Les cours offerts aux membres de l association visent d ailleurs tout autant sinon plus d fendre les int r ts des patrons que ceux des travailleuses puisqu ils cherchent les r duquer pour les rendre plus performantes et cr er l avantage des premiers une lite de travailleuses Toutefois cela ne signifie pas que les femmes ne puissent en tirer profit elles peuvent s y divertir et y acqu rir des connaissances professionnelles utiles Sans pouvoir savoir si elle est vraiment importante aupr s d une majorit de vendeuses APEM est tout de m me active chez Dupuis si on se fie au Duprex au moins jusqu en 19431 2 3 6 Participation au Duprex par le biais de l envoi de photos Par ailleurs comme cela a d j t mentionn les travailleuses prennent aussi norm ment part la production du journal d entreprise en y en
35. Santink qui avec un ouvrage sur Eaton s paru en 1990 s attarde a d crire l ascension de ce grand magasin et expliquer son succ s en grande partie tributaire du contexte social et conomique de l poque Une tr s vaste partie de l historiographie canadienne sur les grands magasins a en fait privil gi l tude de la famille Eaton C est le cas de Ruth Frager qui a abord en 1992 le theme des conflits de travail de Lorraine O Donnell qui a men en 2005 une tude portant sur les femmes dans lunivers de consommation cr par Eaton s et de Donica Belisle qui a publi trois articles au sujet du syndicalisme de la commodification des employ s du paternalisme de la culture de consommation et de l ali nation qu elle peut causer et ce toujours dans le cadre eatonien Celle ci a galement fait para tre en 2010 un ouvrage fort complet sur Vhistoire de la soci t de consommation ainsi que des grands magasins canadiens entre 1890 et 1940 En plus de reprendre certaines th ses d j nonc es dans ses articles elle y montre comment ceux ci ont cr le Canada moderne tout en contribuant au maintien de diff rents types de hi rarchies d j fortement ancr es dans la soci t En somme l historiographie canadienne consacr e aux grands magasins est d j vaste mais certains 5 Santink Timothy Eaton and the Rise 319 pages Ruth Frager Class Ethnicity and Gender in
36. accapar e par Eaton s malgr la pr pond rance de ce magasin dans l historiographie 1 2 2 Sources La tr s grande majorit des sources qui ont t utilis es pour notre tude proviennent du Fonds P049 Dupuis Fr res Limit e 1868 1968 conserv HEC Montr al En effet son service des archives poss de quelque 23 m tres lin aires de documents textuels li s cette entreprise canadienne frangaise Bien qu il traite de diff rents aspects tr s int ressants de l histoire de Dupuis certaines s ries du fonds nous ont int ress es plus particuli rement Ainsi la s rie P049 D qui contient des documents concernant la gestion des ressources humaines de 1886 1978 a t tr s pertinente Nous avons d abord utilis la sous s rie D10 portant sur le syndicat chez Dupuis entre 1919 et 1978 et sur ses relations avec la direction du magasin Cette sous s rie est compos e entre autres de correspondance conventions collectives factures et proc s verbaux C est toutefois la sous s rie D11 qui 72 Voir p 9 Site de l Exposition virtuelle du fonds DFL Guide de fonds Dupuis Fr res Limit e en ligne http experience hec ca dupuis_et_freres guide de fonds dupuis freres limitee page consult e le 24 mars 2011 22 dans cette s rie s av re la plus int ressante puisqu elle est d di e enti rement aux activit s sociales des employ s de chez Dupuis entre 1886 et 1977 Cel
37. autres D exprimer au h ros de la maison Dupuis Nos sinc res sentiments chansons sont particuli rement vocatrices des normes de f minit que les employ es tentent de mettre de l avant A titre d exemple en 1942 une paroli re anonyme promeut dans Amusons nous jeunesse la vivacit et la jeunesse certes mais aussi le plaisir l ments qui investissent de plus en plus l poque la d finition de la f minit Je suis jeune et gentille Et j aime le plaisir Car il est difficile de trop se divertir Toujours a mon gard Toujours ma pens e Je crois qu il n y a pas de mal danser valser Toutefois l uvre litt raire la plus frappante publi e dans Le Duprex reste le feuilleton d Ang lique d j mentionn pr c demment Outre le fait qu il c l bre la romance et le mariage celui ci est r v lateur du milieu de travail des vendeuses de leur culture et de leurs relations entre elles On pourrait ais ment le comparer l uvre d Emile Zola Au Bonheur des Dames dans la mesure o tous deux d peignent le quotidien des grands magasins Plusieurs aspects y sont voqu s par Ang lique le climat de travail et la profondeur de l amiti qui unit les vendeuses la dynamique au sein d un d partement les relations amoureuses au travail les soldes qui ponctuent la vie au magasin les relations 7 Extrait de Bonne f te Monsieur Dugal par
38. comme le p re des grands magasins Eaton s initialement ouvert Toronto en 1869 mais galement entre autres Montr al d s 1925 popularise plusieurs principes innovateurs sur le plan du commerce notamment le paiement comptant et la r gle satisfaction garantie ou argent remis Peu peu d autres grands magasins s imposent sur la sc ne canadienne par exemple Simpson s Morgan s Sears Ogilvy Scroogie etc de sorte que dans les ann es 1920 15 on en compte une vingtaine au Canada Il n existe pas de d finition fixe et universelle des grands magasins mais un certain nombre de caract ristiques leur tant propres peuvent tre d gag es une marchandise et Tamilia p 12 et 23 Au Canada apr s la crise conomique des ann es 1930 et de fa on plus prononc e apr s la Deuxi me Guerre mondiale ils commencent faiblir pour graduellement c der le pas d autres types de commerces notamment les grandes surfaces Statistiques Canada Les grands magasins au Canada 1923 1976 Ottawa Statistiques Canada 1979 p 17 10 C est en 1883 que Timothy Eaton d placera son commerce sur la c l bre Yonge Street de Toronto au num ro 178 Par la suite il va demeurer sur cette rue et prendre de l expansion Joy L Santink Timothy Eaton and the Rise of his Department Store Toronto UTP 1990 p 62 ll Paul Andr Linteau La rue Sainte Catherine Au coeur de la vie montr al
39. crit un article dans lequel elle leur sugg re comme s il s agissait d un point de rep re vident de recevoir les clients comme s il agissait d invit s que l on accueille son domicile Lorsque je vois entrer une personne au magasin je me figure que c est un ami qui vient me rendre visite en passant et je le re ois dans mon second chez soi comme doit le faire A 5 p EA x E 187 une ma tresse de maison Je me fais accueillante comme si je le connaissais bien Il est galement int ressant de voir comment tout comme c est le cas pour les enseignantes d crites par Joanne Preston Le Duprex souligne l importance des qualit s domestiques des vendeuses que ce soit le fait d tre accueillante bienveillante attentive ou 188 douce Par ailleurs les employ es et collaboratrices du Duprex prennent pour acquis que leurs coll gues tout comme leurs clientes en tant que femmes sont n cessairement des m nag res C est ce que fait Pauline Hudon employ e au rayon de la vaisselle en avril 1935 ses yeux le rayon dans lequel elle travaille est sp cifiquement con u pour la client le f minine qui cause de ses t ches domestiques porte forc ment un int r t envers les produits de porcelaine et la vaisselle il semble impossible qu une femme entrant bien dans son r le de ma tresse de maison ne s applique conna tre l utilit de chaque 189 service ou bibelot install
40. culture dominante et un gage de respectabilit il n est pas tonnant que les employ s de Dupuis d cident d annoncer le leur un maximum de gens par le biais de leur journal d entreprise Par ailleurs il faut mentionner qu une certaine partie des mariages unissent deux employ s du magasin Selon Denise Girard les couples montr alais francophones de l entre deux guerres se rencontrent en effet tr s souvent sur leurs lieux de travail Avec ses centaines d employ s Dupuis Fr res repr sente un bassin de population consid rable et pour les jeunes employ es c libataires qui y passent une grande partie de leur temps un lieu sans doute propice aux rencontres m me si les femmes sont plus nombreuses que les iba 4 ao hommes au sein du personnel C est ainsi que dans Le Duprex on retrouve au total 104 2 Doug Owram Born at the Right Time A History of the Baby Boom Generation Toronto UTP 1996 p 12 13 25 Girard p 60 214 En ce sens il est possible de faire un rapprochement entre le cas de DF et celui des employ es de bureau d crites par Boyer Selon elle le bureau est un milieu sexually charged le flirt fait partie du travail et les relations qui se d veloppent entre coll gues ne sont pas rares Dans Neither Forget p 220 L amiti entre vendeurs et vendeuses semble aussi exister mais tout porte a croire qu elle d bouche le plus souvent sur des relations amoureuses St
41. dans cette voie en m me temps qu il r pond l int r t qu elles lui portent 207 Pour une description d taill e de la c r monie du mariage durant l entre deux guerres voir Denise Girard Mariage et classes sociales Les Montr alais francophones entre les deux guerres Sainte Foy IQRC 2000 203 pages 208 Tentler p 80 LD vol 3 n 11 ao t 1929 p 11 210 LD vol 10 n 9 avril 1940 p 195 a LD vol 11 n 1 f vrier 1941 p 5 71 Le mariage occupe aussi une place importante dans Le Duprex cause de son omnipr sence dans les rubriques de nouvelles du personnel Rares sont les ditions dans lesquelles on ne retrouve aucune mention de mariage d employ s entre 1926 et 1960 on en compte plus de 527 c est dire en moyenne 2 77 par dition Celles ci sont m me plus nombreuses compter de 1939 en effet 78 de ces mentions sont concentr es de 1939 1960 ce qui montre que malgr le temps qui avance le caract re fondamental du mariage ne se d ment pas aupr s du personnel de Dupuis Ces chiffres r v lent aussi l influence de ce que Doug Owram appelle le culte du mariage selon lui la soci t canadienne d apr s guerre le valorise au point o les personnes qui d vient de cette norme sont marginalis es Ainsi dans la mesure o les hommes et les femmes de cette poque consid rent le mariage comme un accomplissement un moyen de montrer leur appartenance la
42. dans la soci t qu b coise entre 1920 et 1960 Au cours de cette p riode en effet et surtout apr s la Deuxi me Guerre mondiale de nouvelles dimensions de la f minit ont t progressivement int gr es leur culture de travail notamment de nouveaux comportements en lien avec le corps la mode la beaut le sport la volont d expression le militantisme et l mancipation D une f minit jadis essentiellement ax e sur le devoir de m re et d pouse en particulier les travailleuses passent de plus en plus au fil des ans une f minit qui fait galement place aux loisirs ainsi qu au plaisir notamment lorsqu elles participent aux activit s organis es par leur employeur Certaines d entre elles contreviennent galement de par la long vit de leur carri re aux normes de la f minit dominante une poque o le mod le de la femme au foyer est encore largement r pandu dans la soci t Finalement dans une optique plus globale nous esp rons que cette tude a su montrer quel point l arriv e massive des femmes sur le march de l emploi a t pour elles un point tournant en ce sens o elle a grandement contribu la red finition de leur identit au del des r les traditionnels li s la domesticit Plus g n ralement nous souhaitons aussi avoir contribu l accroissement des connaissances en ce qui a trait l histoire des femmes au Qu bec plus pr cis ment
43. de Dupuis depuis un certain nombre d ann es ou tre un employ m ritoire Peu de t moignages concernant ces clubs subsistent mais on peut supposer qu ils comblent certains besoins de reconnaissance ou d attachement un groupe distinct d employ s anciens ou m ritants Parmi les clubs existants chez Dupuis 173 Fr res notons par exemple l Ordre des optimistes Dupuis ODOD Cependant le groupe le plus populaire et dont les membres sont les plus nombreux car il est ouvert une nouvelle conception de la masculinit Dans Qu b coises et Ontariennes en voiture L exp rience culturelle et spatiale de l automobile au f minin 1910 1945 RHAF vol 63 n 2 3 2009 2010 p 322 170 On fait souvent mention tout au long de la p riode l tude des cours de couture mais pour ce qui est des autres cours nous n avons pu trouver de mentions ou de statistiques montrant ou m me estimant le nombre de femmes qui s y inscrivent 17 Voir par exemple LD vol 13 n 5 septembre 1947 p 196 172 Dans un document datant de 1968 on mentionne la tenue de cours de d coration int rieure et d habillement Il serait plausible que de telles activit s aient galement t offertes auparavant c est dire avant 1960 Dans le dossier Club culturel et social Dupuis Sogena Communications 1967 69 Avis tout le personnel de la part de J G Judd repr sentant pour le club octobre 1968 15
44. employeur et vise plut t favoriser la collaboration avec la direction du magasin qui y est d ailleurs tr s impliqu e D s 1935 il devient une entit juridique de plein droit affili e la CTCC mais ne r clame une convention qu la fin des ann es 1940 Dans John Willis Cette manche au syndicat La gr ve chez Dupuis Fr res en 1952 Labour Le Travail vol 57 2006 p 61 30 Selon Belisle peu de femmes participent aux gr ves et aux syndicats avant la Deuxi me Guerre mondiale Elle avance que ce serait d au fait que les travailleuses veulent maintenir leur respectabilit f minine Dans Retail Nation p 191 192 Lucie Bettez abonde dans le m me sens les femmes h sitent participer aux syndicats car le climat qui y r gne est masculin Dans Cent jours dans la vie des Campivallensiennes La gr ve de 1946 Salaberry de Vallefield Labour Le Travail vol 62 2008 p 32 1 Nous n avons pas trouv de statistiques pour toutes les ann es mais en mars 1944 titre d exemple sur 934 syndiqu s il n y a que 394 hommes Dossier Syndicat catholique et national des employ s de magasin fondation chez Dupuis 1919 1951 Lettre du pr sident du syndicat de DF Georges Lalibert au pr sident de la CTCC 23 mars 1944 De plus selon Willis la plupart des employ s qui font la gr ve sont galement des femmes Dans Cette manche au syndicat p 52 302 La chose politique ne
45. entreprise Les initiations ont facilement pu faire partie de la culture des employ es de DF dans la mesure o comme dans les autres grands magasins la formation des nouvelles se fait au contact des plus exp riment es 148 A ce sujet voir Willis p 65 67 Selon lui l arriv e de Raymond Dupuis la pr sidence en 1945 son d sir de moderniser la compagnie et l embauche de Roland Chagnon en tant que g rant ont contribu la d t rioration des relations avec les employ s et le syndicat D s les ann es 1950 l cart entre les employ s et les employeurs s agrandit 144 Selon Lionel Goyer le climat de travail d p rit d s la vente du magasin par Raymond Dupuis car les nouveaux pr sidents ne sont pas aussi bons que la famille Dupuis l tait AHEC Site de l Exposition virtuelle du fonds DFL Famille foi et patrie 47 ILLUSTRATION 2 2 L amiti chez les employ es Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 9 n 4 juillet 1937 p 6l Plusieurs indices montrent n anmoins que les employ es de Dupuis deviennent de v ritables amies notamment les nombreuses photos r parties dans la plupart des ditions du Duprex montrant par exemple des femmes qui se tiennent par la main Le journal nous renseigne galement par ses rubriques de nouvelles sur les f tes qu elles organisent pour leurs amies et qui correspondent aux moments importants de l
46. et des d sirs le go t du partage et des projets 7 Ainsi on pourrait supposer que cette volution des photos symbolise la transition du partenariat conomique vers le mariage de compagnonnage qui se produit autour de cette poque 717 Martine Tremblay La mise en sc ne de l amour La photographie de mariage dans la deuxi me moiti du XX si cle Enfances familles g n rations n 7 2007 p 83 74 ILLUSTRATION 3 2 Mariage d un couple en 1956 Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 16 n 1 septembre 1956 p 15 Il faut galement mentionner a quel point dans la culture de travail des employ es le mariage tout comme la romance sont id alis s Selon Denise Girard dans l entre deux guerres les jeunes femmes entretiennent pour la plupart le fantasme de se marier avec une personne dont elles seraient r ellement amoureuses Elles s imaginent vivre une histoire d amour comme au cin ma qui a d ailleurs une tr s grande incidence sur leur conception de la vie et des relations de couple au terme de laquelle elles se marieraient avec leur me s ur dans un cadre tout fait romantique Les jeunes filles c libataires a l emploi de Dupuis Fr res si on se fie au contenu du Duprex entretiennent effectivement de telles r veries L exemple le plus flagrant de cet aspect de la culture des employ es est sans aucun doute la po
47. exploiter leurs employ s au maximum Donica Belisle analyse ce ph nom ne dans un article de 2006 o elle montre qu Eaton s tente de tirer davantage de ses employ s que ce qui est indiqu dans leur contrat de travail d une part en exer ant des pressions sur eux pour en faire aussi des clients du magasin et les inciter y d penser leur paie et d autre part en se servant de leur apparence et de leur personnalit pour se faire de la publicit Des pratiques similaires sont galement pr sentes chez Dupuis Fr res au cours de la p riode notamment quand il incite les employ s acheter travers Le Duprex En effet on retrouve souvent en quatri me de couverture des publicit s adress es directement aux LD vol 5 n 1 octobre 1930 p 4 Voir aussi l exemple d un article et d une caricature dans LD vol 1 n 2 novembre 1926 p 2 LD vol 15 n 5 d cembre 1954 p 135 32 femmes d ailleurs qui font la promotion de produits disponibles en magasin Dupuis tente aussi d exploiter le corps de ses travailleurs plus pr cis ment de ses travailleuses Certes dans le domaine de la vente en g n ral une attention particuli re est accord e l apparence des employ es au moment de l embauche Devant les clientes une vendeuse doit tre l gante propre de sa personne polie et respectable Mais plus encore Dupuis Fr res apprend utiliser son avantage l image des jeunes
48. ils sont partie int grante de l entreprise en valorisant leur travail elle d montre de l int r t pour leur vie personnelle les fid lise la mentalit de l entreprise utilise un vocabulaire qui fait r f rence au caract re familial de l entreprise etc Bref le journal est l outil par excellence pour encadrer les employ es ce qui ne veut toutefois pas dire que tous les articles sont command s par la direction les travailleuses y participent aussi volontairement et peuvent s y exprimer du moins jusqu un certain point 2 1 2 Une gestion paternaliste Chez Dupuis Fr res comme dans bon nombre d autres grands magasins et entreprises la principale strat gie de gestion mise de l avant par la direction est le paternalisme Selon Joy Santink c tait aussi le cas de Timothy Eaton qui tait tr s pr occup par le sort de ses employ s et par son image aupr s du public Selon cette philosophie le patron la figure paternelle traite litt ralement ses employ s comme des membres de sa famille c est dire qu il adopte une attitude bienveillante envers eux et ce surtout pour les maintenir dans un tat de d pendance hi rarchique et pour que ces derniers prouvent son gard des sentiments de reconnaissance et de respect Le sujet du paternalisme chez Dupuis Fr res a d j t tudi par Mary Catherine Matthews dans son m moire de maitrise parution de LD durant l ann e 1952 sa
49. mettant de l avant diff rents aspects de cette identit nouvelle le langage les pratiques et leur transmission par la tradition orale etc Linda Cullum It Was a Woman s Job I spose Pickin Dirt outa Berries Negotiating Gender Work and Wages at Job Brothers 1940 1950 Newfoundland amp Labrador Studies vol 23 n 2 2008 p 185 213 6l James Spradley et Brenda Mann Les bars les femmes et la culture 255 pages Tentler Wage earning Women 266 pages amp Ibid p 64 et 68 Louise Lamphere Bringing the Family to Work Women s Culture on the Shop Floor Feminist Studies vol 11 n 3 1985 p 519 540 6 Kathy Peiss Cheap Amusements Working Women and Leisure in Turn of the century New York Philadelphie Temple University Press 1986 244 pages 19 Beaucoup d auteurs s entendent n anmoins pour dire que la culture de travail f minine fait la plupart du temps la promotion d une f minit traditionnelle C est l une des conclusions que tire Patricia Cooper de son tude sur les travailleuses des usines de cigares aux tats Unis de 1900 1919 C est galement un sujet qu aborde Suzanne Morton dans son article sur les mariages de la classe ouvri re Halifax dans les ann es 1920 elle y tablit que la culture des travailleuses est centr e sur des sujets de conversation typiquement f minins par exemple la romance la mode ou les comm rages Vicki H
50. on voit appara tre dans LD des listes de prix offerts aux meilleures quilleuses comprenant entre autres des cendriers allumoirs tuis cigarettes ainsi que sets de fumoir LD vol 5 n 6 mars 1931 p 71 et vol 6 n 8 mai 1932 p 118 Dans la mesure o DF est proche des milieux catholiques plus traditionnels cela est la fois surprenant et r v lateur des comportements des employ es qui s loignent parfois de la norme que ces milieux cherchent imposer aux femmes Cette pratique sans doute assez marginale dans les ann es 1930 semble se r pandre avec le temps comme en t moigne une photo de mars 1955 montrant des employ es qui fument LD vol 12 n 9 mars 1955 p 141 ce sujet voir Jarrett Rudy The Freedom to Smoke Tobacco Consumption and Identity Montr al et Kingston McGill Queen s University Press 2005 232 pages Selon lui la consommation de tabac volue au XX si cle et est li e entre autres la construction de l identit Ainsi si avant la Premi re Guerre mondiale les femmes qui fumaient taient consid r es comme barbares graduellement de nouvelles opinions ce sujet vont appara tre et cela sera de plus en plus accept Rudy avance que les femmes vont utiliser cette pratique traditionnellement r serv e aux hommes pour d fier l id ologie des sph res s par es et s affirmer en tant que femmes 85 choisit les plus jolies lorsqu il s agit de faire la pro
51. que chez le personnel Les dirigeants valorisent tout d abord la culture canadienne fran aise en accordant une attention particuli re la langue fran aise En effet d s l poque de la pr sidence de Narcisse 1897 1924 le magasin instaure un Prix de la langue fran aise Dupuis Fr res pour les l ves m ritants Outre la promotion de la culture canadienne fran aise ch re aux yeux des Dupuis ce prix repr sente une autre occasion pour le magasin de faire de la publicit autour des bonnes actions et de l esprit philanthrope et patriotique de ses dirigeants aupr s du public 108 Sangster p 121 ce sujet Belisle montre que Eaton s utilise lui aussi un langage populiste et des slogans tels que A Store for the People afin de se rapprocher des gens Dans Retail Nation p 60 37 Durant toute son histoire Dupuis Fr res promeut l achat local et dans l entre deux guerres soutient lachat chez nous mouvement instaur par des nationalistes voulant encourager le boycott des commer ants non identifi s aux francophones de vieille souche et particuli rement des Juifs Ce th me est pr sent dans Le Duprex par exemple en mars 1927 et en d cembre 1940 dans une rubrique portant sur la SSJB organisation caract re nationaliste dans laquelle de nombreux employ s sont particuli rement actifs En outre le patriotisme de Dupuis Fr res se manifeste aussi de fa on vidente d une part
52. respectables de la classe moyenne et ont adopt modifi ou rejet a leur guise les notions de respectabilit de ces derni res Ainsi tout comme Porter Benson Jonhson montre que les vendeuses poss dent leur propre agentivit 1 1 4 La f minit L historiographie portant sur la construction de la f minit est tr s pertinente pour notre recherche Nancy Theriot 1988 d finit la f minit comme tant the ideology surrounding womanhood the set of ideas about appropriate womanly behaviour aspirations and feelings that rest on assumptions about female nature D autres notamment James Spradley et Brenda Mann 1979 ajoutent que celle ci se d finit en 44 Susan L Forbes The Influence of the Social Reform Movement and T Eaton Company s Business Practices on the Leisure of Eaton s Female Employees during the Early Twentieth Century th se de doctorat London University of Western Ontario d partement de kin siologie 1998 237 pages 4 Val Marie Johnson The Rest Can Go to the Devil Macy s Workers Negotiate Gender Sex and Class in the Progressive Era Journal of Women s History vol 19 n 1 2007 p 32 57 4 Nancy Theriot The Biosocial Construction of Femininity Mothers and Daughters in Nineteenth century America New York Greenwood Press 1988 p 9 15 opposition la masculinit et vice versa De plus selon Beth Bailey leur d finition s est longtemps limit e aux r l
53. t God The Work Culture of Department Store Saleswomen dans Michael Frisch et Daniel J Walkowitz sous la dir de Working class America Essays on Labor Community and American Society Urbana University of Illinois Press 1983 p 185 211 Counter Culture 322 pages 4l Sarah S Malino Faces Across the Counter A Social History of Female Department Store Employees 1870 1920 these de doctorat New York Columbia d partement d histoire 1982 359 pages Porter Benson Counter Culture 8 Belisle A Labour force for the 14 doctorat portant sur l influence du mouvement de r forme sociale sur les pratiques de gestion d Eaton s au d but du XX si cle montre comment ce g ant commercial encadrait de fa on troite ses employ es entre autres avec des cours de f minit de domesticit ou par le truchement du Eaton s girls club qui se chargeait de l organisation de leurs loisirs Mais ce qui marque vraiment l historiographie de m me que toute l uvre de Porter Benson ce sont les tensions sociales caus es par les notions de classe et de genre inh rentes l univers f minin des grands magasins En ce sens d ailleurs l tude de Val Marie Johnson concernant les employ es de Macy s r alis e en 2007 est pertinente Cette auteure r ussit 4 montrer entre autres comment ces travailleuses issues des classes ouvri res ont fait fi des carts de classe les s parant des clientes
54. tails voir Willis p 43 91 30 Willis mentionne que les femmes qui apparaissent sur les photos de la gr ve sont toujours v tues l gamment ce qui montre que m me en piquetant elles d sirent conserver leur dignit bid p 82 310 Archives de la CSN Fonds CSN Le Travail vol 28 n 19 9 mai 1952 p 6 311 Ibid Les employ es ne participent pas toutes certaines sont des scabs Le t moignage d Eglantine Richer nous laisse croire qu elle en tait probablement une Voir Dossier M moires p 24 Selon Belisle beaucoup de femmes sont des scabs soit parce qu elles craignent de perdre leur travail soit parce qu elles ne 101 Y a m me mon fianc qui fait la gr ve lui aussi On est pr ts toffer sic jusqu au coton En bref les employ es de Dupuis prennent r ellement part la gr ve de 1952 et commencent l poque faire entendre leur voix et militer ce qui pourrait montrer que dans l apr s guerre les anciennes normes de f minit telles que la soumission l acceptation ou la douceur c dent graduellement leur place des valeurs d mancipation de d termination et de combativit 3 3 Conclusion Dans ce chapitre nous avons montr comment la domesticit et l id ologie des sph res s par es au c ur de la f minit dominante entre 1920 et 1960 ont influenc la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res En effet plusieurs des
55. vol 1 n 4 janvier 1927 p 7 95 Par ailleurs d autres choisissent des moyens plus subtils de se faire entendre ou d sirent ext rioriser autre chose go ts r ves sentiments etc Pour ce faire certaines femmes optent par exemple pour la po sie Celle ci est surtout dans les ann es 1920 et 1930 tr s abondante dans Le Duprex et certains th mes y sont r currents le printemps le mois de mai le bonheur et le sourire par exemple Beaucoup de celles qui composent des po mes choisissent effectivement d aborder des sujets gais peut tre parce que cela correspond la douceur et l amabilit caract ristiques qui d finissent encore l poque la f minit dominante D autres crivent n anmoins des po mes diff rents notamment Soupir printanier qui en d cembre 1926 compose quelques vers dans lesquels elle laisse percer la difficult du m tier de vendeuse en exprimant les contradictions qui lui sont inh rentes Pleurer le soir rire le jour C est le seul espoir du succ s toujours Telle est la devise du commis de magasin Qui toujours le grise le long du chemin Sa journ e termin e il pourra dire Je suis fatigu mais je peux encore rire Toutefois la po sie romantique est la plus fr quente prouvant que la romance fait partie int grante de la culture de travail des femmes chez Dupuis Plusieurs parmi elles en composent et exposent ainsi publiquement les sentiments qu ell
56. volution de 1940 1970 Montr al PUQ 1977 p 18 Chez DF on constate toutefois que m me au del de cette date certaines nouvelles mari es n attendent pas leur premier n pour partir comme en t moigne un po me intitul Adieu une jeune mari e publi dans LD vol 11 n 10 septembre 1942 p 294 1 LD vol 4 n 6 mars 1930 p 76 67 abordent la difficult d avoir endurer cette double journ e de travail qui peut avoir des cons quences sur le moral Les vendeuses qui doivent aussi tenir maison ont besoin de beaucoup de pers v rance pour ne pas flancher et devraient selon Ang lique pouvoir compter sur la solidarit et l appui de leurs consceurs Car combien pr s de nous sont veuves m res et souvent pouses sur qui retombe la t che de gagner le pain quotidien Ah Que celles l ont besoin de notre soutien et comme leurs compagnes doivent les aider dans leur charges sic respectives du magasin vos s urs feront la cuisine du lendemain n auront peut tre pas le temps de se reposer et vous reviendront bravement le sourire aux l vres sans fl chir sous leur fardeau Ces propos laissent entendre que les m res qui travaillent chez Dupuis le font davantage par obligation pour soutenir leur famille que par choix Dans cette optique ces derni res se consid rent peut tre plus comme des m nag res qui veillent au bien tre de leur famille que comme de v ritables tr
57. 08 pages Lamonde Yvan et Raymond Montpetit Le parc Sohmer de Montr al 1889 1919 Qu bec IQRC 1986 231 pages Linteau Paul Andr La rue Sainte Catherine Au c ur de la vie montr alaise Montr al Editions de L Homme 2010 237 pages Marchand Suzanne Rouge l vres et pantalon Des pratiques esth tiques f minines controvers es au Qu bec 1920 1939 LaSalle Qu bec Hurtubise HMH 1997 162 pages Matthews Jill Julius Good and Mad Women The Historical Construction of Feminity in Twentieth century Australia Sydney G Allen amp Unwin 1984 223 pages Miller Michael B The Bon March Bourgeois Culture and the Department Store 1869 1920 Princeton Princeton University Press 1994 304 pages Owram Doug Born at the Right Time A History of the Baby Boom Generation Toronto UTP 1996 392 pages Peiss Kathy Cheap Amusements Working Women and Leisure in Turn of the century New York Philadelphie Temple University Press 1986 244 pages Pierson Ruth Roach They re Still Women After All The Second World War and Canadian Womanhood Toronto McClelland and Stewart 1986 301 pages Porter Benson Susan Counter Culture Saleswomen Managers and Customers in American Department Stores 1890 1940 Urbana University of Illinois Press 1986 322 pages Rudy Jarrett The Freedom to Smoke Tobacco Consumption and Identity Montr al et Kingston McGill Queen s University Press 2005 232 pa
58. 116 43 constatons que beaucoup de place est accord e a la famille des employ s sp cialement a leurs enfants Plusieurs articles leur sont d di s par exemple pour instruire les jeunes parents sur les jouets appropri s leur acheter disponibles bien s r au rayon des jouets Plusieurs employ s envoient aussi au Duprex des photos de leur nouveau n ou de leur enfant lors de sa premi re communion De plus dans la rubrique des nouvelles des employ s on d nombre 290 mentions de naissances c est dire 1 53 par dition En dehors du Duprex la direction organise l occasion des activit s sp ciales d di es exclusivement aux enfants des employ s ou l ensemble des familles des clients comme le carnaval de la rentr e des classes ou encore le d fil du P re No l deux activit s organis es compter des ann es 1950 Le mod le familial est en bref quelque chose d norm ment valoris et on en parle comme tant la norme laquelle se conformer 2 2 Les employ es 2 2 1 Portrait des vendeuses classe ethnie et genre Comme cela a t mentionn pr c demment le personnel de Dupuis Fr res semble essentiellement compos de gens issus des classes populaires et de confession catholique Les vendeuses ne font pas exception Toutefois il n est pas exclu que certaines personnes provenant des strates inf rieures de la classe moyenne aient pu y travailler notamment les 132 C est a
59. 1876 ainsi que Narcisse en 1897 C est sous l impulsion de ce dernier que Dupuis connait une importante expansion et devient un v ritable grand magasin un des seuls faire affaire en fran ais en Am rique En 1924 le neveu de Narcisse Albert le remplace comme pr sident il demeurera la t te de l entreprise jusqu sa mort en 1945 alors que son fils Raymond lui succ de Apr s la disparition d Albert et plus forte raison apr s une gr ve des employ s en 1952 Dupuis Fr res amorce son d clin L ambiance de travail autrefois qualifi e de familiale est d s lors grandement affect e prouvant des difficult s financi res de plus en plus importantes Raymond met le magasin en vente et c est l homme d affaires Jean Louis L vesque Corporation de valeurs Trans Canada qui l acquiert en 1961 et en transforme radicalement la gestion Par la suite en 1966 l entreprise Sogena rach te la compagnie Plusieurs dirigeants dont Marc Carri re qui a tent d ouvrir des succursales Trois Rivi res en 1966 aux Galeries d Anjou et la Plaza St Hubert en 1968 au Carrefour Laval en 1974 se succ dent jusqu en janvier 1978 au 3 Josette Dupuis Leman Dupuis fr res le magasin du peuple Plus d un si cle de fiert qu b coise Montr al Stank 2004 p 43 44 31 Jbid p 46 48 57 64 72 106 3 Val rie D Amour Site de l Exposition virtuelle du fonds Dupuis Fr res Limit e
60. 1933 p 87 Dans le m me esprit Petite princesse demande galement la courri riste dans le m me article si elle peut rafra chir une de robe dont elle s est lass e en y ajoutant du cr pe vert chartreuse 8 LD vol 13 n 2 octobre 1946 p 51 Paul Dupont parle de ses coll gues f minines en ces termes en 1929 Nos contemporaines enfarin es peintes et repeintes court es disloqu es et d gingand es Dans LD vol 3 n 7 avril 1929 p 9 D autres voix s l vent dans LD pour d noncer l emprise de la mode sur les femmes la m me poque Des 81 Ruth Pierson montre que d s la Deuxi me Guerre mondiale surtout pour les femmes qui se joignent l arm e le maquillage est vu comme un signe de f minit Par ailleurs il arrive aussi que les rubriques mode de Forgues prennent une dimension internationale notamment quand elle r dige des comptes rendus par exemple celui d une conf rence d une repr sentante du magazine Vogue de Londres organis e par Doreen Day chez Eaton s en 194877 Ainsi la r dactrice fait en sorte que les employ es soient au courant des grandes tendances import es d ailleurs ce qui leur donne probablement l impression d int grer le monde glamour de la mode D autres femmes abordent dans Le Duprex le theme de la mode Ainsi certaines d entre elles soulignent l importance de la coiffure et des v tements dans l expression de la pers
61. 1944 Lettre de J Albert Lemieux a Albert Dupuis 0 Les d faillances dans le comportement des employ s ainsi que leur d sob issance envers les r glements sont aussi observables a la lecture des plaintes adress es par les clients Deux dossiers du fonds DFL y sont consacr s soit les dossiers P049 G2C0008 et P049 G2C0018 toutefois seulement pour les ann es comprises entre 1969 et 1977 30 d sob issance aux r glements peut bel et bien faire partie de la culture de travail puisqu elle repr sente une forme d expression des employ s que ce soit une contestation de la gestion des dirigeants ou encore un moyen d affirmer leur individualit leur personnalit lorsqu il s agit par exemple de transgressions par rapport au code vestimentaire La plupart des consignes sont mises pour r gler la vie de tous les jours l int rieur du magasin Par exemple chaque matin sous la pr sidence de Raymond Dupuis 1945 1960 gr ce au syst me de haut parleurs la direction rappelle au personnel de garder le plus possible le silence quand ils travaillent et de ne pas perdre de temps bavarder avec leurs coll gues ce qui parait plut t mal aux yeux des clients Plusieurs fois galement des manuels d instructions leur sont distribu s pour leur signifier ce qu un bon employ doit et ne doit pas faire Une consigne tir e d un manuel de conduite datant de 1954 destin aux employ s du comptoir postal s
62. 1989 292 pages Tamilia The Wonderful World of the Department Store in Historical Perspective A Comprehensive International Bibliography Partially Annotated Cahier de recherche N 02 02 Montr al HEC 2002 p 3 4 Beaucoup d historiens se sont pench s sur la question des grands magasins La principale pionni re fut sans contredit l historienne am ricaine Susan Porter Benson Dans son ouvrage paru en 1986 elle a explor les relations entre les directeurs commerciaux les employ es et les clientes des grands magasins am ricains tout en d crivant la culture respective de ces trois groupes interagissant quotidiennement Essentiellement Porter Benson y montre que chaque groupe poss de un pouvoir et que l interaction entre eux prend la forme d un triangle complexe d alliances de pressions et de conflits Un autre pionnier important est William Leach qui en 1984 a crit un article int ressant sur les grands magasins et leur influence sur les femmes de 1890 19257 Il avance que ceux ci de m me que la culture de consommation en g n ral ont permis aux femmes les travailleuses comme les clientes de s manciper et de concevoir leur identit f minine d une nouvelle fa on Une d cennie plus tard dans son livre sur l histoire du Bon March Michael B Miller montre bien comment au fil de son volution ce magasin parisien au caract re familial et attach aux traditions a tent de s adapter a
63. 993 p 126 Emmannuelle Minnie Bouvie Talons hauts et bas de soie Les t l phonistes de Bell T l phone Montr al 1920 1939 m moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2004 p 24 Drolet p 35 7 Johansen p 129 7 Selon Joan Sangster il s agit d un instrument pour cr er un milieu de travail paternaliste et pour promouvoir une vision liant la nation et la religion la vente Dans Souriez pour les clients Retail Work Dupuis Fr res and Union Protest Transforming Labour Woman and Work in Post War Canada Toronto UTP 2010 p 122 0 Voir ce sujet l article de Gix dans Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 4 n 4 janvier 1930 p 47 LD vol 1 n 1 octobre 1926 p 1 On peut mettre en doute le fait que les employ s puissent s y exprimer librement avec l exemple de la gr ve de 1952 En effet pratiquement aucune mention de cet pisode capital ne se retrouve dans les pages de LD Outre les expressions de m contentement de la part des employ s qui ont facilement pu tre censur es par la r daction aucune mention concernant la gr ve n explique l absence de 27 Duprex aux descriptions de journaux d entreprises que font entre autres Joan Sangster et Claudine Drolet on constate qu il poss de des caract ristiques tr s similaires aux autres publications du m me type la direction tente d y convaincre les employ s qu
64. Eaton Montr al 1880 1980 RHAF vol 58 n 4 printemps 2005 p 537 3 LD vol 3 n 4 janvier 1929 p 6 Selon Strom les cheveux courts sont populaires car ils sont faciles d entretien et ont un c t glamour les vedettes d Hollywood arborent cette coiffure Dans Beyond the Typewriter p 370 Selon Marchand cette mode apparait d s le d but des ann es 1920 Dans Rouge l vres et pantalon p 118 82 les ann es 1920 les jeunes femmes arborant de telles coiffures se consid rent malgr ce que peuvent en dire certains d tracteurs encore plus f minines car elles expriment ainsi leur modernit Bref il est clair que les employ es de Dupuis Fr res ont un int r t marqu pour la 245 mode De fait une autre possibilit s offre elles pour qu elles se tiennent au courant des derni res tendances les conf rences mode organis es au magasin leur intention d s 1930 environ Ces v nements tenus sur une base biannuelle semblent d ailleurs tre con us sp cialement par des femmes et se d roulent dans une atmosph re f minine et esth tique Toutefois le plus souvent c est un homme Rosario Trudel qui dirige la soir e et qui commente le d fil il semble que son r le soit cette fois ci sans recourir aux services d interm diaire de Forgues d duquer ses coll gues qui n ont pas la chance comme lui de voyager l tranger pour assister des p
65. F Tessier J P Deslierres 16 juin 1965 Selon lui les employ es quittent traditionnellement 22 ans reviennent 35 et partent pour de bon autour de 55 ans S Dossier Spicil ge 1946 1955 22e diner du club des 25 pr sentation Mlle Eliane Plaisance par Mme Albert Dupuis novembre 1955 154 Dossier M moires d une poque p 7 SS Des femmes y sont embauch es d s son inauguration en 1921 Certaines employ es de bureau travaillent galement au magasin des secr taires par exemple 22 Elles partagent certes des points communs avec leurs coll gues vendeuses mais galement sans doute avec les travailleuses de bureau d autres entreprises de Montr al telles que les banques et les compagnies d assurances Selon Graham Lowe Mich le Dagenais et Kate Boyer c est surtout compter de la Premi re Guerre mondiale qu on assiste un processus de f minisation du travail de bureau De plus en plus de femmes se dirigent alors vers cette profession car elle est plut t payante pour une profession f minine et elle procure aux travailleuses un certain statut et une certaine respectabilit Les travailleuses de bureau doivent par contre avoir un minimum d ducation et elles sont 158 g n ralement c libataires blanches et g es de moins de 25 ans Dans les grands magasins elles ont un statut sup rieur aux autres femmes celles qui se d marquent peuvent 1 Bien que deveni
66. Fr res d cident galement d occuper une bonne part de leurs temps libres en se joignant a une association d employ es Un des groupes particuli rement pr sent aupr s des travailleuses de Dupuis Fr res est 1 APEM c est dire l Association professionnelle des employ es de magasin affili e la FNSJB Elle organise pour elles des activit s appropri es et vari es cours de diction ou de culture cette liste de promotions 33 noms sont inscrits dont 12 noms de femmes Aucune d entre elles n est promue grand ma tre tandis que plusieurs hommes le sont 174 Dossier Club des 25 1944 1967 Club des 25 4e d ner donn aux membres par la maison DFL 3 juin 1946 Dans les premi res ann es on note que les nouveaux membres f minins ont toujours une marraine tandis que les nouveaux membres masculins ont quant eux un parrain ce qui t moigne de la division sexuelle pr sente en milieu de travail 1 LD vol 13 n 7 avril 1948 p 253 177 On demeure membre du club m me apr s sa retraite de sorte qu en 1965 sur les 221 membres seulement un peu plus d une centaine sont encore au travail Dossier Club des 25 DF f te onze de ses employ s 24 novembre 1965 178 Fond e en 1906 sous la supervision d un pr tre et longtemps dirig e par glantine Phaneuf l APEM en plus de procurer des cours aux jeunes femmes canadiennes fran aises employ es dans diff rents commerces de
67. L AAAD est fond e en 1927 Dossier Certificat de reconnaissance syndicale 1944 1963 Anecdotes du syndicat depuis sa fondation 8 novembre 1944 165 Certains v nements semblent toutefois exclusivement r serv s au personnel masculin comme en t moignent des photos prises lors de la f te aux hu tres organis e pour l anniversaire de naissance d A J Dugal o on aper oit seulement des hommes LD vol 8 n 12 23 novembre 1936 p 168 16 La musique et la danse semblent aussi importantes dans la culture de travail f minine entre autres pour les employ es de Dominion Corset et de la Shawinigan Water and Power Voir Du Berger et Mathieu p 119 et Drolet p 67 68 35 piqueniques l le Ste H l ne ou les sorties au Parc Belmont t Durant les autres saisons on note la c l bration de l Halloween les excursions de ski dans les Laurentides ou les parties de sucre Ces activit s offertes faible co t pour le b n fice de l ensemble du personnel sont ouvertes la fois celui ci mais galement aux ami e s de c ur maris femmes enfants ou ami e s Gr ce cette offre de divertissements Dupuis Fr res permet Secs 168 ses employ es de s amuser sainement dans un environnement qu il juge appropri 2 3 3 Cours et conf rences Dans un but ducatif Dupuis Fr res procure celles qui en manifestent l int r t des cours et des conf rences sur une vari t
68. Mme J M Girard Cette chanson n est pas dat e pr cis ment mais a t compos e entre 1939 et 1944 Dossier F tes et anniversaires 1939 1944 294 C l bre roman d Emile Zola publi en 1883 racontant l histoire de l ascension d une jeune fran aise Denise Baudu qui se trouve un emploi de vendeuse au grand magasin Au bonheur des dames dirig par Octave Mouret qui tombera d ailleurs follement amoureux d elle Zola pour crire son uvre s est 98 avec la direction etc Ang lique tant elle m me vendeuse il est donc logique de supposer qu elle s inspire directement de son exp rience chez Dupuis surtout quand elle mentionne explicitement la vente anniversaire v nement important qui s y tient r ellement chaque ann e Le grand magasin en tant que tel est par ailleurs grandement id alis pas une fois elle ne mentionne les longues journ es de travail des vendeuses qui doivent rester debout ou encore le paternalisme infantilisant des dirigeants Ceux ci ont d ailleurs certainement appr ci la publicit gratuite que leur offre Ang lique quand elle crit qu il fait bon de travailler dans une maison si sympathique ses employ s Bref les lectrices du feuilleton ont pu r ver un moment en se plongeant dans l histoire d une jeune fille issue comme elles des classes populaires qui parvient changer son sort et am liorer sa condition sociale en se mariant un hom
69. Universit de Montr al S amuse bien qui s amuse chez Dupuis La culture de travail des employ es de Dupuis Fr res entre 1920 et 1960 par St phanie Piette D partement d histoire Facult des arts et des sciences M moire pr sent a la Facult des tudes sup rieures en vue de l obtention du grade de Maitre s arts M A en histoire 30 avril 2012 St phanie Piette 2012 Universit de Montr al Facult des tudes sup rieures Ce m moire intitul S amuse bien qui s amuse chez Dupuis La culture de travail des employ es de Dupuis Fr res entre 1920 et 1960 Pr sent par St phanie Piette a t valu par un jury compos des personnes suivantes Mich le Dagenais pr sident rapporteur Denyse Baillargeon directrice de recherche Magda Fahrni membre du jury R sum Cette tude porte sur la culture de travail des femmes qui ont t l emploi du grand magasin Dupuis Fr res de Montr al entre 1920 et 1960 Nous nous int ressons aux particularit s du travail salari f minin dans le domaine de la vente au d tail au Qu bec mais aussi la nature et l volution de cette culture de travail de m me qu ses liens avec les changements qui surviennent l poque dans la construction des nouvelles normes de la f minit respectable D une part notre but est de montrer que pour les travailleuses de Dupuis leur emploi leur perm
70. adresse directement aux jeunes filles qui font montre d un go t pour une mode sans doute un peu trop avant gardiste aux yeux des dirigeants Les demoiselles doivent se v tir de mani re m riter le respect de tous peut on y lire Moult articles du Duprex sont aussi consacr s la transmission de consignes En mai 1949 M Fr chette directeur du personnel livre un texte sur l importance de bien para tre aupr s de ses coll gues de travail pour maintenir une agr able atmosph re pour tous Parmi ses conseils notons entre autres l importance de la politesse et 3 94 celle de garder ses soucis et sa vie personnelle pour soi Sangster en analysant les dossiers personnels des employ es a d ailleurs constat qu il y a certaines formes de r sistance chez celles ci En effet elles ont de la difficult se conformer aux standards du magasin qui ne correspondent pas leur r alit de vendeuses Dans Souriez pour les clients p 124 Dupuis poss de un syst me de 38 haut parleurs utilis le matin pour des annonces et discours de motivation notamment sous la pr sidence de Raymond Voir le dossirt Discours de Raymond Dupuis 1947 1953 Annonces faites au haut parleur du magasin 13 janvier 1953 3 Dossier Manuels d instructions Manuel d instructions pour le personnel du comptoir postal c 1954 p 9 LD vol 13 n 12 mai 1949 p 410 Compte tenu du fait que les coll gues de
71. ail de leurs employ es en leur faisant une large place dans son journal soulignant la tenue d un shower ou l organisation d un piquenique La direction encourage aussi le d veloppement d une culture de travail f minine en multipliant les v nements sp ciaux et les activit s sociales susceptibles de la consolider Mais de quoi est faite plus exactement cette culture de travail f minine Comment a t elle volu entre les ann es 1920 et les ann es 1960 C est ce quoi nous nous int resserons dans le troisi me chapitre 62 Chapitre 3 La f minit et la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res Ce chapitre entend s attarder a la culture de travail des employ es de Dupuis fr res a partir des informations contenues dans Le Duprex Il vise a montrer que cette culture de travail est largement influenc e par le mod le de la m re et de la m nag re et par l id ologie des sph res s par es qui se trouvent au fondement de la f minit dominante entre les ann es 1920 et 1960 mais que cette culture du travail int gre galement d autres dimensions de la f minit qui s affirment au cours de la p riode notamment l importance de l apparence et du corps La premi re partie du chapitre s int resse la persistance des anciennes normes de la f minit centr e sur la domesticit v hicul es dans Le Duprex alors que la seconde insiste sur les nouvelles composantes de la f minit propo
72. ais il ne faudrait pas penser que celles ci sont pour autant manipul es ou passives Comme cela a d j t soulev par d autres auteures les employ es de grands magasins poss dent leur propre agentivit et tentent par diverses strat gies de tirer profit de la situation dans laquelle elles se trouvent Ainsi pour am liorer les revenus de sa famille une vendeuse peut utiliser sa position pour faire en sorte que sa jeune s ur soit galement embauch e Gr ce des rabais d employ s les travailleuses peuvent aussi se procurer moindre co t des articles de mode pour agr menter leur apparence En outre les employ es se servent beaucoup de leur emploi et des r seaux de connaissances qu elles y d veloppent pour se trouver un mari Il est effectivement plus facile de rencontrer quelqu un dans un endroit qui repr sente un bassin de centaines d hommes souvent c libataires tre employ e de grand magasin largit donc les r seaux de connaissances des femmes et par le fait m me multiplie leurs chances 105 Kate Boyer et Kim England abondent dans le m me sens dans leur article sur les employ es de bureau word of mouth and social networks were a primary way that people found jobs Dans Women s Work The Feminization and Shifting Meanings of Clerical Work Journal of Social History vol 43 n 2 2009 p 316 1 Drolet p 133 et 136 Selon l auteure dans le journal de cette entreprise les liens de paren
73. aise Montr al Editions de L Homme 2010 p 76 Statistiques Canada p 11 et 13 Timothy Eaton va dominer le march canadien en ouvrant des succursales de son magasin un peu partout dans les plus grands centres du Canada Hamilton R gina Calgary Edmonton Moncton Halifax Toronto et Montr al Michelle Comeau Etalages vitrines services et nouveaux espaces Trois grands magasins de Montr al durant les ann es 1920 dans Serge Jaumain et Paul Andr Linteau sous la dir de Vivre en ville Bruxelles et Montr al XIX et XX si cle Bruxelles Peter Lang diteur 2006 p 285 S Selon Linteau Simpson s arrive en 1905 Montr al lorsque son propri taire ach te le magasin d j tabli Murphy s Ce n est qu en 1929 toutefois que le commerce change de nom pour Simpson s Dans La rue Sainte Catherine p 64 14 Morgan s fond en 1843 sera achet en 1960 par la Compagnie de la Baie d Hudson de sorte que le c l bre magasin de la rue Ste Catherine prend le nom de La Baie d s 1972 Ibid p 89 S Aux tats Unis parmi les principaux grands magasins au d but du XX si cle on compte Macy s Filene s Harrod s ainsi que Marshall Fields Ingrid Jeacle Emporium of Glamour and Sanctum of Scientific Management The Early Twentieth Century Department Store Management Decision vol 42 n 9 2004 p 1162 Du c t de Paris autre grande m tropole des magasins notons outre Le Bon March
74. andidates font leur apparition dans chacun des six wagons ce qui permet sans doute leurs coll gues de mieux valuer leur beaut LD vol 15 n 2 mars 1954 p 25 Thid p 21 88 Par ailleurs il arrive aussi par exemple en 1956 que Dupuis organise une semaine de la beaut durant laquelle il tient des activit s sp ciales Lors de cet v nement il met encore de l avant le culte de la beaut et de la jeunesse en invitant des laur ates de concours de beaut ou de Miss qui viennent faire des s ances de d dicaces au magasin Parmi celles ci notons la visite de Miss East Central en 1956 ainsi que Miss Radio et T l vision en 19577 Ces activit s tout comme les concours de beaut qui ont lieu dans l apr s guerre nous laissent croire que c est surtout cette poque que le culte de la beaut atteint son apog e chez Dupuis Le sport Cette valorisation de la beaut et du corps se manifeste aussi dans l int r t que portent les employ es de Dupuis aux activit s sportives organis es en grand nombre par l AAAD D s le d but des ann es 1920 selon Soland le sport gage de sant devient aussi un moyen pour les femmes dont la f minit est de plus en plus associ e la vitalit et l nergie de se modeler un corps moderne Tout au long de la p riode l tude les femmes sont chez Dupuis enthousiastes par rapport aux activit s sportives qui leur sont
75. appeler aux travailleuses que leur vraie place est au foyer Un autre aspect maintes fois relev par les historiennes qui se sont pench es sur le travail domestique est le ph nom ne de la double journ e de travail qui s impose aux m nag res qui doivent aussi travailler hors de la maison pour soutenir leur famille Certaines employ es de Dupuis Fr res semblent famili res avec cette r alit en effet tandis que beaucoup sont embauch es jeunes quittent pour fonder une famille et reviennent parfois une fois leurs enfants lev s d autres ne peuvent se permettre cause de leurs revenus modestes de cesser de travailler Il arrive donc que certaines collaboratrices 194 Jill J Matthews Good and Mad Women The Historical Construction of Feminity in Twentieth century Australia Sydney G Allen amp Unwin 1984 p 174 Chez DF les travailleuses semblent en tre conscientes du moins si on se fie aux propos de Cardeuse dans son article de mai 1928 Pour elle le mariage et la maternit repr sentent des devoirs f minins 195 Sangster p 31 Ainsi selon elle beaucoup de travailleuses partent pour se consacrer l ducation de leurs enfants et reviennent par la suite p 50 La plupart des travailleuses quittent en fait leur emploi d s qu elles se marient m me si selon Francine Barry d s 1940 elles le font effectivement plut t lorsqu elles tombent enceintes Dans Le travail de la femme au Qu bec L
76. ats Laura 11 Secord d ailleurs vendus chez Eaton s Durant la Deuxi me Guerre mondiale Le Duprex fait galement montre d un bel esprit patriotique mais canadien cette fois cette poque on retrouve en effet dans le journal d entreprise beaucoup d articles patriotiques de publicit s pour les emprunts de la victoire d incitations au recyclage ainsi qu au rationnement etc Les employ es semblent enclines participer l effort de guerre qu elles soutiennent de leur mieux En 1940 une rubrique du Duprex encourage par exemple les lecteurs envoyer Maria DesRoches une employ e des livres et revues qui ne servent plus pour le b n fice des soldats outre mer N oublions pas toutefois que la pression et la propagande du gouvernement f d ral ainsi que sans doute de la direction du magasin ont pu inciter celles ci mener de telles actions S LD vol 5 n 1 octobre 1930 p 7 et n 6 mars 1931 p 66 16 LD vol 3 n 10 juillet 1929 p 9 7 Voir Colin M Coates et Cecilia Morgan Heroines and History Representations of Madeleine de Verch res and Laura Secord Toronto UTP 2002 368 pages Dans cet ouvrage les auteurs comparent les repr sentations de ces deux femmes qui ont t utilis es des fins nationalistes par les Canadiens anglais dans le cas de Secord et les Canadiens fran ais dans le cas de Verch res Les auteurs soulignent par le fait m me les similitudes unissan
77. availleuses salari es La citation montre aussi que Dupuis institution tr s catholique passe parfois outre la norme sociale en vigueur et accepte d embaucher des femmes mari es ou tout le moins des veuves charg es d enfants Mais dans la mesure o elles n occupent pas de fonctions importantes au m me titre que les hommes elles ne menacent pas trop l id ologie de l homme pourvoyeur ainsi que la famille patriarcale cheres a la soci t qu b coise Par ailleurs la double journ e de travail de certaines femmes peut aussi avoir une influence n faste sur leur temps libre et par cons quent sur leurs loisirs Ainsi celles ci pr f rent peut tre profiter du peu de temps libre qu elles ont pour se reposer la maison ou pour participer des loisirs qui s organisent dans le cadre familial largi 197 LD vol 4 n 6 mars 1930 p 72 198 Tl faut pr ciser que l article cit ci haut para t au d but de la crise en mars 1930 alors que le ch mage masculin est nettement en hausse Sans doute DF tient il compte de cette r alit dans sa d cision d embaucher des femmes d sirant aider leur mari soutenir leur famille Bien qu il soit difficile d obtenir des chiffres pr cis ce sujet on remarque que dans les documents concernant les loisirs les listes des membres du ch ur Dupuis par exemple AHEC FDFL P049 dossier F tes et anniversaires 1939 1944 les noms de femmes
78. dans son vaste rayon Pour les plus jeunes qui ne sauraient encore accomplir leur devoir de m nag re une autre collaboratrice du Duprex Louise essentiellement active en 1930 crit des articles leur tant destin s et visant leur en transmettre l importance Encore une fois Le Duprex s assure ainsi de mettre en valeur le travail domestique des femmes ce qui peut contribuer ce que les lectrices prennent conscience de son caract re fondamental dans la 187 Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 LD vol 3 n 4 janvier 1929 p 3 Nous soulignons 88 Joanne Preston Domestic Ideology School Reformers and Female Teachers Schoolteaching Becomes Women s Work New England Quarterly vol 66 n 4 1993 p 537 189 LD vol 8 n 1 avril 1935 p 7 65 consolidation de leur f minit Ainsi en avril Louise tente de donner aux jeunes employ es le go t d apprendre les arts culinaires et de devenir des cuisini res hors pair afin de fonder une famille et rendre l homme heureux Quelques mois plus tard en juillet elle poursuit son uvre d ducation avec un article concernant l importance de ma triser la couture pour une m nag re et m re de famille Elle y va d affirmations tr s directes qui prennent presque la forme d ordres Jeunes filles qui avez des ambitions avant de songer au mariage apprenez faire une soupe ourler un mouchoir ou
79. de la f minit et de la culture de travail f minine seront galement pr sent s D autre part nous expliquerons comment nous avons mis ces tudes profit en laborant sur la probl matique qui guide notre recherche sur les sources que nous avons utilis es ainsi que sur la m thode que nous avons employ e pour bien la mener terme 1 1 1 Les grands magasins L apparition des grands magasins est un ph nom ne qui a profond ment transform le d veloppement du commerce de d tail dans la soci t capitaliste moderne C est autour de 1850 que les premiers apparaissent en Occident le Marble Place New York en 1846 et le Bon March Paris en 1852 Vers 1880 les grands magasins connaissent une croissance importante et au tournant du si cle ils vivent leur 4ge d or en devenant des palais de la consommation N s dans un contexte d industrialisation et d urbanisation de masse c est dans les ann es 1920 1930 que les grands magasins atteignent leur pleine maturit pour 7 Robert D Tamilia Origin and Evolution of the Department Store Montr al UQAM Centre de recherche en gestion 2002 p 18 Susan Porter Benson Palace of Consumption and Machine for Selling The American Department Store 1880 1940 Radical History Review vol 21 1979 p 199 ensuite subir la concurrence grandissante de nouveaux types de commerces Au Canada l Irlandais Timothy Eaton 1834 1907 est consid r
80. de la m re m nag re voqu plus haut mais viennent plut t s y greffer Ainsi sans remplacer l ancien mod le ces nouvelles normes f minines en s y ajoutant ont plut t comme effet de le rendre plus complexe qu auparavant Il a donc t possible de voir comme d autres auteures l ont montr que les employ es de Dupuis Fr res ont su entre 1920 et 1960 se forger une identit propre distincte de celle de femme au foyer mais pas si loign e de la f minit dite traditionnelle 313 Selon Sangster cette participation des femmes la gr ve leur permet de lib rer les tensions accumul es Dans Souriez pour les clients p 135 Conclusion Ce m moire a voulu mettre en parall le l volution de la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res entre 1920 et 1960 avec l largissement plus global de la d finition de la f minit respectable Pour ce faire le journal de l entreprise Le Duprex a t une source indispensable v ritable mine d informations r v latrices des pratiques et des mentalit s des dirigeants de Dupuis Fr res et des femmes leur emploi Dans un premier temps nous avons bross un portrait du grand magasin et de ses employ es Ainsi il a t possible de constater que Dupuis a adopt une vari t de strat gies pour encadrer son personnel notamment l utilisation du Duprex en tant que tel l mission de r glements et a fortiori la mis
81. de ses employ es ne soient pas compromises par des passe temps inappropri s toujours dans l optique de se construire dans l opinion publique une r putation sans faille Le paternalisme de la famille Dupuis n est cependant efficace ni aupr s de l ensemble du personnel ses plus jeunes membres semblent tre moins dociles ni durant toute la p riode l tude En effet d s le milieu des ann es 1940 et plus forte raison partir de la gr ve de 1952 la gestion paternaliste perd beaucoup de son efficacit aupr s d employ s et employ es qui tentent de plus en plus de s affranchir du joug de leur employeur et qui par cons quent se consid rent de moins en moins comme des membres de la grande famille Dupuis 105 Dans un deuxi me temps nous avons tent de montrer comment la domesticit et l id ologie des sph res s par es qui repr sentent des assises importantes de la f minit dominante entre 1920 et 1960 ont influenc le d veloppement et l volution de la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res En effet il a t possible de voir que durant la p riode l tude le travail domestique la maternit le mariage ainsi que le respect des hi rarchies li es au genre restent d terminants dans l laboration de la culture de travail des femmes l emploi du grand magasin montr alais Par contre ces derni res sont ouvertes aux transformations plus larges qui se produisent
82. de sujets Les conf rences semblent avant tout ax es sur les voyages alors que des conf renciers informent l auditoire sur les diff rentes destinations la mode et sur les attractions que l on y trouve photos l appui On entretient ainsi parmi les employ es un d sir d ouverture sur le monde qui va d ailleurs avoir des effets concrets effectivement dans Le Duprex on compte de nombreuses photos des vacances qu elles passent parfois m me entre elles voyager Souvent il s agit de s jours dans des pensions ou des chalets des Laurentides mais apr s la Deuxi me Guerre mondiale certaines femmes se rendent aux tats Unis en Am rique du Sud en Europe et partent m me l occasion en road trip Par ailleurs des cours et ateliers sont galement fr quemment organis s pour les employ es surtout pour les plus jeunes d entre elles qui ne sont pas n cessairement initi es aux arts f minins Au fil des ann es on organise des 167 Selon Yvan Lamonde et Raymond Montpetit les parcs d amusement ouverts pour toute la famille accueillaient aussi fr quemment des f tes professionnelles Dans Le parc Sohmer de Montr al 1889 1919 Qu bec IQRC 1986 p 182 168 DF procure aussi ses employ es certains services pour assurer leur bien tre et peut tre pour d tourner l attention des conditions de travail difficiles dans lesquelles elles vivent Parmi ceux ci notons une salle mange
83. des employ es heureuses de se rendre au travail pour voir leurs amies et enclines collaborer entre elles car proches les unes des autres ne peuvent que repr senter un atout pour un employeur De plus on constate que les liens d amiti tiss s chez Dupuis Fr res se prolongent non seulement en dehors des heures de travail mais galement apr s le d part d une employ e Le magasin encourage les femmes dans cette voie puisqu il les incite tre amies en dehors du travail ainsi dans l dition de d cembre 1933 du Duprex une jeune fille qui crit au courrier du c ur d Ang lique au sujet de ses loisirs se voit r pondre de fr quenter ses coll gues l ext rieur du travail car dit la courri riste une jeune fille de bureau a le droit et le devoir de se 148 distraire C est un avantage de fr quenter ses compagnes en dehors du bureau D autres l ments r v lateurs sont les photos et les remerciements envoy s au Duprex la suite d un LD vol 9 n 4 juillet 1937 p 61 Les femmes sur la photo se sont peut tre rapproch es les unes des autres la demande du photographe Toutefois on peut avancer que celle ci cherche projeter l image d employ es tr s unies que ce soit vrai ou non Belisle Retail Nation p 111 Les employ s en retour offrent des cadeaux leurs patrons par exemple une plaque comm morative pour le 70 anniversaire du magasin Dans le dossier Jubil
84. des mati res R sum RS ne nes ae ae EE E E cat E A E A oh i PDS AC AEEA E E AE AEE E EE ii Table des mati res siene niea aaa ln E ans AAE AREO EREA nas EREATARA AENEA iii Liste des illustrations sc nanna E R E Pr Re Rent V ESS S DIVORCE de ent vi RemerciemeMS an Tes A A ne dd orne cn dis tous viii troduction Re A ne r Oea k e A E EE E E Ae 1 Chapitre L ats tists ariel ere Se RSR RENE 5 Bilan historiographique probl matique sources et m thodologie 5 1 1 Bilan MS IOTIOS PAP MIQUE SAR NES Re te iat 5 1 1 Tes grands masse nana dat aaa aR aR AEE i 5 1 12 D p is F ES ES aani oren iar E EEE eee AER 10 Te ASICS vendes Smac a a e e untae a a E a i 12 el SB T L ey Pesce A ROE Re E A a te eee 14 1 1 5 La culture de travail f minine rss Aste Steer ate eae nase 16 1 2 Probl matique sources et m thodologie 20 1 2 1 Pro DICIIA NIG UG tele Me De ea ne is i Nae Sahelian ner sed 20 1 22 SOUL CCS apres Se enr cede oe ne ce Una css ts 21 1 2 3 M thodolo fie sen ens nie Ne nn net 23 Chapitre 2 ie se sara ced oe ne nn is 25 Dupuis Fr res et ses employ es ne A RS net ne nn et r 25 2 1 VSG HAASAN EE ieia aiio Sans aps Soc hessade wees EEO Maceo ic av Seana haga eae oH 25 2 1 1 Le Duprex comme moyen de L on emmener Labs 25 2 1 2 Une gestion paternaliste tendre Ate enlace dtc 27 2 1 3 R glements avertissements consignes et conseils 29 2 1 4 Utilisation des employ es apparence culture et r seaux ee eeeeeeteeete
85. e En effet en avril 1927 Michelle publie un article dans lequel elle d plore le fait que les femmes soient depuis sa cr ation totalement absentes du Duprex cens repr senter l ensemble du personnel ses yeux il est peu galant que depuis sa cr ation personne n ait daign ts 278 crire un mot concernant les femmes L auteure lance ainsi un appel la participation de ses coll gues pour qu elles se fassent entendre Il est int ressant de voir que celle ci d cide d intituler son article F minisme en effet m me si elle n aborde pas ce th me de fa on directe on peut en d duire que pour elle sa prise de position visant rappeler l importance de consid rer dans le journal d entreprise l l ment f minin s apparente une lutte f ministe D autres femmes sont galement capables de se d fendre sont conscientes de leur valeur et n h sitent pas l exprimer dans Le Duprex avec des propos parfois virulents Les exemples les plus loquents sont recens s de mars juin 1929 En effet dans ces quelques ditions du journal diff rentes employ es r agissent un article d un coll gue Jean Bernard paru en d cembre 1928 dans lequel il livre sa version plut t simpliste des femmes selon lui plusieurs ne s int ressent qu aux toilette s chiffons th s et danses et sont constamment entre elles soit parler de leurs amours soit se raconte r l
86. e dernier film de Ramon Navarro sic Cette diatribe cause tout un toll alors que plusieurs femmes choqu es par ces propos d cident d crire au Duprex pour r tablir leur r putation elles ne sont pas des tres frivoles et superficiels et faire comprendre a tous en particulier 4 Bernard que les hommes ont en r alit grand besoin d elles Une r plique de Pierrette M en juin 1929 est particuli rement loquente cet gard L homme fait de grandes choses de grandes d couvertes de grands gestes la 78 LD vol 1 n 7 avril 1927 p 6 2P LD vol 3 n 3 d cembre 1928 p 8 94 femme au second plan aide beaucoup son succ s sans en avoir l air Auparavant en avril 1929 Froufrou livre des propos encore plus imp tueux et sous entend que les femmes sont en fait sup rieures aux hommes Le sexe faible est quelques fois tr s fort n est ce pas BAS LES HOMMES VIVE NOUS Bref m me dans les ann es 1920 certaines femmes n h sitent pas dans Le Duprex s affirmer se d fendre et r clamer la place qui leur revient Certaines travailleuses privil gient plut t humour pour s exprimer dans Le Duprex selon plusieurs auteures il fait partie int grante de la culture de travail des femmes car il leur permet de faire passer plus vite leur journ e de travail Plusieurs petites rubriques humoristiques ponctuent ainsi les pages du journal d entreprise et r
87. e en place d un climat et de m thodes de gestion paternalistes L entreprise a galement de fa on continue entre 1920 et 1960 fait la promotion aupr s des personnes son emploi et du public en g n ral de diff rentes valeurs essentielles la compr hension du milieu de travail dans lequel les premiers ont volu Parmi ces valeurs notons le nationalisme la religion la comp titivit la morale et la respectabilit de m me que la famille Par la suite nous avons dress une esquisse des employ es de Dupuis vendeuses employ es de bureau et travailleuses manuelles en abordant des th mes tels que leurs origines leur situation maritale leur milieu de travail les relations interpersonnelles qu elles y d veloppent etc Leur vie socioculturelle de m me que leurs loisirs tels qu ils apparaissent dans Le Duprex ont galement t abord s Ainsi nous avons vu que les femmes l emploi de Dupuis participaient aux r ceptions aux sorties et aux cours organis s leur intention par la maison Par les photos qu elles envoyaient leur journal d entreprise nous avons encore une fois constat quel point leur vie tait bien remplie L analyse de la culture de travail des employ es de Dupuis par Le Duprex montre aussi qu elle partage plusieurs points communs avec celles d autres travailleuses Comme on a pu le voir les travailleuses de Dupuis pratiquent sensiblement les m mes rituels et 104
88. e savoir LD vol 4 n 8 mai 1930 p 104 7 S land p 16 46 48 8 Belisle Retail Nation p 188 99 et affili la CTCC d s 19227 A l poque il est comme le milieu syndical en g n ral tr s masculin si bien que peu de femmes y participent Ainsi m me si elles repr sentent une part importante des membres du syndicat chez Dupuis les repr sentants syndicaux ont de la difficult dans les premi res ann es les rejoindre et les convaincre de participer aux rencontres En mai 1929 Louis Marie Gagnon crit donc un article dans Le Duprex dans lequel il souligne l absence des femmes aux assembl es syndicales et les incite s y pr senter pour exercer leur droit de vote et ainsi faire valoir leurs int r ts La participation f minine au syndicat change toutefois au tournant des ann es 1950 De plus en plus les femmes s impliquent et militent pour de meilleures conditions de travail Chez Dupuis elles commencent int grer la direction du syndicat en y occupant des postes importants Vers la fin de la d cennie des femmes comme Madeleine Brosseau et Henriette Laforest deviennent pr sidentes du syndicat la premi re en 1957 et la 7 Dossier Certificat de reconnaissance syndicale 1944 1963 Anecdotes du syndicat depuis sa fondation 8 novembre 1944 Au d but il s agit d un syndicat de boutique il ne n gocie pas de r elle convention collective avec l
89. e transformer en grand magasin Dans La rue Sainte Catherine p 64 Dupuis Leman Dupuis fr res le magasin du peuple 290 pages 37 Mary Catherine Matthews Working for Family Nation and God Paternalism and the Dupuis Fr res Department Store Montreal 1926 1952 m moire de ma trise Montr al McGill d partement d histoire 1997 118 pages 12 et avance que l ann e 1952 celle de la gr ve a repr sent le d but de l effondrement de ce type de gestion Mais ce qui est sans aucun doute le plus connu de l histoire de Dupuis c est justement la fameuse gr ve qui a clat en 1952 John Willis s y est int ress en 2006 dans un article paru dans la revue Labour Le Travail En plus de relater les faits saillants de la gr ve Willis y aborde le r le majeur des femmes dans le conflit la notion de solidarit de m me que le militamtisme et les strat gies des gr vistes Plus r cemment en 2010 Joan Sangster a accord un chapitre de son livre Transforming Labour Women and Work in Post War Canada cette gr ve qui fut un point tournant pour les travailleuses de m me qu un symbole de changement social et politique au Qu bec La pr sente tude se situera donc au sein de cette historiographie et se donne comme objectif de faire un peu plus de lumi re sur l histoire de Dupuis Fr res en abordant un autre sujet se voulant innovateur la culture de travail de ses employ es Mais avant d
90. eaut et du corps s immisce dans la culture des employ es Selon diverses auteures dans l entre deux guerres la f minit est en effet de plus en plus directement li e a la beaut et au soin 248 du corps Chez Dupuis cela se manifeste de diverses fa ons notamment par la prolif ration d articles dans Le Duprex concernant ces sujets Parmi ceux ci celui de Gix dans lequel il se penche sur le th me des nouvelles tendances coiffure de l ann e 1936 se d marque Certes ses yeux les cheveux repr sentent un des l ments essentiels de la beaut f minine toutefois ses propos sont par moments tonnants surtout lorsqu il affirme que l on peut faire sourire un visage juste avec la mani re dont on le coiffe La coiffeuse peut concurrencer avec moins de danger la chirurgie esth tique Il est surprenant de constater qu un article de mode datant des ann es 1930 voque cette possibilit Ce n est certes pas encore pratique commune mais en faire mention signifie que certaines femmes les plus riches sans doute peuvent d j en profiter et ainsi se sacrifier au culte du corps parfait correspondant aux normes de beaut de l poque Seland affirme d ailleurs qu l poque les nouvelles normes de f minit en lien avec l apparence poussent les femmes vouloir entretenir un corps moderne les v tements n tant pas suffisants ce qui pourrait expliquer le recours des p
91. eeee 31 2 1 5 Les valeurs v hicul es par Le Duprex ss 36 La patrie eene a a a E aee 36 La comp titivit e A te Skies 39 La morale et la resp ctabilit s fesse nine line nant 40 APEC OI nesr nn nn En E EEE EAE A EE RSS 40 Ka famille nanet eg eI a E E E eae 42 22 LES employ es Nr n n a a te ae 43 2 2 1 Portrait des vendeuses classe ethnie et genre ssl 43 22 2 La Vie des vende s essre ien eian a a i lien nan 46 2 2 3 Les employ es de DATENT ASS nr ne 51 DD Ar Les autres AT AVANIICUSES missin n i chai EE ER E E 53 2 3 La vie socioculturelle et les activit s ie 53 iv 2 3 1 v nements sp ciaux et r ceptions es 53 23 2 ACTIVITES SOC ST ET RS ARE A EAI OAAR N ERRATEA EEE 54 2 3 3 COUT Et CONTETENCES arian a E E RR O AE AE 55 BD Ab O EE EE E E EE EE T A 56 2 3 5 Les associations d employ es Eine eee te ue 57 2 3 6 Participation au Duprex par le biais de l envoi de photos 58 A4 CONCIISION EEEE E EAEE E NEATE 60 Chapitre Ent a A E E ten E E E A alles 62 La f minit et la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res 62 3 1 Persistance des anciennes normes de T mIMIT nn nan asie 62 3 1 1 Le travail dOMES TURN RS RE ne ne ati 63 3 12 Le miari geneisst aui A ns de ft st natal lens 69 3 1 3 Soumission aux hommes et respect des hi rarchies de genre cc eee 77 3 2 Apparition de nouvelles formes de f minit 79 3 2 1 Nouveaux standards en mati re d apparence physique
92. el est g n ralement regroup non seulement par sp cialisation mais galement par sexe et par ge les travailleurs organisent leur vie au travail et leur vie sociale avant tout autour de leur premier groupe d appartenance c est dire leur rayon Par cons quent il arrive que ce sentiment d appartenance se mue dans un contexte de travail o l augmentation des ventes et des profits est l objectif de chaque rayon en comp tition Selon Susan Porter Benson celle ci dans la mesure o elle reste saine est encourag e par les magasins qui s assurent ainsi de ventes lucratives Plusieurs indices nous poussent croire qu une telle comp tition entre les rayons existe chez Dupuis Fr res mais qu elle peut parfois nuire aux ventes titre d exemple H L Bernard dans un ditorial du Duprex de novembre 1934 demande aux vendeuses des diff rents rayons de coop rer davantage entre elles dans le but de mousser 121 p Pa les ventes globales du magasin Puisque ce dernier prend la peine d crire un article pour 1 LD vol 13 n 6 d cembre 1947 p 244 120 Selon Susan Porter Benson la direction a tendance typecast clerks in certain departments young pretty women for the street floors motherly types for the children s departments and older dignified women for the more expensive departments Social barriers thus reinforced spatial ones Dans Palace of Consumption and Machine for Selling The Am
93. elles que l on retrouve dans la presse f minine de la premi re moiti du XX si cle permettent aux femmes de s vader dans la litt rature et la r verie toutefois elles cr ent aussi chez ces derni res des attentes et des id es pr con ues quant au mariage et aux relations interpersonnelles qui souvent id alis es peuvent ventuellement les d cevoir lorsqu elles se rendent compte que leur r alit sera diff rente 71 Le feuilleton est une sorte de roman publi par tranches et dont le sujet tourne g n ralement autour d intrigues amoureuses c est une forme litt raire qui a la cote dans la presse populaire et les magazines f minins de l poque Selon John Dickinson et Brian Young les feuilletons constituent une forme importante de litt rature populaire et un attrait majeur aupr s du lectorat de la plupart des journaux On en publie dans divers quotidiens m me apr s 1945 Dans Br ve histoire socio conomique du Qu bec Sillery Septentrion 2003 p 264 Dans le premier chapitre elle le regarde de loin et le trouve si joli LD vol 4 n 7 avril 1930 p 87 Quant au dernier chapitre il est compos de deux lettres de Jeanne son amie Dans la premi re Jeanne s avoue perdument amoureuse de son pr tendant mais prouve la peur que les sentiments de celui ci ne soient pas r ciproques Finalement dans la derni re lettre tout est bien qui finit bien apr s une absence de plusieurs
94. encore faire une robe de nuit Toute jeune fille de 20 ans devrait avoir une parfaite connaissance de la machine coudre De tels propos laissent croire que les plus jeunes employ es n ont peut tre pas toutes les connaissances requises pour accomplir pleinement leur r le de m nag re pr cis ment parce qu elles travaillent hors du foyer et que certains s en inqui tent Quand Aline demande au courrier de Pierrette dans Le Duprex de juillet 1927 ce qu elle devrait servir une r ception on peut en d duire que c est effectivement le cas c est dire que des travailleuses ne poss dent pas l exp rience n cessaire pour savoir comment recevoir convenablement des invit s Ainsi m me si le mod le de la f minit dominante veut que les femmes soient de parfaites m nag res et des ma tresses de maison accomplies on voit que certaines d entre elles semblent manquer de pr paration ce r le Comme l ont mentionn plusieurs historiennes le travail domestique englobe aussi le r le de m re de famille Certaines collaboratrices du journal telles que Cardeuse dans un article de mai 1928 expriment leur volont d avoir des enfants On peut supposer m me si plusieurs employ es demeurent c libataires et ne deviennent donc pas m res que c est l galement le d sir de beaucoup de jeunes employ es chez Dupuis car le mariage et la 1 LD vol 4 n 7 avril 1930 p 88 PT LD vo
95. ent adress une coll gue toutefois non identifi e intitul Toi qui lis ce po me que me r pondrais tu Guertin semble tre laise dans l criture elle publie en 1935 un recueil de po mes intitul Confidences que DF vend De plus elle compose des contes pour LD Le petit ruisseau qui sonne en avril 1935 ainsi que Myst re d hier en 1936 96 Le besoin de s exprimer que ressentent les employ es de Dupuis se manifeste aussi parfois par la chanson Selon Monique Leclerc celle ci a plusieurs fonctions diffuser des id es servir d agent unificateur ou de d foulement exprimer des sentiments ou encore divertir Ainsi la chanson peut donc tre r v latrice d une soci t d une poque ou dans ce cas ci de la culture de travail d un groupe de femmes Par ailleurs il est possible de croire que la popularit grandissante que connaissent certains artistes issus des classes laborieuses dans l entre deux guerres a fait r aliser aux employ es de Dupuis la possibilit d crire des chansons leur image dans le but de s exprimer On peut penser notamment Mary Travers La Bolduc qui a acquis sa popularit en chantant dans un langage populaire les probl mes du quotidien et les difficult s de la vie ordinaire La d mocratisation de la radio au Qu bec a favoris la diffusion de ses chansons et lui a permis de devenir la porte tendard de la culture po
96. erican Department Store 1880 1940 Radical History Review vol 21 1979 p 211 PT LD vol 7 n 11 novembre 1934 p 163 40 rappeler l importance de la coop ration on peut supposer que cela ne va pas a ins 122 n cessairement de soi et qu une r elle division existe entre les rayons La morale et la respectabilit Comme il a d j t mentionn Dupuis Fr res se soucie galement de la moralit ainsi que de la respectabilit de ses employ es surtout pour maintenir sa r putation aupr s du public La direction fait la promotion de valeurs morales traditionnelles et exige des employ s un comportement irr prochable et ce autant au magasin qu en dehors des heures de travail par exemple lors de sorties organis es Ainsi en 1966 lors d une f te champ tre elle demande aux employ es de porter une tenue vestimentaire de circonstance et de bon go t Elle leur demande galement de rester sobres et de ne pas danser en maillot de 123 bain La direction se fait galement un point d honneur que ses vendeuses respectent un code vestimentaire strict puisqu elles repr sentent le magasin aux yeux du public et que celui ci entretient la grande majorit de ses rapports avec Dupuis Fr res par leur entremise Elle demande ainsi aux vendeuses en 1930 de s habiller sobrement dans des teintes 7 a 4 124 fonc es tout en maintenant une l gance discr te La religion Les
97. erni res ann es de parution du Duprex on ceux du magasin Paquet de Qu bec note l existence d quipes de quilles mixtes dans la ligue mais auparavant partir de la saison 1929 1930 plus pr cis ment hommes et femmes jouent dans des quipes s par es regroup es dans deux sections qui chacune couronne une quipe gagnante au terme de la 270 Au moins entre 1947 et 1960 90 saison Selon Sangster les entreprises ont int r t ce que leurs employ es participent des sports d quipe car ils les stimulent et les incitent 4 d velopper un plus fort sentiment j 272 de loyaut envers elles ILLUSTRATION 3 5 Les championnes de la saison de quilles 1938 39 LE DUPREX 79 Vol 10 No 4 LES CHAMPIONNES DE LA LIGUE DE QUILLES DUPREX Section f minine L quipe Comptoir Postal a remport le championnat de la saison 1938 39 De gauche droite Mlles Madeleine Christin magasin Marie Anne L tourneau Lucienne Paris Gabrielle Christin capitaine Laurette Beaulne et Fernande DeLachevroti re magasin Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 10 n 4 mai 1939 p 79 D autres articles du Duprex t moignent aussi du fait que les travailleuses sont sportives ou du moins aimeraient l tre En effet selon un extrait du courrier d Ang lique 271 Voir par exemple LD vol 10 n 4 mai 1939 p 79 Cette quipe est c
98. es prouvent envers l tre cher ou encore entreprennent d expliquer en quelques vers la nature de l amour On aime sans rien faire oh non Rien pour cela Parce qu on est pass e alors qu IL tait l Parce qu son sourire tremblait une pri re Et que cet instant l vaut bien la vie enti re On aime vois tu bien parce qu il faut aimer Mais on ne choisit rien ni l heure ni l aim 84 Notons que la po sie du travail n est pas un ph nom ne propre DF d autres travailleurs semblent galement avoir eu le besoin de verbaliser en vers leur condition Si on feuillette notamment la revue Labour Le Travail on constate que certaines ditions consacrent des rubriques la work poetry Par exemple au printemps 1983 quelques pages sont allou es la publication de po mes de travailleurs parmi ceux ci on en retrouve un de Sandra Shreve qui s intitule Telephone Operator Dans Labour Le Travail vol 11 printemps 1983 p 182 Le po me n est pas dat mais peut t moigner d une pratique de l poque s il est vieux comme d une pratique persistante s il est plus r cent 285 Po me de Soupir printanier dans LD vol 1 n 3 d cembre 1926 p 2 6 LD vol 8 n 6 mars avril 1936 p 87 Il s agit de la r plique de Rapha lle Berthe Guertin un employ Maurice Du Berger qui avait crit dans LD de janvier f vrier 1936 un po me romantique visiblem
99. es sexuels traditionnels et st r otyp s homme puissant et viril femme fragile et soumise Du point de vue th orique ce qui est r ellement important de noter c est que la f minit est une construction sociale et historique dont la d finition varie selon les poques les lieux l ge des femmes etc titre d exemple Jill Matthews dans son ouvrage de 1984 sur la construction de la f minit en Australie au XX si cle montre comment la nature f minine n a rien de fixe mais est plut t le produit d une soci t donn e une poque donn e De plus selon elle l id al de f minit est impossible atteindre dans la mesure o il existe une multiplicit d id aux parfois m me contradictoires Pour cette r CE PE 50 auteure la f minit est une coquille vide en attente de se voir attribuer un sens Plusieurs auteurs ont aussi montr que certaines normes associ es la f minit persistent durant la plus grande partie du XX si cle la chastet le mariage l h t rosexualit la maternit la subordination aux hommes etc A titre d exemple Joan Sangster mentionne que jusque dans les ann es 1950 au Canada une vision conservatrice de la f minit li e la domesticit domine encore Durant tout le XX si cle galement on craint que les travailleuses ne perdent leur f minit Selon Ruth Pierson et Bilge 7 James Spradley et Brenda Mann Les bars les
100. esoin de cette information En effet des questions envoy es par des femmes au courrier d Ang lique traduisent le fait que certaines d entre elles prouvent des incertitudes quant la mode ou des difficult s diff rencier ce qui est appropri et respectable de ce qui ne l est pas Par exemple en d cembre 1933 Ginette demande la DA ee 23 courri riste quelle couleur de robe convient une jeune fille de 19 ans Il arrive aussi que Forgues produise des articles sur l volution de la mode c est le cas par exemple en octobre 1946 quand elle d cide de replonger ses lectrices vingt ans en arri re en d crivant les tendances de l ann e 1926 Ce qui retient l attention ici c est qu elle insiste sur le fait que des pratiques jug es d plorables une poque peuvent au fil de temps se g n raliser et tre int gr es la f minit respectable L exemple du maquillage est dans cet article le plus flagrant si son usage tait encore d cri la fin des ann es 19207 l article souligne que vingt ans plus tard en 1946 il s est n ralis gne q g p g HMH 1997 p 16 18 32 La presse f minine et la publicit ont aussi beaucoup d influence sur les femmes selon elle LD vol 8 n 9 janvier 1938 p 122 36 Forgues crit aussi souvent au moins deux fois par ann e des chroniques concernant les tendances de la nouvelle saison 7 LD vol 7 n 6 d cembre
101. et de gagner leur vie certes mais aussi de l agr menter de se divertir au moyen de loisirs organis s par l entreprise et de cr er des liens entre elles travers la culture de travail qu elles y d veloppent ces femmes se cr ent une identit particuli re Nous soulignons aussi que Dupuis Fr res dans un esprit paternaliste encadre de pr s ses employ es et exploite leur culture de travail afin de s assurer de leur loyaut et de maintenir sa bonne r putation aupr s de l opinion publique D autre part nous cherchons prouver que m me si la culture des femmes l emploi de Dupuis au cours de cette p riode est largement influenc e par la domesticit et l id ologie des sph res s par es caract ristiques de la f minit traditionnelle dominante elle int gre n anmoins de plus en plus surtout partir de la Deuxi me Guerre mondiale de nouvelles dimensions plus modernes de la f minit qui ne remplacent pas l id al de la m re m nag re mais qui viennent plut t s y greffer et qui rendent du coup leur identit f minine plus complexe Mots cl s Grands magasins Dupuis Fr res femmes travail salari culture de travail f minit Abstract This study is about the work culture of the women who were employed by Dupuis Fr res a famous Montreal department store between 1920 and 1960 We will focus on the features of this particular type of paid work that is women s work in r
102. etail in Quebec We will also insist on the nature and evolution of that work culture and on the fact that it was influenced during this period by the transformations that occurred in the construction of new forms of respectable femininity First our goal is to show that these Dupuis Fr res women employees didn t work for the sole purpose of earning a living but did also in order to live a more pleasant life to entertain themselves by participating in leisure activities organized by their employer and to create new bonds among themselves With this work culture that they developed these women workers also created themselves a new particular identity We also want to show that Dupuis Fr res with its paternalistic management was controlling its employees and was exploiting their work culture to ensure the employees faith in them and maintain the company s reputation Second we want to prove that even if the work culture of the women working at Dupuis Fr res during that period was influenced by domesticity and the separate spheres ideology features of the dominant traditional femininity it was more and more incorporating mostly from Second World War new dimensions of a more modern femininity that were not replacing the mother housewife ideal but that rather were making their feminine identity more complex Keywords Department stores Dupuis Fr res women paid work work culture femininity iii Table
103. eur vie anniversaires f tes de d part showers ou elles s offrent souvent des pr sents financ s grace aux dons amass s parmi les coll gues de travail Ces manifestations d ailleurs fr quemment soulev es dans l historiographie sont typiques de la culture de travail f minine et sont intimement li s des rites de passage tels que le mariage et la maternit qui marquent le 48 parcours de vie des femmes Chez Dupuis comme ailleurs souligner de tels v nements est important au total entre 1926 et 1960 on d nombre dans Le Duprex pas moins de 235 mots de remerciements pour des cadeaux de noces offerts par la maison ou des coll gues Ces changes de pr sents montrent entre autres que l int gration des femmes au march du travail leur permet de cr er des liens en dehors de leur cercle familial et de donner ces v nements une r sonnance publique beaucoup plus large Le fait que Dupuis leur offre aussi des cadeaux montre par ailleurs qu il se pr occupe de ses employ s Ce geste qui semble en surface g n reux n est toutefois pas d sint ress comme le montre Donica Belisle il s agit d une strat gie paternaliste qui a pour but entre autres de s assurer de la loyaut des employ s et de d velopper parmi eux une mentalit consum riste On peut galement penser que le magasin profite de ces amiti s entre travailleuses dans la mesure o elles augmentent leur productivit En effet
104. exposer la probl matique ainsi que la m thodologie de notre tude il convient de faire un tat des connaissances dans ce domaine plus sp cifique 1 1 3 Les vendeuses La premi re tranche pertinente de l historiographie est celle d di e l tude des vendeuses des grands magasins ce sujet la plupart des auteurs s entendent pour dire que ces commerces repr sentent un univers f minin Susan Porter Benson dans ses nombreuses tudes portant sur le sujet ajoute que les vendeuses poss dent une agentivit c est dire un r el pouvoir sur leurs patrons comme sur les clientes Selon elle cet univers f minin est 38 John Willis Cette manche au syndicat La gr ve chez Dupuis Fr res en 1952 Labour Le Travail vol 57 2006 p 43 91 13 aussi marqu par une culture de travail f minine particuli re comprenant une panoplie de r gles de rituels et de pratiques D autres historiennes lui ont emboit le pas en affirmant tout comme elle que les conditions de travail des vendeuses sont difficiles certes mais qu elles b n ficient d avantages sociaux marginaux Ainsi Sarah Malino en 1982 a montr que pour une jeune fille de la classe ouvri re un tel emploi constitue une opportunit unique et est attirant pour des raisons symboliques surtout pour son c t glamour Porter Benson a ajout en 1986 comment le travail de vendeuse est the cinderella of occupations car malgr ce c t g
105. ext rieur de leur lieu de travail Que ce soit leurs talents particuliers le fait qu elles remportent des concours ou qu elles se d vouent des organismes de charit toutes les raisons semblent valables pour vanter leurs m rites ainsi que leur comportement exemplaire ce qui contribue construire une image positive du magasin aupr s du public En effet si Le Duprex est avant tout destin son personnel la 10 DF participe ce d fil au moins des ann es 1920 au milieu des ann es 1950 Lucia Ferretti Site de l Exposition virtuelle du fonds Dupuis Fr res Limit e Nationalisme en ligne http experience hec ca dupuis_et_freres le magasin du peuple nationalisme page consult e le 8 mars 2012 101 Cela illustre ce qui se passe galement chez Eaton s o selon Belisle la direction fait de la publicit autour du corps de la docilit de la jeunesse et de l ornementalit des employ es Dans Retail Nation p 119 Les femmes sont choisies pour leur beaut tandis que les hommes le sont pour leur prestance et leur m rite au travail Josette Dupuis Leman Dupuis fr res le magasin du peuple Plus d un si cle de fiert qu b coise Montr al Stank 2004 p 149 34 direction en envoie aussi des exemplaires des gens de l ext rieur Le Duprex est lu galement par les pouses des employ s du magasin qui ont la possibilit par la suite de parler en bien de Dupuis Fr res leurs co
106. femmes et la culture des femmes au travail dans un monde d hommes Paris PUF 1979 255 pages 48 Beth L Bailey From Front Porch to Back Seat Courtship in Twentieth Century America Baltimore Johns Hopkins University Press 1988 p 98 Jill J Matthews Good and Mad Women The Historical Construction of Feminity in Twentieth century Australia Sydney G Allen amp Unwin 1984 223 pages 5 Ibid p 7 Sangster Representations and Realities The Shifting Boundaries of Women s Work dans Transforming Labour p 16 52 Ruth Pierson T hey re Still Women After All The Second World War and Canadian Womanhood Toronto McClelland and Stewart 1986 301 pages 16 Yesil c est particuli rement dans le contexte de changement social de la Deuxi me Guerre mondiale que de telles craintes mergent en Am rique du Nord Malgr tout au cours du si cle des transformations se produisent de sorte que selon Mary Louise Roberts d s les ann es 1900 les anciennes notions de la f minit victorienne pi t puret domesticit soumission sont remises en question par les femmes Brigitte Soland dans son tude sur les Danoises des ann es 1910 et 1920 montre galement que la modernit et la culture de masse influencent la construction de la f minit Selon elle de nouveaux standards f minins en lien avec le style le corps le travail et l ind pendance par exemple seront d s lors tablis Les concl
107. ffectuent leur travail long et monotone Selon James Spradley et Brenda Mann qui ont tudi les travailleuses de bar la culture de travail favorise aussi de forts liens d amiti de m me qu une puissante solidarit f minine Pour sa part Leslie Tentler dans son analyse sur le travail industriel aux Etats Unis de 1900 a 1930 voque le fait qu au sein de la culture de travail se forge souvent une discipline avec ses r gles et ses conventions Ainsi selon elle ce type de culture a aussi des effets positifs pour les entreprises puisqu il poss de r gle g n rale un pouvoir d autor gulation et d int gration des employ es Cette id e d autor gulation des travailleurs par la culture de travail a t reprise par de nombreux auteurs par la suite De son c t Louise Lamphere dans une tude portant sur la culture de travail des femmes innove en insistant sur la place pr pond rante que joue la famille au sein de celle ci Pour elle cet aspect monopolise en effet une grande partie des sujets de conversation des travailleuses ce qui selon nous montre leur attachement premier la sph re domestique l inverse dans son ouvrage sur les travailleuses new yorkaises entre 1880 et 1920 Kathy Peiss montre comment celles ci par le biais de leur culture de travail ont su se construire une nouvelle identit de travailleuses distincte de celle des femmes au foyer D autres ont poursuivi sur cette lanc e en
108. filles qui sont son emploi C est notamment le cas lorsqu il choisit les employ es qui d filent lors des parades de mode organis es par la maison En effet partir de 1930 environ Dupuis Fr res organise chaque ann e des soir es conf rences sur la mode destin es tant t au public tant t au personnel Tr s appr ci es ces conf rences mode en plus d instruire le personnel sur les nouvelles tendances saisonni res chose essentielle pour quiconque travaille dans les rayons de la mode comprennent une partie d fil o les mannequins souvent des employ es d voilent l assistance les tenues les plus en vogue du moment Bien entendu un soin particulier est apport au choix des mannequins car celles ci sont toujours tr s belles comme en t moignent les photos de ces v nements Ceux ci font souvent l objet d articles dans la presse populaire Dupuis Fr res s assure ainsi d une autre forme de publicit peu co teuse qui plus est Quant aux employ es mannequins elles en tirent aussi profit puisqu elles trouvent l exp rience plaisante et valorisante En effet elles semblent aimer participer ce genre d v nement glamour m me si comme le note Donica Belisle s ee i 99 ce dernier promeut l id e que les femmes sont tributaires de leur apparence Belisle A Labour Force for the Consumer Century Commodification in Canada s Largest Department Stores 1890 to 1940 Labour Le Trava
109. ges Sangster Joan Earning Respect The Lives of Working Women in Small Town Ontario 1920 1960 Toronto UTP 1995 356 pages Santink Joy L Timothy Eaton and the Rise of his Department Store Toronto UTP 1990 319 pages Soland Brigitte Becoming Modern Young Women and the Reconstruction of Womanhood in the 1920s Princeton Princeton University Press 2000 249 pages 110 Spradley James et Brenda Mann Les bars les femmes et la culture Des femmes au travail dans un monde d hommes Paris PUF 1979 255 pages Strom Sharon Hartman Beyond the Typewriter Gender Class and the Origins of Modern American Office Work 1900 1930 Urbana University of Illinois Press 1992 427 pages Strong Boag Veronica The New Day Recalled Lives of Girls and Women in English Canada 1919 1939 Markham Penguin Books 1988 233 pages Tentler Leslie Wage earning Women Industrial Work and Family Life in the United States 1900 1930 New York Oxford University Press 1979 266 pages Theriot Nancy M The Biosocial Construction of Femininity Mothers and Daughters in Nineteenth century America New York Greenwood Press 1988 168 pages Warren Jean Philippe Hourra pour Santa Claus La commercialisation de la saison des f tes au Qu bec 1885 1915 Montr al Bor al 2006 301 pages Watson Elwood et Darcy Martin sous la dir de There She Is Miss America The Politics of Sex Beauty and Race in America s Most Fam
110. hie de genres en place voulant que les hommes soient sup rieurs aux femmes Au contraire elles semblent la plupart du temps respecter cet ordre des choses et adoptent une attitude en accord avec les r les traditionnels genr s Par exemple sur le plan de leur implication au travail on peut constater que les femmes ne tentent gu re de prendre leur place au m me titre que leurs coll gues masculins elles comptent toujours en moins grand nombre que les hommes quand il s agit de former les comit s d organisation des activit s sociales restant souvent confin es des t ches de soutien Selon Ruth Pierson qui a tudi la participation des Canadiennes la guerre de 1939 1945 la f minit est en effet 229 associ e en g n ral des r les de second plan En outre une citation tr s vocatrice au sujet de la soumission des femmes l poque se trouve dans l entrevue d une ancienne employ e glantine Richer r alis e en 1982 Lorsque l intervieweur la questionne par rapport la condition des femmes l poque elle r torque Ah Il n y en avait pas Aujourd hui c est la femme libre qu ils appelle nt sic Dans ce temps l il n tait pas 230 question de a N anmoins la soumission des femmes aux hommes m me si elle demeure tout au long de la p riode l tude est moins manifeste dans Le Duprex apr s 1945 Notons que selon Mary Louise Roberts au fi
111. ian ailles entre employ s de naissances de d c s de liens de parent et de remerciements pour cadeaux divers Cette analyse quantitative a donc parfois servi de support notre tude essentiellement qualitative Elle a entre autres permis de mieux assoir nos affirmations au sujet de l importance de l univers domestique dans la culture du travail des femmes Chapitre 2 Dupuis Fr res et ses employ es Dupuis Fr res symbolise l histoire du commerce francophone dans l est de la ville de Montr al C est galement l histoire de centaines d employ s hommes et femmes qui pendant pr s de 110 ans s y sont relay s diff rents postes que ce soit dans la vente le travail de bureau la direction ou autres Ce sont des travailleuses et des travailleurs qui ont parfois pass de nombreuses ann es de leur vie a y ceuvrer accomplissant un travail exigeant et d veloppant des liens particuliers avec leurs coll gues leurs patrons et leurs clients Dans ce chapitre nous dresserons essentiellement a partir du Duprex un portrait des employ es de Dupuis Fr res entre 1920 et 1960 et nous aborderons leur vie socioculturelle ainsi que leurs loisirs Nous constaterons qu en plus d tre leur gagne pain leur emploi chez Dupuis devient un pilier central de leur existence un moyen de rencontrer des gens et une opportunit de se divertir autrement qu au travers des structures familiales ou paroissiales Ce faisant nous
112. ier cet aspect incontournable de l histoire des femmes Voir notamment Diane B lisle et Yolande Pinard De l ouvrage des femmes qu b coises dans Louise Vandelac ef al Du travail et de l amour Les dessous de la production domestique Montr al Saint Martin 1985 p 99 133 V ronica Strong Boag Keeping House in God s Country Canadian Women at Work in the Home dans Craig Heron et Robert Storey sous la dir de On the Job Confronting the Labor Process in Canada Montr al McGill Queen s University Press 1986 p 124 151 Denise Lemieux et Lucie Mercier Les femmes au tournant du si cle 1880 1940 Ages de la vie maternit et quotidien Qu bec IQRC 1989 398 pages Denyse Baillargeon M nag res au temps de la crise Montr al ditions du Remue m nage 1991 311 pages Bettina Bradbury Familles ouvri res Montr al Age genre et survie quotidienne pendant la phase d industrialisation Montr al Bor al 1995 368 pages Selon l Encyclop die Canadienne le travail domestique comprend toutes les t ches non r mun r es accomplies dans un m nage M Eichler Site de L Encyclop die Canadienne Travail domestique en ligne http www thecanadianencyclopedia com articles fr travail domestique page consult e le 31 janvier 2012 18 Brigitte Seland Becoming Modern Young Women and the Reconstruction of Womanhood in the 1920s Princeton Princeton University Press 2000 p 147 64 Mercantila
113. il vol 58 2006 p 110 et 142 Belisle Retail Nation p 120 33 Dans la m me veine un autre v nement annuel incontournable chez Dupuis Fr res est sa participation au d fil de la Saint Jean Baptiste Chaque ann e certains responsables du magasin et du syndicat con oivent un char all gorique grandiose illustrant un th me diff rent par exemple Ali Baba en 1929 ou Le visage du Canada Fran ais sic en 1956 Le 24 juin les dirigeants et quelques dizaines d employ s masculins du magasin d filent aupr s dudit char lors de la traditionnelle parade Les seules femmes qui peuvent y participer sont celles qui ont la chance d incarner un personnage faisant partie du th me du char all gorique Costum es celles ci sont encore une fois toujours jeunes et jolies Bien qu elles semblent heureuses de se voir accorder un tel privil ge elles font ainsi la promotion du magasin de mani re sexiste et st r otyp e De plus leur participation passive accentue la division sexuelle des r les parmi les employ s de Dupuis Fr res les femmes tant rel gu es celui de figurantes tandis que leurs saik 102 coll gues masculins participent part enti re la parade Outre leur apparence la culture ainsi que les activit s et les r seaux des employ es sont eux aussi utilis s par Dupuis Ainsi il arrive fr quemment que Le Duprex fasse tat des succ s qu elles connaissent l
114. il domestique en ligne http www thecanadianencyclopedia com articles fr travail domestique page consult e le 31 janvier 2012 Huet Pierre et Michel Rivard 23 d cembre Beau Dommage Anthologie EMI Music Canada 724352394029 1999 115 Versailles Claire Site de L Encyclop die Canadienne La Bolduc en ligne http www thecanadianencyclopedia com articles fr la bolduc page consult e le 9 mars 2012
115. illeurs catholiques du Canada DF Dupuis Fr res FNSJB F d ration nationale Saint Jean Baptiste LD Le Duprex ODOD Ordre des optimistes Dupuis SSJB Soci t Saint Jean Baptiste vil Chez Dupuis vous pouvez voir Mieux que partout ailleurs Chez Dupuis matin au soir Les commis les meilleurs Chez Dupuis court un slogan Accueil dans la gaiet Chez Dupuis l ann e durant Rayonne l amiti Extrait du Chant de l amiti viii Remerciements J aimerais d abord remercier le CRSH et le FQRSC pour leur soutien financier Je veux aussi remercier ma directrice de ma trise Mme Denyse Baillargeon qui m a grandement aid e durant les deux derni res ann es dans la r alisation de mon m moire Ses commentaires pertinents et sa disponibilit m ont toujours t fort utiles Merci galement au personnel du service des archives de HEC Montr al en particulier Mme Val rie D Amour pour son accueil son int r t et sa g n rosit Je tiens aussi souligner la collaboration d Yves Lacroix des archives de la CSN Merci ma famille qui a toujours t pr sente pour moi mon fr re Marc Andr ainsi qu mes parents Luc et Martine pour leur soutien et pour m avoir toujours encourag e dans tout ce que j ai entrepris Merci galement mes amis qui m ont t essentiels surtout pour me divertir lorsque j en avais besoin Je remercie ainsi particuli rement Ovila qui a rendu m
116. ipaient sa r daction d s 1927 il contient habituellement une page f minine ou au moins quelques rubriques crites par des femmes de m me que sur leur vie leur culture particuli re et sur l esprit g n ral de l entreprise Dupuis Fr res On compte au total 190 num ros du Duprex entre 1926 et 1960 Publi au d part mensuellement ses ditions vont graduellement s espacer pour para tre ensuite sur une base bimensuelle ou saisonni re Il faut aussi mentionner que le journal interne est largement contr l par le syndicat dont les 23 dirigeants en 1926 font aussi partie de la direction de l entreprise Il faut donc a la lecture du Duprex faire preuve de discernement sa vision en est une grandement aseptis e et peu critique quant au milieu de travail Ainsi bien qu il incorpore les opinions des employ s le lecteur doit garder en t te le contexte de production de cette source Finalement nous avons galement puis certaines informations dans les archives de la CSN En effet celles ci rassemblent des documents sur Dupuis Fr res puisque l entreprise tait jadis affili e la CTCC son anc tre Nous avons donc consult plusieurs ditions du journal du syndicat Le Travail pour tenter d en apprendre plus sur la participation des femmes la gr ve de 1952 Dans notre d pouillement nous avons limit nos recherches aux ditions publi es cette ann e l 1 2 3 M thodologie En ce qui a tra
117. iqu e dans son milieu elle devient galement membre du conseil d administration du magasin dans les ann es 1970 Val rie D Amour Site de Exposition virtuelle du fonds DFL Dupuis pour elle en ligne http experience hec ca dupuis et_freres travailler chez dupuis dupuis pour elle page consult e le 13 f vrier 2012 53 2 2 4 Les autres travailleuses Dupuis Fr res embauche finalement dans une moindre mesure un certain nombre de travailleuses manuelles ou sp cialis es Tr s peu d informations leur sujet ayant surv cu il n est pas possible d en dresser un portrait tr s exhaustif Un organigramme datant de 1946 quoiqu incomplet nous renseigne sur la vari t des emplois qui s offrent a 161 elles Parmi ceux ci notons ceux de laveuse emballeuse tiqueteuse finisseuse caissi re op ratrice et v rificatrice l ajustement Leur d finition trop succincte dans ce document ne nous permet pas d en savoir plus sur leur nature pr cise Par contre il nous apprend qu en 1946 pr s d une vingtaine de femmes sont galement embauch es par Dupuis Fr res titre de couturi res L entreprise en embauchait d j en 1937 puisqu un article du Duprex intitul Nos gentilles midinettes leur est d di Tr s br ve cette rubrique souligne n anmoins l existence d une salle de couture o des employ es confectionnent des produits destin s tre vendus au rayon du clerg
118. it la m thodologie il faut tout d abord mentionner que notre tude se limitera l analyse des ann es comprises entre 1920 et 1960 Ce choix m thodologique s explique ais ment Tout d abord il s agit de la p riode qui semble repr senter l ge d or de l entreprise en ce qui concerne la vitalit de la culture de ses employ s De plus ces dates correspondent sensiblement aux ann es de publication du Duprex 1926 1960 qui offre une mine de renseignements permettant de reconstituer la culture de travail des employ es Son d pouillement a donc t effectu de mani re syst matique c est dire que nous avons enti rement analys les 190 num ros publi s de 1926 1960 Pour ce qui est des autres sources du fonds Dupuis Fr res les s ries et sous s ries susmentionn es ont elles aussi t d pouill es de fa on syst matique Par ailleurs nous avons privil gi pour mener bien notre tude une m thode ax e avant tout sur l analyse de contenu En effet les sources d pouill es contenant la fois des 24 l ments textuels et iconographiques ont t soumises une rigoureuse analyse Cette approche qui consiste analyser en profondeur les param tres contenus dans un document a pour but d en r v ler le sens r el Parfois manifeste il arrive aussi que le v ritable message d un document soit latent ce qui demande au chercheur d tre alerte et de bien analyser ses sources
119. journal d employ s en Am rique du Nord comme tant le 7rip Hammer de la Massey Manufacturing Company paru d s le milieu des ann es 1880 Toronto Le Duprex s av re pour les dirigeants du magasin un outil de gestion de choix En effet il s agit d un moyen facile de rejoindre les employ s de fa on efficace et de faire passer des id es ou des messages importants qui s adressent l ensemble du personnel tant donn sa popularit il ne fait aucun doute que l information se transmet rapidement une fois le journal paru D ailleurs dans l dition originale du Duprex en octobre 1926 la r daction exprime clairement sa mission Il sera le lien qui unira en un tout homog ne les diff rentes parties de la grande organisation DUPUIS Patrons et employ s y expliqueront librement leurs vues et une entente encore plus troite en r sultera En comparant Le 75 Claudine Drolet Shawiniganaises et travailleuses Les employ es de bureau de la Shawinigan Water and Power 1945 1963 m moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2010 p 109 Donica Belisle abonde dans le m me sens dans Retail Nation Department Stores and the Making of Modern Canada Vancouver UBC Press 2010 p 91 Il sera question du paternalisme un peu plus loin 7 Belisle p 91 77 Jean Duberger et Jacques Mathieu sous la dir de Les ouvri res de Dominion Corset Qu bec 1886 1988 Sainte Foy PUL 1
120. jours au travail Andr revient au magasin avec son p re et demande la main de Jeanne vol 4 n 9 juin 1930 p 115 21 Lise Chamberland souligne cette tendance dans son m moire de ma trise Dans le corpus qu elle a analys sur un total de neuf nouvelles ayant pour th me les rencontres le seul mod le mis de l avant est celui du mariage celui ci est pr sent comme la seule option r aliste et d sirable Dans La Revue moderne 76 Le mariage est galement id alis dans les articles sp ciaux qui paraissent l occasion dans Le Duprex pour souligner les noces de membres de la famille Dupuis Lorsque de tels mariages ont lieu le journal de l entreprise ne manque pas l occasion de publier un long article accompagn de photos dans lequel un chroniqueur d peint le caract re grandiose de la c l bration C est notamment le cas en novembre 1934 quand plusieurs pages sont d di es l union de la fille d Albert Dupuis Th r se avec Daniel De Yturralde la robe de la mari e y est d crite en d tails tout comme les tenues des 222 demoiselles d honneur les d corations les fleurs etc Il ne fait aucun doute que de tels articles ont eux aussi contribu entretenir chez les employ es une fascination pour les mariages glamour Ces chroniques leur ont sans doute permis de ressentir par procuration l esprit d une grande noce comme dans les films Chrys Ingraham mentionne d ailleur
121. l 4 n 10 juillet 1930 p 128 Dans son ouvrage bas sur des entrevues qu elle a r alis es aupr s de femmes qui ont v cu la crise conomique des ann es 1930 Baillargeon montre que certaines d entre elles ne se sentaient effectivement pas pr tes tenir maison car avant de se marier elles occupaient un travail salari Dans M nag res au temps de la crise p 68 193 LD vol 2 n 8 mai 1928 p 6 66 maternit semblent encore dans la premi re moiti du XX si cle repr senter le destin in luctable des femmes Selon toutes apparences une vaste majorit des employ es de Dupuis y aspire m me si cela signifie quitter son emploi du moins durant les ann es n cessaires l ducation des enfants car comme le montre Sangster encore dans les ann es 1950 une femme qui travaille en m me temps qu elle duque de jeunes enfants est 195 Louise valorise d ailleurs le r le de m re dans ses articles En mars 1930 tr s mal vue par exemple elle mentionne que la femme de par la volont divine a une mission remplir sur terre et qu elle doit tant jeune s rieusement se pr parer accomplir correctement son r le d pouse et de m re en accordant au moins deux soirs par semaine l tude des sciences m nag res ses yeux les r les de m re et de m nag re vont de pair et sont capitaux pour les femmes Le Duprex en publiant ses articles semble lui aussi vouloir r
122. l du XX si cle les anciennes normes de la f minit dominante notamment la soumission sont de plus en plus remises en question z KAA 231 sous l impact des changements sociaux qui s acc l rent immense dans le c ur de tous Dossier Correspondance entre les employ s et la direction 1968 1978 28 janvier 1968 28 Dossier Organisation de la c l bration du 75e anniversaire 1943 Banquet 1 f vrier 1943 Les membres du comit d organisation mobilis pour ce banquet sont pratiquement tous des hommes il n y a que quelques femmes au secr tariat et aux costumes Celles ci occupent galement des r les de soutien lors des parades de la St Jean Baptiste comme cela a t mentionn au chapitre pr c dent Ruth Pierson They re Still Women After All The Second World War and Canadian Womanhood Toronto McClelland and Stewart 1986 p 162 Dossier M moires d une poque p 19 2 Mary Louise Roberts True Womanhood Revisited Journal of Women s History vol 14 n 1 2002 p 150 155 79 3 2 Apparition de nouvelles formes de f minit Graduellement au cours de la p riode a l tude d autres attributs li s la f minit prennent une place grandissante dans la culture populaire notamment l importance de l apparence physique et de la beaut Comme le montre l tude du Duprex la culture du travail des employ es de Dupuis int gre ces nouvelles dimension
123. lace les bases de notre tude Nous tablirons d abord un bref historique des grands magasins et de l entreprise Dupuis Fr res avant de proc der une revue historiographique des connaissances sur le th me des vendeuses du commerce au d tail de la f minit ainsi que de la culture de travail f minine Nous pr senterons ensuite notre probl matique nos sources de m me que notre m thodologie Le chapitre deux sera consacr la pr sentation de l entreprise et de ses employ es entre 1920 et 1960 D une part nous tenterons de dresser un portrait des moyens de gestion et des valeurs v hicul es par la direction de Dupuis Fr res D autre part nous nous attarderons aux employ es elles m mes ge statut civil origines sociales etc mais surtout leur vie socioculturelle et aux loisirs qu elles pratiquaient dans le cadre de leur emploi chez Dupuis et m me au dehors Ce faisant il s agira de montrer que la gestion paternaliste de Dupuis Fr res se nourrissait de la culture de travail de ses employ es dont elle favorisait par ailleurs l expression Finalement dans le chapitre trois nous tenterons de pousser un peu plus loin notre analyse en montrant les liens qui unissent la culture de travail des employ es de Dupuis entre 1920 et 1960 et l volution des normes de f minit acceptables la m me poque Cette partie de la recherche s int ressera d abord aux formes de f minit qui persistent da
124. lamour celles ci restent le plus souvent 42 confin es dans la pauvret Malgr leur faible statut qui les situe au bas de l chelle les vendeuses et leur apparence sont importantes pour les magasins elles en sont les repr sentantes si bien que leur r putation d pend presque enti rement d elles Porter Benson l a d montr tout comme Belisle en 2006 qui a aussi fait voir comment Eaton s faisait de la publicit autour de la respectabilit de ses vendeuses afin de bien para tre dans l opinion publique De fait pratiquement tous les auteurs mentionnent comment les grands magasins ont consacr de plus en plus d nergie a former leurs vendeuses afin d am liorer leur apparence leurs comportements et leurs comp tences et ce l aide de programmes d entrainement de mesures paternalistes et du welfare work A titre d exemple Susan Forbes dans sa th se de 3 Joan Sangster Souriez pour les clients Retail Work Dupuis Fr res and Union Protest dans Transforming Labour Woman and Work in Post War Canada Toronto UTP 2010 p 108 144 Porter Benson The Clerking Sisterhood Rationalization and the Work Culture of Saleswomen in American Department Stores 1890 1960 Radical America vol 12 n 2 1978 p 41 55 The Cinderella of Occupations Managing the Work of Department Store Saleswomen 1900 1940 Business History Review vol 55 n 1 1981 p 1 25 Customers ain
125. le le mariage est en quelque sorte la pierre d assise de la f minit Pour les employ es de Dupuis Fr res tout comme pour une majorit de Canadiennes le mariage semble effectivement de 1920 1960 une norme sociale laquelle elles veulent se conformer Jusqu a la Deuxi me Guerre mondiale dans les classes les moins ais es de la soci t le mariage constitue avant tout une union conomique entre l homme et la femme en raison de leur interd pendance l homme fournit le salaire n cessaire la survie de sa conjointe et de ses enfants tandis que cette derni re procure le travail domestique essentiel au noyau familial M me si de plus en plus avec l apparition de la culture de masse le mod le plus romantique du mariage de compagnonnage merge il n en reste pas moins que l institution du mariage en soi est toujours per ue comme primordiale et que l id e de la compl mentarit des r les des poux perdure La plupart du temps les gens se marient avec leurs semblables c est dire des gens de m me ethnie classe et religion Il faut aussi mentionner que les femmes se marient assez t t quoique l ge f minin moyen au mariage tende augmenter jusqu la Deuxi me Guerre mondiale avant de redescendre par la 206 suite En outre il repr sente un v nement important de la vie des femmes durant 203 Jill J Matthews p 112 7 Sgland montre que les Danoises des ann es 1920 aspire
126. le ci contient des programmes de r ceptions des paroles de chansons compos es par les employ s des factures et re us d activit s organis es par les employ s des invitations etc Dans le m me ordre d id es au sein de la s rie P049 G concernant les communications la sous s rie GS relate pour la p riode allant de 1907 1976 la tenue d v nements sp ciaux organis s chez Dupuis comme des anniversaires des inaugurations et des r ceptions parfois organis s par les employ s en l honneur des dirigeants On y retrouve galement des discours invitations programmes coupures de journaux factures et timbres comm moratifs D autres parties du fonds ont t utilis es notamment la s rie P049 A qui se penche sur l administration g n rale en particulier la sous s rie A3 sur l historique de l entreprise la sous s rie P049 C7C concernant les salaires P049 G1 qui rassemble les communications internes P049 G6 qui contient des spicil ges P049 W5 o sont concentr s les manuels d employ s et finalement P049 XPH pour les photographies Il ne faut pas oublier de mentionner une derni re sous s rie qui a t capitale pour notre tude Il s agit de la sous s rie P049 W2 qui renferme l int gralit du journal d entreprise Le Duprex publi pour les employ s avec l troite collaboration du syndicat Cette publication pr sente une mine tonnante de renseignements sur les employ es qui partic
127. leur comportement autant que dans leurs rapports avec les hommes coll gues ou patrons les employ es r gle g n rale ne remettent pas en question la 24 Donica Belisle Retail Nation Department Stores and the Making of Modern Canada Vancouver UBC Press 2010 p 192 Selon elle aussi les grands magasins renforcent volontairement les hi rarchies sexuelles entre autres car ils en tirent un avantage conomique Dans Negotiating Paternalism Women and Canada s Largest Department Stores 1890 1960 Journal of Women s History vol 19 n 1 2007 p 61 gt Sangster The Softball Solution Female Workers Male Managers and the Operation of Paternalism at Westclox 1923 60 Labour Le Travail vol 32 1993 p 167 200 C est pour cette raison que Kathy Peiss mentionne que m me si la culture de travail peut tre synonyme d autonomie et de plaisir elle reste en m me temps en quelque sorte la source de leur oppression au travail Dans Cheap Amusements Working Women and Leisure in Turn of the century New York Philadelphie Temple University Press 1986 p 6 7 Dossier 75 anniversaire de DF Banquet 1943 Discours d Albert Dupuis 28 mars 1943 Extrait 227 En 1968 une employ e Yvonne Vaillancourt crit au pr sident Marc Carri re une lettre tr s logieuse Vous tes l homme le plus extraordinaire qu il m ait t donn de rencontrer vous tenez une place 78 hi rarc
128. ls du pr sident de l poque et son futur successeur prononce un discours sur le th me Les institutions dans lequel il affirme que l glise repr sente la premi re et la plus importante des institutions La famille La famille est une autre valeur tr s importante pour les Dupuis Outre la promotion du caract re familial de l entreprise Dupuis Fr res promeut la famille canadienne fran aise et pr tend la prot ger Par exemple la convention collective de travail de 1958 article 27C stipule de mani re particuli rement sexiste que dans le cas d une mise pied si deux employ s ont une exp rience quivalente l avantage est donn celui qui entretient une famille c est dire un homme la plupart du temps En outre dans tout Le Duprex nous En 1948 le 4 p lerinage annuel a lieu le dimanche 17 octobre et rassemble pr s de 300 personnes LD vol 13 n 9 novembre 1948 p 319 130 Dossier Jubil de progr s 70e anniversaire Banquet 1938 Me Raymond Dupuis avocat directeur et assistant secr taire tr sorier DFL discours de sant BI Dossier Convention collective du 26 septembre 1958 1958 1961 Convention collective de travail p 20 Selon Sangster les paiements attribu s aux employ s dans le cadre des welfare programs renforcent galement le mod le de l homme pourvoyeur car ils sont d termin s selon le genre Dans Souriez pour les clients p
129. lus pratiques pour les femmes qui pratiquent des sports d hiver Les propos de cet auteur montrent qu au milieu des ann es 1930 m me si certaines telles que Pierrette prouvent encore des craintes par rapport a leur participation des sports d autres au contraire semblent avoir un mode de vie r ellement actif C est du moins le cas de Juliette Du Paul dont Le Duprex relate au moins six reprises entre 1937 et 1948 les exploits sportifs lors de divers tournois amateurs de tennis et de tennis sur table au magasin ou l ext rieur Bref l ensemble des activit s sportives offertes aux employ es montre une certaine ouverture de la part de Dupuis face la participation des femmes aux sports un ph nom ne qui comme le mentionne Detellier a rencontr sa part de r sistance dans la soci t qu b coise Mais on constate galement que l entreprise a longtemps favoris la 77 Sangster The Softball Solution p 192 273 LD vol 7 n 6 d cembre 1933 p 87 77 Detellier Bonifier le capital p 492 493 92 s gr gation des sexes du moins en ce qui concerne les quilles une mani re peut tre d viter que leur f minit soit trop directement remise en question N anmoins puisqu ils sont pr sents d s la fin des ann es 1920 les sports f minins chez Dupuis montrent que les femmes transgressent dans leur culture de travail les discours des lites conservatrices signalon
130. me beau instruit et riche Ang lique d crit ainsi le fantasme typique de la vendeuse ce qu avait aussi fait Zola auparavant dans son roman 3 2 3 Pouvoir et mancipation Selon Soland graduellement d s les ann es 1920 les femmes adoptent de nouveaux comportements et mentalit s l nergie le travail salari et l ind pendance sont int gr s la d finition de la f minit moderne Dans la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res cela se traduit une vingtaine d ann es plus tard par une prise de conscience de leur pouvoir ainsi qu un d sir d mancipation vis vis leur employeur En effet selon Donica Belisle il arrive que les employ es de grands magasins r agissent individuellement ou collectivement aux conditions de travail d plorables dans lesquelles elles vivent Chez Dupuis cela s incarne dans le militantisme des femmes au sein du syndicat fond en 1919 grandement inspir du magasin Au Bon March d Aristide Boucicaut Sophie Guerm s Pr face Le po me de l activit moderne dans mile Zola Au Bonheur des Dames Paris Fasquelle 1998 p 5 42 5 LD vol 4 n 7 avril 1930 p 86 87 Ang lique d peint effectivement de fa on idyllique la vie des vendeuses chez DF a t elle re u des commandes ou directives de la part de ses patrons Faisait elle elle m me partie de la direction Dans la mesure o elle reste anonyme il est difficile de l
131. mentionn s sont beaucoup plus souvent accompagn s du titre Mlle que Mme Cela pourrait signifier que celles qui participent aux activit s organis es par le magasin sont des femmes jeunes et ou c libataires plut t que des femmes mari es et m res 68 Les comp titions culinaires ou de couture organis es par Dupuis Fr res soulignent elles aussi le caract re fondamental du travail domestique des femmes Certes elles permettent aux femmes d exprimer leur identit et leur offrent une occasion d tre c l br es pour leurs talents particuliers l ext rieur du cadre familial mais elles les confinent n anmoins au mod le f minin dominant de la m nag re En organisant ces concours l entreprise valorise le mod le de la femme au foyer car il promeut l id e qu il est naturel pour les employ es d avoir des aptitudes particuli res en lien avec ce r le Les concours d habilet s culinaires ou autres sont d ailleurs populaires aupr s des femmes qui rappelons le consid rent elles aussi que les t ches domestiques rel vent de leur expertise Peut tre que l espoir de gagner un prix vient aussi r pondre un besoin de reconnaissance rarement combl dans leur quotidien au travail et la maison Les seize femmes qui ont particip au concours de g teaux de l AAAD en 1948 ont sans doute pu combler ce besoin 200 Tl est int ressant car leurs exploits sont soulign s dans l dition de novembre du
132. motion du magasin ce qui leur envoie le message que la beaut est importante pour r ussir ou tre promues ILLUSTRATION 3 3 Tenue de vacances d une employ e Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 9 n 12 vacances 1938 p 267 Dans des articles du journal d entreprise la minceur est aussi mise de l avant Selon lise Dubuc avec l av nement de la soci t de consommation contemporaine appara t le culte du corps mince si bien que pour beaucoup de femmes le recours au corset demeure n cessaire Ainsi par exemple Claire Gari py affirme dans Le Duprex de d cembre 1948 que le corset est devenu plus que jamais indispensable la femme moderne Quelques ann es auparavant en f vrier 1941 un autre article valorise d j lui aussi la 256 lise Dubuc La rectitude corporelle ou l int gration des contraintes L exemple du corset le v tement qui fait corps Bulletin d histoire politique vol 10 n 2 2002 p 72 83 7 LD vol 13 n 10 d cembre 1948 p 369 86 minceur pour expliquer aux vendeuses les comportements a adopter dans diverses situations le journal fait para tre des instructions sous forme d illustrations dans lesquelles l employ e est d une extr me maigreur ce qui peut laisser croire aux lectrices qu elles ee doivent se conformer ce standard physique Dupuis met galement de l ava
133. mploy es de Dupuis d fient certaines normes li es la f minit respectable telle que d finie par l glise peut tre pas dans leur vie quotidienne mais du moins durant leurs vacances dans un contexte o moins supervis es elles se sentent probablement plus libres La direction de Dupuis Fr res valorise elle aussi la culture de la beaut aupr s de ses employ es et ce de plusieurs fa ons D abord comme cela a d j t mentionn elle 253 1 semble que lorsqu il est question des loisirs que les employ es pratiquent l ext rieur notamment lors de leurs vacances DF est plus ouvert ou du moins ne se prononce pas concernant les v tements qu elles portent En effet comme cela a t mentionn au chapitre pr c dent s il ne tol re pas les tenues jug es trop os es lors des activit s qu il organise jusque dans les ann es 1960 le magasin permet que des photos sur lesquelles les employ es d voilent leur corps soient publi es dans LD Elise Detellier Bonifier le capital humain Le genre dans le discours m dical et religieux sur les sports au Qu bec 1920 1950 RHAF vol 62 n 3 4 2009 p 496 497 255 Tl arrive aux employ es de DF de contrevenir d autres normes d finissant la f minit respectable On peut penser notamment la consommation de tabac Il semble en effet que l usage du tabac par les femmes est tol r chez DF d s les ann es 1930 puisqu en 1931
134. n 1 f vrier 1941 p 12 13 Selon Marchand l id al de la femme mince et lanc e apparait entre 1920 et 1939 La minceur de plus en plus apparente dans le domaine de la haute couture parisienne devient aussi un symbole de prestige social Dans les revues f minines et l occasion dans LD on sugg re aux lectrices des moyens pour devenir ou para tre minces Dans Rouge l vres et pantalon p 51 54 Elwood Watson et Darcy Martin sous la dir de There She Is Miss America The Politics of Sex Beauty and Race in America s Most Famous Pageant New York Palgrave Macmillan 2004 205 pages Val rie Korinek Mrs Chatelaine vs Mrs Slob Contestants Correspondents and the Chatelaine Community in Action 1961 1969 Journal of the Canadian Historical Association vol 7 n 1 p 251 275 87 r 261 X n est pas menac e Ainsi bien que ce soient des ph nom nes modernes ils restent pr s des conceptions traditionnelles de la f minit Chez Dupuis les concours de beaut prennent toutefois une forme diff rente Bien que des parades de mode soient souvent organis es au magasin ce n est pas lors de tels v nements que des reines de beaut sont couronn es mais plut t l occasion d exp ditions sportives o est lue une reine des sports En effet quelques reprises lors d excursions de ski tenues vers la fin des ann es 1940 et dans les a
135. nn es 1950 les employ s lisent une de leurs coll gues ce titre Rien ne souligne explicitement quels crit res sont utilis s pour valuer les candidates mais en observant les photos des gagnantes on ne peut douter du fait qu il s agit d un concours de beaut la reine est 263 toujours en effet une tr s jeune et jolie femme Parmi les reines dont le nom est mentionn dans Le Duprex notons celui de Lise Desmarais en 1948 et de Marthe Fleury en 1954 4 Nous n avons pu trouver de traces dans les archives concernant la signification de ces concours pour les participantes Ce qui est n anmoins s r c est que Dupuis s est conform la tendance de l poque peut tre cherchait il comme d autres entreprises montrer la f minit de ses employ es 26l Sangster Queen of the Picket Line p 83 106 LD mentionne galement une fois la tenue d un concours de pin up c est dire un concours de beaut sous forme de photos Voir LD vol 5 n 8 mai 1931 p 90 D autres l ments nous laissent croire que le crit re de la beaut physique est le plus important dans l lection de la reine En effet les employ s votent pour leur candidate favorite dans le train avant m me leur arriv e sur les lieux de l excursion de ski ce qui montre qu elles ne sont pas valu es selon leurs performances sportives De plus un article de LD mentionne qu au moment du vote les c
136. nnaissances L entreprise a donc tout int r t faire valoir la moralit de ses travailleuses travers son journal A nsi par exemple en septembre 1936 celui ci vante les qualit s de deux d entre elles qui ont remport des prix importants en participant des concours prestigieux qui mettaient en pr sence des concurrents de centaines d autres magasins Dupuis Fr res a galement tendance se servir des talents naturels de ses employ es notamment pour sauver de l argent Par exemple tout au long de la p riode lorsqu un programme musical est pr vu pour divertir les invit s lors de r ceptions organis es par le grand magasin il arrive que la direction 104 demande une ou plusieurs employ es talentueuses de chanter Tout le monde semble y trouver son compte Dupuis n a pas a engager de professionnels et les participantes consid rent comme un agr able privil ge le fait de pouvoir d ployer leurs talents devant de telles audiences On peut par contre se demander si ces employ es b n ficient d un cachet pour les services rendus Dupuis Fr res tire galement profit des r seaux de ses employ es qu il s agisse de r seaux de connaissances ou familiaux Ainsi de nombreuses reprises par le biais du Duprex ou par celui de communiqu s officiels la direction incite le personnel pratiquer un type de publicit peu co teux et particuli rement efficace le bouche oreille En transmet
137. ns la culture de travail f minine chez Dupuis durant toute la p riode l tude Dans un deuxi me temps il sera question des nouvelles normes de f minit propos es aux femmes qui travaillent dans ce magasin surtout partir de la Deuxi me Guerre mondiale Nous verrons ainsi comment ces nouvelles composantes sans se substituer au mod le toujours dominant en 1960 de la m re m nag re viennent s ajouter aux premi res complexifiant la d finition de la f minit En somme cette recherche a pour but de faire avancer les connaissances dans le domaine de l histoire de la consommation et des grands magasins Nous esp rons contribuer enrichir l histoire des femmes du Qu bec au XX si cle et plus forte raison l histoire des travailleuses des classes ouvri res montr alaises Chapitre 1 Bilan historiographique probl matique sources et m thodologie 1 1 Bilan historiographique Afin de bien asseoir les bases de notre recherche ce chapitre servira la mettre en contexte et en dresser les principales orientations D une part nous commencerons par traiter de l historiographie pertinente sa r alisation Nous nous pencherons sur l historique des grands magasins et de Dupuis Fr res tout en laborant bri vement sur les th ses que diff rents historiens ont nonc es ce sujet D autres travaux pertinents notamment ceux qui se sont pench s sur les th mes des vendeuses de grands magasins
138. ns doute indirectement r f rence l achat chez nous mais aussi au nationalisme en g n ral ainsi qu la qualit des produits et services offerts par l entreprise 112 LD vol 1 n 6 mars 1927 p 2 et vol 10 n 12 d cembre 1940 p 268 1B Dossier 75e anniversaire de DFL Liste d invit s 1943 Cartons d invitation listes d invit s et r ponses de ceux ci 114 Ang lique ne mentionne jamais son identit on ne sait donc pas s il s agit d une simple employ e ou d un membre de la direction Sans n cessairement que tous ses articles soient command s il est toutefois possible de penser que cette derni re tait pr s de la direction cause de son attitude de d f rence envers elle Voir l exemple de son article dans LD vol 5 n 11 ao t 1931 p 124 38 leur demandant d agir telles des Madeleines de Verch res modernes En voquant la m moire de ce personnage historique consid r l poque comme une h ro ne de la Nouvelle France Ang lique s assure de faire passer son message Elle n a d ailleurs pas t la seule chez Dupuis utiliser l image de Verch res en effet en juillet 1929 on retrouve dans Le Duprex une publicit faisant la promotion d une nouvelle gamme de bonbons et de chocolats vendus en exclusivit au magasin les produits Madeleine de Verch res De toute vidence Dupuis a ainsi tent de copier le ph nom ne des c l bres chocol
139. ns qui s inscrivent elles aussi dans les strat gies de gestion paternalistes de Dupuis dans la mesure o elles lui permettent d taler aux yeux du public sa grande g n rosit envers son personnel Par ailleurs non seulement les employ es sont la plupart du temps invit es assister ces v nements mais elles participent souvent leur organisation qui peut d marrer plusieurs semaines l avance Outre le repas les prix de pr sence et les discours la musique et la danse occupent tr s souvent une place de choix au programme de ces soir es et sont d ailleurs des l ments incontournables de la culture de travail f minine chez Dupuis 2 3 2 Activit s sociales D autres activit s moins fastes mais tout aussi courues par les employ s sont organis es par Dupuis Fr res et l AAAD Ces activit s sociales r parties sur toute l ann e visent certes divertir les employ s mais aussi faire en sorte que leur temps libre soit occup par des loisirs respectables toujours dans un esprit paternaliste Plusieurs de ces activit s parmi les plus populaires reviennent au programme ann e apr s ann e comme les 15 Cela semble tre particuli rement le cas durant la pr sidence d Albert qui ressemble un ge d or des relations entre DF et ses employ s ainsi que de la vie sociale au magasin Albert para t beaucoup plus appr ci du personnel que son successeur son fils Raymond 14
140. nt elles aussi majoritairement se marier Dans Becoming Modern p 168 7 Kate Boyer Neither Forget nor Remember Your Sex Sexual Politics in the Early Twentieth century Canadian Office Journal of Historical Geography vol 29 n 2 2003 p 223 224 Il faut aussi mentionner que bien entendu le seul type de mariage accept et envisageable est le mariage h t rosexuel 7 Selon Mich le Dagenais au Qu bec si les femmes travailleuses ou non se marient 24 1 ans en 1911 vingt ans plus tard en 1931 elles ne le font qu a 25 6 ans Dans Itin raires professionnels masculins et f minins en milieu bancaire Le cas de la Banque d Hochelaga 1900 1929 Labour Le Travail vol 24 1989 p 61 L auteure explique ce changement par l influence de la crise conomique des ann es 1930 Chez DF certaines femmes semblent se marier beaucoup plus tard apr s parfois dix ou vingt ans de service si on se fie a LD On peut prendre a titre d exemple le cas de Pauline Hudon elle quitte son emploi en 1944 pour se marier mais revient en 1954 a la mort de son mari L ann e suivante en 1955 elle est admise au Club des 25 ce qui nous laisse croire qu elle a originalement t embauch e en 1920 si on d duit de ses 25 ann es de service les dix ans o elle a quitt le magasin Elle aurait ainsi travaill presque 25 ans avant de se marier 70 l entre deux guerres et m me au del en ce sens o il symbolise
141. nt la culture de la beaut en organisant d s la fin des ann es 1940 certaines activit s sp ciales notamment des concours de beaut Ces comp titions permettent certes aux employ es de s exposer et d en tirer de la fiert mais v hiculent n anmoins une image st r otyp e des femmes les participantes faisant la promotion de normes de beaut strictes et tr s exclusives Par ailleurs des auteurs soulignent la modernit de ces concours en mentionnant que leur expansion s est faite en parall le avec le d veloppement des nouveaux m dias de masse dont ils ont su tirer profit De plus plusieurs s accordent sur le fait que de tels concours sont li s de pr s la construction de la f minit selon Val rie Korinek non seulement ils v hiculent les valeurs dominantes d une soci t une poque donn e mais ils font aussi la promotion d une f minit la fois id alis e et conservatrice Selon elle ces concours font galement la promotion outrance de la beaut physique au d triment des autres aspects de la personnalit des concurrentes En outre Joan Sangster a montr que les concours de beaut dans un contexte de changement culturel servent d une part maintenir en place les pratiques sexistes en vigueur li es la subordination de genre et d autre part dans un contexte o les femmes int grent le milieu du travail montrer au public que leur f minit 38 LD vol 11
142. ntre la famille Dupuis et leurs employ s etc Un m moire de ma trise pr sent McGill en 1997 par Mary Catherine Matthews s est aussi int ress Dupuis Fr res L auteure y tudie les relations entre employ s et patrons telles que pr sent es dans Le Duprex journal interne de l entreprise En r sum elle voque les strat gies de gestion paternalistes du grand magasin Dupuis pour elle Albert Dupuis avait aussi ouvert en 1940 une succursale sp cialis e dans la vente de produits haut de gamme destin s aux hommes situ e dans l h tel Windsor dans la partie ouest de la ville 33 Une particularit de DF tait ses liens avec le clerg En plus d entretenir des liens troits avec ses plus importants repr sentants DF comptait un service d di enti rement au clerg o celui ci recevant un soin tout particulier pouvait faire tous ses achats ainsi que se reposer et manger gratuitement dans une salle lui tant r serv e Dupuis Leman p 248 258 35 Daniel Charbonneau L mergence d une art re commerciale la rue Sainte Catherine de Montr al 1870 1913 m moire de ma trise Montr al UQ M d partement d histoire 2006 p 152 Ici il faut mentionner que DF n tait pas leur seul magasin de la partie est de Montr al Linteau mentionne l existence du magasin de nouveaut s Letendre et fils situ entre les rues Amherst et Wolfe que les propri taires tent rent en vain d
143. oins p nible le processus plut t solitaire de la r daction Hadil pour ses corrections Emilie et Carolyne qui m ont offert une poup e a l effigie de Michel Foucault Philippe qui a souvent accept d tre mon camarade de biblioth que Rebecca qui a pass plusieurs de ses vendredis apr s midis avec moi ainsi que Julien Vincent et Alexandra qui m ont permis de me changer les id es comme d habitude lors de nos soupers Finalement je ne peux passer sous silence le support et la compr hension de mon amoureux Nicholas Merci de toujours tre l pour moi J adresse un dernier merci Jeannette Perras secr taire g n rale de Dupuis Fr res qui a fait beaucoup d efforts pour s assurer de la conservation des archives de l entreprise essentielles la r alisation de ce travail et la compr hension de l histoire de ces femmes qui comme elle y ont travaill et ont r ussi a se tailler une place dans un monde d hommes Introduction En 1883 Emile Zola crivait dans son roman Au Bonheur des Dames que ce grand magasin de Paris semblait a lui seul la lumi re et la vie de la cit Comme en t moigne cet extrait l apparition de ce type de commerces en Occident au milieu du XIX si cle a profond ment marqu la culture mais aussi videmment le monde de la vente au d tail ainsi que les habitudes d achat de la population En Am rique et en Europe ces palais de consommation se s
144. ompos e de femmes du magasin et du comptoir postal ce qui montre que malgr des divisions il arrive que les employ es des deux sections de l entreprise se m lent 91 de d cembre 1933 Pierrette se demande s il est d plac pour une jeune fille qui travaille dans un bureau et bien lev e de faire partie d une organisation sportive Il semble donc que celle ci tout en d sirant pratiquer des activit s sportives exprime n anmoins des craintes en lien avec sa f minit participer des sports pourrait il nuire sa r putation de femme respectable Cette lettre envoy e au courrier d Ang lique montre donc que le sport n est pas au d but des ann es 1930 largement int gr la vie de toutes les femmes probablement parce que circulent encore au Qu bec des discours particuli rement hostiles ce sujet En effet selon lise Detellier la participation des Qu b coises francophones aux activit s sportives surtout les sports d quipe a longtemps t ralentie par un discours social tr s pr sent jusqu aux ann es 1950 voulant que celles ci menacent leurs capacit s reproductrices au c ur m me de leur f minit Par ailleurs on peut aussi souligner l article de 1936 crit par Gix cit auparavant concernant les cheveux Il y mentionne la possibilit de r aliser des coiffures adapt es au style de vie de chacune en effet selon lui il existe des coupes qui sont mieux adapt es et p
145. on Par ailleurs on constate que les employ s voient leurs patrons comme des parents et qu ils se comportent de mani re filiale envers eux Ainsi une photographie datant du 11 janvier 1939 prise lors de la traditionnelle f te des employ s montre une jeune vendeuse Mlle Gingras debout arborant un costume de fillette et lisant une adresse son p re Albert Dupuis assis face elle aux c t s des autres dirigeants du magasin En outre les employ es semblent se consid rer entre elles comme des membres d une m me grande famille Ang lique dans un article du Duprex de mars 1930 concernant les difficult s financi res de certaines femmes du magasin crit Ah que celles l ont besoin de notre soutien et comme leurs compagnes doivent les aider dans leur charges sic respectives du magasin vos soeurs vont travailler laver coudre ou repriser la robe qui ne doit pas para tre us e Il arrive m me que la direction fasse mention de fa on explicite du fait que les gens qui travaillent pour Dupuis Fr res repr sentent une grande famille unie Selon Donica Belisle l utilisation d une telle m taphore est encore une strat gie visant encourager la d votion du personnel En ce sens un extrait d une chanson compos e par un employ Uld ric Lafrance dans le but Department Store Montreal 1926 1952 m moire de ma trise Montr al McGill d partment d histoire 1997 118 pages
146. onnalit comme par exemple Agn s Sorel qui en janvier 1929 fait un rapprochement int ressant non seulement entre les cheveux et la personnalit des femmes mais aussi entre ceux ci et un mode de vie moderne Les cheveux courts ce n est pas juste une mode C est une poque A notre poque l employ e de magasin veut de l aisance Etre propre et libre est sa formule Les cheveux longs ne sont pas faits pour notre temps On voit ici que l auteure valorise l image de la jeune fille moderne et la page et sous entend que son nouveau mode de vie qui peut impliquer le travail salari les sorties ou les sports n cessite un look qui lui est adapt Selon Seland la mode des cheveux courts m me si elle suscite beaucoup de critiques plusieurs y voient une violation de la f minit s impose d s chroniqueuses par exemple Soupir printanier en mars 1927 vol 1 n 6 p 2 prouvent des r ticences face aux nouvelles modes ce qui selon Marchand repr sente une tendance r pandue LD vol 13 n 2 octobre 1946 p 51 1 Pierson p 153 LD vol 13 n 10 d cembre 1948 p 369 Doreen Day est directrice de mode chez Eaton s Montr al des ann es 1920 jusqu 1958 elle devient c l bre en tant que globe trotter et r alise d importantes pr sentations de collections europ ennes Lorraine O Donnell Le voyage virtuel Les consommatrices le monde de l tranger et
147. ons auxquelles nous en arriverons seront comparables avec les grandes tendances relev es par l historiographie Est ce que les vendeuses de chez Dupuis Fr res au XX si cle ont v cu une exp rience semblable celle des vendeuses des grands magasins am ricains d crite par Susan Porter Benson Est ce que leur culture de travail tait semblable celle des t l phonistes de Bell d peintes par Bouvie 7 Emmanuelle Minnie Bouvie Talons hauts et bas de soie Les t l phonistes de Bell T l phone Montr al 1920 1939 m moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2004 110 pages 21 D autre part nous essaierons de voir de quelle fa on les nouvelles conceptions de la f minit qui mergent au XX si cle telles qu expliqu es pr c demment ont influenc la la culture de travail des employ es de Dupuis Fr res entre 1920 et 1960 Nous proc derons en deux temps nous montrerons d abord quels l ments de la f minit dominante demeurent importants leurs yeux durant la p riode l tude pour ensuite nous concentrer sur les nouvelles normes de f minit qui investissent graduellement surtout partir de la Deuxi me Guerre mondiale leurs pratiques de m me que leurs perceptions Voil les questions principales qui orienteront notre tude qui par ailleurs veut montrer qu au Qu bec la sph re de la consommation et des grands magasins au XX si cle n a pas uniquement t
148. ont assez rapidement impos s comme des symboles du progr s technologique de l industrialisation et des d buts de la consommation de masse Au Canada l entreprise qui a connu le plus grand succ s conomique et qui par cons quent a le plus marqu l histoire des grands magasins est sans contredit Eaton s n e Toronto en 1869 L esprit d initiative de son fondateur lui a permis de faire grandir son commerce d un x oe 03 oc an l autre et de devenir un v ritable symbole canadien Malgr la pr dominance d Eaton s sur la sc ne nationale au plan local il faut savoir que d autres grands magasins sont eux aussi parvenus se tailler une place dans la vente au d tail Montr al Dupuis Fr res a r ussi cet exploit et a grandement marqu l histoire Entreprise canadienne fran aise fond e d s 1868 et devenue sur la rue Sainte Catherine le p le du East central commercial Dupuis a aussi laiss des souvenirs ind l biles dans la m moire de ceux et celles qui l ont fr quent Plusieurs traces de ce magasin subsistent m me dans la culture populaire que ce soit dans les romans de Michel Tremblay entre autres dans Un ange cornu avec des ailes de t le ou dans des chansons de Robert Charlebois Qu bec Love et de Beau Dommage 23 d cembre Emile Zola Au Bonheur des Dames Paris Fasquelle 1998 p 74 Au Bonheur des Dames est un magasin fictif mais Zola s est grandement inspir pou
149. ous Pageant New York Palgrave Macmillan 2004 205 pages Zola Emile Au Bonheur des Dames Paris Fasquelle 1998 1883 542 pages Articles de p riodiques et chapitres d ouvrages collectifs Belisle Donica Exploring Postwar Consumption The Campaign to Unionize Eaton s in Toronto 1948 1952 Canadian Historical Review vol 86 n 4 2005 p 641 672 Belisle Donica A Labour Force for the Consumer Century Commodification in Canada s Largest Department Stores 1890 to 1940 Labour Le Travail vol 58 2006 p 107 145 Belisle Donica Negotiating Paternalism Women and Canada s Largest Department Stores 1890 1960 Journal of Women s History vol 19 n 1 2007 p 58 81 B lisle Diane et Yolande Pinard De l ouvrage des femmes qu b coises dans Vandelac Louise et al Du travail et de l amour Les dessous de la production domestique Montr al Saint Martin 1985 p 99 133 111 Bettez Lucie Cent jours dans la vie des Campivallensiennes La gr ve de 1946 a Salaberry de Vallefield Labour Le Travail vol 62 2008 p 9 50 Boyer Kate Re working Respectability The Feminisation of Clerical Work and the Politics of Public Virtue in Early Twentieth Century Montreal dans Myers Tamara sous la dir de Power Place and Identity Historical Studies of Social and Legal Regulation in Quebec Montr al 1996 Montr al Montreal History Group 1998 p 151 168 Boyer
150. oward a aussi abord cet aspect dans son tude sur la culture des employ es de la compagnie Maidenform dans les ann es 1940 et 1950 De plus comme le montre Sangster dans son article sur le paternalisme de la compagnie Westclox les travailleuses contestent rarement la hi rarchie sexuelle au travail ce qui par le fait m me signifie qu elles ont tendance ne pas remettre en question la f minit traditionnelle En 1995 Sangster a galement avanc que la culture de travail f minine est forg e la fois par des processus de r sistance et d adaptation Emmanuelle Minnie Bouvie en arrive aux m mes conclusions dans son tude sur les t l phonistes de Bell Montr al entre 1920 et 1939 qui selon ses dires r sistaient leurs employeurs face des mesures jug es inappropri es tout en sachant tirer profit de certains avantages que Patricia Cooper Once a Cigar Maker Men Women and Work Culture in American Cigar Factories 1900 1919 Urbana University of Illinois Press 1987 350 pages 7 Suzanne Morton The June Bride as the Working class Bride Getting Married in a Halifax Working class Neighbourhood in the 1920 s dans Bettina Bradbury sous la dir de Canadian Family History Toronto Copp Clark Pitman 1992 p 360 379 68 Vicki Howard At the Curve Exchange Postwar Beauty Culture and Working Women at Maidenform Entreprise and Society vol 1 n 3 2000 p 591 618 Sang
151. pulaire et du folklore urbain canadien 290 fran ais des ann es 1930 En ce sens il n est pas tonnant que des travailleuses de Montr al aient d cid de prendre une telle femme comme mod le et de s exprimer elles 33 te 291 aussi leur mani re en composant des chansons 787 Monique Leclerc Les Chansons de la Bolduc Manifestation de la culture populaire Montr al 1928 40 m moire de ma trise Montr al McGill d partement d histoire 1974 p 33 36 88 En fait les chansons et la musique font souvent partie de la culture de travail des femmes Selon Emma Robertson les travailleuses aiment cr er et couter de la musique au travail Dans Harmonious Relations Music at Work in the Rowntree and Cadbury Factories Business History vol 49 n 2 2007 p 228 289 Gasp sienne d origine La Bolduc 1894 1941 devient une auteure interpr te tr s populaire au Qu bec avec son style particulier alliant humour langage populaire et turlute Elle aura une grande influence sur la chanson francophone au Qu bec Claire Versailles Site de L Encyclop die Canadienne La Bolduc en ligne http www thecanadianencyclopedia com articles fr la bolduc page consult e le 9 mars 2012 Parmi les autres artistes qui utilisent le m me langage notons Jean Narrache Louis Fr chette et Alfred Desrochers Marie Jos e Charest Lire Mary Travers La Bolduc Chansons et repr sentation
152. pularit qu a connue le feuilleton romantique crit par Ang lique pour Le 718 Girard p 61 75 Duprex en 19307 Il s agit de l histoire d une jeune employ e de grand magasin Jeanne qui par sa correspondance avec une coll gue malade qu elle souhaite tenir au courant de la vie au magasin raconte sa rencontre avec un nouvel employ Andr Au fil des chapitres qui s chelonnent sur quelques mois en 1930 et qui prennent toujours la forme de lettres les nouvelles concernant le magasin sont rapidement mises de c t par Jeanne au profit du r cit de ses rapprochements avec Andr Au terme de l histoire celle ci vit un r ve non seulement elle se marie avec lui mais elle apprend qu il est riche qu elle pourra d m nager avec lui aux tats Unis et qu elle sera en mesure de vivre une vie de r ve Plusieurs aspects du d nouement sont id alis s par l auteure au plus grand plaisir des lectrices qui peuvent ainsi s vader de leur quotidien sans doute moins grandiose En plus de dresser un portrait embelli du travail en magasin Ang lique envoie un message tr s clair ses coll gues et lectrices une histoire d amour se solde n cessairement par un mariage qui de toute fa on est pr sent comme le point culminant de la vie de la protagoniste Cela semble en fait tre un message tr s souvent v hicul par les feuilletons de l poque L uvre d Ang lique tout comme c
153. r sentations sur le sujet On peut faire un rapprochement entre cette situation et une autre rapport e par Bouvie selon elle Bell a d cid pour mieux encadrer ses travailleuses qui produisaient des pi ces de th tre parodiques de cr er son propre club de th tre dirig par des hommes et respectant ses standards culturels Pour la compagnie de t l phone comme pour Dupuis le fait de placer un homme la t te d un groupe de travailleuses est un bon moyen paternaliste de s assurer de son bon fonctionnement tout en reproduisant les hi rarchies de genre Malgr cela les employ es de Dupuis baignent dans un univers f minin et esth tique o la mode est tr s pr sente Celui ci les pousse au fil des ans se conformer de plus en plus de nouveaux standards physiques et par cons quent les incite adopter de nouvelles normes de f minit 44 Soland p 44 45 7 Des photos de LD montrent que les employ es semblent accorder beaucoup de soin leurs tenues souvent dernier cri LD vol 16 n 7 avril 1958 p 124 125 6 LD vol 12 n 8 avril 1945 p 325 7 Emmanuelle Minnie Bouvie Talons hauts et bas de soie Les t l phonistes de Bell T l phone Montr al 1920 1939 m moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2004 p 88 89 83 La culture de la beaut et le corps Il est possible de constater que d s le milieu des ann es 1930 la culture de la b
154. r une salle de repos des repas offerts prix r duits une infirmerie ainsi qu une biblioth que LD vol 14 n 1 septembre 1949 p 37 A ce sujet Maude Emmanuelle Lambert avance qu au d but du XX si cle les excursions en voiture repr sentent pour les femmes qui en font la modernit la libert l ind pendance ainsi que l affirmation de leur ascension sociale Selon elle le symbole de la femme automobiliste semble tre d autant plus fort que la voiture au tournant du XX si cle est intimement li e 56 cours dans diff rentes mati res mais les cours de couture semblent les plus populaires Au comptoir postal il existe m me la fin des ann es 1940 un cercle de couture plac sous l gide de la fille du pr sident Ren e Dupuis Plusieurs mentions dans Le Duprex concernent ce cercle de couture on y publie par exemple des articles qui vantent les m rites des couturi res Outre les cours de couture d autres ateliers sont aussi organis s par exemple des cours de vente de secourisme offerts par l Ambulance St Jean ou des fee 10 le ons de cuisine 2 3 4 Clubs Pour agr menter la vie des employ es mais aussi sans doute pour que celles ci d veloppent un plus fort sentiment d appartenance envers la maison Dupuis Freres cr e diff rents clubs auxquels elles peuvent adh rer Certaines conditions pour tre membre sont cependant requises comme tre l emploi
155. r l inventer du magasin parisien Au Bon March Expression de Susan Porter Benson dans Palace of Consumption and Machine for Selling The American Department Store 1880 1940 Radical History Review vol 21 1979 p 199 221 gt Donica Belisle Retail Nation Department Stores and the Making of Modern Canada Vancouver UBC Press 2010 p 236 Partie est de Montr al qui rassemble une vari t de commerces qui appartiennent en grande partie des Francophones Josette Dupuis Leman Dupuis fr res le magasin du peuple Plus d un si cle de fiert qu b coise Montr al Stank 2004 p 264 J ai dans le c ur un jour de l An o mes parents Pensant bien faire m avaient habill en communiant Chez ma grand m re c tait mon p re Qui s d guisait en P re No l pour faire accroire r 5 Que les cadeaux a v naient pas toute de Dupuis Fr res Si Dupuis Fr res peut tre consid r comme un v ritable lieu de m moire qu b cois pour reprendre l expression de Pierre Nora certains aspects de son histoire demeurent n anmoins m connus Certes le magasin s est fait conna tre pour son catalogue fran ais distribu travers le Qu bec pour le nationalisme de ses dirigeants ou pour les liens troits que ces derniers ont partag s avec le clerg catholique tout au long de son existence Au sein de la communaut historienne c est essentiellement la gr ve des employ s en 1952 qui a attir l at
156. r secr taires de direction et ainsi acqu rir de l autonomie au travai relativement peu d informations relatives au travail de bureau des femmes chez Dupuis subsistent il est possible de penser que ce bref portrait des employ es de bureau de Montr al l poque correspond dans une certaine mesure celui des travailleuses de bureau chez Dupuis du moins jusqu aux ann es 1940 156 Kate Boyer Neither Forget nor Remember Your Sex Sexual Politics in the Early Twentieth century Canadian Office Journal of Historical Geography vol 29 n 2 2003 p 212 229 Graham S Lowe Women Work and the Office The Feminization of Clerical Occupations in Canada 1901 1931 Cahiers Canadiens de Sociologie vol 5 n 4 1980 p 361 381 Mich le Dagenais Itin raires professionnels masculins et f minins en milieu bancaire Le cas de la Banque d Hochelaga 1900 1929 Labour Le Travail vol 24 1989 p 45 68 157 En 1921 cet emploi est devenu le 3 plus courant chez les femmes au Qu bec Boyer p 216 18 Boyer et England p 312 313 19 Belisle Retail Nation p 162 Le cas de Jeannette Perras pourrait bien illustrer cette opportunit de carri re Elle occupe dans son parcours professionnel au magasin 1933 1978 plusieurs postes diff rents adjointe au bureau de contr le secr taire d Armand et ensuite de Raymond Dupuis ainsi que secr taire g n rale de la compagnie d s 1953 Eduqu e et impl
157. rais y rester alors on m a dit voulez vous continuer J ai dit oui et j ai rest 43 ans Je suis entr e 19 ans et je suis sortie 66 ans Toutes ces ann es pass es au magasin les poussent galement d velopper d troites relations avec leurs coll gues ce qui renforce leur identit de travailleuse 2 2 3 Les employ es de bureau Outre les vendeuses travaillant au magasin de la rue Sainte Catherine une autre importante partie de la main d uvre f minine s active au comptoir postal situ dans le quartier Saint Henri en tant qu employ es de bureau Bien que ces employ es se m lent celles du magasin lors d activit s communes le comptoir postal repr sente une sorte de branche ind pendante au sein de l entreprise En effet celui ci poss de ses propres organisations et activit s sociales et sportives dont Le Duprex se fait l cho dans la rubrique La voix du comptoir postal qui para t dans les ann es 1940 et 1950 Les employ es de bureau accomplissent chez Dupuis Fr res une vari t de t ches dont la plupart entoure la r ception la gestion et l envoi de commandes postales et t l phoniques 152 M me si la tendance semble tre la baisse vers la fin de la p riode beaucoup de femmes restent effectivement longtemps l emploi de DF parfois plusieurs d cennies Voir le dossier tudes sur l organisation les effectifs et les salaires 1962 1968 Lettre de
158. ratiques chirurgicales visant l am liorer Par ailleurs si on se fie aux photos de vacances envoy es annuellement au Duprex par les employ es on constate que plusieurs d entre elles n h sitent pas porter des 48 Voir notamment Seland p 15 et Sangster Earning Respect The Lives of Working Women in Small Town Ontario 1920 1960 Toronto UTP 1995 p 85 Selon Marchand la presse f minine accorde beaucoup d importance aux soins du corps dans l entre deux guerres Les m dias v hiculent galement l id e du pouvoir de la beaut et mettent de l avant des mod les f minins correspondant au corps id alis Dans Rouge l vres et pantalon p 30 et 32 250 LD vol 8 n 9 septembre 1936 p 134 51 Jbid Nous soulignons 2 Soland p 47 84 v tements qui dissimulent de moins en moins le corps En effet d s le milieu des ann es 1930 il est plus fr quent de voir publi s dans le journal d entreprise des portraits de femmes en maillot de bain ou v tues d un short tr s court Il peut para tre tonnant que Dupuis permette la publication de telles photos dans la mesure o la direction est tr s pr s de l glise dont la frange la plus conservatrice d nonce jusque dans les ann es 1950 le port de tels v tements qui nuisent leur r putation de femme respectable et repr sentent des manquements la pudeur et la d cence Ces clich s montrent donc comment les e
159. rom mentionne d ailleurs que jusqu en 1930 m me en milieu de travail h t rosocial la sociabilit est essentiellement homosociale Dans Beyond the Typewriter p 369 72 mentions de fian ailles dont 20 sont clairement identifi es comme tant entre employ s de la famille Dupuis soit pr s de 20 7 Cela pousse d ailleurs un chroniqueur du journal en octobre 1939 a d former sous le couvert de l humour le slogan officiel du magasin Ach te bien qui ach te chez Dupuis pour Choisit bien qui choisit chez Dupuis Les photos que contient Le Duprex sont aussi r v latrices de la nature des relations hommes femmes au sein du magasin comme en t moigne un clich datant de juillet 1940 sur lequel on aper oit un groupe d employ s des deux sexes avec au premier plan un homme assis avec une jeune et jolie femme sur chaque genou ILLUSTRATION 3 1 La proximit physique entre employ s et employ es Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 10 n 10 juillet 1940 p 227 75 Les fian ailles ne sont sans doute pas toutes rapport es dans LD il y en a probablement plus que cela au cours de la p riode 216 LD vol 10 n 6 octobre 1939 p 122 73 Il semble clair selon la proximit qui unit les employ s sur cette photo que les contacts y compris les contacts physiques et le flirt sont fr quents en milieu de travail alors que jusqu a
160. s propos des grands mariages de la royaut notamment celui de Grace Kelly que these modern day fairy tales captured the imagination of many These women s lives 223 En somme symbolized possibility Fairy tales can come true it can happen to you l importance accord e au mariage dans Le Duprex montre qu il est un l ment central de la culture des employ es de Dupuis de 1920 1960 m me si les articles qui l abordent sont moins nombreux apr s la guerre Ainsi Le Duprex semble particuli rement valoriser cet aspect de leur culture et par cons quent laisse sous entendre aux femmes que leur vraie place se trouve au foyer plut t qu au travail 1945 1960 Une analyse de la presse f minine commerciale au Qu bec m moire de maitrise Montr al Universit de Montr al d partement de sociologie 1982 p 152 2 LD vol 7 n 11 novembre 1934 p 164 165 Cela doit para tre impressionnant pour les employ es issues des classes populaires car leurs c r monies sont beaucoup moins labor es le nombre d invit s est limit il y a peu de d corations la tenue de la mari e est simple et rarement blanche etc Pour plus de d tails sur ce sujet voir Girard p 113 123 Chrys Ingraham White Weddings Romancing Heterosexuality in Popular Culture New York Routledge 1999 p 36 Il serait possible de faire un rapprochement entre ces mariages et ceux rapport s dans LD TT
161. s es aux travailleuses surtout partir de la Deuxi me Guerre mondiale Comme on le verra celles ci viennent s ajouter et non pas se substituer l id al de la m re m nag re De fait comme l ont not certaines historiennes la d finition de la f minit m me si elle se transforme avant les ann es 1960 s appuie toujours sur le r le primordial d pouse et de m re l insistance sur les attributs physiques venant surtout confirmer leur destin e premi re se trouver un mari pour fonder une famille 3 1 Persistance des anciennes normes de f minit Selon Leslie Tentler les travailleuses ont dans le premier tiers du XX si cle une vision assez conservatrice de la f minit Chez Dupuis les employ es entretiennent effectivement entre 1920 et 1960 une attitude assez conventionnelle vis vis leur destin e et ce pour l ensemble de la p riode il faut dire qu elles baignent dans un milieu de travail 184 Leslie Tentler Wage earning Women Industrial Work and Family Life in the United States 1900 1930 New York Oxford University Press 1979 p 62 Les conclusions de Patricia Cooper concernant les travailleuses des usines de cigares de 1900 1919 vont aussi dans le m me sens Dans Once a Cigarmaker 63 ax sur le maintien des r les genr s ce qui manifestement influence leurs attitudes quant trois aspects de la f minit dominante qui demeurent ancr s dans leur culture de travail soi
162. s soit avec des membres de leur famille Plusieurs d entre elles ne se marieront que tardivement ou pas du tout Ainsi parmi les femmes qui acqui rent le titre de membre du Club des 25 plusieurs se font encore appeler mademoiselle malgr leur ge avanc ce qui signifie qu elles sont demeur es c libataires Dans un t moignage recueilli en 1982 glantine Richer une ancienne vendeuse affirme d ailleurs tre rest e vieille fille parce qu elle tait enti rement d vou e son travail Beaucoup de vendeuses semblent comme elle accorder beaucoup de place leur emploi dans leur vie Elles s y d dient corps et me et en parlent beaucoup leurs proches Pour ces femmes sans poux ni enfants la famille d origine tout comme la grande famille Dupuis est d une importance capitale 135 Les grands magasins engagent plus de femmes car elles leur co tent moins cher Dans l entre deux guerres plus de la moiti du personnel des grands magasins canadiens est f minin Belisle Retail Nation p 159 136 Selon John Willis les femmes repr sentent en 1930 68 du personnel en 1952 elles repr sentent 57 du personnel syndiqu Dans Cette manche au syndicat La gr ve chez Dupuis Fr res en 1952 Labour Le Travail vol 57 2006 p 57 58 137 Sarah S Malino Faces Across the Counter A Social History of Female Department Store Employees 1870 1920 th se de doctorat
163. s et m moires Bouvie Emmanuelle Minnie Talons hauts et bas de soie Les t l phonistes de Bell T l phone Montr al 1920 1939 M moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2004 110 pages Chamberland Lise La Revue moderne 1945 1960 Une analyse de la presse f minine commerciale au Qu bec M moire de ma trise Montr al Universit de Montr al d partement de sociologie 1982 207 pages Charbonneau Daniel L mergence d une art re commerciale La rue Sainte Catherine de Montr al 1870 1913 M moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2006 200 pages Charest Marie Jos e Lire Mary Travers La Bolduc Chansons et repr sentations sociales dans le Qu bec des ann es 1930 M moire de ma trise Montr al Universit de Montr al d partement de litt rature de langue fran aise 2008 171 pages Drolet Claudine Shawiniganaises et travailleuses Les employ es de bureau de la Shawinigan Water and Power 1945 1963 M moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2010 213 pages Forbes Susan L The Influence of the Social Reform Movement and T Eaton Company s Business Practices on the Leisure of Eaton s Female Employees during the Early Twentieth Century Th se de doctorat London University of Western Ontario d partement de kin siologie 1998 237 pages Leclerc Monique Les chansons de La Bolduc
164. s lignes de piquetage et elles ressentent un profond sentiment d appartenance envers leur syndicat Dans les archives de la CSN anciennement la CTCC plus pr cis ment dans l dition du 9 mai 1952 du journal du syndicat Le Travail on peut galement voir la motivation des employ es gr vistes dont les propos sont recueillis par Pierrette P sur les lignes de piquetage Selon les t moignages une employ e impliqu e dans l ex cutif du syndicat semble surprise de la solidarit syndicale de ses consceurs Je n aurais jamais pens que les employ es de Dupuis auraient fait la gr ve et le piquetage donc Une autre tr s motiv e mentionne la journaliste qu elle manifeste ainsi six heures par jour Dossier Officiers du comit Madeleine Brosseau est la premi re femme occuper ce poste dans le syndicat de DF Plus tard elle deviendra galement vice pr sidente de la CTCC Sangster Souriez pour les clients Retail Work Dupuis Fr res and Union Protest Transforming Labour Woman and Work in Post War Canada Toronto UTP 2010 p 139 307 Bettez p 33 308 La raison pour laquelle nous ne nous attardons par sur la gr ve est que celle ci a d j t tudi e notamment par Willis et Sangster Elle a t caus e surtout par l insatisfaction face aux salaires mais aussi par un ras le bol du personnel en lien avec la gestion arbitraire des patrons Pour plus de d
165. s que Veronica Strong Boag a d j not que les femmes des classes ouvri res sont moins influenc es par les normes qui sont cens es d finir la f minit respectable Quoi qu il en soit plus les ann es avancent moins il semble y avoir de r sistance par rapport ce ph nom ne et la participation des employ es aux sports semble devenir graduellement une pratique accept e 3 2 2 Le d sir de s exprimer Il arrive assez fr quemment aux employ es de Dupuis Fr res de composer articles chroniques po mes et chansons et de les envoyer au Duprex parfois en empruntant un nom de plume Il est important de souligner que ce geste correspond sans aucun doute un d sir de s exprimer de manifester leur fiert de femmes et de travailleuses En effet en analysant cette litt rature on constate que d s le d but de la p riode l tude elles ont une panoplie de sentiments go ts opinions et fantasmes ext rioriser On retrouve d abord 275 LD vol 8 n 9 septembre 1936 p 134 776 Veronica Strong Boag The New Day Recalled Lives of Girls and Women in English Canada 1919 1939 Markham Penguin Books 1988 p 31 77 Selon Line Gosselin l usage de pseudonymes est chose courante chez les journalistes qu b coises de 1880 1930 Qui plus est les noms de plume des francophones se limitent souvent un pr nom f minin Non seulement cette identit fictive leur procure une certaine libert
166. s qui viennent moduler la d finition de la f minit respectable S il arrive qu ils se manifestent d s les premi res ann es de la publication du Duprex c est n anmoins apr s 1939 que ces changements apparaissent de fa on significative 3 2 1 Nouveaux standards en mati re d apparence physique La mode Au d but du XX si cle apparaissent de nouveaux standards f minins en mati re ee 1939 A d apparence physique Beaucoup sont influenc es par ces nouveaux mod les car selon Kate Boyer la qu te de la respectabilit cr e chez les femmes m me celles des classes Pr A je 233 laborieuses le d sir d avoir des v tements des coiffures et des accessoires la mode Les employ es de Dupuis ne semblent pas faire exception d s la fin des ann es 1930 environ la mode devient l un des sujets de pr dilection des chroniques f minines du 234 Duprex Un grand nombre d articles sont en effet publi s autour de cette th matique 232 S land Becoming Modern Comme nous le verrons plus loin ces nouvelles normes concernent autant la n cessit de suivre la mode que la valorisation de la jeunesse le d sir d un corps moderne la popularit de l activit physique etc 7 Kate Boyer Re working Respectability The Feminisation of Clerical Work and the Politics of Public Virtue in Early Twentieth Century Montreal dans Tamara Myers sous la dir de Power Place and Identity
167. s sociales dans le Qu bec des ann es 1930 m moire de ma trise Montr al Universit de Montr al d partement de litt rature de langue fran aise 2008 p 82 2 Thid p 24 et 45 1 Par ailleurs il est int ressant de voir que les chansons compos es ou chant es lors des r ceptions sont souvent pr s du folklore traditionnel Dans les programmes de ces soir es on en retrouve plusieurs qui figurent dans le R pertoire de la chanson folklorique fran aise au Canada de Marius Barbeau En outre quand les employ s composent une chanson ils optent souvent pour un air traditionnel connu pour que tous puissent la chanter Par exemple En visitant le magasin compos e sp cialement pour LD emprunte l air de Un Canadien errant Dossier F tes et anniversaires 1939 1944 97 De fait celles que l on retrouve dans les archives de Dupuis recens es surtout avant 1945 sont abondantes plusieurs abordent des th mes vari s comme la romance le patriotisme la jeunesse ou les voyages en mer D autres fois les chants d crivent pr cis ment des situations qui ont lieu chez Dupuis laissant encore supposer l importance que rev t pour les employ es leur emploi au magasin de m me que le respect qu elles vouent leur employeur Ce soir tout est en f te Tout est gai et charmant Le personnel en t te Les g rants les assistants Group s autour des tables jolies Attendant le moment 292 D
168. semble pas par exemple int resser Eglantine Richer C tait quoi la politique pour vous Ah bien je ne m en occupais pas beaucoup je ne connaissais pas bien a dans ce temps l Dossier M moires d une poque p 16 LD vol 3 n 11 mai 1929 p 4 304 la m me poque environ apr s la Deuxi me Guerre mondiale appara t un nouveau contexte d agitation sociale et la CTCC sous la pr sidence de G rard Picard devient beaucoup plus militante 305 Dossier Officiers du comit ex cutif du syndicat 1950 1977 Durant l ann e 1952 1953 sur les 11 membres qui composent la direction du syndicat cinq sont des femmes 100 seconde en 1959 Si on se fie aux propos de Lucie Bettez qui souligne l implication de Madeleine Parent dans la gr ve de 1946 a Valleyfield il est possible de supposer que la pr sence de femmes la t te d un syndicat stimule chez leurs consceurs l espoir d tre entendues et comprises et favorise ainsi leur militantisme Le fait que la d finition des normes de la f minit respectable s largisse pour inclure l image de la travailleuse y est aussi sans doute pour quelque chose Mais dans l histoire du militantisme des employ es de Dupuis l v nement le plus important reste leur participation la gr ve de 1952 Selon John Willis les femmes ont jou un r le majeur durant celle ci elles sont les plus nombreuses sur les photos de
169. sph re de travail de rendre la journ e moins longue et p nible Dans l tude de Linda Cullum concernant les employ s d une usine de bleuets de Terre Neuve dans les ann es 1940 et 1950 il est possible de constater comment les Sangster Earning Respect The Lives of Working Women in Small Town Ontario 1920 1960 Toronto UTP 1995 p 83 Heather Fowler Salamini Gender Work and Working class Women s Culture in the Veracruz Coffee Export Industry 1920 1945 International Labor and Working class History vol 63 2003 p 102 121 5 Leslie Tentler Wage earning Women Industrial Work and Family Life in the United States 1900 1930 New York Oxford University Press 1979 p 71 Par ailleurs selon Sangster m me si la culture de travail des femmes est tr s li e aux discours dominants sur la f minit elle partage n anmoins des caract ristiques communes avec la culture de travail masculine car bien que le genre l influence grandement la culture de travail est aussi forg e par la nature du travail en question Dans Earning Respect p 107 108 Claudine Drolet Shawiniganaises et travailleuses Les employ es de bureau de la Shawinigan Water and Power 1945 1963 m moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2010 p 108 18 femmes la plupart du temps confin es aux emplois non qualifi s de la berry line trouvent capital de pouvoir discuter avec leurs coll gues lorsqu elles e
170. ster The Softball Solution Female Workers Male Managers and the Operation of Paternalism at Westclox 1923 60 Labour Le Travail vol 32 1993 p 167 200 70 Sangster Earning Respect 356 pages 20 gji oe pe ceux ci leur offraient De mani re g n rale et pour synth tiser on peut dire que ces travaux montrent que la culture de travail des femmes est un ph nom ne complexe largement fa onn par le genre de m me que par la division sexuelle du travail 1 2 Probl matique sources et m thodologie 1 2 1 Probl matique Les conclusions de ces auteures qui ont travaill sur la culture de travail f minine mais galement les conclusions de celles qui se sont pench es sur la f minit nous ont t particuli rement utiles pour tablir notre probl matique g n rale Celle ci est en fait orient e par deux angles d analyse principaux D une part nous tenterons de dresser un portrait le plus complet possible de la culture de travail des employ es de Dupuis tout en la comparant aux caract ristiques entourant l identit ouvri re f minine relev es dans l historiographie Pour ce faire nous commencerons par tablir le contexte dans lequel cette culture s est d velopp e c est dire plus pr cis ment que nous pr senterons le magasin ses strat gies de gestion de m me que les valeurs qu il v hicule Ainsi cette premi re partie se veut plut t comparative Est ce que les conclusi
171. t le travail domestique le mariage et le respect des hi rarchies de genre 3 1 1 Le travail domestique Selon Joan Sangster jusque dans les ann es 1950 au Canada la f minit dominante est encore li e de pr s la domesticit Les employ es de Dupuis Fr res semblent si on se fie au Duprex embrasser le r le de la m nag re tout comme les Danoises des ann es 1920 d crites par Seland Le travail domestique fait effectivement souvent l objet d articles de la part des collaboratrices du journal du moins avant 1939 Dans la mesure o Dupuis attach aux milieux conservateurs veut s assurer de la consolidation de la f minit de ses travailleuses il n est pas tonnant qu une place consid rable lui soit accord e dans le journal d entreprise Ainsi en le lisant on constate que les auteures font syst matiquement r f rence leur r le de ma tresse de maison quand par exemple elles veulent expliquer leurs coll gues le comportement appropri adopter avec les clients En janvier 1929 Men Women and Work Culture in American Cigar Factories 1900 1919 Urbana University of Illinois Press 1987 350 pages 185 Joan Sangster Representations and Realities The Shifting Boundaries of Women s Work Transforming Labour Woman and Work in Post War Canada Toronto UTP 2010 p 16 52 D s la fin des ann es 1970 plusieurs historiennes autant au Qu bec qu ailleurs ont entrepris d tud
172. t qui unissent les employ s entre eux sont aussi mis en vidence 107 Ainsi au total on d nombre plus de 132 mentions claires de liens de parent entre deux employ s ou plus Sans doute y en a t il davantage mais nous n avons pu tous les comptabiliser car ils n taient pas toujours indiqu s de fa on vidente 36 de rencontrer l me s ur comme en t moigne Le Duprex qui rec le de nombreux exemples de couples qui ont fait connaissance au travail 2 1 5 Les valeurs v hicul es par Le Duprex La direction du magasin qui contr le une grande partie du contenu du Duprex se sert galement de celui ci pour transmettre ses employ s l importance de certaines valeurs ch res la famille Dupuis L accent que met le journal d entreprise sur certaines d entre elles notamment la religion est un l ment par lequel Dupuis Fr res se distingue par ailleurs d autres publications de m me type La patrie C est un fait connu la famille Dupuis est nationaliste Tout au long de son existence le magasin Dupuis Fr res se fait ainsi le porte tendard de la patrie canadienne fran aise Le fait qu Armand Dugal d abord g rant g n ral 1910 et ensuite vice pr sident c 1938 ait attribu l entreprise son surnom officiel de magasin du peuple n est sans doute pas tranger ce ph nom ne Le patriotisme chez Dupuis Fr res se manifeste de plusieurs fa ons autant chez la direction
173. t les r cits construits des deux h ro nes Il est possible de croire que DF constatant le succ s de la compagnie Laura Secord fond e en 1913 a voulu faire la m me chose en exploitant le mythe de Verch res des fins conomiques tout en offrant ses clients amateurs de chocolats un produit typiquement canadien fran ais 18 LD vol 10 n 8 f vrier 1940 p 162 Le b n volat des femmes au b n fice des soldats durant la guerre est plut t fr quent Voir aussi vol 11 n 10 septembre 1942 p 276 39 La comp titivit La comp titivit est une autre valeur mise de l avant dans la gestion des employ s L entreprise organise en effet beaucoup de concours pour les motiver et les discipliner en leur offrant des prix et des troph es individuellement ou par rayon Ainsi durant toutes les ann es de sa publication on retrouve plusieurs mentions dans Le Duprex de ces concours g n ralement des concours de vente moyen efficace de stimuler les employ s au travail et de mousser les profits une fois par ann e la direction organise aussi un grand concours de propret travers le magasin le rayon qui s applique le plus dans ces t ches m nag res se m ritant un troph e Il faut mentionner qu il est tr s facile de mousser la comp tition dans les grands magasins cause de leur structure En effet en r partissant les employ s en rayons l employeur favorise la division puisque le personn
174. tant cette consigne plusieurs centaines d employ s qui poss dent chacun leurs r seaux sociaux Dupuis Fr res s assure d une publicit directe et de porte paroles cr dibles en effet qui connait mieux la qualit de la marchandise et des services offerts par le magasin que ses propres employ s Les r seaux des employ es sont galement utiles 15 LD vol 8 n 9 septembre 1936 p 139 Le type de concours n est pas sp cifi 104 La participation musicale de deux employ es les petites s urs Gingras deux soir es sp ciales est voqu e dans LD vol 11 n 12 f vrier 1943 p 359 35 lorsqu il s agit d embaucher du nouveau personnel Nous sommes port s croire que les techniques de recrutement de Dupuis Fr res comme celles de la Shawinigan Water and Power s appuient en grande partie sur le personnel qui sugg re la direction d engager telle amie ou tel membre de la famille En comptabilisant pour l ensemble des ditions du Duprex toutes les mentions de liens de parent unissant le personnel on en vient a la conclusion que souvent plusieurs membres d une m me famille sont l emploi de Dupuis Fr res et que la plupart ont d croch leur emploi gr ce aux bons mots de leur a n ou de leur p re la direction De toute vidence Dupuis Fr res tire donc bien plus de ses employ es que ce que stipule leur contrat d embauche pour reprendre les termes de Belisle M
175. tenterons aussi de montrer que l organisation des loisirs par Dupuis Fr res repr sente une strat gie de gestion paternaliste qui vise s assurer de leur loyaut et maintenir sa bonne r putation dans opinion publique Pour bien tablir le contexte dans lequel ces femmes ont volu nous pr senterons d abord les strat gies de gestion de m me que les valeurs v hicul es par Dupuis Fr res tel qu elles apparaissent dans le journal de l entreprise et dans d autres documents tir s de ses archives 2 1 Le magasin 2 1 1 Le Duprex comme moyen de gestion Le journal d entreprise tout en tant un t moin important de la culture populaire d une poque selon Peter Johansen peut galement servir la direction de moyen de gestion du personnel Claudine Drolet mentionne d ailleurs qu il est un outil cl du Peter Johansen Where s the Meaning and the Hope Trends in Employee Publications Journal of Popular Culture vol 29 n 3 1995 p 129 26 paternalisme et du corporate welfare capitalism Plusieurs grands magasins l ont adopt notamment Eaton s Simpson s et la Hudson Bay Company tout comme d autres entreprises telles la Dominion Corset de Qu bec Le CanCan la Shawinigan Water and Power Le Shawinigan Journal et Bell Telephone de Montr al Le Blue Bell Les journaux d entreprises ne repr sentent pas un ph nom ne r cent Johansen a identifi le premier
176. tention des chercheurs laissant ainsi en plan d autres dimensions fondamentales de cette institution qui a marqu l histoire de Montr al et du Qu bec au XIX mais surtout au XX si cle titre d exemple peu se sont attard s analyser en profondeur la vie des femmes qui y ont travaill En effet si une vaste partie de la client le des grands magasins est compos e de femmes une part consid rable du personnel qu ils emploient l est aussi et en ce sens Dupuis Fr res ne semble pas faire exception la r gle M me si les conditions de travail sont r gle g n rale dans ce type de commerces plut t d plorables il n en reste pas moins que beaucoup de femmes des classes laborieuses pour qui le travail salari est essentiel pr f rent y uvrer que d tre enferm es dans des usines car au moins il leur permet de maintenir une certaine forme de respectabilit Au fil des ann es pass es ensemble les employ es de Dupuis Fr res ont cr une culture de travail particuli re qui a comme elles gt Pierre Huet et Michel Rivard 23 d cembre Beau Dommage Anthologie EMI Music Canada 724352394029 1999 Pierre Nora sous la dir de Les lieux de m moire 3 tomes Paris Gallimard c1984 1992 4751 pages volu dans le temps Produit unique du contexte dans lequel elle s est construite cette culture de travail influenc e par une vari t de facteurs tels le genre la classe la religion
177. the Eaton Strikes of 1912 and 1934 dans Franca Iacovetta et Mariana Valverde sous la dir de Gender Conflicts New Essays in Women History Toronto TUP 1992 p 189 228 7 Lorraine O Donnell Le voyage virtuel Les consommatrices le monde de l tranger et Eaton Montr al 1880 1980 RHAF 2005 vol 58 n 4 p 535 568 8 Donica Belisle Exploring Postwar Consumption The Campaign to Unionize Eaton s in Toronto 1948 1952 CHR vol 86 n 4 2005 p 641 672 A Labour Force for the Consumer Century Commodification in Canada s Largest Department Stores 1890 to 1940 Labour Le Travail vol 58 2006 p 107 145 Negotiating Paternalism Women and Canada s Largest Department Stores 1890 1960 Journal of Women s History vol 19 n 1 2007 p 58 81 Belisle Retail Nation Department Stores and the Making of Modern Canada Vancouver UBC Press 2010 308 pages 10 aspects pourraient tre creus s davantage notamment l histoire des commerces comme Dupuis Fr res dont le rayonnement est plus r gional 1 1 2 Dupuis Fr res Nazaire Dupuis ouvre un magasin g n ral caract re familial le 28 avril 1868 sur la rue Sainte Catherine coin Montcalm D s 1870 son commerce prend de l expansion adopte le nom Dupuis Fr res et en 1882 il s tablit sur la m me rue coin Saint Andr Apr s le d c s de Nazaire ses fr res prennent la rel ve Odilon et Louis Napol on en
178. tissements consignes et conseils Une seconde tactique de gestion des employ s tr s pr sente tout au long de la p riode a l tude est l mission sous diverses formes de r gles avertissements consignes et conseils divers Ce type de gestion s incarne souvent par le truchement d articles qui paraissent dans Le Duprex dans des communiqu s adress s au personnel ou encore dans des brochures officielles remises l employ au moment de son embauche L tude de tels documents s av re int ressante dans la mesure o elle est r v latrice de certaines pratiques faisant partie de la culture des employ es de Dupuis Fr res En effet la fr quence de telles publications de m me que l insistance sur certains points de discipline semble tre une forme de r ponse des probl mes de comportement apparemment r currents parmi le personnel Comme d autres auteurs l ont d j montr cela laisse supposer que la 3 Belisle p 90 88 Dossier F tes et anniversaires 1939 1944 Bonne ann e Monsieur Dupuis 1942 Dossier Spicil ge fait par Lionel Goyer portant sur la faillite 1978 Article du Devoir Bless s dans leur fiert les employ s n en reviennent pas 6 f vrier 1978 Un autre exemple vocateur se trouve dans une lettre de remerciement d un employ a Albert Dupuis Je vous honore je vous admire je vous aime comme j ai aim mon p re Dossier F tes et anniversaires 1939
179. ton University Press 2000 249 pages 17 enfants showers f tes potlucks piqueniques danses activit s sportives clubs r ceptions et m me p lerinages dans le cas des travailleuses mexicaines du d but du si cle qui sont l objet d tude de Heather Fowler Salamini M me si elle varie selon l environnement la culture de travail que l on retrouve en divers endroits et entreprises est souvent semblable La raison qui explique cela est semble t il le lien troit que partage la culture de travail avec d une part la culture de masse populaire et d autre part les discours dominants sur la f minit Par ailleurs l aspect de la formation de la culture de travail la fois complexe et subtile m rite aussi d tre mentionn Plusieurs auteurs notamment Claudine Drolet ont constat que celle ci est souvent le r sultat d une combinaison de comportements qui tant t acceptent tant t r sistent l esprit et aux politiques de l entreprise qui emploie les travailleuses en question Dans son m moire de ma trise paru en 2010 concernant les employ es de bureau de la Shawinigan Water and Power de 1945 1963 elle montre galement que ces derni res ont su malgr la gestion paternaliste de leur employeur vivre une vie enrichissante et se construire une culture unique La plupart des auteurs s accordent aussi sur un autre aspect la fonction principale de cette culture est d humaniser la
180. travail deviennent souvent amies on peut douter que cette directive ait vraiment t respect e 31 Les pages du Duprex reproduisent aussi fr quemment des articles concernant la discipline tir s d autres revues d di es a la vente ou de journaux divers Par exemple en octobre 1930 on reprend les propos d un texte qui donne une s rie de recommandations a suivre pour tre un bon employ de grand magasin appeler ses coll gues monsieur et madame ne pas bavarder ou se disputer avec eux ne pas arborer un air condescendant ou ennuy aupr s des clients ne pas s appuyer sur le comptoir mais plut t se tenir bien droit sur ses deux pieds ne pas m cher de la gomme ou manger etc D autres consignes fr quentes sont d viter les familiarit s avec les clients tre poli ne pas utiliser d argot ne pas crier ou siffler et ne pas fumer Finalement une attention particuli re est accord e au langage des employ s qui ne proviennent pas n cessairement des classes les plus ais es et duqu es de la soci t Pour contrer l usage d expressions anglaises inappropri es un lexique est ins r dans Le Duprex de d cembre 1954 leur intention o on leur explique par exemple qu il faut dire Enl ve l tiquette plut t que te le beul 2 1 4 Utilisation des employ es apparence culture et r seaux Dupuis Fr res et les grands magasins en g n ral ont galement tendance vouloir
181. ue On peut toutefois supposer qu elles aient pu servir remplir le journal qui a de la difficult recruter des collaborateurs ou encore qu elles visent renforcer un message religieux qui passe de plus en plus difficilement aupr s des plus jeunes membres du personnel 126 Du Berger et Mathieu p 101 127 Par exemple dans LD vol 5 n 10 juillet 1931 p 115 128 Autre preuve que DF est un milieu de travail religieux selon Lionel Goyer il y a un crucifix dans chaque rayon Site de l Exposition virtuelle du fonds DFL Famille foi et patrie Entrevue de Lionel Goyer en ligne http experience hec ca dupuis et freres le magasin du peuple famille foi patrie page consult e le 8 mars 2012 42 en 1944 et auquel des centaines d employ s participent aux c t s des dirigeants de l entreprise C est galement un fait largement connu que la famille Dupuis est pr s de l glise catholique ce qui transpara t norm ment dans les archives titre d exemples des membres influents du clerg sont syst matiquement invit s lors de la tenue d v nements sp ciaux et d anniversaires et ceux ci sont plac s parmi les invit s d honneur Les convives consid rent aussi comme un privil ge le fait que ces dignitaires religieux donnent la b n diction avant le repas lors de ces rassemblements Par ailleurs en 1938 lors du banquet organis pour le 70 anniversaire du magasin Raymond Dupuis fi
182. uf pour le mois de d cembre L ditorialiste en d cembre 1952 ne parle que d un vague retour apr s une longue absence vol 14 n 9 p 234 Il n y avait en effet pas eu de publications depuis octobre 1951 82 Joy Santink Timothy Eaton and the Rise of his Department Store Toronto UTP 1990 p 115 Belisle montre plut t que le paternalisme d Eaton s sert donner bonne figure au magasin en masquant l exploitation des employ s et l accroissement de l anonymat au magasin caus par l augmentation du personnel Dans Retail Nation p 88 En ce qui concerne cette question voir l tude de Mary Catherine Matthews voqu e dans l tat de la question au chapitre pr c dent Working for Family Nation and God Paternalism and the Dupuis Fr res 28 En pluchant Le Duprex et les archives de Dupuis Fr res on ne peut effectivement que constater l omnipr sence du paternalisme Par exemple de 1920 1960 les m taphores caract re familial sont fr quentes Cela est d abord perceptible dans le type de vocabulaire employ par les travailleurs et travailleuses tout comme par la direction elle m me De fa on explicite plusieurs reprises celle ci est d crite ou se d finit elle m me en termes paternels ou maternels Ainsi en 1948 la femme du pr sident Albert Dupuis Henriette Beullac adresse ses v ux au personnel pour la nouvelle ann e en leur t moignant sa maternelle affecti
183. up d importance aux pratiques religieuses et au respect des pr ceptes de l glise On peut ainsi faire un rapprochement entre ces travailleuses et les employ es de la Dominion Corset pour qui selon Jean Du Berger et Jacques Mathieu la religion est un r confort Le personnel en tr s grande majorit catholique semble en effet tr s pratiquant tout au long de la p riode l tude ce qui se manifeste de plusieurs fa ons la convention collective interdit le travail le dimanche et lors de f tes chr tiennes lors des sorties organis es la journ e s amorce souvent avec la c l bration d une messe sp ciale pour les participants tous semblent respecter les proscriptions li es au car me etc Le Duprex souligne m me quelques reprises le d part de certaines jeunes employ es qui quittent le magasin pour aller faire leur noviciat Ainsi il est possible de constater que la religion entre 1920 et 1960 est omnipr sente dans la vie de ces travailleuses francophones issues des classes populaires de Montr al Dupuis Fr res organise d ailleurs annuellement une s rie de rassemblements religieux tr s populaires aupr s des employ s notamment des messes En outre des p lerinages sont aussi planifi s par le magasin dont le populaire p lerinage l Oratoire St Joseph inaugur 125 Il est difficile de conna tre avec certitude la raison pour laquelle les rubriques religieuses sont plus abondantes cette poq
184. ureau 59 loisirs des femmes leurs familles leurs enfants leurs mariages et m me leurs animaux domestiques On peut ainsi constater quel point m me pour les femmes ayant un emploi la sph re domestique et la famille occupent une place incontournable En effet leur identit de travailleuses englobe aussi leur identit d pouses m res s urs filles etc Elles int grent ainsi la sph re domestique dans leur culture de travail par exemple en montrant leurs coll gues des photos des membres de leur famille et en changeant ce sujet avec elles ILLUSTRATION 2 4 Blanc blanc BLANC BLANC A l instar du po te des chats Beau delaire et de Loti qui consacra Mou moute blanche et Moumoute chinoise des pages inoubliables le Duprex aime les chats et c est avec plaisir qu il pr sente BLANC BLANC ses lec teurs Ce magnifique angora est la propri t de Mlle Pauline Hudon Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res Limit e P049 Le Duprex vol 9 n 3 mai 1937 p 46 182 Les employ es participent aussi LD par le biais de l expression crite cet aspect sera abord plus loin au chapitre 3 8 LD vol 9 n 3 mai 1937 p 46 et vol 10 n 11 octobre 1940 p 253 Manifestement certaines femmes n h sitent pas d fier les normes traditionnelles de la f minit et s adonnent des loisirs typiquement masculins comme la p che et la chasse ILLUSTRATION 2
185. usions de ces auteurs sont particuli rement utiles pour notre recherche puisque notre but est d examiner le d veloppement de la culture de travail des femmes chez Dupuis Fr res en parall le avec cette construction de la f minit au XX si cle et ce en tentant de voir comment la seconde influence la premi re 1 1 5 La culture de travail f minine L historiographie la plus pertinente dans le cadre de la pr sente tude est sans aucun doute celle qui concerne l identit ouvri re f minine ou en d autres termes la culture de travail des femmes dont a d j trait Porter Benson Joan Sangster d crit le terme work culture comme fhe informal and customary values rituals and rules that are part of the workplace Pratiquement tous les auteurs qui en ont trait ont insist sur l importance et la vari t des rituels et activit s compris dans la culture de travail des femmes souvent li s aux tapes de la vie des femmes comme les fian ailles le mariage ou la naissance des 5 Bilge Yesil Who Said this is a Man s War Propaganda Advertising Discourse and the Representation of War Worker Women during the Second World War Media History vol 10 n 2 2004 p 103 117 i Mary Louise Roberts True Womanhood Revisited Journal of Women s History vol 14 n 1 2002 p 150 155 5 Brigitte S land Becoming Modern Young Women and the Reconstruction of Womanhood in the 1920s Princeton Prince
186. ussi le cas du Blue Bell chez Bell Telephone Bouvie p 43 133 32 de ces mentions sont recens es avant 1939 12 de 1939 1945 et 56 apr s 1945 ce qui montre que les naissances sont plus nombreuses dans l apr s guerre alors que le taux de nuptialit monte lui aussi en fl che 134 DF organise son propre d fil du P re No l Il semble toutefois que cela soit arriv plut t tardivement du moins on n en fait pas mention dans les archives avant 1950 Lionel Goyer employ de 1943 1978 a incarn le P re No l durant neuf ans mais il ne pr cise pas partir de quand AHEC Site de l Exposition virtuelle du fonds DFL No l chez Dupuis Le pays des merveilles en ligne http experience hec ca dupuis_et_freres marketing pere_noel page consult e le 5 mars 2012 Selon Jean Philippe Warren ce n est qu apr s 1945 que le P re No l consolide sa pr sence dans la culture populaire canadienne fran aise et que la commercialisation des c l brations du 25 d cembre supplante les traditions plus chr tiennes du jour de l an Dans Hourra pour Santa Claus La commercialisation de la saison des f tes au Qu bec 1885 1915 Montr al Bor al 2006 p 241 243 Cela pourrait expliquer l arriv e tardive du d fil du P re No l chez DF entreprise tr s ax e sur les traditions religieuses 44 ILLUSTRATION 2 1 Quatre g n rations de femmes Dupuis Source Archives HEC Montr al Fonds Dupuis Fr res
187. ux ann es 1950 le discours social dominant continue de valoriser les fr quentations chastes et bien encadr es Visiblement il peut arriver que les femmes a l emploi de Dupuis vivent des exp riences qui vont l encontre de ce discours et ne font pas reposer leur identit f minine sur le strict respect des vertus comme la pudeur et la r serve associ es la f minit traditionnelle En outre comme cela a d j t mentionn les remerciements pour cadeaux de noces sont galement nombreux on en d nombre 235 au total Tout comme pour l annonce des c l brations ils sont plus fr quents partir de l poque de la Deuxi me Guerre mondiale puisque 82 d entre eux paraissent apr s 1939 sans doute parce que la prosp rit conomique aidant les coll gues de travail sont plus enclins puiser dans leurs goussets pour offrir de tels pr sents De m me plusieurs employ s envoient au journal une photo de leur mariage pour publication dans Le Duprex De plus en plus nombreuses au fil des ans ces images voluent Dans les premi res ann es de la p riode l tude elles montrent surtout le couple sa sortie de l glise tandis que d s la fin des ann es 1940 il s agit plus souvent de la traditionnelle photographie des nouveaux poux qui taillent leur g teau de noces Selon Martine Tremblay les clich s montrant le mari et la femme effectuant ensemble une action voquent la fusion des volont s
188. ux courants modernes de la consommation en recourant un mode de gestion paternaliste D autres chercheurs se sont pench s sur des questions similaires notamment Geoffrey Crossick et Serge Jaumain qui ont dirig et sign l introduction en 1999 d un ouvrage collectif sur l histoire des grands magasins europ ens Dans cette introduction ils mentionnent que les grands magasins ont souvent t l origine de petits magasins qui ont connu une croissance rapide Ils affirment galement que ces tablissements commerciaux ont servi diffuser la Porter Benson Counter Culture Saleswomen Managers and Customer in American Department Stores 1890 1940 Urbana University of Illinois Press 1986 322 pages William Leach Transformations in a Culture of Consumption Women and Department Stores 1890 1925 Journal of American History vol 71 n 2 1984 p 319 342 3 Michael B Miller The Bon Marche Bourgeois Culture and the Department Store 1869 1920 Princeton Princeton University Press 1994 304 pages Geoffrey Crossick et Serge Jaumain sous la dir de Cathedrals of Consumption The European Department Store 1850 1939 Aldershot Ashgate Publications 1999 175 pages culture bourgeoise et ont fait partie de la r volution du monde du commerce sans toutefois tre a la source de celle ci Plus pr s de nous des auteurs ont crit sur les grands magasins canadiens a commencer par Joy L
189. v lent la capacit des femmes rire d elles m mes En ao t 1928 une blague particuli rement savoureuse en t moigne Une dame dit une autre J esp re que vous nous quittez pour une meilleure position L autre r pond Oh non madame je vais me marier 83 Cet extrait montre que certaines femmes jettent un regard critique sur le mariage cette institution traditionnelle au c ur m me de la f minit malgr un discours social qui le glorifie et malgr le fait que la majorit y aspire elles semblent aussi le consid rer avec suspicion sans doute conscientes du fait que s il peut assurer leur s curit financi re il n est pas n cessairement gage de bonheur 8 LD vol 3 n 9 juin 1929 p 11 81 LD vol 3 n 7 avril 1929 p 8 En majuscules dans le texte 2 Voir notamment Claudine Drolet Shawiniganaises et travailleuses Les employ es de bureau de la Shawinigan Water and Power 1945 1963 m moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 2010 p 151 8 LD vol 2 n 11 ao t 1928 p 6 D autres blagues int ressantes se trouvent dans LD Q Que font toutes les jeunes filles chez Dupuis R Elles vieillissent vol 1 n 7 avril 1927 p 5 ou encore Q Quel est le plus long mot de la langue fran aise R La vraie r ponse est anticonstitutionnellement mais je pr f re procrastination parce que cela a plus de sens pour les employ s de magasin
190. valeurs religieuses sont comme les valeurs morales tr s pr sentes chez Dupuis de 1920 1960 et m me au del Albion Jett longtemps en charge du service au clerg Des divisions existent aussi entre le personnel du magasin et celui du comptoir postal en raison probablement de l loignement g ographique de ce dernier situ dans le quartier St Henri Pour faciliter la fraternisation entre les deux corps d employ s DF cr e en 1944 un comit des relations fraternelles Dans LD vol 12 n 4 avril 1944 p 186 123 Nous avons int gr ce document notre corpus d archives puisque c est le seul de ce genre que nous avons pu trouver Nous pouvons supposer que de tels r glements taient galement observ s dix ou vingt ans plus t t Dans le dossier F te champ tre Bromont 1966 F te champ tre Quelques notes l intention du comit d organisation 29 juin 1966 124 LD vol 4 n 6 mars 1930 p 75 41 tient dans le journal d entreprise une rubrique d di e aux nouvelles religieuses qui au d but des ann es 1940 semble prendre de plus en plus d espace Cette rubrique comprend des sections d di es l annonce de la nomination de nouveaux v ques et cardinaux des lettres de remerciement adress es au personnel d vou du service au clerg des photos d v nements religieux etc En dehors du Duprex les employ es semblent accorder individuellement et collectivement beauco
191. voyant des photos personnelles celles d j mentionn es ajoutons les nombreuses photos montrant les moralement et professionnellement de les pr parer accomplir leur r le dans la famille et la soci t ainsi que finalement de les divertir LD vol 3 n 6 mars 1929 p 8 De plus les associations r pudient tout recours ventuel la gr ve comme moyen d action Yolande Pinard Le f minisme Montr al au commencement du XX si cle 1893 1920 m moire de ma trise Montr al UQAM d partement d histoire 1976 p 206 207 Selon Pinard la FNSJB privil gie la formule de la collaboration entre les patrons et les employ es 180 Thid p 204 et 208 Selon Pinard l APEM est aussi guid e par le conservatisme de la FNSJB qui est plut t r ticente au travail f minin p 203 181 L APEM semble conna tre un d clin chez DF d s les ann es 1930 car de moins en moins d articles de LD en parlent Selon Pinard p 212 213 d s 1918 APEM avait connu une baisse de ses effectifs avant de se r organiser en 1926 Elle ne mentionne pas jusqu quand APEM a t active On peut penser que son id ologie conservatrice a nui au fil des ann es au recrutement de nouveaux membres c est du moins ce que sugg re Sangster dans Souriez pour les clients p 120 Par ailleurs pour les travailleuses de bureau l emploi de DF il existe un groupe similaire l Association des Employ es de B
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