Analyse - UCP, mouvement social des aînés asbl
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1. quoi servirait en effet de revendiquer une libert qu autrui pourrait bafouer all grement Or on n imagine pas dans notre conception actuelle que le droit sanctionne celui qui aurait emp ch un suicidaire de passer l acte On voit au contraire les parquets entamer des poursuites et les tribunaux condamner du chef de non assistance personne en danger ceux qui se sont abstenus d intervenir en pareilles circonstances alors que la situation ne pr sentait aucun risque pour eux m mes La tendance est donc la r pression chaque fois que la chose est possible En droit civil aussi le suicide engage diverses responsabilit s il exclut dans certaines conditions que les h ritiers du d funt tirent b n fice de l assurance vie qu il avait souscrite leur profit Il contraint r paration celui qui manque son devoir de surveillance lorsque son prot g profitant de son inattention abr ge ses jours On a vu retirer de la vente il y a quelques ann es un livre intitul Le suicide mode d emploi parce qu il en faisait l apologie en fournissant des moyens s rs pour passer dans l autre monde En conclusion si le suicide n est pas interdit c est parce qu il est impossible de le pr venir Il n en reste pas moins selon l expression la plus parlante un abus du droit d exister La raison en est simple nous sommes prot g s par le droit en tant que membres de la collectivit du corps social La soci t ne sau2. Analyse 2012 16 19 octobre 2012 mouvement social des a n s Mettre fin ses jours ce que le droit nous apprend sur le suicide et l euthanasie d couvrir dans cette analyse Dans cette analyse nous nous aventurons une fois n est pas coutume sur le terrain juridique pour traiter de deux sujets graves qui peuvent parfois h las concerner directement les a n s En effet le droit p nal sert souvent de balise pour d finir dans une soci t donn e un moment donn ce qui doit tre consid r non seulement comme licite ou prohib mais peu pr s bien ou mal En ce sens il influence grandement notre repr sentation de ce que doit tre un tre humain en l occurrence face sa propre mort Questions pour lancer et ou prolonger la r flexion e Le suicide doit il tre consid r comme l expression la plus radicale de la libert individuelle ou au contraire comme la manifestation d un d r glement mental e Sil s agit d une libre manifestation de volont m rite t elle pour autant le respect En poussant le raisonnement l absurde si cette libert se traduisait en droit l tat ne devrait il pas donner tous les citoyens les moyens de mettre fin leurs jours e Quant l euthanasie elle met en sc ne un tiers charg d ex cuter la volont de celui qui d ciderait d en finir Quel tiers la requ te de qui La loi se m fie des assassins charitables autant que des autres
3. On examinera ici l tat de la l gislation ant rieure 2002 pour tenter de bien comprendre ce qui a r ellement chang depuis dix ans en cette mati re ultrasensible Th mes e Suicide e Euthanasie e Mort e Droit Parfois quand la vie semble n tre plus que souffrance une personne g e peut en venir souhaiter mettre d finitivement fin sa vie Dans cette analyse nous prendrons d lib r ment son point de vue nous poserons une s rie de questions et tenterons de comprendre ce qu en dit notre droit et ce que cela implique Le suicide la libert de se tuer Supposons que je d cide de mettre fin mes jours La loi me l interdit elle Assur ment la r ponse est non le suicide n est pas une infraction Si j ai donc toute libert d ex cuter mon projet ai je pour autant le droit de me suicider La r ponse est tout aussi n gative attenter ma propre vie n est qu une possibilit de fait et ne saurait se muer en un droit dont je puisse notamment exiger le respect par autrui Tentons de clarifier ces solutions Si le suicide n est pas r prim c est en vertu de plusieurs principes g n raux de droit En premier lieu la mort de l inculp teint l action publique Autrement dit poursuivre un cadavre serait absurde Ensuite toute peine est personnelle M me s il se concevait de condamner un mort on ne saurait envisager de faire subir une punition d autres que l auteur du crime fussent ils
4. e mort Jean Baptiste Dayez avec l aimable concours de Bruno Dayez juriste et philosophe Pour citer cette analyse Dayez J B 2012 Mettre fin ses jours ce que le droit nous apprend sur le suicide et l euthanasie Analyses En o 2012 16
5. rait consentir la perte d un des siens de la seule initiative de celui ci Si le droit nous institue comme tres libres serait ce donc condition de faire de notre libert l usage qu il tol re Que vaut dans ce cas une libert dont nous ne puissions faire mauvais emploi L euthanasie le droit d tre tu Comme nous venons de le voir je ne suis pas ma tre de ma mort au point de pouvoir imposer mon choix quiconque l obligeant le respecter Pourtant l euthanasie vient d tre partiellement l galis e La loi du 28 mai 2002 change t elle donc la donne Peut on dor navant dire que du moins dans certaines conditions ma mort est moi Pour bien comprendre la port e de cette loi il convient sans doute de rappeler bri vement quel tait l tat du droit avant son entr e en vigueur Dans la rigueur des concepts l euthanasie est un assassinat c est dire un homicide volontaire avec pr m ditation Pour le droit ni le fait que la victime y a consenti ni le mobile charitable ayant anim l auteur des faits n y changent rien En effet d une mani re g n rale le consentement de celui qui subit une infraction n emp che nullement que l infraction existe si nous acceptons de nous faire tuer battre ou d pouiller de nos biens la d fense de l ordre public impose de poursuivre et de condamner de tels actes au nom de la soci t En d autres termes notre vie notre int grit physique notre p
6. rner sa place le cours de son destin Dans cette vision des choses on se demande de quel droit la loi entend imposer chacun en tout tat de cause de subir sa vie jusqu son terme m me s il n en a plus ni le go t ni la volont De ce point de vue d fendre tout crin le caract re sacr de la vie quivaut rendre obligatoire une certaine conception des valeurs qui n est plus commun ment partag e dans une soci t pluraliste le r le de la loi devrait tre au contraire de laisser le libre choix de tout ce qui les concerne aux individus pourvu que l exercice de cette libert n entrave pas celle du voisin Les tenants de cette position ont fait du droit la mort un v ritable fer de lance de ce combat pour l mancipation des personnes consid rant tort ou raison que leur mort est leur affaire propre chacune et qu ce sujet elles n ont de comptes rendre qu elles m mes l oppos les partisans du statu quo d fendaient une tout autre conception de l tre humain caract ris comme tre de relation et d fini par son rapport aux autres Dans une telle perspective lui laisser le choix de mettre fin la relation est per u comme une n gation de son humanit Fondamentalement on voit se dessiner ici une ligne de fracture irr ductible entre deux conceptions de la dignit humaine qu il va falloir tenter de bien distinguer si nous voulons saisir le sens de la loi qui actuellement r git notre mis
7. ropri t sont prot g es en tant qu int r ts publics et nous ne pouvons pas renoncer cette protection parce que le droit consid re qu travers nous ce sont des valeurs fondatrices de la soci t qui sont en jeu Par ailleurs la raison pour laquelle l auteur d une infraction passe l acte est sans aucune port e que l on tue par passion par sadisme par vengeance ou pour tout autre motif ne change rien au fait qu il y a bien meurtre Certes on peut tenir compte du mobile lorsqu il s agit d appr cier combien a m rite autrement dit la juste peine Mais dans le cas qui nous occupe la compassion pour un malade ou le v u de respecter sa volont n teront pas au geste euthanasique son caract re criminel puisqu il se d finit comme tout acte pratiqu par un tiers qui met intentionnellement fin la vie d une personne la demande de celle ci et que nous ne disposons pas de notre vie Ce qui fut donc en jeu dans le d bat qui s est conclu il y a quatre ans c tait rien moins que le droit de mourir entendu au sens fort soit le pouvoir d exiger d autrui qu il nous mette mort si nous en avons d cid ainsi De m me que le droit d avorter consacrait la ma trise de la femme sur le produit de la gestation mon corps est moi fut l un des slogans cl s de ce combat le droit de mourir a t brandi comme une nouvelle conqu te de l individu par rapport un ordre social oppressif pr tendant gouve
8. ses h ritiers Quant refuser une s pulture au coupable ou tra ner sa d pouille autour des murs de la ville ce sont l des ch timents de jadis bien peu compatibles avec nos m urs Enfin le l gislateur pr sume qu un suicidaire n est pas en possession de ses facult s mentales pour vouloir abr ger ses jours il faut avoir atteint le fond du d sespoir et de ce fait m me avoir perdu la raison Le suicide philosophique auquel on se r soudrait au contraire par un exc s de lucidit est tout autant consid r comme une aberration de l esprit C est ce point de vue qui permet de faire chapper la sanction p nale celui qui a tent de se suicider sans parvenir ses fins quoi bon accabler un irresponsable S ajoute ce motif d impunit une raison de pure technique juridique la tentative n est pas r pr hensible si le fait principal en l occurrence le suicide ne l est pas C est une raison similaire qui emp che de condamner la complicit au suicide celle ci n tant pas davantage punissable puisque le fait dont on se rend complice n est pas consid r comme un crime Mais alors si le suicide ne tombe sous le coup d aucun interdit qu est ce qui autorise pr tendre qu il n est pas un droit de l homme mais uniquement une libert de fait C est qu un droit dont je dispose implique dans le chef des autres l obligation de le respecter En effet il n existe pas de droit sans obligation corr lative
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