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INFORMATION TO USERS - Université d`Ottawa

1. Cette image dominante qui retient l attention de Paul Schwartz est bien celle du juif 7 Ibid Bernard Lortholary pr face p 7 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis island op cit p 49 voir Georges Perec Je suis n op cit p 95 Paul Schwartz Georges Perec Traces of his Passage op cit p 80 un ve met mets me 400 victime qui ne doit la vie qu au hasard et l exil L ensemble de l humanit manifeste ce processus de condamnation de la victime marqu e du sceau ind l bile de la lettre Nous sommes dans une civilisation de l crit laquelle nul ne saurait chapper Ce quoi se heurte Perec est bel et bien l opacit de la lettre la rigueur obstin e du message c est dire la pesanteur in vitable de l indicible La victime est vou e l indicible non pas au mutisme ce qui pourrait encore se manifester mais l indicible parce ou elle ne peut s ins rer dans des syst mes s mantiques engendr s par la lettre Ren Girard souligne en effet que la communaut se trouve tout enti re solidaire aux d pens d une victime non seulement incapable de se d fendre mais totalement impuissante susciter la vengeance C est l indicible qui r gle le processus et Perec le pressent bien qui crit Je ne sais pas si je n ai rien dire je sais que je ne dis rien je ne sais pas si ce que j aurais dire n est pas dit parce qu il est
2. En rappelant cette conception de Borges Perec rejette donc une vision ordonn e de l univers non pour les raisons d Auguste Comte car ce dernier avait abdiqu devant l ampleur du probl me mais pour jouer sur la possibilit inou e d un ordre qui se g n re et d g n re par lui m me Dans l oeuvre de Perec dont une relecture pourrait tre ainsi tablie les normes du discours doxique ainsi d jou es persistent tel un squelette Nous d couvrons le sch ma d un montage biotechnologique un sch ma holographique de l tre humain Ce sch ma commande des machines textuelles qui sont des cha nes de montage sur lesquelles les machines transferts apportent des pi ces qu elles bricolent suivant le mod le doxique Les structures de la doxa rel vent d une inf rence g n ralis e fond e sur un mod le interpr tatif canonique Notre ordre de lecture chez Perec ne peut d pendre que de l existence simultan e d ordres divers Il nous faut rechercher une r gle de lecture commune qui fait exploser les dogmes de la doxa C est par exemple ce qu a fait Jacques Jouet non pas pour la lecture de Perec mais pour ses compositions Toutefois pourquoi ne pas passer ensuite la lecture et au d chiffrement de l oeuvre Partant du qualificatif Jorge Luis Borges Fictions Paris Gallimard 1957 et 1965 La Biblioth que de Babel p 73 209 attribu par Perec la grande utopie rabelaisienne lt Thel me Cl
3. crivain dou d un immense actif lectoral Perec ne pouvait manquer d tre inform par ses lectures Contrairement de nombreux auteurs chez qui on va chercher les sources de telle ou telle oeuvre Perec ne con oit pas ainsi la filiation litt raire S il ne d nie pas toute forme d influence il rejette celles qui traditionnellement rattachent le sujet d une oeuvre une autre Il s agit pour lui d en travail sur les genres sur les codes et sur les mod les dont mon criture proc de un certain nombre d auteurs de Joyce Herg de Kafka Price de Sc ve Pierre Dac de Si Sh nagon Gotlib d finissent circonscrivent le lien d o j cris Ce qui l int resse c est le mod le c est dire l exemple voire le r emploi d une oeuvre connue et appr ci e dans ses propres crits l s agit d une nouvelle connaissance en prise directe avec le plagiat dit cr atif Cela sera conforme par anticipation ce que Fran ois Le Lyonnais appelle la lipo analytique puisqu elle recherche des possibilit s qui se trouvent chez certains auteurs sans qu ils y aient pens Alors qu il n tait pas encore membre de l Oulipo l poque Perec manifestera clairement cette tendance dans son premier roman Les Choses Elle sera bien s r accentu e encore par son adh sion au mouvement C est alors que Perec multipliera les techniques de r emploi de textes trangers
4. Ibid Nous avons successivement les textes suivants Petit ab c daire illustr 1970 p 18 Versions latines 1973 p 49 Les adventures de Dixion Harry 1975 p 63 Petite histoire de la musique 1977 p 79 80 Oeuvres Anthumes 1978 p 91 Gamine de blouse 1979 p 112 Rom Pol 1980 p 126 Dictionnaire des cin astes 1981 p 146 et Cocktail Queneau 1982 p 179 180 Marc Lapprand L Oulipo pour qui tude ayant fait l objet d une communication au C I E F Qu bec le 10 avril 1994 dans l atelier d Andr Colombat crire avec critures en collaboration Georges Perec Voeux op cit p 116 et 126 Ibid p 118 176 du nom de la c l bre cantatrice Montserrat Caball que quelques oulipiens dont Perec ont travaill avec ardeur lors d un trajet en automobile Georges Perec qui y participa nous raconte ceci Je ne me souviens plus quel moment pr cis ayant repris la route et luttant contre une certaine somnolence post prandiale que la monotonie autorouti re risquait sensiblement d amplifier la conversation alla porter sur l incomparable cantatrice qui se nomme Montserrat Caball En tout cas le nom seul de cette Diva sublime d clencha dans l automobile une fi vre homophonique qui devint bient t fureur et nous tint bien au del du voyage et bient t rejoints par Paul Fournel Claude Burgelin et B atrice de Juque
5. 3 Ibid p 82 289 post scriptum deux ancrages temporels de ses souvenirs selon les termes de Butor le temps de l criture d abord Ces Je me souviens dont quelques uns ont t publi s dans Les Cahiers du Chemin n 26 janvier 1976 ont t rassembl s entre janvier 1973 et juin 1977 Il nous explique ensuite le temps de l aventure Ces souvenirs s chelonnent pour la plupart entre ma 10 et ma 25 ann e c est dire entre 1946 et 1961 77 Cet effort de localisation temporelle participe d une rationalisation du souvenir c est dire d une tentative de vraisemblabilisation qui a pour but de le rattacher la r alit Cet effort de localisation marque le souvenir du sceau ind libile du pass et le distingue ainsi de l espace du r ve Reconna tre le souvenir comme un fait du pass c est cependant le faire entrer dans une construction intellectuelle Comme nous pourrons l observer le souvenir est un acte de synth se intellectuelle qui vise l int grer un syst me mental plus vaste et qui ressortit une s rie de ressemblances d analogies et de relations logiques relevant aussi bien du conscient que de l inconscient Aussi ne devons nous pas tre tonn s qu un psychologue comme Janet affirme que la m moire est une conduite du r cit La m moire est en effet le principe auto r gulateur d une narrativit des souvenirs Perec parle effectivement d une m moire fic
6. Derni res modalit s de la m moire dans Je me souviens au travers de la pratique rh torique de l allusion ce que nous pouvons appeler la m moire occult e qui vient s opposer la m moire exhib e Pour la m moire occult e nous choisissons deux souvenirs Perec crit en effet Je me souviens de Lee Harvey Oswald et non pas comme il le fait pour Sharon Tate ou Jaur s je me souviens de l assassinat du pr sident Kennedy Pourtant le nom propre de Lee Harvey Oswald d signe l assassin reconnu du pr sident des USA Le nom propre du criminel renvoie la victime selon un jeu hypersignifiant du d codage patronymique Nous retrouvons un m canisme similaire lorsque Perec crit Je me 3 Voir Jean Paul Sartre La Naus e Paris Gallimard 1938 Georges Perec Un Homme qui dort Paris Deno l 1967 p 138 Sur les parall les possibles entre les deux personnages de Camus et de Sartre et les r flexions de Perec voir Pierre Siguret Les exil s camusien et sartrien Meursault et Roquentin comme manifestations du signifiant transcendantal in Exil s Marginaux et Parias dans les litt ratures francophones Actes du Colloque International de l Universit Brock St Catharines Ontario Canada 23 24 octobre 1992 organis par Sandra Beckett Leslie Boldt Irons et L onard Rosmarin Toronto ditions du Gref Collection dont actes n 12 1994 p 133 146 5 Georges Perec Je me souviens op it ent
7. L Appel de Cthulhu pr sent par August Derleth traduit de l am ricain par Claude Gilbert Paris Christian Bourgois Presses Pocket 1975 Dou d un sens peu commun de l observation d une curiosit intellectuelle in puisable et d une m moire sans failles Perec accumule au cours de sa carri re un savoir encyclop dique sur la plupart des sujets majeurs du monde moderne Aussi ne sommes nous pas tonn s de le voir int grer son oeuvre une masse prodigieuse de connaissances des plus vari es C est ce que constate le journaliste Jean Marie Le Sidaner qui s adresse en ces termes Perec Vous utilisez les savoirs contemporains psychanalyse sociologie etc vous les faites contribuer troitement l laboration de vos fictions S il est vrai que Perec emploie toutes sortes de connaissances pour nourrir son oeuvre romanesque on peut cependant remarquer que la science y est employ e sous de multiples aspects aussi bien comme pure rudition que comme ressort fictionnel ou point de d part de constructions ludiques Marcel B nabou remarque que c est principalement l histoire de tous les temps et de tous les pays qui retient l attention de Perec et par voie de cons quence les sciences auxiliaires de l histoire arch ologie philologie pigraphie etc Quant Perec lui m me il ne parle que de la neurophysiologie et de la documentation bibliographique Pourtant les sciences exa
8. Le fonctionnement de la caution r f rentielle est assur dans le cas d Appenzzel par la similitude des pr noms les deux savants s appellent tous les deux Marcel et de plus ils portent videmment des noms impronon ables Le syst me de l association nominale rappelle celui de l id olog me qui selon Marc Angenot conf rent autorit et coh rence aux discours sociaux Ainsi Ibid p 347 Ibid p 348 Ibid p 146 et 148 Voir ce sujet Bernard Magn Le Puzzle du nom Tentative d inventaire de quelques unes des choses qui ont t trouv es au fil des ans propos des noms de personnages dans La Vie mode d emploi in Perecollages 1981 1988 Toulouse Presses Universitaires du Mirail Toulouse 1989 p 166 Marc Angenot Glossaire pratique de la critique contemporaine op cit p 100 t 65 l int gration de noms de savants appartenant au champ r f rentiel dans le champ fictionnel produit un effet de l gitimation du texte romanesque De plus le jeu des oppositions dialectiques la science par rapport l ignorance peut servir de force motrice la di g se Les checs de R mi Rorschash et de Boris Kosciuszko d montrent l exploitation que Perec peut faire de l ignorance volontaire ou non Tandis que R mi Rorschash paie de sa ruine conomique son ignorance des m canismes commerciaux et mon taires de l Afrique noire c est Boris Kosciuszko qui entra ne au d s
9. Tandis que Perec aborde le vaste domaine de la connaissance du monde dans la plupart de ses oeuvres avec un succ s in gal sa plus grande r ussite demeurera son exploration de l autobiographie Il d finit son identit personnelle d une fa on transversale par les jeux de la m moire Dans son recueil Je me souviens Perec a rassembl un grand nombre de souvenirs disparates Il s agit en quelque sorte d une autobiographie compos e et transform e par la foule des souvenirs tant personnels que g n raux Perec joue sur le caract re fictif de la m moire On d couvre ainsi les jeux complexes qu il institue entre la m moire les fantasmes et l criture Perec fait ici la d monstration d un savoir plus intime une qu te personnelle confront e la recherche de la diff rence Au travers d un texte domin par le ressassement des st r otypes Perec lance les bases d une personnalit originale li e une culture populaire L anaphore exhibe alors l importance du verbe c est dire celle du souvenir comme connaissance de soi Mais les liens que Perec tisse entre la fiction et l autobiographie entre le verbe et la lettre entre son identit et la qu te de soi sont encore plus d velopp s dans W ou le souvenir d enfance Les m canismes identitaires passent par des laborations textuelles et langagi res W m lant un texte de fiction une autobiographie Perec h rite Georges Perec Je me so
10. in Collectif Le Plagiat sous la direction de Christian Vandendorpe Ottawa Les Presses de l Universit d Ottawa 1992 p 17 23 Dou d une vaste culture litt raire Perec va exp rimenter les combinaisons des textes de ses auteurs favoris Chacun sait que c est surtout dans La Vie mode d emploi qu il r ussira int grer le plus grand nombre de textes trangers au sien En effet le syst me de contraintes tr s sophistiqu que Perec utilise pour laborer sa fiction lui impose d int grer son texte deux s ries de citations par chapitre II ne manque pas en outre de signaler la fin de son roman la liste compl te des auteurs dont il a utilis les textes Parmi ceux ci figure Kafka dont nous pourrons analyser l int gration d une nouvelle au texte perecquien Cette insertion v rifie les hypoth ses lanc es par les oulipiens Elle v rifie surtout le talent de Perec masquer et exhiber la fois ses emprunts Comme de nombreux critiques l ont remarqu tels Bernard Magn le texte rev t alors un sens enti rement nouveau Ainsi la cr ativit de Perec produit par les m canismes intertextuels une nouvelle lecture du texte de Kafka qui constitue peut tre un renouvellement de la critique Mais Perec s int resse aussi aux transformations des textes selon les hypoth ses de l anoulipisme Ainsi en transformant l incipit proustien dans Esp ces d espaces il se Voir Hans Hartje Bernar
11. la prononciation de ces signes sp ciaux dont les r f rents sont des individus est aussi une violence faite l individu Balzac royaliste crivait toujours Roberspierre Buonaparte Churchill pronon ait toujours nazzi L histoire du nom de Cinoc est en fait un cas limite un cas qui limite la doctrine de l arbitraire du signe force d avoir trop touch ce qui d signe cette chose unique qui est l une vie humaine l histoire ou la g ographie linguistique d Europe Orientale ou l antis mitisme n a laiss qu un ali n un idiot un fou qui ne sait plus dire son nom en un mot un sinoque C est ainsi qu l analyse du patronyme familial vont r pondre les pr occupations alimentaires de Gaspard Winckler Dans W ou le souvenir d enfance Perec voque son origine familiale Marcel B nabou Perec et la jud it in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 26 David Bellos Perec et Saussure propos de La Vie mode d emploi in Parcours Perec op cit p 93 DEET geed 371 Le nom de ma famille est Peretz Il se trouve dans la Bible En h breu cela veut dire trou en russe poivre en hongrois Budapest plus pr cis ment c est ainsi que l on d signe ce que nous appelons Bretzel lt Bretzel n est d ailleurs rien d autre qu un diminutif Beretzele de Beretz et Beretz comme Baruk ou Barek est forg sur la m me racine que Peretz
12. observer le site choisi la Place Saint Sulpice Perec ouvre cette nouvelle tape de son heuristique pour savoir ce que le changement a pu apporter la r alit Pour d tecter ces effets fortuits du changement il passe par diff rentes phases du questionnement pour s ancrer dans l interrogation Par rapport la veille qu y a t il de chang Une premi re tape la similitude Au premier abord c est vraiment pareil Beaucoup de choses n ont pas chang n ont apparemment pas boug les lettres les symboles la fontaine le terre plein les bancs l glise etc moi m me je me suis assis la m me table Il reprend son processus d observation consignation rapidement il prend conscience qu il sombre dans l it ration absolue C est alors qu il d cide d entreprendre une nouvelle tape celle de la diff rence d o ce nouveau sous titre la recherche d une diff rence Perec va alors passer en revue les diff rentes composantes d un d cor devenu familier les caf s ce qu il consomme le plat du jour d un restaurant les cars 35 Ibid p 40 Ibid p 40 7 Ibid p 41 8 Ibid p 41 123 de touristes les d chets et rebuts qui tr nent sur le trottoir Rien ne frappe son attention ou plut t aucun fait issu de la comparaison entre hier et aujourd hui ne peut tre producteur de changements de modifications de transformations L cesse l nigme
13. COLLECTIF La Biblioth que Oulipienne vol 2 Paris Ramsay 1987 393 p COLLECTIF La Biblioth que Oulipienne vol 3 Paris Seghers 1990 377 p QUELQUES OULIPIENS B NABOU Marcel Pourquoi je n ai crit aucun de mes livres Paris Hachette Textes du XX Si cle 1986 129 p B NABOU Marcel Jette ce livre avant qu il soit trop tard Paris Seghers 1992 257 p BENS Jacques Queneau Paris Gallimard 1962 258 p CALVINO ITALO Le Baron Perch Paris Seuil 1960 285 p FOURNEL Paul Clefs pour la litt rature potentielle Paris Deno l 1972 149 p QUENEAU Raymond Loin de Rueil Paris Gallimard 1944 211 p QUENEAU Raymond Exercices de style Paris Gallimard 1947 199 p QUENEAU Raymond Le Chien la mandoline Paris Temps M l s 1958 40 p QUENEAU Raymond Zazie dans le m tro Paris Gallimard 1959 253 p QUENEAU Raymond Cent mille milliards de po mes Paris Gallimard 1961 33 p 430 QUENEAU Raymond B tons chiffres et lettres Paris Gallimard 1965 270 p QUENEAU Raymond Courir les rues Paris Gallimard 1967 199 p QUENEAU Raymond Raymond Queneau en verve Paris Pierre Horay 1970 126 p UENEA jourd hui Actes du Colloque Raymond Queneau Universit de Limoges mars 1984 Paris Clancier Gu naud 1985 245 p QUENEAU Raymond Oeuvres compl tes Paris Gallimard La Ple ade 1989 1700 p QUEVAL Jean et BLAVIER Andr Album Queneau Paris Henri Veyrier
14. Hyst ro prot ron voir Hyst ro proton Hyst ro proton voir Hyst rologie Hypozeugme voir M sozeugme Mesozengine voir Zengine l index s arr te la lettre p au niveau du contenu jeux de mots calembours au niveau du rapport index texte rep rage de ces figures dans le texte De plus les indications concernant les m taboles et les parataxes ne figurent pas l index et ne peuvent donc tre assimil es au texte Nous sommes donc loin des m canismes de la scolastique o le contexte tait n cessaire l interpr tation Il s agit au contraire pour Perec de nier l vidence du contexte en laissant aux figures recherch es leur propre autonomie et ce jusqu constituer un paratexte autonome En r alit l index peut tre utilis comme mod le heuristique permettant d tablir le fonctionnement d un texte d une id ologie ou d une philosophie C est ce quoi pourra nous servir l index d Esp ces d Espaces ou de Je me souviens Les index respectifs de ces deux textes ainsi que ceux de La Vie mode d emploi peuvent ressembler celui de La Boutique obscure qui est appel Rep res et repaires Les assonances rivalisent avec les homonymies et conduisent la confrontation de deux d marches face la prospective intellectuelle se rep rer le rep rage et se prot ger le repaire ou encore la r paration Collectif Georges Perec crire Transformer op
15. Nous remarquons une ultime d nonciation celle de la m moire dans un recueil rassemblant des souvenirs Nous verrons quatre pratiques de cette d nonciation de la m moire ce qui correspond une reconstitution factice du pass Tout d abord la fausse m moire associ e au vrai souvenir du type j ai oubli mais je me souviens de Perec amp Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 256 p 68 18 Ibid entr e n 174 p 50 165 Ibid entr e n 174 p 50 6 Ibid entr e n 175 p 50 67 Ibid entr e n 174 p 50 18 Thid entr e n 187 p 53 77 Ibid entr e n 237 p 64 Georges Perec L infra ordinaire op cit Approches de quoi p 9 13 325 nous propose ceci Je me souviens qu la fin de la guerre mon cousin Henri et moi marquions l avance des arm es alli es avec des petits drapeaux portant le nom des g n raux commandant des arm es ou des corps d arm es J ai oubli le nom de presque tous ces g n raux Bradley Patton Joukov etc mais je me souviens du nom du g n ral de Larminat Tout se passe comme si dans cette entr e Perec n avait retenu que le nom du g n ral de Larminat et oubli les autres mais il les mentionne n anmoins Cela r v le ou bien une construction d lib r e ou bien le jeu du faux souvenir ce qui produit un r sultat identique Le nom du g n ral m moris est occult derri re les noms de ceux que l on a pr
16. On ne peut envisager la connaissance de soi sans une exp rimentation de la m moire L identit individuelle ne saurait tre d finie si on ne la rattache des souvenirs qui appartiennent en propre la personne Mieux encore il faudra que ces souvenirs soient partag s pour caract riser notre appartenance tels ou tels groupes sociaux Le recueil de Georges Perec Je me souviens proc de de cet effort particulier de la m moire En proposant un grand nombre de souvenirs communs ses contemporains Perec exhibe son identit sociale et favorise sa reconnaissance Ces souvenirs sont reconnus pour tre d vidents rep res sociaux qui s assimilent des connaissances communes de nombreux individus qui ont v cu les m mes exp riences dans la m me p riode de temps apr s la seconde guerre mondiale Ainsi le souvenir de par sa consistance sa durabilit et son objectivit en appelle l adh sion enthousiaste du lecteur qui ne s criera pas Comme c est vrai mais plut t Je men souviens aussi La m moire collective est certainement l instrument le plus apte constituer une nouvelle culture populaire Cr er de toute pi ce une nouvelle culture tel sera en effet le propos de Je me souviens Pour cela Perec se fonde sur les m mes instances que la culture traditionnelle et bourgeoise logique int r t partag similarit et familiarit des codes et surtout m moire comme activit d enregistrement
17. cassonade lapin la bourguignonne 6 sauce bourguignonne lapin aux navets 11 servir avec des navets glac s lapin au roquefort 15 saupoudrer largement de miettes de roquefort lapin la saigonnaise 16 envoyer part une sauci re de nuoc man 7 Voir par exemple le lapin au Noilly in Georges Perec Penser Classer op cit p 89 201 sole l oseille 17 servir avec une pur e d oseille Quelques plats remarquables ris au riz 58 servir avec du riz au lait lapereaux happy few 62 envoyer part une sauci re de sauce anglaise Ces deux plats sont remarquables plus par leur d nomination que par ce qui est gastronomiquement r alisable Le premier joue sur le redoublement du phon me ri avec tous les jeux possibles sur l homonymie voire l homophonie et toutes les inversions imaginables confinant aux contrep teries Quant au second il dirige notre attention sur la conclusion de La Chartreuse de Parme et la vocation litiste du roman stendhalien Toutefois la pr tention litiste du plat d nomm lapereaux happy few gt est effac e par l accomodation finale une sauci re de sauce anglaise ce qui par un raisonnement analogique vis vis des autres plats permettrait de d finir le marqueur sauce anglaise comme justifiant l explicite pour parler comme Barthes du plat lui m me Pourtant en d pit de l originalit globale de chacune des d nominations a
18. la science comme caution de ses r cits et ce la mani re de Jules Verne La science ne constitue pas pour lui la garantie d une quelconque v rit C est plut t que toute forme de savoir repr sente ses yeux un catalyseur de la fiction Par ce c t il ressemble aux crivains du Nouveau Roman qui aiment s entourer d un environnement de connaissances pr cises et solides pour ancrer le texte dans un r f rentiel qui fera illusion Mais cette caract ristique n est pas le seul Voir Georges Perec Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner loc cit p 4 Voir Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 375 13 point commun entre Perec et le Nouveau Roman Par exemple il imitera le Butor de La Modification dans son roman Un Homme qui dort Dans ce cas il calquera le proc d de Butor en employant la seconde personne comme voix narrative Bien qu il se soit tenu loign des avant gardes litt raires trois ressemblances peuvent tre relev es entre Perec et le Nouveau Roman Tout d abord Perec partage avec ses auteurs une certaine conception du r alisme selon laquelle la repr sentation de la r alit savoir le roman fait n cessairement partie int grante de la r alit elle m me De plus la fa on du Nouveau Roman Perec construit ses textes partir de contraintes tr s sophistiqu es Finalement son oeuvre t moigne de son int r t pour l objet et sa description exact
19. p 58 Ibid pp 48 et 52 Voir Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage op cit p 143 1 Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit pp 37 41 et 54 128 On passe ainsi de l autonomie des foules pi tonni res ou m canis es la pseudo autonomie des parapluies et des oeufs Du fait d une perception alt r e on glisse progressivement vers un insignifiant l g rement mystifi cela devient encore plus manifeste lorsque Perec utilise tout son talent pour d peindre des situations banales nous avons alors aussi bien des confusions l x matiques que toutes sortes d expressions de l humour de l crivain Les confusions lex matiques sont autant le fait de la contextualisation narrative que de la contextualisation r f rentielle nous avons par exemple Une jeune fille mange la moiti d un palmier Il s agit d un jeu de mots absence de class me explicite d o confusion v g tal p tisserie Deux aubergines toniques Nouveau jeu de mots absence de class me explicite d o confusion v g tal auxiliaire de police idiolectal argot parisien Jeux sur le r f rentiel Un camion livre de la bi re en tonneaux de m tal Kanterbra la bi re de Ma tre Kanters 7 Le Goff tirage bi re 12 Ibid p 24 13 Ibid p 32 8 Ibid p 16 35 Ibid p 17 129 On sort la bi re Le tocsin se m
20. par tous les philosophes de la subjectivit notamment par Husserl Heidegger puis Sartre Ce conflit se traduit par l opposition entre l en soi le monde objectal des choses et le pour soi la conscience Ibid p 6 il donne comme r f rence cette entrevue Jean Duvignaud Le Bonheur p 32 223 humaine dans sa facult de n antiser Face cette probl matique deux tendances se dessinent celle de l cole du regard o l on observe comme dans le Nouveau Roman la multiplication des faits et celle de l introspection o l on d finit les raisons d tre des faits Perec a nettement pressenti dans Les Choses que l homme est le cr ateur des syst mes de signes Mais il les adopte ensuite comme manifestations de la r alit Ainsi l accumulation des objets dans Les Choses semble confirmer la fausse abondance des soci t s contemporaines que justement des essayistes comme Jean Baudrillard vont syst matiser en crivant par exemple Amoncellement Profusion Les grands magasins sont comme le lieu g om trique de l abondance Les vitrines encombr es ruisselantes leurs talages de charcuterie La vitrine de l antiquaire est le mod le aristocratique luxueux de ces ensembles Le premier chapitre du roman de Perec est le moment de l initiation la probl matique Il s agit de la description qui parmi tant d autres recoupe l inventaire du monde La fin de la description es
21. scrivain p 60 70 Paul Schwartz Georges Perec traces of his passage Birmingham Sussex publications inc 1988 ch 2 The Oulipians novels p 31 43 7 Voir Andr Maurois Les Silences du colonel Bramble suivi des discours et nouveaux discours du docteur O Grady Paris Bernard Grasset 1921 1922 1950 240 ame eege 158 pourtouguez avec la terminaison aoung r volution r volu aoung constitution constitu aoung inquisition inquisi aoung Or il y a en fran ais deux mille mots qui se terminent en tion Votre Excellence me doit cinquante francs Fax favor d fallar portuguez La parodie est un agr ment doublement conomique ajoutant aux jeux mon taires les jeux consid rables de la langue Perec s apparente encore Mme H l ne Smith cette jeune glossolale qui faillit enseigner la langue martienne Saussure Le cas de cette personne retient notre attention Tzvetan Todorov nous indique en effet que Mile Smith vit deux romans dans l un elle visite la plan te Mars et communique avec des tres stellaires dans l autre elle vit une aventure orientale qui se passe aux Indes Un professeur de psychologie de l Universit de Gen ve Th odore Flournoy tudie le cas et publie un ouvrage intitul Des Indes la plan te Mars Comme Fournoy identifie et transcrit deux langues le martien et l hindou ou sanscrito des et comme il m co
22. traces Excipient plac bique Q S 98 6 La formule exhibe tous les caract res de ce que Bernard Magn d signe si opportun ment comme la scientificit Mais la formule en appelle encore l allusion comme 19 Thid p 33 34 7 Georges Perec Quel petit v lo guidon chrom au fond de la cour Paris Deno l 1966 108 Thid p 79 80 TT Bernard Magn lt La Cantatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in Perecollages 1981 1988 op cit p 198 69 m canisme d inclusion de savoirs trangers la science Nous avons par exemple les croisements suivants litt rature t l phone et agence de publicit Balzac 001 le num ro de la plus fameuse des agences de publicit bas e sur les Champs lys es dans les ann es soixante litt rature populaire roman d espionnage et code secret James Bond 007 le nom du c l bre agent secret des romans popularis au cin ma par Sean Connery synth se plus pouss e encore que Perec r alisera quelques ann es plus tard en attribuant Marcel Gotlib la r alisation de l un des films au titre des plus prometteurs Balzac 001 contre le docteur Nos litt rature et r putation dose infinit simale Agrippa dobognia Agrippa d Aubign le grand po te des Tragiques au XVI si cle La composition m dicamenteuse affirme cette tonnante capacit de Perec r unir des
23. une purement combinatoire comme pratique d une contrainte et une autre id ologique manifestant une r inscription du d j ditS Soit qu il utilise des contraintes dures soit qu il fasse un r emploi de textes choisis Perec tablit une m thode d criture originale Il faut remarquer qu il privil gie ainsi le signifiant et notamment la lettre pour construire ses textes D une fa on transversale la lettre lui permet de se rattacher un savoir identitaire Aussi est ce la lettre e effac e du texte de La Disparition omnipr sentedans Les Revenentes ou est d di son ouvrage autobiographique W ou le souvenir d enfance Pour E lit on en effet comme d dicace d une autobiographie sous contrainte selon les termes de Philippe Lejeune Contre toute attente Perec exp rimente un nouveau savoir identitaire gr ce aux lettres et aux contraintes qu elles lui sugg rent 65 Voir Claudette Oriol Boyer Le Voyage d hiver Lire crire avec Perec in Collectif Cahiers Georges Perec n 1 Paris P O L 1985 p 146 170 Philippe Lejeune Une autobiographie sous contrainte Magazine litt raire n 316 d cembre 1993 p 18 21 26 La recherche de sa propre identit constitue l un des p les majeurs de l oeuvre de Perec Lorsqu il value son propre travail il ne manque pas de rattacher plusieurs de ses ouvrages une interrogation autobiographique Au nombre de ceux ci figure Je
24. 26 Il est pr f rable de transposer le and de l anglais au et fran ais pour am liorer le rendement ludique des conjonctions nominales 0 Ibid p 15 et p 26 lIbid p 14 digestive et p 26 Voir Bernard Magn La Cantatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in Pere ollages 1981 1988 op cit p 201 Georges Perec ibid p 14 saccular et p 28 80 Dix sept recettes faciles au chou et l ail Avec des tomates r cup ration des projections l usage des cantatrices seulement reprise des noms d auteurs Mace I et Doyne J Sur les diff rents types de r actions tomateuses chez la cantatrice r cup ration plus compl te conduisant des recettes plus vari es Actualit et Hommes politiques Giscard d Estaing V Discours aux transporteurs routiers de Rungis Maotz E et Toung I Tomatic innervation of the nucleus ruber au temps de la r volution culturelle et des gr ves possibles tude des activit s simiesques singeries sinologues Chou O et Lai A Note on the tomatic inhibition in the singing gorilla Chou O et Lai A 4 Ibid p 13 et p 29 4 Ibid p 14 et p 29 7 Thid p 28 6 Ibid p 14 Rubrospinal et p 29 81 Faradic response to tomatic stimulation in the buzzling ouistiti invitations pouss es jusqu leurs extr mes conclusions Comptines enfantines Op ra Chants
25. 89 90 7 Ibid entr es n 334 n 335 et n 336 p 85 86 7 Ibid entr es n 164 165 et 166 p 48 a 320 Georges comme travailleur de la terre 150 et une autre traduction celle du syntagme am ricain cow boy comme gar on vacher 191 L ignorance commande bien des surprises lorsqu elle est d voil e mais l apprentissage engendre aussi une l gitime fiert celle que Perec prouve en apprenant ceci le coca cola bu par les soldats am ricains contenait de la benz drine et Perec proclame qu il tait tr s fier de savoir que c tait le nom scientifique du maxiton Une autre fiert li e sa pr cocit est mentionn e dans ce souvenir Je me souviens que j tais fier de conna tre et d utiliser relativement t t des mots et des expressions comme la rescousse estafette caduc e des potron minet L acquisition du langage rev t donc une importance capitale d j manifest e par la plupart des cas pr c dents en associations paradigmatiques Le dernier exemple confirme cette tendance dans l avalanche des d riv s Je me souviens que j tais fier de conna tre beaucoup de mots d riv s de caput capitaine capot chef cheptel caboche capitale Capitole chapitre caporal etc Ces deux derni res entr es sont class es la rubrique Langage dans l index ce qui r v le l importance accord e par Perec au d veloppement de ses c
26. Cependant c est en int grant l Oulipo que Perec va s ouvrir bien des proc d s novateurs propres de nouvelles formes d intertextualit Or l un des membres fondateurs de l Oulipo Fran ois Le Lionnais nous explique ainsi les deux tendances qui partageaient le mouvement dans son premier manifeste D une part une tendance novatrice appel e synthoulipisme mot valise form de synth se et d Oulipo qui d signe tous les proc d s litt raires et combinatoires aboutissant de nouveaux textes et d autre part une seconde tendance d sign e anoulipisme mot valise galement form d analyse et d Oulipo dont l objectif est de travailler sur les oeuvres du pass pour y rechercher des possibilit s qui d passent souvent ce que les auteurs avaient soup onn C est cette seconde tendance qui va marquer Perec dans le croisement de ses textes pour reprendre l expression de John Pedersen Il s agit en effet de consid rer les textes du pass comme des objets d analyse que l on transforme et sur lesquels on peut conduire une exp rimentation Fran ois Le Lionnais La Lipo le premier Manifeste in Collectif Qulipo La Litt rature potentielle Paris Gallimard 1973 p 17 3 Ibid p 17 Voir John Pedersen Perec ou les textes crois s Copenhague tudes Romanes de l Universit de Copenhague 1984 Voir Marcel B nabou Les ruses du plagiaire exemples oulipiens
27. Christian Bourgois diteur 1975 DEET ET 102 Carrefour Mabillon ou surtout la Place Saint Sulpice ou pour les observer selon des tapes de longue dur e comme pour la rue Vilin premier projet de Lieux que ce soit encore pour les accumuler selon des inventaires en confrontation constante un contexte variable ou encore pour d jouer la prison existentielle Perec r unit toujours les l ments et les qualit s n cessaires l laboration d un savoir nouveau relevant d une herm neutique du quotidien Chez Perec l interrogation sur l insignifiant est le fruit d une longue maturation mais aussi celui d une lassitude accumulative Certes l influence des pr occupations du groupe de Cause Commune a pu polariser l attention sur des ph nom nes jusqu alors ignor s du savoir officiel La lassitude comme second facteur proc de la fois des tendances pr c dentes mais repr sente aussi un aspect innovateur dans une recherche de la sociologie du quotidien Par la voie d une analyse interne Perec recoupe effectivement sa recherche sur l insignifiant avec son interrogation sociologique et ses liens avec l quipe de Cause Commune Elle proc de aussi de la lassitude face l effet m diatique du spectaculaire Il s insurge avec v h mence et lucidit contre ce qui fait l attrait et le profit conomique de la presse savoir comme si la vie ne devait se r v ler qu Georges P
28. Festschrift am Arturo Toscanini herausgebeb vom A Pick I Pick E Kohl et E Gramm Musique instruments de musique Balala ka P Deafness caused by tomato injury Observations on half a Casel sourds s abstenir tude portant sur un demi cas seulement Vulcanologie Pompeiano O Vesuviana A Strombolino H et Lipari G Volcaniche effetti della formazione reticolare nella funiculi funicula sujets au vertige s abstenir Ascenseurs pi ces mont es Charlotte Roux C F et Combaluzier H U Le syndrome de Charlotte W7 Ibid p 13 et p 27 8 bid p 27 Ibid p 14 auditive et p 26 7 Ibid p 14 reticular et p 31 tSt Ibid p 13 et p 31 82 ce quoi peuvent servir les ascenseurs pour les artisans p tissiers trop petits Otis J et Pifre K Gasping in the ascending pathways In Hommage Henri Eiffel ed by D Haux et D Bas Paris CNRS pour ceux qui ne sont pas afflig s par les hauts et les bas de la vie Syst me de la mode v tements Mc Hulott E Mac Haskett E et Massinture E T C Fate of exogenous C scotch U bloodymary and other tritiated compounds injected in laryngeal and pharyngeal pathways traitement vestimentaire base de carbone et d uranium poids atomiques L4 et 235 Proverbes syntagmes fig s devises Jeanpace L et Desmeyeurs P Recherches histologiques sur les noyaux de Pesch et de Poissy Karybb H et Szyl H Of birds and m
29. Graham B 336 Grandgousier 138 Gratiolet O 63 64 Grenier J 95 Greimas A J 65 248 258 Grifalconi 420 Grimm J 395 Grincheux 319 Grivel C 243 Guarretos J 157 Gu non R 341 359 364 365 368 369 394 Guyomard 42 Haddock Capitaine 191 Halbwachs M 290 Halter M 385 Hamlet 166 167 Hartje H 9 23 40 270 414 Hassoun J 356 357 358 359 Hatteras Capitaine 190 Haviland OW A 330 H bert P 40 44 Heidegger 222 Heimick Beavin J 110 Henri Cousin 321 Henry Professeur 160 Herbert F 396 Herg 213 Herv A 24 Hill L 13 21 Hitler A 328 358 360 401 Hjelmslev 64 Holm s P 342 Hom re 11 Horace 11 Houvion 171 313 Hugo V 106 107 191 Husserli E 222 293 451 Imbert P 103 301 310 343 364 369 373 374 376 Ionesco E 176 Ivanovitch Boufnarine D 315 Iznogoud G V 280 Jakobson R 160 381 Jakson D 110 James H 329 Janet P 289 295 Jaur s 317 326 Javaloyes Espi O 366 Jazy M 171 172 173 177 313 Jenny L 232 J r me B 42 45 178 J r me Les Choses 67 221 231 233 237 J sus 351 364 365 402 Jolivet J 265 Jonas 187 Jospin M 317 Jouet J 208 209 210 Joukov 325 Joyce J 53 213 272 Juda 372 J nger E 409 Juquet B de 176 Juv nal 11 Kafka F 23 42 213 214 215 217 239 240
30. Julliard 1965 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 70 72 Ibid p 72 Voir Georges Perec Esp ces d espaces Paris Galil e 1974 p 25 417 pas expliquer le texte Ce sont plut t des compl ments heuristiques des suppl ments partir desquels le lecteur peut inventer cr er son propre texte Les m canismes de l intertextualit perecquienne sont donc infiniment complexes l crivain devenant lui m me un carrefour de textes qui s anastomosent On peut donc admirer la richesse que Perec sait faire surgir de ces confrontations entre les textes Ainsi se d gagent progressivement des relations peu courantes entre le savoir sur le monde et le savoir sur soi Ce sont finalement des savoirs que l criture perecquienne met en sc ne dans la recherche autobiographique On reste frapp s par la consid rable prolif ration des souvenirs dans Je me souviens recueil o Perec r ussit une sorte d autobiographie collective Dans cet ouvrage Perec se livre l enregistrement d une connaissance peu conventionnelle h t rodoxe et h t rog ne Il s agit d une esp ce de mod lisation de la m moire de la d monstration du caract re fictif de la m moire et de ses rapports avec l oubli On assiste par le rassemblement des souvenirs disparates une vaste d tection des faits leur s lection leur regroupement leur classification leur hi rarchisation et leur fixation Perec vise
31. Paris Je me souviens de la soir e Oulipo au Centre Beaubourg lorsque Georges parla d Ma Van Zapatta l Alhambra Madmax Quatr collectif La Biblioth que Oulipienne Volume 2 Paris Ramsay 1987 p 90 Ce qui donne lieu la succession lectorale suivante 1 Georges Perec 2 Marcel B nabou 3 Pierre Siguret 384 savoir sans raison sans intelligence ne lt figure t il pas linfini du langage et ne pourrait il pas se terminer par ce myst rieux Abracadabra Ce mot si galvaud par les prestidigitateurs de cirque et autres magiciens de f te foraine au chapeau vomissant les lapins ou les colombes au gr des affinit s du praticien attire lui immanquablement la curiosit du public Il poss de les vertus du code herm neutique comme le lui reconna trait certainement Roland Barthes Mais d o vient ce mot trange Presque impronon able Que recoupe t il Se pourrait il qu il soit finalement li cet impensable qui fascine Perec On peut imaginer que ce terme peu commun provient d une extension d formation du mot grec Abraxas ou Abrasax et qu il aurait t employ par les alchimistes du XV si cle Il s agit bien d un terme mystique utilis par les gnostiques qui recomposaient sa valeur gale 365 suivant la num rologie grecque ce qui l identifie l ann e solaire mais aussi aux 365 manations ou d ploiements successifs de la D it Mieux encore abracadra pourra
32. Perec a su galement employer celles des p ritextes ou paratextes Ce sont ces index ces chronologies ces post scriptum tout ce que G rard Genette appelle paratexte ce qui est autour du texte savoir titre sous titre intertitres pr faces postfaces 7 Voir aussi collectif Oulipo Atlas de litt ratu tentielle Paris Gallimard 1981 Claude SS Boules de neige et hyperavalanche ce vers Ce jour l je me suis couch de bonne heure p G rard Genette Palimpsestes op it p 64 7 Ibid p 64 58 Ibid p 64 7 Ibid p 64 too Voir G rard Genee Seuils Paris Seuil 1987 264 avertissements avant propos etc notes marginales infrapaginales terminales pigraphes illustrations pri re d ins rer bande jaquette et bien d autres types de signaux accessoires autographes ou allographes CC Aw Toutes ces excroissances textuelles n ont pas manqu d int resser les oulipiens Elles en viennent m me expulser le texte de la place qui lui revient dans une oeuvre de Paul Fournel intitul e Banlieue titre dont l allusion m taphorique ne saurait tromper personne En effet le texte de Banlieue est enti rement vacu au profit du p riph rique du p ritexte le paratextuel nom de l auteur titre sous titre Le Scandale pr face postface bande avertissement note liminaire de l auteur notes infrapaginales dossier p dagogique index table des mat
33. Perec et la jud it in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 26 106 Thid p 27 Voir l article de Philippe Lejeune Dire l indicible La M moire et l oblique op cit p 15 57 Voir Warren F Motte The Poetics of Experiment op cit chapitre VII Metaliterature o le critique explique la structure des emprunts de Perec TH Voir Patrick Imbert Construction et discours op cit p 46 Voir aussi R gine Robin Le Deuil de l origine Une langue en trop la langue en moins Saint Denis Presses Universitaires du Vincennes 1993 p 183 374 kabbalistes Le mat riel et ou le mat riau ultimes restent les lettres comme l affirme aussi Georges Perec lt les lettres une une se d tachent et viennent se fondre dans les mots jusqu ce que prenne la mayonnaise du texte Ces innombrables textes qui ont pris dans la mayonnaise universelle des lettres et des mots en appellent l ex g se et celle ci l ex g se des ex g ses C est le lent processus de la multiplication des significations confront un arr t brutal par des pouvoirs autoritaires qu il s agit de d jouer Et dans ce but il faut dire l indicibles c est dire l impr visible c est dire l impensable C est ce point de fuite vers lequel s lance celui qui prend la plume ou appuie sur les touches de son ordinateur de composition L crivain surtout Perec fixe le de
34. Qulipo La Litt rature potentielle op cit p 74 152 E et en Z de Raymond Queneau dont voici un extrait Ondoyons un poupon dit Orgon fil d ubu Bouffons choux bijoux poux puis du mou du confit buvons non point un grog un punch On peut donc aussi bien supprimer une lettre que plusieurs et toutes les combinaisons sont infinies mais les cons quences de ces abstentions ne peuvent tre les m mes On ne saurait comparer la proscription d une consonne celle d une voyelle et parmi les voyelles celles qui sont les plus indispensables aux vocables On sait par exemple qu en h breu langue dont ou n crit pas les voyelles plusieurs lectures du texte sont toujours possibles Ces cons quences sont envisag es par John Lee dans son article au sujet du po me de Mallarm r crit par Perec Brise Marine qui devient Bris Marin po me introduit dans La Disparition Voici essentiel des conclusions de Lee Au niveau des microstructures mots phrases multiplication des liens entre les mots c est dire assonances rimes anagrammes Au niveau des macrostructures phrases paragraphes expansion du vocabulaire et multiplication des registres linguistiques Au niveau des superstructures textes intertextes Raymond Queneau Lipogramme en A en E et en Z in ibid p 94 7 Ibid p 94 St phane Mallarm Po sies Paris Gobier 1974 Georges Perec La Disparition o
35. Si Perec nous impose en effet ses centres d int r t ses go ts et ses obsessions on peut n anmoins affirmer qu il est galement sous l emprise des constantes id ologiques qui d terminent ses choix au moment de la conception de l ouvrage Cet univers id ologique impose galement un ensemble de paradigmes explicatifs et d terminera aussi la pr sentation des souvenirs et leur d codage dans la lecture Il importera donc d en tudier les ruptures comme dirait Barthes Georges Perec Je me souviens op cit p 119 S Paul Schwartz Georges Perec Traces of His Passage Birmingham Suma Publications inc 1988 p 62 Voir Roland Barthes Les Sorties du texte in Bataille Colloque de Cerisy op cit p 2 298 Nous pouvons en effet consid rer les entr es s lection pr sentation et les sorties du texte lecture comme solidaires d un ensemble de souvenirs rediffus s par la m moire s lective Ce seront des configurations qui nous permettront d laborer plusieurs syst mes de regroupement des points selon une multiplication construite de leurs instances et selon leur rapport avec le niveau externe de la lecture Nous rattacherons ces processus d examen une herm neutique relevant d une programmation quasi oulipienne Pourtant les m canismes apparents d association comme les relations th matiques permettent uniquement une classification des ph nom nes de la m me fa on que le climatologu
36. _cit Sylvie Rosienski Pellerin Jeux p ritextuels Quel Petit V lo guidon chrom au fond de la cour de Georges Perec pp 34 35 2 Voir ce sujet Umberto Eco ioti Phil hi l Op cit p 163 TT Georges Perec Esp ces d Espaces op cit pp 124 125 Georges Perec Je me souviens op cit pp 123 146 Georges Perec La Boutique obscure op cit 270 se r parer comme remis en tat Cela est d autant plus clair lorsqu il s agit de rep rer l laboration chronologique de la di g se dans La Vie mode d emploi puisque l une des pi ces annex es est constitu e par des rep res chronologiques Ajoutons cela le Rappel de quelques unes des histoires racont es dans cet ouvrage Alors le lecteur pourra tablir ses propres romans soit en d finissant de nouvelles pistes de lectures soit en modifiant la succession des v nements de la di g se soit encore en recombinant les romans selon un personnage un th me un instrument qui figurent l index On peut imaginer une lecture th matique de La Chartreuse de Parme selon un index tabli par Perec Nous aurions alors campagnes napol oniennes passion amoureuse Toscane et Milanais vie politique querelles de cour joies mystiques de la religion etc C est cependant ce que font aussi bien des amateurs que des sp cialistes qui puisent dans leurs lectures l laboration d une fantasmatique personnelle Pour ce qui est de La Vie mod
37. combiner 81 recettes de cuisine partir d une s rie d ingr dients de base permutables visant ainsi l puisement de leurs permutations L exp rimentation du langage s effectue donc d abord selon deux niveaux en premier celui des lettres et en second celui des mots Aux nombres de ces exp rimentations nous trouvons les mots crois s de Perec que nous n avons pas retenus En effet les Georges Perec De la difficult qu il y a imaginer une Cit id ale in Penser Classer op cit p 129 Georges Perec Quelques unes des choses qu il faudrait tout de m me que je fasse avant de mourir in Je suis N Paris Seuil 1990 p 105 Georges Perec 81 fiches cuisine l usage des d butants in Penser Classer op cit p 89 Georges Perec Les Mots crois s Paris Mazarine 1979 Georges Perec Les Mots crois s IT Paris Mazarine P O L 1986 pb penari 21 mots crois s sont construits selon deux contraintes celle de la grille et celle des d finitions Ces contraintes recoupent celles d autres textes que nous avons consid r s La ma trise des contraintes des variations et des combinaisons transforme notablement la connaissance que nous pouvons avoir du langage et de ses potentialit s Mais grand lecteur lui m me Perec voudra galement exp rimenter le langage sur un autre plan Ce seront alors les combinaisons des textes qui retiendront son attention Cette exp rimentation conduira
38. gions que Perec consid re comme mineures Il termine sur quelques bi res et une impressionnante Georges Perec Tentative d inventaire des aliments liquides et solides que j ai ingurgit s au cours de l ann e mil neuf cent soixante quatorze in L Infra ordinaire op cit p 97 5 Ibid p 97 1S Tbid p 97 155 Ibid pp 98 100 et 101 138 liste d alcools manifest e par une solide consommation cinquante six armagnac quatre cognac trente six vodka quatre whisky Peu de choses sur le cours d une ann e en v rit si l on doit s interroger sur le go t de Perec pour la dive bouteille Ce sont plut t les vins mill sim s qui lui plaisent davantage et notamment des grands crus Lalande de Pomerol Chateau Margaux Aloxe Corton Mercurey Pommard Chambolle Musigny Ce sont essentiellement des vins rouges fran ais ce qui nous rend compte du peu d attrait qu exercent sur Perec les cuisines exotiques un peu la mani re de Barthes Le regroupement final qui r sulte de cette accumulation de plats et de vins produit une monstrueuse masse de signifiants appelant le jeu interminable du d chiffrement C est l le r sultat cons cutif de tout inventaire vers le comique de r p tition avec Moli re vers le rire de l accumulatin avec Pr vert et ses ratons laveurs et vers la monstrueuse d gustation ludique chez Perec parodiant volontairement ou non Rabelais et les repas de Grandgousier ou de Ga
39. il s y montrait au moins aussi imaginatif qu un Ponson ou qu un Paulhan La d monstration se poursuit au travers d une accumulation de concepts dont les signifiants d signent des substantifs abstraits suffix s en ion Quelques exemples de la parodie de la th orie et des exc s de la th oricit nous sont donn s par Perec L ambition du Scriptor son propos disons son souci son souci constant fut d abord d aboutir un produit aussi original qu instructif un produit qui aurait qui pourrait avoir un pouvoir stimulant sur la construction la narration l approbation l action disons d un mot sur la fa on du roman d aujourd hui Il s agit bien d une auto th orie usage interne pour renvoyer aux th ories du roman pr existantes dont les propos sont bien loign s de l ambition du scriptor parce qu elles visent les contraintes bien trop traditionnelles du r alisme psychologique et du r alisme moral qui sont tout autant que le lipogramme le r sultat de l imagination de l auteur Le scriptor justifie sa d marche puisqu il y assouvissait jusqu plus soif un instinct aussi constant qu infantin ou Georges Perec La Disparition op cit p 310 3 Ibid p 309 Voir ibid p 311 css anam 157 qu infantile son go t son amour sa passion pour l accumulation pour la saturation pour l imitation pour la citation pour la traduction pour l
40. impression d une description purement behaviouriste du bonheur de ses h ros J r me et Sylvie mise part la transparence des coeurs les class mes du corps et du physique raccourcissent l analyse de toute notion psychologique introspective ou morale La d monstration du corps heureux s effectue autour du class me de l expression gestes regards sourires et m me les coeurs sont des expressions du corps et ces class mes t moignent esth tiquement du bonheur par identit des parcours figuratifs corps bonheur beaut Il existe donc d incontestables analogies qui fondent l intertextualit Flaubert Perec Celles ci sont d lib r ment choisies par notre auteur ainsi qu il l a r v l dans sa conf rence de Warwick Mais en r crivant Flaubert en produisant une intertextualit Perec nous force une relecture du romancier du XIX si cle L effet d intertextualit est la concr tisation de infinit du code selon les termes de Kristeva On ne pourra d sormais lire Flaubert sans viter une assimilation Mireille Ribi re Parcours Perec op it p 36 7 Julia Kristeva S m iotik Recherches pour une s manalyse op cit p 175 1 luet dene SE Eege 238 voire une pseudo assimilation Perec selon les m canismes propres du plagiat par anticipation C est ainsi que Michel Schneider revenant au mod le original de Perec L ducation sentimentale de Flaubert caract ri
41. ins rer dans les b timents de leurs si ges sociaux ce qu ils pouvaient consid rer comme le nec plus ultra de la grande architecture classique l incorporation de colonnes doriques ou corinthiennes aux difices n o gothiques ceci n a pas donn lieu l apparition de quelques monstruosit s contre natures comme si l on greffait une corne de rhinoc ros sur la t te d un lion du d sert mais plut t a favoris l mergence d un baroque nouveau Quant l expression de Bernard Magn elle correspond v ritablement une analyse critique pouss e l extr me de ses possibilit s ce que nous verrons plus loin Cette insertion de fragments emprunt s est videmment lev e la hauteur d une institution par le Perec de La Vie mode d emploi comme le signale le post scriptum mentionn pr c demment Nous avons remarqu comment dans son interview accord Gabriel Simony Perec insiste sur le concept de puzzle Or l id e de puzzle implique de nombreuses techniques relatives la mat rialit de la construction il s agit de celles du d coupage de l insertion du collage et du gommage ce qui recoupe aussi l id e du montage cin matographique aussi bien par les effets du fondu encha n que ceux du montage choc inaugur par Eisenstein partir de cette influence ind niable du septi me art sur Perec il y en a bien d autres remarqu e aussi par B nabou il nous faut r fl chir sur l int gratio
42. la tentation d oublier tout de m me quelque choses TH dans ce cas ce serait plut t la tentation de r p ter quand m me ce qui a t d j fait Cela nous conduit une nouvelle assimilation de la cuisine au texte Ceci n est rien moins que scolastique mais cette seconde recette confondue la premi re nous renvoie la mayonnaise du texte qui prend finalement selon ce qu annonce Georges Perec dans sa contribution l ouvrage de Bernard Magn Perecollages Georges Perec Prise d criture 18 Ibid p 101 Ibid p 101 Ibid Les Joies ineffables de l num ration p 167 AN rover em 203 les mots d terminent les mots les lettres une une se d tachent et viennent se fondre dans les mots jusqu ce que prenne la mayonnaise du texte 71 La premi re surprise pass e on peut s merveiller de la productivit de la combinatoire m taphoriquement comparable une huile que l on verse sans interruption comme dans la mayonnaise Cet exercice de cuisine litt raire pourrait constituer un nouvel avatar de l Oulipo qui pourrait tre appel l OuCuiPo selon les propres termes et les conclusions de Claude Berge et d ric Beaumatin Si ce r sultat est sans doute la limite du gastronomiquement exp rimentable il nen t moigne pas moins brillament par l criture de ce que pourraient tre d un point de vue plus r f rentialiste certaines activit
43. me si celui ci peut se d finir comme lt un miroir d formant du texte une organisation parall le qui permet de reprendre autrement le ruban de la m moire 7 il est possible d j gr ce lui d valuer les composantes du recueil comme l ments fondamentaux d une culture populaire Ainsi avons nous statistiquement parmi les rubriques les plus importantes la classification suivante 3 Andr e Chauvin Jeu de m moire et histoires de mots dans Je me souviens de Georges Perec Les Cahiers du CRELEF op cit p 56 GEEEEEETT Georges Perec Je me souviens op it index p 123 146 Acteurs de cin ma Politique Sports Guerres toutes confondues Music Hall Vie quotidienne Films Publicit Jazz missions de radio Cin ma salles de Chansons Folklore enfantin Langage Alimentation Faits divers Internat Musique Classique R alisateurs de cin ma Jeux de mots voir aussi langage Th tre salles de Voitures Mode principalement vestimentaire Litt rature contemporaine 333 38 entr es 32 entr es 32 entr es 27 entr es 26 entr es 26 entr es 25 entr es 21 entr es 20 entr es 19 entr es 18 entr es 17 entr es 17 entr es 16 entr es 15 entr es 15 entr es 10 entr es 10 entr es 10 entr es 9 entr es 9 entr es 9 entr es 7 entr es 6 entr es l issue de l examen nous constatons que les rubriques les plus importantes sont celles q
44. miotique en action Elle est l activit consciente et inconsciente se tra ant par l criture Lorsque Husserl crit que la v rit a un besoin essentiel de criture nous pourrions ajouter aussi que l approximation la d formation le mythe en ont galement besoin Si la signification de la v rit est li e au logos comme cautionnement on peut aussi affirmer que la m moire puise dans le logos le r tablissement de la v rit comme pr sence La m moire est une tentative pour abolir l oubli Elle reconstitue partir de absence du pass partir de l oubli du refoulement et de la sublimation En effet l oubli est le compl ment de la m moire On dit aussi que l art d apprendre c est l art d oublier Il s op re une s lection par la m moire et l on peut oublier par le manque de fixation par le refoulement par l effacement par l enregistrement erron Dans une civilisation de l crit on peut consid rer que l criture pourrait tre le meilleur moyen Georges Perec Je suis n op it p 81 3 Edmund Husserl Origine de la g om trie Paris Fayard 1956 p 211 Voir Jacques Derrida De la grammatologie Paris Minuit 1967 p 27 pat 294 d oublier On conna t l importance par leur lien la violence des proclamations publiques par voie d affichage publication des arrestations des actes de condamnation des avis de recherche des mesures prises en cas d pid mie
45. p 167 Deeg une 205 N emp che que l on continuera encore longtemps cat goriser tel ou tel animal selon qu il a un nombre impair de doigts ou des cornes creuses Les aspirations les plus optimistes de l homme sont d menties par les faits Perec nonce tous les espoirs du positivisme comme puisement de la r alit Dans la derni re tape de l volution de l humanit Auguste Comte avait d crit celle ci comme l tat positif Enfin dans l tat positif l esprit humain reconnaissant l impossibilit d obtenir des notions absolues renonce chercher l origine et la destination de l univers et conna tre les causes intimes des ph nom nes pour s attacher uniquement d couvrir par l usage bien combin du raisonnement et de l observation leurs lois effectives c est dire leurs relations invariables de succession et de similitude quoi donc pourra aboutir la d marche positiviste ceci que Comte anticipe avec espoir la perfection du syst me positif vers laquelle il tend sans cesse quoiqu il soit tr s probable qu il ne doive jamais l atteindre serait de pouvoir se repr senter tous les divers ph nom nes observables comme des cas particuliers d un seul fait g n ral tel que celui de la gravitation par exemple 7 Par deux voies distinctes Perec et Comte aboutissent aux m mes conclusions chercher un code unique une loi universelle qui r
46. p 45 46 Burgelin explique que le blanc est pour Perec la couleur m me de l ambig it confuse des signes Voir par exemple Andy Leak W Dans un r seau de lignes entrecrois es souvenir souvenir cran et construction dans W ou le souvenir d enfance in Collectif Parcours Perec Colloque de Londres mars 1988 textes r unis par Mireille Ribi re Lyon Presses Universitaires de Lyon 1990 p 83 Jean Paul Sartre Qu est ce que la litt rature Paris Gallimard 1948 p 46 fus ue a me 349 Claude Burgelin lt le terreau germinatif de l imaginaire a t constitu pour lui avant tout par les syst mes signifiants lettres chiffres symboles L investissement de l espace par la lettre par l crit correspond donc l une des premi re polarit s du corps confront au domaine exclusif de la connaissance Chez Perec la lettre transite encore par le m canisme du premier souvenir Avant d analyser ce dont il s agit il convient de remarquer la vigueur de l assertion le premier souvenir Toutefois une pr caution oratoire pr alable vient nuancer son rappel Perec crit en effet Mes deux premiers souvenirs ne sont pas enti rement invraisemblables m me s il est vident que les nombreuses variantes et pseudo pr cisions que at introduites dans les relations parl es ou crites que j en ai fait les ont profond ment alt r s sinon compl tement d natur s M me si Philippe Lejeun
47. papillons baladeurs de l le Iputupi est un mod le du genre C est ce que fit en son temps et pour d autres raisons d Alembert en formulant des lois physiques vraisemblables pour le sens commun mais pourtant totalement fausses du type C est en hiver qu il doit surtout tomber de la gr le car l air est plus froid De l abus du bon sens chez d Alembert l usage d tourn des cadres scientifiques chez Perec nous retrouvons les m mes possibilit s de d viations du savoir Il semble que ce soit dans ce cadre sp cifique de l exp rimentation que l int gration du savoir la fiction soit la plus ais e Cependant les strat gies narratives de Perec sont extr mement vari es Dans ce sens les sciences exactes servent galement de savoirs r f rentiels pour consolider la vraisemblance de nombres d pisodes o Perec met en sc ne des savants La nature des rapports de Perec aux formes classiques du savoir scientifique sera de deux ordres D une part il existe dans son oeuvre un rapport ludique qui se manifeste dans les devinettes voire les nigmes que Perec pose implicitement son lecteur Si l on sait ce que sont des orages magn tiques que sont donc ces miettements dont le professeur Davidoff est sp cialiste D autre part il existe chez Perec une qu te maniaque du savoir que Marcel B nabou appelle son r ve encyclop dique dans un article intitutl Vraie et fausse rudition chez P
48. parodiquement le gavage des oies et l angoisse d oublier L accumulation rel ve effectivement du monstrueux dont parle Perec Et encore si le r sultat de cette consignation de l insignifiant alimentaire confine au curieux c est moins parce qu il se moque du cratylisme d un v ritable d calage du signifiant au signifi Analyser cette liste gastronomique constitue videmment un exercice d licieux Cette liste constitue un exemplaire exceptionnel de l insignifiant du fait de la r p tition des repas et de la longue litanie des aliments Comment Perec a t il tabli cette liste exhaustive Cette question appelle plusieurs remarques Tout d abord Perec d laisse les recettes de cuisine qu il affectionne particuli rement comme chacun sait pour l inventaire mais encore la liste E Georges Perec Le Travail de la m moire entretien avec Frank Venaille gt in Je suis n Op cit pp 87 88 7 Georges Perec Tentative d inventaires des aliments liquides et solides que j ai ingurgit s au cours de l ann e mil neuf cent soixante quatorze in L Infra ordinaire op cit pp 97 106 Voir Georges Perec 81 fiches cuisine l usage des d butants in Penser Classer op cit pp 89 108 Sr NE 136 t moigne de l attachement de Perec la cuisine bourgeoise pratiqu e dans les restaurants de Paris au cours des ann es 1970 De plus la pr sentation nominale de la liste des plats consomm s corr
49. psychanalyse Midrash et Kabbale Thomisme et Augustinisme philosophie Nietzsch enne marxisme et existentialisme Le monde comme lecture savoir est ainsi d fini par Deleuze Il s agit de deux lectures du monde dans la mesure o l une nous convie penser la diff rence partir d une similitude ou d une id e pr alable tandis que l autre nous invite au contraire penser la similitude ou m me l identit comme le produit d une disparit de fond La premi re d finit exactement le monde des copies ou des repr sentations elle pose le monde comme ic ne La seconde contre la premi re d finit le monde des simulacres Elle pose le monde lui m me comme phantasme Le choix de la modulation th orique et philosophique du monde rel ve d un choix identitaire L identit est d termin e par la d couverte d une similitude possible toujours tablir selon les grandes th ories du langage Mais encore elle peut aussi s tablir comme le montre Deleuze sur la base d une id e pr alable dans le monde des Id es d fini par Platon selon le mythe de la caverne Cette id e revient au canon l id e pr tablie qui garantit la pens e identitaire par sa fixit et son dogmatisme Gilles Deleuze Logique du Sens Paris Les ditions de Minuit 1969 p 302 345 partir du moment o le sujet part la recherche de lui m me il s tablit une communication Ce processus d change gu
50. r de la dictature du canon pourrait produire l image de celui de Perec et donc de l invitation qu il lance continuellement son lecteur Comme les palindromes qui peuvent s tendre la musique l architecture voire au cin ma on peut penser que les m canismes de l intertextualit correspondent aux domaines d influences les plus vastes Sur le plan litt raire il n y a que des r emplois comme l affirme Hubert Aquin ll n y a pas d originalit les oeuvres sont des d calques tir s de contretypes oblit r s qui proviennent d autres originaux d calqu s de d calques qui sont des copies conformes d anciens faux qu il n est pas besoin d avoir connus pour comprendre qu ils n ont pas t des arch types mais seulement des variantes Il existe un premier trajet dans les pratiques intertextuelles de Perec celui St phane Santerres Sarkany Th orie de la litt rature op cit p 70 Hubert Aquin Montr al Parti Pris 4 janvier 1969 p 24 CT 272 des r emplois qui conduisent au d voilement du faux comme accr ditation du vrai ce que Perec avoue la fin d Un Cabinet d amateur Des v rifications entreprises avec diligence ne tard rent pas d montrer qu en effet la plupart des tableaux de la collection Raffke taient faux comme sont faux la plupart des d tails de ce r cit fictif con u pour le seul plaisir et le seul frisson du faire s
51. rarchie des instances de l nonciation qui avons nous faire dans cette disparition sibylline De l crivain au Scriptor nous traversons une parodie de la th oricit Que dire d un crit th orique qui d termine le Georges Perec La Disparition op cit p 312 Ibid et Georges Perec Les Revenentes op cit Jacques Bens Oulipien 97 in Magazine litt raire Georges Perec Mode d emploi Paris n 193 mars 1983 p 25 Dixit Philippe Drogoz entrevue lt l picerie du vendredi 27 ao t 1993 Montreuil rue Rabelais TT Voir Mireille Ribi re Contraintes et effervescence in Cahiers de narratologie Nice n 1 Texte et antitexte 1987 p 185 196 155 roman et en explique l intention en utilisant un alphabet lacunaire galement sans e le post scriptum de La Disparition constitue le proc s de l crivain cach d tourn par le scriptor nouvelle instance cognitive et pseudo didactique de l nonciation Ce m me scriptor avait d j produit l histoire du proc d l lt Histoire du lipogramme C est un syst me de valeurs litt raires classiques que sont rattach es les instances de l nonciation Ainsi l crivain se trouve tenu par la tradition du classicisme Uniquement pr occup e de ses grandes majuscules l Oeuvre le Style l Inspiration la Vision du Monde les Options fondamentales le G nie la Cr ation etc Tandis qu au scr
52. s d un OuCuiPo toujours venir La succession ludique des recettes de Perec l usage des d butants cuisiniers chevronn s s abstenir recoupe non seulement le texte en g n ral en en constituant une d viation prise multiple sur la r alit culinaire mais encore une liste prospective des possibilit s des l ments alimentaires A l instar des 81 fiches cuisine l usage des d butants de Penser Classer o les recettes se fondent sur la permutation d un ensemble fini d ingr dients et de techniques culinaires toute la cuisine voqu e dans La Vie mode d emploi des repas color s de Madame Moreau aux diff rentes recettes propos es rend compte d un exemple de cuisine sous contrainte qui illustre merveille la combinatoire perecquienne celle des plats TT Bernard Magn P il 1981 1988 Toulouse Presses Universitaires du Mirail Toulouse 1989 p 11 voir aussi aux pages 5 17 Collectif Cahier Georges Perec n 4 M langes op cit Claude Berge et ric Beaumatin Georges Perec et la combinatoire p 89 204 des lettres et des mots Ces manipulations sont fond es sur la liste Perec a per u cette possibilit de la raison humaine magnifi e dans les listes Il y a dans l id e que rien au monde n est assez unique pour ne pas pouvoir entrer dans ma liste quelque chose d exaltant et de terrifiant la fois On peut tout recenser les ditions du Tasse les les de
53. sus en face des Docteurs Nous voulons nous s parer de plusieurs critiques qui se sont pench s sur ces lignes pour y voir la manifestation de plusieurs instances Ce seraient bien s r particuli rement la famille la jud it et l criture ce qui est loin d tre erron et rend bien compte de l ambiance th trale et pittoresque du tableau restitu e sous un aspect purement fantasmatique Mais nous pr f rons analyser la formation iconique du signe ce que fait partiellement Philippe Lejeune car ce n est pas ce qui l int resse au premier chef Pour ce faire nous partons de cette constatation nonc e par St phane Sarkany selon laquelle l faut tout un d ploiement d id es th oriques une mise en perspective particuli re pour 7 Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit p 22 23 Voir Philippe Lejeune ibid p 222 224 j Voir Bernard Magn Perecollages 1981 1988 Toulouse Presses Universitaires du Mirail Toulouse 1989 Le puzzle mode d emploi Petite prop deutique une lecture m tatextuelle de La vie mode d emploi de Georges Perec p 48 50 Voir Philippe Lejeune La M moire et l oblique op cit p 210 21 Voir aussi Warren F Motte Embellir les lettres in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 110 124 Voir Philippe Lejeune La M moire et l oblique op cit p 222 224 eak oran s a m nee 351 rendre vident que l criture dans sa mat rialit es
54. tables de pierre crites du doigt de Dieu p 95 Le livre disparu voir les innombrables crits apocryphes rattach s La Bible ainsi qu nombre de livres d autres religions V das hindouistes crits bouddhistes ne pas oublier qu lt apocryphe gt veut dire cach secret voir ce sujet Royston Pike Dictionnaire des Religions Paris Presses Universitaires de France 1954 p 20 21 380 religieuse abandonn e au profane Chez les peuples civilisation dite avanc e comme en Occident l initiation rel ve de l instruction dans la loi de jeunes gens qui sont cat chis s puis confirm s dans le savoir cela se passe ainsi par exemple dans l glise Catholique Quant aux peuples de l Antiquit aux peuplades pr historiques et aux soci t s secr tes l initiation est fond e sur la protection du secret non pas des doctrines qui sont imp n trables mais des rites et des symboles Il est alors n cessaire d employer dans la transmission des connaissances une langue initiatique propre rappeler ses responsabilit s l initi et agir sur son subconscient Nous retrouvons dans le secret de ces langues initiatiques utilis es par les multiples pr trises des peuples antiques des peuplades pr historiques ou des officiers francs ma ons le rapport l origine aux sch mas perdurants de la mort r surrection de la fixit et du changement de la descente remont e Si nous partons du pr
55. tait donn pour but d analyser les v nements et les faits de tous les jours Perec n a pas manqu de vouloir percer les secrets de l insignifiant ce qu il appelle quelquefois infra ordinaire Ses observations sont constitu es de proc s successifs de la r alit que ce soit au Carrefour Mabillon ou la Place Saint Sulpice En op rant une num ration brute des l ments de la r alit Perec isole le classement des formes classiques de la pratique romanesque c est dire de la narration ou de la description Il nous livre ainsi un classement d pouill d cal sans autre alibi que l objectif de capturer la r alit jusque dans ses derniers retranchements En quelque sorte il fait pour le classement ce que fait Robbe Grillet pour la description Marguerite Duras pour le dialogue Nathalie Sarraute pour le monologue int rieur et Distribution spatio temporelle de Coscinos era Victoria Cosc inoscera tigrata Carpenter Coscinoscera punctata Barton et Coscinoscera nigrostriata d Iputupi p 35 52 Voir Georges Perec Notes sur ce que je cherche in Penser Classer Paris Hachette 1985 p 10 7 Georges Perec Tentative d puisement d un li isien Paris Christian Bourgois diteur 1975 Georges Perec Tentatives de description des choses vues au carrefour Mabillon le 19 mai 1978 mission radiophonique diffus e sur France Culture le 20 f vrier 1979 EE 413 Michel Butor pour la topo
56. un agenda de cuir un bloc notes Comme pour Lautr amont et Les Chants de Maldoror repris par Citation de Michel Strogoff de Jules Verne in Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 p 13 7 Georges Perec Les Choses op cit p 19 3 Ibid p 10 mt adean 227 Julia Kristeva il existe dans Les Choses une conformit la loi des ensembles vides Chaque phrase est attach e la pr c dente comme un l ment qui ne lui appartient pas Mais il suffit cependant d ajouter un seul l ment signifiant l un des ensembles pour qu il introduise derechef avec lui par g n ration spontan e un deux voire plusieurs l ments comme ces appartements vides que l on meuble progressivement lors d un d m nagement D m nager Quitter un appartement Vider les lieux D camper Faire place nette D barrasser le plancher Emm nager acqu rir recevoir ramener d baller d faire Pourtant description dont on pourrait croire qu elle est d pouill e justement de toutes traces de subjectivit humaine vont progressivement se greffer des d tails narratifs valeur associative On pourrait penser comme certains lont fait la reprise d une m thode celle de Robbe Grillet qui d crit pour d crire dans l apparente gratuit du r cit Pour d autres raisons que les n tres certains critiques ont vu la diff rence c est le cas de Paul Schwartz qui crit W
57. une homog n isation des publics par les m dias la publicit la vie scolaire la vie urbaine Il oppose l uniformit un individualisme exacerb Il pose le probl me de la repr sentation Dans cette opposition des formes culturelles on peut int grer en les liant les notions de st r otype de m moire Georges Perec Je me souviens Paris Hachette P O L 1978 L expression autobiographie collective a t employ e par Bernard Magn lors de sa conf rence du dimanche 6 octobre 1996 donn e la Maison de la culture Plateau Mont Royal Montr al l occasion de la cl ture du Colloque Georges Perec 3 5 octobre 1996 418 et de texte qui les d jouent On peut appliquer dans le cadre de Je me souviens la distinction pertinente que fait Barthes entre la culture de masse et la culture des masses Ainsi en rassemblant dans un m me texte des souvenirs personnels et des souvenirs plus g n raux Perec tablit une forme originale de l autobiographie qui constitue une premi re r ussite de la connaissance de soi On peut constater en effet que c est dans le domaine particulier de la connaissance de soi que Perec a obtenu les r sultats les plus remarquables Perec a surmont l opacit de la lettre qui commande ses relev s autobiographiques La lettre est li e la pesanteur de l indicible Perec parle de l indicible m taphysique que la parole suscite mais ou elle ne peut qu occulter L histoire du
58. voquer les deux bonshommes rudits de Flaubert Bouvard et P cuchet 7 Comme pour les deux personnages de Flaubert la hantise des connaissances chez Perec se manifeste non seulement dans l obsession de l exhaustivit mais aussi par son exhibition dans la plupart de ses crits Elle est aussi clairement manifest e dans tous les 8 Tbid p 44 Jean Paul Sartre La Naus e Paris Gallimard 1938 p 51 15 Tbid p 52 et 59 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 225 226 7 Gustave Flaubert Bouvard et P cuchet Paris Librairie G n rale Fran aise 1959 wt 9 avant textes de Perec L activit pr paratoire de Perec ressemble une tude documentaire comparable celles de Flaubert pour Salamb et plus encore pour Bouvard et P cuchet Mais elle rel ve aussi de structures combinatoires propres une laboration sophistiqu e du texte La mise en sc ne du savoir est un travail de compilation comme de combinaison Ces combinaisons d pendent du plan des instances et des disciplines retenues par Perec qui vont constituer le texte mais plus encore des similitudes que les connaissances peuvent faire surgir entre elles Il n en reste pas moins une domination r currente de la th matique du classement de la mise en ordre de la recherche du syst me pour tout dire de la taxinomie L exemple le plus caract ristique est certainement celui de La Vie mode d emploi dont Le Cahier des charges t
59. 1973 318 p COLLECTIF Th orie de la Litt rature textes des Formalistes russes r unis pr sent s et traduits par Tzvetan Todorov pr face de Roman Jakobson Paris Seuil 1965 318 D COLLECTIF Signe Langage Culture pr sent par Algirdas Julien Greimas Paris The Hague Mouton 1970 723 p COLLECTIF Le Temps et les philosophies tudes pr par es par l UNESCO introduction de Paul Ricoeur Paris Payot UNESCO 1978 248 p COLLECTIF Michel Foucault Lire l oeuvre sous la direction de Luce Giard Grenoble J r me Millon 1992 226 p COLLECTIF La Repr sentation de l espace Lausanne Cahiers du D partement des Langues et des Sciences du Langage Universit de Lausanne 1986 233 p COLLECTIF L Intertextualit Intertexte Autotexte Intratexte Toronto ditions Trintexte 1984 387 p COLLECTIF Sartre Barthes Revue d esth tique Paris ditions Jean Michel Place 1991 num ro Hors S rie 117 p CUVILLIER Armand Cours de Philosophie 1 Paris Armand Colin 1954 650 p 434 CUVILLIER Armand Cours de Philosophie 2 Paris Armand Colin 1954 458 p DELEUZE Gilles Logique du Sens Paris ditions de Minuit 1969 392 p DERRIDA Jacques De la grammatologie Paris ditions de Minuit 1967 448 p DERRIDA Jacques La Diss mination Paris Seuil Tel quel 1972 406 p DERRIDA Jacques Positions Paris ditions de Minuit 1972 174 p DION Michel Sociologie et Id ologie Pari
60. 1980 420 multitude de savants de toutes disciplines de cette multitude d aventures des connaissances surgissant de nulle part pour aboutir n importe o On songe au r seau de vers qui ont d vor le pied de la luxueuse table ancienne d couverte par Grifalconi Peu importe Perec l authenticit de cette connaissance du monde sur laquelle se sont acharn s tant et tant de savants Cette connaissance ainsi qu il le montre est labile faible sujette caution infiniment variable et sans cesse remise en question de d bats en d bats comme ceux des historiens g ographes du congr s d Edinbourg d octobre 1887 Perec d joue le savoir positiviste par son texte romanesque Il en fait ironiquement l objet de ses pratiques ludiques Cela constitue incidemment la manifestation de la sp cificit de son criture Mais l ne cesse pas pour autant son originalit d crivain Si elle se manifeste par cette esp ce de contestation du savoir institutionnel elle passe encore par la r ussite et l accomplissement de sa propre identit C est par la d couverte de nouvelles formes de l autobiographie g n ralement li e des contraintes que Perec a obtenu ses plus grands succ s Il faut rappeler que Perec voulait rattacher son oeuvre quatre grandes tendances que nous avons successivement explor es son int r t pour les d tails triviaux de la quotidiennet le go t de se raconter gr ce l autobiographie sa
61. 1987 189 p 439 MAUSS Marcel Sociologie et Anthropologie Paris Presses Universitaires de France 1950 482 p MENDRAS Henri l ments de sociologie Paris Armand Colin 1967 252 p MEYRINK Gustav Le Golem traduit de l allemand par Denise Meunier Paris Stock 1969 MICHAUD Ginette Lire le fragment Montr al Hurtubise HMH 1989 320 p NADEAU Maurice Histoire du Surr alisme Paris Seuil 1969 525 p NESSELROTH Peter W Lautr amont s Imagery A Stylistic Approach Gen ve Librairie Droz 1969 130 p NIETZSCHE Fr d ric Ainsi parlait Zarathoustra Paris Mercure de France 1914 511 p NIETZSCHE Fr d ric Par dela le Bien et le Mal pr lude d une philosophie de lavenir Paris Mercure de France 1923 355 p NIETZSCHE Fr d ric Le Gai Savoir Paris Gallimard 1950 381 p NIETZSCHE Fr d ric L Ant christ Paris Union G n rale d d ditions 10 18 1967 182 p PATERSON Janet M Moments postmodernes dans le roman qu b cois Ottawa Presses de l Universit d Ottawa 1990 126 p PIERSSENS Michel Savoirs l oeuvre essais d pist mocritique Lille Presses Universitaires de Lille 1990 185 p PREVOST Claude Li re Politi Id ologie Paris ditions Sociales 1973 278 D PRIGOGINE Ilya Temps devenir propos de l histoire du temps Saint Laurent ditions Fides 1994 44 p RENAN Ernest De l Origine du langage Paris Calmann Le
62. 244 245 246 247 248 249 251 252 253 254 255 256 257 259 273 274 275 277 397 398 416 Kakapot Y 166 313 Kanters R 220 Keinhof 49 Kennedy 145 326 413 Kerbrat Orecchioni C 109 110 111 113 120 123 125 127 131 133 142 243 King Kong 142 Kipling R 317 Klinov 49 Klajnhoff 49 Kolliker 41 411 Kosciusko B 45 65 66 Kristeva J 217 218 227 237 239 260 452 Kuhn T S 242 Labibine Osouzoff 1 166 313 314 Lacan J 192 Lacoste 292 Laloch re J 172 Lamartine 301 Lambert V 39 Lamblin Richardson S 72 Land N 191 Lapprand M 175 Larminat de 325 Lautr amont 226 Lavelle G 296 Leacock S 204 Leak A 348 401 LeBran Chastel 41 45 Lecarme J 241 367 Lee J 152 153 Lejeune P 25 102 109 267 284 328 332 342 346 347 349 350 359 360 361 364 373 Le Lionnais F 22 213 232 240 263 416 Lemoine 40 Le Sidaner J M 4 36 66 70 213 260 410 413 Leverk hn 206 326 L vi Strauss C 215 260 377 Liddel et Scott 363 Lieury A 287 Linhaus 49 Lintvelt J 243 Lipatti D 319 Lloyd Wright E 160 Loch re D 171 172 173 174 Loew 341 Lombard Professeur 159 Longuet Marx A 379 Lonsdale M 127 Lortholary B 253 398 399 Lotman I 181 182 Lovecraft H P 3 328 Loyola I de 393 413 453 Lusson P 167 26
63. 261 M ller C 314 315 Murphy A 323 Musil R 34 273 Nabokov V 179 Nadeau M 264 266 268 Naf Naf 318 Napol on III 54 Nathan Murat M 356 Neefs J 9 10 23 40 270 414 Neher A 50 376 389 Nerval G de 340 Nizan P 21 230 No Dr 69 Noch re M 41 Normand 301 O Brien P 70 O Grady Dr 157 Olender M 179 Oriol Boyer C 25 454 Orlova de Beaumont V 54 55 Orwell G 104 Oswald L H 326 Ouellet R 66 Papillon 308 316 Parcas G 383 Parker C 329 Partre J S 261 Patton 325 Paulhan E 156 Pawlikowska E 410 Pedersen J 22 157 224 225 272 273 361 P guy C 77 Perec I J 194 Peretz 371 372 373 Petra 291 292 Peugeot E 283 Piaf E 327 Pic de la Mirandole 292 Picard G 360 Pierce C S 351 Pierre Abb 321 336 Pierssens M 45 88 89 Pike R 379 380 381 384 385 Pinchas de Korentz S 405 Piquemal 171 313 Platon 10 Poe E A 190 Polanski R 317 Ponge EA 2 Ponson du Terrail 156 Poujade P 336 Pr vert J 138 Price 213 Proust M 40 77 215 261 277 346 416 Pujazon 171 313 Pym A G 190 Qoh l t 389 455 Queneau R 11 152 153 163 165 168 169 170 171 172 174 175 177 180 456 281 282 302 353 389 Rabelais 138 150 154 197 280 Racine 308 Rackam Le Rouge 191 Radzynski A 356
64. 325 326 327 328 329 331 333 334 335 336 337 338 346 406 417 418 Je me souviens de Georges Perec 303 Je suis n 20 27 35 135 178 179 180 181 187 188 190 191 192 194 212 264 265 268 277 288 289 290 293 294 295 311 341 343 398 399 415 418 Jette ce livre avant qu il soit trop tard 385 Jeu des co ncidences dans La Vie mode d emploi de Georges Perec Le 38 48 51 52 66 Journal pour ermites 395 Kabbale et sa symbolique La 341 367 374 376 394 396 405 L G Une aventure des ann es soixante 35 Lettre et l image La 389 Lettres fran aises Les 225 Linguistique et Anthropologie 377 Litt rature et r alit 91 223 Litt ratures 153 384 410 Livre des morts Le 409 Logique du sens 344 Loin de Rueil 282 Madame Bovary 231 233 234 235 236 Magazine litt raire 15 25 140 154 165 306 342 348 Manger 198 Mangeur du XIX si cle Le 136 198 ME D hring bouleverse la science 63 M langes R Gu non 341 368 369 M moire collective La 290 M moire d Abraham La 385 M moire et l oblique Georges Perec autobiographe La 102 109 267 284 328 342 465 347 349 350 359 360 361 373 M tamorphose La 42 Michel Butor Colloque de Cerisy 216 1984 104 Modification La 13 Mot pour un autre Un 19 Mots crois s Les I et II 20 30 Mots sous les mots Les 17 Mythologies 198 335 336 Mythologiques 215
65. 34 Deuil de l origine Une langue en trop la langue en moins Le 274 329 373 415 Dictateur Le 353 359 Dictionnaire des Religions 379 380 381 384 385 Dictionnaire encyclop dique Quillet 92 93 Dictionnaire Larousse du XX si cle 92 93 Disparition La 18 19 25 28 151 152 153 154 155 156 157 160 161 162 168 276 340 385 387 388 395 404 414 Documents Georges Bataille 286 Dune 396 crits II Lacan 192 Ecrits de Sartre Les 330 Ecriture de la religion criture du roman 243 Ecume des jours L 261 Education sentimentale L 230 231 238 Encyclopaedia universalis 183 220 265 287 Enfants du limon Les 171 Enonciation de la subjectivit dans le langage L 109 110 111 120 123 125 127 131 133 142 243 En remontant la rue Vilin 140 Entretien avec Claude Levi Strauss 260 463 Entretien avec Gabriel Simony 42 240 283 292 Esp ces d espaces 3 15 16 23 24 96 102 105 106 107 108 109 111 114 115 118 142 189 215 227 261 266 267 269 277 302 304 307 331 348 375 416 Esprit 337 Essais Les 181 Essais de linguistique g n rale 381 Essais sur le roman 289 Esth tique de la disparition 98 tudes Rabelaisiennes 209 tranger L 254 325 326 volution de la m moire et la notion du temps L 289 Exercices de Style 153 302 Exil et le Royaume L 187 Exil s marginaux et parias dans le
66. Cahiers du CRELEF op cit p 61 62 310 Langres est triplement c l bre pour ses records de froid sa coutellerie et Diderot La rupture du clich joue sur l assimilation des lex mes triplement tristement dans le syntagme fig tristement c l bre Cet clatement du clich comme le rappelle Patrick Imbert produit une double isotopie Ce qui reviendrait laisser entendre que Langres a produit surtout des objets n gatifs mettant ainsi dans le m me panier et les records de froid la coutellerie et Diderot Le souvenir scolaire ainsi d tourn revient confirmer une connaissance parodique comparable aux encha nement des comptines Cela devient encore plus visible dans ce dernier souvenir scolaire class en folklore enfantin Je me souviens de un soudard ne vit que de rapines obscures Jouant sur la l gende du soudard c est dire des soldats indisciplin s pilleurs et mercenaires dont la vie st r otyp e consiste se payer sur le terrain le souvenir v hicule une s rie de jeux de mots plus ou moins grivois sur le sexe masculin ainsi que le signale Andr e Chauvin noeud vit rapinezobscures conduisant rapidement le lecteur vers une confirmation des comportements tudesques dans les guerres sporadiques des si cles pass s 15 Georges Perec Je me souviens op it entr e n 77 p 30 16 Voir Patrick Imbert Roman qu b cois contemporain et clich s Ottawa ditions de
67. Dans des conditions normales de temp rature et de pression dans ces conditions de bonne visibilit comment remplir l espace Pour affronter ce casse t te Cinoc commence donc par la tabula rasa il limine des centaines et des milliers d outils des dizaines d les des centaines de villes et de fleuves des milliers de chefs lieux de canton des centaines de sortes de vache des cohortes de g ographes de missionnaires d entomologistes de P res Perec de l Eglise d hommes de lettres de g n raux de Dieux et de D mons f On remarque le courant ascensionnel et de cette hi rarchie des noms seul chappe la fureur iconoclaste de Cinoc le nom perdu le T tragramme fondateur Peut tre est ce l une bien trop grosse partie pour le pauvre Cinoc quand on sait comme le rappelle Perec que selon la Temurah troisi me 7 Georges Perec Esp ces d espaces op it voir infra p 8 note n 24 3 Ibid p 15 Voir Constantin Crisan Georges Perec ou le paysage du conditionnel utopique pour une syntaxe de la logique litt raire in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 53 IT Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 361 362 376 ex g se des Kabbalistes le Livre est un anagramme qui rec le je suppose quelque chose comme cent mille milliards de fois le nom de Dien IT Mais bien observer les multiples occupations de Cinoc nous remarquons qu il lui faut bient
68. Disparition in Litt ratures Toulouse Service des publications de l Universit de Toulouse Le Mirail printemps 1983 n 7 p 12 Georges Perec Histoire du lipogramme Oulipo La Litt rature potentielle op cit p 83 Raymond Queneau Exercices de Style op it p 111 154 population je En effet il ne s agit pas d attrister le lecteur mais de le r jouir et surtout de le questionner ultime jouissance Expliquerons nous pourquoi le Perec r cemment oulipien sauta sur le lipogramme technique li e la subtilit gratuite des curiosit s litt raires et qui mes produire coup sur coup La Disparition et Les Revenentes Reportons nous ce constat tonn de Jacques Bens lorsqu il red couvrit l adh sion de Perec l Oulipo lt Jouant le jeu compl tement le nouvel OuLiPien adopte alors une technique d lib r ment frivole le lipogramme celle qui semble la plus loign e du coeur que l on frappe pour qu en jaillissent les tincelles du g nie la stup faction de tous et d abord la n tre j en suis t moin sur ce terreau artificiel il fait pousser une figure d une insolente richesse La Disparition Le titre insolite et suggestif semble recouper le point du sensationnalisme sur un sc nario proche de ceux des bandes dessin es Perec compose un roman o l criture proscrit le E Cette disparition lettrique et litt rale recoupe en r alit toute la hi
69. Ibid p 125 273 l infini n est possible qu en forme non finie qu en forme ouvertes L intertextualit permet le jeu des savoirs mais aussi leur confrontation avec la conviction absurde que l on pourra certainement trancher ce qui n est en aucun cas la vision de Perec Au lieu de discuter traditionnellement comme dans l essai du relativisme des informations des faits et des id es ce que fait par exemple Musil dans L Homme sans qualit s Perec pr f re et de loin mettre en pr sence plusieurs conceptions qui viennent s entrechoquer s amalgamer s liminer s annuler ou se conjuguer selon les m canismes lectoraux que tel ou tel lecteur va privil gier Lorsque John Pedersen parmi d autres critiques d montre la relecture des grands mythes qu effectue Perec en affirmant que L essentiel partout c est qu il ne s agit pas de simples allusions pour le jeu mais des tentatives pour que sonnent dans ses propres textes des chos d autres univers fictifs De grands mythes comme ceux du Graal ou de Faust y confluent avec des mythes contemporains tels que les ont forg s par exemple Kafka ou Melville Pedersen nous convainc de cete diss mination g n rale des textes chez Perec y compris les siens propres Perec parvient encore recombiner les univers mythiques John Pedersen Perec ou les textes crois s op it p 125 S Robert Musil L Homme sans qualit s Paris Seui
70. Je me souviens Paris Hachette 1978 entr e n 278 p 73 Ne pas oublier que robot signifie travailler en russe amp Georges Perec La Vie mode d emploi op cit 86 polyglottes atteints de boulimie intellectuelle et dou s d une m moire prodigieuse mais ces talents exceptionnels ne font que les isoler davantage au sein de l humanit Consid r s comme des tres part ils sont l objet de l indiscr tion populaire plut t que d une distingu e consid ration Le contraste est tonnant entre le r le professionnel du savant sa vie priv e et son impact social quasiment nul Tout se passe comme si la science adul e par la majorit de nos contemporains n attirait vers les savants qu une vague curiosit de mauvais aloi voire une r probation larv e L attitude du grand public ne fait que refl ter cette esp ce d ind termination qui caract rise la science l adulation b ate Perec d cide d opposer cette incertitude que les foules peuvent aussi prouver l gard de la science C est cette attitude ind niable que commandent les conduites inattendues des savants dont les caricatures ne font que nous conforter dans le scepticisme de la mauvaise conscience La parodie s tend aussi aux sciences du paranormal comme Eco dans Le Pendule de Foucault Perec se joue des recettes cul s de l occultisme et du spiritisme tournant en ridicule la foi na ve du profane en des exploits purement tru
71. L 377 Winckler G 44 348 370 371 Wolfluss J 70 Yanne J 166 Yahv 379 Zambinella 387 388 Zapfenshuppe 43 60 61 66 Zappy Max 322 Zazie 172 173 174 Z rah 372 Zola 11 459 INDEX DES OEUVRES 461 Action po tique 134 la mani re de 314 315 la recherche du temps perdu L Du c t de chez Swann 261 346 Alphabets 19 355 Alphabet a key to the history of mankind 355 362 Amerika ou le disparu 253 398 i Anthropologie structurale 377 Appel de Cthulhu L 3 Approches drogues et ivresse 409 Arc L 4 12 36 66 70 96 163 165 213 217 260 275 410 413 Architecture of Doom The 360 Aspects du texte moderne pratique th orie p dagogie 244 Au creux des apparences Pour une thique de l esth tique 99 100 141 282 Au dessous du volcan 280 Augmentation L 30 Avare L 138 Aventures d Arthur Gordon Pym 190 Aventures de Simplicius Simplicissimus Les 2 310 Aventure s miologique L 93 106 107 132 Bataille Colloque de Cerisy 286 297 B tons chiffres et lettres 282 353 Bible La Sainte 319 363 371 372 376 379 390 394 395 396 409 Biblioth que oulipienne La 383 Boutique obscure La 24 27 265 266 269 278 286 386 387 389 407 419 Bouvard et P cuchet 8 9 10 Cabinet d amateur Un 30 272 Cahier des saisons 95 Cahiers de narratologie 154 Cahiers des Charges de La Vie mode d
72. Le r p titif l accessoire le personnel n offrent aucun gage l volution de l insignifiant Certes il essaie de retrouver le stable derri re la mouvance et l incertitude les passants les touristes les pigeons sont ils les m mes Si ce sont d autres tres cela pourrait il apporter une transformation notoire son observation Le proc s semble se heurter un chec Perec est accul par son d fi il n a aucun moyen de v rification scientifique Pourtant dans cette recherche du m canique du r p titif de l it ratif qui caract rise l insignifiant Perec rel ve un objet de choix Il s agit des autobus publics de la R A T P qui effectivement peuvent s int grer dans le cadre d une analyse scientifique un examen exhaustif de leurs pr sences de leurs circuits de leurs absences vou es la succession et la pr visibilit Perec rel ve les caract ristiques confortables des autobus Pourquoi compter les autobus Sans doute parce qu ils sont reconnaissables et r guliers ils d coupent le temps ils rythment le bruit de fond la limite ils sont pr visibles Le d terminisme du transport public ne manque pas de stimuler les r flexions de Perec Tandis qu il identifie le reste des objets de l observation comme Ibid pp 41 42 Ibid pp 40 42 voir galement Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage op cit p 142 0
73. Lejeune est all tr s loin dans cette investigation de la lettre en comparant treize variantes de celle ci suivant une version que le critique appelle num ro A8 Mais comme tout un chacun il est oblig de reconna tre que l alphabet h breu poss de une nouvelle lettre Puisqu elle n existe pas il restera aux critiques de Perec trouver d o elle vient et o elle va AT Sans nous assigner ce programme nous pourrons tenter maintenant de voir plus clair dans ce processus d identification En premier nous allons nous borner trouver le nom de la lettre myst rieuse parce que prot iforme Nous avons vu que la combinatoire des l ments iconiques permet l expansion historique du souvenir et son rattachement au drame plan taire Il est vident que la d rivation du signifiant tablit la multipolarisation du signe Jacques Derrida indique en effet qu il n est pas de signifi Voir l excellent film du metteur en sc ne su dois Peter Cohen The Architecture of Doom qui tablit un parall le entre l art et les armes dans les objectifs et les conceptions esth tiques d Hitler Genevi ve Picard Des go ts et des douleurs Voir Montr al semaine du 8 au 14 avril 1993 Philippe Lejeune La M moire et l oblique op cit p 223 Philippe Lejeune ibid p 224 361 qui chappe ventuellement pour y tomber au jeu des renvois signifiants qui constitue le langage Il existe donc soit u
74. Michel Mots sans m moire Paris Gallimard 1969 153 p MARCELLE Pierre La D molition Paris Deno l 1985 90 p MUSIL Robert L Homme sans qualit s Paris Seuil 1982 MUSIL Robert Les D sarrois de l l ve T rless Paris Seuil 1967 ORWELL George La Ferme des animaux Paris Champ Libre 1981 113 p ORWELL George Le Quai de Wigan Paris Champ Libre 1982 260 p ORWELL George 1984 Paris Gallimard 1950 447 p PAZ Octavio Le Singe grammairien Gen ve Albert Skira 1972 170 p PETISKA Edvard Golem Prague Martin 1991 91 p REBOUX Paul et MULLER Charles la Mani re de Paris Bernard Grasset 1964 286 p INDEX DES NOMS 445 Achille 248 Adam 346 394 Alembert d 7 Amis K 35 Amon R 53 Andress U 183 185 186 Angenot M 36 64 94 219 256 354 Antelme R 21 230 401 Antoine J 283 374 Apfesistahl O 371 Apollon 341 378 Appenzzel M 39 44 56 57 58 64 86 372 411 Aquin H 271 Aristote 11 331 341 396 Aron J P 127 136 197 198 Art Tatum 327 Artagnan A d 382 Aubain 224 Aubign A d 68 69 Averroes 341 Avicenne 341 Baader 318 Balthasar 318 Balzac H de 40 68 69 224 370 386 387 Barbosa Machado D 52 Barek 371 Barthes R 21 28 84 85 89 91 93 106 107 132 138 187 188 189 191 192 194 197 198 201 206 207 223 229 230 286 297 332 335 336 337 347 3
75. Naissances mystiques Essai sur quelques types d initiation 380 Naus e La 8 34 51 206 326 Non lieu de la m moire la cassure d Auschwitz 356 Notes sur Qoh l t L Eccl siaste 50 376 389 Nouveau Monde Industriel Le 149 Nouveaux dossiers extraordinaires de Pierre Bellemare Les 283 374 Nouvel Observateur Le 229 Nouvelles litt raires Les 414 Objectivit de la presse le 4 pouvoir en otage L 103 Oeuvres Anthumes 165 175 Oeuvres choisies de Mao Ts Toung 340 Oeuvres compl tes Camus 95 96 Oeuvres compl tes Rabelais 138 Oeuvres compl tes de Vauvenargues 285 Origine de la g om trie 293 Oulipo Atlas de litt rature potentielle 28 263 382 383 Oulipo La Biblioth que oulipienne 164 176 264 280 309 Oulipo La Litt rature potentielle 22 150 151 152 153 155 164 207 213 232 240 276 376 377 378 381 404 416 Palimpsestes la litt rature au second degr 262 263 264 314 Paradigme perdu la nature humaine Le 377 Parcours Perec Colloque de Londres mars 1988 4 7 13 21 28 38 42 43 56 225 230 237 274 348 370 401 404 Paroles 138 Parti Pris 271 Partisans 35 Pastiches et m langes 40 Pendule de Foucault Le 86 369 374 466 Penser Classer 15 20 26 31 102 134 135 139 140 178 179 180 181 182 184 188 189 190 191 198 200 201 202 203 204 207 276 277 285 299 300 307 314 329 412 415 421
76. Penser Classer E crire de Pascal Perec 10 17 31 Perec ou les textes crois s 22 157 224 225 273 361 Perecgrinations ludiques Etude de quelques m canismes du jeu dans l uvre romanesque de Perec 13 Perecollages 1981 1988 19 23 64 68 72 73 75 76 79 82 83 84 202 203 216 244 245 246 248 251 255 312 350 365 Petit trait invitant la d couverte de l art subtil du Go 24 167 266 Place de l toile La 391 Plagiat Le 22 23 24 240 241 242 243 275 276 Poche Parmentier La 30 195 206 Po mes saturniens 342 Po sies 152 Poetics of experiment a study of the work of Georges Perec The 239 318 335 361 373 388 Po tique 232 261 Qu est ce que la litt rature 348 Quel petit v lo guidon chrom au fond de la court 18 24 68 69 175 266 268 269 Quinzaine litt raire La 178 Recherche La 215 261 262 263 277 Recherche litt raire objets et m thodes La 51 65 R cits d Ellis Island Histoires d errances et d espoir 28 183 389 390 391 392 393 398 399 400 404 407 419 Recueil des r sum s de communication 62 congr s de l ACFAS 73 74 75 Revenentes Les 18 19 25 34 151 154 157 160 209 276 385 388 404 Revue canadienne de litt rature compar e 48 49 57 60 65 72 78 87 88 roland Barthes par roland barthes 85 89 138 188 191 194 207 361 388 Roman qu b cois contemporain et clich s 310 Ro
77. Perec introduire dans ses textes non seulement ceux de ses auteurs favoris mais encore les siens propres Cette exp rimentation pratiqu e par Perec pourrait tre d sign e comme une forme d intertextualit bien que ce concept soit relativement ouvert voire largement polys mique Cet emploi de textes emprunt s est ant rieur son adh sion l Oulipo Lorsqu en 1967 dans sa conf rence donn e Warwick en Angleterre Perec expliquera comment il a crit Les Choses il r v lera qu il s est servi de quatre crivains Flaubert Antelme Nizan et Barthes Il nous importera donc en premier d analyser comment Perec va g rer l influence de Flaubert sur son texte Cette premi re exp rimentation proc de aussi bien d une influence d lib r e Perec parlant de son imitation du rythme ternaire de la phrase de Flaubert des emprunts purs et simples qu il avoue lui m me Georges Perec Les Choses op cit Georges Perec Pouvoirs et limites du romancier contemporain conf rence prononc e le 5 mai 1967 l invitation de la section d tudes fran aises de l Universit de Warwick Coventry Grande Bretagne transcription r alis e par Leslie Hill in Parcours Perec op cit p 35 T Georges Perec Pouvoirs et limites du romancier contemporain in Parcours Perec op cit p 36 22 Par la perfection de son style Les Choses constituent un renouvellement de l criture flaubertienne
78. Perec Paris Le Castor Astral 1992 172 p DUVIGNAUD Jean Perec ou la cicatrice Paris Actes Sud 1993 61 p HARTJE Hans MAGN Bernard et NEEFS Jacques Cahiers des Charges de La Vie mode d emploi Georges Perec Paris CNRS ditions et Zulma 1993 303 p LEJEUNE Philippe La M moire et l oblique Georges Perec autobiographe Paris P O L 1991 252 p MAGN Bernard Perecollages 1981 1988 Toulouse Presses Universitaires du Mirail 1989 246 p MAGN Bernard Tentative d inventaire pas trop approximatif des crits de Georges Perec Toulouse Presses Universitaires du Mirail 1993 150 p 426 MOTTE Warren F Jr i e Work of Geor PEREC Lexington French Forum Publishers Inc 1984 163 p PEDERSEN John Perec ou les textes crois s Copenhague Institut d tudes Romanes de l Universit de Copenhague 1985 131 p RAYNAUD Jean Michel Pour un Perec lettr chiffr Lille Presses Universitaires de Lille 1987 261 p RIBI RE Mireille Parcours Perec Colloque de Londres Mars 1988 textes r unis par Mireille Ribi re Lyon Presses Universitaires de Lyon 1990 162 p RITTE J rgea Das Sprachspiel der Moderne eine Studie zur literar sthetik Georges Perec K la Allemagne Janus 1992 115 p SCHNEIDER Martine Les Choses Esp ces d espaces Georges Perec Paris Nathan Collection balises 1991 96 p SCHWARTZ Paul Georges Perec Traces of His Passage Birmingham Summ
79. Perec a d velopp une v ritable fascination pour la science Il est probable que ce go t pour les sciences exactes vient de leur apparente rigueur En effet le savoir scientifique se caract rise par une syst matisation des connaissances et par une analyse m thodique des ph nom nes Ce sont principalement les sciences de la mati re qui seront fictionnalis es dans La vie mode d emploi mais aussi le domaine historique et pour continuer parmi les sciences de l homme l anthropologie et l ethnologie Mais les sciences imaginaires retiendront aussi l attention de Perec de ce domaine propre l imagination provient l int gration des para sciences comme Georges Perec Une amiti scientifique et litt raire L on Burp et Marcel Gotlib suivi de Consid rations nouvelles sur la vie et l oeuvre de Romuald Saint Sohaint Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques p 56 Voir David Bellos Georges Perec une vie dans les mots Paris Seuil 1994 le chapitre 25 Perec au labo 1961 1978 p 270 287 Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 sw fs 6 ressorts di g tiques la fiction Perec manifestera encore cet int r t pour les sciences en les caricaturant dans ses crits pseudo scientifiques r unis dans son recueil Cantatrix Soprani a L et autres crits scientifiques qui regroupe des articles utilisant un appareillage pseudo scientifique pour parodier la science
80. Rauschning H 358 Raynaud J M 361 Reboux P 314 315 Regardie I 409 Rembrandt 350 351 365 403 Renan E 40 58 Renaud 166 167 174 Resnais A 175 Ribi re M 4 38 154 225 230 237 274 348 Ricardou J 244 Rilke R M 340 Rin Tin Tin 336 Robbe Grillet A 225 227 229 412 Robespierre 370 Robin R 274 329 373 415 Robinson 206 326 Roche A 27 298 312 317 327 347 348 Rodolphe 231 Roquentin A 206 326 Rorschash R 65 66 215 246 247 249 250 251 252 253 254 255 256 259 277 Rosienski Pellerin S 13 69 268 269 Rosmarin L 326 Rossman K 398 399 Roubaud J 17 31 167 193 266 Roussel R 11 71 85 150 168 267 Rybalka M 330 Sade 393 413 Sadoul G 359 Saint Sohaint R 5 69 71 77 Sainte Rose 171 313 Salomon 352 Salvador H 166 Samsa G 42 457 Santerres Sarkany S 271 273 337 350 351 Sarapo T 327 Sarrasine 387 388 Sarraute N 412 Sartre J P 2 3 8 34 51 77 222 254 326 330 334 348 357 Saussure F de 28 158 225 Sc ve M 213 Schneider Ma 261 Schneider Mi 238 Schneider R 322 Scholem G G 341 367 368 374 376 377 394 395 396 405 Schwartz P 157 221 227 228 297 397 399 Sellers P 127 Serreau G 127 Serval J 193 Sherwood J 62 Siguret P 168 280 326 383 Simon Crubellier 41
81. Sohaints in ibid p 53 66 premi re diffusion voir p 118 E Georges Perec Pr sentation de la Beauce Notre Dame de Chartres in ibid p 67 71 premi re diffusion voir p 118 19 Georges Perec et Harry Mathews Roussel et Venise Esquisse d une g ographie m lancolique in ibid p 73 115 premi re diffusion voir p 118 Marcel B nabou pr face Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques op cit p 8 re tt wee 72 neurophysiologie de l h pital Saint Antoine Quant au second texte Coscinoscera Victoria il fut le r sultat d une collaboration avec Sylvia Lamblin Richardson Ces deux textes ont t l objet d une analyse comparative de Bernard Magn conduite la lumi re des th ories genettiennes du texte Z Il r pond ainsi la confrontation entre science et parodie de la science et discerne galement travers le texte de Cantatrix sopranica L l mergence d un nouveau genre cr de toutes pi ces par Perec le scientifi comique l instar de Bernard Magn dont nous nous inspirons nous voulons retrouver dans ces textes de Perec la formation de nouveaux savoirs Conform ment ce que Laurence Dahan Gaida a relev dans les potentialit s des confrontations cognitives entre les savoirs nous pourrons mesurer la puissance cr atrice de la litt rature si elle d ploie les savoirs dans l imaginaire c est pour mieux les d sorganiser elle le
82. ainsi Perec comme un d mystificateur La parole est limpide croquante limine tout superflu va jusqu au noyau de l alphabet tranche les mythes cogne l angoisse insondable de l existence la plus banale Citoyen de son lit de sa chambre de sa rue de sa ville du cosmos tant t amn sique tant t Pic de la Mirandole il est la mesure de notre plein de notre vide usager de nos balises agenda de notre poque atomis e Cette description de Perec rend compte de toute la potentialit de son exp rience et surtout de son passage par la m morisation comme m canisme constitutif de sa personnalit Elle n vacue pas cependant l id e d une m moire obsessive oppos e toute amn sie Elle la confirme plut t Il faut en effet ne pas confondre m moire et souvenir Nous avons vu en effet que la m moire pouvait tre consid r e comme une esp ce de 35 Ibid p 119 Voir ibid p 119 Georges Perec Entretien avec Gabriel Simony op cit p 7 293 machinerie destin e produire des souvenirs Une machine qu il faut contraindre pour qu elle produise Rappelons que Perec pr sente ainsi son recueil Comment na t un souvenir Dans le cas de Je me souviens ce sont des souvenirs qui sont provoqu s des choses oubli es que je vais faire resurgir une anamn se c est dire le contraire de Poubli La m moire n est pas l automatisme du souvenir La m moire est l activit s
83. aurait une cuisine vaste et claire avec des carreaux bleus armori s trois assiettes de fa ence d cor es d arabesques jaunes reflets m talliques des placards partout une belle table de bois blanc au centre des tabourets des bancs Mis part le jeu du connecteur intratextuel nous retrouvons ensuite le m canisme d engendrement qui compose la s quence L intrusion de la subjectivit humaine est compl t e ce niveau de connexion par le s me contextuel du plaisir d tre dans la cuisine ce qui a d j t habilement relev par Schwartz qui cite ce passage du roman ell serait agr able de venir s y asseoir chaque matin apr s une douche peine habill Le pronom adverbial y se substitue ici au substantif cuisine et renvoie ce s me contextuel comme connecteur privil gi Georges Perec Les Choses op cit p 14 3 Ibid pp 14 15 Ibid p 15 229 L isotopie centrale de ce premier chapitre est celui de la vision et du regard Mais contrairement Robbe Grillet elle n est pas une source d engluement dans une perception objective mais plut t une recherche de structuration subjective travers des liens s miques extr mement solides dans leur engendrement et leur productivit polyphonique Georges Perec pr cise encore ce qui le s pare de Robbe Grillet dans une interview donn e Jean Duvignaud o il d clare ll y a une distinction tr s simple entre le nou
84. automatisation Nous nous croulons sous l avalanche des signifiants en lt ion qui t moigne des deux grandes tendances exprim es ici par Perec la remise en cause du pouvoir de la connaissance positiviste laquelle il oppose le pouvoir stimulant de son produit instructif La Disparition Le roman poss de un vident potentiel didactique de par la richesse de ses d couvertes ce dont nous ne parlerons pas puisque de nombreux critiques les ont largement mises en vidence et de par une seconde tendance qui correspond une glossolalie innovatrice du r el Dans ses deux romans lipogrammatiques La Disparition et Les Revenentes Perec peut s assimiler volontiers ce professeur de langue portuguaise dont nous parle Maurois et qui monnayait ses services au nombre de mots qu il apprenait ses tudiants Il utilisait la filiation latine du fran ais et du portugais pour gagner rapidement une petite fortune en livrant une marchandise expresse les mots qui se terminent par ion en fran ais sont les m mes que ceux qui en portugais s ach vent par aon March conclu dit Juan Guarretos Eh bien coutez moi Tous les mots qui en fran ais se terminent par la syllabe tion sont les m mes en 35 bid p 310 Nous renvoyons ce sujet aux tudes de John Pedersen Perec ou les textes crois s Copenhague Etudes Romanes de l Universit de Copenhague 1989 chapitre 5 Comment peut on tre
85. bras avec des feuilles de verveine fra che se mettre des calculs de hy ne sous la langue r pandre de la farine sur le sol et m me faire d innombrables anagrammes des noms et des pseudonymes de la personne recherch e Cette amusante satire des m thodes propres aux occultistes r v le la fois le renouvellement de la di g se et l impact du spiritisme sur des esprits aux abois En effet les sciences occultes se rattachent directement la mentalit magique qui recherche la causalit dans l ensemble des faits d exp rience Comme le signale Marcel Mauss la magie a bien l air d tre une gigantesque variation sur le th me du principe de causalit Or chacun sait le r le que joue galement ce principe dans la recherche amp Ibid p 182 185 Ibid p 193 Voir ibid p 193 194 7 Marcel Mauss Sociologie et Anthropologie Paris Presses Universitaires de France 1950 p 56 56 scientifique mais aussi dans la structure du r cit Les sciences occultes provoquent aussi une lib ration des forces pulsionnelles notamment toutes celles qui sont l oeuvre dans les personnages du roman On comprend donc tout l usage et tout le parti que Perec a su tirer de l int gration du parascientifique la di g se de La Vie mode d emploi Cette exhibition de l occultisme participe bien s r de ce voeu d exhaustivit que Perec partage avec ses propres savants Tous ces personnages rudits vont
86. ce sont des souvenirs qui sont provoqu s des choses oubli es que je vais faire resurgir une anamn se c est dire le contraire de l oublis Sensible la cette opposition primordiale m moire oubli sur laquelle nous reviendrons Perec insiste sur lacte volontaire de l esprit qui commande l anamn se c est une sorte de m moire active J essaie de me souvenir je me force me souvenir Il exemplifie galement cette esp ce d asc se qui le conduit fixer rappeler se rappeler et revivre des souvenirs Je me dis voyons le th me de la nourriture le th me du sport celui de la politique une chanson un th me genre souvenirs de vacances tu vois En s adressant au journaliste Frank Venaille Georges Perec explique le rassemblement de ses souvenirs autour de syst mes th matiques qui sont similaires des fonctions Mais ce choix des donn es de la m moire dont nous parlions tout l heure doit ensuite passer par une autre tape Cette nouvelle tape la plus importante est celle de l organisation des souvenirs Elle est li e leur reconnaissance leur coordination leur laboration leur localisation dans le temps Situant les l ments de son recueil Perec nous donne dans un Georges Perec Je suis n Paris Seuil 1990 Le travail de la m moire entretien avec Frank Venaille p 81 c est l auteur qui souligne Ibid p 82 c est nous qui soulignons
87. comme roman dans le roman Perec nous donne ainsi cette description pr cise Ainsi commence le roman de Serval Il s intitule La Crypte Il se pr sente sous la forme d un manuscrit de 130 pages tr s soigneusement dactylographi sans corrections ratures ou rajouts d aucune sorte Sur la couverture une feuille de mati re plastique noire brillante sans indication de titre ni d auteur est coll e une bien curieuse photographie en noir et blanc Je suppose qu il s agit d un panneau peint plut t na vement mais non sans charme install quelque part dans le sud du Maroc Il repr sente un paysage semi aride avec quelques traces de v g tation un petit groupe d arbres dans le lointain un horizon de dunes et de collines Au premier plan gauche un indig ne souriant de face coup mi poitrine par le bord du panneau tenant par le licol un chameau dont on ne voit que le profil de la t te et du cou Au deuxi me plan se dirigeant vers la droite quatre chameliers sur leurs montures Dans le ciel une longue fl che pointe vers la droite Au dessus une grande inscription au pochoir TOMBOUCTOU 52 JOURS elle m me surmont e d une inscription en arabe qui je suppose veut dire la m me chose mais dans l autre sens Georges Perec 53 jours Paris P O L 1989 texte tabli par Harry Mathews et Jacques Roubaud 6 Ibid p 7 HT Ibid p 41 42 194 On remarque d embl e le parall l
88. d ordonnancement de classement d inventaire qui a tant passionn Perec est galement sujet caution destin l inocuit et rattach une forme de d rision L aveu de Perec qui consiste d vraisemblabiliser ses souvenirs et les rattacher au faux provoque ici deux remarques D une part la transformation n gative du souvenir d nie t elle toute valeur au recueil Probablement pas David Bellos nous raconte cette anecdote au sujet de Je me souviens Il y a une erreur que Catherine avait remarqu avant la publication du livre dans le Je me souviens n 440 Maurice Halbwachs La M moire collective Paris Presses Universitaires de France 1950 p 212 3 Georges Perec Je suis n op cit p 91 DT geg 291 Je me souviens de Petit Papa c est aujourd hui ta f te Maman m a dit que tu n tais pas l J avais des fleurs pour couronner ta t te j ai oubli la suite La chanson de sa propre enfance dont Catherine se souvenait disait Maman m l a dit quant tu n tais pas l Elle le signale Perec qui r pondit en ronchonnant Moi je men souviens comme a Expliquant ces d calages qu il rattache l originalit de la m moire individuelle et pour r pondre ses premiers lecteurs qui lui crivent au sujet de ses erreurs Perec affirme que ces erreurs n avaient rien de volontaire Mais cela fait partie du flou Il y a quelque chose d incertain da
89. d cor suscite sa m moire Le film de Robert Bober provoque chez le spectateur cette tension ind finissable que le texte de Perec voque tout au long des rapports successifs qu il consigne de l volution de la rue de son enfance Ainsi que Paul Fournel le signale l occasion de la parution de Penser Classer s Perec tait un homme curieux de tout mais qui savait appliquer sa curiosit ailleurs Les yeux se portaient volontiers l o ceux des curieux institutionnels ne se portent jamais Il tait rudit d une autre rudition et le monde qu il d cidait de voir n appartenait qu Jus Il s agit bien de cela une d cision personnelle capable de structurer une vision loin des canons institutionnels Selon toute rigueur c est ainsi que Perec utilisait le bassin in puisable du r el pour une construction langagi re litt raire po tique en voie de constitution originale complexe Lorsque dans Un Homme qui dort il insiste maintes reprises sur les transformations des chaussettes qui trempent dans une bassine de mati re plastique rose c est bien pour provoquer en nous ce lavage ce lessivage de la vision si Robert Bober En remontant la Rue Vilin 1992 Georges Perec Penser Classer op cit Paul Fournel Perec d but d inventaire in Magazine Litt raire Paris n 226 janvier 1986 p 73 c est l auteur qui souligne 141 longtemps alt r e par les pr tentions d mesur es d un
90. de celle ci ne doivent tre imprim s ou reproduced with the author s autrement reproduits sans son permission autorisation 0 612 21017 0 Canad R sum Savoir et connaissances dans l oeuvre de Georges Perec Portez ce vieux whisky au juge blond qui fume Pangramme de Georges Perec Le rapport entre savoir et fiction est l une des questions capitales en critique litt raire aujourd hui Georges Perec crivain dou d une connaissance encyclop dique est certainement l un de ceux qui ont le mieux r ussi cette int gration du savoir la fiction La recherche a pour but de ratisser toute la cr ativit cognitive de Perec et d en tablir les fondements les motivations et les objectifs Perec en effet brise avec un gal succ s la cloison entre savoir et cr ation dans de nombreux domaines le ludisme formel le jeu des lettres et des chiffres la qu te de son individualit la subversion du savoir scientifique la stimulation de la m moire le d jouement de la scolastique les constructions novatrices de l intertextualit et l tablissement d un nouveau savoir fond sur l insignifiant On se proposera de montrer comment se r partissent ces diff rents savoirs et quels r sultats on peut attendre de leurs interactions et m me de la production de nouveaux savoirs Tout cela conduisant la d couverte de l herm neutique perecquienne REMERCIEMENTS Notre reconnaissance va en premier li
91. de cette production multiforme De nombreuses hypoth ses peuvent se pr senter l esprit Tout d abord le flot des connaissances chez Perec correspond un double besoin d une part comme il le dit lui m me transmettre ces connaissances de conna tre ce qui nous entoure de jouer avec c est une mani re de le ma triser de l interpr ter et de r ver dessus et d autre part un besoin continuel qui est la production de la fiction Comme on le constate ici le second besoin est en accord avec le premier et en repr sente une de ses cons quences On rel ve cependant les contradictions de Perec entre son d sir de communiquer la connaissance et celui de jouer avec elle En effet on se souvient que Perec n a jamais montr d objectifs didactiques mais qu il consid rait plut t le texte comme producteur de fiction de fiction de savoir de savoir fiction N anmoins nous avons pu mesurer le potentiel consid rable des connaissances perecquiennes et partant leur incidence sur ses textes Perec d montre par son oeuvre la grande capacit de la litt rature absorber toutes sortes de connaissances Cette capacit vient de ce qu elles rel vent galement de la fiction Inversement c est encore cette grande vari t de connaissances qui d termine l abondance de la production perecquienne Il s agit en premier lieu des sciences de la nature et des sciences de l homme qui constituent pour Perec le mod le du savoi
92. des actes de mobilisation g n rale en cas de guerre sans oublier ie tonnerre des affiches publicitaires La m moire et l oubli par leur double filiation au domaine de l imaginaire constituent les bases op ratoires des s lections culturelles et des dictatures des id ologies dominantes La r sultante des luttes s lectives entre la m moire et l oubli reste donc le souvenir On comprend la crainte qui animait Perec lorsqu il tait la recherche des souvenirs du temps pass Mais il y a une p riode qui correspond d ailleurs une psychanalyse o j avais une v ritable phobie d oublier et il ajoute encore que c tait une d marche tout fait compulsive la peur d oublier Et lorsqu il r ussissait extraire ces souvenirs de son oublieuse m moire il avoue son tonnement et sa joie Oui il y en a d ailleurs deux ou trois qui m ont beaucoup tonn Et puis au moment o l on sort le souvenir on a vraiment l impression de l arracher d un lieu ou il tait pour toujours Cet arrachage du souvenir au pass participe bien de cet effort de construction intellectuelle du pass gr ce l imagination La m moire conduit le r cit d un souvenir t Ibid p 55 Georges Perec Je suis n op it p 87 7 Ibid p 88 7 Ibid p 88 33 Ibid p 89 295 fantasm fond sur une double tentative celle de la vraisemblabilisation et celle de l authentification toutes
93. du monde et sa propre annulation suicidaire On peut consid rer que les grandes explications du monde rattachent leur interpr tation des conflits engendr s par le d sir cette alternance des valeurs Ren Girard explique en effet que toutes les id ologies modernes sont d immenses machines justifier et l gitimer m me et surtout les conflits qui de nos jours pourraient bien mettre fin 9 Ibid p 131 Georges Perec Esp ces d espaces op cit p 95 11 Tbid p 96 190 l existence de l humanit Ces conflits existent aussi bien au niveau interindividuel qu au niveau individuel consid rant m me que le premier niveau produit le second On comprend alors le ressort final de la solitude romantique comme annulation du d sir ainsi que celles des c nobites et autres ermites Mais le d sir d isolement s accentue lorsque Perec se sent attir par les d serts glaciaux Ensuite des choses qui sont li es des r ves de temps ou d espace Il y en a pas mal C Aller au del du cercle polaire et dans La Cit id ale J aimerais bien vivre dans le Grand Nord mais pas trop longtemps Qu est ce qui attire ainsi Perec vers la zone arctique Le go t de l aventure ou l exp rience Sont ce des r miniscences d Arthur Gordon Pym d Edgar Allan Poel ou de Jules Verne dans ses Voyages et Aventures du capitaine Hatteras Il en va de m me de son attirance pour le milieu oc anique s
94. du regard de la cam ra et celle du regard de l cole du regard le Nouveau Roman la diff rence d Alain Robbe Grillet explique Perec dans un entretien de 1965 il ne cherche pas dans Les Choses vider les mots de leurs richesses crire un langage transitif ou neutre J ai voulu au contraire que mes mots soient inject s de sens charg s de r sonnances Moquette par exemple pour moi c est un mot qui v hicule tout un syst me de valeurs Cette d claration est symptomatique d une part les mots sont des bornes significatives dans la trajectoire de la subjectivit du narrateur et d autre part ce sont eux qui commandent au del des errances de la cam ra l ensemble des structures textuelles et partant les connexions intratextuelles qui assurent la coh rence isotopique du discours Ainsi cet oeil unique du cyclope qui telle une bille de verre lanc e par un enfant ou un oeil de verre tomb malencontreusement de son logement glisse solitairement sur la moquette syst me de valeurs repr sente bel et bien le regard du narrateur qui analyse David Bellos Perec et Saussure propos de La Vie mode d emploi in Mireille Ribi re Parcours Perec op cit p 91 David Bellos cite les propos recueillis par Marcel B nabou et Bruno Marcenac Georges Perec s explique in Les Lettres Fran aises no 1108 2 d cembre 1965 p 14 Voir aussi John Pedersen Perec ou les textes c
95. e ils tiennent un sac une petite valise un cabas une canne une laisse au bout de laquelle il y a un chien la main d un enfant Le reste des trajectoires concerne des cars de Ibid p 14 73 Ibid p 14 35 Ibid p 14 76 Voir ibid p 15 et 16 7 Voir ibid p 15 7 Voir ibid p 16 117 touristes et des livreurs Ce premier rapport de Perec d voile un univers fig fonctionnant dans le cadre troit du lieu g ographique L ordonnancement premier choisi par Perec rend compte de l efficacit de son heuristique Il donne l impression qu il n a rien manqu et lance un d fi comparable son lecteur parviendra t il sa suite reconstituer l univers le que l auteur observateur lui a livr En se conformant ses objectifs Perec donne largement l impression d une r ussite compl te La seconde tape va consacrer un renouvellement de son heuristique L attention de Perec vient se dissoudre devant la pression des micro v n ments Il va d laisser le champ g n ral de son observation pour se concentrer sur les faits sociaux D entr e de jeu il annonce la haute densit de ce qui lui offre le d cor imm diat plusieurs dizaines plusieurs centaines d actions simultan es de micro v nements dont chacun implique des postures des actes moteurs des d penses d nergie sp cifiques Stimul exalt enthousiasm par la d couverte soudaine de la multitude des comporte
96. emploi ibid p 70 252 l occurrence celui de Kafka vient par le m canisme de l inclusion intertextuelle modifier la configuration de lunivers intradi g tique du personnage perecquien Rorschash dont la destin e actantielle aurait t annul e s il n avait pas d velopp cette nouvelle potentialit savoir celle de raconter par un scripteur interpos son biographe la vie peu commune du trap ziste arrach malgr lui l univers kafka en Poursuivons maintenant l examen du parcours narratif tabli par Perec dans son int gration du r cit de Kafka Le paragraphe que Perec vient d introduire dans son r cit de la vie de Rorschash et qui concerne celle du trap ziste emprunt e Kafka transforme quelque peu la structure actantielle Le sujet devient l acrobate lui m me et l objet est alors repr sent par la qu te le d sir de la perfection Kafka justifie en effet les diff rentes performances de son trap ziste par l aspiration la perfection Au d but de la nouvelle nous pouvons lire que l acrobate est Pouss d abord par la seule ambition de se perfectionner tandis qu la fin du paragraphe nous lisons comme justification du genre de vie a rien du h ros que c tait pour lui la seule fa on de se tenir constamment en forme et de poss der toujours son m tier dans la perfection 2 Ici se produit une rupture dans l int gration du r cit kafka en Alors que l crivain tch que
97. en arabe sinon en h breu B et P sont une seule et m me lettre Auparavant dans le d roulement entrecrois des deux r cits celui de Perec et celui de la fiction romanesque Gaspard Winckler qui attend Otto Apfelstahl dans un bar re oit l offre suivante du gar on Voulez vous des bretzels Pardon fis je sans comprendre Des bretzels Des bretzels pour manger en buvant votre bi re Non merci Je ne mange jamais de bretzels l illusion des approximations onomastiques de Cinoc correspond ainsi le jeu sur les variations de bretzel et les r p titions quatre fois dans ce court dialogue Qui n a pas r v d une fantasmatique du nom Ce que fait Perec avec d autant plus de facilit et de secr te fureur qu il est juif Le patronyme originel de sa famille est Peretz il est si ancien qu il se rattache la Bible Le domaine des lettres authentifie l anciennet la v racit et la noblesse du nom Le recours l tymologie ajoute encore un d tail folklorique Peretz veut dire trou en h breu Le sens exact est rupture brisure cassure ce qui convient encore mieux la Georges Perec W ou le souvenir d enfance op it p 51 8 Ibid p 26 Ibid p 51 372 structure textuelle de W En effet la rupture appelle la suture comme le montre Bernard Magn propos de W ou le souvenir d enfance Le trou la rupture le nom originel renvoie la b ance universell
98. encore un savoir organisateur de la vie ainsi que le t moigne ces affinit s isotopiques du d sir qui ordonnent une nouvelle hi rarchie par comparaison organisatrice 2 L ordre de la comparaison syst me analogique Jonque va de pair avec Orient Jonque signifie un voilier d Extr me Orient dont les voiles de nattes ou de toile sont cousues sur de nombreuses lattes horizontales en bambou Lune va de pair avec la belle toile La lune est un satellite et l toile est un astre Pendant la nuit ils brillent dans le ciel Monast re va de pair avec hameau Le monast re est un tablissement o les moines vivent isol s du monde et un hameau est une agglom ration de quelques maisons rurales situ es l cart d un village Donjon va de pair avec tour Le donjon est la tour principale qui domine le ch teau fort Ksar va de pair avec le Grand Nord Un ksar est un lieu fortifi et nous pouvons dire que le climat du Grand Nord prot ge ses terres de la destruction humaine en agissant comme une forteresse climatique R cif va de pair avec sous marin Georges Perec Penser Classer op cit p 129 131 185 Le r cif est un roche dans la mer tandis que le sous marin circule sous la surface de la mer Wigwam va de pair avec Am rique Un wigwam est une hutte ou une tente des Indiens d Am rique du Nord Exp dients va de pair avec vieux Pour vivre certains individus sont oblig s de
99. es selon un hi rarchisation philosophique tr s classique Nous retrouverons cependant chez Perec bien des traits identifi s par Camus ne serait ce que la dimension et le rythme de l insignifiant dans l habitude Un autre auteur qui s est interrog sur l insignifiant fut l un des compagnons de Perec Cause Commune Il s agit de Paul Virilio Il existe videmment une communaut d id es et de pens es entre Perec et Virilio cela se con oit ais ment Bien que Virilio se soit plut t interrog sur les m canismes de la vitesse et des transformations perceptibles qu elle produit sur le r el il s est int ress galement la question de l insignifiant qui est li e une attitude g n rale l gard de l environnement Virilio cite une discussion entre le peintre Ren Magritte et un journaliste Alors que le journaliste affirmait que Magritte ne peint que des objets bizarres tels que des bilboquets Le peintre reprend son interlocuteur en montrant que rien n est plus familier qu un bilboquet Ce qui ne l est pas c est la rencontre de ces objets soit disant bizarres un peu comme celle de la machine coudre et du parapluie des surr alistes ou celle de la poule et du r veille matin des plaisantins jouant sur un certain ahurissement provoqu par la rencontre fortuite En r alit selon Virilio ce qui transforme le banal et fait appara tre l insignifiant c est le regard Regarder ce qu on ne r
100. est expliqu par une note laiss e c t du bol de caf au lait du petit d jeuner Ibid p 218 Georges Perec Voeux op cit p 168 Raymond Queneau Zazie dans le m tro op cit p 67 174 Le breuvage laiteux voque galement le cacocalo dont Zazie fait une effrayante consommation En r alit le jeune Dan Loch re se suicide rituellement lorsqu il apprend que sa soeur Zazie n a pas r ussi prendre le m tro C est le trou noir de la mort par l engin locomoteur ainsi Perec nous indique t il ceci Je me souviens des trous dans les tickets de m tro Le compte rendu de Perec nous r v le que les jeux homophoniques de Voeux ne se limitent pas des rencontres phon tiques et phon matiques mais aussi toute cette mentalit culturelle qui fonde le d jouement scolastique Ce d jouement scolastique c est videmment la critique de toute canonicit du texte La relecture que Perec fait de Zazie correspond en tous points la r invention de l oeuvre de Queneau Il s agit donc du second volume de Zazie pas dans le m tro Perec tente d puiser les reprises homophoniques dans son recueil de Voeux I s agit entre autres de l alphabet enfantin Bah Beh Bi beau but l du latin revisit Abyssus Abyssum invocat Asinus Asinum fricat des proverbes anglais T oublies Renaud t oublies To be or not to be des noms des music
101. et d oubli s lectif L avalanche des souvenirs du Je me souviens constitue elle seule l laboration d une nouvelle culture populaire Situ s dans la lign e du travail de Queneau et de sa l gendaire affection pour les mots Georges Perec Je me souviens Paris Hachette 1978 Ibid 282 et expressions du peuple les souvenirs tag s de Perec d velopperont la richesse d une langue et d une culture non litaire Ce qui jusqu pr sent ne pouvait tre voqu qu entre complices pourra d sormais tre l objet d une interrogation acad mique La d rision et le contraste eussent pu sans aucun doute choquer les pr cieux de tous bords qu on en juge par cette premi re confrontation Je me souviens du tac tac et Je me souviens qu il a fallu plusieurs jours pour que Ren Coty Versailles soit lu Pr sident de la R publique Quels sont les rapports possibles entre la connaissance du tac tac et celle de la fonction pr sidentielle dans la constitution de la quatri me r publique en France Doit on poss der une connaissance encyclop dique un esprit d lib r ment ouvert ou une m moire d l phant pour d chiffrer les souvenirs propos s par Perec Est ce l le premier effet thico esth tique des rencontres possibles Faut il percevoir un arri re plan socio politique qui nous entra nera au d cryptage complet du recueil Quelle esth tique se trouve manifest e dans la crista
102. et de certaines plantes L analyste de l insignifiant est confront une ph nom nologie polymorphe o il doit organiser ses activit s selon une microsociologie du quotidien Quels ph nom nes rattacher l insignifiant Comment organiser ces renseignements innombrables parvenant l informateur selon des cadences irr guli res Face l clatement constant de l individuel la multiplicit et la complexit des vies autonomes face la confrontation constante des actions simultan es et successives Perec est confront une probl matique qui semble absolument imma trisable Pourtant comme nous allons le voir il improvise un syst me d examen fond sur une heuristique qui reprend les acquis de la m thode progressive r gressive alliant sans cesse th orie et pratique Jamais il ne revient sur ses pas une progression continue rend compte du succ s de sa m thode aussi bien pour s lectionner les faits que pour les hi rarchiser et les distribuer Partant du principe ou aucun des l ments retenus ne saurait tre gal aux autres y compris ceux qui se r p tent Perec parviendra organiser les objets les faits les tres vivants selon les r gnes les activit s les mouvements non sans y int grer les rythmes puissants de la ville auxquels nul ne saurait chapper Que ce soit pour observer des faits dans une continuit rapproch e comme au 3l Georges Perec Tentative d puisement d un li isien Paris
103. et la stagnation du souvenir scolaire Je me souviens des Trois v ch s Metz Toul et Verdun ou encore Je me souviens de Pondich ry Karikai Yanaon et Mah Ces deux souvenirs sont class s sous cole dans l index Le premier rappelle le caract re paralysant de la m moire scolairement form e aussi Perec confesse t il propos de l cole J ai appris beaucoup de choses l cole et je sais encore que Metz Toul et Verdun formaient les Trois v ch s que delta gale b2 moins 4 ac et qu acide plus base donnent sel plus eau mais je n ai rien appris concernant la campagne ou bien j ai oubli tout ce que l on m avait appris Finalement de cette m moire encombr e on ne garde rien puisque la p dagogie reste Georges Perec Penser Classer op cit Je me souviens de Malet et Isaac p 74 Georges Perec Je me souviens op it entr e n 13 p 16 Ibid entr e n 93 p 33 Georges Perec Esp ces d espaces op cit p 94 308 inadapt e puisque l enseignement ne porte pas sur les r alit s concr tes Mais Perec parviendra se rattraper en parodiant le savoir scolaire C est le cas lorsqu il d clare ele me souviens du vase de Soissons En int grant ce souvenir au folklore enfantin Perec ne fait rien d autres que d imiter parodiquement les mots de Clovis Roi des Francs reprenant en main la situation Le vase de Soissons d connecte le souv
104. et seconde remarque s agit il ici de contraintes conomiques Les oulipiens dont ici Perec est le repr sentant attitr veulent transformer les pratiques lectorales et en l occurrence d dramatiser la lecture qui depuis qu elle existe semble subir le diktat 17 Georges Perec Un Homme qui dort Paris Deno l 1967 p 11 3 G rard Genette Palimpsestes La Litt rature au second degr Paris Seuil 1982 c est l auteur qui souligne 1S Ibid p 63 263 du canon Ces m mes canons nous asservissent la scolastique Perec s emploie ici les d jouer dans la subversion du savoir autog ne Mais Genette analyse autant l effet d conomie produit par les suppressions impos es certains po mes par les oulipiens En n utilisant que le d but ou la fin de chaque vers comme le fait Tristan Dereme ou bien des bords du po me comme le fait et le dit Fran ois Le Lionnais il est certain qu on veut d montrer que ces l ments sont auto suffisants et que par cons quent le reste est superflu D o cette derni re transformation propos e par Genette comme synth se de la Recherche Je proposerais pour ma part cette ha ka sation forc e de la Recherche Longtemps je me suis couch dans le temps Cette derni re transformation selon Genette pr senterait l avantage ind niable de permettre la vente simultan e des deux versions Parmi les nombreuses possibilit s offertes par l intertextualit
105. exploration d un savoir non institutionnel cach improbable qui requiert des instruments d investigation peu communs Interroger les dictionnaires pour comprendre la notion d insignifiants se r v le certainement tr s d cevant Les d finitions qui nous sont donn es ne sont rien moins que squelettiques voire si vasives qu elles nous d concertent dans leurs approches Nous en avons pour preuve ces deux d finitions tir es du dictionnaire Larousse du XX si cle et du dictionnaire encyclop dique Quillet Insignifiant du pr fixe in et signifier du latin signum marque Qui ne signifie rien n a rien de marquant est sans int r t des paroles des Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 Voir Georges Perec Approches de quoi in L Infra ordinaire Paris Seuil 1989 pp 9 13 7 Ibid p 12 ube zem 93 actions insignifiantes En parlant des personnes qui est sans m rite particulier sans importance un homme insignifiant Insignifiant Qui ne signifie rien Par ext qui est sans importance sans caract re insipide Ouvrage insignifiant Physionomie insignifiante Se dit aussi des personnes Personnage insignifiant Ctr Insigne important caract ris videmment ces d finitions ne sont pas tr s explicites elles ouvrent toutes sortes de possibilit s la r flexion Elles ont le m rite cependant de donner la conception commune de l insignifiant avec
106. ferai pas parce que cela prendrait trop de temps et aussi dans La Cit id ale J aurais bien aim aller sur la lune mais c est un peu tard Il y a d r alisation des options parce qu elles sont transfigur es par la vision artistique Ainsi TT Michel de Montaigne Les Essais tome II Paris Nelson diteurs 1926 p 31 Georges Perec Je suis n op cit p 105 Georges Perec Penser Classer op cit p 129 Touri Lotman La Structure du texte artistique Paris Gallimard 1973 p 257 i Georges Perec Je suis n op cit p 107 108 3 Georges Perec Penser Classer op cit p 130 r rena e smee ee men 182 que l annonce Tout Lotman propos du syst me m taphorique La sp cificit du sujet artistique r p tant un autre niveau la sp cificit de la m taphore consiste en la pr sence simultan e de plusieurs significations pour chaque l ment du sujet en outre aucune d elles n en limine une autre m me si elles sont totalement contradictoires Ce qui se produit dans une confrontation premi re de ces textes c est la formation d une approche impossible du d sir approche qui transite par une application m taphorique Le d sir se manifeste au mieux dans l impossibilit de s exprimer compl tement C est le propre de l Utopie un affranchissement de la r alit dans l expectative d un futur id al Les deux textes se r unissent comme list
107. g tiques ce qui produit une confusion entre l extra di g tique et les univers m tadi g tiques Les cons quences de ces transformations textuelles sont donc constitu es notamment par l annexion d un personnage de l univers kafka en celui de Perec En effet l impr sario de Kafka d anonyme qu il tait devient Rorschash c est dire le h ros chez Perec et s assimile le r le de rapporteur narratif m tadi g tique Finalement les jeux s miques produits par la circularit des isotopies dominantes comme l art l espace temps ou la mort dans la concentration des contraintes spatio temporelles permettent l assimilation compl te du texte origine par le texte cible muse mi 260 La manifestation de l intertextualit est videmment beaucoup plus t nue lorsque l on aborde des textes po tiques Claude L vi Strauss d finit ainsi le statut de la po sie La po sie semble se situer entre deux formules celle de l int gration linguistique et celle de la d sint gration s mantique De la m me fa on que Kristeva rejette la distinction prose po sie Perec n accepte pas la conception romantique de la po sie J ai choisi d appeler po sie des textes engendr s par des contraintes difficiles Le recueil de M taux appartient ce type de po sie puisque ce sont des po mes h t rogrammatiques Perec les appelle sonnets bien que leur forme n ait rien de comparable ave
108. gration de la science comme ressort distributionnel de la di g se tendrait certainement expliquer l absence des dialogues dans La Vie mode d emploi comme l a remarqu Jean Fran ois Chassay Le dialogue reste le processus explicatif par excellence au niveau romanesque M me lorsque la di g se int gre une controverse patente comme celle qui oppose le professeur Zapfenschuppe l archiviste Zaccaria Perec ne nous livre aucun dialogue qui aurait t rendu possible par la pr sence des deux savants au m me congr s La science ne saurait susciter d change non pas parce qu elle est fig e et monolithique mais parce que le savoir en tant que moteur de la di g se doit chapper tout didactisme Conform ment son dessein Perec utilise les savoirs comme une machinerie de l imaginaire Mais cette machinerie c est celle de la science consid r e non plus seulement comme g n ratrice de savants aux destin es exceptionnelles mais encore comme productrice de textes innombrables g n ralement destin s aux sp cialistes Cet int r t pour la science comme texte appara t rapidement chez Perec Chacun se souvient comment il devint documentaliste au d partement de neurophysiologie du C N R S en Voir Jean Fran ois Chassay Le Jeu des co ncidences dans La Vie mode d emploi de Georges Perec op cit p 134 Voir Roland Bourneuf et R al Ouellet L Univers du roman Paris Presses Universitaires de
109. gression par rapport celle qu il pr conise dans ses reconstructions inattendues Hyper signifiance et r seau sont donc les deux fondements de cette nouvelle culture populaire que Perec livre ses lecteurs de toute origine En r unissant dans un m me texte selon l exemple de conjonction donn par Warren F Motte on tend d montrer que le chef terroriste et le chef d orchestre appartiennent s mantiquement et s miotiquement au m me univers de signifiance et que partant leurs responsabilit s sont identiques pour ce qui concerne la formation de la culture populaire Les th mes obsessifs s lectionn s par Perec vouent la culture des s ries de symboles crans qui polarisent la r flexion Toutes proportions gard es entre les analyses de Roland Barthes et les repr sentations et rem morations de Perec nous pouvons consid rer Je me souviens comme un ouvrage mythologique et les Mythologies de Barthes comme un appel au souvenir du genre Je me souviens des romains au cin ma 7 Voir ibid derni re page de couverture 58 Voir Warren F Motte Jr The Poetics of Experiment a study of the work of Georges Perec op cit p 111 Roland Barthes Mythologies Paris Seuil 1957 p 27 o rm ps rage A Steg 336 Je me souviens des martiens Je me souviens de l abb Pierret Je me souviens du bifteck frites 2 Je me souviens des paroles de M Poujade Je me souviens de Billy Graham
110. habitude d rivent d une constatation vidente on ne peut nommer les signifi s sinon au moyen d autres signifiants Mais dans les diff rents processus de d placement ou de condensation tudi s par Freud de quelque fa on que l on en multiplie les m canismes de d rive et de germination quasi automatique on ne trouve aucun jeu qui m me s il est li des asso Ilit rati imilari expression ne se r verb re aussit t sur l agr gation des unit s de contenu et ne soit d termin en profondeur par cette r verb ration Autrement dit la diffraction des signifiants ne peut conduire qu la multiplication des signifi s En r alit le signifiant originel la matrice de d part produit un nouveau signifiant comme le d calque en pochoir d un mod le qu il suffit de colorer d une autre couleur mais on assiste surtout au d doublement du signifi Le signifi de Zazie dans le m tro reste sans commune mesure avec celui de Jazy Dan l aimait trop la seule co ncidence demeurant celle des phon mes alors que d j au niveau graph matique la s paration est consomm e Ce sont donc les signifi s qui permettent l clatement du processus textuel et sa multiplication comme dans le cas de La Cantatrice Sauve 2 Umberto Eco S miotique et philosophie du langage Paris Presses Universitaires de France 1988 p 31 c estnous qui soulignons Raymond Queneau Zazie dans le m t
111. interpr tation culturelle de la vie dans une soci t urbaine En laborant puis en pratiquant une m thode pour observer l insignifiant et ensuite le consigner par le texte Perec parvient cerner la notion jusqu un ultime recul dans l hypersignifiant du type Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit p 48 Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage op cit p 145 134 mikado Ainsi avons nous les principaux facteurs qui pr sident l identification de l insignifiant La r p tition vols de pigeons La concentration foules humaines automobiles flics touristes japonais etc La pr visibilit autobus L al atoire les mains occup es des passants L anecdotique les gens qui tr buchent micro accidents L insignifiant n chappe pas la hi rarchisation et la d codification subjective des faits Il consacre l clatement de l individu et la confrontation des vies autonomes dans la reconstitution de la quotidiennet par l inventaire C est bien s r l inventaire qui permet au mieux l analyse de l insignifiant Et chacun sait que Perec ne s est pas priv d en tablir de multiples exemples ce seront les joies ineffables de l num ration En 1974 Perec tente une exp rience originale une de plus certes celle de dresser la liste de tous les aliments qu il absorbe au cours de l ann e Au
112. l Universit d Ottawa 1983 p 114 197 Georges Perec Je me souviens op it entr e n 88 p 32 voir aussi Index p 132 18 Andr e Chauvin Jeu de m moire et histoires de mots dans Je me souviens de Georges Perec in Les Cahiers du CRELEF op it p 62 Au sujet des pratiques tudesques des soudards ou pourra lire Johan Jacob Christoph Von Grimmelhausen Les Aventures de Simplicius Simplicissimus traduction introduction et notes par Maurice Colleville Paris Aubier ditions Montaigne 1963 e lan 311 Rattachant ainsi tous ces souvenirs du folklore Perec propose une relecture ludique de l histoire la lumi re des transmutations textuelles des faits enregistr s Le souvenir unitaire permet aussi une revitalisation du v cu accumul C est l exp rience du v cu qui passe de la sph re de la subjectivit celle du cautionnement litt raire Cet Erlebnis r v le la puissance de ses liens avec cette exp rience du concret chez Perec ainsi avons nous Je me souviens que ma premi re bicyclette avait des pneus pleins Et Perec d expliquer le caract re concret de ce souvenir Quand j cris Je me souviens que ma premi re bicyclette avait des pneus pleins ce n est pas innocent J en ai encore la sensation physique et pourtant apparemment c est neutre Cette apparente neutralit est bien l expression de l intensit du v cu telle que Perec l exprime lorsqu il avoue qu e
113. l crivain On assiste enfin la manifestation du dernier volet de cette comparaison entre les deux utopies professionnelles de Perec celle qui concerne la vie entre les livres et celle qui recoupe les m canismes de l intertextualit qu il met rapidement en place d s son premier roman Les Choses Nous lisons en effet dans Choses que je fasse avant de mourir ce que nous ne retrouvons pas dans La Cit id ale J aimerais Aller du Maroc Tombouctou dos de chameau en 52 jours Ce d sir provoque en nous le d clic vers la derni re grande oeuvre inachev e de Perec savoir son roman 53 Christian Chelebourg pr face Jules Vernes Vingt Mille Lieues sous les mers Paris Librairie g n rale fran aise 1990 p XI Jacques Lacan crits IT Paris Seuil 1971 Subversion du sujet et dialectique du d sir dans l inconscient freudien p 185 3 Georges Perec Les Choses op cit Georges Perec Je suis n op cit p 107 193 jours En effet l illustration envisag e par Georges Perec pour la couverture du livre s intitule Tombouctou 52 jours avec une fl che orient e de la gauche vers la droite et figurent donc sur cette illustration quelques b douins dos de chameau Mais Perec nous donne lui m me une bien meilleure description Il s agit du manuscrit de Serval le romancier dont la vie constitue l une des histoires du roman qui pourrait plus tre consid r
114. l indicible l indicible n est pas tapi dans l criture il est ce qui l a bien avant d clench je sais que ce que je dis est blanc est neutre est signe une fois pour toutes d un an antissement une fois pour toutes Comme nous avons voulu l indiquer la parole n a pas produit l criture mais l criture n est qu un substitut inad quat ce silence command ordonn impos par des modes de pens e plus int gr s aux pouvoirs dirigeants d o la n cessit du meurtre Les H Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Leland op cit p 43 Ibid p 43 Ren Girard Des Choses cach es depuis la fondation du monde op cit p 38 39 Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit p 58 59 401 hommes tuent pour mentir aux autres et se mentir eux m mes au sujet de la violence et de la mort Il faut tuer et toujours tuer chose trange pour ne pas savoir qu on tue Des d portations des juifs accomplies par les Assyriens et les Babyloniens dans l Antiquit jusqu aux pogroms russes et la solution finale d Hitler le jeu dialectique des univers s mantiques s est r p t dans la multiplication des relations comme manifestation de l indicible propos de Perec et du monde souterrain de VW ou le souvenir d enfance le critique Andy Leak rapporte ceci Dans Lib ration du 3 avril 1976 figurait un article intitul Les enfants de la Shoah Com
115. l ments qui taient inaper us et qui ne deviennent visibles qu en comparaison avec ce qui s est fait beaucoup plus tard Pour atteindre ce r sultat on peut comparer notre m thode aux tapes suivies par la microbiologie cellulaire dans sa pratique de la th orie des cl nes savoir choisir enlever puis transplanter d une cellule une autre une s rie d l ments qui transformeront la cellule r ceptrice en une nouvelle entit Marcel B nabou d taillant les diff rents proc d s de Perec comme plagiaire nous explique que chez Perec le plagiat a pris presque toutes les formes possibles le d tournement parodique l emprunt transform pour ob ir une contrainte l autocitation et enfin l emprunt pur et simple Cette pratique perecquienne est loin d tre pass e inaper ue et ce d autant plus qu elle constitue un des mots d ordre de l Oulipo Les sp cialistes qui se sont pench s sur cette technique ont essay de la th oriser ainsi Marcel B nabou rappelle que Perec la d nommait citation Bernard Magn pr f re le mot valise par lui compos impli citation et Jacques Lecarme a le m rite de rendre concret le m canisme en le rattachant un art du visuel Ainsi les fondateurs des grandes banques modernes ont su Marcel B nabou Les Ruses du plagiaire exemples oulipiens in Le Plagiat op cit note n 14 p 21 Ibid pp 24 25 8 Ibid pp 24 25 242
116. l imaginaire perecquien On se souvient que Perec ne pouvait envisager d crire sans contraintes d o les romans lipogrammatiques et les po mes h t rogrammatiques Dans Voir Roland Barthes Sade Fourier Loyola Paris Seuil 1971 S L articulation p 58 61 Voir Georges Perec Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner in LA op cit p 8 414 une entrevue donn e aux Nouvelles litt raires Perec avouait ceci J aime multiplier les syst mes de contraintes lorsque j cris ce sont les pompes aspirantes de mon imagination Au del de la vision m caniste propos e par la m taphore il nous faut admettre que l imaginaire perecquien est stimul par les contraintes parce qu elles ouvrent sur la logique des combinaisons voire des combinatoires indispensables l expansion du texte Ce qui constitue l un des paradoxes de l criture de Perec et non des moindres Les textes perecquiens sont le fruit de multiples combinatoires C est ce qu exhibe le roman somme de Perec La Vie mode d emploi qui est en effet le r sultat d au moins six huit combinatoires possibles algorithmes listes d placements g om triques etc Ce travail de la combinatoire ressemble s y m prendre une forme d exp rimentation scientifique Ainsi les romans lipogrammatiques dont La Disparition constitue un exemple remarquable montrent que les contraintes exerc es sur les lettres constituent une exp rimentation scienti
117. l oblique rges Perec autobiographe Paris P O L 1991 Les temps d une ruse p 244 7 Voir ibid p 239 et 248 7 Ibid p 239 285 au travers de l ensemble du texte Le recueil constitue un texte h t rog ne correspondant par la bri vet de chacune des entr es aux bombardements ponctuels des pens es et des maximes des recueils de certains moralistes du XVII ou du XVIII si cles Ces souvenirs de Georges Perec sont au XX si cle ce que les aphorismes des moralistes classiques taient aux XVII et XVIII si cles Par exemple ceux de Luc de Clapiers marquis de Vauvenargnes Dans la langue ch ti e des philosophes du si cle des Lumi res Vauvenargues illustre les contradictions humaines que les pr occupations du temps lui enseignaient Des aphorismes tels que ceux ci sont soumis notre r flexion Les passions ont appris aux hommes la raison Le bon instinct n a pas besoin de la raison mais il le donne Les grandes pens es viennent du coeur Pour ex cuter de grandes choses il faut vivre comme si on ne devait jamais mourir Ce qui peut se comparer aux aphorismes de Perec qui compl tent ses souvenirs La m moire est une maladie dont l oubli est le rem de Le bonheur est dans l oubli non dans la m moire Un peu d oubli loigne de la m moire beaucoup en rapproche Ce sont les entr es d un texte h t rog ne On opposera les r gles de la combinatoire dans le cas de Perec au
118. la c te atlantique les ingr dients n cessaires la confection d une tarte aux poires les reliques majeures les substantifs masculins dont le pluriel est f minin amours d lices et orgues les finalistes de Wimbledon Le processus de la liste est exaltant et terrifiant la fois car il t moigne de l implacable vocation de la rationnalit le classement le parcours historique et l illusion taxinomique avec pour aboutissement la s curit de la pens e ancr e sur une r alit fractionn e et atomis e Pourtant Perec ne s arr te par l il a compris la faille la d faillance la faiblesse de l puisement du r el par les listes et les classements C est ce qu il analyse dans Le Monde comme puzzle On divise les plantes en arbres fleurs et l gumes Stephen Leacock Tellement tentant de vouloir distribuer le monde entier selon un code unique une loi universelle r girait l ensemble des ph nom nes deux h misph res cinq continents masculin et f minin animal et v g tal singulier pluriel droite gauche quatre saisons cinq sens six voyelles sept jours douze mois vingt six lettres Malheureusement a ne marche pas a n a m me jamais commenc marcher a ne marchera jamais Georges Perec 81 fiches cuisine l usage des d butants Penser Classer op cit p 89 108 Georges Perec La Vie mode d emploi op it passim Georges Perec Penser Classer op it
119. la vie et limit par la mort La philosophie de la vie est d une part li e au savoir ininterrompu qui s acquiert tout au long de la vie humaine et d autre part un 103 Georges Perec Voeux op it p 179 180 1 Georges Perec Penser Classer op cit p 129 131 8 Thid p 131 s Ibid p 129 107 Georges Perec Je suis n op cit p 105 109 181 apprentissage un apprivoisement de la mort un peu selon le mot de Montaigne disant que philosopher c est apprendre mourir Le fait que ces textes soient r dig s la premi re personne des choses que je pourrais faire d s aujourd hui et j aime bien vivre en France mais parfois oons exprime principalement la relation moi et le monde selon les paroles de Iouri Lotman Le monde est constitu comme lieu de vie et comme appropriation de d sir individuel Cette relation du moi avec le monde passe par l imagination la conception d une Cit id ale c est dire non seulement un endroit exceptionnel o la vie serait parfaite mais galement un endroit qui s ins rerait naturellement dans une pratique du monde Ce monde est transform par la vision artistique de l crivain Cette vision commande l impuissance de l auteur et l utopie engendr e par un avenir hypoth tique Ainsi avons nous dans Choses que je fasse avant de mourir il y a ensuite beaucoup de choses que j aimerais apprendre mais je sais que je ne le
120. le mythe du myst re gyptien avec un industriel allemand Herman Fugger amateur de cuisine et initiateur de l sot risme gyptien Georges Perec La Vie mode d emploi op cit index p 614 voir Jean Fran ois Chassay Le Jeu des co ncidences dans La Vie mode d emploi de Georges Perec op cit p 120 BA 53 Il a sous le bras un quotidien de Dublin The Free Man dont on peut lire la manchette NEWBORN POP STAR WINS PIN BALL CONTEST ainsi qu un petit encart d agence de voyages i EGYPT d A EGYPT ERSS ITS SUN ITS SUN k ITS EVENINGS ITS EVENINGS lt gt 3 ITS FIRMAMENT ITS FIRMAMENT A Le message publicitaire de l agence de voyage soigneusement agr ment de signes hi roglyphiques compose le message sot rique suivant l gypte terre du dieu soleil Amon R est aussi celle de la contemplation du ciel nocturne Sans insister sur toutes les relations que tisse Perec entre Joyce Dublin et l gypte Herman Fugger repr sente videmment le d mon vocateur des secrets gyptiens qui attirent tant les touristes du type myst re des pyramides de la chambre de la Reine des momies de l ensemble de la statuaire et de l architecture gyptien Perec r alise une alliance humoristique entre l sot risme gyptien et la pragmatique du touriste en mal de myst re Mais c est avec les manifestations du diable dans un occultisme grand spectacle qu il accomplit une r ussite
121. le signale Georges Perec dans les objectifs d Esp ces d espaces L objet de ce livre n est pas exactement le vide ce serait plut t ce qu il y a autour ou dedans Il r active ainsi l opposition int rieur ext rieur en dirigeant notre attention vers la figure I de l ouvrage o l on d couvre un large carr blanc de 9 4cm de c t avec cette l gende Carte de l oc an extrait de Lewis Carroll la chasse au snark Tel est en effet le probl me qui se pose l crivain celui de l absence du manque du vide Ce manque si souvent voqu comme explication de l criture c est aussi l espace occuper et la vie justifier Un des principaux motifs de la cr ation artistique d clare Sartre est certainement le besoin de nous sentir essentiels par rapport au monde Pour Perec comme le constate Roland Barthes roland Barthes par roland barthes Paris Seuil 1975 p 42 Georges Perec Esp ces d espaces Paris Galil e 1974 p 13 Georges Perec Ibid p 10 Anne Roche nous livre aussi cette remarque fort int ressante sur la page blanche qui est selon ses propres termes l explosion de l univers fictif pour Winckler r el pour Perec qui fonde le texte Anne Roche Souwenir d enfance in Magazine Litt raire op it p 27 voir la note n 19 Sur l obsession du blanc chez Perec voir Claude Burgelin Perec et la cruaut in Cahiers Georges Perec n 1 op cit
122. les agents du FBI puis allant m me jusqu aux innovations d tourn es pour accr diter la recherche transformer le liquide en essence ou encore faire du sucre avec de la sciure de bois En racontant la science Perec m le sans cesse l obsession du savoir scientifique la m tadi g se romanesque Le contraste permettant le jeu qui d concerte assure en m me temps la caution r f rentielle du r cit Cela est conforme aux proc d s mis en lumi re par Laurence Dahan Ga da qui crit La strat gie de la fiction consiste absorber des syst mes tout faits de causalit et les faire collaborer avec les syst mes formels de la Ibid p 374 Ibid p 375 376 e r 60 narration en vue de r gler son propre r gime de vraisemblance et d intelligibilit Il s tablit au niveau de La Vie mode d emploi un change incessant entre plusieurs niveaux narratifs que repr sententle texte scientifique et le texte litt raire comme int gration simultan e des principes rationnels de la connaissance organis e Il s agit de produire un texte qui rel ve du vraisemblable et cautionne l imagerie st r otyp e d une science omnisciente r glant elle m me la mati re du texte Mais la science c est encore la supr matie de la preuve Perec ne va pas n gliger une pareille aubaine lorsqu il s agit de d peindre une controverse scientifique parmi celles innombrables qui ont d fray la chronique
123. les exc s inutiles de la presse La nouvelle tape de la constitution de cette heuristique perecquienne consistera cibler les nouveaux centres d int r t et se donner une m thode pour les analyser Dans la suite de son propos Perec essaie de cerner les cat gories selon lesquelles l insignifiant peut se manifester le r p titif par exemple Ce qui se passe chaque jour et qui revient chaque jour le banal le quotidien l vident le commun l ordinaire l infra ordinaire le bruit de fond l habituel Apr s avoir identifi ce qu il recherchai Perec nous propose une probl matique et une Georges Perec Approches de quoi in L Infra ordinaire op it pp 9 10 Ibid p 10 Voir au sujet de cette confrontation entre le sensationnel et l essentiel Patrick Imbert L Objectivit de la presse le 4 pouvoir en otage Ville LaSalle ditions Hurtubise HMH Lt e 1989 p 168 3 Ibid p 10 Ibid p 11 104 m thodologie Il faut changer notre perception des choses et aussi notre interpr tation L habitude a effac en nous tout d sir et toute possibilit de regard neuf sur notre univers coutumier Il en vient la conclusion que nous dormons d un sommeil hypnotique alors que nous sommes veill s L opposition sommeil veille est constitu e comme exemple d un tat de catalepsie avanc et improductif Il rassemble sa probl matique selon une interrogation existentielle O est el
124. mar e de tout ce qu il faut observer les gens dans la rue les voitures les immeubles les magasins les caf s les rythmes notion abstraite lire ce qui est crit dans la rue la beaut des femmes les op rations de la circulation garer sa voiture les circuits des autobus les gens classer les gens jouer au tennis o dust ENNEN 115 barbe les animaux etc Dans cette premi re tape de son heuristique Perec proc de un balayage complet du champ op ratoire de son observation Pour concr tiser sa r ussite il va tout regrouper sous de grandes rubriques en essayant autant que possible de ne pas rompre son analyse C est ce qu il appellera un inventaire du visible Cet inventaire caract ristique est effectivement conforme ce qu il avait pr conis dans Esp ces d espaces Il rassemble ainsi un vaste savoir s miologique du plus petit au plus grand des lettres compos es par des sigles genre KLM des mots surtout des noms de magasins de rues d institutions genre H tel R camier rue du Vieux Colombier Parc Saint Sulpice des symboles conventionnels du type fl che indicatrice de direction ou panneau de sens interdit des chiffres notamment sur les autobus ou ceux du seuil des b timents des slogans dits fugitifs parce qu ils se baladent sur les autobus de l autobus je regarde Paris Apr s avoir r uni dans cette synth se du mobile et de l immobile un grand nombre d objets ins
125. me souviens un recueil de souvenirs que lui a inspir le livre de l crivain am ricain Jo Brainard Il r unit dans ce recueil pr s de 480 souvenirs originaux mais qu il partage avec nombre de ses contemporains L ouvrage poss de n anmoins un caract re autobiographique ind niable Il s agit d une autobiographie collective On ne peut donc s parer la connaissance de soi de la r union de tous ces souvenirs personnels L originalit de Perec se manifeste dans cette tonnante exp rimentation de la m moire Encore une fois par l accumulation de tous ces souvenirs il r v le l aspect taxinomique de la m moire Les souvenirs collect s par Perec correspondent en quelque sorte un recueil de pens es les plus diverses relevant des activit s humaines les plus vari es souvenirs d cole souvenirs de vacances de films de sportifs qui ont d fray la chronique d acteurs de cin ma d hommes politiques d anecdotes plus ou moins banales comme des grands v nements de l histoire contemporaine Toutes ces notions disparates ont pu s agglom rer dans la m moire d un grand nombre d individus et font partie int grante d une personnalit marqu e par l histoire de son temps Cette exp rimentation de la m moire se situe donc deux niveaux de connaissance d une part Perec s efforce Georges Perec Notes sur ce que je cherche in Penser Classer op cit p 10 Georges Perec Je me souvien
126. mis en avant par Perec confirme cette analyse d Eco Aussi Perec n est il sur ce point particulier qu un h ritier des processus d criture de l Antiquit Nous reprenons par exemple les hypoth ses de certains arch ologues tels le s mitiste allemand W Gesenius qui soutient que the Semitic names were derived from Tzvetan Todorov Th ories du Symbole Paris Seuil 1977 p 33 voir aussi Umberto Eco Le Signe op cit p 222 Marc Angenot Glossaire pratique de la critique contemporaine Montr al Hurtubise HMH 1979 p 54 Umberto Eco Le Signe op cit p 224 355 the form of the object originally represented by the sign gt Et David Diringer que nous citons exemplifie la th orie de Gesenius So for example it is commonly accepted that the second letter had originally the form of a house and because of this form it was called beth meaning house M me si l orientaliste rejette ensuite cette th orie on peut comprendre qu elle aurait pu s duire Perec La probl matique de l alphabet obs de Perec ce qu il manifeste par une exploitation syst matique des possibilit s alphab tiques dans son recueil de po mes appel justement Alphabets Dans ce recueil le syst me de la onzine permet d explorer tous les textes g n r s par l h t rogramme Ainsi dans la relation de ses souvenirs personnels Perec nous raconte qu il vient de partir d une ferme occup e par un vi
127. monde Les synth ses surprenantes de Perec sa d dramatisation de la science par la parodie reviennent justement cela La science n est que pr texte d autres savoirs qui fa onnent et dominent progressivement l imaginaire collectif Michel Pierssens Savoirs l oeuvre Essais d pist mocritique op cit p 184 18 Roland Barthes roland Barthes par roland barthes op cit p 164 CHAPITRE II POUR UN SAVOIR DU QUOTIDIEN Au d but de son article sur lt L Effet de r el Roland Barthes s interroge derechef sur l importance des objets triviaux voire insignifiants qui pars ment nombre de textes des romanciers du XTX si cle Il s agit d un vieux piano d un barom tre ou d un tas pyramidal de boites et de cartons retenus par Flaubert ou bien encore d une petite porte signal e par Michelet Quelle importance peut rev tir la description ou ne serait ce m me que la simple mention de ces objets h t roclites Telle est la question que se pose Barthes Une porte passe encore on peut en effet la franchir ou la fermer mais un vieux piano probablement d saccord un barom tre sans mercure et des boites peut tre ab m es et sans fond de quelle pertinence peuvent tre ces objets N anmoins Barthes rappelle notre attention que ces objets d risoires qu il d signe comme la notation insignifiante s apparentent dans leur simple mention la description Il rel ve que l int grati
128. n cessairement lus pour tre conserv s Perec vise plut t la constitution d un appareil g n rateur de symboles ou de signes qui d voile les syst mes de pens e vou s aux clich s et aux st r otypes Mais la s lection n est pas tout Ce sont encore tous les m canismes sous jacents o la collecte des souvenirs qui forment cette nouvelle culture populaire en opposition flagrante avec le pr t penser de la doxa Ces m canismes sont ceux de la juxtaposition de la coordination de la subordination de la confrontation qui mettent en avant un bouleversement complet de perceptions organis es comme habitudes sociales La culture populaire qu exhibe ironiquement Perec met en pi ce les figures l gendaires Bernard Buffet Boris Vian Andr Gide Jean Paul Sartre Michel Butor telles que v hicul es par le go t pour l anecdote que partage la soci t TT Georges Perec Je me souviens op cit derni re page de couverture 335 fran aise Elle rehausse consid rablement des proc d s g n ralement rejet s comme mineurs jeux de mots fond s sur les affinit s des signifiants slogans publicitaires subvertis comptines couplets chansons chansonnettes vou es au galvaudage et au d vergondage lectures d tourn es des textes pseudo souvenirs historiques et scolaires enseignement d g n r Perec fait des lieux communs qui meublent les esprits une esp ce de culture de cuisine d risoire qui est en constante r
129. objectifs de l aventure perecquienne ainsi que le signale Marcel B nabou Elle correspond au soin que Perec met masquer ses emprunts et inversement tous ceux qu il apporte pour les r v ler Cela correspond aussi sa psychologie largement d doubl e et fractur e telle qu il l exprime dans W ou le souvenir d enfance Une fois de plus les pi ges de l criture se mirent en place Une fois de plus je fus comme un enfant qui joue cache cache et qui ne sait pas ce qu il craint ou d sire le plus rester cach tre d couvert 2 Un dernier point que les m canismes d intertextualit perecquiens mettent en valeur correspond au dessein tr s oulipien de faire ressortir des textes anciens des Voir Georges Perec Quatre Figures pour La Vie mode d emploi in L Arc op it p 50 53 Marcel B nabou Les Ruses du plagiaire exemples oulipiens in Le Plagiat op cit p 25 25 Ibid p 25 TY Georges Perec W ou le souvenir d enfance Paris Deno l 1974 p 14 276 potentialit s nouvelles En ins rant des textes trangers ses propres textes Perec fait surgir pour reprendre les termes de B nabou des virtualit s qui ne pourraient tre per ues dans le contexte initial 2 L adh sion de Perec l Oulipo est d terminante dans l volution de sa production Il en assimile rapidement l esprit les recherches et les proc d s et d s lors un nouveau champ de recherche s o
130. of Georges Perec Lexington Kentucky French Forum Publishers 1984 Ch III The Game John Pedersen Perec ou les textes crois s Copenhague tudes Romanes de l Universit de Copenhague 1984 Ch 7 La vie en jeu Jean Michel Raynaud Du double jeu gt in Cahiers Georges Perec n L op cit p 83 Jacques Bens Un crivain joueur in Cahiers Georges Perec n 4 M langes Paris Editions du Limon 1990 p 75 Voir aussi le m moire de Pascale Millot Georges Perec et le jeu tentative d inventaire des Formes du jeu dans l oeuvre de Georges Perec M moire Litt rature Universit de Picardie 1987 75 pages 7 Voir Roland Barthes roland Barthes par roland barthes Paris Seuil 1975 p 145 362 faut donc poursuivre ce cercle du jeu cette fois avec la nouvelle d nomination de la lettre Dans W ou le souvenir d enfance la page 23 la note infrapaginale n 1 corrige les notations approximatives du texte Il existe en effet une lettre nomm e Gimmel Et Perec ajoute encore e dont je me plais croire qu elle pourrait tre l initiale de mon pr nom Selon l habitude bien ancr e nous retrouvons le redoublement de la consonne m Car s il existe une lettre d nomm e gimel dans l alphabet h breu et qui en constitue la troisi me sa graphie est simplement gimel Nous avons vu que pour certains linguistes chaque lettre peut correspondre un objet usuel La lettre gimel ou gam
131. p ETZIONI AMITA Activ jety f Soci nd Politi New York The Free Press 1968 698 p FISCHER Gustave Nicolas Psych iologi r Paris Presses Universitaires de France Que sais je 1981 127 p FISETTE Jean Introduction la s miotique de C S Peirce Montr al XYZ 1990 86 p FOUCAULT Michel Les Mots et les choses Paris Gallimard 1966 400 p FOUCAULT Michel L Arch ologie du savoir Paris Gallimard 1969 257 p FREUD Sigmund Essais de Psychanalyse Paris Payot 1963 280 p FREUD Sigmund Introduction la Psychanalyse Paris Payot 1984 443 p FREUD Sigmund Totem et Tabou Paris Payot 1965 186 p FRYE Northrop Le Grand Code la Bible et la litt rature traduit de l anglais par Cartherine Malamoud pr face de Tzvetan Todorov Paris Seuil 1984 338 p GABEL Joseph La Fausse Conscience Essai sur la r ification Paris ditions de Minuit 1969 273 p GENETTE G rard Palimpsestes la litt rature au second degr Paris Seuil 1982 558 p GENETTE G rard Figures I Paris Seuil 1968 276 p GENETTE G rard Figures II Paris Seuil 1969 294 p GENETTE G rard Figures III Paris Seuil 1972 282 p Vans ne rum Ate soie 2 ET 436 GENETTE G rard Seuils Paris Seuil 1987 388 p GEORGIN Robert Lacan Petit Roeulx Cistre 1984 118 p GIRARD REN Des Choses cach es depuis la fondation du monde Paris Bernard Grasset 1978 631 p GIRARD REN La Route a
132. pas abouti il convient d analyser quelles sont les oeuvres o il recourt des index ou d autres dispositifs textuels qui ressemblent des listes voire des sommes scolastiques Nous avons tabli justement la liste suivante en vue de pr parer nos conclusions Quel Petit V lo guidon chrom au fond de la cour Paris Deno l 1966 Index des fleurs et ornements rh toriques et plus pr cis ment des m taboles et des parataxes que l auteur croit avoir identifi es dans le texte qu on vient de lire Petit trait invitant la d couverte de l art subtil du Go Paris Christian Bourgois diteur 1969 IT Saturation comprenant notamment Bibliographie Glossaire Table et Soldes La Boutique obscure Paris Deno l 1973 Un index appel Rep res et Repaires avec cette note 1 Les chiffres renvoient aux num ros des r ves Sur la m me page cette citation emprunt e sans autre r f rence Harry Mathews car le labyrinthe ne conduit nulle part qu au dehors de lui m me Une Postface de Roger Bastide Une Table Esp ces d Espaces Paris ditions Galil e 1974 Un index intitul R pertoire de quelques uns des mots utilis s dans cet ouvrage TT Georges Perec Esp ces d espaces op cit p 124 8 Georges Perec Je me souviens op cit p 127 M Georges Perec Petit V l idon chrom au fo la our Paris Deno l 1966 Pierre Lusson Georges Perec J
133. point de vue phon tique il existe une disjonction entre les phon mes purement en a soit a ou a et ceux qui comprennent la consonne nasale n soit ou a Ainsi en est il de tous les participes pr sent massacrant cachant catchant des adjectifs verbaux comme charmant ou des substantifs divers comme safran pampa etc Concernant la pratique de ce texte remarquable le jeudi 5 novembre 1992 lors d une soir e organis e par l Acad mie Qu b coise de Pataphysique Marcel B nabou invit pour pr senter son dernier livre nous fit une lecture publique du dit lipogramme Tout en le pr sentant haute et intelligible voix selon l expression consacr e il nous vint cette id e qui fut confirm e ensuite la conclusion de la lecture que nous assistions une c r monie initiatique m me ubuesque et qu au del de l humour de Perec que nous restituait si vigoureusement Marcel B nabou il existait un ancrage profond de ce chant dans les pratiques d initiation Et le dernier mot du lipogramme Abracadabra participe de la parodie m me de cette fa on magique d envisager le texte En effet tout texte sans 7 Ibid p 216 7 Ce lipogramme en a est sign Gargas Parcas tel est le nom du scrivain ou du scriptor voir Claude Burgelin Georges Perec op it p 31 La premi re lecture probable de ce lipogramme a eu lieu selon le souvenir de Paul Braffort au Centre Beaubourg
134. produire d autres signes Cette fonction li e ici au parall lisme entre l histoire collective et l histoire personnelle appara t clairement dans un passage de WA Bien que nous ayons d j remarqu cette analogie entre le dessin et la famille il nous faut pousser plus loin notre analyse du transformationnisme iconique de Perec en revenant pour cela sur un passage signal par Warren F Motte Nous lisons en effet ceci dans W Mon souvenir n est pas souvenir de la sc ne mais souvenir du mot seul souvenir de cette lettre devenue mot de ce substantif unique dans la langue n avoir qu une lettre unique unique aussi en ceci qu il est le seul Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit D Warren F Motte Embellir les lettres in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 114 sO n res gemet kan 353 avoir la forme de ce qu il d signe le T du dessinateur se prononce comme la lettre qu il figure mais ne s crit pas T gt mais signe aussi du mot ray nul la ligne des X sur le mot que l on n a pas voulu crire signe contradictoire de l ablation et de la multiplication de la mise en ordre axe des X et de l inconnu math matique point de d part enfin d une g om trie fantasmatique dont le V d doubl constitue la figure de base et dont les enchev trements multiples tracent les symboles majeurs de l histoire de mon enfance deux V accol s par leurs poi
135. puis celles de Jaap Lintvelt Bernard Magn sugg re selon ses propres termes de distinguer dans le discours fictionnel trois instances 1 Une instance de l inscription dont l nonciateur est l auteur 2 Une instance de la scription dont l nonciateur est le scripteur 3 Ibid p 26 Ibid p 26 Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage Paris Armand Colin 1980 pp 171 172 L Jaap Lintvelt Les Instances du texte narratif litt raire in criture de la religion criture du roman textes r unis par Charles Grivel Centre Culturel Fran ais de Groningue Lille Presses Universitaires de Lille 1979 p 170 Ces deux auteurs sont cit s par Bernard Magn voir note suivante 244 3 Une instance de la narration dont l nonciateur est le narrateur Le but de ces distinctions est nonc clairement apr s prise en compte d une opposition relev e par Ricardou entre le repr sentatif et l anti repr sentatif Puisque l criture est une activit anti repr sentative on devrait aboutir deux sortes de textes les textes hyposcripturaux o l criture demeure sous la domination de la repr sentation et les textes hyperscripturaux o l criture est affranchie de la repr sentation Comme Ricardou aboutit caract riser diachroniquement les deux sortes de textes en pal otexte pour l hyposcriptural et en n otexte pour l hyperscriptural Be
136. qui faisaient l orgueil du The Oriental Saloon and Gambling House lui seul l inventaire consign dans La Vie mode d emploi au chapitre 94 Escaliers 12 pourrait susciter une tude d taill e il s agit de la Tentative d inventaire de quelques unes des choses qui ont t trouv es dans les escaliers au fil des ans suite et fin Resteraient encore faire les inventaires transformationnels des Lieux des Lieux o Cat dormi dont il ne subsiste que quelques chambres retrouv es et l volution de la Rue Vilin Sur le mod le proustien Perec recompose ses Trois chambres retrouv es pour Ibid pages 16 17 24 29 30 39 43 58 82 102 106 111 115 144 152 170 171 505 et 555 IT Ibid pp 654 567 Georges Perec Trois Chambres retrouv es in Penser Classer op cit pp 25 29 et La Rue Vilin in L Infra ordinaire op cit pp 15 31 7 Georges Perec Trois chambres retrouv es in ibid pp 25 29 140 y restituer les lits o il dormait les lectures qu il faisait ou qu il voquait les maisons o elles taient situ es ou encore les activit s que ces chambres lui rappelaient cure d eau Enghien les Bains ou record de bicyclette Beauvais Par contre la Rue Vilin est li e directement des transformations progressives de l insignifiant La vision de Perec est alors plus que jamais subjectivement conditionn e par le pass vocateur que le
137. remarque pour d autres raisons que nous Odile Javaloyes Espi ne pr sentent pas les trois lettres h bra ques de la mezzuzah de la m me fa on L La Vie mode d emploi Paris dition Hachette P O L 1978 p 501 zb 2 La Vie mode d emploi Paris dition du livre de poche 1980 p 501 VU Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 voir les chapitres LX Ibid p 501 8 Ibid p 501 Odile Javaloyes Espi Contre l vidence apparente in Textuel Cahiers Georges Perec no 2 W_ou le souvenir d enfance une fiction Paris Universit de Paris VII 1988 p 61 367 Cette dissemblance rev t une certaine importance m me si elle ne concerne pas directement notre examen qui commence par l identification des trois lettres En lisant de gauche droite bien s r il s agit des trois lettres suivantes sin waw yod ou shim resh yod ou encore shim daleth yod ce que l on d signe g n ralement comme le Shadda le nom de Dieu qui appara t traditionnellement sur le mezouzoth comme le rappelle Warren F Motte Le Shadda est l un des kinnujim c est dire quil correspond la Tora ce que nous explique avec beaucoup de pr cision Gershom G Scholem en citant Josef Gikatilla La Tora tout enti re est une trame de surnoms kinnujim c est l expression h bra que pour les diff rents pith tes de Dieu tels que mis ricordieux grand cl ment respect
138. renouvel es de la parodie scientifique Pourquoi les aspirateurs tra neaux se vendent si mal Que pense t on dans les milieux de modeste extraction de la chicor e C Aime t on le fromage en tube Voir David Bellos Georges Perec une vie dans les mots Paris Seuil 1994 p 271 103 Georges Perec Les Choses Paris Julliard 1965 e Voir ibid p 29 7 Tbid p 34 68 Aimeriez vous madame donner en location votre chambre un Noir GE qualit s demandez vous votre matelas Est ce qu elle ne mousse pas trop votre machine laver En germe dans Les Choses la parodie scientifique s accentue dans Quel Petit v lo guidon chrom au fond de la cour Bien s r elle s int gre la dissolution g n rale que Perec impose aux valeurs socio conomiques d une soci t perturb e par la derni re guerre coloniale du si cle Nous relevons cependant cet exemple dans le champ m dical que Perec commence bien conna tre il s agit de la formule du Dr Mortibus au nom vocateur et nous nous rabatt mes sur la thanatine solucamphr e du Dr Mortibus Nicotate de Methilde 0 005 8 Chloroth ophyllinate dimethyl amino thyl benzhydryli EE sis 0 1 Paradichlorobenz ne 0 4 Balzaque 0 0001 Quinquina succirubra 0 8 James Bond 0 07 Agrippa dobignia
139. romantisme li l litisme Il s agissait pour lui de nous obliger d caler nos pr perceptions notre perception notre s lection du signe li es une excessive et omnipotente transcendance du sentiment et de l analyse Perec remet sans cesse en cause cette ad quation possible suppos e infinie entre le r el et le langage entre le sensible et l intelligible La vie du reclus laquelle il fait allusion dans Un Homme qui dort et qui se compose de menus faits correspond cette polarisation sur l insignifiant comme origine possible de la complexit Michel Maffesoli dans son analyse de l exp rience banale montre que l effet de composition rejoint la th matique de la complexit pour laquelle rien n est n gliger Tout est bon pour une compr hension holistique et par l est d pass e l habituelle dichotomie entre le monde sensible et le monde intelligible fondement du rationalisme moderne Ce constat de Maffesoli ne fait qu ent riner la multitude des transferts toujours possibles entre la r alit et le langage L observation forcen e conduit un clatement de l objet en une mosa que de l insignifiant ou encore en lt une configuration kal idoscopique pour reprendre l expression de Michel Maffesoli Tout ce morcellement culturel de la vie peut devenir objet d tude de constat d approfondissement Tels sont les travaux d Abraham Moles qui s int resse la micropsychologi
140. s simples d une trentaine de signes typographiques soit capable de cr er chaque jour ces milliers de messages Avant de consid rer les rapports qu entretiennent entre eux ces milliers de messages nous pouvons commencer par la production la plus l mentaire des lettres assembl es savoir le nom Le nom propre certainement m rite cette attention puisque nous analysons les processus identitaires C est un truisme que d affirmer que le nom nous renvoie un E Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit p 23 Georges Perec prise d criture in Bernard Magn Perecollages Toulouse Presses Universitaires du Mirail Toulouse 1989 p 11 Georges Perec Un Homme qui dort op it p 64 366 personnage et son caract re Parmi les personnages les plus intriguants de La Vie mode d emploi beaucoup de lecteurs ont remarqu le merveilleux Cinoc au nom toil Avant de consid rer le nom du personnage venons en tout d abord ce substitut du nom qu est dans le cadre juif la mezzuzah ou mezouza selon la graphie de Perec Elle est install e non pas l entr e de l appartement de Cinoc comme le veut la tradition mais sur le chambranie de la porte de sa chambre La mezzuzah est cens e contenir quelques versets de la Torah Nous allons voir qu il n en est rien et qu il y a interpolation Signalons en premier que les deux ditions de La Vie mode d emploi comme le
141. sa connotation n gative Mais puisque l tymologie rattache le terme au signe il convient d analyser ce qu il a de commun avec sa racine latine signum la marque Nous ne reviendrons pas sur une d finition du signe Nous remarquons simplement que l insignifiant est marqu par une grave ambigu t s mantique Serait ce justement parce que ce concept ne constitue pas un signe Or Roland Barthes propos de l objet insignifiant pose ainsi le probl me Est ce qu il y a des objets hors du sens c est dire des cas limites Je ne le pense pas Un objet non signifiant d s qu il est pris en charge par une soci t et je ne vois pas comment il ne pourrait pas l tre fonctionne au moins comme le signe de l insignifiant il se signifie comme insignifiant Avec Barthes nous aboutissons une philosophie de l insignifiant Cette cat gorie constitue un signe Elle s ins re dans les m canismes g n raux de la s miose La s miose ou semiosis est d finie selon Eco comme lt le processus par lequel 8 Dictionnaire Larousse article insignifiant Larousse du XX si cle tome I M Paris Librairie Larousse 1972 p 77 Dictionnaire Encyclop dique Quillet tome G J Paris Librairie Aristide Quillet 1969 p 3483 Roland Barthes S mantique de l objet in L Aventure s miologique Paris Seuil 1985 p 258 94 des individus empiriques communiquent ces processus de communication sont de
142. sario attentionn nous fait part de son soulagement Quand je le voyais crit Rorschash poser le pied sur l chelle de corde grimper rapide comme l clair et se percher enfin l haut je vivais toujours l un des plus beaux moments de ma vie Il convient de remarquer ici que Perec attire notre attention sur l impr sario Rorschash car ce dernier crit ses impressions et les rapporte m me au style direct Ainsi l impr sario Rorschash joue le r le du rapporteur selon la terminologie de Bernard Magn et il devient un actant op rateur de l insertion En effet jouant sur le principe de la causalit que Kafka maintient au niveau de l implicite Perec reprend l id e du d gagement complet des portes et des couloirs pour que l acrobate p t sans perdre une seule seconde rejoindre ses hauteurs Et il introduit alors la remarque de Rorschash faite au style direct comme l impli citation m nag e par l actant op rateur qui Franz Kafka ibid p 55 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 71 Bernard Magn Perecollages 1981 1988 op CL p 75 3 Ibid p 75 _ g Georges Perec La Vie mode d emploi op it p 71 feet aen era 256 r alise ainsi l intrusion du m tadi g tique dans le di g tique Le personnage actant op rateur impr sario Rorschash nous livre ses impressions directement sur son artiste chaperonn comme si le lecteur lisait sans inter
143. signe du signe du corps Cette d monstration des corps devait tre si lumineuse que jamais le nazi ne pouvait manquer le Juif Pourtant malgr cette identit si limpide les plus perspicaces des meilleurs visionnaires nazis pouvaient se tromper dans ce d chiffrement de l criture des Corps Simone de Beauvoir nous rapporte l anecdote suivante lorsqu elle visita Sartre l Institut Fran ais de Berlin l y avait l institut un juif assez beau grand bien d coupl et un petit corse aux cheveux cr pus immanquablement les racistes allemands prenaient le second pour un isra lite le premier pour un aryen Sartre et ses camarades s amusaient de cette pers v rante m prise I fallait donc l insigne l toile jaune le signe car cette insigne rendait visible ce qui ne l tait pas Il fallait tablir des minorit s visibles Il fallait r crire l criture des Corps devenue trompeuse et m me scandaleusement trompeuse pour les racistes nazis Par l toile jaune les Nazis jouaient donc la surd termination du signe exactement comme dans le cratylisme Il fallait exclure rejeter expulser le juif gr ce au signe La pers cution du juif passe par un m canisme de caract risation qui fait de lui l objet du Nazi Le Juif nous rappela encore Jacques Notes tir es d une conf rence de Jacques Hassoun donn e le 5 f vrier 1992 l Universit d Ottawa Notes tir es de la conf rence de Jacques H
144. sit rattacher le mythe de la libert am ricaine la solution finale du nazisme Ainsi par exemple voici ce que nous lisons sous la plume de Paul Schwartz Perec s personal obsession with the fate of European Jews during the Nazi occupation makes him particularly sensitive to the lt herding and labeling procedures described as part of the Ellis Island ritual His editing of the text and film emphasizes perhaps exaggerates this disquieting underside of America s welcome to immigrants of the world It is clearly not Perec s intent to expose American freedom as an unreliable myth Nous ne sommes pas si p remptoires d s lors que Perec place l pop e d Ellis Island sous le signe de Kafka Franz Kafka L Am rique 12 Paul Schwartz Georges Perec Traces of his Passage Birmingham Summa Publications Inc 1988 p 80 398 Lorsque seize ans le jeune Karl Rossmann entra dans le port de New York sur le bateau d j plus lent la statue de la libert qu il observait depuis longtemps lui apparut dans un sursaut de lumi re On eut dit que le bras qui brandissait l p e s tait lev l instant m me et l air libre soufflait autour de ce grand corps Cette traduction tr s condens e et un peu libre de l introduction du roman inachev de Kafka Amerika ou le disparu rassemble les principaux paradigmes qui identifient l Am rique aux yeux de l immigrant la symbolique de la sta
145. sujet de cette exp rience et de la contrainte laquelle il se plie il avoue ceci Frank Venaille Mais il y a une p riode qui correspondait d ailleurs une psychanalyse o j avais une v ritable phobie d oublier J ai publi dans Action po tique un texte qui s appelait Tentative d num ration de tous les aliments liquides et solides que j ai ingurgit s au cours de l ann e Je tenais un Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit passim et pp 16 17 21 34 et 35 7 Georges Perec Penser Classer op cit V Les Joies ineffables de l num ration p 167 135 journal Je notais mes repas et cela donne un r sultat qui est la fois monstrueux et tout fait curieux C tait une d marche tout fait compulsive La peur d oublier Tat tenu ce journal j ai not tous les v nements pas du tout des pens es non des faits du genre d ai mang un gigot d agneau et Tat bu une bouteille de gigondas Le titre exact de cette performance gustative et litt raire sera en r alit Tentative d inventaire des aliments liquides et solides que j ai ingurgit s au cours de l ann e mil neuf cent soixante quatorze Remarquons tout d abord que le titre ne fonde pas une gastronomie pr cise et litiste ce sont des aliments liquides et solides ils n ont pas t consomm s ou encore mieux d gust s mais plut t ingurgit s La lex matique rappelle
146. sujet est donc li e la lettre au signe au langage et au travail du texte La tradition occidentale repose sur le connais toi toi m me socratique et delphique que Perec d joue par le calembour en rattachant la devise la banalit quotidienne de la vie individuelle Il renonce encore la vision standardis e de l autobiographie en m lant dans W ou le souvenir d enfance un r cit autobiographique un r cit fictionnel Il s av re en outre que le r cit de fiction rel ve d un r ve persistant que Perec a fait dans son enfance Ainsi se trouvent m l s dans cette recherche exploratoire de son identit la double fantasmatique de l autobiographie et de la fiction Il en va de m me dans l expression de la logique du r ve et de sa capacit 3 Voir Georges Perec Les gnocchis de l automne ou r ponse quelques questions me concernant in Je suis n op it p 67 74 Georges Perec W ou le souvenir d enfance Paris Deno l 1975 419 exprimer la personnalit du r veur La Boutique obscure constitue en effet une esp ce d autobiographie nocturne o la consignation des r ves participe de la constitution de son identit R fl chissant sur la tradition cabalistique du Golem tradition qui informe l inscription du sujet Georges Perec interroge les ph nom nes contemporains des immigrations massives dans R cits d Ellis Island Histoires d errance et d espoir Le film et le livre r alis s a
147. t reconstruire ce qu il a d truit suivant le mod le biblique de l eccl siaste Un temps pour d truire et un temps pour b tir De la maison du proscrit ruin e et convertie selon l expression consacr e des rois d Assyrie et de Babylonie en latrines publiques na t un jardin floral autour d une demeure princi re Cinoc s empresse aussit t d tablir une liste de mots rares et il d cida de r diger un grand dictionnaire des mots oubli s pour sauver des mots simples qui continuaient encore lui parler Nous retrouvons le mod le parodique du Sapeur Camembert qui creusait d autres trous pour enterrer la terre provenant du premier foss Le paradigme de la destruction construction s vacue lentement vers l it ration l errance et la mise en vidence de la b ance diss minatoire Les commentaires les marges les textes sur les textes les nigmes et plus encore les paraboles sont des parties de l infini du livre et du nom infiniment permutable par le jeu avec les chiffres Ainsi la Temurah comme l appelle Perec ou la Temuna selon Gershom G Scholem ne constitue que la troisi me potentialit de l ex g se Kabbaliste Georges Perec Histoire du lipogramme in collectif Oulipo La litt rature potentielle Paris Gallimard 1973 p 74 s La Bible traduction de J rusalem op cit p 849 Eccl siaste 2 3 Voir Andr Neher Notes sur Qoh l t L Eccl siaste Paris Les di
148. tendument oubli s Exemple inverse maintenant le processus de la fausse amn sie du type je me souviens mais j ai oubli Perec nous expose ceci comme r sultat de ses lectures Je me souviens que le personnage central de L tranger se nomme Antoine Meursault il a t souvent remarqu que l on ne se souvient pas de son nom Dans ce cas Perec a oubli le pr nom du h ros de l tranger le point d interrogation semble imposer le doute au souvenir Pourtant c est le rappel du nom qu il pose comme probl me la fin de l entr e La confusion permet une s rie de r visions fond es sur l allusion Tout d abord se souvient on ou ne se souvient on pas L ind fini propose le doute r flexif au lecteur Ensuite la mise en doute du nom authentique agite le spectre du d doublement du h ros Meursault confront celui de TT Georges Perec Je me souviens op it entr e n 37 p 21 c est nous qui soulignons Ibid entr e n 294 p 77 Albert Camus L tranger Paris Gallimard 1957 326 La Naus e de Sartre Antoine Roquentin Le vrai pr nom de Roquentin est donc attribu dans le m canisme de la fausse amn sie au v ritable h ros de Langer ce qui produit une mod lisation du h ros existentialiste dont Perec mettait en doute aussi l efficacit Combien d histoires mod les exaltent ta grandeur ta souffrance Combien de Robinson de Roquentin de Meursault de Leverk hn
149. tout en laborant des p ritextes scientifiques tels que des bibliographies fantaisistes Perec compose aussi des listes d ouvrages o les titres et les noms des auteurs ne sont rien d autres que des calembours ce qui pulv rise l effet s rieux de la science Cet aspect s rieux de la science ne manquera pas d attirer Perec qui s en servira comme d un masque Ce sera le cas dans La Vie mode d emploi o il met en sc ne un grand nombre de savants qui ont apport leur contribution au savoir de l humanit tant par leurs d couvertes que par leurs th ories Mais cette sacralisation cons cration s accompagne de multiples parodies des sciences qu il utilise donc comme ressorts ludiques La consid ration qu accorde Perec la science est donc oppos e celle du sens commun pour qui elle est l objet d une constante admiration Les textes pseudo scientifiques de Perec ne r v lent pas que des connaissances hautement probl matiques aux yeux des sp cialistes dans la mesure o ils permettent de d couvrir que les sciences exactes constituent l int rieur de l oeuvre des mod les de savoirs institutionnalis s matrices sur lesquelles l auteur travaille pour rassembler des pseudo connaissances tout en leur donnant un aspect de savoir vraisemblable L tude des 7 Georges Perec Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques op cit Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 7
150. un cur de bonne taille Papa encore des chansons base de Petit papa c est aujourd hui ta f te et Au lyc e papa au lyc e papa au lyc e Papillon dont nous avons d j utilis le patronage et les jeux le houla hoop 493 incitant au yo yo 444 par le jeu des marqueurs grammaticaux dans le cas qui nous occupe Le parall lisme des structures substantifs et adjectifs St Voir ibid entr e n 158 p 47 1 Ibid entr es n 427 et 428 p 104 et 105 5 Ibid entr e n 440 p 108 Thid entr e n 441 p 108 135 Ibid entr es n 443 et n 444 p 108 et 109 317 verbaux ainsi avons nous Je me souviens de la surface corrig e et Je me souviens des personnes d plac es 7 ces associations prox miques vient s adjoindre un grand nombre de couples d entr es qui ainsi que nous le signalions peuvent relever aussi bien de constructions videntes que de simple recours un imaginaire commun Ainsi nous pouvons avoir une association par confusion Bellec Perec aux entr es 134 et 183 par th matisation disjonctive les assassinats de Jaur s et de Sharon Tate la premi re femme de Roman Polanski aux entr es 255 et 276 par le marqueur nominal caput comme nom commun en latin 316 et le nom propre d un coureur cycliste Louis Caput 192 ou encore un double Mowgli nom du jeune h ros du Livre de la jungle de Rudyard Kipling et nom d un musicien d
151. une Cit id ale in Penser Classer op cit p 129 131 2 Georges Perec Les Choses une histoire des ann es soixante Paris Julliard 196 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit 3 Franz Kafka Premier chagrin in La Colonie p nitentiaire et autres r cits Paris Gallimard 1948 p 53 Georges Perec La Vie mode d emploi op it chapitre XIII lt Rorschash I p 70 72 Georges Perec Esp ce d espaces op it 2 chapitre Le lit p 25 5 Voir G rard Genette Seuils Paris Seuil 1987 ZP sm 278 exp rimentale ces manipulations et ces combinatoires t moignent plus de la recherche d un nouveau mode de connaissance que d un savoir nouveau et original Pourtant c est dans la recherche de son identit que Perec saura tablir avec succ s ce nouveau mode de connaissance Il va utiliser les potentialit s de la m moire pour fixer ses propres souvenirs en les rattachant ceux des autres Il pourra aussi m ler sa propre autobiographie la fiction dans W ou le souvenir d enfance et m me obtenir une autobiographie en consignant ses r ves comme dans La Boutique Obscure Dans cette qu te de lui m me Perec retrouve ainsi l importance du verbe comme expression d une culture juive qu il croyait perdue On peut penser que c est dans la recherche de ses propres origines que Perec d couvre et pratique un mode de connaissance original et novateur 7 Georges Perec W o
152. vient s opposer la r alisation du voyage ou tout au moins la possibilit du 43 Georges Perec Je suis n op cit p 107 7 Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit Collectif Georges Perec crire Ti rmer Qu bec Universit Laval 1990 Bernard Magn 53 jours Pour lecteurs chevronn s p 201 1 Roland Barthes roland Barthes par roland barthes op cit p 80 t 2e ae seim am aate a 195 voyage Et cette impossibilit de l art et de la litt rature construit la multitude des possibles propres la lecture 3 4 LA CONSTR N COMBINATOIRE C est aussi la cuisine comme possibilit d infinies combinaisons que Perec s est int ress On peut dire qu il pars me son oeuvre d allusion la cuisine voire de recettes culinaires Ainsi dans sa pi ce de th tre au titre non quivoque La Poche Parmentier avons nous des recettes base de pommes de terre ma s aussi bien d autres comme celle de l minc de poularde flamb e au cognac dont voici la recette L Homme presque pleurant C tait un minc de poularde flamb au cognac cuit dans une marinade l estragon d glac au bordeaux vieux enrob dans une croustade farcie au foie gras frais napp d une sauce brune aux truffes et servi avec des fonds d artichauts et une mousseline de cardons Le chef de cuisine qui a d couvert cette excellente recette a pour nom p re Dupaillon probable
153. 1 279 279 339 408 422 460 INTRODUCTION Ja ich war so perfekt und volkommen in der Unwissenheit dass mir unm glich war zuwissen dass ich so gar nichts wusste J tais d une si parfaite ignorance qu il ne m tait m me pas possible de savoir que je ne savais rien Johan Jacob Christoph Von Grimmelshausen Abentheverlicher Simplicius Simplicissimus Hesse Bobertag 1669 Les Aventur implici implicissimus traduction introduction et notes par Maurice Colleville Paris Aubier ditions Montaigne 1963 pp 42 43 Je consid re l tat actuel des sciences des biblioth ques enti res sur chaque partie de chacune d elles Faudrait il donc que je commence par les lire et les apprendre Plusieurs vies n y suffiraient pas Au milieu de l norme tendue et quantit des connaissances acquises par chaque science du nombre accru des sciences nous sommes perdus Le meilleur parti prendre est donc de consid rer toutes choses comme inconnues et de se promener ou de s tendre sous bois ou sur l herbe et de reprendre tout du d but Francis Ponge cit par Jean Paul Sartre el homme et les choses Situations I Paris Gallimard 1947 la Biblioth que se compose d un nombre ind fini et peut tre infini de galeries hexagonales avec au centre de vastes puits d a ration bord s par des balustrades tr s basses De chacun de ces hexagones on aper oit les tages inf rieurs et sup rie
154. 18 28 29 33 29 40 43 44 45 52 53 57 amp libid p 12 114 commencer par se livrer un balayage complet de tout ce qui se produit sur son lieu d observation Il va ensuite se concentrer plus particuli rement sur les faits sociaux Il analysera aussi les tapes possibles de son examen du constat interrogatif l assertif et au comparatif Il tentera m me d tablir des lois pr cises pr sidant la fonctionnalit circulatoire des v hicules publics Ce sera une d monstration toujours possible de scientificit Malgr tout l insignifiant viendra galement marquer l observateur aussi bien au niveau de ses impressions sentiments et options personnelles qu celui du langage ce qui ne saurait nous tonner tant donn la formation et les go ts de Perec Ce seront les conditions de l volution de son heuristique qui le conduiront une adaptation sans cesse renouvel e face un milieu d observation instable et particuli rement soumis un non d terminisme notoire et l impr visible Lorsqu il d bute ses observations il est comme un n ophyte face une entreprise inconnue confront la mise en action de ce qu il avait choisi comme m thode dans ses travaux pratiques d Esp ces d espaces Il s agit de d chiffrer les signes h t roclites de l insignifiant en essayant d en contr ler l avalanche autant que faire se peut Il ne faut surtout pas tre d pass par le raz de
155. 1984 98 p QUEVAL Jean Essai sur Raymond Queneau Paris Seghers 1960 223 p APPAREIL CRITIQUE a Articles ANGENOT Marc Pr suppos Topos Id olog me tudes Fran aises vol XIII n 1 2 1977 pp 11 34 DAHAN GAIDA Laurence Du Savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature Revue Canadienne de Litt rature Compar e d cembre 1991 pp 471 487 IMBERT Patrick Ceci est mon corps ceci n est pas une pipe Degr s Roman Contemporain et cr ation Bruxelles 1986 pp 1 21 IMBERT Patrick Silences et dualisme Le Roman qu b cois depuis 1966 Qu bec P U L 1992 pp 105 118 ROBIN R gine Le Sociogramme en question Discours Social vol 5 n 1 2 hiver printemps 1993 pp 1 32 431 VAN ROSSUM GUYON Fran oise Aventures de la citation chez Butor Michel Butor Colloque de Cerisy Paris U G E 10 18 1979 pp 17 54 b Livres AB L I AL M ARR L pitre du Pardon traduction introduction et notes par Vincent Mansour Monteil pr face d tiemble Paris Gallimard 1984 248 p ADAMSON Ginette Le Proc d de Raymond Roussel Amsterdam Rodopi 1984 109 p ALQUI Ferdinand Le D sir d ternit Paris Presses Universitaires de France 1943 154 p ANGENOT Marc Glossaire pratique de la critique contemporaine Montr al Hurtubise HMH 1979 223 p ANGENOT Marc Critique de la raison s m
156. 3 Voir Georges Perec Note sur ce que je cherche in Penser Classer Paris Hachette 1985 p 10 16 analyse l espace habituel de la vie des humains selon un embo tement pluridimensionnel de la page au monde et aux espaces intersid raux en passant successivement par le lit la chambre l appartement l immeuble etc 7 S y rattachent galement des improvisations surprenantes telles que sa Tentative d puisement d un lieu parisien Dans cet ouvrage Perec install dans l un ou l autre des bistrots de la Place Saint Sulpice Paris va s vertuer tout observer tout d crire tout noter tout consigner de ce qu il verra Il regardera les tres les choses et les v nements qui vont se d rouler diff rentes heures de la journ e et selon une p riodicit adapt e Il r p tera cette exp rience dans sa Tentative de description des choses vues au carrefour Mabillon le 19 mai 1978 Il s agit d un enregistrement radiophonique d une dur e de cinq heures correspondant une esp ce de document acoustique hallucinant par la multitude et la pr cision des d tails Ces tentatives d puisement ou de description s apparentent la m thode scientifique de l observation avec cette diff rence que les objets observ s ne sont g n ralement pas des objets scientifiques Perec enregistre ainsi des connaissances nouvelles d tach es de toute trame narrative Beaucoup de ses textes seront constitu s de l
157. 4700 800 521 0600 Universit d Ottawa University of Ottawa SAVOIR ET CONNAISSANCES DANS L UVRE DE GEORGES PEREC par Pierre SIGURET D partement des lettres fran aises Universit d Ottawa Th se pr sent e l cole des tudes sup rieures de l Universit d Ottawa en vue de l obtention du Doctorat Lettres fran aises Ph D Pierre SIGURET Ottawa 1995 Bai ofi Ge ged du Canada Acquisitions and Acquisitions et Bibliographic Services services bibliographiques 395 Wellington Street 395 rue Welington Ottawa ON K1A ON4 Ottawa ON K1A ON4 Canada Canada Yaw io vare faence Our fip Nore retsrenco The author has granted a non Lage a accord une licence non exclusive licence allowing the exclusive permettant la National Library of Canada to Biblioth que nationale du Canada de reproduce loan distribute or sell reproduire pr ter distribuer ou copies of his her thesis by any means vendre des copies de sa th se de and in any form or format making quelque mani re et sous quelque this thesis available to interested forme que ce soit pour mettre des persons exemplaires de cette th se la The author retains ownership of the copyright in his her thesis Neither the thesis nor substantial extracts from it may be printed or otherwise disposition des personnes int ress es L auteur conserve la propri t du droit d auteur qui prot ge sa th se Ni la th se ni des extraits substantiels
158. 48 361 384 386 387 388 389 393 404 413 418 Bartlebooth 44 62 Baruk 371 Bastide R 389 Bataille G 286 297 Baudrillard J 223 Beaumatin 164 199 203 Beaumont E de 39 54 Beaumont F de 39 44 86 Beauvoir S de 357 Becket S 326 Beiderbecke B 175 446 Bellec 317 Bellemare P 283 Bellos D 5 16 28 67 102 165 167 178 225 290 291 333 370 372 395 B nabou M 4 7 8 22 23 24 38 42 43 56 71 164 225 240 241 242 243 275 276 280 341 347 367 370 372 373 383 385 404 Benjamin W 100 Bens J 154 178 361 Beretz 371 Berge C 199 203 263 280 Besson C 198 Beyssandre C A 44 Billacois F 209 Binet C 295 Blake W 272 Bober R 29 140 183 389 390 391 393 398 399 400 404 407 419 Boldt Irons L 326 Bond J 68 69 Bonnier H 285 Bonvallet M 71 Borges J L 2 208 328 378 Borotra 292 Bourneuf R 66 Bouvard 8 9 10 Bovary E 231 233 Bradley 325 Braffort P 383 Brainard J 26 282 283 329 Brazeau C 74 75 Brialy J C 319 Brion S 287 Brugnon 292 Brummel V 171 313 Buffet B 260 334 Buonaparte N 370 Burgelin C 30 176 240 348 349 374 383 Burp L 5 69 71 77 Butor M 13 110 216 289 334 413 Caball M 176 Calvino I 164 199 300 Camenbert S 376 447 Camus A 9
159. 5 96 97 105 187 325 326 Capek C 85 Caput L 317 Carette 319 Carol M 319 Carroll L 348 Cerdan M 324 Chaplin C 353 359 Charbonnier G 260 Chartre J P 77 Chase J H 175 Chassay J F 37 38 48 51 52 66 Chateaubriand 301 Chauvin A 9 168 272 301 309 310 315 317 326 328 332 Chelebourg C 191 192 Chessman C 321 Chevalier M 266 Christ 362 402 Churchill 370 Cinoc A 28 44 45 48 49 50 51 366 369 370 371 374 375 376 403 Cl ment d Alexandrie 354 Clifford Brown 324 Clovis 308 Cochet 292 Cocteau J 169 Cohen P 360 Colleville M 310 Colomb C 61 Colombat A 175 Colquhoun of Darroch S 61 Compagnons de la chanson Les 327 Comte A 205 208 Condillac E 262 Connery S 69 Conseil 191 Constantine E 327 Contat M 330 Cording H 166 Cosinus 48 85 Coty R 282 Cover H 166 313 448 Cowi D 315 Crisan C 375 Cuvillier A 7 296 Dac P 213 Dahan Gaida L 48 49 57 59 60 65 72 78 87 88 Darrigade A 315 316 Darrigaud A 315 316 Darwin C 63 David 338 356 358 389 395 409 Davidoff 7 12 41 Debray R 323 Delbourg P 42 Deleuze G 344 Dereme T 263 Derrida J 293 360 361 380 401 Desroches H 182 183 Destremeau 292 Devyver A 340 394 Diable 54 Diderot 310 Didier B 10 Dint
160. 5 Georges Perec Esp ces d espaces op it p 70 Voir Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage op cit p 132 1 2 3 4 5 6 7 8 9 La date L heure Le lieu Le temps La date L heure Le lieu La date L heure Le lieu La date L heure Le lieu La date L heure Le lieu Le temps La date L heure Le lieu Le temps La date L heure Le lieu La date L heure Le lieu Le temps La date L heure 112 18 octobre 1979 10h30 Tabac Saint Sulpice Froid sec Ciel gris Quelques claircies 18 octobre 1974 12h40 Caf de la mairie 18 octobre 1974 15h20 Fontaine Saint Sulpice caf 18 octobre 1974 17h10 Caf de la mairie 19 octobre 1974 samedi 10h45 Tabac Saint Sulpice Pluie fine genre bruine 19 octobre 1974 12h30 Sur un banc en plein soleil au milieu des pigeons regardant dans la direction de la fontaine bruits de la circulation derri re Le ciel s est tout coup d gag 19 octobre 1974 14h00 Tabac Saint Sulpice 20 octobre 1974 dimanche 11h30 Caf de la Mairie la pluie Sol mouill claircies passag res 20 octobre 1974 13h05 113 Le lieu Caf de la Mairie En tout nous avons donc neuf sites d observation dont quelques uns sont r p t s Le choix de la Place Saint Sulpice est videmment d lib r puisqu
161. 50 Simplet 319 Simpson G 42 Simony G 42 240 242 283 292 Si Sh nagon 213 Sissy 322 Skrifter L 53 54 Smith H 158 159 161 Socrate 10 341 354 Sollers P 286 328 Staline G 328 Stanley B 53 54 Stendhal 201 270 Sterne 150 Stewart J 323 Strogoff M 226 Strong A L 340 Swedenborg 53 Sylvie Les Choses 67 221 231 233 237 Szinowcz 49 Tamar 372 Tardieu J 19 Taskerson H 64 458 Tate S 317 323 326 Temple S 336 Ter Ovanessian 172 313 Thaddeus 41 Thiam Papa Gallo 171 313 Timof itch Isma lov B 314 Todorov T 158 160 lel 354 Tolkien J R R 396 Tooten H M 63 Toscanini A 81 Tosito L 314 315 Tournesol 85 Trenet C 77 Ubu 40 152 Unamuno M de 104 Vachon S 51 Val ne S 272 Val ry P 17 Vandendorpe C 22 Van Loorens C 44 46 Van Rossum Guyon F 216 Van Zapatta M 382 383 Vassilievitch Potengleska 1 315 Vauquer B 224 Vauvenargues L de Clapiers Marquis de 285 286 Venaille F 134 288 290 311 Ventura R 318 Verlaine P 342 Verne J 11 12 35 105 156 190 191 192 226 Vian B 261 334 Viollet Leduc 77 Virgile 11 Virilio P 15 97 98 99 127 146 Voltaire 170 Von Grimmelhausen J J C 2 310 Watzlawick P 110 Wehsal E 40 41 44 57 59 Se Weinzaeplen C 198 Wells H G 35 Whorf B
162. 6 Luovna Borissitch K 314 Macadam A 382 Macklin 39 44 Maffesoli M 99 100 141 282 Magn B 9 19 23 40 64 68 72 73 74 75 76 79 82 83 84 194 202 203 216 241 242 243 244 245 248 251 255 270 299 300 312 328 338 350 365 372 414 417 419 Magritte R 97 Malet et Isaac 307 329 Malinowski 56 Mallarm S 152 Mao Ts Toung 340 Marcenac B 225 Marcia D 65 Marcia L 8 43 44 46 47 48 Margay L 47 Marghescou M 214 Mariana de Zaccaria 43 44 61 62 66 Marmande F 328 Martel C 77 Martens M 127 Marx K 212 Massin A 389 Mathews H 71 176 193 220 280 Matuska S 374 Mauriac F 17 Maurois A 157 Mauss M 55 64 313 330 331 Melchior 318 Melville H 273 Mendes Sargo D E 379 M phistoph l s M phisto 54 Metail M 309 Meunier J G 51 65 Meursault 206 325 326 Meyrink G 395 Michaud E 393 Michelet J 91 Miguet M 261 Mikha lov Vassiliev 1 314 Mikha lova Droubetskoi A 314 Miller G 323 329 Millot P 361 Modiano P 391 Mohrt M 127 Mo se 379 Moles A 141 Moli re 77 138 308 Montaigne M E 181 Montand Y 327 More T 183 Moreau 139 196 Morellet A 40 Morin E 377 Mortibus 68 Motte W F Jr 239 318 335 350 352 356 361 367 373 388 Mowgli 317 Mozart W A 174 Mroust P
163. 65 Le m rite de M Perec est d avoir nourri les cent pages de son roman d une analyse sociologique et non psychologique particuli rement perspicace Pour la perspicacit de la construction on ne trouve rien y redire mais pour l analyse sociologique c est une autre affaire Qu est ce qu une analyse sociologique Est ce prendre la soci t comme mod le pour y d couvrir et analyser les d viants ou inversement est ce consid rer les malades et les anormaux comme exemples et la soci t comme perverse Peu importe la raison la valeur l talon D j le titre du roman est trange quasiment philosophique r sonance de syst me le syst me des choses Envahissement Ibid p 88 voir aussi id olog me ibid p 99 100 Georges Perec Les Choses op cit Robert Kanters Le Figaro Litt raire Paris 25 novembre 1965 no 20 1023 article intitul Les Choses et les mots p 5 7 Voir Harry Mathews article Perec in Encyclopaedia Universalis p 214 On a souvent pris Les Choses pour un tude sociologique Fat 06 OR pe 221 de la vie humaine par les choses L analyse de la class matique fait surgir la diff rence entre anim et inanim Les animaux ne sont pas des choses Dans ce cas pour le romancier Perec qu est ce que les choses Que sont ces choses qui composent cette lt histoire des ann es soixante La lecture du roman nous l apprend ces choses sont
164. Au choix du double trap ze comme substitut du chantage la mort Perec acc de celui du suicide comme n cessit l volution de la di g se Les interactions finales entre les deux textes s organisent donc au niveau des parcours s m miques L isotopie de la mort permet la 7 Georges Perec La Vie mode d emploi op it p 71 Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op cit p 56 39 Thid p 56 258 construction de la destin e future du trap ziste condamn mourir sur son trap ze ou s craser sur le sol du cirque Perec invente alors une conclusion aux possibilit s s mantiques et di g tiques inou es Organis e autour de l isotopie de la mort cette conclusion entra ne l volution acc l r e de la di g se l actant sujet le trap ziste refuse de quitter son trap ze la foule s amasse la fin du spectacle attir e par les supplications de l impr sario du directeur et de tout le personnel du music hall Cette foule joue le r le de l adjuvant elle va aider le trap ziste chercher son destin savoir la mort par le suicide Le trap ziste se lance alors dans une succession ininterrompue de grands soleils ce qui confirme la valeur polys mique du s me soleil qui indique la fois les performances de l acrobate l illumination de son r le et la courbe parabolique de sa chute finale comme mouvement solaire diurne Le choix du suicide par l absenc
165. Bernard Grasset 1964 L on Tolsto et les romanciers russes traduits en fran ais R demption p 277 281 G rard Genette Palimpsestes La litt rature au second degr Paris ditions du Seuil 1982 p 139 7 Georges Perec Penser Classer op cit Lire esquisses socio physiologique p 114 315 Dimitri Ivanovitch Boufnarine avait longtemps men une d gradante vie de d bauche JI Class dans le folklore enfantin le souvenir russe de Perec ressortit au dispositif parodique visant relier les noms des personnages imaginaires ceux de l histoire mais encore jouer du d calage des cultures pour reconstituer le mouvement de la m moire polaris e sur les souvenirs du d risoire Mais la construction des Je me souviens passe aussi par des s ries de syst mes binaires ou de valence de deux pouvant constituer des groupes de deux entr es unies par des liens associatifs prox miques ou encore par des liens d affinit plus ou moins mis en vidence voire notoirement inapparents Nous examinerons maintenant les liens associatifs fond s sur le passage de l un l autre Ce sont les rencontres les plus hasardeuses du recueil car Perec a choisi volontairement de r unir des souvenirs pr sentant une similitude C est le cas entre une pi ce de th tre La petite Hutte jou e pendant plusieurs ann es et une autre pi ce Fleur de Cactus qui tint aussi l affiche tr s longtemps L encha nemen
166. Cela lui vaudra au moins une br ve reconnaissance d Ernest Renan dans ses chroniques Comme pour Appenzzel la di g se est tout enti re structur e par les rebondissements des checs cautionn s finalement par la reconnaissance parodique de Renan qui joue le r le de l ancrage dans le r f rentiel Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 78 79 76 Thid p 79 7 Ibid p 79 Ibid p 79 59 Quant la recherche de Wehsal elle refl te aussi cette aspiration la r g n ration Wehsal est un savant chimiste d origine allemande r cup r par les Am ricains la fin de la seconde guerre mondiale Perec m le habilement expos s historiques et expos s pseudo didactiques du genre Th oriquement il suffisait de combiner un ion hydrog ne une mol cule de monoxyde de carbone CO pour obtenir des mol cules de p trole Ceci permet d asseoir un r cit mythique fond sur une science omnipr sente et omnisciente dans le monde contemporain Perec ne se prive pas des ressorts de l interdiscursivit pour tayer le complexe m tadi g tique de la science Le r cit rassemble sous son gide tous les proc d s des relations propres aux grandes d couvertes scientifiques d tails folkloriques des savants allemands fuyant les groupes de mangeurs de choucroutes pour ne pas tre identifi s d anciens nazis savants aux savoirs sp cialis s vivant dans la discr tion r unions secr tes avec
167. France 1972 p 194 195 TT Voir Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner L Arc n 76 Aix en Provence 1979 p 4 tft e ge AA aa 67 1961 Ce travail qui aurait ennuy voire accabl plus d un convenait parfaitement Perec Rechercher analyser et conserver les informations utiles du savoir scientifique ne pouvait manquer non seulement de passionner Perec mais encore de stimuler une cr ativit toujours en veil Dans son premier roman Les Choses on peut dire que la connaissance scientifique n appara t qu dose hom opathique Il s agit principalement de la psychosociologie li e au marketing J r me et Sylvie les deux personnages principaux du roman sont psychosociologues Nouvelle branche de la sociologie en pleine expansion dans les ann es soixante la psychosociologie consiste laborer des questionnaires sur des sujets les plus vari s La lessive le linge qui s che le repassage le gaz l lectricit le t l phone les enfants les v tements les sous v tements la moutarde les soupes en sachets les soupes en bo tes les cheveux etc D j l humour est toujours pr sent dans les vocations pr tention scientifique les cheveux et la soupe n tant pas qu une pure co ncidence textuelle Les longues listes de questions que posent J r me et Sylvie lors de leurs enqu tes t moignent encore du go t pour l num ration que manifeste Perec mais aussi des possibilit s
168. Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op CH p 34 124 al atoires improbables anarchiques il se tourne vers les autobus comme gage de la stabilit Apr s cet examen de la fr quence des autobus il passe l observation de leur contenu et la succession des personnes transport es telle que Passe un 86 presque plein Passe un 63 presque vide Passe un 96 plut t plein Passe un 87 plut t plein Ob issant alors des m canismes notoires d associations des id es Perec parvient une conclusion pseudo scientifique en consid ration probablement d une conomie d change des contenus propres aux autobus appliquer aux autobus la th orie des vases communicants tant donn es les correspondances qu il peut tablir entre les autobus vides et ceux qui sont pleins il est probable que les autobus r pondent eux aussi aux d terminismes des vases communicants Si l un passe vide il faut que l autre vienne plein ou peu pr s Perec cherche toujours tendre la synth se scientifique des objets ind pendants du champ exp rimental Il r dite aussi ce type de raisonnement d ductif lorsqu il s interroge sur les flux successifs des passants qui vont de la Rue de Rennes la Place Saint Sulpice Cela nous permet de d couvrir ce th or me original de la circulation pi tonni re dans ce quartier de Paris D une fa on purement abstraite on pourrait proposer le th or
169. IA La di g se est fond e sur la preuve mat rielle du document C est la m thode historique l historien chercheur et explorateur du pass ne peut progresser que sur la base de documents irr futables La preuve supr me est accord e la supr matie de la trace la plus ancienne Or le vieil Atlas de Zapfenschuppe date de 1507 et disgr ce supr me pour ce dernier l antique planisph re de Zaccaria remonte 1503 Apr s avoir calm la temp te d cha n e par les deux communications le pr sident de la s ance le vieux Lord Smighart Colquhoun of Darroch accorde sa b n diction l archiviste espagnol qui devint le h ros du jour Le congr s constitue bien s r la pi ce ma tresse de la d monstration de Perec La science est le fait de groupes de sp cialistes qui se cautionnent et s opposent selon les m canismes g n r s par les valeurs sociales De l naissent les rebondissements toujours possibles des controverses scientifiques Perec ne s arr te pas en si bon chemin et il poursuit sa critique de la m thode historique en m nageant justement un rebondissement remarquable au r cit Un nouveau personnage savant lui m me entre en jeu Florentin Gilet Burnachs conservateur au mus e de Dieppe Ce dernier remet en cause la lecture des lettres us es Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 473 s Ibid p 474 Ibid p 474 475 62 et interrompues du planisph re d couvert pa
170. INFORMATION TO USERS This manuscript has been reproduced from the microfilm master UMI films the text directly from the original or copy submitted Thus some thesis and dissertation copies are in typewriter face while others may be from any type of computer printer The quality of this reproduction is dependent upon the quality of the copy submitted Broken or indistinct print colored or poor quality illustrations and photographs print bleedthrough substandard margins and improper alignment can adversely affect reproduction In the unlikely event that the author did not send UMI a complete manuscript and there are missing pages these will be noted Also if unauthorized copyright material had to be removed a note will indicate the deletion Oversize materials eg maps drawings charts are reproduced by sectioning the original beginning at the upper left hand corner and continuing from left to right in equal sections with small overlaps Each original is also photographed in one exposure and is included in reduced form at the back of the book Photographs included in the original manuscript have been reproduced xerographically in this copy Higher quality 6 x 9 black and white photographic prints are available for any photographs or illustrations appearing in this copy for an additional charge Contact UMI directly to order UMI A Bell amp Howell Information 300 North Zeeb Road Ann Arbor MI 48106 1346 USA 313 761
171. Ibid p 227 Ibid p 361 3 Voir Laurence Dahan Ga da Du Savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature in Revue Canadienne de Litt rature Compar e d cembre 1991 p 483 Voir aussi Jean Fran ois Chassay Le Jeu des Co n idences dans La Vie mode d emploi de Georges Perec op cit p 111 112 49 de relations avec le monde ext rieur Bien que sa vie priv e soit limpide et sans histoire il suscite ardemment la curiosit de ses voisins Nous pouvons mentionner les variations savoureuses du nom de Cinoc telles qu envisag es par ceux ci notamment par Monsieur chard dont l exp rience des for ts lui a permis de sortir de la brousse inextricable des noms propres Mais voici qu interf rent nouveau le savoir priv et le savoir public dans la discussion que provoque son nom entre ses voisins et lui m me Cinoc se borne faire un bref expos des transformations de son patronyme en butte aux vicissitudes des changements de fonctionnaires li s ceux des gouvernements tutellaires de la Pologne empires prussien austro hongrois et russe Ainsi avons nous cette liste volutive des noms successifs de la famille Cinoc fond e par un bourrelier de Szczyrk village situ dans le Palatinat de Cracovie Klajnhoff Keinhof Klinov Szinowcz Linhaus Certes les explications que donne Cinoc sont fort convainquantes ce qui l est moins c est le d calage entre le
172. Nous pourrons fonder notre analyse sur la d finition de l embrayeur g n rique telle que donn e par Marc Angenot dans son Glossaire pratique de la critique contemporaine o il nous indique ceci On appellera embrayeur g n rique tout nonc qui dans un texte signale au lecteur le mode de lecture qu il convient de lui appliquer L exemple le plus vident est la formule classique du conte de f e Il tait une fois L analyse des embrayeurs g n riques identifiables permet de signaler l int gration de discours h t rog nes au texte romanesque On pourra donc admettre que les connecteurs g n riques transforment le code de lecture du texte et ce volont suivant l habilet de l auteur et la comp tence du lecteur Ces connecteurs peuvent conditionner et Marc Angenot Glossaire pratique de la critique contemporaine Montr al ditions Hurtubise HMH 1979 p 72 220 d terminer les codes linguistiques et artistiques voire id ologiques qu instaure le texte C est ce que nous verrons chez Perec lorsqu il met en oeuvre des connections intertextuelles pour int grer des pastiches de Flaubert dans son premier roman Les Choses On sait que Les Choses est g n ralement consid r comme un roman sociologique Cela signifie que pour la plupart des critiques l analyse sociologique est la raison d tre du roman Au nombre de ces critiques Robert Kanters crira la parution du roman en 19
173. Partisans Il s agissait pour lui d examiner l ouvrage de Kingsley Amis portant ce m me titre L univers de la science fiction Dans cet article Perec voit les limites du genre et en d plore le manque d imagination C est sans doute cause de ces carences qu il avait lui m me envisag d crire un roman de science fiction Bien que le temps ne lui ait pas permis de r aliser ce projet Perec a autrement r ussi l int gration de la science la litt rature en exploitant les ressorts consid rables de celle ci Georges Perec L univers de la science fiction Partisans n 10 mai juin 1963 p 118 130 Republi dans L G Une aventure des ann es soixante Paris Seuil 1992 p 115 139 Kingsley Amis L Univers de la science fiction Paris Payot 1962 Voir Georges Perec L univers de la science fiction in L G Une aventure des ann es soixante op cit p 115 139 Voir Georges Perec Quelques unes des choses qu il faudrait tout de m me que je fasse avant de mourir in Je suis n Paris Seuil 1990 p 108 36 Dans ses rapports avec les sciences exactes on pourra montrer que Perec utilise leurs caract ristiques pour les subvertir trois niveaux Pour reprendre ce qu il dit du texte la science n est pas productrice de savoir mais de fiction Ce qu il entend par cette fiction de science passe plus par une stimulation de l imagination que par les cr ations improbab
174. RAT ORECCHIONI Catherine L nonciation de la subjectivit dans le langage Paris Armand Colin 1980 290 p KRISTEVA Julia Semeiotik Recherch r une s m Paris Seuil 1969 380 D KRYSINSKI Wladimir Carrefours de signes essais sur le roman moderne La Haye Mouton Editeurs 1981 452 p KUNDERA Milan L Aart du Roman Paris Gallimard 1986 200 p LACAN Jacques crits I Paris Seuil 1966 289 p LACAN Jacques crits II Paris Seuil 1971 244 p LAKOFF George Women Fire and Dangerous Things what categories reveal about the mind Chicago and London University of Chicago Press 1987 614 p LAUNOIR GUY Clefs pour la Pataphysique Paris Seghers 1969 172 p LEENHARDT Jacques et J ZSA Pierre Lire la lecture essai de sociologie Paris Le Sycomore 1982 422 p LEFEBVRE Henri Hegel Marx Nietzsche ou le Royaume des Ombres Paris Casterman 1975 223 p LEVI STRAUSS Claude Anthropologie structurale Paris Plon 1958 et 1974 446 p MAFFESOLI Michel Le Temps des tribus le d clin de l individualisme dans les soci t s de masse Paris M ridiens Klincksieck 1988 226 p MAFFESOLI Michel Au Creux des apparences pour une thique de l esth tique Paris Plon 1990 300 p MAFFESOLI Michel La Contemplation du monde Paris Grasset 1992 235 p MARTIN Robert Langage et croyance Les Univers de croyance dans la th orie s mantique Bruxelles Pierre Mardaga
175. Todorov Paraphrasant Jakobson on pourrait dire que les n ologismes des glossolales sont linguistiques ou anti linguistiques mais jamais a linguistiques Nul ne peut chapper la dure logique des langues m me si la glossolale vise l inintelligibilit Mais elle livre encore un message justement celui de ne plus vouloir que ses paroles soient soumises l interpr tation videmment nulle trouvaille de Perec ne vise ce but La restriction de la langue comme chez la glossolale la r p tition constante des m mes sons conduit l hybridation des moyens d expression la disparition des tendances traditionnelles du roman l analyse psychologique ou au proc s moral ce que Perec lui m me recommande lorsqu il crit Il comprit qu l instar d un Frank Lloyd Ibid p 330 Ibid p 332 Voir ibid p 332 161 Wright construisant sa maison il fa onnait mutatis mutandis un produit prototypal qui s affranchissant du parangon trop admis qui commandait l articulation l organisation l imagination du roman fran ais d aujourd hui abandonnant tout jamais la psychologisation qui s alliant la moralisation constituait pour la plupart l arc boutant du bon go t national Dans cette derni re citation Perec confirme les r sultats de son analyse de la typologie du roman fran ais ce qu il a con u en revanche ne se rattache ni au roman r aliste du XIX si cle ni au Nouve
176. UQAM Montr al de S suis s rotype 2 dans les macrophages p riton aux de souris in vitro Des macrophages p riton aux sont mis en culture en pr sence de S suis pendant 1 heure La phagocytose et la survie intracellulaire des bact ries sont tudi es en microscopie optique fluorescence apr s coloration vitale des bact ries sur l orang d acridine et l extinction des bact ries non phagocyt es par le cristal violet Les r sultats montrent qu une souche virulente et capsul e 1591 est faiblement phagocyt e soit dans 9 des cellules et ces cellules phagocytaires contiennent en moyenne 5 bact ries vivantes et 6 bact ries mortes Par contre une souche montante non capsul e et non virulente M2 est phagocyt e dans 71 des cellules et il y a en moyenne 20 bact ries mortes par cellule Pour la souche 1330 capsul e non virulente les r sultats ressemblent ceux de la souche 1591 9 des cellules sont phagocytaires et il y a en moyenne 3 bact ries vivantes et 4 bact ries mortes par cellule Donc on peut conclure que la phagocyte en l absence d anticorps et du compl ment des souches S suis s rotype 2 bien capsul es se fait tr s difficilement 74 Cet exemple tir de la transcription d un rapport scientifique en biologie cellulaire science peu la port e de l homme de la rue tant donn son haut degr de sp cialisation rend compte des principales caract ristiques de la langue scientifiq
177. Universitaires de France Que sais je 1990 p 33 3 Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit p 24 Umberto Eco Le Signe Bruxelles Editions Labor 1988 p 95 Voir aussi Jean Fisette Introduction la s miotique de C S Peirce Montr al XYZ Collection tudes et documents 1990 p 29 3 Umberto Eco Trattato di Semiotica generale Milano Bompiani 1971 p 185 et 301 4 w n me mn 352 la fois l ext rieur et l int rieur de son ouvrage comme le peintre Escher dessine sa propre main se dessinant elle m me L expression naturelle conduit au d chirement le corps clat de l enfant prodige r concili par l criture au sein du camp familial On peut donc recouper dans cette longue description d une ambiance familiale les courants d expression bibliques et juda ques Quelques pages plus loin dans l ouvrage de Perec nous sommes nouveau confront s au domaine iconique Comme le remarque Warren F Motte ce parall lisme va encore se recouper chez Perec histoire collective la famille le peuple juif lev l poque de Salomon puis abaiss par les babyloniens les romains et les nazis et histoire individuelle car la lettre produit d autres lettres Cet auteur crit en effet Point d articulation entre histoire collective et histoire personnelle la lettre fonctionne aussi comme signe primaire car dans la s miotique de Perec elle sert souvent comme matrice
178. V X ff let K DVV VV XX Ce DV V X X X a Nous avons largement affaire un syst me s miotique fond sur deux codes savoir celui de l enfance m moris symboliquement par Perec famille et celui des signes qui identifient deux peuples rivaux nation c est dire les nazis avec la croix gamm e et les juifs avec l toile de David Les transformations des l ments fondamentaux du signe rendent compte de l tonnante f condit des combinaisons Ces interactions combinatoires attirent elles de multiples interpr tations Celles ci sont largement command es par des s ries perceptives fond es sur la vue Or comme nous le rappela Jacques Hassoun lors d une conf rence 7 Georges Perec ibid p 105 106 Warren F Motte Embellir les lettres in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 114 Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit p 106 Voir Jacques Hassoun Non Lieu de Ja m moire La cassure d Auschwitz en collaboration avec Mireille Nathan Murat Annie Radzynski Paris Bibliophane 1990 A sus somme mamans 357 la pulsion de la vision est objet dans le nazisme Il fallait voir le juif pour l identifier Pourtant si le juif tait si reconnaissable pourquoi devait il porter une toile jaune Il fallait se fondre sur l criture des Corps Cette criture des corps qui traverse sans cesse l criture de Perec et ici d j au niveau de la lettre du
179. W les chiffres les lettres et le titre d un roman d Italo Calvino Si par une nuit d hiver un vovageur 57 selon les propres indications de Perec renferm es en Penser Classer Et Bernard Magn de conclure ceci En effet juxtaposer dans l espace de la page la lettre W qui num rote le paragraphe et la citation de Calvino c est faire lire cette derni re comme un sous titre possible et en l occurrence parfait pour le r cit W 55 Le concept de r seau est videmment tr s f cond du point de vue scientifique On peut consid rer que toutes sortes de r seaux se sont constitu s au niveau naturel eaux souterraines circulation des oiseaux migrateurs regroupement de macromol cules Ces r seaux sont devenus des objets d tudes Ainsi Perec en constituant ses propres r seaux au sein de ses oeuvres cr e t il des discontinuit s susceptibles d interpr tations multiples Bernard Magn montre que dans W le narrateur autobiographique d finit le r seau textuel comme lieu de la signifiance Il s agit d une dynamique de Bernard Magn Pour une lecture r ticul e in Cahiers Georges Perec n 4 M langes Paris ditions du Limon 1990 p 153 Voir Bernard Magn ibid p 154 Italo Calvino Si par une nuit d hiver un voyageur Paris Seuil 1981 amp Voir Georges Perec Penser Classer op cit Penser Classer W dans un r seau de lignes entrecrois es p 176 B
180. a Publications Inc 1988 145 p SIMONY Gabriel Georges Perec Entretien avec Gabriel SIMONY pr face de Patrice DELBOURG dessins photomontage de Guyomard Paris Le Castor Astral 1989 40 D COLLECTIFS ET REVUES Cahiers Georges Perec n 1 Colloque de Cerisy Juillet 1984 Paris P O L 1985 332 p Cahiers Georges Perec n 2 W_ou le souvenir d enfance une fiction S minaire 1986 1987 Textuel 34 44 n 21 Paris Universit Paris VII 1988 174 p Cahiers Georges Perec n 3 Presbyt re et Prol taires le dossier P A L F pr sent par Marcel B nabou Paris ditions du Limon 1989 112 p Cahiers Georges Perec n 4 M langes Paris ditions du Limon 1990 180 p d 427 Cahiers Georges Perec n 5 Les Po mes h t rogrammatiques Paris ditions du Limon 1992 172 p crir former tudes litt raires vol 23 n 1 2 Qu bec Universit Laval 1990 234 p Georges Perec L ARC n 76 Aix en Provence 1979 94 p Georges Perec Litt ratures n 7 Toulouse Presses Universitaires du Mirail 1983 155 p Penser classer crire de Pascal Perec tudes r unies et pr sent es par B atrice Didier et Jacques Neefs Saint Denis Presses Universitaires de Vincennes 1990 209 p Georges Perec Dossier Magazine Litt raire n 193 Paris mars 1983 pp 12 38 26 p Georges Perec Nuova Corrente n 108 Genova 1991 34 p Georges Perec Una teoria potencial de l
181. a escritura Anthropos o 134 135 Barcelona 1992 56 p Georges Perec The Review of Contemporary Fiction Vol 13 No 1 Fairchild Hall 1993 88 p Georges Perec Dossier Magazine Litt raire n 316 Paris d cembre 1993 pp 16 84 68 p 92 Le Triomphe de Perec Lire n 197 Paris f vrier 1992 pp 14 29 15 p FILMOGRAPHIE Un Homme qui dort 1974 film de Bernard Queysanne et Georges Perec Le Fiap R alisation Bernard Queysanne Texte Georges Perec Filmographie tablie d apr s celle de Bernard Magn pour Magazine Litt raire n 316 Paris d cembre 1993 pp 83 84 428 Aho Au coeur du monde primitif moyen m trage couleurs 1975 R alisation Daniel Bertolino et Fran ois Floquet Texte Georges Perec La Vie film e des Fran ais 2 partie R alisation Michel Pamart et Claude Ventura Commentaire de Georges Perec dit par Georges Perec Les Lieux d une fugue couleurs R alisation Georges Perec Texte dit par Marcel Cuvelier ce texte est celui d une nouvelle publi e en 1975 et reprise en 1990 dans le recueil Je suis n Gustave Flaubert le travail de l crivain 1976 R alisation Bernard Queysanne Texte Georges Perec dit par Jacques Spiesser L oeil de l autre long m trage couleurs 1976 R alisation Bernard Queysanne Id e originale Georges Perec adaptation de Noureddine Mechri R cits d Ellis Island Histoires d errance_et_d espoir coul
182. a girafe et l anti girafe Barthes rappelle que ia girafe est le hi rogiyphe de la v rit elle est ainsi parce qu elle est aussi inutile que la V rit en Civilisation Quant l anti girafe le renne il sera prodigieusement utile l ordre soci taire voir Roland Barthes Sade Fourier Loyola Paris Seuil 1971 p 103 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Island op cit p 35 geb Seege 394 destin e de l immigrant on peut l gitimement se demander quoi correspondent les transformations du Golem La vieille l gende est videmment une r interpr tation talmudique de la cr ation de l homme partir du limon terrestre que nous donne le r cit g n siaque C est ce r cit qui nous livre les plus riches intrications des syst mes symboliques ou des encyclop dies comme dirait Eco L encyclop die fonctionne directement par contextes culturels Elle nous indique comment ces contextes favorisent certains traits au d triment des autres Ainsi le contexte culturel h breu privil gie t il la terre comme origine de l homme Le nom du premier homme d signe la terre Adam Adama Adamma le limon l argile la couleur rouge Le nom vient de l aleph initial A gt auquel on a ajout la racine dam le sang la couleur rouge du sang C est ici l vocation des r ves les plus nationalistes car le sang est li la terre territoire national et la puret de la race aristocra
183. a trouille que j avais quand j tais interne qu on me passe la bite au cirage Ce souvenir n est pas enregistr l index sous la rubrique internat alors que le class me interne est manifeste Pourtant cette m me rubrique signale l entr e n 147 Je me souviens que l avenue de New York s appelait l avenue de Tokyo S agit il d un oubli d une erreur d une confusion num rique On pourra se perdre en conjectures Ce sont les effets du bizuthage Le cirage reste obsessif On retient aussi deux souvenirs didactiques maintenant li s la classe de troisi me la confection d un grand plan de la Rome Antique class en cole et la r solution du probl me topologique de l alimentation en eau gaz et lectricit de trois maisons voisines sans que les conduites viennent se croiser class la rubrique lt internat souvenir qui est galement voqu dans Esp ces d espaces propos des probl mes suscit s par les ponts de Koenigsberg Un souvenir li la vie de l colier celui de Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 47 p 23 et 53 jours op cit p 36 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 146 p 44 et 53 jours op cit p 35 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 147 p 44 S Voir Georges Perec Esp ces d espaces op cit p 15 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 153 p 46 e
184. a vie en se consacrant aux t ches les plus ingrates Perec red couvre ce lien ind l bile qui configure la lettre lorsqu elle s impose l humanit comme premi re trace d une existence Ainsi l homme s en remet la lettre pour justifier ce qu il d signe comme r alit C est le premier pas vers l intelligence de la lettre chez Perec et comme le montre Gershom G Scholem la lettre est l expression de la Tora dans ce but il reprend Pinchas de Koretz et un manuscrit o il est dit C est en effet la v rit que la Sainte Tora fut cr e originellement dans un chaos sans coh rence de lettres Il fallait produire du texte pour produire du seng Mais cette cr ation du sens reste toujours ouverte et c est effectivement ce qu a voulu d montrer Perec En effet que devient la devise socratique signe le plus vident de la manifestation philosophique de la pens e gr co chr tienne Confront e la transgression rabbinique elle est compl tement d samorc e perdant jusqu sa vertu pseudo oraculaire Car la devise apollinienne est alors convertie par les machines kabbalistiques en une philosophie de cuisine une invitation aux gnocchis de l automne La devise du savoir individualiste de l occident 10 Gershom G Scholem La Kabbale et sa lique op cit p 88 0 Thid p 88 406 platonicien et chr tien est transform e par le jeu des lettres et convertie l impr visibilit du sens
185. able et ces attributs sont de leur c t une trame faite des diff rents nom de Dieu comme par exemple El Elohim Shadda Et Gershom G Scholem ajoute encore pour conclure Mais ces noms sacr s d pendent tous du T tragramme JHWH avec lequel tous sont li s C est pourquoi la Tora enti re est enfin tiss e de ce T tragramme En r alit le Shadda constitue ici dans le cadre du processus d identification soit un lien lacunaire avec l espace soit un personnage inidentifiable Il correspond deux grandes tapes du processus D une part il s agit 3 Warren F Motte lt Embellir les lettres in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 121 Gershom G Scholem La Kabbale et sa symbolique Paris petite biblioth que Payot 1975 p 55 sur le d chiffrement de la mezouza et du Shadda voir aussi Marcel B nabou Perec et la jud it in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 19 Gershom G Scholem op cit p 55 Concernant les sp culations sur le nom interdit voir Jacques Lecarme Perec et Freud ou le mode d emploi in Cahiers Georges Perec no 4 M langes Paris ditions du Limon 1990 p 136 137 368 comme le montre Ren Gu non de participer au m canisme de la production des nombres et d autre part ce qui revient au m me au processus concommittant de la diss mination des significations En effet le Shadda se compose d une partie des lettres du t tragramme ou
186. abli par Hans Hartje Bernard Magn et Jacques Neefs dresse la liste des vingt et une paires d instances qui d terminent les activit s des personnages la composition du d cor le nombre de pages du chapitre etc Ces instances list es constituent un amalgame composite de savoirs litt raire citations lectures et livres historique poques zoologique animaux musical picturesque physique psychologique math matique botanique etc Ces listes sont videmment comparables Voir Andr e Chauvin Six personnages en qu te d histoire ou la poche r cits Singularit et ancrage textuel article in dit o la professeure Chauvin signale les hypoth ses de Hans Hartje sur les avant textes de Perec th se de doctorat non encore publi e et intitul e Georges Perec crivant Gustave Flaubert Salamb Librairie G n rale de France 1956 Gustave Flaubert Bouvard et P cucher op cit 7 Hans Hartje Bernard Magn et Jacques Neefs Cahiers des charges de La Vie mode d emploi Paris CNRS ditions et Zulma 1993 nn 10 aux nomenclatures des domaines et disciplines disparates que Flaubert a assembl es pour Bouvard et P cuchet sous les rubriques Agriculture Jardinage conomie politique Amour Philosophie Mysticisme Religion Proph ties Exaltation du bas Imb ciles Esprit des Journaux Jacques Neefs d crit ces assemblages flaubertiens comme une sorte de sc nario taxi
187. acques Roubaud Petit Trait invitant la d couverte de l art subtil du Go Paris Christian Bourgois diteur 1969 Georges Perec La Boutique obscure op cit use ame er meme eme 267 Une table Je me souviens Paris Hachette 1978 Note liminaire Post scriptum Index les num ros renvoient aux num ros des Je me souviens Une r serve de pages blanches avec cette explication A la demande de l auteur l diteur a laiss la suite de cet ouvrage quelques pages blanches sur lesquelles le lecteur pourra noter les Je me souviens que la lecture de ceux ci aura esp rons le suscit s 6 pages libres Une table La Vie mode d emploi Pr ambule pilogue Plan de l immeuble Pi ces annexes Index Rep res chronologiques Rappel de quelques unes des histoires racont es dans cet ouvrage Post scriptum Table des mati res Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques Paris Seuil 1991 L article Experimental demonstration of the tomatotopic organization in the Soprano Cantatrix Sopranica L n 1 comporte une liste de r f rences L article Distribution spatio temporelle de Coscinoscera Victoria Coscinoscera tigrata carpenteri Coscinoscera punctata Barton et Coscinoscera nigrostriata d Iputupi n 2 comporte une bibliographie L article Roussel et Venise Esquisse d une g ographie m lancolique n 3 comporte des pi ces annexes compos es de cin
188. ain sp cialis rapporte que le personnage Rorschash lui a dit que Il y a d multiplication de l instance narrative Partant du postulat que toute criture est une r criture fond e sur une lecture nous pouvons avancer qu au moins deux des instances narratives ont lu Kafka et ont eu l id e d int grer aux aventures du personnage Rorschash les tribulations du trap ziste ne serait ce que pour d montrer son amour du music hal Nous savons aussi que dans sa qu te du succ s Rorschash aurait pu r ussir s il n avait t en avance de quelques ann es sur son temps Cette remarque du narrateur premier m rite r flexion D une part cela signifie que Rorschash est un pr curseur et que la connaissance de l histoire du trap ziste que pouvait avoir son biographe constitue un plagiat par anticipation et d autre part que Rorschash est un pr curseur retardataire dans le domaine de l imitation puisque son art consiste imiter successivement les comiques am ricains les comiques troupiers les jazzmen les danseurs argentins et russes et pour finir le bel canto italien bref tout ce qui est la mode au moment o il fait autre chose Il essaye donc 7 Nous utilisons pour cette analyse les th ories de G rard Genette Figures II Paris Seuil 1972 pp 225 267 TT Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 70 1 Ibid p 70 17 Rorschach commence sa carri re la fin de la Grande Guerre et Kaf
189. aintenant les niveaux s miologiques des deux r cits celui de Kafka et celui de Perec nous remarquons que Kafka introduit son personnage gr ce l isotopie de l art crivant non sans ironie que l art que les acrobates exercent dans les airs sous le d me des grands music halls est on le sait l un des plus difficiles auxquels l homme puisse s lever Quant Perec il introduit le personnage du trap ziste par l isotopie de la c l brit gr ce au double parcours Voir Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 69 HI G rard Genette Figures MI op cit p 244 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 70 Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op cit p 53 250 s m mique de la jeunesse et de l endurance En effet le trap ziste est devenu c l bre cause de deux particularit s La premi re tait son extr me jeunesse il n avait pas douze ans lorsque Rorschash fit sa rencontre la seconde tait son aptitude rester sur son trap ze pendant plusieurs heures d affil e Fondant sa description du personnage sur son r le professionnel Perec pr pare l int gration du texte kafka en au sien Une double num ration d crit la sph re d activit du trap ziste cette sph re se manifeste au sein d un double espace celui restreint du trap ze o l acrobate exerce sa profession qui consiste d fier les lois de la pesanteur mais
190. ais les r f rences unitaires peuvent encore tre analys es sous trois formes remarquables Tout d abord celle de la r f rence anonyme le substitut pronominal masculin pluriel ils est employ dans le langage populaire et familier pour d signer l intervention d un groupe au dessein et l organisation myst rieux ainsi avons nous Je me souviens du mal qu ils ont eu creuser les fondations du drug store Saint Germain Nous avons 5 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 64 p 27 H Thid entr e n 415 p 102 7 Ibid entr e n 94 p 33 voir ce sujet l usage idoine qu a fait Bernard Magn de ce souvenir Re id ouvrage Perecollages 1981 1988 Toulouse Presses Universitaires du Mirail Toulouse 1989 6 bid entr e n 400 p 99 7 Thid entr e n 402 p 99 S Ibid entr e n 344 p 87 Voir Anne Roche L auto bio graphie in collectif Cahiers Georges Perec n 1 Colloque de Cerisy op cit p 71 9 Ibid entr e n 73 p 29 gn 313 ensuite l expression des limites du langage d s lors que l auteur s engage dans la description Je me souviens que dans les wagons de m tro le plan de la ligne indiquait encart s sous chaque nom de station les rues et les num ros de rues sur lesquels d bouchaient les sorties comment dire cela plus simplement Le questionnement renvoie l interrogation au lecteur Un autre m canisme auquel se heurte Per
191. ais plus encore de toutes les combinaisons auxquelles la cuisine donne lieu cet quilibre par exemple Je me souviens que le quatre quarts doit son nom au fait qu il est compos d un quart de lait d un quart de sucre d un quart de farine et d un quart de beurre Il a explor cette combinatoire de la cuisine dans un court texte intitul 81 fiches cuisine l usage des d butants texte qui a d abord t publi dans le magazine Manger et qui s annonce donc innocemment comme quelques recettes cautionn es par Perec Nous allons voir qu il s agit en v rit d un nouveau jeu pour d router l amateur Il s agit de recettes base de poisson la sole de viande le lapin et d abats le ris de veau Nous pourrions analyser dans cette combinatoire ce que nous Voir par exemple les tudes de Roland Barthes sur Le bifteck et les frites Le vin et le lait Mythologies Paris Seuil 1957 p 74 79 Voir aussi Jean Paul Aron Le Mangeur du XIX si cle Paris Robert Laffont 1975 Georges Perec Je me souviens op it entr e n 92 p 33 Georges Perec Penser Classer op it p 89 108 81 fiches cuisine l usage des d butants Manger Christian Besson et Catherine Weinzaeplen diteurs Li ge et Chalons sur Sa ne Yellow Now et Maison de la culture 1980 p 97 109 vaut 199 annoncions pr c demment savoir les combinaisons des ingr dients celles des op ratio
192. al repr sente le chameau selon l analyse de David Diringer Mais il faut amplifier cette analyse en signalant que cette lettre la forme et au nom incertains a probablement t choisie dessein par Perec Cette myst rieuse ic ne d signe la lettre par excellence l image le dessin par lequel surgit le commentaire Elle ne constitue donc qu un proc d de plus par lequel se produit le mot Nous avons vu que ce gimmel gt peut tre assimil au gamma grec avec cette fois la consonne centrale redoubl e Une double filiation s tablit ici d une part avec la parabole vang lique du Christ et le rapport qu il veut d montrer entre les riches le trou de l aiguille et le chameau et d autre part avec la g matrie universelle et le Grand Georges Perec W ou le souvenir d enfance op it p 23 Georges Perec ibid p 23 Voir David Diringer The Alphabet A Key to the History of Mankind op cit p 219 Voir David Diringer ibid p 218 363 Architecte On se souvient de la parabole vang lique selon laquelle J sus constate sur les difficult s des riches entrer dans le Royaume des Cieux en utilisant cette comparaison imag e Qui je vous le r p te il est plus facile un chameau de passer par un trou d aiguille qu un riche d entrer dans le Royaume des Cieux Or les lexicologues Liddel et Scott nous rappellent qu en grec le mot pour corde est Ka mi los et po
193. ale solidarit Perec le fait l occasion du mariage de ses amis o il crira quelques textes po tiques les pithalames pour exalter la joie de la journ e L pithalame est un texte de circonstance destin accompagner les poux jusqu au lit nuptial en faisant l loge de leurs vertus en remerciant les Dieux qui les ont fait se rencontrer et en voquant les f licit s qui les attendent Au d sir de faire plaisir s ajoute la volont consomm e de r ussir un texte surprenant qui agacera la perspicacit des destinataires Variations homophoniques c est dire qu il faut jouer sur le similitude des sons ainsi voeux je veux Le vouloir tre de la c l bration annuelle est galement travers par l homophonie Le titre du recueil est donc repris par Marcel B nabou et ric Beaumatin qui ont rassembl les textes pars et les ont class s suivant l ordre chronologique de leur diffusion Entre 1970 et 1982 l ann e de sa disparition Georges Perec envoie ses amis presque chaque hiver des Voeux pour le Nouvel An Ces petits albums se trouvent pr sent r unis dans l ordre o ils ont t crite Si nous suivons l ordonnance de la table des mati res nous avons en effet successivement ceci Le petit ab c daire illustr 1970 repris dans Chronique de UC Art Vivant 1970 n 14 et dans Qulipo La Litt rature potentielle Gallimard id es 1973 mis en musique
194. ande C est galement ce que Perec envisage lorsque Paul Virilio Esth tique de la disparition Paris Galil e 1989 p 44 5 Ibid p 44 Concernant la monopolisation des esprits sur des op ra savons de l espace comme Star Trek et ce l chelle mondiale voir le num ro sp cial de Time Star Trek the passion that drives the Enterprise November 28 1994 Vol 144 No 22 notamment l article Boldly going and going and going Star Trek began life as a campy unpopular TV show in the late 1960s So how did it become the most enduring pop phenomenon of our time pp 66 75 99 s interrogeant sur les effets m diatiques il s aper oit que l essentiel des journaux se compose du spectaculaire de l insolite de l extra ordinaire Pour expliquer cette tendance contemporaine il retrouve comme Virilio la m me puissance d anesth sie sur les consciences conduisant les humains un sommeil sans r ves La vie r v e envisag e par les surr alistes a t oubli e Mais plus encore la recherche de l insignifiant permettrait de construire une vie lucide l aide du r ve Il semble pertinent de donner d sormais une configuration g n rale ce que l on peut consid rer comme insignifiant Michel Maffesoli en annon ant l importance des menus faits de la vie quotidienne vient construire une socialit nouvelle fond e sur l insignifiant et qui caract riserait notre poque C est a
195. anger de cr merie Les interventions de Perec dans son long proc s de l insignifiant place Saint Sulpice manifestent leur influence sur l observateur lui m me Cela t moigne de la contamination de ces observations h t roclites en comp tition constante La position de neutralit apparente de Perec est donc constamment remise en cause notamment par les confrontations permanentes des v nements qu il consigne La localisation syntagmatique produit une s rie de d calages paradigmatiques Ainsi avons nous par exemple cette mise en comp tition du message publicitaire dans cette succession d nonc s Le 86 va Saint Germain des Pr s Exigez le Roquefort Soci t le vrai dans son ovale vert Aucune eau ne jaillit de la fontaine Des pigeons se sont pos s sur le rebord d une de ses vasques tant donn que le message publicitaire joue sur la connotation d notation ainsi que le montre Roland Barthes la contextualisation du message dans un environnement indiff rent d cale in vitablement l injonctif exigez et peut m me le transf rer aux autres nonc s De la confrontation l h t rog ne na t une improbable syntagmatique qui tablit une syntaxe impr visible La parataxe o la seule forme de connexion est la simple juxtaposition ouvre le champ sp culatif toutes les La Thid p 30 a Ibid p 33 12 Ibid p 14 15 Voir Roland Barthes L Aventure s miologique op cit Le Mes
196. ans le langage op cit p 135 CE O 111 passer d un syst me h t romorphe li la sensori motricit et la r flexion psychologique un syst me de la consignation par le langage crit Elle conclut sur le d calage consid rable qui se manifeste entre le fait observ et s lectionn et le fait consign Quant l ultime probl matique celle qui est constitu e par l agencement des faits elle rel ve de l heuristique perecquienne et la lecture du texte nous r v le son volution constante selon des polarisations liminatrices et classificatrices En nous proposant d valuer ce syst me fond sur l insignifiant nous nous fixons pour objectif d analyser l heuristique de Perec selon le va et vient qu il va tablir entre th orie et pratique consid rant que ces mouvements de la recherche sont r v lateurs de l volution de la notion d insignifiant Perec va donc ainsi tablir une nouvelle connaissance en cr ant de toutes pi ces de nouveaux objets d observation Fid le ce qu il avait annonc dans les travaux pratiques d Esp ces d espaces il va ancrer sa d monstration des endroits pr cis Noter le lieu la terrasse d un caf pr s du carrefour Bac Saint Germain l heure sept heures du soir la date 15 mai 1973 le temps beau fixe L importance des d ictiques donne une caution scientifique la tentative Nous aurons successivement amp Voir ibid p 135
197. ant est futile mais il nous instruit il nous apprend quelque chose Camus ordonne son examen autour d une progression d exemples de l insignifiance et des oppositions qu elle suscite vis vis de ce qui est important Il aboutit quelques conclusions notables l insignifiant c est ce qui n a pas de signification g n rale Plus loin il montre que lt l insignifiance a toujours sa relation qui d cide de ce qu elle est C est ce que nous avons signal propos de l importance du contexte Camus insiste sur l incertitude de la notion mais il la rattache l habitude les actions insignifiantes trahissent toujours l aspect m canique des choses et des tres l habitude de ce qu ils son La r p tition et la petitesse seront donc les Voir Georges Perec J aime je n aime pas pour continuer la s rie in L Arc n 76 Aix en Provence 1979 pp 38 39 Voir Georges Perec Un Homme qui dort Paris Deno l 1967 et aussi Esp ces d espaces Paris Galil e 1974 Albert Camus De l insignifiance in Oeuvres compl tes d Albert Camus op cit p 448 Ibid p 448 3 Ibid p 449 sain roma 97 traits secondaires de l insignifiance La libert de ce qui est important s oppose l habitude des actions insignifiantes Sacrifiant n anmoins au dualisme cart sien Camus regroupe toute l insignifiance dans le domaine humain les actions les paroles et les pens
198. ar Perec restent ceux d un groupe social original instruit capable de d tourner les messages de leurs sources dans un contexte communicationnel objectiv par les nonc s Derri re l aspect inoffensif des pseudo clich s propos s par Perec se cache cette d rision laquelle il fait allusion et qui n est rien d autre que la d nonciation q Roland Barthes Changer l objet lui m me in Esprit Paris avril 1971 p 613 Voir St phane Santerres Sarkany Th orie de la litt rature Paris Presses Universitaires de France Collection Que sais je 1990 p 68 82 338 d une soci t ali n e devenue la proie facile d un type d id ologie vou e la contradiction permanente et insurmontable comme mod le des affrontements entre cultures entre croyances Ce sont ces affrontements exhib s en permanence qui perdurent et qui demeurent sous jacents aux nonc s m diatiques Ce sont toutes ces entr es potentielles propres entrer dans le patrimoine culturel des groupes sociaux que Perec propose comme rem de toutes les ersatz philosophies opportunistes Ces pseudo philosophies arborent le v tement d une histoire populaire que Perec aime jouer contre les forces m diatiques le combat de David contre Goliath Aux bombardements massifs des informations selon les clich s bient t reconfirm s par l autoroute lectronique Perec propose un renouvellement des associations informatives afin de di
199. assoun Simone de Beauvoir La Force de l ge I Paris Gallimard 1960 p 207 358 Hassoun st le f tiche du nazi Dans ses entrevues avec Hitler Hermann Rauschning nous rapporte les paroles suivantes du dictateur nazi Repr sentez vous ces hommes ternellement mouvants et nous m mes avec notre nouvelle croyance au mouvement ternel Comme ils nous ressemblent et d autres gards comme ils sont diff rents Quelle lutte s engage entre eux et nous L enjeu est tout simplement la destin e du monde Ne vous tes vous pas aper u que le Juif est en toutes choses le contraire de l Allemand et qu il lui est cependant apparent au point qu on pourrait les prendre pour deux fr res Il faut noter la rivalit des doubles croix gamm e contre toile de David s engendrant l une l autre Ren Girard nous explique l origine de la victime qui doit cl turer la rivalit L appartenance de la victime une minorit ethnique ou raciale la d signe pour le r le de bouc missaire Dans les textes de pers cution par cons quent nous reconnaissons la victime des signes culturels Ces signes ne signifient nullement que les victimes ne sont pas arbitraires Elles sont parfaitement arbitraires sous le rapport des accusations qui p sent sur elles Ces accusations arbitraires dont parle ici Ren Girard que l on se rappelle celles des Nazis contre les Juifs tres d gradants mis rables en soi sous hom
200. astre son m c ne et protecteur David Marcia pour avoir ignor les grands classiques au profit des crivains de deuxi me voire de troisi me zone Les personnages consid r s comme des agents cognitifs r v lent qu ils se basent sur leurs connaissances pour tablir leurs strat gies d actions ls sont galement sanctionn s par leurs ignorances volontaires ou non Ainsi que le montre Jean Guy Meunier Son intervention celle d un agent cognitif identifi un personnage dans le monde qu il s agisse d y vivre ou d y survivre exige des gabarits d action qui recourent des op rations sur des acteurs des objets des buts des instruments des intentions etc Dans cette perspective les mod les dits actantiels tels ceux de Burkes ou de Greimas sont les templates ou les frames de strat gies d intervention d un agent cognitif sur son monde ext rieur ou int rieur Voir Laurence Dahan Gaida Du Savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature loc cit p 477 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 72 74 et 450 451 7 Voir Jean Guy Meunier Narration et cognition in La Recherche litt raire objets et m thodes op cit p 494 8 Ibid p 494 Te ans RE 66 C est exactement ce type d interventions que se ram nent les programmes de Rorschash et de Kosciuszko La richesse des processus d terminatifs d int
201. ater ses inventions fond es sur une esp ce d exp rimentation du langage sont multiples et vari es Elles t moignent de sa volont d explorer les possibilit s du langage Il poursuit encore l application de cette m thode exp rimentale dans le r emploi de ses lectures Admirateur inconditionnel de Flaubert de Kafka et de Proust entre autres Perec r utilisera leurs textes dans son oeuvre selon une exp rimentation clectique de l intertextualit Flaubert est largement imit dans Les Choses tandis que Kafka est repris mot pour mot dans une s quence de La Vie mode d emploi L intertextualit peut se manifester comme influence c est le cas de celle de Flaubert sur Les Choses Elle peut aussi constituer en une reprise int grale d un texte tranger comme c est le cas dans La Vie mode d emploi o Perec reprend une nouvelle de Kafka L intertextualit peut exister encore sous la forme d une parodie du texte source Ce sera le cas de l incipit de Proust dans La Recherche que Perec parodie au d but de son deuxi me chapitre d Esp ces d espaces Mais Perec r ussit encore susciter tous les m canismes de l intertextualit gr ce aux p ritextes Ces d viations ludiques de la m thode u Voir Georges Perec Quelques unes des choses qu il faudrait tout de m me que je fasse avant de mourir in Je suis n Paris Seuil 1990 p 105 109 Voir Georges Perec De la difficult qu il y a imaginer
202. attache la phase d initiation Quant au souvenir fictionnel de 53 jours il applique cette d couverte non au Lyc e Claude Bernard mais au Coll ge Saint Hilaire d tampes le pion blondinet et ha que l on avait surnomm le cocu parce qu il 7 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 400 p 99 et 53 jours op cit p 37 Georges Perec 53 jours op cit p 35 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 360 p 91 306 portait une charpe jaune La connotation sentimentale ajoute la rh torique du souvenir Toutefois on peut consid rer que ces confrontations externes montrent deux choses d une part la densit des souvenirs comme reconstitution d une fiction vocation r aliste et d autre part le caract re transgressif de Perec qui aime d tourner et subvertir ses propres options et dispositions pour faciliter les pratiques lectorales les plus diverses du lecteur ce qui est videmment tout fait conforme ses voeux on peut appliquer Je me souviens et l ensemble du corpus de Perec ses propres aspirations pour La Vie mode d emploi Mon r ve serait que les lecteurs jouent avec le livre qu ils se servent de l index qu ils reconstruisent en se promenant dans les chapitres les histoires dispers es qu ils voient comment tout cela circule comment se construit le puzzle Ce sont donc l les effets des discontinuit s du texte contaminant d aut
203. atteindre vingt vingt cinq et m me une fois trente million de francs anciens Il est vident que les myst res de l occultisme se pr tent admirablement aux ressources financi res de la di g se Mais le cas le plus int ressant de cette expansion de l intrigue g n r e par le spiritisme reste celui du diplomate su dois Sven Ericson Suite la disparition accidentelle de son fils ric et du suicide subs quent de sa femme Sven Ericson recherchera avec opini tret celle qu il tient pour responsable de la mort de son fils Il s agit d une jeune fille lizabeth de Beaumont fille de la cantatrice Vera Orlova de 65 Tbid p 388 ms Ibid p 389 Ibid p 185 198 55 Beaumont Ayant utilis finalement tous les moyens possibles pour retrouver la pr sum e coupable Sven Ericson va d cider de faire appel aux puisantes ressources de l irrationnel Perec nous livre alors une ahurissante liste de pratiques occultes permettant de retrouver celui ou celle que l on recherche Cela va des tables tournantes la divination dans les laitances de carpes les t tes d nes morts et les cercles de grains picor s par un coq en passant par l emploi des aimants des ongles de pendus la consultation des sorciers des sourciers des tireuses de cartes des voyantes des devins de toutes sortes et de ce qu ils firent lancer des d s br ler des photographies de la personne recherch e se frotter les
204. au Roman Les solutions qu il a choisies sont des confirmations de l illusion d un savoir total qui n appartient jamais aucun parmi nous ni aux protagons ni au scrivain ni moi qui fut son loyal proconsul nous condamnant discourir sans fin nourrissant la narration ourdissant son fil idiot grossissant son vain charabia sans jamais aboutir l insultant point cardinal Ainsi l activit du scriptor et du scrivain aboutit la transformation compl te de la pratique romanesque Comme les glossolales le scriptor est habilit discourir sans fin nourrissant la narration dans le cycle perp tuel des redondances et des it rations La suppression de la lettre modifie la production des signifiants et soul ve une nigme Ce fut le cas pour le sanskrit de la glossolale de Gen ve Mlle Smith dont el absence troublante d f reste incompr hensible C est aussi le cas chez Perec dans La Disparition o l absence de la voyelle e pose encore probl me tel point m me Georges Perec La Disparition op it p 311 Ibid p 304 Tzvetan Todorov Le Symbolique chez Saussure in Th ories du Symbole op cit p 326 162 que certains critiques ne se sont pas aper us de la suppression Ainsi la compression inaccoutum e du parc des lettres de l alphabet exhibe un savoir cach La suppression de la lettre est li e aux langues initiatiques Elle participe des myst res introduits dans
205. au vel d hiv Je me souviens des films avec le chien Rin Tin Tin et aussi de ceux avec Shirley Temple et aussi des po sies de Minou Drouet Je me souviens du cerveau d Einstein Il existe incontestablement des synergies sociologiques et des co ncidences de recherches entre Barthes et Perec qui sont r v latrices du tissu mental et intellectuel d une soci t un moment donn de son histoire Il se manifeste simultan ment une r vision de la doxa d s lors que son emprise devient insupportable Les r actions de penseurs tels que Barthes et Perec demeurent exemplaires dans leur vitalit et leur lucidit Comparativement avec vingts ann es de d calage ce qui est peu en regard de la permanence de la doxa Mythologies et Je me souviens constituent des mod lisations des actes de m moire Comme nous l avons vu les tapes de ce savoir passent par une s rie de processus caract risant la culture occidentale qu il s agisse de la d tection des faits de leur s lection de leur mod lisation puis de leur fixation C est la mod lisation qui 0 Ibid p 42 Ibid p 54 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 370 p 93 2 Roland Barthes ibid p 77 3 Ibid p 85 Ibid p 99 23 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 197 p 55 Voir aussi Roland Barthes Mythologies op cit p 153 7 Roland Barthes ibid p 91 mer greng une 337 demeure la p
206. au vulgaire qui abolit le quotidien le r p titif l habituel r instale l invisible comme objet du d sir comme objet unique de son herm neutique En manipulant la rh torique de la description Perec reproduit ce qu il fait avec les contraintes de l autobiographie En s affichant comme contr leur de lignes de la R A T P pour les autobus il se d finit comme crivain oulipien Le projet de la tentative comme observation du quotidien s inscrit dans le projet de la Ligne G n rale Il s agit d une transformation d une conversion on passe d un usage politique un usage personnel La rh torique de la description sert des objectifs politiques La fonction de l insignifiant est tout aussi bien le marquage que le masquage l exhibition et la dissimulation En fait l illusion est de croire que d est le pr sident Kennedy qui est signifiant et non pas le panier de la m nag re Il n y a pas d insignifiant La vraie vie n est pas ailleurs Tout ce qui se d roule sous nos yeux ne devient insignifiant que pour ceux qui ne veulent pas voir la r alit tous ceux qui s accommodent de la soci t telle qu elle est Utiliser le r ve et l imaginaire dans l analyse du quotidien pour nous montrer ce qui est insignifiant voil ce que nous propose et ce qu a r ussi Georges Perec Perec a utilis une grande vari t de savoirs scientifiques Il les consid re comme le mod le accompli du savoir L utilisation de la sci
207. avons donc successivement dans cette confrontation r ticul e les souvenirs suivants Les phrases rem mor es des le ons d allemand class es en cole Ich weiss nicht was soll es bedeuten das Ich so traurig bin les phrases toutes traduites dans le Gaffiot et la joie que cela produisait chez le jeune latiniste class es en cole et aussi les punitions que cela lui valait la consommation de cigarettes au nom vocateur High Life Naja si bien dit par Sami Frey class e dans l index lt cigarettes la fabrication des postes gal ne non D Georges Perec Je me souviens op cit index p 130 132 et 134 75 Georges Perec 53 jours op cit p 35 Concernant les fragiles intersections voir Georges Perec W ou le souvenir d enfance Paris Deno l 1975 derni re page de couverture 76 Georges Perec Je me souviens op it derni re page de couverture 7 Ibid entr e n 19 p 17 7 bid entr e n 45 p 23 et 53 jours op cit p 29 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 26 p 19 et 53 jours op cit p 36 Voir Sami Frey Je me souviens de Georges Perec La Biblioth que des voix Paris Hachette pour le texte 1970 304 class dans les rubriques num r es l index et mise part La crainte persistante des bizuthages dont l expression est manifest e par Perec sous la forme de la torture la plus raffin e Je me souviens de l
208. barthes Paris Seuil 1975 p 80 c est l auteur qui souligne F4 Georges Perec Je suis n op cit p 106 Georges Perec Penser Classer op it p 130 F6 bid p 130 7 Georges Perec Je suis n op cit p 106 7 Georges Perec Penser Classer op cit p 130 189 st Nous partons du principe et de l exp rience que pour le citadin le d partement de l Yonne bien que dot de plusieurs villes reste n anmoins une zone rurale privil gi e Pour Perec le hameau la campagne l Yonne s int grent id alement ce qu il a d j appel lt L Utopie villageoise Elle se rattache la reconstitution nostalgique d un pass inexistant et aux r flexes d un milieu sociologique humain r volu les trains ont disparu les habitants interpr tent le temps venir en lisant les nuages ils se connaissent tous et produisent ainsi un milieu convivial transparent On jouerait la manille avec le garde champ tre On irait chercher son bois dans les bois communaux On saurait reconna tre les oiseaux leur chant On conna trait chacun des arbres de son verger On attendrait le retour des saisons Dans ces consid rations se m lent donc trangement au conditionnel utopique des aspirations vers un pass aboli et sa reconstruction vocatoire L alternance des valeurs comme dit Barthes se multiplie ainsi dans le libre jeu du sujet et du monde le d sir pr side la reconstruction
209. brat Orecchioni utilisant les travaux des sp cialistes de la communication comme P Watziawick J Helmick Beavin et D Jackson montre clairement que vu la densit des impressions sensorielles que re oit chaque individu il doit faire des choix drastiques pour ne pas tre submerg par l information Concernant le second probl me de choix elle insiste sur le fait qu il est impossible de lt verbaliser la totalit du per u et l encore s impose une s lection draconienne gt Il sera donc impossible Perec de couvrir la totalit du champ de l exp rience et ce d autant plus qu il en sort quelquefois aussi bien pour voquer les circuits des autobus que les aspects historiques de l endroit qu il a choisi ou encore pour se livrer des s ries de suppositions hypoth tiques Li e cette seconde probl matique est la consignation exhaustive de l ensemble des faits retenus Ceci correspond au d calage entre le temps de l aventure et le temps de l criture tel qu envisag par Butor Catherine Kerbrat Orecchioni traite de cet aspect de la probl matique dans sa rubrique consacr au temps scriptural S Il s agit en effet de Voir ibid pp 133 134 Ibid p 133 Voir ibid p 134 Voir Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit pp 11 12 14 Voir ibid pp 30 31 amp Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit d
210. c celle de la prosodie classique Dans le monde de l crit la subversion du savoir accumul dans les archives innombrables est facile Cela peut commencer par les synonymes les plus impr visibles qui viendrait l id e d crire sur ses propres draps peindre oui passe encore Je me souviens que l on racontait que Bernard Buffet tait pauvre et que fou de peinture il en tait r duit peindre sur ses propres draps Mais crire sur ses draps c est pourtant ce que Perec a la pr tention de faire gr ce un simple jeu synonymique On Georges Charbonnier Entretiens avec Claude Levi Strauss Paris Union G n rale d ditions 1969 p 123 7 Georges Perec Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner in L Arc n 76 Aix En Provence 1979 p 8 Georges Perec La Cl ture et autres po mes Paris Hachette 1980 pp 39 44 HS Georges Perec Bibliographie sommaire assortie de quelques commentaires de l auteur in L Arc op cit p 92 7 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 220 p 60 Dn RO 261 utilise g n ralement la page dans le sens de sa plus grande dimension Il en va de m me pour le lit Le lit ou si l on pr f re le page est un espace rectangulaire plus long que large dans lequel ou sur lequel on se couche commun ment dans le sens de la longueur On peut notamment gr ce la confusion homonymique du masculin au f minin le page la pag
211. cantonnement Ce personnage inoubliable est l invention de Paul Reboux et de Charles M ller dans leur pastiche de Tolsto R demption G rard Genette montrant la possibilit qu ont les pasticheurs non seulement d imiter le style du mod le mais encore sa th matique crit Voyez l immortel pseudo Tolsto R demption de Reboux et M ller o Ivan Labibine convertit et recueille des prostitu es avec le r sultat pr visible que vous savez Or Perec s tait largement plaint de sa difficult lire les romanciers russes au sujet des difficult s de sa lecture et notamment de la reconnaissance des noms il crit ceci Je n en ai pour ma part qu une confirmation n gative le sentiment d intense frustration qui ma longtemps saisi la lecture des romans russes veuf d Anna Mikha lova Droubetskoi Boris Timof itch Isma lov demanda la main de Kat rina Lvovna Borissitch qui lui pr f ra Iva Mikha lov Vassiliev Il est vrai que les emb ches rencontr es lors de la lecture du pastiche de Tolsto ont pu largement gu rir Perec de ses frustrations Ivan Labibine Ossouzoff du gouvernement de Kartinskrasolvitchegosk district de Vokovosnesensk Auskrevo santchoursk commune de Ortoupinska eska a Tienswalapopol Tartine quand il eut h rit la fortune de sa m re Ilia Vassilievitch Potengleska et le majorat de son p re le g n ral Paul Reboux et Charles M ller la mani re de Paris
212. ce court extrait consid rons l encha nement des concepts comme cautionnement de l tre par le Logos suivant le mod le logique ainsi d velopp DIEU TRE VERBE LOGOS LETTRE ESPRIT CRITURE LIVRE SENS SECRET SAVOIR SAGESSE LETTRE CACH E MOT TU Deux instances retiennent ici notre attention Il s agit d une part du Logos comme manifestation de Dieu deux niveaux celui de la cr ation mat rielle comme parole parl e et comme criture fig e et d autre part de celui du Secret par opposition aux religions r v l es qui pr tendent tout d voiler d un Dieu qu elles ont pour but d occulter derri re la lettre cach e le mot tu le nom perdu et le livre disparu On comprend alors la n cessit de toute forme d initiation au savoir la sagesse la foi etc Cette initiation permet d viter comme la peste ou les pestes la contingence d une formation 7 Voir ce sujet Anne Longuet Marx et David Emmanuel Mendes Sargo La lettre l esprit et le comparatiste in Comparatio Revue Internationale de Litt rature Compar e Gen ve Facult des Lettres Litt rature Compar e 1990 n 1 p 16 Voir La Bible traduction de J rusalem op it Gen se 1 3 Dieu dit Que la lumi re soit et la lumi re fut p 9 Voir ibid Exode 31 18 Lorsqu il eut fini de s entretenir avec Mo se sur le mont Sina Yahv lui remit les deux tables du T moignage
213. ces sur les textes produits On pense la recherche de Jean Tardieu dans Un mot pour un autre celle de la voyelle inconnue recherche que cite Perec dans La Disparition et qui doit aboutir une concat nation du langage Dans ses recherches microcosmiques sur le langage Perec travaille sur le signifiant par la suppression ou la concentration de voyelles Il en r sulte les traductions lipogrammatiques de La Disparition et des Revenentes Il produit aussi son recueil de Voeux o il nous livre des textes relevant de pratiques homophoniques c est dire d une variante savante du calembour Ces pratiques rel vent du ludisme Toutefois il semble que dans ce cas Perec tablisse un couplage entre une activit ludique et une exp rimentation tendance scientifique comparable en cela aux m thodes des zoologues behavioristes qui tudient l intelligence animale gr ce la m thode des essais et des erreurs Les t tonnements puis les r ussites de Perec correspondent bien un ludisme exp rimental Ce sera aussi le cas des po mes h t rogrammatiques d Alphabets et de La Cl ture Ces po mes n ont pas t analys s En effet le syst me de contraintes employ par Perec correspond un m lange d anagrammes et de lipogrammes Il s agit donc Georges Perec La Disparition op cit Georges Perec Les Revenentes Paris Julliard 1972 Georges Perec La Disparition op cit p 313 Jean Tardieu Un mot pour u
214. ces textes ne manquent pas de nous tonner Ils nous rappellent la forte coh rence qui unit une oeuvre aussi diverse Ils nous signalent encore toute la diversit des proc d s que Perec a utilis dans son oeuvre pour r employer les textes des autres voire les siens propres Ces nouvelles lectures d bouchent sur les processus d intertextualit et en fondent toute la probl matique En premier lieu nous reprenons notre compte la d claration de Claude L vi Strauss propos des textes mythologiques Chaque texte pris en particulier existe comme application restreinte d un sch ma que les rapports d intelligibilit r ciproque per us entre plusieurs textes aident progressivement d gager Comment percevoir ces rapports d intelligibilit entre plusieurs textes Bref comment parvenir une exp rimentation scientifique de l intertextualit En second lieu Il s agit de la nouvelle intitul e Premier chagrin constituant une partie de Champion de je ne in Franz Kafka La colonie p nitentiaire et autres r cits Paris Gallimard 1948 p 53 La nouvelle est int gr e dans La Vie mode d emploi au chapitre XIII lt Rorschash I voir Georges Perec La Vie mode d emploi op cit pp 70 72 Voir Georges Perec Esp ces d espaces Paris Galil e 1974 p 25 1 Voir G rard Genette Seuils Paris Seuil 1987 Claude L vi Strauss Mythologiques Paris Plon 1964 p 21 216 nous no
215. choix draconiens Tout observer Et peut on tout observer C est ici la premi re probl matique du choix que rassembler comme insignifiant dans une premi re collecte de donn es brutes Ensuite que noter Et peut on tout noter C est l la seconde probl matique du choix que doit affronter Perec Troisi me tape comment assembler ces donn es pour justifier un tant soit peu de la coh rence d un travail scientifique Il s agit en effet d un d fi consid rable et nous pressentons d ores et d j toutes les implications des choix que devra faire Perec Dans son tude sur L nonciation de la subjectivit dans le langage Catherine Kerbrat Orecchioni analyse avec pr cision les d terminations caract ristiques de la subjectivit chez Perec dans sa Tentative d puisement d un lieu parisien Elle r pond notamment aux questions soulev es par les probl matiques perecquiennes de l observation et de la consignation de l insignifiant Sans nous attarder sur les probl mes de ce sujet voir ce que confirme Philippe Lejeune in La M moire et l oblique Georges Perec autobiographe op cit p 166 7 Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage Paris Armand Colin 1980 pp 131 146 110 perspectives qui sont secondaires pour nous d s lors que l insignifiant peut se manifester partout nous pr f rons revenir sur la probl matique de l observation Catherine Ker
216. ciation sur la r currence du signifiant band ou bien pour joindre des souvenirs en apparence sans liens hormis ceux de l actualit un moment donn Il n en reste pas moins vrai que les syst mes binaires constituent une premi re grande approximation du savoir en Occident puisqu ils peuvent tre le fondement du raisonnement analogique Ce type de raisonnement appartient au potentiel logique de la m moire et de l imagination et est donc largement exploit au niveau scientifique avec les r sultats que l on sait Les syst mes ternaires ont galement produit des encha nements dont Perec ne s est pas priv pour laborer toutes ces conjonctions de son recueil Nous examinerons une s rie de cinq encha nements de souvenirs dont deux sont signal s l index Il s agit tout d abord des Noms de choses ou de gens Perec oublie ainsi tous les autres noms propres qui pourraient constituer ses souvenirs Sous l gide du chiffre 3 qui regroupe en trois entr es successives les triades suivantes les trois rois mages Gaspard Melchior et Balthasar 353 les trois petits cochons un seul nom Naf Naf 354 les sept nains Georges Perec ibid entr es n 14 et n 360 p 16 et p 91 3 Warren F Motte Jr The Poetics of Experiment a study of the work of Georges Perec Lexington French Forum Publishers 1984 p 111 Georges Perec Je me souviens op cit index p 138 ze zm fe RSR 319 avec
217. cientifique Apr s avoir vou les autobus aux enfers Perec r v le son engluement dans l insignifiant au niveau personnel Ainsi que l a fort clairement d montr Catherine Kerbrat Orecchioni Perec doit sacrifier aux pressions de la subjectivit L influence 105 Thid p 47 1 Thid p 39 19 Ibid p 40 18 Voir Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage op cit pp 132 135 126 d une subjectivit incontr lable conduit videmment transformer la perception de l insignifiant Ainsi avons nous en premier le jeu de l impr cision partant du principe que ce qui est insignifiant se d note aussi comme impr cis Nous avons par exemple ces associations qui se veulent banales dans l observation de la place Des gens par paquets toujours et encore Tout plein de gens tout plein de bagnoles Des gens des gens des voitures Les conjonctions gens v hicules automobiles rendent compte de la pression du r el et du d bordement de l observateur Il c de encore des hcoix personnels lorsqu il se repose sur des d ductions hypoth tiques ou des constatations virtuelles Ce sera le jeu des marqueurs sociaux du type un facteur avec sa sacoche belles oisives envahissant des magasins de modes Passe une femme l gante ces inconnus que Perec identifie socialement viennent s opposer une s rie de personnages qu il conna t soit pe
218. cifique de l crit et du signe De ce point de vue on peut supposer que la qu te de Perec dans la connaissance de soi constitue une r ussite personnelle particuli rement originale tant dans la fusion des genres que dans la collecte des savoirs Dans cette recherche du savoir chez Perec il est significatif qu il faille revenir constamment La Vie mode d emploi Il semble donc probable que ce roman correspond l apog e du syst me perecquien il constitue une esp ce de clef de vo te de l oeuvre de Perec Le roman somme cristallise en effet dans leur emploi les multiples proc d s que Perec a d couverts et exp riment s au cours des ann es Ces proc d s ressortissent aussi bien au ludisme qu l rudition Ils rel vent encore aussi bien de l intertextualit que de la combinatoire Ce sont donc tous ces proc d s qui se retrouvent dans les autres oeuvres de Perec que nous n avons pas tudi es mais qui se placent justement dans le sillage des oeuvres analys es C est le cas d Un Cabinet 7 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Isi Histoires d errance et d espoir Paris Sorbier 1980 7 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit A0 d amateur ouvrage consid r par Claude Burgelin comme le cent uni me chapitre de La Vie m emploi Il restait le th tre de Perec Il ne constitue pas une partie majeure de son oeuvre nous l avons donc cart Nous remarquons cependant que L Augme
219. cit p 14 77 de la sociologie urbaine de l ethnologie africaine de la g om trie descriptive de l pist mologie g n tique de la statistique int grale de l conomie politique et de la chimie mol culaire Comparativement au texte retenu pour exemplifier le discours scientifique Perec ma trise un ensemble de proc d s qui authentifient la fois la science et sa relation langagi re Nous trouvons ainsi joints simultan ment la taxinomie abusive et les transformations ludiques des l ments list s par exemple cet inventaire des grands courants historiques id ologiques et esth tiques qui ont contribu fa onner l esprit fran ais Des grandes invasions au Front populaire de Charles Martel Charles P guy de Charles Trenet Charles de Gaulle de la NASA Jean Paul Chartre d Hollywood la R vocation de Ed de Nantes de la Nuit du 4 ao t aux trois Glorieuses de Viollet Le Duc la mise en place du T G V de la grande Chartreuse Marcel Proust du rationalisme chart sien l cole des Chartes et du geste auguste du semeur l organisation des voyages en charter En plus de ces variations sur les phon mes voisins charles et chartes nous trouvons un grand nombre de proc d s qui sont li s la tradition scientifique h rit e de la scolastique Ce sont ailleurs des proc d s comme la gestion parodique de la preuve labus de l autorit scientifique le langage abstrus et amphigouri
220. connaissances disparates au milieu textuel lt Rem de du texte d clare aussi avec humour Sylvie Rosienski Pellerin il s en faut de peu que le texte d finisse le lieu d closion de nouveaux savoirs m dico pharmaceutiques En fait p ritextualit et interdiscursivit vont constituer les ma tres proc d s de Perec pour utiliser la science parodi e et produire un renouvellement de notre perception de l univers scientifique o Voir Sylvie Rosienski Pellerin Jeux p ritextuels Quel petit v jo zuidon chrom au fond de la cour de Georges Perec in Georges Perec crire transformer tudes litt raires vol 23 n 1 2 t automne 1990 Qu bec Universit Laval 1990 p 40 TT Georges Perec Une Amiti scientifique et litt raire L on Burp et Marcel Gotlib suivi de Consid rations nouvelles sur la vie et l oeuvre de Romuald Saint Sohaint in Cantatrix sopranica L e autres crits scientifiques Paris Seuil 1991 p 58 2 Agrippa d Aubign Les Tragiques 3 Sylvie Rosienski Pellerin Jeux p ritextuels l petit v lo guidon chrom au fond de la cour de Georges Perec in Georges Perec crire transformer op cit p 41 70 De 1979 1982 Perec va parall lement sa grande oeuvre produire une s rie de textes pseudo scientifiques o il pourra d velopper son go t pour l rudition et r employer son exp rience acquise d une science rigide et vou e au mandarinat dont il
221. core la suppression de le voyelle e dans La Disparition de Perec et le retour obsessif de ladite voyelle dans Les Revenentes La Lettre dans le monde occidental est sans cesse le raccourci du Livre Que le Livre soit li la Lettre autrement encore que par la graphie nous en avons pour preuve ce r cit de r ve que Perec nous rapporte dans son recueil onirique La Royston Pike Dictionnaire des Religions op it p 3 Marcel B nabou li il soi Paris Seghers 1992 Il jeta effectivement le livre sur le sol 1 Georges Perec La Disparition Paris Deno l 1969 7 Georges Perec Les Revenentes Paris Julliard 1972 et 1991 18 Voir le livre de Marek Halter La M moire d Abraham Paris Robert Laffont 1983 LA nec 386 Boutique obscure Ainsi la date de septembre 1970 nous lisons ce r cit intitul S Z que nous ne pouvons nous retenir de citer in extenso Je retourne dans cette librairie o les livres pour la plupart d occasion sont empil s ou plut t amoncel s dans un coin Je cherche un titre pr cis mais la librairie ne l a pas En compagnie de Z Je feuillette quelques ouvrages Je trouve un livre le nom de l auteur m est familier mais sans plus c est une gigantesque compilation ou dictionnaire des variations S Z chez Balzac Chaque page se pr sente en quatre colonnes Terme attest S r R f rence de l emploi Les colonnes terme attest et
222. cours de Michel BEAUJOUR Damian BAYON Jean LE 442 GALL TROCM Georges LONDEIX et C sar MAGRINI Paris ditions de L Herne 1981 469 p H P LOVECRAFT cahier dirig par Fran ois TRUCHAUD Paris ditions de L Herne 1969 379 p GUSTAV MEYRINK cahier dirig par Yvonne CAROUTCH Paris ditions de L Herne 1976 290 p RAYMOND QUENEAU cahier dirig par Andr e DERGENS Paris ditions de L Herne 1975 392 p OEUVRES DIVERSES ANTELME Robert L Esp ce humaine Paris Gallimard 1957 233 p BORG S Jorge Luis Fictions Paris Gallimard 1957 et 1965 185 p BORG S Jorge Luis L Aleph Paris Gallimard 1967 218 p BRETON Andr Manifestes du Surr alisme Paris Gallimard 1924 et 1929 173 p BRETON Andr Arcane 17 Paris Jean Jacques Pauvert 1971 145 p BUTOR Michel Passage de Milan Paris ditions de Minuit 1954 286 D CALVINO Italo Cosmicomics Paris Seuil 1968 153 p CAMUS Albert Le Mythe de Sisyphe Essai sur l absurde Paris Gallimard 1942 186 p CAMUS Albert L Homme r volt Paris Gallimard 1951 382 p ECO Umberto Le Nom de la Rose Paris Grasset et Fasquelle 1982 548 p ECO Umberto Apostille au Nom de la Rose Paris Grasset 1985 ECO Umberto Le Pendule de Foucault Paris Grasset 1990 657 p 443 GRASS G nter Le Tambour Paris Seuil 1973 634 p JABES Edmond Le Livre des ressemblances Paris Gallimard 1991 394 p LEIRIS
223. ctes sont repr sent es plusieurs reprises dans l oeuvre de Perec par exemple la physique la chimie la balistique la physiologie et l anatomie humaine voire l astrophysique et l lectronique Y figurent aussi des para sciences telles que l occultisme ou la divination Georges Perec Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner LA n 76 1979 p 4 Marcel B nabou Vraie et fausse rudition chez Perec in Parcours Perec textes r unis par Mireille Ribi re Lyon Presses Universitaires de Lyon 1990 p 42 Voir Georges Perec Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner loc cit p 4 pe 3 comme de pseudo sciences qui constituent des amalgames de connaissances Quelques exemples nous sont donn s dans un article intitul Une amiti scientifique et litt raire L on Burp et Marcel Gotlib o Perec livre une liste de quelques unes des pseudo sciences de son cr criminologie compar e anthropologie structurale musicologie analytique stomatologie clinique sociologie urbaine ethnologie africaine g om trie descriptive pist mologie g n tique statistique int grale conomie politique et chimie mol culaire Cette liste rend compte d un habile amalgame entre des disciplines solidement tablies et celles qui ne sont rien moins que de pures fantaisies L int r t de Perec pour les sciences notamment les sciences exactes n est plus d montrer Form l cole du CNRS
224. cyclop diques on remarque la lecture du roman qu une grande vari t de sciences sont pr sentes dans le r cit que ce soient des sciences exactes des sciences exp rimentales des sciences de la nature des sciences humaines voire les sciences dites 9 Jean Fran ois Chassay Le Jeu des co ncidence La Vie mode d emploi de Georges Perec Ville LaSalle ditions Hurtubise HMH It e 1992 p 13 Ibid p 13 Marcel B nabou Vraie et fausse rudition chez Perec in Parcours Perec Colloque de Londres Mars 1988 textes r unis par Mireille Ribi re Lyon Presses Universitaires de Lyon 1990 p 41 47 39 occultes Toutes ces disciplines se retrouvent m l es au d roulement narratif avec les implications que nous verrons Ainsi l anthropologie et l ethnologie sont repr sent es par Marcel Appenzzel que sa passion monomaniaque conduira d tranges aventures sur lesquelles nous reviendrons Avec Fernand de Beaumont nous d couvrons l importance de l arch ologie Parti la recherche de la cit l gendaire de Lebtit capitale des tribus arabes pr islamiques il d couvre finalement que c est Oviedo que devait se manifester le myst re C est aussi l arch ologie que s en remettra le diplomate su dois Sven Ericsson pour essayer de pi ger V ronique Lambert alias Elizabeth de Beaumont qui a tu accidentellement son enfant et qui tudiait l arch ologie Londres La B
225. d Horace Virgile en passant par Juv nal transmettent un grand nombre d informations leurs lecteurs non seulement religieuses mais aussi profanes de l agriculture l art de la guerre C est au Moyen Age avec la litt rature biblique et la red couverte d Aristote que la litt rature et les disciplines les plus diverses se m leront encore davantage La distinction entre le discours litt raire et la science n existe pas M me si la s paration commence s op rer partir de la Renaissance nombre d crivains int grent leurs textes des notions parfaitement trang res la litt rature C est notamment le cas de l oeuvre rabelaisienne qui nous frappe par son ampleur tant donn e la profusion de connaissances utilis es par l auteur Il va sans dire que les encyclop distes du XVII si cle ne font que r p ter cette tendance la qu te irr pressible du savoir Quant aux grands romanciers du XIX si cle ils accumuleront des informations sur tous les sujets pour en nourrir leurs oeuvres Zola et surtout Flaubert manifestent plus d un titre cette pr occupation du savoir ses d buts Perec est influenc par Flaubert Mais il est d autres auteurs qui eux aussi ont inspir Perec dans sa propre qu te Il s agit bien s r de Jules Verne mais aussi de Roussel et de Queneau l image de ses pr d cesseurs Perec recherche la connaissance dans toutes sortes de disciplines mais aussi il r e
226. d Magn et Jacques Neefs Cahiers des charges de La Vie mode d emploi Georges Perec op cit Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 695 Voir Marcel B nabou Les ruses du plagiaire exemples oulipiens in Collectif Le Plagiat op cit p 26 Voir Bernard Magn Perecollages 1981 1988 op cit p 233 A 24 livre une nouvelle exp rimentation textuelle Finalement nous pourrons envisager encore d autres transformations toujours possibles du texte en tudiant les s ries d index que Perec ajoute plusieurs de ses ouvrages tels que Quel petit v lo guidon chrom au fond de la cour Petit trait invitant la d couverte de l art subtil du go La Boutique obscure Esp ces d espaces Je me souviens et La Vie mode d emploi Constituant la fois un p ritexte et un paratexte les possibilit s de l index concr tisent l expansion du texte travers des composantes peu conventionnelles L index constitue un prolongement ludique au texte qu il permet de lire selon les choix personnels du lecteur Cette disposition illustre bien la conception perecquienne de la lecture comme jeu crire est un jeu qui se joue deux entre l crivain et le lecteur S Ainsi les connaissances litt raires de Perec lui permettent elles de multiplier les exp rimentations sur les textes Elles vont de la copie pure et simple au puzzle le plus vaste comme dans La Vie mode d emploi en passant par le col
227. dans les siens propres selon une logique qui ne manque pas de nous surprendre par sa rigueur Allant de la citation Georges Perec Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner in L Arc n 76 Aix en Provence 1979 p 3 Collectif Oulipo La litt rature potentielle Paris Gallimard 1973 p 33 Georges Perec Les Choses Une histoire des ann es soixante Paris Julliard 1965 C est par d faut que nous d signons ainsi l Oulipo car il ne se d finit pas comme mouvement voir collectif Oulipo La litt rature potentielle op it note l diteur p 7 214 l ench ssement pur et simple en passant par la transformation la mani re perecquienne de concevoir le savoir litt raire nous conduit resituer toutes ses techniques dans la plus vaste perspective d un travail intertextuel fruit d un change constant entre lecture et criture l ne s agit plus d influence consciente comme r sultat d un choix d lib r et volontaire Il est donc tr s important de consid rer l usage que fait Perec de ses lectures et des textes qui lui servent de mod les Les m canismes de l intertextualit perecquienne sont largement novateurs et produisent un nouveau savoir litt raire en multipliant lt les possibilit s d interpr tation selon le mot de Marghescou Nous pourrons examiner tout d abord la facture particuli re de son premier roman Les Choses Le style de cet ouvrage sonne en effet tr s d
228. de boucherie Je me souviens de Suivez le boeuf Ce sont les m mes pratiques de mise en vidence qui dicteront ces consid rations Perec Les trains ne se mettent exister que lorsqu ils d raillent Georges Perec Je me souviens op it entr es n 368 373 p 93 17 Tbid entr e n 445 p 109 5 Ibid entr e n 338 p 86 323 Les avions n acc dent l existence que lorsqu ils sont d tourn s Les voitures ont pour unique destin de percuter les platanes D frayer la chronique par du nouveau toujours du nouveau permet d effacer l essentiel c est dire la r flexion et d emp cher la constitution d une culture id ologiquement novatrice Sous l apparente conjonction culturelle on peut toujours retrouver l exhibition de clich s et des st r otypes ainsi avons nous une cha ne multipolaire concernant la culture am ricaine Dans cette cha ne sont r unis successivement l assassinat de Sharon Tate les principales victimes du mccarthysme dans le domaine du cin ma la carri re du soldat am ricain Audie Murphy devenu acteur l interpr tation de James Stewart dans le r le du musicien de jazz Glenn Miller La concentration des entr es sur la th matique cin matographique d voile une civilisation de l image c est dire dans ce cas les cons quences du faux semblant qui vont de la pers cution politique la r putation belliciste On r
229. de combinaisons que Perec improvisera Finalement nous d couvrons comment il aboutit la connaissance de soi gr ce de nouvelles exp rimentations celle de la m moire mais aussi celle des multiples signes qui peuvent composer l identit personnelle d un individu ou d une famille Une telle volution n aurait pas pu tre mise en lumi re si Perec n avait d abord explor les possibilit s de la science sous bien des formes notamment par celle de la parodie S d brocarde ainsi la science il n en reste pas moins qu il y recherche les secrets du monde qui nous entoure f t ce par le biais de m thodes et d objectifs peu conventionnels propos de ses m thodes Paul Fournel disait que ses yeux se portaient volontiers l o ceux des curieux institutionnels ne se portent jamais Perec se passionne pour l exploration et la d couverte de notre monde quotidien Il recherche ce qui n int resse pas le savoir institutionnel Cette qu te de l insignifiant de l infra ordinaire cette obsession de la signification du quotidien est li e directement au groupe de Cause commune auquel Perec participe aux c t s de Paul Virilio et de Jean Duvignaud cet int r t pour les faits insignifiants caract ristique d une tendance minimaliste se rattachent des ouvrages de commande comme Esp ces d espaces o Perec Paul Fournel Perec d but d inventaire Magazine litt raire n 226 janvier 1986 p 7
230. depuis l av nement du scientisme positiviste Cette fois il s agit d un sociodrame g n r par l histoire Sous pr texte de nous relater la d couverte nominale de l Am rique Perec se livre une satire en r gle de la m thode historique La satire constitue une m tadi g se du r cit et se dissimule derri re l ampleur des d couvertes exhib es L histoire est li e la trace et partant au mythe de l origine Ce qui est le plus ancien cautionne la d termination de la v rit La mise en sc ne de l pisode est simple il s agit d un congr s international d historiens o comme par hasard vont s affronter deux sp cialistes qui travaillent dans le m me champ de recherches Ils veulent trancher une fois pour toute la probl matique du nom attribu au continent nouvellement d couvert Tandis que le savant alsacien Zapfenschuppe confirme gr ce la d couverte d un atlas r put introuvable que le continent d couvert Laurence Dahan Guida Du Savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature in Revue Canadienne de Litt rature Compar e op cit p 485 Re ed ms ra 61 par Colomb avait t l gitimement appel Am rique TERRA AMERICI VEL AMERICA son rival involontaire gr ce l exhibition d un ancien planisph re prouve que l objet du litige ce nouveau continent tant convoit tait d sign sous le nom de TERRA COLUMB
231. deux s appuyant leur tour sur la v rit du savoir v rit confirm e par la caution que le pass attend du pr sent Il n emp che que comme l affirme Gilbert Durand La m moire est bien du domaine du fantastique puisqu elle arrange esth tiquement le souvenir Mais ce travail de l imagination ne peut se fonder sur l arbitraire En effet le souvenir est une action socialement partageable Janet montre que la m moire est un acte social qui a pour but de lutter contre l absence Cet acte est essentiellement celui du r cit C est effectivement l un des objectifs de Perec Tout cela tant faire partager aux autres faisant partie de quelque chose dont l aboutissement est un objet mat riel le livre qui appartiendra aux autres qui sera partag chang Perec va plus loin encore dans ses affirmations en mettant en avant l int r t convivial de son recueil Tout cela est une approche de ma propre histoire mais dans la mesure seulement o elle est collective partageable Le m canisme de base du rassemblement des souvenirs est donc le d sir de faire co ncider des fantasmatiques celle de l auteur et celles des lecteurs C est comme dans la th orie des ensembles je partage avec X des souvenirs que je ne partage pas avec Y et dans le grand ensemble de nos souvenirs chacun pourrait se choisir une configuration Gilbert Durand Les Structures anthropologiques de l imaginaire Paris Du
232. ditionnels tabac riz th colliers embauche d un guide voyage et pers v rance Toute une s rie de m canismes toffent et justifient le d roulement di g tique mais sont d jou s avec obstination par l objet propre l tude scientifique savoir les Kubus la fin de son r cit Appenzzel livre au lecteur une courte lettre o il explique ses d boires et son chec L exemple d Appenzzel nous permet de comprendre comment la litt rature peut r organiser des savoirs en utilisant le champ exp rimental La pseudo exp rience de l ethnologue permet de v rifier d une part les limites de cette science et d autre part d int grer au r cit des proc s n gatifs qui ne retirent rien sa saveur Ainsi que le montre Laurence Dahan Gaida lt R crivant les savoirs qu elle mobilise la fiction les met en crise en m me temps que le r cit qui leur sert de support Il existe donc chez Perec le d sir de raconter la science non plus seulement les d boires d un ethnologue obtus mais le r cit des tapes d une grande d couverte Avec Dinteville et Wehsal Perec met en sc ne la science Il s agit pour lui de nous relater les efforts que ces chimistes ont d velopp s pour r aliser la synth se du diamant pour l un celle du p trole pour l autre On sait que les sciences qui ont essay de p n trer la composition des l ments ne l ont pas fait d une fa on gratuite Un arri re plan psychologique m
233. doivent n cessairement appara tre et s incorporer dans son TR Au sujet de l intertextualit g n ralis e chez Perec voir R gine Robin Le Deuil de l origine une langue en trop la langue en moins Saint Denis Presses Universitaires de Vincennes 1993 p 183 Mireille Ribi re Parcours Perec op cit conf rence de Perec Warwick intitul e Pouvoirs et limites du romancier contemporain pp 31 40 2 bid pp 31 40 21 Thid pp 31 40 Franz Kafka Premier Chagrin in La Colonie P nitentiaire et autres r cits op cit pp 53 57 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit Duo wem wn e 275 propre texte C est dans le Post scriptum de La Vie mode d emploi qu il nous livre le nom de la trentaine d auteurs qu il a utilis s au nombre desquels figure bien s r Kafka Au sujet de cette insertion que nous avons examin e dans le d tail Marcel B nabou pour expliciter les techniques que Perec a employ es nous rappelle que ce dernier a t cin aste d o sa ma trise de proc d s tels que le collage et le montage Il rappelle encore que ces insertions se rattachent parfaitement l art du puzzle Mais de la m me fa on qu une pi ce de puzzle se fond dans l ensemble du tableau qu elle d finit elle exhibe aussi une notoire distinction avec les pi ces voisines et l ensemble du tableau Ce r le contradictoire assum par la pi ce rapport e d finit tr s bien les
234. double aspect de construction ludique et de son pendant imm diat la subversion Le savoir qui se g n re lui m me partir d une matrice originelle pourra se manifester en premier avec le jeu formel du lipogramme 3 1 LUDISME FORMEL LE LIPOGRAMME Ce sont les consid rations de Perec sur le lipogramme qui nous aident d finir la probl matique des constructions de lettres de syllabes ou de mots Peut on concevoir un savoir fond sur la combinatoire des lettres C est toujours une conception litaire de la litt rature qui pr domine pour contraindre les subtilit s langagi res tre rabaiss es au niveau des curiosit s litt raires Les artifices syst matiques les mani rismes formels ce qui en derni re analyse constitue Rabelais Sterne Roussel sont rel gu s dans ces registres d asiles de fous litt raires que sont les Curiosit s gt En effet la cr ation litt raire ne doit traduire que des aspirations l id alit qui font partie de l h ritage Georges Perec Histoire du lipogramme in Collectif Qulipo La Litt rature potentielle Paris Gallimard 1973 p 75 151 gr co chr tien Loin donc des jeux de lettres et de mots qui n apportent rien tout au moins premi re vue au potentiel r flexif de l humanit Il est vident que ce qui vaut pour tout le ludisme formel s appliquera particuli rement au lipogramme dont nous savons ce qu en a fait Perec De
235. dr e Chauvin le jeu sur le savoir l histoire et l Histoire ce qui apportera de l eau au moulin de nos conclusions Ainsi en 1982 Perec fonde tous ses voeux sur Queneau et son oeuvre d o le titre amp Andr e Chauvin Perec Queneau Roussel le chiffre du r cit communication donn e au C LE F Qu bec le 10 avril 1994 sous l gide de l atelier dirig par Pierre Siguret intitul Alitt rature pataphysique et Oulipo ou comment sortir du champ litt raire eneen ES TER e se a 169 g n ral de la pochade Cocktail Queneau Confirmant joyeusement son appartenance l Oulipo il annonce ainsi les habituelles libations Nous pr f rons A l OuliPo Aux quenelles de Cocteau Les cocktails de Queneau D tourner le chiasme vers l humour n est pas le moindre des talents de Perec il suffit d admettre qu il permet un change conomique au caf plut t que la rime plate Queneau Cocteau qui certes existe nous pr f rons changer les queneau quenelles contre les Cocteau cocktails De plus Perec ajoute pour brouiller les cartes cette note infrapaginale On appelle cocktail Queneau un m lange de bitter san pellegrino et de schweppes C est ce que l on peut consid rer comme une tentative explicite d accr ditationdes usages de l Oulipo en r union et d associer ainsi au m lange un change valorisant Suite cette distribution des invitations Perec dresse alors la
236. e l clatement du processus de signification que nous retrouvons dans la formation et l attribution du nom La Bible nous relate l histoire d un accouchement Tamar enceinte de Juda son beau p re qui l a prise pour une prostitu e exer ant au bord de la route met au monde deux jumeaux qui essaient tour de r le de na tre le premier Cette opposition illustre encore la rivalit des doubles qui se combattent mutuellement pour d cider de celui qui passera le premier de l int rieur vers l ext rieur Cette querelle interne provoque chez la malheureuse accouch e une rupture p rin ale et na t finalement en premier Peretz P re selon la traduction de J rusalem puis son fr re nomm Z rah Belle pop e caverneuse et intra ut rine qui nous renvoie au double jeu de l int rieur et de l ext rieur comme structure du monde Ce savoir ludique s amplifie encore gr ce la dialectique des signifiants signifi s sur laquelle se fonde Perec en nous proposant d autres signifi s au nom le poivre et le bretzel puis d autres encore en embrayant sur de nouvelles graphies possibles du signifiant Sans aller comme le fait volontiers Marcel B nabou jusqu faire rimer Appenzzell avec Bretzel ce dernier rappelle encore ou au yeux de Perec Bretzel n est qu un diminutif TT Voir l article de Bernard Magn Les sutures dans W ou le souvenir d enfance in Textuel Cahiers Georges Perec n 2
237. e hwitz en collaboration avec Mireille Nathan Murat Annie Radzynski Paris Bibliographie 1990 173 p HAZARD PAUL ri l ien e nne 1 1715 Paris Gallimard 1968 429 p HEIDEGGER Martin Questions I et II Paris Gallimard 1968 378 p HERSCH Jeanne et POIRIER Ren Entretiens sur le temps Paris Mouton 1967 351 p HILLENAAR Henk et VAN DER STARRE Evert Le Roman le r cit et le savoir Groningen C R I N Institut de Langues Romanes 1986 225 p HIRSCHBERGER Johannes Abr g d histoire de la philosophie occidentale adaptation fran aise de Philibert Secretan Fribourg ditions Universitaires Fribourg 1990 266 p HOEK Leo H La Litt rature et ses doubles Amsterdam C R I N 13 1985 184 p HYVRARD Jeanne Le Corps d funt de la com die Trait d conomie politique Paris Seuil 1982 152 p IMBERT Patrick L Objectivit de la presse le A pouvoir en otage Montr al Hurtubise HMH 1989 211 p IMBERT Patrick Construction et Discours Montr al Ciadest 1991 56 p JAKOBSON Roman Huit Questions de po tique Paris Seuil 1977 188 p JAKOBSON Roman Essais de linguistique g n rale Paris ditions de Minuit 1963 255 p JARRY Alfred Le Surm le suivi de Gestes et opinions du Docteur _Faustroll Pataphysicien Paris Les Humano des Associ s 1979 192 p 438 KERBRAT ORECCHIONI Catherine La Connotation Lyon Presses Universitaires de Lyon 1977 256 p KERB
238. e volution constitue la premi re d marche vers la connaissance c est dire vers l identit de la personne et vers celle du monde qu elle conditionne selon des processus d adh sion de r pulsion et de fusion C est pour chapper l imaginaire que le corps de l crivain se constitue comme lettre Aussi paradoxale que soit cette affirmation on ne peut dissocier le corps de l crivain des lettres qu il forme sur le papier ou aujourd hui sur l cran de son ordinateur Se rappeler ces mots de Roland Barthes Mon corps n est libre de tout Voir Philippe Lejeune La M moire et _l oblique op cit voir aussi Anne Roche L auto bio graphie gt in Cahiers Georges Perec n 1 op it p 65 voir encore Anne Roche Souwenir d enfance in Magazine litt raire Paris mars 1993 n 193 p 27 28 Philippe Lejeune La M moire et l oblique op it La lettre h bra que p 210 Voir Philippe Lejeune ibid p 222 La forme de la lettre et p 224 Le nom de la lettre Voir Marcel B nabou Perec et la jud it in Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 19 348 imaginaire que lorsqu il retrouve son espace de travail Le geste antique du sculpteur gyptien gravant la cartouche pharaonique sur le calcaire corallien ou celui du scribe h breu enregistrant le psaume sous la dict e du chant davidique revient celui du scrivain livr l espace blanc et immense de la page comme
239. e d emploi le travail sera encore grandement facilit par un usage ludique du Cahier des charges de la Vie mode d emploi Tous ces processus lectoraux qu un auteur comme Perec peut g n rer notamment en utilisant des index des rep res des rappels produisent un d cloisonnement du texte et appellent la multitude des constructions lectorales Cet appareillage peut notamment servir reconstruire le d nouement d une 5 Georges Perec La Vie mode d emploi op it pp 677 690 188 bid pp 691 694 7 Stendhal La Chartreuse de Parme op cit TT Hans Hartje Bernard Magn et Jacques Neefs Cahier des charges de La Vie mode d emploi de Georges Perec Paris CNRS ditions et Zulma 1993 271 nouvelle ou d un roman D voiler alors la fin d une nouvelle d un roman ou d un film ne constituerait aucunement une transgression de la pratique romanesque selon une conception institutionnelle de la litt rature ou du cin matographe mais justement une ouverture de plus faite l imaginaire collectif Ce sont les conclusions auxquelles aboutit par exemple St phane Santerres Sarkany lorsqu il crit Or plus le monde a acc s aux lettres plus il est assur contre les avatars possibles d une civilisation hyperm canis e L impr gnation imaginaire de la vie que d j les surr alistes avaient souhait e ne para t plus Impossible TT Nombreux sont donc les processus qu un imaginaire collectif lib
240. e et aussi souvenir sinistre du slogan d un c l bre opticien pr cisant que son nom malgr certaines consonances n avait aucun rapport avec un nom juif Un second souvenir plus court appara t comme trace de p dagogie bien connue Je me souviens de Malet et Isaac Ce dernier est un souvenir titre de Je me souviens tandis que le premier tir des lt Consid rations sur les lunettes nous renvoie l affiche et au nom propre Il ne semble pas cr er d allusion directe au recueil des souvenirs Et ce dernier Je me souviens qui fut glan par R gine Robin propos de la famille am ricaine de Perec et qui vaut comme ultime d calage Il y a une chose qui m avait beaucoup choqu en elle je me souviens C est qu am ricaine elle ne connaissait pas Charlie Parker tout en croyant conna tre aimer le jazz repr sent e pour elle par un certain Harry James ou Glenn Miller je ne sais plus Les souvenirs du jazz tournent autour des musiciens 86 Thid p 248 Georges Perec Penser Classer op it Consid rations sur les lunettes p 148 Ibid Je me souviens de Malet et Isaac p 73 R gine Robin Le Deuil de l origi ne lan n la langue en moins Saint Denis Presses Universitaires de Vincennes 1993 p 215 asa 330 et caract risent la culture am ricaine mais surtout les souvenirs de Perec renferm s dans la myst rieuse bo te noire du texte fa onnent une tonnant
241. e passer de la page au page et donc se coucher par crit La subversion commence donc par l crit les espaces sont interchangeables Longtemps je me suis couch par crit sign Parcel Mroust La seconde subversion est celle des lex mes se coucher aller au lit et l instar de Proust le mod le se coucher consigner par crit tous ses faits et gestes les plus quotidiens Nouvelle subversion celle du nom de l auteur subtilement d clin selon le mod le propos par le Boris Vian de L cume des Jours celui de son c l bre Jean Sol Partre Cette subversion est encore celle de l intertextualit partir de l incipit de la Recherche Longtemps je me suis couch de bonne heure Parfois peine ma bougie teinte mes yeux se fermaient si vite que je n avais pas le temps de me dire Je m endors Ce qui donne aussi lieu une r interpr tation autrement labor e par 7 Georges Perec Esp ces d espaces op cit p 25 s Ibid p 25 Boris Vian L cume des Jours Paris Gallimard 1956 Voir Martine Schneider Les Choses Esp ces d espaces Georges Perec op cit p 69 Voir aussi Marie Miguet Sentiments filiaux d un pr tendu parricide Perec in Po tique n 54 avril 1983 pp 135 148 T Marcel Proust la recherche du temps perdu I Du c t de chez Swann Paris Gallimard 1954 p 5 262 Perec D s que tu fermes les yeux l ave
242. e saura regrouper les m t ores climat riques pour en valuer les effets Les critiques qui les ont recherch s dans le texte de Perec ont reconnu une certaine r sistance ce type d op ration Ainsi Anne Roche crit par exemple Si on lit Je me souviens en tentant d y rep rer les m canismes d associations plusieurs difficult s se font jour Elle ajoute galement en note que tel n est pas son propos puisqu en effet elle essaie dans son tude de rattacher le recueil de Perec au genre autobiographique Un classement th matique serait videment possible il est sans grande utilit dans la perspective de cette tude Parmi les difficult s qu Anne Roche analyse au sujet de la classification des entr es elle signale la m connaissance de l ordre de composition l inutilit de l index pour rep rer les suites logiques des occurrences et encore ses carences signaler certains 7 Anne Roche lt L auto bio graphie in collectif Cahi rges Perec n 1 Colloque de Ceri Paris P O L 1985 p 70 s bid note n 23 p 79 299 encha nements Ainsi elle insiste sur la quasi impossibilit de rep rer des associations autres que discontinues ce qu elle attribue fort pertinemment au fait que ni le mode d mergence des souvenirs ni leur mati re ne sont explicites Ce sont videment ces discontinuit s qui nous int ressent car elles r v lent la morphologie du recueil Ces discon
243. e Flaubert Madame Bovary op cit ch XII pp 215 216 D Teatan an saap gemg 232 Les textes choisis ont t reconnus comme parall les puisqu une isotopie unique commande les figures lex matiques celles du voyage mais le voyage est pris ici au sens romantique comme double rupture s mantique d une part avec le pass des personnages et d autre part comme d paysement provoqu par l errance Les vertus curatives du voyage ne sont plus d montrer reste d terminer cependant l effet de l isotopie sur le texte Dans cette analyse comparative suscit e par l intertextualit Perec Flaubert nous pouvons relever une s rie de traits analogiques qui assurent la coh rence intertextuelle Ces traits analogiques pourront tre identifi s comme connecteurs intertextuels Nous pouvons fonder l analyse sur les indications de Perec lui m me et sur l affirmation de Laurent Jenny qui crit que l intertextualit d signe le travail de transformation et d assimilation de plusieurs textes op r s par un texte centreur qui garde le leadership du sens Dans le cas qui nous pr occupe c est le texte premier savoir celui de Flaubert qui conditionne a posteriori la r ception du texte de Perec d o entre autres choses la notion de plagiaire par anticipation si ch re aux oulipiens Le choix volontaire convoque les effets qui produisent structures et images Nous relevons trois analogies tablir entre l
244. e culture populaire qui d joue toutes les figures les plus st r otyp es jusqu celle de sa propre culture comme cette cousine am ricaine de Perec Le recueil de Perec constitue une d monstration de cette supr matie de la m moire qui d termine cette tonnante culture populaire Il existe une ad quation entre culture et id ologie Dans un but pol mique Sartre en 1956 lors d un colloque Venise proclamait cette identit Nous en arrivons ici au fond du probl me culturel c est que les cultures sont aussi des id ologies Nous ne nous rendons pas compte que nous vivons en p riode d id ologie bourgeoise que nos id es d une mani re ou d une autre sont conditionn es par l id ologie bourgeoise exactement comme les id es des Sovi tiques sont conditionn es par l id ologie sovi tique Or ce qui constitue une culture ce sont aussi bien des modes de pens es que des modes d action d o cette d finition de la culture donn e par l anthropologue am ricain William A Haviland A set of rules or standards shared by members of a society that when acted upon by the members produce behavior that falls within a range the members consider proper and acceptable Toute pratique id ologique se retrouve tant au niveau de l action qu celui de la pens e Ainsi que l a montr tr s clairement Marcel Mauss ces pratiques Michel Contat et Michel Rybalka Les crits de Sartre Paris Ga
245. e d changes langagiers correspond clairement l volution de la di g se confinant l exemple de l anti conte abolition du conte Le h ros se suicide au lieu de conna tre la r compense et l l vation Voil qui constitue au sein de l analyse fonctionnelle l inversion de la r compense suivant le sch ma punition vs r compense et nous permet de cat goriser cette histoire comme un anti conte Dans ces conditions elle sort de l univers kafka en puisque sa transformation textuelle Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 72 TT Voir Algirdas Julien Greimas S mantique Structurale op cit pp 193 196 259 narrative actantielle et s miotique lui assigne un cadre neuf o se lit un renouvellement di g tique l issue de ce parcours il convient d tablir un proc s de l int gration intertextuelle Perec Kafka dans La Vie mode d emploi Nous pourrons formuler sur quatre remarques principales sur ce cas d intertextualit int grative 1 2 3 4 L int gration du texte de Kafka dans le texte de Perec n est pas homog ne ni dans le cours du programme narratif voir d roulement narratif ni dans les modes de son int gration variantes modales intrins ques ou extrins ques Il se produit ainsi que l on a pu le remarquer une d multiplication des instances narratives et un bouleversement de leur hi rarchie On note des interf rences entre les univers di
246. e de la vie quotidienne c est dire TT Voir Georges Perec Un Homme qui dort op cit pp 20 22 24 26 et 30 8 Voir ibid p 24 TT Michel Maffesoli Au creux des apparences Pour une thique de l esth tique op cit p 94 0 Voir ibid p 94 142 la constante r p tition de gestes anodins sans cesse accomplis dans la quotidiennet Il existe une tendance constante passer du per u v cu oubli un enregistrement global de l anodin Il semblerait que le jeu traditionnel des oppositions sensationnel insignifiant tel que Perec l utilise par exemple dans Esp ces d espaces o il fait appara tre King Kong au dessus des toits des immeubles se manifeste dans le d calage de ses observations Toutes ces oppositions se dissolvent dans la confrontation Que ce jeu puisse se circonvenir en des oppositions nouvelles c est aussi ce que Perec montrera Dans sa Tentative d puisement d un lieu parisien nous avons suivi le proc s d un texte provoqu par l examen du r el Perec est pass de la d couverte la saturation Ce qui est le plus remarquable dans ce texte c est bien l volution de l auteur qui dans cette courte exp rience parvient non pas puiser lt le r el mais puiser quelques uns des moyens que nous avons pour puiser les comptes rendus sur la r alit L puisement du r el d termine cette poursuite harassante de l insignifiant Cette chasse l insig
247. e du cycle de Dune Il invente le concept du golah c est dire un homme recompos une seconde fois de toutes pi ces bien que mort partir de quelques cellules pith liales Cet homme recompos est en tout point comparable l original au physique et au moral selon l expression consacr e La Bible traduction de J rusalem op it p 790 psaume 139 16 Gershom G Scholem La Kabbale et sa symbolique op cit p 181 7 John Ronald Reuel Tolkien Le Seigneur des Anneaux Paris Christian Bourgois 1972 Frank Herbert Dune Paris Robert Laffont 1970 1972 397 Il nous faut donc analyser la m taphore et en refaire une application la destin e de l immigrant selon ce qu a fait Perec lui m me Le Golem est form du sol il ne parle pas mais comprend ce qu on lui dit on le consacre aux t ches domestiques sur son front il poss de la v rit inscrite si une lettre est effac e il dispara t non sans ventuellement nuire son cr ateur et possesseur Bien que probablement Perec n ait pas mesur toutes ces implications ce qui certainement le comblerait d aise l immigrant la lettre coll e sur l paule voque la destin e du Golem Comme la cr ation rabbinique l immigrant vient de terres lointaines s il parle personne ne le comprend il est vou aux t ches subalternes et il porte une lettre qui peut le condamner au n ant Pourtant beaucoup de critiques n ont pas h
248. e et litt raire L on Burp et Marcel Gotlib suivi de Consid rations nouvelles sur la vie et l oeuvre de Romuald Saint Sohaint Pr sentation de la Beauce Notre Dame de Chartres Roussel et Venise Esquisse d une g ographie m lancolique Les cinq textes ont t r unis dans un recueil intitul Cantatrix Soprani a L et autres crits scientifiques o ils constituent le meilleur chantillonnage qui soient des travaux ludico scientifiques de Perec Ainsi que l indique dans sa pr face Marcel B nabou Perec d couvre son inali nable vocation scientartistique en se faisant tour tour neurophysiologiste entomologiste hagiographe historien et philologue Le premier de ces textes Cantatrix sopranica L connut une destin e originale puisqu il fut remis en cadeau dans un recueil de travaux offert en 1979 Marthe Bonvallet l occasion de son d part la retraite par l ensemble de ses collaborateurs du laboratoire de Georges Perec Distribution spatio temporelle de Coscinoscera Victoria Coscinoscera tigrata carpenteri Coscinoscera punctata Barton et Coscinoscera nigrostriata d Iputupi in Cantatrix Soprani a L et autres crits scientifiques op cit p 35 52 concernant la premi re parution du texte voir aux pages 117 118 7 Georges Perec Une Amiti scientifique et litt raire L on Burp et Marcel Gotlib suivi de Consid rations nouvelles sur la vie et l oeuvre de Romuald Saint
249. e exhaustive de projets irr alisables Ils recoupent cette utopie dont Perec disait Toutes les utopies sont d primantes parce qu elles ne laissent pas de place au hasard la diff rence aux divers Tout a t mis en ordre et l ordre r gne Derri re toute utopie il y a toujours un grand dessein taxinomique une place pour chaque chose et chaque chose a sa place Cet aveu manifeste son amertume dans ces deux textes que nous examinons L ordre ne fait plus place une harmonie hasardeuse Nous remarquons donc ces deux caract ristiques de Utopie selon Perec D une part une mise en ordre du savoir un dessein taxinomique et d autre part une num ration exhaustive et un classement Comme Henri Desroches l affirme Des textes se r ditent des nomenclatures se dessinent des typologies ou m me des mod les s esquissent des r habilitations sont op r es l utopie prend une place 1 Touri Lotman La Structure du texte artistique op cit p 341 5 Georges Perec Penser Classer op it R Utopies p 156 183 notoire non seulement dans la sociologie de la connaissance r trospective mais aussi dans celle de l action prospective gt f Nous retrouvons dans ces affirmations aussi bien celles de Perec que celles de Desroches le d sir de constituer des sommes des nomenclatures Taxinomie des possibles l utopie devient le non lieu du lieu Utopie selon Thomas More signifie
250. e jazz Mowgli Jospin entr es 209 et 343 Ce peut tre encore un marqueur de couleur le jaune du pain apr s la guerre et le jaune symbolique des 56 Ibid entr e n 475 p 115 7 Ibid entr e n 476 p 115 Voir Anne Roche lt L auto bio graphie in collectif Cahiers Georges Perec n 1 Colloque de Cerisy op cit p 70 Elle nous signale aussi les bin mes 96 97 en jeux de mots et 303 304 en langage Voir aussi le train bin mique du m tro en 477 478 juste la fin du recueil p 116 1E Georges Perec Je me souviens op it entr es n 134 et n 183 p 42 et p 52 Voir Anne Roche ibid p 71 TT Georges Perec ibid entr es n 255 et n 276 p 68 et p 73 Voir Anne Roche ibid p 70 ZE Georges Perec ibid entr es n 192 et n 316 p 54 et p 82 Voir aussi Andr e Chauvin Jeux de m moire et histoires de mots dans Je me souviens de Georges Perec Les cahiers du CRELEF op cit p 68 Georges Perec ibid entr es n 209 et n 343 p 58 et p 87 318 cocus entr es 14 et 360 Il existe videmment une infinit de configurations associatives par couple probl matique que Warren F Motte a analys sous l angle de la synth se historique It also serves to remind the reader that memory unlike history may reserve a place for both Ray Ventura s big band and La Bande Baader On ne sait dans le cas de Warren F Motte s il a compos cette asso
251. e l identification d un objet large et massif conduisent le processus auto r flexif du doute Perec est amen une forme de dogmatisme il faut trancher Un 96 plein peut tre ai je seulement aujourd hui d couvert une vocation Contr leur de lignes la R A T P La fonction du st r otype vocation est de manifester le doute Ce sont les tats successifs de l interrogation il rel ve de la difficult d interpr ter l insignifiant Comme pour la maquette d architecte Perec n aime pas se maintenir sur un terrain plus ou moins glissant ou alors ce sera par pure affectation Mais il enregistre une s rie d affirmations qui cautionnent alors les capacit s illimit es de l observateur deus ex machina de la th atralisation du site observatoire observ Je regarde d un oeil torve le passage des oiseaux des tres et des v hicules La vision englobante et g n ralisante de l observateur omnipotent le conduit un constat non d nu d une certaine irritation 9 Thid p 38 122 celle peut tre du potentat exc d de l agitation de ses cr atures Face l uniformit d une activit g n ralis e Perec recherche alors la diff rence Ce sera alors la comparaison quoi peut aboutir la comparaison des faits des tats des tres Peut elle cautionner les transformations manifestes de l existence qui op rent toute l originalit de la vie Apr s bien des heures pass es
252. e le jargon cin matographique John Pedersen par exemple qui crit C est en cameraman que Georges Perec ouvre son premier roman Les Choses L oeil glisserait et dans ce mouvement d un travelling accompli le lecteur voit s ouvrir devant lui un univers qui semble reproduire fid lement avec nombre de d tails le monde des ann es 60 saisi par un regard impassible qui sans se presser p n tre partout enregistrant placards gravures moquettes rideaux meubles lampes bibelots de toutes sortes Il faut revenir au champ s mique de d oeil qui commande cette interpr tation L oeil d abord glisserait sur la moquette grise d un long corridor haut et troit L oeil et non les deux yeux de l tre humain normalement constitu car ce sont les cam ras qui John Pedersen Perec ou les textes crois s Copenhague tudes Romanes de l Universit de Copenhague 1985 p 37 Georges Perec Les Choses op cit p 9 225 poss dent un oeil m taphore de l objectif technique qui filtre les rayons lumineux et les transmet la pellicule Cet oeil de la cam ra glisse la moquette se pr te au mouvement ou plut t glisserait mais nous ne traitons pas de l aspect temporel Le mot glisser implique un savoir faire et une jouissance savoir faire et jouissance de la caresse amoureuse Ce mot d clenche alors un autre r flexe d analyse celui de la comparaison entre l objectivit
253. e le menu o les plus grandes extrapolations voire les plus grandes esp rances sont permises Ainsi avons nous dans La Vie mode d emploi ce menu rouge compos par Gertrude la robuste cuisini re bourguignonne de Madame Moreau en l honneur du vice ministre du commerce ext rieur de l Union Sovi tique Voici ce menu offert un dignitaire de l ex pays au drapeau rouge Oeufs de saumon Bortsch glac Timbale d Ecrevisses Filet de Boeuf Carpaccio Salade de V rone Edam Etuv Salade aux Trois Fruits Rouges Charlotte aux Cassis 5 Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 chapitre XC p 552 553 197 Vodka au piment Bouzy rouge Le menu rouge ne constitue bien s r qu une variante amusante de la th matique culinaire qui a pu passionner Perec En effet les connaissances culinaires du gastronome n ont pour gales que celles inaccoutum es du chef de cuisine qui se doit de d concerter son juge par ses pratiques professionnelles et par l imagination d bordante de ses menus tel ce menu rouge de Gertrude La fiction du savoir passe par une tonnante combinatoire des composantes en cuisine Aux extr mes possibilit s de la cuisine viennent s adjoindre celles et non des moindres du langage sp cialis qu elle suscite dans l ensemble des publications techniques guides de cuisine guides touristiques d peignant des restaurants et des sp cialit s gastronomiques livres et r
254. e par la lettre et la signification par une philosophie de l existentiel La devise socratique dirige notre pens e vers deux probl matiques qui sont concomittantes d une part celle de la connaissance de par ses vertus didactiques et Paul Verlaine Po mes saturniens Paris Messein diteur 1906 p 107 Philippe Lejeune La M moire et l oblique Georges Perec autobiographe Paris P O L 1991 chapitre I Dire l indicible p 15 E ET amaaa 343 d autre part celle du processus identitaire par sa r troaction sur l individu En effet la connaissance primordiale semble tre dans des soci t s hyper individualistes comme les n tres celle de la personne unique originale irrempla able Mieux encore il semblerait qu il faille conna tre sa propre personnalit selon la devise socratique pour d couvrir la totalit de l univers Cette connaissance ne pourra s acqu rir que dans un mouvement cognitif et m taphorique ascendant de type pascalien le microcosme et le macrocosme venant se confondre Pour comprendre ce mouvement il faut se doter de l appareillage intellectuel suffisant On ne peut en effet accorder de dimension pist mologique la r alit sans s inqui ter de l outil cognitif savoir la personnalit du chercheur qu il soit un scientifique ou non car il devient lui m me l objet de sa propre qu te tre et signe de l tre sont li s au processus de questionnem
255. e parcours remarquable est celui de la marche car on marche beaucoup dans ces romans Chez Flaubert on peut trouver le parcours suivant On marchait au pas cause des grandes dalles 5 tandis que chez Perec nous avons Ils marchaient dans des for ts sans bornes ou encore ls marchaient sous une pluie battante respirant l odeur des herbes mouill es Aux lex mes organis s de la lenteur justifi e et de la retenue oblig e chez Flaubert Perec oppose ceux de la nature envahissante herbes satur es d humidit et for ts illimit es confirmant la vitalit des paysages 7 Georges Perec Les Choses op cit p 113 bd p 113 s Gustave Flaubert Madame Bovary op cit p 215 Georges Perec Les Choses op cit p 113 S Ibid p 113 eh 235 travers s Ce nouvel exemple de d calage dans la s manticit intertextuelle confirme l analogie par les rapprochements Un dernier exemple de l organisation parall le de ces parcours figuratifs des lex mes est constitu par tous ceux qui se rattachent aux figures lex matiques des fleurs En effet chez Flaubert nous lisons Il y avait par terre des bouquets de fleurs que vous offraient des femmes habill es en corset rouge Perec nous rapporte cela sur trois parcours Le monde leur appartenait avec ses provinces couvertes de bl ses campagnes fleuries Ils d couvraient d une hauteur des vallons couverts de fleurs des cha
256. e rel ve ici le caract re fabul des deux premiers souvenirs on assiste la gen se d une identit individuelle qui passe par la lettre Georges Perec nous livre ainsi le fruit de son vocation du pass Le premier souvenir aurait pour cadre l arri re boutique de ma grand m re J ai trois ans Je suis assis au centre de la pi ce au milieu des Journaux yiddish parpill s Ce cercle de la famille m entoure compl tement cette sensation d encerclement ne s accompagne pour moi d aucun sentiment d crasement ou de menace au contraire elle est protection chaleureuse amour toute la famille est l r unie autour de Claude Burgelin Georges Perec Paris Seuil Les contemporains 1988 p 80 Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit p 22 Georges Perec ibid p 22 Philippe Lejeune La M moire et l oblique op cit p 210 350 l enfant qui vient de na tre n ai je pourtant pas dit il y a un instant que j avais trois ans comme un rempart infranchissable Tout le monde s extasie devant le fait que j ai d sign une lettre h bra que en l identifiant le signe aurait eu la forme d un carr ouvert son angle inf rieur gauche quelque chose comme et son nom aurait t gammeth ou gammel La sc ne tout enti re par son th me sa douceur sa lumi re ressemble pour moi un tableau peut tre de Rembrandt ou peut tre invent qui se nommerait J
257. e soon sense that this description in the conditional tense is neither a Balzacian generation of setting nor a Robbe Grilletian display of objective reality The description is humanized brought to life by phrases which idealize the setting un peu triste 12 elle serait havre de paix terre de bonheur 13 La vie l serait facile serait simple 15 Il serait agr able de venir s y asseoir 15 Ils appelleraient cet quilibre bonheur 16 Julia Kristeva S m iotik Recherch Op cit p 192 Georges Perec Esp ces d espaces Paris ditions Galil e 1974 pp 49 51 Paul Schwartz Georges Perec traces of his passage op cit p 6 228 Au del de ce caract re r aliste Schwartz nous permet de d couvrir un nouveau trait important de cette description du premier chapitre Elle op re galement par conjonction Les signifiants appellent aussi d autres signifiants par contigu t s mique des signifi s Ainsi quand nous lisons on viendrait livrer chaque quinzaine le vin l huile le sucre nous pouvons nous poser cette question qu appelle donc cette num ration d aliments triviaux Par le libre jeu lex matique des connecteurs on pense la cave au cellier la cuisine et surtout la cuisine Nous sommes plong s dans un appartement parisien et l ensemble vide appel par les lex mes vin huile sucre correspond en effet celui de la cuisine dl y
258. e toi Quel homme est inform dans quel ch teau de cartes Quel fil Quelle loi Les bavardages confus de la doxa d routent l homme qui dort Il ne supporte plus les explications qui l entourent et le submergent La doxa a pour but de supprimer l alt rit la diff rence son objectif est de dominer et d effacer jusqu au pouvoir de la r flexion individuelle Elle provoque cette r action de Barthes exprim e par cette tr s Georges Perec Th tre I op cit La Poche Parmentier p 78 Jean Paul Sartre La Naus e Paris Gallimard 1938 p 167 168 Georges Perec Un Homme qui dort Paris Deno l 1967 p 138 e Ibid p 32 207 belle phrase Je suis sans cesse l coute de ce dont je suis exclu On comprend la r action de Perec contre la doxa tablissant des modes de pens es qui tout en s appuyant sur la pratique du langage viennent la d jouer le lipogramme la traduction homophonique les jeux de l utopie la construction combinatoire Il faut vivre l alt rit sans jamais succomber ni l al atoire ni l arbitraire ce qui serait construire une nouvelle scolastique sur les ruines de l ancienne En refusant les savoirs tout pr par s bien tablis garantis par leurs performances ou des autorit s irr futables Perec recombine l infini des possibilit s du langage C est ce qu il exprime en statuant par exemple sur l art et la mani re de ranger se
259. e ton pied droit de ton avant bras droit d une partie de ton ventre et qui est fusion osmose dilution et celui de ton corps avec lui m me l o ta chair rencontre ta chair l o le pied gauche passe sur le pied droit l o les genoux se rencontrent g weer dd 346 l o ton coude affronte ton estomac ceux ci sont aigus chauds ou froids ou chauds et froids Trois instances recomposent cet expos dans son aspect dialectique l exhaustivit la corporalit et la m moire active Mais toutes les trois se rattachent au corps comme expression de l identit et partant la m moire qui est la reconstitution de la trace corporelle dans l coulement du temps Il n entre pas dans notre propos d analyser ici la fonction la formation et le r le de la m moire Bornons nous donc simplement lier m moire et souvenir comme possibilit d expression de cette facult Il nous faut tout naturellement reconna tre le souvenir pour l attribuer au pass Ce probl me du souvenir comme l ment constitutif de la personne et de la culture est un de ceux qui ont obs d Perec Parmi tous ses ouvrages qui r v lent cet int r t signalons bien s r Je me souviens dont nous venons de parler Un Homme qui dort que nous venons de citer et surtout W ou le souvenir d enfance C est particuli rement ce dernier ouvrage qui retient notre attention il a d j captiv bien des critiques surtout des sp ciali
260. ean Fran ois Chassay Le Jeu des co ncidences dans La Vie mode d emploi de Georges Perec op cit p 120 52 intellectuel mais encore plus chez Perec au niveau di g tique Dans La Vie mode d emploi rien moins que six biblioth ques sont mentionn es pour les r les qu elles jouent dans le r cit que l index nous livre ainsi Bibliotheca Lusitania de Diego Barbosa Machado 226 Biblioth que centrale du 18 arrondissement 555 Biblioth que de l institut p dagogique 307 Biblioth que nationale 184 Biblioth que de l Op ra 299 301 Biblioth que Sainte Genevi ve 363 Conform ment aux chelles que nous avons discern es chez Perec la biblioth que le livre le lecteur le mot sont des d clencheurs de l aventure Ce sont avant tout les meilleurs stimulants du savant qui r agit particuli rement la provocation du mot du concept qui animent en lui la passion du savoir On ne pourrait passer sous silence dans la grande diversit des sciences utilis es par Perec tout le domaine du paranormal les sciences du spiritisme de l occultisme sciences de l irrationnel qui intriguent la soci t contemporaine Perec a su avec une grande rigueur r pondre aux attentes d une lecture qui chercherait reconna tre dans La Vie mode d emploi les grands myst res questionn s dans cette fin de si cle Au sein de cet arsenal complet des pratiques magiques et myst rieuses nous trouvons videmment
261. ec Je suis n op cit De la difficult qu il y a imaginer une cit id ale in La Quinzaine litt raire n 353 1 ao t 1981 p 38 R f rence donn e in Georges Perec Penser Classer op it p 180 179 En plus d voquer le domaine de l utopie ces deux textes t moignent des obsessions personnelles de Perec Le texte sur la Cit id ale a t republi en 1985 dans Penser Classer Se signalent d embl e les similitudes remarquables entre les diverses pr occupations de Perec cette poque de sa vie Ce sont les derniers textes qu il va publier avant sa mort Il importe donc de comparer ces deux textes et de voir comment ils en viennent transformer nos conceptions ou pour reprendre les paroles d introduction de Maurice Olender pour Penser Classer comment Georges n a cess de bouleverser les conventions du sensible et les hi rarchies tablies Nous remarquons en premier que le texte Quelques unes des choses comporte un total de 37 entr es Perec expliquant qu il s est lui m me volontairement arr t ce chiffre Faire la connaissance de Vladimir Nabokov 37 etc etc Il y en a certainement beaucoup d autres Je m arr te volontairement 3711 Quant la Cit id ale nous avons compt 26 voeux et souhaits Si l on compare ces deux chiffres et l on sait toute l importance que les chiffres rev tent chez Perec on Ibid p 129 131 7 Ibid pa
262. ec est celui de la causalit dans ce je me souviens il annonce ceci Je me souviens de plusieurs athl tes Houvion Thiam Papa Gallo Sainte Rose Jazy Piquemal Pujazon et aussi de Valeri Brummell qui eut un terrible accident de moto et de Ter Ovanessian 2 Nous avons affaire une causalit invers e tout se passe comme si pour Perec Valeri Brummell devenait un champion des accidents de moto La magie de l athl te ne le prot ge pas des accidents ou bien encore elle lui permet de battre des records inattendus Nous assistons un d doublement dialectique de la m moire qui rend compte d un monde manich en l o les bons athl tes sont victimes du mal in vitable Perec pourra toutefois utiliser ses propres souvenirs comme un rem de la frustration de ce monde double De quoi s agit il De ce souvenir largement parodique Je me souviens de Ivan Labibine Osouzoff et de Yamamoto Kakapot et de Harry Cover Nous nous int ressons particuli rement au premier personnage dont le nom ne 0 Thid entr e n 163 p 48 D Tbid entr e n 450 p 110 Sur la causalit magique voir Marcel Mauss iologie er Anthropologie Paris Presses Universitaires de France 1950 Esquisse d une th orie g n rale de la magie p 3 141 7 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 311 p 81 314 fait que transcrire une activit commerciale banale vendre de la bi re aux sous officiers d un
263. ec et la combinatoire p 83 96 La partie qui traite de la combinatoire des 81 recettes couvre les pages 88 et 89 1 Georges Perec L Infra ordinaire Paris Seuil 1989 Deux cent quarante trois cartes postales en couleurs v ritables p 33 67 voir Claude Berge et ric Beaumatin Georges Perec et la combinatoire op cit note n 7 p 89 200 recettes de lapin neuf recettes de ris de veau et la cr me idem en tout selon ce calcul sch matique 3x3 3x3 3x3 x 3 27 x 3 81 C Q F D Mais ce n est pas tout une combinatoire s institue galement au niveau des aromates bardes carottes minc es tomates fra ches et oignons nouveaux que l on trouve trois fois par accomodation trois aux champignons trois au Noilly trois la cr me en tout 9 fois par base soit en tout vingt sept fois Nous avons donc cinquante quatre recettes sans aromates Mais l o Perec d montre son exceptionnelle ma trise dans la manipulation de cette combinatoire culinaire c est bien dans l extraordinaire vari t des titres des plats Bien que partant de trois bases et de trois accomodations similaires il ne r p te qu une seule fois le titre d un plat chaque fois nous avons affaire une nouvelle d nomination Ces titres d pendent pour la plupart de l assaisonnement final Cet assaisonnement sert g n ralement de marqueur pour le titre du plat Nous avons par exemple ris de veau flamande 5
264. ecueils de recettes exotiques ou non articles des journaux consacr s au tourisme notamment la cuisine r gionale et l exploration des milliers de restaurants que rec le tout pays toute contr e toute province La gastronomie se pr sente donc comme un ensemble de r gles qui r gissent la science de la bonne ch re une esp ce de science de la gueule Faire son march choisir des ingr dients pr parer les plats servir et consommer la nourriture sont des actes ais s soumettre une classification des r gles des codes Il suffit de penser Rabelais et plus pr s de nous pour leurs travaux th oriques sur la nourriture Roland Barthes et Jean Paul Aron pour s merveiller de la complexit et de la multiplicit des signes de 1 Ibid p 553 7 Thid p 553 KI la nourriture La cuisine peut donc manifester la r p tition d une crise de valeurs comparable toutes proportions gard es certains aspects historiques de la philosophie Les valeurs pr conis es par certains philosophes sont m pris es par d autres De la m me fa on s amorcent aujourd hui plus qu hier des querelles d coles tant au sein de la grande cuisine que de la nouvelle cuisine Cela peut se traduire par une suppression voire un remplacement de certains proc d s ingr dients assaisonnements au profit d autres moins riches moins co teux etc Perec s amuse certes de ces querelles d cole m
265. egarderait pas couter ce qu on 98 n entendrait pas tre attentif au banal l ordinaire l infra ordinaire D j dans ce texte Virilio transforme notre facult d attention nous pressentons en effet toutes les influences qui commandent cet attrait vers l insignifiant Mais Virilio expose ensuite une id e fondamentale qui caract rise l insignifiant il d pend d une hi rarchisation culturelle Nier l id ale hi rarchie du crucial l anecdotique parce qu il n y a pas d anecdotique mais des cultures dominantes qui nous exilent de nous m mes et des autres une perte du sens qui n est pas seulement pour nous une sieste de la conscience mais un d clin de l existence Ce sont les cultures dominantes qui d cident du banal ou de l insolite La priorit est donn e en Occident au sensationnel l insolite l extraordinaire tout ce qui requiert une curiosit instinctive r flexe d nu e d effort Elle t moigne de l assouplissement de nos consciences d o pour Virilio l int r t actuel pour la science des autres mondes comme dans la science fiction type Star Trek et celui partag par des millions d individus pour les religions et les sectes nouvelles type Nouvel ge L insignifiant selon Virilio r v le donc l anesth sie des consciences incapables d observer et encore moins d interpr ter les faits hormis ceux qui sont les fruits d un sensationnalisme de comm
266. eil homme aux moustaches grises Ce personnage sciait son bois sur un chevalet form de deux croix parall les prenant appui sur l extr mit de leurs deux montants de mani re former cette figure en X que l on appelle Croix de Saint Andr et r unis par une traverse perpendiculaire l ensemble s appelant tout bonnement un X Mais voici que se r v le la grande souplesse de Perec sa m moire passe ensuite au T dont nous venons de parler pour retourner au X gt dont il rel ve la plurivocit en tant que signe signe du mot ray nul David Diringer The Alphabet A Key to the History of Mankind London Hutchinson s Scientific and Technical Publications 1948 and 1949 p 219 David Diringer The Alphabet A Key to the History of Mankind op cit p 219 7 Georges Perec Alphabets Paris Galil e 1985 3 Georges Perec W_ ou le souvenir d enfance op it p 105 Georges Perec ibid p 105 356 de la multiplication de la mise en ordre axe des X et de l inconnu math matique Ce X gt va nous entra ner vers bien d autres domaines comme nous pouvons le v rifier Mais nous quittons rapidement les domaines du cratylisme et des math matiques pour entrer dans le psychodrame perecquien qui produit selon les termes de Warren F Motte dans la s miotique de Perec les transformations suivantes des symboles majeurs de l histoire de son enfance gt DV
267. elon Choses que je fasse avant de mourir J aimerais Faire un voyage en sous marin Faire un long voyage sur un navire Aller aux les Kerguelen ou Tristan da Cunha J aimerais boire du Ren Girard Des Choses cach es depuis la fondation du monde op cit p 48 c est l auteur qui souligne 3 Georges Perec Je suis n op cit p 106 Georges Perec Penser Classer op it p 129 Edgar Allan Poe Aventures d Arthur Gordon Pym Paris ditions L Conard 1965 Jules Verne Voyages et Aventures du Capitaine Hatteras Paris Hachette 1966 r dition de Hetzel ob a CR ee D mme 191 rhum trouv au fond de la mer comme le capitaine Haddock dans Le Tr sor de Rackham le Rouge Voil qui ressemble parfaitement cette autre tiologie du d sir dans La Cit id ale Je n aimerais pas vivre sur une jonque mais parfois si Je n aimerais pas vivre sur un r cif mais parfois si Je n aimerais pas vivre dans un sous marin mais parfois si Tout cela repr sente un remarquable aboutissement des aspirations hypoth tiques jonque r cif sous marin et encore sous marin manie les boire du rhum du fond de la mer le milieu oc anique se pr te la mouvance du d sir et son ancrage Barthes nous rappelle que lt l utopie est famili re l crivain parce qu il est un donateur de sens sa t che ou sa jouissance est de donner des sens des noms Donner des noms n
268. elui de la citation certains proc d s comme le plagiat par anticipation oulipien Il s agit de confronter une intertextualit bloqu e sur un texte origine et final qui fait autorit et cl ture l interpr tation une autre forme qui reste ouverte sur l infini du texte C est le cas de l intertextualit avec l uvre flaubertienne dans Les Choses qui se caract rise plut t comme ensemble tonal et th matique Quant l int gration de la nouvelle de Kafka dans La Vie mode d emploi on peut consid rer que le trap ziste constitue une m taphore de l crivain On se souvient en effet que l acrobate ach ve sa carri re en allant s craser sur le sol du cirque apr s une impeccable parabole L histoire constitue encore une remarquable mise en abyme en ce sens que les textes de Kafka sont aussi des paraboles Le mot double sens renvoie encore ici le textuel au textuel exactement comme le d tournement parodique de l incipit de Marcel Proust Le verbe se coucher renvoie aussi bien au lit au page selon l idiolecte argotique qu la page o l on se couche par crit Ces mises en abyme sont encore amplifi es dans les jeux du texte et des index En effet ces index si nombreux dans les oeuvres de Perec ne servent 7 Voir Fran ois Le Lionnais Le second manifeste in Collectif Oulipo La litt rature potentielle Paris Gallimard 1973 p 23 8 Georges Perec Les Choses Paris
269. emblant Mais dans ce cas qu en est il des r emplois de Blake et de Joyce dans les donn es des tableaux conceptuels Ils illustrent une m thode fond e sur une herm neutique particuli re li e un h ritage kabbaliste Les m canismes de l intertextualit perecquienne sont fond s sur la contamination et la diss mination telles ces gouttes d huile qui s tendent de plus en plus sur la surface polie de la mare d eau jusqu ne former qu une couche macromol culaire L intertexte chez Perec rel ve de cette expansion infinie des textes puisqu il ne se limite pas des pratiques narratives ou des transmutations de la connaissance mais aussi cherche contaminer des structures plus vastes pr sidant l laboration ou la construction du texte comme dans La Vie mode d emploi C est aussi l une des conclusions laquelle aboutit par exemple John Pedersen lorsqu il crit Le travail dont chaque texte est l expression ne m ne pas l accomplissement mais vers l in fini tant il est vrai pour n en prendre qu un exemple que la toile de Val ne ne pourra jamais s achever Dire TT Voir Georges Perec La Vie mode d emploi op cit Post scriptum p 695 Voir Andr e Chauvin Le Jeu des erreurs ou m tamorphoses en minuscules in Georges Perec crire Transformer Qu bec Universit Laval 1990 pp 98 103 2 Georges Perec Un Cabinet d amateur Paris Balland 1979 et 1988 13
270. ement comme dans le Nouveau Roman Il suffit de penser aussi bien aux Choses qu La Vie mode d emploi pour s en convaincre Ces ressemblances signalent donc notre attention l une des grandes tendances de la litt rature contemporaine celle de l puisement du r el par la description L usage de savoirs complexes n cessaires la description enrichit notablement l oeuvre romanesque et surtout elle d tourne le roman de la narration comme unique centre d int r t Michel Butor La Modification Paris Les ditions de Minuit 1957 Georges Perec Un Homme qui dort Paris Deno l 1967 Voir ce sujet Sylvie Rosienski Pellerin Perecgrinations ludiques tude de quelques m canismes du jeu dans l oeuvre romanesque de Perec Toronto ditions du GREF 1995 p 159 161 Leslie Hill Perec Warwick in Parcours Perec op cit p 28 Georges Perec Les Choses Paris Julliard 1965 La Vie mode d emploi op cit a mpa me 14 Une lecture d ensemble de toute l oeuvre de Perec permet de d gager les grandes lignes directrices qui organisent sa vision des relations entre savoir et fiction Il est vident que l on retrouve dans cette int gration des connaissances des donn es acquises dans les domaines les plus vari s Cela correspond tr s bien la formation d autodidacte qu il s est donn e lui m me Bien qu apprenant de fa on tr s anarchique Perec a t capable de r organiser
271. emploi de Georges Perec 9 23 40 270 414 Cahiers du CRELEF Les 301 309 310 315 317 326 328 332 Cahiers Georges Perec n 1 Colloque de Cerisy 25 27 298 317 327 341 347 348 350 352 356 361 367 370 373 375 Cahiers Georges Perec n 4 M langes 199 203 209 300 361 367 Cantatrice chauve La 176 Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques 5 6 7 37 69 70 71 72 73 76 77 78 79 80 81 82 83 267 411 Cause commune 15 97 102 146 341 412 Chants de Maldoror Les 226 Chartreuse de Parme La 201 270 462 Ch teau des Carpathes Le 105 Choses Les 13 21 22 67 68 192 212 213 214 220 221 223 224 225 226 227 228 229 230 231 233 234 235 236 238 277 416 Choses cach es depuis la Fondation du monde Des 190 358 382 400 401 Choses Esp ces d espaces Georges Perec 261 53 jours 14 193 194 302 303 304 305 306 Citations du Pr sident Mao Ts Toung 340 Cl ture et autres po mes La 19 209 260 Colonie p nitentiaire et autres r cits La 215 217 247 249 251 252 253 254 255 256 257 274 277 Comparatio revue internationale de litt rature compar e 379 Concept de litt rarit Le 214 Construction et discours 301 364 369 373 374 376 Cours de Philosophie 7 396 Cours de Philosophie positive 205 Cratyle Le 354 Critique 393 Cultural Anthropology 330 D sarrois de l l ve T rless Les
272. en calling strategies and humming responses Sornette U et Billevayz H 152 Ibid p 30 7 Ibid p 13 comparative Karybb and Szyl et p 29 Pour Jeanpace L et Desmeyeurs P voir Bernard Magn La Cantatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in Perecollages 1981 1988 op it p 201 83 Les stomatites tomateuses Sturm U et Drang F Musikalische Katastrophe Timeo W Danaos I et Dona Ferentes H E W Brain cutting and cooking Arch metaphys endogen Gastromi2g Wait H and See C Balistic requirements in tomato throwing and splatching vaste choix de formules toutes faites r interpr tables par les milieux scientifiques Ambiance bucolique Vincent J Mil ne J Danzunpr J L et Sanvaing Danihotte J J J Le r flexe hydro musical s le doux chant des petits ruisseaux dans les prairies Bandes dessin es Zeeg O et Puss LK Georges Perec ibid p 14 et p 31 Ibid p 15 Shriek scream shrill and other hysterical reactions et p 31 1 Ibid p 32 7 Ibid p 32 voir Bernard Magn lt La Cancatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in Pere ollages 1981 1988 op cit p 201 e Thid p 32 On the fanatic demonstrations of music lovers Chemin de fer mise en garde en langue italienne figurant aux bords des fen tres des wagons de v
273. ence des fins litt raires caract rise bien l oeuvre romanesque de Perec Sa r ussite est li e l emploi de nombreux proc d s ludiques Il s est donc appuy sur des strat gies narratives tr s diverses allant de l invention des noms de savants l expos de leurs destin s et de leurs moeurs en passant 146 par la description de leurs th ories et de leurs inventions Perec d montre ainsi la virtuosit avec laquelle il r emploie une solide culture scientifique Mais il ne s arr te pas en si bon chemin D une part ses parodies visent toutes les pseudo sciences comme l occultisme ou le spiritisme et d autre part sa ma trise de la documentation scientifique lui permet d crire des textes qui imitent la science tout en la parodiant de multiples niveaux Cependant ce go t pour la m thode scientifique le poussera explorer un domaine n glig par le savoir institutionnel ce sera sa qu te du quotidien Il se mettra alors la recherche de l insignifiant dans sa Tentative d puisement d un lieu parisien Cette recherche d un nouveau savoir passe par cette qu te minutieuse du quotidien Confront aux multiples aspects de la r alit urbaine Perec va s efforcer de n en retenir que l insignifiant c est dire ce qui n voque rien chez lui Cette tentative li e aux objectifs de Cause Commune lui permet de r v ler l importance d un objet g n ralement n glig Pourtant Perec ne
274. encore accomplit les t ches courantes de la vie faire la sieste se laver s habiller boire une tasse de chocolat 5 celui plus vaste qui Correspond aux d placements n cessit s par sa notori t et les contraintes conomiques du cirque On remarque que cet espace est circonscrit l Europe l Afrique du Nord et le Proche Orient c est dire des endroits que le trap ziste peut atteindre par le chemin de fer L Afrique du Nord pourrait tre rattach e au reste du vieux continent par le d troit de Gibraltar Mais surtout la jonction s op re gr ce au facteur temporel le trap ziste vieillit il progresse dans son art et ses exigences augmentant d autant on d couvre la suture employ e par Perec au second paragraphe de l anecdote Mais en grandissant le trap ziste devenait de plus en plus exigeant Pouss d abord par la seule ambition de se perfectionner puis par une habitude devenue tyrannique il avait Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 70 us Ibid p 70 6 Ibid p 71 his ai 251 organis sa vie de telle sorte qu il p t rester sur son trap ze nuit et jour aussi longtemps qu il travaillait dans le m me tablissements C est l investissement spatio temporel qui permet la r ussite et la concr tisation de l amalgame Qui raconte cependant Nous passons d un narrateur intradi g tique qui serait l crivain biographe de Rorschash et qui peut tre identifi a
275. enir historique du nom propre du lieu et du vase qui y est attach vers un non lieu de la connaissance Toujours sous le haut patronage du lyc e Papillon mentionn l entr e 441 dans la chanson bien connue Perec rappelle aussi les proc d s mn motechniques qui ont fait fureur chez des g n rations de potaches Je me souviens de C est assez dit la baleine j ai le dos fin je me cache l eau et de Racine boit l eau de la fontaine Moli re Proc d s d ancrage de la m moire fond s sur les jeux de mots et l association homophonique que des g n rations de lyc ens ont employ s pour enregistrer le mammif res marins et les crivains du XVII si cle fran ais La m moire tant consid r e comme un r servoir qu il faut remplir et dont seuls les proc d s mn motechniques peuvent combler les carences Cette derni re vocation est class e sous les rubriques du folklore enfantin et du langage Quant ce dernier souvenir il 7 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 366 p 92 3 Ibid Index p 132 Ibid entr e n 441 p 108 10 bad entr e n 194 p 54 11 Ibid index p 132 et 135 309 rel ve galement des proc d s oulipiens Je me souviens de J avais une soif de lionne voulant savoir quoi l eau sert je m criai Tonnerre Avalons gt En effet nous retrouvons des jeux comparables chez Mich le M tail qui s
276. ent des cercles concomittants qui composent notre d cor du quotidien ne suffit pas compenser une routine du savoir Encore faut il d couvrir d autres moyens de r interpr ter le texte minente transgression du langage que Perec ardent oulipien r ussira pleinement par gratitude pour Raymond Queneau et ceci dans son recueil intitul Voeux Commenc en 1970 et achev en 1982 le recueil de Voeux sera publi en 1989 C est dans ce recueil que l on peut lire un Cocktail Queneau texte o tous les titres des oeuvres de Raymond Queneau sont soigneusement transform s par les vertus de l homophonie Perec pr sente ainsi lui m me ses diff rentes pochades dont celles qui traitent de Queneau il s agit de petits textes g n ralement fond s sur des variations homophoniques tir s une centaine d exemplaires et envoy s mes amis l occasion de la nouvelle ann es Voeux est un titre banal et la raison d tre des textes ne l est pas moins Des voeux c est ce que l on souhaite nos amis lors des occasions traditionnelles du premier jour de l ann e des anniversaires ou des f tes C est une manifestation Georges Perec Voeux Paris Seuil 1989 le Cocktail Queneau 1982 figure aux pages 149 180 7 Idem Georges Perec Bibliographie sommaire assortie de quelques commentaires de l auteur in LA n 76 Aix en Provence 1979 p 93 164 d amic
277. ent Golem et l emploient comme domestique pour ex cuter les travaux domestiques Seulement il ne doit jamais sortir de la maison Sur son front est crit emeth v rit il grossit chaque jour et devient facilement plus grand et plus fort que tous ceux qui vivent dans la maison alors qu au d but il tait si petit Par peur de lui ils effacent la premi re lettre afin qu il ne reste que meth il est mort sur ce il s croule et redevient de l argile Un homme avait laiss par insouciance grandir son Golem il tait devenu si grand qu on ne pouvait m me plus atteindre son front Alors il ordonna par peur au valet de lui enlever ses bottes avec l id e qu tant baiss il pourrait lui atteindre le front Cela r ussit la premi re lettre fut enlev e mais tout le poids d argile tomba sur le Juif et l crasa Voici un domestique bien dangereux que se constituaient les familles juives polonaises Cependant que signifie ce nom de Golem qui lui est attribu D aucuns pensent qu il veut dire embryon puisque le seul endroit o il appara t dans le texte sacr est le psaume 139 16 de David o il est dit selon la Bible de J rusalem Mes actions Mon 186 Cit par Gershom G Scholem ibid p 180 7 Ibid p 180 Au sujet du Golem et de sa pseudo d couverte par Perec voir David Bellos Georges Perec Une Vie dans les mots op it p 418 419 David Bellos rappelle aussi que de nombreu
278. ent dont Heidegger dit qu il est lui m me pris dans la question Le processus de signification nous pourrions dire de d finition repose sur le questionnement propos du signe et de l tre Qui suis je D o suis je venu O vais je aller Pourquoi suis je n Ai je connu une autre vie Dans ce cas suis je le r sultat d une transformation Qu est ce qu une transformation La question de l tre et de son identit correspond celle du m me et de l autre savoir ce du est l tre et ce qu il n est pass Voir Georges Perec Les gnocchis de l automne ou R ponse quelques questions me concernant in Je suis n op cit p 70 8 Voir Patrick Imbert Silences et dualisme dans Le Roman qu b cois depuis 1960 Qu bec P U L 1992 p 105 118 nP a ri na a renait araa oaae aee e 344 Toutes les grandes th ories qui syst misent le processus identitaire int grent les principaux paradigmes qui affirment et d finissent la personne Il s agit d un ensemble de cat gories qui structurent l identit le m me et l autre le stable et le changement l int rieur et l ext rieur l avant et l apr s l origine et la fin comme conditions n cessaires la d finition du moi L ego et le monde constituent les objets du discours c est dire des processus de signification Se partagent donc le champ de l tre les grandes th ories qui s interrogent sur le langage s miologie
279. erec Il y d crit galement l inlassable e D Ibid Distribution spatio temporelle de Coscinoscera Victoria Cos inoscera tigrata carpenteri Coscinoscera punctata Barton amp Coscinoscera nigrostriata d Iputupi p 35 52 Voir Armand Cuvillier Cours de Philosophie Tome I Paris Armand Colin 1954 p 65 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 375 7 Marcel B nabou Vraie et fausse rudition chez Perec in Parcours Perec op cit p 43 8 curiosit de Perec une curiosit qu il compare celle de l autodidacte 5 Form dans un cadre de pens e qui lui ouvrait un grand nombre de connaissances Perec n en a pas moins cherch d autres savoirs auxquels il n avait pas facilement acc s Comme l autodidacte de La Naus e Perec a investi m thodiquement les champs du savoir ces diff rences pr s qu il ne lisait pas les ouvrages d une biblioth que publique selon l ordre alphab tique et que sa qu te interminable ne d bouchait pas sur un voyage aventureux En quelque sorte ainsi que le remarque Marcel B nabou Perec ressemble par bien des c t s l un des savants de La Vie mode d emploi L on Marcia parfaitement autodidacte En quatre ans L on Marcia lut un bon milliers de livres et apprit six langues Plus il apprenait plus il voulait apprendre 8 Ce d sir insatiable et syst matique de savoir que manifeste Perec n est pas sans
280. erec ibid Tentative de description de choses vues au carrefour Mabillon le 19 mai 1978 document radiophonique avec Ren Farabet producteur Voir ce sujet David Bellos Georges Perec une vie dans les mots Paris Seuil 1994 p 656 3 Georges Perec Lieux projet annonc et d crit dans Esp ces d espaces op cit pp 76 77 La Rue Vilin in L infra ordinaire op cit pp 15 31 Voir Philippe Lejeune La M moire et l oblique Georges Perec autobiographe Paris P O L pp 26 27 50 51 et pp 141 209 Voir Georges Perec Notes sur ce que je cherche in Penser Classer Paris Hachette 1985 p 10 103 travers le spectaculaire comme si le parlant le significatif tait toujours anormal cataclysmes naturels ou bouleversements historiques conflits sociaux scandales politiques 5 Perec montre que les faits sensationnels sont utilis s pour masquer l essentiel Le scandale ce n est pas le grisou c est le travail dans les mines Il sait que l ensemble des nouvelles journali res constitue un pactole m diatique exploit pour annuler les probl mes s rieux et authentiques de la soci t contemporaine De l proc de son rejet des journaux dans une r action pidermique spontan e Les journaux parlent de tout sauf du journalier Les journaux m ennuient ils ne m apprennent rien La gen se de l interrogation sur le quotidien proc de bien selon ce que Perec nous en dit d une lassitude pour
281. ernard Magn Pour une lecture r ticul e in Cahiers Georges Perec n 4 M langes op cit p 154 Voir ibid p 153 301 l interpr tation en action discontinue Dans W ou le souvenir d enfance nous lisons le premier souvenir humoristique du temps de guerre Du monde ext rieur je ne savais rien sinon qu il y avait la guerre et cause de la guerre des r fugi s un de ces r fugi s s appelait Normand et il habitait une chambre chez un monsieur qui s appelait Breton C est la premi re plaisanterie dont je me souvienne Ce souvenir fix par le marqueur de l initiation et dont l humour est fond sur le d calage des patronymes qui se rattachent tous les deux des provinces fran aises reviendrait mettre la Normandie dans la Bretagne Cela constituerait un bouleversement moindre que la guerre dont on connut autrefois les r sultats L opposition la plus comique demeure celle des deux provinces de l ouest de la France dont on conna t la rivalit s culaire ne serait ce que pour la possession du Mont Saint Michel Trois ans plus tard Perec r utilise cette confrontation Normand Breton non sans la nuancer d un parall le gastro litt raire entre Lamartine et Chateaubriand Je me souviens qu Villard de Lans j avais trouv tr s dr le le fait qu un r fugi qui se nommait Normand habite chez un paysan nomm Breton Des ann es plus tard Paris Tat ri tout autant de savoir qu un restau
282. es L invention langagi re provient de cette recherche des causes que poursuit assid ment la science En effet science et litt rature secr tent une intelligibilit de la mati re voire du cosmos dans sa globalit Mais la litt rature par le d passement de tous les savoirs remet sans cesse en cause l ordre tabli Ainsi que le dit Laurence Dahan Ga ida la litt rature tout au moins telle que con ue par Perec met cet ordre en crise et avance sa mani re proprement al atoire vers des lieux encore vierges de tout savoir Et c est peut tre l o elle courtise le plus assid ment l inconnu que la litt rature trouve son lien le plus propre l o elle d couvre et invente librement d gag e des contraintes extrapol es partir des savoirs qu elle se constitue comme un Voir Georges Perec La Vie mode d emploi op cit pp 24 78 144 et 374 88 jeu de langage diff rent qui ne feint de se soumettre des r gles que pour mieux mesurer sa libert On ne peut mieux faire que d appliquer ces paroles Perec car dans ses crits pseudo scientifiques il exp rimente une nouvelle cr ation litt raire Il prend appui sur la grande rigueur de la m thodologie scientifique pour parvenir contre toute attente produire une science ludique g n ratrice de savoirs nouveaux et inconnus Perec renonce toute id e de connaissance pol mique Il construit un langage hi rophanique
283. es Perec Les Revenentes Paris Julliard 1972 et 1991 p 12 Il aurait fallu d abord que les commencements fussent de vrais commencements Quelque chose commence par finir Jean Paul Sartre La Naus e Paris Gallimard 1938 p 62 Une petite gare sur la ligne de Russie A perte de vue dans les deux sens quatre voies parall les s allongeaient en ligne droite sur un large remblai couvert de ballast jaun tre c t de chaque voie comme une ombre sale la trace noire inscrite sur le sol par les jets de vapeur br lante Robert Musil Les D sarrois de l l ve T rless Paris ditions du Seuil 1967 p 9 L h g monie de la science au XX si cle ne peut manquer de frapper les esprits contemporains La science et ses d riv s technologiques attirent in vitablement l attention sur une multitude d applications qui sont la source du confort moderne Cependant la science pure est plus difficilement perceptible dans les milieux profanes L introduction de la science dans la litt rature n est pas nouvelle Il suffit de penser la cons cration du genre de la science fiction partir de Jules Verne en France et de H G Wells en Angleterre pour appr cier toutes les ressources du genre Comme bien de nos contemporains Georges Perec lui m me s est int ress la science fiction C est en effet en 1963 qu il fera para tre un article examinant le genre L univers de la science fiction dans le journal
284. es magn tiques et le professeur Davidoff sp cialiste des miettements dont on ne sait s il s agit de la mati re ou de la lumi re et pour la seconde discipline du professeur Kolliker ing nieur atomiste qui avait perdu bras et jambes lors du bombardement de son laboratoire mais que l on consid rait comme le cerveau le plus volu de son temps bien qu il f t par surcro t sourd et muet C est une s v re destin e que conna t ce savant notamment quant ses difficult s d expression qui appellent des moyens exceptionnels pour transcrire ses th ories Dans le domaine des sciences appliqu es on trouve bien s r la m decine repr sent e par une orthophoniste Lise Gilbert qui lt r duque les petits enfants b gues une tudiante en m decine Martine Noch re fille de la concierge de l immeuble de la rue Simon Crubellier Et surtout Bernard Dinteville un m decin de famille dont la recherche sur les reins de l un de ses anc tres galement m decin Rigaud de Dinteville sera pill e par le professeur LeBran Chastel qui Dinteville avait fait confiance 3 Ibid p 375 3 Voir ibid p 375 3 Ibid p 371 Voir ibid p 214 215 7 Voir ibid p 267 270 et p 574 581 42 Comme le signale Marcel B nabou la science historique constitue l une des disciplines clefs du roman Elle conna t en effet une s rie d avatars qui r v lent l importance de l histoire dans la str
285. es pour tre regroup es selon des plans et des niveaux plausibles Le meilleur exemple qu il nous donne dans ses textes pseudo scientifiques est certainement la bibliographie de son article antatrix sopranica LI Dans cette vaste bibliographie compos e de quelque soixante huit ouvrages haute teneur scientifique nous avons relev les diff rentes hybridations cognitives suivantes aboutissant des savoirs 7 Laurence Dahan Gaida Du Savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature loc cit p 482 Georges Perec Experimental demonstration of the tomatotopic organization in the Soprano Cantatrix soprani a L in Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques op cit p 26 33 79 nouveaux voire renouvel s culturellement les ouvrages sont galement cit s dans le texte Les jeux de soci t pratiqu s dans les lieux conviviaux caf s et restaurants Attou J et Ratathou diteur V Cointreau et M Brizard jeux de carte et digestifs alcooliques de bonnes marques Beulott A Rebeloth B et Dizdeudayre C D succ s du joueur favoris Les traitements des maux d estomac pour les mauvais joueurs Alka Seltzer La La cuisine pour b n ficier des traitements m dicaux Bortsch B Saccular disturbances produced by whistling in Russian siffler les cantatrices siffler un bortsch Lai A et Chou O Ibid p 14 et p
286. es textes respectifs de Flaubert et de Perec une identit de lex mes une identit des parcours figuratifs et une identit des valeurs esth tiques consid r s comme connecteurs Laurent Jenny La Strat gie de la forme in Po tique n 27 1976 p 262 5 Voir Fran ois Le Lionnais Le second manifeste in Collectif Oulipo la litt rature potentielle Paris Gallimard 1973 p 23 ae o Sgr ton sed G RARE eee 233 Quant aux lex mes nous rep rons tous ceux qui recouvrent les moyens de transport chevaux navires et marche pied et ensuite ceux qui assument les endroits travers s for ts et montagnes avec l appropriation des hauts lieux les sommets et une rel gation au second plan narratif des milieux urbains comme si seule la campagne pouvait id aliser le voyage Puisque le texte premier est celui de Flaubert et qu il constitue ipso facto le mod le nous remarquons que Perec l imitation de Flaubert utilise les figures lex matiques comme connecteurs intertextuels L identit des parcours figuratifs t moigne des effets de l intertextualit non seulement comme analogie mais aussi comme parent oblig e Tandis ou Emma est emport e au galop de quatre chevaux c est aussi au galop de leur chevaux que sont emport s J r me et Sylvie mais cette fois ci par des chevaux sauvages L opposition des s mes domestique sauvage que nous rep rons au niveau intertextuel caract rise une di
287. espond typiquement aux menus en vogue lors des v nements exceptionnels de la vie d une famille fran aise Repas de communion repas de noces banquets des anciens combattants menus de r veillon suivent un c r monial largement ritualis depuis le XIX si cle Perec suit donc la pr sentation des menus ou des cartes de restaurants utilis es pour organiser les repas de f tes Il commence par les plats pour aboutir aux vins et aux liqueurs du solide au liquide Bien s r les plats solides dominent largement la liste en commen ant bien s r par l antith tique depuis les soupes pour s achever avec les tartes les g teaux et autres desserts glac s Pour cela il passe successivement selon le protocole de la gastronomie fran aise par les charcutailles et cochonailles les coquillages et crustac s les l gumes et les salades les entr es froides et chaudes les oeufs et les omelettes les poissons les pi ces de boeuf et les pot au feu les pi ces de veau les agneaux et les moutons les abats rognons riz de veau cervelles foies et g siers les assiettes anglaises les l gumes vari s et les pommes de terre les p tes les salades les fromages les fruits et les compotes les salades de fruits Que l on se rassure cette consommation est graduelle et Perec n est pas sujet l indigestion Chacune des rubriques voit ensuite ses l ments tre class s grosso modo selon un ordre alphab tique Andouille andouillet
288. est ce qu un genre litt raire Paris Seuil 1989 184 p x A mea y r mes 441 SCHOLEM Gershom G La Kabbale et sa symbolique Paris Petite Biblioth que Payot 1975 230 p STAROBINSKI Jean Les Mots sous les mots Paris Gallimard 1971 167 p THOM Ren Paraboles et catastrophes Paris Flammarion 1983 193 p TODOROV Tzvetan Les Genres du discours Paris Seuil 1978 309 p TODOROV Tzvetan Th ories du symbole Paris Seuil 1977 375 p UBERSFELD Anne Lire le th tre Paris Messidor ditions Sociales 1982 302 p VANDENDORPE Christian Le Plagiat actes du colloque tenu l Universit d Ottawa du 26 au 28 septembre 1991 Ottawa Presses de l Universit d Ottawa 1992 244 p VERTHUY Ma r L Espace temps dans la litt rature Victoria APFUCC 1989 233 p VEYNE Paul Comment on crit l histoire essai d pist mologie Paris Seuil 1971 242 p VIRILIO Paul L Horizon n gatif Essai de dromoscopie Paris Galil e 1984 305 p VIRILIO Paul Vitesse et politique Essai de dromologie Paris Galil e 1977 151 p VIRILIO Paul Esth tique de la disparition Paris Galil e 1989 126 p WAHL Jean Trait de m taphysique Paris Payot 1968 724 p WHORF Benjamin Lee Linguistique et Anthropologie Paris Deno l Gonthier 1969 228 p APPAREIL CRITIQUE LES CAHIERS DE L HERNE JORGE LUIS BORG S texte r unis et pr sent s par Dominique de ROUX et Jean de MILLERET avec le con
289. est la communication est fond sur une diff renciation celle du sujet et de l objet Si l on examine la constitution du processus identitaire on s aper oit que l enfant fonctionne sur la base du syncr tisme Il confond volontiers les deux ordres que l adulte distingue g n ralement tels que ce qui est lui m me et ce qui constitue son environnement y compris le corps de sa m re Cette tendance syncr tique a t manifest e par de nombreux crivains ou philosophes de l introspection ls ont aim y voir la fusion de l individu avec le Grand Cosmos qui attire les voeux des utopistes sectaires Mais c est aussi un univers syncr tique que se confronte le dormeur qui flotte entre plusieurs niveaux de conscience et qui remet en cause son identit Avec l exp rience de la second naissance provoqu e par l attente et la formation du moi se constituent alors les principes de la personne C est l univers des significations que la personne peut se heurter Au sein de la corporalit il lui faut distinguer la multitude des organes L enfant au berceau compose avec la connaissance il ne sait faire la diff rence entre la main de sa m re et sa propre main Le dormeur est aussi aux prises avec la multitude des coenesth sies Se souvenant de cette remarquable volution de sa corporalit Georges Perec crit Il y a deux types de contacts en principe celui de ton corps avec les draps pour ce qui est de ta cuisse gauche d
290. est une surr alit qui permet l int gration du r el dans le savoir L examen minutieux de la succession et de la transformation des lettres chez Perec conduit un vaste vertige produit par les syst mes iconiques qui d finissent son identit Comment se ressembler soi m me et comment se rassembler avec les autres D autant plus que les signes qui manifestent son identit fonctionnent selon une ambigu t insurmontable Seule une forme d opposition l autre non par la violence mais selon une minutieuse ironie permet le recoupement final qui stabilise l identification Les graphies successives d une lettre clef telle que gometh gomel gamma renvoient aux multiples possibilit s de la polys mie croix gamm e gamelle gam tes etc Elle ne s applique pas en premier au d chiffrement pur et simple d un texte qui se veut autobiographique mais plut t l inscription d une famille victime au sein d une humanit d chir e par la guerre par l histoire la coupure irrecevable de la grande hache de l histoire Et pourtant s il s agit d un jeu tragique et arbitraire tel que Perec le d chiffre il est minemment s rieux car il d termine l avenir d un homme affirmant pour lui le salut ou la d ch ance En effet une ultime transformation impr vue est celle du gimel sur la lettre initiale du pr nom de Perec Les ressources de la lettre conduisent toujours la d couverte et l affirmation de l i
291. et sonner Autre jeu de mots la d contextualisation r f rentielle permet le jeu sur la confusion s m mique boisson alcoolique cercueil D une camionnette bleue un homme a sorti un diable Dehors on ne distingue pratiquement plus les visages La confusion s m mique engin de transport des colis le malin initiateur du mal est confirm par l obscurit ambiante Quant aux manifestations de l humour de Perec qui viennent d placer l insignifiant de son cadre de r ception d termin elles sont fort nombreuses nous pouvons cependant citer les exemples suivants appartenant des cat gories bien d finies Les allit rations Passe un papa poussant poussette Afflux Accalmies Alternances Retour en force de l Oulipo il ne perd jamais ses droits Le mot valise Fantomatismes qui renvoie aux automatismes fant mes ou bien aux fant mes automatiques Perec laisse entendre que les comportements individuels qu il observe savoir un homme qui paie la consommation de son ami d pourvu de monnaie ou encore un autre homme de petite taille qui tire la n E 5 S H F E ta La e H E g 35 H F e gri A Ee 8 Lente z E Ki Lal O 130 porte du caf au lieu de la pousser correspondent des conduites automatiques et fant matiques L activit r flexe est li e tous les revenants secoueurs de cha ne qui viennent se produire selon leur tour a
292. et des lettres il faudra cr er celui de la ponctuation qui doit contenir m me nombre de signes J avais commenc un travail sur la gamme de ponctuation je l avais pouss 25 signes appuy s d exemples d notant le ridicule et l ambigu t de nos signes actuels j ai perdu ce travail avant qu il f t achev et je ne l ai pas recommenc depuis Observons ce sujet que le premier de nos signes le plus bas nomm virgule doit tre diff renci au moins en quadruple forme pour faire appr cier les diff rentes port es de la virgule ses acceptations qui variant l infini sont exprim es confus ment par un seul signe c est le combie du d sordre Il en est de m me des autres signes ils cumulent trois ou quatre sens la ponctuation civilis e est un vrai chaos Charles Fourier Le Nouveau Monde Industriel nouvelle dition p 482 Perec poursuit une investigation du langage selon deux processus distincts d une part avec le ludisme formel comme dans l emploi du lipogramme ou la mise en pratique des traductions homophoniques il produit un renouvellement de la configuration du texte qui se d double et d autre part par l accumulation et la combinatoire comme dans la confrontation que l on peut tablir entre ses aspirations personnelles et l utopie et finalement par la combinatoire culinaire il vise produire des textes qui se multiplient C est en effet ce que nous nous proposons d analyser sous ce
293. et n 260 p 41 et 69 5 Voir Umberto Eco S miotique et Philosophie du langage Paris Presses Universitaires de France 1988 le chapitre IT Dictionnaire versus encyclop die p 63 137 notamment les pages 128 137 322 Je me souviens de Zappy Maxi Ces six entr es essouflantes dans leur concision rendent compte de l h t rog ne du texte et partant de la multipolarit de cette forme de culture qui est li e aux pr sentations m diatiques On les rattachera successivement aux domaines suivants la chanson le crime et son ch timent les bienfaiteurs de l humanit et leur d vouement les pid mies animales et leur utilit le film populaire et un animateur d missions de radio La plupart des entr es proviennent du champ de l information Leur contenu elliptique produit la vacuit de l information et la densit de la rencontre La recherche des rapports possibles m me s ils demeurent purement hypoth tiques confirment les possibilit s des entr es L op ration anodine de Perec qui consiste bousculer les pratiques informatives vise recycler l information pour briser les st r otypes de pens e Ses pseudo coq l ne sont en r alit un d poussi rage constant des habitudes mentales de l auditeur ou du t l spectateur contemporain habitu passer du film romantique genre Sissi Je me souviens de Sissi avec Romy Schneider la publicit obs dante et paraiysante d une campagne
294. etrouve ces m me formes d exhibition lorsque l on aborde les catastrophes au sens trivial du terme Elles constituent in vitablement un domaine qui suscite au plus haut point la curiosit populaire Cela n arrive ou aux autres est le 7 Georges Perec L infra ordinaire Paris Seuil 1989 Approches de quoi p 9 7 Georges Perec Je me souviens op it entr e n 255 p 68 Thid entr e n 256 p 68 1 Ibid entr e n 257 p 68 81 Jbid entr e n 258 p 68 Voir R gis Debray Vie et mort de l image une histoire du regard en Occident Paris Gallimard 1992 324 marqueur id ologique de la catastrophe Pour ne citer que ces exemples la mort accidentelle de Marcel Cerdan le naufrage de Andres Doria les bagarres au quartier latin en mai 1968 la guerre civile au Biafra la guerre entre l Inde et le Pakistan la mort accidentelle du trompettiste de jazz Clifford Brown Incendie du drug store des champs lys es Comme pour les trains qui d raillent dont parle Perec dans ses Approches de quoi les v nements correspondent des r v lateurs d existence comme le r v lateur photographique Ils conjuguent l effet m diatique au profit conomique Mais Perec d voile cette accoutumance des esprits au d codage de l v nement Il veut modifier l approche des v nements pour rejeter le sensationalisme facile et revoir les m canismes de l enregistrement m moriel
295. eu monsieur Patrick Imbert qui tout au long de notre recherche a su nous prodiguer conseils directives et encouragements Nos remerciements vont aussi au Conseil de recherches en sciences humaines du Canada au Fonds pour la formation des chercheurs et l aide la recherche Qu bec et au R gime des bourses d tudes sup rieures de l Ontario pour toute l aide mat rielle procur e qui a permis la r alisation de ce travail de recherche Nous d sirons enfin remercier l cole des tudes sup rieures et de la recherche ainsi que le D partement des lettres fran aises de l Universit d Ottawa sans l aide desquels cette recherche n aurait pu tre conduite son terme TABLE DES MATI RES INTRODUCTION PREMI RE PARTIE LA CONNAISSANCE DU MONDE Chapitre 1 Les savoirs scientifiques Chapitre 2 Pour un savoir du quotidien DEUXI ME PARTIE EXP RIMENTATION DU LANGAGE ET PRATIQUES DES TEXTES Chapitre 3 Manipulations et combinatoires 3 1 Ludisme formel le lipogramme 3 2 Ludisme formel la traduction homophonique 3 3 Les jeux des aspirations individuelles confront es l utopie 3 4 La construction combinatoire Chapitre 4 Des r f rences litt raires l intertextualit TROISI ME PARTIE LA CONNAISSANCE DE SOI Chapitre 5 Une exp rimentation de la m moire Chapitre 6 Le rabbin et la lettre CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE INDEX DES NOMS INDEX DES OEUVRES 148 148 150 163 178 195 21
296. eur Exp dients vieux aspect de confrontation m tonymique Ursula Andress N gresco genres de vie Issoudun Zanzibar villes ou plus g n ralement lieux g ographiques Qu bec Xanadu assimilation esth tique et phon tico g ographique L utopie permet l puisement des perspectives de se rejoindre dans l expression du d sir Elle conduit galement une saturation des possibilit s voqu es Qu en est il maintenant de l organisation du savoir dans Choses que je fasse avant de mourir Il s agit d un ordre prioritaire d une hi rarchie des imp ratifs du possible selon neuf cat gories virtuelles 1 2 3 4 5 6 7 8 choses que je pourrais faire d s aujourd hui choses un tout petit peu plus importantes qui impliquent des d cisions choses li es des d sirs plus profonds de changement choses li es des r ves de temps ou d espace toutes les choses que je ne connais pas encore il y en a certaines que je voudrais avoir le temps de bien d couvrir beaucoup de choses que j aimerais apprendre mais je sais que je ne le ferai pas parce que cela prendrait trop de temps des choses li es mon travail d crivain une chose que j aimerais faire mais je ne sais pas o elle se place 187 9 des choses qu il est d sormais impossible d envisager mais qui auraient t possibles il n y a pas si longtemps Ce classement refl te tout le
297. eur taient si ais ment reconnaissables par leurs v tements par leur aspect physique par leurs corps pourquoi fallait il encore les marquer du sceau ind l bile de l int rieur du r gime de l int rieur du sceau de la Cit Comme les nazis confront s l incertitude des corps les officiers de l immigration am ricains doivent laborer une th orie de l identit des corps Cette th orie passe galement l image de l toile jaune par la surd termination du signe Le corps ne suffisait pas son criture tait insuffisante Et paradoxalement elle tait d j compl te dans son d chiffrement Confront la lettre isol e unique exemplaire Perec mesure l insuffisance de l apparence humaine La confrontation des deux mondes passe comme par un effet de retour de civilisation par le jeu n cessaire de l alphabet La destin e tragique de l homme ne vient plus des dieux mais des lettres qui composent son langage Sur Ellis Island aussi le destin avait la figure d un alphabet 7 Ainsi que nous avons TE Voir Patrick Modiano La Place de l toile Paris Gallimard 1968 17 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Island op cit p 35 392 d j remarqu la lettre produit la lettre et en la produisant elle d termine un destin une vie marqu e par le sens du tragique Semblables aux pythonisses de la Gr ce Antique des officiers de sant examinaient rapidement les ar
298. eurs R alisation Robert Bober Textes premi re partie textes et voix de Georges Perec deuxi me partie interviews men es par Georges Perec l ensemble des textes a paru aux ditions du Sorbier INA en 1980 S rie noire couleurs 1979 R alisation Alain Corneau Dialogues Georges Perec d apr s le roman de Jim Thompson A Hell of a Woman Retour la bien aim e long m trage couleur 1979 R alisation Jean Fran ois Adam Sc nario adaptation et dialogues Jean Fran ois Adam Jean Claude Carri re Beno t Jacquot et Georges Perec Inauguration 1981 R alisation Robert Bober Texte Georges Perec Les Jeux de la comtesse Dolingen de Gratz couleurs 1981 R alisation Catherine Binet Sc nario adaptation dialogues Catherine Binet d apr s Sombre Printemps d Unica Z rn un fait divers et Dracula de Bram Stoker Production Les Films du Nautile fond s par Georges Perec et Catherine Binet Trompe l oeil couleurs 1982 R alisation Catherine Binet Sc nario montage Catherine Binet Photographies Cuchi White Textes Michel Butor Les Yeux perdus po me Georges Perec L Oeil bloui prose et Trompe oeil po me 429 L OULIPO COLLECTIF Oulipo La Litt rature potentielle Paris Gallimard id es 1973 308 p COLLECTIF Quiipo A litt ntielle Paris Gallimard Id es 1981 432 p COLLECTIF La Biblioth que Qulipienne vol I Paris Ramsay 1987 377 p
299. eux sources de la morale et de la religion Paris Presses Universitaires de France 1948 340 p BONNEFOY Claude Panorama critique de la litt rature moderne Paris ditions Pierre Belfond 1980 445 p BUTOR Michel Essais sur les Modernes Paris Gallimard 1960 1964 376 p CALVINO Italo La Machine Litt rature Paris Seuil 1984 235 p CALVINO Italo Le ons Am ricaines ai Gallimard 1989 197 p CAWS Mary Ann Th orie Tableau Texte de Jarry Artaud Paris Lettres Modernes Minard 1978 198 p CH TELET Fran ois La Philosophie des Professeurs Paris Bernard Grasset 1970 278 p CH TELET Fran ois et MAIRET G rard Histoire des Id ologies Paris Hachette Litt rature 1978 3 v 433 CL MENT Catherine Vies et L gendes de Jacques Lacan Paris ditions Grasset et Fasquelle 1981 256 p COLLOT Michel L Horizon Fabuleux L XIX si cle Paris Librairie Jos Corti 1988 2 v Centre TADAC Texte et Id ologie dit par A W Halsall et R B Rutland Ottawa Carleton University 1988 200 p Centre d tudes Rh toriques de Carleton University La Rh torique et linter disciplinarit Ottawa Revue dienne dE Rh tori 1991 126 p Centre d tudes Rh toriques de Carleton University La Rh torique et l argumentation Ottawa Revue Canadienne d Etudes Rh toriques 1992 207 p COLLECTIF Bataille pr sent par Philippe Sollers Colloque de Cerisy Paris 10 18
300. eville B 41 57 58 Dinteville F de 40 44 87 Dinteville R de 41 Diringer D 355 362 Disney W 319 Dixion H 164 165 166 175 Doc 319 Drogoz P 154 164 165 174 280 Drouet M 336 Dubois P 384 Duchet C 51 D hring M E 63 Dunod 113 Dupaillon 195 Dupanloup 195 Durand G 295 380 Duras M 412 Duvignaud J 15 127 146 222 229 449 chard 49 Eco U 86 93 94 176 177 269 321 351 354 369 374 381 394 Eiffet H 82 Einstein 336 Eisenstein S M 242 EI Fichero 47 Eliade M 380 luard P 340 Engels F 63 Ericsson S 39 54 55 Escher 352 Estaing G d 80 ve 346 Farabet R 102 Faust 273 Fisette J 351 Flack 305 Flaubert G 8 9 10 11 17 21 40 91 214 217 220 221 224 230 231 232 233 234 235 236 237 238 274 277 Flournoy T 158 159 Foucault M 17 Fourier C 149 393 413 Fournel P 15 17 140 176 264 280 Franklin B 44 Freud S 177 367 Frey S 303 Frye N 363 Fugger H 52 53 Gaffiot 303 Gargantua 138 Gaspard 318 Gaulle C de 77 Genette G 24 46 215 247 249 262 263 264 277 314 Gertrude 196 197 Gesenius W 354 355 Gide A 17 334 Gikatilla J 367 Gilbert L 41 Gilet Burnachs F 43 61 450 Girard R 189 190 358 382 400 401 Goliath 338 Gotlib M 5 69 71 76 77 213
301. f ou de l infinitif modalis La ville doit susciter l observation de l insignifiant bien plus encore que la campagne la montagne le milieu marin trop dissout dans l infinit de l espace Barthes rappelle fort justement la haute concentration de significations que d tient la ville propos de Victor Hugo Barthes signale cette Ibid p 12 Georges Perec Esp ces d espaces op it p 70 Roland Barthes S miologie et urbanisme in L Aventure s miologique op cit p 261 107 antique comp tition entre l criture par la pierre et l criture sur le papier Et de conclure de cette mani re lt Et nous retrouvons ici la vieiile intuition de Victor Hugo la ville est une criture celui qui se d place dans la ville c est dire l usager de la ville ce que nous sommes tous est une sorte de lecteur qui selon ses obligations et ses d placements pr l ve des fragments de l nonc pour les actualiser en secret Perec lecteur de la ville cela se comprend d autant mieux qu il emploie ce type de m taphorisation pour observer la ville Jouant sur l embrayeur d chiffrer il confronte les conflits d attention en proposant D chiffrer la ville en d duire des vidences la hantise de la propri t par exemple Ce qu il oppose d chiffrer un morceau de ville Ses circuits pourquoi les autobus vont ils de tel endroit tel autre La multitude des lectures possib
302. ff rents paradigmes int gratifs produisent les structures coh rentes de la di g se actants sujets tels les savants et tout P Ibid p 476 477 la mer de ou du Cousin Ibid p 478 Ibid p 478 63 le syst me des isotopies reli es aux sph res d actions d monstration opposition d couverte et contre d couverte enfin reconnaissance ultime de l authenticit de la preuve Il est vident que l histoire constitue l une des disciplines les plus ais es introduire m tadi g tiquement dans le r cit Mais le savoir scientifique peut produire encore trois grands types d int gration distributionnelle la narration La contestation de la th orie scientifique peut g n rer des pisodes relevant d une certaine m taphysique fiction tandis que la science peut servir cautionner le fictionnel et constituer la force motrice de l action narrative Ainsi l un des projets d Olivier Gratiolet consiste d montrer que selon l expression du professeur H M Tooten l volution est une imposture On se souvient de la r cup ration de la fameuse th orie darwinienne par le marxisme dont elle servait les objectifs rh toriques et des paroles de Friedrich Engels d clarant Darwin a inflig un rude coup la conception m taphysique de la nature en d montrant que le monde organique tout entier est le produit d un processus de d veloppement qui dure depuis des millions d ann es Or le
303. fique du langage La contrainte s apparente donc la m thode scientifique en ce qu elle repr sente une hypoth se de d part dont on va pouvoir tirer des conclusions pertinentes Par la contrainte une relation s tablit encore entre l criture et la censure De plus on peut ajouter que chez Perec le r le de la contrainte est de produire du texte comme jeu avec la censure Il en va de m me du Georges Perec Les Nouvelles litt raires Paris n 2655 octobre 1978 p 32 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit Voir Hans Hartje Bernard Magn et Jacques Neefs Cahiers des charges de La Vie mode d emploi Georges Perec Paris CNRS ditions et Zulma 1993 3 Georges Perec La Disparition Paris Deno l 1969 415 d doublement des signifiants dans les jeux homophoniques du recueil de Voeux Toutes les programmations oulipiennes manifestent l extraordinaire potentialit des contraintes et des combinatoires mises en oeuvre par Perec C est aussi ce que l on constate lorsque l on tablit une confrontation philosophique entre les l ments de la cit id ale et ceux des choses que je voudrais faire avant de mourir Ces utopies perecquiennes constituent une tentative de connaissance plus personnelle au travers de listes qui expriment ses aspirations les plus intimes L ultime combinatoire de la cuisine repr sente finalement les capacit s des combinaisons multiplier une forme de connaissance
304. fit l exp rience au d partement de neurophysiologie du C N R S Il nous livre lui m me dans une entrevue la d couverte du savoir scientifique qu il fit dans le cadre de son travail de documentaliste Les seuls savoirs dont j ai sciemment tir parti dans mon travail sont ceux dont le langage pour des raisons professionnelles m tait vraiment familier la neurophysiologie et la documentation bibliographique information retrieval Cette formation rigoureuse mais involontaire le conduisit crire les textes suivants Experimental demonstration of the tomatotopic organization in the Soprano Cantatrix sopranica L Georges Perec Laboratoire de physiologie Facult de m decine Saint Antoine Paris France Distribution spatio temporelle de inos Victoria Coscinoscera_tigrata carpenteri Coscinoscera punctata Barton et Coscinoscera nigrostriata d Iputupi par Pogy O Brien Department of Comparative Entomology Fitchwinder University Swetham Mass USA et Johann Wolfluss Department of Mathematical Biology 4 Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner LA op cit p 4 II Georges Perec Experimental demonstration of the tomatotopic organization in the Soprano Cantatrix sopranica L in Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques Paris Seuil 1991 p 11 33 concernant la premi re diffusion du texte voir la page 117 71 University of Canberra Australia Une amiti scientifiqu
305. fonder une v ritable anthropologie de l homme bas e sur l merveillement pour le quotidien Pour illustrer sa pens e Perec fait allusion Jules Verne et probablement son roman Le Ch teau des Carpathes o l on assiste la mise en oeuvre d un cylindre enregistreur capable de reproduire et de transporter les sons Cet tonnement na f pour les innovations scientifiques et techniques du XIX si cle qui ont fascin Jules Verne devrait pouvoir se comparer celui que nous pourrions d couvrir dans l insignifiant Perec nous livre alors les domaines o pourrait se concentrer cette improbable cat gorie la brique le b ton le verre nos mani res de table nos ustensiles nos outils nos emplois du temps nos rythmes Par ces indications il nous propose toute cette amplification de l insignifiant Il est videmment beaucoup plus exhaustif que Camus qui ne se borne qu aux actes aux paroles et aux pens es des hommes Perec va tablir un inventaire beaucoup plus complet de l insignifiance Non seulement la fin de son article Approches de quoi mais encore dans Esp ces d espaces dans son chapitre sur la rue o il ouvre une rubrique Travaux pratiques Nous retrouvons alors une mise en parall le des injonctions qu il lance dans ces deux textes Georges Perec Approches de quoi in L Infra ordinaire op cit p 12 Jules Verne Le Ch teau des Carpathes Paris Hetzel 1882 r diti
306. ges Perec W ou le souvenir d enfance Paris Deno l 1975 173 l an antissement syst matique des hommes pour ne plus trouver surprenante la m diocrit des performances enregistr es le 100 m tres se cours en 23 4 le 200 m tres en 5l Pour Dan comparer ses r sultats ceux de Jazy ne peut que le conduire au suicide m me s il invoque le retrait de son champion de la comp tition L Athletic Club de Saint Mouezy ne peut former de v ritables athl tes Dan Loch re est un espoir sans espoir Il est pourtant le fr re de Zazie il ressemble aussi Jazy Mais il se suicide en se jetant du haut du pont du chemin de fer au moment du passage du rapide de Patris Cette mort violente illustre videmment la destin tragique d une famille dont le sort est de d frayer constamment la chronique La m re de Zazie avait en effet ex cut froidement son mari coup de hache fait divers voir le titre de Perec dont tous les journaux s taient fait l cho Zazie liche la mousse de son demi puis elle r pond Vous lizez les journaux Des fois Vous vous souvenez de la couturi re de Saint Montron qui a fendu le cr ne de son mari d un coup de hache Eh bien c tait maman Et le mari naturellement c tait papa Mais encore le train rapide Paris voque irr sistiblement le m tro parisien Le contraste des vitesses rend compte de l acc l ration de la mort de l athl te d sesp r Le suicide matinal
307. girait l ensemble des ph nom nes est probl matique Auguste Comte garde l espoir mais reste dans l hypoth tique et Perec d nie toute possibilit de trouver la solution 5 Ibid p 155 Auguste Comte Cours de Philosophie positive tome XI Paris La Librairie Scientifique Industrielle de L Mathias p 324 17 Ibid p 326 D 2 dde 10 106 riada 206 d finitive Elle n existe pas et n existera jamais cela se lie la probl matique de l abstraction La langue que nous parlons chaque jour est terriblement abstraite Perec r agit contre l abstraction par exemple cette r plique dans La Poche Parmentier La vieille femme Les sacs les torchons les journaux les petits couteaux la bassine tout a c est du r el on peut toucher on a quelque chose faire c est pas du bavardage c est utile la soci t Il nous est loisible de sortir gr ce Perec du cercle infernal des sp culations abstraites de la doxa contemporaine Pour cela il faut rejeter cette vision ordonn e du monde que nous offre l humanisme C est cet humanisme que le Roquentin de La Naus e avait largement parodi et que l Homme qui dort de Perec retrouve incidemment dans la confusion des signes Combien d histoires mod les exaltent ta grandeur ta souffrance Combien de Robinson de Roquentin de Meursault de Leverk n et Des mots sans suite porteurs de sens embroussaill s tournent en rond autour d
308. gnalant que la violence faite aux noms de famille correspond celle dont l individu lui m me a pu tre victime Finalement se rattache cette vaste qu te identitaire la d marche de Perec New York lorsqu il part enqu ter sur les immigrants d Ellis Island Son essai R cits d Ellis Island Histoires d errance et d espoir crit en collaboration avec son ami le cin aste Robert 7 Roland Barthes S Z Paris Seuil 1970 Georges Perec La Disparition op it What a man in Collectif Oulipo Atlas de litt rature potentielle Paris Gallimard 1981 et 1988 p 214 216 Histoire du lipogramme in Collectif Atlas de litt rature potentielle op cit p 73 89 75 Georges Perec W on l souvenir d enfance Paris Deno l 1975 7 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 359 361 Voir aussi David Bellos Perec et Saussure A propos de La Vie mode d emploi in Parcours Perec op cit p 92 93 29 Bober confirme l importance de la lettre dans l identification individuelle Comme le golem pragois le sort de l immigrant tait li la lettre que les officiers d immigration am ricains tra aient sur son dos L approche autobiographique de Perec est tout fait nouvelle Ses recherches tr s vari es rassemblent une multitude de connaissances h t rog nes pouvant d finir son identit Ces connaissances sont principalement centr es sur la lettre et tout le domaine sp
309. graphie La narration devient alors une cuisine qui d termine un classement particulier la personnalit d un crivain classement qui est la fois une vision du monde et aussi un style et donc son langage Le langage du quotidien se veut une exploration d un nouveau savoir Cette exploration est fond e sur des proc d s rh toriques que nous avons mis en lumi re depuis l accumulation les rythmes descriptifs jusqu aux jeux de mots les plus divers Mais le proc s que fait Perec de l insignifiant et du quotidien produit finalement un renversement copernicien des valeurs En effet ce qui reste de l insignifiant n est plus le panier de la m nag re mais bien plut t l actualit internationale avec les agissements du pr sident Kennedy Le panier de la m nag re n est insignifiant que pour ceux qui ne veulent pas voir la r alit c est dire tous ceux qui s accommodent de la soci t telle qu elle est Perec d montre ainsi que la vraie vie n est pas ailleurs Il transforme ainsi une num ration usage politique en un usage personnel Il montre encore par cette vision du monde d finie par un langage qu il s agit bien pour l crivain d un probl me de langage dont la fatalit comme le montre Roland Barthes propos de Loyola est l articulation et le classement qui le s pare du r el du continu de l indiscernables La cr ation d un langage sp cifique exprime videmment les potentialit s de
310. h l t L ccl siaste Paris Les ditions de Minuit 1951 Pour les lettres corps voir le tr s bel ouvrage d Andr Massin La Lettre et l image Paris Gallimard 1993 notamment le sous titre La figuration dans l alphabet latin du VIII si cle nos jours pr face de Raymond Queneau et commentaire de Roland Barthes Roger Bastide postface La Boutique obscure op it p 5 1 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Isl histoires d errance et d espoir Paris ditions du Sorbier 1980 390 des vanit s et tout est vanit Quel int r t l homme toute la peine qu il prend sous le soleil Retrouvant cette antique pose des proclamations publiques Georges Perec en voyage aux tats Unis s assigne cette mission insolite espionner l errance la dispersion le poudroiement incertain des destin es individuelles de ces millions de corps affam s vou s la souffrance et la maladie tourment s et s par s qui ont transit par Ellis Island Ce que moi Georges Perec je suis venu questionner ici c est l errance la dispersion la diaspora Ellis Island est pour moi le lieu m me de l exil c est dire le lieu de l absence de lieu le non lieu le nulle part Il faut questionner la logique manich enne de l migration immigration c est dire la relation entre l ext rieur et l int rieur ou comment passer de l ext rieur l int rieur Pour cela il faut f
311. i res errata puis fin de couverture Tout cet arsenal complexe n a pas manqu d int resser galement Perec et l on ne doit pas s tonner que d s l expos de ses projets Maurice Nadeau l une des figures du p ritexte savoir l index de ses oeuvres retienne son attention Ainsi voici comment il annonce quelques uns de ses projets Mon second projet avait pour titre L ARBRE Histoire d Esther et de sa famille C est la description la plus pr cise possible de l arbre g n alogique de mes familles paternelle maternelle et adoptive s Comme son nom l indique c est un livre en arbre d veloppement non sl G rard Genette Palimpsestes La litt rature au second degr Paris Seuil 1982 Collectif Oulipo La Biblioth que oulipienne volume 3 Paris Seghers 1990 Paul Fournel Banlieue p 183 7 Paul Fournel ibid pp 183 214 amp Georges Perec Je suis n op cit Lettre Maurice Nadeau pp 51 66 al me 265 lin aire un peu con u comme les manuels d enseignement programm difficile lire la suite mais au travers duquel il sera possible de retrouver en s aidant d un index qui sera non un suppl ment mais une v ritable et m me essentielle partie du livre plusieurs histoires se recoupant sans cesse Hormis l id e de l arbre g n alogique qui recoupe l arbre porphyrien on remarque l importance attach e l index Mais ce n e
312. ialis adapt tel ou tel type de recherche il est vident que Perec ne se prive pas d employer les termes rattach s directement telle ou telle discipline scientifique Dans Cantatrix_sopranica_L nous croulons sous une avalanche de trigeminal bitrigeminal quadratrigeminal supra infra et inter trigeminal de macular saccular intricular ventricular monocular binocular triocular auditive et digestive Expert en d rivation pr fixale et suffixale Perec utilise toutes les ressources des radicaux scientifiques pour former des mots ici des adjectifs qualificatifs aptes d peindre des structures Les inventions du vocabulaire passent videmment et de loin les aspects descriptifs du texte scientifique et Perec n h site pas inventer de nouvelles disciplines scientifiques qui attendent leur avalisation Ainsi avons nous ce m lange h t roclite de disciplines reconnues et invent es propos des champs d tude de Marcel Gotlib dans les domaines de la criminologie compar e de l anthropologie structurale de la musicologie analytique de la stomatologie clinique Bernard Magn La Cantatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in Perecollages 1981 1988 op cit p 198 3 Georges Perec Experimental demonstration of the tomatotopic organization in the Soprano Lanz sopranica L in Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques op
313. ichel Butor in Michel Butor Colloque de Cerisy op cit p 25 et Bernard Magn ibid p 109 TT Bernard Magn ibid p 108 e Ta MAS D 2 3 1 2 217 La citation traditionnellement tablie par les dispositifs canoniques de la typographie savoir les deux points les guillemets etc Elle ne nous concerne pas ici puisqu elle ne fait pas appel des connecteurs quel que soit leur aspect L emprunt pur et simple qui confine au plagiat les liens entre le texte source et le texte cible peuvent tre tablis par des connecteurs narratifs C est ce que nous pourrons examiner dans la reprise par Perec d un texte de Kafka L vocation explicite ou implicite du texte source par le texte cible peut confiner au pastiche Les liens d intertextualit s tablissent naturellement sur la base d isotopies parall les Ces isotopies parall les sont affich es par un ou plusieurs lex mes qui manifestent la transparence de la similarit entre le texte source et le texte cible C est ce que nous pourrons examiner dans la reprise avou e de Flaubert par Perec Dans tous ces cas ces m canismes recoupent la conception paragrammatique du langage po tique telle que d finie par Julia Kristeva conception que l on peut tendre l ensemble du discours litt raire Cette conception s articule sur les trois th ses suivantes Le langage po tique est la seule infinit du code Le texte litt ra
314. id p 226 3 Ibid p 227 Ibid p 441 Ibid p 442 Ibid p 226 48 Il nous faut revenir au cas d un savant remarquable celui de Cinoc esp ce de professeur Cosinus du roman Dans La vie mode d emploi ce personnage est par excellence le parangon du savant Le professeur Cinoc au nom vocateur confine au st r otype l g rement d vi du savant illumin Le savant authentique ne saurait tre qu un vieillard rudit et souffreteux et nous le pr sente ainsi Cinoc est dans sa cuisine C est un vieillard maigre et sec v tu d un gilet de flanelle d un vert pisseux La maigreur du savant est certainement attribuable son r gime alimentaire Le narrateur nous apprend que Cinoc mange m me la bo te imparfaitement ouverte des pilchards aux aromates comme L on Marcia qui lui ne se nourrit plus que de lait de petits beurre et de biscuits aux raisins Cinoc se contente de repas frugaux qui ne risquent pas de lui embrumer l esprit et de le conduire l embonpoint Il repr sente dans son isolement une rudition confront e au savoir public du dictionnaire s oppose la destruction des mots Cinoc est tueur de mots et le r tablissement des mots oubli s t che laquelle il se consacrera sa retraite Il incarne videmment le savant individualiste isol enferm dans un monde int rieur qui le prive sans frustration aucune Ibid p 359 7 Ibid p 360
315. iduelle de chacun Nous pouvons consid rer que le langage est selon le mot de Lavelle la m moire de l humanit De cette esp ce de langage de la m moire que nous retrouvons Ibid p 92 st Ibid p 83 Voir Armand Cuvillier Cours de Philosophie I Paris Armand Colin 1954 p 195 bh ke nr wg ba AR 297 dans le recueil de souvenirs de Perec ce dernier nous explique le principe de principe en est simple tenter de retrouver un souvenir presque oubli inessentiel banal commun sinon tous du moins beaucoup Au del de la simplicit affirm e du principe nous sommes confront s ainsi que nous l avons vu plusieurs tapes du processus de rationalisation et de construction des souvenirs Ces tapes sont les suivantes le choix des souvenirs leur pr sentation et leur lecture Nous avons d j statu sur le choix des souvenirs comme d pendant de la sensibilit individuelle de l auteur ce que confirme par exemple Paul Schwartz While Perec memories are usually collective they are also selective It is sufficient to look though the carefully prepared index noting thirty nine references to movies actors twenty five references to film eighteen references to movies theaters twenty six to music hall and sixteen references to language to recognize that in the conscious or unconscious process of selection Perec has imposed his own interests tastes and obsessions on these memories
316. ie mode d emploi op cit p 450 Ibid p 226 3 Ibid p 460 M atu 47 suffisait de lire quelque chose une fois pour s en souvenir jamais ou encore que ses souvenirs ressurgissent volont de sa m moire prodigieuse Il en va de m me d un savant peu orthodoxe de Lino Margay et de la science du banditisme international Lino Margay d couvrit cette occasion qu il poss dait une m moire tonnante quand il sortit de prison en juin mille neuf cent quarante deux il n ignorait plus rien du pedigree des trois quarts de la p gre sud am ricaine Ceci le conduira recevoir le sobriquet respectueux d el Fichero le Fichier Science et m moire peu importe la discipline vont de pair dans l imaginaire populaire Perec montre que les innovations sont li es au r emploi des connaissances du pass d o l importance de toujours ressasser pour atteindre la d couverte Ce sont les techniques de L on Marcia largement prouv es qui consistent tablir de surprenantes synth ses sur la base des comparaisons de renseignements Il est vident que ces talents exceptionnels ont t encourag s et form s par un environnement hors du commun Le savant ne na t pas ainsi sortant tout quip du cerveau de la science universelle Et Perec de s ing nier fournir grands coups de descriptions une multitude de d tails qui r v lent les conditions du savoir scientifique Ib
317. iens Wolf Gang amas des housses Mose s art Wolfgang Amadeus Mozart ou encore Fi Lis peu drogue ose Philippe Drogoz S Voir ibid p 22 et 60 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 185 p 52 3 Georges Perec Voeux op cit 175 des titres de ses propres oeuvres 2 Qu elle p te Yves loa Guy donc Rom o fondent la cour l petit v lo guidon chrom fon r des jazzmen am ricains Bic se baille des rebecs Bix Beiderbecke des auteurs de romans policiers J aime a de laides chaises James Hadley Chase des cin astes voqu s par le titre de l un de leurs plus c l bres films Ire au chyme ah Mona m re Hiroshima mon amour d Alain Resnais Il s agit aussi comme nous venons de le voir du titre de l une des oeuvres de Raymond Queneau Georges Perec reprend son compte les m thodes oulipiennes que Marc Lapprand a fort justement d fini comme une saturation du signifiant Il s agit en effet de doubler les effets du signifiant originel noms propres titres d oeuvres proverbes etc en produisant un nouveau signifi qui vient s adjoindre parall lement au premier James Hadley Chase se d double en J aime a de laides chaises pour illustrer le texte suivant Ne me parle jamais de Knoll de Thonet ou de Charles Eames Moi pour m asseoir ce que je pr f re ce sont des si ges moches Le mod le oblig tant celui
318. ientifique et le texte litt raire qui peuvent jouer les uns contre les autres et produire dans une synth se inattendue des savoirs inaccoutum s L analyse discursive du texte scientifique reste d velopper Nous pourrons cependant par l examen d un court texte appartenant ce champ d exp rience laborer quelques unes des caract ristiques les plus videntes du texte dit scientifique Nous prendrons comme exemple le r sum d une communication donn e en biologie cellulaire au 62 congr s de l ACFAS tenu Montr al l UQAM du 16 au 20 mai 19947 tude de la cin tique de l infection caus e par Streptococus suis s rotype 2 dans les cellules phagocytaires S suis est un important pathog ne chez le porc S suis serait transport au niveau du syst me nerveux central par des monocytes infect s Toutefois aucune donn e n existe sur le temps de la survie de la bact rie dans les phagocytes ni sur les diff rentes tapes menant la maladie L objectif des travaux est d tudier la phagocytose de diff rentes souches Georges Perec Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques op cit p 24 voir Bernard Magn lt La Cantatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in Perecollages 1981 1988 op it p 203 8 Bernard Magn ibid p 203 7 Recueil des r sum s de communications 62 Congr s de l ACFAS du 16 au 20 mai 1994
319. iff remment de toutes les productions contemporaines malgr l actualit du sujet trait savoir une tude quasi sociologique d un couple aux prises avec les lois du march Nous verrons en effet que les phrases tr s soutenues de Perec doivent beaucoup au style de Flaubert Il en sera de m me lorsque nous examinerons les ph nom nes d intertextualit qui se manifestent dans La Vie mode d emploi entre Perec et Kafka Non content de r cup rer quelques phrases chez Flaubert et d imiter son style dans Les Choses dans La Vie mode d emploi Perec va ench sser pratiquement toute une nouvelle de Kafka dans son propre texte Ce proc d sera consid r comme une citation pour se conformer la contrainte du texte perecquien Mircea Marghescou Le Concept de litt rarit La Hague Paris Mouton 1974 p 55 Georges Perec Les Choses op cit 7 Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 215 chaque chapitre de La Vie mode d emploi devant int grer un certain nombre de citations Il n en reste pas moins que l int gration de la nouvelle de Kafka m rite d tre analys es De plus il sait aussi reprendre certains textes en les d formant serlon une parodie comme cela sera le cas de l incipit de Marcel Proust dans La Recherche Mais encore l tablissement de p ritextes comme des index ou des chronologies manifeste d autres possibilit s offertes par l intertextualit L examen de tous
320. igne Histoire et analyse d un concept Bruxelles ditions Labor 1980 p 40 3 Ibid p 29 Voir ibid pp 31 et 33 IS Thid p 29 95 l insignifiant se constitue comme signifiant et qu il est donc capable de rassembler une multitude variable de signifi s devenant eux m mes des signifiants pour d autres signifi s partir de cette identification on pourra d sormais d finir les caract ristiques de l insignifiant ce qui le constitue comme tel Albert Camus s est galement int ress cet aspect de l insignifiant Dans son Cahier des saisons publi en 1959 il traite de cette question dans un article intitul De l insignifiance Voulant crire une anthologie de l insignifiance il se heurte d embl e la d finition du concept Il rejette l tymologie et confirme ce que nous venons d exposer savoir que lt l insignifiance n est pas ce qui n a pas de sens De ce court texte le plus int ressant demeure certainement les exemples de l insignifiant que Camus retient dans le domaine du comportement humain Au contraire les plus futiles des faits un nez que l on gratte des lettres d imprimerie qu on remplit au crayon un lacet toujours d nou la qualit d un papier lettres une fa on de parler du nez de ne jamais s essuyer les pieds de toujours caresser les chats rebrousse poil de dire vous sa femme de marcher syst matiquement la droite de
321. ignifiants Perec passe l examen des quatre r gnes le min ral terre sable et gravier de la pierre trottoirs fontaine glise maison de lasphalte Voir Georges Perec Esp ces d espaces op cit pp 70 73 Voir pour le jeu du tennis barbe Georges Perec Je me souviens Paris Hachette 1978 entr e n 266 p 70 Georges Perec Tentative d pui nt d un li isien op cit p 13 7 Ibid p 13 2 Ibid p 14 116 le v g tal lt des arbres feuillus souvent jaunissants et une salade fris e d bordant partiellement d un cabas l animal des pigeons et une esp ce de basset l humain des tres humains L examen exhaustif de tout ce que peut rassembler la Place Saint Sulpice un vendredi 18 octobre 10h30 se termine par deux grandes rubriques en italiques les trajectoires et les couleurs Pour ces derni res la dominante chromatique reste le bleu tandis que pour les trajectoires elles concernent surtout les autobus dont Perec poss de une connaissance remarquable des trajets Cette rubrique des trajectoires est interrompue plusieurs reprises soit par des lectures de slogans sur le Roquefort par deux fois par l observation de la fontaine sans eau soit par celle de trois clochards aux gestes classiques boire du rouge la bouteille sur le sixi me banc et surtout par une co ncidence remarquable La plupart des gens ont au moins une main occup
322. il s agit d un endroit tr s agr able de la rive gauche situ dans un quartier o des diteurs comme Dunod et des libraires sont tr s nombreux du fait de la proximit des facult s Autrefois quartier des d vots avec un s minaire une glise et une fontaine o sont sculpt s les grands orateurs chr tiens des si cles classiques la Place Saint Sulpice demeure un haut lieu touristique de Paris Apr s avoir pr sent le site choisi Perec ne s attarde pas sur ce qu il estime devoir tre l objet des guides et des documents d information touristique Par contre il insiste avec pr cision sur ce qui l int resse Ce que l on ne note g n ralement pas ce qui ne se remarque pas ce qui n a pas d importance ce qui se passe quand il ne se passe rien sinon du temps des gens des voitures et des nuages Nous constatons d embl e un d calage entre le site choisi qui n a rien d anodin et l objectif de Perec qui consiste capturer l insignifiant Tout se passe donc comme s il choisissait un endroit remarquable de Paris pour y observer ce qui ne l est pas On peut affirmer que chacune des probl matiques que nous avons envisag es l instar de Catherine Kerbrat Orecchioni sont g n ratrices des tapes que Perec va suivre pour puiser l insignifiant avec rigueur Fid le sa recherche de l exhaustivit il va Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit pp 12
323. incipe expliqu par Derrida selon lequel lt l criture est ant rieure au langage phon tique nous n aurons point de peine imaginer que les c r monies initiatiques du pass reposaient sur des chants et des danses la danse tant consid r e comme une criture du corps Le d roulement du syntagme initiatique pouvait s organiser ainsi le chant la 3 Voir Royston Pike op cit p 161 voir aussi Mircea Eliade Naissances Mystiques Essai sur quelques types d initiation Paris Gallimard 1959 Voir Royston Pike Dictionnaire des Religions op it p 161 s Tbid p 161 Voir aussi Gilbert Durand Les Structures anthropologiques de l imaginaire Paris Dunod 1984 La descente et la coupe p 225 320 6 Jacques Derrida De la Grammatologie op cit p 17 er mes mt ve 381 danse le dessin la lettre et l criture notamment avec le sang selon le phon tisme de la langue Ce sont donc des processus hautement culturels qui pr sident la formation du langage initiatique Le signifiant musical recoupe et m me vient se confondre avec les structures phoniques du langage articul Jakobson nous montre toute l importance de cet aspect du langage en rappelant que comme les chelles musicales les structures phon matiques constituent une intervention de la culture dans la nature un artifice qui impose des r gles logiques au continuum sonore La rationalisation progressive des sons produit simul
324. int resse la p rig ographie vocalisable dans son Petit atlas g o homophonique des d partements de la France m tropolitaine et d outre mer nous lisons ce vers consacr l Yonne Sans se noyer en aval on joignit ton aire l eau sert Sans anticiper sur une analyse des pratiques homophoniques de Perec nous retrouvons parmi ces proc d s le d doublage du signifiant comme si l une des facettes de ce dernier appelait par son montage des signifi s plus faciles retenir Dans le cas du Je me souviens de Perec nous absorbons le d partement et quatre villes l Yonne Auxerre Tonnerre et Avallon dans le cas de Mich le M tail cinq villes Noyers Avallon Joigny Tonnerre et Auxerre la m moire ne perd pas au change Nous quittons progressivement l enseignement scolaire pour examiner les d viations auxquelles il donne lieu par voie de la n cessit et de la contrainte Pour terminer nous examinons avec ces transformations des souvenirs du savoir scolaire le jeu de la rupture du lieu commun Premier clich soumis notre sagacit ce souvenir Je me souviens que TT Ibid index p 132 et 135 Mich le M tail Petit atlas g o homophonique des d partements de la France m tropolitaine et d outre mer in collectif Oulipo La Biblioth ipi Volume 3 Paris Seghers 1990 p 32 Voir Andr e Chauvin Jeu de m moire et histoire de mots dans Je me souviens de Georges Perec in Les
325. iolence faite aux noms appelle encore tous les mauvais traitements que l on a pu faire subir aux individus qui les portent Le comble de l chec dans cette reconstitution ne peut conduire qu la folie et l ali nation la plus compl te Mais la fantasmatique du nom offre encore bien d autres possibilit s plus attrayantes que l ali nation mentale La r interpr tation du nom patronymique de Perec qui nous renvoie trou rupture cassure brisure en h breu convoque aussi l image du vide de la b ance universelle gouffre immense o vient s engloutir l ensemble des processus de signification La tentation de Perec reste toujours de dire l indicible c est 404 dire de parvenir un impossible savoir ce savoir perdu que l on ne peut atteindre On comprend d s lors l attrait qu exercent sur Perec toutes les formes d rudition C est lui qui r digera une tr s rudite histoire du lipogramme Cette histoire construite elle m me selon des structures contraintes lui permet une exp rimentation de la th orie Cette exp rience conduira Perec une mise en pratique dans la r alisation de ses oeuvres lipogrammatiques Ce seront le lipogramme en a et surtout La Disparition et Les Revenentes Le lipogramme en a qui se termine par abracadabra recoupe t il l impensable qui a tant fascin Perec Et ce d autant plus que le mot pourrait devenir un palindrome Les ouvrages lip
326. iotique Fragment avec Pin Up Montr al Presses de l Universit de Montr al 1985 133 p ATTALI Jacques Histoires du temps Paris Fayard 1982 318 p AUSTIN John Langshaw Quand dire c est faire traduction et introduction de Gilles Lane Paris Seuil 1970 183 p BACHELARD Gaston La Po tique de l espace Paris Presses Universitaires de France 1961 214 p BACHELARD Gaston La_Dialectique de la dur e Paris Presses Universitaires de France 1963 150 p BAECHLER Jean Qu est ce que l id ologie Paris Gallimard 1976 405 p BARTH L MY MADAULE Madeleine Bergson Paris Seuil crivains de toujours 1967 189 p BARTHES Roland L Aventure s miologique Paris Seuil 1985 363 p BARTHES Roland Le Bruissement de la langue Paris Seuil 1984 412 p 432 BARTHES Roland Le Degr z ro de l criture suivi de Nouveaux essais critiques Paris Seuil 1953 et 1972 190 p BARTHES Roland Le on Paris Seuil 1978 46 p BARTHES Roland Mythologies Paris Seuil 1957 52 p BARTHES Roland Le Plaisir du texte Paris Seuil 1973 108 p BARTHES Roland roland Barthes par roland _barthes Paris Seuil crivains de toujours 1975 192 p BARTHES Roland Sade Fourier Loyola Paris Seuil 1971 191 p BARTHES Roland S Z Paris Seuil 1970 278 p BAUDRILLARD Jean La Soci t de consommation ses mythes ses structures Paris S G P P 1970 298 p BERGSON Henri Les D
327. ir identifi s dans le texte qu on vient de Ire Il se produit suite cette annonce une d contextualisation recontextualisation des termes composant l index L effet de d contextualisation est produit au niveau de l index qui fonctionne selon la tradition comme liste alphab tique Nous avons des confrontations du genre lt Africanisme Alexandrin lt pith te oiseuse pith te contradictoire lt Hell nisme Helv tisme ven a pas Hispanisme ven a pas non plus plus loin ltalianisme y en a pas Japonisme y en a pas Jeu de mots eh oui Jeanotisme h las non La contextualisation des figures de rh toriques vise produire un texte autonome qui pourrait tre ind pendant de la sortie elle m me Mais un effet de recontextualisation pourra se produire si le lecteur cherche utiliser les termes de l index Il pourra se lancer alors dans une incertaine recherche des figures signal es Concernant les nombreuses autres modalit s possibles de jeu que d tient cet index Sylvie Rosienski Pellerin a analys trois niveaux de fonctionnement de l index de Quel Petit v lo FF Georges Perec Je suis n op cit Lettre Maurice Nadeau p 54 Georges Perec Quel Petit V lo guidon chrom au fond de la cour op cit p 113 Ibid pp 113 114 269 au niveau de la pr sentation on reconna tra m me certains points communs avec le jeu de piste Hyst rologie voir Hyst ro prot ron
328. ire est un double criture lecture Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 pp 70 72 Perec reprend pratiquement l ensemble de la nouvelle de Kafka Premier Chagrin tir e de La Colonie p nitentiaire et autres r cits Paris Gallimard 1948 pp 53 56 Georges Perec lt Emprunts Flaubert in LA n 79 pp 49 50 2 Julia Kristeva S m iotik Recherches pour une s manalyse Paris Seuil 1969 p 174 218 3 Le texte litt raire est un r seau de connexions Ainsi partant du principe avec Kristeva que le texte litt raire est un r seau de connexions nous pourrons parler de connecteurs Ce sont principalement des connecteurs intertextuels soit qu ils appartiennent au d roulement de la narration comme connecteurs narratifs soit qu ils commandent la s manticit des textes mis en pr sence selon des isotopes comparables on pourra parler alors de connecteurs s mantiques Ces connecteurs tablissent le r seau paragrammatique de l criture et de la lecture dans la similitude plus ou moins apparente de deux voire de plusieurs textes Concernant le plan de l isotopie nonciative le texte citationnel n est pas une entit homog ne Il produit une permutation de textes pris sur d autres textes et atteint de ce fait le plus haut niveau d int gration Comme le rappelle Julia Kristeva il est transposition dans la parole communicative d nonc s ant rieurs ou synchronique
329. ire pratique de la criti ntemporaine op it p 72 Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op cit p 55 257 h las o le trap ziste refusa de redescendre Chez Perec c est l annonce du drame et la rupture textuelle avec Kafka est consomm e En effet l crivain tch que nous explique la raison de l appel du trap ziste Il s agit d une trange demande il faudra d sormais lui installer deux trap zes Malgr l assurance que lui donne son impr sario l acrobate fond en larmes et para t inconsolable Il lui faut beaucoup de temps pour se calmer et s cher ses pleurs Enfin apais le trap ziste retourne sa r verie et l impr sario peu rassur sur lavenir de son prot g continue de l observer la d rob e Confirmant l volution de la di g se aussi bien chez Kafka que chez Perec l isotopie de la mort annonce le double d nouement de la nouvelle Chez Kafka il s agit des s mes n gatifs rattach s aux id es morbides qui occupent la pens e du trap ziste et dont le narrateur nous dit ceci Ces id es qui le tourmentaient puisqu elles lui taient d j venues pourraient elles jamais cesser compl tement Ne reviendraient elles pas encore plus violemment N taient elles pas un danger de mort La mort s annonce donc chez le trap ziste et se borne produire sur le front de l artiste qui tait lisse comme celui d un enfant quelques rides mal venues
330. isme qui s tablit entre la lecture et le voyage On va Tombouctou aller du Maroc Tombouctou dos de chameau en 52 jours fl che vers la droite puis on revient texte en arabe dans l autre sens Bernard Magn rel ve ce double sens lectoral et ajoute cette obsession du voyage ce jeu r current sur Tombouctou dans W ou le souvenir d enfance Je ne peux m emp cher de relier ce fragment o Perec voque la d couverte de la tombe de sJon p re des mots PEREC ICEK JUDKO suivis d un num ro matricule inscrits au pochoir sur la croix de bois encore tout fait lisibles W p 54 c est moi qui souligne ou cet autre dont plusieurs mots cl s se retrouvent comme en paragramme dans TOMBOUCTOU j allai une fois sur ce que l on peut appeler la TOMBE de mon p re C tait un premier novembre Il y avait de la BOUe par TOUT ibid p 45 Voyage et lecture obsession revigor e et confirm e par l criture Perec nous propose le d calage des 52 jours au 53 jours du roman Le gel du temps au profit de l utopie constitue le propre d un nouveau clinamen mise en place ici par Perec Nous ne pouvons trancher qu l abri de la relecture utopique du texte Le Texte par exemple est une utopie sa fonction s mantique est de faire signifier la litt rature l art le langage pr sents en tant qu on les d clare impossibles cette impossibilit de la litt rature et de l art
331. istes Ce sera le cas du recueil intitul L infra ordinaire o l on retrouve notamment une autre tentative sous forme de liste la Tentative d inventaire des aliments liquides et solides que j ai Georges Perec Esp ces d espaces Paris Galil e 1974 Georges Perec Tentative d pui nt d un li isien Op it Georges Perec Tentative de description des choses vues au carrefour Mabillon ie 19 mai 1978 mission radiophonique diffus e sur France Culture le 20 f vrier 1979 David Bellos Georges Perec une vie dans les mots op cit p 656 17 ingurgit s au cours de l ann e mil neuf cent soixante quatorze Ce dernier texte r unit deux passions de Perec la recherche obsessive du quotidien et le go t des listes qui proc de de son objectif d exhaustivit Passions que nous retrouvons exprim es de multiples mani res dans La Vie mode d emplo Jacques Roubaud a justement tent de rassembler quelques unes des listes tablies par Perec dans un article intitul Notes sur la po tique des Listes chez Georges Perec tandis que Paul Fournel parle de l une des plus vieilles formes po tiques la liste l o Perec a excell Ces tendances caract risent donc l volution de Perec dans la recherche et la compilation des connaissances Nous les retrouverons manifest es dans sa pratique de la langue et les exp rimentations qu il conduira sur le langage avan ant ainsi sa pr
332. it autorise ais ment ce dont Perec ne saurait se priver Toutefois les interf rences entre l observation et la vie priv e de l observateur produisent aussi de nombreuses conjonctions vers ce que l on pourrait d signer comme l insignifiant individuel de l observateur Celui ci vient manifester comme l indique galement Catherine Kerbrat Orecchioni une s rie de r actions de type affectif transmises sur le ton de la confidence Ainsi il nous relate ses activit s qui concernent aussi bien ce qu il boit du type conclusion d un constat d cisionnel Je bois une gentiane de Salers Je bois un Vittel alors qu hier je buvais un caf que ce qu il mange J ai mang un sandwich au saucisson en buvant un ballon de bourgueil J ai froid je commande un vieux marc ou Je mange un sandwich au camembert Il nous avoue aussi bien son int r t pour son entreprise que sa lassitude Curiosit inassouvie ce que je suis venu chercher le souvenir qui flotte dans ce cafe Jl Il est quatre 35 Ibid p 52 Voir Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit op cit pp 144 145 7 Voir ibid p 138 Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit pp 39 42 45 50 et 57 Ibid p 46 132 heures cinq Lassitude des yeux Lassitude des mots dl est cinq heures moins le quart J ai envie de me changer les id es Lire Le Monde Ch
333. it provenir d un palindrome que le critique Phillipe Dubois identifie comme ablanathanalba une formule magique de gu rison De bien plus nombreuses autres tymologies plus ou moins fantaisistes du mot magique pourraient venir s ajouter notre examen mais pour de tout aussi nombreuses raisons il convient de s arr ter aux gnostiques basilidiens qui 19 Thid p 123 Roland Barthes S Z Paris Seuil 1970 p 267 Voir Royston Pike Dictionnaire des Religions op cit p 3 Voir Philippe Dubois Petite Histoire des Palindromes in Litt ratures Toulouse Service des Publications de l Universit de Toulouse Le Mirail printemps 1983 n 7 p 129 385 surent employer en premier le nom mystique Ainsi c r monie initiatique mot magique gnostique basilidienne nom mystique corroborent tous la fonction du lipogramme Celle ci est de cacher en premier le langage et en second le contenu id ologique du message N oublions pas que si compliqu s qu ils soient en certains cas les rites d initiation sont destin s agir sur le subconscient du r cipiendaire De cette trange c r monie provient certainement la conclusion de la pr sentation de Marcel B nabou Achevant en effet la pr sentation de son ouvrage intitul Jette ce livre avant qu il soit trop _tard il joignit le geste la parole pour confirmer dans cet acte illocutoire l invitation du titre De cette m me ma eutique provient en
334. ivain au scripteur l criveron au scriptor est d volue lt l criture comme pratique comme travail comme jeu Il s agit de toute une conception de savoir qui est boulevers e par l intervention du scriptor Cette ignorance lexicographique celle du lipogramme s accompagne d une m connaissance critique aussi tenace que m prisante Quant l crivain il a pour r le de transmettre les grandes id es d un savoir litiste et aristocratique dont les capacit s d absorption sont d termin es par la rentabilit scientifique n o positiviste Par exemple au XVIII si cle l lectricit que l on venait de d couvrir n apparaissait que comme un jeu et une curiosit l image des combinaisons chimiques il a fallu le XIX et la d couverte des applications de Georges Perec Histoire du lipogramme in collectif Oulipo La Litt rature potentielle op cit p 75 7 Ibid p 75 2 Ibid p 75 3 Ibid p 75 156 l lectricit pour faire de cette nergie le champ d application de plusieurs sciences On peut penser Jules Verne qui a su tirer le meilleur pati des possibilit s litt raires de l lectricit et de ses applications ce savoir hautement aristocratique sont attach es les conceptions valorisantes de Ar auxquelles le scriptor d nie tout pouvoir lt D abord lui qui n avait pas pour un carat d inspiration il n y croyait pas par surcro t l inspiration
335. je vais par exemple vous montrer au tableau que quand j ai crit Les Choses je me suis servi de quatre crivains FLAUBERT NIZAN LES CHOSES ANTELME BARTHES Ce qui nous int resse ici est Flaubert puisque Perec l a utilis dans son roman son sujet Perec nous explique ceci Quant Flaubert il m a servi de trois mani res Premi rement at repris des images enfin des images des sc nes que Flaubert utilise dans L ducation sentimentale En particulier il y a une vente aux ench res dans L ducation sentimentale il y en a une dans Les Choses il y a un voyage en bateau dans L ducation sentimentale il y a un voyage en bateau dans Les Choses Il y a une manifestation politique dans L ducation sentimentale et dans Les Choses a c est le premier emprunt que j ai fait Flaubert Le deuxi me je l ai fait en piquant une trentaine de phrases sans mettre de guillemets et il n emp che que personne ne le voit et de toute facon m me si on le voyait Et la troisi me chose c est que j ai construit mes phrases exactement comme Flaubert construit les siennes c est dire avec un rythme ternaire Bon Georges Perec Les Choses op cit 7 Mireille Ribi re Parcours Perec op it conf rence de Perec Warwick intitul e Pouvoirs et limites du romancier contemporain pp 31 40 a Ibid p 35 Ibid p 36 231 Afin de servir notre analyse nous retiendrons deu
336. ka publie La Colonie p nitentiaire en 1919 ibid p 69 et Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits Paris Gallimard 1948 derni re page de couverture 248 malencontreusement de rattraper la mode et comme Achille il ne rattrape jamais la tortue en d pit de sa bonne volont vidente Il est donc qualifi ironiquement de pr curseur par le narrateur qui ne fait rien d autre que d annoncer la rencontre du trap ziste conditionn e elle m me par les checs r p t s du personnage L analyse de l int gration d un r cit tranger un r cit premier passe par la conjonction de trois niveaux servant de connexions un premier niveau que nous appellerons celui du d roulement narratif o s articulent les diff rents narrateurs un niveau actantiel o interf rent les actants et un niveau s mantique o se produisent les investissements s miques de connecteurs Examinons tout d abord le d roulement narratif de l histoire du trap ziste Nous remarquons trois zones ponctuelles d int gration savoir une introduction qui m nage la premi re occurrence du r cit second ou impli citation pour reprendre la terminologie de Bernard Magn ensuite la mi r cit une interruption et une transformation du r cit second et finalement une conclusion o se produit un d gagement fictionnel par rapport l impli citation du texte de Kafka Le processus d int gration de l histoire du trap ziste empr
337. l 1957 1958 Voir St phane Santerres Sarkany Th orie de La Litt rature Paris Presses Universitaires de France 1990 La Souverainet du lecteur TT John Pedersen Perec ou les textes crois s op cit p 126 HN mt 274 entre eux et donc tablir une nouvelle herm neutique textuelle Finalement les cas d intertextualit que nous avons analys s chez Perec convoquent les trois possibilit s de l volution de l intertexte chez notre auteur Le premier cas d intertextualit celui de Flaubert Perec nous r v le une premi re strat gie compos e de trois modulations Tout d abord il s agit de reprendre un style ce que Perec appellera le rythme ternaire Il reprend aussi tout un syst me lexico s mantique qui caract rise le pseudo romantisme de Flaubert c est ce que Perec appellera des images des sc nes faute de mieux C est aussi les phrases compl tes piqu es par Perec Flaubert Dans tous les cas il s agit bien d un r emploi qui fonde une nouvelle perspective de la critique litt raire Cette derni re m thode ouvre sur l emprunt cat gorique telle celui de la nouvelle de Kafka op r dans La Vie mode d emploi Comme on le sait cette assimilation de texte emprunt ne fait qu ob ir l une des contraintes de l ouvrage Perec dresse une liste de sujets traiter dans chaque chapitre et il incorpore notamment cette liste le nom de deux auteurs dont les textes
338. l faut parcourir les distances le plus rapidement possible g n ralement en chemin de fer et d autre part il faut trouver un espace but comparable dans sa rigidit et dans son altitude au trap ze ironiquement on d couvre qu il s agit du filet bagage d un compartiment de chemin de fer o va se coucher le malheureux trap ziste l arriv e le supplice s ach ve et tous les orifices sont largement ouverts pour permettre l acrobate de s y engouffrer sans d lai et d atteindre nouveau les sommets de son art Nous assistons alors une nouvelle transformation de la narration tant donn que le but de l impr sario est de faciliter son artiste prot g le retour l tat premier dans un r le sa hauteur c est dire son installation permanente sur son trap ze Kafka Jean Paul Sartre Situations I Paris Gallimard 1947 Explication de L tranger p 112 Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op cit p 54 et Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 71 255 signale cette ascension du trap ziste vers les hauteurs comme un instant remarquable et celui qui contemple avec satisfaction ce retour l quilibre supr me et primordial de l acrobate est bien s r son impr sario Dans le r cit de Kafka c est le narrateur omniscient extradi g tique qui nous rapporte l pisode mais chez Perec c est Rorschash lui m me qui en tant qu impr
339. la multitude des objets qui composent la vie ordinaire des citadins ordinaires Ces choses sont fabriqu es par l homme elles sont les produits de l activit dirig e et intelligente de l homme Les tenants de la sociologie et les attard s de la psychologie veulent tout prix rattacher Les Choses ce grand continent du connu o tout est si clairement ordonn Ainsi Paul Schwartz d c le les affinit s il n est pas le seul et il est loin d tre dans l erreur entre le roman de Perec et Flaubert et d couvre dans Les Choses the Bildungsroman of J r me et Sylvie s sentimental education Mais la vie des personnages n est pas qu un pr texte au sein du foisonnement des choses Il s agit aussi d un Flaubert sociologue car la qu te romantique du bonheur est remplac e par la recherche fr n tique des choses ces biens spirituels concrets qui composent l univers mental de l individu des ann es soixante meubles divans villas v hicules voyages qui sollicitent le d sir des bien nantis en Occident Paul Schwartz insiste sur cette tendance du roman et cette motivation de Perec en relevant l une des d clarations de l auteur Voir le titre du roman de Perec Les Choses une histoire des ann es soixante Paul Schwartz Georges Perec traces of his passage Birmingham Summa Publications Inc 1988 p 5 222 Toute une sociologie am ricaine et fran aise a commenc d vo
340. la diversit des crits de Perec il est possible de consid rer l oeuvre selon une vision panoramique Dans une telle recherche o nous avons pour objectif de suivre justement l volution de Perec au travers des relations qu il tisse avec la connaissance il est impossible de renoncer cette vision globale de l oeuvre Toutefois un tel examen ne pourrait tre conduit selon un ordre diachronique La chronologie de production ne sera suivie que ponctuellement pour d gager la configuration de l volution perecquienne Selon les grandes lignes qui se dessinent nous pouvons passer de la recherche du savoir qui caract rise Perec ses d buts vers une taxinomie h g monique manifest e par un go t de plus en plus prononc pour les listes de toute nature ou de tout genre ainsi que le rappelle Jacques Roubaud La liste t moigne d une certaine dissolution du savoir car m me si elle se veut exhaustive dans le domaine qui lui est propre Il y a comme le dit Perec lui m me dans toute num ration deux tentations contradictoires la premi re est de TOUT recenser la seconde d oublier tout de m me quelque chose Ces deux tentations illustrent l envi la carence de la liste Elle se borne recomposer un savoir inorganis qui ne peut se structurer en liste que sur la base de principes arbitraires alphabets affinit s dimension hi rarchie etc En rassemblant une multitude de connaissances de donn es de l exp
341. la torsion tant imprim e aux phon mes pour produire d inoubliables calembours Tout le recueil est ainsi construit en trois temps un titre un texte qui lui correspond puis un d cryptage final appel Table qui rend compte du jeu de mots Les dix textes du recueil de Voeux comportent tous une table sauf celui intitul Lieux communs travaill s o en lieu et place de la table Perec invite avec humour son lecteur un effort inusit Cette fois ci il n y a pas de table Il faut commencer accepter qu un texte puisse se porter tout seul Il laisse donc le soin au lecteur de d couvrir le lien commun ainsi voqu Le d cryptage final correspond une r interpr tation du titre suivant le mod le de variations homophoniques Georges Perec Voeux op cit p 54 Ibid p 63 S Pierre Lusson Georges Perec Jacques Roubaud Petit trait invitant la d couverte de l art subtil du Go Paris Christian Bourgois diteur 1969 voir III 5 Proverbes p 128 129 et 1 Les Tobi diag 15 p 89 Georges Perec Voeux op cit p 39 168 Il s agit donc bien de r interpr ter le texte ce qui constitue une vidente pratique anti ludique Il convient maintenant de s attarder sur la derni re phase de Voeux qui a t concentr e admiration et reconnaissance obligent sur Queneau D j Andr e Chauvin avait tabli les recoupements entre Perec Queneau et Roussel notammen
342. lage ou le montage techniques inspir es du cin ma dont Perec fut un grand amateur La probl matique Georges Perec Esp ces d espaces op cit p 25 sl Georges Perec 1 petit v lo idon chrom nd de la cour op cit Pierre Lusson Georges Perec et Jacques Roubaud Petit Trait invitant l art subtil du go Paris Christian Bourgois 1969 Georges Perec La Boutique obscure Paris Deno l Gonthier 1973 Georges Perec Esp ces d espaces op cit Georges Perec Je me souviens Paris Hachette P O L 1978 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit La notion de p ritexte est emprunt e G rard Genette voir Seuils Paris Seuil 1987 S Georges Perec La vie r gle du Jeu entretien avec Alain Herv Le Sauvage n 60 1978 p 17 amp Voir Marcel B nabou Les ruses du plagiaire exemples oulipiens in Collectif Le Plagiat op cit p 25 Georges Perec La Vie mode d emploi op it 25 majeure de cette exp rimentation reste donc celle de l innovation produite par la transformation ou le r emploi du texte source Ce texte ins r dans un autre ensemble plus vaste constitue t il un nouveau texte c est dire apporte t il une nouvelle criture dans le domaine litt raire l s agirait alors d une nouvelle dimension de l auteur ou des auteurs qui ont produit le texte originel Ces relations intertextuelles tiss es m thodiquement par Perec rel vent de deux strat gies l
343. le notre vie O est notre corps O est notre espace Le questionnement sur la situation de l tre humain li e l inaction dans le sommeil v g tatif et la veille soporifique la comparaison de deux tats est r v latrice d une absence de lucidit et d int r t pour ce qui constitue les contraintes et la d termination du quotidien La soci t contemporaine rec le des conditionnements comparables au monde orwellien de 1984 la banalit est ni e au profit du spectaculaire afin de masquer le questionnement sur l existence et les pratiques d g n ratives de la soci t contemporaine Aucune information ne serait possible dans une existence banalis e car elle serait alors d r alis e L analogie que Perec tablit entre l habituel et l habitude est r v latrice de absence de pens e que partagent la plupart des humains Vivre sans penser semble tre le mot d ordre de millions d individus qui traversent l existence dans une quotidiennet in vitable Cela rappelle les consid rations de Miguel de Unamuno coutant les soldats fascistes espagnols criant Viva la muerte et estimant donc que pour vivre ces brillants guerriers auraient pu se contenter de leur seul Ibid p 11 George Orwell 1984 Paris Gallimard 1950 Br RE 105 cervelet L impossible penser l impossible dire n est pas manifest il est dans l annulation des capacit s de r flexion et d interrogation Il faut
344. les voire laborieuses de la science fiction Il s agit pour lui d utiliser les potentialit s des sciences exactes pour provoquer l imagination de son lecteur Dans ce but rien de tel que de subvertir la science pour en montrer les limites les carences et les aboutissements oblig s Nous consid rerons que toute subversion repose sur l emploi d une r gle d un moyen ou d un proc d pour poursuivre une fin contraire leurs fonctions normales Dans ce sens Perec s int resse trois aspects de la science qu il va subvertir Il constate que la science est principalement le fait d individus qui travaillent dans le champ clos de la recherche sp culative Ce sont bien s r les savants Le personnage du savant attire irr sistiblement Perec pour les possibilit s infinies de la caricature voire de la satire de l ironie qui ram ne la science une plus juste dimension La science est aussi l origine de nombreuses connaissances nouvelles qui fascinent Perec Ce sont donc ces d couvertes scientifiques ou non dont Perec se chargera de r employer tout le potentiel dans le cadre de la fiction De plus il pourra ainsi agr ger aux sciences exactes 5 Georges Perec Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner L Arc n 76 Aix en Provence 1979 p 4 Voir Marc Angenot Glossaire pratique de la critique contemporaine Ville LaSalle Hurtubise HMH 1979 p 195 37 des sciences peu connues voire peu reconnues co
345. les de la ville r v le l impossibilit de trouver un signifi d finitif 5 le mod le unique la structure cosmique qui liminerait la double angoisse du choix et de l enregistrement Perec au contraire de l habitude veut actualiser sa recherche et la r pandre dans un pros lytisme inaccoutum Il faut non seulement que son projet s attache au trivial et au futile qui constituent quelques caract ristiques notables de Ibid p 263 38 Ibid p 268 Georges Perec Esp ces d espaces op cit p 71 7 Ibid p 72 3 Roland Barthes S miologie et urbanisme in L Aventure s miologique op cit p 269 108 l insignifiant mais encore qu il touche ses semblables dans une m me vocation de l inessentiel Ces travaux pratiques qui annoncent selon les propres m thodes de Perec sa volont de pi ger l insignifiant conna tront deux r alisations remarquables d une part le texte Tentative d puisement d un lieu parisien publi en 1975 selon une exp rimentation r alis e en 1974 Place Saint Sulpice dans le 6 arrondissement de Paris et d autre part un enregistrement radiophonique intitul Tentative de description de choses vues au carrefour Mabillon le 19 mai 1978 carrefour situ non loin de Saint Sulpice toujours dans le 6 arrondissement Nous nous int resserons videmment la premi re Tentative que nous consid rons comme texte exemplaire car elle constitue une her
346. lig de s engager en Indochine et Je me souviens de l enl vement du petit Peugeot Anonymat c l brit notori t La culture populaire peut c l brer plus d illustres inconnus au gr des v nements de l actualit point de d part d une culture quotidienne que nen c l brera jamais une culture litaire Il nous faut p n trer cette s dimentation de la culture qui fait appel aussi bien une facult psychologique la m moire qu un arri re plan id ologique qui commande le choix des souvenirs Pour parvenir une synth se entre ces deux instances disparates 7 Voir Joe Brainard I Remember Le recueil de Georges Perec s inaugure par cette reconnaissance son pr d cesseur am ricain Le titre la forme et dans une certaine mesure l esprit de ces textes s inspirent des I remember de Joe Brainard Georges Perec Je me souviens op cit p 11 Georges Perec Entretien avec Gabriel Simony Paris Le Castor Astral 1989 p 7 Georges Perec Je me souviens op it entr e n 39 p 22 Ibid entr e n 137 p 42 Sur ce fait divers voir Jacques Antoine Les Nouveaux Dossiers extraordinaires de Pierre Bellemare Paris Arth me Fayard 1977 L affaire ric Peugeot p 219 229 284 il nous faut tablir une analyse socio culturelle du recueil Nous pouvons en effet consid rer les souvenirs de Georges Perec comme les donn es d une exp rimentation globale de la m m
347. liste compl te des oeuvres de Raymond Queneau savoir trente sept titres puis il nous livre ses interpr tations homophoniques des titres et des contenus des ouvrages ainsi r pertori s selon la formule g n rale de Voeux Cette formule rappelons le est la Suivante un court texte qui r pond un titre donn par Perec titre qui peut rappeler un musicien un cin aste ou une oeuvre litt raire comme c est le cas pour Queneau Toutes Georges Perec Voeux op cit p 149 181 Ibid p 150 amp Ibid p 150 Ibid p 151 181 170 ces d couvertes novatrices visent red couvrir les oeuvres de Raymond Queneau Nous commen ons par analyser Cours de g ologie l mentaire 6 Comment se fait il qu on trouve en haute montagne des fossiles de bestiaux manifestement aquatiques Voltaire pr tendait que c tait les restes de coquilles de p lerins se rendant Compostelle Mais son explication fait aujourd hui sourire La v rit c est qu il y eut jadis au m me endroit un cours d eau qui fut un jour tari mais dont le lit brass et rebrass pendant des milliers et des milliers d ann es finit par devenir montagne Une br ve s rie de remarques s impose propos de cette le on de g ologie fantaisiste tout d abord le marquage familier du lex me bestiaux dits aquatiques Or ce sont des fossiles ces bestiaux qui sont donc des coquillages embl matiques ceux de
348. llimard 1970 p 301 7 William A Haviland Cultural Anthropology New York Holt Rinehart and Winston 1983 p 31 331 id ologiques recoupent aussi bien des comportements humains qui d finissent des attitudes culturelles par exemple par rapport l alimentation au sommeil au travail la sexualit attitudes qui sont manifest es intratextuellement par les comportements des personnages romanesques mais galement par des formulations langagi res id es personnelles opinions constatations raisonnements proverbes et aphorismes tout ce qui a passionn Perec et qu il a int gr notamment dans son recueil Je me souviens Les explications que Perec nous fournit sur la r surgence de ses souvenirs montrent clairement qu il s agit d un effort volontaire de la m moire On sait qu Aristote distingue deux formes du rappel des souvenirs ce qu il d signe comme mn m qui correspond la conservation du pass et son retour spontan l esprit et anamn sis ou rem moration qui repr sente la facult d voquer volontairement les souvenirs Quant Perec il est vraiment confront cette anamn sis cette m moire volontaire instrument de r tablissement du pass Cependant la m moire n est pas stimul e comme dans le cas du t moignage juridique retrouver des d tails pertinents pour une enqu te mais pour faire revivre des souvenirs impr visibles et g n ralement anodins confinant aux st r ot
349. llisation d une culture populaire jusque l confin e aux milieux les plus humbles voire les plus laxistes du point de vue culturel Ces questions que suscite le recueil de Georges Perec sont l gions car la suite de son pr d cesseur am ricain Joe Brainard Georges Perec inaugure une nouvelle formule pour Voir Raymond Queneau Loin de Rueil Paris Gallimard 1944 Voir encore Raymond Queneau B tons Chiffres et Lettres Paris Gallimard 1965 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 7 p 14 5 Ibid entr e n 119 p 39 6 Voir Michel Maffesoli Au Creux des apparences pour une thique de l esth tique Paris Plon 1990 283 rassembler la culture Furtif vigilant il drague toutes sortes d allusions de s diments qu il restitue d une criture rudement rabot e prenant soudain de l ampleur lyrique comme par effraction pour retomber dans l anonymat ironique d un fait divers 5 Cette description m taphoriquement g ologique donn e par le journaliste Gabriel Simony met fort pr cis ment en valeur cette aventure culturelle de Perec draguer partout o cela est possible pour consigner dans l criture jusqu l anonymat du fait divers Par exemple les deux premiers faits divers de son index sont ainsi pr sent s laconiquement Je me souviens qu un coureur de 400 m tres fut surpris en train de voler dans les vestiaires d un stade et que pour viter la prison il fut ob
350. lus conforme aux objectifs de l metteur enregistrement simple du genre cela peut toujours servir donc en rapport avec le pragmatique accumulation rh torico didactique conomie d change d informations fossilisation rapide d un savoir inutile en expansion continue Afin de r duire voir de supprimer la fixation puis la fossilisation du savoir Barthes r agissait vivement en crivant Il s est cr une doxa mythologique la d nonciation la d mystification ou d mythification est devenue elle m me discours corpus de phrases nonc cat chistique Ce ne sont plus les mythes qu il faut d masquer la doxa s en charge c est le signe lui m me qu il faut branler Non plus seulement renverser ou redresser le message mythique le remettre l endroit d notation en bas et connotation en haut nature en surface et int r t de classe en profondeur mais changer l objet lui m me engendrer un nouvel objet d part d une nouvelle science La mod lisation du Je me souviens est un acte didactico culturel qui envisage subjectivement la formation d un nouveau public lettr ou semi lettr en expansion constante Ces publics autrefois structur s dans les villages par le mod le bouche oreille sont d sormais vou s l uniformit tant soumis aux influences m diatiques qui fa onnent des soci t s fortement urbanis es En r action les mod les de soci t et de public suscit s p
351. m diaire son r cit revu et corrig par l crivain sp cialis qui joue le r le du scripteur et nous rapporte ainsi de seconde main les paroles de son client l impr sario Rorschash Il se produit dans cette rencontre des instances narratives une confusion des niveaux di g tique et m tadi g tique autorisant une double circularit fictionnelle La fiction de Kafka est absorb e mieux phagocyt e par Perec qui l assimile gr ce son actant connecteur comme partie int grante de son r cit C est pourtant ici que cesse l emprunt textuel de Perec Kafka mais non l emprunt global de la di g se Pourtant il devient bient t n cessaire de cl turer cette courte nouvelle C est alors que s tablit de nouveau un parall lisme tonnant entre Kafka et Perec dans l annonce du d nouement Cette annonce est faite gr ce au connecteur g n rique typique des contes de f es le il tait une fois qui introduit les instances narratives actantielles et s miologiques du conte Ce connecteur est en relation directe avec le facteur temporel et annonce opportun ment le d nouement Chez Kafka nous lisons Et c est ainsi qu un jour comme ils voyageaient ensemble le trap ziste en train de r ver dans le filet l impr sario lisant dans le coin en face de lui pr s de la porti re le trap ziste appela doucement l impr sario Tandis que chez Perec nous pouvons lire il vint un jour 5 Marc Angenot Glossa
352. m neutique du quotidien conform ment aux intentions de Perec dans Approches de quoi Le questionnement existentiel traditionnel retenu par la philosophie du type Qui suis je D o suis je venu O vais je aller sera remplac par des interrogations existentielles relevant de la microsociologie O est cette rue Qu est ce qui se passe dans cette rue O est notre corps O est notre espace Le but de ce processus heuristique demeure bien s r de capter notre v rit au travers de questions peu essentielles Voir Georges Perec Approches de quoi in L Infra ordinaire op cit p 13 Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit Tentative de description de choses vues au carrefour Mabillon le 19 mai 1978 op cit Georges Perec Approches de quoi in L Infra ordinaire op cit p 11 Tibid p 13 109 Comme nous l avons pr c demment signal la Tentative d puisement d un lieu parisien constitue une mise en oeuvres des travaux pratiques d crits dans Esp ces d espaces La mise en pratique de la recherche de l insignifiant par Perec en octobre 1974 Place St Sulpice est certainement l un des d fis les plus difficiles qu il ait accept de relever M me si les travaux pratiques donnent les bases de ce que le chercheur d insignifiant peut faire Perec sera rapidement confront plusieurs s ries d incertitudes qui le conduiront des
353. m de son personnage notre sagacit Ii n entre pas dans notre propos d analyser maintenant les d clinaisons du nom de Cinoc Ren Gu non M langes op cit p 64 TT Ibid p 65 68 Umberto Eco Le Pendule de Foucault Paris Bernard Grasset 1990 p 46 47 Patrick Imbert Construction et discours op cit p 47 Voir Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 360 9 EP LE CPR 370 Pourtant comme le signale Marcel B nabou Albert Cinoc pr sente avec Perec lui m me d tranges ressemblances comme lui c est un juif d origine polonaise comme lui il porte un nom dont la prononciation pose probl me et dont l orthographe est le r sultat d une s rie de transformations En r alit la transformation du nom vient s ajouter sa r p tition jusqu sati t Cette esp ce de litanie du nom confirme l obsession de la recherche du savoir perdu ainsi que la saturation du souvenir la poursuite d un savoir inconnu et insurmontable auquel le nom doit ouvrir la porte Cependant David Bellos montre que le nom peut conduire l individu qui le porte la folie pure et simple Aucun lecteur quelque peu attentif de Perec ne peut manquer de reconna tre l troite ressemblance entre l histoire du nom de Cinoc et l histoire du nom de Perec racont e au chapitre VIII de W ou le souvenir d enfance Nul ne peut ignorer non plus que la violence faite son nom l orthographe ou
354. man qu b cois depuis 1960 Le 343 Sade Fourier Loyola 393 413 Salamb 9 Sang pur les pr jug s de race chez les gentilhommes fran ais de l Ancien R gime Le 340 394 Savoirs l uvre Essais d pist mocritique 45 89 Sauvage Le 24 Seigneur des anneaux Le 396 467 S mantique structurale 248 258 S m iotik Recherches pour une s manalyse 217 218 227 237 239 S miotique et Philosophie du langage 177 269 321 381 394 Seuils 24 215 263 277 Si par une nuit d hiver un voyageur 300 Signe Le 351 354 Signe Histoire et analyse d un concept Le 94 Silences du colonel Bramble suivi des discours et nouveaux discours du docteur O Grady 157 158 Situations I 2 3 254 Soci t de consommation La 223 Sociologie et anthropologie 55 313 331 Star Trek 98 Structure des r volutions scientifiques La 242 Structure du texte artistique La 181 182 Structures anthropologiques de l imaginaire Les 295 380 Symboles de la science sacr e 359 364 368 S Z 28 384 386 387 T l rama 178 Tentative de description de choses vues au carrefour Mabillon le 19 mai 1978 16 102 108 412 Tentative d puisement d un lieu parisien 10 16 101 102 108 109 110 113 115 116 117 118 119 120 121 122 123 124 125 126 127 128 129 130 131 132 133 134 142 143 144 146 412 Textuel Cahiers Georges Perec n 2 366 372 Th t
355. mates la prolif ration des papillons hybrides les productions scientifiques et litt raires de deux savants amis une recherche pointilleuse de Roussel Perec crit une science fictionnelle qui r invente ses objets ses m thodes ses conclusions Perec nous r v le les puissances baptismales du langage qui d passent bien s r le simple domaine scientifique videmment le langage scientifique est l origine d une multitude de n ologismes voire de barbarismes qui se sont int gr s progressivement la langue courante selon les m canismes de l assimilation Je me souviens que le mot robot est un mot tch que invent je crois par Carel Capek S Avec quinze histoires rattach es directement aux savants aux personnages que sont les savants on ne peut manquer de s interroger sur les buts poursuivis par Perec dans La Vie mode d emploi quant une exhibition aussi particuli re de la science II est vrai que la caricature syst matique du savant est l g rement d cal e par rapport aux st r otypes Aux savants distraits et mentalement confus du type Cosinus ou Tournesol Perec aime opposer des savants amoureux na fs incompris et frustr s Des savants pour lesquels la science n ouvre pas toutes grandes les portes de la gloire mais plut t qui les touffe sous le poids de la mesquinerie humaine Certes ces savants sont souvent 1 Roland Barthes roland Barth l Paris Seuil 1975 p 94 Georges Perec
356. me suivant en un m me laps de temps davantage d individus marchent dans la direction Saint Sulpice rue de Rennes que dans la direction rue de S S P LU e S S E E P E T Lai A F 125 Rennes Saint Sulpice Th or me gratuit th orie inv rifiable et donc ind montrable Perec utilise les ressources d une pseudo science dans l observation assidue de l insignifiant Les autobus ont longuement sollicit l attention de Perec car leurs itin raires leurs fr quences et leur contenus ont pu polariser ses capacit s d examen Aussi n avons nous pas t tonn s que le transport en commun de la R A T P appelle lui humoristiquement la question de sa vocation Mais finalement il d laisse avec humeur ces centres d int r t accaparants que sont les autobus Des autobus passent Je m en d sint resse compl tement Les autobus ont donc absorb durablement l attention de Perec Du fait de leur masse de leur bruit de leurs couleurs et de leur inclusion habituelle dans le paysage parisien ils constituaient une manifestation incontournable de l insignifiant consid r comme l habituel et le r p titif Mais ils ont eu le m rite de pousser Perec laborer les m canismes de leur circulation selon des lois pseudo scientifiques La parodie est d j une premi re manifestation d une subjectivit ma tris e et qui ne demande qu tre affranchie des lourdes exigences de l objectivit s
357. ment dire l indicible Se taire Ne pas faire supporter aux survivants l impossible fardeau Mais comment ne pas en parler alors que le voeu de tous ceux qui sont revenus a t de raconter raconter sans fin comme si seul un entretien infini pouvait tre la mesure du d nuement infini Cet article cit r p te la probl matique de Robert Antelme qui nagu re sensibilisa Perec l histoire des camps nazis Nous retrouvons aussi la m me logique que celle du meurtre d finie par Ren Girard tuer pour ne pas savoir qu on tue parler pour ne pas savoir qu on parle crire pour cacher l criture L criture repr sente le langage L criture ne devient plus qu un ersatz d criture et le langage n est plus qu un squelette de langage La lettre est le premier pas vers le processus de la rationalisation Mais il y a inflation du signe dans la formation du savoir L indicible est en amont de la production du Ren Girard Des Choses cach es depuis la fondation du monde op cit p 243 244 Andy Leak W Dans un r seau de lignes entrecrois es souvenir souvenir cran et construction dans W_ou le souvenir d enfance in Parcours Perec op cit p 85 86 P Voir Jacques Derrida De la Grammatologie op it p 15 402 signe La rationalisation est contraignante mais elle permet la constitution du savoir Combien de repr sentations de la maison ont elles produit la lettre beth La lettre
358. ment une reminiscence du p re Dupanloup autre c l brit mais non pas de la cuisine Toutefois le domaine gastronomique reste videmment un champ d application tr s vaste pour toute une combinatoire non seulement satisfaisante au go t de l amateur mais encore tr s f conde quant aux possibilit s infinies des jeux sur le savoir alimentaire Les ingr dients sont tr s simples 7 Georges Perec Th tre I Paris Hachette 1981 La Poche Parmentier p 61 132 5 Georges Perec Th tre I op cit p 74 7 Ibid p 74 196 il faut de bons ustensiles casseroles plats de service l chefrite faitout couteaux d couper d sosser escaloper chinois et autres passoires il faut encore des ingr dients linfini de base et d assaisonnement et encore de bonne qualit et finalement les recettes dont les variantes constituent le fondement principal de cette combinatoire Si cette cuisine est r serv e la consommation priv e elle peut s entourer d un secret qui justement lorsque l on passe au niveau public de la consommation en restaurant pourra s entourer d une aura suppl mentaire manifest e par les d formations de style maison ma fa on ou encore la fa on du chef Puis le chef se livre encore toute l inventivit propre aux titres des plats livr s eux m mes la plus grande fantaisie qui en appelle l imagination du convive Le recueil des titres des plats compos
359. mente Jacques Jouet crit ceci non sans respecter la contrainte perecquienne du R gle de flemme R gle de Th l me Perversement Perec se recr e en les r gles m mes Le spleen de cr er est s v rement vent Th l me Cl mente Les Revenentes et aussi R gle d enfermement En Th l me m me Perec descend les herses met les scell s d fense d entrer Et le cercle s v rement ferm Perec descend vers le centre Ce qui signifie Le texte est le v tement de ce secret S enfermer l gender cet enfermement c est en germe d m ler le sens de ce r ve d enterrement Selon les voeux de Jacques Jouet la cr ation de Perec est soumise la loi s v re de La Cl ture C est une cr ation ferm e l image de cette myst rieuse mais d mente abbaye de Th l me Cloisonnement des personnes d abord Privatisation des locaux dirait le jargon d aujourd hui L abbaye reste un lieu de l enfermement Et Fran ois Billacois conclut ainsi sur ce lieu unique de l utopie rabelaisienne Th l me l abbaye sans clo tre est la fois le centre du monde le lieu d o comprendre le monde et la retraite qui 8 Georges Perec Les Revenentes Paris Julliard 1972 et 1981 p 23 Jacques Jouet Les Sept R gles de Perec in collectif Cahiers Georges Perec n 4 M langes op cit p 16 1 Tbid p 16 WT Thid p 16 TT Georges Perec La Cl
360. ments humains Perec prouve la joie de cet clatement rythmique de l v nementiel sa conclusion implicite savoir l impossibilit de tout consigner ne refl te pas un chec mais au contraire consacre la pl nitude optimale de son observation Il d crit ensuite les principales activit s des groupes humains discussions deux trois plusieurs modes de locomotion modes de partage modes de traction degr s de d termination ou de motivation et finalement les positions du corps Ces descriptions seront donn es soit Voir ibid p 18 H Voir ibid p 18 et 19 KEE 118 sous la forme d une accumulation de substantifs par exemple pour les modes de locomotion o l on a successivement marche v hicule deux roues automobiles v hicules utilitaires services publics etc H Tout cela tant nuanc soit d appartenances voitures priv es voitures de firmes soit sous la forme de verbes l infinitif composant des s quences parataxiques acc l r es par exemple degr s de d termination ou de motivation attendre fl ner tra ner errer aller courir vers se pr cipiter vers un taxi libre par exemple chercher musarder h siter marcher d un pas d cid Ce type de liste verbale est particuli rement recherch e par Perec Il d note toutes les possibilit s d puisement du rythme qu il accorde la description verbale Une co ncidence id ale se manifeste entre le
361. mes a humains fa onnent et m me construisent la personnalit imaginaire de la victime selon une ardente haine qui est une manifestation de f tichisme Et jamais personne ne parle plus du f tiche que l auteur du f tichisme Il en parle jusqu la Notes tir es de la conf rence de Jacques Hassoun S Hermann Rauschning Hitler m a dit Confidences du F hrer sur son plan de conqu te du monde Paris Coop ration 1939 p 266 Ren Girard Des Choses cach es depuis la fondation du monde Paris ditions Grasset et Fasquelle 1978 p 189 das mme 359 saturation jusqu la naus e Le Juif f tiche est l objet central d un inavouable d sir de destruction L toile jaune est le signe de l autre qui donne voir l inimaginable de la diff rence Sur fond de rivalit des doubles il y a donc chez Perec un m canisme d interproduction du signe puisque l toile juive peut tre produite partir de la croix gamm e comme le remarque aussi Philippe Lejeune Cela signifie encore l quivalence des deux races lues en comp tition face la divinit a nsi que l affirme Jacques Hassoun Mieux encore cette myst rieuse lettre que Perec confond avec la lettre gimmel de l alphabet h breu 3 et qui correspond au gamma de l alphabet grec T conduit aussi au swastika En effet Ren Gu non indique que l assemblage de quatre T gamma plac s angles droits les uns par rappor
362. miste ancien l ve de l cole polytechnique Fran ois de Dinteville qui r ussit la synth se du diamant partir de morceaux de charbon et qui a l honneur d tre voqu par Ernest Renan dans ses Chroniques et enfin un grand savant allemand Eidrich Wehsal transfuge am ricain par force et dont les tats Unis voulurent utiliser la sp cialit savoir la synth se du p trole proc d qui se r v le la longue plus co teux que l extraction de l huile lourde du sol naturel Deux autres Tbid p 160 propos de Paul H bert on reconna tra ais ment le p re H bert d Ubu ce que confirme Perec lui m me dans ses notes Allusions et d tails voir Cahier des charges de La Vie mode d emploi de Georges Perec pr sentation transcriptionet notes par Hans Hartje Bernard Magn et Jacques Neefs Paris CNRS ditions et Zulma 1993 p 66 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 42 46 Georges Perec ibid pp 78 79 propos de la fabrication du diamant voir Marcel Proust Pastiches et m langes Paris Gallimard 1947 L affaire Lemoine Dans un roman de Balzac et L affaire Lemoine par Gustave Flaubert p 9 22 Georges Perec ibid p 373 377 41 sciences exp rimentales gravitent autour de la chimie la physique et la physique nucl aire repr sent es par trois amis du professeur Wehsal savoir pour la premi re discipline par le professeur Thaddeus sp cialiste des orag
363. mme celles du paranormal tels l occultisme ou le spiritisme Mais plus g n ralement les connaissances scientifiques pourront susciter des laborations de recherches de d couvertes ou de pseudo d couvertes plus ou moins satiriques qui consacreront ainsi la parodie d un certain savoir scientifique Enfin la science produit du texte le texte scientifique qui par ses pr tentions la rigueur int ressera hautement Perec Il voudra en effet s en amuser jusqu l extr me en subvertissant le genre Pour cela rien de tel que de reprendre l ensemble des constantes du texte scientifique pour produire de nouveaux textes qui tout en en ayant la forme n en seront qu une habile parodie Ce seront tous les textes pseudo scientifiques qu il crivit Ce seront on l esp re ces crits qui pourront tre analys s en dernier si l on consid re que les ressources de la science seront principalement exploit es par Perec dans sa grande oeuvre La Vie mode d emploi laquelle nous avons choisi de nous int resser en premiers In vitablement notre attention sera donc attir e par son roman somme scientifique et encyclop dique La Vie mode d emploi C est ce choix vident qui a aussi largement motiv Jean Fran ois Chassay dans son tude des aspects cognitifs de la grande oeuvre perecquienne Oeuvre encyclop dique La Vie mode d emploi fait de la connaissance une multiplicit alors que de nombreux savoirs sont c
364. mploie incontinent tout ce qu il apprend et d couvre dans son oeuvre Cette tude se propose de mettre en vidence les limites du savoir perecquien Quelle est l tendue de son savoir dans les diff rents domaines explor s par l homme Il sera galement tr s pertinent d tablir avec pr cision non seulement les informations CS 12 employ es par Perec mais aussi celles qu il va cr er pour les besoins de sa cause romanesque L tude des limites du savoir perecquien qui n a pas t entreprise nous permettra d analyser plus profond ment ce ou est la connaissance dans l oeuvre de Perec Selon ses propres d clarations son propos est d utiliser le texte comme producteur de fiction de savoir voire de savoir fiction Il invente donc des informations imaginaires qui pourront devenir des ressorts de la fiction Ce sera le cas des miettements de Davidoff Les confrontations entre les connaissances acquises les connaissances purement invent es et la fiction constituent le fondement de la strat gie litt raire de Perec Nous nous proposons d en analyser les d veloppements les cons quences et les r sultats Il nous importe d une part de consid rer l usage que Perec fait du savoir et d autre part d analyser les raisons qui l ont pouss m ler sans cesse toutes sortes de connaissances sa fiction En ce qui concerne la premi re question nous pouvons d j affirmer que Perec n a pas recherch
365. mps Puis ils r vaient de porcelaines pr cieuses de brass es de fleurs Une occurrence des fleurs chez Flaubert contre trois chez Perec une nouvelle notion intertextuelle se confirme ici celle de la multiplicit des lex mes dominants comme connecteurs Les parcours figuratifs nous font passer des plans s miologiques de l conomie chez Flaubert o les femmes vendent des bouquets de fleurs aux plans de la g ographie chez Perec o les surplus de fleurs des campagnes jonchent finalement le sol des chambres nuptiales La multiplication produit un effet d insistance le mod le est d pass dans la r alisation intertextuelle par la surabondance de la production et de la productivit textuelle Gustave Flaubert Madame Bovary op cit p 215 Georges Perec Les Choses op it p 112 6 Ibid p 113 e Ibid p 113 Z ga tt ET RE e pee e 236 tant donn l importance que rev t dans les deux textes le class me de l existence puisqu il est polaris autour du bonheur des amants de la joie du couple et comme r sultante des qualit s esth tiques de l environnement naturel on peut se demander si les auteurs voulaient objectivement valoriser l existence comme justiciable d un but esth tique Cette analyse devrait nous permettre de d celer les connecteurs qui r v lent cette tendance Nous relevons en effet chez Flaubert C est l qu ils s arr teraient pour vivre dan
366. n Elle mentionne la suite l exemple suivant que nous venons d analyser Je me souviens qu Art Tatum appela un morceau Sweet Lorraine il Auparavant Anne Roche avait 17 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 327 p 84 Ibid entr e n 49 p 24 7 Ibid entr e n 6 p 14 TT Anne Roche lt L auto bio graphiez in collectif Cahiers rges P n 1 Colloque de Ceri op cit p 71 e Ibid p 71 328 insist sur la m thode de Perec Des noms propres sont lanc s jamais expliqu s les seules explications consistant assigner par exemple une pi ce un com dien un air de jazz un auteur une chose un mot jamais d crire Perec ne d crit pas il nomme l imitation de Borges ou de Lovecraft Le signe le plus vocateur reste le nom Andr e Chauvin signale galement ce r sultat obtenu lors d un s minaire Georges Perec s la remarque a t faite que les noms propres taient tr s probablement les v ritables d clencheurs et fixateurs de la m moire mais qu on ne les voyait pas appara tre en s rie peut tre par un souci de Perec de bloquer les organisations videntes les mouvements trop m caniques et trop directement lisibles de la m moire 8 Ainsi que nous l avons vu le nom propre cristallise principalement les m canismes identitaires et la d nomination affranchit le texte du support excessif de la description Pourtant tous ceux
367. n autre Paris Gallimard 1951 Georges Perec ibid Georges Perec Les Revenentes op cit Georges Perec Voeux Paris Seuil 1989 Georges Perec Alphabets Paris Galil e 1976 Georges Perec La Cl ture et autres po mes Paris Hachette P O L 1980 Voir aussi Bernard Magn criture et d construction dans les textes de Georges Perec in Perecollages 1981 1988 op cit p 233 20 d une exp rimentation sur les possibilit s offertes par des signifiants qu il transforme de multiples mani res Il tendra aussi ses exp riences sur le langage vers une certaine combinatoire des mots C est ce qu il fera dans deux articles parall les le premier est intitul De la difficult qu il y a imaginer une Cit id ale et le second Quelques unes des choses qu il faudrait tout de m me que je fasse avant de mourir Dans ces textes le rassemblement des utopies est li la confrontation ludique des possibles Ceux ci sont fond s sur une conception de l utopie et d une connaissance pr cise de ses potentialit s De plus comme pour toute autre exp rimentation scientifique Perec voudra encore v rifier ses connaissances en les confrontant les unes aux autres selon une hi rarchisation des priorit s et des possibilit s Nous ach verons cet examen des possibilit s ludiques des combinaisons de mots par les tr s oulipiennes 81 fiches cuisine l usage des d butants Perec s amuse alors
368. n brouillage soit un surpistage du savoir dans l ambigu t de la lettre dont le nom aurait t gammeth ou gammel Arr tons nous un instant sur le redoublement consonantique du m il constitue un brouillage par rapport aux signifi s gam te qui appelle lui la g n tique mend lienne travers les m canismes de la reproduction sexu e laquelle est vou le genre humain ou encore gamelle qui voque la fraternit militaire ou la vie de famille l poque du rationnement Ainsi que le remarque Philippe Lejeune qui mentionne les deux d rivations pr c demment voqu es on doit encore y ajouter celle de la croix gamm e pour qualifier ces transformations possibles de m tamorphoses Or Perec est un crivain pour qui le jeu est une passion cela ne reste plus d montrer Et le jeu pour reprendre l expression de Barthes consiste masquer qu il en est un Chez Perec il ne faut pas oublier que tout est jeu la moindre activit peut se transformer en cr ation ludique Il amp Jacques Derrida De la grammatologie Paris Editions de minuit 1967 p 16 Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit p 23 Philippe Lejeune La M moire ou l oblique op cit p 225 amp Une vaste synth se sur le jeu chez Perec reste faire de nombreuses et riches id es sont dispers es chez les critiques suivants de Perec Warren E Motte Jr The Poetics of Experiment a study of the work
369. n de l emprunt au texte matriciel Nous partageons avec Marcel B nabou l opinion selon laquelle Perec accorde une attention toute particuli re Sur l id e de puzzle voir Thomas S Kuhn La Structure des r volutions scientifiques Paris Flammarion Collection Champs 1983 pp 29 30 Voir Marcel B nabou Les Ruses du plagiaire exemples oulipiens in Le Plagiat op cit p 26 243 la mani re d ins rer ses emprunts Et B nabou insiste sur les efforts que fait Perec la fois pour les cacher en homog n isant son texte et pour les r v ler en lt actualisant des virtualit s qui ne pouvaient tre per ues dans le contexte initial C est exactement ce que nous voulons montrer en analysant la s quence du trap ziste pour d couvrir le r le primordial des connecteurs s mantico syntaxiques de l intertextuel La probl matique de l int gration d un texte tranger dans un texte matriciel autonome d pend de deux instances d une part de la situation du producteur et d autre part du choix du texte r cepteur Autrement dit il se produit au niveau de l int gration d un texte r cit un double jeu entre celui qui relate l histoire le narrateur et dont peut tre il est t moin voire m me participant et les langues respectives de deux producteurs dont la conciliation n est vidente aucun niveau Reprenant son compte les analyses de Catherine Kerbrat Orecchioni
370. n renon ant l laboration id ologique il cherchait le v cu ras de terre C est le v cu saisi au niveau du milieu dans lequel le corps se d place les gestes qu il fait toute la quotidiennet li e aux v tements la nourriture au voyage l emploi du temps l exploration de l espace C est particuli rement au niveau du v cu celui de l l ve du lyc en que Perec pourra concr tiser cette pseudo neutralit de la m moire Ce seront les souvenirs des Georges Perec Je me souviens op it entr e n 133 p 41 110 Georges Perec Je suis n op cit Le travail de la m moire entretien avec Frank Venaille p 84 Ut Thid p 89 2 Ibid p 89 312 s jours l infirmerie du lyc e des batailles de polochons et surtout des trois souvenirs en C lorsqu il tait coll lorsqu il attendait la cloche qui signalait la fin des cours et lorsqu il d gustait des bo tes de coco colle cloche coco forment un ensemble de base unitaire correspondant un v cu potachique enregistr comme agreable Un dernier v cu qui d joue l exp rience est celui du Golf Drouot Je me souviens du Golf Drouot je n y suis jamais ali Haut lieu du Paris des distractions la salle de danse d frayait r guli rement la chronique selon les orchestres qui s y produisaient D daign par Perec ce dernier signale toute la d rision de l endroit M
371. ncontre pas moins de quinze histoires qui sont li es directement aux savants Histoire de l anthropologue incompris 25 Appenzzell Histoire de l arch ologue trop confiant dans ses l gendes 2 Fernand de Beaumont Histoire de l archiviste espagnol SO Juan Mariana de Zaccaria Histoire de la belle italienne et du professeur de physique chimie 27 Paul H bert Histoire du botaniste frustr 72 Mr Macklin Histoire du chimiste allemand 62 Wehsal Histoire du critique d art qui chercha le chef d oeuvre 87 Charles Albert Beyssandre Histoire de la derni re exp dition la recherche de Franklin 44 Winckler Bartlebooth Histoire de l expert autodidacte 39 L on Marcia Histoire de l homme qui crut d couvrir la synth se du diamant 14 Fran ois de Dinteville Ibid p 224 228 7 Ibid p 359 366 et p 459 468 ET 45 Histoire de l homme qui rayait les mots 60 Cinoc Histoire du m decin dont un patient avait t empoisonn sur l ordre de William Randolph Hearst 59 Fran ois Pierre LaJoie Histoire du m decin qui fut dup 96 Bernard Dinteville amp le professeur LeBran Chastel Histoire du metteur en sc ne qui m prisait les grands classiques 75 Boris Kosciusko Histoire du professeur d histoire qui fut attach culturel aux Indes 46 Monsieur J r me Il est vident que ces histoires sont celles des personnages que nous a
372. ndividualit de l crivain Le jeu sur la lettre recoupe les m canismes de la s miose Jjud o chr tienne Elle permet Perec de s identifier au rabbin par excellence savoir J sus Christ dans la double mise en abyme de la sc ne familiale et du pseudo tableau 403 de Rembrandt ainsi que de la r f rence la parabole vang lique du chas de l aiguille et du chameau comme m thode caract ristique de l enseignement du ma tre Perec manifeste donc une ma trise remarquable des potentialit s propres aux lettres Il les fait passer par toute une s rie d tapes et de transformations qui correspondent un va et vient incessant entre l individualit et la collectivit Ce sont les m canismes d engendrement infini des lettres et des nombres qui occup rent la Kabbale Cette expansion ind finie et infinie des lettres correspond la diss mination du nom perdu de Dieu Elle caract rise le dispositif d identification individuelle par le nom Elle est largement parodi e par Perec tant pour son propre nom familial que pour celui d un savant auquel il ressemble le c l bre Cinoc Le nom repr sente bien la clef d un savoir perdu et difficilement reconstituable Cela nous explique que la double narration de W dans les confrontations auxquelles elle oblige le lecteur correspond l une des nombreuses tentatives pour essayer de vaincre les normes difficult s d une improbable reconstitution du nom Toutefois la v
373. nifiant n est rien d autre que la qu te compulsive de la signification Chez Perec cette recherche du sens est li e deux postulations l objectivit et l exhaustivit l ne parle jamais d objectivit il en impose une que le lecteur est bien oblig d accepter Ce lecteur est bien oblig d accepter Ce lecteur accorde pleinement sa confiance Perec et ce d autant plus que l observateur remplit son r le le plus consciencieusement n Voir ibid p 96 1 Georges Perec Esp ces d espaces op cit pp 73 74 13 Voir Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage op cit p 133 143 possible Pourtant la comp tition est constante entre l objectivit et l exhaustivit Elle se joue en r alit entre les il y a et les il arrive La confrontation est permanente dans le champ de vision de Perec mais bien plus encore dans son enregistrement et sa hi rarchisation des faits S opposent sans cesse ses yeux la force massive et brutale des existants bruts qu il pourchasse d immeuble en immeuble de rue en rue des automobiles des passants des paniers provisions des animaux etc S opposent encore toutes ces existences h t roclites et malais es contr ler les milliers de micro v nements qu elles g n rent les v hicules qui vont et viennent les passants qui passent les pigeons qui s envolent ou se posent les flics qui patrouillent La comp
374. nna t les langues hindouisantes et le martien bien davantage il fait appel l minent orientaliste M Ferdinand de Saussure Ce dernier se passionnera pour des langues parl es par Mile Smith et rel vera nombre de traits caract ristiques aussi bien 3 Ibid p 209 Voir Tzvetan Todorov Th ories du symbole Paris ditions du Seuil 1977 La Symbolique chez Saussure p 323 338 3 Thid p 324 Tbid p 324 Theodore Flournoy Des Indes la plan te Mars Paris Gen ve 1900 note n D 2 Tzvetan Todorov ibid p 324 3 Ibid p 324 159 du pseudo sanskrit de Mile Smith que du garden Ce qui nous int resse ici bien plus que l vidente curiosit que suscite un tel cas savoureux ce sont plut t les caract ristiques de la glossolalie mise en vidence dans le cas de la jeune inspir e Les conclusions qui sont tir es de l examen du cas par le professeur Flournoy sont les suivantes 1 les productions glossolaliques se signalent par l abondance d allit rations et de figures rythmiques Flournoy note le fr quent emploi de l allit ration de l assonance de la rime 2 l activit glossolalique est rapproch e de la po sie Un autre professeur M Lombard crit La propension versifier est tr s marqu e chez les glossolales comme en g n ral chez les proph tes et les voyants C est un trait r gressif de plus s il est vrai que dans toutes les litt ra
375. nod p 466 467 Pierre Janet L Intelligence avant le langage Paris Flammarion 1936 p 254 Georges Perec Je suis n op cit p 92 7 Ibid p 92 296 unique C est la description d un tissu conjonctif en quelque sorte dans laquelle toute une g n ration peut se reconna tre Tous ces souvenirs constituent des savoirs communs une s rie de groupes sociaux qui pourront donc les reconna tre les r tablir et les reconstituer en fonction de leur potentiel culturel C est ainsi que Perec d finit son recueil comme sympathique C est un livre que je pourrais appeler sympathique je veux dire qu il est en sympathie avec les lecteurs que les lecteurs s y retrouvent parfaitement Ainsi ce seront les cadres sociaux qui permettront de reconstituer le souvenir la lutte contre l effacement du temps passe par une sorte de m moire collective Chacun des groupes sociaux poss de donc des ensembles de traditions et de souvenirs qui vont se perp tuer dans le langage non seulement au niveau des idiolectes qui sont des marqueurs sociaux mais encore des souvenirs communs C est pour cela que sociologiquement le recueil de Perec parle aussi bien l tudiant au soldat au cur au p re de famille au sportif au snob au commer ant au m decin etc Il est la synth se d une m moire paralys e par le souvenir mais en constante expansion par la d construction que ce souvenir impose la m moire indiv
376. nomique De m me pour Perec il ne faut pas oublier que ses listes font partie d un appareillage tr s sophistiqu visant la conception puis la r alisation du roman La fiction du savoir ou la fiction fond e sur le savoir visant une certaine exhaustivit des connaissances r unies par la combinatoire ne tendrait elle pas implicitement laborer dans la confrontation de connaissances un ou des nouveaux savoirs S ajoutent aussi ces connaissances de nouveaux champs d observation tels la Tentative d puisement d un lieu parisien o Perec fait surgir un savoir du quotidien tout fait original La question du rapport entre savoir et litt rature n est pas nouvelle D s l Antiquit les penseurs r fl chissent sur les connaissances transmettre la jeunesse Platon nous montre Socrate discutant longuement avec ses disciples des noms et de l origine des Dieux Toute la connaissance religieuse est alors puis e dans la litt rature Jacques Neefs Noter classer briser montrer les dossiers de Bouvard et P cuchet in Penser Classer crire de Pascal Perec tudes r unies et pr sent es par B atrice Didier et Jacques Neefs Saint Denis Presses Universitaires de Vincennes 1990 p 72 2 Ibid p 72 Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien Paris Christian Bourgois diteur 1975 l1 en l occurrence dans l oeuvre d Hom re Les po tes latins
377. ns celles des assaisonnements et celles des d nominations des plats D j dans une excellente tude sur Georges Perec et la combinatoire Claude Berge et ric Beaumatin se sont pench s avec succ s sur les combinaisons g n r es par le traitement op ratoire des ingr dients Nous renvoyons nos lecteurs qui seraient int ress s d velopper leurs talents dans ce domaine cette tude De plus nous signalons que Claude Berge et ric Beaumatin indiquent un autre domaine o s est exerc le talent de Perec pour la combinatoire savoir ses Deux cent quarante trois cartes postales en couleurs v ritables d di es Italo Calvino Quant nous nous allons nous int resser aux combinaisons produites par les ingr dients aux titres et quelques plats remarquables Le titre appelle bien s r une premi re remarque notamment le chiffre 81 qui est le carr de 9 ce dernier chiffre tant lui m me le carr de 3 En effet le chiffre 3 correspond d j aux trois bases savoir la sole le lapin et le ris de veau il correspond ensuite aux trois accomodations principales que nous retrouvons pour chacune des bases aux champignons neuf recettes de sole neuf recettes de lapin neuf recettes de ris de veau au Noilly Pratt ap ritif l g rement acidul neuf recettes de sole neuf Collectif Cahiers Georges Perec n 4 M langes Paris ditions du Limon 1990 Claude Berge et Eric Beaumatin Georges Per
378. ns ce que les membres de l Oulipo appellent anoulipisme et qu ils d finissent ainsi La tendance analytique travaille sur les oeuvres du pass pour y rechercher des possibilit s qui d passent souvent ce que les auteurs avaient soup onn C est donc cette double indication que nous voulons analyser et pratiquer savoir la d couverte et les possibilit s des textes pr existants et celle des sens insoup onn s par les auteurs originels Ces possibilit s nouvelles impliquent le r emploi des textes et la d couverte des nouveaux effets produits C est aussi ce que Fran ois Le Lyonnais appelle plagiats par anticipation l o le plagiaire 7 Voir par exemple la photographie que Perec pr f rait parce qu il y ressemblait Kafka Voir Claude Burgelin Georges Perec Paris Seuil Les Contemporains 1988 p 32 Georges Perec Entretien avec Gabriel Simony Paris Le Castor Astral 1989 3 Ibid p 24 Marcel B nabou lt Les Ruses du plagiaire exemples oulipiens in Le Plagiat actes du colloque d Ottawa Ottawa Les Presses de l Universit d Ottawa 1992 p 24 3 Collectif Qulipo La Litt rature potentielle op cit p 17 2 Ibid p 23 241 est l crivain du pass et le plagi l innovateur oulipien Mais Marcel B nabou voque ce proc d d une fa on logieuse en montrant que cette notion de plagiat par anticipation aide retrouver chez le pr d cesseur des
379. ns le petit tremblement du pass Ce tremblement du pass n est rien d autre que cette marge d erreur que s accorde Perec pour tablir une convivialit lectorale avec son public Mais d autre part il pose le probl me du faux par rapports la retranscription de ses erreurs Dans le post scriptum de son recueil Perec rattache encore les souvenirs au mythe Lorsque j voque des souvenirs d avant guerre ils se r f rent pour moi une poque appartenant au domaine du mythe ceci explique qu un souvenir puisse tre objectivement Du et l appui de cette explication il utilise l exemple des Mousquetaires du tennis Petra David Bellos Georges Perec Une vie dans les mots Paris Seuil 1994 p 653 Ibid p 653 voir aussi Georges Perec Je me souviens op cit p 119 Georges Perec Je me souviens op it post scriptum p 119 292 Borotra Cochet et Destremeau Il avoue avoir substitu Brugnon et Lacoste Petra et Destremeau La m moire est aussi une facult d limination et de s lection Plus grave encore elle pourrait authentifier le faux dans la recherche de la v rit du savoir La m moire pourrait aussi faire subir des d formations involontaires nos souvenirs La probl matique de la m moire s articule donc sur la disjonction souvenir oubli comme cautionnement de l erreur C est un peu ce dilemme que pose le journaliste Gabriel Simony lorsqu il d crit
380. ntation fonctionne sur la base d une combinaison des contraintes rh toriques tandis que La Poche Parmentier d montre une combinatoire de textes comparables celles de La Vie mode d emploi avec cette diff rence qu il s agit d un texte crit pour le th tre Perec a produit beaucoup d oeuvres au cours de sa br ve existence Ces oeuvres se recoupent in vitablement ainsi en est il des jeux de mots que nous tudions dans le recueil de Voeux et de ceux des Mots crois s Il nous faut cependant d finir ce qui pr domine pour caract riser le fonctionnement des savoirs chez Perec Nous avons donc d termin un choix d oeuvres solidement tabli en fonction des connaissances qu il utilise Il nous permettra d analyser les potentialit s du savoir dans cet ensemble multiforme Il nous permettra encore de v rifier notre hypoth se selon laquelle les multiples savoirs mis en oeuvre par Perec n aboutissent pas un nouveau savoir mais r v lent sa qu te d un mode de connaissance unique et original Georges Perec Un Cabinet d amateur Paris Balland 1979 La Vie mode d emploi op cit p 360 Voir aussi Claude Burgelin Georges Perec Paris Seuil Les Contemporains 1988 p 205 Georges Perec lt L Augmentation et La Poche Parmentier in Th tre I Paris Hachette P O L 1981 Georges Perec Voeux op cit Les Mots crois s op cit Les Mots crois s IT op cit 31 Malgr
381. ntes dessinent un X en prolongeant les branches du X par des segments gaux et perpendiculaires on obtient une croix gamm e elle m me facilement d composable par une rotation de 90 d un des segments en sur son coude inf rieur en sign la superposition de deux V t te b ch aboutit une figure dont il suffit de r unir horizontalement les branches pour obtenir une toile juive C est dans la m me perspective que je me rappelle avoir t frapp par le fait que Charlie Chaplin dans Le Dictateur a remplac la croix gamm e par une figure identique au point de vue de ses segments affectant la forme de deux X entrecrois s GIS Nous voici confront s un vaste domaine iconique et Perec dans la d couverte de la productivit du signe ne fait rien d autre que d exhiber le m canisme de production des lettres signes alphab tiques ou non et celui de toute la symbolique traditionnelle g n ralement oubli e ou occult e depuis des si cles Mais tout d abord qu est ce que le T du dessinateur Ce d tail nous apporte deux indications pr cieuses D une part criture et dessin sont identiques D o l importance de la calligraphie si d velopp e par nombre d artistes arabes qui les autres images taient interdites et qui ont transmis cette passion des lettres aux ordres religieux de la catholicit m di vale si prodigue en moines enlumineurs D autre part Perec travers le T remar
382. ntique des hommes pervers Paris Bernard Grasset 1985 189 p GOETSCHEL Roland La Kabbale Paris Presses Universitaires de France Collection Que sais je 1985 126 p GRANIER Jean L Intelligence m taphysique Paris ditions du Cerf 1987 232 p GREIMAS Algirdas Julien S mantique structurale recherche de m thodes Paris Larousse 1966 262 p GREIMAS Algirdas Julien Du Sens Essais s miotiques Paris Seuil 1970 313 p GREIMAS Algirdas Julien Essais de s miotique po tique Paris Larousse 1972 240 p GREIMAS Algirdas Julien Du Sens II Essais s miotiques Paris Seuil 1983 245 p GROUPE D ENTREVERNES Analyse s miotique des textes Lyon Presses Universitaires de Lyon 1979 208 p GU NON Ren Le Symbolisme de la croix Paris ditions Vega 1957 315 p GU NON Ren Symboles de la science sacr e Paris Gallimard 1962 439 p GURVITCH Georges Trait de sociologie tome I Paris Presses Universitaires de France 1968 516 p GURVITCH Georges Trait de sociologie tome II Paris Presses Universitaires de France 1968 466 p HALL Edward T La Dimension cach e Paris Seuil 1971 254 p 437 HAMON Philippe Texte et Id ologie Paris Presses Universitaires de France 1984 227 p HALSALL Albert W L Art de convaincre Le R cit pragmatique rh torique id ologie propagande Toronto ditions Paratexte 1988 436 p HASSOUN Jacques Non Li l m moir
383. nture du sommeil commence la p nombre connue de la chambre volume obscur coup par des d tails o ta m moire identifie sans peine les chemins que tu as mille fois parcourus etc Sont donc envisag s ici les m canismes de l intertextualit qui pr sident la formation des textes de l original sa traduction r interpr tation dans le cas pr sent vers une transformation physico introspective la Condillac Mais pour ce qui concerne la subversion de l incipit il suffit de revenir l examen de G rard Genette tel que r alis dans Palimpsestes Composer une dition de la Recherche adorn e de telle variation minimale f t ce pour plus de facilit de lecture sur la seule premi re phrase version sportive Longtemps je me suis douch de bonne heure version nosographique Longtemps je me suis mouch de bonne heure version sexologique et sans doute plus fid lement autobiographique Longtemps je me suis touch de bonne heure etc intervention co teuse certes mais ces pratiques subversives s adressent par d finition des publics fortun s les amateurs plus d munis peuvent se contenter d une rature manuscrite Deux remarques s imposent concernant ce texte qui veut puiser la question Tout d abord l ultime transformation de l incipit proustien non incluse ici est bien s r celle du lavabo ou du tuyau qui proclamerait Longtemps je me suis bouch de bonne heure De plus
384. nulle part un lieu qui n est dans aucun lieu une pr sence absente une r alit irr elle un ailleurs nostalgique une alt rit sans identification Savoir paradoxal l utopie concerne l infini des possibles Perec voque cet infini selon ces deux textes qui ne sont que l expression de l utopie Ces deux textes comportent une forme de hi rarchie une mise en ordre dirait Perec mais il s agit d une mise en ordre non conventionnelle car elle ob it une dialectique existentielle Voyons quelques possibilit s de ces mises en ordre tout d abord pour La Cit id ale 1 L ordre de l chelle du plus grand au plus petit toile Ksar Lune N gresco Orient Monast re Am rique Donjon Grand Nord Tour Qu bec R cif France Wigwam Yonne Sous marin Paris Jonque Cinqui me Ursula Andress Zanzibar Vieux s Henri Desroches article utopie En yclopaedia Universalis op cit tome XVII p 544 7 Sur l impossibilit de l identification voir aussi Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Island Histoires d errance et d espoir Paris Sorbier 1980 p 42 e Henri Desroches article utopie op it p 544 545 184 Issoudun Exp dients Xanadu Hameau L chelle permet de r quilibrer les lieux g ographiques les constructions lunaires les moyens de transport la vedette de cin ma et les modes de vie Ils sont int gr s dans une Cit id ale c est dire
385. off et de Yamamoto Kakapot et de Harry Cover et aussi d un autre moiti anglais moiti fran ais Je me souviens qu Henri Salvador a enregistr quelque chose comme les premiers disques fran ais de Rock and Roll avec le nom de Henry Cording Rude cole que celle du calembour laquelle est donc soumis le dictionnaire qui devient pour les besoins d une personnification express Dixion Harry Quant aux proverbes anglais qu il est cens rassembler nous trouvons les c l bres paroles de Hamlet To be or not to be agr ment de ce texte qui est cens les illustrer Je t aime beaucoup Renaud mais vraiment tu n as aucune m moire tu n as vraiment aucune Georges Perec Je me souviens Paris Hachette 1978 S Ibid entr e n 449 p 110 Ibid entr e n 311 p 81 Ibid entr e n 135 p 42 167 m moire L explication de l nigme relationnelle entre le titre proverbial et le texte nous est donn e finalement par la table T oublies Renaud t oublies ces phon mes correspondent grosso modo ceux des stances haml tiennes To be or not to be Le proverbe shakespearien avait d j inspir Perec en 1969 l occasion des proverbes rassembl s pour le jeu de Go Il nous cite par exemple TOBI or not TOBI les tobi sont des extensions en ligne d o la taille de Hamlet Ce sont donc des jeux de mots particuli rement tordus comme dit David Bellos
386. ogrammatiques de Perec rel vent d une ma eutique discipline hautement stimulante pour la m moire Elle provoque un vagabondage de la pens e Elle organise la qu te de Perec pour d finir son identit Cette qu te proc de aussi bien selon la ligne droite que selon le zigzag pour reprendre les hypoth ses de Barthes propos de son oeuvre Ce sont encore des processus similaires qu il viendra interroger avec le cin aste Robert Bober New York Nous retrouvons dans R cits d Ellis Island la probl matique de l identification iconique gr ce la lettre Comment se reconna tre par la lettre Comment identifier ces milliers d anonymes qui arrivent en Am rique par bateaux entiers Confront s aux officiers am ricains de l immigration leur TH Voir Marcel B nabou Vraie et fausse rudition chez Perec in Mireille Ribi re Parcours Perec op cit p 41 47 78 Voir Georges Perec Histoire du lipogramme in collectif Oulipo La litt rature potentielle op cit p 74 7 Georges Perec La Disparition op cit Georges Perec Les Revenentes op cit 405 sort est suspendu une lettre unique que l on grave sur leur dos Tel un golem l immigrant doit appara tre ou dispara tre L homme qui vient de loin vient toujours de la terre Il incarne des r ves nationalistes et soutient les exactions dont il a t victime Golem domestique et golem embryonnaire l immigrant est comme un nouveau n qui d bute s
387. oire Ce sont les donn es de l exp rience de la m moire En amont lorsque Perec constituait progressivement ses souvenirs il aurait pu accumuler un nombre x de souvenirs possibles On peut donc envisager la s lection de Perec comme un rassemblement des donn es Cette collecte des donn es qui constitue une sorte d tude documentaire est videmment le fondement d un processus scientifique Philippe Lejeune a expliqu que Perec a r uni ses souvenirs en trois tapes De janvier juin 1973 il crit les cent cinquante premiers Je me souviens De novembre 1974 janvier 1975 nouvelle flamb e n 186 270 Le 13 mai 1977 il en est encore au n 320 En juin le livre est fini les cent soixante derniers Je me souviens ont t crits en un mois et demi ce stade nous pouvons consid rer le recueil de Perec comme un ensemble contenant 480 entr es De plus c est ainsi que sont th oriquement d sign s les souvenirs enregistr s par Perec comme donn es Philippe Lejeune explique les manipulations de ces donn es appel es entr es en comparant le recueil de Je me souviens une usine de s paration isotopique Ce qu on isole apr s avoir rejet tout le reste semble t nu d risoire mais l tincelle jaillit le courant passe l nergie est l Comment dans ces conditions passer des entr es au d chiffrement des souvenirs Philippe Lejeune La M moire et
388. ologie improvis e Cette instabilit de ses m thodes rend compte des h sitations de l observation Confront une multitude de possibilit s d observation tout aussi passionnantes les unes que les autres il va sans cesse de l une l autre comme par regret pour ce qu il vient d abandonner Cette navette incessante entre les certitudes les doutes et les incertitudes l am ne reconsid rer continuellement les aspects et les pr sentations des faits Comment identifier les faits relevant de l insignifiant et comment ensuite les pr senter pour que le lecteur cautionne le choix Au fur et mesure que l exp rience s enracine et que l observateur narrateur gagne en exp rience nous assistons aux transformations patentes du double processus d observation consignation Les consid rations m talinguistiques et m tadi g tiques si nous incorporons un narrateur personnage observateur d un r cit que nous consid rons comme fictionnel se manifestent par des s Ibid pp 14 et 20 pe Ibid p 21 120 remarques du type Limites videntes d une telle entreprise m me en me fixant comme seul but de regarder je ne vois pas ce qui se passe quelques m tres de moi je ne remarque pas par exemple que des voitures se garent Ce constat d impuissance confirme les analyses de Catherine Kerbrat Orecchioni lorsqu elle insiste sur l impossibilit de tout observer et de tout consigner Perec prend progressi
389. ommer comme Jules Verne ce que remarque Perec E Vingt Mille Lieues sous les mers Conseil sait CLASSER les poissons Ned Land sait CHASSER les poissons Conseil tablit le catalogue raisonn des poissons que Ned Land arraisonne Ce go t de nommer que manifeste incontestablement Perec le critique Christian Chelebourg l attribue chez Jules Verne l influence de Hugo On reconna t encore l influence hugolienne dans cette ivresse lexicale de l puisement du r el laquelle se 7 Georges Perec Je suis n op cit p 107 Georges Perec Penser Classer op cit p 130 Roland Barthes roland Barthes par roland barthes op cit p 80 7 Georges Perec Penser Classer op it p 156 192 laisse aller Jules Verne On peut dire que l puisement du r el dans la nomination produit la jouissance dont Barthes parle propos de l crivain Lacan d finit cette configuration de la jouissance comme interdit Ce quoi il faut se tenir c est que la jouissance est interdite qui parle comme tel ou encore qu elle ne puisse tre dite qu entre les lignes Pour Perec c est non seulement entre les lignes qu il crit mais aussi entre les livres qu il lit ou qu il produit que l on peut retrouver cette jouissance Loin des puisantes listes pr tention exhaustive cette jouissance concerne l puisement du d sir dans la r alit et son analyse dans l expos des aspirations de
390. on ll le centre de la croix est marqu Ren Gu non M langes Paris Gallimard 1976 p 63 Voir Ren Gu non Symboles de la science sacr e op cit p 52 54 369 kabbalistiquement par la lettre W qui se pla ant au centre du T tragramme TITT dont les quatre lettres figurent sur les quatre branches de la croix forme le nom penta grammatique TITUMTY vi Par ce m canisme de l ajout raisonn de la lettre nous comprenons mieux d sormais le processus de l expansion ind finie des lettres et des nombres s engendrant jusqu l infini ce que fait Gu non dans la suite de son expos cette prolif ration infinie des nombres dont le T tragramme est l origine par voie de recomposition kabbalistique des lettres correspond videmment la diss mination du nom perdu de Dieu C est ce sur quoi insiste avec humour Umberto Eco dans Le Pendule de Foucault o sur deux pages il d veloppe les variations informatiques du nom occult Il exhibe ainsi l intrigue absolue comme le rappelle Patrick Imbert en crivant que c est ce qui se produit dans Le Pendule de Foucault de Eco o les permutations des lettres du nom de Dieu sont cens es ouvrir au savoir contenu dans la disquette du grand ordinateur Voici d couvert le fondement sans cesse renouvel du myst re que s approprie Perec toujours dans le cas de Cinoc o dans La Vie mode d emploi il propose vingt graphies prononciations du no
391. on Paris Hachette 1966 Voir Albert Camus De l insignifiance in ompl tes d Albert Camus op cit pp 449 450 Georges Perec Approches de quoi in L Infra ordinaire op cit pp 12 13 Esp ces d espaces op _cit pp 70 74 106 Du microcosme au macrocosme Perec propose un programme d observation Alternance du ton et alternance des centres d int r t ce d chiffrage des hi roglyphes de l insignifiant passe par une s rie de phases parfaitement rythm es qui exhibent l angoisse de l observateur Tout voir tout noter tout organiser Voil le d fi qu il se propose de relever Ce programme s inscrit dans une complicit avec ses lecteurs Il peut se manifester l imp ratif et d non ant l urgence de la situation comme dans Approches de quoi D crivez votre rue D crivez en une autre Comparez Faites l inventaire de vos poches de votre sac Il peut aussi se r v ler sous la forme d un infinitif valeur modale d imp ratif comme dans Esp ces d espaces Observer la rue de temps en temps peut tre avec un souci un peu syst matique S appliquer Prendre son temps La rue essayer de d crire la rue de quoi c est fait quoi a sert Perec s interroge essentiellement sur le milieu urbain surtout le milieu parisien Ses conseils ses ordres ses exhortations pressantes ne s adressent pas un protagoniste pr cis d o l emploi de l imp rati
392. on de tels objets au corps g n ral d une description a pour but de produire l illusion r f rentielle L vidence d un objet insignifiant produit l ancrage du texte dans un r f rent concret Barthes part du principe que le monde occidental ne peut se passer de r f rence au concret La mention d objets surtout insignifiants permet de cautionner le texte en le rattachant la r alit Quant Georges Perec sa recherche de l objet ou du fait insignifiant n est pas n cessairement motiv e par la n cessit d une caution d un cautionnement r f rentiel du Roland Barthes L Effet de r el in collectif Litt rature et r alit Paris Seuil 1982 pp 81 90 Ibid p 81 3 Ibid p 82 3 Ibid p 87 92 texte hormis pour ses romans eux m mes qui n chappent pas ce processus ce sur quoi nous revenons la fin de ce chapitre avec La Vie mode d emplo Si la recherche de l insignifiant a passionn Perec c est plus par une prise de position contre l extraordinaire et le sensationnel qui d fra ent la chronique Il veut ramener la vie humaine la banalit de la vie quotidienne C est alors qu il pense interroger la fonctionnalit de l objet ou la signification du fait d risoire D crivez votre rue Faites l inventaire de vos poches de votre sac Tels seront les mots d ordre de Perec dans sa recherche de l insignifiant Cela constitue pour lui l
393. onn et d autre part cela ne serait pas conforme la logique romanesque de Kafka qui comme l ont vu de nombreux lecteurs critiques est faite de myst res incompr hensibles identifi s la lois du destin ou a 7 Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op cit p 54 4 Georges Perec La Vie mode d emploi op it p 71 Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op cit p 54 F8 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 71 Voir Bernard Lortholary pr face Franz Kafka Amerika ou le disparu Paris Flammarion 1988 pp 10 14 254 transcendance impossible C est alors que se produit une nouvelle soudure entre les deux textes gr ce un connecteur actantiel l impr sario Anonyme chez Kafka puisqu il n y a qu un seul h ros il dirige notre attention sur Rorschash chez Perec L impr sario faisait tout pour abr ger le plus possible ses souffrances C est donc Rorschash lui m me qui est identifi l impr sario cette transformation n est pas sans cons quence La soudure au niveau textuel se double d une rupture au niveau actantiel puisque l impr sario alias Rorschash redevient le sujet et le trap ziste l objet Le but du h ros impr sario est d abr ger les souffrances de l objet acrobate Nous nous retrouvons confront s la probl matique de l espace temps consid r alors comme opposant D une part i
394. onnaissances structurelles lexicales Ainsi les nombreuses associations de mod le binaire ou ternaire peuvent tre construites sur une base th matique Elles peuvent 8 Ibid entr es n 132 n 150 et n 191 p 41 45 et 53 7 Ibid entr e n 143 p 44 bid entr e n 162 p 47 1 Ibid entr e n 316 p 82 5 1e a AAR 321 appara tre l index comme le cousin Henri ou encore ne pas y appara tre comme le Palais de Chaillot Il existe une potentialit consid rable dans le recueil non seulement de revoir les entr es mais aussi de les reconstruire en fonction d un syst me romanesque ou d un syst me encyclop dique Les syst mes multipolaires constituent justement un mod le plus caract ristique de la connaissance encyclop dique Les entr es ainsi identifi es peuvent rassembler une connaissance tr s vaste synth tis e par la bri vet ou l appartenance culturelle Nous avons par exemple les entr es de la page 93 du recueil qui constituent dans leur accumulation rapide un v ritable bombardement de souvenirs 368 Je me souviens de Elle n a dans qu un seul t 369 Je me souviens de Caryl Chessman 370 Je me souviens de Abb Pierre 371 Je me souviens de la myxomatose 372 Je me souviens de Continent Perdu 373 Voir ibid pour le cousin Henri les entr es n 10 n 22 et n 37 p 15 18 et 21 pour le Palais de Chaillot les entr es n 132
395. ons me concernant p 68 7 Albert Camus L Exil et le Royaume Paris Gallimard 1957 Jonas ou l artiste au travail p 142 ETT e e 188 revers et l utopie l avers En v rit l analyse de Barthes se d multiplie puisque le champ des contradictions peut occuper autant la vie de l crivain que sa propre fantasmatique de l utopie Ainsi avons nous dans ces aspirations domestiques un Perec qui affirme ceci dans Choses que je fasse avant de mourir choses li es des d sirs plus profonds de changement par exemple Vivre l h tel Paris Nous avons aussi un autre Perec qui avoue son incertitude ou son ambivalence en proclamant dans La Cit id ale J aime bien vivre Paris mais parfois non et Je n aimerais pas vivre au N gresco mais parfois st Aussi pour Perec la vie l h tel serait bien agr able mais seulement Paris et encore la fr quentation du N gresco resterait pisodique Mais des similitudes se dessinent dans ses aspirations notamment l gard de la campagne et de la zone arctique Dans Choses que je fasse avant de mourir il reconna t d sirer vivre la campagne et dans La Cit id ale ce d sir est exprim de deux fa ons formul es selon le m me principe hypoth tique Je n aimerais pas vivre dans un hameau mais parfois stet Je n aimerais pas vivre dans l Yonne mais parfois 13 Roland Barthes roland B roland
396. onvoqu s tour de r le ou Voir Georges Perec Cantratix Sopranica L et autres crits scientifiques Paris Seuil 1991 Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit 38 simultan ment Justifiant son choix partir de sa propre probl matique qui recoupe la n tre Jean Fran ois Chassay ajoute le roman permet de rendre compte de l int gration et de l importance du discours scientifique l int rieur des discours sociaux et de l influence d terminante que le discours scientifique peut avoir sur la narration et sur les structures romanesques L appropriation de connaissances diversifi es par Perec dans son roman d termine le destin agit d une multitude de personnages instruits voire savants dont les aventures nourrissent toute la s miotique narrative De plus ces connaissances extr mement vari es font sans cesse d river l univers di g tique vers une impossible stabilit Il convient videmment ne serait ce que pour singer Perec d essayer de dresser un inventaire de toutes ces sciences qu il a int gr es son r cit comme pratiques narratives Dans son tude consacr e Perec et son rudition Marcel B nabou rappelle les liens qui existent entre La Vie mode d emploi et l histoire ce qui constitue bien s r un d part convainquant pour les rapports entre Perec et la science Mais fid le ses aspirations en
397. op cit p 39 55 11 La Bible traduction de J rusalem op cit p 47 Gen se 38 24 30 Voir David Bellos Georges Perec Une vie dans les mots Paris ditions du Seuil 1994 p 23 24 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 144 150 373 qui se rattache la m me racine que celle du nom Peretz Du nom divin et perdu celui d un trange savant puis celui de notre auteur nous retrouvons un ensemble de tendances plus ou moins explicites Comme le remarque Marcel B nabou les approximations sur le nom rel vent de traits traditionnellement consid r s comme ins parables de la pens e juive le go t de l ex g se et de l ex g se portant sur les propres travaux de l ex g te le besoin d puiser toutes les possibilit s d une pens e d un raisonnement et de tirer toutes les cons quences d un mot ou d une Images La pens e de B nabou dict e par d autres pr occupations recoupe cependant une autre grande tentation de Perec savoir comme le montre Philippe Lejeune celle de dire l indicible Dans cette tentative de r cup ration Perec fait fl che de tout bois il r invente tous ses pr d cesseurs Cela revient au processus de l intertextualit g n ralis e que nous analysons plus loin dans ses diff rentes modalit s En effet gr ce l expansion ind finie et infinie des lettres tout a t dit comme le pensent les 3 Marcel B nabou
398. opre interpr tation des signes et de leurs sens c est dire une herm neutique personnelle et originale Sa recherche du sens passe par la remise en cause du langage Il ne le fait pas d une fa on conventionnelle en opposant au beau style des entorses plus ou moins d lib r es Il imite d abord Flaubert puis il suit ces grands h ritiers du style classique que sont Paul Val ry Andr Gide ou Fran ois Mauriac Pourtant la ma trise du beau langage n int resse que m diocrement Perec qui privil gie les m canismes de la langue Il s agit 3 Georges Perec Tentative d inventaire des aliments liquides et solides que j ai ingurgit s au cours de l ann e mil neuf cent soixante quatorzes in L infra ordinaire Paris Seuil 1989 p 97 106 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit passim Jacques Roubaud Notes sur la po tique des Listes chez Georges Perec in Penser Classer op cit p 201 208 Paul Fournel Perec d but d inventaire loc cit p 73 Voir Michel Foucault Les Mots et les choses Paris Gallimard 1966 p 44 18 l d une forme de connaissance de la langue li e la morphologie la syntaxe ou la s mantique n cessaires l crivain certes et se rattachant encore au domaine encyclop dique Cette connaissance de la langue se manifestera plut t chez Perec comme une exp rimentation du langage L exploration des m canismes langagiers passera donc chez Perec
399. origines Je taime plus que Je name la flamme Qui borne le monde Elle illumine Un cercle Quelconque Hors duquel nul ne sait rien d elle Rainer Maria Rilke cit par Andr Devyver Le Sang pur les pr jug s de race chez les gentilhommes fran ais de l Ancien R gime 1560 1720 Bruxelles ditions de l Universit de Bruxelles 1973 Tous les r actionnaires sont des tigres en papier En apparence ils sont terribles mais en r alit ils ne sont pas si puissants envisager les choses du point de vue de l avenir c est le peuple qui est vraiment puissant et non les r actionnaires De m me qu il n y a aucune chose au monde dont la nature ne soit double c est la loi de l unit des contraires de m me l imp rialisme et tous les r actionnaires ont une double nature ils sont de vrais tigres et en m me temps des tigres en papier Entretien avec la journaliste am ricaine Anna Louise Strong ao t 1966 uvres choisies de Mao Ts Toung tome IV Mao Ts Toung Citations du Pr sident Mao Ts Toung P kin ditions en Langues Etrang res 1966 p 82 83 NIK Parmi les devises les plus pernicieuses que l Occident a produites on ne peut manquer de citer celle attribu e Socrate Connais toi toi m me Inscrite au dessus de la porte d Apollon Delphes cette trange devise convoque la curiosit des voyageurs Thraces Grecs d Asie Mineure Ath niens Scythes M so
400. otanique attire par contre l int r t d un tudiant de l Universit de Madrid qui se consacrera plut t aux d chiffrements des r ves Mais surtout c est une discipline qui passionnera un certain Mr Macklin botaniste g de plus de soixante ans qui apr s avoir vingt ans durant catalogu des papillons et des foug res dans les sous sols du British Museum tait parti sur le terrain faire l inventaire syst matique de la flore du Kenya Mais c est Georges Perec La Vie mode d emploi op it p 144 Ibid p 24 15 Ibid p 27 6 Ibid p 189 191 7 Ibid p 240 18 Ibid p 430 40 particuli rement la chimie qui retiendra l attention de Perec en relation directe avec la discipline g n ratrice l alchimie on comprend qu elle fascine Perec pour toutes les potentialit s que rec le cette science transmutation des m taux explosions plus ou moins cons quentes exp rimentations amusantes et surtout synth ses innombrables et toujours possibles d l ments aussi rares que pr cieux Les repr sentants de la chimie restent principalement un professeur de physique chimie Paul H bert surnomm comme l indique ses initiales PH par ses l ves du Lyc e Chaptal un pr parateur de chimie l cole polytechnique Auguste Morellet grand sp cialiste en produits farfelus et en explosions de toute nature qui ont l art de perturber la vie des habitants de son immeuble un savant chi
401. otive tous ces chercheurs plus ou moins Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 144 Laurence Dahan Gaida Du Savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature in Revue Canadienne de Litt rature Compar e op cit p 482 58 orthodoxes savoir comprendre les l ments pour pouvoir les reconstituer R g n rer la mati re romanesque c est galement faire oeuvre de talent personnel Le lien m tadi g tique entretenu par Perec et ses personnages de savants est fond sur cet objectif surprenant permettre leur int gration au r cit gr ce la narration de leurs d couvertes Concernant Dinteville il se borne nous d livrer sur un ton hypoth tique les exp riences plus que contestables que m ne le savant En 1840 il crut d couvrir le secret de la fabrication du diamant partir du charbon Se fondant sur une th orie qu il appelait la duplication des cristaux il r ussit faire cristalliser par refroidissement une solution satur e de carbone Ces exp riences d ment pr sent es selon des m thodes de v ridiction prouv es conduisent cependant des r sultats peu convaincants les diamants qu il avait obtenus tant ternes cassants facilement rayables avec l ongle et parfois m me friables Dernier aspect de cette courte poursuite vers le miracle de la synth se du diamant l ent tement du savant prendre un brevet
402. oue le jeune Dan h ros de l anecdote dont le titre est donc Jazy Dan l aimait trop tout un chacun aura reconnu le titre de l ouvrage de Queneau Zazie dans le m tro Mais l ne s arr tent pas les relations d intertextualit et les allusions que tisse Perec En effet le nom de famille Lochere et le pr nom du protagoniste principal du fait divers Dan sont transparents ils correspondent la famille et la m re de Zazie qui s appelle Jeanne Laloch re Dan Loch re n est autre que le fr re de Zazie Il habite Saint Mouezy c est dire un avatar de Saint Montron Il est vident que Saint Mouezy voque un village o a sent le moisi En r alit dans ce village moisi pourri en voie de d composition sans espoir il existe peu d espoir pour les jeunes espoirs Les athl tes de Saint Mouezy qui rime aussi avec Jazy ressemblent certainement ceux de W ou le souvenir d enfance c est dire ce sont de bien pi tres athl tes il faut les voir ces Athl tes squelettiques au visage terreux l chine courb e il faut voir fonctionner cette machine norme dont chaque rouage participe avec une efficacit implacable Georges Perec Je me souviens op it entr e n 450 p 110 C est nous qui soulignons 73 Georges Perec Voeux op cit p 180 7 Raymond Queneau Zazie dans le m tro Paris Gallimard 1959 7 Voir ibid p 12 3 Voir ibid p 67 Geor
403. our les immigrants Ce cheminement recompose anachroniquement les actions du nazisme l gard des juifs Ainsi que le signale ric Michaud Le langage du nazisme est celui de l assimilation ou de l exclusion De la m me fa on l immigrant doit tre assimil ou exclu mais la lettre rend visible ce qui ne l est pas Tant que l immigrant n est pas marqu il est objectivement inexistant Il est invisible pour le monde de la Cit C est la lettre qui en le magnifiant comme minorit visible fait appara tre le myst rieux immigrant Il s apparente d s lors pour employer une expression calqu e sur Fourier un anti golem peu importe la nouvelle signification de la lettre En effet le lien tabli par Perec entre le Golem et l immigrant n est pas celui de l effacement mais celui de l apparition de l exhibition du surgissement de l humain dans la l gende du Golem il est racont qu il suffit d crire un mot Emeth sur le front de la statue d argile pour qu elle s anime et vous ob isse et d en effacer une lettre la premi re pour qu elle retombe en poussi re Partant de la conception saussurienne du signe selon laquelle le signe est signe d autre chose et de la constatation que Perec utilise la l gende du Golem pour caract riser la TS ric Michaud Nazisme et repr sentation in Critique n 487 Paris d cembre 1987 p 1023 TT Voir chez Fourier par exemple l
404. oyageurs de la SNCF Pericoloso O et Sporgersi I Sull effetti tomestiche e corticali della stimolazione di leguminose nella Diva Rencontre de troisi me type Payre L et Tairnelle E Sur le sursaut tomateux du Baryton l ger f Cette liste non exhaustive de quelques rencontres bibliographiques r v le quel point Perec parvient rejouer la science au nom d une culture populaire en diss minant ses savoirs l s agit d une cr ation originale partir des traditions scientifiques des m thodes d exhaustivit et de confrontations exp rimentales Ainsi que l voquait Roland Barthes la science produit des visions visions largies quittant le terrain exp rimental pour rencontrer celui plus vaste de l existence dans sa totalit Barthes crit propos de l essai Tout essai repose ainsi peut tre sur une vision des objets intellectuels Pourquoi la science ne se donnerait elle pas le droit d avoir des visions Bien souvent t9 Ibid p 13 et p 32 33 Ibid p 15 et p 30 voir Bernard Magn La Cantatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in Perecollages 1981 1988 op cit p 201 6 Georges Perec ibid p 14 et p 30 85 par bonheur elle le prend La science ne pourrait elle pas devenir fictionnelle partir d exp riences fantaisistes conduites dans le champ r f rentiel la cantatrice siffl e qui re oit des to
405. p cit Bris Marin p 118 153 grandes magnitudes des textes favorisant l intertexte Il est vident que plus la contrainte est exigeante plus le proc d se r v lera efficace Ce que Perec reconna t volontiers au sujet des voyelles La troisi me tradition du lipogramme est la tradition vocalique celle qui bannit les voyelles Elle n est pas n cessairement la plus difficile crire sans a est badin en fran ais p rilleux en espagnol c est l inverse pour Tell Voici donc l attrait essentiel du lipogramme pour Perec le d fi relever Queneau s tait frott la suppression du E dans les Exercices de Style qui nous proposent ce texte Lipogramme Voici Au stop l autobus stoppa Y monta un zazou au cou trop long qui avait sur son caillou un galurin au ruban mou Il s attaqua aux panards d un quidam dont arpions cors durillons sont avachis du coup puis il bondit sur un banc et s assoit sur un strapontin o nul n y figurait Plus tard vis vis la station saint Machin ou saint Truc un copain lui disait Tu as ton raglan un bouton qu on a mis trop hauts Voil Le texte se lit avec aisance voici voil sans charrier nul E Proc d exemple filiation dont Perec attribuera l efficacit Queneau Ramun Quayno dont il s affirmait l obscur famulus n avait il pas dit jadis Lon n inscrit pas pour assombrir la John Lee Brise Ma Rime l ivresse livresque dans La
406. par Philippe Drogoz adapt en italien par Italo Calvino Lieux communs travaill s 1972 Versions latines 1973 Les adventures de Dixion Harry 1975 7 Collectif Qulipo La Biblioth que oulipienne volume 2 Paris ditions Ramsay 1987 Georges Perec pithalames p 1 23 Voir Georges Perec Voeux op cit p 7 8 St bid p 7 165 Petite histoire de la musique 1977 Philippe Drogoz s est partiellement inspir de ce texte pour une oeuvre intitul e Scrabble Music Oeuvres anthumes 1978 bien que n ayant pas t dit sous forme de voeux Oeuvres anthumes partiellement publi dans le Magazine litt raire d octobre 1978 se rapproche manifestement de ces textes Gamine de blouse 1979 ROM POL 1980 Dictionnaires des cin astes 1981 Cocktail Queneau 19825 Perec aimait les listes nous allons y revenir celle ci est close et il convient de s attarder sur quelques textes tout particuli rement sur ceux qui concernent Queneau Pour commencer consid rons Les adventures de Dixion Harry 1975 55 non seulement pour l anglicisme adventures qui voque la fa ade du magasin devanture mais encore et surtout pour le nom patronymique du h ros Dixion Harry D o vient ce nom fantaisiste David Bellos nous en explique ainsi la gen se Ce dont il Perec s occupa beaucoup en revanche Grifydam ce fut de son ri
407. par une activit ludique produisant des jeux de langages extr mement diversifi s Ces jeux concernent donc avant tout le Perec oulipien mais pas toujours car le ludisme de Quel petit v lo pr figure l Oulipo Cette exp rimentation ludique du logos se fera selon une chelle dimensionnelle des pratiques de la lettre au texte en passant par les mots Ce seront principalement des jeux portant sur le signifiant qui lui permettront l exp rimentation la plus rentable Cependant la premi re grande d monstration r ussie de cette exp rimentation du logos sera un roman lipogrammatique La Disparition fruit de l adh sion de Perec l Oulipo La privation de la voyelle e produit une transformation de la langue correspondant une exp rience conduite tant sur la langue que sur la pratique du roman En travaillant le langage Perec tablit une nouvelle conception du savoir sur la langue l instar des glossolales dont les linguistes peuvent tudier la cr ativit le ludisme du langage tronqu de Perec dans La Disparition m rite d tre consid r avec soin La suppression d une voyelle le e dans La Disparition toutes les autres voyelles dans Les Revenentes s apparente une hypoth se scientifique dont on pourra v rifier Georges Perec Quel petit v lo guidon chrom au fond de la cour Paris Deno l 1966 Georges Perec La Disparition Paris Deno l 1967 19 les implications et les cons quen
408. parition Paris Deno l 1969 319 p Les Revenentes Paris Julliard 1972 138 p La Boutique obscure Paris Deno l Gonthier 1973 n p Esp ces d espaces Paris Galil e 1974 127 p W ou le souvenir d enfance Paris Deno l 1975 220 p Alphabets Paris Galil e 1976 186 p Je me souviens Paris Hachette Pol 1978 153 p La Vie mode d emploi Paris Hachette Pol 1978 700 p Les Mots crois s Paris Mazarine 1979 n p Un Cabinet d amateur Paris Balland 1979 125 p La Cl ture et autres Po mes Paris Hachette Pol 1980 89 p Th tre I Paris Hachette Pol 1981 132 p Tentative d puisement d un lieu parisien Paris Christian Bourgois 1982 60 p Penser Classer Paris Hachette 1985 185 p Les Mots crois s II Paris Mazarine Pol 1986 n p 53 jours Paris Pol 1989 335 p L Infra ordinaire Paris Seuil 1989 123 p 424 Voeux Paris Seuil 1989 180 p Je suis n Paris Seuil 1990 116 p Cantatrix Sopranica et autres crits scientifiques Paris Seuil 1991 119 p L G Une aventure des ann es soixante Paris Seuil 1992 185 p Le Voyage d hiver Paris Seuil 1993 33 p OEUVRES EN COLLABORATION Petit Trait invitant la d couverte de l art subtil du go Paris Christian Bourgois 1969 en collaboration avec Pierre Lusson et Jacques Roubaud 147 p R cits d Ellis Island Histoires d errance et d espoir Paris Sorbier 1980 en collaboration avec Rober
409. parvient pas laborer ce nouveau savoir qu il recherche Son exp rimentation du quotidien se solde par une opposition manifeste entre ce qui est important et ce qui ne l est pas Mais il renverse les points de vue entre ce qui est digne d int r t et ce qui ne l est pas Encore une fois nous constatons que l application de la PS Georges Perec Tentative d puisement d un li isien op cit i Cause Commune revue fond e par Jean Duvignaud en collaboration avec Paul Virilio et Georges Perec en 1971 1972 Paris et dit e par Deno l et Gonthier 147 m thode scientifique ne permet pas Perec de faire surgir un nouveau savoir mais de r v ler de nouvelles oppositions au sein de la r alit Il lui faudra alors trouver un autre champ d investigation auquel il pourra appliquer la m thode scientifique de l exp rimentation Il s av re que la diversit de ses lectures et son adh sion l Oulipo le conduiront s int resser un nouveau champ exp rimental celui du langage Il m ne alors des exp riences aussi bien sur les m canismes des contraintes langagi res que sur ceux de l intertextualit Cette ma trise de l exp rimentation lui permettra d laborer un nouveau type de textes DEUXI ME PARTIE EXP RIMENTATION DU LANGAGE ET PRATIQUE DES TEXTES CHAPITRE M MANIPULATION ET COMBINATOIRES Nihil est in intellectu quod non prius fuerit in sensu Adage scolastique Outre l alphab
410. passion pour les contraintes formelles et les combinaisons multiples et finalement son attirance pour les Georges Perec La Vie mode d emploi op it p 163 3 Ibid p 473 421 histoires et les personnages aux p rip ties sans cesse renouvel es Il est vrai qu il suspend rapidement ce classement en m lant all grement les tendances les unes aux autres dans chacun de ses ouvrages La raison de cette confusion rel ve de ses ambitions d crivain Son programme tait immense mais il ne voulait pas se r p ter De plus il voulait crire tout ce qui est possible un homme d aujourd hui d crire Suit dans cette confession la liste des objets de ce vaste programme qui recoupe l infini la plupart des connaissances humaines Nous pouvons donc remarquer que c est par ce programme sp cifique que Perec s tait assign qu il se manifeste comme un crivain original et unique crivain classificateur il demeure en v rit inclassable non seulement au sein de la litt rature fran aise mais probablement aussi au niveau de la litt rature mondiale Georges Perec Notes sur ce que je cherche in Penser Classer op cit p 10 Ibid p L1 3 Tbid p 11 BIBLIOGRAPHIE OEUVRES DE GEORGES PEREC Les Choses Paris Julliard 1965 158 p Quel Petit V lo guidon chrom au fond de la cour Paris Deno l 1966 119 p Un Homme qui dort Paris Deno l 1967 144 p La Dis
411. potamiens Romains Syro ph niciens ceux de la Cappadoce de la Cyr na que du Pont Euxin et les Juifs de la diaspora tous curieux de saisir leurs racines et la culture trang re qui ram ne comme une mar e la leur propre Puis l histoire du Moyen ge sera celle de cette longue maturation des cultures en voie de symbiose la grecque avec Aristote transf r e vers la scolastique l arabe avec Avicenne et Averroes et la juive avec la Mishna les Talmuds et la Kabbale H ritier des Rabbins de l Isra l obscur de la proscription Perec s emploie remettre en cause les fondements individualistes de la civilisation gr co chr tienne de l Occident et tel le grand Rabbin Loew de Prague il d tourne la langue de sa destination Passant du grec au fran ais par l interm diaire d une interpr tation phon tique et culinaire Perec tourne en d rision la fameuse devise qui du grec gnothi seauton devient alors les gnocchis de l automne Ce titre sous forme de calembour est celui d un texte o Perec s interroge sur ce Ouest pour lui Voir Ren Gu non M langes Paris Gallimard 1976 l article intitul justement lt Connais toi toi m me traduit de l arabe publi dans la revue El Ma rifah n 1 mai 1931 Ren Gu non op cit p 49 Voir Gershom G Scholem La Kabbale et sa symbolique Paris petite biblioth que Payot 1975 p 214 215 Pour ce chapitre voir Marcel B nabou Pe
412. projet de Gratiolet s identifie au domaine de la m taphysique Comment s y prendre pour d molir une th orie aussi prouv e La parodie va s instituer sur une base rh torique Perec n utilise pas son personnage pour passer en revue une critique compl te de la th orie de l volution comme le font par S Thid p 347 Friedrich Engels M E D hring bouleverse la science tome n 1 Paris ditions Costes 1931 p 11 Georges Perec La Vie mode d emploi op it p 347 64 exemple les cr ationnistes Au contraire Olivier Gratiolet a entrepris un inventaire exhaustif de toutes les imperfections et insuffisances dont souffre l organisme humain Suit une longue num ration de tous les d fauts de l homme tendant d montrer l inocuit de ladite th orie avec cette conclusion de Gratiolet l homme que l on consid re g n ralement comme le plus volu de tous est de tous l tre le plus d muni La parodie scientifique sous la forme de m taphysique fiction alimente un expos pseudo scientifique pour cautionner une d monstration qui s tablit sur le plan de la v ridiction La science doit encore garantir l ancrage parodique du texte romanesque dans le r el A cette fin rien de tel que de faire c toyer comme le fait Perec des savants fictifs comme Appenzzel et des savants r els comme Marcel Mauss ou encore comme le philologue su dois Hambo Taskerson et Hjelmslev
413. q feuillets 77 Suite cette num ration du p ritextuel dans sept ouvrages de Perec nous reprendrons notre compte l image th orique du lecteur actif qui sera justement stimul par tout cet appareillage paratextuel et notamment par les index Nous nous souvenons en effet que pour son projet L Arbre Perec avait mentionn l index comme devant jouer un r le 174 Georges Perec Esp ces d Espaces op cit 3 Georges Perec Je me souviens op cit au sujet des pages blanches et du gaspillage subs quent on devrait lire Les Temps d une ruse de Philippe Lejeune in La M moire et l oblique Georges Perec autobiographe Paris P O L 1991 p 235 250 6 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit 7 Georges Perec Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques op cit les pi ces signal es sont aux pages suivantes article n 1 r f rences pp 26 33 article n 2 bibliographie pp 51 52 article n 3 pi ces annexes pp 108 115 geesde nm a 268 inestimable dans la lecture le d chiffrement et la composition du texte un index qui sera non un suppl ment mais une v ritable et m me essentielle partie du livre Si nous commen ons par l index de Quel petit v lo nous devons remarquer que Perec renvoie son lecteur la lecture du texte Index des fleurs et ornements rh toriques et plus pr cis ment des m taboles et des paradoxes que l auteur croit avo
414. qu s ou des proc d s caricaturaux Certes ces sciences du myst rieux sont les plus aptes faire bouger les savoirs en ce qu elles d tournent la causalit scientifique de son objectif primordial savoir l explication C est pour cela que le savoir scientifique reste toujours le d clencheur privil gi de l aventure car il porte en lui l explication et permet de justifier les situations les plus invraisemblables Appenzzel poursuit inlassablement les kubus Fernand de Beaumont recherche le myst re de Lebtit Eidrich Wehsal veut Umberto Eco Le Pendule de Foucault Paris CH synth tiser le p trole et Fran ois de Dinteville le diamant Perec veut raconter la science non dans un but de vulgarisation mais comme parodie du savoir Quant aux textes pseudo scientifiques de Perec ils pulv risent le s rieux et les pr tentions au s rieux de la science en g n ral En poussant l extr me par un emploi caricatural les caract ristiques bien d finies du texte scientifique vocabulaire langue sp cialis e r f rences objectifs d monstration oblig e notes bibliographie Perec d tourne la science de son propos et la subvertit par un nouveau savoir un savoir parodique qui confine l ignorance sereine du sceptique En feignant de se soumettre aux exigences de la science Perec conjugue ludiquement le savoir scientifique et un certain savoir populaire caract ris par de multiples inventions langagi r
415. que l ancienne ad quation du Georges Perec W ou le souvenir d enfance op it p 105 106 Sur cet emploi du signe voir Raymond Queneau B tons Chiffres et lettres Paris Gallimard 1960 o Queneau int gre son texte des signes disparates Au sujet du sigle Voir Georges Perec La rue Vilin in L Infra ordinaire Paris Seuil 1989 p 21 g f er rare 354 signifiant et du signifi dans toutes les critures pictographiques Cl ment d Alexandrie rel ve cette imitation directe entre le scarab e et son pictogramme Toujours dans ce texte nous red couvrons le cratylisme et ses implications On se souvient en effet que dans Le Cratyle Socrate tente de r fl chir sur le caract re conventionnel ou naturel du langage Et Cratyle de postuler que le son correspond la chose nomm e ou encore que la lettre est le dessin de la chose voqu e Marc Angenot pour statuer sur le d bat ajoute que contre l arbitraire du signe le cratylisme opte pour la surd termination du symbole De plus Umberto Eco rappelle le fond du probl me Le processus s miotique s identifie au processus abstractif de la pens e Il s agit dans les deux cas de s lectionner certains aspects g n raux des donn es de l exp rience et de construire sur cette base une sorte de mod le st nographique selon la th orie de l iconisme ce mod le a une forme identique celle de l objet signifi L exemple du T
416. que popularis par Moli re l enthym misme parodique la documentation scientifique d tourn e de son H Georges Perec Une Amiti scientifique et litt raire L on Burp et Marcel Gotlib suivi de Consid rations nouvelles sur la vie et l oeuvre de Romuald Saint Sohaint in ibid p 56 5 Ibid p 69 voir aussi la page 68 56 Thid p 69 78 objet La parodie de la science revient d montrer ses carences dans l investigation du r el Tous ces proc d s parodiques ne sont pas innocents Ils visent l allusion une culture populaire g n ralement loign e du contexte scientifique mais pas toujours et contribuant ainsi l laboration de nouveaux savoirs tant donn es les immenses possibilit s et la souplesse du texte litt raire la litt rature sera m me de faire surgir des connaissances nouvelles voire d anciennes renouvel es par le changement des perspectives Ainsi que le montre Laurence Dahan Gaida La litt rature peut aussi tre amen e en tirant parti de la structure lacunaire de ses structures pist miques produire des savoirs in dits partir de l ordre tabli en d ployant les possibles qui sont scell s dans ses savoirs d emprunt elle transforme ses propres fictions en un tout autre savoir 7 C est exactement ce que fait Perec en superposant un savoir pseudo scientifique une infinit de connaissances disparates qui en appellent de multiples synth s
417. quer les probl mes de l homme solitaire dans le monde de la production Mais cela n avait pas encore t un th me litt raire Il n y a pas encore eu de roman de r cit qui pr sente des personnages vivant l int rieur de cette soci t soumis la pression du march C est cela mon livre L aveu de cette probl matique comment traiter de ce probl me social sinon en inventant des personnages qui analyseraient les syst mes conomiques mis en place dans les soci t s lib rales circuits de distribution de consommation march s financements concurrence logistique etc Comment analyser les multiples interactions et synergies d velopp es au sein d un soci t conomie lib rale Sous l abondance apparente r gne la p nurie d o la n cessit des tudes des enqu tes des recherches visant permettre le contr le des march s par les classes dirigeantes non productives gouvernants arm e clerg cadres Derri re ces enqu tes subalternes se cache l enjeu primordial la ma trise des besoins des humains et finalement le contr le du d sir dans la soci t humaine La probl matique de Perec est la suivante comment la conscience humaine qui vit le d sir peut elle tre obscurcie par la r alit de ce qui l entoure Cette r alit est devenue encore plus complexe partir de la premi re puis de la seconde r volution industrielle C est le conflit traditionnel qui sera explor
418. qui se sont essay s aux Je me souviens et qui l instar de Perec ont voulu rappeler leurs souvenirs gr ce au nom propre ont couru un chec Philippe Lejeune nous rappelle l exemple de Philippe Sollers Sollers est un petit malin il est comme Le Figaro on ne la lui fait pas Il crit Je me souviens de Hitler je me souviens de Staline et aligne ainsi la suite 34 noms illustres exercice parodique qui se retourne contre lui On a l impression qu il est jaloux et vex On ne peut r employer 8 Ibid p 70 TT 184 S minaire P rec Paris VII avril 1992 Francis Marmande et Bernard Magn signal par Andr e Chauvin Jeu de m moire et histoires de mots dans Je me souviens de Georges Perec Les Cahiers du CRELEF op it p 60 S Philippe Lejeune La M moire et l oblique Georges Perec autobiographe op cit Les temps d une ruse p 247 329 innocemment la recette de Perec qui fut imit e de l exemple de Joe Brainard car il fallait encore constituer la prodigieuse vari t s des entr es pour chapper la monotonie de la litanie anaphorique Ajoutons toutefois ces Je me souviens de Perec trois autres exemples qui ne figurent pas au recueil mais qui sont signal s et remarquables pour tre analys s Un premier long souvenir Je me souviens aussi d une affiche o l on voyait un visage de femme pris dans un casque impressionnant destin l examen de sa vu
419. qui vise abolir les champs respectifs de domination priv e appartenant aux disciplines Quel savoir est autonome aujourd hui quand on sait combien chaque discipline est tributaire de toutes les autres plus forte raison avec le d veloppement des applications en expansion constante de l informatique L id e ma tresse de Perec reste celle du transfert Il parvient transf rer sans cesse un domaine dans un autre de l entomologie aux statistiques des statistiques la neurophysiologie de la neurophysiologie l histoire la philologie l hagiographie etc La science devient une immense remise travers e par des courants des bifurcations des assimilations des fluctuations des turbulences qui utilisent les instruments du langage et transf rent continuellement le savoir vers la construction litt raire enregistrant les sommes consid rables de connaissances accumul es et h t rog nes Ainsi que l affirme Michel Pierssens La litt rature est entre mille autres fonctions un op rateur de transferts constants entre les savoirs et l imaginaire dans les 7 Laurence Dahan Gaida Du Savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature loc cit p 486 o os oofl rte as nn 89 deux sens la pts Le manteau de la science voile le monde car nous sommes scientifiques par manque de subtilit Emprunter ce manteau pour le lever revient d voiler le
420. r plus d un titre Ces sciences Georges Perec Entretien Georges Perec Eva Pawlikowska Litt ratures Toulouse Service des publications de l Universit de Toulouse Le Mirail Printemps 1983 n 7 p 74 Georges Perec Entretien Perec Jean Marie Le Sidaner in L Arc n 76 Aix en Provence 1979 p 4 411 permettent en effet de captiver l int r t du lecteur pour le monde des savants et de leurs recherches La vie des savants pr sent e sous l angle parodique voire satirique polarise g n ralement les aspects les plus d concertants de la fiction Que ce soient les aventures de l anthropologue Appenzzell des savants atomistes comme le docteur Kolliker ou des historiens la recherche du nom v ritable du continent am ricain nous sommes confront s un potentiel d rudition consid rable qui est ainsi mis en oeuvre Il est n cessaire de remarquer que cependant cette rudition m me si elle a les couleurs de l authenticit est bien souvent le fruit des chafaudages de l imagination de Perec Ainsi il est possible de v rifier que ses connaissances imitent en le d tournant le savoir institutionnel Perec utilise en effet la science positiviste pour cr er son univers fictionnel et lui donner l aspect trompeur de l authenticit et de la v racit Mais Perec dans cette vaste parodie imitative du savoir scientifique ne s arr te pas l Car en second lieu non content de cr er de
421. r cit premier Tout se passe donc comme si le personnage narrateur R mi Rorschash avait soit rencontr le trap ziste de Kafka soit lu son histoire et d cid de l int grer sa biographie Le narrateur anonyme de La Vie mode d emploi voque la vie de R mi Rorschash au chapitre XIII de l ouvrage avec pour intitul Rorschash I Mais nous apprenons que la vie mouvement e du personnage a t racont e par un crivain professionnel sp cialis en biographies La vie de R mi Rorschash telle qu il l a racont e dans un volume de souvenirs complaisamment r dig par un crivain sp cialis pr sente un douloureux m lange d audace et de m prises Cette relation constitue un expos remarquable de la tripartition du narrateur le narrateur anonyme de La Vie mode d emploi nous apprend que la vie de Rorschash a t relat e par un autre crivain que lui un autre narrateur qui est au service du personnage qui lui aussi lui a rapport ses aventures Nous avons donc trois plans narratifs Un narrateur extradi g tique le narrateur de V M E i Thid p 68 7 Voir ibid p 68 TT Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 69 Ce O obe Aoma i M E gege 247 Un narrateur intradi g tique l crivain sp cialis biographe de Rorschach Un narrateur m tadi g tique le personnage de Rorschash lui m me Ceci revient l embo tement suivant le narrateur nous dit que l criv
422. r e n 265 p 70 s Voir ibid entr es n 255 et n 276 p 68 et 73 7 Voir ce sujet Andr e Chauvin Jeu de m moire et histoires de mots dans Je me souviens de Georges Perec Les Cahiers du CRELEF op cit p 60 327 souviens de Th o Sarapos 8 Le personnage mentionn nous renvoie dith Piaf dont il fut le dernier mari et qui selon les habitudes bien connues de la chanteuse fut mis en selle par sa protectrice l instar de bien d autres ce que Perec rappelle Je me souviens que c est gr ce dith Piaf que les Compagnons de la chanson Eddie Constantine et Yves Montand d but rent Dernier exemple de ces jeux de la m moire celui de la m moire exhib e ainsi propos du musicien de jazz Art Tatum avons nous ce souvenir Je me souviens ou Art Tatum appela un morceau Sweet Lorraine parce qu il avait t en Lorraine pendant la guerre 14 18 Jeux de miroirs que cette m moire exhib e Perec se souvient d Art Tatum qui se souvient de la Lorraine Comme nous le voyons ces concentrations m morielles fonctionnent surtout propos du nom C est effectivement cette importance des noms que signale Anne Roche cette banalisation celle des souvenirs s oppose un trait propre Perec et qu aucune collection de Je me souviens faite par n importe qui d autre ne pourrait pr senter ce degr noms propres de personnes noms et surnoms de lieux etc processus de nominatio
423. r f rences de l emploi donnent des explications les colonnes S et Z indiquent tous les mots transform s Ainsi Balsac Balzac Maiss Maizs e e Maiss est le nom d un personnage et Maizs terme que d abord je ne comprends pas est videmment pourquoi l avais je oubli le nom d un village polonais Il y en a des pages et des pages Chaque terme ou couple plut t est tellement vident que l on se demande comment il se fait que personne n y a pens plus t t que l on s tonne qu il ait fallu attendre Roland Barthes pour s en apercevoir En feuilletant le livre l envers Z me montre une s rie d pigraphes en rouge au d but d un chapitre La premi re dit quelque chose du genre de Perec se prive de ses lettres c est extrait d un article Georges Perec La Boutique obscure 124 r ves Paris Deno l 1973 16 Thid r ve n 21 387 sur la Disparition mais je ne trouve ni le nom de l auteur ni le nom du journal j en suis tr s satisfait comme si cette citation tait un signe de reconnaissance de prise au s rieux L auteur du livre est une femme et je me souviens que j ai lu un de ses romans Nous assistons dans cette relation de r ve une stratification des donn es le titre S Z qui renvoie au S Z de Roland Barthes le compagnon de promenade un certain Z fort myst rieux la r currence de S Z chez Balzac Balsac les variation
424. r me raffinement Perec peut en effet conduire une double analyse homophonique dans le cas du titre et aussi textuelle dans le cas du contenu de l oeuvre elle m me Examinons un dernier exemple de ces pratiques ludiques d velopp es par Perec Celui ci nous est propos sous le titre suivant qui est d j longuement vocateur dans son impr cision m me Fait divers 23 Dan Loch re jeune espoir de l Athletic Club de Saint Mouezy s est donn la mort hier apr s midi en se jetant du haut du pont du chemin de fer au moment du passage du rapide de Paris Dans une note laiss e sur la table de la cuisine c t de son bol de caf au lait le jeune gar on explique qu il a perdu le go t de vivre depuis que son idole Michel Jazy a abandonn la comp tition On se souvient tout d abord que Perec gardait un excellent souvenir de nombre d athl tes qui ont d fray la chronique en leur temps Ce fut le cas de Jazy dont il nous dit ceci Je me souviens de plusieurs athl tes Houvion Thiam Papa Gallo Sainte Rose Jazy Piquemal Pujazon et aussi de Valeri Brummel qui eut un terrible accident de A Ibid p 179 7 Raymond Queneau Les Enfants du limon Paris Gallimard 1938 73 Georges Perec Voeux op cit p 168 mge WR ebe eme 172 moto et de Ter Ovanessian Coureur de fond Jazy a t champion du monde aux 800 m tres et au 1500 m tres On comprend l admiration que lui v
425. r unir dans un livre qui devient un instrument d affranchissement Car la loi du refoulement freudien ne s applique plus alors au sexuel qui comme le montre Roger Bastide au lieu d aller contre l ordre social lui est maintenant int gr mais contre un autre danger qu il nous est bien difficile de d finir puisque parce que danger il est refoul et qu il devient par cons quent de l inconscient d chiffrer qui n cessiterait pour que nous trouvions la loi de son d codage une nouvelle psychanalyse qui serait une psychanalyse de l action politique On peut donc s affranchir de la convention gr ce la lettre ou bien la r int grer dans un processus identitaire comme ce fut le cas des millions d immigrants qui transit rent par Ellis Island Les R cits d Ellis Island peuvent constituer cette psychanalyse politique des corps dont parle Roger Bastide et que Perec tenta dans sa recherche identitaire On peut rattacher l ouvrage que Georges Perec et Robert Bober ont crit comme pendant leur film une posture antique et biblique C est la position du Qoh leth le convocateur l eccl siaste celui qui assemble le peuple pour lui annoncer les v rit s proph tiques qui lui permettront d assumer sa destin e de peuple lu Propos de Quoh leth fils de David roi dans J rusalem Vanit des vanit s dit Qoh leth Vanit Voir l ouvrage d Andr Neher Notes sur Qo
426. r Zaccaria La di g se int gre toute la critique de la m thode historique Apr s avoir jou de la critique externe int grit du document authenticit et anciennet on passe alors la critique interne savoir son interpr tation le d chiffrage et la lecture autoris e Il s agit en effet de reconstituer dor navant le texte Les lettres r interpr t es par Zaccaria sont fautives Si l on ne veut pas affronter l nigme d un alphabet ind chiffrable ou encore un palimpseste obscur il faut retrouver les lettres effac es du vieux planisph re victime de l injure du temps L Occident est fid le sa coutume qui consiste attribuer la d couverte le nom de son d couvreur Les lettres manquantes interpr t es par Zaccaria ne s assemblent pas pour former Columbia mais plut t Consobrinia selon les nouvelles d couvertes du conservateur du mus e de Dieppe Beau joueur et de surcro t honn te le savant espagnol s incline et d cide de reprendre ses recherches Ainsi l antiplanisph re datant de 1503 tendait d montrer que le continent aujourd hui connu sous le nom d Am rique tait appel le Cousine P Ultime int gration de ce mat riel historique la di g se le rachat du planisph re par James Sherwood et qui passera ensuite aux mains de Bartlebooth La controverse historique permet donc le libre jeu de l histoire envisag e comme m thodologie scientifique de la preuve Les di
427. ranchir la Porte d Or comme autrefois on entrait J rusalem la Cit Sainte par la Porte des Poissons la Porte des Moutons ou la Porte des Eaux C est symboliquement ce qu exprime Perec en crivant que pour l immigrant Ellis Island c tait la Golden Door la Porte d Or En franchissant cette porte les voyageurs harass s entraient dans la premi re salle du Temple un temple positiviste et pragmatiste une usine comme dit Perec transformer des migrants en immigrants l exemple des Sum riens de l Antiquit pour ces immigrants et ceux qui les examinent officiers d immigration La Bible traduction de J rusalem op it p 848 Eccl siaste 1 1 3 7 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Island op cit p 42 re Thid p 36 5 Ibid p 1l 391 m decins contr leurs policiers etc le monde est manich en Il y a ceux qui appartiennent la Cit ou qui peuvent lui appartenir et ceux qui viennent du pays incivilis correspondant au d sert peupl par les gazelles les onagres et les scorpions pays de l horreur et de l effroi celui des famines des guerres des pid mies des pogroms etc Le comble de l horreur doit se rassembler l ext rieur C est ce qu implicitement ressentent les officiers de l immigration et ceux qui l ont v cu dans leur chair dans leur corps savoir tous les immigrants Mais puisque ceux qui venaient du pays de l horr
428. rant appel Le Lamartine tait c l bre pour ses chateaubriands Le d calage provincial est transf r Paris et l opposition joue au niveau des deux auteurs dont l un est breton et Voir Patrick Imbert Construction et discours Montr al Ciadest 1991 p 29 et p 45 Georges Perec W ou le souvenir d enfance op cit p 118 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 69 p 28 Voir Andr e Chauvin Jeu de m moire et histoire de mots dans Je me souviens de Georges Perec in Les Cahiers du CRELEF n 33 Besan on 1991 1992 p 59 302 l autre bourguignon et dont les noms sont donn s un restaurant pour le premier et une pi ce de viande pour le second Le r seau se constitue d une part au niveau autobiographique et d autre part au niveau des assimilations litt raires et para litt raires qui sont ainsi d montr es Cette premi re configuration externe des discontinuit s rend compte des potentialit s du r seau Elles se d velopperont encore entre Esp ces d espaces Je me souviens et les Exercices de style de Raymond Queneau propos de l autobus de la ligne S7 Avant c tait des lettres l S cher Queneau est devenu le 84 Je me souviens que les autobus taient d sign s par des lettres et pas par des chiffres d o le c l bre S des Exercices de Style devenu 84 Contrairement aux m canismes r p titifs des p dagogies rituelles de certaine
429. re sur l atomisation des centres d int r t Maffesoli rappelle aussi toute l intensit que l insignifiant peut concentrer en lui m me C est aussi une des le ons que nous pourrions tirer des pratiques que Perec fera de cette cat gorie savoir faire le plus avec le moins ou bien encore tenter de dire le tout sur une multitude de petits riens De la m me fa on que des sociologues de la connaissance ont abouti une hi rarchisation des savoirs humains Perec tentera une organisation des faits insignifiants La question demeure pos e sur un savoir du quotidien Peut on parvenir une microsociologie du quotidien en ne se fondant que sur une moisson de faits h t roclites pour ne pas dire divers Peut on encore tabler sur les m canismes associatifs d une culture donn e pour concr tiser un tel examen Doit on encore s en remettre l arbitraire des circonstances pour permettre voire pour faciliter l analyse de faits contradictoires Pour prendre l exemple de la tentative faite par Perec Place Saint Sulpice peut on accepter comme donn n cessaire l ensemble des contraintes socio conomiques qui Ibid p 93 ee RO 101 r gissent le quartier Les horaires des institutions mairies banques commissariat de police des commerces librairies des manufactures commandent ou annulent la circulation des chalands Le lever et le coucher du soleil organisent les activit s diurnes et nocturnes des animaux
430. re L 30 195 206 Th orie de la litt rature 271 273 337 351 Th ories du symbole 158 159 160 161 354 Time 98 Tragiques Les 69 Trattato di semiotica generale 94 351 Tr sor de Rackam le Rouge Le 191 Univers de la science fiction L 35 Univers du roman L 66 Vie et mort de l image Une histoire du regard en Occident 323 Vie mode d emploi La 5 6 7 8 9 12 13 16 17 23 24 28 29 30 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 85 87 92 138 139 196 197 203 204 214 215 217 468 225 226 239 242 244 245 246 247 248 249 250 251 252 253 254 255 257 258 259 267 269 270 272 274 275 276 277 306 350 366 369 370 372 374 375 376 411 414 416 420 Vingt Mille Lieues sous les mers 192 Voeux 19 30 163 164 165 167 168 169 171 172 173 174 175 177 180 207 415 Voir 360 Voleurs de mots 238 Voyages et aventures du capitaine Hatteras 190 W ou le souvenir d enfance 25 28 42 172 194 275 278 299 300 301 303 346 348 349 350 351 352 353 355 356 361 362 365 366 370 371 372 378 400 401 406 418 Zazie dans le m tro 172 173 177
431. rec et la judeit in Cahiers Georges Perec n 1 Colloque de Cerisy juillet 1984 Paris P O L diteur 1985 p 15 29 Georges Perec Autoportrait Cause commune n 1 mai 1972 Le titre complet du texte de Perec est Les gnocchis de l automne ou r ponse quelques questions me concernant in Je suis n Paris Seuil 1990 p 67 74 342 l criture Il passe du champ philosophique au champ pratique la mani re de Pierre Holm s la voix de la R sistance qui depuis Londres au cours de la seconde guerre mondiale r citait sur les ondes le po me de Paul Verlaine Chanson d Automne Les sanglots longs Des violons De l automne Blessent mon c ur D une langueur Monotone Ce dernier passait du champ po tique au champ pratique en utilisant la langue po tique pour produire un acte illocutoire puisqu il s agissait d informer des groupes de r sistants qu il tait temps de saboter certains ouvrages strat giques la veille du d barquement de Normandie Le po me devenait un message secret Premier indice remarquable de la pens e de Perec nul ne peut concevoir et analyser la vie sans la lier son d roulement spatio temporel C est ce qu exprime encore mais sous une autre forme Philippe Lejeune qui voit dans l criture de Perec la coexistence la constante association de deux axes l un existentiel l autre formel Il y a plus encore ici et ce serait d abord l approche du sign
432. recourir des moyens de subsistance voir anormaux ind licats Des vieillards peuvent se retrouver dans les m mes circonstances Cinqui me va de pair avec Paris Le cinqui me est un arrondissement Paris Yonne va de pair avec France L Yonne est un d partement fran ais N gresco va de pair avec Ursula Andress Ursula Andress est une actrice c l bre qui peut souvent se retrouver dans des grands H tels tels que le lt N gresco Issoudun va de pair avec Zanzibar Ces deux mots sont respectivement des noms de villes Qu bec va de pair avec Xanadu Xanadu est une place mystique d une ville ou village d une beaut id ale comparable au Qu bec sans oublier que Xanadu Canada R f rence possible Citizen Kane ou la r sidence de Kubilai Kan Cer exercice de recoupement t moigne de la potentialit organisatrice de l utopie Le classement fonctionne sur les bases multiples de la m tonymie et de la m taphore Ainsi avons nous comme proc d m tonymique les synecdoques suivantes Orient Jonque Am rique Wigwam Paris cinqui me France Yonne Quant au syst me m taphorique il produit une assimilation des images selon ce mod le 186 Lune toile objets astronomiques Monast re Hameau isolement Donjon Tour ch teau fort m me si la tour peut d signer celles des grands ensembles modernes Grand Nord Ksar forteresses mat rielle et climatique R cif sous marin ext rieur int ri
433. remarquable Inscrite la fin de son ouvrage histoire de la femme qui fit appara tre quatre vingt trois fois le diable pas une de plus pas une de moins est celle d une certaine Ingeborg Skrifter fille d un pasteur danois migr aux tats Unis Avec son compagnon Blunt Stanley elle r alise une s rie de num ros de music hall o appara t Swedenborg Du fondateur de la Nouvelle glise que l on S Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 216 Ibid p 384 et 692 54 appelait grands renforts d artifices de toute nature au M phistoph l s le plus conventionnel il n y aura qu un pas Aussi sollicit s par un riche amateur de diableries Ingeborg Skrifter et Blunt Stanley attir s par l app t du gain vont ils accepter de faire appara tre le redoutable personnage C tait un M phisto plut t traditionnel presque conventionnel m me Il n avait ni cornes ni longue queue fourchue ni pieds de bouc mais un visage verd tre des yeux sombres tr s enfonc s dans leurs orbites des sourcils pais et tr s noir des moustaches effil es une barbichette la Napol on IIS Cette r ussite malheureusement ne profitera gu re leurs auteurs Victimes d un ma tre chanteur ils durent s astreindre faire r guli rement appara tre le ma tre des enfers des fins financi res En un peu plus de deux ans Ingelborg fit appara tre 82 fois le Diable pour des prix qui finirent par
434. res textes afin de transformer sans cesse la lecture par des va et vient constants au sein de la fiction Cette multiplication des pratiques lectorales se manifestera encore plus pr cis ment d s lors que p n trant dans le recueil des Je me souviens nous venons en analyser les confrontations internes Ainsi que nous l annoncions nous revenons sur les souvenirs scolaires pour en analyser le traitement Ces souvenirs scolaires constituent le premier agencement de ce Georges Perec 53 jours op cit p 35 Georges Perec Je me souviens op it et Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 Magazine litt raire Paris n 141 octobre 1978 307 que nous pouvons d signer comme syst me unitaire ou encore monovalent Nous savons que l histoire avalanche telle qu elle est enseign e dans les lyc es fran ais a retenu l attention de Perec voire suscit sa critique f roce Il a fallu que je cherche et retrouve presque par hasard quelques uns de ces anciens livres de classe pour qu en les feuilletant aussit t resurgissent travers ces mises en page labor es o alin as caract res gras et italiques esquissent le cadre immuable d une p dagogie s re de ses principes quelques si cles de notre histoire telle que l ont rab ch e des g n rations de lyc ens Cette histoire scolaire confine aux d terminismes des apprentissages Dans Je me souviens Perec met en avant la fixit
435. rgantua L inventaire constitue pour Perec un authentique moyen d exhiber l insignifiant C est particuli rement ce qu il fera dans La Vie mode d emploi Ces inventaires sont 1 Ibid p 106 7 Voir Roland Barthes roland Barthes par roland barthes Paris Seuil 1975 Fran ais par les fruits p 100 Voir Moli re L Avare Paris Gallimard 1993 acte II sc ne I pp 97 99 Voir Jacques Pr vert Paroles Paris Gallimard 1972 Inventaire p 130 Voir Fran ois Rabelais Oeuvres compl tes Paris Gallimard La Pl iade 1994 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit cures 139 aussi largement concurrenc s voire supplant s par une multitude d autres figures de la concentration des objets et des tres qui signalent au lecteur la marque ind l bile de l insignifiant Sans aller jusqu analyser chacune de ces pi ces conviction nous voudrions signaler quelques unes d entre elles qui ont frapp notre attention les recettes de cuisines et autres menus nous l avons d j mentionn les r pertoires d quation les figures du puzzle les titres en calligraphie gothique les bibliographies et les articles bibliographiques les tiquettes et les panneaux annonceurs les catalogues comme celui de Mme Moreau les arbres g n alogiques les mots crois s les avis de d c s les pamphlets publicitaires les luxueux d pliants en quadrichromies et aussi les plaques maill es
436. rience de savoirs disparates et inorganis s Perec volue vers la dissolution de lunivers cognitif Il faut donc rechercher dans son oeuvre Jacques Roubaud Notes sur la po tique des listes de Georges Perec in Penser Classer op cit p 201 208 5 Georges Perec V Les joies ineffables de l num ration in Penser Classer op cit p 167 32 un champ de savoir o il a pu organis une multitude de connaissances h t rog nes autrement que selon les ordres arbitraires des listes Il s av re que ce domaine correspond sa propre recherche de lui m me c est dire que l exploration de son identit lui a permis d appr hender un champ du savoir bien structur celui de la connaissance de soi Le savoir sur soi revient donc une synth se des connaissances De cette ultime m tamorphose chez Perec provient l id e de notre recherche Savoir et connaissances dans l oeuvre de Georges Perec Notre but consiste donc d une part valuer les connaissances de l auteur et d autre part consid rer comment il les organise pour comprendre finalement quoi il aboutit dans cette exploration du savoir On peut penser que sa qu te se termine par la ma trise d une connaissance unique celle de soi PREMI RE PARTIE LA CONNAISSANCE DU MONDE CHAPITRE I LES SAVOIRS SCIENTIFIQUES J mets fermement que les gens de ce texte et les r els ne pr sentent de ressemblence Perec Georg
437. rition ou Les Revenentes comme l observe Warren F Motte propos de La Disparition Cette avalanche de d finitions chez Barthes rend bien compte du jeu qui se d veloppe chez Perec c est celui dans ce r ve de la r tention du sens travers le glissement du signe Du signe saussurien et jakobsonien au signe derridien le signe se donne voir plus qu il ne se donne signifier Aussi dans un autre ouvrage Barthes nous livre les caract ristiques de son oeuvre des caract ristiques qui pourraient tr s bien s appliquer celle de Perec dans sa qu te du savoir Cette oeuvre dans sa continuit proc de par la voie de deux mouvements la ligne droite et le zigzag le contre pied la contremarche la contrari t l nergie r active la d n gation le retour d un aller le mouvement du Z la lettre de la d viance Le Z comme lettre de la d viance c est donc la d viation du signe qui conduit au savoir quant la barre c est aussi la r flexion la r fraction le refl chissement de la lettre qui permet d identifier d autres personnages La lettre corps de Sarrasine la lettre corps de Zambinella la lettre corps de La Disparition et la lettre corps de l auteur peuvent se 66 Tbid p 113 77 Warren F Motte The Poetics of Experiment a study of the work of Georges Perec op ci 1 Roland Barthes roland Barthes par roland barthes op cit p 94 eege nes aee a P wn mp an 389
438. rivants et tra aient la craie sur les paules de ceux qu ils estimaient suspects une lettre qui d signait la maladie ou l infirmit qu ils pensaient avoir d cel e C la tuberculose E les yeux F le visage H le coeur K la hernie L la claudication SC le cuir chevelu TC le trachome X la d bilit mentale L immigrant est un objet avant d tre un homme Il est un signe qui demande une interpr tation l attire l inspection et par l m me la qualification Objet reconnaissable au premier coup d oeil non seulement par son apparence physique mais surtout de par sa situation g ographique et historique il est emprisonn Ellis Island son appartenance il faut l immigrant une surd termination iconique pour l interpr ter correctement d o la lettre Cette lettre ainsi que nous l avons pr c demment remarqu joue un r le comparable l toile jaune que les juifs durent porter sous la f rule nazie Voici un Juif Ecce homo Voici un immigrant Tels taient les messages que transmettaient les lettres ic nes fix es sur l homme objet du nazisme du processus victimaire ou du processus d immigration Certes on ne peut assimiler une exp rience rs Ibid p 35 393 unique comme celle de la Shoah aux nombreuses autres exp riences de marquage dont l histoire de l homme est marqu e Mais on comprend l attrait qu a pu exercer sur Perec le lent cheminement de l assimiliation p
439. rnard Magn lance l hypoth se suivante propos de La Vie mode d emploi Pour moi La Vie mode d emploi est un n otexte qui probl matise sa narration exhibe sa scription et textualise au moins partiellement son inscription Pour d montrer cette hypoth se Bernard Magn labore entre autres une nouvelle th orie celle de l impli citation complexe Le texte de Kafka repris par Perec est class par Bernard Magn dans la cat gorie des impli Bernard Magn P li 1981 1988 op cit p 62 Jean Ricardou Aspects du texte moderne pratique th orie p dagogie dactylogramme in dit pr sentation d une th se d tat sur travaux soutenus l Universit de Toulouse Le Mirail mai 1982 cit par Bernard Magn Perecollages 1981 1988 op cit p 63 Ibid pp 12 14 Jean Ricardou Aspect du texte moderne pratique th orie p dagogie op cit pp 12 14 Bernard Magn Perecollages 1981 1988 op it p 64 Ibid pp 73 75 245 citations simples o il y a suppression pure et simple des marques du changement d nonciation Selon ce dernier comment pourrait se jouer l int gration de l emprunt Kafka Il explique que lt l nonciateur r el savoir l auteur cit est occult par le narrateur Tout se passe comme si le narrateur de la Vie mode d emploi incorporait dans l un de ses r cits une histoire produite par quelqu un d autre comme ces mythomanes q
440. ro op cit Georges Perec Voeux op cit Jazy Dan l aimait trop p 180 178 3 3 L DES ASPIRA D NFRONT ES A L UTOPIE Les deux textes tir s de ces deux ouvrages qui nous int ressent ici ont t produits la m me ann e c est dire en 1981 une ann e peine avant la disparition de Perec en mars 1982 C est dire l importance que rev t l un de ces deux textes puisqu il s intitule justement Quelques unes des choses qu il faudrait tout de m me que je fasse avant de mourir Ce texte est republi dans Je suis n paru en 1990 Nous pourrons comparer ce premier texte avec un autre qui constitue avec lui un tonnant parall le Il s agit de De la difficult qu il y a imaginer une Cit id ale Voir David Bellos Georges Perec Une vie dans les mots op cit p 725 Quelques unes des choses qu il faudrait tout de m me que je fasse avant de mourir 1981 est la version crite d une participation la s rie radiophonique de Jacques Bens Les Cinquante Choses que je voudrais faire avant de mourir pour l mission Mi mi raisin de Bertrand J r me France Culture novembre 1981 Dactylographie originale conserv e au Fonds Georges Perec Un tat sensiblement diff rent tabli d apr s enregistrement en avait t publi dans T l rama n 2070 13 septembre 1989 p 15 R f rence donn e in Georges Perec Je suis n op it p 113 Georges Per
441. rois s op cit p 37 Ps 226 un appartement id al la lumi re pour reprendre la m taphore des glissements isotopiques que lui permet l extr me libert du roman Ceci conduit in luctablement la valorisation unique du regard humain lt Regarde de tous tes yeux regarde comme surdimension de l tre dira plus tard Perec en citant le roman de Jules Verne Michel Strogoffs Georges Perec s amuse d lib r ment dans ce premier chapitre transgresser l ensemble des conventions romanesques tablies En apparence le narrateur est une cam ra qui sur son chariot suit le cours du destin de l appartement C est un huissier ou un commissaire priseur qui accompagne le propri taire des biens et en dresse une liste compl te en vue d inventaire Telles sont les ressorts du narrateur h t rodi g tique Sous ce masque de narrateur Dieu Le P re il provoque la mar e montante des choses qui par le processus de la g n ration oblig e viennent s engendrer les uns les autres garni de trois tag res qui supporteraient des bibelots des agates et des oeufs de pierre des bo tes priser des bonbonni res des cendriers de jade une coquille de nacre une montre de gousset en argent un verre taill une pyramide de cristal une miniature dans un cadre ovale La multiplication des choses provoque leur symbiose polyphonique Plus loin encore nous lisons Une ath nienne supporterait un t l phone
442. roles d introduction de Maurice Olender directeur de la collection Textes du XX si cle chez Hachettte p 7 NT Georges Perec Je suis n op it p 109 10 Georges Perec Penser Classer op cit p 129 131 180 s aper oit de ce que 37 est un nombre premier et chiffre impair tandis que 26 est un nombre pair et multiple de 13 Pourquoi notamment le chiffre 37 Il faut se rappeler que 37 est un des chiffres personnels dont Perec s entiche Un autre exemple imm diat est videmment les 37 titres des oeuvres de Queneau qui sont homophoniquement transform s dans le recueil de Voeux Toute cette num rologie perecquienne est significative du choix d un destin reposant sur l improbable de la vie Le texte de la Cit id ale est fond sur des constructions temporelles command par le d sir de vivre Mais la formule type qu il emploie est g n ralement J aimerais bien vivre formule laquelle s oppose Je n aimerais pas vivre Nous avons par exemple J aimerais vivre vieux Je n aimerais pas vivre en Am rique ce texte vient s opposer par son titre le premier Choses que je fasse avant de mourir Les deux textes se superposent donc dans leur ambivalence Ils se signalent par l opposition duelle vie mort Il s agit d une dialectique de la vie et de la mort que projette Perec la fin de son existence Il lui faut donc apprendre classer un savoir li
443. rsonnellement soit pour les avoir vus par exemple au cin ma d o cette gamme de noms propres qui viennent cautionner l insignifiant en s excluant du genre TT Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit p 25 o Tbid p 50 Hi Ibid p 50 7 Ibid p 31 25 33 et 53 127 Jean Paul Aron Peter Sellers sosie Jean Duvignaud Paul Virilio s Michel Mohrt sosie 7 Genevi ve Serreau Michel Martens Michel Lonsdale sosie Cette liste de personnalit s du monde des lettres des arts ou du spectacle contrarie l insignifiant Elle ne rel ve pas du type de notation recherch e mais au contraire elle vient ici ruiner l investigation en niant l alibi de la recherche l observateur Elle constitue pourtant le faire valoir potentiel de l insignifiant en inversant les r les de la recherche C est le filtre de la subjectivit qui v rifie les clauses du contrat que Perec s est fix Une derni re influence de la subjectivit se manifeste lorsque Perec joue sur la confusion des acteurs observ s ainsi les foules humaines se confondent aux foules voituri res les gens qui se prot gent de la pluie sont m tamorphos s en parapluies et le camion du livreur des beurres oeufs fromages B O F devient les oeufs extra frais NB 13 Thid pp 29 et 33 s bid p 27 5 bid p 41 D Ibid p 45 a Ibid pp 43 et 51 S bid pp 24 et 54 119 bid
444. rt s engage entre deux personnages qui se ressemblent comme des fr res rivalit des doubles Match pas banal Andras MacAdam campagnard pas bavard bravant Max Van Zapatta malabar pas marrant Ce combat hom rique croule sous l avalanche des exclamations reprises des bandes dessin es qui fournissent au combat son caract re fantasmatique Ah la la Splatch Paf Scratch Bang Crac La lutte s ach ve par la mort de Max Van Zapatta la capture la condamnation et l emprisonnement d Andras MacAdam comme il se doit Alcatraz et la promotion d un troisi me personnage inattendu Armand d Artagnan qui v ritable ange exterminateur d truit tout sur son passage Ce lipogramme en a se termine sur ces mots sibyllins propos du gladiateur universel et mousquetaire Armand d Artagnan lan ant at last glas fatal TT Georges Perec What a man in Oulipo Atlas de litt rature potentielle Paris Gallimard 1981 p 215 2 Voir ibid p 214 7 Voir Ren Girard Des Choses cach es depuis la fondation du monde op cit Chapitre II Le d sir sans objet A Les doubles et l interdividualit p 422 7 Georges Perec Oulipo Atlas de litt rature potentielle op cit p 215 5 Ibid p 215 HS Ibid p 215 383 Abracadabra gt 7 Certes comme chacun le sait le lipogramme monovocalique en a est fond sur la r union du maximum de vocables en a Au
445. s Si nous entendons comme parole communicative le texte r cepteur ou texte cible il int gre la citation ou texte source qui est trait comme un objet d ench ssement Cette absorption est obtenue selon les diff rents modes d int gration gr ce aux connecteurs narratifs En cons quence le passage du texte source au texte cible peut rester flou voire ind cidable C est l analyse des lexies transformatives et responsables de l ench ssement qui sont seules identifiables comme connecteurs narratifs 7 Tbid p 175 Ibid pp 181 182 mn m fie piatun beem memes 219 Au niveau syntagmatique les connecteurs narratifs peuvent contribuer l entr e en fonction de nouveaux d veloppements actantiels Ils sont alors sp cifiques en ce qu ils r glent le d bit narratif la structure de la di g se et les relations entre les actants Dans tous les cas il y a apport de s m mes directifs par des proc d s de soudures de coupures ou de ruptures Ces connecteurs modifient le r cit en provoquant une transformation th matique ou en ouvrant la voie une volution di g tique Ces connecteurs intertextuels puisqu ils peuvent tablir une relation d vidente similitude entre un texte source et un texte cible sont tout aussi pertinents pour des textes engag s id ologiquement que pour des textes appartenance g n rique vidente Certains connecteurs peuvent se manifester comme des embrayeurs g n riques
446. s ditions Sociales 1973 DIRINGER David The Alphabet A Key to the History_of Mankind London Hutchinson s Scientific and Technical Publications 1948 and 1949 607 p DUMONT Fernand Les Id ologies Paris Presses Universitaires de France 1974 183 p DUPLESSIS Yvonne Le Surr alisme Paris Presses Universitaires de France 1971 128 p DURAND Gilbert Les Structures anthropologiques de l imaginaire Paris Bordas 1984 536 p DUVIGNAUD Jean Lieux et Non Lieux Paris ditions Galil e 1977 153 p DUVIGNAUD Jean La Sociologie guide alphab tique Paris 1972 330 p ECO Umberto L Oeuvre ouverte Paris Seuil 1965 315 p ECO Umberto Le Signe Histoire et analyse d un concept adapt de l italien par Jean Marie Klinkenberg Bruxelles ditions Labor 1988 283 p ECO Umberto La Structure absente Intr ion la recherche s miotique traduit de l Italien par Vocio Esposito Torrigiani Paris Mercure de France 1972 447 p ECO Umberto S miotique et Philosophie du langage Paris Presses Universitaires de France 1984 285 p ELIADE Mircea L preuve du Labyrinthe entretiens avec Claude Henri Rocquet Paris Pierre Belfond 1978 249 p 435 ELIADE Mircea Naissances mystiques essai sur quelques types d initiation Paris Gallimard 1959 275 p ELIADE Mircea Aspects du mythe Paris Gallimard 1963 247 p ELIADE Mircea Forgerons et alchimistes Paris Flammarion 1977 188
447. s coles primaires la nouvelle formulation produit un effet d enrichissement du tissu conjonctif du corpus du r seau qui associe la rigueur des processus de la m moire son authentification C est videmment au niveau des souvenirs scolaires que nous envisagerons ensuite sous l aspect didactique mais que nous identifions d abord comme souvenirs d coles que se trouvent rassembl es les plus nombreuses discontinuit s entre Je me souviens et le dernier roman inachev de Perec 53 jours Georges Perec Esp ces d espaces Paris Galil e 1974 Georges Perec Je me souviens op cit Raymond Queneau Exercices de style Paris Gallimard 1947 7 Georges Perec Esp ces d espaces op it p 72 7 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 468 p 114 7 Ibid Georges Perec 53 jours Paris Pol 1989 te 303 En effet ces souvenirs d cole selon l index de Je me souviens se rattachent trois domaines les rappels de l enseignement secondaire class s en cole ou internat le folklore enfantin et les souvenirs d internat Nous pla ons cette vocation d un r seau les fragiles intersections entre les textes sous la fonction des aveux m mes de Perec Pourtant mes souvenirs sont revenus en foule et de sa p tition de principe consign e la fin du recueil Ces je me souviens ne sont pas exactement des souvenirs et surtout pas des souvenirs personnels Nous
448. s Ainsi toutes ces manipulations et combinatoires r sultent de la grande f condit de l imaginaire perecquien D une part elles favorisent son expansion ind finie et d autre part elle ouvrent la porte la multitude des lectures possibles De plus on constate que Perec utilise des processus de lecture et de relecture pour construire ses oeuvres en r employant les textes de ses crivains favoris R gine Robin parle volontiers d une lt intertextualit g n ralis e d un univers de livres qui se r pondent qui se d calquent s empruntent et s empreintent ces citations r elles ou fictives ces pseudo emprunts ces allusions r miniscentes ces parodies et pastiches 6 En fait le probl me de l intertextualit perecquienne est une question centrale dans notre 4 Georges Perec Voeux Paris Seuil 1989 Georges Perec De la difficult qu il y a imaginer une Cit id ale in Penser Classer op cit p 129 Georges Perec Quelques unes des choses qu il faudrait tout de m me que je fasse avant de mourir in Je suis n Paris Seuil 1990 p 105 R gine Robin Le Deuil de l origine Une langue en trop la langue en moins Saint Denis Presses Universitaires de Vincennes 1993 p 183 eo a Ee en Seegen 416 examen m me si le concept est suffisamment flou pour autoriser n importe quelle d rive Cela revient chez Perec opposer le mod le de l intertextualit canonique c
449. s e de Dieppe un certain Florentin Gilet Burnachs qui apportera de nouvelles r v lations que le professeur Zaccaria acceptera avec honn tet m me si elle remettent en cause ses d couvertes Un dernier sp cialiste de l histoire retient notre attention savoir L on Marcia qui s imposera rapidement comme expert en art l chelle 2 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 263 266 3 Ibid p 374 voir Marcel B nabou Vraie et fausse rudition chez Perec in Parcours Perec op cit p 43 Georges Perec ibid p 473 474 3 Ibid p 475 M TT gl 44 internationale Nous revenons un peu plus loin sur ses exceptionnels talents puisqu il repr sente l rudition et le savoir encyclop dique Nous avons encore bien des rudits tel Cinoc vers en linguistique et encore un esprit universel Carel van Loorens dont l int r t pour les sciences n a d gal que sa perp tuelle disponibilit Tous ces savants sont des caricatures qui nous donnent une image ironique de l h g monie de la science et de la fascination qu elle exerce sur nos contemporains Les caricatures seraient peu de choses dans La Vie mode d emploi si le r le du savant n tait lev la hauteur d une institution On peut affirmer que nombreuses sont les histoires de savants qui composent la di g se ou qui se rattachent celles que les savants d terminent ou provoquent En utilisant l index on ne re
450. s op it p 12 Le titre la forme et dans une certaine mesure l esprit de ces textes s inspirent des I Remember de Joe Brainard 27 de d finir l interpr tation personnelle des v nements qu il a v cus et d autre part il essaie de retrouver des souvenirs qui objectivement ont t partag s par nombre d individus Il s agit d un savoir sp cifique qui constitue une culture commune Ainsi m me si ce recueil ne fait aucune place une vie int rieure bien d finie Perec reconna t ses propres souvenirs en les confrontant ceux des autres En faisant ainsi bouger les fronti res de l autobiographie Perec modifie notre conception de la connaissance de soi Perec renouvelle ainsi la conception de l autobiographie en rattachant ce genre des ouvrages peu conventionnels Il d place lui m me la probl matique autobiographique en transformant la devise socratique gnothi seauton en un calembour On le retrouve dans le titre d un article o il s interroge sur sa pratique de l criture sur ce qui fait de lui un crivain Mais l exploration progressive de son identit passe d abord par la prise de conscience de son propre corps telle que d crite dans Un Homme qui dort Dans ce r cit Perec utilise l intertextualit proustienne pour montrer comment la connaissance de soi volue entre les tats de veille et de sommeil Il rattache encore au genre autobiographique son recueil de r ves La Bo
451. s r seaux possibles de syst mes de signification qui se r fl chissent les uns les autres Comme nous le constatons Eco fait appel deux processus qui permettent la qualification du signe comme tel c est dire la possibilit de reconna tre l insignifiant D une part la signification comme processus r v le que le signe c est quelque chose qui est mis la place de quelque chose d autres Il faut encore que ce signe ne soit pas isol d o la n cessit du contexte Eco rappelle que le mot bifteck lanc au restaurant sous entend l ordre apportez moi un bifteck D autre part le signe s ins re dans un processus de communication Il est utilis pour transmettre des informations partir du moment o les deux processus de communication et de signification sont mis en oeuvre la r union des manifestations de l insignifiant va donc produire des assertions des interrogations des demandes qui vont constituer des textes c est dire des discours On va partir des universaux s mantiques pour aller vers l mergence de l insignifiant Une reconnaissance s effectuera qui organisera la classification et la hi rarchisation des manifestations de l insignifiant On pourra donc admettre que Umberto Eco Trattato di semiotica generale 1975 cit par Marc Angenot Glossaire pratique de la critique contemporaine Ville LaSalle ditions Hurtubise HMH Lt e 1979 p 181 Umberto Eco Le S
452. s activit s humaines morcel es et les num rations descriptives notamment par l usage de verbes d action appartenant tous au premier groupe Il se r v le une condensation des comportements publics de l tre humain en milieu urbanis Toutefois Perec ne poursuit pas son examen selon cette nouvelle m thode il retourne ce qu il pratiquait le jour pr c dent Il reprend la description de ce qu il avait appel Trajectoires tout en hybridant encore plus fortement le texte par des inclusions diverses recoupant soit des constats de l imm diatet 3 Voir ibid p 19 amp Jibid p 19 Voir Georges Perec Esp ces d espaces op it pp 49 51 Voir Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit pp 12 18 119 Accalmie Il n y a personne l arr t des autobus soit par des observations ponctuelles qui rompent avec le mouvement pour s ancrer sur le stable Juste en bordure du caf au pied de la vitrine et en trois emplacements diff rents un homme plut t jeune dessine la craie sur le trottoir une sorte de V l int rieur duquel s bauche une mani re de point d interrogation land art La d monstration de l heuristique n est plus faire Perec passe sans cesse d un type d observation un autre et partout il cherche de nouvelles fa ons de consigner l insignifiant C est en effet ce que r v le un examen diachronique de sa m thod
453. s deux graphies comp titives Temurah Temuna voir Georges Perec Histoire du lipogramme in collectif Oulipo La litt rature potentielle op ct p 74 et Gershom G Scholem La Kabbale et sa symbolique op cit p 89 Georges Perec Oulipo La litt rature potentielle op cit p 73 15 Ibid p 74 Voir Benjamin Lee Whorf Linguistique et Anthropologie Paris Deno l Gonthier 1969 chapitre II Consid rations linguistiques sur le mode de pens e dans les communaut s primitives t3 Voir Claude Levi Strauss Anthropologie Structurale Paris Plon 1958 et 1974 notamment Langage et soci t p 70 82 et Edgar Morin Le Paradigme perdu la nature humaine Paris Seuil 1973 notamment La culture p 180 188 378 Sans vouloir d montrer la coh rence d un processus de recherche et de composition Perec aime passer sans cesse de la lettre aux mots et des mots aux lettres c est ce qu il fait dans W La moindre d couverte dans le domaine des lettres constitue pour Perec un pr texte de nouveaux d veloppements possibles Cette proc dure n est pas innocente parce qu elle permet en premier de se tourner vers l criture comme mod le d incantation Cela pourrait tre une formule rituelle magique initiatique comme celle qui tait inscrite sur le frontispice du temple d Apollon Delphes le fameux lt gnothi seauton transform e en calembour par Perec et cit e dans notre introduction Nou
454. s du Sorbier 1980 an its mme CONCLUSION Tu as mat les pa ens fait p rir l impie effac leur nom pour toujours et jamais l ennemi est achev ruines sans fin tu as renvers des villes et leur souvenir a p ri Psaumes 9 6 David La Bible de J rusalem Paris ditions du Cerf 1961 p 660 Quant celui qui d truira ce Livre des Morts que son nom ne soit plus jusqu des temps ind finis Mal diction du grand pr tre d Aton Le Livre des Morts Schlummum gypte La nuit est indispensable l esprit de l homme comme son corps le sommeil Ernst J nger Approches drogues et ivresse Paris Gallimard 1974 p 413 Micma Goho Mad Ziz Conselha Zien Biah Os Londoh Norz Chis Othil Gigipah Vnd L Chis ta Pu Im Q Mosplieh Teloch Oui I N Toltorg Chis I Ghis Ge in Ozien Ds R Brgdo Od Torzul Vois dit ton Dieu je suis un Cercle et sur Ses Mains reposent douze Royaumes Six sont les Si ges du Souffle de Vie Les autres sont comme des Faucilles Aiguis es Ou les Cornes de la Mort L o sont les cr atures de la Terre et o elles ne sont pas Except Mes propres mains Qui dorment aussi Et s l veront Incantations Enochiennes Isra l Regardie Adeptus Minor The Golden Dawn Chicago 1940 rr Saar me LES l issue de ce parcours on est d sormais en droit de s interroger sur l importance des connaissances dans l oeuvre de Georges Perec sur le sens que prend le savoir au sein
455. s enseignant de l vangile le Rabbi par excellence d une part en s introduisant dans l univers pictural d un tableau Ren Gu non Symboles de la science sacr e op cit p 120 7 Ibid p 55 note n 1 7 Patrick Imbert Construction et discours Montr al Ciadest 1991 p 24 365 attribu Rembrandt J sus en face des Docteurs et d autre part une seconde fois par les m tamorphoses d une nigmatique lettre h bra que qui reconvoque la parabole du chameau et de l aiguille la confrontation des classes sociales face l univers religieux et la causalit g n rale du monde li e au Grand Architecte de l Univers Le processus identitaire d fini par Perec autour de la lettre passe donc par toutes sortes d chelons dans un constant mouvement de va et vient entre le monde individuel et la collectivit le microcosme et la macrocosme dirait Gu non c est dire cette ind finissable fronti re poreuse entre l int rieur et l ext rieur que recoupe la moindre activit ludique L amplification de la lettre s effectue par le rassemblement en mot les mots d terminent les mots les lettres une une se d tachent et viennent se fondre dans les mots jusqu ce que prenne la mayonnaise du texte is constatant l efficacit de l alphabet Perec nous livre cette confidence dans Un Homme qui dort Tu peux encore t tonner que la combinaison selon les r gles finalement tr
456. s litt ratures francophones 326 Fictions 2 208 Figaro litt raire Le 220 Figures III 46 247 249 Fleurs bleues Les 168 Force de l ge La 357 Formes traditionnelles et cycles cosmiques 394 Free Man The 53 Georges Perec 30 240 349 374 383 Georges Perc crire Transformer tudes litt raires 69 194 269 272 Georges Perec Une vie dans les mots 5 16 67 102 165 178 291 333 372 395 Georges Perec Traces of his passage 157 221 222 227 297 397 399 Glossaire pratique de la critique contemporaine 36 64 94 219 256 354 Golden Dawn The 409 Golem 395 Grammatologie De la 293 361 380 401 Grand code La Bible et la litt rature Le 363 Greek English Lexicon A 363 Histoire du cin ma 359 Hitler ma dit Confidences du F hrer sur son plan de conqu te du monde 358 Homme qui dort Un 13 14 27 42 96 140 141 206 262 326 346 365 Homme sans qualit s L 273 Indes la plan te Mars Des 158 464 Infra ordinaire L 16 17 92 99 102 103 104 105 108 135 137 139 199 323 324 353 Intelligence avant le langage L 295 Introduction la s miotique de C S Peirce 351 I remember 26 283 Je me souviens 24 26 85 115 166 172 174 198 260 266 267 269 280 281 283 286 288 289 290 291 292 293 297 298 299 301 302 303 304 305 306 307 308 309 310 311 312 313 315 316 317 318 319 320 321 322 323 324
457. s livres Comme les biblioth caires borg siens de Babel qui cherchent le livre qui leur donnera la cl de tous les autres nous oscillons entre l illusion de l achev et le vertige de l insaisissable Au nom de l achev nous voulons croire qu un ordre unique existe qui nous permettrait d acc der d embl e au savoir au nom de l insaisissable nous voulons penser que l ordre et le d sordre sont deux m mes mots d signant le hasard Nous retrouvons le m me conflit per u par Perec celui de la loi unique qui r gnerait sur le monde et constituerait le savoir de Roland Barthes roland Barthes par roland barthes op cit p 126 Voir Georges Perec Histoire du lipogramme gt in Collectif Oulipo La litt rature potentielle op cit p 75 Voir Georges Perec Voeux op it Cocktail Queneau 85 Voir Georges Perec Penser Classer op cit 81 fiches cuisine l usage des d butants p 89 108 7 Georges Perec Penser Classer op cit Notes br ves sur l art et la mani re de ranger ses livres p 42 eme S 208 l insaisissable de l inexprim de l indicible de l inconnaissable de tout ce qui ne peut tre rationalis et expliqu Cela est conforme la d finition que Borges donne de l homme il est un imparfait biblioth caire Borges d finit ainsi l origine de la Biblioth que oeuvre du hasard ou de dommages malveillants ou de l arbitraire
458. s m canismes oppositionnels qui mettent en comp tition abstrait et concret m talangage et langage objet th orie et pratique La narration perecquienne int gre la configuration du temps conforme celle du Qoh l t tout il y a un temps La seconde partie de la description du savant Cinoc est fond e sur un rythme quilibr du travail Apr s avoir d truit des milliers de concepts appartenant une grande vari t de champs s mantiques Cinoc consacre son temps au r tablissement de mots oubli s En r alit Cinoc se donne une nouvelle formation d s lors qu il entre dans sa p riode de retraite En bon savant il fr quente videmment les biblioth ques celle du XVII arrondissement de Paris o se trouve son domicile l immeuble de la rue Simon Crubellier puis ensuite la tr s rudite Biblioth que Sainte Genevi ve Ses m thodes d rudition sont particuli rement d concertantes Il se mit lire les auteurs Voir Andr Neher Notes sur Qoh l t L Eccl siaste Paris Les ditions de Minuit 1951 p 94 hd Aaa 51 dont en entrant il voyait les noms grav s sur la fa ade Perec nous donne ensuite la liste h t roclite des auteurs qui vont requ rir l attention de Cinoc Par certains c t s videmment sa m thode recoupe celle de l autodidacte de La Naus e qui parcourait tous les livres de la biblioth que publique de Bouville de A Z La m thode de Cinoc est plus m tic
459. s p lerins qui au Moyen ge se rendaient Saint Jacques de Compostelle en Espagne La haute montagne en question serait les Pyr n es mais que dire du reste du monde Perec tire une premi re conclusion l explication de Voltaire nous fait aujourd hui sourire Combien de p lerins combien de militaires combien de soudards combien de p lerinages auraient t n cessaires pour rassembler de si hautes montagnes Il revient alors une explication pour ainsi dire plus terre terre Rempla ant les mers anciennes par de modestes cours d eau le lit soulev de ces rivi res endormies a produit ces immenses massifs proposant aux g ologues des masses gigantesques de calcaires coralliens ou coquilliers Comme quoi petit cours d eau peut devenir grand et produire des tels amas de coquillages Mais quel est donc le titre de l oeuvre g ologique de Queneau ainsi voqu e Perec nous le livre sous l aspect d un second titre donn son expos scientifique Les ans font du lit Ibid p 156 171 mont savoir donc les ann es transforment le lit du fleuve en une montagne C Q F D Il s agit donc de la r interpr tation homophonique du titre de l ouvrage de Queneau Enfan limon Dans le cas de Queneau l volution du jeu de Perec s effectue en quatre tapes le titre des oeuvres un texte court et son titre et un nouveau titre r interpr tation du titre de l ouvrage de Queneau Il s agit d un sup
460. s personnes qu on accompagne de se raser les l vres avant le menton l habitude d acheter des souliers trop petits de ne jamais aller seul au spectacle de dormir sur le ventre de siffler en prenant son bain l utilisation constante dans les discours de la proposition n est ce pas les lapsus les actes manqu s le caf que l on prend sans sucre une certaine mani re de plier les billets de banque de s asseoir sur les bords des chaises ou de ne pas prendre les passages clout s sont des messages qui dans certains cas et selon certains tres peuvent tre charg s de sens Albert Camus Oeuvres compl tes d Albert Camus notice de Jean Grenier Paris ditions du Club de l Honn te Homme 1983 De l insignifiance Cahier des saisons 1959 vol 4 pp 447 450 17 Ibid p 447 18 Ibid p 447 96 Voici donc une longue liste que Perec malgr ses r ticences l gard de Camus n aurait certainement pas reni e Beaucoup de faits en v rit ont retenu aussi l int r t de Perec les lettres d imprimerie le papier lettres les habitudes de l crivain les chats dormir sur le ventre ou lire chez Perec le domaine psychanalytique avec les lapsus et les actes manqu s emprunter ou ne pas emprunter les passages clout s comme dans Un Homme qui dort etc Tous ces menus faits sont qualifi s de futiles par Camus il les appelle des oppositions instructives L insignifi
461. s pourrons consid rer certains lipogrammes comme assimilables des formules initiatiques Cette option n est que le fruit d un double recoupement tabli par Perec entre la lettre et le livre l alphabet et le chiffre Reprenant son compte Borges voici ce que Perec nous livre dans son histoire du lipogramme gt Dans son loge de la Cabbale Borges parle de cette id e prodigieuse d un livre imp n trable la contingence SU est vrai qu au commencement tait le Verbe et que l Oeuvre du Dieu s appelle l Ecriture chaque mot chaque lettre appartiennent la n cessit le Livre est un r seau infini tout instant parcouru par le Sens l Esprit se confond avec la Lettre le Secret le Savoir la Sagesse est une lettre cach e un mot tu le Livre est cryptogramme dont l Alphabet est le chiffre Ce court texte extr mement riche assemble dans sa puissance vocatoire les degr s progressifs de la complexification de l criture comme manifestation supr me de l tre 7 Lipogramme syst me qui privil gie ou supprime une certaine lettre du texte 7 Georges Perec Oulipo La litt rature potentielle op cit p 73 138 Ibid p 74 379 En outre il r v le aussi deux possibilit s de lecture selon la scolastique augustinienne du Moyen ge savoir une lecture selon la lettre et une autre selon l esprit Sans entrer dans l analyse philosophique plus pouss e que m riterait
462. s sur Maiss personnage et Maisz village polonais la mention explicite de Barthes comme initiateur et la propre autor f rence l auteur et l un des ses romans lipogrammatiques La Disparition avec la mention explicite Perec se prive de ses lettres Au centre de tout cela le jeu de miroirs comme le rel ve Barthes De plus S et Z sont dans un rapport d inversion graphique c est la m me lettre vue de l autre c t du miroir Sarrasine contemple en Zambinella sa propre castration S Nous assistons au d double ment d triplement du r veur P rec qui est confront au d doublement du Z et la romanci re critique de son roman La Disparition D o l importance de r flecteur que Barthes assigne la barre Aussi la barre qui oppose le S de SarraSine et le Z de Zambinella a t elle une fonction panique c est la barre de censure la surface sp culaire t Ibid r ve n 21 amp Roland Barthes S Z op cit 183 Georges Perec La Disparition op cit amp Georges Perec La Boutique obscure op cit r ve n 21 7 Roland Barthes S Z op cit p 113 pe 20 reg 388 le mur de l hallucination le tranchant de l antith se l abstraction de la limite l obliquit du signifiant l index du paradigme donc du sens Cette barre c est d abord la castration non seulement de Sarrasine et de Zambinella mais encore celle de l alphabet chez Perec dans Dispa
463. s un village de p cheurs leur existence serait facile et large comme leurs v tements de soie toute chaude et toil e comme les nuits douces qu ils contemplaient L existence des amants est polaris e s mantiquement autour de deux s ries adjectivales articul es sur des s mes comparatifs dont voici le tableau facile et large comme leurs v tements de soie existence chaude et toil e comme les nuits douces qu ils contempleraient Les caract ristiques d finies par la comparaison affirment la dissolution s mantique des lex mes Au niveau s miologique les significations sont organis es autour de class mes de la facilit du confort de l aisance et de la richesse conform ment au tableau suivant facilit aisance confort richesse la soie chaleur cl mence atmosph rique douceur la nuit et sa contemplation Au niveau s mantique les significations d finissent l aspect stable du bonheur de l existence gr ce la rh torique de la comparaison qui consolide les images 7 Gustave Flaubert Madame Bovary op it p 215 Ibid p 216 237 Chez Perec on remarque que l existence du couple est concentr e s mantiquement autour de la valeur esth tique Il se construit une rupture des s mes r unis autour des qualifications adjectivales suivant le tableau ci dessous gestes beaux Corps regards sereins coeurs transparents sourires limpides Perec donne l
464. sage publicitaire p 245 133 synth ses possibles Dans le texte cit les transformations des quatre exemples choisis peuvent produire l autotexte g n ratif suivant en transf rant les modulations des exigences Allez Saint Germain des Pr s Apportez de l eau la fontaine Faites poser les pigeons sur les vasques Inversement nous pouvons avoir plus aucun Roquefort Soci t n appara t Place Saint Sulpice ou encore sur le mode du constat interrogatif nous pourrions avoir Pourquoi aucun Roquefort Soci t n appara t il sur la Place Saint Sulpice Les m canismes de production appellent le transfert des signifi s du message publicitaire vers une recodification des signifiants Cela peut constituer une nouvelle vision fantasm e de la r alit qui pulv rise l insignifiant ce quoi se livre Perec par exemple en lan ant cette observation surprenante et improbable relev e dans son champ de vision Pr c d de 91 motards le mikado passe dans une rolls royce vert pomme Ainsi que le rappelle fort justement Catherine Kerbrat Orecchioni il est impossible d emp cher l irruption des fantasmes dans le champ perceptif Le cas exceptionnel de cette ultime observation vient paradoxalement conforter la conceptualisation de l insignifiant par un effet de superposition antith tique La construction de la quotidiennet passe par la recherche chez Perec du fait banal r p titif qui permettra la r
465. savoir du savant et les explications qu il fournit sur son nom Il se produit donc une occultation d informations qui est li e aux transformations n cessaires de la di g se Comme le montre Laurence Dahan Gaida Le travail scientifique ne se laisse donc pas seulement analyser en termes logiques conceptuels institutionnels et socio politiques mais requiert galement une analyse en termes psychobiographiques La dissipation du myst re du nom passe en effet par cette analyse pseudo linguistique des Voir Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 360 55 Ibid p 361 Laurence Dahan Guida Du Savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature in Revue Canadienne de Litt rature Compar e op cit p 483 50 avatars successifs du nom On ne con oit pas de cl ture entre les diff rents plans de la di g se On circule selon l conomie litt raire qui fait tourner les savoirs des transformations phon tico graphiques du nom aux inconstances qui entourent les modifications Toutefois m me si le myst re du nom semble se dissiper c est au contraire celui du r le du savant qui s obscurcit Comment est il possible scientifiquement qu un savant linguiste sp cialiste de l ex cution des mots soit si peu au fait de l radication de son nom propre C est ici la loi transgressive de Perec le savoir g n re le savoir mais en annihile spontan ment un autre selon de
466. se lance dans une profuse vocation des contacts humains de son acrobate qui l haut sur les hauteurs converse tant t avec un coll gue tant t avec des couvreurs ou un pompier ou encore pour dissiper l ennui de la solitude consacre alternativement son temps au 1 Ibid p 71 et Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op cit p 53 12 Idem 253 travail et au repos Perec rompt avec ce d veloppement pour aboutir directement la conclusion du paragraphe de Kafka savoir la probl matique des d placements Le narrateur de Kafka nous annonce du dl le trap ziste e t donc v cu dans le calme sans les in vitables voyages de ville en ville qui lui pesaient norm ment et celui de Perec affirme que lt le probl me devenait plus difficile r soudre lorsque les contrats s achevaient et que le trap ziste devait se transporter dans une autre villes Sur le plan de la narration c est toujours le scripteur savoir l crivain biographe de Rorschash qui assure la fonction de la narration C est plus sur le plan actantiel que se produit un nouveau changement l opposant chez Kafka ce sont les voyages les d placements spatiaux chez Perec ce sont les n cessit s conomiques et la lenteur Certes on peut objecter que chez Kafka l acrobate doit aussi se d placer cause des contraintes conomiques toutefois selon le r cit kafka en d une part cela n est pas explicitement menti
467. se le plagiat en le s parant de l hommage Nul mieux que Georges Perec n a su plus malicieusement brouiller la fronti re entre le plagiat et le pastiche entre l influence subie et l hommage voulu Son premier roman Les Choses fut crit dans l ombre de l Education sentimentale La pr sence de Flaubert est d terminante pour la forme et le style du livre et de cette imitation d lib r e Perec tira des r sultats tout fait neufs qui ne doivent rien l influence La th matique emprunt e par Perec Flaubert ne constitue que l un des moyens qu il a utilis s pour construire son roman De plus comme le montre Schneider bien d autres param tres flaubertiens ont t r employ s par Perec avec la r ussite que l on sait On peut donc conclure que l isotopie du voyage gr ce au class me du r sultat du d placement permet l int gration du discours au r cit ce qui est principalement l effet des connecteurs intertextuels Ces connecteurs produisent sch matiquement le r sultat suivant le fruit du voyage c est le confort chez Flaubert et la beaut du corps chez Perec Nous avons affaire deux programmes narratifs parall les conduisant des utopies voqu es sur le mode ironique Nous passons de l utopie romantique du XIX si cle l utopie scientifico technologique du XX si cle ce qui par les effets intertextuels pr c demment d crits nous force une red couverte de la premi re ca
468. ses ann es plus tard lorsque Catherine Binet lui offrit une dition du Golem de Gustav Meyrink Perec manifesta bruyamment son merveillement en tombant sur le mythe emeth meth comme s il s agissait pour lui d une v ritable d couverte Mais c est exactement ce que j ai fait dans La Disparition s exclama t il 396 embryon h breu golem tes yeux les voyaient toutes elles taient sur ton livre Ce psaume assez herm tique laisse penser qu il s agit de la ma trise de la destin e humaine par Dieu et ce d s l embryon De plus le psalmiste y ajoute le livre la relation du livre l embryon nous claire tout passe encore par l crit le Golem est un homme livre qui maintient la v rit il est une extension de l homme lettre qui le commande Toutefois Gershom G Scholem met en doute cette interpr tation du Golem comme l embryon il parle plus volontiers d une signification qui se rattacherait au sans forme la mati re sans forme d Aristote Nombreux sont les cr ateurs litt raires qui ont voulu se r clamer de ce mythe du Golem qui a fascin Perec On pense John Ronald Reuel Tolkien le grand philologue anglais cr ateur du cycle du Seigneur des Anneaux Dans ce cycle de contes on rencontre un personnage Gollum qui participe de cette nature obscure et argileuse du sol terrestre C est aussi vrai de l auteur de science fiction am ricain Frank Herbert cr ateur prolix
469. ssin des lettres qui figurent le corps Les lettres peuvent d terminer un destin Rien d tonnant ce que Cinoc soit de sa profession un tueur de mots comme un certain Sylvestre Matuska est sp cialiste en catastrophes ou d railleur professionnel Du tueur de mots Cinoc qui agit comme un abatteur gages un d railleur anarchiste motiv par des cent dix glises de Vienne qui sont toutes vides on retrouve le m me Voir Gershom G Scholem La Kabbale et sa symbolique op cit p 85 o il expose la th orie des Quatre Mondes des kabbalistes 7 Patrick Imbert Construction et discours op cit p 46 o Voir Umberto Eco Le Pendule de Foucault op cit passim tous les textes dits de files Voir aussi Patrick Imbert Construction et discours op it p 48 Georges Perec La Vie mode d emploi op it p 361 Voir Claude Burgelin Georges Perec op cit p 151 2 Jacques Antoine Les Nouveaux Dossiers extraordinaires de Pierre Bellemare Paris Arth me Fayard 1977 p 123 3 Ibid p 122 375 souci religieux de la vacuit de l espace Il s agit ni plus ni moins de vider et de combler l espace C est tout d abord le th tre jeu des points cardinaux compos pour Esp ces d espaces ce qui recoupe le Shaddai ACTE UN Une voix off Au nord rien Au sud rien l est rien A l ouest rien Au centre rien Le rideau tombe Fin de l acte un
470. ssin photomontage de Guyomard Paris Le Castor Astral 1989 p 19 Voir ibid p 306 307 Voir aussi Georges Perec Un Homme qui dort Paris Deno l 1967 Sur le mod le et la conception perecquienne de l histoire voir W_ou_le souvenir d enfance Paris Deno l 1975 p 13 fleca a tr RE R SERRES me e 43 anglais Mais l histoire impose irr sistiblement son emprise sur le roman lorsqu il s agit d voquer le Troisi me Congr s de l Union internationale des sciences historiques qui se tint dimbourg en octobre 1887 sous les doubles auspices de la Royal Historical Society et de la British Association for the A ment of Sciences cette occasion deux savants historiens se feront remarquer par la teneur novatrice de leurs communications qui se voudront contradictoires Il s agit d un savant alsacien le professeur Zapfenschuppe de l Universit de Strasbourg et d un savant espagnol Juan Mariana de Zaccaria La controverse qui va d cha ner les passions portera essentiellement sur les premi res d nominations attribu es au Continent Am ricain controverse sur laquelle nous reviendrons Ces savants rendent compte de l histoire comme d une discipline rigoureuse exigeante pointilleuse et non exempte des vives oppositions que la faiblesse des ancrages au pass appellent in luctablement Un troisi me personnage historien lui aussi sera m l la controverse c est le conservateur du Mu
471. ssocier de dissoudre les st r otypes et inviter ses lecteurs reconsid rer la constitution d une culture populaire Cette culture sera vou e la lucidit et la d nonciation afin de combattre l ali nation Elle manifeste aussi une vitalit instituante ayant ses propres r seaux en expansion ind finie L id e de r seau si bien exploit e par Bernard Magn correspond bien aux processus psycho int grateurs de la m moire Elle op re en effet par champ unificateur r unissant des souvenirs h t roclites comme s ils taient homog nes Les nuages de points souvenirs viennent s agglom rer selon des r seaux de lecture Ces r seaux propos s par Je me souviens constituent une autobiographie parcellaire qui se rattache la m moire collective comme si Perec en confondant ses propres souvenirs avec ceux de la m moire du monde annihilait jamais tous les risques de sa propre disparition individuelle CHAPITRE VI LE RABBIN ET LA LETTRE L alphabet magique l hi roglyphe myst rieux ne nous arrivent qu incomplets et fauss s soit par le temps soit par ceux l m mes qui ont int r t notre ignorance retrouvons la lettre perdue ou le signe effac recomposons la gamme dissonante et nous prendrons force dans le monde des esprits G rard de Nerval cit par Paul Eluard Po sie involontair je _intenti l cit par Georges Perec Paris La Disparition Deno l 1969 p 314 rit rigin Obscurit des
472. st pas tout un autre projet fait tat d un index J ai choisi Paris douze lieux des rues des places des carrefours li s des souvenirs des v nements ou des moments importants de mon existence J ai commenc en janvier 1969 j aurais fini en d cembre 1980 J ouvrirai alors les 288 enveloppes cachet es les relirai soigneusement les recopierai tablirai les index _n cessaires Ces indications r v lent toute l importance que rev tent pour Perec les index comme instruments privil gi s de la lecture de ses propres textes Ces index se rattachent d une part au p ritextuel dont Perec utilisera les potentialit s mais aussi aux sommes scolastiques dont ils sont des parodies En effet la somme scolastique est le r sum Syst matique d un ensemble doctrinal r sum qui peut tre fait long L index constitue aussi une sorte de r sum parce qu il accumule une th matique des principaux sujets trait s par exemple chez Perec Chien 37 41 81 85 Cheval roulettes 165 Ibid pp 53 54 c est nous qui soulignons 1 Ibid pp 58 59 c est encore nous qui soulignons 7 Jean Jolivet article scolastique Encyclopaedia Universalis op cit p 582 TT Georges Perec La Boutique obscure op cit Rep res et repaires 266 59 Chevalier Maurice 1888 1972 282 tant donn que les projets que Perec voquent aupr s de Maurice Nadeau n ont
473. stanciation r alis e entre Perec et son mod le Contre toute attente cette diff rence organis e alors par les parcours figuratifs concentre les liens intertextuels plus qu elle ne les dissout C est un effet de dissimilation qui obture la fracture entre les deux textes On retrouve cette m me r sultante lorsque l on compare le parcours figuratif de l ascension vers les sommets montagneux Ainsi chez Flaubert Souvent du haut d une montagne ils apercevaient tout coup quelque cit splendide r sonne chez Perec ils Gustave Flaubert Madame Bovary op cit p 215 Georges Perec Les Choses op cit p 113 7 Gustave Flaubert Madame Bovary op cit p 215 234 escaladaient les plus hauts sommets ou encore ceci Ils d couvraient d une hauteur des vallons couverts de fleurs des champs Tandis que le parcours figuratif du lex me connote chez Flaubert un r ve de possession du milieu urbain chez Perec une double connotation est produite par la figure lex matique du sommet et ses parcours figuratifs D une part il s agit de l exploit incontestable de l alpiniste et d autre part de la prise de possession d une campagne paisible par des conqu rants bien intentionn s La g n ralisation du parcours figuratif passe encore par une diss mination du sens chez Perec et t moigne de la m me prise en compte de cette diss mination comme recentrage du sens et resserrement du texte Un autr
474. stes de l autobiographie comme Philippe Lejeune ou Anne 10 Georges Perec Un homme qui dort Paris Deno l 1967 p 98 99 Comment ne pas envisager ici un effet d intertextualit avec le texte de Marcel Proust Quelquefois comme ve naquit d une c te d Adam une femme naissait pendant mon sommeil d une fausse position de ma cuisse Marcel Proust la Recherche de temps perdu Du c t de chez Swann Paris Gallimard 1954 p 7 Georges Perec Je me souviens Paris Hachette 1978 Georges Perec op it Georges Perec W ou le souvenir d enfance Paris Deno l 1975 347 Roche Ce qui attire notre attention dans ce r cit autobiographique c est la relation du premier souvenir de Georges Perec en rapport direct avec sa famille juive Ce premier souvenir que Philippe Lejeune appelle La lettre h bra que gt d clenche chez nous un r flexe d analyse car c est ainsi que Perec est devenu un homme de lettres Comme Philippe Lejeune nous pourrons entreprendre une analyse de cette lettre et de son contexte Suivant une progression dimensionnelle nous envisagerons tout d abord sa forme son aspect iconique puis son nom et sa place dans l alphabet h breu sa relation avec le nom en particulier celui perdu de Dieu son agglutination aux mots et ensuite son int gration l criture l exploration de la combinatoire dans le lipogramme et finalement son identification avec la destin e Cett
475. t gorisation la lumi re de la seconde selon des r sultats pr vus et estim s par Michel Schneider C est en effet ce que tend d montrer l intertextualit composite du second et monumental 7 Michel Schneider Voleurs de mots Paris Gallimard 1985 pp 66 67 239 roman de Georges Perec ce qu il appelle lui m me les Romans de La Vie mode d emploi Il n entre pas dans notre propos de pr senter le roman gigogne de Georges Perec La Vie mode d emploi Nous nous bornerons donc rappeler que la probl matique de l intertextualit est ici rig e en v ritable syst me La d finition que Julia Kristeva donne de cette notion et que nous rappelons convient particuli rement bien au chef d oeuvre de Perec La langue po tique est la seule infinit du code Deux pr cisions s imposent au sein de ce m canisme typique de l allusion d une part prendre le roman de Perec comme po tique et d autre part consid rer la notion de code comme pendant du signe et donc comme r v lation d un cryptosens apport par la multitude g n rative des confrontations textuelles En plus de la liste d j imposante des autres textes cit s ou r cup r s par Perec dans La Vie mode d emploi celle que l auteur nous livre l issue de son roman Warren Motte propose notre r flexion le d compte le plus exhaustif qui soit des sources d inspiration de Perec savoir pr s de 200 auteurs soit 198 e
476. t jusqu l heure du d ner Encore ne consent mes nous nous arr ter que parce que nous tions arriv s la 101 m tamorphose de ce nom ch ri et qu une exasp ration muette mais croissante commen ait f rocement maner de nos h tes qui depuis plusieurs heures d j esp raient de plus en plus vainement que nous allions enfin causer litt rature D 101 variations sur le nom de la c l bre cantatrice peuvent effectivement repr senter une saturation raisonnable du signifiant les oulipiens auraient certes pu continuer ad libitum et le titre donn cet exercice de multiplication du nom choisi est bien s r paradigmatique puisqu il s agit de La Cantatrice Sauve Ce titre voque videmment celui de la c l bre pi ce du non moins pataphysicien Eug ne lonesco La Cantatrice chauve Cette transformation du signifiant correspond en trois points l analyse que fait Umberto Eco au sujet de la primaut accord e au signifiant Collectif Oulipo La Biblioth que oulipienne volume 1 Paris ditions Ramsay 1987 Claude Burgelin Paul Fournel B atrice de Juquet Harry Mathews Georges Perec La Cantatrice Sauve p 305 322 Eug ne Ionesco La Cantatrice chauve Paris Gallimard 1954 177 Quel que soit le discours des th oriciens de cette tendance sur les signifiants il suffit d y lire signifi s pour qu il acqui re un sens compr hensible Cette quivoque ou cette
477. t 53 jours op cit p 37 3 Georges Perec Je me souviens op cit entr e n 292 p 76 et 53 jours op cit p 37 Voir Georges Perec Esp ces d espaces op cit p 87 a 305 lattente de la cloche la fin du cours class en internat Nous avons galement gard pour la fin de cet examen des configurations externes les souvenirs concernant les pions de coll ge et de lyc e Un premier est mentionn dans Je me souviens l entr e 25 comme le pion corse qui s appelait Flack comme la D C A allemande class en internat et qui recoupe une double occurrence de la guerre Un m me pion corse voire un autre est mentionn dans 53 jours comme tant celui qui gardait dans son armoire un bout de fromage vieux de plusieurs mois qu il fallait casser coup de marteau Le renouvellement des anecdotes contribue faire du r seau un tableau historique des personnages ainsi voqu s et de leurs activit s connues ou inconnues Un second pion est mentionn et d sign comme le pion cocu cause du marqueur de couleur jaune de son charpe La comparaison des deux r f rences tablit le d calage entre le souvenir authentique et sa transcription fictionnelle Je me souviens d un pion au lyc e Claude Bernard qui avait une charpe jaune c est cette occasion que j ai appris que le jaune tait la couleur du cocu Ce souvenir est class en folklore enfantin ce qui le r
478. t Bober 149 p OEUVRES TRADUITES PAR GEORGES PEREC Harry Mathews Les Verts champs de moutarde de l Afghanistan Paris Deno l 1974 188 p Harry Mathews Le Naufrage du stade Odradek Paris Hachette 1981 174 p PRINCIPAUX CRITS CRITIQUES SUR GEORGES PEREC a Articles CHAUVIN Andr e Jeu de m moire et histoire de mots dans Je me souviens de Georges Perec Les Cahiers du CRELEF n 33 Besan on 1992 1991 pp 42 68 425 LURCAT Fran ois Georges Perec et le comique des neurosciences La Nouvelle Revue Fran aise n 447 Paris Gallimard avril 1990 pp 115 126 MAGN Bernard Le Puzzle mode d emploi petite prop deutique une lecture m tatextuelle de La Vie mode d emploi de Georges Perec Texte __1 L Autorepr sentation Le Texte et ses Miroirs Paris 1982 pp 71 96 MIGUET Marie Sentiments filiaux d un pr tendu parricide Perec Po tique n 54 avril 1983 pp 135 148 ROCHE Anne lt L Effort pour rendre l autre fou La Quinzaine Litt raire n 541 du 16 au 31 octobre 1989 pp 5 6 ZUPANCIC Metka La Vie mode d emploi Georges Perec Tribune Juive vol 9 n 4 janvier f vrier 1992 pp 44 46 b Livres BELLOS David Georges Perec une vie dans les mots Paris Seuil 1994 827 p BURGELIN Claude Georges Perec Paris Seuil Les contemporains 1988 256 p CHASSAY Jean Fran ois Le Jeu des co ncidences dans La Vie mode d emploi de Georges
479. t aux autres forme le swastika 5 L examen iconique des lettres conduit Perec retrouver le processus identitaire travers l opposition l autre Mais il r soud encore cette opposition avec humour puisqu il introduit alors le souvenir du film de Charlie Chaplin Le Dictateur o l acteur metteur en sc ne am ricain ridiculise le dictateur allemand Et les embl mes nazis sont finalement banalis s par le double X du fantoche de cin ma Cette banalisation Notes tir es de la conf rence de Jacques Hassoun d j cit e Philippe Lejeune La M moire et l oblique op it p 225 7 Notes tir es de la conf rence de Jacques Hassoun d j cit e Ren Gu non Symboles de la science sacr e Paris Gallimard 1962 p 122 Voir Georges Sadoul Histoire du cin ma Paris Flammarion 1962 p 242 360 redouble et l incertitude du signe et celle de son r f rent savoir le nazisme Il renvoie la monstrueuse doctrine au n ant Que les math matiques conduisent la dictature puis la d livrance et Tat cela rel ve de l vocation des lieux du possible comme authentifi s par le croisement des deux histoires celle de l individu et celle du peuple auquel il appartient et qui correspond au reflux de l ext rieur vers l int rieur L iconicit de la lettre illustre ce lent processus psychologique de la m moire personnelle de l crivain qui int riorise le drame plan taire Philippe
480. t esth tique dit Barthes pour ajouter que dans l id ologie de notre temps la r f rence obsessionnelle au concret est toujours arm e comme une machine de guerre contre le sens comme si par une exclusion de droit ce qui vit ne pouvait signifier et r ciproquement Le but de la description est d atteindre au concret en assumant le sens C est aussi l objectif de Perec dans Les 3 Jean Baudrillard La Soci t de consommation Paris S G P P 1970 p 20 Roland Barthes lt L Effet de r el in collectif Litt rature et R alit Paris Seuil 1982 pp 84 et 87 San ni MR EEE SO 224 Choses notamment dans ce premier chapitre Le rideau se l ve sur un appartement de r ve qui par opposition paradigmatique tranche singuli rement avec ceux de la pension Vauquer ou avec le salon de Mme Aubain Les deux personnages principaux du roman n habitent pas dans cet appartement Cela rev t une grande importance La description n est pas tablie par un narrateur homodi g tique Le narrateur omniscient est comparable en cela ceux de Balzac ou de Flaubert C est un tre de fiction qui fonctionne comme une cam ra cin matographique et qui sait en outre parler et crire de l son apparente objectivit et de l encore les possibilit s infinies de sa vision C est justement ce qu il nous faut explorer La plupart des critiques ont relev cette similitude de vision ou de prise de vision pour reprendr
481. t iconique Cette lettre est donc avant tout un dessin un plan une photographie a rienne comparable celles si l on veut de ces grandes bases d envol que l on a surprises dans les Andes Cette lettre plan correspond au mythe de l enfermement ainsi doublement exprim comme mise en abyme du cercle de famille proc d dont Perec a beaucoup us La conception du signe passe par un travail mat riel qui est n cessaire pour produire des expressions symboliques La lettre plan est doubl e d une description peut tre son mode d emploi le sujet que la lettre enferme correspond J sus en face des Docteurs Peu importe la vraisemblance voire l existence du tableau de Rembrandt puisque Perec en d ment justement la production dans sa note n 2 Pourquoi alors cet enfermement du sujet quoi correspond il Nous pourrions pour utiliser la classification d Umberto Eco int grer cette pseudo lettre h bra que au dessin pervers dans la cat gorie des Sinsigne conique Rh matique gt reprise de Peirce dont Eco nous donne la d finition suivante Une reproduction diagrammatique comme signe d une essence cas d un quelconque triangle con u comme repr sentant l entit g om trique triangle Cette lettre plan r v le un ratio difficilis selon la terminologie d Eco car le sujet dessinant est Tato GITFICILIS g J St phane Santerre Sarkany Th orie de la litt rature Paris Presses
482. t peut aussi provenir de la relative similarit des patronymes ainsi avons nous Je me souviens que Darry Cowl s appelle Andr Darrigaud et Et cela me fait souvenir du coureur cycliste Andr Darrigade Paul Reboux et Charles M ller la mani re de op cit L on Tolsto et les romanciers russes traduits en fran ais R demption p 277 7 Georges Perec Je me souviens op cit entr es n 107 et n 108 p 108 7 Thid entr e n 157 p 46 Ibid entr e n 158 p 47 Sur cette rencontre fortuite voir Andr e Chauvin Jeu de m moire et histoires de mots dans Je me souviens de Georges Perec Les Cahiers du CRELEF op cit p 64 316 Darrigaud appelle Darrigade les d clinaisons du nom permettent le rapprochement Au passage nous remarquons que l entr e n 158 est la seule ne pas tre introduite par Je me souviens nous avons au contraire une formule de r m moration association et cela me fait souvenir Cette transgression apparente du genre manifeste toute la souplesse de la construction qui permet aussi bien une volution intrins que que des sorties affranchies en apparence d un r seau plus rigoureux Toujours sur la base de l association de lex mes identiques nous avons encore relev les groupes juxtapos s suivants la montagne 427 et 428 r unis par les paroles du chant L haut sur la montagne l une des chansons concerne un chalet et l autre
483. t pour ce Cocktail Queneau dont elle crit ceci Cocktail Queneau la derni re s rie des Voeux crits par Georges Perec pour 1982 propose pour trente sept titres de Queneau d abord num r s par ordre alphab tique table initiale des r cits homophoniques comportant chacun un titre propre et issus d une d composition homophonique recomposition s mantique des titres queniens table finale tr s proche du proc d volu de Roussel Trente sept un des nombres personnels de Perec contient le trois et le sept chers Queneau Mais l intersection triple branche se redouble comme on pouvait s y attendre Parmi ces trente sept micro r cits si FB donne pr texte via Leffe leurre bleus l histoire intitul e Une fine plaisanterie dans l arm e belge on trouve n s du Journal intime de Sally Mara L Ejur n a lundi mais Shalimar a et d Un de ses livres I Comment il a crit certains de ses livres 2 Ces deux r cits fournissent sur l oeuvre de l crivain des pr cisions ausi in dites et douteuses que celles qui abondent chez Roussel marqu es par une rudition apocryphe Po tisation du savoir ironisation de l histoire et de l Histoire sont pr cis ment en jeu dans Les Fleurs Bleues FB sans manquer d appara tre dans La Disparition LD Spirale des leurres et de leurs chiffres pour un lecteur qui s aime bleu Nous retiendrons particuli rement de cette pr sentation d An
484. tan ment le code et les significations dans ce lent passage de la nature la culture Cependant le code aussi bien con u soit il ne peut emp cher la multitude des occurrences de la signification Ainsi que l explique Eco le code est la source d un jeu Mais aucun jeu aussi libre et inventif soit il ne proc de par hasard Le langage initiatique n chappe pas la d finition code et significations se cod terminent jusque dans le jeu auquel nulle paroie ne saurait chapper Jusque dans sa longue Histoire du lipogramme Perec utilise une structure ludique ne serait ce que par le choix de ses exemples Quelques ann es plus tard il Voir Royston Pike Dictionnaire des Religions op cit p 279 Roman Jakobson Essais de Linguistique g n rale Paris Minuit 1963 p 117 Umberto Eco S miotique et Philosophie du langage Paris Presses Universitaires de France 1988 p 274 Georges Perec Oulipo La litt rature potentielle op cit p 73 89 a nd 382 crira son lipogramme baroque en a intitul What a man Quel homme en fran ais courant Ce texte constitue un retour l individu et au processus identitaire Class parmi les lipogrammes monovocaliques ce court texte tr s dense ressemble un chant initiatique conforme l artifice jakobsonien De quoi s agit il Consid rons tout d abord la narration qui compose ce texte lipogrammatique Une lutte mo
485. te cervelas charcutaille coppa cochonnaille figatelli foie gras fromage de t te hure de porc jambon de Parme p t p t de IT Voir Jean Paul Aron Le Mangeur du XIX si cle Paris Robert Laffont 1975 137 canard etc l num ration alphab tique se joint la quantification Un p t de grive six p t s des Landes quatre museau une mousse de foie gras un pied de cochon sept rillettes un salami deux saucisson etc sl Finalement on remarque un dernier crit re de classement l laboration qu elle soit purement fictive comme celle du nom Deux andouilles de Gu m n ou encore conforme au travail demand quatorze c leri remoulade six escalope milanaise un civet de li vre l alsacienne Cette d monstration d inventaire gastronomique reste suspendue aux m mes processus que l inventaire de la Place Saint Sulpice la s lection et la consignation cette diff rence pr s que s ajoute le mat riel de la consommation c est dire de la destruction de l article d nomm Concernant les liquides nous remarquons le m me ordonnancement avec cependant une grande absence de la tradition fran aise celle de l ap ritif Perec commence imm diatement sa liste de vins par des beaujolais seul vin rouge tre consomm frais puis il passe ensuite aux grandes r gions vinicoles c tes du rh ne bordeaux et bourgognes les vins divers repr sentent ensuite des r
486. teindre la quantification des r sultats exp rimentaux Structure d un langage command par le type classique du raisonnement causal l essentiel de l exp rimentation tant d aboutir des conclusions Non apparent ici mais sous jacent au texte l importance des r f rences des travaux et recherches ant rieurs Cette derni re caract ristique est particuli rement signal e par Bernard Magn dans son examen des textes de Perec Au niveau macro structurel les articles perecquiens 5 L A C F A S sigle mis pour Association canadienne fran aise pour l avancement des sciences Voir Bernard Magn La Cantatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in Pere oll 1981 1988 op cit p 198 T Caroline Brazeau tude de la cin tique de l infection caus e par Streptococcus suis s rotype 2 dans les cellules phagocytaires in Recueil des r sum s de communications op it p 36 D hu 76 respectent la m me architecture interne typique de l article scientifique un corps d article un appareil de notes et r f rences une bibliographie Sans nous attarder sur le p ritextuel notamment sur la bibliographie que nous analysons plus loin nous pouvons commencer par examiner s il est possible de retrouver dans les textes de Perec les caract ristiques que nous avons relev es dans le texte de biologie cellulaire Concernant le vocabulaire sp c
487. tie terrienne La terre et le sang liquide et solide m l s intimement dans le corps humain mais encore le gaz le souffle de Dieu qui transmet la vie Ce souffle cette respiration c est aussi et probablement une parole animatrice un souffle langagier l mission du nom de la lettre cr atrice qui lie dans le m me contexte symbolico physico religieux encyclop die l int grit de la vie fusionnant T La Bible traduction de J rusalem op cit p 10 Gen se 2 7 S Umberto Eco S miotique et Philosophie du langage op cit p 110 1H Voir Ren Gu non Form iti Iles et cycl i Paris Gallimard 1970 p 55 60 voir aussi Gershom G Scholem La Kabbale et sa symbolique op cit p 180 181 Voir Andr Devyver Le Sang pur Les pr jug s de race chez les gentilhommes fran ais de l Ancien R gime 1560 1720 Bruxelles ditions de l Universit de Bruxelles 1973 395 mati re contre mati re et anti mati re dans l esprit de vie Ces suppositions recoupent le d roulement de la l gende du Golem telle que Jacob Grimm la livre dans son Journal pour Ermites Les juifs polonais fabriquent apr s certaines pri res r cit es et jours je n s la forme d un homme en argile et en glu et s ils prononcent au dessus le Schemhamphoras miraculeux le nom de Dieu il doit devenir vivant Il ne peut naturellement pas parler mais il comprend suffisamment ce que l on dit ou commande Ils le nomm
488. tinuit s existent ainsi que nous l annoncions entre notre texte source ou texte origine le recueil Je me souviens et d autres textes de Perec Cela signifie que ces discontinuit s se manifestent chez Perec deux niveaux D abord il s agit d une subversion personnelle de ses propres m thodes Si je tente de d finir ce que j ai cherch faire depuis que j ai commenc crire la premi re id e qui me vient l esprit est que je n ai jamais eu envie de r p ter dans un livre une formule un syst me ou une mani re labor s dans un livre pr c dent Et ensuite il s agit du renouvellement d un processus de confrontation m morielle Ce processus rel ve encore du r seau entre les oeuvres de Perec ainsi que l a fort justement montr Bernard Magn Au sujet de W ou le souvenir d enfance Bernard Magn reprenant la pri re d ins rer de Perec explique alors ceci Et c est pr cis ment autour du mot r seau qu on peut rep rer un des premiers exemples de fragile intersection entre l autobiographie le r cit s Ibid p 70 Ibid p 70 Ibid p 70 s Georges Perec Penser Classer op cit Notes sur ce que je cherche p 9 300 d aventure et lunivers Wf Le r seau constitue un syst me relationnel sp cifique qui institue un renouvellement constant des liens tablir entre ses propres composantes Par exemple Bernard Magn d voile le r seau qui se constitue entre
489. tionnelle comme l un des aspects de son travail de m morisation dans Je me souviens Insistant sur l aspect Georges Perec Je me souviens op it post scriptum p 119 7 Ibid post scriptum p 119 Voir Michel Butor Essais sur le roman Paris Gallimard 1992 p 118 Pierre Janet L volution de la m moire et la notion du temps Paris Chahine 1928 p 170 Georges Perec Je suis n op cit p 86 290 intellectuel et sur l aspect fictionnel de la m moire dans la reconstitution du souvenir le sociologue Maurice Halbwachs crit Le souvenir est dans une large mesure une reconstitution du pass l aide de donn es emprunt es au pr sent et pr par e d ailleurs par d autres reconstructions faites des poques ant rieures et d o l image est sortie bien alt r e Cette constatation rend bien compte des m canismes qui transforment le souvenir gr ce tous les efforts d embellissement ou de vraisemblabilisation Perec tait conscient de la fragilit de ses efforts pour organiser ses souvenirs Il le confie ainsi Frank Venaille Je sais par exemple que Je me souviens est bourr d erreurs donc que mes souvenirs sont faux Cela fait partie de cette oppositions entre la vie et le mode d emploi entre la r gle du jeu que l on se donne et le paroxysme de la vie r elle qui submerge qui d truit continuellement le travail de mise en ordre et heureusement d ailleurs L effort
490. tions de Minuit 1951 119 Georges Perec La Vie mode d emploi op it p 363 Patrick Imbert Construction et discours op it p 47 be et mes 8 gaben 377 auparavant nous avons la G matrie ou Gemmatria 2 qui s int resse la valeur num rique des lettres et la Notarikon qui consid re chaque mot du livre comme un sigle En r alit les ex g tes Kabbalistes dont Perec est videmment l h ritier se sont interrog s sur les m canismes productifs des lettres et des chiffres c est dire des signes Une tude de l alphabet et de son histoire montre que les traces de l criture et les modalit s de la formation des signes crits sont auto productives et auto cumulatives Les lettres et les chiffres se forment se d truisent et se reforment suivant les lois internes des besoins et des imaginaires ou suivant les lois ethniques des univers religieux L histoire du savoir est celle de la culture qui fournit la pens e et les r flexes de pens e au m me titre que tout l ensemble de la r fl xologie sensori motrice humaine L histoire de la Kabbale n est qu une prodigieuse variation sur les possibilit s constructives d un univers religieux Ces possibilit s doivent demeurer constamment ouvertes l encontre des interpr tations doctrinales et dogmatiques des philosophies et des religions gr co chr tiennes et l on comprend mieux que Perec refus t tout esprit de syst me TT Sur le
491. tition constitue la premi re probl matique de l inventaire Que mettre dans la liste Et pourquoi la liste Pourquoi les inventaires La liste est l abolition des d sordres du monde elle offre la s r nit de la signification encastr e dans un environnement facilement rep rable et interpr table La liste est encore l abolition du temps et la lutte contre les incertitudes de la m moire Elle permet d enregistrer tout e qu une fragile m moire se h tait d oublier Elle emp che que soit rejet dans l infini de l oubli tout ce qui m rite d tre enregistr Le r el constitue une nigme L crivain demeure fascin par ce myst re Il restitue son tonnement d une mani re aussi brute que possible Il questionne le r el travers ce qui est insignifiant Il s agit d un processus litt raire Il faut faire voir ce que l on ne voit pas On peut comparer la tentative perecquienne au roman Le roman utilise la description pour pr parer transformer ou expliquer la di g se Perec se coupe de toute 144 justification narrative Cependant comme le Nouveau Roman il bouleverse la hi rarchie traditionnelle des objets Il privil gie la cafeti re bleue aux d pends des beaux sentiments de la marquise Perec crit donc un pur flot de notations Bien que ce ne soit pas l ekphrasis ces notations expriment l tonnement et la surprise de l crivain face au r el En apparence seulement il semble refuser tout montage et
492. tons beaucoup sur l id e que le savoir humain est auto cumulatif La notion math matique de fonction confirme un savoir Dans le cas du recueil de Perec qui participe de cette fonction il nous faut tudier la connaissance selon son rapport au temps Cela correspond la d finition g n rale de la m moire Selon Serge Brion La m moire est la propri t de conserver et de restituer des informations 2 nous faut cependant nuancer et amplifier cette d finition nous pouvons en effet consid rer que la m moire est une facult qui enregistre rappelle reconna t et organise les informations en provenance du pass Nous pouvons consid rer que le mat riel de la m moire est constitu par les souvenirs Ces derniers peuvent quelquefois tre spontan ment enregistr s par la m moire toutefois dans la plupart des cas il faut qu intervienne un m canisme de fixation Et ce m canisme d pend d un effort qui est videmment volontaire Dans la Voir Alain Lieu article m moire in Encyclopaedia Universalis tome XV Paris Encyclopaedia Universalis S A 1985 p 1089 Voir Alain Lieury article M moire op it p 1091 a ugyen mms 288 gen se de ses Je me souviens Perec ne manque pas d voquer justement comment il a proc d pour faire monter du n ant ses propres souvenirs Il nous explique ainsi comment il ressentit le processus Comment na t un souvenir Dans le cas de Je me souviens
493. tout au moins comporte une des lettres de ce dernier Le t tragramme repr sente l absolu de l espace dans la reconnaissance des quatre points cardinaux Gu non examinant le processus de multiplication production des nombres crit alors Si le ternaire est le nombre qui repr sente la premi re manifestation de l Unit principielle le Quaternaire en figure l expansion totale symbolis e par la croix dont les quatre branches sont form es par deux droites ind finies rectangulaires elles s tendent ainsi d finitivement orient es vers les quatre points cardinaux de l ind finie circonf rence pl r matique de l tre points que la Kabbale repr sente par les quatre lettres du T tragramme JHWHS Comment se forment donc le Shadda et la progression num rique qui en d coule N oublions pas que l objectif reste la diss mination des nombres et que science des lettres et science des nombres demeurent quivalentes dans l optique de la Kabbale et de l sot risme islamique Le t tragramme correspond bien s r cette lecture des lettres h bra ques que nous donne Gershom G Scholem JHWH soit yod h waw h tant donn que ces quatre lettres correspondent chaque branche d une croix orient e spatialement vers chaque direction de l espace NESO ESON NOSE SEON NSEO OESN comme dirait Perec Il suffit de marquer le centre de cette croix pour obtenir le pentagramme ainsi que le d montre Ren Gu n
494. toute pr sentation rh torique Le texte se pr sente comme un proc s verbal un constat un inventaire destination prosa que Pourtant il est tout le contraire d un constat d huissier sec et d pourvu de r f rences sensibles C est une description dont les proc d s rh toriques deviennent rapidement visibles et clatants m me Les variations rh toriques du texte en constituent le charme m me Nous avons not quelques uns de ces proc d s jeux de mots pseudo d cousu parataxe allit rations etc Il est remarquable de constater que Perec commence sa tentative par des lettres ce qu il note en premier ce sont ces lettres Esquisse d un inventaire de quelques unes des choses strictement visibles Des lettres de l alphabet des mots KLM sur la pochette d un promeneur un P majuscule qui signifie parking 7 Les choses les plus visibles sont donc des lettres Il commence toujours par l criture puis il tablit un nouveau circuit du visible qui revient encore aux apparences sensibles Agence de voyage autobus pompes fun bres diteur Entre autres choses son attention est polaris e par les autobus Ils le fascinent cause de leur grosseur de leur couleur et de leur bruit Il les per oit comme des tres mythiques un peu comme un arbre ou un Le Georges Perec Tentative d puisement d un lieu parisien op cit p 13 145 paysage pour un po te Le regard du po te contrairement
495. toutes ces mati res et renseignements assimil s selon des syst mes tr s rigoureux et tr s productifs On en veut pour preuve nombre d crits o il op re une s lection tr s pertinente des connaissances qu il int gre la trame romanesque de son r cit Nous pensons aussi bien Un Homme qui dort qu 53 jours son dernier roman inachev pour prendre deux exemples caract risant le d but et la fin de sa production romanesque C est que le savoir chez Perec reste tr s sp cifique Il l est plus d un titre et notamment parce qu il commande la narrativit romanesque Cependant nous pourrions ais ment nous laisser d border par l tendue d un savoir tellement multiforme comme en t moigne une analyse du corpus Dans cette perspective les oeuvres de l auteur s organisent selon de grands ensembles signifiants que nous adopterons comme lignes directrices Les oeuvres de Perec s organisent selon trois grands objets de la connaissance le monde le langage et l identit Concernant la connaissance du monde Perec va l explorer dans les connaissances scientifiques parodi es ou non comme dans la recherche du quotidien et l observation de l insignifiant Nous examinons ensuite la Georges Perec Un Homme qui dont op cit Georges Perec 53 jours es aap 15 connaissance du langage qui passe par une exp rimentation des ressources de la langue et par celle des textes litt raires selon toute une gamme
496. toutes les contraintes que l on peut exercer sur les langues alphab tiques il est certain que le lipogramme est l une des plus potentiellement productives et des plus anciennes li e qu elle est au processus de conceptualisation h sitation dans la gen se de la langue C est certainement pour justifier de cette tonnante f condit que Perec a crit son histoire du lipogramme et aussi deux romans servant de d monstration cette cause surprenante retrouvant en cela les m canismes volutifs des langues li es aux myst res fondamentaux des cultes anciens Ainsi que Perec l indique lui m me dans son Histoire du lipogramme Le radical lipo y vient de leipo je laisse Il s agit donc d abandonner de laisser de supprimer de proscrire l emploi d une lettre au choix pr d termin et de composer ensuite le texte en respectant cette contrainte Le lipogramme se fonde sur la suppression d une seule lettre mais aussi de deux voire de plusieurs ou encore de leur emploi unique Ainsi avons nous un lipogramme en A en Au cours de leur volution de nombreuses langues ont perdu ou gagn des lettres Georges Perec Histoire du lipogramme in collectif Oulipo La Litt rature tentielle op cit p 73 89 Ce sont les deux romans lipogrammatiques de Perec La Disparition Paris Deno l 1969 et Les Revenentes Paris Julliard 1972 et 1991 Georges Perec Histoire du lipogramme in collectif
497. toutes pi ces des connaissances imaginaires il utilise le champ exp rimental et les m thodes de la science pour produire un ensemble de textes pseudo scientifiques Dans ce cas tel celui des papillons de l le Iputupi ou celui des projections de tomates sur les cantatrices non seulement des connaissances sont invent es mais encore tout un appareil rudit est mis en place Cet appareil singe la science et consacre la d monstration r f rences citations notes infrapaginales bibliographie savante etc 3 Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 p 147 149 375 473 478 Georges Perec Cantatrix Sopranica L et autres crits scientifiques Paris Seuil 1991 Georges Perec Cantatrix Soprani a L et autres crits scientifiques op CL Experimental demonstration of che tomatotopic organization in the Soprano Cantatrix Sopranica Li p 11 33 et m r 3 te E 412 Au travers de ces diff rentes tendances et manifestations du savoir chez Perec on peut donc v rifier qu il n existe chez lui en d pit de ses affirmations aucune volont de transmettre des connaissances On peut donc penser que la connaissance du monde comme objet scientifique n int resse que m diocrement Perec tout au moins comme qu te d une v rit qu elle soit scientifique ou m taphysique Il lui reste explorer le monde du quotidien la r alit de l insignifiance Li au groupe de Cause Commune qui s
498. travail m ticuleux de Perec et la hi rarchie des d sirs et des contradictions humaines telle qu il l exprime lui m me a peut durer longtemps C est le propre de l homme de lettres de disserter sur son tre de s engluer dans sa bouillie de contradictions lucide et d sesp r solitaire et solidaire beau phraseur de sa mauvaise conscience La hi rarchie a au moins le m rite de r organiser le tissu des contradictions la bouillie de contradictions comme dit Perec Mais le texte de Choses que je fasse avant de mourir correspond aussi aux aspirations artistiques d un crivain ne serait ce d j que par l allusion au Jonas de Camus solitaire et solidaire Les donn es les plus compl tes de cette analyse seront apport es par la comparaison th matique des d sirs de Perec selon les deux textes parall les Nous retrouvons cette dialectique des contradictions selon ce qu annonce Roland Barthes au sujet de l utopie L utopie est famili re l crivain parce que l crivain est un donateur de sens sa t che ou sa jouissance est de donner des sens des noms et il ne peut le faire que s il y a paradigme d clic du oui non alternance de deux valeurs pour lui le monde est une m daille une monnaie une double surface de lecture dont sa propre r alit occupe le 12 Georges Perec Je suis n op cit p 105 109 TT Ibid Les Gnocchis de l automne ou R ponse quelques questi
499. trois noms Grincheux Simplet et Doc 355 La Bible et Walt Disney permettent cette combinaison triadique incompl te comme d jouement de la m moire Nous avons encore sous la rubrique Nouvelle Vague une premi re vocation de ces remous aquatiques et marins Je me souviens de la Nouvelle Vague 334 laquelle Perec ajoute un des plus c l bres acteurs de cette m me vague Jean Claude Brialy 335 et un hebdomadaire se r clamant de cette phase novatrice L Express qui se donne pour L hebdomadaire de la Nouvelle Vague 336 Un dernier exemple de suite est int ressant C est celle de l opposition mort vie non mentionn e l index selon une progression inversion couleur tragique la mort de l acteur Carette cause de sa n gligence 164 le viol de la tombe de Martine Carol 165 l apprentissage du piano par Dinu Lipatti 166 7 Deux autres s ries sont construites sur la base de la subjectivit de l auteur La connaissance est toujours r v latrice des sentiments de l initi lors de sa d couverte et de son acquisition Perec nous rappelle deux types de sentiments qu il a prouv s face de nouvelles connaissances Tout d abord une cha ne propre l tonnement qu est ce qui a pu l tonner ce point Ce seront successivement l absence de lien entre le Palais de Chaillot et le Trocad ro 132 la signification de son pr nom 5 Ibid entr es n 353 n 354 et n 355 p
500. ttribu es aux plats nous trouvons une exception c est dire une r p tition remarquable du titre Il s agit comme par hasard du plat nomm ris de veau flamande 5 dont une seconde occurrence est plac e en fin de liste la recette n 52 Le premier ris de veau flamande amp Ibid p 90 93 Les chiffres indiquent le num ro des recettes e Thid p 102 et p 103 6 Stendhal La Chartreuse de Parme Paris Librairie G n rale Fran aise 1983 p 674 7 Georges Perec Penser Classer op cit p 90 ton 202 avait pour sp cificit la cassonade c est dire un sucre peu raffin produit notamment dans le nord de la France et dans les Flandres Voil le second ris de veau flamand D gorger dans une eau l g rement citronn e Faire partir feu vif dans une grande sauteuse puis baisser la flamme et laisser mijoter Ajouter 250g de champignons de Paris Sa confection ne diff re en rien du premier hormis l accomodation finale en lieu et place d un saupoudrage de cassonade nous avons Envoyer part une sauci re de mayonnaise Cette mayonnaise constitue un marqueur peu pertinent par rapport au titre du plat quand bien m me on se souvient que la coutume dans le nord de la France et en Belgique est de manger des frites avec de la mayonnaise Il s agit donc d une mystification de Perec qui correspondrait pratiquement ce qu il annonce des num rations savoir
501. tue l p e s culi re en lieu et place du flambeau de la libert le corps grand et fort attirant les vents libres du monde pour reprendre le clich libre comme le vent La class matique ambivalente permet l ambigu t puis la recodification du symbole ce qui signifie que l Am rique n est pas ce que l on croit Le grand corps n est ce pas ce Golem hostile plant devant le continent am ricain Il brandit non plus le flambeau qui claire le monde suivant le st r otype mais contre toute attente le glaive s culier qui poursuit de continent en continent tous ceux que l intol rance et la mis re ont chass et chassent encore de la terre o ils ont grandi La lecture perecquienne de Kafka est bien univoque Commentant la pseudo b vue de Kafka qui prend pour un glaive le flambeau universellement connu Bernard Lortholary traducteur de Amerika ou le disparu Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Island op cit p 48 voir aussi Georges Perec Je suis n op cit Ellis Island Description d un projet p 95 103 Franz Kafka Amerika ou le disparu traduction d apr s le dernier tat du texte de Kafka et pr face de Bernard Lortholary Paris Flammarion 1988 3 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Island op cit p 47 Franz Kafka Amerika ou le disparu op cit p 5 399 affirme que ce qui est clair d embl e c est le geste de l auteur r cusant et no
502. tuel petit livre de voeux Pour 1974 partir de proverbes anglais il inventa des jeux de mots particuli rement tordus et il intitula son recueil Les adventures de Dixion Harry Harry Dixion Dixion Harry Dictionary Dictionnaire Nous remarquons les termes employ s par Bellos un rituel petit livre de voeux consid ration qui signale une habitude bien ancr e chez Perec Georges Perec ibid p 185 et L Arc op cit p 93 3 Georges Perec ibid p 185 S Ibid Cocktail Queneau p 149 181 5 Ibid Les adventures de Dixion Harry p 51 65 David Bellos Georges Perec Une vie dans les mots Paris Seuil 1994 p 578 166 r diger chaque ann e son livre de voeux Puis nous passons ensuite la recette des jeux de mots particuli rement tordus et nous pensons au Perec du Je me souviens Je me souviens de Jean Yanne R T L et de ses inoubliables calembours tire ailleurs c est mes galets ce sont d avides et b tes abb s Neuf acteurs sonnent toujours deux fois L abb irrit sort de la douche des enfants et vi C est une recette bien fran aise que celle du calembour Elle consiste r interpr ter les sons qui composent le signifiant oral les phon mes ce qui constitue l analyse scientifique du calembour les variations homophoniques C est effectivement ce qui se passe avec Harry dont Perec se souvient aussi d un premier avatar Je me souviens de van Labibine Osouz
503. ture et autres po mes Paris Hachette 1980 3 Collectif tudes Rabelaisiennes tome XV Gen ve Librairie Droz S A 1980 article de Fran ois Billacois lt Th l me dans l espace et en son temps p 101 anua ma Are 210 prot ge du monde Enferm dans le pi ge du monde Perec selon l expression de Jacques Jouet descend vers le centre vers le sens d une exploration des paradigmes plan taires de la confiance id ologique ce qu est la Th l me Cl mente R union de beaux esprits dont les productions restent cach es il faudra aux th l mites anciens et modernes un auteur comme Perec pour exhiber irr sistiblement une seconde et nouvelle fois leurs crits de tous bords Il saura non seulement les rappeler nos m moires paresseuses mais encore les transformer et les r nover en Th l me cl mente certes mais aussi en Th l me d mente dans l excellence de la diss mination des textes ES 8 Ibid p 112 CHAPITRE IV DES R F RENCES LITT RAIRES A L INTERTEXTUALIT Le moyen fait partie de la v rit aussi bien que le r sultat Il faut que la recherche de la v rit soit elle m me vraie la recherche vraie c est la v rit d ploy e dont les membres pars se r unissent dans le r sultat Karl Marx Georges Perec Les Choses Paris Julliard 1965 p 158 Les Gnocchis de l automne ou R ponse quelques questions me concernant in Je suis n Paris Seuil 1990 p 70
504. tures du monde la po sie est apparue avant la prose On peut donc admirer que par des voies compl tement oppos es la glossolalie Perec rejoigne l enrichissement myst rieux de langues inspir es Il est certes remarquer que les glossolales qui se sont exprim es tant parmi les premiers chr tiens que dans certaines sectes modernes affichent des constructions linguistiques qui manifestent la r p tition des sons la redondance l it ration des phon mes Ils signifiaient par l l troitesse de leur champ de renouvellement phonique Voir ibid p 324 327 35 Ibid p 332 Voir ibid p 332 7 Ibid p 332 160 En choisissant volontairement de se couper d avec l usage d une lettre Perec s assimile aux glossolales qui sont circonvenues dans leur expression par la n cessit d exprimer rapidement dans leurs pri res et suppliques un nombre restreint d id es qui s accomode bien du parc troit de leurs connaissances linguistiques Le professeur Henry rappelle que de langage cr par une glossolale doit reproduire et nous permettre de saisir avec la nettet qui r sulte de l observation directe les proc d s inconscients et subconscients du langage normal Ainsi les proc d s g n r s par la contrainte retrouvent la logique du r ve ce que fait Perec en s astreignant crire sans E La Disparition ou uniquement avec des E Les Revenentes Par cons quent comme le rappelle
505. u G de gimel ou dis de la g om trie Ren Gu non montre Ou ll appara t en outre que la lettre G en tant qu initiale de Geometry a pris la place de son quivalent grec D ce que justifie suffisamment l origine m me du mot g om trie Cette g om trie est la science par excellence celle du Grand G om tre de l Univers savoir Dieu God en anglais o nous retrouvons le G initial ce qui recoupe la science des lettres la S m arabe que Gu non rattache au mot grec s meia pour science des signes en ajoutant dans une note infrapaginale au sujet de la s m qu elle est peu pr s l quivalent du nom de ia gematria kabbalistique mot d origine grecque galement et d riv non de geometria comme on le dit le plus souvent mais de grammate a de grammata lettres De gamma le G grec T grammata la lettre il n y a encore ici qu un pas qui peut tre franchi par l adjonction de la consonne ou par m tath se d un r La myst rieuse lettre h bra que dont Philippe Lejeune propose la solution participe du processus culturel de la s miose jud o grecque conform ment ce qu indique Patrick Imbert propos du principe identitaire Le principe identitaire est en m me temps identification au groupe qui maintient ce principe identitaire Ce principe pourrait tre transf r au niveau individuel Ainsi Perec s identifie par deux fois au J su
506. u le souvenir d enfance Paris Deno l 1975 Georges Perec La Boutique obscure 124 r ves Paris Deno l 1973 TROISIEME PARTIE LA CONNAISSANCE DE SOI CHAPITRE V UNE EXP RIMENTATION DE LA M MOIRE Je me souviens de l amour tout particulier que Georges portait aux albums du Grand Vizir Iznogoud Marcel B nabou Je me souviens de discussions sans fin sur Au dessous du Volcan dans un caf pr s de Saint Sulpice au cours d un hiver particuli rement pluvieux peut tre 1959 ou 1960 Marcel B nabou Je me souviens quand Georges crivait Je me souviens Claude Berge Je me souviens de Georges Perec dans un restaurant essayant de faire croire une jeune fille qui l avait reconnu qu il n tait pas Georges Perec Paul Fournel Je me souviens que Georges Perec tait socialiste Je me souviens de Georges Perec en train de gratter sa barbiche Je me souviens que Georges Perec raffolait de l humour coll gien Je me souviens que Georges Perec arrivait toujours la gare au moins une heure avant le d part de son train Je me souviens de Georges Perec disant C est chiant comme la mort Harry Mathews Collectif Qulipo La Biblioth que oulipienne vol 2 Paris Editions Ramsay 1987 Je me souviens p 87 97 Je me souviens que Philippe Drogoz avait tous les livres de Georges Perec d dicac s sur les rayonnages de son picerie clandestine de la rue Rabelais Montreuil Pierre Siguret
507. u moins accentu e les uns par rapport aux autres je n essaierai pas de lier d organiser ces sorties CL Ji Pourtant dans les frictions in vitables que ces souvenirs peuvent susciter les uns contre les autres nous pouvons tenter de discerner une organisation qui commande la gen se et la s lection des souvenirs Confirmant un programme oulipien les souvenirs peuvent se regrouper selon un syst me bien tabli Il faudra plus probablement d terminer les lois 17 Georges Perec Je me souviens op it index p 123 146 8 Georges Perec La Boutique obscure 124 r ves Paris Deno l 1973 Roland Barthes Les sorties du texte in Philippe Sollers Bataille Colloque de Cerisy Paris Union g n rale d dition U G E 1973 p 49 Le texte comment de Georges Bataille Le Gros Orteil est tir de Georges Bataille Documents Paris Mercure de France 1968 p 75 82 7 Roland Barthes op cit p 4 WT 287 internes qui commandent l quilibre du syst me et qui sont explor es par la th orie Ces lois internes d terminent des points de conflits ou des points de bifurcations qui sont fond s dans le cas des Je me souviens sur une dialectique de la m moire et de l oubli de la mise en avant de la transformation voire de l occultation pure et simple du souvenir derri re une vocation pr texte de type souvenir cran Toute conception dialectique de la m moire recoupe celle du savoir Nous insis
508. ucture di g tique Ce sera l expression du destin kafka en d un tudiant en histoire Gr goire Simpson que tout un chacun a reconnu comme le personnage de La M tamorphose Gr gor Samsa l instar de son mod le et parall lement au syst me de vie voqu par Perec dans Un Homme qui dort l tudiant en histoire qui commence sa carri re comme sous biblioth caire se transforme progressivement en larve humaine pour dispara tre finalement sans laisser de trace hormis quelques bizarres objets personnels D aucuns ne manqueront pas de voir dans ce r cit la fois le redoublement du destin de Gr gor Samsa et une double m taphore de l histoire humaine condamn e s crire et dispara tre l instar du pass laquelle elle se rattache Un autre historien est incarn par un certain Mr J rome lt jeune agr g d histoire et Normalien prestigieux qui apr s avoir t Attach culturel Lahore finira sa carri re comme vieil rudit vivotant d exp dients tels la compilation de fiches sur le clerg espagnol du XVIII si cle ou la traduction de livres pour enfants en Voir Marcel B nabou Vraie et fausse rudition chez Perec in Parcours Perec op cit p 42 43 Voir Georges Perec La Vie mode d emploi op cit pp 299 307 Voir aussi Franz Kafka La M tamorphose Paris Gallimard 1955 Voir aussi Georges Perec Entretien avec Gabriel Simony pr face de Patrice Delbourg de
509. ue en fran ais courant Nous pouvons donc laborer un m talangage nous permettant d analyser ce type de discours fond sur une langue d coulant directement de la langue naturelle Voici quelques unes de ces caract ristiques parmi les plus remarquables Vocabulaire scientifique sp cialis restreint et sp cifique au champ disciplinaire du type phagocyte macrophage Emploi de langues trang res ici sous forme d expressions latines du type in vitro cet inventaire manque videmment l anglais non employ ici cause de F8 Caroline Brazeau tude de la cin tique de l infection caus e par Streptococcus suis s rotype 2 dans les cellules phagocytaires in ibid p 36 e ex 75 la sp cificit de l Association scientifique Bernard Magn rappelle la domination exclusiviste de l anglais au sein des revues scientifiques internationales refl tant la monopolisation de cette langue par les chercheurs Syntaxe simplifi e l extr me afin d atteindre les crit res scientifiques cart siens de la clart et de la concision Redondance n cessit e cependant pour atteindre la pr cision optimum Enthym misme et descriptions op ratoires de type La phagocytose et la survie intracellulaire des bact ries sont tudi es en microscopie optique fluorescence CG w Usage g n reux des donn es chiffr es et lettr es et des pourcentages Cet usage est n cessaire pour at
510. ue les d bats rapport s selon la fonction id ologique du narrateur pour reprendre cette expression de Genee Les caract ristiques des savants d peints par Perec correspondent pleinement aux conceptions socio conomiques courantes mieux m me on pourrait dire qu elles renforcent la vision st r otyp e du savant telle que per ue dans le monde moderne Par exemple les savants sont tous polyglottes et atteints de boulimie intellectuelle Ainsi Carel Van Loorens parlait couramment une bonne douzaine de Langues tandis ou ven quatre ans L on Marcia lut un bon millier de livres et apprit six langues l anglais l allemand l italien l espagnol le russe et le portugais qu il ma trisa en onze jours Si Carel Van Loorens n a pas autant lu que L on Marcia il est l auteur d innombrables trait s sous forme de notes ind chiffrables concernant indiff remment l arch ologie l gyptologie la typographie projet d alphabet universel de linguistique la m decine la politique l information l alg bre num rique la physiologie l optique la physique la chimie Cette curiosit universelle des savants est accompagn e d une m moire exceptionnelle qui enregistre et conserve tous les l ments que son d tenteur a examin s propos de L on Marcia nous apprenons qu il lui Voir G rard Genette Figures III Paris Seuil 1972 p 263 Georges Perec La V
511. ui se racontent en reprenant aux autres des pisodes d une vie qu ils n ont pas v cus Toutefois il ne se produit pas dans ce cas de division entre di g se et m tadi g se comme il pourrait en exister entre histoire premi re et histoire seconde dans le roman tiroirs Nous assistons plut t l embo tement de deux di g ses qui demeurent sur un strict plan d galit ce qu constitue toute l habilet de Perec Il reprend le r cit de Kafka sans modifier sa propre histoire ni annuler la nouvelle de son mod le Comment cela se passe t il au niveau de l nonciation Bernard Magn avance qu il se produit une hi rarchisation des instances nonciatives ce qui n existait pas pour chacune des narrations respectives l origine Ce critique montre fort justement que l insertion de l impli citation n est possible que si existe un op rateur de l insertion que j appellerai le rapporteur et dans le discours fictionnel l acteur qui occupe la place actantielle de Ibid p 74 Ibid p 74 10 Tbid p 74 PT 246 rapporteur au plan de l implicite est videmment le scripteur Nous avons donc nouveau un d doublement entre deux univers di g tiques ce qui permet la fois une occultation de lunivers di g tique de l impli citation absorb dans celui du r cit premier mais encore une exhibition de l impli citation dont l univers di g tique recouvre galement celui du
512. ui sont consacr es l audio visuel Une grande absente de ces rubriques et notamment dans le domaine pr cit est la t l vision mais nous savons que Perec n avait pas la t l vision Il n emp che que cet index lance les bases premi res de la culture populaire il est utile certes pour jouer avec le recueil et reconstituer des trames possibies mais il n puise pas loin de l les possibilit s innombrables d une culture qui 5 Voir David Bellos Georges Perec une vie dans les mots Paris Seuil 1994 Pr e o 334 ne serait ni famili re ni vulgaire mais plut t lucide et constructive Tandis que la culture de masse vise un public cible gt la culture populaire s adresse un public d j structur par ses propres valeurs Le recueil Je me souviens progresse vers la saturation culturelle par la masse des symboles qu il draine Il r v le apparemment un texte faibles contradictions Ce sont l en effet les objectifs de Perec qui vise l infinie l g ret du texte Fid le sa tentative de banalisation du souvenir il insiste sur le fait que le souvenir est quelque chose d encore plus mince d inessentiel de tout fait banal miraculeusement arrach son insignifiance retrouv pour un instant suscitant pendant quelques secondes une impalpable petite nostalgie Les cultur mes accept s et choisis comme signifiants par Perec ne sont pas ceux que l id ologie bourgeoise dominante a
513. uleuse encore et va g n rer en lui son projet compensateur Cinoc lisait lentement notait les mots rares et peu peu son projet prit corps et il d cida de r diger un grand dictionnaire des mots oubli s mais pour sauver des mots simples qui continuaient encore lui parler On peut dire que dans le cas de Cinoc la biblioth que g n re le tissu narratif C est l abondance des unit s du savoir qui permet de passer d une chelle une autre pour construire le r cit Le livre incite Cinoc chercher des mots qu il va int grer lui m me son dictionnaire Cette pratique s inscrira dans ce que Jean Guy Meunier appelle les fonctions praxologiques Ils les personnages assimil s aux tres vivants tudi s par la science utilisent l information recueillie dans la poursuite de buts Cinoc manifeste toutes les potentialit s du savant particuli rement lorsqu il consacre plus de temps la biblioth que qu au laboratoire La biblioth que constitue en effet le lieu privil gi de la diffusion du savoir bien s r au niveau Georges Perec La Vie Mode d emploi op cit p 363 Jean Paul Sartre La Naus e Paris Gallimard 1938 p 52 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 363 Jean Guy Meunier Narration et cognition in La Recherche litt raire objets et m thodes sous la direction de Claude Duchet et St phane Vachon Montr al XYZ diteur 1993 p 493 Voir aussi J
514. une langue donn e et ce d autant plus s il s agit d une langue sacr e comme le grec l aram en ou l h breu Myst re dont le moindre n est pas celui de la proscription du nom divin chez les h breux L interdiction de l emploi d une lettre voire d un nom entier consiste se retrancher du domaine ordinaire des vivants la mort nous dit la fin du roman Il faut atteindre la pr tention sublime d un tat mystique d un tat second pour se conformer aux rites initiatiques Toute infraction pourrait en effet tre punie de mort De l proviennent les aspirations subconscientes des glossolales la langue retourne la langue pour sauver la vie Comme toutes les formes d abstinences exig es par des pratiques religieuses la suppression de la lettre est un exercice d l vation du fid le vers un divin exigeant Comme si Dieu en privant ses adorateurs du moyen complet de le servir appr ciait davantage le culte qui lui tait rendu Exigence d mesur e la r tention de la lettre conduirait la folie puis la mort conclusion in vitable que nous retrouvons la fin de La Disparition Georges Perec La Disparition op cit p 305 3 Voir ibid p 305 163 3 2 LUDISME FORMEL LA TRAD N HOMOPHONIQUE Manipuler le langage ne consiste pas uniquement rassembler le beaucoup dans le peu mais encore faut il savoir communiquer La complexit infinie de notre entourage de notre environnem
515. unt e Kafka par Perec rel ve de l intrusion de i univers extradi g tique dans les univers di g tique et m tadi g tique C est le narrateur anonyme de La Vie mode d emploi qui nous fait partager son exp rience de lecteur mais ce pourrait aussi tre le cas du narrateur TT Voir Algirdas Julien Greimas S mantique Structurale Paris Larousse 1966 p 181 Bernard Magn Perecollages 1981 1988 op cit 249 intradi g tique repr sent par l crivain sp cialis que Perec a mentionn pr c demment Puisque l histoire du trap ziste provient d un nonciateur r el appartenant l univers extradi g tique son apparition au sein de La Vie mode d emploi constitue donc une m talepse selon la terminologie emprunt e Genette Or nous avons affaire une m talepse historique nous pouvons cependant affirmer qu il s agit plut t d une pseudo m talepse puisque le narrateur anonyme semble c der la place l crivain sp cialis qui constitue le second narrateur Concernant le deuxi me niveau nous mentionnons pour m moire les checs successifs de Rorschash qui le conduisent renoncer la carri re artistique Ainsi l actant sujet Rorschash h ros d une qu te oblig e de la gloire s identifie un acteur qui change de r le d artiste il devient impr sario D s lors l actant objet n est plus la gloire mais le trap ziste que Rorschash repr sente Si nous comparons m
516. ur assigne de nouveaux objets en redistribue les cat gories redessine leurs relations tant internes qu externes Il faut sans doute voir l l un de ses effets les plus f conds car elle est ainsi amen e d signer les forces de ces savoirs mais aussi bien leurs obscurit s ou leurs potentiels inaper us De cette dissolution des savoirs et de leur r organisation Bernard Magn nous donne un excellent exemple lorsqu il analyse le jeu des TT Georges Perec Cantatrix Soprani a L et autres crits scientifiques op it p 117 Voir Bernard Magn La Cantatrice et le papillon propos de deux pastiches d article scientifique chez Georges Perec in P ll 1981 1988 op it p 191 206 3 Voir ibid p 200 c est l auteur qui souligne 4 Laurence Dahan Gaida Du savoir la fiction les ph nom nes d interdiscursivit entre science et litt rature loc cit p 482 ue Ba 73 connotateurs contradictoires le d calage entre l appareil scientifique et sa repr sentation parodique par Perec savoir les bibliographies et particuli rement le seul organigramme de Cantatrix sopranica LI propos de ce d calage il crit en effet Le m me ph nom ne peut tre constat dans Cantatrix avec un organigramme dont le s rieux est imm diatement pulv ris par la pr sence des sigles qu il contient SNCF Pet T MLF ONU etc Ce sont tous ces d calages entre le texte sc
517. ur chameau Ka me los De plus le mot aram en pour corde et pour chameau est gamla Certains orientalistes pensent que la lettre gimel en h breu gamal en aram en et gamma en grec vient de son aptitude repr senter et la corde et le cou du chameau voir la th orie de G s nius De l conclure que le chas de l aiguille est aussi l oeil du chameau et que la corde est celle qui sert l attacher il n y a qu un pas Il se produit une assimilation iconique entre l oeil chas de l aiguille et le fil corde qui sert lier l animal Cette conclusion ne fait qu ent riner l une de celles de Northrop Frye lorsqu il se prononce sur la m taphore biblique en affirmant que c est une conception de l identit qui va bien au del de la juxtaposition parce qu il n y a plus deux choses mais une seule sous deux aspects Les m canismes identitaires ne sont que des passages de l Un l Autre gr ce aux processus s miotiques 7 La Sainte Bible traduite en fran ais sous la direction de l cole Biblique de J rusalem Paris ditions du Cerf 1955 p 1315 Evangile de Mathieu 19 24 voir aussi les vangiles synoptiques Marc 10 25 et Luc 18 25 7 Liddell et Scott A Greek English Lexicon London United Editions 1903 p 231 Northrop Frye Le Grand Code la Bible et la litt rature Paris Seuil 1984 p 129 364 Illustrons encore ces m canismes par la seconde filiation celle d
518. urs interminablement La distribution des galeries est invariable Jorge Luis Borges Fictions La Biblioth que de Babel traduit de l espagnol par P Verdevoye Ibarra et Roger Caillois Paris Gallimard 1957 et 1965 Que faire pour cela D abord revenir cette attitude na ve ch re tous les radicalismes philosophiques Descartes Bergson Husserl Feignons que je ne sache rien Jean Paul Sartre Situations I Paris Gallimard 1947 Ce n tait pas plus difficile en somme que pour les lecteurs de La Biblioth que de Babel de trouver un livre donnant la cl des autres Georges Perec Esp ces d Espaces Paris ditions Galil e 1974 Ce qu il y a de plus pitoyable au monde c est je crois l incapacit de l esprit humain relier tout ce qu il renferme Nous vivons sur une le placide d ignorance environn e de noirs oc ans d infinitude que nous n avons pas t destin s parcourir bien loin Les sciences chacune s vertuant dans sa propre direction nous ont jusqu pr sent peu nui Un jour cependant la coordination des connaissances parses nous ouvrira des perspectives si terrifiantes sur le r el et sur l effroyable position que nous y occupons qu il ne nous restera plus qu sombrer dans la folie devant cette r v lation ou fuir cette lumi re mortelle pour nous r fugier dans la paix et la s curit d un nouvel obscurantisme Howard Phillips Lovecraft
519. us appuierons sur les travaux de Fran oise Van Rossum Guyon au sujet de Michel Butor propos de la citation et sur ceux de Bernard Magn au sujet de Georges Perec propos de ce qu il appelle les impli citations puisque nous rattachons la probl matique de l intertextualit celle de la citation Dans ces relations entre plusieurs textes que constitue cette probl matique nous verrons trois tapes 1 La r f rence un texte pr existant selon Fran oise Van Rossum Guyon ou le choix et le d coupage des textes originaires c est ce que Bernard Magn appelle le texte source 2 Les modalit s de son insertion dans le texte d accueil o Bernard Magn distingue la suture ou la rupture 3 Le choix et la situation du texte d accueil ou texte r cepteur ou encore comme l appelle Bernard Magn le texte cible Nous admettons donc trois niveaux d int gration du texte source dans le texte cible Fran oise Van Rossum Guyon Aventures de la citationchez Butor in Michel Butor Colloque de Cerisy Paris Union G n rale d ditions 1974 pp 17 39 Bernard Magn Perec ollages 1981 1988 Toulouse Presses Universitaires du Mirail Toulouse 1989 p 108 Fran oise Van Rossum Guyon Aventures de la citation chez Butor in Michel Butor Colloque de Cerisy op cit p 25 5 Bernard Magn P Il 1981 1988 op cit p 108 Fran oise Van Rossum Guyon Aventures de la citation chez M
520. us invitant r cuser ce qu on a appris propos du pays o d barque son h ros Ce qui caract rise l immigrant c est donc son hyperlucidit voil e de dons visionnaires que Perec nous soumet en concluant sur cette premi re vision du jeune Karl Rossmann tre migrant c tait peut tre tr s pr cis ment cela voir une p e l o le sculpteur a cru en toute bonne foi mettre une lampe Et ne pas avoir compl tement tort Comme le Golem frapp d effacement par la lettre le mythe am ricain s effondre dans ce glaive qui pousse manu militari vers la Porte d Or des millions d migrants paralys s de visions Ces immigrants qui arrivent avec les meilleures intentions du monde ne sont pas des oies blanches Ils portent la violence en eux m mes Ils ha ssent l autorit qui les a accabl s Ils fuient les dictatures Russie tsariste Allemagne nazie Italie fasciste mais ils aiment l ordre et la force Ce qu ils ha ssent ils le gardent n anmoins en eux et ils le retrouvent l o ils vont C est ainsi que le parall le entre les syst mes nazi et fasciste et l accueil am ricain s impose progressivement Perec Paul Schwartz nous le signale His fear of and fascination with manifestation of fascism a fear and a fascination which mark in many forms his fiction as well as his autobiographical works draw him perhaps unconsciously towards these images of cattle runs and the branding of immigrants
521. ussi ce qu il appelle la pens e vicinale Cette pens e est cens e associer aux plaisirs de la vie l ensemble des observations du quotidien qui par nature sont purement transitoires Maffesoli affirme encore ceci C est donc une r volution copernicienne que nous convie la pens e vicinale celle qui valorise le concret les petites choses la banalit Banalisation du monde et h donisme de l imm diatet vont donc de pair Les caract ristiques de l insignifiant selon Maffesoli sont dont les suivantes le minuscule le r p titif l anodin le frivole selon les ordres dimensionnels et sentimentaux ce sont aussi le fugitif l ph m re le transitoire selon l ordre temporel le futile le trivial l anecdotique selon 7 Voir Georges Perec Approches de quoi in L Infra ordinaire op cit p 9 2 Ibid p 11 Michel Maffesoli Au creux des apparences pour une thique de l esth tique Paris Plon 1990 p 90 100 les ordres logique et rationnel Face aux consid rables exigences d un monde en complexification croissante la recherche de l insignifiant peut constituer un tonnant palliatif A propos de l oeuvre de Walter Benjamin Michel Maffesoli affirme qu elle chappe au politique et entend montrer comment la magie du d tail ou futile peut tre un moyen d outre passer les contradictions caract ristiques du monde moderne En mettant l accent sur l infime sur le parcellai
522. utique obscure o il souligne le r le des Voir Anne Roche L auto bio graphie in Collectif Cahiers Georges Perec n 1 op cit p 70 71 Voir Georges Perec Les gnocchis de l automne ou r ponse quelques questions me concernant in Je suis n Paris Seuil 1990 p 67 74 7 Georges Perec Un Homme qui dort op cit Georges Perec La Boutique obscure op cit 28 lettres dans sa vie personnelle Ainsi en est il du r ve consign comme souvenir du S Z de Roland Barthes En se d finissant comme crivain qui se prive de ses lettres pour crire Perec exp rimente une personnalit apte une certaine disparition l instar de l ouvrage qui porte ce titre Ainsi toute la technique lipogrammatique qui est d velopp e dans La Disparition dans son grand lipogramme en a What a man et m ine dans son Histoire du lipogramme tend d montrer comment la lettre contribue la d finition identitaire Plus encore ce sera dans W ou le souvenir d enfance qu il parviendra ie mieux affirmer cette importance de la lettre voire de symboles fort anciens pour rassembler les l ments de sa propre identit la fa on des kabbalistes du Moyen ge Perec voudra raconter son histoire familiale et nationale par le jeu des lettres et des signes qui la d finissent On peut alors tablir un parall le entre Perec et le savant Cinoc de La Vie mode d emploi comme le fait David Bellos en si
523. uviens Paris Hachette 1978 713 Georges Perec W ou le souvenir d enfance Paris Deno l 1975 407 des proc d s et des sp culations des rabbins de l Antiquit et du Moyen ge qui s interrogeaient sur la lettre et l esprit Ainsi il a su employer des lettres comme W ou X pour d finir son identit ou encore des symboles comme la croix gamm e ou l toile davidique pour d crire le drame de sa famille Il retrouve encore la logique du r ve dans La Boutique obscure pour retracer la constitution de sa personnalit II voque encore sa destin e familiale dans le film qu il r alise avec Robert Bober R cits d Ellis Island histoire d errance et d espoir Ainsi Perec r ussit exp rimenter de multiples formes d autobiographie qui manifestent toutes la ma trise qu il tablira de la connaissance de soi Par son travail minutieux et obstin par son go t de l rudition par sa pratique de voies nouvelles Perec a su obtenir de plus grands succ s que par la mise en oeuvre de l exp rimentation scientifique S il fut en qu te de nombres de savoirs in dits qu il ne trouvera jamais par contre il r ussit laborer un programme pour atteindre une connaissance de soi particuli rement adapt e sa qu te personnelle H Georges Perec La boutique obscure Paris Deno l 1973 7 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Island Histoires d errance et d espoir Paris dition
524. uvre lui celui du langage Il lui manquait en effet une syst matisation et une m thode pour entreprendre ses recherches personnelles Je commence par produire une tude tr s rudite de l histoire du lipogramme Puis il crit coup sur coup ses deux romans lipogrammatiques La Disparition et Les Revenentes qui sont les fruits de cette tonnante exp rimentation Mais ses manipulations sur les lettres ne s arr tent pas l Il crit aussi plusieurs s ries de courts textes homophoniques o il d double les signifiants pour nous livrer des textes originaux En outre sa passion de la combinatoire lui permet bien s r d crire La Vie mode d emploi mais encore bien d autres textes plus modestes tels que les 81 fiches cuisine usage des d butants 2 I crit encore une s rie de textes ludiques o il confronte ses aspirations personnelles Marcel B nabou Les Ruses du plagiaire exemples oulipiens in Le Plagiat op cit p 26 Georges Perec Histoire du lipogramme in Collectif Quli li tentielle Paris Gallimard 1973 pp 73 89 Georges Perec La Disparition Paris Deno l 1969 Georges Perec Les Revenentes Paris Julliard 1972 et 1991 TT Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 Georges Perec 81 fiches cuisine l usage des d butants in Penser Classer Paris Hachette 1985 p 89 108 277 une utopie plus g n rale Ainsi que l on peut le const
525. ux endroits d sign s Deux n ologismes coup sur coup Une ambulance pimponnante adjectif form sur le verbe du premier groupe pimponner lui m me constitu partir de l onomatop e pin pon qui caract rise plut t les v hicules des pompiers que ceux des h pitaux Cargaisons de japonais photophages form partir des deux radicaux grecs photo la lumi re et phagein manger Les Japonais ne sont pas des mangeurs de lumi res ce qui constituerait un r gime alimentaire peu co teux mais plut t le n ologisme d crit ici l habitude bien ancr e chez les Japonais de tout avaler dans leurs appareils photographiques habitude laquelle Perec tait videmment bien sensible Le transfert du st r otype Les scouts quittent Saint Sulpice en file hindoue L clatement du st r otype en double isotopie indienne hindoue d crit satiriquement le processus de la marche des boy scouts en filant doux aussi L humour jouant sur l ironie r p titive Les feux passent au rouge cela leur arrive souvent 1 BI Ibid p 41 132 Ibid p 41 15 Thid p 47 3 Thid p 49 131 La co ncidence oppositionnelle Passe un homme qui marche le nez en l air suivi d un autre homme qui regarde par terre Ainsi les possibilit s du site se r v lent in puisables non seulement pour une observation du banal Il se pr te encore aux multiples transformations que la consignation par l cr
526. veau roman et ce que j ai essay de faire Robbe Grillet est tout entier du c t du langage d not comme dit Roland Barthes et moi je serais tout entier du c t du langage qui entoure les choses de ce qu il y a en dessous de tout ce qui les nourrit de tout ce qu on leur injecte Bref Perec nous d voile ici sa vocation pour la connotation autrement dit son voeu d tablir une description subjective En effet la description romanesque atteint ce r sultat inou une soci t chosifi e compl tement r ifi e Ainsi bient t au sein m me de ce monde de choses palpables et visibles se produisent des cha nes de r actions et d interf rences tout aussi remarquables bien que plus t nues Il s agit de la conjonction des textes qui constitue un univers unit galement soumis l inventaire et l imbroglio eux m mes pr textes la logique combinatoire ce qui repr sente un nouveau r seau du roman Les Choses tabli un niveau second savoir celui de l intertextualit 7 Jean Duvignaud Georges Perec Prix Renaudot 1965 in Le Nouvel Observateur Paris 24 30 novembre 1965 p 27 230 C est Georges Perec lui m me qui a voqu la gen se de son roman Les Choses Lors d une conf rence prononc e le 5 mai 1967 l invitation de la section d tudes fran aises de l Universit de Warwick Coventry Grande Bretagne il s est expliqu en ces termes Alors
527. vec Robert Bober montrent que les m canismes constitutifs de l identit individuelle sont structur s par l institution Les muitiples processus exp rimentaux que Perec a su mettre en oeuvre dans l tablissement de son identit t moignent de son succ s dans ce champ originel ou eet celui de la connaissance de soi Bien souvent on remarque que Perec ne recherche pas vraiment les manifestations du savoir comme connaissances sp cifiques Il chappe toutes les tentatives d un talage d rudition quel qu il soit Il existe plut t chez lui un double m canisme qu il met en oeuvre dans sa production d une part celui qui consiste g n rer des savoirs par le jeu des contraintes et des combinatoires et d autre part une volont de circonscrire ses sujets par l exhaustivit des connaissances Quel usage fera t il ensuite de toutes ces connaissances accumul es Nous avons remarqu ou au sujet de la connaissance du monde ces savoirs sont principalement fictifs et s ins rent dans le fictionnel C est qu en effet Perec transforme toute forme de connaissance par le ludique et la fiction D o cette Georges Perec La Boutique obscure Paris Deno l Gonthier 1973 L expression autobiographie nocturne a t formul e par Bernard Magn lors de la conf rence qu il a donn e Montr al le 6 octobre 1996 Georges Perec et Robert Bober R cits d Ellis Island Histoi errance et d ir Paris Sorbier
528. vec le scripteur C est ce dernier qui introduit une nouvelle notion temporelle en rapport avec l acrobate D sormais il va passer le jour et la nuit sur son trap ze L isotopie du temps tait annonc e par Perec dans ses pr paratifs de suture l acrobate passait d sormais plusieurs heures d affil e sur son trap ze Consid r comme l actant objet le trap ziste d veloppe alors une nouvelle potentialit fonctionnelle en rapport avec une performance spatio temporeile Nous pouvons donc affirmer que les trois niveaux de l analyse qui s entrecroisent ici savoir le narratif l actantiel et le s miologique convergent pour diriger notre attention sur le r le de connecteur polydi g tique actantiel et s miotique que joue paradoxalement ici la double isotopie de l espace temps C est justement cause de ce r le peu courant que Perec fait jouer la configuration spatio temporeile de la narration qu il peut dissimuler au mieux la double p n tration des niveaux di g tique et m tadi g tique En effet l univers extra textuel du discours fictionnel de l autre en U Ibid p 71 et Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op cit p 53 TT Voir Bernard Magn Perecollages 1981 1988 op it p 75 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 71 et Franz Kafka La Colonie p nitentiaire et autres r cits op it p 53 Georges Perec La Vie mode d
529. vement conscience de l immensit de la t che accomplir Cela le conduit un nouveau processus de questionnement il d couvre ce que nous pouvons appeler le constat interrogatif M me ce que l on peut consid rer comme r el provoque le doute Voici quelques exemples de ce vertige brutal et soudain que suscitent chez Perec les surprises de la r alit Les cloches de Saint Sulpice s arr tent de sonner tait ce les v pres Inculture religieuse M connaissance des usages de la catholicit La nuit l hiver aspect irr el des passants Double factorisation des param tres la morte saison et l obscurit provoquent des illusions Ibid pp 25 26 Cette remarque est imprim e en italique Voir Catherine Kerbrat Orecchioni L Enonciation de la subjectivit dans le langage op cit pp 133 135 S Voir ibid pp 133 135 Georges Perec Tentative d puisement d un li isien op cit p 37 Voir Catherine Kerbrat Orecchioni ibid p 142 Georges Perec ibid p 38 DI _ Tout au fond H tel R camier il y a maintenant plusieurs fen tres allum es Position incertaine de l observation incertitude de ses conclusions Passe un homme qui porte une maquette d architecte est ce vraiment une maquette d architecte a ressemble l id e que je me fais d une maquette d architecte je ne vois pas ce que a pourrait tre d autre Les difficult s d
530. viwe les nombreuses p rip ties de son roman Ainsi que le rappelle Marcel B nabou propos des projets de Perec o l rudition est lev e au rang de d clencheur d critures on peut dire reprenant B nabou que le savoir est aussi un d clencheur d aventures Par exemple d s que Marcel Appenzzel eut termin sa formation aupr s de Malinowski il voulut se lancer dans l tude des tribus sauvages qui avaient suscit cette vocation Le projet est li au savoir non pas uniquement gr ce la comp tence acquise et n cessaire mais surtout gr ce la d termination qu il suscite Pouss e par la fi vre du savoir Appenzzel s embarque pour Sumatra o il poursuivra pendant cinq ans la myst rieuse tribus des Anadalams appel s encore Orang Kubus ou Kubus La volont de l exotisme n a d gale que les multiples p rip ties que va conna tre notre h ros pour s apercevoir que l objet de sa qu te c est dire les Kubus ne veulent rien savoir de la civilisation et qu ils le fuient comme la peste Cette attitude affiche la revanche de l ignorance sur les ressources du savoir scientifique Ses p rip ties fond es sur les connaissances ethnologiques Marcel B nabou Vraie et fausse rudition chez Perec in Parcours Perec op cit p 45 57 d Appenzzel sont les suivantes zone de localisation et de vie des Kubus genre de vie pr suppos s de l attrait des sauvages pour les cadeaux tra
531. vons d j rattach s telle ou telle discipline scientifique La lex matique des titres renvoie une vaste op ration satirique Il s agit de stimuler l imagination du lecteur en exhibant le conflit logique du genre ici le titre confront un d calage lex matique Les savants selon ces histoires sont amoureux na fs incompris et frustr s tout ce qui vient contraster avec la solidit de leur fonction sociale et l accr ditation qu ils re oivent dans le monde contemporain Conform ment l tude de Michel Pierssens sur l pist mocritique on peut dire que les m canismes d change entre les connaissances et la fiction fonctionnent sur la base de deux processus rh torico narratifs la figuration et l argumentation Nous pourrons int grer la figuration l ensemble des descriptions de savants qui cautionnent leur appartenance au milieu scientifique tandis que les syst mes argumentaires Ibid p 691 694 Rappel de quelques unes des histoires racont es dans cet ouvrage le chiffre renvoie au chapitre o cette histoire appara t g n ralement pour la premi re fois mais pas forc ment dans sa totalit On peut d nombrer 107 histoires dont quinze sont plus ou moins li es des savants ou des rudits Voir Michel Pierssens Savoirs l oeuvre Essais d pist mocritique Lille Presses Universitaires de Lille 1990 p 167 46 concernent aussi bien les interactions di g tiques q
532. vy 1889 258 p 440 ROBERT Marthe Roman des origines et origines du roman Paris Bernard Grasset 1972 364 p ROBIN R gine il l origine l n n moins Saint Denis Presses Universitaires de Vincennes 1993 264 p ROUSSEAU Jean Jacques Essai sur l origine des langues Bordeaux Guy Ducros Editeur 1968 284 p SANTERRES SARKANY St phane Th orie de la litt rature Paris Presses Universitaires de France Que sais je 1990 127 p SARTRE Jean Paul L tre et le n ant Paris Gallimard 1943 691 p SARTRE Jean Paul Qu est ce que la litt rature Paris Gallimard 1948 307 p SARTRE Jean Paul Situations I Paris Gallimard 1947 335 p SARTRE Jean Paul Situations II Paris Gallimard 1948 330 p SARTRE Jean Paul Situations II Paris Gallimard 1949 311 p SARTRE Jean Paul Situations IV Paris Gallimard 1964 459 p SARTRE Jean Paul Situations V Paris Gallimard 1964 253 p SARTRE Jean Paul Situations VI Paris Gallimard 1964 384 p SARTRE Jean Paul Situations VII Paris Gallimard 1965 342 p SARTRE Jean Paul Situations VIII Paris Gallimard 1966 378 p SARTRE Jean Paul Situations IX Paris Gallimard 1967 418 p SCARPETTA Guy loge du cosmopolitisme Paris Bernard Grasset 1981 304 p SCARPETTA Guy L Impuret Paris Bernard Grasset 1985 389 p SAUSSURE Ferdinand de Cours de linguistique g n rale Paris Payot 1982 520 p SCHAEFFER Jean Marie Qu
533. x cadres th matiques de la r flexion au si cle des Lumi res conform ment une volution de l pist m Pour Vauvenargues ce seront donc les instances philosophico morales qui captent l attention Luc de Clapiers Marquis de Vauvenargnes Oeuvres compl tes de Vauvenargues pr face et notes de Henry Bonnier Paris Hachette 1968 15 bid passim Georges Perec Penser Classer Paris Hachette 1985 K Des aphorismes p 175 286 du philosophe la raison la passion la vertu la gloire l amour la justice la fortune etc On pourrait entrer dans le recueil de Vauvenargues Pour Perec ces entr es du texte seront celles d une culture populaire cin ma acteurs de cin ma chansons salle de cin ma souvenirs d cole missions de radio faits divers folklore enfantin Music Halt politique sports etc Ce sont ces entr es qui vont nous faire transiter par un ensemble herm tique obscur la boutique obscure et du r ve du texte livr notre r flexion Nous devons alors envisager les sorties du texte un peu la mani re de Roland Barthes lorsqu il parle de Bataille Voici un texte de Bataille Le Gros Orteil Ce texte je ne vais pas l expliquer Je vais seulement noncer quelques fragments qui seront comme les sorties du rextes TT Barthes toujours attach aux fragments nous explique ensuite ce qu il fera de ces sorties Ces fragments seront en tat de rupture plus o
534. x caract ristiques de l imitation de Flaubert par Perec D une part notre auteur a repris des images chez Flaubert et d autre part il a construit ses phrases sur le m me rythme ternaire que le romancier du XIX si cle Nous ne chercherons pas dans le texte des Choses les phrases que Perec a piqu es Flaubert ni les correspondances entre Les Choses et L ducation sentimentale laissant ce soin un lecteur plus policier que nous Ce sont plut t les domaines de l image et de la phrase qui retiendront notre attention car c est ce niveau que nous pourrons rep rer le libre jeu des connecteurs Nous avons donc choisi deux passages chez chacun des romanciers pour pouvoir les comparer librement dans le jeu des images et des constructions phrastiques Ils sont tir s bien s r des Choses pour Perec mais de Madame Bovary pour Flaubert En effet c est en d calant le mod le que nous pourrons certainement le mieux r aliser une analyse objective des effets de l intertextualit Le passage retenu dans Les Choses est situ au chapitre 10 et voque une r verie des deux h ros du roman J r me et Sylvie Quant Flaubert nous avons choisi galement une r verie d Emma alors qu elle songe ses amours avec Rodolphe au chapitre XII du roman Gustave Flaubert Madame Bovary Paris ditions Malesherbes 1947 2 Perec Flaubert Georges Perec Les Choses op cit pp 112 114 Gustav
535. xactement selon ce que nous avons compt De cette masse norme de lectures merge cependant Kafka que Perec pour des raisons subjectives autant intellectuelles que F Georges Perec La Vie mode d emploi Paris Hachette 1978 Julia Kristeva S m iotik Recherch OP EI p 175 Georges Perec La Vie mode d emploi op cit p 695 cette liste est intitul e lt Post scriptum et introduite par des parenth ses et cette annonce Ce livre comprend des citations parfois l g rement modifi es de suit la liste alphab tique des auteurs ainsi r employ s IT Warren E Motte Jr The Poetics of Experiment a study of the work of Georges Perec Lexington French Forum Publishers 1984 pp 115 118 mge oi mu age 240 sentimentales et motionnelles consid re comme son mod le comme un r servoir privil gi pour sa cr ation Dans un entretien donn Gabriel Simony il reconna t la dette qu il a contract e l gard de Kafka Parlant du r cit qui captive ici notre attention celui du trap ziste Perec r pondait l allusion d un journaliste L histoire du trap ziste est en grande partie de Kafka Il y a beaucoup de choses du livre qui viennent d autres livres Cela fait partie d une image du puzzle aussi Ce qui nous int resse c est le mode d int gration du conte kafka en au r cit perecquien Marcel B nabou parle de l emprunt pur et simple Cette pratique s inscrit da
536. ypes Ce sont tous les souvenirs que tout un chacun garde propos de sport de politique de chanson de nourriture de souvenirs de vacances Ces sollicitations th matiques correspondent aux grandes fonctions argumentatives du programme oulipien qui commandent les rassemblements des souvenirs Quant aux variables que nous ne Voir Marcel Mauss Sociologie et An logie op cit voir Georges Perec Esp ces d espaces op cit la page 29 Perec fait r f rence Marcel Mauss et ses analyses des Techniques du sommeil Marcel Mauss ibid p 378 332 connaissons pas elles dirigent la s lection vidente des souvenirs Les affinit s s lectives qui s tablissent entre les souvenirs repr sentent les interf rences param triques d un programme oulipien On se souvient que Philippe Lejeune comparait encore le recueil de Perec une usine de s paration isotopique Cette s paration des souvenirs aboutit finalement au surgissement d amalgames plausibles de traces m morielles Mais comme Roland Barthes propos des sorties du texte nous n envisageons pas d imposer une formule unique de relations mais plut t de laisser se d gager toutes sortes d affinit s lectives possibles Il s agit donc d op rer une s lection des entr es du recueil de Georges Perec pour en reconstituer les l ments d une culture populaire videmment le premier instrument de cette solution pourrait tre constitu par l index M

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