[halshs-00226409, v1] Le capitalisme cognitif
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1. quat des proc dures de type individualiste lorsque sont en jeu des conomies sociales d chelle 1968 p 233 Dans le cas des connaissances produites par un syst me d enseignement et de recherche le groupe au niveau duquel doit s effectuer l internalisation est national L enjeu central du capitalisme cognitif est celui des modes de r gulation de l innovation et de la cr ativit c est dire du montant et de la nature des ressources mobilis es des orientations des investissements en innovation probl mes thiques cologiques et de la r partition des droits de propri t Dans un syst me o le profit est particuli rement incertain o il est virtuel et futur un horizon pas toujours rapproch et dans lequel par cons quent les questions d information et relatives aux arguments de valorisation sont strat giques la r partition des profits actuels n est pas plus strat gique que celle de la r partition des droits de propri t Non seulement les droits patrimoniaux de type financier mais videmment les droits de propri t intellectuelle aussi Bien videmment les contraintes d origine institutionnelle ou politique p sent sur la valorisation de ces droits et sur l orientation de l investissement Dans le capitalisme cognitif beaucoup plus que dans le 12 C Jessua cite ce propos un article de P Mass dans lequel on peut lire L appr ciation de l entreprise est par la force des choses un juge2. ann es soixante dix ont d termin l essor d une intellectualit diffuse et la crise du capitalisme industriel en posant les jalons d un mode de d veloppement alternatif 3 La tension centrale du capitalisme cognitif L une des caract ristiques essentielles du capitalisme cognitif et dans laquelle nous voyons l une des pierres de touche possibles du d passement du capitalisme industriel est que la production des ressources d borde le cadre de l entreprise la formation des comp tences les subjectivit s mobilisables et plus g n ralement ce que d autres appellent le capital humain n ont pas leur origine exclusive dans l entreprise Alors que pour Schumpeter ou Perroux par exemple le syst me capitaliste est concr tis dans l institution de l entreprise priv e J Schumpeter 1942 1950 p 110 dans le capitalisme cognitif le hors travail et le hors entreprise tendent prendre une importance particuli re Non seulement parce que la consommation et ce qui se trouve en amont la subjectivit constituent des enjeux centraux Mais aussi cause de l unit technique et cognitive du social qui englobe et la sph re de la production en entreprise et celle de la consommation ou des relations priv es La culture technique en un sens large constitue une indivisibilit cf ci dessous Dans le capitalisme cognitif la source de la richesse des nations se trouve en fait de plus en plus en amont de la sph re du travail
3. cle nous a men du capitalisme mercantiliste au capitalisme industriel b la crise sociale du rapport salarial fordiste comme origine du capitalisme cognitif Nous pouvons relever deux ph nom nes cl s qui sont au c ur de la crise sociale du rapport salarial fordiste 1 la contestation de l organisation scientifique du travail et de la norme de l emploi salari plein temps et tout la vie durant ii le processus de diffusion du savoir engendr par le d veloppement de la scolarisation de masse et la hausse du niveau moyen de formation il s agit de ce que nous avons appel l mergence d une intellectualit diffuse C est cette nouvelle qualit intellectuelle de la force de travail qui a conduit la mont e du travail immat riel et intellectuel et la remise en cause des formes de la division du travail et du progr s technique issues de la premi re r volution industrielle La gen se du capitalisme cognitif est en grande partie une r ponse aux conflits qui durant les ann es 1970 ont d termin la crise sociale du mod le fordiste en bauchant dans le m me mouvement les contours d un mod le de d veloppement alternatif et fond sur deux axes principaux halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 la socialisation des savoirs comme vecteur d un d passement de l organisation dite scientifique du travail et de formes alternatives de travail l expansion des services collectifs du Welfar
4. dat que le premier r gime d accumulation du capitalisme cognitif D autres r gimes d accumulation et mode de r gulation sont possibles et la crise structurelle du mod le am ricain est l pour le d montrer 2 Les origines du capitalisme cognitif Nous avons d j soulign que la crise de transformation d o est issu le capitalisme cognitif est loin de pouvoir tre expliqu e par un d terminisme technologique qui ferait des NTIC le facteur principal du passage une nouvelle organisation de la division du travail et des rapport sociaux L origine du capitalisme cognitif est plus profonde plus structurelle et plus complexe Des tendances lourdes se m langent des facteurs plus contingents ou de moyenne p riode L essentiel est de comprendre pourquoi au travers de la crise du fordisme certains param tres ou facteurs institutionnels centraux du capitalisme industriel sont remis en cause et d identifier ces param tres L argument d terminant de la th se du capitalisme cognitif est celui de la fin du capitalisme industriel La crise du fordisme et le post fordisme ne doivent pas tre des arbres qui cachent la for t L enjeu de l puisement du fordisme va selon nous au del de la question de la crise d un mode de d veloppement C est l aspect de notre th se qui nous distingue sans doute le plus des th ses alternatives sur le capitalisme financiaris ou sur le capitalisme patrimonial ou encore des th ses de l OCDE
5. duisant leurs bases de production Stefano Brusoni Andrea Prencipe et Keith Pavitt 2001 On peut retenir que la sp cialisation inter firmes de la production s accro t alors que la sp cialisation de la connaissance ne s accro t pas s accro t moins voire d cro t Si l on peut faire l hypoth se qu il existe un march de la technologie et que la plupart des connaissances sont d sormais accessibles via un march on se retrouverait dans le cadre smithien traditionnel Cette hypoth se est soutenue par Arora et Gambardella par exemple 1 Jacques Freyssinet La Division capitaliste du travail Savelli Paris 1977 14 Stefano Brusoni Andrea Prencipe et Keith Pavitt 2001 Knowledge Specialization Organizational Coupling and the Boundaries of the Firm Why do Firms Know More Than They Make Administrative Science Quarterly vol 46 halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 13 qui observent que l information pertinente pour l innovation quelle que soit sa source peut maintenant tre trait e dans des cadres et des cat gories qui sont plus universelles Mais de l en tirer la conclusion que les m canismes de march sont parfaitement op rationnels pour faciliter les changes d informations et de tous les l ments scientifiques et techniques jouant un r le dans l innovation et que les formes traditionnelles de la division du travail peuvent se d ployer il y a un grand pas C est en effet faire peu de cas
6. machines et sur l organisation du travail abord e dans ce contexte comme l organisation de la production et l affectation des travailleurs des postes Il s agit de mettre le travail la disposition du capital Le capitalisme cognitif est un autre syst me d accumulation dans lequel l accumulation porte sut la connaissance et sut la cr ativit c est dire sur des formes d investissement immat riel c d finition et traits essentiels du capitalisme cognitif Nous appelons capitalisme cognitif un syst me d accumulation associant un mode de production capitaliste un r gime d accumulation privil giant la connaissance et la cr ativit et un mode de r gulation caract ris par des rapports sociaux fondamentaux et des comportements tourn s vers l innovation la nouveaut et le partage des droits y aff rent Ce syst me implique une transformation majeure du rapport salarial et des formes de la concurrence L hypoth se du capitalisme cognitif se fonde sur l observation que la connaissance se pr sente de plus en plus comme Penjeu cl de la cr ation de valeur et de accumulation du capital Ce syst me d accumulation accorde une place particuli re la connaissance en un sens tr s g n ral cf ci dessous la science et la technique Il se signale par le d veloppement des outillages et des outils techniques mais ne se r duit ni ne se confond avec la p riode marqu e par le d collage des NTIC Les comportements et l
7. question du sujet Dans ce contexte la mobilit du travailleur n est pas seulement subie Elle devient aussi une norme d volution professionnelle L auto emploi et le cumul d emplois se d veloppent Les formes d emploi se multiplient La conjugaison d une pr carit accrue et du contr le que le travailleur peut nouveau exercer sur sa propre activit sous r serve d une int gration dans la Il suffit d ailleurs de se r f rer M Polanyi pour constater que celui ci n a jamais envisag l existence d une connaissance totalement codifi e halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 14 politique globale de l entreprise accentue le caract re conomique de la d pendance du travailleur La d pendance conomique prend le pas sur la subordination hi rarchique dans l entreprise Elle devient a fortiori dominante lorsqu il s agit de travailleurs ind pendants La relation salariale volue se complexifie et se transforme Elle peut aller jusqu englober les relations mon taires qui s tablissent entre les prestataires de services individuels dont la d pendance n est pas moindre que celle des travailleurs r guliers de l entreprise A l ancienne s curit de l emploi pourrait se substituer une s curit de statut assurant la continuit de la r mun ration et des droits sociaux L une des tensions au travers desquelles se manifeste l mergence d un nouveau mode de r gulation se manifeste ce niveau Les nouvelles formes ins
8. r gime d innovation permanente ou soutenue c est la connaissance qui est accumul e Or il s agit d un bien immat riel dont la production et la diffusion ob issent des lois sp cifiques qui rejaillissent sur la fa on m me de concevoir la division du travail 4 Capitalisme cognitif et nouvelle division du travail Un syst me d accumulation se caract rise par deux traits par l objet d accumulation d une part ici la connaissance et la cr ativit par la nature de la division du travail d autre part Notre th se est que le caract re central de la connaissance comme objet d accumulation et de l innovation tend faire merger une nouvelle division du travail Nous y voyons l une des manifestations critiques du d passement du capitalisme industriel Le capitalisme industriel se caract rise par quatre traits principaux 1 La g n ralisation lente mais progressive du salariat industriel et sa concentration dans des manufactures ou des industries Le mod le du putting out system est remplac par le syst me de la grande entreprise manchest rienne qui devient dominant partir de la deuxi me moiti du XiX si cle halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 12 2 La division du travail est caract ris e par un processus de polarisation du savoir Celle ci s exprime par la parcellisation d qualification du travail d ex cution d une part et la surqualification d une composante minoritaire de la force de tr
9. se construisent Mais nous n avons pas abord la derni re phase de la r flexion th orique telle que la con oit de Bruyne autrement dit la formulation d hypoth ses nonc s conjecturaux susceptibles d tre d mentis par les faits Dans l tat o elle se pr sente encore notre construction a un caract re heuristique Elle permet d ordonner de donner un sens certaines volutions Elle contribue pointer certains ph nom nes et sugg rer certaines connexions Au del de la conviction ou de la croyance c est lorsque la productivit de ces travaux auront t av r s par la concordance des faits enregistr s par la coh rence manifeste ou d montr e des ph nom nes caract ristiques soulign s que l on pourra soutenir et argumenter plus fortement la th se du capitalisme cognitif
10. sur l conomie de la connaissance 1l Notre propos se distingue par cons quent de la th se de M Aglietta qui fait jouer un r le premier l exigence de rentabilit des actionnaires laquelle aurait conduit les entreprises changer l orientation du progr s technique Chavance Magnin p 279 halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 8 Nous ne reviendrons pas ici sur l volution du taux de profit et ses cons quences sur les revenus et sur l investissement Nous en reconnaissons toute l importance et le caract re central Il s agit cependant d un aspect du probl me assez bien abord dans la litt rature Nous nous permettons de renvoyer le lecteur int ress aux travaux pertinents et clairants sur ce point de Dum nil et Levy 2000 a capitalisme cognitif et capitalisme industriel L un des principes d analyse qui fondent l hypoth se du capitalisme cognitif est que l enjeu de la mutation actuelle ne se trouve pas dans la simple mise en place d un mode de r gulation et d un r gime d accumulation post fordistes poursuivant sur de bases nouvelles la m me logique de d veloppement industriel Les caract ristiques du nouveau mod le d accumulation en voie d mergence se d finissent en rupture avec certains invariants fondamentaux du capitalisme industriel et ne peuvent donc pas tre d duites quasiment trait par trait de l ancien mod le d ge d or de la croissance du capitalisme industriel Cette
11. KUO halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 a s Le capitalisme cognitif Un nouveau syst me historique d accumulation Patrick Dieuaide Bernard Paulr et Carlo Vercellone MATISSE I SY S UMR Universit Patis 1 C N R S Sur une p riode longue on ne peut ignorer les changements du capitalisme Or pour mettre en perspective longue les transformations que nous observons nous n avons gu re le choix qu entre deux points de vue D une part celui qui consiste valuer ces transformations l aune de l ordre pass ce qui revient identifier les facteurs de crise et observer l ordre qui se d fait D autre part celui qui consiste imaginer ou tenter de percevoir o nous m nent les transformations en cours et pour cela faire ventuellement une hypoth se audacieuse sur l ordre qui vient et qui se construit Cet essai a pour ambition de sugg rer les contours et certaines des origines d une forme nouvelle de capitalisme que nous baptisons de capitalisme cognitif Pourquoi pour comprendre les volutions en cours serait il utile sinon n cessaire de prendre en compte la mutation du capitalisme Pour quelle s raison s est ce du c t de la valorisation de la connaissance que l on peut pr tendre trouver le sens de la forme nouvelle de capitalisme en cours d mergence Nous voulons plaider une th se que nous pouvons introduire tr s grand traits de la fa on suivante i la crise apparue dans l
12. ation Mais un r gime d accumulation s inscrit dans un cadre ou une cat gorie englobante appel e mode de r gulation lequel est constitu par un ensemble de proc dures et de comportements individuels et collectifs qui a la triple propri t de 1 reproduire les rapports sociaux fondamentaux ii soutenir et piloter le r gime d accumulation en vigueur iii assurer la compatibilit dynamique d une ensemble de d cisions d centralis es sans que soit n cessaire l int riorisation par les acteurs conomiques des principes de l ajustement du syst me R Boyer 1986 p 54 B Billaudot baptise mode de d veloppement le couple constitu par un r gime d accumulation et le mode de r gulation dans lequel il s inscrit 1996 p 15 Le Fordisme constitue une illustration bien connue de la notion de mode de d veloppement Dans la terminologie de la Th orie de la r gulation la notion de mode de production est la cat gorie de niveau imm diatement sup rieur celle de mode de d veloppement Elle d signe toute forme sp cifique des rapports de production et d changes c est dire des relations sociales r gissant la production et la reproduction des conditions mat rielles requises pour la vie des hommes en soci t R Boyer 1986 p 43 On peut sur cette base caract riser le mode de production capitaliste Il est surprenant qu aucune cat gorie ne vienne occuper l espace compris entre les modes de d veloppem
13. avail affect e aux t ches de conception 13 d autre part La scission du travail intellectuel et du travail manuel va ainsi de pair avec une tendance lourde l incorporation du savoir dans le capital fixe et l organisation des firmes Dans ce cadre la soumission ou subsomption du travail au capital devient r elle puisqu elle s impose partir de l int rieur du proc s de production La contrainte au travail salari n est plus seulement mon taire mais elle est aussi technologique endog n is e par le progr s technique 3 Sur la base de cette logique de la division du travail le crit re principal de l efficacit conomique devient la recherche d conomies homog nes de temps Ce crit re qui sera aussi le fondement de la valeur temps de travail va avoir deux cons quences essentielles D une part il se concr tise dans une organisation du travail en termes de travail prescrit et de temps allou D autre part il est l origine de la construction sociale d un v ritable clivage du temps une clivage qui oppose le temps de travail direct salari consid r comme le seul temps productif et les autres temps sociaux consacr s la reproduction de la force de travail Cette opposition temps de travail temps libre rejette dans l ombre le temps de travail non salari 4 Le r le moteur de l accumulation du capital mat riel et de la grande usine sp cialis e manchest rienne puis fordiste dans la produc
14. crise de mutation correspond puisement de la logique de d veloppement du capitalisme issue de la premi re r volution industrielle et la transition vers une nouvelle phase du capitalisme La gen se du capitalisme cognitif trouve ainsi son point de d part dans la crise du mod le fordiste un mod le qui sur bien des aspects peut tre consid r comme l aboutissement de la logique du capitalisme industriel La crise du mod le fordiste aurait correspondu louverture d un niveau sup rieur de grande crise par rapport au concept r gulationniste de crise de mode de d veloppement Nous sommes donc face une probl matique de sortie de crise bien plus complexe que celle qui depuis la premi re r volution industrielle a conduit la succession puis la crise de diff rents mode de d veloppement fond s sur l articulation d un mode de r gulation et d un r gime d accumulation sp cifiques la dynamique du capitalisme industriel En somme pour reprendre le titre d un pr c dent article le capitalisme cognitif se pr senterait comme la tentative d une sortie de la crise du capitalisme industriel lui m me Dans le cadre de cette grande crise de mutation les pays capitalistes dits avanc s seraient en fait confront s une m tamorphose majeure des formes sociales d accumulation et de la division du travail une m tamorphose dont l importance est comparable celle qui entre le XVIII et le XIX si
15. des conditions dans lesquelles se r alise l absorption des connaissances nouvelles Ni davantage des connaissances n cessaires l acquisition de connaissances Sauf faire l hypoth se d une codification quasi compl te des connaissances et d une certaine standardisation de celles ci Mais une telle hypoth se nous para t excessive compte tenu de l existence d une part f 5 n 15 irr ductible de connaissances tacites Si on laisse de c t le fait que la production de connaissances serait essentiellement appel e se r aliser dans le cadre de r seaux et d alliances il n en demeure d ailleurs pas moins qu au niveau d une entreprise ou d un service on est amen revenir sur le sch ma taylorien de base et envisager les cons quences d une implication de l employ dans des activit s cognitives Si l on retient le principe anti taylorien que tout travail associe la production et l innovation la reproduction ou la r p tition et la cr ation l exploration et l exploitation alors les articulations qui en r sultent cr ent les conditions pour une nouvelle division du travail 5 La nouvelle relation salariale A partir d une conception extensive et enrichie de la t che ou de la fonction on est amen concevoir le travail comme un complexe d activit s productrices cr atrices ou formatrices Il faut souligner que dans la perspective d une r introduction d un travail immat riel et cr atif ce ne sont pas seulem
16. e sant ducation etc comme secteur moteur d un mode de d veloppement non productiviste et fond e sur la connaissance et la primaut du non marchand Ces deux axes anticipent sur bien des aspects les traits de ce mode de d veloppement anthropog n tique centr sur le savoir et la production de l homme par l homme qui selon R Boyer dans son dernier ouvrage pourrait tre le nouvel horizon ouvert par l effondrement des mythes de la nouvelle conomie et la crise du r gime de croissance financiaris Les travaux de Fontvieille montrent bien cette rupture l aide d une analyse statistique fouill e partir de la fin des ann es 1960 sous la pouss e des conflits pour la r appropriation et la socialisation des savoirs et l mancipation du rapport salarial le d veloppement de l ducation devient en partie une variable autonome par rapport aux cycles de l accumulation du capital En somme le capitalisme cognitif n a pas t le simple r sultat d une tendance de longue p riode l accumulation de connaissance qui aurait conduit partir d un certain seuil une sorte de passage du quantitatif au qualitatif engendrant une conomie fond e sur la connaissance Il a aussi t et peut tre m me principalement le r sultat d une dialectique complexe conflits restructuration Dans une large mesure il est le produit d une offensive du capital contre les mouvements sociaux qui durant les
17. e principe que sans incitation c est dire sans capacit de capter la rente associ e brevets personne ne va investir en recherche Cependant on sait et cela est nonc par Arrow lui m me dans son article de 1962 qu une gestion gouvernementale de la recherche est du point de vue du bien tre collectif pr f rable une gestion priv e qu il s agisse d un monopole ou de la concurrence L approche propos e se complexifie d s lors que l on introduit les externalit s Le rendement social est en effet sup rieur au rendement priv W Norhaus Mais pour peu que l on admette l existence d autres incitations que p cuniaires le raisonnement ne tient plus Ainsi plusieurs analyses du logiciel libre p e Lerner et Tirole 2000 expliquent son d veloppement par des logiques essentiellement non marchandes Posons le probl me en partant du c t oppos c est dire en partant du principe que les organismes d enseignement de recherche et de formation professionnelle sont de fa on essentielle des metteurs externalit s Les connaissances que ces organismes produisent ou font merger ont un caract re d indivisibilit et les services qu ils fournissent constituent des biens de caract re collectif C Jessua a parfaitement montr que l internalisation de ces externalit s implique la mise en place de coop rations entre les membres du groupe l origine de ces externalit s Plus g n ralement il souligne le caract re inad
18. ent et le mode de production Depuis longtemps conomistes et sociologues ont en effet ressenti le besoin de distinguer des configurations diff rentes du capitalisme caract ris es chacune par un type de d veloppement ou d accumulation capitalisme 5 Nous prenons ici le mot historicit dans son sens Tourainien Production de la soci t Observons d ailleurs qu en mettant en avant la capacit auto transformatrice d une soci t nous ne sugg rons absolument pas qu une planification centrale et ou un syst me de pilotage g r par le haut sont n cessaires pour la r aliser Nous serions plut t du c t d une approche auto organisationnelle c est dire en faveur d une approche qui reconna t les capacit s volutives et transformatrices d un syst me sans que ces capacit s soient inject es de l ext rieur soient initialement programm es ou fassent n cessairement l objet d une coordination d lib r e R Boyer et Y Saillard Th orie de la r gulation L tat des savoirs La D couverte 1995 halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 4 commercial capitalisme industriel capitalisme financier par exemple pour reprendre la terminologie de F Perroux Dans le pass les conomistes tout comme les sociologues du XIXi me si cle adoptaient d ailleurs un point de vue volutionniste chacune des ces configurations tant con ue comme un stade de d veloppement du capitalisme succ dant n cessairement un au
19. ent les connaissances au sens troit du terme qui sont en jeu Ce sont aussi les capacit s relationnelles et comportementales qui sont exploit es et valoris es par l entreprise C est la subjectivit du travailleur qui est mobilis e Ce que Y Moulier Boutang baptise exploitation au second degr La cons quence soulign e par lui est que Le travailleur ne se pr sente plus alors comme possesseur de sa seule force de travail h t ro produite mais comme s tant produit et continuant se produire lui m me Azais et alii On observera que cette auto production n est pas concevoir comme un processus individuel et isol en quelque sorte chacun r alisant une production de soi dans son coin D un c t la subjectivit et le d veloppement des capacit s ont un caract re social parce qu elles sont influenc es par l environnement social imm diat et le syst me ducatif De l autre la nature g n rique des technologies et la continuit du monde des m dias et de la communication qui englobe m me si des diff renciations existent la sph re de la consommation priv e et celle de la production et du travail cr ent des ph nom nes externalisation ou d indivisibilit s Au del du caract re g n rique des nouvelles technologies et de l extension de la sph re professionnelle qui mord sur la vie priv e on observe une certaine normalisation des comportements qui contribue au m lange des sph res priv es et publiques
20. ent spatial institutionnel et organisationnel ad quat pour accro tre la capacit s impliquer dans un processus cr atif et en capter les b n fices quelle que soit la nature que l on privil gie profit accomplissement de soi prestige etc d ce que n est pas le capitalisme cognitif L hypoth se du capitalisme cognitif se distingue d autres hypoth ses formul es sur les manifestations contemporaines du changement technique ou sur la nature du nouveau r gime de croissance 1 on ne peut confondre les caract ristiques conomiques sociales et institutionnelles d un mode de d veloppement en voie d mergence avec les nouveaux dispositifs techniques d sign s globalement par la notion de TIC technologies de l information et de la communication La dynamique du capitalisme cognitif est l origine du d veloppement de ces technologies en m me temps qu il trouve en elles des supports techniques qui entretiennent sa capacit de transformation Mais les manifestations de l accumulation de la connaissance et des d veloppements scientifiques et techniques vont au del des technologies de l information qui n en repr sentent qu un aspect 2 notamment l hypoth se du capitalisme cognitif tout comme la th orie de la r gulation en g n ral carte toute adh sion un d terminisme technologique consistant poser que la soci t volue en s adaptant des transformations technologiques exog nes 3 l hypoth se du ca
21. es ann es soixante dix est l origine de transformations importantes dans lesquelles l innovation et l exploitation de la connaissance semblent occuper une place centrale Cette interpr tation ne nous est pas propre puisque notamment un grand nombre de travaux de l OCDE ont t consacr s depuis les ann es quatre vingt l volution de la place de la technologie dans la croissance et finalement la qualification des soci t s contemporaines comme knowledge based Gi Or partir du moment o l accumulation de la connaissance est privil gi e un certain nombre de cons quences en d coulent ne serait ce que du fait de ses propri t s sp cifiques bien connues notamment depuis l article d Arrow de 1962 Nous reconnaissons comme pertinentes et fond es ces caract ristiques de l information et de la connaissance que la plupart des conomistes s int ressant la technologie ont adopt es comme point de d part de leur recherche Mais il nous est apparu et c est partir de l que notre approche diverge par rapport celle de travaux centr s sur l conomie de la connaissance que ses cons quences et ses implications n ont pas t assez analys es Ces travaux s inscrivent en effet pour la plupart dans le contexte sub disciplinaire de l conomie de l innovation et de la technologie et le plus souvent dans un cadre d analyse micro ou m so conomique Or il faut aussi en tirer les cons quences au niveau macro conom
22. es proc dures 7 F Perroux Le capitalisme PUF 1962 p 27 8 Cet volutionnisme n a rien voir avec l volutionnisme darwinien ou avec les manifestations de ce que nous appelons l volutionnisme contemporain en conomie Telle est la d marche de F Perroux cf op cit page 28 la distinction des capitalismes selon leurs domaines n claire pas seulement la succession des capitalismes etc halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 5 centrales du mode de r gulation du capitalisme cognitif tournent autour de la r gulation du changement de la flexibilit des rythmes et des contenus de l innovation de l attribution des droits de propri t question des nouvelles enclosures La captation des gains actuels ou futurs tir s des connaissances et des innovations est l enjeu central de l accumulation et joue un r le d terminant dans la formation des profits La question des droits de propri t la dimension spatiale du positionnement place dans les r seaux les alliances la gestion des projets sont des facteurs institutionnels et organisationnels majeurs Ils jouent un r le d terminant dans l exercice individuel ou collectif de la cr ativit et plus particuli rement dans l investissement dans les formes que prend cet exercice organisationnelles institutionnelles ou simplement individuelles Les strat gies individuelles ou plus institutionnelles se d terminent partir de la recherche d un positionnem
23. es transformations de la division du travail et qui met l accent sur les conflits des savoirs et de pouvoirs qui vont de pair avec le d veloppement d une conomie fond e sur la connaissance Le concept de capitalisme cognitif n a rien voir avec les mythes des th oriciens de la New Economy selon lesquels une r volution technologique exog ne la r volution informationnelle li e aux NTIC serait venue bouleverser le fonctionnement du capitalisme industriel en ouvrant la voie un nouveau mode de d veloppement post industriel Nous avons par ailleurs montr les dimensions utopiques et id ologiques de ces discours et ce avant m me les d sillusions li es l effondrement du Nasdaq B Paulr 1999 et 2000 D autre part les th ses de la New economy ont contribu diffuser la th se d une conomie dualiste c est dire d une s paration des secteurs en deux cat gories les secteurs High Tech d un c t et les secteurs Low Tech Old economy de l autre Or le concept de capitalisme cognitif d signe une transformation structurelle qui ne peut pas tre cern e en isolant un secteur sp cialis dans la production des connaissances ou en consid rant l conomie de la connaissance comme une sous discipline s occupant d un aspect particulier du fonctionnement de l conomie Il s agit d un processus global qui se manifeste dans l ensemble des secteurs par l importance des externalit s li es au savoir et se
24. ique et dans une perspective L existence et l importance de ces travaux fond s sur un grand nombre de statistiques et d analyses empiriques nous pargnent donc d avoir d montrer par nous m me la place centrale de la connaissance dans les soci t s contemporaines Nous y renvoyons le lecteur Je plus souvent nous n ignorons pas videmment l existence des travaux sur les syst mes nationaux d innovation halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 2 historique Et il convient ce niveau de faire le lien avec les analyses conomiques de l ducation avec celles des nouvelles consommations et plus globalement avec les conditions dans lesquelles se r alise l accumulation Bref il nous semble que les propri t s conomiques sp cifiques de l information et de la connaissance une fois mises en relation avec ces autres dimensions ont des cons quences et des implications importantes en mati re d organisation de relation salariale et de division du travail c est dire pour les l ments canoniques de ce que nous appelons ci dessous un syst me d accumulation ii Au cours des ann es 90 la faveur d un ensemble de conditions particuli res sur lesquelles nous reviendrons certaines de ces transformations ont atteint un seuil critique c est dire la capacit d infl chir suffisamment le fonctionnement de la soci t et les performances conomiques pour que les l ments ou les principes d une nouvelle c
25. istinction entre le support forme physique mat rialit du bien et le contenu c est dire Putilit ou effet attendu du bien De m me que tout bien immat riel implique le plus souvent une forme physique nous ne contestons pas l id e que tout objet mat riel est dans une certaine mesure culturel puisque pour Putiliser il faut disposer de son mode d emploi c est dire une certaine connaissance ou une exp rience La forme physique n est jamais neutre Tout objet est culturel aussi dans la mesure o il traduit ou exprime un certain niveau de d veloppement et o son existence manifeste un certain niveau de d veloppement et d organisation de la soci t o il existe On peut aller un peu plus loin en distinguant le contenu informationnel ou cognitif d un bien de son contenu symbolique Le contenu informationnel ou cognitif proc de de l ensemble des connaissances d terminant la conception la fabrication ou l usage d un bien Le contenu symbolique proc de des activit s immat rielles qui tendent fixer les normes culturelles et artistiques les formes les modes les go ts ou les satisfaire Concr tement ce contenu est en partie d termin dans l entreprise non par les d partements de conception ou d engineering mais par les d partements de Marketing La dynamique l uvre dans le capitalisme cognitif n est pas sans impliquer d autres transformations issues notamment du fait que dans un
26. ment marginal On peut dire par exemple d une mani re sch matique et abr g e que la dispersion est la charge de l entreprise et la concentration partiellement la charge de la collectivit Au terme du processus une s rie de d cisions marginalement correctes peut conduire une situation globale d fectueuse voire critique article reproduit dans Le plan ou l anti hasard Ce texte concerne l am nagement du territoire On peut facilement le transposer au domaine de la connaissance halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 11 capitalisme industriel et pour des raisons diff rentes l investissement et l innovation ont une forte dimension sociale Ce qui n est pas sans effet sur les formes de la concurrence Qu est ce qu un bien immat riel Alors qu un bien mat riel vaut essentiellement par sa consistance et sa fonction mat rielle ou physique nergie nous qualifions de bien immat riel ou culturel un bien dont la valeur et lusage sont sans rapport direct essentiel avec sa nature et sa forme mat rielle On peut d finir les notions d activit ou de travail mat riel de fa on analogue Un travail culturel ou mental ou intellectuel est un travail dont la valeur ne peut tre mise en rapport avec le temps pass la fatigue ou l nergie physique d pens e pour laccomplir Dans la mesure cependant o un bien immat riel a une forme physique un disque CD par exemple on doit insister sur la d
27. nsive et une accumulation extensive en un sens large qui englobe le financement de l innovation La th se du capitalisme cognitif retient l id e que la boucle profit innovation profit tend devenir dominante Historiquement la stagnation des profits dans un contexte marqu par un certain nombre de contingences d r glementation par exemple aurait conduit les entreprises s aligner progressivement sur un mod le de croissance tir par l innovation On observera que dans l analyse du capitalisme patrimonial par exemple la cat gorie et le type d activit s dont il est question sont l innovation et le progr s technique Nous restons dans un cadre d analyse relativement traditionnel que l on peut sp cifier math matiquement partir d quations relativement classiques dans le contexte de l conomie du progr s technique et des mod les de croissance Or la th se du capitalisme cognitif refuse de r duire le th me de la connaissance et de l innovation un investissement en bien d quipement ou la cr ation de produits nouveaux La connaissance et la cr ativit sont une sorte d ethos qui traverse la soci t Il n en reste pas moins qu il serait excessif d opposer radicalement le capitalisme cognitif et le capitalisme financier Nous pouvons sugg rer l hypoth se que le r gime d accumulation dominante financi re th oris par Chesnais et Serfati n a t probablement dans la mesure o 1l peut tre historquement
28. nsommation c est dire l orientation g n rale du progr s technique et de la connaissance dans leurs diff rentes manifestations les autres propositions tendent faire jouer ceux ci un r le secondaire ou d riv compte tenu de la place centrale qui serait d sormais occup e par le profit par action dans les strat gies des entreprises L arbitrage ou le compromis central de la distribution des revenus se serait transform et par cons quent d plac de la n gociation collective vers la gouvernance des entreprises En fait la relation entre innovation progr s technique et distribution des revenus forme une boucle Quantitativement la dynamique de l accumulation est d termin e en partie par la r partition de la valeur ajout e qui elle m me d pend de la croissance et des gains de 10 Telle est la vision du capitalisme patrimonial propos e par M Aglietta halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 7 productivit Qualitativement les volutions de la productivit et du rythme d innovation sont li es la croissance et l organisation de la production Ce qui compte c est moins les normes ou les exigences exog nes qui p sent sur ce syst me que la nature le signe et l intensit des boucles qui le composent Ainsi deux param tres permettent de sp cifier la r partition du profit d une part le partage dividende part du profit retenu et d autre part le choix ou le partage entre une accumulation inte
29. onfiguration se fassent jour Suffisamment en tous cas pour que ses contours puissent tre esquiss s sinon identifi s C est la fin des ann es 90 qu apparurent l hypoth se de l mergence d un capitalisme patrimonial M Aglietta et celle d un capitalisme financiaris F Chesnais Ces diff rents v nements empiriques et th oriques renforc rent notre conviction que l hypoth se d une nouvelle configuration du capitalisme n tait pas totalement hors de propos Nous allons d finir et pr senter la notion de capitalisme cognitif section 1 avant de rendre compte de ses origines section 2 Puis nous en soulignerons certains traits sp cifiques du point de vue de la division du travail section 3 et en ce qui concerne la question de la nouvelle relation salariale section 4 1 D finition et nature du capitalisme cognitif a orientations m thodologiques En proposant d tudier les changements conomiques et sociaux contemporains partir d une grille de lecture qui place en son centre un type particulier d accumulation nous nous engageons assez clairement dans une voie somme toute assez classique de l conomique politique Nous partons du principe que les conomies se d finissent moins par leur quilibre un instant donn que par leurs d s quilibres C est la capacit de mobiliser des ressources en faveur de l investissement et la fa on dont ces ressources sont pr lev es qui d terminent et manifestent leur ca
30. pacit se projeter dans le futur et le type de futur qu elles projettent La r partition des ressources et l organisation du travail en un sens large sont l origine de conflits qui d terminent le sens dans lequel les d s quilibres sont plus ou moins r sorb s ou g r s On ne peut cependant consid rer que cette capacit de mobilisation et surtout les orientations privil gi es de l accumulation l uvre en une p riode donn e mergent spontan ment ou sont donn es de toute ternit partir du moment o nous accordons une attention particuli re au contenu m me de l investissement et aux orientations qu il r v le nous ne pouvons nous contenter d un cadre d analyse universaliste et neutre le march ou de la r f rence quelques grandes lois permanentes la baisse tendancielle du taux de profit par exemple C est pourquoi nous nous situons dans une perspective qui reconna t la pertinence d une analyse en terme de p riodes ou de cycles et qui admet Pour clairer le propos et la terminologie que nous proposons ci dessous le capitalisme industriel est un syst me d accumulation le capitalisme cognitif en est un autre 4 Nous faisons allusion ici la th se classique de l existence d un surplus dont une partie r investie permet la croissance halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 3 l existence d une historicit c est dire la capacit qu a une soci t de se mettre en mouvement e
31. pitalisme cognitif se distingue de deux notions qui ont occup une place importante l analyse en terme de soci t fond e sur la connaissance propos e par l OCDE d une part la New economy d autre part La sp cificit de hypoth se du capitalisme cognitif tient tout autant au rejet du d terminisme technologique qu celui d une approche r ductrice restreignant le domaine de l conomie de la connaissance celui des activit s d lib r es de production de savoir Elle est critique galement d une approche de l conomie de la connaissance qui fait abstraction de l histoire et de la transformation des rapports sociaux et qui finit par appr hender le savoir comme un facteur de production ind pendant du capital et du travail La plupart des approches de l conomie de la connaissance sont en fait caract ris s par une vision a historique positiviste et non conflictuelle de la science et de la technologique qui conduit effacer les contradictions sociales thiques et culturelles que le d veloppement de l conomie du savoir engendre Aussi l une des originalit s de l approche en termes de capitalisme cognitif est elle justement le choix d une m thode mettant l accent sur l historicit des conomies et qui cerne la probl matique de la connaissance dans sa dimension sociale et collective Il en r sulte une halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 6 grille de lecture qui renoue avec le r le structurant d
32. s effets sur l organisation de la division technique et sociale du travail consid r e dans son ensemble Ainsi Eliasson consid re la diff rence de Machlup que les t ches de production de et de traitement de la connaissance sont localis es dans toutes les activit s conomiques y compris dans les secteurs faible intensit technologique En d autres termes l av nement de l conomie fond e sur la connaissance s exprimerait moins par l expansion continue d un secteur sp cialis que par la prolif ration d activit s intensives en connaissances dans tous les secteurs de l conomie Cela explique l importance nous soulignons que l approche en termes de capitalisme cognitif attribue l analyse de la division du travail pour cerner les mutations li es au caract re de plus en plus collectif de la production de connaissances et de la dynamique de l innovation la fois au niveau de l organisation interne des firmes que et surtout avec l ext rieur e capitalisme cognitif et capitalisme financier L hypoth se du capitalisme cognitif n est pas fonci rement incompatible avec d autres propositions privil giant l influence pr pond rante des march s financiers et ou les changements de gouvernance des entreprises en faveur des actionnaires Mais alors que l hypoth se du capitalisme cognitif fait jouer un r le central la modification des normes d accumulation de production et de co
33. salari et de l univers marchand c est dire dans la soci t et notamment dans le syst me de formation et de recherche L une des tensions ou l une des sources de complexit du capitalisme cognitif vient de cette diff renciation entre d un c t un syst me institutionnel et organis de recherche de formation et de valorisation de la connaissance et des savoirs et de l autre le caract re diffus vivant adaptatif et transversal des dispositions cognitives individuelles halshs 00226409 version 1 30 Jan 2008 10 Par ailleurs la continuit technologique et culturelle que nous voquions plus haut brouille les fronti res On assiste un effritement des fronti res entre travail et non travail li la mont e du contenu intellectuel du travail et la socialisation grandissante des m canismes de l innovation et de la production de connaissances Ce type de transformation remet en cause la validit des fronti res traditionnelles par lesquelles la th orie conomique conventionnelle s parent l univers productif de la sph re marchande de l univers improductif de la sph re non marchande Il en va de m me pour les cat gories habituellement utilis es pour caract riser le statut actif ou inactif productif ou improductif de la force de travail Un aspect du type de tension que nous voquons peut tre analys dans le cadre de l conomie de l innovation L conomie n oclassique et lib rale pose en effet comm
34. t de se transformer Cette grande dynamique ne se r alise ni spontan ment ni de fa on occulte Son issue et sa direction sont toujours en d bat et en suspens Elles sont aussi l origine de conflits C est pourquoi il est n cessaire d introduire dans l approche les formes institutionnelles qui constituent le cadre lui m me volutif partir duquel les orientations sont discut es et mises en uvre Ces formes jouent un r le m diateur entre les diff rentes forces et les diff rents niveaux de la r alit sociale et ont une triple fonction de contrainte de l gitimation et d espace de n gociation Une fois ces bases soulign es on comprendra que nous avons t amen s nous tourner vers la th orie de la r gulation Nous trouvons dans ce corpus non seulement un cadre de travail pertinent mais aussi un acquis m thodologique et th orique utile sinon indispensable Cependant ce cadre nous a paru comporter une sorte d angle mort pour ce qui concerne justement les types d accumulation C est pourquoi avant de d finir la notion de capitalisme cognitif nous allons revenir sur le cadre d analyse g n ral de la th orie de la r gulation b la th orie de la r gulation un cadre d analyse compl ter La notion de r gime d accumulation qui exprime la nature d un ensemble de r gularit s assurant une progression g n rale et relativement coh rente de l accumulation du capital est au c ur de la th orie de la r gul
35. tion de masse de biens standardis s Durant la phase du capitalisme industriel de type Fordiste et Taylorien la division du travail Smithienne fond e sur un principe de sp cialisation l change de biens standardis s et sur l tendue du march joue donc plein La gestion de la sph re de la connaissance qu il s agisse de la connaissance d velopp e par les bureaux d tudes et de m thodes ou la connaissance produite et g r e dans les laboratoires s inscrit dans cette logique Or les transformations induites par un r gime d innovation permanente fond sur l accumulation de la connaissance remettent en cause la logique smithienne d une double fa on D un c t l investissement en connaissances se r alise dans le cadre de r seaux et d alliances dont l organisation n est pas de nature marchande Ces organisations hybrides sont aussi des lieux de partage de connaissances Selon des tudes r centes Prencipe 2001 Brusoni Prencipe et Pavitt 2001 si le march peut tre consid r comme la forme cardinale de gouvernance des activit s de production des entreprises des formes explicites de coordination et organisations r ticulaires sont n cessaires la gouvernance des processus d apprentissage et d accumulation de connaissances Les m mes tudes pointent galement la diff rence entre ce que les firmes font et ce qu elles savent Les firmes investissent dans l largissement de leurs bases de connaissances tout en r
36. titutionnelles susceptibles de soutenir le nouveau r gime d accumulation centr sur les connaissances et la subjectivit sont en d bat Les propositions issues de la th orie des march s transitionnels offrent l une des directions possibles dans lesquelles la relation salariale peut tre reconfigur e B Gazier Cette orientation souligne la n cessaire conciliation du renforcement de l autonomie individuelle et de la solidarit des travailleurs Les droits sociaux et mon taires sur lesquels peut d boucher une nouvelle convention salariale de ce type sont originaux en ce qu ils ont un caract re n cessairement collectif En conclusion nous souhaitons souligner la nature et la port e de notre ambition Certes d un c t l existence du capitalisme cognitif ne se d montre pas Ce qui aux yeux de certains peut en amoindrir la port e car il s agirait d une proposition non falsifiable par cons quent non scientifique Mais nous n avions pas ici la pr tention de formuler la th orie d une nouvelle forme de capitalisme dont les traits seraient suffisamment identifi s et mesur s pour pouvoir donner lieu des travaux statistiques Notre approche doit plut t tre identifi e comme une phase exploratoire qui s int gre dans un mouvement de th orisation esquiss e Nous serions dans ce que de Bruyne appelle le p le morphologique de la th orisation c est dire dans cette phase ou cours de laquelle la coh rence et l unit d une th orie
37. tre stade Soulignons d embl e que notre approche sur ce point n est pas aussi syst matique L absence d une cat gorie interm diaire dans la th orie de la r gulation ne doit cependant pas para tre trop tonnante dans le mesure o les th oriciens de cette cole ont privil gi l tude des transformations des modes de d veloppement et ont inscrit l essentiel de leurs analyses dans le cadre d une configuration particuli re le capitalisme industriel Or notre analyse des transformations en cours nous a conduit penser que l puisement du Fordisme marque non seulement la fin de ce mode de d veloppement mais qu il signale galement la fin du capitalisme industriel cf ci dessous Les ph nom nes originaux qui mergent durant cette phase sont suffisamment forts et significatifs pour qu ils tendent selon nous faire sortir le capitalisme contemporain du mode d accumulation qui l a caract ris pendant plus d un si cle On comprend donc pourquoi nous sommes amen s souligner pour la regretter l absence de cat gorie interm diaire entre l tage du mode de d veloppement et celui du mode de production Nous proposons d appeler syst me d accumulation l association d un mode de production et d un type d accumulation Ainsi le capitalisme industriel peut il tre caract ris par le fait que la formation du profit repose sur l organisation du travail dans les manufactures L accumulation porte pour l essentiel sur les
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