S`encabaner - Éducation relative à l`environnement: Regards
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1. Bru 2000 p 23 L volution des rapports de sexe fait que la partition actuelle des r les est moins nettement marqu e Les diff rences de r cits entre les g n rations le confirment l adolescence les endroits favoris sont ceux qui poss dent des qualit s ressour antes C est dire ceux qui offrent la possibilit de se relaxer et se d tendre qui favorisent l exp rience esth tique la ma trise ainsi que la libert d expression et qui permettent de fuir la pression sociale Nordstr m 2010 p 24 3 4 La cabane comme espace ducatif S encabaner une pratique d habiter tre Le cabanisme est un ph nom ne anthropologique majeur Au cours de son d veloppement l enfant recherche des lieux sp ciaux pour se construire La cabane comme habitat qu elle soit de l ordre de la coquille de la hutte ou du nid de l arch type de l le de l oasis ou de la grotte renvoie toujours quelque r cit fondateur qui se rejoue travers elle S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 47 Elle se situe d abord dans l espace des parents dans lhabitat choisi et am nag par eux dans les limites autoris es par leur statut social Les us coutumes et r gles qui y pr valent font de la maison un terrain d ducation L enfant se d tache progressivement du portage de lhabitat assur par les parents Il prend sa place y laisse des traces Et il nourrit cet habiter si P2. S encabaner art constructeur et fonctions de la cabane selon les ges Exploration biographique et photographique R sum Parmi les jeux d enfance la cabane Dominique tient une place sp cifique dans le d veloppement Bachelart de l tre humain par les moments d initiation de JUT de Tours transition de socialisation qui soutiennent l volution de l enfant et de l adolescent Mais si y les jeux de cabane perdurent aujourd hui la ES pratique a volu au fil des g n rations Elle est ukh F F alors significative de la place donn e l enfant Le dans nos am nagements et dans nos choix ducatifs Cet article analyse les diff rentes fonctions psychiques et sociales de la cabane comme art constructeur apprentissage des relations l espace aux autres et la nature Nous nous int ressons d abord aux cabanes que construisent les enfants et aux processus de subjectivation de socialisation et d cologisation qui sy d ploient Puis nous explorons quelques formes de cabanes d adultes construites sous pr texte de chasse de travail de loisir La pluralit de ces pratiques de cabanes est ensuite analys e comme pratique d un lieu exp rience d un mode d habiter et questionnement d une mani re d habiter contemporaine Abstract Among children s games the hut plays a major role in human development through moments of initiation transition and socialization which
3. accueillir qui se constitue partir de l intimit projet e ici dans la cabane La cabane comme la maison est une enceinte protectrice contre les turbulences pulsionnelles Elle agit comme une peau psychique comme contenant comme espace que l on s approprie tout en se d tachant du reste On sy installe en assumant la responsabilit de cr er Certaines cabanes subsistent comme vestiges apr s la mue en tant que souvenir L habitat bric brac est un puissant support d aventures ludiques et de cr ativit infinies Winnicott 1975 p 110 signale que c est en jouant et seulement en jouant que l individu enfant ou adulte est capable d tre cr atif et d utiliser sa personnalit toute enti re C est seulement en tant cr atif que l individu d couvre le soi L exp rience est celle d un tat qui ne se donne pas de but Winnicott bid p 111 parle ce propos d une sorte de cr dit ouvert une personnalit non int gr e Cet espace potentiel peut fonctionner comme une aire transitionnelle qui remplit une fonction de passage entre l attachement la m re et d autres objets de l environnement 48 Dominique Bachelart Une certaine angoisse peut se manifester dans cette zone fronti re de limite de symbiose s paration condition pour le sujet de na tre au symbolique Cette exp rience n est pas hors sol ni extra terrestre Les objets sont r els au sens o
4. hutte abri cabanon baraque appentis remise bicoque etc Elle offre un abri un habitat intime et ph m re et fait d couvrir lauto construction et l architecture modeste Parmi les nombreux travaux sur le sens de l habiter les recherches de Sobel 1993 reprises par Berryman 2003 celles de Cooper Marcus 2006 ont montr l importance de lieux sp ciaux de jeux en terrain sauvage ou dans la nature pour explorer se mesurer au danger r vasser dans le d veloppement de l enfant Se pourrait il que notre amour du plein air et de la nature se forme dans notre petite enfance Ces exp riences racontent les modifications majeures de nos rapports la nature dans les soci t s occidentales industrialis es et urbanis es Sirost 2009 Elles s ancrent dans nos mani res transform es d habiter la nature de vivre le grand dehors selon la formule de Michel le Bris le big sky Elles n cessitent d examiner de pr s les contextes ducatifs offerts aux enfants autour des maisons dans les cr ches les jardins d enfants Wauquiez 2008 d valuer le potentiel d apprentissage des cours d cole selon qu elles sont naturalis es ou non Raffan 2002 d tudier les offres p dagogiques dans et par la nature dans chaque contexte Des approches ethnologiques fines partir de dessins d enfants renseignent titre comparatif sur d autres natures du monde si diff rentes selon les con
5. ils font partie de la r alit partag e et ne sont pas simplement un faisceau de projections Les enfants y d couvrent les pr mices de savoirs naturalistes en observant la morphologie et le comportement des esp ces Ils y d veloppent une maturit affective avec l environnement non humain maturit que Searles 1986 d finit comme une capacit d prouver un senti ment de parent avec le monde non humain la terre l arbre les animaux les l ments et le maintien de la conscience de son individualit en tant qu tre humain La construction de la cabane est une exp rience de d fis mat riels de r sistance avec laquelle il faut travailler des capacit s de nos corps de fa onner des objets mat riaux qui permettent un large champ d actions cr atrices Psychodynamique mat rielle de la cabane C est en effet par l action effective entreprise en fonction de ses caract ristiques propres que le sujet sp cifie fait merger ou encore rend pr sent son environnement Il est enrichissant d appr hender le rapport l environnement comme une co d pendance plut t que comme un rapport objectif et d sincarn fait de repr sentations Dans cette perspective c est le sujet qui donne sens et valeur des l ments de l environnement qui n en ont pas a priori La fonction de la cabane est donc avant tout une pratique psychodynamique d une grande richesse Cet abri nous sugg
6. 247 256 Huerre P 2006 L enfant et les cabanes Enfances amp Psy 433 20 26 Le Run J L 2006 L enfant et l espace de la maison Enfances amp Psy 4 33 27 36 L vy J dir 2008 L invention du monde une g ographie de la mondialisation Paris Les Presses de Sciences Po 60 Dominique Bachelart Nordstr m M 2010 L utilit des cours d cole dans la construction de l identit de genre observations des activit s pratiqu es par les filles et les gar ons g s de 12 ans pendant la r cr ation In Danic I David O et Depeau S dir Enfants et jeunes dans les espaces du quotidien Rennes PUR Pagezy H Carri re S et Sabinot C 2010 Natures du monde dessins d enfants Paris CTHS Paquot T Lussault M et Youn s C dir 2007 Habiter le propre de l humain Paris La d couverte Pluymaekers J 2006 L institution quand on n a plus que son lit comme cabane Cahiers critiques de th rapie familiale et de pratiques de r seau 37 73 83 Radkowski G H de 2002 Anthropologie de l habiter Vers le nomadisme Paris Puf Raffan J 2002 La nature nourrici re une tude du potentiel d apprentissage dans les cours d cole Consult le 15 mai 2012 sur http www evergreen ca docs res La nature nourriciere pdf Raveneau G et Sirost O 2011 Introduction De l mergence des abris de loisirs aux formes contemporaines In Raveneau G et Sirost O Anthropolo
7. La cabane occupe une place particuli re dans la trajectoire personnelle entre l enfance et l ge adulte Les r cits rapportent des souvenirs souvent vaguement dat s sous forme de chronique cabaniste Gabriel 20 ans raconte sa cabane improvis e avec une couverture entre deux tables de nuit dans sa chambre avec son fr re puis une maison de tissu 7 9 ans une cabane de foug re construite pendant les vacances avec sa m re et son grand p re la cabane dans un arbre de la cour d cole 6 11 ans les cabanes des enfants de 9 10 ans qu il encadrait comme animateur de centre de vacances puis les sorties cabanes en for t avec des enfants d un centre de loisirs urbain les nuits sous tente S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 39 Jean Pierre 62 ans d crit des cabanes bo te de jeux corporels et des cabanes tente dans des cartons de toutes tailles chez sa grand m re commer ante les cabanes dans les osiers bottel s ou dans les osiers en nourrice au printemps couter cach les adultes au travail la cabane de palier et les jeux de d couverte de l autre sexe la cabane solide tanche de l adolescence construite avec des mat riaux de r cup ration et d autres cabanes moins investies la cabane sucre au Qu bec la cabane aux outils de jardin les waters au bout de la cour 3 2 Des aires transitionnelles en jeu dans le d veloppement de Penfant Selon les
8. de percevoir le d ploiement d un faire un art de faire la fois mat riel et psychique diff rents ges elle ne suffit pas pour comprendre comment les individus pratiquent une multiplicit de lieux avec lesquels ils construisent une relation signifiante Les cabanes perch es con ues pour les touristes vont elles devenir une pratique ordinaire occasionnelle rituelle Que se passe t il dans ce lieu autre Comment cet emplacement va t il constituer un milieu existentiel Le mode d habiter de l individu dans l ensemble des lieux qu il pratique en sera t il chang L enqu te est donc poursuivre pour identifier comment les moments pass s dans les cabanes enrichissent le quotidien le hors quotidien Comment influent ils sur les modes d habiter d un individu inscrit dans un ensemble de lieux qu il pratique Signifient ils un rapport changeant la nature Ces lieux peuvent constituer une exp rience o l on change radicalement d habiter sans changer pour autant son mode d habiter Elles se pratiquent alors sur un mode compensatoire sans questionner le r gime d habiter en usage dans notre soci t Les pratiques que nous avons approch es ne s inscrivent pas prioritairement comme forme de r sidence secondaire mais comme alternative quelquefois 58 Dominique Bachelart quotidienne plus souvent saisonni re en marge de la r sidence dite principale Comme si
9. ges la cabane est refuge espace de jeux moteurs de jeux de socialisation espace solitaire de d couverte de l autre sexe lieux ins r s dans des projets Les p dopsychiatres et les psychanalystes ont montr la suite de Winnicott 1975 l importance de ces aires transitionnelles et de la fonction des jeux dans le d veloppement de l enfant Pour sy rep rer le tableau 1 reprend l volution des pratiques de cabanes au cours du d veloppement de l enfant enrichi des pratiques retrouv es dans les r cits Tableau 1 volution des fonctions des cabanes et d veloppement de l enfant l adolescent Fonctions de la cabane Pratiques d crites dans les r cits Tout petits Ut rus couffin berceau Construction des limites du moi d couvertes sensori motrices Contenant pour parer la dispersion ou l clatement d un soi encore hypoth tique Cr ation d une sorte de niche o il sera possible de jouer se cacher ou se montrer et o stocker quelques objets familiers et rassurants tels des tr sors Construite proximit de l espace de vie des grands voir sans tre vu Conqu te partielle du cadre familial Constructions individuelles ou en petits groupes qui aident se diff rencier les uns des autres Extension de l espace la cour au jardin l cole maternelle les adultes et les plus jeunes Repli et ou voyage 3 6 ans Distinction
10. la mobilit Nous sommes dans une soci t individus mobiles qui pratiquent diff rents lieux Certains lieux sont choisis investis comme r f rents pour l identit L identit spatiale ainsi model e peut relever d une des multiples constructions mythiques qui peuplent l imaginaire en acte des groupes humains Pour r v ler le mythe il faut une histoire un r cit un mod le et usage qui animant et pr cisant cet univers lui donne tout son sens Urbain 2002 p 172 Notre imaginaire charrie des mod les territoriaux de r f rence et d appartenance charg s de valeurs et pos s comme des vidences par ceux qui les noncent et s en servent dissimulant du m me coup leur laboration et leur stabilisation Si l individu contribue d finir et changer la qualit des lieux d autres acteurs y contribuent galement et en modifient la perception C est le cas des acteurs du tourisme coum nal qui s emparent de la mode des cabanes perch es du renouveau de la marine de Loire de l attrait paysager de la cabane de vigne L coum ne touristique est un regard sur l espace qui embrasse le potentiel d un lieu en mati re de jeu de d couverte de repos Levy 2008 p 145 Pour le comprendre il faut suivre la psychodynamique des images invers es chez l adulte la cabane peut tre un havre de civilisation dans la vie sauvage et peut tre un havre de vie sauvage dans les exc s de notre moder
11. plus du registre du tissage que de la construction Les arrangements de pierres peuvent tre aussi minimalistes marquant au sol la limite des pi ces laissant le seuil vide ou indiqu d un simple trait dans la terre Construction manipulation exp rimentation se domicilier par ses propres moyens Le passage des branchages ramass s aux troncs lagu s obtenus par l usage de la hache de la scie marque les d buts de l art de la charpenterie Avec des parents puis avec des pairs la cabane est une invitation au bricolage une aventure construire Cette premi re confrontation l art d difier n est pas un acte ordinaire La puissance po tique de l habiter dont parle Heidegger s y exp rimente peut tre de mani re unique alors que le pouvoir de construire sera ensuite d l gu d autres La cabane se n gocie avec le site les mat riaux pr sents les outils disponibles L invention s insinue en fonction des ressources S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 41 Ma premi re cabane d coule de promenades autour de la maison avec une copine Quand on descendait par un chemin pour rejoindre la Loire il y avait un endroit o plein d encombrants taient stock s comme a dans la nature mais ce n tait pas une d chetterie Une vraie mine d or Alors ma copine et moi on a am nag notre premi re cabane proximit de ce lieu avec tout disposition Laura 20 ans
12. re la possession du monde mais nous fait d couvrir les limites de notre omnipotence Il nous fait vivre la dialectique du refuge et de l effroi on veut tre prot g mais on ne veut pas tre enferm Si pr caire soit il il donne tous les r ves de s curit Les r veries du repos donnent un sentiment d asile de paix de solitude et voisinent avec les r veries de la volont L tre humain y sait la fois les valeurs du dehors et du dedans Bachelard 1948 p 186 Cette exp rience est faite d ambivalence affirmation de soi n gation de soi fuir l autorit des adultes exp rimenter les r les des adultes d pendance ind pendance convivialit solitude La cabane n est pas principalement de l ordre du visible elle est de l ordre de l exp rience celle de se construire soi m me en la construisant et de s en d gager Montrant la dynamique des images mat rielles des substances terrestres Gaston Bachelard d crit galement une ima gination activiste une volont qui r ve un homme veill par la duret mat rielle par l activit d opposition qui pressent pr voit la r sistance de la S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 49 mati re Les mati res terrestres excitent en nous la volont de les travailler La psychologie du contre li e l hostilit de la mati re contraste avec les images du repos et la psychologie du dans de l intimit de la m
13. La d couverte Wauquiez S 2008 Les enfants des bois pourquoi et comment sortir en nature avec de jeunes enfants Paris Books On Demand Winnicott D 1975 Jeu et r alit l espace potentiel Paris Gallimard S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 61
14. M et G Basnier sur leur abri de loisir Les histoires de cabane J P L cureuil D Beaudoin G Goblet A Muso C Careil le Pr sident des chasseurs de gibiers d eau le pr sident des malonneurs Cette pratique de chasse a fait l objet d une exposition temporaire La chasse de la pr histoire nos jours l comus e du V ron f vrier mai 2010 Note biographique Dominique Bachelart est Ma tresse de conf rences en sciences de l ducation l Universit de Tours Elle enseigne l IUT de Tours D partement Carri res sociales Elle est charg e du programme de la licence professionnelle M diation scientifique et ducation l environnement R f rences Bachelart D 2009 Autobiographie environnementale explicitation et exploration de l exp rience coformatrice Jn Guillaumin C Pratiques r flexives en formation ing niosit et ing nieries mergentes p 25 145 Paris l Harmattan Bachelard G 1947 La terre et les r veries de la volont essai sur l imaginaire des forces Paris Jos Corti Bachelard G 1948 La terre et les r veries du repos essai sur les images de l intimit Paris Jos Corti Balestra R Charles C et Roux R 2006 Festival Arts Plastiques Enfants Fape Abris cabanes et autres refuges Nice Inspection Acad mique de Nice Consult le 23 avril 2012 sur http www ac nice fr ia06 eac eacgup index php Berque A 2010 Histoire de
15. de dispara tre Nous rencontrons cependant encore des versions de la cabane dans lesquelles se reconna t une po sie un imaginaire un art d difier qui renvoie une perception fine de la composition avec les mat riaux les rebuts baignoires vieilles pompes bidons dans un arrangement souvent personnel des couleurs des formes de la v g tation L originalit des cabanes leur aspect d braill leurs mat riaux de r cup ration deviennent embl matiques d un d ni des normes esth tiques et sociales L abri de loisir s inscrit dans le m me esprit que labri de jardin Il se d finit moins par la dur e tr s variable qui lui est accord e que par les intentions de ses cr ateurs Cette construction se caract rise d une part par l absence d imp ratifs de solidit d o le choix de mat riaux de r cup ration ou p rissables et des techniques de construction r v latrices de diverses formes de bricolage d autre part cette construction s oppose au provisoire en ce sens qu elle nest pas un pis aller en attendant autre chose mais une architecture existant pour elle m me le temps que quelque chose se produise Labri de loisir appara t alors comme fondamentalement li au jeu la f te et des pratiques de retrait social Raveneau et Sirost 2006 p 15 16 4 5 Toues caban es arch ologie exp rimentale r invention de tribus de mariniers Les toues sont des gabarres bateaux construits en bo
16. de telles situations Huerre 2006 p 25 L apprentissage des r les sociaux de sexe dans la s paration la compl mentarit Plusieurs des tapes de transitions et d apprentissage des identit s et des r les sociaux de sexe sy d roulent Le s jour dans la cabane dans les contes comme dans les jeux installe chacun dans son r le et son sexe en lui disant quelle partie du monde il appartient Dans les r cits de passage ces contes narrent une transition un enfant un jeune homme ou une jeune fille part de la maison familiale Ce personnage fragile mais d termin entreprend ainsi un parcours sem d emb ches des preuves dont il triomphera gr ce des aides magiques g n ralement des vieilles femmes rencontr es au hasard d un carrefour ou post es devant un abri de fortune qui l aident progresser dans sa qu te Bru 2000 p 21 Les cabanes sont un l ment essentiel du sens et la fonction du conte merveilleux Bru 2000 Dans le conte il s agit d une construction isol e de pr f rence dans la for t ou sa limite marquant le passage au domaine des jeux Elle peut tre construite de toutes pi ces ou d j en place attendant d tre investie Les r cits recueillis soulignent galement combien le passage par la cabane a une fonction d initiation La cabane est un lieu de s jour provisoire Les relations entre fr re et s urs entre voisins gar ons et filles s exp rimentent dans la s
17. enqu te On ne pense pas la m me chose sur le m me sujet si on essaye de le dire avec des mots crits des mots parl s des dessins des photographies Nous avons donc approch la pratique de la cabane par des crits des r cits et des photographies partir de trois sources principales e analyse de 55 textes d autobiographie environnementale dans lesquels nous avons extrait les exp riences de cabane Ces textes de jeunes d une vingtaine d ann es ont t produits lors d un cours universitaire de premier cycle sur l ducation l environnement e un vagabondage photographique attentif aux inscriptions locales du cabanisme Dans la diversit des cabanes nous avons conduit notre investigation vers six formes de cabanes adultes inscrites dans le territoire du Parc Naturel R gional Loire Anjou Touraine les r centes cabanes perch es commerciales les tr s nombreuses loges de vignes anciens abris de travail les innombrables cabanes de jardin les abris 38 Dominique Bachelart de loisir en particulier en bord de rivi re la limite de l habitation secondaire les cabanes de chasseurs et les huttes de malonnage plus rares et les plus difficiles d acc s circonscrites aux prairies humides inondables enfin les toues caban es accessibles aux cales d amarrage et par leurs regroupements lors de f tes de batellerie e un recueil par t moignage oral ou c
18. les gens avaient une habitation fonctionnelle et une cabane essentielle existentielle compl mentaire Le d sir d isolement de privacit de l espace de solitude de vie extramondaine s accompagne de moments de forte convivialit o la cuisine ciel ouvert et la salle manger en plein air sont largement ouvertes aux amis et connaissances Ces modes d habiter pr caire de soustraction momentan e la vie sociale pour mieux y revenir de relation avec le dehors sauvage ou am nag s inscrivent de mani re singuli re dans des processus de subjectivation de socialisation et d cologisation que la socio anthropologie de l espace habit ne cesse d explorer Vers quel r gime d habiter L approche par la cabane ins re dans les pratiques et les significations de l habiter des lieux modestes voire cach s qui sont mobilis s en acte en situation Ces pratiques la marge peuvent signifier des aspirations nouvelles On y rep re des tendances un habitat modeste une revalorisation du quotidien et de l extraordinaire ordinaire d tre dans ces espaces interm diaires simplement disponible pour se retrouver soi tre en plein air dans la nature vivre du banal avec les autres dans la convivialit Nouveau mythe de cyborgeois Celui que Berque d crit comme un tre m canis qui essaye d chapper au milieu humain cherche se sentir en prise directe avec l essence de
19. les nids les tani res enfin les endroits qu ils ont construit sp cifiquement pour leurs jeux tels que les cabanons dans les arbres les fortins p 355 356 La cabane r siste aux essais de classification Toute tentative de d finition trop stricte perdrait d ailleurs la richesse de son acception Pour sy rep rer retenons pour l instant les caract ristiques mises en valeur dans l op ration Cabanes construit ton aventure Balestra Charles et Roux 2006 Toutes les formes cabani res ont en commun d tre une demeure pr caire ph m re de petite dimension r alis e partir d une vari t infinie de mat riau de toutes sortes et inscrite en relation troite avec la nature Il semble qu elles expriment un go t pour la vie simple une forme de rel chement des codes sociaux et une forte sociabilit une rupture du temps et de l espace une coupure avec le quotidien et les contraintes domestiques un d sir d vasion et enfin un rapport privil gi avec la nature Leur statut juridique et leur existence sociale sont flous elles d rogent souvent aux cat gories et aux normes institu es Situ es dans un entre deux entre le dedans et le dehors elles sont un lieu d investissement imaginaire et symbolique intense porteuses de contestation des conventions tablies p 6 2 Une enqu te d rivante histoires de cabanes vagabondage photo graphique partir de cette formulation souple partons en
20. r el imaginaire ivalit s et diff rence de force de sexe de cr ativit Comp tition Faire comme si l on tait ugement des adultes est d terminant Capacit travailler en groupe D couverte du quartier du village Espace de jeu plusieurs pouvant occuper le groupe de S occuper tre tranquille fa on durable Lieu d entre Soi s Se cacher tre libre de ses pens es 7 1l ans D fis techniques mat riaux solidit tanch it Faire des b tises se personnaliser Transmission de savoir faire bricolage am nagement Processus de progression lors de la construction et esth tique moments r gressifs de plaisir bien tre peurs loignement progressif des adultes rotection Objectivation de l espace Jeux sociaux imitant les adultes Socialit entre pairs de m me sexe et ou de sexe 12 13 15 ans s gr gation en fonction du sexe oppos s selon l ge compr hension de l identit de genre Adolescent Investissement des zones interm diaires d laiss es par Camping sauvage entre pairs se relaxer se ressourcer Trouver des zones de libert d expression de tranquillit et de distance avec les autres g n rations 40 Dominique Bachelart 3 3 Les fonctions des cabanes sont multiples Construction l g re elle se transforme avec l ge et l loignement de la maison Ceux qui n ont pas d acc s l espace ext rieur la construisent dans le
21. s avec mon fr re et mes voisins nous investissions un carr de pelouse sur le c t de la maison pour faire une cabane La cabane tait un m lange de tipis et d igloo uniquement fait pour les gens de petite taille On ne pouvait y rentrer qu quatre pattes On se servait de vieux arceaux arc en plastique pour faire les serres et des branches de ch taigner On tendait des grands morceaux de tissu des vieux draps que l on attachait aux arceaux avec des pinces linge Parfois on se donnait des r les On avait un m tier une famille La balan oire situ e en bas du carr de pelouse c tait notre voiture Le jardin devenait notre terrain de vie car on se baladait dedans en s inventant des histoires On allait chercher les fruits en s imaginant faire notre march Leslie 20 ans Lorsque l enfant difie son abri proximit de l espace de vie des adultes il est avant tout un lieu de guet d o il peut voir ou entendre sans tre vu La personnalit en d veloppement se forme dans ce laboratoire d exp ri mentation la fois psychique et social Au printemps les osiers destin s la vannerie taient coup s et repiqu s en lignes parall les dans une parcelle de terre contigu la maison Ils taient plac s l soign s dans un terrain humidifi et formaient en quelque sorte une futaie tr s dense Entre les lignes de repiquages nous nous faufilions au c ur des osiers jusqu dem
22. sa barque dans la hutte de branchage qui le dissimule Les huttes de marais sont entretenues en attente d une crue inondant les prairies humides Cela ne s est pas produit depuis cinq ans On recense une trentaine de propri taires au sein de l association des malonneurs La chasse est masculine et se pratique plusieurs Chacune de ses pratiques s inscrit dans une histoire une relation la nature des valeurs spatiales dont on trouve la synth se dans le tableau 2 5 Pratiques des lieux et mani res d habiter en volution Une culture contrast e selon l ge et le sexe selon les g n rations Les enfants sont la fois des h ritiers des cabanes faites avec leurs parents et les fa onniers de nouvelles pratiques inscrites dans la culture de leur g n ration Les r cits des sexag naires souvent ins r s dans une soci t rurale agricole et artisanale mettent en vidence la grande libert laiss e aux enfants 54 Dominique Bachelart Tableau 2 Synth se des pratiques de cabane Valeurs spatiales Socialisation Relation homme nature Singularit universalit lieux Passage rites initiation Relation homme nature Cabane sp ciaux Jeux Relation au sauvage d enfant Microcosme Socialisation de genre et For t Bas haut proche lointain chemin apprentissage des r les sociaux Pont entre moi imaginaire et dedans dehors adultes magnitude du monde Lieu ailleurs en Pair milieu Cab
23. support the development of the child and the teenager Hut games continue to this day however the practice has evolved over the generations It is then significant with regards to the place given to the child in our spatial developments and in our educational choices This article analyzes the various psychic and social functions of the hut as an art of building of learning about the relations to space to others and to nature We will focus at first on the huts built by children and on the processes of subjectivization socialization and of ecological awareness that develop Then we will investigate some forms of adult huts built under the pretext of hunting work or leisure Afterwards the plurality of these practices will be analyzed as the use of a place the experience of a way of living and a questioning of a contemporary way of living DUCATION RELATIVE L ENVIRONNEMENT Vol 10 201 2012 35 Des cabanes d enfant au cabanisme adulte chacun a des images de cabane dans la t te B ties avec des planches des t les faites de cordes tendues dans les arbres sur lesquelles on accroche des branchages ou d un simple drap sur une table qui d limite un espace imaginaire les cabanes rev tent une infinit de formes Parmi les souvenirs d enfance la construction de cabanes a un statut particulier par la puissance vocatrice de moments jubilatoires La cabane rejoint les multiples variations de l habitat pr caire
24. 6 a explor la grande p riode de l enfance des gar ons occup e par la conqu te des airs et du monde des oiseaux Aujourd hui les jeunes de vingt ans ne racontent plus de chasse aux oiseaux ni de nids d vast s mais la conqu te des cimes des arbres reste une de leurs activit s privil gi es Une activit ne nous a pratiquement pas quitt du primaire l escalade arboricole Il s agissait d abord de rep rer un arbre qui serait int ressant escalader ou qui pourrait offrir un bon perchoir une bonne cachette et un bon observatoire Cette recherche d un endroit o l on pourrait se retrouver ensemble en hauteur avec deux amis tait importante Cet arbre peut en ce sens s apparenter une cabane secr te Cela nous rapprochait encore davantage C tait notre lieu et notre secret commun notre endroit nous o personne ou presque ne pouvait venir nous chercher C tait galement une fa on de se retrouver de se sentir l cart de sortir du groupe On peut voir l la recherche d un refuge d un lieu de recueillement de partage de valeurs communes d une vision des choses de la vie de la nature proche Les gar ons comme quelques filles de 20 ans qui se font parfois traiter de gar on manqu continuent de se retirer du monde le temps d investir une nature r v e et de briser ou mettre distance le temps d un ensauvagement n cessaire et rituel les liens avec l univers familier
25. Les arrangements cr atifs des l ments relev s sur chaque site sont infinis La cabane n est pas un projet descriptible avant sa mise en uvre elle est avant tout exp rimentation r sine des branches coup es qui embaume et colle aux mains essences flexibles ou cassantes g om trie au sol et hauteur de fa tage La mati re r siste l tanch it du toit laisse d sirer mais le choix des mat riaux les textures et vibrations les odeurs les lumi res qui filtrent entre le dedans et le dehors laissent entrevoir la g opo tique d un land art initial et des chantiers cr atifs de rencontre avec le monde La construction de l abri suscite la d couverte des mat riaux utiles leur solidit les outils leur maniabilit l organisation du groupe et la r partition des t ches En fonction des projets la cabane durera la journ e toutes les vacances ou plusieurs ann es Des comp tences artisanales de constructeur accompagnent la cr ativit groupale Le savoir faire ne fait pas que sy manifester Il sy constitue et s accomplit de mani re parfois hasardeuse Les exp rimentations aux cons quences in gales laisseront leurs marques positives ou frustrantes renfor ant le plaisir le go t d entreprendre ou la crainte et la frustration Un espace cabane pour construire d construire sa vie psychique En investissant la cabane comme espace de jeu l enfant apprend qu il a le droit d avoir un espace lui d en
26. Les enfants sont largement pris en charge l ext rieur de l espace domestique dans le cadre de multiples institutions qui occupent et r gulent leur temps en centre de loisir activit s sportives ateliers ducatifs dans des loisirs encadr s obligatoires contr l s par les adultes Ces occupations ne leur laissent pas le temps de chercher d couvrir leurs limites ni l espace pour conna tre le go t de la libert Sarmento 2006 p 312 Est ce dire que la pratique de la cabane est p rim e Lop ration cabane l ducation nationale en 2001 2002 laisserait penser qu elle reste un ferment imaginaire Pourtant cet optimisme n est pas largement partag Avec l urbanisation et la peur du risque pour les enfants sest cr un mouvement d int rieurisation qui les font passer de la rue la culture de la chambre articul e la culture des m dias technologiques Les pr adolescents ont la possibilit de construire de nouveaux loisirs technologiques et m diatiques qui chappent en partie au groupe de pairs et aux adultes l inqui tude d une alt ration des relations de l homme non seulement avec lui m me et avec ses semblables mais aussi avec son environnement mat riel mest pas r cente Certains auteurs d noncent les nouveaux espaces psychotechologiques qui court circuitent lappareil psychique comme syst me transg n rationnel et d plorent que les industries de programme captent
27. anes d enfance Naturalisme n o archa sme Cabanes D sirs urbains de nature Ensauvagement ponctuel et r actif perch es r invent e au stress de la vie urbaine ropositions commerciales Abris de De la singularit uniformit rivacit Lieu d apprentissage moral social jardin de Lieu Ici ou Ailleurs familier Marginalit cologique loisir Contr le social socialit renouvel e Particularisme localisme Lieu de travail casse cro te sieste Protection contre intemp ries Loge de immobilit ruralit jusqu aux ann es 60 70 Relation homme cheval remplac e vigne Milieu Hi rarchie sociale de la par v hicule construction Circulation Particularisme Mariniers jusqu en 1870 troite symbiose avec l cosyst me Localisme Outil de travail de p cheurs de la rivi re au fil des saisons et Toues Milieu Socialit essentiellement masculine des variations hydrom triques caban es chappatoires saisonni re ou ponctuelle vers la rivi re les gr ves duits boires paysages Cabane Installation fixe ou flottante Sauvaginiers malonneurs Conflits sur l jointage des hutte dissimul e int gr e au paysage transmission p re fils appelants de chasse Socialit s masculines troite d pendance avec le r gime du fleuve pour jouer dans la rue ou dans les entours du village Cette libert tait contrast e des imp ratifs horaires stricts sept heu
28. arbapapa les trois petits cochons C me le baron perch d Italo Calvino Thoreau et sa cabane des bois dans Walden la comtesse de S gur Tom Sawyer et l cole buissonni re le club des cinq d Enid Blyton Giono et surtout Robinson un Robinson chapp du personnage de roman de Delfoe arrang par l imaginaire singulier pour servir d arch type de vie sauvage de mythe du parfait bricoleur agriculteur leveur ou de simple rappel du camping La multiplicit des formes et des imaginaires montre combien toute d finition ne peut tre qu approchante tol rant des pratiques la marge des formes les plus pr caires aux proximit s avec l habitation p renne Pour Tiberghien 2005 La cabane se distingue de la maison et de la cabine aussi plus d un titre Elle ne comporte aucune fondation Elle constitue un habitat de secours elle peut tre rapidement abandonn e renvoie des soucis cologiques et surtout ne sinstitue pas partir d un seuil La cabane brouille le rapport int rieur ext rieur elle est dans la nature et elle en tend ind finiment l espace S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 37 Cooper Marcus 2006 distingue trois cat gories de cachettes de lieux sp ciaux chez les enfants les lieux am nag s par les adultes dans un autre but tels que caniveaux remises v randas ou armoires les lieux dans la nature qu ils adaptent pour se cacher tels
29. ati re Des lieux sp ciaux respecter Ces fonctions plurielles de lhabiter dans une cabane sont constitutives de nous m mes autant qu elles nous apprennent notre rapport l autre sexe et aux r les sociaux adultes Notre d finition initiale de la cabane peut donc senrichir de l id e qu elle est le support et le symbole d une prise d autonomie progressive et de construction identitaire gr ce au jeu l imaginaire mat riel et social partag avec des pairs Les biographies environnementales qui cherchent comprendre comment les cadres de notre pass affectent nos pr f rences environnementales actuelles font appara tre deux th mes majeurs les exp riences dans des environnements ext rieurs et le besoin de lieux o se cacher Cooper Marcus 2006 Bachelart 2009 Le fait est que le temps pass en plein air avait et a encore dans nos m moires une qualit primordiale et sacr e bien au del de son temps effectif Les enfants utilisent l ext rieur comme lieu d exploration pour d couvrir les merveilles de la vie animale et v g tale pour se tester face des dangers inconnus Cooper Marcus 2006 p 345 L importance des lieux sp ciaux de l enfance devraient tre rappel s aux ducateurs aux lus aux am nageurs aux paysagistes ce qui assure l efficacit fonctionnelle de la ville n assure pas n cessairement l quilibre socio affectif des enfants Ceux ci ont besoin des interstices de
30. e Ne chassez pas l homme trop t t de la cabane o s est coul e son enfance recommande le po te Friedrich H lderlin L adulte par nostalgie de son enfance ressuscite t il l image mythique de la cabane Nous vivons dans un cadre de plus en plus citadin dans des villes o la nature est encadr e contenue dans des espaces r duits Les adultes gardent en eux des souvenirs d une vie rurale connue dans l enfance ou pendant des vacances Ils vivent dans des habitats haute densit humaine dans un environnement min ral un rythme stressant et r vent parfois de b tir des maisons dans les arbres de se loger le temps des vacances dans des cabanes de plein air dans une nature bien souvent id alis e Les cabanes perch es dans les arbres deviennent un concept en vogue revisit e par les designers au confluent de courant actuel prise de conscience cologique volont de vivre en harmonie avec la nature besoin de retrouver des racines envie de revivre ses r ves d enfants S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 51 Les propositions touristiques de cabanes perch es donnent des garanties cologiques affirm es Loffre est mergente en Touraine Elle para t en phase avec les attentes urbaines de retrait de simplicit de nature Si l on offre un s jour en cabane perch e de jeunes mari s comme cadeau de nuit de noce si les s jours en famille sy d veloppent est encore tr
31. es ne venaient pas souvent nous d ranger Maman venait nous voir Pheure du go ter Elle faisait toc toc sur la porte de la cabane rentrait comme elle pouvait au moins le haut de son corps et nous demandait si l on voulait go ter Leslie 20 ans L intrusion est la fois une violence sociale et psychique Le respect de cet espace marque l acceptation de la vie psychique autonome de l enfant Serge Tisseron 1998 a montr l importance du mensonge pour la structuration de l enfant Penfant est convaincu que sa m re voit tout lit ses pens es En mentant il prend conscience qu elle ne remarque pas le fait qu il ment Le voil existant pour lui m me distinct J avais construit au plein c ur du bois une cabane dans un petit renfoncement entre trois arbres Ma seule hantise l poque tait que l on d couvre mon secret l existence de ma cabane J inventais toutes sortes de mensonges lorsqu on me demandait ce que j avais fait de mon apr s midi C est au cours de l option environnement que j ai demand ma m re si elle avait un jour su ce que je partais faire toutes ces heures dans le bois Elle ma r pondu tout naturellement que j allais certainement dans ma cabane J ai alors appris qu ils avaient toujours su et qu ils avaient eu la pr sence d esprit de me laisser vivre mon exp rience solitaire dans ma cabane milie 20 ans L exp rience de la cabane fait vivre la dimension psych
32. eurer dans ce que nous nommions galement des cabanes form es naturellement L espace habitable tait constitu des interstices entre les rang es de brins qui formaient parois un toit en quelque sorte tait form par les pointes des brins devenant feuillus Nous devinions les gestes des adultes et leurs mouvements aux bruits qu ils faisaient Le grand avantage de ces moments de cabane tait que nous pouvions suivre les conversations des adultes Curieux nous r coltions des informations nous enregistrions des histoires que ces m mes adultes ordinairement ne d livraient pas en notre pr sence Jean Pierre 60 ans Dans tous les cas il s agit de trouver ou de confectionner un cadre o l on se sente suffisamment bien pour un temps donn et qu il soit le reflet le plus proche possible de son int rieur au point o on en est dans sa construction et ses besoins fondamentaux de contenance et de r assurance La cabane est un espace de projection Projection de chacun dans un projet personnel et ou collectif projection des craintes des peurs des attentes projection gr ce labri construit des affects S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 45 n gatifs et des pens es agressives sur un ext rieur d sormais d limit permettant de maintenir l id al d un int rieur pargn hors du temps et du monde o le bonheur pourrait r gner ferment d une nostalgie ult rieure pour
33. fixer les r gles d y avoir sa pens e intime Il lui faut parfois l aide d un p re d un oncle d un grand p re pour s loigner de sa m re La distinction avec les parents est majeure cette distinction qui le constitue suppose cet espace temps o je peux merger autre c est dire moi m me Nous avons tous un besoin vital d un espace que Pluymaekers appelle espace cabane et d un temps pour nous y r fugier C est ce lieu quel qu en soit l endroit concret o je peux tre avec moi m me et me parler moi m me sans danger Pluymaekers 2006 p 76 Lenfant y d couvre ses capacit s introspectives Il peut y r guler ses motions sa vie affective En ce sens il exp rimente un espace de pens e qui lui est propre Son esprit est lui m me une cabane Cet espace a ses secrets Ce lieu tait la bo te au secret On s y disait tout Il nous appartenait C est ici que j ai d apprendre le plus de chose sur l amiti J y allais quand j avais des chagrins C tait un lieu o je me sentais en confiance o je me sentais prot g Cette niche ma fait grandir car elle ma accompagn jusqu mon adolescence Fr d ric 20 ans 42 Dominique Bachelart L adulte ne peut entrer dans cet espace qu express ment invit Il ne peut tre invit qu en acceptant de jouer le jeu Qu un adulte franchisse le seuil sans y avoir t incit et le charme est rompu Les adult
34. force de paysager lunivers l extr me on risque de l ext nuer c est dire de le rendre mince La pratique de la cabane interroge t elle nos modes d habiter nos r gimes d habiter La qualit des lieux les rapports au lieu n existent pas en soi de fa on ind pendante mais toujours reli e la question des pratiques de la pr sence des mani res de faire associ es aux repr sentations valeurs symboles imaginaires la fois topique cologique cosmologique d une soci t La pratique d un lieu peut tre multiple selon la pluralit des individus le sens qu ils leur attribuent et le projet qu ils sen donnent Les habitants temporaires investissent le lieu en tant que un seul lieu peut porter une vari t de en tant que touriste excursionniste homme d affaire en d placement cycliste etc Stock 2004 propose de diff rencier trois niveaux dans l habiter les pra tiques de lieux signification des lieux familiers identificatoire et intentionnalit les modes d habiter mani re dont un individu habite un ensemble de lieux met en r seau les lieux le r gime d habiter mode dominant d tre en relation avec les lieux dans une soci t donn e valeurs assign es la mobilit et aux lieux technologies de l habitat images et discours de l espace rapports la nature Si la chronique cabaniste permet la compr hension de pratiques
35. gie des abris de loisirs p 8 23 Paris Presses Universitaires de Paris 10 Sansot P 1995 Jardins publics Paris Payot Sarmento M J 2006 Les cultures de l enfance au carrefour de la seconde modernit In Sirota R dir l ments pour une sociologie de l enfance p 307 316 Rennes PUR Searles H 1960 1986 L environnement non humain trad de l anglais par D Blanchard Paris Gallimard Sigrist M 2008 Loges de vigne en Val de Loire La cr che Geste ditions Sirost O dir 2009 La vie au grand air Aventures du corps et vasions vers la nature Nancy Presses Universitaires de Nancy Sobel D 1993 Childrens Special Places Exploring the Role of Forts Dens and Bush Houses in Middle Childhood Tucson AZ Zephyr Press Stiegler B 2008 Prendre soin de la jeunesse et des g n rations Paris Flammarion Stock M 2004 Lhabiter comme pratique des lieux g ographiques EspacesTemps net Textuel 18 12 2004 http www espacestemps net document1138 html Tiberghien G A 2005 Notes sur la nature La cabane et quelques autres choses Paris Le f lin Tisseron S 1998 Nos secrets de famille histoire et mode d emploi Paris Ramsay Urbain J D 2002 Paradis verts d sirs de campagne et passions r sidentielles Paris Payot Villela Petit M 2007 Habiter la terre In Paquot T Lussault M et Youn s C dir Habiter le propre de l humain p 19 34 Paris
36. ique des solitudes de l cart La solitude est surtout appr hend e comme un sentiment n gatif accompagn de perte tristesse douleur absence silence Les solitudes d fensives lorsqu on s loigne pour bouder ou pleurer peuvent s ouvrir sur des solitudes incorpor es qui permettent de vivre l exp rience de solitude comme ressource le repli sur soi est alors un outil d un travail de r quilibration La cabane peut abriter l intimit et la r verie dans la tension du dedans et du dehors en permettant de se retirer du monde pour le retrouver Les enfants tout ge manifestent le d sir de pouvoir isoler seul ou plusieurs Des jeux Pair libre et en contact avec la nature Certains ont fait l exp rience intime de la solitude parfois apr s l preuve de se trouver dans un environnement d routant dont ils ressentent lhostilit Hutte de branchage caverne grotte ou anfractuosit investie d une fonction d abri ces cabanes ne sont pas tanches au monde Elles permettent de d couvrir la d pendance au monde Elles t moignent de la qu te d un ailleurs S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 43 fait d l ments d arbres de rochers de vent d herbes de champignons myst rieux d animaux inattendus de chaleur et de pluie laissent place la r verie de la nature tant t comme un dehors terrifiant tant t comme un ressourcement primordial L habitation ouvre aux que
37. is chevill s clins dont les planches se chevauchent comme des tuiles La cabane tait une sorte de chambre de bois m nag e l arri re des bateaux de mariniers et qui leur sert d habitation pendant la descente Sur les bateaux plus petits les f treaux les p cheurs tablissaient leur cabane sous la forme de leur voile repli e sous la coue du bateau Arch ologues charpentiers de marine amoureux de la navigation de rivi re et de la Loire ont amorc la fin des ann es quatre vingt la reconstruction de ces bateaux traditionnels partir de fouilles ou d tude des bois de r emploi dans les habitations et une approche est bas e sur l arch o logie exp rimentale Des tribus viriles rassembl es par la construction et par la navigation partagent leur cabane flottante s arr tant pour des f tes rustiques hautes en couleur Les f tes de la batellerie se succ dent tout au long du fleuve offrant au visiteur charm un divertissement spectaculaire Ces S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 53 f tes sont favorables un tourisme vert promu par les lus dans une logique de d veloppement durable par exemple la pr face de l ouvrage Des hommes et des bateaux sur la Loire de Bourgeois et Pasquier 2008 r dig e par la Pr sidente du Conseil G n ral d Indre et Loire Depuis que la Loire est inscrite au Patrimoine mondial de l Unesco la batellerie r in
38. l attention des jeunes Stiegler 2008 D autres y voient un nouvel axe de construction identitaire de nouveaux jardins secrets de nouveaux espaces d apprentissages Flichy 2010 Comment se transforme la mat rialit de nos exp riences corporelles dans les usages plus virtuels qui sont propos s aux enfants Qu est ce qui constitue l espace potentiel psychique de contenance et d enveloppement que permettait la cabane Ces questions sont encore explorer Elles montrent le d calage g n rationnel les d synchronisations des cycles de vie plus incertains la dissociation des syst mes sociaux et symboliques Les r ves de cabanes de la part des adultes destination des enfants marquent galement le d sir d une harmonie d un ralenti d un rythme de vie de tous ceux qui furent les victimes de cette trange et permanente destruction des formes de vie auxquelles ils taient attach s Un coum ne touristique qui transforme la cabane en produit et en spectacle L attrait pour les cabanes ne ressemble pas un mouvement de retour l enracinement Ce serait l un malentendu comme le souligne Augustin 56 Dominique Bachelart Berque dans la pr face du livre de Radkowski 2002 li des lunettes renversantes qui nous font croire un retournement de tendance alors que nous sommes dans un mouvement qui ne fait que pousser plus loin toujours la tendance fondamentale de la modernit au d racinement et
39. l habitat id al de l orient vers l occident Paris Le F lin Berryman T 2003 L co ontog n se les relations l environnement dans le d veloppement humain D autres rapports au monde pour d autres d veloppements ducation relative l environnement Regards Recherches R flexions 4 207 229 Bourgeois J et Pasquier H 2008 Des hommes et des bateaux sur la Loire Savonni res Bourgeois Pasquier Bru J 2000 Une fille dans la cabane ou Pentre deux maisons In Brun B Dufour A H Picon B et Rib reau Guyon M D dir Cabanes cabanons et campements formes sociales et rapport la nature en habitat temporaire Travaux de la Soci t d cologie humaine Cabedoce B et Pierson P dir 1996 Cent ans d histoire des jardins ouvriers 1896 1996 La Ligue Fran aise du Coin de Terre et du Foyer Grane Cr aphis Cooper Marcus C 2006 Habitat et nature du pragmatique au spirituel Paris In Folio Delalande J 2006 Le concept heuristique de culture enfantine Jn Sirota R dir l ments pour une sociologie de l enfance p 267 273 Rennes PUR Fabre D 1986 La vie des oiseaux Sur quelques r cits d apprentissages L Homme 26 99 7 40 Flichy P 2010 Le sacre de l amateur sociologie des passions ordinaires l re num rique Paris Seuil Hubert Pellier M 1997 Les abris de vigne en Touraine Bulletin de la soci t Arch ologique de Touraine 45
40. la nature sans l interm diaire du travail dans une nature campagne sans site dans un milieu non lieu acosmique Berque 2010 Ici on vit cette pancarte sur une cabane de jardin donne au contraire de mani re condens e le sens intense de la cabane Elle signifie dans un sens intensif tendu dans ici on pourrait vivre puisqu on y vit Forme d accordance au monde qui pourrait tre le creuset de formes de demain si tant est que l on ne sombre pas dans un n opuritanisme environnemental pour moraliser ces pratiques comme forme d habitat cologique fait de renoncement des besoins jug s superficiels Il ne s agirait pas ici de morale de la p nitence mais de la jouissance amp amp Notes Op ration conduite par le minist re de l ducation nationale le minist re de la Culture l Institut fran ais d architecture qui avait pour objectif de familiariser les enfants l univers de l architecture voir les sites http cabanes ressources org www sitewan org On pourrait galement envisager des pi ces manipuler Piaget et al 1969 en utilisent pour appr hender les t ches de mod lisation de l espace chez l enfant Avec les photographies de J P L cureuil compagnon des vagabondages g opo tiques et plusieurs contributeurs D Cottereau Y Bruxelle A Muso H Pr vost B Briand G et C De Laage C Careil S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 59 4
41. les seulement le moyen de recr er le monde merveilleux de l enfance Sont elles le reflet des divers modes d habiter de leur cr ateur ou de leur utilisateur ou plut t le r sultat d une inscription sociale et culturelle sp cifique 1 En quoi et quoi tient la cabane une multiplicit de formes et d imaginaire Il n y a pas de concept de cabane Que ce soit une hutte sommaire en branchages un creux dans un arbre un refuge loin des habitations le terme g n rique de cabane d signe l espace dans lequel on s abrite Les cabanes sont des formes d habitat humbles d abri pour vivre temporairement Elles empruntent aux exp riences archa ques de l esp ce humaine pour se prot ger de l ext rieur des pr dateurs de la pluie du vent de la chaleur Le th me de la cabane lors de cette enqu te a suscit des propositions de lieux qui donnent une id e tr s extensive de la notion les abris des ardoisiers des roulottes des yourtes les postes d observation ornithologiques des folies au sein de parcs de ch teau les toilettes au fond du jardin la sweat loge exp riment e par un de nos t moins les caravanes sans roues des manouches en cours de s dentarisation les abribus les monuments fun raires des cimeti res Variations avec les images et les mots cabane lapin tre en cabane Les cabanes ouvrent au patrimoine litt raire ou cin ma tographique de chacun les maisons des B
42. lieux permettant l appropriation des parcs et endroits abandonn s permettant des jeux en terrain sauvage Dans l architectonique des lieux les enfants sont g n ralement oubli s ainsi que leur droit de disposer proximit d une diversit d exp riences Avant d apprendre tre Penfant a besoin d apprendre tre l L ancrage con u comme l attachement un lieu est un point de r f rence partir duquel des explorations ext rieures se font sur lesquelles la mobilit vient prendre forme Les lieux doivent laisser l imaginaire et l initiative ouverts Lenfant nest gu re reconnaissant que Pon lui offre une cabane toute faite 4 Des cabanes tout au long de la vie Qu en est il l ge adulte Appartement maison logis chez soi cr che p nates piaule nid niche rep re baraque labri serait un invariant anthropologique Paquot et al 2007 L adulte poursuit son exp rience de 50 Dominique Bachelart l habiter partir de l exp rience originaire que chacun fait de la spatialit en tant qu il est un ego incarn qu il est relation entre le corps propre et la terre sol Villela Petit 2007 A t il encore besoin de cabane 4 1 Un territoire secret une exigence existentielle vitale Ce sont parfois les sans abris qui nous informent le plus de l aspect crucial de pouvoir s approprier un lieu comme sien Ceci vaut pour toutes les tapes de la vie Les moments importants
43. lles deviennent un petit patrimoine paysager sans plus d autre fonction perceptible que de rester le refuge des amoureux et la fiert de leur propri taire 4 4 Cabanes de jardin abris de loisirs inventions d anarchitectes L abri de jardin forme avec son jardin un ensemble incontournable aux appellations vari es tonnelle gloriette cabane petit pavillon de verdure La cabane trouve sa place au fond c t de l espace r serv au repos et aux jeux des enfants Le jardin dans une vis e productive pour les siens est traditionnellement un espace domestique masculin S impose aujourd hui le jardin plaisir n d une volont de retour la nature de la satisfaction mat rielle et morale de produire et de r colter ses l gumes et ses fleurs Bouquin dans Cabedoce et Pierson 1996 p 170 La cabane peut tre la fois cr ation du jardinier remise outil domaine de la famille Au d but du si cle ces constructions de petite dimension s difient 52 Dominique Bachelart avec des mat riaux de r cup ration sur des terrains obtenus g n ralement en location pr caire Originaux parfois haut en couleur stup fiants ces abris sont souvent mouvants C est encore le cas en zone rurale alors qu en ville le secteur informel de la construction jardini re tend tre r glement pour contrer l impression de bidonville de pollution visuelle Le potager du besoin tapi dans le paysage est en passe
44. nit Elle repr sente une marge et elle est revendiqu e comme espace d autonomie de libert par les anarchitectes des jardins et les acharnistes bateliers La pens e am nagiste et paysagiste r cup re les uns La soci t du spectacle r cup re les autres et en valorisant ces hommes pris de libert les contraint se conformer aux canons historiques d une toue authentique voile carr e piautre et tre pr ts faire des ronds dans l eau pour satisfaire les touristes Convertie en produit la cabane peut tre d tourn e de ses fonctions psychiques et instrumentalis e r cup r e des fins r cr atives et commerciales La cabane passe alors de la relation objet sujet utile pour construire sa vie psychique et sociale limage objet juste l pour nous divertir Elle devient un l ment de d cor pour mettre en sc ne un mode d existence c t du monde On peut ainsi prendre cong momentan ment de son si cle s y retirer comme dans un nid dans l entre soi amical conjugal familial sans que la profondeur anthropologique de l exp rience soit n cessairement accessible A l extr me la cabane n est plus qu une enveloppe vide offerte au regard La cabane de vigne reconstruite aux carrefours routiers est une fa on de paysager l entr e de ville Mais comme le dit Sansot 1995 S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 57 p 261
45. on lui en laisse le loisir si les parents ne st rilisent pas l espace laissant peu de jeu dans tous les sens du terme et sil mest pas affect par leur tat psychique Le Run 2006 p 34 Dans l exp rience de la cabane l enfant construit son int riorit et par cons quent son rapport l autre l ext rieur de la maison la relation la cabane s exprime dans la jouissance v cue du rapport avec la nature dans un rapport physique sur un fonds corporel exigeant lorsque l acc s se donne dans la marche le transport de mat riaux la construction Une cabane a se respire a se touche a se fantasme comme un lieu d accueil possible qui fait r ver penser se perdre Il fait bon tre dedans y trouver un abri o l on est prot g y compris de la nature d cha n e ou de soi m me C est cette pratique comme faire comme art de faire qui permet l habiter tre et la construction de soi du soi travers cette exp rience La cabane appara t alors comme une co mergence sujet objet La possibilit d habiter au sens plein r side dans l existence d une int riorit d une intimit d un chez soi o pouvoir isoler Certains enfants n acc dent pas cette sortie de la carapace et recherchent l immuabilit D autres semblent tre partout et nulle part sans pouvoir se poser La possibilit d habiter est cette capacit de se recueillir et d
46. op t t pour mesurer l impact de cette nouvelle proposition touristique d y d couvrir les pratiques sociales et les productions imaginaires 4 3 Loges de vignes des petits monuments paysagers Les loges de vignes sont de petites maisons dans les champs Sigrist 2008 Hubert Pellier 1997 Elles sont construites sur des parcelles loign es de l habitation principale pour permettre labri le repos Dans le Val de Loire les plus anciennes datent du XVIS si cle mais la plupart ont t construire au XIXe si cle lorsque la viticulture s est transform e apr s le phylloxera conduite au fil de fer plantation align es permettant le labour charrue attel e traitement des maladies La cabane permet alors de stocker les piquets le fil de fer les harnais Elle abritait les hommes pour la sieste le repas les moments d orage Elles ont t progressivement abandonn es au profit de la voiture qui permettait de rentrer chez soi au cours de la journ e de travail et aujourd hui elles sont remplac es par un utilitaire D laiss es elles ont un temps t investies comme refuge par des utilisateurs clandes tins vagabonds et marginaux Vou es pour la plupart la destruction elles ont t identifi es comme digne t moin d un pass dont pourrait se pr valoir le territoire Elles sont r investies r cemment par des associations par les institutions patrimoniales qui soutiennent leur restauration E
47. paration dans la proximit ou dans la compl mentarit des sexes Le centre de loisir est lieu de ma plus importante cabane Il y avait un grand sapin Il n avait des branches que d un seul c t Ses branches taient tr s grosses et elles taient courb es vers le haut de v ritables si ges naturels Avec des amis nous grimpions dedans et nous allions nous asseoir sur les branches du haut Chacun avait sa place attitr e en fonction de l ordre d arriv e du premier jour C tait un club ferm nous avions un code d entr e et m me une carte de membre une association pratiquement Nous tions entre pairs et on se sentait plus fort Les adultes et les filles taient interdits car tout cela devait rester entre gar ons de 10 ans Fr d ric 20 ans Si dans notre enqu te les filles comme les gar ons construisent des cabanes les cabanes isol es du regard des adultes et que l on fr quente seul sont plut t 46 Dominique Bachelart le fait des gar ons Les cabanes dans les arbres sont aussi une sp cificit masculine L arbre suffit pour se retirer du monde et pour faire un univers L arbre est une des plus grandes verticales de la vie imaginaire de l homme Le haut celui des branches s oppose au bas celui du tronc qui s ouvre parfois comme une grotte enserre entre ses racines le niveau des jeux des gar ons et celui de filles Les r veurs ont des pr f rences pour des parties de l arbre Daniel Fabre 198
48. re il fallait tre rentr et un contr le social de tous les adultes sur les enfants si tu avais fait une b tise quand tu rentrais le soir tes parents taient d j au courant Les jeunes d une vingtaine d ann e sont encore tr s nombreux avoir eu de belles exp riences de cabanes autour de leurs maisons pendant les vacances en centre de loisirs dans de rares cours d cole encore non bitum es Cette pratique est sexu e et cette sexuation est un ph nom ne constant travers les g n rations m me si les rapports sociaux de genre dans les jeux de socialisation sont moins cliv s Chez l adulte cette pratique des cabanes abris de chasse abris de loisirs se retrouve de mani re tr s marginale essentiellement comme une forme d chappatoire masculin S ENCABANER ART CONSTRUCTEUR ET FONCTIONS DE LA CABANE 55 Les g n rations plus jeunes sont marqu es par la red finition des ges et des lieux de la vie et une pr maturation adolescente qui s investit dans une culture de la chambre plus que de la rue Les enfants ados d aujourd hui sont aux prises avec une conomie m diatico publicitaire qui standardise jusqu la cabane En plastique aux couleurs vives elle offre plus de d fi de construction ni d exp rience mat rielle riche Auraient ils d ailleurs le temps pour faire des cabanes Les cultures de l enfance actuelles laissent moins d espace temps pour cette exp rience
49. rit de chroniques de cabanes en saisissant toutes les opportunit s pour susciter l expression sur les exp riences singuli res de cabanes 3 Cabanes sans fondations mais fondamentale initiation transi tion socialisation 3 1 Une chronique cabaniste tr s singuli re Les histoires de cabane racont es oralement par des t moins de tout ge ont t faciles d clencher tant les cabanes ont un grand pouvoir d vocation Elles sont charg es de po sie et nous font renouer avec l enfant enfoui en nous Les cabanes suscitent souvent des souvenirs tr s nostalgiques Nous nous rem morons avec acuit le lieu o l on a march fait du v lo nag construit notre cabane Nous portons tous en nous une image de l espace acquise entre l ge de six et neuf ans environ Ces lieux font partie de ce que nous sommes Leur vocation cr e le sentiment exaltant de les visualiser nouveau de pr sentifier des odeurs la texture du bois les ombres et lumi re dy p n trer toujours et encore dans notre imagination Ces souvenirs sont ressentis comme particuli rement clairs d taill s vivants Ils donnent un sentiment de continuit du soi Leur vocation est souvent enthousiaste et agit comme un exhausteur d humeur qui renforce le bien tre et le sentiment d appartenance sociale Ces fragments de vie psychique tenus l cart de la conscience clament en quelque sorte leur droit reconnaissance
50. sage Je crois que c est mon premier souvenir avec le vent Cet attachement cet tre v g tal ce dr le de sapin m a donn une mission de protection de cet arbre et des arbres en g n ral Fr d ric 20 ans On y partage l aventure de se suffire soi m me de pouvoir subvenir ses besoins dans la nature de pouvoir y survivre On y prouve la sensation l id e d une petite tribu qui s adapte la saison pour trouver ses ressources manger des ch taignes s essayer la conservation des aliments d couvrir des go ts des saveurs L art de se nicher dans le paysage fait vivre l exaltation et l inconfort de cette vie qui consiste habiter la nature se prolongeant tant t aux pratiques de plein air ou sur le p le de l habitat Jeux spontan s dans une aire transitionnelle marqu e par les pairs l cart des adultes La cabane participe de la prise d autonomie de l enfant Il y exp rimente avec des pairs des jeux du comme si et explore les r les des adultes Les enfants 44 Dominique Bachelart les plus jeunes jouent la maman et au papa Ils ne se contentent pas d imiter les relations familiales qu ils connaissent Ils construisent plut t un id al type de la famille r inventant partir des r alit s individuelles contrast es une version pur e qui peut se r duire la trilogie papa maman b b et manger dormir jouer Delalande 2006 De 6 10 ans tous les t
51. se jouaient dans la vie familiale Actuellement la vie sociale s organise de plus en plus en lien avec les institutions leurs dispositifs temporels horaire et spatiaux implantation et la conjugaison de ces dispositifs selon leur disponibilit Maternit cr che cole entreprise h pital maison de retraite fun rarium Entrer sortir na tre grandir s installer se r fugier fuir mourir etc Comme le souligne Pluymaekers ces verbes disent l espace et renvoient nos liens affectifs Comment les institutions prennent elles en consid ration ce besoin de territoires secrets Comment exister sans territoires propres sans constituer un chez soi une intimit Il faut peu de choses pour faire une cabane mais cette exigence existentielle est vitale Les destins tragiques nous ont appris l importance de pouvoir construire sa cabane et sy r fugier pour se savoir existant au del et en de de son d sespoir Pluymaekers 2006 p 76 Les institutions d h bergement trop souvent dit il ne prennent pas en compte le sens et le poids de ce que repr sente pour l enfant l adolescent et l adulte institutionnalis la chambre l armoire le lit pour se constituer un chez soi Quand on n a plus que son lit comme cabane il devrait tre inviolable pour garder encore un peu de son int grit de sa dignit Pluymaekers 2006 p 79 4 2 Cabanes suspendues cabanes perch es palimpseste de lieux sauvag
52. stionnements cruciaux quant une cologie existentielle et invite souvent aux robinsonnades On sy sent explorateur ermite et l on essaye de vivre dans la nature sans rien d autre en mangeant des fleurs Ce biais purement ludique bas sur l envie de jouer plus que sur la curiosit vis vis de la nature a en fait t un bon moyen pour faire connaissance avec tout ce qui sy cache des rainettes aux mantes religieuses Nous on a exp riment ce terrain de jeu avant d apprendre que dans l herbe il y a des serpents et des tiques et des araign es Tout cela n a plus d importance lorsqu on a v cu de bons moments dans ce milieu Aucun de nous ne s est jamais fait piquer par un serpent Une araign e si mais c est peu cher pay pour les moments qu on a pass s Parfois on trouvait des orvets de tous petits serpents qui s enroulaient autour de nos doigts en faisant des huit Nature respecter Pas encore Mais on prenait conscience qu on n tait pas les seuls habiter dans l herbe Aline 20 ans Lieu d initiation aux bruits de la nature au froid de la nuit aux peurs de la nature la solitude la sexualit On peut y vivre sans tre sous le regard normatif des adultes ses pulsions sadiques l gard des animaux un sentiment de parent intime avec un arbre la d couverte d un l ment de pr dilection De l haut je sentais le vent Il venait nous caresser le vi
53. trats de subsistances entre les hommes et les animaux les perceptions saisonni res les r cits et mythes qui v hiculent les valeurs morales ducatives symboliques ou mat rielles de chaque soci t Pagezy Carri re et Sabinot 2010 Cet article analyse dans une premi re partie le sens de l habiter en cabane travers des autobiographies environnementales de jeunes animateurs et des chroniques d exp riences de cabanes recueillies sous forme de r cit crit ou oral aupr s d autres g n rations Il y a t il un ge des cabanes quels besoins fondamentaux de contenance de r assurance de d tachement r pondent elles Quel lien permettent elles avec ce que lon appelle commun ment la nature Quelles volutions sont perceptibles entre les g n rations Une deuxi me partie rep re des formes d encabanement adulte Cette r flexion nous a men e sur les routes et chemins sur les rives de la Vienne et de la Loire dans la zone du Parc Naturel R gional Loire Anjou Touraine la recherche de ces habitats sommaires cabanes perch es dans les arbres cabanes 36 Dominique Bachelart de vignes cabanes de jardin abris de loisir toues caban es cabanes de chasse au gibier d eau Ces cabanes nous informe t elles sur la persistance d une fonction psychique de la cabane comme espace priv interm diaire voie d acc s l intimit abris Pair libre comme le disait Henri David Thoreau Sont el
54. ur chambre D autres cabanes s installent dans le jardin encore vue des adultes mais aspirent la cabane sauvage loign e et m me ignor e des adultes Elles offrent labri l vasion du quotidien un repli sur soi un moment de r ve une chapp e de l imaginaire La cabane apprend Pacte de poser des limites entre int rieur et ext rieur entre haut et bas la s curit et l ins curit le permis et le transgressif le sauvage et le cultiv partir de quoi quelque chose commence tre Arrangement englobement modification de l espace en lieu La d limitation de l espace peut tre sommaire Il ne sagit pas encore d une construction mais d une d limitation d un entourement dans un contact continu avec le v g tal Le contour peine esquiss donne forme un dedans et un dehors L homme ne peut pas vivre dans l espace infini dirait Gaston Bachelard Nous petit groupe d enfants du voisinage faisions des labyrinthes dans les champs d herbes hautes en aplatissant l herbe pour cr er des couloirs Je me souviens qu on avait toujours pour objectif de remplir tout le champ avec nos am nagements mais finalement quand on avait six ou sept all es on commen ait cr er des pi ces comme dans une maison et on voulait juste habiter la petite parcelle que lon avait faite n tre Aline 20 ans De nombreuses cabanes sont un premier arrangement de branches ramass es
55. vestie est devenue une activit de batellerie patrimoniale Elle fonctionne l t contre saison des pratiques d antan qui s exer aient lorsque le niveau d eau tait le plus lev Les moteurs japonais ont remplac la remonte la voie carr e ou le halage Qu importe L offre touristique et ducative s est empar e de l engouement nouveau pour retrouver l alliance avec le fleuve en milieu rural comme urbain en proposant la d couverte de la p che traditionnelle des aff ts animaliers des parcours de d couverte des rives et des les 4 6 Hutte de chasse au gibier d eau Dans nos r gions la chasse au gibier d eau est une chasse aux appelants Des canes colvert sont tendues c est dire attach es sur un cadre flottant et servent d appelant pour amener les sauvages se poser en confiance Les huttes de chasse sont des bateaux camoufl s accost s sur des les Elles servent de cache pour les sauvaginiers Le malonnage est un autre mode de chasse de gibier d eau pratiqu e dans le V ron zone comprise entre la Vienne et la Loire leur confluence C est une chasse l affut qui se pratique dans les prairies humides dans les p riodes de crue La hutte est une sorte de tissage de branchage La structure est faite de deux poteaux de bois et inclut parfois un arbre Elle est refaite r guli rement et s int gre dans le paysage Le chasseur entre avec
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