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1. Jean Benoist D partement d anthropologie Facult des sciences sociales conomiques et politiques Universit de Montr al 1996 Carrefours de cultes et de soins l le Maurice Un document produit en version num rique par Jean Marie Tremblay b n vole professeur de sociologie au C gep de Chicoutimi Courriel jean marie_tremblay uqac ca Site web p dagogique http www uqac ca jmt sociologue Dans le cadre de Les classiques des sciences sociales Une biblioth que num rique fond e et dirig e par Jean Marie Tremblay professeur de sociologie au C gep de Chicoutimi Site web http classiques uqac ca Une collection d velopp e en collaboration avec la Biblioth que Paul Emile Boulet de l Universit du Qu bec Chicoutimi Site web http bibliotheque uqgac ca Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 2 Politique d utilisation de la biblioth que des Classiques Toute reproduction et rediffusion de nos fichiers est interdite m me avec la mention de leur provenance sans l autorisation for melle crite du fondateur des Classiques des sciences sociales Jean Marie Tremblay sociologue Les fichiers des Classiques des sciences sociales ne peuvent sans autorisation formelle tre h berg s en fichier ou page web en totalit ou en partie sur un serveur autre que celui des Classiques servir de base de travail un autre2. 1996 9 L un conomique fait merger les classes d une soci t indus trielle moderne o se distribuent les individus sans qu interviennent a priori leur origine ethnique Conflits syndicaux et oppositions sociales surgissent sur la base d affrontements relatifs un partage plus gal de la richesse et des pouvoirs Le gouvernement mauricien qui est celui d une d mocratie parlementaire sensible la pression lectorale de sa base vise une r elle r duction des in galit s La modernit fait irrup tion de fa on puissante travers les actions des nouveaux leaders conomiques comme dans les aspirations populaires et les modes de vie les plus quotidiens Mais l autre axe est ethnique Longtemps des groupes ethniques clairement d finis dot s d institutions religieuses et sociales entrete nant souvent des liens privil gi s avec leur pays d origine ont valoris un communalisme qui demeure perp tuellement implicite dans les relations entre les individus et entre les groupes La solidarit ethnique est souvent inexprim e mais latente dans la vie quotidienne elle peut prendre force lors de tensions et se cristalliser en p riode lecto rale sous forme de factions politiques qui sans toujours tre explicite ment ethniques s identifient majoritairement une communaut Le malaise qui gagne le pays par p riodes amplifi par la caisse de r sonance qu est une petite soci t insulaire participe donc
3. l e Maurice 1996 6 Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice Un chapitre publi dans l ouvrage sous la direction de Jean Benoist Soigner au pluriel essais sur le pluralisme m dical pp 89 113 Paris Les ditions Karthala 1996 520 pp Introduction Retour la table des mati res L le Maurice dispose de services m dicaux modernes fort d ve lopp s Elle compte aussi de nombreux praticiens qui participent sous diverses formes l exercice de m decines traditionnelles elles m mes plus ou moins directement li es par leur origine aux divers groupes qui ont form la population de l le m decines chinoise indiennes etc Mais les pratiques qui se d roulent quotidiennement dans l le en rapport avec la pr vention de la maladie et avec les soins qu elle peut recevoir vont bien au del de ces cadres En effet les champs du religieux et du m dical ont de tels recouvrements qu il est souvent ar tificiel de les distinguer et que l on ne peut traverser l un sans entrer quelque peu dans l autre et c est bien au del de la part th rapeutique de leurs pratiques que les diverses religions hindouisme islam ca tholicisme cultes chinois sectes vang liques contribuent aux r ponses offertes aux malades Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 7 Le passage d une soci t construite autour de la plantation sucri re une
4. la fois de l h ritage des contraintes anciennes et des humiliations subies par bien des groupes sociaux lors de la p riode coloniale et de la d stabilisa tion de cet ordre ancien M me mal v cues lorsqu elles taient abso lues les certitudes qui figeaient cet ordre assuraient une coh rence en assignant des r les et une place d finis et peu susceptibles d tre alt r s La disparition de ces contraintes cr e paradoxalement bien des angoisses surtout chez les vaincus de la modernit qui voient clater la famille le village les rythmes des t ches et des jours rep res an ciens auxquels aucun succ s nouveau ne vient se substituer C est l que s ancre leur demande de secours qui se manifeste tout autant dans l adh sion diverses pratiques religieuses que dans la recherche de soins pour une sant qui se sent menac e et que d stabilisent des si Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l e Maurice 1996 10 gnes autrefois mieux accept s Les conduites relatives la maladie doivent une part non n gligeable de leur sens cette situation et elles sont devenues le lieu d une intense activit qui brasse des courants de pratiques et de savoirs issus de toutes les traditions ethniques du pays Ce n est pas que la biom decine fort d velopp e ne soit largement accessible tous Un syst me hospitalier appuy par des lois sociales de bonne qualit des centres de soins des m decins priv s e
5. 40 45 ans ce Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 19 sont des loques Si vous ne r ussissez pas m dicalement mais si vous r ussissez gagner le moral donner confiance dans la vie en 10 15 jours le malade peut tre retap Dans les cas tr s graves nous ne soignons pas On dit d aller voir son m decin Nous ne sommes pas des gu risseurs nous refusons cette appellation Nous sommes l seu lement pour soulager couter comprendre et essayer de r conforter Les rencontres avec les pratiques les plus traditionnelles survien nent parfois des moments inattendus Une femme souffrait On lui avait fait de la sorcellerie J ai donn quelques m dicaments pour la calmer Quand j ai sorti un pendule dont je me sers tr s rarement a fait quelque chose Elle a cru que c tait un geste de sorcellerie Je lui ai pr cis qu elle n tait pas poss d e Mais elle a t gu rie d sorce l e Tout cela montre qu il ne suffit pas d avoir des connaissances pour tre un bon th rapeute Il faut travailler sur son propre esprit pour af finer son intuition son coute Aux confins du technique et du reli gieux la self analyse r guli rement pratiqu e en suivant les indica tions d une feuillet publi par l association pour guider la d marche suivre sert se corriger soi m me voir ses points faibles Ainsi comme cet employ de bureau indien soignant
6. nonc d un ensemble de r gles concernant l usage des rem des et comment utiliser les potentiels forts et les faibles La liste des maladies et de leurs principaux symp t mes ne s carte gu re de ce qui pourrait figurer dans un manuel fa milial de m decine g n rale La description de chaque maladie est suivie d un guide d utilisation des m dicaments hom opathiques Le dernier chapitre de l ouvrage Diet and Mind Body and Soul replace la Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 15 maladie dans son contexte spirituel tout en mettant l accent sur l im portance des choix alimentaires dont on souligne combien ils sont li s au spirituel 2 Pr parer des m dicaments Retour la table des mati res Les m dicaments hom opathiques utilis s par le centre sont assez diff rents de ceux qu utilisent en g n ral les hom opathes Ils portent les m mes noms et ils ont les m mes indications mais leur mode de pr paration est tout autre Il vite en tout cas le risque d un conflit avec les autorit s responsables de la sant publique qui pourraient s alarmer de voir user de pr parations pharmaceutiques effectu es partir de teintures m res contenant des produits physiologiquement actifs et m me dangereux avant dilution Aussi n emploie t on pas de teintures m res ni aucune autre sorte de produit pour pr parer les granules hom opathiques prescrits au Sivananda healing cente
7. dans un isolement jusque l in connu des pressions traumatisantes probl mes financiers volont d ducation co teuse des enfants clatement du r seau de parent tensions ethniques D pouill s de l encadrement social de villages au coeur desquels s infiltre l industrie d pouill s de bien des recours tra ditionnels que l ducation leur fait abandonner les malades trouvent l une r ponse modernis e aux questions qu ils posaient autrefois aux pusari et aux longanistes et auxquelles les m decins n apportent que des solutions trop partielles Mais le message le plus important va bien au del de la r ponse chaque individu sur ses probl mes propres les soins n offrent pas seu lement des diagnostics et des m dicaments Ils sont surtout la d mons tration d un autre ordre social qui est en action devant le malade Sur le th tre du dispensaire se pr sente une autre soci t mauricienne Les soignants en donnent une autre image Par leur pr sence d abord Mais aussi par la r f rence une philosophie qu ils identifient l Inde et qui nie les contradictions sociales agressives issues de la modernit Les in galit s de classe et les contrastes ethniques v cus comme des lieux de tension prennent un aspect positif car on les pr sente comme les pr alables d une unit Les activit s de soin et leurs fondements religieux et philosophiques permettent de r interpr ter les traumatis mes que ressentent vio
8. aux activit s de l As hram Ils lisent r guli rement la litt rature que celui ci publie et ils pratiquent la m ditation Cette d marche apporte aussi d autres b n fices en particulier celui fort manifeste d acqu rir un statut gr ce la participation une activit tr s valorisante Les propos de certains soignants qui ont cependant une place tr s enviable dans la soci t montrent clairement leur ancienne vocation et le regret de n avoir pas suivi la voie m dicale Le centre de soin et les cliniques p riph riques sont certes dot s d une large autonomie mais la r f rence au Sivananda Ashram revient r guli rement m me chez les non hindous et les brochures religieu ses aides la m ditation r flexions sur la sagesse etc disponibles l Ashram sont diffus s dans les lieux d attente des malades Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l e Maurice 1996 24 La doctrine de l Ashram est largement oecum nique Il y est expli citement dit que toutes les formes de culte et d adoration sont admises que toutes les repr sentations religieuses que tous les livres saints de l hindouisme de l islam du christianisme sont accept s Lors des r unions de pri re de l Ashram des fid les de diverses religions lisent tour de r le des extraits de leurs propres livres sacr s tout en com men ant tous par une invocation Krishna L fait capital les diff rences ethniques e
9. constellation de pratiques diagnostiques et th rapeutiques Les affiches de la salle d attente traitent de l acupuncture de la vert broth rapie de la di t tique etc En r alit aucun th ra peute et aucun malade ne se limitent l hom opathie Le diagnostic par la pression de la plante du pied occupe une place pr pond rante il est compl t par les m di caments vibro hom opathiques associ s parfois des manipulations vert brales ou des massages sur la r gion dont on a diagnostiqu qu elle tait malade ou distance de celle ci l coute du malade est explicitement consid r e comme tr s importante La consultation d passe fr quemment une demi heure et dans certains cas elle se borne un long entretien sans examen physique R p t e interval les r guliers elle a beaucoup d une psychoth rapie in formelle et elle s accompagne alors de conseils relatifs des probl mes relationnels ou personnels et m me de se cours mat riels Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l e Maurice 1996 22 e les conseil di t tiques sont tr s courants Ils sont de deux ordres Les uns visent la mise en accord de l individu quel qu il soit avec les r gles et les interdits de l hindouisme v g tarien les autres correspondent des r gimes relatifs des entit s pathologiques selon les prescriptions du Handbook of Healing e les conceptions de l tiologie des maladie sont
10. enseignement se fait sous forme de stage intensif d une dur e de quatre mois Les l ves se voient remettre un manuel qui deviendra leur livre de r f rence Handbook on Healing par Narayani et Gir darlall Publi d abord Bangalore puis en Afrique du sud cet ou vrage rappelle dans sa pr face que les auteurs sont inspir s par l en seignement hom opathique qu a donn Durban RSA le Swami Venkatesananda Celui ci qui tait le disciple de Swami Sivananda lui m me m decin fonda les Sivananda Ashram en leur donnant en tre autres objectifs celui de contribuer la sant des populations d fa voris es Il leur fixa pour moyen d action la formation d hom opathes non m decins capables d intervenir au profit des malades sans co t excessif pour eux Il organisa des stages de formation au diagnostic et au traitement C est en 1977 apr s avoir suivi cet enseignement que les auteurs du Handbook of Healing sont venus Maurice Ils y ont enseign l hom opathie au Sivananda Ashram Beau Bassin dans le centre de Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l e Maurice 1996 14 l le Sri Mangalal Desai originaire du Gujerat donna un terrain o fut difi un centre de soins inaugur le 8 septembre 1979 Rapidement se mirent alors en place des consultations dans le Centre et dans des dispensaires situ s dans divers difices religieux temples hindous glises catholiques et dans des centres so
11. essentiel lement diff rentes Le fonctionnement et le succ s du Sivananda healing center r v lent des besoins auxquels ne r pondent ni les structures m dicales ni les th rapeutes traditionnels lors des changements importants li s l industrialisation tr s rapide de l le Sur le plan m dical le centre re pr sente avant tout une modernisation de la m decine traditionnelle Mais son impact social est bien plus important car l id ologie du groupe fondateur permet sans l expliciter de lutter contre le commu nalisme tout en revivifiant les liens avec l Inde Lieu auquel la prati que th rapeutique l gitime l acc s de tous il contribue affirmer la convergence des religions et par l celle des groupes sociaux de l le Sans n cessairement le savoir on y vient dans une d marche globale o la demande de soin ou de protection imm diate s accompagne d une autre demande qui vise transformer la soci t elle m me Bibliographie Retour la table des mati res ALBER J L 1993 Emploi de la pens e et pens e mode d emploi en contexte pluriethnique in J Hainard et R Kaehr ed Si Neuch tel Mus e d ethnographie pp 89 114 BEALS A R 1976 Strategies of Resort to Curers in South India in C LESLIE ed Asian Medical Systems U of California Press BENOIST Jean 1975 Patients Healers and Doctors in a polyethnic society African Environnment 1 4 40 64 Jean Benoist Carrefours de cultes et de
12. la table des mati res Les soignants sont de toutes origines Les Hindous sont majoritai res mais m me en leur sein des coupures souvent tr s affirm es Maurice entre castes entre nord indiens et tamouls par exemple sont ici effac es Les non hindous ont toute leur place dans les m mes conditions d exercice Musulmans Franco Mauriciens Cr oles Chi nois participent diverses activit s du centre Les in galit s sociales Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 28 elles aussi semblent effac es Dans les cliniques loign es o deux o trois personnes re oivent les malades dans les annexes d un difice religieux il est tout fait normal qu un individu de statut social lev soit l aide d un hom opathe de classe tr s inf rieure lui Je pense par exemple tel cadre du secteur tertiaire appartenant une famille franco mauricienne bien connue et qui tait l aide d un jeune policier tamoul La majorit des soignants appartient aux classes moyennes urbaines employ s techniciens fonctionnaires bien que certains aient une position plus importante Les malades en majorit urbains eux aussi appartiennent des groupes plus d favoris s et sont pour plus de 70 des femmes Le v ritable th tre de soins qui accueille ainsi le malade n est pas seulement une repr sentation de la modernit il montre surtout des acteurs qui soignent ensemble dans un Centre
13. plac sous l gide d un Swami hindou La caution religieuse donne sa force et son sens ce qu expriment sur la soci t mauricienne leur pr sence simultan e et la coop ration dans un ordre qui contredit les st r otypes souvent justi fi es sur les oppositions ethniques et les in galit s c une image positive du changement social en cours Retour la table des mati res La dimension religieuse rev t dans le contexte mauricien un sens tout autre que celui qu elle pourrait avoir en Inde et sans doute dans la soci t indienne d Afrique du sud Sous le message religieux et philo sophique perce un message social d une grande importance qui fait que le centre devient un lieu o les tensions n es du communalisme sont rejet es l ext rieur au profit d une image de paix de concorde et d galit Coh rents par leurs apparences avec les r f rences techniques de la soci t moderne o sont immerg s les malades qui viennent les rece Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 29 voir les soins offerts ne renvoient pas un groupe ethnique particu lier ni une classe sociale Mais en permettant chacun de venir ils font du centre un carrefour des angoisses et des tensions Tous les soi gnants soulignent combien la demande qui leur est adress e refl te de profondes difficult s issues du changement de la soci t Les femmes en particulier se trouvent soumises
14. puis es dans un large ventail de m decines orientales ou de m decines parall les bien que l hom opathie soit largement domi nante Il y a quatre maladies qui r gnent depuis que le p ch est entr dans le monde la syphilis la tuberculose la l pre et la gonorh e Par exemple l asthme c est que le g ne de la tuberculose est l On donne quatre pilules Mais les r f rences la nature voire la naturopathie sont fr quen tes L homme est responsable de sa maladie On se chauffe on conditionne l air le corps dit Tu n as pas besoin de moi je te quitte L nergie n entre plus et c est fini D une fa on g n rale les sympt mes seuls sont recherch s la re cherche tiologique passant au second plan ou demeurant tout fait absente e jamais il n est fait allusion une intervention divine directe dans le processus de diagnostic ou de traitement pas plus que dans l tiologie des maladies soign es au Centre Par contre l aide de la pri re et de la m ditation est consid r e comme allant de soi et on s y r f re sans s appesantir tant cela parait vident La dimension religieuse hindoue est sous jacente l ensemble des activit s et l on ne peut s en tenir au discours explicite qui est appa remment tr s m dical Ce n est pas un hasard si les ferronneries prot geant les fen tres des cabinets de consultation sont travaill es en forme de OM sanscrit D autre part le pluralisme m
15. Maurice 1996 33 Fin du texte
16. ayeur le nerf connect l organe fait un noeud La circulation est interrompue ce point l vers la glande pituitaire la glande principale qui va au plexus solaire le plexus solaire re oit tous les nerfs Vous en traitant ce point vous retirez les n uds il y en a pour les poumons le coeur On a eu quelques cas vraiment extraordinaires Nous som mes quatre faire sp cialement ce travail Beaucoup de ceux qui viennent vous pensent Ce sont des char latans Mais aussit t qu une personne comprend un int r t pour son cas particulier c est d j 50 de gagn dans le bien tre que vous pouvez lui apporter Malheureusement dans les h pitaux les m decins ne peuvent pas aller au fond des choses Alors ces gens qui sont pau vres tr s pauvres vont l h pital passent sortent avec trois compri m s mais ils n ont pas la tranquillit la qui tude d me Ils vont pren dre des m dicaments Mais pour que quelque chose fasse un effet il faut que le subconscient ait t saisi pour mener parall lement cette bataille La fa on dont le m decin questionne ne permet pas au ma lade de trouver des mots pour exprimer ce qu il ressent et emp che le diagnostic Ils disent Mo les reins faire mal 80 de nos malades sont des femmes Tous les probl mes reposent sur elles La plupart des hommes ont d missionn de leurs devoirs paternels Et la femme a se d fendre sans appui moral de l homme
17. boratoire e dilution dans de l eau distill e e r le de l alcool comme pr servateur e utilisation d une machine complexe e r f rence un processus physique e codification de la carte voquant l informatique e pr cision quantitative des dilutions la disposition g n rale du local principal du Sivananda hea ling center e b timent moderne semblable un dispensaire e salle d attente e enregistrement des malades par des aides techniques en cadrant la consultation e pharmacie o sont pr par s et stock s les m dicaments e s rie de cabinets de consultation donnant chacun sur la salle d attente le cadre mat riel de la consultation e cabinet de consultation quip comme un cabinet m dical et s en inspirant directement bureau t l phone chaise Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 21 pour le malade table d examen affiches m dicales aux murs soignant en blouses blanches fichier d observation des malades utilisation d un imposant livre m dical Boericke Pocket Manual of Homeopathic Materia medica e b Mais si cette adh sion la science est vidente au premier re gard c est une science diff rente celle des m decines douces naturelles la r f rence principale est l hom opathie autant quant aux m dicaments qu en ce qui concerne la nosologie et les explications tiologiques mais l hom opathie n est que le centre d une
18. ciaux La Sivananda healing association servit de cadre aux hom opathes ainsi form s et ceux qui ann e apr s ann e les rejoignirent La fin de stage est marqu e par l octroi d un dipl me qui bien entendu ne donne pas le droit d exercer la m decine bien que les autorit s mauriciennes tout en tant attenti ves ce qui se fait dans ces centres aient montr une grande tol rance envers leurs activit s Handbook of healing est un tr s curieux ouvrage Ecrit for the use of Healer il centre son enseignement sur l hom opathie mais il y ajoute des rappels de beaucoup d autres doctrines m dicales que pr sente un chapitre consacr aux Natural healing methods La prati que du Sivanana healing center se conforme ses indications en pr nant l hom opathie et l utilisation de m thodes naturelles de soins qui forment une excellente combinaison lorsqu elles sont utilis es en conjonction avec l hom opathie On soigne aussi en vitant au ma lade toute absorption de drogues gr ce l utilisation de techniques vari es Pressure therapy Foot reflexology Breathing exercises Wa ter treatment etc L essentiel de l ouvrage est cependant consacr l hom opathie Les m dicaments hom opathiques y sont pr sent s dans une premi re partie liste de 36 mixtures puis de 80 rem des simples Apr s une excursion du c t de l astrologie le plus long chapitre porte le titre de Diseases et se pr sente comme l
19. comme faisant partie de l univers m dical moderne comme n tant qu une de ses variantes adapt e la n cessit d un appui spiri tuel sont bas s sur des proc d s de diagnostic et sur des m dicaments enti rement symboliques et d pourvus de toute connexion avec les connaissances m dicales auxquelles ils semblent renvoyer Les mala des re oivent une m decine traditionnelle sans le savoir et en pen sant recevoir une forme adapt e d une m decine moderne Il faudrait pas croire que l on se trouve en rupture avec ce qui se pratiquait auparavant et qui se pratique encore dans d autres secteurs de la soci t mauricienne La trame pluralisme de la m decine mauri cienne r pond au pluralisme de la soci t elle m me Ansi que le re marquait Sussman Le syst me m dical pluraliste de Maurice est bien adapt au contexte h t rog ne dans lequel il existe 1983 p 373 Mais ce pluralisme poursuit elle n est pas facteur d clate ment au contraire car il a pu difier une id ologie o chaque compo sante de la diversit devient une partie d un ensemble v cu comme potentiellement unitaire en raison des multiples changes qui se d roulent Malgr l h t rog n it ethnique et religieuse de ses popula tions et son histoire relativement br ve Maurice a un syst me de re pr sentations et de classifications m dicales qui offre une trame uni fi e gr ce laquelle les patients structurent aussi bien leur perc
20. dans un dispensaire de l association install dans un temple hindou atteint on un certain id al Mon papa tait infirmier Il a travaill 22 ans et moi son co t j ai travaill 15 ans l h pital sur la propri t J ai lu ses bouquins allopathiques C m a toujours int ress mais je n ai pas eu l occasion d tudier la m decine Nous recevons une trentaine de personnes cha que samedi nous sommes de toutes les communaut s et nous venons apr s les heures de bureau Je veux rendre service Je suis bien dans mon travail le Bon Dieu m a b ni alors je veux aider ceux qui souf frent C est ce que j ai toujours voulu faire vu que depuis mon enfance mon papa voulait me faire dentiste Quand il est mort subitement c tait fini J avais commenc un an et demi Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 20 Tout cela se d roule m me lorsque les consultations ont lieu dans des difices religieux selon un protocole qui a toutes les apparences de celui d un dispensaire de sant publique S1 l on essaie de d gager les r gularit s les plus significatives de ce qui se passe dans ce dispensaire on voit se mettre en ordre plu sieurs l ments qui construisent une combinaison originale a Notons d abord des l ments qui reprennent les apparences d une m decine moderne la technique de fabrication des m dicaments qui se r f re explicitement des pratiques de la
21. dical du centre Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 23 proc de clairement de la pens e de l Inde et il fait cho au pluralisme indien qui associe lui m me de fa on tout fait naturelle m decins et param dicaux pharmaciens praticiens des m decines savantes chi noise ayurv dique siddha hom opathes gu risseurs de village ma trones herboristes praticiens magico religieux etc Il le fait en liai son avec une pens e humaniste appuy e sur une vision universaliste destin e d passer les oppositions de cultes et de cultures La m decine exerc e au Centre est v ritablement une philosophie en action et elle a en ce domaine valeur de d monstration Maurice comme en Inde en effet la pr sence de philosophies m dicales plu ralistes refl te une conception g n rale pluraliste de l Univers Il y a de nombreux Dieux de nombreuses voies vers le ciel de nombreuses textes sacr s de nombreuses traditions intellectuelles et bien des sor tes diff rentes de gens Beals Dans l expression de leurs motivations les th rapeutes voquent d ailleurs un devoir religieux voire une crise spirituelle et une crise d identit qui les ont conduits adh rer au centre Ils sont devenus hom opathes au cours d une d marche plus globale o se rencontrent le d sir de participer une oeuvre de bienfaisance envers les malades et un cheminement religieux qui les fait adh rer
22. eption de la maladie que leur utilisation des diverses ressources th rapeuti ques disponibles 1983 p 355 Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 27 Or ce pluralisme souple et finalement unificateur subit un double assaut de la biom decine et d une fa on g n rale du paradigme scien tifique qui vient branler les fondements de la plupart des an ciennes doctrines m dicales de l mergence de certaines tendances la purification des pratiques religieuses en vue de les d barrasser des influences d autres religions Les musulmans ne sont pas les seuls aller dans ce sens hindous et chr tiens ont une tendance analogue Le Centre vient r pondre cette menace En donnant apparemment une r ponse issue de la modernit il r affirme le pluralisme travers la doctrine religieuse de l Ashram ouvert tous les cultes travers la diversit des th rapeutiques qu il accepte et par la rupture des hi rar chies de classe et des tanch it s ethniques que d montre sa pratique Il appara t comme une forme de transition comme une r ponse ancr e dans le religieux indien qui permet d aborder la modernit en rema niant sans le rejeter le pluralisme ant rieur et en permettant que conti nue le r le privil gi du m dical dans la perm abilit entre les ethnies et entre les croyances b des soignants qui refl tent la nouvelle soci t mauricienne Retour
23. es Classiques des sciences sociales S Courriel oj benoist wanadoo fr Polices de caract res utilis e Pour le texte Times New Roman 14 points Pour les citations Times New Roman 12 points Pour les notes de bas de page Times New Roman 12 points dition lectronique r alis e avec le traitement de textes Microsoft Word 2004 pour Macintosh Mise en page sur papier format LETTRE US letter 8 5 x 11 dition num rique r alis e le 30 novembre 2007 Chicoutimi Ville de Saguenay province de Qu bec Canada amp Fait avec Macintosh Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 4 Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice Essais sur le pluralisme m d Un chapitre publi dans l ouvrage sous la direction de Jean Benoist Soigner au pluriel essais sur le pluralisme m dical pp 89 113 Paris Les ditions Karthala 1996 520 pp Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 5 Table des mati res Introduction l Devenir hom opathe 2 Pr parer des m dicaments 3 Donner des consultations 4 Niveaux d une action a Une technique au carrefour de la tradition et de la modernit b des soignants qui refl tent la nouvelle soci t mauricienne c une image positive du changement social en cours Bibliographie Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins
24. fichier modifi ensuite par tout autre moyen couleur police mise en page extraits support etc Les fichiers html doc pdf rtf jpg gif disponibles sur le site Les Classiques des sciences sociales sont la propri t des Classi ques des sciences sociales un organisme but non lucratif com pos exclusivement de b n voles lls sont disponibles pour une utilisation intellectuelle et person nelle et en aucun cas commerciale Toute utilisation des fins commerciales des fichiers sur ce site est strictement interdite et toute rediffusion est galement strictement interdite L acc s notre travail est libre et gratuit tous les utilisa teurs C est notre mission Jean Marie Tremblay sociologue Fondateur et Pr sident directeur g n ral LES CLASSIQUES DES SCIENCES SOCIALES Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 3 Cette dition lectronique a t r alis e par Jean Marie Tremblay b n vole profes seur de sociologie au C gep de Chicoutimi partir de Jean Benoist anthropologue Carrefours de cultes et de soins l le Maurice Un chapitre publi dans l ouvrage sous la direction de Jean Benoist Soigner au pluriel essais sur le pluralisme m dical pp 89 113 Paris Les Editions Karthala 1996 520 pp M Jean Benoist anthropologue nous a accord le 17 juillet 2007 son autorisa tion de diffuser toutes ses publications dans L
25. issons c est la confiance illimit e que nous faisons avoir au malade Quand c est d bloqu d foul alors l nous le prenons en charge Sur les or ganes qui ne fonctionnent pas nous avons le pressure pointing nous avons d tect certains organes qui ne fonctionnent pas par les pieds Voil une m thode merveilleuse tr s loin de la m decine allopathi que La religion Travailler dans un temple indien ou dans une mosqu e moi catholique Mon impression c est que le Christ a paru en Orient Mais pendant 33 ans o tait il Peut tre au Tibet peut Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 18 tre en Chine Qui dit qu il n a pas t en Inde Chacun prie son Dieu nous ne pouvons pas savoir C est ma maison je ne connais pas ta maison Les techniques en oeuvre sont vari es Deux autres th rapeutes travaillent dans une pi ce voisine L un est technicien en lectronique l autre policier Tous deux sont en train de masser un homme qui a de violentes douleurs au genou gauche Il s agit de r flexoth rapie mas sage lent et continu du coude droit et pression sur la plante du pied gauche puis pressions sur la projection plantaire de la colonne vert brale Cependant un jour suivant un autre th rapeute cadre dans une banque exposera qu il suit une autre d marche un organe n est ja mais malade Mais par une certaine raison un stress un choc une fr
26. lemment ceux qui viennent consulter Entre les croyances pass es marqu es par la plantation coloniale et une mo dernit v cue comme trang re les pratiques le langage et les r f rences du Centre assurent la transition Ils d montrent que l univers mauricien impr gn de la vision du monde de l univers indien est compatible avec la modernit et qu il ne s y d truit pas Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 30 Mais le plus important n est pas cette m diation interethnique in terreligieuse C est la m diation entre l univers de la science moderne que le centre repr sente au sens d une repr sentation th trale et ce lui de la religion Car chacune de ses activit s diagnostic traite ment est enracin e quelque part bien au del de ce que conna t la science non dans l inconnu mais dans ce qui est par essence incon naissable et de ce fait appartient au divin On n a pas se r f rer au surnaturel on montre qu il est la racine du monde au del du naturel mais que celui ci est un chemin qui conduit lui si on sait viter les pi ges de s en tenir la science Nous retrouvons ici la force des m decines douces modernes En pr sentant leur enracinement comme plongeant au del du scientifique du connaissable par la voie de la science elle peuvent r soudre des aspirations contradictoires aspira tion la science qui peut agir mais qui donne une rep
27. ns et qu elles peuvent m me y demeurer pendant 20 ans Mais la pr paration est fragile Le soleil la d truit ainsi que les odeurs qui neutralisent les m dicaments On doit craindre en particulier les piments et l odeur du dentifrice ce c1 rappelle la croyance courante selon laquelle l absorption de produits la menthe d truit l effet des m dicaments hom opathiques Lorsque tout est pr t on peut r gler la dilution Un compteur plac sur la machine indique une s rie de dilutions et le pharmacien en choisit une en tournant un bouton Les dilutions suivent le classement suivant une dilution de 1 x correspond une goutte de teinture m re dans neuf gouttes d eau une dilution de 2 x correspond une goutte de la solution pr c dente dans 9 gouttes d eau et ainsi de suite Les dilutions utilis es au centre sont les suivantes 6 x 30 x 200x Mille x deviennent 1 m On utilise des dilutions de 1 m 10 m 100 m Cette derni re est not e CM et on peut pousser jusqu MM soit mille m La croyance exprim e pare les th rapeutes veut qu un m di cament soit d autant plus puissant qu il est plus dilu Quand l appareil a t ajust la dilution souhait e il est mis en marche En 6 minutes les granules sont transform s en m dicament Ils sont alors manipul s avec pr caution sans contact direct avec les doigts de quiconque et plac s dans de petits tubes analogues ceux qu utilisent les laboratoires h
28. ns hom opathi ques le Sivananda healing center Il est le lieu principal des activit s de soin de la Sivananda healing association elle m me issue d un mouvement originaire de Bangalore en Inde et qui est en troite coo p ration avec les activit s du Sivananda Ashram lieu de pri re et de m ditation interethnique Le Centre est tabli depuis quelques ann es dans une des r gions urbanis es et tr s peupl es de l le quartier mi distance entre les zones d habitat les plus riches et les zones les plus d favoris es K OK K k Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 13 Comment un centre m dical sert il de r v lateur une dynamique sociale et culturelle Et comment celle ci rencontre t elle les logiques de ceux qui s adressent ce centre travers son message philoso phique comme par sa fa on de concevoir les soins 1l joue un r le exemplaire dans la dialectique fort tendue entre l indianit toujours r surgente Maurice et la n cessit d une unit nationale Il joue sy m triquement un r le capital dans l ajustement la modernit des classes moyennes urbaines r cemment issues du monde rural en effet les soins sont dispens s par des personnes issues de toutes les classes et de tous les groupes ethniques de Maurice et qui ont re u une forma tion acc l r e aux diagnostics et aux soins 1 Devenir hom opathe Retour la table des mati res L
29. nus majoritaires les descendants des travailleurs indiens renforc s par l arriv e de commer ants immigr s de l Inde ont peu peu affirm leur place tous les niveaux Ils jouent actuellement un r le d terminant en tant devenus les principaux cadres politiques administratifs et intellectuels de l le ind pendante depuis 1968 Les descendants direct des colons Europ ens contr lent l essentiel des terres et des usines sucri res en conjonction avec les Indiens et les Chinois ils ont donn l le Mau rice une orientation r solument moderne en d veloppant depuis une vingtaine d ann e le tourisme puis l industrie Celle ci a donn essor une classe conomiquement puissante de dirigeants d entreprises issus de divers groupes hindous indiens musulmans chinois cr oles issus de divers m tissages franco mauriciens Les masses populaires refl tent elles aussi la diversit originelle mais les anciens clivages issus de la soci t de plantation se complexifient et le mod le social et conomique d une modernit acc l r e taraude les fronti res entre les groupes sociaux Deux axes structurent ainsi la soci t mauricienne mais en se re coupant ils se contredisent de plus en plus tablissant une dialectique qui ne laisse de pr pond rance aucun d eux mais un subtil quili bre porteur la fois de tensions et d innovations Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice
30. om opathiques classiques Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 17 3 Donner des consultations Retour la table des mati res L observation des consultations donn es au Sivananda healing cen ter r v le comment s y entrecroisent bien des ph nom nes Dans les consultations comme d une fa on plus g n rale dans tout le fonction nement du centre on peut distinguer d abord un niveau explicite le plus vident finalit m dicale Un autre niveau est lui implicite l le propos m dical initial est transcend par une mise en sc ne qui branle l image des r les ethniques et sociaux au sein de la soci t mauricienne la lecture de cette mise en sc ne permet de percevoir comment se fait sa prise sur le malade et nous indique le lieu le plus probable de l efficacit de cette institution une th rapie remettant en place les dislocations issues des transformations r centes de la vie so ciale Quand il vient nous mettons le malade dans sa peau affirme l un des th rapeutes franco mauricien occupant un poste assez lev dans la fonction publique et qui est consid r au centre comme un sp cia liste du diagnostic Nous ne le traitons pas tout de suite nous l invi tons causer et en causant causant 1l finit par dire quelque chose que nous comprenons On peut se dire le mal tient de 90 des ma ladies viennent du cerveau ce qui fait que nous r uss
31. oris s des zones urbaines les apports culturels et religieux originels ne sont pas des patrimoines clairement d limit s attribu s tel ou tel groupe Ils s identifient de moins en moins leurs origines Benoist 1989 Comme dans l le voisine La R union Benoist 1975 1993 les chevauchements sont nombreux En particulier les choix que font les individus dans leur recherche de secours franchissent tr s ais ment les barri res ethniques Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 11 et les oppositions religieuses qui leur sont souvent li es et l on s adresse successivement ou simultan ment des formes tr s diff rentes de recours pusari tamoul tombeau du P re Laval ce pr tre catholique que fr quentent aussi hindous et musulmans tombe de saints musulmans pratiques populaires originaires du nord de l Inde gu risseurs cr oles sages femmes hindoues ou musulmanes da sont accessibles la plupart ind pendamment de son origine On est en droit de se demander si cette remarquable facilit n est pas en conti nuit avec les conduites courantes en Inde o les connaissances des individus sur la maladie voquent le pouvoir d absorption d une ponge quant aux informations m dicales quelle qu en soit la source et parce que les diff rents types de traitement ne sont pas consid r s comme contradictoires il n y a rien de mal en essayer simulta n ment une g
32. ours de cultes et de soins l le Maurice 1996 25 dans une part de ses positions sur l tiologie des maladies On ne se dresse pas en opposition avec les fondements pist mologiques de la m decine moderne bien au contraire Les r f rences tiologiques ne touchent jamais le surnaturel et elles n empi tent pas sur le champ du religieux Les explications physiopathologiques donn es aux malades font appel l anatomie au fonctionnement du corps l environne ment ou l alimentation Malades et th rapeutes situent la pratique m dicale qui s exerce au Centre au sein de la m decine moderne dont elle repr sente leurs yeux une variante enracin e dans une dimen sion spirituelle Si certaines convergences avec la m decine ayurv di que apparaissent c est plus du fait de la doctrine hom opathique elle m me qu en raison d une volont de se rattacher l Ayurveda Le travail du th rapeute est accompagn d une gestuelle qui se rap proche beaucoup de celle du m decin dans son cabinet La tenue de dossiers m dicaux vient conforter ce sentiment aux yeux du malade Il en va de m me lors de la formulation de l ordonnance ou de son ex cution la pharmacie du Centre L encore blouses blanches m di caments envelopp s dans des tubes prescription soigneuse des condi tions d administration se pr sentent sous un visage totalement techni que sans laisser apparemment de place un quelconque appel au sur na
33. r Les granules sont pr par s selon une m thode qui aurait t mise au point en Grande Bretagne par Malcom Roe La sp cificit de cette m thode tient ce que les teintures m res sont remplac es par l action d une machine le magneto geometric potentizer sur les granules neu tres de lactose Chaque m dicament hom opathique serait caract ris par une vibration propre L appareil vise soumettre le granule de lac tose cette vibration dont il gardera trace ensuite et dont il v hiculera vers le malade l effet bienfaisant lui aussi sp cifique Pour chaque m dicament produire la pharmacie du centre de soin dispose d une carte sur laquelle figure un diagramme form de plusieurs cercles concentriques Le cercle le plus petit porte des encoches dont la dispo sition commande le rythme vibratoire du m dicament auquel corres pond la carte La machine suit ce rythme lorsqu on la met en marche apr s introduction de la carte et le communique aux granules qui en l enregistrant deviennent des m dicaments Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 16 Le plus grand soin doit tre apport aux manipulations destin es la pr paration de ceux ci La carte est ins r e de fa on tr s pr cise dans la machine On introduit ensuite dans une ouverture le lactose et quelques gouttes d eau distill e contenant 30 d alcool Il est enseign aux hom opathes que l alcool retient les vibratio
34. r sentation inacceptable de l tre aspiration au surnaturel qu on ne croit pas ca pable d agir seul les succ s de la science ne lui laissant pas de chance mais qui en se pr sentant comme la part d inconnaissable du monde est acceptable Dans une soci t polyethnique o l identification des individus passe largement par le religieux il est remarquable que ce lieu de re cours mais il en existe bien d autres qui ont une structure analogue soit apparemment marqu par une identit religieuse explicite forte hindoue en l esp ce alors que ceux qui s y adressent viennent d ail leurs et ne sont nullement des convertis En venant au centre ils semblent alors franchir les fronti res qui pourraient s parer les identi t s et cloisonner l le tel point que ce franchissement de fronti res est sans doute l un des aspects principaux de ce qui s y passe Par del le discours explicite de ces lieux qu il soit religieux ou m dical l clatement des cloisons communalistes est au coeur du processus de prise en charge Les consultations d montrent ceux qui viennent se faire soigner la r solution des oppositions elles mettent en sc ne des situations o les contradictions identitaires qui branlent bien des individus sont r solues par la perm abilit entre des configurations Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 31 culturelles que la soci t globale pr sente souvent comme
35. rande diversit Beals 1976 p 191 Gr ce cette perm abilit m dicale les lieux de soin sont des lieux privil gi s de perm abilit interethnique Ils ne sont donc pas que des lieux de soin ils mettent en contact et en communication des traditions aux origines les plus diverses et travers la pratique tr s concr te des soins c est une pratique interethnique qui se construit Le r le de celle ci est d autant plus important dans la dynamique des rela tions interethniques dans l le qu il s agit d un r le souterrain inexpri m second par rapport au r le explicite et accept de tous soulager des malades Certains lieux de soins sont donc de v ritables th tres de la communication interethnique communication qui s difie au cours d une mise en sc ne de la prise en charge de la maladie Le pluralisme m dical trouve l un usage social original il cons truit des passerelles entre cultures et il participe dans le cas de cette soci t l dification de la cr olit commune par del diff rentes cultures Les changements r cents de la soci t mauricienne ont toutefois conduit l mergence d une classe moyenne ayant un niveau d ins truction non n gligeable et qui ne participe que de fa on r ticente Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l e Maurice 1996 12 celles des activit s de soins qui sont le plus explicitement marqu es par l empreinte des croyances populai
36. res bien qu elle ne s en dissocie pas r ellement Aussi est ce d abord dans ce groupe qu a pris racine le fait m dical tr s particulier que nous allons d couvrir ici Il ne s agit pas de la rencontre entre des pratiques populaires traditionnelles et la m decine moderne comme le montrent bien des pluralismes Ni de la confrontation de la biom decine aux nouvelles m decines douces ou parall les bien que les apparences puissent conduire l observateur retenir initialement cette interpr tation mais d une nouvelle mise en sc ne de la communication interethnique autour de la maladie sous une forme accessible et intelligible cette nouvelle classe moyenne Ainsi par del le m dical s agit il de la structure sociale de l le et de ses changements r cents Cette pratique m dicale est en m me temps une pratique sur le social Dans une soci t en changement ra pide l activit m dicale par le relais d une consultation et de l admi nistration d un traitement contribue laborer une nouvelle repr sen tation de cette soci t Tout en gravitant autour de pr occupations ap paremment exclusivement li es la sant les soins dispens s se pla cent au coeur des changements sociaux r cents et des tensions ethni ques que vivent les individus et ils r v lent le foyer r el d un malaise collectif Nous allons voir comment en concentrant notre observation sur un lieu hautement significatif Il s agit d un centre de soi
37. soci t moderne en croissance conomique rapide et affect e par le tourbillon d un immense changement social vient frapper de plein fouet cette constellation de pratiques et de valeurs La pathologie certes demeure mais elle est affect e elle aussi par le changement Ce n est pas seulement la pollution les transformations de l alimentation et des activit s qui sont en cause mais bien plus globalement les r ac tions la modernit au bouleversement du quotidien la remise en cause de l image d une soci t o jusqu alors et malgr les tensions la place de chacun tait claire tous Image qui se brouille d sormais soci t o les r ponses donn es auparavant aux questions sur la signi fication de la douleur et de la mort semblent t tonner entre des univers contradictoires Et cependant il ne cesse d merger des solutions nouvelles dans cet empirisme sociologique qui caract rise les soci t s des mondes cr oles Maurice par sa diversit extr me par le poids relativement faible qu y occupe la composante d origine africaine et la place consi d rable des divers apports de l Inde occupe certes une place part dans l ensemble du monde cr ole Mais elle est pleinement concern e par tout ce qui s y d roule remaniements majeurs de la soci t de plantation issue de l poque coloniale insertion dans des courants conomiques migratoires touristiques culturels d chelle plan taire convergences et fusions a
38. soins l le Maurice 1996 32 BENOIST J 1989 De l Inde Maurice et de Maurice l Inde ou la r incarnation d une soci t Carbet Fort de France N 9 d cembre 1989 pp 185 201 Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales JMT BENOIST J 1993 Anthropologie m dicale en soci t cr ole Paris P U F Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales JMT BISSOONDOYAL U S B C SERVANSING 1986 Indian La bour Immigration Mahatma Gandhi Institute Mauritius 329 p BOERICKE W Pocket Manual of Hom opathic Materia Medica comprising the characteristic and guiding symptoms of all remedies clinical and pathogenic 9 ed B Jain Publishers New Delhi 1042 p n d ERIKSEN T H 1992 Us and them in Modern Societies Ethnicity and Nationalism in Mauritius Scandinavian University Press Oslo NARAYANI and GIRDARLALL 1981 Handbook on Healing 2nd ed Sivananda Press 570 New Germany road Reservoir Hills Durban South Africa 2nd ed PARATIAN R 1995 La r publique de l le Maurice l heure des d localisations Paris L Harmattan SUSSMAN Linda K 1983 Medical pluralism on Mauritius a stu dy of medical beliefs and prectises in a polyethnic society Ph D Washington University 445 p SUSSMAN Linda K 1983 Unity and diversity in a polyethnic so ciety the maintenance of medical pluralism in Mauritius Soc Sci Med 158 247 260 Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le
39. t des pharmacies implant s la port e de chaque village la rendent omni pr sente et chaque malade s adresse un jour elle Mais elle n est pas seule dans les choix et les demandeurs de soins la combinent de fa ons tr s vari es d autres th rapies techniques ou religieuses Il existe ainsi un tr s large pluralisme m dical qui offre chacun une s rie d alternatives dont l num ration est loquente Il existe au moins douze cat gories de soignants l le Maurice Ce sont 1 Les m decins de la biom decine 2 Les m decins et les pharmaciens chi nois 3 Les praticiens ayurv diques 4 Les hom opathes 5 Les herbo ristes sud indiens 6 les matrones indo mauriciennes et cr oles 7 Les gu risseurs cr oles 8 Les pr tres catholiques et autres soignants reli gieux 9 Les pr tres gu risseurs hindous 10 Les pr tres gu risseurs musulmans 11 Les religieuses boudhistes 12 Des sorciers de tous les groupes ethniques ou religieux Sussman 1983 Au premier abord la diversit de ces pratiques m dicales semble refl ter les origines de la population de l le chaque groupe ayant ap port la fois ses fa ons de soigner les r f rences religieuses et phi losophiques qui soutiennent ses conceptions de la maladie et les sp cialistes qui entretiennent son propre syst me m dical chacun ses croyances ses connaissances ses techniciens En r alit surtout dans le monde rural et dans les groupes d fav
40. t religieuses ne sont plus le fondement d opposi tions Au contraire elles sont int gr es dans un ensemble plus vaste qui les accepte toutes et qui donne un sens positif leur rassemble ment les diverses religions les diverses ethnies apparaissent tr s ex plicitement comme autant de voies qui convergent vers un m me but L Inde est toujours pr sente l arri re plan elle est la r f rence in dispensable dont la philosophie vient cautionner cette unit Elle en seigne chacun que les oppositions apparentes de la soci t mauri cienne sont en fait des compl mentarit s 4 Niveaux d une action a Une technique au carrefour de la tradition et de la modernit Retour la table des mati res Les th rapeutes comme les malades semblent adh rer totalement aux croyances v hicul es par les le ons au profil d enseignement scientifique diffus es par les fondateurs du Centre Et l nous nous trouvons devant un ph nom ne qui semble g n ral bien au del de Maurice lorsque les approches traditionnelles des soins s adressent des soci t s modernes l instance l gitimante imm diate n est pas d ordre religieux mais d ordre scientifique quitte ce qu une instance sup rieure d ordre spirituel vienne son tour l gitimer cette science Il s agit de ne pas s carter de fa on irr vocable de ce que cautionne la science moderne dans son vocabulaire dans ses r f rences au corps Jean Benoist Carref
41. turel Mais simultan ment l observateur reconna t ais ment que les dia gnostics tels qu ils sont effectu s les manipulations des pieds qui les accompagnent et la pr paration des m dicaments gr ce au magneto geometric potentizer ne rel vent pas de l ordre de l action ni des pr alables exp rimentaux propres la biom decine Car si ces techniques pr tendent s inscrire dans le m me cadre que les pratiques de la m de cine elles n entendent pas les reproduire Il ne s agit pas d une variante de la m decine moderne mais d une apparence de celle ci qui adopte les gestes et les objets par lesquels la modernit a conquis une prise 1 Pratiquement absente de Maurice jusqu une date r cente la m de cine ayurv dique y est l objet d une attention croissante Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 26 mat rielle sur la r alit biologique Mais il n est pas question d adopter la d marche exp rimentale et de chercher v rifier ce que l on fait et que l on ex cute comme un rituel dont la conformit un mod le as sure la qualit et l efficacit Il n est pas question en effet de d mon trer la r alit des vibrations ni l effet biologique de leur introduction dans le lactose par le magneto geometric potentizer Aussi la situation est elle particuli rement riche en signification Il s agit presque d un mod le exp rimental de placebo les soins qui se pr sentent
42. u long de m tissages multiples op rant tous les niveaux Mariages langue religions alimentation et prati ques relatives la sant sont entra n s par un courant irr sistible KK k Il ne s agit pas l de faits accessoires temporaires effluves d une modernit que la tradition absorbera mais de la poursuite d une aven ture sociale et culturelle qui a commenc avec le peuplement de l le Chaque groupe humain qui y a concouru s y est ins r non seulement en tentant comme ailleurs d occuper une niche exclusive mais en ap portant des mat riaux culturels dans lesquels les uns et les autres ont Jean Benoist Carrefours de cultes et de soins l le Maurice 1996 8 puis Car la soci t mauricienne s est construite partir de vagues d immigration Europ ens Malgaches Africains Indiens et Chinois s y sont successivement ins r s La situation respective de ces groupes au long de l histoire coloniale a marqu d s leur arriv e leur place dans stratification sociale de l le Les Europ ens leurs esclaves afri cains et malgaches les travailleurs indiens et les commer ants chinois occup rent des places fort diff rentes dans une soci t fond e sur les plantations sucri res soci t tr s in galitaire o les appartenances culturelles et la r f rence aux origines taient constitutives de l identi t et du destin assign s chaque personne Le temps a nuanc les contrastes originels Deve
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