medicalisation de la qualite de vie : le role des medias
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1. St rilit on d bouche les trompes en douceur ou En finir avec la migraine Quant aux sujets traitant de l am lioration de la qualit de la vie plut t que des maladies ils sont accueillis bras ouverts mais l aussi on pr f re une approche optimiste plut t qu une approche critique ou trop prudente Une journaliste explique qu on lui a command un article sur le traitement hormonal dans l intention d en faire le sujet de couverture Lorsqu elle pr senta son article il tait si nuanc que le d partement marketing estima le sujet trop peu vendeur pour passer en couverture Il aurait fallu que l article soit plus positif UNE LOGIQUE CONCURRENTIELLE FAIRE MIEUX QUE LE VOISIN Chaque m dia n est pas seul dans la course l audience Il subit les cons quences des efforts effr n s d une s rie de concurrents pour capter l attention du m me public Au moins trois m canismes sp cifiques d coulent de cette comp tition La recherche du scoop Entre m dia la course de vitesse est permanente pour annoncer le premier Dans les sujets d actualit c est m me la logique dominante Dans les sujets de sant c est un imp ratif qui prend une importance disproportionn e par rapport la r serve d informations disponibles On mettra surtout en avant les premi res obtenues par des quipes de recherche les crises qui clatent en raison d un accident d une pid mie les scandales qui mergent2. J en ai plus qu assez d entendre dire et r p ter qu une femme sur douze risque de faire un cancer du sein On fait du cancer une sorte d pouvantail dont les femmes ont tellement peur que beaucoup pr f rent ne pas se faire d pister afin de rester le plus longtemps possible dans l ignorance Quand on a trop peur on a tendance faire l autruche Les m dias sont capables de cr er de v ritables psychoses et puis de s en d sint resser totalement C est nous ensuite de vivre ensuite avec les cauchemars des patients D autres encore l inexactitude des repr sentations cr es Nous passons plus de temps rectifier les informations mal comprises pr matur es inadapt es ou carr ment malhonn tes qui se r pandent comme des tra n es de poudre travers les m dias qu soigner effectivement nos patients Je n accepte plus jamais de r pondre aux demandes des journalistes Ils se croient permis de juger de tout parce qu ils sont journalistes alors qu ils ne connaissent rien rien Mes rapports avec eux ont t la pire exp rience de ma vie L effet pervers unanimement reconnu de ces attentes affirm es par le public c est qu ils induisent le m decin se conformer ce qu on lui demande m me s il estime que ce n est pas ce qui convient au patient parce qu il veut garder sa client le gagner du temps ou tout simplement se d barrasser du probl me Ce sont finalement les m dias qui
3. voir l dedans et la limite les gens ne veulent pas l entendre Elle reste un outil de libert Prendre la pilule sans savoir comment elle fonctionne c est adopter une solution bo te noire S informer sur les m canismes d action et leurs cons quences c est acqu rir une ma trise sur l instrument qui permet une plus grande souplesse dans son utilisation une meilleure aptitude valuer les risques et prendre une d cision en cas de probl me Pour M Winckler 2002 la libert passe par le savoir et le savoir est fait pour tre partag BIBLIOGRAPHIE Andin F Taches effac es mains rajeunies Sant magazine 2002 Bader J L Le surprenant recul de l asthme le Figaro 2 ao t 2000 Bouchet C Le Prozac a t il am lior la qualit de vie des Fran ais sur Medcost fr 11 juin 1999 Cara l E L pid mie de VIH SIDA les repr sentations dans les m dias in L H pital belge Sant et m dias n 3 2000 Chalvon Demersay S L exp rience fictionnelle et le retour l ordinaire in Sant h pitaux et m dias Editions de l Universit de Bruxelles 2001 Clara A L image du psy au cin ma in Sant h pitaux et m dias Editions de l Universit de Bruxelles 2001 Decoster C Goosens T H pitaux marketing interdit in L H pital belge Sant et m dias n 3 2000 De Maret P Sacr e sant conf rence d bat sur le th me Sant et m dias Centre de Culture scientifique
4. faisait encore exception dans la mesure o il tait admis que la pertinence d un traitement m dicamenteux par exemple devait tre tablie par des arguments objectifs et rationnels Pourtant il est illusoire de croire que les m decins eux m mes fonctionnent prioritairement sur le mode rationnel Les publicitaires qui s adressent eux par le biais des magazines m dicaux l ont bien compris Un responsable d agence sp cialis e en communication m dicale explique Nous avons pu constater que les annonces qui r alisent les meilleurs scores chez les m decins taient celles bas es sur une approche motionnelle La cr ativit et l humour l emportent sur l information Chez le grand public cette sensibilit l motionnel va sans dire L annonce du cancer du colon de Ronald Reagan a fait plus pour le d pistage de ce type de cancer aux Etats Unis que n importe quelle campagne de sensibilisation de Maret 2002 Dans un article de magazine f minin on choisira d veiller l inqui tude pour capturer l attention en titrant Apn es du sommeil et si vous tiez concern e Sous titre 9 malades sur 10 ignorent et leur sant en p tit Plus loin dans l article on apprendra que ce probl me touche deux femmes sur cent Mais l alarmisme du titre vous neuf sur dix assure que l article sera lu En vertu de ces observations le scientifique est consid r comme un mauvais communicateur Car s il ta
5. Sida la m ningite ou le s quen age du g nome humain nous ont t communiqu es par les m dias Dans une large mesure les m decins eux m mes apprennent les avanc es de la recherche m dicale par la voie des m dias g n ralistes pour ce qui ne concerne pas leur propre sp cialit J L Vanherweghem 2001 Il n existe pas de chiffres pr cis sur la croissance de l espace m dia consacr aux questions de sant Il ne fait cependant aucun doute qu il est en croissance rapide Tous les sondages d opinion montrent que les informations relatives la sant sont parmi celles qui int ressent le plus le public et par voie de cons quence les m dias Les r dactions reconnaissent volontiers que le volume de l information m dicale a doubl ou tripl en quelques ann es Aujourd hui l int r t pour le m dical suffit faire vivre et m me bien vivre des p riodiques totalement cibl s Top sant Sant magazine Ma sant En Belgique une revue comme Top sant est lue par une femme francophone sur quatre dossier M dia Marketing 2000 Il est rare de ne pas voir un sujet sant figurer au programme du JT et la fr quence peut monter jusqu trois ou quatre par soir e L ERE DES PATIENTS SAVANTS La cons quence imm diate de cette mont e du m dical dans les m dias est d augmenter le niveau d information du public sur les risques de sant les maladies les traitements les comportements pr ventifs PEUT ON D
6. de l Universit Libre de Bruxelles 11 septembre 2002 Goens J La syphilis une maladie de la communication ou la litt rature fleur de peau in Sant h pitaux et m dias Editions de l Universit de Bruxelles 2001 Got C Risquer sa peau Bayard 2001 Grevisse B M dias et m decine deux logiques de communication document de travail Lorelle V Les journalistes sous la pression des laboratoires Le Monde 21 f vrier 2002 M dia Marketing Dossier sur la communication m dicale r alis par de Oliveira V van Dongen l Schrader S Op de Beeck H n 155 f v mars 2000 Mintzes B Barer M Kravitz R Kazanjian A Bassett K Lexchin J Evans R Pan R Marion S Influence of direct to consumer pharmaceutical advertising and patients requests on prescribing decisions two site cross sectional survey BMJ 2002 324 278 279 Nabarette H Nobel d conomie et asym trie d information en sant sur medcost fr 2001 Poucet T Petit examen clinique des pratiques d information in Sant h pitaux et m dias Editions de l Universit de Bruxelles 2001 Sweet M Sponsored journalism award shocks Australian media BMJ 323 24 nov 2001 Sweet M How medicine sells the media BMJ 324 13 avril 2002 Tepper l Ma sant sur Internet Psychologies avril 2001 Thoveron G La m decine malade des m dias in Sant h pitaux et m dias Editions de l Universit de Bruxelles 2001 Vanherweghem J L Rationali
7. et l ducation 5 G Thoveron 2001 Voyons quelques chiffres sur l opinion des Fran ais vis vis de l information m dicale Dans une premi re enqu te men e en septembre 2000 par la Sofres on demande aux Fran ais qui selon eux est le mieux plac pour les informer sur les m dicaments 80 citent les m decins 66 les pharmaciens Les journalistes de sant sont cit s par 13 des r pondants et Internet par 5 seulement Une autre enqu te men e en mai 2002 par l Ifop et o le nombre de r ponses est limit deux donne des r sultats similaires 72 citent les m decins 63 les pharmaciens et 5 les journalistes Mais quand on leur demande quelles sont les sources d information qu ils utilisent effectivement en mati re de sant enqu te Sofres juillet 2002 la premi re source cit e est la t l vision 71 avant le m decin 65 puis la presse crite 62 et la radio 45 Les cotes de confiance accord es ces diff rentes sources sont toutefois concordantes avec le classement pr c dent 8 2 sur dix pour le m decin 6 4 pour la t l vision 6 3 pour la presse crite et 6 pour la radio Il n est pas tonnant que les m dias soient des vecteurs de diffusion bien plus effectifs que les professionnels de sant m me sans avoir leur potentiel de cr dibilit Nous n interrogeons un m decin que lorsque nous sommes personnellement concern s et la plupart des informations dont nous disposons sur le
8. mesure o certains patients vitent d avoir recours un psychiatre en raison des clich s qu ils ont en t te ou bien consultent avec des parti pris qui compliquent la relation th rapeute patient A Clara 2001 C t publicit une tude de l universit de Colombie Britannique montre qu un quart des patients en consultation mentionnent leur m decin le nom d un m dicament ou d une maladie apr s avoir vu une publicit sur le sujet B Mintzes et al 2002 QUELLE EST LA REALITE DE CETTE INFLUENCE PERCUE PAR LES MEDIAS Une tude r alis e par le CSA en avril 2000 aupr s de 400 professionnels de sant r v le les perceptions suivantes Diriez vous que les Fran ais sont aujourd hui mieux inform s sur les questions de sant qu il y a quelques ann es Oui 92 Les Fran ais souhaitent ils aujourd hui recevoir davantage d informations sur leur tat de sant Oui 95 Les Fran ais souha itent ils aujourd hui recevoir davantage d informations sur les traitements qu on leur prescrit Oui 94 Les Fran ais se montrent ils aujourd hui plus exigeants l gard de leur sant Oui 93 Les Fran ais h sitent ils consulter plusieurs professionnels de sant la fois ou changer de praticien Non 83 Les comportements pr ventifs en mati re de sant se sont ils d velopp s Oui 71 Constatez vous plus souvent qu avant de la part de vos patients des demandes de modifications de vos pres
9. ses choix de s imposer des formations permanentes ou d avouer qu il ne sait pas r pondre Le m decin a toujours t plac sur un pi destal et voici que celui ci se met vaciller Il y a ceux qui r sistent et ceux qui suivent le mouvement On peut trouver son r le ailleurs que dans une relation de pouvoir Plut t que d cider pour le patient l aider prendre sa d cision lui m me M Winckler 2002 De plus la r duction de l asym trie d information ne prive pas le m decin de son r le car l information ne s assimile pas la connaissance H Nabarette 2001 Les ann es de formation et les ann es de pratiques donnent au m decin une vision globale qui lui permettent de donner un conseil averti et pr cis ment adapt au cas du patient Cependant l ducation du public est tr s souvent per ue comme une menace Menace de perdre sa cr dibilit et donc sa client le si l on ne trouve pas le moyen de r pondre aux attentes ou de les modifier Menace plus directe encore d tre accus d erreur de diagnostic ou de traitement par des patients m contents La tendance est clairement visible aux Etats Unis par exemple le taux de naissances par c sarienne ne cesse d augmenter car les m decins ne veulent plus prendre le risque d une naissance naturelle les parents sont trop prompts attaquer le m decin en justice si leur enfant n est pas parfait et les enqu tes montrent que les m decins fran ais sont tr
10. IRE QUE LES REPRESENTATIONS VEHICULEES PAR LES MEDIAS ONT UNE INDLUENCE SUR LES OPINIONS ET LES COMPORTEMENTS DU PUBLIC EN MATIERE DE SANTE Plusieurs indices tendent montrer que oui M me lorsqu il s agit de fiction ou de publicit Une tude r alis e sur les spectateurs de la s rie t l vis e Urgences montre que les spectateurs ont int gr beaucoup de choses sur le fonctionnement de l h pital Vocabulaire gestes organisation instruments proc dures Lorsqu ils sont eux m mes en situation hospitali re ils calquent leurs attentes et leurs exigences sur ce qu ils ont retenu du feuilleton S Chalvon Demersay 2001 La litt rature romanesque a longtemps v hicul des images parfois tr s document es sur des maladies comme la tuberculose ou la syphilis et continue faire ce m me travail de familiarisation pour le cancer ou le sida J Goens 2001 Une psychiatre qui tudie les repr sentations de la maladie mentale au cin ma remarque que les sympt mes et les manifestations de certaines pathologies pilepsie hyst rie tat maniaque criminalit li e la maladie mentale sont parfois mis en sc ne avec tellement de r alisme que l on pourrait les consid rer comme des pseudo documentaires En revanche le contenu fictionnel entretient et r pand un malentendu aupr s du public en ce qui concerne la personnalit du th rapeute tr s souvent caricatur Ceci entrave la pratique de la psychiatrie dans la
11. MEDICALISATION DE LA QUALITE DE VIE LE ROLE DES MEDIAS par Elisa BRUNE Avertissement ce travail est bas outre les ressources bibliographiques sur une quinzaine d entretiens avec des journalistes des m decins et des analystes du milieu universitaire Certains d entre eux ayant pr f r ne pas tre cit s nomm ment ils ont tous t trait s de fa on anonyme L information m dicale et les m dias Les questions de sant sont longtemps rest es du ressort des seuls m decins Jusque dans les ann es soixante la presse annon ait les grand progr s techniques sans autres forme de critique ou d analyse L apparition de la radio puis de la t l ont amen une diffusion progressive du discours m dical On assiste une autonomisation du discours m dical dans les m dias avec la cr ation d associations de journalistes sp cialis s Aujourd hui sous la pression notable des cha nes de t l vision priv es l information m dicale est devenue l une des plus d battue sur la place publique Elle se banalise et est soumise aux m mes contraintes d audience et de marketing que n importe quel sujet pr sent dans les m dias Notons toutefois que le nombre de journalistes scientifiques est actuellement dix fois moins lev que celui des journalistes sportifs E Cara l 2000 et que la structure de la consommation t l visuelle reste essentiellement ax e sur le divertissement 70 avant l information 22 puis la culture
12. Prenons le plus grand hebdomadaire d information g n rale en Belgique La journaliste m dicale pr pare un dossier sur le vieillissement de la peau La nouvelle fait la joie du service marketing du journal qui contacte les laboratoires cosm tiques pour vendre de l espace publicitaire au meilleur prix La journaliste pr vient Je ne suis pas s re qu ils vont aimer mon dossier Le marketing s affole et demande lire Catastrophe un m decin dermatologue interview tire boulets rouge sur les produits cosm tiques qui ne servent selon lui rien Le marketing pr vient le laboratoire acheteur d espace et celui ci pique une crise de fureur Lettre comminatoire au directeur de la r daction pour qu il retire cet article sous peine de se voir d finitivement priv des budgets de l annonceur Des millions sont en jeu R union de crise au journal Finalement la r daction tiendra bon et l article para tra Le labo s est content de lettres de protestations et de rapports d tudes contradictoires Cette issue semble tre exceptionnelle De lavis de l observatoire des m dias de l universit de Louvain seul ce magazine l pouvait esp rer remporter le bras de fer De par sa position de leader sur le march de l information g n rale il repr sente une voie d entr e difficilement contournable vers le consommateur belge N importe quel autre support aurait d capituler Autre strat gie le black out sur certains suje
13. calisation tout court D sormais les taches brunes dues au vieillissement sont un probl me de sant que l on peut traiter via quatre techniques diff rentes les cr mes d pigmentantes l azote liquide le peeling l acide trichlorac tique ou le laser ce qui justifie un dossier complet sur le sujet dans un magazine de sant F Andin 2002 Nouveaux traitements et recherches en cours assurent sans arr t de la copie aux journalistes en mal d inspiration Sans compter les nouvelles probl matiques de sant qui se cr ent au fur et mesure de l volution des traitements disponibles troubles de l humeur troubles de comportements sociaux mineurs et autres syndromes de phobie sociale comme la timidit sexualit m nopause etc Voici encore quelques phrases glan es dans les m dia Les troubles du sommeil sont une maladie chronique Le ronflement s est fortement m dicalis ces derni res ann es Les difficult s de couple ou conjugopathies peuvent n cessiter un traitement m dicamenteux Bon nombre de sp cialistes consid rent aujourd hui le vieillissement comme une maladie donc susceptible de pr vention de d pistage et de prise en charge E Zarifian 1996 signale que le syndrome pr menstruel est entr dans la liste des troubles psychiatriques du DSM IV et est depuis lors trait au moyen de substances psychoactives antid presseurs NB le DSM est un manuel de crit res diagnostiques universels des troubl
14. ce sera le principal argument mobilisable pour int resser les annonceurs publicitaires Il faut donc tout faire pour maximiser cette audience A ce titre il faut reconna tre que la sant est une th matique porteuse La mont e des sujets sant est g n rale Les informations relatives la sant sont parmi celles qui int ressent le plus le public Le responsable d un grand magazine d information g n rale explique qu une couverture sur un sujet de politique internationale fait baisser les ventes tandis qu une couverture sur un sujet sant les stimule nettement L engouement pour les sujets de sant peut tre sch matiquement reli trois grands facteurs Un facteur d mographique le vieillissement progressif de la population entra ne un accroissement automatique des pr occupations li es la sant Un facteur conjoncturel li au climat politique international Dans une situation de grande confusion de grande incertitude et surtout de grande impuissance de l individu agir sur le monde ou m me le comprendre les consommateurs ont tendance se replier vers des pr occupations plus proches d eux m mes et de leur rayon d action en Australie le secteur de la chirurgie cosm tique aurait connu un boom apr s les attentats du 11 septembre M Sweet 2002 Un troisi me facteur est li aux diff rents scandales sur la sant et sur l alimentation qui d fraient r guli rement la chronique Le consommateur prend con
15. criptions Oui 29 Les m decins voquent tr s r guli rement les demandes qui leurs sont faites par des patients qui savent exactement ce qu ils veulent comme m dicament en particulier pour des mol cules qui ont t largement d battues dans les m dias comme le prozac ou le viagra Une tude pr sent e dans la Revue m dicale de l Assurance Maladie en 1993 montre par exemple que dans 56 8 des cas la prescription de benzodiaz pines a t demand e explicitement par le patient E Zarifian 1996 La m me tendance s observe dans la plus grande propension des patients se soigner eux m mes en particulier pour tout ce qui ne n cessite pas de prescription m dicale Une tude de la Sofres men e en mars 2001 montre que 52 des Fran ais d clarent se soigner sans aller voir un m decin pour des probl mes b nins Parmi ceux ci 87 disent avoir recours au m dicament 45 des Fran ais sont ainsi en mesure d acheter des m dicaments sans avis du m decin Au total les patients semblent bien plus souvent qu avant tre en mesure d orienter leurs choix de poser des questions pr cises de demander une information compl te L information disponible par la voie des m dias a un effet sur la compr hension de la m decine des maladies de l h pital A tel point qu un anthropologue stigmatise la situation en d crivant le patient qui sort de sa poche une longue liste de questions bas es sur ce qu il a pu glaner dans les m dia
16. direction des fumeurs plus aucun d entre eux ne peut ignorer qu il r duit significativement son esp rance de vie en continuant fumer Cela ne suffit pas les convaincre d arr ter On peut soutenir qu elle est une tape n cessaire C Got 2001 propose une m thode d analyse du changement en quatre tapes connaissance conviction d sir comportement L information rationnelle ne fournit que le support de la premi re tape du processus Elle ne suffit pas mais si elle n est pas fournie il y a peu de chances que les tapes suivantes du processus puissent se mettre en place On peut penser que l enjeu est ailleurs P Verhaegen sp cialiste de la diffusion des savoirs l universit de Louvain estime que l information m dicale ne joue qu un petit r le dans les comportements de sant et particuli rement s il s agit de m dicalisation de la qualit de la vie On n a pas besoin de tout savoir sur la pilule pour l adopter ou sur la DHEA ou sur le viagra ou sur la chirurgie esth tique Le vrai d bat est ailleurs Dans les repr sentations qui font que la demande existe et est port e devant le m decin Cette demande de corps svelte de jeunesse de performance ce n est pas le discours m dical qui le forme C est tout un ensemble de lames de fond de la soci t Mais si la jeunesse est prolong e par les hormones alors le discours m dical renforce le discours social L information scientifique n a rien
17. disent ce que doit tre un bon m decin et si vous ne correspondez pas l image c est que vous n tes pas un bon m decin Une tude aux Etats Unis a montr que dans 67 des cas le m decin avalise la demande pour garder le client Dans une tude r cente cit e par Marie H l ne Spieger 70 des femmes consultant pour des troubles li s des perturbations hormonales et insatisfaites du comportement de leur m decin traitant ce sont tourn es vers un autre qui r pondait leur demande M Wolinsky 2001 Plus significatif encore cette r action au niveau institutionnel l American Medical Association estime que les publicit s dirig es vers les patients entravent la pratique m dicale elles font perdre un temps pr cieux aux m decins qui doivent convaincre les patients que ceux ci n ont pas besoin des m dicaments qu ils r clament Zarifian 1996 Le d bat est touffu conflictuel souvent charg de ressentiments On sent le poids des exp riences n gatives d un c t comme de l autre Il faut scinder le probl me en deux composantes distinctes La qualit de l information en tant que telle est une dimension de la discussion Mais ce qui se cache derri re cet argument facile est un enjeu de pouvoir Le m decin est bouscul interpell dans sa situation acquise Il critique la qualit de l ducation du public mais supposer que celle ci soit irr prochable aurait il pour autant envie de justifier
18. es psychiques Entre la premi re et la quatri me version le nombre d entit s psychopathologiques d finies est pass e de 180 plus de 300 L information m dicale en se banalisant est entra n e dans les logiques de production m diatiques Et les moyens de remonter le courant sont faibles Si les r alisateurs d un film d un feuilleton ou d un spot publicitaire peuvent s entourer des conseils d une quipe de m decins quand ils en ont besoin les r alisateurs de JT JP ou journaux imprim s n ont pas la possibilit de r tribuer des professionnels capables de juger de la qualit et de l importance scientifique des nouvelles Reste analyser le contenu m me des messages adress s au public et essayer de cerner comment les diff rents metteurs d information s y prennent pour marquer des points DE L INFO O DE L AFFECT Les logiques de production qui ont t voqu es d bouchent immanquablement sur des messages qui mobilisent davantage les motions du public la peur l espoir la compassion la col re que sa raison la compr hension d un maximum d l ments possibles d une situation Les professionnels de la communication ont observ depuis longtemps qu un discours rationnel tait loin d tre le plus efficace pour emporter l adh sion du public Mieux vaut s duire et blouir que d montrer et clairer Toutefois l information m dicale qui fut longtemps le monopole des m decins
19. formation est trouver par d autres biais Beaucoup de journalistes insistent sur le fait que l ducation du public oblige le m decin surveiller et remettre jour sa propre information Le patient ne prend plus tout ce qu il dit pour argent content Le d veloppement d une attitude critique ne peut qu augmenter la qualit de la pratique m dicale Ce qui n tait souvent qu un dialogue de sourds le patient n entendant rien au discours m dical truff de mots difficiles tourne plus la demande de justification et de mise en perspective pourquoi tel traitement plut t qu un autre avec quelles cons quences etc Certains journalistes n oublient pas de poser des limites leur r le disant qu ils ne doivent pas se substituer au m decin et fabriquer des patients qui ont d j fait leur diagnostic et leur prescription Il suffit de montrer ce qui bouge dans le monde m dical et le patient s en remettra lavis du m decin pour voir ce qui peut s appliquer son cas pr cis Mais les m decins sont souvent d crits comme des gens peu enclins se remettre en question peu aptes communiquer et volontiers jaloux de leur pouvoir Heureusement disent les journalistes sous la pression du public ils vont tre oblig s de descendre de leur tour d ivoire d aller vers plus de transparence et d galit dans la relation avec le patient Un m decin qui tient une rubrique m dicale sur une grande cha ne de radio s amuse de co
20. it bon communicateur il serait mauvais scientifique Il faudrait qu il se plie aux exigences de bri vet et de spectacle qu il tronque l information qu il mette en vidence son seul potentiel s duisant J L Vanherweghem 2001 Les professionnels de la communication diront qu on ne peut pas tre la fois scientifique exact complet et efficace entendu compris On en arrive alors injecter les m dicaments dans les m mes fili res cr atives des agences publicitaires que n importe quel bien de consommation courante La publicit cr e une association entre le produit et un concept d sirable Elle met en sc ne une promesse qui n a plus rien voir avec le discours m dical Une publicit pour un antid presseur par exemple montre un jeune couple enlac et titre Revivre l motion ce qui associe le m dicament avec l une des cons quences possibles du traitement et non avec son indication m dicale ou son efficacit th rapeutique Exactement comme d autres publicit s associent la bi re et l amiti comme s il suffisait de boire de la bi re pour avoir des amis Mais qu en est il de l information rationnelle Pourquoi est elle si faible Il est patent qu elle ne suffit pas On s expose de nombreuses d sillusions si l on s imagine que le changement la d cision d agir sont automatiquement li au savoir dont on dispose sur une situation Apr s des ann es de communication sur les risques du tabac en
21. les dessous de l industrie pharmaceutique dans un magazine de vulgarisation scientifique leur r daction se voit dans l obligation de les licencier Quand une journaliste d un magazine m dical n glige d inclure dans son article les informations fournies sur le sujet par un annonceur de poids le r dacteur en chef corrige lui m me l article La journaliste refuse de signer et se voit oblig e de d missionner Quand un journaliste du m me magazine m dical exige un r quilibrage entre r dactionnel et publicit il se fait galement remercier Au total les contraintes li es au financement publicitaire p sent lourdement sur les choix ditoriaux le planning r dactionnel est tabli en fonction des lancements de produits les articles sont fax s pour accord aux annonceurs certains papiers sont de pure complaisance V Lorelle 2002 Les annonceurs courtisent les journalistes De leur propre aveu les journalistes m dicaux sont quotidiennement inond s d information en provenance des laboratoires pharmaceutiques des tablissements de soin des fondations de recherche Et non seulement d informations mais de propositions Les colloques les symposium les s minaires se multiplient souvent dans les plus beaux h tels et sous d autres latitudes Traditionnellement ce genre d incitant s adressait surtout aux m decins Aujourd hui les journalistes sont inclus dans la liste des invit s Selon un professionnel de la c
22. leurs budgets Un annonceur ne maintient ses d cisions d investir que lorsqu un support correspond ses besoins d finis d une part en termes de cible d autre part en termes de philosophie g n rale de l information La publicit dans les m dias est un outil promotionnel important tr s co teux mais tr s rentable lorsqu il est bien utilis et pour optimiser le r sultat les services marketing utilisent des m thodes tr s sophistiqu es pour d terminer l audience la couverture et l impact de leurs messages Dans les faits les annonceurs ne se contentent pas de s lectionner les supports qui leur conviennent le mieux ils participent parfois activement leur orientation et leurs choix ditoriaux Comment les annonceurs orientent les r dactions IIS sugg rent aux chefs de r dactions ou aux journalistes m dicaux de parler des th matiques qui les int ressent qui cr ent un climat favorable la consommation de leurs produits C est ce qu on peut appeler du lobbying d environnement Zarifian 1996 On verra ainsi fleurir des dossiers sur la d pression sur le stress sur l anxi t toutes informations qui favorisent une reconnaissance puis une identification de certains sympt mes de la vie quotidienne avec les pathologie d crites et amener en consultation des patients qui se d clarent d entr e de jeu d prim s ou stress s ou anxieux Dans Le Point on lira que selon une tude men e la demande d
23. nformation scientifique et publicit pour un ou plusieurs produits Par exemple sous le titre Du nouveau contre les taches brunes on trouve une page d informations sur les causes de l hyperpigmentation suivie d un encart sur deux produits de soin compl mentaires donnant des r sultats durables La page est pudiquement intitul e communiqu Les journalistes reconnaissent qu on leur sugg re r guli rement des sujets d articles ou de dossier Souvent aussi la proposition vient de la direction de la r daction sans que le journaliste sache tr s bien s il s agit ou non d une pression de l ext rieur Le lobbying peut prendre des forme encore plus subtiles lorsque des leaders d opinion issus du show business sont pay s pour r pandre des rumeurs dans les d ner mondains Tel grand acteur de cin ma affirmera par exemple en pr sence de journalistes de la presse people qu il a t norm ment soulag par la prise de tel antid presseur tandis que tel chanteur de rock d clarera se soigner la DHEA De quoi inciter la presse redoubler d attention pour ces sujets Comment les annonceurs censurent l information ind sirable Toute information n est pas bonne entendre pour un producteur de m dicament ou de produit de soin Si des vell it s se font jour chez tel ou tel journaliste de discr diter leurs produits ou de promouvoir une approche alternative les d fenseurs de l industrie partent en guerre
24. nstater qu on en vient reprocher beaucoup de patients de consulter pour un oui ou pour un non alors que pendant des d cennies ont leur a reproch de consult trop tard quand les d g ts d une maladies volutive taient d j irr parables En prenant leur sant en main notamment sous l influence des m dias les patients ne font que mettre en uvre une attitude responsable et pr ventive pr n e en principe par la m decine elle m me Du coup les gens qui consultent ne sont plus n cessairement malades ils veulent viter de l tre D autre part pour toute une s rie d affections b nignes et tr s bien ma tris es par les m dicaments modernes le patient duqu peut fort bien se passer du m decin et se soigner tout seul moins que les sympt mes ne persistent Cependant cette forme d autonomisation n est pas encourag e et les m decins continuent voir d un mauvais il les patients qui se passent d eux LES AUTRES DISENT QUE C EST UNE CATASTROPHE Ce sont toujours des m decins Certains fustigent la cr ation d attentes irr alistes A force de taper sur le clou de la nouveaut vous nous fabriquez des patients qui ne veulent plus entendre parler de traitement plus anciens m me s ils leur conviennent parfaitement et qui crient la non assistance personne en danger si nous refusons le traitement dernier cri qu ils r clament D autres la cr ation de peurs disproportionn es
25. oin de comporter toutes les garanties de s rieux souhaitable En conclusion par les diff rentes contraintes auxquels ils sont soumis pression des annonceurs pression du public pression des concurrents les m dias sont amen s produire une information qui repose sur la dramatisation la surench re et l imm diatet dans laquelle le nouveaut est la valeur centrale l oppos d un expos complet et sans passions d une mise en perspective et d une distance critique qui permettraient de cerner au mieux la v rit du moment T Poucet 2001 parle du mode de fonctionnement hyperbolique et tonitruant de la presse du tourniquet des sollicitations auxquelles elle r agit sans discernement ou encore du d sordre stroboscopiques acc l r auquel le public est soumis Les th mes de sant font ainsi des carri res m diatiques dont le profil a tr s peu voir avec l incidence r elle de la maladie ou du traitement dont il est question E Cara l 2000 On parle la une du Parisien de trois cas de contamination par le virus de l h patite et nulle part du nombre de tu s sur la route on annonce les traitements des dysfonctionnements sexuels grands cris sans dire que la non ma trise de la contraception d bouche encore sur 350 000 grossesses non d sir es par an M Winckler 2001 Cette course la nouveaut se marie particuli rement bien avec la tendance la m dicalisation de la qualit de vie ou la m di
26. ommunication les acteurs qui exercent ces s ductions les responsables marketing des grosses firmes sont des gens qui atteignent un professionnalisme de plus en plus pouss lls n ignorent rien des techniques de promotion et de relations publiques Au contraire le m tier de journaliste se pr carise de plus en plus Press par le temps le pigiste n a pas l occasion de recouper ses informations de se lancer dans une d marche d investigation Et quand on lui offre quatre jours aux Seychelles pour assister une demi journ e de s minaire il a du mal dire non La s duction ne se limite pas aux avantages directs Les firmes financent galement toutes sortes d activit s valorisantes des associations des activit s de recherche des revues de contact des concours de journalisme m dical avec prix M Sweet 2001 Ainsi l association professionnelle des journalistes m dicaux en Belgique vivait elle gr ce l argent vers par des laboratoires m dicaux Lorsque les journalistes ont voulu s affranchir de cette tutelle ils se sont retrouv s sans la moindre ressource Par la force des choses leur association est devenue aujourd hui plus th orique que r elle La pr sidente poss de une liste des membres et leurs activit s s arr tent l Les annonceurs courtisent les m decins Les m decins sont depuis toujours la cible de ces grandes op rations de promotion que sont les colloques ou symposium o ils sont invit
27. s conscients de la menace Dans l tude du CSA parmi les professionnels de sant on demande Pensez vous que les actions judiciaires contre les praticiens vont prendre une tr s grande ampleur en France dans les prochaines ann es 85 pensent que oui tout fait 40 ou plut t 45 73 affirment qu ils prennent de plus en plus en compte ce ph nom ne dans l exercice quotidien de leur activit Mais revenons maintenant en d tail sur la question de la qualit de l information m dicale dans les m dias Pourquoi est elle si souvent criticable Quelle sont les logiques de sa production LES LOGIQUES DE PRODUCTION DE L INFORMATION DANS LES MEDIAS UNE LOGIQUE DE FINANCEMENT PLAIRE AUX ANNONCEURS Les m dias sont largement financ s par la publicit La presse m dicale sp cialis e ou g n raliste n chappe pas la r gle bien au contraire Beaucoup de titres destin s aux m decins sont gratuits c est dire enti rement financ s par des firmes priv es les autres d pendent 90 de la publicit Des journaux gratuit ax s sur la sant destin s au grand public sont galement disponibles distribu s en toutes bo tes ou dans les pharmacies Les annonceurs p sent lourds Une r daction dont la survie d pend des investissements publicitaires de ces annonceurs ne peut pas consid rer qu elle a les mains libres Il s agit de garder la confiance des sponsors de les inciter maintenir ou accro tre
28. s et le m decin de r pondre pr f rez vous que je tente de r pondre quelques unes ou que je vous ausculte P de Maret 2002 Il faut maintenant se demander quel point les connaissances diffus es dans le grand public sont adapt es pertinentes productives pour l exercices de la m decine Les avis sont largement divergents LES UNS DISENT QUE C EST BON POUR LA MEDECINE Ce sont surtout des patients et des journalistes et une minorit de m decins Prenons une enqu te men e parmi des utilisateurs fran ais des sites de sant sur Internet 50 estiment qu Internet a une influence importante sur leur compr hension des probl mes de sant et 44 jugent que leur relation avec leur m decin en sera am lior e Un m decin qui r pond aux questions du public via un site m dical estime que ce canal permet de contourner certaines r ticences et inhibitions classiques dans le cabinet m dical Pour preuve les questions li es la sexualit motivent jusqu 40 des courriels 1 Tepper 2001 Un autre argument de poids en faveur de l information hors cabinet r side dans la dur e de plus en plus courte des consultations m dicales qui rend virtuellement impossible une v ritable communication En dix ans la dur e moyenne d une consultation chez le g n raliste fran ais est pass e de 35 14 minutes source Impact m decine Aux Etats Unis elle est de 7 minutes Dans ces conditions un compl ment d in
29. s tous frais pay s Ils sont galement sollicit s pour particip s aux tudes de phase IV sur les m dicaments contribution pour laquelle ils sont r mun r s et qui les entra nent ipso facto dans une relation de d pendance par rapport aux laboratoires Ceux ci gardent le contr le final de l information issue de ces tudes Les m decins sont encore la cible d op rations de formation permanente massivement financ es par les laboratoires qui d livrent des informations in vitablement orient es fragmentaires parfois mensong res M Winkler 2001 On observe ainsi un flot d informations orient es qui inondent le monde m dical sans rencontrer de contre discours Tous les d bats se focalisent autour de produits qui sont virtuellement indistinguables les uns des autres avec plus de trente antid presseurs commercialis s par exemple C Bouchet 1999 tandis que d autres pans entiers d informations ne parviennent pas jusqu au m decin fran ais Or ce sont pr cis ment ces m decins que les journalistes iront interroger lorsqu ils voudront se faire une id e objective de la situation ignorant les liens de d pendance mat rielle et ou intellectuelle que les m decins entretiennent avec l industrie UNE LOGIQUE CLIENTELISTE PLAIRE AUX LECTEURS AUDITEURS SPECTATEURS Les abonnements et les ventes n interviennent que pour une part minoritaire ou nulle dans l quilibre financier d un support m dia Cependant l audien
30. science des risques qui p sent sur sa sant et veut tre inform A noter que dans l esprit du public sant n est pas synonyme de m decine Le consommateur est soucieux de pr server sa sant par quelque moyen qu il juge pertinent Une journaliste m dicale de la presse g n rale explique qu elle n a jamais eu autant de r actions de lecteurs et de demandes d informations compl mentaires que lorsqu elle a publi un article sur les gu risseurs A chaque cible sa logique Prenons l exemple des magazines f minins pour montrer comment les caract ristiques de la cibles vont modeler le contenu ou le style de l information qu on lui fournit Les magazines f minins s adressent aux femmes sur un mode r solument et volontairement optimiste Les femmes qui ach tent un magazine f minin veulent s extraire de la morosit ou des soucis quotidiens Elle ne paient pas pour un suppl ment de mauvaise nouvelles Si tel est le positionnement du magazine tel est le positionnement de la rubrique sant galement Une journaliste rapporte qu elle ne re oit pas l autorisation de traiter de sujets comme la scl rose en plaque ou la mucoviscidose parce que ces maladies sont encore incurables et ne peuvent donc faire l objet d un traitement optimiste Un article peut tre consacr une affection ou maladie pour autant qu on puisse le traiter sous un angle positif annoncer une victoire ou une bonne nouvelle comme dans Vaincre la d pression
31. suite la r v lation d erreurs ou de suppos es erreurs m dicales Tout cela au d triment d un traitement de fond critique d une mise en perspective des sujets ou d une r elle transmission d information noter que le monde m dical n est pas du tout pr par r pondre cette presse qui est toujours sur la br che plut t que dans le sujet Alors que la communication de crise est une ventualit int gr e dans toutes les cellules marketing des firmes et des grandes organisations les m decins et les h pitaux sont syst matiquement d munis lorsque des journalistes tombent du ciel sous pr texte de telle ou telle urgence Et la bonne volont sans parler de la mauvaise cause des catastrophes l o des personnes form es auraient sans doute pu expliquer les faites de fa on satisfaisante B Grevisse 2002 Certains communicateurs sugg rent aux h pitaux de se doter de cellules de communication actives 24h sur 24 car le silence excite la curiosit des m dias et les incite inventer des sc narios eux m mes A noter aussi que la fa on habituelle des m dias d aborder le progr s m dical dans la veine tout ce qui est nouveau est meilleur s av re parfaitement conforme avec la logique commerciale des annonceurs La recherche de la pol mique Un sujet de sant est d autant plus int ressant pour les m dias qu il soul ve la controverse la contestation ou la mise en cause de tel ou tel acteur insti
32. t et m diatisation convaincre ou persuader in Sant h pitaux et m dias Editions de l Universit de Bruxelles 2001 Winckler M Contraceptions mode d emploi Au diable vauvert 2001 Winckler M C est grave docteur Editions La Martini re 2002 Wolinsky M Nous serons toujours jeunes et beaux Albin Michel 2001 Zarifian E Le prix du bien tre Odile Jacob 1996 Sources statistiques Les Fran ais et les m dicaments Etude Sofres septembre 2000 Barom tre Sant et M dicaments Etude lfop mai 2002 L opinion des Fran ais en mati re d infomation sur leur sant Etude Sofres juillet 2000 Les Fran ais et la sant Rapport d tude du CSA avril 2000 Les Fran ais et l autom dication Etude Sofres mars 2001 Les nouveaux comportements de sant des Fran ais Etude Sofres juillet 2001 La consommation de soins Etude FNORS 1999 Global Cyberchondriac Study Harris Interactive janvier 2002
33. ts parce qu ils proposent une alternative au traitement m dicamenteux classique Le cas de la m latonine est exemplaire selon ce m decin hormonoth rapeute La m latonine est toujours interdite de distribution en Belgique alors que m me l acad mie de m decine a reconnu ses effets positifs sur le sommeil En plus elle n est pas ch re du tout Mais comme l exp rience montre qu elle a fait chuter la vente des somnif res aux Etats Unis les laboratoires pharmaceutiques s opposent vigoureusement ce qu on en parle La campagne anti millepertuis serait elle aussi orchestr e par des industriels menac s Un m decin s insurge Pourquoi cacher au praticien fran ais et a fortiori au public que le millepertuis est le traitement le plus prescrit en Allemagne contre la d pression La presse m dicale a une attitude peu objective et diffuse s lectivement l information Cependant ces cas sont minoritaires On canalise plus efficacement les choix ditoriaux et m ditatiques travers des suggestions positives fr quemment assorties d incitants divers qu travers une censure autoritaire d autant que les supports m diatiques ne sont pas suicidaires et s imposent dans une large mesure une auto censure spontan e T Poucet 2001 Les tentatives de d noncer les pressions des annonceurs sont plut t le fait de journalistes isol s qui le paient souvent fort cher Quand deux journalistes r alisent un dossier sur
34. tution politique victime ou groupe de pression Les probl matiques qui permettent une mise en sc ne anim e voire une dramaturgie haletante recevront donc la priorit sur celles qui ne mobilisent que des id es consensuelles ou bien tablies B Grevisse 2002 Dans un d bat t l vis ou radiophonique les experts invit s seront choisis d une part pour leurs comp tences m diatiques pr sentation facilit de parole et d autre part pour leur potentiel de conflit avec un autre expert groupe d int r t ou institution Les animateurs animeront le d bat de mani re jeter de l huile sur le feu pour augmenter la qualit du spectacle La volont de cr er l v nement Si l actualit ne fournit ni le scoop ni la pol mique il est toujours possible de cr er l v nement soi m me de jeter un pav dans la mare en r v lant des faits des chiffres des t moignages que l on a t extraire sur le terrain Pensons aux classements d h pitaux qui ont t publi s par une grande revue scientifique fran aise Le public s est ru sur l information sans s interroger sur la cr dibilit de tels classements Or il s est av r que les m thodes utilis es pour le calcul des scores taient plus que contestables C Decoster 2000 De tels d rapages montrent clairement quel point le public est demandeur de transparence d une part et combien l information qui est fournie pour r pondre cette demande est parfois l
35. u minist re de la Sant et cofinanc e par trois laboratoires pharmaceutiques seul un tiers des d pressions serait identifi Dans Impact m decine on lira qu une enqu te r alis e pour le compte du laboratoire producteur du viagra r v le que 40 des hommes de 25 40 ans ont t confront s des pannes sexuelles Et le num ro sp cial TOC troubles obsessionnels compulsifs d un magazine m dical comprend huit pages de publicit s pour le m dicament dont les TOC sont la principale indication En amont et l appui de ces dossiers les laboratoires pharmaceutiques produisent des tudes de pr valence des pathologies dont ils s occupent tudes qu ils ont financ es eux m mes On sait d j que la recherche clinique sur les m dicaments est financ e 70 par l industrie Ils financent aussi des tudes pid miologiques souvent par le biais d associations d tude et d information qui concluent par exemple que l asthme a vu sa fr quence doubler au cours des vingt derni res ann es association Asthme Dans le m me temps une tude men e par des chercheurs ind pendants de toute firme pharmaceutique aboutit des conclusions inverses J M Bader 2000 La publicit prend des allures d information Le CESSIM centre d tudes sur le support de l information m dicale observe que l une des formes de communication de plus en plus pris e des annonceurs est le publi r dactionnel un genre hybride qui m le i
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