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n°1 - janvier 2011 : Marc Alyn

1. Ce n est plus le fer mais les viandes qui font rougir les braises Les volutes de fum e br lantes ont c d la place aux fumets des formes tranges naissent et dessinent suspendues sous les plafonds de pierre les gestes oubli s que l atelier r cite de m moire Immobiles les roues les cordes les cha nes Immobiles les plateaux les m canismes complexes Immobiles Le soufflet inspire expire seul il fait cr piter le bois et s essouffle faire na tre les mouvements fantomatiques qui s accrochent aux machines dans un nuage d esp rance vaine Immobiles elles attendent chacune de ses respirations l ultime incarnation qui leur rendra le bruit de la vie T B PARTAGE DES VOIX 0 w PARTAGE DES VOIX 00 P ISABELLE BALADINE HOWALD TARDIVE pour Roland et Christiane Juste avant on entend A A gt presque quelque chose sans tre s r quelque chose d infime inaper u sans cette alarme qui vibre plus qu elle ne sonne Pour moi depuis toujours comme un sifflement sans possibilit d identifier sa provenance Notamment juste avant le sommeil un peu trop tard Ce que j cris je ne l entends pas Je ne l entendrai jamais Je n entends ni musique ni mot parfois juste ce sifflement contretemps un temps trop tard souvent suite un clat d image Apr s sifflement me dit Lui toujours un peu d tourn T nstr m Tourne la t te de que
2. jamais priv es d yeux de l vres et de langue poup es abandonn es dans la d charge publique de l ternit Ce qui rend la mort si cruelle c est la proximit des vivants le corps corps des amants au fond des chambres la neige attisant l t le tapage nocturne men par les for ts f roces et cette lune orgiaque occup e ronger le ciel M A DANIEL LEUWERS ENTRETIEN AVEC MARC ALYN Les d buts le d clic initial D bute t on jamais en po sie Et quel moment cesse t on de commencer La question des origines se r v le forc ment inso luble en un domaine o tout proc de du mouvement de l apti tude la m tamorphose de la remise en cause permanente des valeurs sombres ou claires de la langue simultan ment r v l es et occult es Jai exprim cela sur un mode lapidaire dans Le Silentiaire Un po te ne d bute pas il survient il surgit Un po me ne finit point il phr atise six pieds sous l oubli Bien entendu nous ne saurions pr ciser ni vous ni moi ni personne la nature r elle de ce don de po sie qui nous traverse la fa on d un fleuve nous d robant au passage un cri une p pite avant de d fer ler plus loin pour entra ner les pales d autres moulins D s le ventre maternel nous pr tons l oreille aux chos assourdis de la voix humaine dont la sonorit nous bouleverse et myst rieuse ment nous veille Peut tre les po tes se recrutent ils parmi
3. Lors de ma premi re rencontre avec le site arch ologique de Byblos en 1972 un proche prit une photographie o l on me voyait d ambuler parmi les ruines avec des bras tendus de som nambule valuant la texture de l air tel un oiseau au bord du ciel L envol du somnambule Je sais aujourd hui quel point ce clich correspond une r alit que les mots eussent t impuissants d peindre il fixe le moment du passage travers une fronti re invisible en direction de l outre temps domaine o les forces antagonistes se rejoignent et s pousent Suis je jamais revenu de cette seconde si vaste qu elle contenait mon existence et celle de nos pr d cesseurs de tous les ges la promesse de l tre apr s l t l impitoyable candeur du monde et la tendresse que l on l ve jusqu ses l vres au petit jour dans le bol couleur de lait o tremble un reste de nuit Comme en d autres temps Nerval ou Germain Nouveau j tais parti pour l Orient dans l espoir d y retrouver mon Aur lia Lou Nadja aim e puis perdue dans quelque destin e ant rieure laquelle je n avais plus acc s Et cette femme Nohad Salameh po te et po me m attendait en personne fid le au rendez vous aussit t identifi e la Dame protectrice de Byblos Nul n ignore le r le jou par cette tr s ancienne cit quant la formation de l criture n a t elle pas donn son nom la Bible et par extension au livre
4. Marc Alyn proclamait alors MARC ALYN ar MARC ALYN EN N Maintenant et demain je n ai pas peur Des mal fices r pandus Par la corne d abondance des calendriers Aujourd hui et demain je laisse sur le sable S vanouir mes pas Pour que dans dix mille ans renaisse Le m me sommeil de mousse et de champignons bleus Dont ton souvenir est l otage Cette m me ann e 1954 il avait lanc une revue au titre rouge Terre de feu dont l ambition avou e tait d inventer une nourri ture base de soleil Avec le soutien de Jean Bouhier celui l m me qui tait l origine de l cole de Rochefort et Pierre Garnier il d nongait la triste po sie nationale visant l difica tion des masses populaires Marc Alyn se sentait plus proche d luard et d un Ren Guy Cadou mort trois ans auparavant trente ans que d Aragon le patron des Lettres fran aises Sa revue eut une existence tr s ph m re puisqu elle ne dura qu un an suscitant quatre num ros Le Temps des autres Moi qui ai le grand privil ge de pouvoir relire les po mes de ce recueil depuis longtemps puis je puis affirmer que la po sie qui se d ploie ici n a pas pris une ride que plus de cinquante ans apr s la magie de cette criture a r sist l usure du temps comme tout uvre authentique qui acc de myst rieusement l intemporel Le long po me d ouverture offr
5. la mer D limitant subtilement les territoires du pass et du r volu qu elle oppose Claude Ber se livre des r miniscences dont la douceur nim plique pas le regret ni un quelconque pass isme C est au contraire un salutaire retour sur soi qui r gle quelques comptes avec le pass Parfois crit elle j ai compassion de ce que je suis devenue parfois je suis simplement agac e d tre encore en ma compa gnie Pr texte et post texte l enfance le s jour d sormais d roule ses heurts violents et ses fastes modestes et grandioses Mais sourd aussi comme incidemment la gen se d une criture Jamais peut tre ne s tait elle livr e aussi totalement Il existe et c en est la preuve une pudeur de l impudeur Celle qui ressuscite les morts par la vertu des mots L heure est venue de Sassoupir dans la lucidit du jour blouissant NOTES DE LECTURES Ww M NOTES DE LECTURES Ww ON Contrairement l ordinaire la photographe Adrienne Arth ne se contente pas de livrer des clich s au demeurant fort beaux et fr lant l informel elle produit un texte D ambulations sta tions chemin qui donne brillamment quelques clefs de son travail tout en se r v lant une uvre en soi Dans une ruelle une vieille femme marche en pantoufles sales et se retourne d un air suspicieux un pansement l il droit Elle est borgne Moi aussi je vis borgne toujours un il
6. JEAN PIERRE CRAMOISAN PETITES M DITATIONS DE BOH ME Si mon c ur est trouble c est qu un cadavre y pousse II Toujours ardeur violente et renouvel e les d parts plus renversants que les visions perdues le silence glac des solitudes et la magie des lieux que nous ne connaissons pas que nous ne conna trons sans doute jamais l intensit des chaos int rieurs plus d routants que les sommeils solaires l esprit et sa maladie rongeuse le corps La vieillesse l inanit des nergies Quel vide nous attend Quel n ant va nous engloutir III Corps grincements des chairs dans la douleur et le plaisir extatiques les meurtrissures bleu tres et le sang vineux Corps absence fatale des chaleurs r confortantes dans la lutte insens e les entrailles larv es et le sang noir Corps monstrueuse gestation des plus sombres pressentiments les brunes puanteurs et les carcasses verdies sous les pierres ternel d sespoir PARTAGE DES VOIX N SS PARTAGE DES VOIX N ES IV En quelque matin e de printemps que l on se puisse trouver la vase au fond du lac reposera nos yeux fatigu s par de sauvages excursions psychologiques Voici que les soleils boueux s infiltrent d j dans les retraites les plus s res v O sont ces anciennes p r grinations qui nous obs dent encore Quel souvenir nous fera retrouver le va et vient des s ves Dans l air d
7. Mais d j j difiais le po me afin d y tablir ma r sidence principale laissant sur la porte la clef que le plus d muni entre ici se chauffer Vos peintres Je peins et ils crivent constatait Picasso propos des po tes ouvrant selon son habitude de vastes perspectives par le biais d une formulation minimum Quand le peintre appareille toute toile dehors vers le grand large des images la vibration qui MARC ALYN UD Ww MARC ALYN Ww P Panime ne se distingue gu re de l lan int rieur du po te griffon nant les premiers vocables embu s de silence du po me encore incertain d exister Dans les deux cas c est l homme qui se parle lui m me au seuil de la grotte primordiale le dessin s organise en criture un soup on d invisible s incarne dans le trait la touche la couleur Il mest impossible assurait Andr Breton de consi d rer un tableau autrement que comme une fen tre L atelier de l artiste aussi bien que le cabinet d criture donnent sur l ailleurs quoi r vent les paysages sinon se transfigurer en tableaux La parole quant elle aspire s envoler de la page pour retrouver l ivresse de l oralit en attendant de retomber dans le pi ge tendu par quelque nouveau veilleur l aff t Que vaudrait un artiste qui ne serait pas galement un po te Et comment imaginer ce dernier totalement d pourvu de l il de proie du voyant Hugo dessinait d
8. Son th tre est celui d une r sistante civile comme elle se d finit elle m me Dans L Ann e de Richard une variation sur le Richard II de Shakespeare Ang lica Liddell prend la parole pour ne plus la l cher Elle donne corps et voix au monstre au tyran qui se sert des bassesses et de la servilit de ses sujets pour mieux asseoir son pouvoir tout en exploitant les failles de la d mocratie Dans La Maison de la force la parole revient aux victimes Aucune montagne aucune for t aucun d sert ne nous d livrera du mal que les autres trament notre intention annonce une fillette seule sur sc ne au d but du spectacle Six femmes trois s urs de souffrance comme chez Tchekhov puis trois autres commencent alors se raconter Le spectacle est long plus de cinq heures parce qu elles prennent le temps de parler au rythme des souvenirs souvent mauvais qui reviennent leur m moire et parce que l histoire de la violence et des humiliations subies par les femmes n en finit pas de recommencer ici ou ailleurs en Espagne ou au Mexique puisque c est l que se cl t La Maison de la force dans un pays o les femmes meurent la pelle vio l es tortur es assassin es comme en t moigne la liste des mortes de Ciudad Ju rez lue par l une des com diennes C est un th tre qui tient aussi de la performance Sur sc ne le corps prend le relais de la parole il se tend il se convulse il saigne p
9. a roport o l attendaient amis et journalistes tait une jeune po te aux longs cheveux d b ne aux yeux d bordant d horizons de promesses qu il reconnut sur le champ sans lavoir jamais vue Cette belle t n breuse dont la pr sence illuminait c tait Nohad Salameh attentive et pudique douloureuse et hi ratique comme ces statues de Cyb le Aphrodite asiatique repr sent e avec la lune sa gauche et sa droite le soleil Alyn lui offrit d embl e l Infini au del qu il tenait la main et ce fut entre eux l instant magn tique voqu dans une strophe de Byblos Soudain levant les yeux j ai vu tous tes visages femme amphore lourde de glycines de bleuets de menthe de r s da d iode de piment de cardamome de laurier rose et de chevreuil seconde de ma vie quemplit peine l infini for t que j ai tenue dans ma main comme un nid Cet amour qui le fit rena tre il va le chanter le c l brer sous toutes ses formes dans un livre admirable Le Livre des amants qui s ouvre sur une litanie poignante dans la lign e des Troubadours largie par usage d un vers de seize syllabes J ai tant faire l amour que je n ai plus le temps de vivre en vain j appelle mon secours la raison qu elle me d livre Ma s sans amour que vaut de vivre Ah Que cesse ici bas mon cours si j oublie un instant d tre ivre ou si me d laisse l amour Suit ce portrait en forme de blason La femme de j
10. dans Libert de voir Marc Alyn ajoute de nombreux in dits aux po mes publi s pr c demment Serge Brindeau l a n de douze ans notait Nous r vions d une fraternit solaire objectif Soleil ce fut la devise de Marc Alyn Nous prenions en charge ce que Marc Alyn allait appeler le temps des autres D s les premiers recueils Alyn s interroge sur les jardins de Pen fance dont nous avons gar la clef et adopte la d marche de Pini ti qui se construit travers les myst res ou de l alchimiste la recherche de la pierre philosophale Dans les ann es qui suivent sa po sie prend souvent des accents d invocation l univers entier Comme le souligne avec justesse l un de ses ex g tes Bernard Fournier dans son essai LImaginaire dans la po sie de Marc Alyn L Harmattan 2004 Le po te est pris entre les feux infernaux et la nostalgie de l origine n e de terre et d eau Le po me est un acte qui reprend la somme d un homme depuis son origine jus qu sa fin Le po te sent en lui la pr sence de forces obscures Nulle part le min ral na trouv plus bel asile que dans l homme et ses limons D l biles H ritier de la pens e grecque et gyp tienne il se sait issu des commencements mythiques et tend vers quelque ailleurs qui lui chappe Son but retrouver une parole perdue Elle tait l avant la bouche avant la langue dans le cla potis du san
11. ditions SUD Et ce titre dangereux ma s beau sifflant comme un coup de fouet fut adopt l unanimit par le conseil de r daction d Autre SUD qui signait ainsi l acte de nais sance de ces nouveaux cahiers litt raires internationaux et s en ins tituait le conseil Outre les membres reconduits apr s la douloureuse disparition de Jean Max Tixier et l amicale et indis pensable venue de T ric Boucebci un autre ami qui n est plus PH NIX N 1 NI PHOENIX N 1 00 pr senter Jean Orizet n du c t de l Estaque nous fit lhon neur et la joie d accepter de s agr ger l quipe Cette pr sentation est donc coll gialement sign e Yves Broussard T ric Boucebci Frangoise Donadieu Jo lle Gardes Daniel Leuwers Jacques Lovichi Jean Orizet Jean Poncet Fr d ric Jacques Temple et Andr Ughetto qui constituent le conseil souverain de Phenix N B Lors du dernier des repas aux Arcenaulx durant lesquels le conseil de r daction de la d funte revue Autre SUD avait coutume de rencontrer nombre de ses lecteurs ce qui devint habituel chaque parution et le sera pour Phoenix nous avons eu la surprise le plaisir et la joie de voir sans les trois coups appara tre notre ami Marcel Mar chal exceptionnellement de passage Marseille pour y pr sen ter Bada venu nous saluer et rappeler les liens tr s forts qui unis saient alors notre revue au th tre national de la Cri e soir es c
12. Au milieu de ce cimeti re de lettres s achar nant d sesp r ment renouer leurs jambages sous la terre afin de reconstituer mots phrases livres je reconnus le sourire de lange dans l entreb illement de la porte d ombre d o filtrait une indes MARC ALYN Ww MARC ALYN SS N criptible clart Les trois volumes des Alphabets du Feu sont le fruit de ce choc initial inlassablement m dit et traduit en po mes Des ann es plus tard je retrouverai Nohad Paris gr ce un encha nement de miracles Celui qui ne croit pas aux miracles n est pas r aliste et nous accomplirons ensemble d autres voyages initiatiques notamment Ninive Babylone la porte du dieu et Bagdad Dans l intervalle la guerre civile avait clat au Liban et Beyrouth divis e en secteurs ennemis perc e de meur tri res tait devenue un lieu de mort saignant la une au fond de l encre des journaux comme je l avais not dans Le Livre des amants recueil v cu crit et imprim la lueur des tirs durant mes s jours aux c t s de Nohad L amour n est il pas le moteur essentiel du po me L amour cauchemar de la mort est le c ur battant du po me le r servoir de son nergie fabuleuse et le bruit de fond accompa gnant sa perp tuelle imminence La grande force est le d sir affirme Guillaume Apollinaire tandis que Ren Char exalte le d sir demeur d sir et Saint John Pers
13. C est l le ventre du livre s il est permis de faire r f rence au th me obs dant du d sir et du refus d enfant Anne est enceinte et Lucie Emna et une autre femme qui fut Tunis la ma tresse de Martin sont prisonni res de rapports compliqu s la maternit Anne qui ne saura pas si Lucie a tu ou non va d couvrir le secret de sa grand m re Mme Karabotchka au nom sorti de Gogol qui dis simule le vrai Ce ne sont pas les deux s ries d v nements qui importent encore qu ils permettent de beaux portraits surtout de femmes reli es par le ressentiment de la serpilli re mais la double qu te en elle m me non dans ce quelle a d anecdotique mais dans la r flexion sur l origine qu elle soit motivation d un acte ou filiation Terme de l enqu te de personnalit terme de la grossesse terme de l nigme familiale tout n est affaire que de qu te existentielle et de mise jour de blessures dans le refus d enfant ou dans le refus de l amour De m me que les blessures inflig es aux objets elles d rangent l ordre de l univers L il postiche de la statue kongo r pare la fissure qui lui a t inflig e comme les mensonges de la grand m re et le silence de Lucie r parent les blessures de l Histoire et de leurs histoires Mais si on les dissimule un temps on ne peut les supprimer Anne l enqu trice narratrice devra s adapter sa nouvelle identit et lui don ner
14. celle du monde qui broie les tres sans c ans je n ai plus pas sauf j ai ecchymoses urine injures chevilles gonfl es et pourtant elle ne saurait masquer sa splendeur celle des choses et surtout des tres voqu s par leur nom quand ils sont connus ou plus anonymes comme le tr s beau travesti de la rue des Archives chaloupe seins boules louve foule houle ou ces hommes sur les toits pour r parer les ouvrages bleut s que le temps a d faits et qui sont transfigur s par la seule hauteur Une m me tension traverse l criture souvent sur le mode du constat d pouill de listes qui tentent de capter un peu de la diver sit de l univers mais aussi de sortes de calligrammes comme dans le po me M t ores o les mots sont s par s tels de lourdes gouttes de pluie ou Patience qui alterne des blocs compacts avec des colonnes qui voquent les tas de cartes dispos s selon des r gles d finies Une motion surgit de tous ces contrastes et la travers e du temps et de l espace qui nous est propos e pourrait tre celle de chacun de nous occup brasser les cartes qu il a re ues de clairs encha nements de causes surviennent grand jeu les cartes te gouvernent Jo lle Gardes o NOTES DE LECTURES 139 NOTES DE LECTURES ES O Grandeur nature d Yves Broussard Le Taillis Pr Le dernier recueil de po sie d Yves Broussard entre une citation de Pierre
15. crivain La ma trise de celui qui a donn ses lettres de noblesse au conte m ta physique continue de me fasciner la fiction borg sienne se construit souvent partir de ces arch types qui nourrissent les mythologies et donc l inconscient collectif l ternel retour le th me du double le jeu des miroirs la mise en abyme le Labyrinthe la Kabbale l Aleph Un essayiste a d fini cette fiction comme une aventure d id e autrement dit la mise en situation d une id e abstraite mais dans laquelle Borges int gre sa culture universelle sa pens e philosophique sa fantaisie Le magicien aveugle aimait r p ter cette formule N oubliez pas que la fiction est une r criture de la r alit D ailleurs la vie pour lui nous rappelle Bern s n tait faite que de variantes infinies de versions et de perversions qui r p tent leur rythme des redites programm es Borges n a cess de r fl chir de nouveaux projets litt raires qu il d finissait comme des formes de l espoir Il en avait exclu le roman consid r comme une routine une superstition des crivains Lors de ses conversations avec Jean Pierre Bern s Borges lui avait donn avec un humour caustique la recette pour crire un roman Vous commencez par Il pleuvait Vous racontez des d jeuners des petits d jeuners les menus les cou cheries le suicide de la belle s ur la fin et vous remp
16. ficie d une prolongation et s installe avec sa m re Menton o il meurt le 14 d cembre l ge de trente deux ans La m re du po te a racont la mort de son fils dans une villa perron qui donnait sur le boulevard du Midi Il s tait lev quoique tr s faible mais plein de ga t Vers midi et demie il a mang une aile de faisan Vers deux heures le m decin est venu lui faire une piq re Il savait que sa fin tait proche mais n en lais sait rien para tre Vers sept heures il mangea deux c telettes d agneau et dit qu il voulait dormir Vers neuf heures un grand froid l envahit On lui mit une bouillotte sur le ventre Il s assoupit puis s veilla en sur saut son regard se fixa sur sa m re et il cria tr s fort Maman Ses yeux taient grands ouverts mais il tait d j mort De retour Vichy vers le 3 ou le 4 mars Valery Larbaud et L on Paul Fargue trouv rent une lettre de Monsieur Levet par laquelle celui ci les priait de ne pas s occuper de la publication des ceuvres de son fils Georges Levet allait mourir peu apr s Il faudra donc attendre trente deux ans avant que ne soient publi es les fameuses Cartes postales Elles nous parlent de Calcutta de Bombay de Brazzaville de Biskra de la Plata de Nagasaki de Port Sa d de Nice et des Antilles Pour le po te globe trotter que je suis et qui a mis ses pas dans ceux de Levet ces brefs messages gardent intacte leur magie He
17. h pital g n ral de Zanipolo tre d sorient dans une ville de l Orient Marc Alyn a choisi de placer en pigraphe son livre ces vers de Pound Je suis venu ici dans ma prime jeunesse et jai pris place sous le crocodile L au pied de la colonne face l ouest le vendredi Et j ai dit demain je m installerai du c t sud Et le lendemain au sud ouest Mais est il si facile de s orienter dans Venise Il y a Venise la rouge mais aussi Venise la noire la Venise des t n bres sous le regard des Trois philosophes de Giorgione admirablement voqu s dans le chapitre Signori di notte Il y a Venise sous la pluie devi n e par Marc Alyn lors d un premier r veil Et je me souviens d un autre r veil dans un h tel du quai des Schiavoni Venise dans un brouillard pais aupr s duquel le fog londonien n est que brume l g re Dehors les ruelles devenaient des tunnels l eau glauque des canaux semblait rec ler des puissances mal fiques Cher Marc Alyn ce jour l le pi ton de Venise que j tais ne voyait pas la pointe de ses chaussures Et comme j aime votre livre pr cis ment parce qu au lieu d une Venise pour cartes postales pour touristes na fs et pour jeunes mari s il nous met imm diatement en face d un port grouillant o l Asie d barque il nous fait p n trer dans l antre du dragon il nous rend sensible Venise l alchimique il y fait circuler les tarots dont l
18. il redevienne comme tait le vieux T N P sinon national du moins populaire longue vie encore s il n est trop tard au merveilleux Festival d Avignon L x MISE EN SCENE m N MA x MISE EN SCENE m N CN CHRISTILLA VASSEROT DEUX SPECTACLES DE L ESPAGNOLE ANG LICA LIDDELL AU FESTIVAL D AVIGNON La Casa de la fuerza au Clo tre des Carmes L Ann e de Richard la Chapelle des P nitents blancs Ang lica Liddell un pr nom et un nom que peu de personnes en France connaissaient jusqu ce mois de juillet 2010 o cette jeune Espagnole fut sacr e r v lation v nement de la derni re dition du Festival d Avignon En 2008 et en 2009 Pont Mousson l occa sion du festival La Mousson d t certains avaient pu assister la mise en espace de deux de ses pi ces Et les poissons partirent combattre les hommes puis Belgrade publi es aux ditions Th trales Cet t Avignon le public frangais a pu non seulement mieux conna tre Ang lica Liddell en tant qu auteur mais aussi la d couvrir comme met teur en sc ne et com dienne Elle y a en effet pr sent deux spectacles qu elle a crits mis en sc ne et o elle joue L Ann e de Richard et La Maison de la force Bien que fort diff rents ils sont tous deux l image d un th tre nourri par la rage le d chirement et la compassion c est dire l art de partager la douleur
19. un chat atteint de c cit Des morts tir s quatre pingles conduisaient l attelage de Fant mas lanc tombeau ouvert vers les bas quartiers de l nigme On entendait tinter les colliers de grelots par dessus les sanglots d une trang re d pouill e de sa robe sur les coussins de cuir par des doigts intraitables et les rares passants essuyaient un feu nourri d invectives rebroussant chemin vers les zones clair es La vie fuyait ainsi de chapitre en chapitre folle alli e de forfaits imaginaires fouaill e par une criture de haut bord ample et incisive qui fon ait vers l ailleurs en inversant les r les Tous les h ros taient fictifs au m me titre que l auteur dont la t che consistait pr senter les mots aux choses et les choses aux mots en vue d garements partag s Il en naissait des significations inou es t te b che sauvages offrant une vue imprenable sur le grand large L bas le claquement des lessives marines annon ait la cit oriflammes grand voile d ploy e pi ces de lingerie roses cramoisies mordor es plus vaporeuses que la fin du monde Du haut des remparts les veilleurs visaient les yeux Puis l aube s envolait et l on d couvrait blotti entre les roues l enfant perdu depuis tant d ann es grand pour son ge tel un prisonnier largi MARC ALYN N SU MARC ALYN N EN Fatigu de la gravitation universelle il pr tait l oreille au pas des
20. 4 par exemple peut se r f rer au livre de la papesse arcane 2 Elle est le livre le lit Il la lit elle se livre c est alors qu il la lie on remarquera la libert des jeux de mots n h sitant pas bousculer le bon go t classique assez caract ristique de la prose de Marc Alyn ils disent ici un d sir assez cru logique au d but du parcours initia tique Le texte 21 se r f re manifestement au soleil arcane 19 Que le num ro du texte ne soit pas celui de l arcane correspon dant c est sans doute cause de l action vagabonde du mat po te ou fou dans ce contexte amoureux d amoureuse initia tion pour reprendre une expression de Milosz Un tarot du MARC ALYN VA N MARC ALYN M 0 XVII si cle celui de Noblet ne rempla ait il pas le b ton du bateleur par un phallus Au terme du parcours on observe tou tefois une d ception cependant la jouissance du corps laissait d sirer et finalement le juge tourdi abattait le gagnant d une balle en plein r ve La cruaut du po te Comme il est dit dans la lettre finale de Nuit majeure le verbe se r ve et se nie pour mieux se rajeunir Je rapprocherais cette affirmation des observations de Gilbert Durand Une image symbolique a sans cesse besoin d tre rev cue l image symbo lique s incarnant dans une culture et dans un langage culturel risque de se scl roser en dogme et en syntaxe C est
21. Barbe Bleue d bordant d uniformes cribl s de balles et de dentelles ensanglant es attendait le client aux portes des goulags accompagn e d hymnes et de cantiques Tout tait donn en vrac sans mode d emploi chacun de trier parmi ces d s ces faux jetons ces cartes biseaut es sa propre ligne de vie avant qu elle ne l trangle En d pit de ces menues contrari t s nous prenions le temps de caresser au passage une jeune rivi re boucl e comme un agneau qui passait chatouillant de son rire le paysage voyageur Le temps d apprendre par c ur la mort puis de l oublier nous n tions plus l pour personne mais demain qui l aurait t D j je devais faire un n ud ma m moire afin de ressusciter les traits oblit r s d amis ensevelis sous le papier glac de grotesques photos d identit vestiges de destins calcin s peine subsisteraient quelques traits de couleurs sur les parois de grottes envahies de gravats et de mati re noire ex lumi re pass e l ennemi Mais nul regard n atteindrait ces gisements d images L oreille nous manquait pour capter la pri re que les choses de toute leur path tique immobilit s effor aient d sesp r ment d mettre Tout se r duirait un enchev trement de chiendent de fourmis gastronomes et d escaliers abrupts menant des balcons de glace Un cavalier gardien du bout des eaux surgirait du brouillard pour nous communiquer des nouvelles fra che
22. Ce qui m nes de Vilar est une excellente chose Mais cela ne durera pas ternellement Papperlapaap Faut il vraiment qu une manifestation d une telle ampleur soit parfaitement rat e pour emporter les suffrages de l intelligentsia parisienne Si c est le cas par piti batifolez Paris mais ne laissez pas d shonorer un lieu de si pres tigieuse histoire th trale J entends d ici les protestations offusqu es de ceux et celles qui pr tendent enseigner le beau aux abrutis de la pro vince les pauvres rien compris aucun imaginaire r f rences vieillottes hargnes campagnardes b tise r trograde et pass iste en un mot des malheureux qui refusent d entrer dans la somptuosit si si il y en a une c est m me tout ce qu il y a de la grandiose supercherie Car il y existe une sorte de g nie dans le ratage Le public ny est pas comme on le croit complice Il est victime Ici flattant son d sir d tre dans le coup on se paie litt ralement sa t te En est il conscient Certains spectateurs rient parfois faiblement De leur propre b tise J crivais nagu re propos de l Inferno de Castelluccci pr sent au m me lieu et dans les m mes conditions Vouloir retranscrire ce texte celui de la Divine Com die en des images quasi silencieuses fussent elles sublimes serait d une t m raire imb cillit Qui fut bienheureu sement vit e Encore alors y avait il un texte C
23. Jo lle Gardes photographies d Adrienne Arth Par del les murs photographies de Patrick Gardes gravures de Martine Rastello textes de Jo lle Gardes 134 Ayesha de T ric Boucebci 137 Bruissant de Ga lle Guyot 138 Grandeur nature d Yves Broussard 140 Pr face la vie Prefazione alla vita Otto poeti francesi della Revista Autre Sud 141 Quelques premiers vers de Germain Nouveau 142 Romans r cits nouvelles Z l postiche de la statue kongo d Anne Christine Tinel 144 clats d enfance toulonnaise 1936 1952 de Marcel Migozzi avec des dessins de Serge Plagnol La Seule Rescap e de Marcel Migozzi 145 C est tous les jours comme a Les Derni res Notes d Anthelme Bonnard de Pierre Autin Grenier 147 tudes essais et documents Jorge Luis Borges La vie commence de Jean Pierre Bern s 147 Fr d ric Jacques Temple l aventure de vivre tudes r unies et pr sent es par Colette Camelin Le Centre du monde autres po mes de D H Lawrence traduit par E J Temple 149 L Odyss e Cendrars de Patrice Delbourg 151 A Peaceful legionnaire An Indochina sketchbook 1948 1954 de Helmut Loofs Wissowa 153 Jan Karski le roman et l histoire de Jean Louis Pann 155 PH NIX N 1 H MARC ALYN Dossier rassembl par Andr Ughetto Marc Alyn dessin de Colette Debl ANDR UGHETTO ALYN PARMI NOUS C est en 2006 que j ai rencontr pour
24. arcane 17 cher Andr Breton il r pand les effluves d pices parfois pervers Vous avez intitul l un de vos chapitres Manger Venise mais n est ce pas Venise aussi qui risque de nous d vorer Encore Rimbaud malgr l absence Rimbaud vous le rappelez n est jamais pass par Venise quand il est parti pour l Orient pour les pays poivr s et d tremp s auxquels se vouent les colons de D mocratie Mais dans un autre po me des luminations Promontoire il a voqu les Embankments d une Venise louche Curieux alliage v n to londonien pratiqu par un alchimiste du verbe qui comme vous l crivez si bien sut chanter comme personne les villes fantas tiques o nichent les po mes Votre livre en est un un po me plein riche savoureux lucide p n trant et p n tr et assur ment un po me pour aujourd hui L Aventure initiatique Mais voici un tout autre voyage dans le livre de Marc Alyn publi en 2010 par les ditions Phi Le Tireur isol Cet l gant recueil de po mes se place sous le signe d un d part de la d me sure vers d autres cieux vers d autres lieux et ceci d s l pigraphe qui donne la tonalit et le sens de l ensemble Quand la d mesure ne trouve plus se loger nulle part G nant l espace aux entournures Prends le maquis en compagnie du po te Qui progresse d un pas de silence travers la nuit blanche Pr c d de ses mots
25. cach par l objectif Je suis aussi borgne du dedans Je regarde dehors sans me voir Et c est pourtant le peintre en elle qui aura le dernier mot apr s avoir eu le premier Sur le chemin du retour je cueille des illets de po te rose fuchsia encore pleins de ros e Je les mettrai dans ma cellule roses contre le mur blanc dans un vase blanc d o surgit le vert de la tige entre le visage aux deux mains et le bras gauche du Christ pris dans les lignes du pl tre R cusant toute invite ces r sidences d artistes dont l aspect artificiel me paraissait suspect qui impliquait la production d un texte de circonstance pour ne pas dire de commande j ai toujours courtoisement d clin les offres hospitali res de ce type moins qu ici encore l exception ne confirme la r gle M ditation des lieux m am nerait sans nul doute reconsid rer les choses Par del les murs prolonge en quelque sorte la m ditation trois voix On y retrouve des textes de Jo lle Gardes pr c demment nomm e avec des photographies de Patrick Gardes et des gra vures de Martine Rastello Trois fa ons encore d explorer un terri toire commun Sculpteur et photographe P Gardes recompose la nature dans ses uvres Venues du Portugal d Italie de Tha lande de Chine ou du Laos mais aussi de divers coins de France les photos qu il nous propose constituent dans une confondante conomie d images un ensemble qui jamais ne to
26. ce que Hugo nommait son uvre de fan t me Qu il travaille devenir voyant comme le voulait Rimbaud ou m riter Hom re Borges le terrible privil ge de la c cit qui claire les choses de l int rieur toutes les d marches extr mes du po te vont dans le sens d un clatement des limites en vue d une rencontre avec l inconnu travers Rimbaud Mallarm Artaud et les autres l alchimie du verbe demeure l l ment moteur de la po sie vivante La dimension sot rique vous avez raison de le souligner occupe une place plus clatante dans Le Tireur isol ce n est certes pas une nouveaut chez moi depuis Nuit majeure mais peut tre le fil d or de la qu te scintille t il d sormais au premier plan fil d Ariane pour s chapper du labyrinthe ou s y enfoncer sans retour La po sie ne constitue t elle pas en elle m me une initia tion Le po te homme r fl chi tout miroitant d images distille inlassablement le langage comme l alchimiste messie des m taux ses liqueurs philosophales Il n ignore point que de grands myst res attendent d tre perc s non seulement dans l alphabet clat des astres mais aussi plus pr s au c ur d un grain de bl Laissant d autres la t che vaine de fabriquer de l or il me semble pr f rable de suivre l exemple du peintre Yves Klein qui en compagnie de Dino Buzzati jetait la Seine des lingots des paillettes aurif
27. ces r veurs actifs de la vie pr natale d j en proie la musique du verbe avant m me d en pouvoir saisir la signification L oreille qui sert de regard aux aveugles saccomplit dans l ou e dire contact privil gi actif avec le langage parl bient t relay par l crit Pour ma part je fus un usager pr coce de ce vice impuni la lecture avide d s l enfance d apprivoiser l nigme dissimul e sous la couverture des livres encombrant la demeure familiale mon p re tant lui m me un fameux d voreur d imprim s r vant sa vie au lieu de la gagner ou plut t la dilapidant au profit de ses royaumes imaginaires Pour acc der l expression crite aux bal butiements du po me il me faudra atteindre la pubert l ge o les mots font lamour Je Pai voqu ailleurs Le surgissement d un po te qui se confond avec la d couverte de sa propre voix se r v le indissociable d une prise de conscience quasi physique de ce ph nom ne d affinit s lectives et de possession intime des MARC ALYN N N MARC ALYN N o vocables dont la finalit se nomme l image M moires provi soires Orph e jaillit d ros lui m me fr re ennemi de Thanatos L explosion lyrique chez l adolescent po te est parall le celle du sexe le Sexe le Texte et de son ombre port e la mort Tout jeune vous prouvez un d sir fou de po sie Comment cela se manifeste t il dan
28. d chiffre en r p tant la phrase Exquise d un genou Le vers fou d une cuisse La croupe ail e de B r nice MARC ALYN SS N MARC ALYN Ww o0 Il y a chez Marc Alyn une telle vidence de la fonction m dia tique et osons le mot sacerdotale du po te une telle certitude de voyance dans un sens moins proche que l on pourrait croire de la parole rimbaldienne qu elles demandent une adh sion totale ou un rejet d finitif Je voudrais ne faire pousser aucun haut cri en d clarant que pour moi dans sa conception du r le qu il est amen jouer ce po te est plus proche de Hugo pour paradoxal que cela paraisse que de l habitant d Une Saison en enfer Et C est de ma part une extraordinaire louange Je n ai rien contre Jean Arthur bien entendu De cette haute conscience de la fonction proph tique du po me et du po te vient sans nul doute la sourde hostilit que certains lui t moign rent Ce qui g ne un peu aujourd hui la lecture et qu on ne remarquait pas c est une certaine pr tention litt raire d nonc e par ailleurs crivait par exemple Serge Brindeau dans La Po sie contemporaine de langue fran aise depuis 1945 ne se rendant sans doute pas compte qu il contribuait ainsi sans le vouloir l dification d un pi destal dont rassurons nous le po te descend aussi souvent qu il est n cessaire Jean Bouhier et Pierre Garnier qui furent de nos amis to
29. d ploie un lan continu en m me temps qu il module chacune de ces sta tions pour reprendre le th me christique qui scande la seconde partie nous menant de la plong e dans l ab me au retour la vie Significativement la reprise anaphorique le dis moi du Fleuve Premier et le crire au quotidien du Fleuve dernier qui ouvre et cl t le recueil enserre la plong e dans la mort entre deux appels la vie Conjuration d abord ce seuil o l me se d livre de sa robe charnelle Dis moi le livre le chant les radeaux qui remontent le fleuve les ombelles les alc ves la course folle vers l estuaire la course folle vers l incendie et sursaut de r sis tance vitale si la fi vre te gagne tu ris de ce rire oc an venu de plus loin que la peur quand corps abattu sur le lit le dress e il s agit d aller tout de m me Ne renonce pas et monte la colline et si les galaxies s effritent ton approche ressoude l oc an C est pas pas que le po me suit le calvaire de celle a long e fatigu e ravag e qui n en demeure pas moins solaire s duc trice guerri re jusque dans ce dit de la mort qui inscrit dans l criture son effacement impensable d un coup de gomme tout rayer Le texte mang englouti perdu le corps ses d sirs sa soif La lumi re Tout L exp rience d borde de l individuel et le p
30. dans celui qui est pr dit ou promis au chr tien Marc Alyn caract rise admirablement cette ligne de partage et il s agit bien cette fois de la sienne comme ligne de partage entre l tre et l t C est la premi re des quivoques po tiques fond es sur de subtils jeux de mots qui vont abonder dans Le Tireur isol Je serais tent de dire que ce sont autant de ses coups s il est vrai qu il se confond avec le po te t oppos l hiver des neiges d chirantes t laiss loin de ce qui est en train d tre et qui en est pourtant in vitablement tributaire pr sent li au pass par le fil du temps L enfance est d ailleurs encore l qui veille sur le sort du promeneur solitaire le prot geant des anges marau deurs qui peuvent n tre que des anges gordiens Il est l homme de la fronti re ce po te marcheur car pour lui comme pour Rimbaud marcher sidentifiait la po sie m me Il est aussi l homme de l ascension atteignant des points de vertige Le mot qui servit peut tre de titre un po me de Rimbaud celui qui commence par Qu est ce pour nous mon c ur et appara t dans le cours d une des uminations Mouvement revient maintes fois dans Le Tireur isol dans un cadre de montagne qui est celui d critures pic et si l on peut pousser le jeu de mots jusqu la familiarit d critures qui tom bent pic dans un monde qui en a b
31. de Paris voque pour son compagnon de voyage les errances parisiennes en compagnie de Levet C tait vers 1895 Fargue avait dix neuf ans Levet vingt et un Ils faisaient la navette entre le Quartier Latin et Montparnasse Les soirs d t ils montaient sur l imp riale du petit omnibus deux chevaux Place Pigalle Halles aux vins pour aller d un endroit l autre Ils aimaient les quartiers excentriques les bis tros du canal Saint Martin les ateliers des Buttes Chaumont Ils lisaient les po mes d Oscar Wilde les livres de Marcel Schwob et admiraient les tableaux de Whistler de Lautrec de Van Gogh et de Gauguin Ils allaient aussi du Mercure de France l ancien Moulin de la Galette avec ses tonnelles et ses tables peintes en vert Levet note Fargue avait d j senti le grand appel d air des voyages Il n en avait gu re fait mais il les pressentait Il aimait les atlas et les cartes les rocking chairs et les h tels cosmopolites Les PARTAGE DES VOIX O O PARTAGE DES VOIX m e e deux po tes r vaient des siestes dans les les du Pacifique des iguanes et des cocktails roses Apr s avoir v cu chez ses parents rue Cambon son p re tait d put de la Loire Levet habita quelque temps un petit apparte ment rue Caulaincourt En 1896 il s installa rue Fontaine et en 1897 rue Lepic Ses v te ments taient d une coupe anglaise Il avait d ailleurs a
32. de la vitesse dans le Shinkansen entre Tokyo et Kyoto voici le silence de l immobile devant le jardin du Ry an Ji Il est le plus c l bre des Kare san sui ou jardins secs de l art zen On attribue sa paternit au ma tre Soami qui l aurait dessin vers la fin du xv si cle mais le fait n est pas av r Ce peintre de haute r putation n en 1472 et mort en 1523 est plus s rement l auteur du Ry gen in ou Ry gintei composition de pierres sur un lit de mousses qu il aurait dessin e en 1502 On lui pr te aussi puisqu on ne pr te qu aux riches le trac du Daisen in autre jardin sec du monast re zen de Daitoku ji dat lui de 1509 Le Ry an ji est un espace rectangulaire de trente m tres sur dix au sol constitu d un gravier blanc ratiss chaque matin selon un rituel tabli Il appartient au type trois cinq sept c est dire qu il comporte trois groupes de pierres l un comprenant trois pierres l autre trois pierres plus deux et le dernier cinq pierres plus deux ce qui donne quinze pierres au total C est un type de jardin classique de la p riode Momoyama XVI xvVII si cles Il s inscrit dans la ligne des jardins min raux et repr sente l aboutissement d un exercice d abstraction auquel se livrent les moines zen Cette Voie des Pierres est utilis e par les artistes dans la pratique du Tao comme ils utilisent la Voie du Pinceau pour essayer de transmettre un message de sag
33. en ce point que la lettre menace l esprit lorsque la po tique proph tique est suspect e ou musel e Marc Alyn lui affirme que Briseurs d idoles et visionnaires de divinit s gigognes notre fonction fut d agrandir le monde par adjonction d espaces ou d esp ces imaginaires Lhistoire abolit l un apr s l autre les dieux et leurs syst mes symboliques il ne s agit pas pour le po te d inventer une nouvelle religion un nou veau dieu mais de faire revivre l nergie psychique et verbale qui leur permit de relier l homme l inconnu d sirable La re symbo lisation du monde passe donc paradoxalement par une criture irr v rencieuse cruelle bousculant comme nous l avons vu plus haut le bon go t c est dire la somnolence langagi re la gra vit des pontifes du verbe Marc Alyn voquait propos de Mauriac une crainte du p ch de po sie Mauriac homme int rieur par excellence a effectu assez de plong es dans ces profondeurs de l me o la po sie prend forme pour ne pas igno rer qu un po te est appel un jour ou l autre s il ne triche pas fr ler des gouffres insondables o sa raison risque de sombrer Le pseudonyme de Marc Alyn fait assur ment allusion l alyn acc l rateur des op rations alchimiques mais aussi Marcel Allain Pun des cr ateurs de Fant mas On est donc entre l initia tion sot rique et le roman policier pl
34. en recenser les lignes de force d en souligner l unicit D j dans Cruels Divertissements une suite de po mes en prose parue en 1957 chez Seghers un an apr s la parution du Temps des autres le po te attendait de la litt rature qu elle lui permette de supporter par un c r monial des sens la vie pouvantable mesure qu il avance recueil apr s recueil dans l approfondis sement du langage le creusement minutieux des images au go t de chant sauvage avec Br ler le Feu Seghers 1959 et D l biles Ides et Calendes 1962 Marc Alyn ne peut s emp cher de mesu rer la fragilit voire l aspect d risoire des mots qu il convoque dans l laboration du po me la vanit de leurs efforts pour forer le silence de la page blanche Lorsque la venue in vitable de la mort cl turera sa trajectoire terrestre l instant de l orgueil rabot que vaudra alors cette obstination vouloir trouver le mot juste la perfection recherch e du chant po tique Puisque Un Dieu sans fin d tisse maille maille La foule des morts o germent les mots Si lucide soit il vis vis des pouvoirs limit s de l criture le po te n en voque pas moins la n cessit int rieure de dire le monde de tenter d en d chiffrer le myst re La parole me fut donn e pour retenir la terre ferme malgr le chaos du monde Il pleut des plaies sur les bras tendus de la terre Les volcans o
35. l riches d une vie incluse eux les sceaux dont la seule lecture suffit raconter une histoire VOLCAN EN JACH RE TOILE PHR ATIQUE D cor du drame le ciel noir d un long silence est finalement retomb en une pluie de cendres sur le recueil en jach re Des clairs de chaleur ont alors dress leur cri bref hissant un horizon au dessus du manque d crire Apr s tous ces chemins pris gard s pour soi apr s toutes ces marches effac es le po te a repris sa concoction d lans mais lui manque encore l envergure de ton ner Le po te Apr s des mois sans toi par o reprendre la vie que je t avais confi e La po sie Je suis ton toile phr atique L absence compte autant Le rythme c est elle Le po te fait son pain au miel des nuits lentes il sengironne son bonheur phr atique 3 e3 Quand il repart d en po sie c est toujours sa cascade sur le dos C M PARTAGE DES VOIX N O PARTAGE DES VOIX oo e T RIC BOUCEBCI PO MES Soustraire au pr sent un jour pour demain et les jours qui suivent tre un rayon qui s l ve l horizon une treinte la vie dans ce regard enivrant br lant qui re oit la Lumi re Un tumulte venir blanc gris noir en volutes ouat es avance inexorablement vers nous Un son un jour une nuit ou l entre deux un instant de bruit quelque part et l Univers Trace Sur mon corps des f
36. la premi re fois Marc Alyn et son pouse Nohad Salameh chez leurs amis Pierre et Marie Cayol qui organisaient dans leur demeure gardoise de Tavel une lecture des deux po tes pr sentant leurs derniers ouvrages parus Parmi ceux ci Le Dieu de sable que le po te diteur Jean Portante avait pris dans sa jeune maison Phi cette occasion prenant conscience de l ampleur et de la diversit de l uvre alynienne je plaidai avec succ s au sein de la r daction d Autre Sud pour qu un hommage lui soit rendu mais apr s la disparition de la revue qui devait l accueillir c est Phenix bien nomm e pour la circonstance qui a permis d en faire rena tre le projet et de rassembler le dossier qu on va lire On y trouvera d abord des in dits de la m me veine superbe que les po mes du 77reur isol galement publi par les ditions Phi en ce printemps 2010 L entretien de l auteur avec Daniel Leuwers le salut que lui adresse Jacques Lovichi les approches chronologiques compl mentaires de Bernard Mazo et de Sylvestre Clancier permettent de suivre son trajet de po te Emmanuel Hiriart s int resse quant lui la fonction symbolique des proses notamment travers les textes qu il qualifie plaisam ment de guides du pi ton somnambule et ce sont encore ces proses po tiques du Pi ton de Venise au Tireur isol qui inspirent les analyses de Pierre Brunel r v latrices de leur caract re rimbal dien en r
37. la vision n de fa on si sub tile de m identifier ce mur contenant tous les remparts ce mur o la glaise coule mar e basse vers le halo bleut des si cles libre moi d y m ler ce l zard ce tigre ces for ts dont l impatience cogne aux portes Libre moi d aspirer de l int rieur les veines du dragon de b tir d une montagne l autre des ponts clabouss s d immobile par une cascade p tr e Libre moi d tre l architecte qui meuble l espace du monde et d acqu rir la sagesse du lichen LE DANDY DE MONTBRISON Montbrison est un chef lieu d arrondissement du d partement de la Loire Cette petite ville assez terne est le berceau de ma famille paternelle les Orizet D apr s mes informations le pr fixe de ce patronyme indique rait une relation au travail de Por une certaine poque des gise ments aurif res auraient exist dans la r gion Peut tre certains de mes anc tres taient ils orf vres ou orpailleurs Montbrison est aussi la ville qui a vu na tre un 13 janvier 1874 le po te Henry Jean Marie Levet Tous les vrais amateurs de po sie le connaissent ne serait ce que par un sonnet que l on se r p te comme un mot de passe ou une formule de reconnaissance pour initi s son titre est Outwards litt ralement Vers l ext rieur L Armand B hic des Messageries Maritimes File quatorze n uds sur l Oc an Indien Le soleil se couche en des confiture
38. laboratoire propice aux formations de po mes venir Une g ographie symbolique Explorant Venise Paris et les goutti res avec les chats l uvre en prose offre au lecteur l exp rience d un espace sym bole Venise est la ville palimpseste souvrant comme un livre au sens ville livre par excellence non seulement en raison du r le capital qu elle joua dans le d veloppement de l dition et de l rudition gr co latine mais pour des raisons qui chappent la raison li es l intuition magique comme si quelque message crypt d ordre m taphysique tait emprisonn dans les pierres exigeant d tre lib r et traduit Ici encore le lien avec l uvre po tique est fort on pense aux dits du po me des Alphabets du feu la lettre finale de Nuit majeure qui crire aujourd hui sinon au langage Le po me Venise devenue langage par la m diation du po te qu elle m ta morphose devient espace dur e temps autre Et lorsque la nuit quotidienne s empare de Venise et devient nuit majeure du sym bole saint Marc autrement dit la fois l glise et le po te lui m me est l athanor de cette transmutation Quant la basilique que Byron compara t un crabe elle appara t sous son vrai jour de transformateur des hautes tensions invisibles labora toire central producteur d nergies ph nom nales qui assument un r le dans la transmutation alchi
39. lumi re cache plus qu elle ne d voile Midi l aveugle disait Saint John Perse Mais cette po sie enracin e en M diterran e n est pas pour autant r gionale et leur qu te atteint l universel C est un autre po te qui les a traduits Guido Zavanone il dirige galement la collection qui les accueille sans jamais les trahir attentif au sens pr cis des mots comme au rythme et la musicalit qui lui impose d heureuses transpositions de dispositions et de mots l heure de la disparition d Autre Sud l anthologie de Guido Zavanone vient point nomm rappeler que la po sie elle demeure J G Quelques premiers vers de Germain Nouveau dition de la Soci t de D couragement de l Escrime Bruxelles Li ge 2009 Il nous est venu de Belgique la fin de l ann e 2009 un livre tout la fois beau et utile Couverture au graphisme simple et l gant papier glac qui donne aux reproductions de manuscrits et de fac simil s un charme d suet et coquet cet objet pr cieux contient quelques premiers vers de Germain Nouveau l un des plus grands po tes du xIx si cle certains le disent l un des plus m connus tout le monde s accorde sur ce point Et pourtant ce mendiant magnifique n a jamais manqu d ardents d fenseurs ni de grands amateurs Parmi ceux l Jean Philippe de Wind et Pascale Vandegeerde Ils sont tous deux avocats et ont une passion ent t e pour la
40. magnifiques taient pro mis vivre l instant ternel du recommencement de lamour En 1996 Marc Alyn r unit en un seul et m me recueil l ensemble de sa po sie amoureuse savoir deux recueils dans leur version d fi nitive Po mes pour notre amour 1985 et Le Livre des amants 1988 avec une partie inaugurale Th tre d ros reprise d Infini au del 1972 d autres po mes tant extraits de Nuit majeure Infini au del Douze Po mes de l t les Noces Byblos venant de Byblos et les deux derniers textes du Scribe errant Ce volume une le part dans la cr ation de l auteur d un c t traduit ce que Paul luard nommait une longue r flexion amoureuse de l autre installe un laboratoire de formes faisant appel toutes les res sources de la prosodie Roger Caillois consid rait cet ensemble comme les plus beaux po mes d amour de la seconde moiti du XX si cle La pr face relate la gen se du seul Livre des amants qu il faut situer dans le contexte historique ayant t v cu crit et imprim Beyrouth sous les bombes durant la guerre civile Dans le C r monial de la Ville femme la capitale libanaise o souffle un vent d pop e est identifi e la femme Ao t semait sur ta peau des sauges des absinthes et je ne savais plus au terme de l treinte si tu tais la Ville ou si la Ville femme se livrait en mes mains au Jugement des flammes Avant de conclure
41. pass le pont les fant mes vinrent sa ren contre est il dit au seuil du chef d uvre cin matographique de Murnau Nosferatu La notion de pont travers titre d un recueil de r cits de r ves de Paulhan puis enseigne de la librairie de Marcel B alu suppose qu il existe un point de passage une sorte de poste fronti re entre l invisible et le monde des vivants On y change des messages des images des marchandises inter dites pay es en monnaie de songe Les po tes ont ici leurs grandes et petites entr es ce qu ils doivent non quelque mission pro ph tique mais la disponibilit inventive et ludique de leur sen sibilit Les po tes souvent ils devinent assurait Picasso Ainsi tombe t on par hasard sur une fr quence inconnue en cherchant simplement de la musique sur le cadran du poste de radio Il existe en po sie une riche g n alogie initiatique depuis les romantiques allemands jusqu aux surr alistes les uns li s aux MARC ALYN Ww M MARC ALYN SS CN autres gr ce au n ud coulant de Nerval lequel je l ai sugg r ailleurs crivait haut et court L inventeur des sommeils Robert Desnos se pr sentait comme un dormeur debout un r veur veill ligot par les liens du r ve et qui ne peut plus agir dans la vie qu au risque veill lui m me de n avoir plus autour de lui que des somnambules des aveugles des muets N est ce pas l accomplir
42. pour une dur e ind termin e dans un de ses nombreux labyrinthes ou dans quelque cabinet secret de sa biblioth que de Babel pas plus En mai 2010 un livre para t sign Jean Pierre Bern s d abord ami intime de Borges puis diteur de son uvre compl te dans La Pl iade Cet ouvrage apporte la preuve que l crivain est toujours parmi nous Quand j cris sur Borges je suis troubl car je ne puis m emp cher de songer ce qu il disait un jour Nous sommes tous les h ritiers de millions de scribes qui ont d j crit long temps avant nous tout ce qui est essentiel Nous sommes tous des copistes et les histoires que nous racontons ont d j t racont es Comment apr s de tels propos oser crire encore Mais il le faut Ceux qui aiment Borges se doivent de poursuivre leur travail d ex ploration et d abord sur Borges lui m me Il en avait exprim le souhait On ne sait rien de l intimit de Dante de Cervant s ou de Shakespeare moi je veux qu on sache il faudra dire La publication du livre de Bern s me remet en m moire ma premi re rencontre avec Borges le mardi 14 septembre 1982 Buenos Aires Notre attach culturel avait organis un rendez vous au domicile de l crivain 994 rue Maipu 10 heures du matin Vingt huit ans apr s la rencontre de Buenos Aires je retrouve dans le livre de Bern s un Borges plus vivant que jamais plus proche encore s il se peut de ma sensibilit d
43. pres que una ni me ment dune m me t l Tunis son ex ces sif Les fe n tres pas sent la nuit au cri ble d un ciel trou d toiles Les toiles en retrait de l clat de la lune Essouffl e blafarde l aube embue la vitre d un ciel ind cis PARTAGE DES VOIX m O N PARTAGE DES VOIX e oo Moi aussi les vignettes 1 CARTE La Vierge de la Garde allume son cierge et pointe son doux index vers le ciel obscurci paratonnerre pieux aux vices d ici bien connus de Paris D un fort l autre fort les autos font un collier de perles au cou du Vieux Port faute de la cha ne qui en fermait l entr e La Canebi re d verse son trop plein de lumi res dans l eau Il ne manque qu un timbre ma carte postale B P VOIX D AILLEURS Giorgio Cittadini est n Palerme Il a occup jusqu une date r cente la chaire de radiologie l universit de G nes et a publi de nombreux articles et ouvrages dans le domaine de l imagerie m dicale C est en 1985 qu il publie son premier recueil de po mes La Gioia di cercare ECIG Genova suivi en 1988 de Il Pensiero del coccio ECIG Genova En 1988 il publie galement La Morte di Mirsilo Sellerio Editore Palermo qui obtient en 1989 le prix Rhegium Julii un des prix de po sie les plus importants en Italie Le monde antique comme dans Il Pensiero di Ulisse suite dont la traduction par Jo ll
44. remonterait la surface Moins de m pris surtout En dehors de la notori t mondiale qui draine sur les bords du Rh ne toutes sortes de spectateurs non pr par s l esprit des lieux et pour les quels il faut tout prix d magogie oblige faire du moderne deux choses au moins ont au cours de son histoire affaibli et pour finir tu le Festival D abord un off pl thorique o se c toient le meilleur et le pire mais qui de toute fa on loigne le public des grandes sc nes parce que le fric est roi et que l on peut moindre frais faire Avignon sans entrer dans le in Ensuite de catastrophiques erreurs de program mation qui sous pr texte de renouveler le Festival en ont d tourn touff l esprit jusqu l agonie On ne peut cr er passez moi le en je vous prie Avignon donc nimporte quelle uvre aussi int ressante soit elle Certains checs se justifient presque uniquement par le choix du lieu Comme aussi certaines r ussites Oui ce Richard l tait fait pour redonner un peu de son sens au lieu prestigieux qui lui servait de cadre Cela suffira t il restaurer ce que j ai appel l esprit d Avignon et qui fit tant d faut ces derni res ann es C est peu probable Mais si le Festival survit on le devra en grande partie malgr quelques erreurs et beaucoup de maladresses Sastre et sur tout Podalyd s Ce qui n est pas un mince loge Et pourvu qu
45. res afin de restituer au fleuve enrichi d arcanes et d espaces le fabuleux m tal issu des profondeurs D L JACQUES LOVICHI ALPHABETS D Ros Les mots font l amour au silence MA Nohad Salameh et tous ceux qui font pacte avec l Immense Tout spasme na t des mots qui caressent nos nerfs crit d j Marc Alyn en 1976 lors de son exil d Uz s dans l un des Douze po mes de l t Mais c est de La Parole plan te panneau central du triptyque qui constitue Les Alphabets du Feu que je voudrais tirer l essentiel de cette br ve m ditation sur l criture et plus sp ciale ment l criture po tique par laquelle Marc Alyn s empare de la nature dans son aspect sacr comme dans son aspect charnel Ainsi peut on dire que chez lui du moins la po tique est en quelque sorte une rotique diffuse et transcend e Je n en veux pour preuve que ces quelques vers arrach s l un des Dir s du po me et que je retranscris ici sans commentaire inutile Parfum de p che de ta voix Ta parole est le songe amoureux des abeilles Je caresse un blason du corps f minin J embrasse bouche que veux tu la nuque d une cantil ne Les sonnets de tes seins emprisonnent mes mains Femme je t p le ainsi que versets du Cantique des cantiques Envahis de vocables laineux qui filent moutonnant Sur l paule arrondie o coule la nuit courbe Tatouage criture sur ta peau Que je
46. res oubliant la fatigue il s puisait tenir le cap dans sa fuite Sa pens e tr buchait il butait sur un mot un autre s avangait sur le bord aussit t venu la pointe de la langue il en sentait le doux fr missement Il lui en venait sans cesse qui frappaient la vitre pour le tirer du n ant de cette distraction o il se tenait Avec obstination liant les mots d autres mots il cherchait assembler les lieux et les moments de sa vie depuis ce jour o il tait parti sans autre empressement que de mettre ses pas sur l ar te tranchante des pierres avec le vent et sa rumeur pour compagne sous le haut ciel de Pair o filaient les nuages PARTAGE DES VOIX O W PARTAGE DES VOIX Y F infatigables au long des collines l o l on discernait peine une nappe de brume grise qui descendait au dessus des bois l o le trac de la route s ext nuait dans l tendue visible que recouvrait le silence des premi res neiges Qu tait il sinon cette fugitive image qui bascula au septi me jour se consumant entre la pierre et le b ton dans les replis du temps pareille obscurit qu son nom seul l ab me avait d sert e pareil cueil sur ses l vres retenant un fragment de clart A F C JEAN ORIZET LE RYOAN JI JARDIN SECRET DES SIGNES Le Tao engendre Un PUn engendre Deux Deux engendre Trois Trois engendre l infinit des cr atures Lao Tseu Apr s le bruit
47. s dans le mois sacr D abord la lumi re qui t ouvre les l vres ensuite carte les rideaux D s le seuil prononce un mot toujours neuf tu confonds givre et trilles Est ce la neige encore la frondaison Offre toi sans r pondre aux chemins libres Avance ne te soucie pas d inscrire une trace un enfant te pr c de Ne sois que souffles et vois une glycine a d bord le mur N arrache aucune fleur tu t largis Pair ne vient que du large Oublie tous les noms sauf ceux du jardin la fois des rivages Pleines mains sur l corce coute aussi bien le silence la s ve Rien ne reste invisible dis pr sent le parfum des lilas Pluie fine en f te ferme les yeux r veille le chant des grives Les ailes le coeur laisse les battre laisse les battre ensemble Rayonne tu en as le temps entre deux syllabes d un pas l autre Si tu t arr tes choisis l ombre d un arbre pense alors aux falaises Le vent sur les paules vacille l espace ruisselle d embruns de pollen PARTAGE DES VOIX N PARTAGE DES VOIX N N Herbe au soleil ou galets sous l cume ne demande plus jusqu o tu iras D une m me voix parle A x gt la nuit comme l aube uniquement de ce qui va clore Accorde une place l cho regarde au loin aux creux des paumes Franchis l horizon avec le po me lessor sy r invente P D
48. sa fascination pour Cendrars mais au regard de tout ce qui a d j t crit sur l auteur de L Or ou de Moravagine commencer par les travaux de Claude Leroy les crits de J r me Camilly et de F J Temple ou le num ro 26 Cendrars vivant de la revue SUD qui publia gale ment dans un num ro sp cial 1988 les Actes du colloque de Cerisy 1987 consacr s celui que Delbourg appelle dr lement e one manchot on imaginait mal comment l auteur des Jongleurs de mots allait aborder le sujet d une fa on neuve et originale Il prend le parti d un apparent glossaire constitu d autant de chapitres qu il y a de lettres dans notre alphabet et de Alfa Romeo Zone nous conte sa mani re en vingt six chapitres po mes la vie et l uvre de Fr d ric Louis Sauser auxquelles on sent bien chemin faisant qu il s identifie peu ou prou Ce qui nous en apprend autant plus peut tre sur Patrice que sur Blaise Si l on s attend trouver des t tes de chapitre intitul es Bourlingue Fabulateur Transsib rien Wagon Lit le chien pas le moyen de locomotion ou Helv tie on peut s tonner d en rencontrer d autres plus inat tendues comme lastique Jonglerie Kodak Quotidien Vieil ge ou X nophobie Pourtant le puzzle se reconstitue merveille pour dessiner le portrait d un homme libre parfois antipathique et m me insupportable en raison de cette libert m me Cendrars pour
49. sa part ne consentit jamais jouer le jeu de la modernit qui faisait les beaux jours de tant d opportunistes crit il de cet homme qui cherche non mouvoir comme Apollinaire ma s surprendre loin de la glu du sentiment et de l autocomplaisance pathologique Ce qui ne l emp che pas d crire ailleurs et fort jus tement que l on ne peut crire qu un livre ou plusieurs fois le m me livre C est pourquoi tous les beaux livres se ressemblent Ils sont tous autobiographiques Analysant les fondements de l criture de Cendrars il souligne que celui ci met jour des textes g om trie variable lisibles par diff rentes g n rations et qui vont confirmer son image d auteur tout terrain aupr s du grand public Tiens ce soli taire qui se soucie de la gloire comme d une guigne crit pour s duire le plus vaste public de lecteurs Quelle aventure L aventurier selon le mot du po te Pierre Reverdy est celui qui invente ses aventures et les plus beaux voyages sont ceux que l on fait en imagination Voyage autour de ma chambre Non r in vention gratifiante d une r alit pas toujours la hauteur Ainsi naissent positivement les mythomanes Et c est une excellente chose pour la litt rature Que l on me permette achevant cette note de citer une charge de haulte graisse dont m me si elle est un peu longue le respect d au lecteur ne saurait faire l conomie Parlant de Blaise
50. se caract rise au plan formel par des images jamais vues et des formules souvent lapi daires ce dernier trait tant nettement marqu dans les recueils les plus r cents comme Le Silentiaire paru chez Dumerchez en 2004 MARC ALYN N MARC ALYN OO ou Le Dieu de sable publi par Phi en 2007 dans lesquels le po te tend vers l aphorisme L humour et l ironie ne sont jamais absents de cette po sie sensible et grave philosophique et humaniste Puisque tout court l ab me d une foul e sauvage prends le temps d agripper un vertige ta taille Le Silentiaire D s ses d buts la po sie de Marc Alyn fait preuve d une immense libert de cette libert libre dont parlait Rimbaud Affranchie de la rime qu Aragon avait pourtant remise en usage et qui marquait encore la po sie des ann es cinquante chez nombre de po tes elle s irradie de fulgurances surr elles La m me ann e 1954 vit para tre une premi re plaquette Le Chemin de la parole et Rien que vivre dans le 4 cahier de la 8 s rie des Cahiers de Rochefort Jean Breton ouvrait sa collection Le V hicule par Demain l amour de Marc Alyn qu il d signait en ces termes ami de l homme guerrier tendre camarade couvert de ros e et Jean Rousselot disait de lui Ce jeune homme est dou d un souffle d un bonheur d invention et d expression absolument remar quables devant lesquels tombe toute notion d cole En 1956
51. se peuvent retrouver des l ments communs et pour commencer l enfance elle m me qui nous parlent et dans lesquels nous pouvons tous nous revivre Aussi diff rentes qu aient paru nos existences g ographiquement familialement socialement ce qui nous r unissait tait bien plus fort que ce qui nous divisait car notre vie tait beaucoup plus NOTES DE LECTURES ES MA NOTES DE LECTURES ES EN ouverte beaucoup plus collective beaucoup moins go ste qu en cette poque ci p riode r tract e o l on ne sait m me plus qui sont ses voisins de palier ce titre des livres comme celui de Migozzi outre un besoin de dire qui nous tions et ce qui nous a constitu s t moignent g n reusement d une p riode r volue et trouvent place dans l Histoire d une autre civilisation Les hommes qui n ont pas de pass n ont aucun avenir Et ne peuvent revendiquer l appartenance aucune civilisation La plupart des jeunes d aujourd hui ont peu de souvenirs et c est en quoi ils sont plus plaindre qu bl mer Les jambes nues c est mon enfance Nous les gardions jusqu quinze ans ou presque Elles vivaient battaient l air froid connaissaient d autres jambes nues aujourd hui devant la maternelle les jambes nues ont disparu De petits bonshommes pleurent entre eux sans essuyer leurs larmes sans sexe sans mains parfois les moufles les ont d vor es Mis re plus d
52. sentinelles sur le chemin de ronde du cadran de l horloge Les wagons du m tro regorgeaient de jupes entrav es et de jeans d voy s serr s de pr s aux heures de pointe Les journaux du matin relataient la col re d un million d leveurs de fourmis en Chine d vor s de dettes criardes Un peu plus haut un peu plus bas dans l paisseur du temps se creusaient les trous noirs de l inconscient de Dieu statue sans socle d pourvue de mati re et de forme statue sans rien nipp e de loques d air La mort petite frappe r dait alentour folle de lignes droites entassant des pierres blanches dans l obscur l aube on ramassait l univers en lambeaux parmi les revenants crabouill s et les g om tries sinistr es Des pans disloqu s d images en proie au s isme composaient un fabuleux difice o il go tait le bonheur de se perdre au cours de perp tuelles all es et venues entre l tat d extr me veil et le sommeil de plomb des cosmonautes chou s au fond de la Mer de la S r nit L ange avait la majest terrifiante des montagnes moins la lourdeur D s que nous d tournions le regard les revenants enjambaient la crois e br lant de nous rejoindre dans l espoir de trouver place en nos po mes ainsi l oiseau prend appui sur le vide qui l habite pour voler immobile au coeur de la vitesse Nous abattions nombre de ces visiteurs ind sirables aveugles en demi deuil gr ce des salves d imag
53. songe assez souvent aux maximes de La Rochefoucauld interdit la moindre pose proph tique N ayant pas eu les moyens d existence pour citer comme il le fait un titre de Jean Rousselot de ses a n s surr alistes il a d consentir un travail forc critiques livres de commande qui a fortement d velopp en lui autant l esprit de recherche que le sentiment de la relativit de toute gloire litt raire J irai jusqu affirmer que sa condition ouvri re expression que j emprunte l uvre de Simone Weil portant ce titre l a enrichi d une vraie connaissance de l esprit populaire sans qu il ait eu besoin d un engagement politique public pour la confirmer Enfin Marc poussant sa curiosit vers des ouvrages de derri re les fagots trait s d alchimie manuels de tarologie livres de th o sophes ne verse jamais dans l herm tisme de l obscur et incom municable Il est bon cet instant de se souvenir qu Herm s tait dit aussi conducteur d mes Eh bien c est cette vocation qui me semble finalement caract riser le mieux le po te Marc Alyn Il sait comme Victor Hugo quelle doit tre la fonction du po te qui est d apporter ses lecteurs pour les clairer travers les tracas et les fracas du si cle une lampe de haute spiritualit d gag e des dogmes g n rateurs de guerres et qui tremble un peu chez un qui partage ainsi que Psych l moi de contemple
54. suicide int rieur j ouvrais nouveau les yeux et reprenais la barre M moires provisoires 2002 Ainsi le sujet du recueil suivant Infini au del est il le retour la parole obtenue au terme d une asc se La gloire de la voix tait de se taire de sinventer un grand style de silence afin de mettre aux fers le chant et le forcer par un si haut refus Saggraver de sens MARC ALYN vw MARC ALYN VA O Retrouvant ses pleins pouvoirs de po te Marc Alyn fonde des villes voyage exhume les dieux solaires du Midi gallo romain ouvre les rideaux pourpres du th tre d ros o les chairs d nu d es fourr es de lune acc dent la c leste soudure gr ce une profusion d treintes b tit des po mes sur l eau organise des combats de soleils et de coqs invente des v g taux incante des oc ans Au travers de po mes plus brefs que ceux des recueils pr c dents il concentre intens ment son criture qu il caract rise ainsi dans M moires provisoires Je fr le ici le min ral en son expression la plus translucide un quartz laiteux tranchant habit d immensit s en voyage C est peu de temps apr s la sor tie du recueil qu il part pour l Orient Il allait nous confie t il la rencontre de la Dame de Gebal en vue d existences ult rieures au d roulement inimaginable Or la premi re personne qu il remarque en p n trant dans le salon d honneur de l
55. v rit et pour Nouveau Ils passent leur temps disponible tenter de retrou ver les morceaux perdus et parpill s de l uvre que le po te n a pas Pour citer ceux que les nouveaux diteurs saluent la fin de leur pr face Jacques Lovichi Le Cas Germain Nouveau critiques description hypoth ses avec trente et une planches photographiques comment es hors texte th se de doctorat Aix en Provence 1963 1964 et Pierre Olivier Walzer diteur de Nouveau dans la collection de la Pl iade Lautr amont Germain Nouveau uvres compl tes Gallimard Paris 1970 voulu sauvegarder et que d autres peu scrupuleux se sont appro pri s C est le r sultat de ces recherches qu ils ont publi en octobre 2009 Ils ont choisi de r unir dans cette nouvelle dition Quelques premiers vers accompagn s de manuscrits et de fac simi l s le titre choisi pour l ouvrage d signant le premier obstacle ren contr dans cette aventure ditoriale d finir le corpus des premiers vers Quant aux autres difficult s les diteurs les signalent avec la plus grande sinc rit dans la pr face avouant avec modestie et un peu d autod rision que leur projet de corriger les ventuelles erreurs de l dition de la Pl iade tait un projet ambitieux mais tr s difficile r aliser En effet ils se sont heurt s l go sme la mesquinerie des collectionneurs priv s ils signalent en revanche la bonne volont des inst
56. Dhainaut qui affirme qu un livre n est vivant que s il n est pas d finitif et un fragment de Ren Char qui d finit la po sie par le d tachement nous offre sous forme de courts fragments mais nous sommes depuis longtemps habitu s sa bri vet syno nyme de densit une longue m ditation qu on pourrait qualifier d thique Car c est bien l la plus haute mission de la po sie que de nourrir notre r flexion et de nous donner des le ons de vie nous avons le devoir d exister face la nuit l ombre et au sens qui se d robe en permanence et qu elle nous aide d chiffrer C est dans la d tresse et le d nuement que se r g n re l me Les titres des neuf sections qui se succ dent sont suffisamment explicites pour dire le conflit de ombre et de la lumi re l exigence du po te qui doit avoir un regard ajust mais surtout le mouve ment continu vers lavant d sirs neufs et la volont de r sis tance encore et toujours La tension des contraires est d j dans l criture entre le d pouillement de quelques lignes ou quelques mots sur la page l extr me abstraction y compris dans certains mots rares mais si justes comme illucescente et l extr me enra cinement dans le r el Chaque po te a des lieux et des moments pri vil gi s Chez Yves Broussard c est souvent la montagne ou le jardin sous la neige qui sont voqu s m me s il arrive aux fe
57. Grandeur nature nous avons aussi entrevu les confins du possible J G e Pr face la vie Prefazione alla vita Otto poeti francesi della Rivista Autre Sud Introduzione di Jean Orizet Tradu zione di Guido Zavanone De Ferrari Huit passeurs po tes comme les qualifie dans sa pr face Jean Orizet lui m me po te originaire du Sud sont rassembl s dans cette anthologie G rard Blua Yves Broussard Daniel Leuwers Jacques Lovichi Jean Poncet Fr d ric Jacques Temple Jean Max Tixier et Andr Ughetto qui ont tous particip l aventure d Autre Sud Le volume s ouvre sur une citation de Saint John Perse envers qui la plupart ont en d autres lieux avou leur dette elle rappelle que la po sie n existe que pour nous permettre de mieux vivre Et c est bien de vie et de mort qu il est question dans la plupart de ces po mes On aura une pens e sp ciale pour ceux de Jean Max Tixier qui r sonnent comme une triste pr mo nition quand il parle du temps qui goutte goutte te d truit ti distrugge goccia a goccia et te repousse vers le vide et vers le NOTES DE LECTURES ES SG NOTES DE LECTURES ES N n ant ti rispinge verso il vuoto e verso il nulla Chacun leur mani re travers m ditations ou vocations de paysages les huit po tes s interrogent sur le myst re de l existence car dans ce Sud d o ils sont originaires et o ils vivent g n ralement la
58. Il ne me d pla t pas trop de repartir ainsi de z ro all g de tous bagages loin des destin es clefs en main compter de D l biles ma po sie se transforme s pure gagne en densit aussi bien qu en transparence ce qui d concerte quelques lec teurs Parall lement ce lent travail de somnambule dans la fum e des gauloises bleues je r dige articles pr faces rapports de lecture pour des diteurs adaptations de po sies trang res ainsi qu un dictionnaire des auteurs fran ais L argent gagn dans les prairies lyriques arrive au compte gouttes et s vapore aussi sec Bient t Paris me sort par les yeux et je d cide de m vader en direction du Sud profond de m tablir Uz s loin des cock tails des coteries et des cocteauricos Vous rompez avec la vie litt raire mais non point avec l criture po tique Dans un mas d labr situ au large de la cit quelque peu magique d Uz s je d barque un beau matin au terme d une fuite travers des paysages qui semblent s inventer mesure Le but de tout voyage n est il pas de soigner le temps par l espace et de se rencontrer ailleurs sous d autres traits faute de r ussir se perdre Le lieu d un vert s v re invite la concentration au repli vers les cieux du dedans Tout est ma onn de soleil barricad de chaleur verrouill de cigales Peut on r ver meilleur endroit pour c l brer la Nuit Et nous avons des nui
59. TAGE DES VOIX O N N est ce pas le masque du d sir qui se perd et soublie dans le lit des rivi res gel es o se coucheront nos vies parpill es dans les brisures de ombre qui dort au plus pr s du miroitement incessant des eaux TRAVERS E La nuit se d faisait lente et noire encore endolorie revenant elle d un si long p ril comme en son lit se d nouant l cart trop t t arrach e la course blanche d un demi sommeil qu clairait peine le premier vacillement du jour sur le corps allong du dormeur en qu te de lui m me Nuages et pluie emport s par les fi vres de l hiver fallait il rendre son pas la mesure de l impossible d un r cit fuyant sous la d b cle muette des naufrages l preuve d un chagrin sans cesse renouvel Loin dans les m andres de la terre glac e s puise une voix tenue de dire la br lure du paysage cette vaine douleur d exister au plus fort de la halte quand se lib re l espace Perdu dans la temp te il marche encore t te nue ainsi d saccord il roule sur la pente des heures bloui par la rumeur de la neige En amont s en retourne la plainte bruissante chaque emportement du vent corps ploy sous la pes e des paroles emprunt es au gel Dans son lan une phrase tomb e malgr lui de ses l vres meurtries semblait se perdre en chemin Un tourbillon d ivresse au c ur rien ses yeux ne comptait plus que ses efforts
60. acle donn au Th tre Antique de Vaison la Romaine Sidi Larbi Cherkaoui s attache d abord construire un univers dans lequel il accueille l autre l trang re femme espagnole repr sentante d une prestigieuse tradition et il exp rimente ensuite une fois l invit e en confiance tous les rapports rendus possibles par la m diation de la danse c est dire de l art du geste L univers construit pour la rencontre avec Maria Pag s c est le d sert les dunes parce qu elles sont en constante formation en constante transformation voqu es sur sc ne par des voiles beiges qui ondulent au vent elles sont le lieu de naissance des deux danseurs qui se font face s approchent se rejoignent se touchent et d voilent leurs mains par la gr ce desquelles va saccomplir la geste de l homme et de la femme on y assistera des affrontements violents comme aux plus magnifiques accords et cela vaut aussi pour la musique parfois classique parfois arabe mais le plus souvent flamenca puisque son rythme est le rythme du c ur Quant aux gestes ils sont magnifi s par la splendide Maria Pag s et subtilis s par le chor graphe danseur en effet il les d robe se les approprie et il les affine les rend plus spirituels la fois plus l gers et plus dr les Une fois affirm e la confondante beaut d une danse aussi pure que virtuose il faut dire que le g nie de Cherkaoui se situe au plan du d c
61. ait cette singuli re vision Tout ressemblait ces fleurs qui n ont plus force de vivre et je voyais fuir la rive d un pass encore saignant agitant vers moi ses doigts en lambeaux ses doigts d toiles tandis que mon c ur jouait avec les fruits du langage J tais fou comme on est fort J tais seul comme on est mille Mais j ouvrais trop grand les yeux J tais comme ces miroirs Qui refl tent sans rien voir Le recueil se terminait par un dizain d une beaut que rien mes yeux nest venu alt rer Les choses avaient un poids d cisif une chaleur dont mon corps prenait conscience Mes fr res multipliaient leurs purs visages de plantes l or e de ma stupeur J tais beau de leur splendeur J tais grand de leur d tresse Lesp rance c est avoir l humanit dans ses veines L envol du po te prosateur et essayiste L entr e en fanfare de Marc Alyn dans le champ po tique fran ais n aura pas t un feu de paille chappant au pi ge de la noto ri t imm diate de l tiquette du jeune po te prodige une image qui aurait pu lui coller la peau comme la tunique de Nessus il tourne t t le dos aux pi ges clinquants de la vie litt raire parisienne pour selon sa propre d finition un exil mer veill dans le sud de la France au c ur de la vieille ville d Uz s ch re Jean Racine et Andr Gide R fugi dans sa Th ba de m ridionale il y pu
62. ait de temps en temps apr s ses voyages aux Indes et ses s jours comme vice consul aux Philippines et aux Canaries lais sant accroch s aux murs de sa chambre ces souvenirs que nous avons vus des jouets tranges des photographies de rajahs d di cac es en anglais le drapeau d un tat presque inconnu tout cela m l des portraits d amis celui du dessinateur Forain par exemple et des photographies de lui en uniforme de vice consul Et cette photo du buste de Rimbaud qu il tait all prendre Charleville faisant le voyage expr s Larbaud raconte alors Fargue comment il a connu les po mes de Levet en lisant trois Cartes postales publi es en 1902 dans une revue intitul e L Effort Le soir m me ajoute t il je savais ces trois Cartes postales par c ur dont celle de l Armand B hic cette poque l Levet devait tre Manille Larbaud pensait que le petit recueil qu ils pourraient faire publier serait sans doute aussi pr cieux que Les Chim res de G rard de Nerval Pour moi continue Fargue si Levet avait v cu il se f t sans cesse renouvel et que ne nous e t il pas donn Les fameuses Cartes postales para tront en 1943 chez Gallimard dans la collection M tamorphoses 2 500 exemplaires avec la b n diction de Jean Paulhan Plus loin Larbaud qui n a jamais rencontr Levet demande Fargue comment lui l a connu Et le Pi ton
63. alage humoristique qu il impose au jeu chor graphique Dans le rapport qu il explore entre Phomme et la femme il est petit et fragile elle est grande et puissante elle est investie de toute la noblesse d une tradi tion il semble dans ses habits d adolescent ordinaire venir de la rue Et dans une s quence blouissante elle instaure un rapport de domination auquel il consent lui pantin d sarticul se tra nant genoux elle debout immense frappant des talons comme si elle le pi tinait Mais dans les pas de deux accompagnant les gestes qu elle propose il lui suffit de les prolonger d une seconde pour qu il semble pr t s envoler Bien que ses bras s l vent comme des flammes Maria Pag s reste terrienne Sidi Larbi Cherkaoui est a rien c est un feu follet Et par l il chappe tout en lui rendant hommage l emprise totalitaire de la femme de la tradition de la perfection Il est absolument moderne ED x MISE EN SCENE 129 NOTES DE LECTURES NOTES DE LECTURES w N PO SIE Juste une pierre noire de Jeannine Baude ditions Bruno Doucey Ce livre de Jeanine Baude qui vient de para tre aux nouvelles ditions Bruno Doucey est un parcours initiatique Au fil de la coul e d une eau matricielle celle de la mer du fleuve de l oc an dont la pr sence scande le texte et qui du Fleuve premier au Fleuve dernier traverse le dit de la mort le po me
64. amo inesorabilmente per eccesso di calcolo MIDI Le temps ronge les heures au soleil de midi De l tang le long des vo tes du couvent monte le coassement des grenouilles Il emplit le silence qui tel un rocher m crase du poids de mes pens es Tu es au loin il ne m arrive aucun son venant de toi qui es prise par le jeu de tes journ es entre refus et acquiescement Aimer n est rien qu aimer joie lumi re fr missement qui jaillit de toute chose Aimer n est rien qu aimer et n a de place pour les additions et les soustractions les bilans et les alchimies coute ce que je veux te dire nous nous teignons inexorablement dans l exc s des calculs G C Po mes pr sent s et traduits de l italien par Jo lle Gardes gt VOIX D AILLEURS O PRIX L ON GABRIEL GROS La revue PH NIX attribue chaque ann e le prix de po sie L on Gabriel Gros Il r compense le manuscrit po tique d un crivain fran ais ou tranger traduit en fran ais Le laur at du prix verra son uvre publi e par la revue PH NIX sous la forme d un num ro sp cial de la revue Il recevra 20 exemplaires de son livre imprim Dans le cas d une uvre traduite le traducteur recevra galement 20 exemplaires du livre Participation Les manuscrits doivent comprendre entre so et 140 pages num ro t es Dans le cas d une uvre traduite il convient d envoyer Pori ginal et sa traduction l ense
65. anquet de Platon Chacun d entre nous est donc le symbole d un tre humain puisqu il a t coup la fa on des soles un seul tre en produisant deux sans cesse cha cun est en qu te de son symbole E H PIERRE BRUNEL DU PIETON DE VENISE AU TIREUR ISOL Puissances de tristesse Dans Venise la rouge Pas un bateau qui bouge Pas un p cheur dans l eau Pas un falot Cette strophe et les seize suivantes o la stagnation fait place une l g ret rebondissante datent de 1828 Musset a dix huit ans Il sort du lyc e Henri IV et il n est pas encore all en Italie Ce que Marc Alyn appelle l pisode Musset n a pas eu lieu Venise n a pas encore exerc sur l amant de George Sand ce que Maurice Barr s appelait ses puissances de tristesse et la future bonne dame de Nohant n a pas encore joui en vraie dogaresse sur les cendres du c ur de Musset selon une autre forte formule que donne lire ce volume si vivant de Marc Alyn Le Pi ton de Venise Bartillat 2005 Livre vivant sur une ville qui passe parfois pour une ville morte Ce fut le titre d une pi ce de Gabriele D Annunzio La Citt morta un drame alambiqu de haute teneur en ennui que Sarah Bernhardt voulut monter Paris et qui n merge que n ga tivement dans les pages que Marc Alyn a consacr es l amant d une autre grande actrice Eleonora Duse D Annunzio a fait d elle une all gorie f minine d
66. ans l effarement blanc SOLEILS PERDUS Quelle est cette nigme au bout de la ligne qui court et se rompt poussi re de ciel o se retranche le jour incomparable acharn d couvrir l invisible patience de l herbe livr e nue au caprice des vents La c sure n a d autre nom contre la chair qui s ouvre et palpite x x ds A TA force de l vres morsure du gel qui fend la rive secr te lumi re o respirer et jeter l ancre dans son sillage beaut d faite parmi les pierres quelques bribes de phrases r sonnent dans le d sordre impr visible du sommeil comme des pas qui s bruitent Cet instant que le soleil promet au d tour du champ l espace pris revers dans la pr cipitation des paroles de pluie lair corch sous le d bordement des mots la neige en attente au coeur de l clair clats de voix en lambeaux fig es dans les m andres du froid comme un dernier regard qui plonge dans le vif l hiver s annonce avant que d tre l donnant libre cours aux morcellements de la terre et du ciel La nuit s illumine au bord d un feu obstin peine un peu de sang touche le visage de la neige sa lumi re souveraine au fond des yeux pench sur la trace complice qui n en finit jamais Matins ou soirs ivres du temps perdu le monde est en attente x d un regard parole ouverte sur le ciel sa main se heurte l infranchissable murmure PARTAGE DES VOIX O PAR
67. ar l gers rac crocs Marc Alyn est plus proche de Rimbaud quand il exalte l nergie du d sir et ce qu il a d indomptable Et si les images vont se fragmentant et se multipliant on retrouve m me parmi elles le catleya de Proust c est parce qu ros est ici avant tout le dieu verbe L Abyssin lui m me c de la place l abysse et l Abyssine avec un nouveau passage par Venise et la transformation du Livre des morts tib tain ou du Livre des morts gyptien en Livre des morts v nitiens avec la variante orthographique qui implique une modification de sens Et c est bien une mani re de livre des mortes et des morts que cette sec tion dans les moments m mes o se d ploie un Bal des Ardents et o la f te tourne l or gie Rosa alchemica La derni re section du 77reur isol ram ne l alchimie Mais dire vrai on ne lavait pas quitt e on n avait pas quitt l alchimie du verbe Non que Marc Alyn en revienne comme Rimbaud d non ant apr s coup l histoire d une de s es folies Mais il y revient Cette Rosa alchemica tient lieu de Rosa mystica dans une Com die qui se veut moins divine que non divine l alchimiste restant cibl par l invisible comme l indique le po me en vers qui sert d pi graphe cette nouvelle et ultime s rie de po mes en prose Il est moins de Dieu ici que de fant me de Dieu tandis que des anges d une clairv
68. arfois quand l horreur est telle que les mots ne sont plus la hauteur C V Christilla Vasserot est la traductrice fran aise d Ang lica Liddell x MISE EN SCENE 127 x MISE EN SCENE N oo FRAN OISE DONADIEU FESTIVAL INTERNATIONAL DE DANSE TH TRE ANTIQUE VAISON LA ROMAINE Dunas chor graphie de Sidi Larbi Cherkaoui et Maria Pag s musique de Szimon Brzoska et Rub n Lebaniegos avec entre autres Isma l de la Rosa voix flamenca et Fl Arabi Serghini voix arabe Sidi Larbi Cherkaoui n d un p re marocain et d une m re flamande danseur de hip hop avant de devenir une star de la danse contempo raine ressemble un petit personnage de bande dessin e Il prom ne de par le monde son air naif et fut pour y rencontrer des artistes qui nont en commun que l extr me qualit et la sp cificit d une pratique traditionnelle De ces rencontres naissent des chor graphies dans les quelles il emprunte l Autre autant qu il Penrichit Ainsi avec A Filetta Apocrifi avec des moines chinois Shaolin Sutra et une performance Play Londres avec Shantala Shivalingappa danseuse de kuchipundi Il serait cependant injuste de r duire le travail de ce chor graphe dans Dunas spectacle cr avec la reine du flamenco Maria Pag s une fusion comme on le dit de certaines musiques la mode entre deux techniques artistiques voire m me entre deux cultures Dans le spec t
69. bien le visiteur du Soir ou x MISE EN SCENE m N vw x MISE EN SCENE 124 encore du Richard II dans lequel s investissait si admirablement toute la troupe du T N P Ce Richard l inaugura en fait le Festival Donna le ton On allait y assister comme on va la messe M me si le c l brant tait quelquefois violemment critiqu On y respectait le texte et l au teur Public et acteurs communiaient avec ferveur dans l amour de l criture magnifi e par son passage l oralit Cela n excluait nullement l humour ni l autocritique Des pointures comme Sorano ou Noiret y veillaient Vilar lui m me plus aust re ne n gligeait pas cet aspect des choses et je lai vu rire de bon c ur aux fac ties de tel ou tel Je Pai vu aussi en majestueux costume de sc ne interrompre une repr sentation de Richard pour engueuler morig ner aurait il dit le public attentif certes mais trop bruyant son go t Qui aurait ce courage aujourd hui Connivence amour et respect l tait l esprit d Avignon J y reviendrai peut tre La Trag die du roi Richard II mise en sc ne par Jean Baptiste Sastre tentait sans doute de renouer avec la tradition tout en la renouvelant Bonne direction un rien polys mique Il y est presque parvenu Non gr ce la traduction nouvelle et dont j attendais beaucoup de Fr d ric Boyer trop volontairement prosa que trop d lib r ment ana chronique pas davanta
70. cahiers litt raires internationaux g 4 PARUTION TRIMESTRIELLE janvier 2011 N 1 Marc Alyn in dits entretien Andr Ughetto Daniel Leuwers Jacques Lovichi Bernard Mazo Sylvestre Clancier Emmanuel Hiriart Pierre Brunel Partage des voix Pierre Dhainaut Jean Pierre Cramoisan Cristophe Munier T ric Boucebci Isabelle Baladine Howald Alain Fabre Catalan Jean Orizet Bernard Mazo Benito Pelegrin Voix d ailleurs Giorgio Cittadini Mise en sc ne Notes de lectures PH NIX N 1 MARC ALYN 1980 dixi me anniversaire de la revue SUD dans le jardin de la librairie La Touriale Marseille de gauche droite Yves Broussard Andr Ughetto Jacques Lovichi Christiane Baroche Jean Max Tixier Pierre Caminade Benito Pelegrin Fr d ric Jacques Temple Jacques Lepage Claude Pocheron L on Gabriel Gros Jean Puech L ON GABRIEL GROS Il se fit un grand tumulte dans la nuit Lorsque parut le messager De l air tr s bleu Les marches de cristal brillaient comme des gouttes Dans le coeur noir vertigineux des fleurs profondes O se perd le bourdon Un grand tumulte pour Phoenix En coeur battaient Les volets de la mer Ou ce tonnerre de cymbales Pour la capture de l essaim Chant multiple pareil celui des galets Ou au pi tinement d un troupeau sur les pierres Quand elle bruit comme la gr le La cohorte de laine rance et de vent pre tumul
71. cette br ve tude je voudrais attirer latten tion sur un autre versant tout aussi passionnant de l criture po tique de Marc Alyn celui de ses po mes en prose La publication de L l imaginaire en 1998 puis du Miel de l ab me en 2000 fait suite la dure preuve qu a eu subir le po te atteint d un cancer qui le priva longtemps de sa voix Dans L l imaginaire Marc Alyn se r v le l instar d un Michaux ou d un Pinget m taphysicien fac tieux de l absurde ouvrant la voie au sens secret des choses travers les br ches pratiqu es dans le mur de nos certitudes L humour souvent grin ant alimente ces fatrasies cr atives On le retrouvera dans Le Silentiaire 2004 puis Le Dieu de sable 2007 mais sa veine apparaissait d s 1957 dans ses Cruels Divertissements Le Miel de l ab me tentait de d finir la mission du po te du xxI si cle comme celle d un homme disposant d une double voix N est ce pas ce qu il prouve dans sa chair de voyant capable de vies parall les dont l art d range et qui n est reconnu que par exception Nerval n est pas loin non plus que les romantiques allemands dont Marc Alyn depuis toujours se sent proche On songe ici ses a n s de trente ans n s comme lui Reims ces voyants illumin s nyctalopes r volt s que furent les fondateurs du Grand Jeu Ren Daumal Roger Gilbert Lecomte Roger Vaillant auxquels il a souvent rendu hommage
72. chir d un pas leste de funambule la fronti re indistincte s parant lici du surnaturel La nuit v g tale bruissante de tant de feuillages nous accueillait au bout de sentiers de traverse contournant les lieux habit s Aucun cadran mavouait l heure Des yeux absents tourn s vers le dedans comme ceux des chevaux de mine s effor aient vainement de nous voir fant mes endurcis dans la clart frisante sur la d clivit hypocrite de l ge En ces lieux recul s si proches cependant que nos cils les fr laient la moindre caresse la structure occulte de l univers apparaissait en un clair sur le champ ratur e absorb e par des superpositions successives d absence tandis que se repliaient les ailes de nigme fabuleux parapluie Faudrait il saccoutumer subsister sur ces pointes d aiguille ces lames double tranchant ces hautes cr tes barbel es que seul un soleil d abysses de loin en loin visitait Par bonheur nous n tions que des gens du voyage nulle part attendus r sidents d un livre dont les chapitres seraient des chambres Guid s par nos chiens aveugles nous reprenions l ascenseur jusqu aux jardins suspendus de Babel o une statue de marbre blanc avait veill sur notre sourire tout au long de la nuit natale Les arbres habitaient la maison profitant des orages pour introduire leurs museaux de feuillage par les volets disjoints jusqu aux sournois portraits d anc tres aux barbe
73. chner au cours de l automne 1835 et qui reste inachev e Es war ihm wie ein Schatten ein Traum C tait pour lui comme une ombre un r ve LA BAS Il tait l le dernier parler L autre l avait press de questions d une commune parole brisant l ph m re lien du silence Saisi par le m me vertige un frisson le traversait la pens e qu il ne trouverait jamais l issue S adressant celui qui portait sa plainte dans la froide lueur du matin il songeait que plus tard les pas de l inconnu se confondraient avec les siens puisant ses forces dans la plus haute neige Sur la cr te franchissant la ligne claire il gravissait enfin l aube derni re arc bout e presque jusqu au cercle dormant de la nuit dans ses remous d ombre sous l toile parlant son approche Derri re la muraille blanche veillant dans lattente l bas sans laisser de traces il plongeait si pr s de l obscurit vivante du ciel en qu te d un rivage naufrag sans retour emport vers d autres lendemains Neige au dehors sur la terre d pouill e de tout attribut de couleur jusqu la chaude lumi re qui balbutie encore pr s des soleils disparus mille et mille flocons s vanouissent dans le noir de la neige au dedans Sur la br che battue par les orages il sait que tout n est qu illusion D j il tombe et rejoint l ici bas o demeure de l t l ultime blouissement Le froid c de l
74. comme il a su honorer la m moire de Roger Caillois R mois lui aussi grand voyageur et voyant des secrets de la nature Marc Alyn scribe errant ou tireur isol fait partie de ces voyageurs traqu s qui dans leurs apparents garements nous r v lent notre v rit S C MARC ALYN M Ww MARC ALYN MA P EMMANUEL HIRIART LA RESPIRATION DU SYMBOLE NOTES SUR L UVRE EN PROSE DE MARC ALYN Notre existence ne tient qu un fil mais il est d or et nous relie la pelote du soleil Si Marc Alyn est avant tout po te m me lorsqu il s loigne du genre po sie il est aussi l auteur d une uvre en prose abondante et diverse c t de textes critiques sur des po tes et des peintres ces derniers envisag s dans Approches de l art moderne un autre ensemble r unit ce que je serais tent d appeler les guides du pi ton somnambule Le Pi ton de Venise Monsieur le chat et Paris point du jour un roman Le D placement des recueils d apho rismes po tiques Le Dieu de sable Le Silentiaire et d autres recueils L l imaginaire Le Miel de l ab me relevant large ment du po me en prose et parmi eux le tout r cent 77reur isol S int grent aussi cet ensemble les M moires provisoires de l cri vain Cette diversit n est pas clatement absolu elle rec le une coh rence th matique plus forte que ne le donne penser notre rapide pr sentatio
75. d un g nie la fois singulier et universel Alain Bosquet crivit dans La Table Ronde Cette fr n sie c tait celle d luard encore qu Alyn ait une r sonance moins l giaque et parfois plus ferme Cet enfant de l absurde a un instinct du mot juste qui confond et que n entame nullement un besoin inn du myst re Dire avec nettet l indicible c est plus que de l habilet ou de l intelligence c est un don qu en d autres temps on e t salu du terme de voyance Plus de cinquante ans plus tard l uvre po tique de Marc Alyn compos e d une vingtaine de recueils a t couronn e par le Goncourt de la po sie distinction qui attire justement le regard sur un po te phare de sa g n ration de ceux qui sont n s dans l imm diat avant guerre de 39 40 Oui en ce d but du xxI si cle Marc Alyn est un de nos po tes majeurs qui assume et accepte a dit Philippe Soupault la destin e douloureuse et prodigieuse merveilleuse et dangereuse celle d tre un po te uniquement un po te Si je devais d embl e qualifier cette po sie partir du titre que j ai donn mon tude Fulgurance et voyance je dirais qu elle est aussi bien orphique qu apollinienne solaire mais galement sen sible aux myst res de la nuit de l me humaine f minine et mas culine la fois des r gnes min ral v g tal animal ainsi que des grands mythes cosmique et initiatique elle
76. de lune et des chiures d toile sur la surface de la mare aux rainettes Une sorci re est mont e au clocher de la vieille glise be PARTAGE DES VOIX N VA PARTAGE DES VOIX N CRISTOPHE MUNIER DE LA PO SIE COMME UNE LANGUE TRANG RE car la po sie est r ticente aux mots La Po meraie LE BUREAU Porte plat radeau Une lampe lune confidente et l humus de feuilles ratur es Le bureau apr s toutes ses mises flot est toujours l solide sous les coudes avec sa fibre douce J y pose les mains comme Colomb imprima ses bottes tremp es d eau de mer sur le sable LES OUTILS Cheval de Troie du po me mots rus s feignant de perdre sens jouant aveugles et b gues au rendez vous des baigneuses LA PO MERAIE On entre la po meraie sur les recommandations d instants mineurs clos d eux seuls qui ont fait bouture dans notre m moire Mot de passe distiller des brass es de vie PAPILLES MENTALES Assis je veille la venue des mots d flagration d un sentiment orchid e sonore concepts en charpes de parfum Papille mentale l intuition attire la po sie Puis la vision se travaille sur un tabli d aff t et d effacement Mon seul privil ge la facult de tri Moustiques crissements de la hutte relents mentaux divers Mes papilles mentales ont depuis longtemps rep r le plumage de la b casse TERROIR DE LA COMETE Il arrive qu u
77. depuis des pas de v t rans Amis votre uvre fut cr atrice La conduite d une revue litt raire est uvre vive et prise aux sources Les certitudes qu elle conjugue sont celles de l esprit et du coeur Gi Pour vous l clair dans le taillis d autres s dentaires la pos session d tat la mise en coupe r gl e et l accommodement Le gain du jour n est point votre profit Moins soucieux du miel que de l envol de vos essaims vous viviez en prodigues Et prosp rer pour vous fut toujours synonyme d essaimer L aventure vous lie qui vous pr c de et qui vous cr e Elle n abolit rien d ant rieur Il monte sur vos pas autant de pass que de futur Ainsi en terre haute l ascension d un double horizon maritime et terrestre EA Amis lheure s accro t et la route reprend Avec vous hommes fervents sur l incessante route Avec vous hommes d honneur et de franchise dans la m l e du Si cle L ann e son plus haut et la t che son comble soyez f t s pionniers la crois e des routes automnales l heure vous dit sa pl nitude l quinoxe de Septembre S J P ceux des Cahiers du Sud septembre 1963 Phenix voici le jour L on Gabriel Gros La filiation clairement revendiqu e des Cahiers du SUD SUD puis Autre SUD n est pas d mentie par la disparition du mot SUD dans le titre de notre nouvelle revue Simplement il nous a paru que s il fallait certes c
78. du cercle est devenue heureuse pleine de vie chaque main porte le bruit chaque voix son message et les vivats entra nent l artiste au firmament Certes comme H raclite il sait que commencement et fin coincident sur le pourtour du cercle D une profonde justesse le po me dit bien L aube appelle l veil de ses lueurs d laissant le parfum de la nuit aux esprits qui sattardent fascin s par la beaut du monde Et toute r flexion s impose dans le possible avec Aimer et tre Riches en devenir les po mes passant toujours de l immanence la NOTES DE LECTURES w N NOTES DE LECTURES 138 transcendance suscitent la plus saine des m ditations Le dernier po me dit bien Dans le premier matin d hiver l aube montante le monde est devenu cristal silencieux bd Le long du p tale une larme coule et vient nourrir la terre Cette terre sans qui nous le savons bien rien ne serait possible pour le bonheur de l Homme toujours en devenir Yves Broussard e Bruissant de Ga lle Guyot ditions de l Amandier collection Accent grave accent aigu Derni re parution de la r cente collection Accent grave accent aigu aux ditions de l Amandier le recueil de Bruissant enchev tre un double parcours l un chronologique de l enfance la vie actuelle l autre spatial de la campagne la ville surtout Paris o se d roule la vie actuelle Le parcours chr
79. e travers le symbo lisme alchimiste Il ne faudrait pas en d duire qu elle se contente d une reprise de traditions elle s y r f re en joue mais librement comme d une transparence suppl mentaire ajout e ses profon deurs oniriques en effet seul le temps r v est v cu Deux exemples de libre utilisation de syst mes symboliques tradition nels l astrologie et le tarot permettront de montrer comment le po te habite et par l revitalise le symbole Les poissons apparaissent assez souvent dans sa prose bien qu un peu moins que les oiseaux dont Marc Alyn parle couram ment la langue Ainsi au d but du D placement le h ros s arr te t il devant les poissons de la fontaine ceux ci sont incapables de renoncer chercher la faille qui leur permettra quelque jour de se faufiler jusqu la nappe qui s tend ils le pres sentent sous les rues et affleure parfois l hiver aux vo tes de sal p tre des caves On retrouve ces poissons Venise la faille existait donc On voit alors l eau se faufiler sous la porte accompagn e parfois d un poisson lent et m ditatif Je m assieds sous les feuilles j coute les bruits de Venise je respire son air marin m l d un vague relent de siphon bouch la m lodie aquatique s impose s insinue vibration fr missante Il n y a pas l qu une r verie bachelardienne du poisson chat Marc Alyn appartient en effet au signe astrolo
80. e Gardes a t publi e en janvier 2009 par la revue Les Archers est tr s pr sent dans son uvre C est partir du pass et de la m moire qu il affronte le monde contemporain Il travaille actuellement un recueil Residui di tuono dont l inspiration est li e la musique art auquel il est tr s sensible il pratique d ailleurs assid ment la clarinette Sa po sie se nourrit aussi de po tes modernes et contemporains parmi lesquels Saint John Perse dont il a traduit plusieurs po mes en particulier Anabase ECIG Genova 2000 Il est galement l auteur d un roman Ariele e dopo ECIG 1999 o l influence d Ulysse de James Joyce est sensible Les Lettere a Dib sont in dites gt VOIX D AILLEURS gt VOIX D AILLEURS H H N GIORGIO CITTADINI LETTERE A DIB IL MARE Tu ami veramente il mare illumini quando ne parli Credo per quel che d infinito che ti sempre mancato Ma questo vedi ci accomuna Tante piccole cose anche se pi pesanti di macigni Certe volte vorrei essere un po il tuo mare altero s ma nel contempo pacato tenero avvolgente Credimi non cosa nuova accomunare cose grandi e piccole GIORGIO CITTADINI LETTRES DIBI LA MER Tu aimes sinc rement la mer et t illumines en parler C est je crois pour la part d infini qui t a toujours manqu Mais cela vois tu nous r unit Tant de choses infimes et plus lourdes pou
81. e Venise elle fut belle mais elle est d grad e par le temps Sept trangers Venise Il faut lire ces sept portraits qui sous le titre Sept Voyageurs transfigur s constituent la partie m diane du livre de Marc Alyn Aux diff rents visages de la cit des Doges dont le pi ton attentif a lev un un les voiles comme l enfant l ve les voiles de l Aube MARC ALYN o A MARC ALYN CN N dans la plus parfaite des I luminations sont voqu s sept autres passants de Venise avant Marc Alyn lui m me outre D Annunzio Joseph Brodsky le po te d Aqua Alta expuls d Union sovi tique en 1972 migr aux tats Unis mais venant terminer sa vie Venise Richard Wagner bien s r pr t pour La Lugubre Gondole de Franz Liszt son beau p re son interpr te et pourtant d une certaine mani re son rival Byron sensible la d cadence de Venise avant tout d cadentisme Cet original que fut le baron Corvo alias Frederick Rolfe Plus inattendu encore le dessinateur Hugo Pratt qui se rencontra lui m me Venise sous les traits de Corto Maltese le marin la boucle d oreilles Et pour finir Ezra Pound patriarche et provocateur fid le jus qu au bout aux marches de la Dogana et au Canale Grande pri sonnier du temps dont les parois de plus en plus se resserrent comme l crit Marc Alyn jusqu cette nuit du 31 octobre 1972 o le canot ambulance vient le prendre pour le conduire l
82. e ce terme L ros n en est donc jamais loin Pour le scripteur ou Le Scribe errant des Alphabets du Feu la nature est l vidence f minine Et le po te est l pour la r v ler aux autres et pour en jouir Voil pourquoi au matin Un sourcier retroussait les jupes des prairies de sa verge de coudrier Afin d illuminer le sexe des eaux noires Pourquoi encore La femme nue dans l eau devint une rivi re Le fleuve fut la chair o riant je plongeai Aval par son sexe de verre Et pourquoi enfin le po te se dit submerg par l odeur f mi nine de l eau qui ronronnait sur les cailloux Joyeuse d tre bue D finissant les moyens mis en uvre Robert Sabatier crit encore Il use des pouvoirs d incantation d une po sie d un clas sicisme att nu en employant tous les m tres ou s il crit en vers libres a la m me rigueur la m me contention une certaine minutie quasi val ryenne Il a pris du recul il est all au del des donn es de la spontan it pour crire comme on grave Et cela est si vrai que le po te peut crire sans la moindre osten tation Je l gue la douceur poivr e de mes voyelles cette femme aux l vres d orchid e Qui adorait me murmurer l oreille d une roseraie endormie Et j prouvais d tranges volupt s sentir sur mes mots sa langue comme une aile J ai dit et je r p te ici d t il me d mentir que pour Marc Alyn le contac
83. e en entier le parcours d une vie L tendue le temps des vivants me para t si court Leurs dagues si troites Leurs feux pauvres Et cette exp rience de la mort si vaste ouverte tous les vents de l enfer Avec le retour la vie le po me retourne comme l ordre de la marche allant souvrant s a rant peu peu reprenant souffle et respiration l image du corps qui revient la vie Nul ne sort indemne d une telle travers e Et le lecteur non plus conduit cette connaissance des lointains sur lesquels il est vain de se ques tionner ne pas se poser de questions apr s le d sastre l aube vient aux mains des enfants sur le lit leurs baisers sur les paupi res repart le navire la barque le radeau fragile Rien com prendre sinon la vie son fleuve tandis que rena t le vivre dans sa vitalit ma s cette eau vive ce sang qui coule dans mes veines nouveau cette fr n sie d tre et que se refait alliance dans une humilit nouvelle aussi attentive tout recenser le souvenir d en fance cartable au dos instant quotidien dans le premier tro quet se rafra chir se nourrir parler le bruit de la mer et du vent la clart du jour les pas le tout de tout qui se d plie alors dans un appel vivre qui tandis que surgit le ph nix symbolique de la r surrection invite accourir proposer se dresser vivant se livrer sa
84. e genoux corch s plus de cro tes aux beaux bruns Dommage Fils d ouvriers ou de bourgeois nous avions tous les jambes nues ni t l vision mais des livres ni portables et peu de fixes chez nous d o la n cessit d crire et pas davantage d ordina teurs le nom sans doute n avait m me pas encore t invent Une autre civilisation disais je que restitue pour la m moire le beau livre de Migozzi qui publie par ailleurs aux ditions La Porte chez Yves Perrine dont on ne soulignera jamais assez le m rite quelques brefs po mes sur Oradour on est toujours dans le domaine du souvenir sous le titre La Seule Rescap e maison avec un trou sans porte qui siffle sur le ciel fanatiquement bleu le feu n a pas d humanit se livre l air d chet de honte cendres soumises doit on juger la m moire la seule rescap e Comme il faut peu de mots parfois pour dire l essentiel Privil ge de la vraie po sie Jacques Lovichi e C est tous les jours comme ga Les Derni res Notes d Anthelme Bonnard de Pierre Autin Grenier Finitude Anthelme Bonnard ne fait pour ainsi dire rien Oisif d un certain age il crit fume boit se d sesp re Voil qui suffirait le rendre dangereux Il observe ses contemporains et il prend des notes sur un quotidien trangement inqui tant Une femme et un petit vendeur d orgasmes s y font d vorer une pid mie d infarctus se propage tandis que disparais
85. e il mar z Tace anche il postiglione reprimendo la nenia che gli sale dal cuore LES CHECS Le bilan bien s r t pouvante Tant de choses loign es de tes habitudes de toujours Et comment viter les torches des regards importuns Soufflerons nous pour les teindre comme bougies sur le g teau Facile dire plus qu faire Nous voici donc emprisonn s dans la burqa des conventions an Et c est d j chec et mat 5 Re a x LE MAROZ Tu demandes que la paix te soit rendue 117 Tu le demandes avec la douceur de la tactique la meilleure qui est silence Partir ta recherche au long du jour est comme une marche vaine dans la neige sans une lumi re l horizon sans un point o se r fugier sous la menace du maroz Il se tait aussi le postillon qui r prime la complainte qui monte en lui du fond du coeur gt VOIX D AILLEURS 118 MERIGGIO Il tempo rode le ore nel meriggio assolato Dallo stagno sale lungo le volte del convento il gracidio delle ranocchie empie il silenzio che mi schiaccia come un macigno sotto 1 miei pensieri Tu sei lontana non mi giunge suono alcuno di te presa dal gioco dei tuoi giorni nel negarti e concederti Amare solo amare gioia luce fremito che scaturisce da ogni cosa Amare solo amare non ha spazi per somme e sottrazioni n per bilance ed alchimie Ecco volevo dirti questo noi ci spegni
86. e les vaisseaux troits que sont les lits des amants entra n s par le fleuve Jouissance et souffrance d lire et connaissance le po me est une petite mort qui dure l issue d un processus alchimique aboutissant la trans mutation en or du couple transfigur Dans Byblos et L il imaginaire vous voquez la promesse de la r surrection des Mots Qu est ce dire Dans un lieu tel que Byblos ce point li la naissance de l crit qu il est impossible de prononcer son nom sans voquer le Livre la r surrection des mots n a rien d invraisemblable Les vocables gisent sous le sol grav s au fronton de monuments ense velis alphabet enterr vif qui semble appeler au secours Le po te n crit il pas sous la dict e des morts c est dire en s appuyant sur la m moire d autres textes infiniment r percut s Nul besoin de tables tournantes pour donner voix la bouche d ombre la po sie est un dialogue incessant entre les uvres pass es pr sentes et futures au cours duquel le temps cr ateur de mort est invers dans le sens de la vie Le souffle de l un passe dans les mots des autres et les ranime tel le vent jouant ses cavatines dans la fl te des os Qui mieux que le po te sait quel point faire la charit aux fant mes est un placement long terme Lorsque l Ange sonnera de sa trompette clatante le debout les morts mettant fin la sieste gratuite et obligato
87. e pas celui qui porte l oracle souffle d chir par la lame coupante de Pair p trifi dans le pr sent Il n est d autre saison corps tout entier livr la joie fr missante de la route ce balancement d eau for ant les rames au long des palais de marbre Est ce l parmi tant de f eries la Venise des glaces et sa noire gondole au front des heures vives franchissant le port trangement par de d sespoir Avec ses yeux d enfant il va press dans sa course silhouette jet e dans le bleu nageant sous le masque ciel incendi la voix du vent recule vers le nord les orages et l explosion des toiles PARTAGE DES VOIX o0 O PARTAGE DES VOIX O O SOIR Ce qui restait en lui n tait plus qu un point peine visible comme d port dans le paysage libre tendue qui s offrait d couvert sous la neige aveuglante Visage fouett par les embruns il sengagea dans le passage suspendu avec la crainte de tr bucher et le rappel de la houle grise au bord de l escarpement Il avan ait avec f brilit surprenant les clart s du soir qui s avivaient aux limites du ciel dans cette effervescence que les astres tirent de leur cours Un instant cern par le vide son regard bascula rapide embrasement de l heure qui s aiguise lucidit du noir trouvant appui sur l id e de la chute avant de se perdre sur les hauteurs dans un brusque mouvement d air Le d s quilibre
88. e qui n est h las pas le cas dans Papperlapappouille Ici c est la mort veule et programm e de la parole Un immense talent g ch Du g nie syst matiquement d voy Car les acteurs chanteurs sont au dessus de tout loge Portent le vide avec un courage d sesp r Et une admirable d termination Pour le reste quelques m taphores l mentaires qui ne peuvent plus extasier que Saint Germain des Pr s et une absurde migration de lemmings qui occupe le paysage durant des heures On est ici dans l improvisation totale spectacles d une insolence et d une exigence extr me taill s au cordeau d une intelligence implacable crivent en contradiction avec eux m mes certains inconditionnels Il leur en faut peu pour tre blouis par l indigence la plus crasse par le fumeux du propos par un n importe quoi pouvantablement pr tentieux faussement intellectuel par une rudition vidente mais plaqu e et redondante donc inutile en sa p danterie Pauvres com diens qui tirent malgr tout leur pingle de cet peu pr s tragique de ce fourre tout indigent Suffit il une fois pour toutes d avoir un statut international un des plus grands cr ateurs de th tre d aujourd hui pour se permettre nim porte quoi N importe quand et n importe o Rien voir avec l esprit d Avignon C est subventionn Affligeant Germain Nouveau le mendiant magnifique de et par Philippe Ch
89. encore Sa po sie casse d embl e la vieille vaisselle symboliste et fait p lir les effigies des compass s d alors Il n y a qu se baisser pour ramasser Son Excellence Paul Claudel ambassadeur en viager qui fait le paon devant la moindre rosette Les rideaux de fum e de Perse le grand manipula teur l ego surdimensionn avide de reconnaissance tout le path tique cort ge des simagr es de Saint John l ger l ger Ren Char bricoleur de nu es m taphysiques qui ne cesse de se pousser du col Louis Aragon qui sagenouille devant Staline Paul luard qui se veut l ami du genre humain Le pontife Andr Breton bouffi de certitudes qui p rore l encan et multiplie diktats et exclusions Quelle purge Jubilatoire Cendrars indeed Non Delbourg Chapeau J L e A Peaceful legionnaire An Indochina sketchbook 1948 1954 de Helmut Loofs Wissowa Veritas Publishers Quel livre superbe reflet de la vie et du talent d un homme hors du commun Commen ons par l homme Helmut Loofs Wissowa le l gion naire pacifique mentionn dans le titre Les chats dit on ont sept vies Loofs Wissowa appartient coup s r l esp ce des f lid s N Halle en 1927 il est enr l par la Wehrmacht l ge de 17 ans envoy sur le front de l Est qu il rejoint pied et dont il reviendra toujours pied et sans nourriture En 1947 il fuit la zone d occupation sovi tique rejoint la zone fran aise et s e
90. er ne plus parler oublier ses r ves fracass s ne m me plus PARTAGE DES VOIX 104 chercher savoir que faire de son existence ext nu e Quelqu un ne dort pas il guette la venue de la nuit Il interroge la r alit des choses qui s effacent Il se tient debout adoss au temps immuable Il a le visage de l indicible B M Gassin t 2008 BENITO PELEGRIN POSTLUDE QUART IERS NORD Dans le parc aras les poteaux ont fleuri et quadrillent le ciel Un pyl ne hauss du col joue les tours Eiffel Sur la d charge en pente un arbre d sol 105 dresse vers l eau du ciel ses branches de noy PARTAGE DES VOIX Un c dre rescap sabre et z bre Pazur d une inutile foudre PARTAGE DES VOIX 106 B 1 La tuile volubile de rh torique lasse s est rendue aux arguments du b ton Grisaille de la gomme Sur la tache ros e B 4 Douceur des d tritus joueurs de corne d abondance aux animaux errants et au chien bien nourri amateur de sensations plus fortes plong dans la poubelle B 7 Une auto d soss e r chauffe son squelette au soleil pour revivre la nuit refuge d amoureux de cam s et de chats tous gris Le volant d sax Astre exorbit Aux rayons clips s par la rouille Un grillon gt x F s essaye gr siller dans l incertaine nuit B 9 Quinze t ages s illu minent
91. es fragmentation qui causaient du d g t mais d autres affluaient ou taient ce les m mes La mort coffrait avec la m me indiff rence innocents et coupables nous l coutions chercher en vain le sommeil en ses barques troites froissements de pages tourn es quatuors corde pour violons ou pendus insurrection de roses lupercales de statues Il convenait de r orien ter le vivant de le d tordre malgr contorsions tirements et saccades afin de l initier aux volupt s d une d finitive entr e en mati re S ensuivaient de suaves supplices de lascives arabesques assorties de rauques vocalises et de cinglantes reparties saupou dr es d orties blanches la peau s encanaillait au contact de chairs imaginaires consum es peu peu mystiques des bas fonds avides d acc der par les passages secrets du fantasme la chambre royale veill e par P il triangulaire MARC ALYN N N MARC ALYN N ON Celles qui officiaient bouche que veux tu en fondu encha n sous la coul e des miroirs M lusines champagnis es aux pau pi res violines accul es dans l ultime r duit du ch teau mis sac en compagnie de donneurs d ordres non identifi s celles l sveltes sc l rates pratiquant le p ch p rilleux lastique l me en porte jarretelles barbouill es de rimmel comme un enfant de m res o reposent elles d sormais sur leurs oreilles d licates que nul bijou ne vient dorer
92. esoin Tout s anime tout rena t tout est par d une fra cheur nou velle tout ressusciterait m me si le mot n avait une connotation trop religieuse Certes on chappe difficilement un tel lexique Le Rimbaud d Apr s le D luge recommengait une Gen se manqu e Ici le tireur isol est anim par un ardent d sir de gen se Aller vers l Orient a le m me sens que communier avec le matin en s aidant de la seule parole Nul besoin ici d Aden ou d Abyssinie Tout au plus passe l haleine du d sert et en elle l haleine du d sir Si dans le texte 21 l Orient d ploie obstin ment devant lui ses chemins de fa te c est avec le danger d une multiplicit des possibles qui tournerait vite l abracadabran tesque Le fantasme des vies multiples qui passait et dans Une sai son en enfer et dans les Illuminations entra nerait vers l absurde et ce retournement L homme existe t il s interrogeait Dieu h sitant parier sur ce mauvais fant me L Or natal Tel est le titre de la deuxi me section du Zireur isol Imm diatement le familier de Rimbaud si tant est qu on puisse l tre retrouve un motif marquant de Larme po me de mai 1872 la revendication de Mauvais Sang J aurai de Por dans Une saison en enfer La tentative alchimique qui avait t d une autre mani re celle de Baudelaire passe videmment par un tel motif Mais lor de
93. esse et de beaut Dans un jardin zen tout invite au regard int rieur de la m dita tion en contact avec l Essence qui permettra d atteindre l veil Pour les adeptes du zen cet veil sobtient plus ais ment par une PARTAGE DES VOIX O VA PARTAGE DES VOIX O N contemplation attentive du monde dans ses plus humbles d tails que par celle des mandalas qui dans la tradition bouddhiste du Grand V hicule repr sentent l Univers et sont le support de la m ditation Une composition de pierres comme celle du Ry an ji n existe r ellement que par l il et l esprit qui la contemplent Ce jardin est surplomb d un l gant pavillon faisant office de d ambulatoire et il est clos sur deux c t s d un mur dont l argile p trie dans l huile des si cles semble irriguer par ses mauves ses ocres et ses bruns les veines d une g ologie de la patience La disposition sur l espace du jardin des quinze pierres de formes et de tailles diff rentes est telle que l observateur o qu il se trouve n en peut voir que quatorze la fois Assis sur la banquette en bois qui borde le Ry6an ji apr s une heure de m ditation j ai formul pour moi m me cette lecture de la symbolique zen la pierre que je ne vois pas est la seule qui compte au moment o je regarde les autres elle est le silence de mon il l invisible reflet de mon me l absolu de ma perception Libre moi dans cet entretemps de
94. estination ils se rendent d abord au cimeti re et d posent sur le caveau de famille des Levet un bouquet de cin raires en fleurs Install s l H tel du Lion d Or o ils font un bon d jeuner suivi d une courte promenade ils se rendent ensuite chez les parents du po te grande habitation un peu bourgeoise et un peu campagnarde avec double porte au vestibule la porte d entr e et une porte int rieure vitr e avec des losanges de cou leurs note Larbaud Dans la conversation entre Fargue et Larbaud dat e du 2 mars 1911 l int rieur d une limousine en marche sur la route natio nale entre Saint tienne et Montbrison les deux amis chan gent leurs impressions apr s la visite aux Levet Fargue avec son sens aigu de l observation fait cette description La maison des Levet tait blanche entre les arbres on devine des coupes de p tu nias de belles de nuit Un tout petit jet d eau pareil ceux des tirs montait p niblement avec une esp ce de d clic par instants un bruit qui faisait penser un duel derri re un massif Et Larbaud avec davantage d empathie pour le po te disparu r pond son ami Malgr tout j ai l impression que je lai enfin rencontr il fait allusion Levet bien s r que je lai enfin approch d aussi pr s qu il m tait possible de le faire Quelque chose de lui tait l dans la ville o il venait passer ses vacances et o il reven
95. eurs charrois leurs d sinences une maison une saison une glycine la tota lit de la vie depuis son chant se d versant jusqu la terrible usure avec la lourde peine la nuit qui rassasie les soleils amonce l s de la rue les ordures en une num ration du monde qui en fait boire au po me la saveur et la plaie Et c est avec lui tre au vivant dans sa fragilit dans une pl nitude trou e une sensualit du corps et du mot qui joignent ici l ouvrage de vivre et d crire avec une force d pouill e qui touche l essentiel et r ussit ce rapt du vivant soustrayant au muet de la mort la part de la parole Claude Ber o M ditations des lieux d Adrienne Arth Claude Ber Jo lle Gardes photographies d Adrienne Arth ditions de l Amandier Par del les murs photographies de Patrick Gardes gra vures de Martine Rastello textes de Jo lle Gardes ditions de l Amandier Rien ne d finit mieux la triple entreprise dont les r sultats sont consign s dans M ditation des lieux que l Avant propos anonyme ambitieusement mais justement intitul De l art comme exercice spirituel quoi bon faire du texte sur du texte lorsqu on peut aller puiser la source Donc Les textes et les photographies qui les accompagnent sont n s d une r sidence d artistes au Monast re de Saorge en ao t 2006 Sentes et cl tures de Jo lle Gardes en m me temps qu un inven
96. f rence aux Illuminations Cependant le po te qui arpente Paris point du jour cet autre guide que je conseille tous les voyageurs d sireux de conna tre les secrets de la capitale me rappelle l instar de Baudelaire les changements qui affectent sans cesse son coeur de ville et c est des pr d cesseurs plus imm diats du xx si cle que pour ma part j aimerais comparer Marc Alyn en constatant chez lui par exemple comme chez Saint John Perse une attraction vers l ailleurs la Chine du po te d Anabase ayant pour pendant le MARC ALYN H N MARC ALYN N Proche Orient chez le po te de Byblos En imaginant d autres motifs de ressemblance avec l auteur d Amers ou d loges je d couvre chez Marc galement la pr gnance de l enfance et la magie de l l ment f minin La grande loquence et la capacit de prof ration sont nettement perceptibles dans Les Alphabets du feu ou L il imaginaire Cependant le caract re parfois oraculaire de ces po mes se trouve corrig ou b molis par un sens aigu de l humour et de l autod rision La solennit ou sa menace peut donc tre aussit t d truite par le scud d un jeu de mots Et puis le go t de Marc pour les aphorismes engage un rapprochement avec Ren Char qui en a sem dans tous ses recueils Marc d ailleurs pas moins que Char est un po te de la po sie chez qui un scepticisme de bon aloi on
97. g tendre qui d j nous nommait D l biles Le temps n attaque pas l homme en tat de veille assure t il Lente est la nuit pouse la page il faut na tre encore C est donc bien le po me qui cr e le po te et non l inverse comme le souligne Bernard Fournier et l attention extr me accord e la valeur des mots rapproche Alyn d un Mallarm d un Nerval ou d un Pierre Jean Jouve Dans les ann es soixante Nuit majeure est un livre nos yeux monumental de contestation spirituelle et de critique intellec tuelle renouant avec une tradition qu avaient explor e entre autres Victor Hugo et G rard de Nerval et fond e sur la convic tion que le myst re est la meilleure part de l humain Il passe n anmoins presque inaper u parmi les v nements du mois de Mai 1968 o avait t programm e sa sortie Il contenait entre autres choses rappelle Marc Alyn une description all gorique de la situation de la po sie ce moment pr cis du xx si cle Tel Quel et le structuralisme s acharnaient dissoudre la personnalit intime le je le moi du po te tuant le tu du partage au pro fit de quelque ordinateur triant les phrases et comptabilisant les images issues des seules associations s mantiques hors du contr le et des d lires de la subjectivit Chez moi heureuse ment le naturel revenait toujours au grand galop Un instant caress par la tentation du
98. ge gr ce aux costumes h t roclites et franche ment caricaturaux ah la couronne de Richard comme jamais n en e t un roi encore moins dans l id e de faire jouer certains r les masculins souvent avec une outrageuse grandiloquence par des femmes mais apr s tout le ph nom ne inverse tait de r gle au Globe du temps de Will Non la partielle r ussite est dans la gestuelle et le d placement des acteurs voir les folles courses circulaires d un Podalyd s qui sauve le spectacle lui tout seul m me s il tire le personnage aux antipodes de l interpr tation qu en donnait Vilar Et c est parfaitement son droit comme celui du metteur en sc ne Dans la Cour d honneur du Palais des Papes soufflait ce soir l malgr tout l esprit d Avignon Le chan gement progressif et continu du ton passant insidieusement de la grosse farce la trag die Shakespeare qui m langeait si efficacement les genres l a nomm e trag die apr s tout et la subtilit de cette volution donnent r fl chir en profondeur sur le terrible destin des gens qui nous gouvernent Ah si tous les chefs d tat finissaient par devenir aussi lucides pitoyables et touchants que celui ci Peut tre les plaindrions nous au lieu de les accabler de nos sarcasmes m rit s Si nous savions ce qui se trame vraiment dans les cabinets du pouvoir ce qui s ourdit dans tel premier cercle un peu d indulgence peut tre
99. gique des Poissons l ment biographique qu il estime signifiant Ce poisson c est donc aussi le po te qui doit refuser l immobilit des lignes sous peine de mort th me du roman Le D placement Peut tre m me si l on se r f re au symbole vang lique le Christ qui doit mourir pour rena tre sa nature divine Comme le rappelle un aphorisme du Dieu de sable Chacun de nous menac par la chute perp tuelle de l tre vers les formes inf rieures de la mati re s effor ait de retenir sa substance en noyant le poisson dans des flots somnambules texte crit comme il se doit imparfait temps du r ve ou du moins des textes oniriques Le Tarot est un autre syst me symbolique que Marc Alyn pra tique volontiers On trouve dans son uvre des R ves secrets des tarots comme un Tarot de Venise Le septi me tarot cl t L il imaginaire De mani re plus discr te le Tarot habite aussi Les Degr s de l extase une s rie de po mes en prose du Tireur isol Ces 22 textes ne se r f rent pas explicitement aux 22 arcanes majeurs ils parlent de l aventure amoureuse depuis le d sir ini tial premier moteur de tout le processus de symbolisation chez Marc Alyn jusqu sa r alisation et sa sublimation S il est au premier abord difficile de mettre chaque texte en regard de l ar cane majeur correspondant une lecture attentive permet n an moins d loquents rapprochements le texte
100. haque parole Mais dans le silence doucement rompu se d tachent tes yeux ton visage s illumine d une flamme vive et en un instant s ouvre et se ferme chacune des fibres de ton tre Imp rieuse surgit l esp rance le jour puisse t il venir o tu retiendras au creux de ton front ce point qui donne la lumi re la lumi re et encore la lumi re LE SIFFLEMENT Dans l air surgit le sifflement de la sir ne Bient t tu seras loin entre les certitudes des murs qui te sont chers et la mer scintillera au fil de l horizon Tant de choses ingrates nous ont assaillis instant apr s instant pendant que notre c ur prodigue battait en silence Un sentiment d incompl tude surgit du jour qui m abandonne Je tenterai de recr er ta pr sence si le songe lui m me nous fuit gt VOIX D AILLEURS M gt VOIX D AILLEURS 116 Lo Scacco Certo ti spaventa la somma Quante cose lontane dai tuoi modi di sempre E poi come aggirare le lucerne degli sguardi importuni Soffiandovi di sopra come le candeline sulla torta Facile a dirsi meno a farsi Eccoci dunque preda del burkha delle convenzioni E lo scacco gi matto IL MAR Z Chiedi di restaurare la tua pace Lo chiedi con dolcezza utilizzando la tattica pi consona il silenzio Ed ecco che cercarti lungo il giorno come marcia vana nella neve senza una luce all orizzonte senza un punto d approdo mentre incomb
101. ions de La Licorne Presses universitaires de Rennes Le Centre du monde amp autres po mes de D H Lawrence traduit par F J Temple L Arbre diteur tirage limit Il n est pas indiff rent ni effet de hasard que les actes de ce second colloque consacr Fr d ric Jacques Temple moins de dix NOTES DE LECTURES 149 NOTES DE LECTURES n O ans apr s celui de l universit de Nanterre commence et finisse par l image d un ciel satur d oiseaux Courlis et balbuzards les oiseaux de Fr deric Jacques Temple par Jean Carlo Fl ckiger Vol de tadornes sur Maguelone par votre serviteur ni que les pages rete nues soient harmonieusement distribu es entre chercheurs uni versitaires et po tes certains participants jouant d ailleurs sur les deux tableaux Je connais peu de po tes contemporains sur les quels on prouve une aussi incoercible envie d crire que celui qui fait l objet et le sujet de ce livre Et ce n est pas la derni re mani festation d int r t dont Temple ait t l objet Il doit bien y avoir quelques raisons cela Elles nous sont admirablement donn es par les tudes contenues dans ce volume dont le travail propre ment litt raire et critique ne masque jamais l affectif Car c est bien un homme autant qu une uvre qui se pr sentent ici aux yeux du lecteur Je n en veux pour preuve que des bribes de cer tains titres L art d voquer les minutes heureu
102. ire o le n ant voisine avec le n en des st les peut tre les mots se l veront ils eux aussi comme ces animaux de famille convi s la f te On peut imaginer un Jugement dernier du langage avec Jean Paulhan par exemple dans le r le de Thot pesant chaque vocable ses subtiles balances lui m me veill de pr s par Anubis aux oreilles de chien policier Le po me pri re l envers qui ne qu mande rien L il imagi naire p 50 Comment l entendez vous l origine le po me tait incantation parole magique destin e op rer un sortil ge On a pu comparer le vers un n ud sonore pass au cou des dieux pour les enchanter les capturer et les plier aux volont s de la cr ature La pri re n est pas autre chose en son principe une parole int rieure chuchot e parfois murmur e en ch ur dont on esp re qu elle sera entendue et exauc e en haut lieu Mais la formule magique rev t un caract re imp rieux domi nateur totalement tranger la pri re qui shumilie devant les Puissances et les Tr nes c lestes dans l espoir d en tirer des avan tages imm diats des gr ces Le po me quant lui ne commande ni ne demande acte gratuit par excellence il prodigue tous ses richesses sans rien exiger en change Ne pourrait on dire qu il fait l aum ne Dieu lui m me en sa solitude toil e C est l un des sens possibles du po me Le Soliste dans L l imaginaire
103. isera durant une trentaine d ann es ne retournant Paris qu en 1987 une ardeur cr atrice jamais d mentie Bien qu adonn sans interruption l laboration d une uvre po tique jalonn e jusqu ce jour d une vingtaine de recueils et d une demi douzaine d uvres en prose dans lesquelles lem MARC ALYN Ww MARC ALYN EN En preinte du po te est toujours pr sente il est galement actif sur le front de la critique litt raire laquelle il a consacr pr s d une quin zaine d essais et des recensions po tiques en de nombreuses revues notamment dans Art et spectacles et Le Figaro litt raire Il fonde d autre part et dirige pendant de nombreuses ann es la collection de po sie des ditions Flammarion Entre 1960 et 1972 il fait para tre dans la collection Po tes d aujourd hui de Pierre Seghers des monographies sur Mauriac Dylan Thomas Andr Richaud Norge le Slov ne Kosovel Il op re en 1962 un rassemblement de Po tes du XVr si cle crit en 1965 un essai sur G rard de Nerval pr sente La Nouvelle Po sie francaise aux ditions Robert Morel en 1968 en 1972 Pierre Belfond accueille ses Entretiens avec Lawrence Durell N oublions pas du c t de la prose un roman ce jour unique Le D placement Flammarion 1964 et un r cit autobio graphique M moires provisoires L Harmattan 2002 Du c t de la po sie L uvre est consid rable Tentons d
104. itutions publiques et quand ils ont eu acc s un manuscrit original l criture d routante de Nouveau cer tains fac simil s n tant parfois pas beaucoup plus lisibles Malgr toutes ces difficult s ils offrent aux amateurs comme aux sp cialistes une base de donn es pour certaines nouvelles et pour toutes certifi es dans la mesure o quand ils mont pas retrouv de trace pr cise ou moins pr cise du po me dit il en est fait mention dans les notes qui sont la partie la plus int res sante de cette nouvelle pr sentation Les notes nous permettent de comprendre la gen se de certains po mes leurs sources voir la note passionnante sur La Chanson du Mendiant et surtout de revenir sur la possible chronologie de ces premiers vers chronolo gie toujours soigneusement justifi e surtout si elle contredit une prise de position ant rieure sur ce sujet Quant au lecteur de po sie n ophyte dans l tude g n tique des textes il a double plaisir d couvrir certains po mes peu connus et s initier au travail de l dition scientifique Remercions la Belgique d avoir enfant de si clairvoyants amoureux de la po sie et mentionnons pour finir un ton direct et souvent humoristique dans les commentaires des diteurs Pour preuve semble t il le nom de la maison d dition qui ren voie on l apprend la toute fin comme une r compense pour les bons lecteurs une lettre testament de Nouveau qui au
105. l alchimiste est fabriqu acquis L or natal est un or donn qui a pu tre perdu mais doit pouvoir tre retrouv la prose serr e de L Aventure initiatique succ de ici le vers libre et parfois m me le vers mesur et c est bien la po sie qu il appar tient de recueill ir Por natal du verbe de connivence avec les profondeurs Il ne manque l vocation ni le regard sur les dix sept ans ni l exigence d harmonie f t elle recr er ni les ter MARC ALYN CN VA MARC ALYN ON ON rasses de l H tel de l Univers o figure le Rimbaud d Aden sur une photographie r cemment d couverte et mise en valeur par Jean Jacques Lefr re Et il mest pas d autre mani re d apaiser la soif que le feu Rimbaud l avait bien compris jusqu l ultime puisement Les Degr s de l extase Ce troisi me titre est sans doute le moins rimbaldien de tous Le mot extase est plus verlainien que rimbaldien C est l extase langoureuse dans les Ariettes oubli es encore que dans ce texte phare dont on a souvent voulu faire la derni re des Illuminations G nie on voie passer cet tre merveilleux incar nation de tous les espoirs dans le ciel de temp te et les drapeaux d extase ros ne se confond pas avec ce G nie l m me s il tait porteur d affections normes et d amours r invent es Et les retou cheuses d extase proc dent par petites touches et p
106. l c t q prendre une vue comme prendre un morceau du monde vue au passage l parois grilles jambes bras d sarticul s gris lors de la chute z brures de l air immobilit de la pluie horizontale quand tu voles Je me souviens de l troit praticable de bois souple sur lequel il fallait marcher pas mesur s enfant L ab me d j apparaissait l espace d un rythme par o fendre PARTAGE DES VOIX 0 M PARTAGE DES VOIX 00 CN Courant depuis quand loin d j ces bribes ce revenant tandis que je remonte entre les portes difficiles carter le bruit assourdissant des roues du vent de Pair le bref passage sur les plaques de m tal mouvantes entre lesquelles appara t dispara t un sol inatteignable Effacement rose ce peu le soir au fond du ciel espace vider de la po sie Transparence ou gravure rouge Lalique fabriqu partir de Por ou bleu profond St Louis blanc laiteux dans le c ur en verre que tu portes comme une goutte panch e dans le verre d poli Une phrase par exemple moi qui n ai jamais prononc le mot vers ni prononc ni crit La po sie serait pour moi cette phrase commenc e dans un sifflement et finie si tant elle l est dans un souffle son suspens provoquant son rythme son arr t brutal comme au bord d une falaise ou sa fluidit ininterrompue Sous les arbres ce bref miroitement de l eau aper u trop tard en passant eau
107. lay des matins VI Toujours m me pendant la p riode des nerfs le culte des noblesses infirmes les richesses latentes et somptueusement discr tes vigueur notre jeune force indispensable au divorce sup rieur de la raison force ou lav nement des plus hautes cons crations de la douleur lucide VII Son ventre ros s reux puret des laites encore ti dies apr s la fuite de l organe turgide gemmes r pandues sur les paisses et granuleuses l vres grenat pruineux ventouse sang de dragon coquille rogu e d aurorales pondaisons Son ventre chos des vagues lointaines enferm es dans la nuit des spectres Sa respiration la naissance d une conscience suspendue dans le vide liquide Un germe bulbeux envenime l monctoire VII L eau de tes yeux serpente par des canaux de chair et de flammes A tes l vres la fi vre bourgeonne en des cristaux de musiques IX Au bas d un thalweg qu claire un rayon de cendre les remparts s difient sur les emb cles de notre mis rable rivi re Lib r e des tortures du langage une magie tord les racines de l inconscient La lumi re crisse et rampe les os flamboient le corps s largit les enluminures faciales gr sillent Le sang et les larmes de pierre vers es pour cette veill e alimentent d sormais tes chairs nouvelles X Boinvilliers Soir e La plaine monte dans les brumes le lac sengorge dans ses eaux Il y a des d tritus
108. leurs en boutons des aurores d hiver traces de tes yeux Les lignes de tes envies tissent des motifs des vall es escarp es et des monts noy s de coquelicots Traces o je lis de mes doigts les sillons des questions laiss s sur ma peau livre ouvert gt A z J ai r v Au chant du coq je Pai su Etrange et familier ce monde d c t Une goutte d eau perle sur la vitre il est six heures Derri re le carreau de la chambre les montagnes Jusqu o aller PARTAGE DES VOIX OO m oo N PARTAGE DES VOIX alla Signora e al Signore Ciampi Castagneto Carducci du nom du po te Cypr s questionn s par son retour ville pos e sur une colline de Toscane Des escaliers us s par les pluies font de ces maisons d un autre temps une ligne disjointe resserr e o se faufilent seules les ruelles qui les s parent Les pierres sonnent dures Pleines Sous les pas le temps s est r fugi Le frisson qui parcourt les arbres emplit les rues d un silence creux o r sonne l absence des rythmes m caniques L ne ne tourne plus autour du puits le balancier est suspendu attentif au moindre geste qui lui donnerait du sens Les pav s sont labour s comme en attente de semailles Les chariots lourds ne passent plus ne marquent plus Aucun sifflement d alambic Une vo te s ouvre sur l atelier Des mains invisibles semblent s agiter la forge est devenue fourneau
109. lissez de descriptions 300 ou 400 pages c est mieux N oubliez surtout pas les coucheries et les desserts On voit en quelle estime Borges tenait ce genre litt raire Vers la fin du mois de mai 1986 l H tel l Arbal te Gen ve Jorge Luis Borges eut cette phrase l adresse de son biographe et confident qu il pronon a en fran ais Je ne sais pas dans quelle langue je vais mourir et il ajouta en espagnol cette fois Pero soy un escritor verdad Mais je suis un crivain n est ce pas r pondant ainsi lui m me par une pirouette la question qu il venait de formuler Borges a toujours recommand qui voulait l entendre d tre attentif aux myst rieuses bifurcations du destin Dans une des Fictions que je pr f re Le Jardin aux sentiers qui bifurquent le docteur Stephen Albert dit au narrateur Le temps bifurque perp tuellement vers d innombrables futurs Voil exactement ce qui est arriv Jorge Luis Borges en cet t 1986 son destin a bifurqu vers un autre futur o il a retrouv c t de Voltaire et de Kafka son ami Montaigne avec qui il aimait se coudoyer La vie commence Jean Orizet e Fr d ric Jacques Temple l aventure de vivre tudes r unies et pr sent es par Colette Camelin l occasion du colloque organis par B atrice Bonhomme Laure Michel et Patrick Quillier tenu en 2007 au monast re de Saorge et Aiglun dit
110. mbe dans un exotisme de pacotille ou dans un pittoresque facile Il n est m me pas n ces saire de se r f rer ses peintres de pr dilection pour constater l originalit et la maturit de son regard Dans ses gravures l eau forte aquatinte et carborundum qui illustrent de leur monochromie les t tes de chapitre Martine Rastello oscille entre silence et transparence en un d pouillement graphique qui est la marque vidente de son art Quant Jo lle Gardes dont les textes denses et ramass s consti tuent l indispensable contrepoint au visible elle explore avec bon heur les th mes essentiels de l existence et sa parole br ve sert merveille les sinuosit s de sa m ditation sans que la moindre lour deur verbale n emp che l envol de l imaginaire Comme elle le proclame d s la premi re page Par del les murs souvrent l espace int rieur et la plaine illimit e du songe Et c est elle qui en d tient les clefs Jacques Lovichi e Ayesha de T ric Boucebci ditions Dalimen Cette phrase de Jean Malrieu la po sie comme la science exige un langage de rigueur m accompagne toujours dans mes m di tations comme dans mes lectures et T ric Boucebci me semble appartenir cette famille de po tes authentiques Tous les po mes de ce recueil sont b tis sur la m me pure qu une lumi re pure accompagne Ils t moignent d une extr me rigueur dans tout ce qui valorise l existence L extr mit
111. mble dans ce cas doit comprendre entre 100 et 140 pages l uvre prim e tant alors publi e en ver sion bilingue Sous r serve que l auteur en ait conserv les droits de publication les po mes pr sent s peuvent avoir t publi s en revue Le concours est annuel et permanent il n y a donc pas de date limite de candidature mais seul un manuscrit re u avant le 1 juillet de chaque ann e est susceptible d tre publi la fin de l ann e en cours Les manuscrits sont envoyer sous forme lectronique l adresse revuephoenix yahoo fr et en un exemplaire papier l adresse PH NIX 4 rue F nelon 13006 Marseille France Les manuscrits sont anonym s avant transmission au jury Aucun accus de r ception n est d livr Les manuscrits ne sont pas retourn s Composition du jury Le jury est compos de trois membres du Conseil de r daction de la revue PH NIX et de quatre membres ext rieurs choisis par celui ci La composition du jury mais non sa structure change chaque ann e Le jury se r unit et d lib re souverainement MISE EN SCENE x MISE EN SCENE N N JACQUES LOVICHI LE FESTIVAL D AVIGNON Papperlapaap spectacle de Christoph Marthaler dans une sc nographie d Anna Vierbrock D cid ment la Cour d honneur du Palais des Papes se d fend avec pret des spectacles g niaux qu on lui inflige Et gagne chaque coup par chaos
112. mique des r ves Joueuse la ville devient une criture parfois l g re qui s duit le temps d un regard phrase Comment d crire ce ph nom ne d harmonieuse vivacit qu est une v nitienne Le po te ne peut que louer au passage d un sourire la richesse des enjambements et de la c sure MARC ALYN N N MARC ALYN VA N Mais parfois le d sir du r veur le conduit des exp riences d une tout autre port e Venise s duit et se laisse prendre par le regard aux marges de l imaginaire et d une exploration phy sique identique la mort Qui la p n tre se fond dans la fra cheur translucide d un fruit Et la musique accompagne sournoisement chaque caresse organisme est le cr ateur d or gasmes l instrument de la R v lation Venise seulement nous pouvons aspirer devenir Dieu Mais les lecteurs de Byblos savent que c est Byblos qu on peut r ellement le devenir pour parler comme les alchimistes on serait tent de dire que la prose v nitienne est l a bedo qui permet d abandonner les livres de passer des connaissances au savoir mais que le vers ph nicien haut langage cristallis reste le lieu de la rubedo de la m tamor phose finale criture et syst mes symboliques La derni re citation permet de retrouver dans l exp rience sym bolique des l ments traditionnels l initiation passe par une phase de descente aux enfers elle s exprim
113. monde trac des pistes en des for ts profondes travers l archipel des lacs En quelques mots simples comme matin du monde Temple s y r v le tout entier Comme presque tous les po tes de sa stature FJT est aussi dans sa g n rosit native un admirable passeur J en veux pour preuve la derni re s rie de traductions de po mes de D H Lawrence dont voici un extrait pour mettre l eau la bouche du lecteur Cette mer ne mourra jama s toujours jeune et bleue sans fin gonflant l aube ses collines et prot geant l esquif de Dionysos fr le et sombre au m t pesant des grappes parmi les dauphins bondissants Ce pourrait tre c est encore autant que du Lawrence du Fr d ric Jacques Temple Jacques Lovichi e L Odyss e Cendrars de Patrice Delbourg criture ditions Le signataire de cette note de lecture crite avant tout d ve loppement pol mique n est nullement un sp cialiste de Cendrars Peu au fait des mini temp tes qui agitent le micro NOTES DE LECTURES M MA Hi NOTES DE LECTURES H MA N cosme il n a jug le livre que sur ses qualit s litt raires et comme une fiction prenant appui sur un personnage certes r el mais simple pr texte un portrait en creux de l auteur C est une trange entreprise que celle laquelle se livre le toujours tonnant Patrice Delbourg en ces quelques deux cent vingt pages On connaissait de longue date son attrait
114. n Les guides du pi ton somnambule o l on rencontre autant de morts et de monuments disparus que de vivants parfois bien plus fantomatiques que les cr atures vives de nos m moires pourraient tre pr sent s comme des promenades rudites transcend es par la jouissance imp rieuse d crire pas sant en fraude mille po mes en prose venus hanter les r ves de lec teurs trangers au march clandestin de l dition po tique L uvre en prose est aussi lieu de cr ation po tique On pour rait en dire ce que Marc Alyn dit de celle d Andr de Richaud il nous invite le suivre pour le seul plaisir de la marche travers un labyrinthe d images folles sans fin s expliquant elles m mes se critiquant et se situant par l dans l espace po tique En ajou tant ce qu il crit propos d Aur lia de Nerval le r ve et la vie s panchent l un en Pautre pour aboutir la fabuleuse r concilia tion de l me et du cosmos Renouer avec le cosmos par l exp rience symbolique est la grande ambition de Marc Alyn explicite ment pens e et affirm e depuis Nuit majeure Cette aventure s inscrit contre courant de bien des modes contemporaines et n entend s inscrire que dans l espace temps marginal et vital du po me L criture prosa que moins fortement cristallis e que le vers offre un espace de libert qui contribue laboration et la vitalit de l exp rience symbolique en un
115. ne intuition d roule l clair de sa saisie un manuscrit d odeurs spacieuses ici un galbe d horizon l un rot de pi ces d or Et voil le po te avec sa meute de mots truffiers cernant attisant la palpitation qui vient de l iriser Dans ce monde le voil muni d un b ton d instinct aux accents de torche et de songe PARTAGE DES VOIX N N PARTAGE DES VOIX N 00 RATURES L aur ole de duvets et de paille du po me se gagne la faux Cyclope encharbonn le po te pieute sans retenue m me les l vres de la mine Volcans martel s fontaines lagu es peine form s les mots sont travers s d un clair noir En plein qui vive le po te pi tine une boue de lettres Seul entre son secret et ce qu il attend d en dire poreux et sans piti le po te rature sans rel che passe des heures guider cet intransigeant nez mental v ritable gouvernail quarrisseur Premi re arche les vestiges sont recopi s Nouveau d sastre et nouvelle feuille Mais le noyau du pouls est l Tr s peu de mots respirent d eux m mes Plus rare encore celui qui peut crire jusqu la peau m me du po me et confirmer l inattendu TITRES Certains existent avant le po me comme le nom d un enfant dont lamour n a pas encore t fait D autres ont besoin d un champ de ratures et d un long si ge d incertitudes et de rencontres Bien apr s leur gen se tous sont
116. ngage dans la L gion trang re Marseille puis Sa da en Alg rie Indochine enfin juste temps pour y retrouver la guerre Il quitte NOTES DE LECTURES MA Ww NOTES DE LECTURES MA P lIndochine et la L gion en 1954 se lance dans des tudes d arch ologie et d anthropologie Allemagne France Suisse et obtient son doctorat en 1960 Apr s un passage au Mus e d anthropologie de Berlin Quest il est nomm la Facult des tudes orientales de l Universit nationale australienne en 1961 Il y restera jusqu la fin de sa carri re en 1992 Francophile acharn autant qu l gant francophone Loofs Wissowa a t le pr sident de l Alliance fran aise de Canberra ville o il a galement contribu la fondation de la Petite cole fran aise cole maternelle francophone encore en activit aujourd hui Cerise incongrue sur le g teau de sa vie romanesque le l gionnaire pacifique Loofs Wissowa Allemand naturalis Australien a t pendant de longues ann es le repr sentant en Australie des Anciens Combattants fran ais Son livre maintenant Cent pages de grand format repro duisent en quadrichromie des centaines d uvres r alis es pen dant ses ann es la L gion trang re car Loofs Wissowa est aussi un grand artiste Toutes les techniques graphiques ou presque y sont utilis es crayon encre pastel aquarelle seules ou en combinaisons diverses On y tro
117. nglicis son nom en Levey Il aimait les casquettes de yachtman et les hauts de forme vas s mais il collectionnait les feutres et les som breros s villans Dandy le po te l tait jusqu au bout des ongles Il portait volontiers des costumes grands carreaux des gilets bleus et des souliers couleur jaune d oeuf Il lui arrivait de teindre ses che veux en vert Il appr ciait les beaux bagages les porte habits en cuir les cannes de Briggs et les cravates de Charvet Puis Fargue avoue Larbaud qu il n a que de vagues souvenirs des d parts et des retours de Levet L Annuaire diplomatique nous renseigne l dessus de d cembre 1897 juin 1898 Levet est charg de mission en Inde et en Indo Chine pour le Minist re de l Instruction Publique mission qu il doit en partie l entregent de son d put de p re Celui ci disait de son fils avec bien veillance et r signation qu il tait un original comme tous les artistes Nomm vice consul de troisi me classe il devient secr taire archiviste Manille en novembre 1902 Puis il y est charg de la chancellerie En f vrier 1906 le voil la chancellerie de Las Palmas aux Canaries Le 12 septembre de la m me ann e Henry Jean Marie Levet est mis en arr t maladie pour bronchite par le docteur Dulac de Montbrison Il avait t victime en juin 1904 d une congestion pulmonaire Le 18 septembre apr s une inter vention de son p re il b n
118. nry Jean Marie Levet po te rare dandy provocateur homo sexuel discret diplomate dilettante a v cu de fa on si lointaine si t nue et si br ve que certains lont pris pour une invention de Fargue et de Larbaud une supercherie litt raire Quelle superbe fa on d exister mieux en existant moins Lucide il avait crit en sto cien son ami Francis Jourdain J aurai un fauteuil roulant plein d odeurs l g res Que poussera lentement un valet bien styl Un soleil doux vernira mes heures derni res Cet hiver sur la Promenade des Anglais J O PARTAGE DES VOIX Hi A PARTAGE DES VOIX H e N BERNARD MAZO RETOUR AU SILENCE Toute criture tout po me retournent un jour au silence C est l espoir qui n en finit pas de nous r ver dans l insomnie du sommeil Ma parole est faite du bruissement de toutes les autres Qu attends tu de la vie trop courte tu voudrais simplement A A tre l au c ur du monde couter le battement aveugle de ton sang trouver enfin les mots pour dessiner sur les grandes plages du silence cet espace inconnu qui me hante a O gt mn A A On dirait a que le po me it de null z surgit de nulle part lt comme le reflet 103 d un avant monde englouti dont l harmonie perdue consume les r ves des hommes Certains jours on voudrait simplement demeurer l ras des choses ne plus boug
119. ns jamais avoir pieds et poings li s sur la d rive inscrire le radeau en de au del D une m me voix s noncent indissociables un art po tique et une sagesse dans son double sens originel de savoir et de go ter NOTES DE LECTURES Ww Ww NOTES DE LECTURES UD N s ouvre le livre dans la terre profonde comme labours s inscrivant sillons qui se retournent sous le soc selon l nigme l encre les veines du laboureur et casque contre casque aimer comme l amant g mit au sexe de l amante Car c est bien de sauver le texte et le corps d un suicide int gral absolu qu il s agit de sauver la chair l esprit qui cogne aux tempes le cri l clair sa vibration sauver l tre sa coquille nacr e quand se lient le geste d aimer et celui d crire quand corps et texte ne faisant qu un et que se prononce avec le je les os qui avancent dans leurs gaines les muscles les tendons les che veux les poils les cils le visage les yeux dans un accord parfait une d sinence du verbe aimer ou marcher crire semelles de vent sur les mousses lichens gramin es tendres t nus Ne reste qu peler le monde dans un crire au quotidien qui est la fois r concilia tion et injonction une pr sence au pr sent laquelle le vertige de la mort a donn son ancrage qu crire au quotidien la sueur le sang l charpe le feu crire au quotidien les saisons l
120. o la guerre sans nom s intensifiait C est alors qu au c ur de cette poque d senchant e dans le Landerneau de la po sie fran aise clata un v ritable coup de ton nerre un jeune prodige de vingt ans un po te pratiquement inconnu faisait une entr e fracassante en po sie Il venait de publier en 1957 aux ditions Seghers un recueil d une tonnante pr cocit et d une singularit rimbaldienne Le Temps des autres Il avait tout juste vingt ans Venu de Reims o il tait n en 1937 Marc Alain F cherolle ayant choisi comme nom de plume celui de Marc Alyn se voyait non seulement imm diatement reconnu mais adoub par quelques uns de ses prestigieux a n s ceux qui composaient l poque le jury du grand prix de po sie Max Jacob qui lui tait attribu Naissance d un po te Le Temps des autres n tait pas sorti tout arm de l inspiration du juv nile Marc Alyn En 1954 dix sept ans l ge de l closion po tique de Rimbaud Marc Alyn avait d j publi trois recueils Le Chemin de la parole Millas Martin Rien que vivre Les Cahiers de Rochefort et Demain lamour Le V hicule o Pon pouvait lire Pour effrayer le vent n gre aux dents poussi reuses Les hommes ont dress des girouettes de fer sur les toits Jean Breton en avait donn une pr face o il saluait un po te impatient inspir qui faisait clater les images comme des gre nades
121. o me s aventure au seuil de l indicible entrant dans un dialogue avec lui m me qui croise le r cit de la mont e au Golgotha et soulign par l italique le constat dur et sans concession d un r el implacable avec les journaux de la veille parpill s sur les chaises le sifflement qui glisse s installe dans les tuyauteries de la cuisine et partout le corps souffrant en tas comme mati re Les rides creu s es l int rieur du fruit de la cellule blette le ver le vibrion Le corps sous l enclume quand dans la demeure du mourant c est chaque fois et pour chacun m me preuve qui se rejoue Le texte r sonne de cet entrelacement de voix multiples m lant le rappel de la passion christique la m ditation le souvenir celui des femmes de Provence de la mort du p re du go t de l enfance incarn dans le pain perdu et la sensation brutale du corps qui sen va Coma Putr faction Passage La chair est p le On peut supposer qu elle vire au brun desquame v hicule des humeurs pestilentielles La mort quotidienne dernier passage du lit vers le cercueil y rejoint celle des hommes et des femmes chevel s qui fuient la guerre le d sastre et le po me dit la fois l impensable de la disparition de soi qui d rive tandis que je memmure et le partage d une destin e commune L tendue disloqu e d truite amn sique puis je refair
122. onologique se fait rebours puisque le recueil s ouvre sur un texte intitul Quelques jours avant la mort et se ferme sur un court po me qui dans sa densit c l bre les forces vitales travers la lumi re qui lui donne son titre Cinq sections sans titre regroupent chaque fois en nombre sensiblement quivalent des textes autour de la grand m re li e l alpage au chaos de pierre inquiet o l eau tournoie aux gestes rituels beurre coup droit en couche trop haute sur le pain et autour de la ville de ses enseignes de son M tropolitain de ses habitants qui gr nent leur complainte Entre ces deux univers un po me parle des cartes battues et rebattues et questionn es par la grand m re comme s il s agissait de battre et de rebattre les cartes de la vie et de la mort pour ordonner le jeu en vue d un tour La structure nette de l en semble semble l pour contenir la force et parfois la violence int rieur des sentiments de celle qui dit Je et la violence ext rieure du monde La grand m re Monique Hottegindre est l objet d une fascination r pulsion emperruqu e crue aimant lor mais aussi aimant cyclamen et c est elle que se fait la pr sentation de l enfant j ai peur que tu tendormes qu il glisse de tes bras mais je te l ai port je te le confie c est lui La duret n est pas seulement celle de la grand m re mais aussi
123. onsacr es chacun d entre nous num ros sp ciaux sur Jean Vauthier auteur f tiche de Marcel ou sur cet autre ami Jacques Audiberti et tant de manifestations communes enthousiastes et fraternelles Jy ai vu pour ma part et je ne suis s rement pas le seul le signe annonciateur d une future r ussite pour Phoenix que confirma la pr sence de Jean Puech de la librairie La Touriale qui tint nagu re avec quelques autres la revue SUD sur les fonts baptismaux sous l autorit de Jean Malrieu D cid ment il n est point de hasard J L SOMMAIRE Marc Alyn Anpr UcHETTO Alyn parmi nous Marc ALYN Proses de l int rieur du po me DANIEL LEUWERS Entretien avec Marc Alyn Jacques Lovicai Alphabets d ros BERNARD Mazo Marc Alyn ou La Nostalgie de l absolu SYLVESTRE CLANCIER Marc Alyn Fulgurance et voyance EMMANUEL HIRIART La respiration du symbole Notes sur l uvre en prose de Marc Alyn PIERRE BRUNEL Du Pi ton de Venise au Tireur isol Partage des voix PIERRE DHAINAUT Avril perp tuel de l me JEAN PIERRE CRAMOISAN Petites M ditations de Boh me CRISTOPHE MUNIER De la po sie comme une langue trang re T ric BouceBci Po mes ISABELLE BALADINE HowaALD Tardive ALAIN FABRE CATALAN Proses bor ales JEAN ORIZET Le Ryoan ji jardin secret des signes Le Dandy de Montbrison BERNARD Mazo Retour au silence BENITO PELEGRIN Postlude Quart iers Nord Voix d ailleu
124. onserver la m moire de nos origines nous avions d autres moyens pour cela que reprendre ad vitam aternam sous telle ou telle forme un mot glorieux mais qui deve nait casserole alors que le nouveau titre devait notre id e s ins crire dans cette continuit tout en signalant une certaine forme de rupture d lib r e C est pourquoi consid rant que notre logo fruit des interventions juxtapos es de trois d entre nous et d fi nitivement adopt repr sentait un oiseau volant dans un soleil de flamme que la publication nouvelle prouvait sa capacit rena tre des cendres de la pr c dente que notre jeune doyen F J Temple avait cr en son temps une revue nomm e F nix qu enfin notre ami L on Gabriel Gros qui fut on le sait r dac teur en chef des Cahiers du SUD puis membre du conseil de r daction de SUD nous fit l honneur et l amiti de publier son ultime recueil dans la petite collection SUD Po sie sous le titre flamboyant de Phenix et que ce serait un hommage lui rendre en assurant beaucoup plus subtilement la filiation le r dacteur en chef de la d funte Autre SUD abandonnant son id e d int grer le mot SUD au nouveau titre proposa pour la revue naissante le titre Phenix dans cette graphie puisque c tait pr cis ment une sp cificit voulue par le po te comme nous l apprend Andr Ughetto en sa belle pr face aux uvres compl tes de L G G jus tement parues aux
125. orsqu il songe cet Infortun Pays Puissent elles atteindre leur but avec plus de succ s que les habitants de Schilda Gr ce son art o l irr prochable technique graphique serait vaine s il n avait avant tout un regard particuli rement aff t et plein d une profonde empathie nul doute que le l gionnaire paci fique a atteint son but nous faire partager ses motions de jeu nesse fixer la beaut imm moriale des cultures indochinoises et rendre l hommage du c ur et de l intelligence car le dessina teur ne cesse jamais d tre aussi un anthropologue aux peuples de cette r gion Jean Poncet e Jan Karski le roman et l histoire de Jean Louis Pann Pascal Galod diteurs La parution en 2009 d un livre de Yannick Haenel intitul Jan Karski sonnait comme une heureuse nouvelle Qui en effet se souvenait encore de ce r sistant polonais qui le premier alarma les Alli s sur la mise en uvre de la solution finale Claude Lanzmann avait retrouv sa trace et avait r alis un entretien avec lui pour son film Shoah En 2004 Jean Louis Pann et C line Gervais Francelle avaient fait republier les m moires de Karski Mon t moignage devant le monde histoire dun tat secret chez un diteur confidentiel Cinq ans apr s cette reparution le livre de Yannick Haenel marquait une recon naissance de la figure de Karski Le plan du roman paru chez Gallimard est simple une premi re
126. os e par le lapsus commis par Haenel lui m me dans l exergue de son livre Un vers de Celan ouvre en effet ainsi le roman qui t moigne pour le t moin Or la tra duction correcte est Personne ne t moigne pour le t moin N est ce pas cette hybris avoir voulu tre celui qui t moigne pour le t moin qui vaut Haenel la vol e de bois verts des historiens et de la part de Claude Lanzmann la poix le goudron et les plumes L ouvrage de Jean Louis Pann apporte une pr cieuse contri bution riche d informations d analyses et de documents sur ce Juste parmi les nations dont le nom n est d sormais plus inconnu du public fran ais Apr s avoir r dit les m moires du r sistant polonais en 2004 Pann apporte aujourd hui de nou veaux l ments pour comprendre et conna tre l histoire de Jan Karski Fran ois Bordes e AO Directeur de la publication Jean Charles Lardic CONSEIL DE R DACTION Yves Broussard directeur litt raire Jacques Lovichi r dacteur en chef T ric Boucebci Francoise Donadieu Jo lle Gardes Daniel Leuwers Jean Orizet Jean Poncet Fr d ric Jacques Temple Andr Ughetto Maquette Claire Gaborel Couverture Charlotte Joseph Abonnement 1 AN 4 NUM ROS FRANCE 50 TRANGER 66 R glement l ordre de IHRM PH NIX 4 rue F nelon 13006 Marseille T l 04 91 31 39 31 Fax 04 42 71 86 62 Courriel revuephoenix
127. our la femme de nuit l une fait le lit l autre fait l amour Lune lit le livre et l autre crit Semblable la neige est celle de nuit Plus noire que ja s est celle du jour Ces po mes tendres et virils se rattachent la tradition magni fi e par P trarque et Ronsard Dans Travers e de la nuit la fusion para t totale L un par l autre combl s de sommets et d abimes nous coulons vers la mer nou s comme deux rimes Et la mort quelquefois d une balle perdue accepte de mourir pour rire en l aube nue On sent bien la lecture de ce chef d uvre combien Marc Alyn la plume la fois c leste grave et sensible a su trouver la rose et lor philosophal en transmutant lamour qui a chang sa vie en tendresse et sagesse Fruit d une double exp rience la fois amoureuse et mystique Byblos premier ouvrage constitutif des Alphabets du feu relate un itin raire spirituel conduisant de lamour Amour et des dieux Dieu J avance vers la Mer promise de ta bouche alchimique et c est voyage d initi qui va de Baal au Graal travers d serts et brasiers dans le surgissement de l tre Astart Isis Baalat Dame de Gebal L J Dans la main de Dieu il y a un caillou o nos noms sont crits ainsi qu un jeu de d s qui d plient l infini MARC ALYN N MARC ALYN MA N La boucle se referme et l on voit comment cette chute fait cho celle du Livre des amants o les gisants
128. oyance d effraie travers ent les vivants la vitesse de la lumi re Chacun erre l aveuglette dans son propre myst re et dans un monde multipli Il reste bien peu sur la langue de l alchimiste du go t de divinit ancienne C est il faut en tre conscient le leurre des mythologies dans ces conserva toires que sont les livres dictionnaires inclus Si passe un pressentiment de Dieu c est encore la faveur d une illusion de l t d un faux acquis de l avoir t On nem brasse pas cette aube l si incertaine On ne se confine pas non plus dans un cr puscule qui serait par trop d sesp rant Et c est encore au texte qu on fait confiance l alchimie du verbe l Architexte Marc Alyn reprend le mot de G rard Genette l Architexte toujours futur roul a nt ses voyelles hallucin es comme le furent celles du c l bre sonnet refl tant les lointains sans d serter le proche cursif et solennel dans le vent bouriff Mais que salubre est le vent ce vers de Rimbaud dans La Rivi re de cassis tait celui qu Andr Breton pr f rait C est dans ce vent l que Marc Alyn fait passer le vivant le po te le tireur isol dont ce serait en d finitive le seul et le vrai compagnon PB MARC ALYN ON N PARTAGE DES VOIX PARTAGE DES VOIX N O PIERRE DHAINAUT AVRIL PERP TUEL DE L ME Fabienne Gilles et Nathan Patricia Castex Menier n
129. partie reprend le t moi gnage de Shoah une seconde r sume les m moires une troi si me enfin changeant radicalement de point de vue prend le je de Karski Yannick Haenel revendiquant les libert s de la fiction pr te au r sistant des id es et des interpr tations tr s NOTES DE LECTURES M M NOTES DE LECTURES VA ON loign es de celles de Phomme r el Beau sujet de dissertations de s minaires et de colloques sur les rapports entre roman et his toire Et puis patatras des historiens se cabr rent Annette Wieviorka tira la premi re salve Faux t moignage L Histoire janvier 2010 Puis Claude Lanzmann tira boulets rouges Un faux roman Marianne 23 janvier 2010 d clenchant une pol mique violente et sans merci Le livre de Jean Louis Pann ne mettra sans doute pas fin cette querelle il fournira par contre d indispensables l ments pour conna tre Jan Kozielewski ce r sistant polonais qui prit pendant la guerre le nom de Jan Karski Ancien secr taire de Boris Souvarine Pann reste fid le aux exigeantes le ons du r volutionnaire devenu historien Il traque l anachronisme chasse les erreurs factuelles et d nonce les reconstructions abusives Ici le lecteur trouvera des faits des analyses et des attaques tranchantes contre ce que l auteur nomme une litt rature de ventriloque Lhomme dont parle Pann est bien diff rent de celui de Yannick Haenel Is
130. plus loin dans l absolu que nombre de pri res Il arrive donc que certains textes notamment anciens r duisent la femme un objet de d sir Je pense par exemple l intellectuelle des Cruels Divertissements Cependant l analyse que Marc Alyn fait des cr ateurs et surtout dans ses livres r cents donne une place importante la cr ation f minine par exemple dans son Anthologie po tique amoureuse o plus encore dans ses Approches de l art moderne Il souligne bien s r sa part croissante dans la cr ation contemporaine Au del il voque la f condit la cr a tion f minine ayant ses yeux des caract ristiques sp cifiques et la difficult de la cr ation partag e entre un homme et une femme Son roman Le D placement voque l chec d un couple de cr ateurs le h ros antih ros va presque jusqu au meurtre du moins au meurtre symbolique puisqu il a enferm sa compagne dans un r le de muse Les degr s de l extase que nous avons voqu s plus haut semblent conduire une conclusion plus opti MARC ALYN VA O MARC ALYN N e miste s appuyant sur certaines virtualit s de la tradition sot rique comme la tradition alchimique du rebis androgyne recons titu et chemin vers la pierre philosophale N est il pas significatif que sortent en m me temps chez Phi les derniers recueils de Marc Alyn et de Nohad Salameh Qu on se rappelle cette phrase c l bre du B
131. r Amour A U MARC ALYN PROSES DE L INT RIEUR DU PO ME In dits t 2010 Quand les mots somnambules vont et viennent sur les parvis de la m moire dans l intervalle l entre temps la c sure blouie quel au del s avance leur rencontre avec sa lampe allum e en plein jour comme l Hermite des tarots peine ouverte la fen tre d verse en nos yeux la fra cheur des jacinthes d eau et l or en fusion du soleil alchimiste Le temps pensif sourcilleux fait son bourdonnement de gu pe prise au pi ge d une vitre seul durer parmi tant d ternit s en trompe l il Sur la laisse de mer la frange des grands textes les po tes cheminent laissant la trace de leurs pas au bord de la mar e phosphorescente dans la magnificence tragique de l espace La phrase panoramique remonte ses filets d bordant d archipels de galaxies de brouillons d univers o la mort ne constitue gu re qu une faute de frappe tout d but naissant de sa fin De vertige en voltige du vol plan de l tincelle la respiration glorieuse de la flamme nous progressons ainsi vers les confins trembl s de la parole d pourvus de projet libres dans le temps circulaire faisant halte de loin en loin en de vastes clairi res MARC ALYN Hi N MARC ALYN o0 Comme on provoque par hasard fr lant quelque m canisme invisible louverture d une porte dans l paisseur de la muraille il nous arrivait de fran
132. r si vif en ta poitrine Quelle est une for t palpitante d oiseaux Salut rayonnant pur Adolescent Des montagnes de l Alliance Fr re du faon et de la biche fils du vent Voici r gner les vastes houles de la joie Voici briller au sein de la brume les torches Qui jaillissent de l incendie et de l horreur Pour saluer le jour promis les transparentes Demeures de l homme rayonnant pur le ma tre de l ann e O se l vent ces astres neufs Qui pr sident au si cle vierge sur le monde Quand se parent les fronts d un rayon de ces astres Ils sont baign s par les eaux vives du vrai chant Il en d ferle des cohortes de colombes Qui pr c dent le feu Mais toi tu restes seul immobile Ph nix Diamant sans un reflet et pure transparence Le plus terrible des regards Quand un monde nouveau apprend les lois d Avril Quand l esclave brisant ses cha nes red couvre Les gestes maladroits de l homme libre L G G Novembre 42 novembre 43 Extrait de Phoenix SUD Po sie 1983 PH NIX N 1 N PH NIX N 1 o SAINT JOHN PERSE Amis la route fut longue et br ve o vous avez si fi rement uvr Le temps d un demi si cle consume pour vous l espace d une course all grement courue Et du haut lieu fran ais o vous avez conduit l attelage vous pouvez halte br ve prendre mesure du parcours Des pas de jeunes hommes r sonnent encore au loin qui se sont faits
133. r les grands chemins de l imaginaire Ce voyage initiatique obtenait en 1994 la double distinction du Grand Prix de la Soci t des Gens de Lettres et le Grand Prix MARC ALYN MA MARC ALYN EN de Po sie de l Acad mie fran aise Honneurs qui pas plus que le Max Jacob jadis n ont point interrompu sa qu te L tat nais sant L il imaginaire Le Miel de l ab me constituent comme une seconde uvre encore d couvrir culminant aujourd hui avec Le Tireur isol paru en mai 2010 En prose d importants essais Le Pi ton de Venise Paris point du jour Approche de l art moderne et Monsieur le chat ont d montr la curiosit et l rudition d un auteur toujours pr t faire clater les limites des genres Laissons la conclusion au po te lui m me pour qui Le po me ne s adresse pas l homme social mais la part profonde et nue en nous qui rec le quelque nostalgie de l absolu Je n invente rien j incante Sous la dict e la contrainte D un inconnu qui mhabite Et se repa t de mes craintes B M SYLVESTRE CLANCIER MARC ALYN FULGURANCE ET VOYANCE Le jury du prix Max Jacob d cern au Temps des autres comprenait Jean Cocteau Jules Supervielle Andr Salmon Pierre Mac Orlan Jean Paulhan Jean Rousselot Marcel B alu Cette pl iade d importants crivains du si cle dernier reconna t sponta n ment dans la po sie de Marc Alyn la fulgurance
134. rait t heureux de fonder une Soci t de D couragement de l Escrime Fran oise Donadieu T NOTES DE LECTURES ES I NOTES DE LECTURES En En ROMANS R CITS NOUVELLES L CEil postiche de la statue kongo d Anne Christine Tinel ditions Elyzad Chez le m me diteur Anne Christine Tinel nous avait d j donn un premier beau roman Tunis par hasard dont les quali t s se confirment dans celui ci en forme affich e de roman poli cier si un roman policier se d finit en ce qu il met en sc ne une ou plusieurs morts non naturelles et un enqu teur L enqu teur ici est une femme Anne Cabane qui exerce la profession peu connue d enqu trice de personnalit ce qui signi fie qu elle aide cerner le caract re et le comportement d un accus et du m me coup de la victime La victime c est Emna qui a pous Martin apr s son divorce d avec Lucie celle qu on accuse pr cis ment de l avoir pouss e dans le Rh ne Mais le tri angle amoureux est trop beau pour tre vrai et il s av re que Lucie lisse calme silencieuse que tous d crivent comme une biblioth caire mod le et qui allait prendre le voile n a gu re le visage d une meurtri re Il s av re surtout que le vrai sujet du livre ce n est pas l nigme dont on n aura d ailleurs pas le fin mot mais une autre enqu te que m ne Anne Cabane sur sa grand m re qui vient de mourir et sur ses origines
135. rs GIORGIO CITTADINI Lettres Dibi I5 27 37 AI 47 54 6I 70 73 76 80 84 88 95 97 102 105 113 PH NIX N 1 O INGENIERIE V MAINTENANCE HYDRAULIQUE Vente de mat riels neufs amp occasions Pi ces de rechange et location PERCER CASSER F Montabert Une gamme compl te Fraises Brise roches Godets cribleurs Cisailles Plaques de compactage Pinces b ton hydraulique PROVENCE ALPES COTE D AZUR LANGUEDOC ROUSSILLON ET CORSE IMH ZA de la Plaine de Jouques 519 av du Col de l Ange 13420 GEMENOS T l 04 42 32 15 16 www imh dir com Mise en sc ne Le Festival d Avignon par Jacques Lovichi Papperlapaap spectacle de Christoph Marthaler dans une sc nographie d Anna Vierbrock 122 Germain Nouveau le mendiant magnifique de et par Philippe Chuyen avec Jean Louis Todisco compagnie Artsc nicum 123 La Trag die du roi Richard II de William Shakespeare mise en sc ne de Jean Baptiste Sastre avec Denis Podalyd s 123 Deux spectacles de l Espagnole Ang lica Liddell au Festival d Avignon par Christilla Vasserot La Casa de la fuerza et L Ann e de Richard 126 Festival international de danse de Vaison la Romaine par Fran oise Donadieu Dunas chor graphie de Sidi Larbi Cherkaoui et Maria Pag s 128 Notes de lectures Po sie Juste une pierre noire de Jeannine Baude 132 M ditations des lieux d Adrienne Arth Claude Ber
136. rtant que les rochers Je voudrais pour toi tre comme la mer farouche mais apais e tendre et enveloppante Crois moi elle n est pas nouvelle la r union des choses grandes et infimes gt VOIX D AILLEURS Ww gt VOIX D AILLEURS En IL SILENZIO V nel silenzio oggi Dib l eco di antichi palpiti terso come il vibrare di siringi Il cuore ne toccato e gi sussulta nei labirinti del sogno La tua saggezza m presente ed io ne ho sigillato ogni parola Ma nel silenzio dolcemente franto si stagliano i tuoi occhi il tuo volto saccende d una fiamma tagliente sapre e chiude all istante ogni tua fibra Sale imperiosa la speranza possa tu saldamente un giorno cogliere nell incavo della fronte quel punto che d luce luce e ancora luce IL FISCHIO Nell aria sale il fischio di sirena Fra poco tu sarai lontana tra le certezze delle mura care il luccichio del mare al filo d orizzonte Quante le cose ingrate che ci colsero istante dopo istante mentre il prodigo cuore ci pulsava silente Un senso d incompiuto sale dal giorno che mi lascia Cercher di sentirti qui vicina se ci sfugge anche il sogno LE SILENCE Aujourd hui Dibi le silence bruit d un cho de fr missements antiques clair comme la vibration des syrinx Le coeur en est mu et tressaille d j dans les labyrinthes du songe Ta sagesse est pr sente en moi j en ai scell c
137. s accomplit l extr mit de l effroi Devant le ciel en ab me il lui arrivait de regretter de ne pouvoir marcher sur la t te Il allait devant lui indiff rent absorbant le monde la mani re d un r ve mesure que la lune croissait avec ce trop plein de vie qui le br lait depuis l enfance chaque pas la route s effa ait sous le signe d un adieu l bas corps embourb dans le p ril de la neige Il poursuivait sa marche tenu en alerte avec l inqui tude du gibier nou e au coeur apr s cette ascension irr sistible d boulant sur la pente Dans sa h te port par le courant de tant de pas qui s avancent il gagnait l esquif parmi les chemins d eau dans sa t te r veuse rompant le fil d une blessure obscure Pareil geste contre l vidence des choses suffirait il dire le tourment d une fin de jour qui se retire ne c dant rien sur son clat Il la prenait t moin de sa vie m me cette distance qu il avait gravir moins qu il ne traverse les jours et les heures dans cet trange quipage o l toile innomm e de quelques branches vives fait son lit de silence toujours plus avant comme Lenz qui sen fut par la montagne foulant la neige qui ne tombait pas en terre mais sortait de sa pens e de sa bouche vid e de mots dans l obscurit un soir que le soleil avait sombr Pas lui seulement celui qui parlait en son nom d j s aventurait debout visage effac d
138. s de l infini Puis des pr cipices gigognes nous loigneraient de nous m mes refoul s dans les ultimes retranchements de la dur e travers s de vieux fleuves et de langues perdues MARC ALYN N H MARC ALYN N N Certains garaient leur m moire comme une bille ou une clef oubliant m me d oublier d autres coupables d infid lit l gard de leur propre substance endossaient l apparence des choses des instants des tres rencontr s s veillant alouette squelette scarab e pouvantail au seuil d un champ de bl Seule importait la part r v e de notre vie vaguement clair e par des lanternes d ombre dans les feuilles quand les saisons incestueuses s enchev traient et que l t aux pieds fourchus foulait la grappe rouge sang de l automne Nos yeux nous pr c daient au fond des terriers du sommeil o s entassait un prodigieux butin d images que nos doubles dilapideraient en compagnie d accortes repas seuses toujours dispos es se plier en quatre pour viter de froisser l amour Quelle aube bondissante allions nous rejoindre ou fuir parmi ces lilas de glace et ces amoncellements solennels de blocs de lave noire difiant sans fin d autres ch teaux du Graal Des acc s de solitude nous frappaient au plus rauque des foules Retenu par son filet de voix au dessus du vertige Lazare s mer veillait d arpenter un cadastre exquis dont le d cor en trompe l il n e t pas dup
139. s de crimes Dans cette mer plate comme avec la main Miss Roseway qui se rend Adelaide Vers le Sweet Home au fianc australien Miss Roseway h las n a cure de mon spleen Sa lorgnette sur les Laquedives au loin Je vais me pr parer sans entrain pour la f te De ce soir sur le pont lampions danses romances Je dois accompagner Miss Roseway qui qu te Fort gentiment pour les familles des marins Naufrag s Oh qu en valse lente ses reins mon bras droit je l entra ne sans violence Dans un naufrage o Dieu reconna trait les siens PARTAGE DES VOIX O N PARTAGE DES VOIX O 00 Ce sonnet atypique avec ses fragments de vers entre parenth ses et ses mots anglais crit en vers faux selon la formule de Valery Larbaud et o les h mistiches dansent o la c sure disloque l alexandrin est un des plus singuliers po mes du xx si cle Il est aussi le plus embl matique des Cartes postales ce m me recueil qui aura suffi gr ce Valery Larbaud et L on Paul Fargue faire conna tre Henry J M Levet Les deux comp res sont en effet les d couvreurs du po te Le 28 f vrier 1911 ils se mettent en route partir de Vichy o r side Larbaud pour Montbrison Ils vont tenter d obtenir des parents de Levet lequel est mort en d cembre 1906 l autorisa tion de publier des po mes de leur fils Larbaud a racont ce voyage Parvenus d
140. s l gendaires que la guillotine guettait Dehors l automne cr pitait feu de raisin et de coqs de bruy re l cart des solitudes m taphysiques o les mailles des syllabes capturaient une typographie d abeilles Dans des chambres d pourvues de portes de fen tres envahies par des livres que l ombre seule feuilletait une horloge arr t e demandait l heure au temps sous l il sans tain de miroirs la retraite ressassant les reflets d instants d figur s L effacement incessant du v cu se devinait des alt rations de l agencement des choses comme si la majestueuse ordonnance du monde se r duisait apr s usage de l espace plus ou moins chiffonn Au point culminant de la nuit l insomniaque se laissait couler pic au fond d un mot cueilli au hasard et linfini savangait sous forme d une voyante nue charg e de figues et de p ches dans l aurore couleur d airelle MARC ALYN O MARC ALYN N e Des forces inconnues vivaient notre place respirant Pair occupant l espace L ternit n tait gu re partageuse en ce lieu expos o la po sie aggrav e de marges et de neiges survivait en vendant son sang aux notables des hauts quartiers Tatoueurs de papillons sur croupes ou perceurs d oreilles dans les f tes foraines nous exercions toutes sortes d activit s d une inutilit boulever sante pour joindre les deux bouts en attendant l annonciation L Histoire vestiaire de
141. s quel contexte En mon troite chambre sans porte on y p n trait par la fen tre Reims je brave le froid de l hiver champenois pour ten ter de capturer quelques unes des tincelles que produit le verbe au contact de la dur e lame sous la meule aff ter dans l espoir de loin en loin exauc d acc der au point d incandescence du po me En ce temps l je pose des r ponses comme d autres des questions soup onnant le caract re r versible de chaque pens e Je lis des po tes morts qui m enseignent na tre et auxquels je rends souffle un instant vieux fr res des profondeurs Lorsque le sommeil me terrasse je grince des dents la bouche combl e de mots Je r ve d une po sie verticale toujours en marche et trop souvent mem m le dans le fil de ma phrase guett par quelque n ud coulant invisible et f roce Il m appara t obscur ment que le pr sent n est que le pass de l avenir et qu il convient de bousculer l ordre des chronologies en vue de tirer parti des ressources infinies du temps dix sept ans dans une mansarde exigu de l avenue de Wagram Paris je poursuis le m me combat avec l ange la langue tandis que la pluie roule au dessus de ma t te sur la vitre d un vasistas rouill Je me suis fait quelques amis chez les po tes ils m ouvrent leurs revues me pr tent des livres m encouragent Ils sont pauvres le plus souvent comme je le suis moi m me et nous nou
142. s retrouvons dans les sous sols de caf s inchang s depuis Apollinaire Saint Michel Montparnasse ou du c t du Palais Royal ce sont les catacombes o se r fugient les derniers insou mis d un monde de plus en plus assujetti la dictature de l objet roi et de la d esse Raison ceux qui n entrent pas dans le moule d formant S ensuit la publication de quelques plaquettes puis d un premier recueil Libert de voir et enfin du Temps des autres qu accueille Pierre Seghers et que couronne le jour anniver saire de mes vingt ans le 18 mars 1957 le Prix Max Jacob Je passe ainsi avec la promptitude de l clair de la marge absolue la notori t situation dont je ne profite gu re puisque je dois quit ter aussit t la sc ne la guerre d Alg rie aidant endossant luni forme pour un service militaire d une dur e de deux ans et demi le temps des autres De retour Paris les lauriers sont coup s et les lampions teints seule subsiste la r alit rugueuse treindre voqu e par Rimbaud la fin de sa Saison en enfer Log Aubervilliers dans un immeuble H L M dominant un gris cadastre de rues baptis es par luard en personne son p re achetait lotissait et revendait des terrains l est de Paris de noms de po tes je mesure l tendue de ma solitude et tire les rideaux pour polir les po mes de D l biles parall lement l dification d un roman Le D placement
143. sans rel che ni repentir vers l improbable horizon qui lui faisait signe avec l rosion des mots dans le moindre fr missement de Pair qui emplissait sa gorge La route tait l espoir m me qui le tenait en vie dans cette vigoureuse tension de tous ses muscles qui laissaient remonter en lui le souvenir de ces lieux qu il n avait cess d habiter Il commen ait de l prouver ce mal de la veille cette fi vre blanche qui traversait ses paules et s appesantissait nouveau par vagues sur sa nuque une fi vre qui s agrippait ses yeux noy s de sel sous ses paupi res attisant les feux Il revoyait la blancheur en quilibre dans le silence un rien d illusoire cette sensation de glisser vers des jours calmes et transparents d nombrant d invisibles toiles sous Penche v trement des mots rien d autre que cette fatigue d autrefois qu il semblait guetter au d tour d une phrase plus pr s du corps qui sabandonne NEIGE QUI DURE Dans le murmure sans fin qui tombait du ciel pour s en aller impassible par del les hautes enjamb es de la neige tremblante en ses clats de songe moiti enseveli il lui semblait que le monde n avait d autre destin e tre l suivant la coul e franche des ravins vers le tarissement des ombres Sit t d chir le voile avec son drap de lumi re le masque des flocons dansait le voir ainsi qui tourbillonnait en lui d une si br ve lutte entre les cong
144. sauvages aux oreilles de loup MARC ALYN ON SS MARC ALYN a P Faut il chasser loin de la Gr ce et de tout l espace p n tr de culture hell nique cette d mesure cette hybris qui y tait la fois crainte et d test e Ou au contraire a t on besoin d une telle d mesure dont le po te d aujourd hui serait en quelque sorte le d positaire Marc Alyn n est pas suspect de semblables exc s et surtout pas de ceux qu il arriva Rimbaud d exprimer avec vio lence Il s agit plut t pour lui d chapper l espace cette contrainte de mettre en libert les mots de les conduire vers une nuit blanche qui n est ni celle des Aventures d Arthur Gordon Pym ou du Sphinx des glaces ou encore de la Circeto rimbaldienne dans les IMluminations mais dans une autre Cimm rie situ e aux confins du silence Il se pr sente comme une mani re de chasseur ce tireur isol pr c d de ses mots sauvages aux oreilles de loup en route sur de hauts plateaux ench ss s de neiges d chirantes qui ne sont pas sans rappeler le chaos polaire de D votion donc Circeto des hautes glaces Et son aventure initiatique pourrait tre d si gn e comme l un de ces voyages m taphysiques dont il est question dans le m me po me en prose de Rimbaud aux confins de la parole et du silence la ligne de partage entre un monde et un autre monde qui pour le po te de Charleville ne se situait nullement
145. sent toutes les personnes poss dant le patronyme Martin Des verres de M con sont lich s des cigarettes fum es Des tudiants y sont tabass s par la nouvelle Police du peuple pour une bonne et simple raison ils lisent des livres Pourtant tout le monde le sait Lire peut entra ner des l sions c r brales graves Ma tre de la forme br ve Pierre Autin Grenier nous offre ici quarante sept croquis de la vie quotidienne en bord de Sa ne et ailleurs une poque qui n en doutons pas est la n tre Des chos de Vialatte et de Thomas Bernhard un salut ric Chevillard mais l on pense aussi Orwell Racont s d un ton m lancoliquement badin les faits divers d Anthelme forment un kal idoscope Que le lecteur y jette son ceil Il y verra une certaine image de notre temps avec ses polices nouvelles ses asphyxies et ses censures l espoir aussi malgr tout d une fen tre audacieu sement entrouverte Fran ois Bordes e TUDES ESSAIS ET DOCUMENTS Jorge Luis Borges La vie commence de Jean Pierre Bern s Le Cherche Midi l t 1986 le 24 juin peut tre le bruit a couru que Jorge Luis Borges venait de mourir Gen ve La rumeur tait bien s r infond e Nous tions quelques uns savoir que Borges avait dix mille vies sans cesse r invent es Impossible qu il f t mortel Il NOTES DE LECTURES ES N NOTES DE LECTURES ES OO pouvait la rigueur dispara tre
146. ses C l brer le vivant l coute Aventure de la m moire et porosit de l tre au monde M moire et pr sence L criture fictionnelle de la m moire De la m moire au m morial etc Ce que souligne fort bien en son avant propos qui n est pas aussi fouill soit il qu une pr senta tion du livre mais une v ritable tude le ma tre d uvre Colette Camelin Tant de convergences chez des gens qui ne se sont vi demment pas concert s d limitent en fait le serritoire du po te Si tant est que l on puisse d limiter linfini Il ne saurait tre ques tion en si peu de lignes de faire appara tre toutes les richesses d un ouvrage dont je conseille tr s vivement la lecture non seule ment pour Temple mais pour ce qu il sy dit de 4 po sie Je me contenterai donc d indiquer qu il contient un mouvant mais trop bref pour nos curiosit s cahier de photographies de diverses poques 1930 pour la plus ancienne et surtout car l apr s tout est le coeur de l entreprise et sa justification premi re des po mes in dits d o je tirerai ce fragment de Larzac Enfant berger de mes troupeaux de r ves j allais foulant la folle avoine sur les ardents plateaux d serts o r gne la senteur enivrante des buis J allais travers les cheveux d ange escort de chardonnerets perdu indiff rent aux lendemains Et ceci tir de On Onti Jadis des livres m ont ouvert les portes du
147. sombre sous les feuillages ronds in gaux de lumi re mate mouvants insa sissables mois de Mai Rien sans doute depuis l enfance ne me fascine davantage que cet clat biseaut entrevu tant de fois de tant de fa ons Le sifflement enfil dans lair n est pas diff rent Rien n indique davantage le scintillement qui me hante l oeil comme l ou e cristaux de neige du bracelet offert le moindre de ces mots m enchante I B H t 2008 PARTAGE DES VOIX 00 N PARTAGE DES VOIX OO 00 ALAIN FABRE CATALAN PROSES BOR ALES Extraits Ces lignes de prose extraites d un recueil in dit ont t crites pour saluer la figure de Jakob Lenz crivain pr romantique de langue allemande n le 23 janvier 1751 Contemporain du jeune Goethe il s journa Strasbourg de 1771 1776 Personnage embl matique du mouvement Sturm und Drang Lenz entama apr s sa rupture avec Goethe une vie d errance travers l Allemagne du sud et la Suisse Gagn par des crises de d sespoir il entreprit le 20 janvier 1778 la travers e hivernale des Vosges pour chercher refuge aupr s du pasteur Oberlin Les signes de la folie qui accompagn rent ses pas peu peu allaient le submerger Apr s d autres p riples travers l Europe on le d couvrit mort dans une rue de Moscou le 4 juin 1792 C tait le 20 janvier Lenz marchait dans la montagne Ainsi commence la nouvelle intitul e Lenz crite par Georg B
148. su d une longue r flexion sur la r sistance la guerre et les totalitarismes nourri d une connaissance tr s approfondie du sujet ce livre propose de corriger les erreurs du romancier et de redonner la parole au vrai Karski L action de ce dernier est donc repla c e dans son contexte polonais l auteur insistant en particulier sur l importance du r le de l Armia Krajowa la r sistance int rieure Outre ce travail de contextualisation l ouvrage contient des crits de Karski comme par exemple un article sur la Pologne occup e paru en d cembre 1943 dans La France libre L ouvrage contient aussi une tude de Jean Louis Pann sur la r sistance polonaise La conclusion est une attaque contre la litt rature moisie dont Haenel serait un repr sentant Pour Pann le livre du romancier r pondrait en effet des objectifs id ologiques Il s agirait entre autres de diffuser l id e d une co responsabilit des Alli s dans la Shoah et d imposer ainsi une quivalence entre nazisme et d mocraties lib rales Le passage du roman pr sentant un Roosevelt repu et libidineux indiff rent au sort des Juifs trimbale en effet des clich s d un ge qu on croyait r volu On voit effectivement de quelle vieille corde cette grosse ficelle l serait faite Mais s agit il d un objectif ou d un reflet id olo gique Au del des approximations et des erreurs la question centrale n est elle pas p
149. t avec le monde est de nature clairement rotique MARC ALYN SS O MARC ALYN O Je n en veux pour preuve que ces trois vers qui dansent l or e du matin Le d sir des soleils se concentre en un fruit Et la courbe d une femme endormie Epouse l univers Qu ajouter cela qui est crasant Peut tre ce qu en crivait Sabatier encore lui dans sa monumentale Histoire de la Po sie fran aise aux entours des ann es quatre vingt propos du jeune po te de 1950 Tout ce que souhaitaient les po tes se trouvait l une fra cheur ch re aux admirateurs de Cadou un enthousiasme une joie un souffle un regard neuf sur le monde une diction per sonnelle une mani re de contourner les r miniscences d aller au devant des conqu tes L art tait sans reproche le travail du vers digne des grands artisans la spontan it allant de pair avec une prise de conscience des forces du langage Plus d un demi si cle apr s Le Chemin de la parole c est tou jours et d finitivement vrai JL La Licorne captive f vrier 2010 BERNARD MAZO MARC ALYN OU LA NOSTALGIE DE L ABSOLU C tait au temps de nos vingt ans Notre po sie d faut d tre d j originale baignait souvent dans une lueur cr pusculaire par fois tragique car nous n avions pour la plupart qu une seule perspective celle d tre probablement envoy s en tant qu appel s du contingent en Alg rie
150. taire de lieux est une m ditation sur l criture plus g n ralement sur la cr ation Et au del sur le sens m me de la vie Dans une langue d une rare puret l auteur chante la po sie pour les autres ceux qui y ont droit qu on regarde de loin parce que ce n est pas s rieux ou parce que c est trop s rieux Et semble trouver au moins partiellement la question non formul e une r ponse sous forme d interrogation Fragmentation clats la grenade souvre et laisse voir ses grains de sang Pour que Pers phone revienne consoler Cyb le il lui faut passer de nombreux mois dans la demeure sombre de son poux Faut il donc se renfermer longtemps dans l enfer de soi pour qu enfin l criture explose et offre ses grains juteux M ditation lucide et sen sible sur l obscur de l art en chacun de nous Depuis Lieu des parts que de chemin parcouru par Claude Ber qu on ne pr sente plus jusqu Pareil pour tous Elle y nomme les lieux et prend le paysage bras le corps l eau famili re du lavoir les calades abruptes de l enfance dans ces villages perch s des vall es alpines tout pouse la pente du versant fa ades en biseau des maisons flanc de rocher raidillons plongeant pic brusques d boul es de ravines jusqu en bas dans le coupant en V de la vall e o coule une de ces rivi res torrents V subie Roya ou Verdon dont les torsades serpentent de l nes en cascades jusqu
151. te qui est le chant le plus obscur Dans le secret de notre chair au carrefour Des tempes o la vie change ses monnaies sonores Transparente tait la nuit Une aile de libellule Portant ses ufs d toiles et leur givre Sur le plus mince des tissus Quand se d chire comme un nuage foudroy Le calice le plus altier entre les lis Quand le p trel perce le coeur du vent Monte la plainte de Phoenix au seuil du vol PH NIX N 1 Ww PH NIX N 1 Elle s panouit dans le vent col reux Mais sa corolle est tr s secr te elle est mortelle Et suave pourtant dans le ciel de la nuit Comme un poignard sur du velours La lame longue de la lune Et ces gouttes de cire blonde Qui perlent d une toile morte tumulte qu il faut chanter tumulte qu il faut tisser Nous en ferons le v tement Des paules sans espoir Car il est crit VOUS AUREZ VOTRE DEMEURE DANS LORAGE VOUS N AUREZ PAS D AUTRES PROMESSES QUE CELLES L QUI SE L VENT DANS LA NUIT Voici qu il vient vers nous Phoenix le messager Sans autre escorte que nos cris Et les clairons du vent l agonie bout de souffle Pheenix voici le jour ton fr re retrouv La rose est son bandeau le lys est son p e Le peuple des pis son souffle se dresse Et le rire de l alouette est dans ses yeux Tu foules dans tes pas ou ton vol l herbe haute L clat de tes regards illumine les mers Et ton coeur est l ge
152. ts plus belles que vos jours affir MARC ALYN N KO MARC ALYN US e mait d j Jean Racine lors de son s jour uz tien Effectivement les astres paraissent ici si proches qu on peut ais ment les confondre avec les fruits pendus aux branches du jardin bons cueillir croquer savourer Bient t le d sir me prendra de par tir vers l Orient frugal et princier en qu te d autres vergers d toiles de Venise Babylone Nuit majeure et Infini au del recueils initiatiques cosmiques annoncent l instant fulgurant la r v lation future de Byblos intuition fondatrice de la trilogie Les Alphabets du Feu j ignore alors qu il me faudra payer ce haut moment de cr ation de la perte de ma voix au sens symbolique puis physique du terme Apr s Infini au del commence en effet ce que Bernard No l a nomm la face de silence l envers de la tapisserie verbale r v lant rafistolages mailles perdues tout l cheveau trangleur du fil tors des Parques Durant une longue p riode je lutte pour respirer pratiquant une d s criture tragique cisaillant avec rage les barbel s du discours et me livrant de coupables extr mit s l gard du sacro saint langage la fin de Nuit majeure le labyrinthe s tend et occupe toute la place Quelque chose de blanch tre Lentement chemine ma rencontre dans Infini au del le po te s invente un grand style de silence afin de me
153. ttre aux fers le chant et le forcer par un si haut refus saggraver de sens C est le d but d une glaciation extr me sous un soleil impi toyable dont on trouvera trace dans Douze po mes de l t L affreuse asc se consistait disperser au plus sec du d sert les moissons et les fruits entasser les grains sur le sable laisser les grappes se corrompre deux pas de la soif Comment en sortir sinon par le haut Parvenu au fond du fleuve le noy donne le coup de pied salvateur qui le renvoie vers la surface Pair la clart La biographie int rieure d un artiste est fa onn e de chutes successives qui le d sint grent ou le projettent plus avant Au fond le personnage secret de mon uvre est Lazare deux fois n deux fois mort ayant travers l paisseur terrifiante des t n bres pour ressurgir vivant de l autre c t La d couverte des ruines de la cit ph nicienne de Byblos au Liban m offrira l occasion d une telle renaissance Soudain l bas il fit tr s jour et j apergus depuis les terrasses dominant la mer sur le promontoire des si cles r duits en poudre la vie et la mort faisant l amour au bord d une tombe royale d o mergeait un alphabet miroitant de scarab es Passeur des mots ton crible est une barque semblable la barque des morts Et tu vas travers la grande nuit de l encre Avec ton c ur qui bat dans tous les si cles la fois Le Liban justement
154. u double visage de Janus et que l on pla ait comme viatique sur les paupi res et les l vres des voyageurs de l au del Au sein de l criture cr atrice celle qui ne se r duit pas la relation des faits ou au d veloppement logique de l id e l image repr sente l l ment mobile la surprise blouissante le point de jonction du r seau infini des correspon dances Le po me pr cise Bachelard est essentiellement une aspiration des images nouvelles Sans doute la notion de stup fiant image ch re Aragon et aux surr alistes a t elle fait son temps remplac e par des joints d un autre type mais l on ne sau rait renoncer la libert grande de l image sans risquer de tom ber non dans la prose port e au contraire des altitudes inou es par Breton Gracq Mandiargues mais dans un affligeant prosa sme Au naturel de l image on mesure le niveau du po te sa surface le rapport entre sa base et son sommet pour faire r f rence Char Seule l image port e au rouge lib r e de toute pesanteur insurg e amoureuse permet de br ler les meubles du savoir Votre recueil Le Tireur isol qui vient de para tre cet t chez Phi s ouvre sur une partie intitul e L Aventure initiatique et se cl t sur Rosa alchemica J ai envie de vous demander quelle place occupent dans votre cr ation l initiation et l alchimie Quand il eut
155. uilles de reverdir et aux roses tr mi res de signaler l entr e du royaume et l aube est telle que le premier jour du monde charg e de possibles et du fr missement du temps Les chiens aboient dans le loin tain l oiseau libre de tout r gne senvole dans la clairi re C est ainsi un univers charnel qui est voqu le pain y est odorant l outil familier et le rire de l enfance bruit encore dans l ge maintenant avanc Si la nuit s ouvre au doute et au n ant qui menacent si l espoir bien souvent n est plus qu un ch le d chir accroch au buisson le jour lib re nos pens es et rend l homme et surtout le po te sa t che de guetteur infatigable Port par ses r ves et ses souvenirs lourd de ses attentes il refuse le n ant La mort d un ami le mot n est jamais prononc n est qu une disparition dans l paisseur du temps qui nous absorbera tous Et l ge qui nous rapproche du terme ne tarit pas les d sirs L ge venant l harmonie des contraires rythme ma respiration Il r concilie et l tre alors s prend de toute absence synonyme et c est le dernier mot du recueil de dilection Chaque mot porte chaque recherche typographique importe chaque po me a la pr cision d une pure et la gr ce d une pein ture chinoise R solument l herbe repousse le ciel jusqu aux confins du possible Le temps de la lecture de
156. un sens La qu te ne s arr te pas elle fait partie du simple fait d exister Au bout du compte le roman policier n en est peut tre pas un et l intrigue qu un pr texte cette remont e dans le pass au moment o l avenir s ouvre sur une maternit Et pourtant le texte est bien construit conform ment aux attentes du genre avec des indices lentement donn s des retournements des sur prises c est dans cette impossibilit tre class que r side son originalit L criture elle m me est double tendue sous forme de phrases br ves et de notations qui s puisent jusqu n tre plus qu un mot mais parfois aussi lyrique et ample l image du nouveau moi de la narratrice qui se forme en elle comme le b b dans son ventre En d finitive s agirait il d un roman de forma tion Jo lle Gardes clats d enfance toulonnaise 1936 1952 de Marcel Migozzi avec des dessins de Serge Plagnol G hess ditions collection T moin s La Seule Rescap e de Marcel Migozzi ditions La Porte Yves Perrine diteur M me pour ceux qui n en sont jamais vraiment sortis vient le jour o chacun qu il crive ou pas prouve le besoin de faire retour son enfance pour la fixer d finitivement Aussi empa thique soit on il convient de s interroger sur l utilit qu il y aurait narrer une histoire si personnelle qu elle devrait n int resser que l auteur En chacune de nos enfances
157. un trait de foudre des op ras gothiques usant d une encre jaillie des puits art siens de la nuit Michel Ange composait des Rimes dont les vers taill s facettes s apparentaient au r gne min ral Et j aurai garde d oublier ici telle lettre admirable de Rilke Rodin Et il y a autour de mon c ur un silence profond o se dressent vos paroles comme des statues Si nous nous refusons d sormais s parer les divers modes d expression cr atrice en genres coles ou chapelles c est que nous savons depuis le surr alisme que tout r sulte d une source unique Les Calligrammes d Apollinaire peuvent tre d fi nis comme des dessins r alis s l aide de mots tandis que Michaux invente l alphabet infernal des m tamorphoses et Christian Dotremont le ogogramme J arrive rien je regarde rien encore j insiste une touffe d herbe Jaime les peintres qui coutent passionn ment la respiration de l avenir derri re la porte des couleurs les architectes de l informel et les assassins philanthropes laissant partout leurs empreintes Dans l choppe de l imagier de l imaginaire le monde n en finit pas de se refaire une beaut entre deux ab mes Votre conception de l image Affinit s avec le surr alisme C est par leurs miroirs que les chambres se souviennent des vivants disparus L image et la magie constituent les deux faces d une m me monnaie l as romain souvent orn d
158. us ou moins parodique aim des surr alistes entre le premier et le cinquanti me degr en plein miracle de la multiplication des sens En m me temps qu il rejoint la nuit majeure du symbole le po te chahute donc les mots d ordre C est le travail des po mes en prose et plus encore des aphorismes que de ranimer ternellement la parole seul feu qui nous reste dans la nuit glac e de l esp ce On sait que l un des recueils de Marc Alyn s intitule Le Silentiaire Ce titre un peu myst rieux fait videmment allusion l incipit l atteste Paul le Silentiaire l un des derniers po tes pa ens de l antiquit grecque connu pour ses po mes rotiques mais il faut aussi rappeler que dans l antiquit le travail d un silen tiaire tait d imposer le silence aux esclaves il me semble qu on peut dire sans forcer le texte que l aphorisme sert faire taire le pr t penser le pr t parler le pr t voir Par ailleurs on qua lifie aussi de silentiaire un moine ayant fait voeu de silence on sait que Marc Alyn a d reconqu rir sa voix apr s son cancer du larynx le symbole reste ins parable de la vie force de transforma tion du po me Il s agit de non seulement cr er mais se cr er soi m me au terme d innombrables cruci fictions L homme symbole Le d sir amoureux est chez Marc Alyn consubstantiel au Verbe En effet la volupt communion de l esp ce double m ne
159. ut comme Jean Rousselot eussent pu l dessus dire des choses int ressantes D s ses premiers vers il s est impos par la s ret l accent g n reux et frais de sa diction son mouvante volont de donner la po sie une signification morale crit d ailleurs Rousselot signalant une tendance la fois unanimiste et luar dienne dont il se serait cart penchant vers un onirisme surr a liste et rotique Ajoutons que son action en faveur des autres po tes une forme de g n rosit aujourd hui bien rare dans le microcosme po tique font liti re de toutes ces rumeurs qui rel vent coup s r la po sie nationale ayant t attaqu e aux aubes du stupide et sournois r glement de compte Au reste un po te qui ne porterait pas tr s haut l ambition de la de sa po sie n aurait pas compris grand chose l essence m me de la po sie et ne m riterait pas le nom de po te Robert Sabatier crit citant Mandiargues propos d Alyn Dans une inclination spontan e au mythe et la merveille il a sa musique propre son accentua tion sa tonalit Je n invente rien j incante Sous la dict e la contrainte D un inconnu qui m habite Et se repa t de mes craintes Ce sont l paroles d une orgueilleuse humilit justifi e qui cartent d finitivement toute accusation de vanit La m ta physique de Marc Alyn est aussi est surtout fusion aux deux sens principaux d
160. uve bien s r quelques sc nes de la vie militaire Mais le gros du livre et son principal int r t r side dans la rencontre de Loofs Wissowa avec l Indochine et ses habitants Dans l introduction son texte la fois informatif et profond ment humain Le Sud du sud r dig en 1965 il crit Nul occidental je pense qui sest jamais rendu au Vietnam ne peut s emp cher d tre profond ment marqu par ce pays par l trange beaut de ses paysages autant que par la gr ce et le charme de son peuple Et coup s r tous ceux que cette motion a touch s d plorent sinc rement le sort cruel qui depuis mainte nant plus d une g n ration emp che ce pays de conna tre la paix apr s qu il a t contraint de combattre pour son ind pendance pendant la majeure partie de son histoire Ce livre toutefois n est pas un ouvrage politique Il essaie sim plement de saisir et de transmettre quelques impressions de la beaut de la terre et du peuple du Vietnam beaut ternelle ind pendante des guerres et des r volutions A l instar des habitants de Schilda au Moyen ge qui tent rent d enfermer la lumi re du soleil dans leurs sacs et leurs paniers pour la rel cher dans leur nouvel h tel de ville apr s avoir d couvert qu il tait bien sombre l architecte ayant oubli les fen tres les pages qui suivent essaient de capturer un peu du soleil du Vietnam pour l o on en a besoin c est dire notre esprit l
161. uvrent des paupi res tonn es de curieuses caresses Et l on fourbit des armes quelque part Pour assassiner les oiseaux En 1972 Marc Alyn publie un de ses recueils les plus accom plis Infini au del Flammarion couronn en 1973 par le prix Apollinaire Il y exprime un merveillement continu Je savais le secret les grains et les issues Contenaient l univers Un soup on de pollen lui seul rec lait les espaces les astres Il sy glorifie d Avoir t Un l ment du paysage Ici sous ce ciel telle heure en t d Avoir t L esprit le centre De cet espace entre deux feux Puis se couler dans le silence Pour une ter nit sans yeux Entre 1976 et 1988 quatre recueils suivront avant d arriver l ann e 1991 date laquelle Marc Alyn se lance dans la composi tion d un norme ouvrage po tique qui para tra en 1993 Les Alphabets du feu trilogie d un lyrisme foisonnant Trois recueils qui n en font qu un pour mettre en gerbe les moissons de l clair pr cisait l auteur tandis qu il r sumait son projet tra vers leurs titres Au commencement il y a Byblos le port ph ni cien o voici plus de 3 000 ans furent grav es les lettres m res de notre alphabet Six mill naires de bruit de fureur et de volupt Ressuscitant ce monde englouti le po te entreprend une conqu te magique La Parole plan te il devient le Scribe errant su
162. uyen avec Jean Louis Todisco compagnie Artsc nicum Accessoirement et tr s modestement on put voir chez Marie Jouanic au Centre international de po sie d Avignon anim e par Philippe Chuyen et Jean Louis Todisco une admirable soir e consacr e au tr s m connu po te Germain Nouveau le troisi me homme des trois le v ritable maudit ce que ne furent ni Rimbaud ni Verlaine ses amis proches Quelques po mes bien choisis et interpr t s dans l esprit du po te quelques extraits de correspondance en situation firent de la chose un moment rare Enfin un spectacle d une intense qualit o l on ne perd jamais son temps Le offa parfois du bon La Trag die du roi Richard II de William Shakespeare mise en sc ne de Jean Baptiste Sastre avec Denis Podalyd s On aura beau faire et beau dire pr tendait nagu re la sagesse des Nations avec un humour quelque peu nostalgique on rencontrera de moins en moins dans nos rues et sur nos places les glorieux survivants de la Der des ders On rencontre pourtant parfois pour combien de temps encore quelques survivants du festival d Avignon Du vrai Mentalit d anciens combattants dira t on Presque g teux oui Jen suis j en suis Messieurs sans nulle vanit Il me souvient du Cid de G rard Philipe non sans un peu de Fanfan la Tulipe du Faiseur de Jean Vilar et de sa ritournelle d entr e du Macbeth avec Casar s et Cuny dans le r le titre Cuny vous savez
163. yahoo fr www revuephoenix com Les manuscrits doivent tre exp di s sous forme lectronique accompagn s d une version papier La revue ne r pond pas des manuscrits qui lui sont adress s Les manuscrits non publi s ne sont pas retourn s Les auteurs et PH NIX Imprim en France par Copy Media pour le compte de IHRM Phceenix association loi 1901 D p t l gal janvier 2011 ISBN 978 2 919638 00 0 ISSN en cours Distribution Calibre 27 rue Bourgon 75013 Paris T l or 55 42 12 12 Fax 01 43 29 76 98 distribution calibre calibre fr Au fond le personnage secret de mon uvre est Lazare deux fois n deux fois mort ayant travers l paisseur terrifiante des t n bres pour ressurgir vivant de l autre c t La d couverte des ruines de la cit ph nicienne de Byblos au Liban m offrira l occasion d une telle renaissance Soudain l bas il fit tr s jour et j aper us depuis les terrasses dominant la mer sur le promontoire des si cles r duits en poudre la vie et la mort faisant l amour au bord d une tombe royale d o mergeait un alphabet miroitant de scarab es Passeur des mots ton crible est une barque semblable la barque des morts Et tu vas travers la grande nuit de l encre Avec ton c ur qui bat dans tous les si cles la fois Marc Alyn 7 2919 Prix public 16 8 I ISBN 978 2 919638 00 0 38000 9 6

n°1 - janvier 2011 : Marc Alyn

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