Objet de malheur
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1. lyse MICHON Objet de malheur a question du statut de l objet dans certains tats limites de l analyse d rive parfois vers l id e que l analyste est pris comme objet r el est la m re est l objet Il arrive en effet que l analyste ne se reconnaisse du moins de prime abord ni comme objet de la pulsion bien qu il n y ait pas d objet m me dit r el sans la participation de l investissement pulsionnel ni comme objet fantasmatique les repr sentations dites inconscientes n tant pas rep rables dans un sc nario o l analyste pourrait se retrouver donc non plus comme objet de transfert Il semble ne pas avoir les moyens de se reconna tre comme objet interne la sc ne n offrant pas suffisamment de distinction dedans dehors ou semble n tre que dehors Il ne se reconna t pas non plus comme objet transitionnel puisqu il ny a pas de jeu justement entre un dedans et un dehors qui tous deux participeraient la constitution de cet objet potentiel L analyste en vient donc penser que la transitionnalit est court circuit e absente qu il n y a pas de jeu pas de repr sentation th trale D evant l chec du rep rage d une sc ne interne sommes nous justifi s de penser que nous occupons une place d objet r el ou ne sommes nous pas plut t objet de malheur 82 LYSE MICHON Seront voqu es ici trois situations limites de l analyse qui interrogent le statut de cet objet suppos r el Les manifest2. tre atteint si profond ment dans sa chair dirait Pontalis8 Mais peut tre peut il ainsi rendre compte de l obligation de consid rer l intromission traumatique et surtout du recours au sexuel comme barri re pour paradoxalement se prot ger de cette intromission ou prot ger le sdf tre objet sexuel en lieu et place d tre l objet de malheur ou d tre objet insignifiant Cette sexualisation d fensive pourrait devant l horreur d tre l objet de malheur pousser l analyste un acting sexuel ou pire encore nier l horreur la d nier et ne rien en faire La position de l analyste correspond la fois la sid ration de l enfant et au d sinvestissement narcissique de la m re L analysant nous force alors son insu et c est le cas de le dire notre N 10 T MOIGNER D UNE PRATIQUE 87 88 LYSE MICHON corps d fendant psychiser l impensable et c est en cela que l analyste devient objet de malheur en r p tant le d sinvestissement en r p tant l intromission traumatique du contre investissement mais aussi en reconstruisant ou en construisant cette alt rit ind chiffrable qui si elle peut tre psychis e et repsychis e par les protagonistes de la situation analytique fait de l analyste celui qui fait appara tre l objet O bjet qui est toujours objet de malheur pour toute psych D ans ces analyses ou moments de l analyse o l analyste croit reconna tre qu il
3. sentation au VI Colloque Trans 26 septembre 1997 Pour J Laplanche l intromission est la version violente et d vastatrice de l implantation de la s duction qui structure l inconscient originaire La r volution copernicienne inachev e Paris Aubier 1992 J Andr Aux origines f minines de la sexualit Paris P U F 1995 S Ferenczi Du principe masculin et f minin dans la nature in Journal clinique Paris Payot 1985 p 89 90 J B Pontalis A en lettres capitales in La b tise de l inconscient Montr al Lanct t Editeur et Soci t psychanalytique de Montr al 1996 N 10 T MOIGNER D UNE PRATIQUE 89
4. ations ici relat es peuvent se retrouver ou non chez une m me personne de sexe f minin ou masculin et ont comme particularit de se pr senter comme forme plut t que comme contenu 1 Je pense d abord au statut des s ances qui pour certaines personnes peuvent tre v cues d abord et avant tout comme une action Les s ances ont alors la valeur d une rencontre concr te avoir quelque chose faire avoir quelqu un voir Il y a les jours avec et il y a les jours sans Les jours avec sont des jours vivants les jours sans des jours morts qu il faut tenter de rendre vivants en en faisant le r cit le plus concret le plus chronologique le plus pr cis possible Entreprise vaine qui a pour effet de ne rien communiquer et de laisser l analyste plus mort que vivant 2 Je pense aussi ces r ves ces rafales de r ves amen s en d but de s ances r cit s de fa on appliqu e parfois lus mais jamais rem mor s l occasion d une association ou la faveur du travail analytique Ces r ves se pr sentent comme des cailloux une monnaie d change bout de papier pr par notre attention quelque chose raconter mais qui ne communique rien Ces r ves sont le signe contraire de la capacit de r ver Ici le r ve n advient pas comme objet transitionnel ou dans un espace potentiel Au lieu de l cran du r ve on a affaire un cran de r ves qui prot ge contre l int rieur et peut tre aussi contre l ext
5. es faire effraction traumatiser Troisi me et derni re s ance de la semaine que le contenu soit directement sexuel ou non j prouve une excitation sexuelle dont je ne comprends pas qu elle fasse irruption dans le corps plut t que sous forme de fantaisies de pens es sexuelles Le retour dans mon corps de l effet du discours est pour moi le signe d un retour du cliv un effet de l irrepr sent plut t que le retour du refoul On dirait une s duction agie m me si elle passe par les mots et l insu de la personne qui parle tout comme mon corps agit pour cette personne comme un corps r el qu on d shabille scrute d valorise ou id alise qu on endort ou stimule Tout cela ne parlerait il pas d un exc s du sexuel qui n a pas trouv s inscrire dans la psych sur un mode qui peut faire communiquer les repr sentations Peut on supposer la pr sence chez la m re d un l ment venu bloquer le processus de traduction tant dans son volet liaison des pulsions de l enfant que dans l assistance traduire l alt rit parentale Je ferais l hypoth se d un d sir de mort cliv et contre OBJET DE MALHEUR investi donnant lieu un d sinvestissement narcissique surcompens par un investissement fonctionnel hypersexualis sexualisation d fensive contre la mort peut tre sur le mode de p n trations r elles dans les soins corporels mais donnant lieu de toute fa on une intromission d vasta
6. est pris comme objet r el qu il est la m re n est ce pas lui l analyste qui du fait de l tat limite du fait de ce qui est sollicit en lui de ses propres limites a du mal reconna tre l analysant en dehors de cette r alit le reconna tre comme un objet imaginaire symboliser N est ce pas lui qui prend l analysant comme objet r el et qui n arrive pas lui reconna tre ce qui en est de son laboration particuli re m me si c est par et autour du vide que cette laboration se fait le reconna tre comme objet perdu retrouver le cr er trouver par la voie de l laboration psychique de l imaginaire et du jeu de la traduction refoulement des restes de l inconscient de l autre tranger lui m me comme l autre C est l tranger de l analyste qui doit se penser pour pouvoir penser l tranger de l autre dans l analysant Mais comment s appuyer sur ce qui n est pas nous sur ce qui nous chappe irr m diablement Comment tenir compte du fait qu il y a de l originaire dans l un comme dans l autre sinon comment y aurait il humanit sans une psych aussi peu laborative soit elle Comment tenir compte de ce qu on fait de ce qui n est pas laborable y compris le sexuel qui d sire la mort le sexuel mortif re la violence de mon tranger Le plus de pr sence r clam e l analyste n est pas tant un plus de pr sence l analysant qu un plus de pr sence ce
7. il y a d un c t un infans avec son pulsionnel et sa propension vers l objet et de l autre une m re non moins pulsionnelle Le holding est f minin et masculin en tant que porteur de l l ment f minin pur soit l tre l tre de la m re porteur de la possibilit d une identification primaire la m re qui est condition pr alable l tablissement du vrai self sans en tre l unique condition et en tant que porteur de l l ment masculin c est dire du faire donc du pulsionnel Le maternel qui assure le vital le fait tout autant avec l l ment masculin un faire travers de part en part par le pulsionnel le sexuel et ce qui en est refoul surtout N 10 T MOIGNER D UNE PRATIQUE 83 84 LYSE MICHON ce qui en est refoul de fa on originaire c est dire l inconscient On sait aussi que la m re qui fait plus qu elle n est induit l obligation de percevoir avant d apercevoir au sens de l aperception de s adapter la r alit v cue comme une s rie d empi tements sans aire de repos sans possibilit de recevoir en soi les motions pulsionnelles comme venant de l int rieur Ainsi quand bien m me la demande qui nous serait adress e serait une demande de protection mur mur contre les empi tements de restauration du pare excitation de mise en place de toutes les conditions pour r tablir la continuit d tre tout cela ne peut se faire qu en tentant de fai
8. ions psychiques voire des r vess D evant l excessif de l absence de l alt rit c est toujours le f minin en tant que ce qui est passible qui est atteint traumatis effract et c est l autant le propre de la vie psychique que les conditions de son inaccomplissement ou de ses rat s Face aux traumatismes originaires tous n ont pas la possibilit ou la capacit d laborer psychiquement Certains peuvent avoir acc s au transitionnel s inventer une n vrose cr er et interpr ter cette sc ne originaire D autres ne peuvent qu avoir un accident somatique OBJET DE MALHEUR agoniser psychiquement avec ou sans d sespoir s autocliver et ne pas pouvoir utiliser et symboliser cette absence ou cet exc s Si Winnicott nous rend sensibles l importance pour le narcissisme primaire de l identification l l ment f minin de la m re la m re qui est pour acc der au sentiment d tre J Andr lui nous rend sensibles un ajout essentiel Pour lui tre est une abr viation de tre aim r introduisant le sexuel au c ur m me de cette identification l objet4 Quant moi j oserais ajouter que le narcissisme g n rateur de psychisation est li aussi l identification au sein qui est et qui fait c est dire un sein sexu au sens du refoulement originaire donc un sein qui peut tre porteur d autre chose que d amour le sexuel ne se r duisant pas l amour bien entendu Le sein peu
9. ne circule ces trois cueils limites de l analyse un quatri me pourrait tre envisag soit la fin de l analyse v cue comme la fin de tout la mort hors de l objet point de salut donnant lieu soit l analyse interminable soit des vell it s de suicide jamais apparues jusque l peut tre un accident somatique ou encore un actingout final qui viendrait court circuiter l impensable de la fin Ces actes sympt mes de l analyse qui ne sont pas v cus comme des sympt mes par l analysant peuvent nous amener devoir penser le statut de l analyste comme objet r el les tenants et aboutissants de cette soi disant r alit et ce qui peut en r sulter de psychanalytique On peut alors tre forc d laborer ce qui est adress l analyste comme tant une demande d occuper la place d un objet r el avec un cadre porteur porteur d un holding jadis et toujours d faillant En quoi donner prise cette demande de holding pourrait ventuellement donner lieu une d prise quelles conditions cette position de good enough mother peut donner lieu du psychique du d pla able du transf rable de l analysable Ce sont les questions qui se posent l analyste Quand on compare la situation analytique l aune du paradigme du holding on doit tenir compte du fait que le holding est toujours double et dans les termes de Winnicott f minin et masculin2 Le holding est double parce qu
10. qui nous chappe s absente est tranger nous m mes un plus de pr sence l autre en nous La r alit qu on nous demande de reconna tre c est la r alit de l inconscient en tant qu inconscient de l autre celui du parent comme le n tre Ainsi l analyste OBJET DE MALHEUR de par son propre refoulement ne peut chapper devenir l objet traumatique de la psych l objet de malheur S NOTES 1 2 M Khan De la bonne et de la mauvaise utilisation du r ve dans l exp rience psychique in Le soi cach Paris Gallimard 1976 p 373 383 D W Winnicott La cr ativit et ses origines in Jeu et r alit Paris Gallimard 1975 p 91 119 On a vu plus haut que produire des r ves et avoir la capacit de r ver sont deux choses diff rentes On peut r ver sans jouir d un espace de r ve L laboration est alors ferm e sur elle m me ne communique rien ne s labore pas dans un espace potentiel ouvert sur sa propre dramatisation et cr ation de sa vie personnelle Ajoutons par ailleurs que lorsque la capacit de r ver est pr sente elle peut avoir deux vecteurs Un vecteur r gr dient reconnu au service de la r gression mais aussi un vecteur progr dient c est dire au service de l organisation de l inorganis de la figuration du chaos pulsionnel Le sujet se communique quelque chose lui m me de ce pulsionnel chaotique J Andr L objet mode d emploi pr
11. re taire le pulsionnel de l analyste sans toutefois ne jamais y arriver Alors m me qu on se targue la fa on winnicottienne d tre la nounou ou la good enough mother on ne peut tre au mieux que la bad enough mother parce que grev s de notre propre alt rit nous m mes trang re l inconscient Le holding psychanalytique ne peut tre qu une prise en compte de ce qui est autre en nous de l effraction traumatique que cette alt rit peut repr senter tant pour soi que pour l analysant effraction traumatique qui est d ailleurs le propre de la psychisation de l tre humain L irr m diable b tise de l inconscient fait que l objet est toujours perdu parce qu absent lui m me et l origine du psychique toujours traumatique le traumatisme venant tout autant de la pulsion et de son exigence de travail que de l exigence de travail devant la pulsion de l objet et sa repr sentation inconsciente La b tise ou l absence nigmatique que repr sente l inconscient de la m re ou du parent porteur peut soit donner lieu avec l aide de la m re traductrice au mouvement de traduction et de refoulement des restes et ainsi mettre la psych en branle soit si le clivage domine chez la m re et que l enfant ne peut traduire produire un hors lieu qui donne le sentiment de ne pas exister de ne pas tre r el bien qu une pseudopsych puisse par ailleurs avoir acc s au langage certaines op rat
12. rieur un type d acing out ou plut t d acing in destin masquer l absence d un espace du r ve dans la r alit psychique int rieure D e ces r ves l analyste ne peut rien faire comme s il occupait la place de celui dont la pens e est sid r e devant quelque chose d coder qui exc derait ses capacit s d laboration 3 C est aussi de sid ration qu il est question dans la troisi me forme de manifestation soit le choc post interpr tatif Je pense ces silences de mort qui suivent certaines interpr tations interpr tations qui ne changent absolument rien la direction du r cit qui ne sont pas reprises dans la cha ne associative donc qui leur tour comme les r cits des jours morts et les r ves voqu s plus haut ne communiquent pas Comme s il s agissait d un choc traumatique le sujet s absente n est plus l se dissocie devant des paroles qui ont l effet d une alt rit traumatique l effet d une OBJET DE MALHEUR p n tration d un viol coup d implantation de sens qui dissout l autre Parfois le r cit est repris la virgule pr s o il avait t interrompu et au mieux ce qui est re u est un morceau de voix un morceau de pens e ing r sans tre assimil C est l interpr tation comme objet concret attendu voire d gust pour sa forme plut t qu une interpr tation comme objet transitionnel utilisable objet de pens e qui pourrait faire penser Apparemment rien
13. t aussi tre porteur d un d sir de mort ou d un sexuel mortif re insuffisamment intriqu ou encore d un sexuel dont le caract re disruptif dominerait Je suis le sein peut devenir je suis le sein ha je suis le sein d truit je suis le sein d chet ou encore je suis le sein intromiss Si tre c est dire le f minin pour D Winnicott est condition de possibilit du vrai self chez J Andr c est la passivit originelle de l infans qui vectoris e par la passivit pulsionnelle est reprise dans la f minit pr coce la femme orifice objet d un refoulement tout aussi pr coce et majeur f minit qui doit tre r branl e pour qu il y ait analyse6 Sans la participation de ce f minin c t analysant il ne pourrait y avoir analyse ou alors seulement une analyse de type as if qui fonctionnerait comme une machine J ajouterais qu un type de r action th rapeutique n gative peut tre compris comme r action au f minin qui fait d faut chez l analyste parce qu inaccessible ou cliv L analysant r agit l impossibilit de trouver chez l analyste un tai pour retrouver cette position sans trop d an antissement Du c t de l analyste quelque chose du f minin ferenczien cette fois soit le vouloir souffrir ou le pouvoir souffrir est mis contribution est mis en souffrance pour que s taie sur lui la possibilit pour l analysant de trouver cette po
14. tentialit de base de l branlement pulsionnel rdativement l abri des empi tements pour que la pulsion puisse tre v cue comme venant de l int rieur et s inscrive parfois pour la premi re fois dans un r seau devenu personnel de repr sentations N 10 T MOIGNER D UNE PRATIQUE 85 86 LYSE MICHON Mais est ce possible de partir uniquement de cette position pour que le sexuel retrouve sa capacit d tre transf rable et l interpr tation la possibilit de remettre en mouvement la circulation des repr sentations Ici s impose moi une vignette clinique qui toujours dans l esprit des situations limites de l analyse d crites plus haut a pour particularit de d crire ce qui se passe dans l analyste m me dans son corps plut t que chez l analysant Il s agit dans une analyse de l apparition sporadique mais r guli re d une s quence dans les s ances s quence immuable quant l ordre d apparition des ph nom nes Premi re s ance de la semaine r cit pour rendre le temps mort du pas de s ance du week end aussi pr sent que possible Cela donne lieu un r cit pr cis appliqu qui m endort Malgr tous mes efforts pour rester veill e accrocher quelque chose rien apparemment ne m est communiqu sous une forme psychisable Apparemment Deuxi me s ance hypervigilance compensatoire de ma part tentatives pour faire des liens faire du sens qui m am nent forcer les chos
15. trice Ce contre investissement au lieu de prot ger la psych naissante laisse l enfant aux prises avec l obligation de percevoir avant d apercevoir d investir une r alit plus que r elle et donne lieu une capacit de repr sentation d ficitaire Cette sexualit de forcen qui ne passe pas par un r seau de repr sentations investies d pla ables refoulables et analysables se fait passer pour de l amour La sexualit devient faire du sexe et tre aim devient tre abus tre viol tre intromis Ce sexuel contre la mort ferait retour dans l analyste de trois mani res dans cette s quence singuli re e par un plus d absence s endormir ne plus pouvoir tre partie prenante de cette sc ne de s duction originaire perversifi e tout autant qu tre partie prenante de l absence de signification du vide maternel du d sir de mort sans toutefois pouvoir y chapper e par un plus de pr sence qui ignore sa propre absence traumatique cherche p n trer par des interpr tations pr matur es des mises en place des mises en forme qui ne font que resid rer la pens e et troisi me cas de figure le plus d licat mais peut tre celui qui offre une ouverture l exp rience en s ance d un trouble corporel sexuel retour du cliv dans l analyste qui n a pas le choix alors de se laisser effracter affecter p n trer et laisser ainsi solliciter le f minin avec ce que cela soul ve d angoisse d
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