L`attraction fantôme dans le cinéma d`horreur japonais
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1. Gonthier 1971 Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain 139 Brandon 1978 James R Brandon Form in Kabuki Acting dans James R Brandon William P Malm et Donald H Shively dir Studies in Kabuki Honolulu University Press of Hawaii p 63 132 Costineanu 1996 Dragonir Costineanu Origines et mythes du kabuki Paris Publications orientalistes de France 1996 du Mesnildot 2008 St phane du Mesnildot Les m tamorphoses de Sadako Ring et Kaidan Eiga moderne dans Albert Montagne dir Les monstres du mythe au culte Paris Corlet 2008 p 159 166 Eisenstein 1976 Serguei M Eisenstein Le montage des attractions 1923 Le film sa forme son sens Paris Christian Bourgois 1976 p 15 18 Gaudreault et Gunning 1989 Andr Gaudreault et Tom Gunning Le cin ma des premiers temps un d fi l histoire du cin ma dans Jacques Aumont Andr Gaudreault et Michel Marie dir Histoire du cin ma Nouvelles approches Paris Sorbonne 1989 p 49 63 Gester 2007 Julien Gester Loft de Kiyoshi Kurosawa Les Inrockuptibles n 577 2007 p 128 Gunning 1990 Tom Gunning The Cinema of Attractions Early Film Its Spec tator and the Avant Garde dans Thomas Elsaesser dir Early Cinema Space Frame Narrative London British Film Institute 1990 p 56 62 Gunning 1994 Tom Gunning Cin ma des attractions et modernit Cin ma th que n 5 19942. Une des caract ristiques de l attraction fant me est d agir sur la motricit entrav e des protagonistes aux premi res loges d un spectacle terrifiant Frapp par l avanc e du fant me leur corps tordu entre la tentative de fuir et la tentation de regarder la peur en face perd son quilibre devient quasi invert br Il passe in vitablement de la paralysie du surplace l affolement et se jette par terre en s agitant vainement en se retournant en pi tinant et en rampant Le personnage sous l effet d un attrait Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain 125 r pulsif se transforme comme s il perdait sa condition et sa consistance narrative en s chappant Dans Ju on de Shimizu le gardien de s curit qui a abandonn toute r sistance se voit happ par une forme noire fantomatique qui l enserre l en veloppe et l attire dans un hors champ qu on imagine mortel Le plus souvent la force d attraction du fant me se manifeste sans l ombre d un contact avec les m mes effets mobilit entrav e regard exorbit intelligibilit en suspens Le math maticien paranormal de Ring et l tudiant apathique de Ka ro se ressaisissent ainsi un court instant en croyant que leur apparente rationalisation de la situation va les sauver Ils ont tous deux beau dire J ai compris rien ne sert d invoquer les capacit s d entendement pour viter la chute Le souhait exp
3. The Cinema of Attractions Reloaded Amsterdam Amsterdam University Press 2006 p 309 320 White 2005 Eric White Case Study Nakata Hideo s Ringu and Ringu 2 dans Jay McRoy dir Japanese Horror Cinema Edinburgh Edinburgh University Press 2005 p 38 47 140 CiN MAS vol 20 n 2 3 ABSTRACT Ghost Attractions in the Contemporary Japanese Horror Film Diane Arnaud Over the past ten years the contemporary Japanese horror film has been the site of a return of the ghost film Through close analysis of specific sequences the present discussion approaches this phenomenon by postulating a spectatorial mode of address the ghost attraction This concept takes into account both spec tacular thrills and the special effect of ghostly appearances in the cultural tradition of Noh and kabuki theatre It is linked in cer tain ways independence from the narrative shock effects to the theory of attractions from Eisenstein to Gunning The staging of confrontations and changes of role make the victims take on the part of the viewer in a state of shock Nevertheless these contemporary films also incorporate serial and networked images of ghosts The repetitive nature of the apparitions sug gests a diegetic construction based on a haunting mode of dis appearance and oblivion But does the ghosts field of attraction threaten the identity of the subject in the present day context of the technological circulation of images
4. The appeal of Japanese horror cinema today creates instead a link between aesthetics and history traumas re emerge which are grasped through the visibility of ghosts which have already appeared and disappeared Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain l 4 l
5. s quences sur un mode d adresse spectatorielle l attraction fant me La notion propos e prend en compte la fois leffroi spectaculaire et l effet sp cial de l apparition li la tradition culturelle du th tre n et du th tre kabuki Elle se rattache certains aspects autonomie par rapport la narration motion choc de la th orie des attractions d Eisenstein Gunning La mise en sc ne des confrontations et des d placements fait jouer aux victimes le r le du spectateur en tat de choc Cependant les films contemporains int grent galement des mises en s rie et en r seau des images de fant mes Le caract re r p titif des apparitions implique une construction di g tique sur le mode de la hantise de la disparition et de l oubli Le champ d attraction des spectres menace t il pour autant l identit du sujet dans un contexte o les images circulent par voie technologique Lattrait contemporain pour le cin ma d horreur japonais cr e plut t un lien entre esth tique et Histoire la r mergence de traumas saisie travers la visibilit des fant mes d j apparus d j disparus For English abstract see end of article Le cin ma d horreur japonais a consacr au tournant du si cle dernier le retour en force des kaidan eiga films de fant mes apr s leur d clin la fin des ann es 1960 C est le succ s de Ring Hideo Nakata 1998 en partie li l attrait de son h r
6. Pang de Nakata de Kim Jee woon de Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain l 4 4 Kurosawa trahit les forces int rieures qui traversent la r alit et en d cha nent l ordre apparent Ce qui est boulevers par les modes de pr sence fantomatique c est surtout la mise en images du monde Une distinction pourrait tre apport e entre d une part les confrontations horrifiques frontales d riv es du dispo sitif th tral et appuy es par l tau du champ contrechamp ou par la conversion du plan long et d autre part les r surgences fantomatiques li es aux figures d engendrement des images filmiques Ce deuxi me type d apparition s invente dans la discontinuit du d placement telle avanc e syncop e du ma tre fant me rythm e par des tressautements et des bruits de modem la fin de Kaivo et se rattache un pouvoir ubiquitaire tel celui que poss de la femme fant me dans Loft r apparaissant quasi instantan ment d une pi ce int rieure la baie vitr e la t te renvers e Les effets d inserts vid o neige du g n rique vid o maudite et t l reportage dans Ring ou de double prise de vue tournage en 35 mm et en cam ra DV des m mes plans al atoirement mont s dans Loft d placent la hantise fantomatique du fictionnel au filmique Quand le fant me trans porte les puissances de l image cin matographique dans sa mutation actuelle de l argentique au
7. a d j t propos pour tudier les modes de disparition de la jeunesse par crans interpos s dans Ka ro Arnaud 2007 p 82 89 10 La cassette vid o br l e que les enqu teurs de Ring 2 retrouvent dans la bai gnoire de la journaliste fait trangement songer cette origine perdue de l image reproductible 11 Koji Suzuki l auteur du roman adapt par Hiroshi Takahashi pour l cran s est inspir des exp riences du professeur Tomokichi Fukurai au d but du xx si cle Le principal objet de recherche de Fukurai tait la psychophotographie ou nensha le don d impressionner des photographies par la pens e du Mesnildot 2008 p 161 La r alisation de clich s psychiques pour les photographies des victimes de Sadako qui ont l 38 CiN MAS vol 20 n 2 3 chapp la mort associe la hantise du fant me l engendrement des images et la conception du psychisme en r seau 12 S bastien Jounel 2008 p 151 d veloppe les liens entre la m taphore de l eau et le r seau fantomal Dans chacune des uvres en question le r seau l immensit muette de l oc an du weird Lain de la cha ne maudite Ring de la toile internet Ka ro est voqu par la m taphore de l eau et linternaute ou le vid ophile comme le nouveau Narcisse qui y trouve son reflet 13 La cr ation d un tel fant me se fait d ailleurs en salle de montage quand le journaliste visionne l entretien r alis avec la
8. a shocking collision of film spectator and history where registers of bodily space and historical time are disrupted confronted and intertwined Lowenstein 2005 p 2 Ce qui finit par faire peur dans les films de fant mes japonais ce n est pas tant d tre confront aux sombres histoires des personnages que d entr apercevoir cette Histoire p rilleuse qui se saisit difficile ment car elle oscille entre l clair et l vanouissement Selon la pens e de Benjamin 1971 p 186 Articuler historiquement le pass ne signifie pas le conna tre tel qu il a t effectivement mais bien plut t devenir ma tre d un souvenir tel qu il brille l instant du p ril Les face face avec les fant mes deviennent autrement choquants quand ils risquent de faire s entrechoquer le pr sent et le pass certains moments du d filement filmique sans jamais donner au spectateur l illusion rassurante d une histoire retrouv e Les attractions fant mes sont alors des moments spectaculaires sans fin Universit Paris Diderot Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain l 37 NOTES 1 Pour plus de pr cisions sur la tradition fantastique des r cits de fant mes contes chinois versions japonaises des kaidan th tre kabuki vague cin matographique dans les ann es 1950 et 1960 voir l tude de Max Tessier 1990 p 117 121 2 St phane du Mesnildot 2008 p 161 prolonge le rapprocheme
9. clair s se transforment en aires de jeu et de r ception au d tour des pi ces et des pans de mur La conversion s op re par la r actualisation des conventions de repr sentation th atrale et cin matographique Le num ro de l apparition l attraction fant me se signale syst matiquement par des bruits avant coureurs l instar des trois coups sur sc ne Dans l appartement de l inspecteur Yoshioka le h ros de Retribution Kurosawa 2006 la venue de la femme fant me v tue de rouge est annonc e trois reprises par le fracas d un tremblement de terre Cette perturbation sonore in pr side au r am nagement du lieu quotidien en sc ne de rencontre fan tastique Le plus souvent le pressentiment fantomatique r sulte d une intrusion de sonorit s off notamment dans l univers con u par le compositeur Kenji Kawai Ring et Reincarnation m lant des stridences inhumaines des grouillements affolants Il arrive d ailleurs dans Ju on et dans Ring que ces sons soient di g tis s par leur effet visible sur les personnages qui con tractent leur visage ou se prennent la t te 4 deux mains Un autre l ment bien connu des rendez vous avec la peur consiste Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain 127 faire le noir par le truchement narratif des coupures lec triques Dans Loft l interruption du courant en pleine nuit am ne l crivaine se munir d une lampe torche
10. cours sur la cryptomn sie est interpr t par Kiyoshi Kurosawa qui a t justement professeur du jeune cin aste d horreur La r flexion engag e sur la pr sence d une m moire autre d un mort d un proche correspond en soi la m tapsychologie du fant me dans les crits sur la crypte le deuil et Pincorporation de Maria Torok et Nicolas Abraham 17 Nous avons propos une mise en relation entre les cheveux tomb s au sol comment s lors de la visite du mus e dans Hiroshima mon amour Resnais 1959 et les cheveux envol s de la femme fant me dans Kaidan Kobayashi 1964 En introduisant des motifs trangers chevelure volante visage de pierre la nouvelle fantastique cette adaptation l cran passe par Histoire traumatique du Japon Arnaud 2007 p 118 122 18 Le pika est l expression onomatop ique par laquelle les Hibakusha les rescap s de la bombe atomique d signent le flash de l explosion nucl aire R F RENCES BIBLIOGRAPHIQUES Arnaud 2007 Diane Arnaud Kiyoshi Kurosawa M moire de la disparition Pertuis Rouge Profond 2007 Astic 2005 Guy Astic Voir ou ne pas voir le cin ma fantastique et d horreur dans L a Silhol et Estelle Valls de Gomis dir Fantastique fantasy science fiction Paris Autrement 2005 p 123 137 Aumont 2005 Jacques Aumont Montage Eisenstein 1979 Paris Images Modernes 2005 Benjamin 1971 Walter Benjamin L homme la langue la culture Paris Deno l
11. dos Junko dans une zone interdite l inspecteur Yoshioka dans son appartement finissent par se retourner auto matiquement le temps pour le spectateur de se projeter quelques instants plus loin d prouver de la peur pour eux Leffet cache tte provient galement de la dissimulation totale ou partielle par la concr tude du d cor en int rieur la fillette fant me rampante de S ance 2000 qui met du temps tre vue par la femme m dium hors champ tant qu elle est cach e dans le cadrage fixe du seuil de la porte par la sur l vation du sol par rapport l escalier en ext rieur la femme fant me de Loft 2005 moiti coup e par l arbre lors de sa premi re confron tation visuelle avec l crivaine qui l a plagi e Ici le mouvement du plan un va et vient lat ral occasionn par une chute d objet revient dans laxe de la semi visibilit Entre temps il ny a plus rien voir Le d j l rend l apparition moins choquante mais la pr visibilit va de pair avec l instabilit de la disparition et de la r apparition susceptibles de r introduire la surprise sur tous les bords Dans le cin ma japonais et asiatique par contamination fil mique du nouveau genre autour de 2000 la menace du fant me se remarque dans chaque coin du visible Selon Guy Astic 2005 p 127 le fantastique agirait d s lors l chelle du monde en le d r alisant Lomnipr sence des fant mes dans les films des fr res
12. du th tre n le shura mono r cit de combat met en sc ne le fant me d un guerrier qui raconte ses exploits un pr tre Plus proche des r cents d veloppements fictionnels l cran dans la cat gorie des kyojo mono r cit de femme folle il y a une sous cat gorie celle des shunen mono o la femme folle qui cherche se venger est un fant me C est le shite personnage principal qui narre son histoire au waki personnage secondaire en utilisant diff rents masques expressifs expressions fig es qui impressionnent au cin ma les visages des victimes lors des confrontations fantomatiques La tradition des esprits vengeurs onryou se retrouve galement dans les kaidan histoires de fant mes repr sent es au th tre kabuki la fin de l t Les deux r cits fantastiques majeurs Banch Sarayashiki La maison Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain 121 aux assiettes du quartier de Bansh Okamoto Kid 1925 et surtout T kaid Yotsuya Kaidan Le fant me de Yotsuya Tokaido Tsuruya Namboku IV 1825 constituent des sources dinspiration in puisables pour les adaptations l cran depuis le muet jusqu a nos jours C est Ring le film fondateur du renouveau cin matographique de l horreur qui se rattache le plus cette tradition Le trajet du fant me sortant d abord du puits pour surgir d une t l vision symbolise l volution que Nakata impose au
13. inspir e de ce montage des attractions L analyse de Jacques Aumont avait d j pris soin d indiquer une double origine cette conception d une part un manifeste th orique pour des moments de per formance int grer la mise en sc ne th trale d autre part le go t prononc d Eisenstein pour les formes de spectacle plus agressives cirque music hall baraque de foire Aumont 2005 p 67 En vue d clairer l attraction par l horreur il 122 CiN MAS vol 20 n 2 3 importe surtout de prendre en compte une autre tradition spec taculaire qu voque le th oricien russe le th tre du Grand Guignol de Paris La force de la pression sensorielle et psy chologique exerc e sur le spectateur se per oit travers diff rentes atteintes corporelles truqu es sur sc ne o on arrache un il un acteur ou bien on ampute un bras ou une jambe sous les yeux m mes du public Eisenstein 1976 p 16 Et justement dans le contexte du kabuki japonais l horreur th trale n a jamais t en reste Les pi ces de fant mes jou es autour de l O bon la f te des morts appartiennent au style aragoto dur oppos au r alisme du style wagoto souple par l usage de masques de maquillage et par l intervention fracas sante du surnaturel Vextr me stylisation du th tre kabuki a impos le recours des keren c est dire des techniques de repr sentation et de jeux sophistiqu e
14. moyen fort connu du hors champ et de l ellipse si bien que l attention se d place de la recomposition narrative au d voilement spectaculaire C est le cin ma de Shimizu qui expose le plus ouvertement pareille fa on de faire les choix de narration sont mis au service de la r it ration sans myst re aucun Il s agit de d couvrir chaque fois un peu plus de la sc ne originaire celle d une repr sentation int grale du face face plut t que de suivre la trame du r cit somme toute secondaire dans la mesure o celui ci sert de pr texte aux r p titions spec taculaires R p ter le proc d de l attraction fant me implique de faire varier certains param tres entre l unique et le multiple le lieu de la hantise le moment de la confrontation l identit de l 28 CiN MAS vol 20 n 2 3 la victime la figure du fant me Dans Ju on The Grudge l exergue informe le spectateur du caract re forc ment r p titif voire infini de la mal diction n e de la ranc ur ou de la col re d un tre assassin Les premiers plans si peu nettement d finis qu une impression de salet recouvre leur apparition voquent grand renfort de d cadrages tranchants et de faux raccords coupants au point d ensanglanter les corps une sc ne de tuerie peu rago tante La maison o le meurtre de la femme possi blement infid le et de son jeune enfant a t commis par un mari jaloux devient le principal th tre de la te
15. p 129 139 Gunning 2006 Tom Gunning Attractions How they Came into the World dans Wanda Strauven dir The Cinema of Attractions Reloaded Amsterdam Amsterdam University Press 2006 p 31 39 Hand 2005 Richard J Hand Aesthetics of Cruelty Traditional Japanese Theater and the Horror Film dans Jay McRoy dir Japanese Horror Cinema Edinburgh Edinburgh University Press 2005 p 18 28 Jounel 2008 S bastien Jounel N o Narcisse et l oc an du r seau les outils de communication dans le kaidan eiga contemporain dans Antoine Coppola dir Cin mas d Asie orientale Paris Corlet 2008 p 149 155 Kurosawa 2008 Kiyoshi Kurosawa Mon effroyable histoire du cin ma Entretiens avec Makato Shinozaki Pertuis Rouge Profond 2008 Lowenstein 2005 Adam Lowenstein Shocking Representation New York Columbia University Press 2005 McRoy 2005 Jay McRoy Case Study Cinematic Hybridity in Shimizu Takashi s Ju on The Grudge dans Jay McRoy dit Japanese Horror Cinema Edinburgh Edinburgh University Press 2005 p 175 184 Strauven 2006 Wanda Strauven Introduction to an Attractive Concept dans Wanda Strauven dir The Cinema of Attractions Reloaded Amsterdam Amsterdam University Press 2006 p 11 27 Tessier 1990 Max Tessier Images du cin ma japonais Paris Henri Veyrier 1990 Tomasovic 2006 Dick Tomasovic The Hollywood Cobweb News Laws of Attraction dans Wanda Strauven dir
16. qui produit l effet d une rampe d clairage pour clairer et d signer la possible sc ne d apparition La th tralisation de la rencontre conna t parfois un mode op ratoire entrelac au r cit tels le rituel de la vid o pour Ring et la connexion au site pirate dans Kairo Veux tu rencontrer un fant me Les jeunes Tokyoites se retrouvent par ennui par solitude suivre un mode d emploi et am nager eux m mes le spectacle de leur effroi en scotchant une porte avec du ruban adh sif rouge Une fois ce rideau de th tre contemporain arrach les diff rents lieux urbains d saf fect s se voient r investis pour rejouer la m me sc ne Sont peu peu divulgu es les tapes qui aboutissent la disparition des individus justement par la multiplication des confrontations En effet l exception notable du premier Ring de Nakata qui retarde jusqu au d nouement certes suivre dans Ring 2 l apparition en chair et en os de Sadako la plupart des kaidan eiga modernes reposent sur une succession d exhibitions fantomatiques Attractions en s rie et images en r seau Sans aller forc ment jusqu annuler l effet de suspense et la recherche d intelligibilit la mise en s rie des attractions fant mes cr e une sorte de suspension dans la logique narrative en renouvelant intervalles r guliers l effet de surprise D j le fait de r p ter la sc ne d horreur active le jeu du montr et du cach au
17. Article L attraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain Diane Arnaud Cin mas revue d tudes cin matographiques Cin mas Journal of Film Studies vol 20 n 2 3 2010 p 119 141 Pour citer cet article utiliser l information suivante URI http id erudit org iderudit 045147ar DOI 10 7202 045147ar Note les r gles d criture des r f rences bibliographiques peuvent varier selon les diff rents domaines du savoir Ce document est prot g par la loi sur le droit d auteur L utilisation des services d rudit y compris la reproduction est assujettie sa politique d utilisation que vous pouvez consulter l URI https apropos erudit org fr usagers politique dutilisation rudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif compos de l Universit de Montr al l Universit Laval et l Universit du Qu bec Montr al Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche rudit offre des services d dition num rique de documents scientifiques depuis 1998 Pour communiquer avec les responsables d rudit info erudit org Document t l charg le 16 novembre 2015 06 54 Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain Diane Arnaud R SUM Le cin ma d horreur japonais contemporain a provoqu depuis dix ans un renouvellement du genre des films de fant mes Lauteure aborde ce ph nom ne en se penchant par l analyse de
18. CiN MAS vol 20 n 2 3 succession d attractions quand elle donne forme et sens la r p tition Dans le kaidan eiga contemporain la hantise fantomatique renvoie ce n est gu re un myst re la reproductibilit tech nique des images et aux r seaux de t l communication t l phone t l vision Internet C est Ring qui a consacr la propa gation de la mal diction par la diffusion de la vid o sur les crans domestiques suivi de Ka ro qui a orchestr l invasion fant me en passant par le Net La mise en s rie des rencontres fantomatiques co ncide avec une conception de l histoire en boucle un circuit de disparitions plan taire chez Kurosawa un r seau de mal diction infinie chez Nakata Les tentations et tentatives pour interpr ter de tels r cits insistent sur la place de l individu somme toute difficile trouver dans une soci t satur e d images L orientation sociologique du discours porte sur une sp cificit japonaise du tiraillement psychique entre int gration inconditionnelle au groupe et affirmation de son individualit Jounel 2008 p 153 ou prend un tournant mondial et post humain Eric White 2005 p 40 qui s appuie sur les travaux de Baudrillard et de Deleuze donne un sens la s rie des Ring en d passant la logique du sensationnel et du surnaturel pour la compr hension de l histoire travers l indication donn e par le fant me de Ryuji son ancienne pouse Reiko po
19. e de trouver un refuge illusoire dans une institution psychiatrique comme la fin de Reincar nation et de Ring 2 Sans nier ces interpr tations sociologiques des films il importe de s attacher davantage la persistance du spectaculaire qui ne cesse d tre reconduit par les renou vellements des fant mes l image Au dernier plan de Ring 2 une victime de Sadako trahie par un journaliste qui ma pas copi la VHS revient en fant me vengeur le cheveu tombant et l il rageur tapie dans le flou de l arri re plan elle a justement Pair d tre une image vid o persistante D ja la fantomatique sc ne cran de l attraction La relation intime tiss e entre r seau de fant mes et circuits d images intervient aussi au fur et mesure du film selon une autre acception de l apr s coup celle du d j l Formes fluctuant entre la pr sence et l absence les fant mes des kaidan eiga contemporains contrairement aux revenants sont per us comme pr alablement existants l image dans l image Lappa rition a lieu sur diff rents espaces de repr sentation les sc nes am nag es dans les recoins des lieux fictionnels les crans cr s par les surcadrages de moniteurs ou les inserts vid o plein cadre Les fant mes vengeurs sont souvent l image des reflets la myst rieuse femme en rouge n arr te pas de se signaler travers les miroirs dans Retribution la blanche Sadako appara t d abord r
20. efl t e sur le poste de t l vision dans Ring M me teints les crans rendent visible le fant me soulignant par ce biais une troite connexion l engendrement r ciproque entre l image du fant me et les images du film d j apparues d j disparues Dans Kairo la menace fantomatique qui a investi le Net fait d ailleurs se rallumer l ordinateur off dans le dos de Kawashima provoquant un r veil et le faisant sursauter puis paniquer face aux images secondaires naissantes Les fant mes de Kurosawa l 32 CiN MAS vol 20 n 2 3 survivants du pass coexistant avec un pr sent l agonie ont toujours t d j l pour qu on se retourne sur leur passage Arnaud 2007 p 115 C est son cin ma qui expose avec le plus d insistance les diff rentes manifestations de cette pr sence paradoxalement non spectrale Dans Ka ro S ance Retribution le d j l fantomatique se d cline sur tous les fronts du cin ma comme pour signifier une persistance perceptible sur fond d angoisse sourde jeu de cache cache avec l invisible hors champ dans le champ montage du retournement au moyen du champ contrechamp ou dans le cadrage Le choix bazinien de d coupage d fendu par le cin aste consiste repr senter les v nements d cisifs dans la longueur du plan Cela donne lieu des mises en lumi re plus ou moins effrayantes de femme fant me tapie dans ombre au fond des pi ces Les personnages cadr s de
21. ent des traces d un pass catastrophique qui fait difficilement et effroyablement retour La rem moration se trouve en effet entrav e par les probl mes mn siques des personnages l amn sie chez Kurosawa des h ros de Retribution et de Loft qui ont oubli leur passage Pacte meurtrier ou ferm les yeux sur le crime des autres mais aussi la cryptomn sie chez Shimizu des r incarn s de Reincar nation qui sont hant s par la m moire des morts enfouie en eux et ramen e leur conscience par le r ve et l hallucination Toute fois progressivement le montage d images mentales se d tache dune subjectivit d sign e et laisse la voie libre des croyances multiples envers les d sordres visuels La tendance dans ces films plus r cents qui consiste encha ner les faux r veils la suite d intrusions fantomatiques r ellement cauchemardesques soul ve de nouveau la question de l attraction en s rie La d motivation de l intrigue confirm e par le caract re toujours opaque de l histoire de vengeance personnelle finalement d terr e Ring Retribution Loft ou d abord expos e Ju on se voit doubl e d une perte de rep res temporels et identitaires Le spectateur lui m me frapp par la r currence des chocs a tendance oublier l effroi des premi res fois se substitue une horreur du pass manifest e par le bouleversement de l ordre chronologique et par une temporalit d s lors possible
22. er le cin ma des attractions comme un mode d adresse au spectateur pris dans le contexte historique de la modernit Il a r cemment insist sur l apport de la pens e d Eisenstein tant au niveau formel qu id ologique pour saisir les diff rents enjeux dans la compr hension de la r ception spectatorielle Gunning 2006 p 31 32 6 Les f tes estivales O bon sont d di es la m moire des morts Selon Costineanu 1996 p 411 le r pertoire des mois de juillet et d ao t tait d sign durant l poque Edo sous le terme bon ky gen Ces pi ces taient destin es rafra chir le spectateur mizu ky gen pi ces eau v ritable kaidan mono pi ces fant mes et adauchi ky gen vendettas Ces l ments de l O bon sont associ s dans Ring par la c l bre formule sonore d crypt e sur la cassette vid o jeux d eaux spectres en vue 7 Tomasovic 2006 p 315 sest tourn vers Spiderman 2002 et Spiderman 2 2004 de Sam Raimi pour tenter de d signer les nouvelles lois de l attraction que proposent les blockbusters am ricains en entrela ant diff rentes formes spectaculaires 8 Wanda Strauven insiste sur l motion choc d apr s Eisenstein dans la d finition des attractions en reliant les trucs du Grand Guignol aux exhibitions des mutilations corporelles occasionn es par des accidents de la route dans les films des premiers temps 9 Ce terme qui associe fant me et atomisation
23. face face entre les humains et les spectres La plupart des kaidan eiga contemporains l instar des r cits tra ditionnels associent l apparition du fant me un dessein de vengeance ce qui rend leur manifestation des plus mena antes L effet voulu se r alise sans d tour les victimes se retrouvent de la s rie des Ring celle des Ju on de Shimizu en passant par Ka ro mortes d effroi apr s avoir t terrass es par un regard insoutenable Dans le film de Nakata surgit aux yeux du pro fesseur de math matiques m dium de surcro t la tant attendue Sadako lh ro ne spectrale de Ring Le d placement surnaturel de la femme fant me depuis le puits sur l image vid o jusqu sa sortie de la t l vision s envisage d s le d part comme un trajet contre nature Limpression de d sarticulation saccad e que provoque cette avanc e impitoyable r sulte de la technique du backwards action selon les secrets du hors cadre r v l s par le 124 CiN MAS vol 20 n 2 3 cin aste bonus DVD Canal Vid o 2007 Pour que l in version du d filement ne saute pas aux yeux et que l effet d tranget de ce mouvement aberrant proche de la gestuelle du But garde son myst re le cin aste insiste sur la n cessit de l entra nement physique pour l actrice et danseuse Rie Inou qui interpr te Sadako La direction chor graphique accompagne galement la premi re apparition d une femme fant me sous les yeu
24. genre Sadako relie le kaidan eiga classique l poque moderne du Mesnildot 2008 p 160 Une telle pro position s explique par la reprise de situations narratives comme lorsque dans Banch Sarayashiki Okiku la servante assassin e par son maitre sort du puits devenu son lieu de s pulture en spectre vengeur La ressemblance v tement blanc souill cheveux d tach s ceil dilat entre Sadako l h ro ne de Ring la fille d une voyante qui a t enferm e vivante dans un puits et Oiwa l h ro ne de T kaid Yotsuya Kaidan l pouse d figur e d un samoura qui l a tu e pour pouvoir se marier la fille d un riche seigneur s av re des plus frappantes si on a l esprit l adaptation filmique de Nobuo Nakagawa 1959 Ce type de rapprochements pourrait tre syst matis mais plut t que de relever les circulations de motifs dans lunivers fantas tique des kaidan il s agit ici de caract riser les nouvelles formes d attraction des films de fant mes japonais contemporains en rapport avec les effets sensationnels du th tre Les exhibitions horrifiques sur sc ne sont fondamentalement li es la pens e du cin ma des attractions Lattraction se con oit chez Eisenstein comme un moment suffisamment fort et agressif du spectacle pour qu il devienne autonome et chappe la logique de l action La th orie du cin ma des attractions pens e par Gaudreault et Gunning d s 1985 s est
25. iduelle des personnages toujours menac s de se d sincarner pour que les fant mes se r incarnent ici pr cis ment leur place Les films de fant mes japonais imposent quasi syst matiquement une logique de transsubstantiation la fantomisation des vivants mort par effroi dans Ring et Ju on disparition par devenir tache dans Kairo correspond la mat rialisation des spectres palpabilit des fant mes dans Kairo remodelage plastique des traits de Sadako partir du squelette dans Ring 2 Dans Reincarnation un tel change n en passe plus par le face face mais par le face sur face assimilant les formations identitaires 4 une mise en boucle d images visages Dans ce film est galement actualis un mode de retournement du d veloppement narratif consistant 4 doubler l horreur du pr sent par l horreur du pass Un tel tour de magie provient de l effet d clencheur de la projection cin matogra phique dans la conduite du r cit C est en effet la projection fortuite dans une salle des films super 8 du meurtrier l poque des faits criminels qui pr side la reproduction de la version originale par des personnages fant mes remis en sc ne dans l h tel maintenant en ruine Le montage altern devient un montage g n rateur un montage en r seau des images du pass projet es puis retourn es au pr sent D s lors la mise en s rie des apparitions fantomatiques proc de t elle encore d une l 30
26. ion fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain 12 au cin ma contemporain s est effectu jusqu maintenant surtout vers le cin ma spectaculaire les blockbusters hollywoo diens riches en effets sp ciaux et m me de recr er l instar des phantom rides r actualis s par Spiderman les sensations fortes des parcs d attractions Cependant toujours selon Gunning 1990 p 61 les prouesses du cin ma la Lucas Spielberg Coppola d apr s sa propre expression ne s apparentent qu de timides h riti res des attractions foraines des premiers temps puisque leurs effets ne sont que des attractions assagies et con tr l es La dimension d attrait visuel ne suffit pas couvrir l tendue esth tique des attractions qui comporte depuis Eisenstein un l ment d agressivit dans l adresse au spectateur It goes beyond or even against a simple process of appealing to the taste of the public Strauven 2006 p 18 Alors faire peur La persistance des attractions aurait davantage lieu pour un cin ma ancr dans une tradition th atrale qui comporte un double effet spectaculaire et horrifique De choquer horrifier il n y a qu un pas celui des d marches fantomatiques du cin ma japonais D marches r flexives et conventions spectaculaires La dimension agressive de l attraction intervient lors de mo ments r currents dans le cin ma d horreur japonais contem porain les
27. jeune femme qu il a trahie La tentative d effacer la preuve de sa l chet meurtri re se voit contr e par une r sistance de l image D s lors un ph nom ne de va et vient incontr lable du d filement accompagn d une d coloration jusqu au noir et blanc fantomal transforme la repr sentation de la femme alors vivante morte depuis en image fant me maudite rabattement des cheveux en avant cr ation d un regard monoculaire fatal 14 Kiyoshi Kurosawa 2008 p 26 s exprime en ces termes J essaie de montrer les v nements d cisifs en un seul plan comme par exemple le fait qu un fant me tienne debout un endroit Le rapport Bazin au sujet de la repr sentation fantas tique des fant mes demanderait tre approfondi notamment partir de la contri bution de Daniel Morgan The Afterlife of Superimposition colloque Opening Bazin Yale University 2008 15 L analyse de The Eye fr res Pang 2002 par Guy Astic d veloppe la notion d image panique celle que per oit l h ro ne du film apr s l trange recouvrement de sa vision Cette image souvent d cadr e tronqu e laissant beaucoup de vide dans le champ oblige regarder aux marges du plan nous entra nant dans une vision au bord du gouffre comme pench s sur l entrouvert Astic 2005 p 127 Pareille esth tique pourrait tre le point de rupture de l attraction fant me 16 Dans le film de Takashi Shimizu le conf rencier du
28. l que Gunning 1990 p 59 le con oit se dispenserait il de cr er des personnages avec des motivations psychologiques ou des personnalit s individuelles Le r cit de fant mes ven geurs de Reincarnation r alis par Shimizu va assur ment jusqu g n rer des personnalit s multiples la croyance m ta physique en la r incarnation sert de pr texte une conception Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain 129 du personnage fant me Plus pr cis ment les onze victimes le barman la femme de m nage l pouse la petite fille la poup e nucl e etc sauvagement trucid es par un instituteur tr s perturb lors de ses vacances familiales dans un h tel ressem blant trangement Overlook Hotel de Shining Kubrick 1980 ne cessent d appara tre le teint gris Phabit us et la gestuelle apathique aux yeux de plusieurs humains terroris s Ceux ci sont enlev s un un leur existence r elle et emmen s sur le lieu du crime o ils rejouent avec une pantomime macabre l horrible agonie de ceux qui les hantent et qui se sont de fait r incarn s en eux la suite de cette chor graphie d une seconde mort automatique la re possession des corps suicid s des vivants par les corps ab m s des fant mes donne lieu des effets sp ciaux apparition de veines artificielles sur un teint de marbre vert puis morphing Pareil spectacle r duit n ant la psychologie indiv
29. ment traumatique Le trauma r v l par le retour persistant du fantomatique serait l arri re fond historique des attractions fant mes r p tition L acc s cette dimension pour le spectateur ne passe pas pour autant par l histoire individuelle l identification tant comme on l a d j vu entrav e par la d psychologisation des personnages dans le dispositif attractionnel Cependant le rejet en bloc de la perspective psychanalytique exprim par White soucieux de marquer la correspondance actuelle entre le kaidan eiga et la soci t post humaine ne permet pas d avancer dans la compr hension singuli re de la peur du Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain 135 pass quand il affirme Sadako s emergence from a well of forgetting cannot finally be explained as the return of the repressed in the sense of an unresolved trauma that has endured in the unconscious waiting to be exorcised by means of a therapeutic catharsis White 2005 p 40 Les commentaires de S bastien Jounel 2008 p 154 exposent davantage la complexit des processus psychiques en jeu dans la r ception de tels films Les fant mes r v lent l existence d une autre strate de r el qui fait retour g n ralement un v nement traumatique individuel refoul qui a par la suite une port e collective Ainsi il per oit Pembl matique Sadako la fois comme la personnification d un pass remo
30. misation par la circulation de motifs entre lunivers fantastique et la r alit historique poussi re des corps em preintes charbonneuses au mur cheveux noirs des femmes tomb s au sol Dans Kairo la ressemblance entre les taches l 36 CiN MAS vol 20 n 2 3 laiss es par l vaporation des protagonistes apr s l effroi du face face et les empreintes des corps atomis s sur le lieu du d sastre l instant m me de l explosion nucl aire ne peut chapper m me aux spectateurs lointains Seulement linter pr tation implacable fond e sur le trou noir laiss par un pass catastrophique est une signification encore trop pleine pour les films de fant mes de Kiyoshi Kurosawa Ses uvres n imposent pas un devoir de m moire en r f rence Hiroshima Mais elles retiennent le pouvoir d an antissement du pass et le diffusent en pointill selon la double temporalit du pika entre l instant et Pa venir Arnaud 2007 p 123 Le pr sent se voit d chir entre la m moire d un v nement pass et l anticipation d une retomb e Il ne s agit donc pas d un sens cach que l on devrait historiquement rechercher mais bien d une peur prouver Lowenstein s est justement attach d apr s la conception benjaminienne de l Histoire et de l all gorie tudier les moments all goriques qu il d finit en fonction de leur r ception Let me define the allegorical moment as
31. nt en termes de r flexivit Oiwa l gue Sadako son v tement blanc souill ses cheveux d tach s et son il dilat Mais plus encore ce que Nakata a retenu de son pr d cesseur Nobuo Nakagawa s av re la mise en abyme du spectre comme image cin matographique 3 Adapt d s le muet Daisuke Ito 1928 cette pi ce de kabuki a t port e l cran plus d une dizaine de fois depuis la Seconde Guerre mondiale notamment par Kinoshita 1948 et Nakagawa 1959 Voir les remarques de Kiyoshi Kurosawa 2008 p 16 20 sur les diff rentes versions de ce r cit fondateur et les choix de mise en sc ne pour l apparition des fant mes 4 Le r cit de Gunning 2006 p 31 qui remonte jusqu aux multiples origines du concept mentionne les discussions qu il a eues avec Adam Simon alors en poste Harvard avant de se tourner vers une carri re de cin aste notamment en r alisant le documentaire The American Nightmare 2000 sur le cin ma d horreur am ricain des ann es 1960 et 1970 au sujet de la mani re dont ce genre s adressait au spectateur 5 D s la conf rence de Cerisy en 1985 Gaudreault et Gunning 1989 p 59 caract risent le syst me d attractions monstratives autonomie monstration spec taculaire contexte des attractions foraines en r f rence l analyse quAumont a propos e de l attraction chez le th oricien russe Gunning 1994 p 133 134 prolonge cet h ritage th orique pour pens
32. ntant la surface et comme l incarnation d une puis sance globale Les circuits et les r seaux construits par la r it ration de la vengeance brouillent l identification d un traumatisme individuel sans pour autant dicter un devoir de m moire collective Le mode de rapprochement entre le cin ma d horreur et le traumatisme de l Histoire tel qu Adam Lowenstein Particule dans Shocking Representation 2005 nous permet de sortir de cette double impasse m thodologique dans le champ des tudes du Trauma Cinema calque psychanalytique entre les modes de repr sentation et les processus psychiques d une part opposition thique entre r alisme et modernisme pour I irre pr sentable du trauma d autre part Les films d horreur s imposent de fait comme les uvres privil gier pour tudier le plus inti mement possible dans un contexte culturel sp cifique le lien entre le cin ma national et le traumatisme historique Les films de fant mes japonais rappellent avant qu on les oublie nouveau parce qu ils auront disparu ou parce que nous les aurons fuis les ravages de Histoire et les catastrophes naturelles qui ont touch le Japon tremblement de terre de Tokyo destruction de la ville par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale explosions nucl aires d Hiroshima et de Nagasaki La peur de la fantomisation renvoie et ce d s les kaidan eiga de l apr s guerre la crainte d une retomb e de l ato
33. num rique a t il encore le pouvoir de nous faire peur Si on en croit certaines r actions critiques l effroi continue d uvrer notamment par le dou blement des vues dans Loft Depuis Kairo et ses spectres baudelairiens tout de susurrements plaintifs et de contours vacillants dont la cam ra pousait les vues subjectives on n avait rien vu au cin ma d aussi glacant que ce regard sans foyer Gester 2007 p 128 N oublions pas de plus que la mise mort des victimes de Sadako 4 la fois prolonge la croyance en un regard qui m duse et active la m fiance devant une image qui tue les plans fixes des visages horrifi s et renvers s sont alors expos s leur support photogrammatique origine bient t perdue par un flash revenant au n gatif d velopper Lattrac tion fant me repose donc sur cette r v lation que le fant me est l image de l image sous toutes ses formes et ses formats Le y rei vengeur dans Loft femme per ue dans la profondeur du champ a une apparence fuyante son corps est peu peu perc de trous qui le font dispara tre vue d il Cette vanescence du l 34 CiN MAS vol 20 n 2 3 corps fantomatique qui a pourtant tangiblement exist l cran renvoie aux formations imaginaires d une m moire oublieuse Attraction et rem moration p ril de l Histoire Ce mode de pr sence entre le d j apparu et le d j disparu serait li l inscription au bord de l effacem
34. o ne Sadako qui est l origine d une telle r mergence Lampleur du ph nom ne se signale par deux modes d exten sion D une part on remarque une prolif ration au del du Japon de films d horreur de fant mes apr s 2000 en Asie avec par exemple The Eye des fr res Pang 2002 Tha lande Memento Mori de Kim Tae young 2001 Cor e du Sud et 2 s urs de Kim Jee woon 2003 Cor e du Sud et jusqu aux tats Unis avec les remakes des films d horreur japonais de Hideo Nakata Ring et Dark Water Takashi Shimizu The Grudge et Takashi Miike La mort en ligne D autre part Pen gouement du public japonais a donn lieu des formes de d clinaison audiovisuelle diffusion en direct to video recours animation notamment avec la s rie Lain adaptation en s rie t l visuelle de Ring et La mort en ligne Ces modes de circulation ne seront pas davantage pr cis s car c est la recherche d explica tions esth tiques et culturelles l origine d un tel attrait pour les images de fant mes japonais qui motive la pr sente tude Seront privil gi s certains films des cin astes nippons qui ont contribu la renaissance du genre Hideo Nakata Ring 1998 et Ring 2 1999 Takashi Shimizu Ju on The Grudge 2003 et Rein carnation 2005 et Kiyoshi Kurosawa de Ka ro 2001 Retribution 2006 L analyse de s quences d apparition va d abord montrer que les confrontations visuelles avec la nou
35. pantins avides de voir et vid s de leurs forces Leur corps est plaqu contre le mur le long duquel ils glissent pour se retrouver assis par terre face au spectacle qui les attire et les aimante Toyama peut alors se 126 CiN MAS vol 20 n 2 3 relever et quitter des yeux le contre champ horrifique et flou La fuite du personnage sa sortie de sc ne n est possible que parce qu il y a eu relais spectatoriel Ces s quences de confrontation fantomatique font jouer tour tour aux diff rents personnages le r le du spectateur pour relayer l effet de l attraction La situation de la victime dans les films d horreur irr sistiblement attir e par une menace alentour renvoie la posture du spectateur de cin ma qui peut lui m me difficilement chapper ce qui l agresse audiovisuellement Cependant dans les films japonais tudi s la mobilit entrav e et la modification de la position des victimes rev t une dimension r flexive particuli rement frappante par rapport au dispositif attractionnel l effondrement physique du person nage correspond l effacement de son maintien psychologique au profit d une posture spectaculaire l int rieur du huis clos horrifique la maison hant e de Ju on Shimizu 2003 ou de Loft Kurosawa 2005 les Zones interdites dans Kairo Kurosawa 2001 l h tel maudit dans Reincarnation Shimizu 2005 A annonce du danger ces lieux de la hantise fanto matique sordides et mal
36. rim par le personnage et le spectateur de comprendre l intrigue ne tient pas le choc de la confrontation travers pareil d saveu de Pin tellect l attraction se r alise alors pleinement Car ce qu il y a saisir dans l attitude des h ros immobilis s et sid r s par une terreur spectrale c est qu ils sont avant tout au spectacle un spectacle qui les cloue sur place Seul un tour de passe passe comme dans Ju on permet d op rer une sortie in extremis L ancien inspecteur de police Toyama revient f brilement sur le lieu du meurtre sanglant et de la hantise vengeresse En montant les escaliers comme attir par un in vitable effet de r p tition il est confront l effroyable apparition de Kayako la femme tu e par son mari qui avance vers lui quatre pattes sous une forme hybride entre le fant me et le monstre D s lors ce n est plus le m me homme qui va p niblement regagner le premier tage en rampant Assailli par des tremblements convulsifs cras par la plong e mena ante poursuivi par les horribles crissements osseux il finit les jambes nou es la t te toute retourn e plat ventre en crise d affolement face l imminence du danger C est alors que les deux enqu teurs en service font leur entr e dans la cage d escalier pour le sauver en fait pour prendre sa place Ils se trouvent tr s vite captifs d un cadrage rapproch pris de panique au point d tre immobilis s tels deux
37. rreur Les fan t mes de Kayako et Toshio ne manquent cependant pas d appa ra tre sous diff rentes formes ombre rampante chat etc selon les possibilit s surnaturelles offertes par la tradition folklorique des yokai cr atures fantastiques du spectre au monstre dans les lieux de vie et de travail de ceux qui ont r ussi fuir la mai son hant e Les manifestations de la ranc ur du spectre se d placent ainsi hors les murs car la mal diction poursuit jusqu l ext rieur les visiteurs qui se sont chapp s Ce n est autre que le passage d une victime une autre qui motive le d coupage du r cit en chapitres pr nominatifs de Rika Kayako Len cha nement des attractions fant mes suit une chronologie d sor donn e laissant le choix au spectateur de r tablir la lin arit de l histoire ou d attendre la prochaine apparition horrifique Ce type de construction fait cho au syst me des monstrations attractives Gaudreault et Gunning 1989 p 58 dans lequel la pr dominance du mode spectaculaire sur l absorption narrative est justement assur e par la stimulation directe du choc ou de la surprise Gunning 1990 p 59 Le statut des personnages relais des spectateurs pendant les face face horrifiques se con oit d s lors plus globalement l chelle de la fiction par rapport un dispositif spectaculaire Le cin ma de fant mes japonais l instar du cin ma des attrac tions te
38. s telles que le hayagawari changement rapide de costumes et le honmizu jeu d eaux sc nique Un livre en quatre volumes publi s en 1858 et 1859 illustre 342 techniques de keren dont le d guisement en squelette le flottement pour les fant mes le saignement d une blessure Brandon 1978 p 119 Dans la pi ce 76kaid Yotsuya Kaidan Oiwa le fant me vengeur qui joue du sabre revient sous forme spectrale en apparaissant en lair dans une lanterne Hand 2005 p 23 C est le parall lisme entre les keren du th tre traditionnel japonais et les effets sp ciaux du cin ma d horreur contempo rain d j propos par Richard J Hand qui rattache les apparitions fantomatiques la th orie des attractions L quiva lence entre les trucages perceptible lors des d placements fantomatiques sur sc ne et l cran provient de leur vis e commune qui est de faire sursauter le public dans des moments spectaculaires irrationnels Hand 2005 p 23 L effet d agres sion et de d stabilisation d signe ici de fait un champ d exten sion et d expansion pour le concept des attractions au del d une d limitation historique Et d ailleurs selon le souhait de Gunning 1994 p 131 dans Cin ma des attractions et mo dernit les attractions constituent un mode visuel d adresse au spectateur et existent dans d autres p riodes que celle du cin ma des premiers temps Le prolongement de cette th orie Lattract
39. tomisation Dans ces moments de terreur r p t s le champ d apparition et d attraction du personnage fant me se confond avec le devenir des signaux audiovisuels vid o t l phone portable cran d ordinateur L av nement d une sc ne cran de l attraction nous conduit interroger l identit du sujet dans un contexte o pr domine la circulation techno logique des images La compr hension de l attraction fant me en tant queffet spectaculaire pendant la projection entra nera de par le mode de visibilit des fant mes d j apparus et d j disparus une r mergence des histoires traumatiques pass es Lesth tique de l horreur japonaise contemporaine reposerait en fin de compte sur une rem moration subite au cours du d fi lement des images de l Histoire et de ses dangers Attraction th trale et exhibition horrifique En premier lieu l attraction exerc e par les fant mes se comprend par rapport une tradition th trale des apparitions spectrales Dans le contexte culturel japonais le lien entre le fantomatique l horreur et le spectaculaire remonte justement la repr sentation th trale des r cits fantastiques Les tudes men es par Richard J Hand 2005 et St phane du Mesnildot 2008 clairent cet h ritage pour les films japonais contempo rains en insistant sur la circulation de motifs litt raires et visuels provenant de la richesse du r pertoire Parmi les cinq cat gories
40. ur sauver leur fils on saisit la fin de Ring que la seule fa on de ne pas mourir l image consiste passer une copie de la VHS selon un principe de relais ad vitam aternam Si on poursuit la r flexion de White la vengeance de Sadako entrerait dans une nouvelle logique culturelle du simulacre dans laquelle les copies de copies ne cesseraient de varier en fonction d un original perdu La prolif ration des simulacres travers les m diations technologiques confronterait alors individu une alt rit post humaine m me d alt rer son identit d en d placer constamment les contours l image des formations floues sur les photographies des victimes de Ring 2 C est davantage ce second volet qui sous tend son discours avec les hypoth ses ayant trait aux photographies mentales ou aux exp riences sur les transferts d nergie psychique The great collective psychotronic apparatus of contemporary information Lattraction fant me dans le cin ma d horreur japonais contemporain l 4 l technology ceaselessly reconstitutes individual identity White 2005 p 46 Le sens de la r p tition tel qu il est comment apr s coup par White et Journel correspondrait la d stabili sation sociale et psychique de individu l re actuelle Face la perte de sa psychologie propre le personnage fantomis N o Narcisse pris dans un flux d images sons reproductibles ma certes parfois d autre choix qu
41. velle g n ration de spectres impliquent un mode particulier d adresse spectatorielle l attraction fant me La mise en sc ne des d pla cements fantomatiques dans les sc nes d apparition fait jouer aux victimes de mani re tr s frappante le r le du spectateur en tat de choc La notion d attraction fant me que nous proposons se con oit d s lors partir d une vis e sensationnelle l effroi spec taculaire et d un dispositif th tral l effet sp cial de l apparition Elle se rattache certains aspects de la th orie des attractions telle quelle a t instaur e par Eisenstein et reprise pour le cin ma des premiers temps par Gaudreault et Gunning autonomie du spectacle par rapport la narration production d une motion choc insistance sur la performance physique L attraction quexercent les fant mes japonais ne peut se comprendre que si Pon part de la tradition spectaculaire des apparitions spectrales de la sc ne l cran dans le contexte culturel du Japon Cependant les kaidan eiga contemporains int grent leur mise en sc ne des proc d s relatifs la mise en s rie et la mise en r seau des images de fant mes ce qui les distingue des kaidan eiga classiques Le caract re r p titif des rencontres fantoma tiques recr e on le verra une autonomie relative par rapport 120 CiN MAS vol 20 n 2 3 la narration partir d effets spectaculaires impliquant hantise et fan
42. x d un jeune Tokyo te dans le Ka ro de Kurosawa La d marche ralentie et cass e donne l impression qu un zombie de l univers contestataire de Georges Romero de La nuit des morts vivants la Chronique des morts vivants a pris des cours de danse contemporaine pour mieux fondre sur sa victime passablement t tanis e Un tel travail fait cho a la distinction nonc e par Eisenstein 1976 p 17 au sujet des performances physiques sur sc ne le truc est Poppos de lattraction qui est unique ment bas e sur la r action du public Leffet sp cial ne suffit pas pour d finir un moment attractionnel Dans Retribution de Kurosawa aussi la chute pic de la femme fant me sur la terrasse du balcon prolong e par un vol horizontal de sa simple robe rouge au dessus des immeubles tokyo tes l apparente un superh ros suicidaire et vanescent De telles envol es qui m nent l abstraction du corps fantomatique ont t obtenues par des acrobaties physiques renvers es et des fonds num riques incrust s Linspecteur Yoshioka comme tout spectateur interlo qu face la sc ne regarde la robe rouge flottante s loigner dans le ciel de plus en plus ombrag en s accrochant aux bar reaux de l escalier o il est assis Pair la fois surpris et sonn Le mouvement aberrant des corps fantomatiques japonais est d autant plus attractif qu il comporte un effet de d stabilisation agressive en contrechamp
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