Quelle équité des parents face à l`école ? Inégalités de partenariat
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1. 19 20 et 21 novembre 2008 Pierre P rier Professeur de Sciences de l ducation Chercheur au CREAD Universit Rennes 2 Pierre perier uhb fr Quelle quit des parents face l cole In galit s de partenariat et sentiment d injustice La notion de partenariat entre les parents et l cole a pris forme dans les ann es 1980 et na cess de se renforcer depuis au moins dans les textes et intentions affich es par les acteurs institutionnels On notera ainsi pour la p riode la plus r cente que coop rer avec les parents et partenaires de l cole fait partie des dix comp tences que doivent ma triser les enseignants arr t du 28 d cembre 2006 Une circulaire 25 08 2006 insiste sur le renforcement de la communication de l cole en direction des familles jusqu voquer l id e de contrat pass avec elles dans le cadre des programmes personnalis s de r ussite ducative Ce volontarisme politique s inscrit dans un contexte de lib ralisation croissante de l offre scolaire assouplissement de la carte scolaire banalisation du recours au secteur priv strat gies de communication et d excellence des tablissements qui vise accorder une place toujours plus grande aux familles tant dans le choix des tablissements ent rinant ainsi les in galit s que dans leurs relations avec les agents de l institution Une telle logique d ouverture drap e la r ciprocit des int r ts2. galit s entre les familles partenaires comp tentes pour les unes distantes et d missionnaires pour les autres Depuis quelques ann es la question de la justice l cole offre un renouvellement de la probl matique des in galit s scolaires ou plus exactement de leurs cons quences mais elle se consacre essentiellement au point de vue des l ves et des enseignants Derouet 1993 Meuret 1999 Bressoux amp Pansu 2003 rarement sinon de mani re indirecte celui des parents Or selon notre hypoth se le partenariat anim des meilleures intentions secr te un sentiment d injustice chez les parents les moins accultur s au monde scolaire et pourrait rebours des intentions affich es creuser la distance avec l cole au risque de compromettre les chances des l ves qui d j en avaient le moins Se pose d s lors la question des principes de justice pour une coop ration quitable 1 Ce qu tre partenaire veut dire attentes normatives de l cole et construction de la figure du parent d faillant L invention relativement r cente et la promotion d un mod le de partenariat par l institution scolaire consistent d velopper un type de rapport avec les familles qui en r alit sollicite les parents afin de pr venir de r guler et r parer si besoin les scolarit s Il s agit notamment suivant l id e d un soutien mutuel entre les familles et l cole de parvenir ce que l enfant se
3. sistance sur le mode d une lutte pour la reconnaissance Honneth 2002 Face au jugement n gatif de l cole les parents adoptent des comportements tactiques sur un mode r actif et d fensif mais non strat gique et programmatique Certeau de 1990 Dans cette configuration leur loyaut envers une institution qu ils respectent en observant une attitude de bienveillance distance volue vers des attitudes de r sistance sous les formes principalement de la protestation ou du retrait Dans le premier cas la r action ne s exprime pas publiquement par une prise de parole individuelle ou collective protestataire ou revendicative laquelle ils ne sont Notions que recouvrent la prise de parole et la d fection analys es dans A O Hirschman D fection et prise de parole Paris Fayard 1993 Colloque Efficacit et qut en ducation 6 13 cole inteme do TUBO ESS 19 20 et 21 novembre 2008 gu re pr par s la diff rence des parents des classes moyennes et sup rieures plus rompus ce type d intervention Dutercq 1995 Les classes d favoris es n ont pas n cessairement le pouvoir et la possibilit de rendre public leur sentiment d injustice car leurs modes d expression et de protestation ne sont pas librement accessibles mais d termin s par les rapports de domination dans lesquels ils s ins rent Honneth 2008 De ce point de vue le mod le du partenariat qui en appelle l entente et a
4. La d couverte Kellerhals J amp Coenen Huther J Modak M 1988 Figures de l quit La construction des normes de justice dans les groupes Paris PUF Kherroubi M dir 2008 Les parents dans l cole Paris Eres Lyotard J F 1983 Le diff rend Paris Editions de Minuit Meuret D dir 1999 La justice du syst me ducatif Bruxelles De Boeck Universit Payet J P 1994 L cole l preuve de la r paration sociale la relation professionnels public dans les tablissements scolaires de banlieue Revue fran aise de p dagogie n 109 p 7 17 P rier P 2003 Le m tier d enseignant dans les coll ges et lyc es au d but des ann es 2000 Vanves Les Dossiers n 145 P rier P 2005 Ecole et familles populaires Sociologie d un diff rend Rennes PUR Rawls J 1997 Th orie de la justice Paris Points Renault E 2004 L exp rience de l injustice Paris La d couverte Schnapper D 1996 La communaut des citoyens Paris Gallimard Colloque Efficacit et qut en ducation 12 13 A Colloque international LI Les ai Ecole intern da TURO 19 20 et 21 novembre 2008 Schwartz O 1990 Le monde priv des ouvriers Paris Puf Colloque Efficacit et qut en ducation 13 13
5. au risque de leur stigmatisation sous la figure du parent d faillant ou d missionnaire La norme d galit sous jacente au mod le du partenariat pr suppose des parents en capacit d endosser le statut et les r les attendus face l cole Elle peut rapidement appara tre en contradiction avec les logiques des familles plus ou moins loign es des modes de communication de l institution scolaire La question de la coop ration en situation in gale interroge par cons quent non seulement son efficacit mais son quit au regard de formes et des normes de relations appropriables par une partie seulement des familles les plus accultur es au monde scolaire En d autres termes le partenariat semble ne s adresser qu un type de parent au d triment d autres qui non seulement ne b n ficient pas de l offre institutionnelle en la mati re mais peuvent appara tre comme d sinvesties au regard des attentes normatives sinon prescriptives de l cole Car lorsque le partenariat s institue en norme la distance ou le silence risque d tre interpr t comme le signe d un manque d int r t ou d un d faut de responsabilit parentale alimentant de la sorte les pr jug s portant sur les familles d missionnaires Les difficult s particuli res que rencontrent les familles populaires faire entendre leurs voix et critiques dans un rapport asym trique comme le signale le recours la convocation o elles subi
6. des deux parties contraste fortement avec les processus observ s dans les rapport entre les parents et l cole qu ils se traduisent par l accentuation des processus s gr gatifs induits par les in galit s d acc s l offre par le creusement des disparit s de performances entre tablissements ou au travers des difficult s persistantes dans les relations avec les usagers les plus loign s culturellement de l cole Dubet 1997 P rier 2005 Kherroubi 2008 Colloque Efficacit et qut en ducation 1 13 coleinieme derUBO ER 19 20 et 21 novembre 2008 C est ce dernier aspect qui retient particuli rement notre attention dans une perspective d analyse des in galit s des familles face au mod le du partenariat et de ses effets aupr s des acteurs les moins conformes la figure du parent d l ve attendue et reconnue par l institution scolaire La r flexion propos e s appuie une enqu te r alis e ces derni res ann es aupr s de familles ouvri res et issues de l immigration et dont les principaux r sultats ont t d velopp s ailleurs mais elle en propose une relecture sous l angle particulier du manque reconnaissance et du sentiment d injustice prouv s par une partie d entre elles sans tre publiquement exprim L analyse du caract re normatif des cadres de la relation et de la communication entre les familles et l cole d voile des implicites et impens s qui sont la source d in
7. l cole pour les familles qui en sont culturellement plus loign es Conclusion Le sentiment d injustice des parents face l cole travers notamment les in galit s d acc s au partenariat ou de jugement sur leur non implication ne se comprend qu en rapport avec d une part le principe d galit comme id al des soci t s modernes et d autre part le poids scolaire dans la d termination des destins et le devenir de chacun Or les enqu tes sur les relations entre cole et familles conduisent s interroger sur l int r t du partenariat pour les parents qui en sont les plus loign s et sur le risque engendr par ce qui est per u parfois comme un d faut volontaire de coop rer avec l institution scolaire et ses agents Si la finalit du partenariat consiste am liorer les chances scolaires des l ves et tout particuli rement de ceux qui en ont le moins le doute subsiste quant l efficience d une politique et d actions dont les effets incertains m ritent un examen plus serr et une volont prudente de renforcement d une logique de rapprochement d voilant des in galit s source d un sentiment d injustice chez une partie des parents Des formes diffuses de souffrance se nichent dans cette impossibilit de dire une exp rience n gative pour les individus les moins conformes au langage institutionnel au risque d aggraver une position d invisibilit qui les prive d un statut de partenaire et les enferme dans
8. l institution scolaire et ses agents de la pluralit des contributions des parents c est dire des formes diff rentes d investissement et d appropriation des dispositifs Les ignorer c est contribuer juger normativement des contributions rapport es un statut et ses obligations aff rentes contenues dans l id e du parent d l ve En effet les contributions ont un sens et une port e diff rents selon les individus et leur statut La pluralit des formes de participation et d investissement des parents interroge sur ce que l institution et ses agents identifient et reconnaissent effectivement comme signes de partenariat mais aussi ce faisant de tout ce que les sch mes institutionnels de perception et d appr hension excluent Un tel processus entretient nombre d ambigu t s sur la mani re de statuer de ce qui rel ve de la juste contribution des uns et des autres c est dire sur la possibilit de tracer les fronti res de l change permettant d attribuer la responsabilit l une ou l autre des parties engag es Leur appr ciation repose sur des normes de justice variables car les parents ne proc dent pas la m me valuation de leur contribution ni de ce qu ils re oivent Le principe de justice consiste tablir une correspondance non entre l acte et une norme de r f rence mais entre les acteurs et leur contribution Un troisi me principe de justice repose sur l id e d une configuration
9. un rapport de domination Renault 2008 La r habilitation de la parole des parents les moins dot s en ressources adapt es pour acc der au statut valoris par l institution scolaire pose alors l enjeu de la reconnaissance de leur formes d action et d expression tant individuelles que collectives Colloque Efficacit et qut en ducation 11 13 19 20 et 21 novembre 2008 Bibliographie Boltanski L amp Th venot L 1991 De la justification Paris Gallimard Bourdieu P amp Passeron J C 1975 Les h ritiers Paris Editions de minuit Bressoux P amp Pansu P 2003 Quand les enseignant jugent les l ves Paris Puf Certeau de M 1990 L invention du quotidien T1 Arts de faire Paris Folio Derouet J L 1993 Ecole et justice Paris M taili Dubet F dir 1997 Ecole familles le malentendu Paris Textuel Dutercq Y 1995 Une partie in gale Les interventions publiques des parents d l ves Politix 31 pp 124 135 Felouzis G Liot F amp Perroton J 2005 L apartheid scolaire Paris Seuil Glasman D 1992 Parents ou familles critique d un vocabulaire g n rique Revue fran aise de p dagogie n 100 p 19 33 Goffman E 1986 Stigmate Paris Editions de minuit Hirschman A O 1993 D fection et prise de parole Paris Fayard Honneth A 2002 La lutte pour la reconnaissance Paris Cerf Honneth A 2008 La soci t du m pris Paris
10. conforme au r le d l ve et que les parents adoptent de leur c t les dispositions et le code de bonne conduite qui les institue comme parents d l ves Glasman 1992 Les parents sont donc invit s sur le mode d un traitement individualis se comporter comme des alli s selon une En particulier dans P rier P Ecole et familles populaires Sociologie d un diff rend Rennes Presses Universitaires de Rennes 2005 Colloque Efficacit et qut en ducation 2 13 cole inteme derUBO ESSes 19 20 et 21 novembre 2008 forme associative consistant d sormais faire avec Payet 1994 en compl mentarit et sous le contr le des enseignants Pour autant qu il b n fice d un pr jug favorable et suscite une adh sion spontan e qui peut tre contre le partenariat le partenariat con u comme d finition conjointe des objectifs et des moyens mettre en oeuvre pour les atteindre n en reste pas moins complexe dans son application et incertain voire paradoxal dans ses effets D ailleurs un constat r current se d gage des enqu tes aupr s des enseignants selon les tablissements qui montre que le partenariat est plus d velopp l o il est jug moins n cessaire et plus lacunaire l o il appara t indispensable dans les contextes de l ducation prioritaire notamment Ce bilan paradoxal interroge non le principe des relations construire entre les parents et l col
11. du partenariat au plus pr s des sp cificit s des territoires En effet les contrastes sociologiques tant de plus en plus marqu s la logique du libre investissement des parents dans le partenariat s av re non seulement in gale mais source d injustices scolaires et sociales La prise en compte des diff rences entre les familles et les contextes scolaires sugg re de varier les dispositifs et modalit s de l change et formes de reconnaissance L implication des parents d pend de ce que l cole propose avec Colloque Efficacit et quit en ducation 10 13 cole inteme derUBO ESS 19 20 et 21 novembre 2008 des effets plus sensibles aupr s des parents les plus loign s de l cole Kherroubi 2008 Pour utile qu il soit le mod le de relations dominant dans l institution des rapports entre les familles et l cole documents d information r unions rencontres inter individuelles sur rendez vous repr sentants lus s adresse en r alit un type de parents C est un mod le de communication et un r gime d interaction socialement construit qui en s imposant comme l gitime de puissants effets normatifs et prescriptifs En modulant les formes et les supports du lien ne serait ce qu en am nageant les modalit s de la rencontre l enjeu consiste installer tr s t t la confiance requise dans le processus de reconnaissance Il s agit ce faisant d ouvrir l espace des acc s pratiques et symboliques
12. e de d rogation la carte scolaire montre par exemple que les parents les moins avertis s exposent avec des maladresses d criture et d argumentation voir leur demande plus souvent rejet e par les instances acad miques Felouzis Liot Perroton 2005 Dans un autre domaine on observe que les l ves du secondaire ayant un p re enseignant sont environ deux fois plus nombreux tre scolaris s dans un tablissement public hors secteur qu en moyenne En outre lorsqu elle se manifeste leur initiative la participation des parents de milieux populaires se joue ponctuellement dans des domaines pratiques moins r tribu s en gratifications symboliques accompagnement dune sortie de classe aide l installation ou la r paration de mat riel pr parations culinaires que celle plus visible et socialement reconnue pratiqu e par les membres des classes dominantes participation des r union avec les agents de l cole mandat de d l gu pr sence dans les conseils d administration ou conseils de classe Des freins pratiques et symboliques entravent la communication entre les familles populaires et immigr s et l cole mais celle ci semble d autant plus brouill e que la d finition des r les et responsabilit n est pas clairement d finie et partag e Dans les repr sentations des parents des milieux populaires en effet le monde de l cole appara t s par ment de la famille de sorte que l enjeu d
13. e mais les conditions et dispositions requises pour que tous puissent effectivement s inscrire dans cette logique d change et au del clarifier leurs r les et responsabilit s Or la figure du parent auquel il semble implicitement et id alement s adresser exige un certain nombre de pr requis et de dispositions in galement partag s Leur inventaire synth tique d voile ce qu tre partenaire veut dire au sens de l institution scolaire Acc der ce statut implique en effet une compr hension et appropriation du mode d emploi du partenariat qui laisse en suspens la question de savoir quel moment dans l ann e selon quelle fr quence aupr s de qui et propos de quoi une rencontre peut avoir lieu et tre jug e pertinente Certes une minorit active s empare avec aisance de l offre institutionnelle et en pr c de volontiers les opportunit s mais d autres ne per oivent pas les attentes leur gard et h sitent s engager Leur rapport de m connaissance et d impuissance m l es face l cole les place dans une position o ils restent la fois en retrait et disponibles l gard des sollicitations de l cole Les modalit s pratiques de lieu d horaires et de rendez vous d finissent un cadre et des codes pour entrer en relation que tous les parents ne sont pas en mesure de satisfaire en raison de contraintes mat rielles transport disponibilit mais aussi d une temporalit sociale qui dan
14. e relation leur initiative ne s impose pas d vidence bien au contraire Une forme de respect dont les parents attendent la r ciprocit commande plut t de ne pas s immiscer dans les affaires de l cole et la norme consiste ne pas intervenir du moins aussi longtemps que l cole ne fait pas signe par la biais d un mot dans le cahier ou d un courrier prenant parfois la forme critique de la convocation Les diff rences dans les r gles de l change ainsi mises au jour sont au principe d un diff rend qui alimente le d saccord et rend la r solution des malentendus plus incertaine P rier 2005 En d finitive l inscription des parents dans la logique du partenariat repose sur des dispositions et comp tences que toutes les familles ne sont pas en mesure de mobiliser et en l absence desquelles le rapport d galit face l cole ne peut avoir Colloque Efficacit et qut en ducation 4 13 cole inteme de TUBO KETUSAN 19 20 et 21 novembre 2008 lieu Les effets engendr s se situeraient un double niveau D une part en redoublant les in galit s proprement scolaires entre l ves sur la base de leur appartenance sociale par des in galit s d acc s des parents au r le de partenaire attendu par l institution scolaire de sorte que les familles des l ves qui en auraient le plus besoin en b n ficieraient en r alit le moins D autre part en pointant les attitudes de parents jug s trop absents
15. lique et s mantiques accord s au partenaire La seconde logique de r sistance se traduit par le retrait L exp rience de l injustice cons cutive au d faut de reconnaissance conduit des attitudes de soustraction de la part des parents Leur retrait ou silence ne suffit pas les soustraire de toute emprise scolaire et l absence de discorde peut au contraire exprimer la domination de l cole sur les familles Boltanski Th venot 2001 p 58 Dans un autre sens la d fection peut s interpr ter comme une protestation sourde apr s que les voies de l change aient t puis es ou soient jug es inaccessibles Tel parent refusant de se rendre des convocations traduit l chec dans la communication avec l institution scolaire La d fection peut donc aussi s interpr ter comme un moyen d fensif de se soustraire au regard et jugement de l institution scolaire afin d esquiver une confrontation redout e Ces tactiques sont des mani res d vitement du rapport in gal dans un espace d interactions o ils sont convaincus de ne pouvoir infl chir le cours des choses quoiqu ils disent et quoiqu ils fassent Dans un contexte d favorable ou symboliquement mena ant d fendre ses pr rogatives son r le et sa dignit de parent encourage se faire oublier La dissimulation est la strat gie du discr ditable Goffman 1986 et se tenir silencieusement distance de l cole permet aux familles de contr ler l informatio
16. ment des changes et une dynamique de coop ration qui apporte une am lioration au regard de la position initiale des familles et des l ves et non une quelconque d t rioration de leur rapport l cole On peut esquisser la lumi re de ce qui pr c de trois principes de justice dans une vis e galitaire du partenariat entre les familles et l cole Un premier principe de justice vise l explicitation des attentes de r les en direction des parents Le partenariat comporte trop souvent un caract re opaque et difficilement d cryptable par tous les parents de sorte que les plus initi s tirent les meilleurs profits d un syst me de relations et d informations reposant sur des normes implicites ou des modalit s in galement accessibles favorisant de ce fait le jeu d une connivence culturelle avec les acteurs de l cole La m connaissance des rouages de l institution et l impossibilit de satisfaire ses exigences implicites comme le montre l aide apporter dans les devoirs la maison diminue la capacit d action strat gique et rationnelle des acteurs les moins accultur s au monde scolaire Or comme l crivent les auteurs des H ritiers dans la conclusion de leur c l bre ouvrage Chaque progr s dans le sens de la rationalit r elle serait un progr s dans le sens de l quit Bourdieu Passeron 1975 p 114 Dit autrement l explicitation est une condition de la d mocratisati
17. n sur elles m mes et de limiter l immixtion d institutions qu elles peuvent redouter Un tel repli traduit bien souvent leur sentiment d tre disqualifi s sinon m pris s c est dire m sestim s socialement dans leur r le de parent d l ve Il signe par ailleurs une forme de r sistance passive et repr sente un moyen de garder la face d autant plus n cessaire que les personnes disposent de peu de ressources identitaires En effet un fil rouge relie l l ve la personne et toute appr ciation scolaire projette dans son ombre port e un jugement sur les qualit s ducatives des parents Or la fonction maternelle forge le socle identitaire des femmes en milieu ouvrier et toute atteinte l enfant peut tre v cue comme une blessure subjective pour celle dont les enfants sont une si pr cieuse source d tre et d avoir Schwartz 1990 Prot ger l enfant c est donc se prot ger soi et au del pr server la coh sion et le lien entre les membres selon une strat gie de survie familiale 6 SREO sA ne 2 Dans une situation naturelle nul ne se vante d tre petit Personne ne peut sans perdre sa dignit se pr valoir de d fauts qui le diminuent dans le monde actuel Boltanski Th venot 2001 p 277 Colloque Efficacit et quit en ducation 8 13 ne A 19 20 et 21 novembre 2008 3 Quels principes de justice dans les relations entre les parents et l cole La pour
18. on ce qui transpos dans le cadre du partenariat pose d une part l enjeu d une mise au jour des pr suppos s et pr requis engag s dans ce Colloque Efficacit et quit en ducation 9 13 r HUE IEEE cole inteme de TUBO 19 20 et 21 novembre 2008 mod le de coop ration et d autre part celui de la d finition des formes et modalit s de communication accessibles et intelligibles au plus grand nombre Dire ce que l cole fait et attend des parents est une mani re de pr ciser les fronti res de r les et de responsabilit s des uns et des autres et d viter ainsi le rejet mutuel de la faute les parents incriminant les enseignants et inversement Clarifier les r gles de l change peut contribuer lever les inhibitions et les freins de parents maintenus distance et dans une forme de culpabilit engendr e par le d ni de reconnaissance quand ce n est pas le proc s en d mission dont sont victimes les absents La clarification des comp tences n cessaires afin de suivre et soutenir la scolarit de l enfant conduit poser la questions des ressources in gales des parents et des formes d injustice secr t es dans un rapport de double injonction paradoxale qui exige qu ils fassent ce dont il ne sont pas capables ou qu il acceptent le jugement n gatif de l cole quand bien m me leur bonne volont ne peut tre mise en cause Un second principe de justice consiste en la reconnaissance par
19. on de la part d une institution scolaire ayant pour fonction de d passer symboliquement les diff rences sociales et identitaires au profit d une commune citoyennet Schnapper 1996 La difficult de participer aux rapports d interaction conform ment aux r gles de l cole les prive de la reconnaissance de leur r le et de leur valeur lls deviennent socialement invisibles L exp rience de l injustice face l cole se niche dans ce rapport dissym trique qui peut cependant ne pas reposer sur des l ments objectifs li s un traitement effectivement disqualifiant ou discriminatoire Il d coule du regard que les parents portent sur leur contribution et sur ce qu ils re oivent comme signes de conformation en retour L enjeu de l quilibre dans l change subjectivement per u et de la juste reconnaissance de chacune de parties peut susciter de fr quents d saccords Kellerhals Coenen Huther Modak 1988 L une des causes a pour origine que les parents de milieux populaires ne r pondent pas aux attentes normatives de l cole et ne se voient donc pas reconnus comme partenaires ou bien alors n gativement c est dire au travers de manques et carences qui affectent l image et l estime de soi Les parents peuvent avoir le sentiment d tre m pris s par une institution qui les d nie socialement et atteint leur identit personnelle Parce qu ils souffrent de ne pas tre respect s ils d veloppent des attitudes de r
20. s le cas des familles les plus pr caires est faite d absence de ma trise et de programmation Le pr sent dont la r p tition est conjuration des incertitudes du lendemain rythme des vies d incertitudes et limite troitement toute projection dans un avenir Pouvoir anticiper 2 Une enqu te par questionnaire aupr s de professeurs du second degr a montr que le partenariat pouvait tre jug constructif avec les parents sans tre n cessairement efficace sur le plan du comportement ou du travail des l ves et que les rencontres taient per us sans effets b n fiques pour 30 des enseignants de ZEP interrog s Cf P rier P 2003 Le m fier d enseignant dans les coll ges et lyc es au d but des ann es 2000 Vanves Les Dossiers n 145 Colloque Efficacit et qut en ducation 3 13 nn A 19 20 et 21 novembre 2008 selon une organisation rationnelle est ce dont ces familles sont pr cis ment d poss d es La ma trise de la langue fait galement partie des comp tences indispensables afin de s exprimer avec les mots mais aussi dans les formes qui assurent les conditions d un change vitant de d voiler des fa ons de parler trop peu conformes et inadapt es la situation Comme le dit une m re nous on a notre langage nous Car il faut pouvoir changer avec des arguments acceptables qui permettent de faire entendre sa voix et de d fendre ses int r ts L analyse des motifs de demand
21. ssent la domination de l cole f conde le diff rend En l impossibilit d une indiff rence on ne peut pas ne pas tre partenaire l absent devient la cible des critiques en m me temps qu il pourra juger arbitraire et profond ment injuste l attitude d un partenaire qui applique sanctions ou d cisions sans v ritable concertation ni alternative C est dans cet espace de non rencontre et de silence coupable celui le plus souvent imput aux parents que se niche le diff rend pour des familles soumises aux injonctions normatives de l cole mais incapables d y r pondre S il n est pas nouveau ce diff rend s est r v l et amplifi mesure que s accentuait le rapport de d pendance des familles l cole et la n cessit d une r gulation dans la division du travail ducatif g J F Lyotard note que le diff rend se signale par le silence auquel est associ un tort Cf Le diff rend Paris Editions de minuit 1983 Colloque Efficacit et qut en ducation 5 13 cole inteme de TUBO HETUS 19 20 et 21 novembre 2008 2 Sentiment d injustice et lutte pour la reconnaissance L in galit d acc s au partenariat par lequel les familles sont per ues et jug es secr te un sentiment d injustice car les parents ne voient pas leur investissement reconnu ni leur parole entendue La sensibilit sur ce point semble d autant plus vive qu ils sont en droit d attendre une m me consid rati
22. suite des int r ts scolaires dans un processus de lib ralisation de l offre et de d veloppement de strat gies familiales d instrumentalisation du service d ducation pose l enjeu des modes de r gulation et r gles d quit en direction de parents ne poss dant pas les ressources n cessaires pour se comporter en partenaires reconnus et efficaces Le principe g n ral d une politique de coop ration juste entre les familles et l cole vise le renforcement de l int r t commun et non les b n fices de quelques uns Encore moins un processus qui dans ses effets accentuerait le rapport strat gique l cole d une minorit active quand les plus d favoris s voient leur sort et celui de leurs enfants aggrav L exemple du choix des tablissements suffit montrer que l assouplissement de la carte scolaire cens profiter tous se traduit dans les faits par le placement privil gi d une cat gorie particuli re qui par ce biais conforte son avantage Transpos au partenariat le principe de diff rence Rawls 1997 incline consid rer qu une politique de justice scolaire n est possible qu condition de ne pas p naliser les plus d favoris s et mieux d att nuer les causes sociales de leur souffrance de position et de condition Or rien n est mois s r en mati re de partenariat et d ouverture des l cole en direction des parents incit s participer et s investir D s lors comment engager un mouve
23. ts jug s trop pr sents et b n ficiant d une consid ration privil gi e Celle ci se traduit par une coute et prise en compte des demandes leur permettant de n gocier ce qui semble d embl e refus d autres le placement de l enfant dans telle ou telle classe par exemple C est le sens du t moignage de cette m re sans activit professionnelle l issue des quelques r unions auxquelles elle a particip J ai remarqu que certaines personnes l dedans ils se prennent pas pour Les gens comme a j aime pas Ils s y croient un peu trop Ces parents l ils sont toujours entre eux ces parents sont toujours ensemble et ils ont des copains parmi les professeurs Les instits font des diff rences ils les parents pouvaient changer les enfants de classe De m me la capacit changer avec les agents de l institution scolaire souligne par contraste la position en retrait voire invisible de parents qui ne sont pas en 9 L Boltanski et L Thev not proposent une analyse des disputes en justice Il nous semble que leur champ d analyse peut tre tendu celui des diff rends en justice car tout d saccord ne donne pas lieu une dispute mais la divergence ou l antagonisme sur des principes de justice n en reste pas moins vif Colloque Efficacit et qut en ducation 7 13 coleinieme derUBO EM 19 20 et 21 novembre 2008 mesure d user des registres d expression symbo
24. u consensus permet de conjurer assez t t l expression du m contentement et d un sentiment d injustice de sorte que la dissym trie du rapport ne peut tre remise en cause Lorsqu il s exprime le d saccord se manifeste de fa on plus passive et priv e sous la forme de r criminations ou de critiques l gard de l institution des enseignants ou plus rarement d autres parents Est point s notamment l litisme des enseignants que les parents soup onnent de ne s int resser qu aux meilleurs l ves au d triment des plus faibles L tendue et la complexit des savoirs enseign s sont volontiers incrimin es tant les parents ne peuvent aider ni m me comprendre leur utilit bien que conscients de la s lection implicite op rant par ce biais La critique peut aller jusqu d noncer le traitement jug discriminatoire dont certains l ves seraient les victimes sur une base sociale ou ethnique Les parents se montrent alors solidaires de leur enfant face l injustice dont il ferait l objet Dans ces configurations de jugements implicites cole et famille se renvoient mutuellement la faute et entretiennent un conflit de l gitimit qui peut tomber dans une impasse Mais en rejetant tout ou partie de la responsabilit sur l cole les parents limitent la port e des jugements et valuations sur l enfant et indirectement sur eux m mes Il arrive galement que la critique proc de d une comparaison avec d autres paren
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