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Le texte du Contrat socialiste au format PDF (Acrobat Reader)

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1. On pourrait objecter ici que l tat est devenu au cours des vingt derni res ann es l agent principal de la pr vision et de la planification Mais si l on y regarde de plus pr s on s aper oit qu il a d cette fin se doter de services sp ciaux plac s en dehors des hi rar chies et des circuits op rationnels de l administration le Plan le S E E F l I N S E E etc lesquels services ont jou un r le de stimulation naissance de services d tudes sp cialis s en divers minist res et de concurrence virtuelle des administrations classi ques activant leur z le prospectif pour viter que leur carence trop patente ne fasse na tre des concurrents actifs De ce fait le futur le global le concert tendent devenir la t che sp cialis e d chelons non op rationnels Mais une quipe form e de quelques presbytes et de beaucoup de myopes vaut elle une quipe o chacun aurait une vue normale Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 158 une partie de la fiscalit etc soit parce que leur action n a de sens que si elle touche tout l espace conomique utile quoi servirait d imposer des pres criptions techniques sp ciales aux fabricants fran ais d automobiles si leurs concurrents trangers en sont dispens s sans que les r gles du March com mun permettent de prohiber l importation des v hicules non conformes Cette d sint gration de l tat n en est encore qu ses d buts mais
2. l horizon prochain de ce mouvement s inscrit une cons quence souvent inaper ue du monde politique et syndical c est qu une entreprise comme Renault hier g ant solitaire de l conomie fran aise va cesser d tre excep tionnelle pour n tre plus qu exemplaire L ordre public comme l action syndi cale la participation comme la contestation changent de cadre sous nos yeux et ce changement va s acc l rer M me les r flexions sur l autogestion doi vent pour n tre point utopiques se plier cette volution Une derni re contrainte industrielle souvent li e aux d s quilibres r gio naux doit encore tre reconnue c est qu il existe une forte corr lation entre le rythme de la croissance conomique et l ampleur des reconversions accom plir Parce que le besoin de reconversion prend aujourd hui un tour dramatique dans des industries plus que s culaires comme les mines le textile ou l habil lement il serait na f d imaginer que les autres branches industrielles pourront f ter leur centenaire avant d tre leur tour menac es Le calendrier n est en rien d cisif mais bien l volution technologique dont on conna t la vitesse et surtout l acc l ration On insiste souvent sur le fait que les travailleurs et pas seulement dans l industrie auront d sormais changer plusieurs fois de m tier au cours de leur vie active ce qui est vrai ou le deviendra Mais plus qu ces myriades de reconversions indivi
3. Retour la table des mati res L essentiel est donc de donner vie cette politique contractuelle Comme il s agit d innover les difficult s initiales seront grandes la mesure des m fiances et des inerties vaincre Seule l exp rience permettra de situer exac tement les unes et les autres et de les lever On peut toutefois rep rer a priori quelques besoins particuli rement pressants qui pourraient offrir de premi res possibilit s exemplaires La premi re direction est celle de la recherche La gauche politique et syndicale celle aussi des organisations et des militants qui se croient non politiques est souvent d boussol e Ses id es anciennes ont peu de prise sur une r alit plus changeante que jamais Toute action visant clairer locale ment sectoriellement ou nationalement l un quelconque des changements notables dont notre pays est le si ge conduira des r sultats directement utiles De m me toute action de ce type pourra plus ais ment trouver des concours additionnels D s qu il s agira de comprendre les probl mes qu ils vivent les vell itaires de la politique seront nombreux et de moins en moins vell itaires Enfin toutes les actions de ce type convergent vers la formation d outils suppl mentaires du type bureaux d tudes les administrations et les entreprises recourent de plus en plus massivement leurs concours tandis que les syndicats et les partis en sont encore aux m thode
4. Robert Fossaert 1927 1969 Le contrat socialiste Un document produit en version num rique par Jean Marie Tremblay b n vole professeur de sociologie au C gep de Chicoutimi Courriel jmt_sociologue videotron ca Site web http pages infinit net sociojmt Dans le cadre de la collection Les classiques des sciences sociales Site web http www uqac uquebec ca zone30 Classiques_ des sciences _sociales index html Une collection d velopp e en collaboration avec la Biblioth que Paul Emile Boulet de l Universit du Qu bec Chicoutimi Site web http bibliotheque uqac uquebec ca index htm Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 2 Cette dition lectronique a t r alis e par Jean Marie Tremblay b n vole professeur de sociologie au C gep de Chicoutimi partir de Robert Fossaert conomiste sociologue fran ais Le contrat socialiste Une dition lectronique r alis e partir du texte de Robert Fossaert Le contrat socialiste Paris Editions du Seuil 1969 286 pages Collection L histoire imm diate Autorisation de diffuser accord e par l auteur le 16 ao t 2003 Courriel robert fossaert wanadoo fr Site internet http www macrosociologie com macrosociologie index htm Polices de caract res utilis e Pour le texte Times 12 points Pour les citations Times 10 points Pour les notes de bas de page Times 10 points dition lectron
5. Une telle crise aurait sans doute pour effet de briser la vaste union conomico douani re aujourd hui probable en Europe alors qu elle n aurait pas n cessairement le m me impact sur l actuelle Europe des Six Voir chapitre 2 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 142 Une gauche socialiste au pouvoir dans un pays europ en n aurait pas seulement tenir compte des int r ts sociaux nationaux qu elle d range mais aussi des int r ts sociaux trangers qu elle menace de d ranger par son action ou par la contagion de son action En d autres termes la gauche qui avait tenir compte nagu re de r actions nationales et internationales doit s attendre d sormais ce que ces derni res ne soient pas purement ext rieu res il y a il y aura de plus en plus d int r ts europ ens ou am ricains inscrits dans la g ographie conomique nationale L int gration europ enne sape les pouvoirs des tats nationaux parce qu ils ne sont plus l chelle du march r gir Ce travail de sape pourra demeurer longtemps sans effets perceptibles en maints domaines de l cole l information de la diplomatie l arm e mais il comporte d ores et d j des effets majeurs dans l ordre conomique dans celui o pr cis ment la gauche doit le plus agir DE FAUSSES SOLUTIONS Retour la table des mati res Ceux qui ont conscience de cette contradiction cherchent trop souvent l luder Ainsi les com
6. peu de variantes pr s l imitation d un mod le sovi tique qui est loin d tre en tous points exemplaire L tat actuel de leurs projets et de leurs objectifs ferme aux communistes l acc s au pouvoir Certes lorsque l on consid re l efficacit de leur organi sation en mai 1968 par exemple mais aussi de 1944 1947 on peut douter de leur inaptitude gouverner ils ont fourni de bons ministres fournissent encore d excellents maires et savent faire preuve d autorit Mais cela qui peut suffire en des circonstances exceptionnelles et anciennes comme celles de la Lib ration et loin de faire le compte aujourd hui C est la France actuelle dot e d une conomie complexe inscrite dans l int gration europ enne en tours et articul e de multiples mani res sur le reste du monde qu il faudra gouverner et transformer Les craintes diffuses de l opinion fran aise sont entretenues par un endoctrinement anti communiste Elles sont aussi raviv es parfois en de dramatiques occasions tel a t l effet de l invasion de la Tch coslovaquie par les Sovi tiques malgr la d nonciation circonspecte qu elle a provoqu e de la part du P C On peut prendre la mesure des volutions indispensables en d finissant les conditions qui rendraient acceptable ou souhaitable la pr sence d un communiste la t te de l un ou de plusieurs des minist res suivants l Int rieur la Guerre les Affaires trang res les Finances Po
7. conomiques nationales Or ce commerce est aujourd hui plus libre et plus expansif que jamais D ailleurs il ne s agit pas que de commerce Une grande pouss e d expor tation de capitaux dont le si ge principal est aux Etats Unis accompagne cet essor commercial et entra ne d autres cons quences En s int grant aux struc tures conomiques europ ennes les capitaux am ricains ont le plus souvent pour effet d affilier des entreprises europ ennes des firmes ou des groupes am ricains ou selon l euph misme en vogue multi nationaux Aux Etats Unis comme ailleurs l Etat f d rai exerce son r le coordonnateur et la coh rence des d cisions prises par les firmes vocation mondiale est assu r e de fa on assez satisfaisante pour ce qui concerne le march am ricain Mais aucun gouvernement n a la responsabilit ni le pouvoir d assurer la coh rence de ces d cisions pour ce qui concerne le march mondial Chacune des General Motors et des Standard Oil s efforce certes de programmer sa propre activit mais que ce soit l chelle du march mondial ou celle de r gions particuli res comme l Europe aucune confrontation de leurs d ci sions n est op r e aucun pouvoir politique n est en mesure de l op rer bonne chelle Le gouvernement des Etats Unis n en a cure l Europe n est pas une entit politique chaque Etat europ en n en peut saisir que les manifestations locales et n a gu re de prise sur les
8. conomiques com plexes que remplit l Etat mais un Parlement le peut il Autre crit re le dessin de la fronti re qui au sein de l conomie s pare le secteur priv du secteur public est d licat parce qu il y a quelques provinces mixtes Mais en gros 10 de la production est assur e par le secteur public 30 de l investissement annuel total est r alis par ses soins et pour son compte tandis que plus de 50 de ce m me investissement et financ par ses soins ou sous son contr le Encore faut il noter que ces deux crit res ne rendent pas compte des actions indirectes de l Etat sur l conomie et plus g n ralement sur toute la vie sociale Peut tre l volution long terme du total annuel des pages du journal officiel et de ses satellites donnerait elle une bonne id e des rapports qu entretiennent d sormais l Etat et la soci t civile De ce point de vue on peut sans doute dire que l Universit sera autonome le jour o le Bulletin officiel de l ducation nationale n aura plus de raison d tre Trois pouvoirs Retour la table des mati res L tat dont il vient d tre parl est il autre chose qu une commodit de langage Peut on tenir cet assemblage d un pr sident de quarante ministres de cinq cents d put s de quatre mille juges de cent mille policiers de cinq cent mille enseignants et d un gros million d autres fonctionnaires sans parler des militaires pour un sujet unique pour
9. l ment d auto nomie extr mement pr cieux Mais il y a mieux et ce sera le second exemple Pourquoi la justice est elle de fait presque r ductible une branche administrative de l Etat central Pourquoi n envisagerait on pas f t ce en distinguant le Parquet et le Si ge et en maintenant le premier dans sa vocation actuelle d en dissocier radicale ment le second et si l on peut dire de l asseoir par une institution autonome ne recevant de l Etat qu une dotation budg taire globale et le service r gulier du journal officiel Craindrait on que la justice devint ind pendante Pareille r forme peut se heurter deux objections L une est tir e du principe de la souverainet populaire qui ne pourrait se partager donc s ac commoder d une justice autonome C est une vieille id e mod r ment respectable en juger par ce que la justice est il faut bien admettre que la souverainet populaire s accommode de bien des solutions L autre objection est de fait comment agencer une justice autonome Mais cette question bien des r flexions tir es d exp riences trang res voire de l exp rience des magistrats fran ais eux m mes pourraient donner r ponse Sortir des fonctions comme l information et la justice de la sph re d action de l Etat D concentrer d centraliser et ouvrir l administration Ces diverses orientations ont ceci de commun elles tendent modifier profond ment le r seau des pouvoirs pour
10. la fin de mai 1968 partir de l un progr s d cisif est accomplir et la politique contrac tuelle que l on a propos e plus haut peut en offrir le moyen C est d tablit entre les forces syndicales et les forces politiques de nouveaux liens de nouvelles pratiques communes Ni courroie de transmission ni donneur de le ons ni sauveteur occa sionnel de la R publique le syndicalisme peut ambitionner plus et faire mieux Il lui faut pour cela laborer plus attentivement les revendications qu il pr sente situer plus exactement les obstacles qui s opposent leur satisfac tion rechercher avec d autres par des contrats limit s les solutions prati quables Puis si cette exp rience porte des fruits il lui faut avec prudence exp rimenter d autres types de rapports avec les organisations politiques en inscrivant dans des contrats pr cis ch ance pr fix e des engagements r ciproques contr lables selon des proc dures pr d termin es Le tout sans que les syndicalistes aient se convertir en politiques mais aussi sans h siter revendiquer ce droit de co participation la d signation des candidats qui est l un des traits de la politique contractuelle Il est en effet un moment o le choix des hommes devient d cisif et pourquoi ne pas l influencer UN PARTI POUR LA GAUCHE SOCIALISTE Retour la table des mati res Une telle r orientation progressive d un syndicalisme r unifi ou
11. venir que la population totale supporter m me si l immi gration demeure forte Donc l accroissement de la productivit et de l intensit du travail demeurera la source unique de l enrichissement national D o main tes tensions potentielles entre actifs et inactifs certains des malentendus entre ouvriers et tudiants les font apercevoir Parfois il est vrai des contre courants se dessinent pour une br ve p riode et peuvent faire na tre des illusions ou des espoirs peu fond s long terme Ainsi on peut consid rer la p riode 1962 1968 comme l une de celles o l volution d mographique a t la plus perturb e depuis la fin de la guerre 1 Les pourcentages pr visionnels pour les jeunes comme pour les vieux supposent que le ralentissement de la natalit enregistr depuis 1965 sera ph m re et ult rieurement compens Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 56 Il y a d abord eu le retour massif des Fran ais d Alg rie En quelques trimestres l conomie fran aise a pu absorber tous ceux qui d siraient du travail mais ce gonflement accidentel de la population active a provoqu des effets en cha ne Apr s la stabilisation de 1963 1964 la reprise d une expan sion d ailleurs modeste a r v l d exceptionnels potentiels de productivit dans les entreprises C est dire qu elles employaient plus de main d uvre qu un tri amp calcul de rentabilit ne l e t command et la volont
12. viter la d cadence de certaines r gions Il faudrait aussi une telle population qui donnerait une densit de peuplement voisine de celle de la Grande Bretagne ou de nos partenaires du March commun pour cr er le revenu national permettant de r aliser tous les investissements n cessaires la modernisation de l ensemble du pays Comme nous ne sommes que 50 millions les r gions en n crose ne pour ront tre revitalis es Les probl mes r soudre dans les autres r gions excen tr es ou d s quilibr es comme la Bretagne ou le Sud Ouest sont d une ampleur telle par leur difficult intrins que comme par leur co t et leurs d lais de r solution qu il est pratiquement impossible pour tout gouverne ment et quelles que soient ses intentions de revivifier aussi les d serts en formation Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 57 5 PAYSANS 20 OUVRIERS 75 TERTIAIRES Retour la table des mati res Au recensement de 7968 la France comptait environ 20 millions d actifs tout juste 3 millions d exploitants et de salari s agricoles un peu plus de 7 millions et demi d ouvriers en allant du man uvre au contrema tre et 9 millions et demi de tertiaires Autrement dit sur cent actifs on comptait 75 paysans 39 ouvriers et 46 tertiaires D ici la fin du si cle les proportions changeront in vitablement pour se situer dans la zone suivante 5 paysans une vingtaine d ouvriers et 70 75 tertiaires
13. La propri t s est largie ou nationalis e pour porter la concentra tion du capital au niveau requis par le d veloppement des forces productives Parall lement le syst me des pouvoirs attach s la propri t priv e des moyens de production s est diversifi ramifi et distendu Plus l entreprise ou le groupe d entreprises est vaste plus le pouvoir patronal jadis confondu avec celui du propri taire se distingue de ce dernier tout en se subdivisant La grande entreprise moderne est comme toute vaste institution un syst me complexe de centres de d cision certes hi rarchis s mais jamais d pourvus d une certaine autonomie tout le moins d une certaine inertie La dissociation de la propri t et du pouvoir patronal a fait couler beau coup d encre On a pu parler de propri t au second degr celle dont disposent les actionnaires souvent minoritaires qui dirigent une grande firme ou de technocratie pour opposer la classe des directeurs celle des propri taires ou plus na vement d une sorte de socialisation spontan e du capitalisme devenu populaire par une large diffusion des actions dans le public La th se la plus r cente celle de Galbraith d crit bien l agencement de la grande entreprise capitaliste Celle ci dose les profits qu elle distribue de fa on pouvoir recueillir si besoin est les augmentations de capital n cessaires son d veloppement et de fa on placer ses di
14. celui de d livrer des dipl mes ou d orienter des l ves ne serait ce que vers la classe sup rieure ou vers la porte 3 Les tatiques comme la Caisse des d p ts ou l O R T F les nationalis s qui sont bien connus les mixtes ces entreprises multiples d am nagement de construction et de bien d autres objets et les statuts sp ciaux ce qui permettrait de se souvenir que le Cr dit national ou le Cr dit foncier sont des soci t s priv es quelques d tails pr s 4 Les exceptions sont le plus souvent d coratives et prennent la forme de comit s consul tatifs On ne peut videmment tenir la pr sence de quelques repr sentants des usagers aux conseils d administration de diverses entreprises nationalis es pour une exception r elle ce serait prendre ces conseils pour des centres de d cision Il en va de m me pour les d put s qui de ci de l si gent s qualit en divers conseils d administration ou organes pouvoirs semblables c est dire quasi nuls Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 92 Le pouvoir dans la soci t civile Retour la table des mati res Le pouvoir n est pas un monopole d tat Toutes les sph res de la vie sociale aussi petites soient elles sont soumises des pouvoirs explicites le plus souvent institutionnalis s toute famille toute association toute organi sation toute entreprise est le si ge d un pouvoir ou d une structure plus ou moins co
15. conventionnelles de l Europe de substituer au pacte atlantique un pacte europ en de rassembler les l ments pars de force nucl aire l anglaise et la fran aise et de les renforcer peut tre par quelques achats aux Etats Unis ou par la poursuite des efforts entrepris Une autre enfin serait d associer un d veloppement des arm es conven tionnelles un renoncement unilat ral aux armes nucl aires Ce dernier pari concevable il y a dix ans ne l est plus aujourd hui en raison des progr s acquis ou virtuels de la prolif ration nucl aire Mais la voie demeure ouverte un renoncement multilat ral aux armes nucl aires m me s il ne prend pas 1 a forme d un d sarmement nucl aire g n ralis la signature par la France du trait de Moscou sut la non prolif ration et la recherche d accords de d nu cl arisation de l ensemble de l Europe occidentale centrale et orientale demeurent deux des principales voies explorer Point n est besoin de pousser plus loin la gamme des hypoth ses et des variantes pour admettre cette conclusion inventer dans l Europe en voie d int gration un cheminement compatible avec le d veloppement d exp riences politiques nouvelles l chelle de telle ou telle nation sera de fait une entreprise difficile On peut s attendre ce qu elle soit sem e de diffi cult s de crises politiques de blocages temporaires Mais on doit admettre galement qu une marge de man uvre existe e
16. de l U C R G ou de l U G C S avaient envisag d y emm nager mais les querelles du printemps 1969 en ont d tour n bon nombre De son c t la fragile passerelle qui joignait la vieille maison la tr s vieille maison entendez la section fran aise de l inter nationale ouvri re au parti radical et radical socialiste s tait effondr e au vent de juin 1968 La tr s vieille maison semble d serte sauf aux ombres qui s y tra nent en se saluant bizarrement du nom de pr sident La vieille maison est plus branlante que jamais Depuis quelques ann es le P S U a mis en chantier une maison nouvelle avec des mat riaux emport s de la cit des mauvaises herbes ou pr lev s dans une glise voisine Les lois de la construction politique n tant pas celles de la la cit cet assemblage que les anciens trouvaient saugrenu a tenu bon Si la maison nouvelle s est plus d une fois effondr e c tait plut t par la faute des architectes le P S U en avait plus que de ma ons Pourtant en mai 1968 la maison tait debout Elle s est m me rehauss e d un tage au cours de ce printemps et a bien support les temp tes du printemps suivant Dans le quartier de la gauche les difices syndicaux dressent leurs archi tectures imposantes loin des b timents politiques Pour aller des uns aux autres on se faufile par les ruelles Sit t la mauvaise saison la circulation devient impossible et l on ne se rencontre
17. depuis 1945 elle vit dans l illusion qu il est r solu c est dire que la croissance de la population a d sormais retrouv une allure satisfaisante C est oublier que sur la lanc e des derni res d cennies la France ne retrouvera son quilibre d mographique c est dire une proportion entre Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 55 les diverses classes d ge conforme au cours naturel de la vie qu en 2030 ou 2040 D ici l sa structure d ge pr sentera des d formations dont les cons quences politiques sont des plus importantes la France demeurera la fois trop vieille et trop jeune Au d but du si cle alors que la situation s tait d j longuement d grad e les personnes g es de plus de soixante ans formaient 12 de la population totale On en comptait 15 en 1936 16 en 1954 et le maximum sera atteint vers 1971 avec 17 pour d cro tre lentement ensuite C est dans cette lumi re qu il faut situer l valuation des charges de toute nature li es l entretien des vieilles personnes selon des normes plus exigeantes mesure que le pays s enrichit mais aussi les perspectives d abaissement de l ge de la retraite et enfin les probl mes de la rel ve des g n rations dans les centres politiques et conomiques du pouvoir comme dans les organisations syndicales ou politiques La France vieillit et les progr s de la g rontocratie sont parall les ceux de la g rontologie Elle
18. e Bref la crise conomique mondiale est d sormais possible Mais quelle est au juste sa probabilit Et quelles cons quences peut on attacher son ventuel d clenchement Cela d pendra d abord d l ments al atoires les conditions pr cises dans lesquelles se pr senteront les prochaines r cessions les pays o elles s amor ceront les circonstances contingentes qui les accompagneront Ni leur date ni leur ampleur premi re ne se laissent pronostiquer Il est cependant vrai semblable qu elles se pr senteront spontan ment aussi mal ou plus mal que les pr c dentes par l effet notamment de l affaiblissement des Etats et de leur vive prudence mon taire Il est possible galement que la crise mon taire si elle n avait pas m ri dans l intervalle soit elle m me renforc e par une r ces sion plus aigu et en rende le traitement plus d licat Spontan ment l volu tion conomique mondiale au cours de la prochaine d cennie semble donc comporter la menace pr cise d une crise conomique mondiale c est dire d un recul caract ris de la production Mais ici spontan ment veut dire sur la lanc e actuelle en admettant qu aucun des principaux Etats ne s cartera de sa ligne d action pr sente Or cette spontan it est douteuse La crise est un Processus cumulatif qui pour se d ployer pleinement requiert des mois voire des ann es Pour qu elle accumule toutes ses cons quences et s approfondi
19. enne s est pour partie r sorb e dans l volution g n rale du monde capitaliste L int gra tion europ enne accomplie depuis 1958 n est qu une modalit particuli re du libre changisme qui triomphe dans le monde capitaliste tout entier L origi nalit de l entreprise europ enne va d pendre d autres choix qui restent accomplir et dont les objets actuellement visibles sont nombreux et com plexes le rythme de r alisation effective de l union conomique la sp cificit plus ou moins grande du tarif ext rieur commun la porosit plus ou moins grande de l Europe aux mouvements internationaux de capitaux et sp ciale ment aux investissements am ricains la constitution ou non d un pouvoir politique europ en et la gamme des attributs dont il sera dot enfin l lar gissement ou non de l actuel March commun Objectivement c est dire si l on tient compte des seuls rapports de force o s inscrit l Europe tous ces choix sont largement ouverts et ils le demeu reront si l un quelconque des accidents envisag s plus haut se produit Ainsi par exemple dans l ventualit d une crise conomique majeure m me aggrav e d une crise mon taire l Europe des Six offrirait la politique conomique un meilleur champ de man uvre que tout Etat national europ en pris isol ment la France ou l Allemagne contraintes isol ment d fendre leur franc ou leur mark et ranimer autant que possible leur conomie lan guiss
20. fut de renforcer l assise lectorale de la droite et du centre Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 18 LE FRONT R PUBLICAIN Retour la table des mati res L chec suivant date de 1956 bien qu il ait t consomm en mai 1958 Comme dans toute faillite une p riode douteuse pr c de le d p t de bilan En 1954 un sursaut prometteur porta Mend s France au pouvoir pour mettre un terme la guerre d Indochine Mais ni son gouvernement ni sa majorit ni les communistes qui en taient exclus ne surent reconna tre la Toussaint de cette ann e la naissance d une nouvelle guerre coloniale qui allait sembler plus horrible encore parce qu elle serait mieux connue de chacun Certes la victoire lectorale du 2 janvier 1956 d gagea bien une majorit de Front r publicain et de communistes lue pour mettre fin la guerre d Alg rie Mais le gouvernement de Front r publicain n osa imposer la minorit europ enne d Alg rie si profond ment semblable son lectorat une solution qui en l sant ses int r ts apparents la sauverait de l exil Il n osa ou ne sut se faire ob it de l arm e future p pini re de l O A S mieux il la renfor a en envoyant le contingent et m me les disponibles en Alg rie Les communistes enfin toujours exclus de la majorit mais soucieux de l influencer et ne confondant pas le tout et la partie soutinrent de leurs votes les maigres r formes sociales de
21. la banni re du socialisme et de la sorte se d finit n gativement ce n est pas une aspiration un changement pr cis mais d abord un refus de ce qui existe pr sentement Cependant les exp riences socialistes concr tes lorsqu elles sont connues ne suscitent pas d enthousiasme Il suffit d couter les opinions des syndicalistes retour d U R S S ou m me de Yougoslavie sur les condi tions de travail dans les firmes leur seule appr ciation positive concerne les cadences moins tendues et souvent aussi les services sociaux annexes des firmes jamais personne n a entendu un syndicaliste dire d une firme sovi tique ou autre c est ainsi que plus tard nous nous organiserons Or le mod le socialiste de gestion des firmes ne descendra pas du paradis des bonnes inten tions le lendemain d une ventuelle collectivisation des moyens de produc tion L art d agencer humainement le travail est inventer et son invention sera longue et t tonnante C est par son exp rimentation dans les firmes publiques que la gauche acc dant au pouvoir devrait soutenir cette recherche C est par la contagion de telles exp riences au sein des firmes encore priv es et appel es le demeurer durablement qu elle pourrait rendre ce secteur plus ouvert Le partage des pouvoirs Retour la table des mati res Les orientations d crites ci dessus impliquent une redistribution du pou voir dans la soci t Ce nouveau partage des pouvoi
22. la petite France et le parti de l expansion ont fait bloc et ont laiss les forces politiques repr sentant la troisi me tendance se d chirer alliance incertaine des gauches lections trahison le suffrage universel n a pas eu trancher il a soulign la victoire acquise Comme en outre Pompidou avait obtenu qu on offre aux lecteurs de se compter non plus sur un r f rendum magique mais dans une belle et bonne Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 124 lection l gislative le pouvoir s est trouv apparemment confort d une majo rit toute preuve Mais les belles architectures politiques importent peu quand toute la soci t vacille Sit t engrang e la nouvelle moisson parlementaire la sainte alliance s est rompue et ses deux l ments ont souhait des politiques contradictoires entre lesquelles a oscill pendant un an le gouvernement le plus diaphane qu ait jamais constitu de Gaulle Le parti de l ordre ancien avait eu tr s peur Les petits patrons dans leurs firmes et les grands patrons de la m decine ou de l architecture ont cherch leur revanche Les licenciements de syndicalistes la non reconnaissance de la section syndicale d entreprise dans les firmes ayant moins de 50 salari s les critiques de droite adress es la loi cadre de Faure ont t leur fait Le parti de l expansion pour sa part tait pr t jeter du lest On savait de ce c t que dans son reflu
23. le march du travail comme l organisation culturelle et la civilisation moderne attirent irr sistiblement la population vers les villes en tous pays D o cette caract ristique norme de 1945 1985 la France aura construit plus de logements d coles ou d universit s que dans toute son his toire ant rieure Mais assur ment pas plus de cath drales ou de monu ments L effort insuffisant accompli aujourd hui pour la construction et l quipe ment urbain absorbe un gros tiers de l investissement national total et pr s des trois quarts des financements long terme de toute nature disponibles chaque ann e C est une limite difficile d passer compte tenu d autres besoins non moins urgents et le d bat sur la politique de construction et d quipement ne peut porter utilement que sur l art de faire mieux avec les m mes moyens financiers 1 Les chiffres cit s concernent la population dite urbaine c est dire celles des communes de plus de 2 000 habitants La progression est plus significative encore si l on ne retient que les agglom rations ayant au moins 50 000 habitants Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 61 L ampleur de cet effort a d autres cons quences Il asphyxie les collecti vit s locales aux finances d su tes la charge de la fiscalit locale double en moyenne tous les cinq ans Faute d un nouveau partage du droit de lever l imp t entre l Etat et les collectivit s locales cell
24. les tudiants de Mexico en ont pay le prix en 1969 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 129 ce fut au moins l un des pr textes retenus pour imposer l tat d exception en Espagne La cl de la situation se trouvera donc dans l attitude de la troisi me ten dance Vers quelles luttes les ouvriers les salari s de toute nature les intellectuels et les tudiants vont ils pour leurs raisons propres se trouver engag s Quelles perspectives les organisations syndicales et politiques qui les influencent le plus largement c est dire les gauches vont elles leur ouvrir Quelle strat gie principale et si possible commune se dessinera de ce c t notamment pour pr venir ou endiguer une ventuelle pouss e fasciste pour orienter l ventuelle crise politique de l apr s gaullisme pour pr venir et combattre une ventuelle crise conomique L affaire on le voit va se jouer au niveau des forces politiques et syndi cales de la gauche Sans perdre de temps ni d sarmer elles ont le loisir de faire leur inventaire Elles peuvent bien que la tentation en soit forte se dispenser d improviser des solutions de bricoler des formules de repl trer de vieilles organisations pour se consacrer l essentiel qui est de r inventer leur doctrine leurs m thodes leur strat gie Certaines le feront les autres mour ront Mais si les premi res sont trop rares ou trop faibles la gauche n aura aucun avenir poli
25. mais dont l ambigu t tait et demeure patente on le verra plus loin fut d engager la France dans l aventure europ enne par le trait de Rome Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 19 La g n ration de la Lib ration avait mis plusieurs ann es pour passer de l enthousiasme l amertume Celle de 1956 fut beaucoup plus rapidement perdue On la jeta d autorit dans une aventure alg rienne dont elle ne voulait pas m me avant d en avoir exp riment l inutilit et trop souvent l horreur il fallut en effet toute l autorit administrative et polici re de l Etat et toute l autorit politique des grands partis de gauche pour qu elle cesse son opposition pendant l hiver de 7956 il faudra en 7960 1961 les m mes concours bien qu doses diff rentes pour que son insoumission demeure exceptionnelle Ainsi la jeunesse de 7936 n est pas une g n ration qui s est perdue mais que l on a perdue souvent m me avant qu elle acc de l action politique la d politisation y a exerc des ravages souverains le m pris pour les partis traditionnels de la gauche y r gne de fa on tr s g n rale Pour le P C et surtout pour la S F I O le rythme normal du renouvellement par l adh sion des jeunes s est profond ment d form partir de cette date VERS MAI 1968 Retour la table des mati res Vient enfin le dernier en date des checs celui de mai 7968 Ici comme en 1956 1958 l histoire s est jo
26. n es la pleine concurrence capitaliste ce sont en revanche leurs salari s qui ont grand besoin d une active politique de reconversion et de d fense syndicale LA TENDANCE DE L EXPANSION ET SES CLIVAGES Retour la table des mati res L affaiblissement de la petite France aura pour corollaire un renforcement du parti de l expansion c est dire des grandes affaires La gauche condi tionn e par un vieux r flexe anti monopoles peut voir cette perspective avec crainte Elle peut aussi centrer toute sa r flexion et son action sur trois lignes de clivage d j discernables aujourd hui et qui peuvent tre approfondies au sein du parti de l expansion La premi re r sulte de l int gration europ enne et internationale en cours Certaines firmes sont de par leur activit peu expos es la concurrence internationale D autres parce qu elles auront fait choix de partenaires natio naux pour se concentrer et garder leur capacit comp titive dans un march largi auront conserv des r flexes nationaux D autres en revanche seront devenues si ges ou succursales de firmes multinationales mais seront alors expos es des contradictions sp cifiques entre les int r ts de leur personnel national et ceux de leur strat gie internationale Ainsi en maintes occasions la tendance de l expansion pourra tre d chir e de tensions plus ou moins vives entre nationaux et multinationaux Une seconde ligne de cliva
27. sultante collective des actions ou des int r ts individuels serait soit spontan ment coh rente il est permis de r ver soit r ductible sans tensions excessives une approximative harmonie Qui recouvre des exp riences plus diversifi es des actuelles exp riences sovi tiques hongroises et tch ques aux tentatives plus anciennes et plus complexes des yougoslaves Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 137 Mais il suffit d noncer ces conditions pour tre s r que les optimistes imp nitents renverront au moins au XXIe si cle tout espoir de les voir satisfaites Dans le monde tel qu il est dans les nations ou agr gats de nations tels qu ils sont avec les hommes tels qu ils sont l incoh rence des actions et des int r ts individuels est une donn e avant comme apr s la suppression de la propri t priv e des moyens de production Tout ce que l on peut attendre de celle ci c est d liminer une partie des fadeurs d incoh rence rien de plus LE SOCIALISME POUR NOUS Retour la table des mati res D o certaines conclusions essentielles 1 Le socialisme n est pas un tat de la soci t identifiable la collec visation des moyens de production Ce n est pas non plus un syst me vague de fins C est ce ne peut tre qu une m thode d organisation sociale Cette m thode s assigne pour objet d organiser la soci t de fa on telle que ses chances de ma triser son propre destin soient
28. tait bien men e et si l v nement offrait prise on pourrait voir na tre de la sorte un parti moderniste d mocrate l am ricaine Si le succ s devait couronner pareille entreprise on pourrait assister au ralliement en son sein de tous les centristes qui ne sont pas d extr me droite Une alternative au parti n o gaulliste ou pompidolien prendrait ainsi forme l int rieur du syst me c est dire en restant dans le champ de possibilit s d fini par l atlantisme l int gration europ enne la croissance au sein du march mondial capitaliste etc Dans certaines limites s lection des hommes jeu des institutions minoration des risques de fascisme etc ce pourrait tre une variante respectable Mais elle n aurait rien voir avec le socialisme Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 206 Quand une v ritable gauche aura r ussi s affirmer quand son aile socia liste et son aile communiste seront unies en vue de la r alisation d un projet commun cette coalition retrouvera comme alli s occasionnels et fragiles les gauches r publicaine et r volutionnaire La premi re volera au secours de toute victoire parlementaire La seconde ne sera jamais absente de la rue Ce serait une grave faiblesse de d pendre de tels alli s Ce serait aussi une grave sottise de les m priser L histoire on ne le sait que trop est insensible aux souhaits La double d cantation que l on vient de souhaiter est possibl
29. trois niveaux Le pouvoir de d cision r sultera d ventuelles prises de participation europ ennes ou am ricaines et se localisera ici ou l dans l espace conomique fran ais europ en ou am ricain Du coup le pou voir d incitation et de contr le tendra se disperser entre plusieurs Etats vues partielles et moyens d actions indirects Seul le pouvoir de modifier cet F t ce sous la forme de budgets de transit si comme aujourd hui l Europe demeure politiquement amorphe Ce sont les cessions d actifs dont l exemple corse pr sent ci dessus a montr l impor tance et dont le flux actuel d investissements am ricains sugg re l ampleur possible Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 80 tat de choses par une nationalisation ou par toute autre technique plus ou moins contraignante demeurera la port e de l Etat o l entreprise exerce son activit sauf tenir compte dans l emploi ventuel de ce pouvoir d ven tuelles mesures de r torsion Sous un autre angle on dira que les firmes qui savent aujourd hui dans quel minist re elles peuvent plaider leur dossier auront progressivement choisir entre deux voies se r signer n avoir point d interlocuteur minist riel et r inventer le lib ralisme int gral hypoth se douteuse ou faire savoir qu une structure politique europ enne leur est n cessaire hypoth se probable Un probl me Retour la table des mati res Po
30. ussisse enfin durer au pouvoir c Avait r alis ces projets est le principal moyen de conserver ensuite une meilleure base de d part vers le pouvoir si comme il est probable quelques flux et reflux s pareront la prochaine accession de la gauche au pouvoir de l instauration d un socialisme durable d Quand le stade socialiste sera enfin atteint les anciens contre pouvoirs prendront une signification nouvelle et fondamentale celle de garde fous contre la centralisation totalitaire Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 102 du r seau fran ais sur certaines fonctions sociales Ainsi le souci de la balance des paiements temp re le z le pour le plein emploi En d autres termes l int gration lib rale en cours fait sauter bien des mailles du r seau du pouvoir c est dire fait perdre des pouvoirs Elle rend beaucoup d autres mailles conductrices d impulsions venues de r seaux trangers C est l on ladmettra une volution ne pas perdre de vue lorsqu on dessine un programme politique d ensemble Tout programme n a de sens que par r f rence aux luttes sociales qui peuvent le promouvoir et au r seau du pouvoir dont d pendra sa mise en uvre C est pourquoi le d saccord sur le chapitre europ en dans la plate forme commune P C F G D S de f vrier 1968 n tait pas un d saccord limit sur un chapitre secondaire de politique internationale c tait un d saccord central qui br ve ch ance
31. voir des institutions aptes g rer de tels conflits et les arbitrer utilement Pour partie la r forme des Proc dures d laboration et d ex cution du Plan pourrait y pourvoir Pour partie la refonte des instruments financiers publics pourrait galement y concourir Ainsi le rassemblement des participations financi res d tenues par l tat en une vaste banque d affaires publique plus ou moins inspir e de l I R I italien et le regroupement dans ce m me organisme des proc dures publi ques de financement des investissements industriels donnerait naissance une tr s puissante Banque nationale d Investissement laquelle exercerait cas par cas une influence non n gligeable sur celles des firmes publiques qui auraient besoin de concours financiers importants pour soutenir de nouvelles initiatives De nouvelles orientations enfin Il s agit en effet de faire des entreprises publiques le lieu d exp riences pilotes dans la gestion avanc e des firmes Gestion avanc e est une expression commode pour d signer le vaste champ de besoins et de possibilit s qui s ouvre lorsque l on prend en consid ration la fois les techniques modernes de gestion le management et les aspira tions encore confuses l autogestion ou au pouvoir syndical Cette commo dit de vocabulaire ne doit pourtant pas cacher toutes les difficult s que la prise en compte simultan e de ces deux besoins peut comporter En fait il s agi
32. 123 La suite Retour la table des mati res Le coche a t manqu mais la gauche a t elle subi une grave d faite A court terme assur ment Mais plus longue ch ance le bilan de mai pour rait se r v ler positif En juin 1968 les lecteurs de la gauche se sont clairsem s et ses d put s plus encore Ses alliances politiques et syndicales se sont disjointes Son d sarroi s est r v l immense Pourtant ses forces vives n ont gu re t atteintes et se sont m me aguerries Son centre de gravit s est d plac quelque peu des forces tradition nelles vers des forces plus novatrices Surtout l exp rience de mai a montr que la terre pouvait encore trembler au pays de cocagne ou pour le dire autrement que les grandes pouss es sociales n pargnaient pas la soci t de consommation En f vrier 1968 quand se dessinait une voie lectorale longeant la plate forme commune on ne pou vait gu re opposer ce sch ma qu une critique th orique Depuis la m thode exp rimentale a fait faire cet gard bien des progr s des dizaines de milliers d hommes Mai a ouvert un nouveau chapitre de notre histoire et seules les toutes premi res pages de ce chapitre sont d j crites La suite mettra de longues ann es se dessiner L ANN E WILSONIENNE DU GAULLISME Retour la table des mati res En juin 1968 galvanis s par la parole et la man uvre du pr sident de la R publique
33. 1956 et les pleins pouvoirs que r clamait le gouvernement pour r gler l affaire alg rienne S1 l on ajoute cela l quip e franco anglaise de Suez et le soutien impa vide accord par le P C l intervention russe en Hongrie 1956 prend toute sa dimension C est l ann e o la gauche fran aise de rares exceptions pr s s est d shonor e C est aussi l ann e o consid r e en tant que composante de l difice politique national la gauche s est effondr e pr parant de la sorte l ef fondrement de tout l difice En mai 1958 de Gaulle prendra le contr le d une R publique en ruines Au regard de cet norme passif l actif du Front r publicain se laisse vite recenser quelques perfectionnements aux m canismes formateurs du revenu social aide aux vieux am nagement de la s curit sociale et l octroi d une troisi me semaine de cong s pay s En outre la gauche au pouvoir sut mener une politique conomique plut t efficace malgr les influences souvent d sastreuses pour l conomie de sa politique coloniale Mais cette relative r ussite pr senta une particularit qui en r duit singuli rement la port e elle ne se distingua ni par ses moyens ni par ses fins des politiques conomiques satisfaisantes que certains autres gouvernements de droite ou du centre avaient su ou sauraient mener avant ou apr s le Front r publicain Une autre action dont la port e est souvent surestim e par les socialistes
34. Comit de d veloppement conomique r gional Colloques socialistes Concentration Concurrence internationale Convention abr viation pour Convention des Constitutions r publicaines Contre Plan Contre pouvoirs Crise conomique Crise mon taire Crise politique aux tats Unis Crise politique en U R S S E tat d p rissement de l tat r le conomique de l tat structures de l tudiants Europe March commun Ex cutif F Fascisme F d ration gt F G D S F E N F d ration de l ducation nationale autonome F G D S F d ration de la gauche d mocrate et socialiste F M I Fonds mon taire international F O Abr viation pour C G T F 0 Conf d ration g n rale du travail Force ouvri re Front populaire Front r publicain G Gaullisme Gestion loyale Grenoble Rencontres socialistes de Groupuscules Guerre atomique Guerre coloniale Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 11 Guerre locale Guerre du Tiers Monde H H g monie Horizon 1980 L Immigr s Imp rialisme Imp ts Individu Individualisme Inflation Information LN S E E Institut national de la statistique et des tudes conomiques Intelleduels I R I Instituto per le Ricostruzione industriale J Jacobinisme J C R jeunesse communiste r volutionnaire J E C jeunesse tudiante chr tienne Justice E Libert s Libre changisme
35. E dans maintes organisations paysannes influence de fa on d cisive la Conf d ration g n rale des Cadres et la plupart des organisations professionnelles de l artisanat et du commerce et dirige enfin la plupart des Chambres de commerce La troisi me tendance enfin exerce une influence pr pond rante sinon exclusive dans toutes les grandes centrales syndicales La vie sociale r elle est d une richesse in puisable qui contraint toute sim plification devenir sch matique Cependant comme l infinie vari t du r el le rend opaque toute analyse il faut bien choisir des mod les simplificateurs pour rendre la r alit intelligible Les trois tendances que l on vient de d crire et sur lesquelles on reviendra dans les chapitres suivants expriment un tel choix Deux mod les rivaux pouvaient lui tre pr f r s l un aurait pris directement appui sur l analyse des classes sociales l autre aurait Privil gi les classifications de la vie politique Mais le premier aurait conduit sous estimer ce qui para t tre l une des cl s de notre histoire contemporaine les contradictions internes de la bourgeoisie L autre aurait conduit surestimer les p rip ties proprement politiques et d tourner l attention du v ritable chantier de notre avenir la sourde transformation des structures sociales Trois illusions Retour la table des mati res Pour la prochaine d cennie certains des axes de notre histoire so
36. E et s opposait toute volution sp cifiquement ou partiellement marqu e par un protec tionnisme anti am ricain la limite souvent atteinte cette tendance tait galement atlantiste au sens conomique et militaire du terme par la forma tion d un Etat europ en elle visait un partnership am ricano europ en faisant partager ces deux continents associ s les charges et les respon sabilit s sinon les pouvoirs que les Etats Unis assument aujourd hui seuls L autre tendance celle de la France gaulliste c l brait l ancienne le r le minent des nations et non sans contradictions essayait d entra ner une Euro pe non dot e d un pouvoir tatique commun vers l autonomie Elle n excluait pas un certain protectionnisme l gard des Etats Unis et elle visait d manteler l atlantisme conomique et plus encore militaire Naturellement le jeu complet des forces politiques en Europe ne se laissait pas r duire ces deux courants et m me si l on ne consid rait qu eux seuls c tait simplifier beaucoup les choses que de pr senter la France comme porteur de l un et ses partenaires comme agents de l autre On sait combien la politique fran aise devait au seul de Gaulle On d couvre aujourd hui que sa brutale rigidit offrait de commodes alibis d autres pays apr s de Gaulle l examen de questions comme celle de l admission de la Grande Bretagne montre et montrera de plus en plus que l oppositio
37. Le contrat socialiste 1969 144 Pour tous ces domaines la proposition d actions concert es et de grande ampleur devrait s accompagner de la mise en place d instruments ad quats ou du transfert la C E E des pouvoirs n cessaires leur mise en uvre un commissariat au Plan europ en des agences sp cialis es une r forme des liens entre banques centrales et des actions communes entre firmes publiques ou priv es par conventions expresses pourraient s inscrire dans cette lanc e Par ailleurs 1l est tout aussi important de dresser un compte exact des moyens de pressions disponibles Entre la menace d un retrait complet du March commun l utilisation inventive des clauses de sauvegarde le rep rage des int r ts propres chaque partenaire sur le territoire national et l tude attentive de toutes les affaires en instance Bruxelles s inscrit un vaste espace dont il pourrait tre jou de bien des mani res Tout ce qui par l exemple et le soutien pourrait renforcer chez nos partenaires la puissance et l lan des forces syndicales et politiques aptes impulser dans leur pays des exp riences et des coalitions politiques en harmonie avec les n tres serait consid rer de m me partir de l capacit d action nationale renforc e int r ts communs exactement cern s moyens de pression d ment recens s une marge d action Peut s ouvrir et des compromis deviennent envisageables videmment il se
38. Ligue communiste ex J C R Lutte des classes M March commun Mend sisme Monopoles N Nationalisations O O A S Organisation de l arm e secr te Objectif Ordre mondial O R T F Office de radiodiffusion et de t l vision fran aise y Parlement Parti Paysannerie gt Classes paysannes P C Parti communiste P D G pr sident directeur g n ral Petite bourgeoisie Plan P M E Abr viation pour Conf d ration g n rale des petites et moyennes entreprises Police Politique contractuelle Population active Population par ges Population par r gions Population urbaine Pouvoir sur l avenir Pouvoir dissym trie du Pouvoir dans l tat Pouvoir sur le march Pouvoirs partage des Pouvoir prise du Pouvoir r seau du Pouvoir dans la soci t civile Pr sidentielles lections Projet r formateur Programme P S U Parti socialiste unifi R Radical parti et parti socialiste R cession Reconversion R formes de structure R gions R volution en France R volution du Tiers Monde R volution de 1917 S S D S Sozialistischer Deutscher Studentenbund F d ration des tudiants socialistes allemands Secteur public S E E F Service d tudes conomiques et financi res Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 12 S F L O Section fran aise de l internationale ouvri re sigle du parti socialiste S G E N Syndicat g
39. OUBLI E Retour la table des mati res S1 l on saute de 7929 aux ann es de notre apr s guerre le tableau change sensiblement Au lieu des crises d cennales profondes et internationales on n a plus enregistr que des r cessions b nignes faiblement contagieuses et p riodicit plus irr guli re et plus courte On a d abord imput ce changement des circonstances contingentes les n cessit s de la reconstruction le nouvel lan d mographique des pays riches etc Puis comme le nouveau climat conomique se r v lait durable d autres analyses ont l gitimement pr valu Elles soulignent en premier lieu deux modifications structurelles de l co nomie capitaliste d une part des entreprises concentr es jouent d sormais un r le de leader dans l conomie et leur taille tout la fois les contraint pr voir l volution possible du march et leur en donne les moyens d autre part la distribution des revenus est prot g e des fluctuations cycliques les plus amples par le barrage d fensif des syndicats puissants par la multiplication des transferts sociaux ind pendants de la production allocations familiales 1 Entre une crise et une r cession la diff rence principale est celle ci la crise entra ne un recul sensible de la production la r cession aboutit seulement un ralentissement de sa croissance Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 34 s curit sociale etc ou m
40. Parall lement le reflux de la paysannerie exc dentaire se poursuivra jusqu r duire d un tiers au moins l actuelle population active agricole mais sans que pour autant le r quili brage ville campagne soit d j achev vers 7980 1985 Enfin dans ces dix ou quinze ann es les professions qui depuis 7945 sont demeur es l abri des grandes mutations y seront leur tour plong es quand les banquiers se r forment enfin ce fut le cas en 7966 1968 le temps n est pas loin o les notaires et autres professions lib rales devront faire de m me et l on sait que le plus s r r sultat de mai 7968 aura t de projeter l enseignement vers sa r forme De ces transformations qui pour la plupart affaibliront la petite France il serait vain d attendre un assainissement spontan du climat politique Bien au contraire tout un potentiel de ressentiments va na tre ou plut t s enrichir de ces mutations Mais un premier choix politique s ouvre la gauche doit elle se crisper dans la d fense des droits acquis et privil gier l alliance de toutes les victimes du capital monopoliste ou bien s efforcer de capter le potentiel de r formes qui sourd du pays d finir les transformations les plus urgentes et tout faire pour les imposer La premi re solution qui est traditionnelle est aussi d plorable Elle procure d instables soutiens mais favorise la survivance de ce qu il y a de plus r actionnaire dans notre pay
41. REFORMES DE STRUCTURE Retour la table des mati res En reprenant la terminologie et l analyse d Andr Gorz on peut dire que la gauche doit se donner pour objectif d inscrire dans le r seau du pouvoir le plus possible de contrepouvoirs c est dire de centres de d cisions sensibles ou sensibilisables plus que d autres son influence et de d fendre les contre pouvoirs qu elle a su cr er Toute participation au fonctionnement d un centre de d cision est n cessairement ambigu r versible expugnable En tirer argument pour l abstention c est se condamner l impuissance jusqu l ventuelle R volution Mais renverser l argument pour pr ner toute participation ne serait pas plus raisonnable Le crit re que propose Gorz est retenir sauf en pr ciser la port e concr te en chaque p riode non selon quelque a priori doctrinal mais apr s un examen attentif de la situation effective L alternative est entre des pouvoirs subalternes et des pouvoirs autonomes Par pouvoirs subalternes il faut entendre l association ou la participation des travailleurs une politique et une gestion conomique dont on les incite partager la responsabilit au niveau des r sultats et de l ex cution tout en leur interdisant de se m ler des d cisions ef des crit res en vertu desquels cette politique ef cette gestion ont t arr t es C est donc bien de s inscrire dans le r seau du pouvoir qu il s agit et
42. actionnaires et qui donc sous estime le d clin de la petite entreprise Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 66 avaient finalement peu d cider La situation a radicalement chang au cours des vingt cinq derni res ann es jusqu faire des minist res parisiens les d cideurs principaux du pays tout en les soumettant eux m mes la tutelle du minist re des Finances La France est ainsi devenue le plia centralis de tous les tats capitalistes modernes alors que jadis sa centralisation supportait encore la comparaison avec d autres par exemple avec celle de la Prusse au XIXe si cle La centralisation politique et l individualisme petit bourgeois sous tendus par la pr pond rance de la petite entreprise parse des campagnes et des villes formaient un couple sans doute quilibr Aujourd hui l effondrement de la petite entreprise rompt cet quilibre tandis que la concentration des fir mes le d s quilibre des r gions et l int gration europ enne cr ent de nou veaux besoins d ailleurs ambivalents On peut plaider le dossier d une nouvelle centralisation destin e quilibrer le pouvoir de firmes puissantes par la puissance des pouvoirs d Etat et donner forme et vigueur la r gion fran aise dans l Europe naissante On peut aussi plaider le dossier d une d centralisation radicale on le verra plus loin Mais l un et l autre dossier peu vent se charger de contenus politiques tr s
43. actualit donne une force particuli re aux probl mes de l emploi est on s r d avoir tudi cette fonction sociale au point de poss der une claire politique de l emploi et une bonne strat gie de d fense de l emploi LES LUTTES SOCIALES Retour la table des mati res Vient enfin le dernier l ment du pouvoir le jeu des luttes sociales Leur action est multiple La principale et la plus constante est de polariser le r seau des centres de d cision d aimanter le syst me des d cisions Cette action ne s exerce jamais durablement dans le m me sens Les luttes sociales sont actives ou latentes mobiles ou retranch es et conduisent des victoires et des d faites partielles Le barom tre des luttes sociales oscille en permanence et le r seau du pouvoir re oit des incitations galement oscillantes Cette action ne s exerce non plus jamais avec une force irr sistible annu lant toutes les inerties du r seau Longtemps apr s le succ s d une r volution la v rification en a t faite dans la France du XIXe si cle et dans l U R S S d apr s 1917 des maillons du r seau ancien subsistent c est dire combien En outre ne serait il pas illusoire de penser que la r forme de l Universit si elle r ussit prendre corps va suffire op rer l ajustement des centres de d cision et des syst mes de d cision n cessaire l accomplissement de cette fonction Une part essentielle de cette fonction de for
44. aise ou le statut mort n octroy l Alg rie en 1947 ne peuvent faire oublier les massacres de S tif et d Haiphong En acceptant par habilet tactique d tre complices de ces crimes les partis au pouvoir pr paraient leur chec suivant Malgr les r sultats acquis la g n ration de la Lib ration se consid re souvent comme une g n ration perdue et place son exp rience au rang des checs L cart entre les projets de la R sistance et les r alisations de la Lib ration les luttes violentes qui oppos rent apr s 1947 des hommes qui s taient retrouv s ou d couverts quelques ann es plus t t et qui croyaient avoir tir les le ons des erreurs de 1937 1938 l impuissance viter ou terminer les guerres coloniales les compromissions des socialistes dans la troisi me force l viction ou la subordination par un P C stalinien de ses cadres issus de la r sistance nationale le spectacle enfin des anciennes clas ses dirigeantes reprenant le contr le de la nation assujettissant leurs fins les r formes de 1945 et trouvant une force nouvelle dans un essor conomique qui leur avait t impos telles sont les raisons de cette amertume 1 Comme celles de la Providence les voies du progr s social sont souvent d tourn es le droit de vote accord aux femmes fut assur ment un progr s riche de cons quences qui ne se sont pas encore toutes d ploy es mais son premier effet qui dure encore
45. aussi g n ral que possible et tel que le plus grand nombre s y retrouve Ceci suppose notamment un certain arbitrage une certaine hi rarchisation des besoins et projets imm diats car tout n est jamais possible en m me temps et les coalitions d int r ts b ties sur un vague il faut que a change n ont chance de d boucher qu en d exceptionnelles p riodes de malaise aigu et g n ralis Ce souci de convergence et de coh rence ne d rive pas d un id al abstrait de rationalit mais d un besoin pressant d efficacit Ce n est pas d une coh rence intellectuelle qu il s agit mais d une coh rence active En telle conjoncture politique il convient de produire un syst me tr s vaste de projets ordonn s au soutien duquel une majorit lectorale pourra se consacrer En telle autre conjoncture il convient au contraire de conduire une perc e locale ou partielle au d blocage d un obstacle d cisif ou l exploi tation d une faiblesse particuli re du syst me des int r ts en place S1 la gauche r ussit prendre appui sur les principales forces de change ment qui travaillent notre soci t si elle r ussit coordonner leurs pouss es en un faisceau convergent le pouvoir sera en vue Par quel cheminement selon quelle proc dure et quel calendrier Ces questions il faut le souligner sont secondaires ou plut t secondes que la gauche sache d abord ce qu elle fera du pouvoir qu elle sache gale m
46. avait rompu le charme la gauche en miettes s est trouv e contrainte de r v ler sa v rit elle a sembl moribonde Ainsi la gauche fran aise vient de conna tre son sixi me chec majeur en cinquante ans DU PASS FAISONS TABLE RASE Retour la table des mati res La mont e vers la guerre en 7914 en 1937 1938 et d une autre mani re en 17947 la r sistance du mur d argent en 7924 les soubresauts de la d colonisation en 7956 1958 telles paraissent tre les causes principales des checs pr c dant celui de 7968 1969 On peut en tirer la conclusion que les exp riences de gauche p rissent toujours par quelque d faut de politique internationale ou subsidiairement de politique mon taire La le on est retenir d autant que la politique trang re a aussi pes d un grand poids en mai 7968 on le verra On peut galement invoquer la nature des choses toute exp rience de gauche m me mod r e d range l ordre tabli ou menace de le d ranger N est il pas normal qu un pays capitaliste supporte mal la pr sence aux affaires de gouvernants qui contestent les structures sociales existantes M me s ils se proclament g rants loyaux du capitalisme n y a t il pas d autres g rants plus loyaux encore et disponibles foison Ainsi les checs de la gauche renverraient ses faiblesses propres soit qu elle n ait pas eu la force ou la volont de bouleverser l ordre tabli soit qu elle n ait p
47. c est dire fond sur d abondantes r serves d hommes et de mati res pre mi res et sur une priorit forte aux industries de base Il est aussi apparu comme un syst me social et politique d essence bureaucratique Puis encore apr s 1945 comme un syst me h g monique dans l ordre international on y reviendra Un ensemble de contradictions propres au camp socialiste s est manifest peu peu contradictions entre classes sans doute couronn es par l antago nisme entre la bureaucratie politico administrative et la bureaucratie techni Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 30 cienne mais on dispute beaucoup de la place n cessaire ou al atoire qui re vient la hi rarchie militaire puis apr s 1945 contradictions entre nations socialistes Il est tentant mais peu efficace de r duire l identique les contradictions d celables au sein de chacune des deux zones principales et pour s en tenir celles qui sont de l ordre international d identifier l imp rialisme am ricain et l imp rialisme sovi tique On voit ais ment de quels arguments la th se peut faire tat Elle n en est pas moins fausse Les tats Unis sont une puissance imp rialiste qualit qu ils partagent des degr s divers avec bon nombre d autres pays capitalistes d velopp s dont la France Ils sont en outre une puissance h g monique plus puissante que ne le fut la Grande Bretagne au XIXe si cle ou que ne r va de
48. centrer trop souvent sur la d fense de ce qu elle avait d j acquis Les r ac tions conservatrices qui se font parfois jour parmi les syndicats d enseignants ou de fonctionnaires et le pass isme de certaines couches salariales rel vent de cette attitude 1 L autoritarisme et le conservatisme ont toujours secr t en France leur antidote une vie intellectuelle libre active innovatrice peu favorable la professionnalisation du savoir mais tr s propice au lancement des id ologies des campagnes d opinion ou des modes Les intellectuels sont l anti Etat Parce qu ils ont peu d influence leur pens e est plus audacieuse Alain Touraine le Mouvement de Mai ou le communisme utopique ditions du Seuil 1968 2 VoirF Bon et M A Burnier les Nouveaux Intellectuels Cujas 1966 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 75 Se m fiant de l expansion capitaliste trop souvent sur la d fensive parfois conservatrice cette tendance n en est pas moins activement ou potentielle ment selon les circonstances la grande force de contestation celle qui subit l ordre social plus qu elle ne l accepte celle qu il faut apaiser par une expan sion soutenue celle qui jusqu pr sent ne s est jamais laiss durablement apaiser par une telle expansion DES TENDANCES AUX ORGANISATIONS Retour la table des mati res Les rapports entre les trois tendances qui viennent d tre d crites et les organisations de toute na
49. centres de d cision lointains responsables de ces manifestations D o une seconde r duction de l aptitude des Etats jouer leur r le r gulateur l La politique d inspiration lib rale men e par Giscard d Estaing a sensiblement affaibli le r le de l Etat comme banquier et a plus ou moins bloqu la planification 2 Ft a fortiori chaque tat latino am ricain Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 36 Il en va de m me sous un troisi me angle encore L un des aspects des progr s conomiques r alis s depuis un bon si cle tient la longue port e des d cisions que doivent prendre les Etats et les grandes entreprises nationales ou multinationales Il y a un si cle seule la cr ation des r seaux de commu nications et de t l communications engageait lourdement l avenir On sait par exemple de quel poids fut pour la France la d cision de centrer sur Paris l toile des voies ferr es Aujourd hui les d cisions relatives de nombreux programmes d investissement ou de recherche atome espace ordinateurs etc au lancement de nouveaux produits automobile habitat etc ou de nou velles techniques automatisation etc l agencement de certaines fonctions sociales comme l enseignement entra nent la mise en uvre de moyens immenses et comportent des cons quences qui se d ploient sur des d cennies Leur co t et leurs effets d entra nement rendent ces d cisions difficilement r v
50. ces arguments selon la nature et l importance des d cisions administratives consid r es Sous cet angle il est vident qu au niveau des grandes directions minist rielles les d cisions Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 157 politiques de premier plan sont englu es dans une mar e immense de d ci sions administratives subalternes Le Tr sor ou le Budget pour ne prendre que ces exemples consacrent plus de temps et peut tre plus de soins traiter de cas particuliers plut t qu fixer leur strat gie d o des cons quences comme celles ci tout en se m lant activement de la politique d urbanisme et de construction on peut dire qu ils n ont pas de politique d lib r e en la mati re que les cons quences des d cisions d j prises sur l quilibre futur du budget ou de la tr sorerie leur chappent souvent n anmoins il n est pas un pr t sp cial du Cr dit foncier qui ne soit d lib r en pr sence d un repr sentant du Tr sor Il n est pas vident autre exemple que la politique de constructions scolaires ait fait nagu re comme aujourd hui l objet de pr visions fort atten tives ni que les proc dures de passation des march s de financement des op rations d acc l ration des d lais de coordination des livraisons avec le calendrier scolaire etc aient mobilis tous les soins requis Cependant il n est pas une seule classe suppl mentaire construite ici ou l qui ait t b
51. chef de l tat du 27 au 30 mai la balance oscilla Le pouvoir politique sembla s effondrer et une solution Mend s France s esquissa Dans cette conjoncture d licate la tendance qui domine habituellement la vie nationale le parti de l expansion et qui depuis le d but du mois h si tait et t tonnait se r solut une attitude plus active sinon plus claire la diff rence de la bourgeoisie b te et born e de la petite France la bourgeoisie d affaires sut appr cier leur juste valeur les efforts de la C G T pour endi guer le mouvement Le temps tait venu de n gocier d tre g n reux de miser sur l expansion pour remettre ensuite les choses en ordre f t ce par l inflation et m me par une d valuation Au cours des discussions de Grenelle il n y eut que les repr sentants des P M E et de la C G C c est dire du parti de l ordre pour regimber quel que peu Puis comme cette n gociation semblait ne pas suffire d clencher le reflux on en vint envisager aussi un changement d quipe politique La cg solution Mend s France eut aussi des partisans de ce c t Mais d j pr c dant le reflux de la gr ve celui de l opinion flottante s am plifiait De Gaulle par son discours du 30 mai convertit ce reflux en d route Le parti de l ordre enfin r unifi d fila sur les Champs lys es L PREUVE DE V RIT Retour la table des mati res Secou es par la temp te de mai l
52. ches essentielles pr voir orienter concerter coordonner Prenons l exemple du Budget qui est l un des plus clairants puisque les choix budg taires influencent profond ment toute la vie nationale Les termes de r f rence des choix budg taires sont ou devraient tre l ad quation du budget au plan son action sur l quilibre conjoncturel de l conomie son ajustement des besoins r gionaux et locaux in gaux son adaptation aux besoins des services administratifs son ad quation au traitement de mille probl mes de toutes tailles des prix agricoles au niveau des revenus dans les firmes publiques dont certains sont durables gestion du secteur public et d autres occa sionnels 6 son ajustement aux capacit s contributives des agents conomiques 7 son contr le d ex cution avec les effets en retour sur les choix budg taires ult rieurs Lt vo ut Or ces sept crit res jouent actuellement de fa on confuse contradictoire et selon une hi rarchie irrationnelle Les deux derniers ont une absolue priorit les deux premiers sont une r f rence souvent d corative le tout ensemble conduit des arbitrages dont les cons quences se r v lent arbitraires au niveau de maints utilisateurs Une r forme fondamentale n cessairement li e une profonde d centra lisation devrait tendre renforcer sensiblement le poids des crit res 1 et 2 et renvoyer les crit res 5 et 7 ainsi que l essentiel des
53. concentration et de la centralisation du capital pour arriver aux grandes entreprises puis aux agr gats d entreprises affili es a un m me groupe finan cier En grimpant cette chelle les pouvoirs exerc s par la firme puis par la grande firme puis par le groupe changent progressivement d ampleur Des fonctions sociales qui autrefois taient toujours la r sultante al atoire de milliers de d cisions parses entrent d abord confus ment puis clairement puis d lib r ment dans le champ du pouvoir de ces firmes ou groupes C est ce que l on peut synth tiser en deux formules le pouvoir sur le march et le pouvoir sur l avenir Le pouvoir sur le march est bien connu C est celui qu exercent les firmes d s qu elles sont en mesure d chapper la concurrence aveugle Une certaine ma trise des prix li e un relatif monopole en est le premier stade Une exploration m thodique de la demande puis son conditionnement publicitaire forment l tape suivante Vient ensuite le blocage de la concurrence virtuelle ou potentielle par alliance absorption ou par monopole de la recherche Le dernier stade est la fabrication de la demande la cr ation de besoins paral l le au lancement de produits nouveaux dont l utilit intrins que ou l urgence sociale sont au d part peu videntes Au d part car ensuite les besoins ainsi implant s se mettent vivre de fa on autonome et parfois intense la France en est au besoin
54. conomiquement dramatique LE D SORDRE MON TAIRE INTERNATIONAL Retour la table des mati res Il reste enfin un dernier l ment de fragilit le syst me mon taire inter national Depuis les accords de Bretton Woods en 1944 trois monnaies sont admises comme r serves par la plupart des pays l or le dollar et la livre On peut n gliger la troisi me qui bien avant la d valuation de 1967 ne jouait 1 Ce ne fut m me pas une d cision claire mais la r sultante aveugle de microd cisions parses C est aussi et surtout pour r duire les al as du d veloppement moyen et long terme que le besoin de planification s accro t Voir Claude Gruson Origine et Espoirs de la planification fran aise Dunod 1968 Pierre Mass le Plan ou l anti hasard coll Id es 1965 Pi Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 37 plus qu un r le subsidiaire et pr caire De 1944 1965 le syst me mon taire international a fonctionn de fa on correcte en ce sens qu il a permis l expansion du commerce international il n a pas entrav l essor conomique mondial mais l a plut t servi par son lasticit inflationniste Mais cette capacit inflationniste est devenue inqui tante Il faut en com prendre le m canisme pour appr cier correctement la crise mon taire qui menace depuis 1965 En cr ant des dollars suppl mentaires pour quilibrer leur balance des paiements les Etats Unis se mettent dan
55. d cisions li es au crit re 4 la responsabilit exclusive d autres instances que le Budget des minist res les r gions les collectivit s locales les tablissements publics selon les cas sauf d finir correctement les proc dures du contr le d ex cution et les responsabilit s politiques administratives financi res et pourquoi pas p nales y attach es Le produit sortant des centres de d cision tatiques sous forme d ordres destin s des chelons administratifs subordonn s devrait se r duire une trilogie coh rente Il des missions des moyens des responsabilit s la d cision revenant ces services et le contr le ne s exer ant qu a posteriori La diff rence entre des Il moyens Il et des Il enveloppes Il tient au fait que les secondes sont globales et libres d emploi alors que les moyens sont affect s encore faut il qu ils ne le soient que par masses et non jusqu l extr me d tail jamais un ministre de l ducation nationale ne saura s il vaut mieux tel endroit construire une classe de plus ou employer un instituteur suppl mentaire d o cons l enveloppe de cr dits d l gu e l autorit d centralis e jamais un directeur g n ral des imp ts ne saura s il vaut mieux tel endroit repeindre un bureau ou acqu rir une machine crire d o des moyens r partis par masses et utilisables sous la responsabilit du d cideur local m me si ses pouvoirs ne r sultent que
56. d autre solution que de convertir une fraction des lecteurs en autant d antennes Ce que les forces de gauche demandent leurs lecteurs se r duit tradi tonnellement deux mod les Dans le premier le plus banal il leur est demand d apporter sagement leurs voix en toute lection et de conserver bravement leur confiance aux lus et aux organisations de gauche jusqu la prochaine Dans le second le plus rare il leur est demand de se convertir soudain en militants de plein exercice de se passionner pour les th mes que l organisation politique choisit de privil gier et de consacrer leur activit l accomplissement de t ches que cette organisation d clare prioritaires quand ce n est pas au respect des rites internes auxquels tant d organisations se limi tent si souvent dans l intervalle entre deux lections Entre ces deux mod les s tend un espace immense peupl de rares sympathisants et de militants sp cifiques ou comme disent beaucoup d entre eux non politiques Avec ces deux mod les le r sultat est bien connu une masse d lecteurs dont beaucoup flottent d un camp l autre de rares militants isol s des masses et que leur isolement conduit la complaisance pour les rites qui les singularisent d occasionnelles pouss es d adh sions dont le s diment utile est mince et devient vite indiscernable du stock ancien des adh rents La masse immense des lecteurs de gauche allergiques l ad
57. d une simple d concentration Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 161 A destination des autorit s d centralis es et autonomes le seul produit devrait tre des orientations des enveloppes et des incitations Sans multiplier les observations de ce type et par del les difficult s de mise en uvre qui seraient en d finitive fonction de nos habitudes acquises on peut en apercevoir la port e g n rale La politique europ enne la politique conomique la politique agricole la politique universitaire et bien d autres champs de la politique pourront gagner en soins en finesse en adaptabilit tout ce que les services centraux auront gagn en moyens et en temps se d sengluer des d tails et de la gestion m me si une part des moyens centraux seront affecter localement ou consacrer des t ches de contr le a posteriori devenues plus complexes D CENTRALISER ET D S TATISER Retour la table des mati res S il faut renvoyer l Etat au ciel il faut aussi renvoyer sur terre au c ur m me de la soci t civile une bonne part de ce qui est aujourd hui et jusque dans le dernier d tail de la comp tence des administrations centrales La d concentration du pouvoir de d cision pos e en r gle g n rale et ne souffrant que des exceptions sp cifiquement d finies alors que la r gle inver se est aujourd hui de rigueur la d centralisation effective vers des entit s autonome
58. de comprendre pourquoi les classiques hausses de salaires ne suffisaient pas r soudre le conflit Quand les gr ves sauvages du Mans ou de Caen clat rent au d but de 1968 c e t pu tre l occasion de comprendre ce qu taient et ce que voulaient les jeunes ouvriers qui d bordaient les organisations syndicales et combattaient le service d ordre Quand Nanterre devint ingouvernable partir de novembre 1967 c e t pu tre l occasion d entrevoir ce qui m rissait dans l Universit Si toutes ces exp riences de Besan on Nanterre avaient t m dit es la surprise de mai 1968 e t elle t aussi grande Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 182 M me s ils ne sont pas annonciateurs de cons quences aussi lourdes et aussi rapides tous les mouvements spontan s de la soci t m ritent de retenir en priorit l attention Une omnipr sence attentive une volont de comprendre avant d expliquer et une gale volont de plier les sch mas de raisonnement aux faits observables sont les caract ristiques dominantes du nouveau comportement politique qui est indispensable Mais la gauche a t elle les moyens d tre partout pr sente et partout attentive Si l on en juge par le nombre et la qualit de ses militants perma nents la r ponse est assur ment n gative Si l on en juge par l importance et l omnipr sence de son lectorat il n en va plus de m me Pour comprendre ce qui se passe dans le pays il n est
59. de ces groupes leaders d autres cat gories sociales souvent rassem bl es dans le m me ordre de bataille La premi re tendance celle qui a exerc bon an mal an l influence la plus forte celle donc des v ritables classes dirigeantes est anim e par la grande bourgeoisie d affaires et par la haute administration Cette derni re a 1 Aviv e par l aide que la IVe R publique crut devoir accorder aux coles confessionnelles pour pallier l insuffisant d veloppement de l enseignement public Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 72 exerc un leadership incontest sit t apr s la guerre puis l a progressivement perdu mesure que l expansion portait ses fruits le d sengagement de l Etat auquel Giscard d Estaing s est employ en 1963 1965 a constat et amplifi ce transfert d influence La seconde tendance a de plus larges fondations elle repose sur le gros de la bourgeoisie industrielle commerciale et agraire sur l arm e des P M E et des agrariens La troisi me enfin a pour base non pas les salari s pris dans leur totalit ni m me l ensemble de la classe ouvri re on sait trop de quelles fluctuations ces deux ensembles ont t le si ge mais bien ce que l on pourrait appeler le noyau organis des salari s l l ment relativement stable qui a fourni aux syndicats et en partie aux formations politiques de gauche leur encadrement tous niveaux LA TENDANCE DE L EXPANSION R
60. de reclasser les rapatri s en tait pour une part responsable Mais il en est r sult que l expansion a t accompagn e de 1965 1968 d un progr s du ch mage et d un ralentissement de l exode rural Peut tre m me la renaissance des craintes de ch mage entre t elle pour beaucoup dans la baisse r cente de la natalit Toujours est il que ces diverses volutions contredisent par bien des c t s les tendances observ es depuis vingt cinq ans Ce serait pourtant prendre un risque que d extrapoler pour la prochaine d cennie les tendances r centes n es d une conjoncture politique et conomi que particuli re plut t que les tendances ant rieures LES D SERTS FRAN AIS Retour la table des mati res La population fran aise semble devoir s accro tre d environ 1 par an d ici 1975 1980 Mais ceci n emp chera pas la d sertification de vastes r gions du pays Ainsi le quadrilat re que bornent Poitiers Lyon N mes et Toulouse tend se vider sauf aux abords imm diats de Saint Etienne Limoges Clermont Ferrand et d une douzaine d agglom rations plus petites Ce d sert virtuel s tend sur un huiti me environ du territoire national Avec les autres r gions d j vid es ou en passe de l tre plus du quart du pays est ainsi en n crose Au stade actuel du d veloppement conomique il faudrait 80 100 millions d habitants pour peupler correctement la France exploiter toutes ses potentialit s
61. des lois dont la port e n est pas la m me en toutes situations Au voisinage de certaines limites les propri t s 1 Y compris dans une certaine mesure les associations sp cifiques que forment les entreprises syndicats professionnels chambres de commerce etc Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 97 physiques des corps deviennent anormales Ainsi la glace peut parfois s vaporer sans repasser par l tat liquide Il en va sans doute de m me pour les ph nom nes sociaux Au voisinage de ces limites que sont la guerre le fascisme ou dans un autre ordre d id es la situation r volutionnaire le pouvoir d Etat se trouve dot d une pr minence absolue Mais n est il pas d raisonnable d appliquer le m me raisonnement au cours ordinaire de la vie m me si cet ordinaire est marqu par quelque crise conomique ou politique grave Dans ce cours ordinaire les pouvoirs qui s exercent dans l ordre tatique et dans l ordre conomique sont difficilement hi rarchisables Ils coexistent se soutiennent s interp n trent et ne se diff rencient gu re que par l effet d une division du travail aux fronti res mouvantes En tout cas et l on en vient ainsi la troisi me question pos e il vaut la peine de tenter une analyse unitaire du pouvoir de l ensemble des pouvoirs qui s exercent simultan ment dans une m me soci t On verra bien si elle permet non seulement de rendre un peu mieux intelligible cette so
62. du protecteur am ricain l gard de la r volution fran aise Faut il beaucoup d imagination pour voir se dessiner le cordon sanitaire qui e t entour la France et le soutien actif que les r sistances en France eussent trouv es de ce c t Quelles r sistances Battre les forces de l ordre puis les purer et les remplacer asphyxier un gouvernement d consid r et impuissant et le con traindre s effacer tout cela ne suffit pas tant s en faut garantir le triomphe d une r volution ce n est qu un petit d but Apr s 1l faut en pleine bullition sociale remettre l conomie en marche et plus ou moins vite d molir et reconstruire de multiples institutions cono miques politiques administratives judiciaires etc Faire fonctionner norma lement l conomie dans un tel chantier n e t pas t facile Mais qui parle d un fonctionnement normal de l conomie alors qu il s agit d une r volution Soit 1 C tait la marche acc l r e vers la nationalisation de la plupart des firmes de quelque importance et l exode d une partie des cadres bourgeois C tait aussi une alliance solide de tous les courants de la bour geoisie et de leurs satellites des classes moyennes c est dire une sainte alliance de tous les poss dants C tait donc l amorce d une lutte de classes ouverte durable s v re dans une France isol e et s appauvrissant vite Fallait il escompter le secours du camp socialiste Il
63. effectif des personnels g rer la De bons esprits viennent n anmoins de plaider Pour nationaliser l tat ditions du Seuil 1968 ce qui n est pas sans rapports avec la th se soutenue ici Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 156 plus grande entreprise du monde si son quipement en ordinateurs le met en mesure de remplir ses t ches avec pr cision et souplesse Et surtout ne faut il pas s incliner devant cette contradiction majeure l exigence d mocratique qui tendrait rapprocher l chelon de d cision des citoyens objets de ces d cisions et faire participer le plus grand nombre aux proc dures de d cision n est elle pas incompatible avec l exigence d efficacit qui se traduit non seulement par le besoin de d cisions rapides l ordinateur y pourvoira mais aussi de d cisions prises sereinement loin des pressions imm diates des int r ts concern s et enfin de d cisions ex cut es pleine ment et rapidement sans que les int r ts touch s y puissent faire obstacle Ce bon dossier souvent plaid avec fougue par tous nos jacobins n em porte cependant pas la conviction On peut d abord en faire une critique empirique en montrant les lenteurs les embouteillages les tergiversations d administrations ici engorg es l impuissantes et en se r f rant au jeu multiforme des int r ts aptes se faufiler dans les circuits administratifs les plus sot riques On peut douter auss
64. en voie de r unification serait difficile mettre en oeuvre si la gauche politique demeurait ce qu elle est divis e souvent d moralis e parfois d sabus e Si la r unification syndicale progressait n anmoins sans que la gauche r ussisse reprendre vie et forme d autres dangers pourraient poindre en peu d ann es le syndicalisme serait alors port suivre les exemples allemand ou am ricain C est dire combien les restructurations souhaitables dans le secteur syndical comme dans le secteur politique peuvent s influencer r ciproquement en bien comme en mal par action comme par omission Mais s il est permis d tre impatient il faut pourtant se garder d appliquer au domaine politique un raisonnement sym trique de celui que l on a tenu en mati re syndicale Ici en effet il s agit autant de trier que de rassembler La gauche non communiste offre actuellement trois virtualit s Il est sou haitable que chacune des trois puisse m rir Deux d entre elles n ont aucune vocation r nover la gauche mais sont sans doute indispensables pour la Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 205 purger La troisi me offre de plus utiles promesses On dira des deux premi res qu elles sont l une r volutionnaire et l autre r publicaine pour r server la troisi me le caract re socialiste La gauche r volutionnaire qui mijote dans le secteur groupusculaire et que la Ligue communiste de Krivine ralliera pe
65. et politiques ou syndicalistes et ce tous les niveaux de responsabilit et selon des proc dures qui peuvent tre autant que de besoin discr tes comme une consultation ou publicitaires comme un colloque est donc de premi re n cessit Il serait cependant tr s dommageable que la politique contractuelle se cantonne dans la seule recherche aussi indispensable soit elle Il est en effet en politique des besoins et aussi des temp raments qui juste titre ne s accommoderaient pas d une telle sp cialisation Elle conduirait au total un chec Par contre sa cr dibilit sera accrue si parall lement ou conjointe ment le contrat fleurit d autres fins c est dire en vue d actions Mais cet gard une distinction para t n cessaire Il y a dans le quotidien de l action politique de fr quentes Occasions o des forces diverses se conjuguent pour un bref moment puis se disjoignent ensuite avant de se rapprocher de nouveau selon des configurations varia bles ce sont les mouvements vari s les pulsions ordinaires les gr ves spora diques les scandales locaux les campagnes occasionnelles etc Il serait d raisonnable d essayer de mouler de tels mouvements dans une forme con tractuelle car leur nature ph m re et aussi le cas ch ant le potentiel aigu de divergences qui s efface temporairement dans une conjonction incidente tendraient faire voler en clats tout contrat et invalider la notion m
66. faut beaucoup d imagination pour voir l U R S S s encombrer d une nouvelle Tch coslova quie plus remuante encore et prendre pied de la sorte en Europe occiden tale ce qui serait un casus belli entre les deux Grands Il faut moins d imagi nation pour voir se r aliser en ao t 1968 ou un peu plus tard un march du type je te laisse ta France et je m occupe de ma Tch coslovaquie Bref la r volution engag e en mai e t t en juin victorieuse presque sans coup f rir puis sans doute tr s vite vaincue et noy e dans le rang LES R ALISTES Retour la table des mati res Les communistes ont donc eu raison de ne pas engager cette r volution l N y avait il pour autant d autre issue la crise de mai que la d route de juin Le P C qui r clamait inlassablement un gouvernement d union popu laire et qui fit appuyer ce mot d ordre par la puissante manifestation du 29 mai estime qu un tel gouvernement aurait pu voir le jour si la F G D S avait Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 121 r pondu ses appels pressants pour convertir la plate forme commune de f vrier en un programme de gouvernement si les syndicats non c g tistes avaient leur tour accept de s associer ce programme et de soutenir cette perspective si toutes ces forces politiques et syndicales avaient joint leurs efforts pour ma triser l aventurisme des groupuscules et reprendre le con tr le du mouveme
67. grande partie de la gauche fran aise vit ce changement avec des id es h rit es de la fiabilit ancienne ou conserve le souvenir des anciennes possibilit s de rupture de l ordre social Les uns pr parent inlassablement le Front populaire d autres r vent encore au Cartel des gauches d autres s entra nent pour la R volution de 1917 Il serait temps de se pr parer vivre en 1970 ou en 1980 L avenir inventer Retour la table des mati res Quelques propositions brutales viennent d tre ass n es sans preuves Ce sera l objet des chapitres suivants de les argumenter et d en expliciter les cons quences L encha nement de ces chapitres est n cessairement arbitraire car la poli tique touche tout Aussi a t on veill ce que le lecteur entrant dans ce livre au gr de ses curiosit s puisse l utiliser dans l ordre qui lui plaira chaque chapitre est divis en longs paragraphes relativement autonomes et une table analytique vient compl ter la table des mati res pour guider les choix Les six chapitres qui suivent s ordonnent ainsi L environnement chap 2 traite du champ de forces international dans lequel la France est inscrite et des contraintes qui peuvent en r sulter quant la libert d allure de notre pays et quant aux possibilit s d action de la gauche fran aise Le poids de la politique internationale dans les checs pass s et r cents de la gauche oblige en effet tenter une tell
68. il est de la logique du March commun qu elle s acc l re et s amplifie Le soin avec lequel il a fallu plaider en juin 1968 le dossier des restrictions provisoires l importation destin es pallier certaines cons quences des gr ves montre bien comment l Etat souverain est entrav Ici appara t une contradiction d j rencontr e les pouvoirs perdus souvent n cessaires la r gulation de l conomie la politique anti crises devraient tre reconstitu s l chelle du march Mais ce besoin d un pouvoir politique progressivement applicable l Europe des Six se heurte des r sistances politiques tr s vives o le gaullisme avait sa part mais o les autres nations concern es jouent galement un r le et o les vis es propres des gauches ventuellement au pouvoir ici ou l interviendraient galement Ainsi la formation progressive d un Etat europ en devient n cessaire avant de devenir possible Cette distorsion est durable non seulement parce qu elle est aujourd hui entretenue par des blocages politiques mais aussi parce qu supposer ces blocages lev s il est douteux que la formation d un Etat europ en puisse s accompagner sans d lais du transfert effectif d un ensemble de comp tences exactement ajust es aux besoins Une chose est de constater que l Europe mine les Etats autre chose est de les voir se dessaisir formellement de tous les pouvoirs dont le transfert serait utile Donc toute
69. illustrer la variante fran aise d une politique plus ou moins internationale quelques s quelles pr s l Internationale communiste est morte mais elle survit encore dans la t te d une majorit de communistes fran ais D o leurs blocages Malgr des nuances de plus en plus sensibles malgr des inqui tudes de moins en moins voil es la Politique que d finissent les communistes comporte ou implique encore les objectifs finals suivants une alliance avec l U R S S le maintien du cadre national la collectivisation g n ralis e des moyens de production le maintien de la centralisation tati que la dictature du prol tariat le monopole du P C comme repr sentant du prol tariat la classe ouvri re et son parti la pr minence du P C sur les autres forces socialistes et syndicales Or ces objectifs sont inad quats Ils sont durablement hors d atteinte si l analyse d velopp e dans les chapitres 2 et 1 Cette liste d objectifs politiques pourrait tre couronn e par le rappel d un grand axiome le caract re scientifique du marxisme l ninisme dont le P C cet le gardien Mais il est sans doute charitable de ne pas piloguer sur ce point sauf renvoyer par exemple l admirable discours scientifique d Aragon au Palais des Sports voir l Humanit du 11 juin 1968 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 195 3 est exacte Mais ils sont galement de port e inqui tante car ils supposent
70. jour au pouvoir il serait tout fait d raisonnable qu elle se prive d entr e de jeu de la relative chance de dur e que comporte le m canisme pr sidentiel actuel Pour la m me raison la d signation du gouvernement par le pr sident et le maintien du pouvoir parlementaire de censure dans ses limites actuelles paraissent tout aussi souhaitables Reste enfin que l tat c est aussi comme le dit Trotsky des bandes d hommes arm s on l a bien vu en Mai quand en guise d Etat il ne restait plus qu un Premier ministre un pr fet de police et quelque cent mille policiers Or il ne faut point r ver toute soci t conna t des probl mes de d fense nationale et d ordre public Toute soci t a une arm e et une police Mais la gauche a de ce c t d extraordinaires pudeurs depuis Jaur s elle a formul fort peu de projets dans l un ou l autre de ces domaines On ne saurait suppl er d un mot cette longue carence sauf noter d une part que la Ce sont les pouvoirs constitutionnels du chef de l tat qui sont ici vis s non l inter pr tation qu en a donn de Gaulle En clair il n est pas souhaitable de bouleverser la Constitution mais seulement de lui porter quelques amendements mineurs On pourrait objecter que l lection du pr sident au suffrage universel va privil gier soit les amalgames confus coloration plus ou moins centriste soit le grand parti conser vateur qui semble devoir succ de
71. l ducation et de la recherche et d ouvrir tous l acc s la connaissance la culture et aux responsabilit s dans le respect de la la cit et dans le cadre de la r forme d mocratique de l enseignement Mais de cette r forme elle ne disait mot Les enseignants se reconnaissaient souvent dans la gauche traditionnelle Les tudiants presque jamais La S F I O avait longtemps t seule connaf tre l obligation d exclure p riodiquement ses jeunesses L Eglise avait prati quement d suivre le m me mouvement l encontre de la J E C vers 1954 Le P C son tour s tait abandonn de 1956 1965 la m me extr mit Il lui tait rest une U E C exsangue Au d but de 1968 la gauche tudiante tait dirig e par des militants frap p s d ostracisme et regroup s en groupuscules rivaux qui se disputaient le l1 Beaucoup plus pr cis le programme du P S U anticipait tr s largement sur les revendications des commissions tudiantes de mai juin voir Tribune socialiste du 19 janvier 1967 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 114 contr le de l U N E F Sa fermentation se nourrissait de deux vastes pro bl mes L un tr s imm diat tenait la d sorganisation catastrophique d une Universit dont les murs et les m thodes clataient sous l afflux norme de nouveaux tudiants souvent porteurs d un style nouveau C tait la premi re g n ration de l expansion de la m
72. le rendre la fois plus efficace et plus d mocratique 1 On se reportera notamment la Machine judiciaire de Charles Laroche Flavin col Soci t no 30 ditions du Seuil 1968 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 163 Ce faisant elles font certes place un affrontement plus ouvert des int r ts sociaux divergents mais elles le font par m thode ces affrontements sont de la nature m me de toute soci t ils sont la condition premi re de son progr s MORT DU PARLEMENT ET RENAISSANCE DES PARLEMENTS Retour la table des mati res Il reste que hormis le judiciaire voqu incidemment ces remarques sur l Etat ne concernent que la zone immense impartie l ex cutif On a montr plus haut ce qu tait l importance r elle du m canisme parlementaire mais il faut y revenir Le Parlement succombe en fait devant l volution spontan e de la soci t Si cette fa on de voir est encore peu r pandue la m canique parle mentaire fait en revanche l objet de deux critiques tr s courantes qui parties de points de vue tr s dissemblables tendent la m me conclusion La premi re critique est d essence d mocratique et souligne combien la repr sentation parlementaire est un reflet lointain des aspirations populaires imm diates Le peuple convi aux urnes tous les cinq ans pour choisir cinq cents hommes pr s lectionn s par les appareils politiques et qui devront en principe expri
73. le sch ma de la politique contractuelle peut aussi s appliquer au sein du parti entre l axe central et la p riph rie Au regard de telles orientations quelles sont les chances et les desseins des forces politiques existantes Ces forces se classent en trois cat gories l ex F G D S les groupes pars et le P S U L ex F G D S s est fractionn e La S F I O elle seule comprend deux ou trois courants distincts ceux qui derri re Defferre croient la moder nisation possible de ce parti et que leur destin porte vers la gauche r publi caine ceux qui derri re Mollet semblent encore li s par une solidarit d appareil ceux qui peut tre nombreux sont fluctuants insatisfaits et disponibles A leurs c t s la Convention de Mitterrand l U C R G de Savary et quelques autres quipes sont sans doute ranger assez loin de Defferre ou de Mollet Entre cette zone et le P S U divers groupes pars survivent ou se d velop pent un peu autour d Objectif 72 de Technique et D mocratie de T moi gnage chr tien et de nombreux autres clubs ou comit s de rayonnement plus local sans parler du gros bataillon des militants isol s sinon inactifs Que vont devenir ces deux premi res cat gories L chantillon est si divers si h t rog ne et travaill de tant de querelles qu il est difficile de lui imaginer un avenir commun Mais par ailleurs pour la troisi me cat gorie que forme lui seul le P S U l
74. le secteur priv et le secteur public de l conomie mais qu il est tout aussi n cessaire de d s tatiser les firmes publiques et de renforcer les pouvoirs planificateurs de l Etat qu il est sans doute n cessaire de porter rem de l infortune de l O R T F mais en s inspirant beaucoup plus du statut de la B B C que de celui de la radio t l vision sovi tique qu il est non moins opportun de cr er des conditions telles que le statut empiriquement tabli par le Monde se g n ralise dans la presse qu il est aussi n cessaire de remanier puissamment la justice la police ou l arm e mais point en s inspirant de la confusion des pouvoirs la mani re sovi tique etc L Europe Retour la table des mati res La r flexion politique de la gauche comporte une omission fr quente Les plus intransigeants des r volutionnaires comme les r formistes les plus b nins n gligent en effet l int gration europ enne Pour les premiers le cas n est pas douteux Il suffit de lire l abondante litt rature qu ils ont consacr e mai 1968 et ses suites pour constater que les changements attendre de cette int gration sont exclus de tous les pronostics Les gauchistes ont au moins ceci de commun avec les commu nistes qu ils traitent de l avenir politique de la France comme s il devait se jouer exclusivement en France et entre Fran ais Pour les seconds admirateurs b ats de l Europe en formation le cas est plus comp
75. les plus grandes possibles Elle vise la rendre apte choisir son avenir parmi les possibilit s r ellement offertes et mettre ces choix en uvre Donc apte exprimer clairement le syst me des int r ts antagonistes dont elle est et demeurera faite et r soudre ces antagonismes par des choix et des comparaisons explicites plut t que par des affrontements sourds ou violents 2 La collectivisation des moyens de production est tout au plus une tape privil gi e dans cette m thode Etape privil gi e parce qu une exp rience sans cesse renouvel e montre que l organisation sociale capitaliste est naturelle ment g n ratrice de blocages et d affrontements sourds ou violents Mais une tape seulement et pas n cessairement la plus urgente parce que l exp rience des pays dits socialistes en montre la port e limit e 3 De cette exp rience il r sulte en particulier que la collectivisation hauteur d homme semble pr f rable l abstraite collectivisation tatique A hauteur d homme c est dire l chelle d unit s historiquement constitu es comme un travailleur collectif celle des firmes ou des groupes de firmes correspondant au Stade atteint par le d veloppement des techniques de production et du syst me d organisation du travail La propri t collective ce niveau a le m rite de favoriser une expression plus directe des conflits l1 Ceci n entra ne pas l arr t de la concentration a
76. luctable Son insertion internationale rend plus que probl matiques les chances de succ s d une r volution socialiste classique qui serait n anmoins entreprise par une minorit Le blanquisme n a pas d avenir Aussi faut il combattre la r volutionnite maladie dont les sympt mes sont parfois le verbe sans actes et ailleurs l agitation sans autre but qu elle m me Toute force politique de gauche qui ordonne toute son action et toute son organisation en vue de la seule r volution socialiste classique r ve dangereusement N anmoins on ne peut exclure de notre avenir dix ou quinze ans toute possibilit r volutionnaire Il y a une chance extr mement faible mais non nulle pour qu un concours accidentel de circonstances y conduise Chacune de ces circonstances crise conomique majeure crises politiques am ricaine et sovi tique conflits p riph riques majeurs pouss es r volutionnaires massives dans le Tiers Monde est d une probabilit que l on a discut e au chapitre 2 mais c est leur conjonction dans une constellation telle que la r volution socialiste devienne probable en France qui demeure extr mement al atoire Toutefois avec le temps l al a pourrait se pr ciser ce qui est tout fait douteux vers 1970 peut l tre moins vers 1980 ou 1990 D o cette autre conclusion qui ne contredit point la pr c dente toute force politique de gauche qui ordonne son action et son organisation en excluant absolument
77. me de politique contractuelle Quand en revanche l action est fond e sur un besoin profond et durable qui peut tre la reconversion d une entreprise d une industrie ou d une r gion l urbanisation acc l r e d une agglom ration le besoin de restructuration d une zone agricole l mergence d une profession ou d un statut nouveaux l appli cation d une r forme profonde m me et surtout si elle est discutable comme la r forme universitaire ou la r forme r gionale etc et quand son objet peut tre circonscrit avec une bonne pr cision la politique contractuelle peut trou ver place on en a vu plus haut maints exemples Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 189 Un projet r formateur Retour la table des mati res La politique contractuelle est en d finitive une proc dure qui peut porter des fruits multiples On a d j dit quels effets r novateurs elle pouvait entra ner pour certaines au moins des formations de la gauche et pour leur articulation d mocratique sur le peuple qu ils ont vocation servir On doit galement souligner les liens profonds qui peuvent s tablir entre cette proc dure et ce que l on a appel le projet r formateur c est dire le rassem blement en un ensemble coh rent en une politique possible de tous les projets partiels exprimant les besoins de changement du pays Si un projet r formateur semble indispensable pour que la gauche sache que faire du pouvoir
78. me destin s en corriger les carts allocations de ch mage enfin par la multiplication des cat gories sociales dont l activit et les revenus sont relativement autonomes une bonne part des tertiaires j quoi s ajoutent deux modifications non moins d cisives du r le des Etats Partout l Etat est devenu par la masse de ses actions et par le jeu de sa politique conomique le principal agent de l conomie et le responsable de sa croissance table m me si cette responsabilit n a pas toujours pris la forme d une planification explicite Partout galement l Etat s est comport en ani mateur de l conomie que ce soit par ses budgets militaires et spatiaux par ses programmes d quipements collectifs ou par le soutien qu il procure la recherche et au d veloppement technologiques Ainsi chaque conomie natio nale jadis incoordonn e est devenue le lieu d une certaine concertation Les fluctuations n ont pas t abolies pour autant mais elles ont cess d tre impr visibles et imma trisables Il est m me souvent arriv que pour viter tort ou raison un d r glement plus grave l tat ait provoquer une sorte de r cession Le plan de stabilisation de Giscard d Estaing fut en 1963 1964 une action de ce type et l Angleterre est famili re de cette proc dure drastique Le dernier changement noter concerne enfin l articulation des diverses conomies nationales jusque vers 1960 1962 l
79. n gli geable en ces deux domaines n a jamais t men e jusqu au stade du projet Si bien que les aspirations d mocratiques faiblement labor es par les partis traditionnels et rarement soumises au d bat d mocratique du maximum de citoyens planent dans le ciel des id es ou ronflent dans le fort de l loquence dominicale DES LIBERT S PUBLIQUES Retour la table des mati res Souhaiter que les exigences de la d mocratie soient explicit es dans leurs cons quences actuelles c est galement inviter un nouvel examen des libert s publiques c est dire une d finition concr te des conditions remplir aujourd hui pour rendre effectives les libert s de pens e et de parole de r union et de presse f t elle t l vis e Les discours plor s sur les libert s l encan ne suppl ent ils pas trop facilement les projets pr cis Et derri re cette facilit ne discerne t on pas quelquefois une arri re pens e d noncer sans concession celle qui conduit estimer que l essentiel est de changer l quipe au pouvoir sans modifier la d pendance de l O R T F ou de la magistrature sans clarifier les sources de financement de l activit politique etc Il faut d noncer cette arri re pens e pour une raison capitale Le type de soci t qui dans dix ou cent ans s inscrira dans le prolongement des r for mes des novations que peut esp rer r aliser la gauche sera fortement d pendant du
80. ne doit pas tre surestim e Par comparaison avec toute affiche lectorale le contre plan demeure une m thode sup rieure un cadre plus apte que tout autre exprimer plusieurs des grands chapitres de tout programme de gouvernement Plusieurs mais pas tous et c est en cela que le projet r formateur est plus ambitieux la politique internationale la politi que europ enne les r formes institutionnelles et sp cialement l agencement de contre pouvoirs les r organisations d mocratiques divers chapitres de la politique sociale ou universitaire ou industrielle etc ne peuvent trouver place dans un contre plan car ils ne se laissent pas r duire leur seule dimension conomique Une place sp cifique doit donc leur tre faite et en certaines conjonctures il peut tre n cessaire de leur accorder plus d espace plus de temps qu aux chapitres conomiques voire de plus fortes priorit s qu aux contraintes conomiques En quoi l on retrouve sous un autre angle les limites propres la m thode du contre plan Pris isol ment ce dernier tend toujours privil gier l quilibre conomique Mais l histoire du d veloppement social est tout prendre l histoire de d s quilibres dynamiques sans cesse corrig s L arriv e de la gauche au pouvoir est en elle m me un profond facteur d s quilibrant le tout est de supputer correctement la nature et l ampleur du d s quilibre et d en rer le plus fort effet dynamique
81. ne pourra traiter de cette question sans d boucher sur ce que vise toute r volution le socialisme et sans s interroger sur ce qu est au juste le socia lisme aujourd hui On finira de cerner le champ des possibilit s qui sont ouvertes la France actuelle en examinant les perspectives ouvertes par l int gration europ enne en cours Mai 1968 Retour la table des mati res On pourrait reprendre ici le d bat jamais interrompu sur les r formes et la r volution beau sujet pour le Grand Prix de Rome de la pens e socialiste Fort heureusement l histoire r cente permet d chapper cet acad misme en offrant des questions nouvelles Une r volution a t elle commenc ou avort en France en mai juin 1968 Peut elle se poursuivre ou rena tre au cours de la prochaine d cennie Le contexte national et international pr sent et pr visible permet il de fonder sur l espoir ou la pr paration d une r volution une politique efficace LES TROIS TENDANCES AVANT MAI Retour la table des mati res On a montr au chapitre 3 comment le dispositif des int r ts sociaux dans la France d apr s guerre tendait ordonner les actions et les conflits des forces sociales autour de trois tendances principales Pour comprendre mai 1968 et ses suites il est bon d observer la configuration que dessinaient ces trois tendances la veille de la crise La tendance de l expansion capitaliste ou du mouvement da
82. non dans son ombre port e Du m me coup une notion fr quemment usit e gauche se laisse clairement d finir celle de r forme de structure Il y a r forme de structure quand et seulement quand le r seau du pouvoir est modifi soit par son extension soit par le d placement du contr le d un centre 1 Strat gie ouvri re et n o capitalisme ditions du Seuil 1964 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 101 de d cision Cr er une entreprise nouvelle comme Chimie de France natio naliser les Charbonnages instituer les comit s d entreprise sont des r formes de structure d in gale port e d ailleurs Accorder une troisi me ou une quatri me semaine de cong s pay s n est pas une r forme de structure le r seau du pouvoir n en est nullement affect Faire relever les salaires de 10 ou le S M I G de 35 n est pas une r forme de structure Faire modifier le droit syndical dans l entreprise en est une UN R SEAU SANS FRONTI RES Retour la table des mati res Un dernier mot sur le r seau du pouvoir comme le r seau de distribution lectrique il peut ignorer les fronti res Son interconnexion avec les r seaux trangers prend une importance toute particuli re quand le protectionnisme national s effondre et quand par ailleurs divers l ments de supra nationalit s tablissent Ainsi toute figuration du r seau du pouvoir s appliquant en France de vrait faire appara
83. parti lui m me pour l poque Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 20 Le succ s relatif de cette candidature joint aux suffrages recueillis par Lecanuet permit par la mise en ballottage de de Gaulle d asseoir l exp rien ce Une convergence encore accidentelle se transforma en une entreprise plus d lib r e On commen a de parler programme commun et alliance lectorale entre f d r s et communistes et de n gocier une fusion organique entre f d r s Les lections l gislatives de 7967 sp cialement leur second tour per mirent de mesurer l efficacit de ce processus Le r agencement interne de la F d ration parut alors plus urgent De m me la discussion entre f d r s et communistes reprit de plus belle et aboutit en f vrier 7968 la publication d une plate forme commune qui sans tre encore un programme de gouver nement attestait le rapprochement des points de vue en politique int rieure et fait nouveau recensait avec une certaine pr cision les points de d saccords localis s principalement en politique internationale Bref les conditions d un resserrement progressif de l alliance entre la F d ration et le P C semblaient r unies et l espoir r gnait de voir cette coali tion vaincre la prochaine comp tition lectorale qu elle f t pr sidentielle ou l gislative la majorit parlementaire issue des lections de mars 7967 tait d ailleurs si faible et si h riss e de cac
84. politique de gauche Moins irr aliste que la tentative de Defferre la candidature de Mitterrand a produit quelques effets positifs de l lection pr sidentielle de 1965 aux l gislatives de 1967 Mais ce relatif succ s a provoqu beaucoup d illusions l o il s agissait de reconstruire une force politique de gauche et d inventer une strat gie valable pour les ann es 1970 on s est trop souvent content de rafistoler de vieilles forces politiques et de rajeunir d anciennes tactiques lectorales Le choc de Mai et son contrecoup lectoral de juin 1968 ont d truit la F G D S d nou l alliance avec le P C et ruin l entreprise laquelle Mitterrand venait de se consacrer Quand en mai 1969 une nouvelle lection pr sidentielle s est pr sent e les tentatives pour ressouder la coalition de 1965 1967 ont simplement r v l la puissance de la d sunion Chacun des principaux courants de la gauche a pr sent son propre candidat La seule candidature qui ait sans grande illusion exprim une nouvelle fois la tentation du raccourci a t celle de Defferre Mais ce n tait plus qu une caricature de l essai tent en 1963 malgr l embarquement de Mend s France dans cette gal re Il tait et il demeure d raisonnable de pr ter l lection pr sidentielle des vertus magiques Dans la vie d une soci t la magie n op re qu en plein d sarroi De Gaulle en a donn deux d monstrations en mai 1958 et en mai 1968 Encor
85. pour chafauder un compromis moins pr caire Mais voici que l explosion de mai portait au premier plan un nouveau type de reven dications qui heurtaient de front la tradition jacobine des radicaux et des socialistes et le centralisme d mocratique cher aux communistes La muti nerie g n rale contre tous les gouvernements ne pouvait leur appara tre que comme une aspiration anarchiste comme un non sens Les projets nationaux et internationaux du P C n taient plus adapt s aux besoins du moment Sa perspective politique se r v lait irr aliste LA R VOLUTION D MOCRATIQUE Retour la table des mati res Ce qui bouillonnait en France en mai 1968 tait profond ment ambigu c est dire original Cela pouvait d raper vers une r volution socialiste classique sans issue durable Cela pouvait aussi d boucher sur autre chose Ce qui est apparu alors c est la possibilit de reprendre et de pousser jusqu son terme la r volution d mocratique bourgeoise Autrement dit il tait possible en mai sans s engager trop aventureusement dans une politique internationale une politique int rieure et une politique conomique de nature exacerber toutes les contradictions donc en restant autant que possible dans Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 122 le champ des possibilit s effectivement ouvertes notre pays par son environ nement et par son h ritage d atteindre deux objectifs essentiels aux effe
86. pouvoirs article 34 de l actuelle Constitution etc Par fid lit aux origines du Parlement le vote du budget demeure son acte principal mais il est enserr dans des proc dures qui lui tent beaucoup de sa signification Il serait d raisonnable de s en indigner car un examen minutieux du budget dans tous ses l ments prendrait plus que l ann e enti re et s il fallait en outre d crypter toutes ses implications la t che deviendrait tr s exactement impossible Que fait alors le Parlement Il vote quelques lois refl te l tat de l opinion publique donne naissance aux gouvernements quand la Constitution l y autorise et peut toujours leur donner cong quoi s ajoute cette sorte d assis tance sociale d un genre sp cial le parlementaire court les bureaux des minist res et assaille les administrations de lettres pour d bloquer les affaires de ses mandants Occasionnellement souverain et toujours qu mandeur tel est son lot L EX CUTIF Retour la table des mati res La R publique tr ne au fronton des tribunaux et la Souverainet nationale d l gu e par le suffrage universel si ge au Parlement Mais l Etat n est pas l ou si peu L ex cutif lui seul comprend presque tout l tat Si bien qu il est d risoire de traiter de ce pouvoir comme d une esp ce particuli re L ex cutif est le pouvoir d Etat et l opinion ne s y trompe pas qui impute au Pouvoir toute Robert Fossaert Le contrat sociali
87. priv e o les syndicats seraient accept s plut t que pourchass s o l innovation serait recherch e et o l expansion se poursuivrait la faveur d un march lastique et d une direction souvent habile Second mod le E D F Ici la nationalisation a produit les r sultats heu reux qu aurait donn s la concentration capitaliste et a acc l r ces r sultats en assurant dans chaque plan une bonne priorit l expansion de cette firme Troisi me mod le les banques et assurances nationalis es Il a fallu attendre vingt ans pour s apercevoir qu elles n taient plus des firmes priv es Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 167 En effet c est seulement en 1966 1967 que par l effet de concentrations et de nominations ce secteur financier public a commenc de se distinguer quelque peu de son homologue priv Dans les trois mod les une m me illusion et une m me carence sont appa rues L illusion a t de croire que par elle m me la substitution de l Etat aux anciens propri taires suffisait changer la nature d une entreprise L Etat s est saisi des pouvoirs anciens que d tenaient les actionnaires pouvoirs toujours mineurs dans les grandes firmes o il faut le r p ter l assembl e g n rale des actionnaires comme le conseil d administration sont aussi puissants dans la firme que le Parlement dans l Etat Il a fait usage de ses pouvoirs pour d signer les administrateurs et le P D G mai
88. rang ce dauphin piaffant ou enfin qu il ait souhait recevoir par une r forme institutionnelle aux fins multiples le pouvoir de choisir en la personne du Premier ministre qu il nommait son successeur effectif En appelant au r f rendum du 27 avril 1969 de Gaulle a nou la coalition de toutes les r sistances et de tous les refus Il a offert la France insatisfaite d elle m me frustr e de Mai ou par Mai lass e du style et du pouvoir gaullistes une occasion de changer elle l a saisie Le triomphe du non n a pas t la victoire d un projet ce fut l expression d un refus Les experts en sociologie lectorale tudiant loisir les r sultats de ce vote y d couvriront sans doute que la tr s grande majorit des leaders d opinion repr sentants notables d l gu s lus et citoyens actifs de toutes r gions et de toutes activit s s est retrouv e dans le camp des non et que l essentiel des oui a t form par la masse passive peu clair e suiviste qui demeurait encore dans sa lanc e des dix derni res ann es La France active ne voulait plus de de Gaule et le lui a signifi LES PREMIERS MOUVEMENTS DE L APRES GAULLISME Retour la table des mati res De Gaulle parti tous les probl mes sont rest s Son d part en a m me ajout un de plus celui du fonctionnement ult rieur des institutions politi ques Pour un temps et comme il est normal dans une p riode lectorale doubl
89. res agricoles se heurteraient une opposition massive et difficile contourner nul ne sait combien la France compte de propri taires fonciers mais les valuations oscillent entre 2 et 4 millions La n cessit d attenter aux normes traditionnelles de cette propri t se fait pourtant si pressante qu elle a m me transparu dans les projets de divers gou vernements gaullistes Mais la difficult d y parvenir demeurera grande pour tout gouvernement pendant longtemps encore Et la propri t fonci re n est pas le seul blocage lever la r organisation administrative n est pas moins n cessaire L TERNEL JACOBIN Retour la table des mati res Or en ce dernier domaine l h ritage petit bourgeois se double d une tradition tatique plus ancienne encore On sait combien la tendance centra lisatrice de l Etat fran ais est puissante depuis des si cles Richelieu Colbert les jacobins et Napol on pourraient encore reconna tre leurs apports dans le syst me administratif actuel L essentiel de la force centralisatrice aujourd hui l uvre ne leur est cependant imputable que de fa on indirecte Leurs efforts avaient maill le pays d un r seau administratif tr s dense rabattant toutes les d cisions vers les minist res parisiens mais une poque o ces minist res Notion statistique qui amalgame les revenus tir s de la petite entreprise et les dividendes servis par les soci t s capitalistes leurs
90. res parisiens vidant les tablissements publics de toute autonomie tatisant tous les int r ts collectifs organis s hors sa sph re d action la s curit sociale par exemple La primaut de l tat son identification avec la Nation trouvent d ailleurs des arguments tr s forts dans certains des besoins les plus actuels Le March commun qui dilue la vie conomique dans un espace largi cr e des forces centrifuges tr s puissantes Pour les compenser est il d autre solution que de resserrer plus encore les pouvoirs de l Etat sinon n assisterons nous pas avant longtemps un miettement du pays en r gions dont certaines soumises des attractions trang res finiront par sortir de l espace national Nice se retrouvera italienne Strasbourg allemande et pourquoi pas Dunker que flamande Sans m me aller jusqu consid rer ce risque n est il pas vident qu l chelle de l Europe en formation la France tout enti re n est qu une r gion qui doit demeurer puissamment ancr e sur Paris Nagu re il est vrai cette centralisation pouvait comporter le risque d un engorgement des bureaux parisiens et l on pouvait dire de la France qu elle s asphyxiait d un exc s de comp tences administratives joint une absolue centralisation Mais m me si cela n est point encore du pass la solution n est elle pas en vue avec l informatique Qu importe que le minist re fran ais de l ducation nationale devienne par l
91. s Ne venait on pas d vincer par ordonnances pres que tous leurs repr sentants de la s curit sociale La politique industrielle d signe l ensemble des actions concert es entre l tat et les gran des firmes priv es ou publiques parfois aussi les syndicats professionnels c est dire patronaux en vue d am liorer la comp titivit de l industrie En politique les revenus sont comme les petits pois en bo te les plus gros sont dit moyens On objectera peut tre que les plus gros revenus sont ceux de la grande bourgeoisie d affaires me de la premi re tendance C est vrai mais si les hauts revenus de cette derni re ne sont pas douteux son taux de fraude ou d exemptions fiscales est nettement inf rieur celui des professions lib rales des commer ants ou des riches agriculteurs La seule injustice fiscale qui profite sans doute plus la premi re qu la seconde tendance concerne les plus values sur titres et sur cessions immobili res Une fiscalit l am ricaine suffirait y mettre bon ordre Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 113 Ainsi les l ments d une crise existaient peut tre C tait affaire de rythme et d initiative si le baume europ en venait calmer les blessures pay sannes si l expansion repartait assez vite et assez fort dans un pays d sormais d pourvu de fronti res douani res ou si la conjoncture s am liorait suffisam ment sur le march capitaliste mondial t
92. sa possibilit r tablie Si l inverse le capitalisme se r v le intraitable inapte l volution irr m diablement rebelle toute transition pacifique et progressive vers le socialisme le besoin de r volution aura m ri non plus dans quelques groupuscules pars mais dans les mas ses En attendant en agissant en exp rimentant l histoire poursuivra son cours sans doute pendant quelques d cennies La voie de la coexistence durable ou l incapacit d agir utilement pendant ces quelques d cennies telle est l alternative qui nous est offerte Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 151 La coexistence durable avec le capitalisme n a rien d une idylle ni d une gestion loyale Son objectif n est pas de conserver le capitalisme mais bien de d finir un chemin praticable hic et nunc Vers un socialisme qui ne l ou blions pas reste inventer dans son agencement concret Par coexistence durable avec le capitalisme il faut entendre une situation dans laquelle e Jles atteintes directes au champ d action de l entreprise priv e seront d lib r ment limit es la saisie des points d appui absolument indis pensables la r alisation de la politique vis e autonomie nationale ou europ enne r forme du r seau des pouvoirs permettant la gauche de durer aptitude appliquer le plan etc de telle fa on qu un com promis politique avec les principaux int r ts capitalistes soit possible e Je
93. sa r serve traditionnelle sans perdre son autonomie On a pu crire non sans raisons que le syndi calisme n est pas seulement instrument d action mais thique de vie ce que le socialisme n est pas souvent malgr les apparences Une telle position qui exprime une tradition profonde du syndicalisme fran ais peut conduire des conclusions dangereuses Par exemple tenir la politique pour une forme m diocre sinon m prisable de la vie sociale donc se r signer ce que la politique soit toujours le fait d organisations douteuses d hommes suspects donc se contenter de faire pression sur eux de l ext rieur sans compromettre pour autant les valeurs que l on d fend Quels que soient et ils sont nombreux et cet ouvrage leur a donn une large place les arguments que cette position peut tirer de notre histoire r cente notamment des checs et des compromissions de la gauche elle n en conduit pas moins des r sultats d plorables Elle prive la gauche politique de l lan et de la vigueur que les forces syndicales pourraient parfois lui donner Et surtout elle nie une n cessit sociale fondamentale qui est celle de l arbitrage politique ou si l on veut de la d cision politique Quand les universitaires les syndicalistes les clubmen les militants non politiques et autres citoyens actifs campent sur leurs Aventins respectifs d o 1ls proclament leurs valeurs et dont ils ne descendent que le jour
94. sans avoir h siter entre un changement qu aucune force politique ou syndicale audible par elle ne lui fit apercevoir ou le maintien de l ordre qui n eut videmment aucun avocat alors que le d sordre voyait se multiplier les procureurs L INCERTITUDE Retour la table des mati res Dans cet norme vacillement les rapports de force se modifi rent plusieurs reprises D s le d part la police que la nouveaut et l ampleur de la crise jointes la composition sociale des manifestations emp chaient de tirer balle d couvrit la pugnacit tudiante et la complexit de la situation Ses contradictions devinrent publiques Plus tard quand les usines furent occup es il devint impossible de songer l emploi du contingent qui fut consign Police gendarmerie et troupes s res ne repr sentaient plus malgr leur armement sup rieur qu une arme ineffi cace devant l tendue et la dispersion des forces adverses La crise sociale et politique put m rir sans tre contrari e par la force publique l Voir Serge Mallet la Nouvelle Classe ouvri re ditions du Seuil 1962 et Pierre Belleville Une nouvelle clame ouvri re Julliard 1962 2 Ah si les fils d ouvriers avaient t majoritaires l Universit Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 117 La situation demeura incertaine jusqu aux derniers jours de mai Entre le rejet du constat de Grenelle et le discours r cup rateur du
95. sera pluraliste ou elle ne sera pas Elle ne peut donc tirer sa coh rence que d un accord verbalement plus modeste mais pratiquement tout aussi difficile r aliser sur un ensemble de projets et sur des m thodes de travail des moyens d action et des modes d organisation Quels projets Ceux que les forces politiques et syndicales existantes peuvent laborer d s aujourd hui partir du potentiel spontan des revendica tions sociales et partir d une valuation soigneuse des besoins des possi bilit s et des contraintes qui naissent de notre soci t de son h ritage et de son environnement Naturellement dans l laboration de ces projets les r f rences doctrinales contradictoires des uns et des autres se feront sentir mais autant la fid lit quelque th se pr tablie serait une g ne autant cette confrontation peut tre pr cieuse L exp rience en a t faite notamment dans les Rencontres de Grenoble et elle s est r v l e fructueuse Quelles m thodes de travail Le centralisme la fran aise a tendu ses ravages bien au del de l Etat Les partis notamment dans la gauche jacobine en ont galement souffert La plus saine des r actions serait cet gard d accorder toutes les unit s locales d partementales ou r gionales une autonomie compl te sauf en des mati res limit es express ment d l gu es l chelon sup rieur Lesquelles Il faut en d battre mais leur liste pou
96. socialiste 1969 32 D o la divergence essentielle qui oppose l U R S S la Chine ou d une autre mani re Cuba Pour la premi re le danger atomique commande la patience le louvoiement et la prudence Pour les deux autres la crainte du conflit mondial est un leurre et l offensive anti imp rialiste doit plus que jamais se d velopper Le refus d un monde fig par la bombe s exprime aussi avec une force toute juv nile dans le monde capitaliste comme dans le camp socialiste c est lui qui fonde la r volte internationale des tudiants beaucoup plus que les difficult s nationales dont cette r volte se nourrit certes mais presque par accident La s duction que les th ses mao stes ou castristes exercent dans ce milieu en est un s r indice Il se forme ainsi une internationale tudiante dont la s duction s tend parfois d autres l ments de la jeune g n ration et qui est plus sentimentale qu organis e malgr les efforts des Chinois ou des Cubains Parall lement les vieilles internationales entrent en crise aigu l Internationale communiste s est fragment e l Eglise catholique elle m me voit l universalit de son institution mise en p ril De la relative stabilit des structures mondiales qu impose l quilibre atomique et de l instabilit que r v lent les pulsions du Tiers Monde et les inqui tudes de la jeune g n ration qui va l emporter et comment long terme l issue n est pas dout
97. suppose que l un compense l autre en premi re approximation 3 En supposant ce qui correspond grosso modo aux tendances ant rieures que les radicaux repr sentent le tiers des voix recueillies par la F G D S 4 Idem 5 Ce total a une signification politique tr s vague il mesure l lectorat de gauche et son effet d entra nement quand tout va bien
98. suppose une d marche originale l exp rimentation m me t ton nante d un d veloppement autonome Mais ce ne sont ni les coalitions au pouvoir de Londres Rome et Bonn ni les successeurs de de Gaulle qui s en saisiront m me si ces derniers ne peuvent effacer du jour au lendemain les orientations suivies depuis dix ans Seules les gauches europ ennes pourraient tenter de l exploiter et d abord la gauche fran aise LA GAUCHE ET L EUROPE UNE CONTRADICTION Retour la table des mati res Pareille exploitation suppose que soit r solue par tapes une contradic tion grave et qui rena tra d elle m me En effet m me si elle ne prend pas l allure d un processus r volutionnaire au sens classique du terme une vic toire politique de la gauche aller au pouvoir y durer en user s accompagnera n cessairement d un certain durcissement des luttes sociales Sauf perdre sa raison d tre elle d rangera l ordre existant Mais les forces politiques de gauche au pouvoir en France et dans quelque autre pays du March commun rencontreraient dans ce d rangement un obstacle n du March commun lui m me Ses r gles du jeu ses normes de fonctionnement le d centrage du r seau des pouvoirs qu il provoque tout cela restreint la libert d action d un gouvernement national quelconque Et cette restriction atteint sa force la plus grande lorsque le d rangement vis tend modifier les structures conomiques
99. terme pas trop lointain Mais la coh rence d un plan ou d un contre plan peut en souffrir 1 J Ensemble le Contre Plan p 117 sq coll Soci t no 3 ditions du Seuil 2 Au reste il faudrait que les Plans tablis par les gouvernements successifs fussent correctement ex cut s pour que l on puisse tirer argument contre la gauche de cette ventuelle absence de coh rence id ale mais on sait que chaque Plan a d faire l objet de r visions en marche qui tenaient parfois du rafistolage Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 192 Une derni re caract ristique du projet r formateur est souligner C est son r le p dagogique Tout parti doit former ses membres et concourir l veil politique des citoyens c est dire leur ducation L laboration d un projet r formateur par l action d un ou de plusieurs partis pratiquant une politique contractuelle aurait de toute vidence des vertus formatrices bien sup rieures celles de la r union ou du meeting politiques classiques Ceci non seulement en raison de l active participation qu elle entra nerait mais aussi par l effet des questions pos es Arbitrer entre des revendications sponta n es et laborer des projets pr cis c est du m me coup choisir entre les satisfactions g n ratrices de bien tre actuel et les investissements cr ateurs de bien tre diff r c est expliciter des besoins ressentis et conduire leur examen critique et
100. tie sans qu un dossier complexe ait circul pour estampille de pr fecture en minist res Tout maire tout pr fet tout d put peut se tailler un succ s facile en d crivant par le menu l odyss e d innombrables dossiers C en est au point que le crit re auquel se reconna t l excellence d un maire ou d un d put est son habilet faire avancer le dossier et d abord n en point perdre la piste En consid rant cette situation on peut dire qu une administration centrale qui se perd dans une infinit de d tails et se prive par l m me du temps n cessaire la pr vision au choix d options strat giques la saisie de probl mes nouveaux et la concertation avec d autres centres de d cision adminis tratifs est justiciable d une critique majeure elle rend demi aveugle et demi paralytique un tat qui se veut centralis pour tre lucide et alerte Critique politique galement si l on consid re les rapports entre la centra lisation administrative et l abolition des fronti res conomiques Dans une certaine mesure l int gration europ enne entra ne une d sint gration de l Etat Cela est vrai en premier lieu pour ceux des pouvoirs de l tat qui taient li s au protectionnisme traditionnel En second lieu pour ceux des pouvoirs qui dans l ordre de la politique conomique notamment supposent l exis tence de fronti res soit parce qu ils s exercent ce niveau douanes contr les
101. tique s est att nu e autant que son respect pour le tuteur am ricain L influence de ce dernier s est r duite Les int r ts am ricains se sont certes multipli s dans l conomie ouest europ enne mais paradoxalement la capacit directe de pression politique des Etats Unis s est all g e Le temps n est plus o la marine du plan Marshall et des aides militaires semblait providentielle aux gouvernants et aux bourgeoisies d Europe Aujourd hui les Etats Unis sont encore les protecteurs mais aussi les d biteurs de l Europe occidentale et ces r les contradictoires annulent en partie leurs effets politi ques La meilleure illustration en est donn e par la n gociation toujours renaissante entre l Allemagne et les Etats Unis sur la couverture des frais d entretien des troupes am ricaines outre Rhin Ainsi l Europe qui depuis cinquante ans tait devenue un objet de l his toire redevient un sujet jusqu en 1945 elle vivait enferm e dans un inex tricable syst me de contradictions historiques qui s est d nou par sa ruine Pendant les dix ou quinze ann es suivantes elle a subi l effet de contradictions qui taient moins les siennes propres que celles des deux Grands Maintenant elle a retrouv une certaine capacit d initiative Mais sa libert est loin d tre absolue le champ des contraintes ext rieures s est affaibli non effac De plus l Europe a d j fait usage de sa capacit d initiative en amor ant
102. toute possibilit r volutionnaire risque d tre dangereusement d sarm e le cas ch ant Dans une situation qui tait loin d tre pleinement r volution naire la F G D S en a fait l exp rience en mai 1968 Il faut aussi m diter la position de Marx l gard de la Commune En septembre 1870 il lance cet avertissement Toute tentative de renverser le nouveau gouvernement la R publique vient d tre proclam e quand l ennemi frappe aux portes de Paris serait une folie d sesp r e Quand cette folie d sesp r e s accomplit en mars 1871 Marx est n anmoins sans r serves du c t de la r volution Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 149 Enfin l avance vers le socialisme est l ordre du jour Deux pouss es convergentes y tendent l une est l exigence d mocratique qui a fond l explo sion de mai l autre est l exigence de rationalit conomique et de justice sociale vers laquelle peuvent confluer toutes les revendications de la troisi me tendance Toute force politique qui se veut de gauche doit se donner pour axe principal d action la r alisation de cette aspiration au socialisme d mocrati que dans un pays o la r volution ne peut tre l agent privil gi d une telle action Le rapprochement de ces deux termes aspiration socialiste et r volution improbable conduit n cessairement cette perspective la gauche fran aise doit se pr parer une coexistence durable avec
103. tre surprenant que l on ait rang le financement des organi sations syndicales et politiques parmi les objectifs plut t que parmi les moyens c est pourtant par un choix d lib r L id e que la politique doit reposer sur l action d associations volontaires nourries uniquement des cotisa tions de leurs membres est d une scandaleuse hypocrisie Elle ne correspond la pratique d aucun grand parti en France comme ailleurs ce qui conduit de malsaines substitutions et de sournoises compromissions Elle correspond en revanche la pratique de tous les syndicats hormis quelques trop maigres subventions au titre de la formation dont la C G T est d ailleurs stupidement exclue et sans contribuer sp cialement leur saintet elle y entretient une 1 Ceci vaut galement pour les principaux autres int r ts sociaux organis s il est normal que l tat subventionne un Institut de d fense des consommateurs m me s il est anormal qu il en fasse une agence tatique Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 176 vision du monde souvent trop troite et une Strat gie d un asthmatisme contraint l objection suivant laquelle d importantes subventions budg taires accord es tous les partis l gaux et tous les syndicats repr sentatifs selon des normes d finir g n reusement entretiendraient les tendances scl roti ques de certains appareils contr l s par de vieilles quipes on peut r pondr
104. type de d mocratie dont elle se sera pratiquement faite l avocat puis le r alisateur L un des checs majeurs de la Lib ration est de n avoir pas su cr er les conditions d une presse durablement libre disons autonome L un des checs majeurs du Front r publicain est de n avoir pas su cr er les conditions d une t l vision autonome L un des checs communs tous les gouverne ments de gauche de 1936 1956 est de n avoir pas su cr er les conditions non pas de l ind pendance mais simplement d une suffisante autonomie de la magistrature n1 celles d un financement public abondant et sain des organi sations politiques et ici l chec est moins aigu syndicales Ces checs par omission ont eu des causes contingentes Mais ils renvoient aussi au jacobinisme centralisateur ainsi qu une conception trop sch matique de L Etat pur reflet des rapports de classes il serait toujours l image et au service des coalitions dominantes du moment Le ministre charg par hypoth se de mettre en oeuvre la plate forme commune dans l un ou l autre de ces domaines e t t bien en peine de sortit un projet pr cis dans les huit jours m me si autre hypoth se fortement probable tout gouvernement de gauche devait se pr parer op rer tr s vite la majeure partie des r formes de structure inscrites son programme pour rendre le r seau du pouvoir compatible avec son action et avec sa dur e Robert Fossaert Le cont
105. une volution nouvelle qui a sa propre inertie cette volution est command e par l int gration conomique en cours au sein du March commun L EUROPE DES SIX Retour la table des mati res L Europe des Six se construit depuis dix ans L union douani re est ache v e L union conomique pr vue par le trait de Rome se poursuit mais selon un calendrier d sormais incertain puisque la plupart des tapes exactement programm es par le trait ont d j t parcourues Le March commun est donc un carrefour Va t il en se diff renciant de plus en plus de la simple union douani re devenir une v ritable communaut une conomie unique sans fronti re d aucune sorte Les opinions publiques europ ennes le croient et c est un facteur important Les r dacteurs du trait de Rome le souhaitaient Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 49 et ses ex cutants de Bruxelles le souhaitent toujours Les six tats semblent le vouloir mais in galement et diversement et l on sait que seul compte aujourd hui encore leur accord Un premier choix fondamental a d j t effectu Il fallait que chaque Etat s arrache sa lanc e propre et accepte l id e m me lointaine de perdre de sa substance au b n fice d une entit nouvelle Il fallait surtout que chaque pays la France notamment accepte de se d prot ger C est chose faite Mais ce premier choix n a pas t d cisif car la novation europ
106. une fonction sociale plus r sultante que ma tris e bien que les proc dures publiques d incitation et de concertation tendent rendre cette fonction d investissement socialement ma trisable Le Plan comme lieu de rencontre est le si ge principal de cette tentative et certains des centres de d cision de la structure tatique le Budget le Tr sor diverses banques publiques et de la structure conomique quelques dizaines de groupes de grande envergure en sont avec des bonheurs divers les agents encore t tonnants Cependant le pouvoir explicite des firmes sur l avenir a d autres manifes tations c est de leurs d cisions actuelles que d pendent le volume futur de l emploi les conditions futures de travail les possibilit s futures d volution des revenus l quilibre conomique et social futur de la localit ou de la r gion qu anime pr sentement leur activit Certaines de ces d cisions celles que Claude Gruson appelle les d cisions longue port e mod lent finale ment la civilisation de demain Le r seau du pouvoir Retour la table des mati res A ce point du raisonnement plusieurs questions se pr sentent qui sont inti mement li es mais qu il faut n anmoins dissocier pour en traiter clairement On a pu parler d une structure des centres de d cision dont l activit s inscrit dans la sph re de l Etat existe t il aussi une structure des centres de d cision dans l conomie Q
107. vers d autres voies On peut pr dire que ce seront des impasses cela ne suffit pas pronostiquer qu ils ne s y engageront pas Plusieurs d marches politiques vont donc tre propos es la gauche Il faudra pour les trier utilement disposer de crit res efficaces En voici un que fondent l exp rience des trente ou quarante derni res ann es et l tude des perspectives d volution qui nous sont offertes pour les dix ou quinze prochaines ann es la gauche ne pourra exercer le pouvoir et y durer que si elle est unie c est dire si elle re oit le soutien ou la participation du P C Si ce crit re est d cisif il faut n anmoins le compl ter pour appr cier sainement la situation actuelle cette unit de la gauche est impossible avec le P C tel qu il est pr sentement comme avec la gauche non communiste telle qu elle est pr sentement L un et l autre doivent changer profond ment pour se mettre en mesure d exercer le r le politique qui pourra leur revenir lorsqu ils seront transform s et unis Pour en juger commen ons par le P C Ce sera pour souligner les deux raisons d ailleurs li es qui le rendent aujourd hui inapte au pouvoir en France l anti communisme et l extr me lenteur des communistes com prendre la soci t actuelle et y adapter leurs projets L ANTI COMMUNISME Retour la table des mati res L anti communisme est une r action profonde g n rale et multiforme qui a des racines tr
108. vers la recherche et les applications militaires et spatiales a r ussi int grer une technologie avanc e L URSS actuelle a donc besoin d tablir un syst me conomique plus souple plus d centralis et plus sensible aux besoins exprim s par la demande finale notamment celle des consommateurs 2 Simultan ment elle a besoin de r former son syst me politique d une part pour l adapter la nouvelle organisation conomique cr er ce qui revient l all ger et la r orienter du commandement vers l incitation et le contr le d autre part pour le rendre apte des rapports internationaux moins autoritaires Elle a enfin besoin de red finir son r le mondial tant par r f rence sa tradition r volutionnaire qu en regard de la situation nouvelle n e Hiroshima Chacun de ces probl mes est immense et leur convergence crasante Ici galement on pourrait tre tent pour d finir les issues possibles de se r f rer des formules d j connues comme le stalinisme ou la d mocrati sation Mais l une est sans pr c dent dans l histoire russe et l autre tait li e par bien des aspects une situation r volue La solution m me apparent e l une ou l autre de ces formules sera originale et composite Elle na tra sans doute moins d un conflit opposant les grandes masses ouvri res ou paysannes aux 1 Encore que la R D A puissance conomique non n gligeable ne soit plus le vassal de nagu re l
109. vieillit et rajeunit simultan ment Le pourcentage des moins de vingt ans est pass par son point le plus bas en 1936 avec 30 il a remont 31 en 1954 et 34 en 1968 mais d ici 1975 1980 il ne d passera gu re ce dernier niveau Ce rajeunissement sensible n a cependant pas la valeur d un retour l quilibre ancien car l ge d entr e en activit s l ve rapidement Le Code civil classe les jeunes de moins de vingt et un ans parmi les incapables et les conomistes rangent parmi les inactifs tous ceux d entre eux qui n exercent pas une profession Les conomistes ont d ailleurs raison dans la mesure o l entretien de ces jeunes est une charge actuelle de la soci t qui ne sera compens e que par leur activit future Mais incapables et inactifs les tudiants ont montr r cemment qu ils relevaient aussi d autres crit res dans l ordre politique La France est ainsi soumise simultan ment la loi des g rontes et celle du cocotier Les classes d ge ont beau n tre pas des classes sociales leur densit particuli re n en pose pas moins en France des probl mes sp cifiques Le principal est assur ment celui ci plus de la moiti de la population fran aise est aujourd hui conomiquement inactive et le demeurera pendant plusieurs d cennies En d autres termes la population active totale a tr s faiblement augment depuis 1945 malgr l immigration et elle augmentera moins vite dans la d cennie
110. 1969 168 m me routiers Air France a souffert d arbitrages plus que contestables rendus par les pouvoirs publics en faveur d autres compagnies semi publiques ou semi priv es L tat n a pas su g rer son patrimoine industriel ni en provoquer l expan sion ni en faire l instrument privil gi d une politique de d veloppement industriel national Ses tentatives en ordre dispers ses marches et contre marches n ont pas abouti des r sultats exemplaires Cette carence est politique en fait il ne l a pas voulu Il tait politiquement difficile de d na tionaliser ces entreprises pour les rendre l initiative priv e Il tait aussi difficile de jouer pleinement des possibilit s qu offrait l initiative publique ce vaste patrimoine Entre ces deux limites une politique v ll itaire et m diocre a seule trouv place Les m mes limitations ont entra n une carence du m me ordre en mati re de gestion Les firmes nationalis es sont sans doute les entreprises o dans l ensemble le droit du travail est le mieux respect l Etat propri taire res pecte assez bien les volont s de l Etat l gislateur Mais fort peu de tentatives ont t faites pour aller au del du droit commun et pour innover ou exp rimenter Rien en particulier n a t tent pour agencer autrement que dans les firmes capitalistes priv es l organisation du travail les rapports de commandement et les structures de d cision Le seul doma
111. 69 145 La premi re est d affirmer l autonomie conomique de l Europe de la d solidariser du march mondial capitaliste de la sortir du sillage am ricain Pratiquement cela signifie pour la prochaine d cennie revenir sur les r sultats du Kennedy Round et appliquer un tarif ext rieur commun en moyenne aussi protecteur que celui des tats Unis mais en r servant cette protection aux secteurs les plus d cisifs revenir sur l organisation du F M I et mod rer plus que ne l ont fait les accords de Stockholm voir P 42 les pouvoirs mon taires des Etats Unis revenir sur la libre circulation des capitaux et organiser un march financier europ en qui ne soit pas comme l actuel march des euro devises un instrument de colonisation financi re ni un propagateur de sp culations sur devises trop fortes ou trop faibles accorder une forte priorit au d veloppement des industries de pointe aujourd hui en retard La seconde ligne d action est pr cis ment de favoriser l admission de la Grande Bretagne pour autant qu elle ne s accompagnerait pas d un renfor cement de l influence am ricaine en Europe Ceci pourrait tre tent notam ment en faisant de la dette ext rieure anglaise une charge europ enne commune c est dire en allant beaucoup plus loin que l accord sign B le en 1968 La troisi me ligne enfin est la cons quence logique d une volont d auto nomie europ enne Le protect
112. 9 cette classe a v cu jusqu en 7945 l abri des grandes transformations capitalistes d abord en raison de la lenteur de celles ci puis par le fait d un protectionnisme d lib r Elle a jou le r le de mod rateur des luttes politiques notamment sous le Second Empire et apr s la Commune Elle a t pay e de retour par une politique soutenant largement ses int r ts laquelle a culmin dans les lois M line et par une organisation politique privil giant ses voix souvent doci les le d coupage cantonal les conseils g n raux le S nat en sont les marques videntes Une petite bourgeoisie urbaine d artisans et de boutiquiers a renforc ou relay celle des campagnes tout en jouissant en maintes occasions d une protection comparable dans l ordre conomique Les douanes ont servi les paysans la fiscalit et parfois la prohibition des formes les plus efficaces de la concurrence capitaliste ont sauvegard la boutique Un tel contexte n a pu se maintenir pendant plus d un si cle sans impr gner toute la soci t La petite bourgeoisie intellectuelle des professions lib rales la mentalit petite bourgeoise des fonctionnaires et la teinture petite l Elle a toutefois support le poids principal de la tuerie de 1914 1918 ce qui a commenc d branler ses positions entre les deux guerres Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 65 bourgeoise de toutes les classes du prol tariat la bourge
113. D ici 2980 1985 une partie de cette volution s accomplira principalement par d clin de la paysannerie et croissance du tertiaire Cette volution est en effet command e par des facteurs incoercibles Bien qu elle ait diminu des deux tiers depuis un si cle la main d uvre agricole demeure lourdement exc dentaire Sa production d passe inexorable ment les besoins du march fran ais et les capacit s d importation des march s europ ens ou autres Elle doit donc se r duire encore et sa structure d ge montre assez vers quelles r ductions normes elle est entra n e plus de la moiti des hommes travaillant dans l agriculture ont d pass l ge de cinquante sept ans et les d parts massifs d j enregistr s dans les classes plus jeunes interdisent d es p rer une rel ve importante La paysannerie exc dentaire ne peut tre aban donn e la pure loi du march qui ruinerait infailliblement sa grande masse en cr ant une crise sociale grave Mais elle ne peut pas non plus tre subventionn e par la collectivit jusqu rendre tol rable la poursuite de l acti vit agricole des plus d munis tant la charge serait lourde Toute politique agricole doit s inscrire dans cette contradiction pour quinze ou vingt ans encore Les contraintes industrielles sont d une autre nature L id e selon laquelle le d veloppement du capitalisme la croissance de l industrie et l extension de la classe ouvri re sont trois as
114. De toutes les ventualit s qui viennent d tre envisag es les lignes de force de notre avenir se d gagent assez clairement LA guerre demeure la limite accidentelle de notre histoire Divers v nements nouveaux d impor tance majeure ont chance d influencer fortement cette histoire la crise conomique mondiale la crise politique du camp socialiste et sp cialement de l U R S S peut tre une crise politique am ricaine peut tre enfin une modification dans le rythme et l ampleur des guerres p riph riques et des r volutions du Tiers Monde Toutes ces ventualit s sont videmment de nature r agir les unes sur les autres selon une multiplicit d encha nements Leur d nombrement serait un jeu d cole sans port e pratique En revanche certaines cons quences prati quement valables en toutes hypoth ses se laissent apercevoir pour ce qui est de l Europe occidentale L EUROPE PLUS LIBRE Retour la table des mati res La plus importante est celle ci l Europe est aujourd hui plus libre de choisir son avenir qu aucun moment depuis le d but du si cle Apr s les deux guerres qui l ont saccag e et lui ont fait perdre son ancienne pr pon d rance mondiale elle a pleinement r cup r son potentiel conomique tout en se d barrassant de maintes contraintes h rit es de son histoire En d autres termes elle est moins d pendante de son pass quelques s quelles pr s elle s est d sengag e du co
115. L id al serait aussi qu il sache offrir en temps utile et dans les formes utiles une perspective de collaboration f conde la meilleure et la majeure partie des segments pars d crits plus hauts qu il sache amorcer avec ces forces une n gociation patiente et modeste car il s agit moins d avoir raison contre elles qu avec elles qu il sache se lier elles par des contrats pr cis et limit s plut t que de viser trop vite une difficile unification qu il sache enfin tenir compte galement des contraintes qu exerceront sur lui et sur les autres le calendrier lectoral comme le jeu des luttes sociales L id al serait enfin que les meilleures des forces politiques issues de la F G D S ou demeur es dans l intervalle entre cette derni re et le P S U prennent de leur c t en direction du P S U des initiatives semblables celles que l on vient de souhaiter voir prendre par ce dernier Car ici comme en mati re syndicale aucun des l ments ayant vocation reconstruire la gauche socialiste ne saurait pr tendre l h g monie ou au monopole de l initiative La conjonction de telles initiatives arracherait la gauche actuelle sa l thargie Un vaste champ de possibilit s s ouvrirait une politique contrac tuelle tissant petit petit un r seau de liens pratiques entre les l ments de la future gauche socialiste L laboration d un vaste projet r formateur pourrait tre entreprise progressivement
116. LA CRISE DE L U R S S Retour la table des mati res La crise politique qui m rit en U R S S est plus visible encore et il est vraisemblable qu elle clatera avant celle des Etats Unis sauf crise cono mique dans le monde capitaliste qui procurerait quelque r pit Ses sympt mes les plus clairs sont les checs politiques de l U R S S l gard du schisme chinois comme l gard du schisme tch coslovaque M me la d faite gyptienne de 1967 a Pris une valeur en partie comparable Le camp socia liste se d sagr ge l U R S S n y a plus d autorit que sur Berlin Prague Varsovie Budapest Sofia et Oulan Bator L U R S S stalinienne pratiquait un d veloppement conomique extensif par des m thodes centralisatrices bureaucratiques et polici res Dans l ordre international son h g monie politique s appuyait sur les m mes m thodes La d stalinisation sursaut moral autant que politique a affaibli les contraintes les plus brutales La r bellion chinoise a bris certains conforts id ologiques et a desserr l emprise h g monique de l U R S S pas seulement en Asie Et surtout le d veloppement conomique s est ralenti et partiellement enray au moment o il fallait aborder au domaine complexe de la croissance par gains de productivit et non par embauche massive d ex paysans et de la produc tion tourner vers des besoins plus raffin s et moins pr visibles seul le secteur conomique orient
117. act riser la situation actuelle comme une pseudo autonomie La d finition et la mise en oeuvre d un statut assurant une r elle autonomie politi que financi re et morale de l O RT F ou des O R T F car il n est pas interdit de souhaiter leur multiplicit et leur mulation et plus g n ralement une r flexion nouvelle sur les conditions d exercice de la libert de la presse et de la diffusion du spectacle seraient des plus urgentes S agissant de la radio t l vision une telle r flexion s orienterait sans doute vers la cr ation d une autorit sp cifique tirant son pouvoir doses vari es du Parlement de l Universit de diverses institutions sociales comme les syndicats et de fa on tr s minoritaire de l ex cutif autorit qui aurait d signer et contr ler les dirigeants effectifs de l O R T F ou des O R T F et fixer le taux de la redevance ou le volume des emprunts contracter S agissant par ailleurs de la presse cette r flexion s orienterait probable ment vers la distinction de la presse commerciale rendue au jeu normal du march et de la presse politique b n ficiant par le canal des organisations politiques et selon leurs choix de subventions publiques sur lesquelles on reviendra Encore faudrait il que dans le premier cas une chance privil gi e soit offerte au d veloppement des soci t s de r dacteurs qui l instar de celle du Monde introduisent au sein de la presse commerciale un
118. aginer aussi qu un parti communiste autonome en cette poque stalinienne et un parti socialiste ma tre de ses craintes malgr le sort offert ses homologues d Europe orientale puissent conjuguer leurs efforts pour trouver en politique internationale une voie neutraliste et poursuivre en politique int rieure sur la lanc e de la Lib ration Mais rien dans la situation internationale n1 dans les exp riences pass es ou r centes de ces partis ne les y encourageait Cependant de 7944 1947 le rapport des forces demeura assez favorable la gauche ce fut l poque o sous sa pression maintes r formes sociales ou structurelles furent accomplies On peut attacher plus de prix aux nationalisations qu aux statuts du ferma ge ou de la fonction publique et regretter l absence de r formes universitaire judiciaire et administrative Mais on doit souligner galement les progr s d ci sifs de la s curit sociale ceux plus timides du droit syndical les comit s d entreprise et l extension du suffrage universel aux femmes qui en demeuraient cart es Au total le bilan fut nettement plus positif qu en 1936 les gouvernements de l poque permirent un progr s social manifeste et cr rent les conditions du d veloppement conomique rapide et relativement ma tris qui devait suivre C est seulement en mati re coloniale que la gauche fut tout fait au dessous de ses responsabilit s La triste Union fran
119. aines des limites inh rentes toute tentative de coordination du d veloppement social c est dire des limites qui survivent au capitalisme Dans la premi re formule la perversion cong nitale du socialisme stali nien d ploie tous ses effets Rien ne s oppose ce que le parti unique indissociable de l appareil d Etat centralis ma tre des moyens d information et de propagande ainsi que de l appareil scolaire judiciaire et policier fasse de la propri t du peuple tout entier sa chose propre Le d veloppement social est alors assujetti aux caprices d un ou de quelques hommes et la r sultante de sourdes luttes d int r ts Dans la seconde formule les conflits d int r ts se font plus ouverts mais aussi plus rep rables et mieux maftrisables ce point se situe l un des principaux contresens de la pens e socialiste dogmatique celui qui tend pr senter la propri t de tout le peuple comme une forme sup rieure la propri t du collectif des travailleurs firme par firme S1 l abondance g n rale r gnait si l galit des chances offertes chaque homme tait de pratique courante depuis plusieurs g n rations si l ab me qui s pare les maigres connaissances de la sociologie de l acquis non moins rudi mentaire de la psychologie tait combl si enfin le cloisonnement des nations fabriqu es par l histoire tait de longue date effac alors on pourrait raisonnablement esp rer que la r
120. ais s affirme dans toute lection qui se pr sente Elle ne se b tit pas pour prendre le pouvoir par le jeu exclusif d une ventuelle majorit lectorale mais prend le pouvoir quand et comme il se pr sente le 29 mai 1968 ou au lendemain d lections victorieuses Rien ne permet en effet de pronostiquer que le calendrier lectoral et les proc dures lectorales seront respect es en tous points et tous moments Les p rip ties de l apr s gaullisme peuvent r server des surprises cet gard Les grandes pulsions populaires ne se laissent pas davantage pr voir La seule sagesse et de se pr parer toutes les variantes imaginables ce qui requiert d abord une force politique La seule certitude est que la victoire ventuelle de la gauche s inscrira sinon dans une situation de crise ouverte du moins dans une situation en changement rapide car telle et en effet la caract ristique profonde de notre poque On pourrait croire comme l indiquait le chapitre premier que la gauche a subi des checs r guliers tous les dix ans environ Mais c est une illusion d optique car en notre si cle chaque d cennie est si l on peut dire plus longue que la pr c dente plus longue c est dire marqu e par beaucoup plus de changements La France de 1948 croyait se reconstruire l identique et r vait au bel avant guerre Celle de 1958 enterrait la vieille R publique n e vers 1875 et d couvrait la perspective de l int gr
121. ait la dangereuse politique d expansion et de moderni sation tous crins Apr s avoir impos la T V A au commerce de d tail et une partie de l agriculture ne pr parait 1l pas une r forme de l imp t sur le revenu qui allait videmment frapper les revenus moyens ce qui alarmait jusqu aux cadres Seul Faute faisait mieux que son pr d cesseur en donnant la politique agricole d heureuses inflexions la croissance des subventions sui vait une pente vertigineuse et les perspectives ouvertes si difficilement par la politique agricole commune semblaient int ressantes La troisi me tendance form e de salari s pour l essentiel tait la plus durement trait e Elle red couvrait le ch mage et ce qui n est pas moins gra ve la crainte du ch mage et ses cons quences indirectes Parmi ces derni res le ralentissement sensible des progr s du pouvoir d achat tait largement ressenti La mod ration des hausses nominales la rar faction des heures suppl mentaires l effet m canique d un bar me assez rigide de l imp t sur le revenu la hausse des cotisations sociales et pour beaucoup celle des loyers aboutissaient parfois une stagnation ou un recul du pouvoir d achat bien que le glissement g n ral des prix f t faible Les salari s d couvraient les cons quences lointaines de la stabilisation de 1963 et celles d une concurrence internationale plus s v re Ils se sentaient plus que victimes vis
122. ait a t pr par par la conversion de la C F T C en C F D T et av r par la crise de mai 1968 De fa on in gale et confuse mais n anmoins spectaculaire la C F D T est apparue ce moment aux yeux de millions de salari s en gr ve comme un second p le distinct de la C G T et souvent plus attractif qu elle Cette situation donne aux dirigeants de la C F D T des responsabilit s d cisives S ils savent parfaire une d confessionnalisation d j bien engag e s ils savent consacrer au renforcement et au perfectionnement de leur appareil l attention l invention et les moyens requis s ils savent au sein de leur organisation renforcer les pouvoirs r els des instances conf d rales s ils savent conserver et affiner la sensibilit au changement dont ils ont souvent su faire preuve en Mai et bien avant ils feront de leur centrale ce qu elle promet d j d tre le plus moderne des syndicats fran ais S ils savent en outre imaginer des tactiques et inventer des proc dures pour lier leur action au niveau local f d ral ou conf d ral avec celle des syndicats affili s F O ou la F E N ils peuvent cr er un courant unitaire Peut tre aussi leur faudra t il cet gard joindre le b ton la carotte si par exemple le blocage la ciste demeurait vivace et que la C F D T ait conscience de s tre d barrass e de toute s quelle de son ancien confession nalisme f t ce au prix de quelques mutati
123. ait nouveau tait cependant que beaucoup d tudiants d couvraient l al a de cette carri re la fois parce qu ils taient moins s rs que l Universit puisse leur offrir de bonnes chances d y acc der et parce qu ils pressentaient qu une fois arriv s bon port ils trouve raient une situation en voie de d gradation Quand le nombre des ing nieurs et cadres s accro t de 25 entre deux recensements faut il beaucoup d imagi nation aux futurs ing nieurs et cadres pour deviner que le statut social moyen de ces cat gories va relativement se d grader Les influences sociales traditionnelles se rel chant les tudiants pourraient ils agir comme une force sociale autonome Seraient ils l origine d une quatri me tendance qui viendrait bouleverser la dynamique ancienne des luttes sociales et politiques M me les groupuscules n osaient gu re le pro nostiquer On conna t la suite Une explosion sp cifiquement tudiante branle tout le pays par sa violence Comme c est un pays dont l quilibre politique est pr caire il va une nouvelle fois tituber pendant quelques semaines Comme c est une conjoncture conomique malsaine la gr ve des salari s sera massive durable non r ductible par les proc dures habituelles Comme c est une r volte qui na t d un probl me et d un milieu inhabituels qui se veut politique et qui sort du jeu politique les forces les plus concern es et sp cialement le P C seront contrain
124. ante seraient en position nettement moins commode que la Communaut conomique europ enne menant son chelle de telles actions La raison en est claire si la crise clate et se d veloppe pleinement elle poussera l miettement du march mondial en cantons troits avides de protection et cet miettement sera lui m me facteur d accentuation et de prolongation de la crise si par cons quent le march mondial capitaliste ne se fragmente qu en blocs assez massifs cette circonstance aggravante sera vit e cependant que chacun des blocs pourra appliquer en son sein les tech niques expansionnistes qui se sont r v l es efficaces de 1945 1960 dans chaque espace national prot g Mais subjectivement c est dire en consid rant surtout les orientations auxquelles les gouvernements en place et les forces politiques dominantes accordent leur active pr f rence les choix offerts l Europe sont moins largement ouverts L tape qui s est achev e avec le d part de de Gaulle s est caract ris e par une sorte de match nul entre deux tendances 1 Il n en irait sans doute pas de m me pour un March commun tendu toute l A E L E voir chap 5 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 50 Celle que proclamaient les Six moins la France visait l largissement rapide et inconditionnel du March commun par l entr e de la Grande Breta gne et de ses partenaires de la Zone de libre change A E L
125. arti du mouvement Support traditionnel des forces politiques de gauche ce parti du mouvement a n anmoins perdu beaucoup de sa capacit d initiative sinon de contestation devant l lan nouveau de l expansion capitaliste Prise contre pied par cette expansion par les revenus qu elle procure par les consommations et les modes de vie qu elle provoque cette tendance se bloque parfois sur des positions anciennes qui l assimilent partiellement au vieux parti de l ordre C est la fois et contradictoirement la tendance qui pousse au progr s social et celle qui d fend pied pied ses droits acquis L expansion objectif de la premi re tendance n est pas le progr s social La premi re tendance vise le profit la puissance l abondance par la con sommation individuelle la troisi me privil gie la r duction des in galit s la chasse la mis re la satisfaction des besoins en consommations et en quipements collectifs Mais il y a pourtant un terrain commun entre elles le d veloppement conomique Et comme sur ce terrain la premi re tendance a presque toujours gard l initiative et la pr pond rance elle a capt le d velop pement conomique et l a soumis aux exigences de l expansion qu elle visait tandis que la troisi me tendance ne r ussissait faire reconna tre ses aspira tions au progr s social que de fa on tr s occasionnelle Soumise cette offensive la troisi me tendance a donc t port e se
126. as t d un loyalisme suffisant La le on est galement retenir bien qu elle r duise un sch ma beaucoup trop simpliste des situations politiques qui furent tr s diff rentes les unes des autres Une troisi me consid ration est souvent invoqu e depuis que le P C est devenu une force politique majeure N est il pas toujours soup onn d tre un parti nationaliste tranger D s lors tout s clairerait ce parti pourrait tre l associ ou le soutien d un pouvoir occasionnel n de circonstances excep tionnelles comme la crise et le fascisme des ann es 7930 ou la R sistance des ann es 7940 mais m me s il mod re ses ambitions r volutionnaires il ne pourrait r sister longtemps aux contradictions qui m rissent in vitablement entre l int r t national fran ais auquel l essentiel des autres forces politiques Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 22 de la gauche demeure fid le et l int r t national tranger que v hicule son internationalisme Le fait est qu en 1937 1938 et en 1947 le probl me s est pour partie pos en ces termes Mais aujourd hui et demain Le poids de la politique internationale la r sistance de l ordre tabli la situation contradictoire du P C tous ces facteurs ont pu jouer un r le mais ils sont loin d expliquer pleinement les checs de la gauche Jusqu la premi re guerre mondiale la dominante de la vie sociale sous toutes ses formes tait la fia
127. ation europ enne apr s avoir commenc de s accoutumer l expansion continue Celle de 1968 tait plong e dans l Europe et le march mondial n avait plus que des souvenirs d Empire et d couvrait la port e insoup onn e du rajeunissement d mo graphique Que l on prenne n importe quel crit re la technique les modes de vie les r f rences culturelles le poids relatif de diverses couches sociales la puis sance imp riale le rapport au march mondial ou ce que l on voudra le r sultat est toujours le m me la France change plus vite que jamais Si par exemple l U N E F avait entrepris apr s Mai d amalgamer une large pan des forces nouvelles issues du mouvement et si en se d marquant m me brutalement des groupes politiques les plus r volutionnaristes elle avait particip aux lections univer sitaires de l hiver 1968 ig6g elle aurait sans aucun doute remport comme le montre l exemple de Caen un tr s large succ s elle aurait en outre capt une bonne part du courant que le P C a su rassembler autour des liftes U N E F Renouveau Elle n e t rien perdu pour autant de sa capacit contestatrice bien au contraire Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 181 Pour juger de ce qu elle est aujourd hui il suffit d couter les jeunes de quinze vingt ans n s au monde apr s 1958 Ce qu ils savent ce qu ils sentent et ce qu ils retiennent de ce monde a peu de choses en commun avec ce q
128. aurait frap p d inanit tout le programme s il s tait agi de l appliquer La d mocratie Retour la table des mati res M me si certaines de ses mailles filent dangereusement le r seau du pouvoir n en est pas moins aujourd hui d une densit sans pr c dent et tous les individus se trouvent pris dans son filet La vie quotidienne d un citoyen sous la Ile R publique d pendait avant tout d v ne ments dont personne n tait visiblement responsable Celle d un citoyen de la Ve R publique est tram e par les myriades de d cisions qui manent du r seau qui en douterait il est conseill de dresser l inventaire des impulsions de ce type re ues en une seule journ e f t elle de vacances La seule difficult de cet exercice est que l habitude cr e l accoutumance n oubliera t on pas les publicit s les conditionnements radio t l vis s les consommations r flexes les imp ts tapis dans chaque produit etc Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 103 LA D POLITISATION Retour la table des mati res Pourtant le contenu pratique de la d mocratie n a gu re chang d une R publique l autre 1l s agit toujours d lire occasionnellement un pr sident un d put un conseiller g n ral ou municipal C tait beaucoup au moment o le suffrage universel venait d tre conquis C est peu aujourd hui et l on comprend que l explosion de mai o l aspiration d mocratique tait c
129. auto critique c est enfin traiter de nouvelle mani re des probl mes que l organisation sociale traite d j mais aussi d couvrir les probl mes qu elle ignore et en laborer de nouvelles solutions En tant qu investissement politique le projet r formateur r v lerait donc des effets successifs terme relativement proche il vise le pouvoir pour la suite il enracine la confiance que des citoyens mieux clair s peuvent accorder leurs repr sentants mais plus long terme il appara t surtout comme une d marche relevant fondamentalement de la m thode socialiste Les communistes Retour la table des mati res Il faut enfin en venir aux organisations politiques syndicales et autres qui composent aujourd hui la gauche Leurs checs leurs faiblesses leur marasme ont t s v rement analys s Mais ce serait une pure illusion que de sous estimer pour autant leur vitalit Actives ou moribondes dynamiques ou scl ros es porteuses d avenir ou conservatrices de traditions ces organisa tions existent M me ce bon vieux parti radical n en finit pas de mourir et sait on jamais nos petits enfants en d c leront peut tre encore les traces apr s tout il existe bien encore des royalistes ou des bonapartistes Certains ont parfois imagin qu une r sorption rapide du P C jointe l mergence ou la r novation d une ou plusieurs organisations solides de la gauche serait possible Mais ce fu
130. autres ont aper u certains des chan gements qu a provoqu s le remplissage progressif de ce vide entre ciel et terre mais pr s d un demi si cle apr s la mort de L nine il est permis de tenir ses indications pour anciennes et sommaires L imbrication de l tat et de l conomie l intrication de tous les int r ts de la soci t civile et de tous les rouages de l administration ont comme on l a vu multipli les fondions sociales remplies par l tat et ramifi prodigieu sement le r seau des pouvoirs Mais ils ont galement fait na tre de nouvelles possibilit s qu expriment chacune sa mani re l exploration du march par les grandes firmes la responsabilit de l quilibre conomique d sormais impartie l tat et les diverses tentatives de planification plus ou moins souple Une soci t capitaliste moderne n est plus une collectivit n cessaire ment emport e par un destin aveugle c est dire par la r sultante impr visible et imma trisable d une infinit de d cisions parses Ce n est pas non plus une collectivit ma tresse de son destin c est dire apte pr voir ses avenirs possibles op rer des choix et les mettre collectivement en uvre Son statut effectif se situe entre ces deux p les Elle s est arrach e au pur hasard sans conqu rir sa ma trise e L exp rience des principaux pays capitalistes au cours des deux ou trois derni res d cennies fait ainsi mieux appara tre la nat
131. aux de la vraie bourgeoisie de la plus grande la plus petite Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 74 traditionnellement la petite paysannerie de certaines r gions et de fa on plus al atoire une fraction de la petite bourgeo isie urbaine L une des particularit s fran aises est l attraction qu exerce cette tendance sur une large fraction des intellectuels Ces derniers hormis un milieu assez troit de journalistes d crivains et d artistes formaient nagu re moins une couche sociale sp cifique qu une frange sp cifique pr sente dans toutes les cat gories sociales Mais le rassemblement de vastes groupes de travailleurs intellectuels dans des soci t s sp cialis es bureaux d tudes dans les servi ces sp cialis s de grandes firmes recherche ou de grandes administrations techniques et financi res ainsi que la multiplication des cadres de formation intellectuelle plus pouss e et que l agglom ration massive des travailleurs intellectuels dans l enseignement bient t un demi million d enseignants sans parler des tudiants obligent r viser progressivement ce jugement La frange intellectuelle envahit le tissu social Avec plus ou moins de force les divers milieux intellectuels relaient l influence de la troisi me tendance vers toutes les classes sociales non sans v hiculer en retour les influences contraires Ainsi on le voit cette troisi me tendance est la forme actuelle de l ancien p
132. bilit Les manuels d histoire peuvent nous donner l illusion du contraire parce qu ils privil gient les v nements saillants mais les historiens de l conomie ou des id es en jugent autrement La croissance conomique et l urbanisation taient lentes l univers culturel tait stable la vie sociale se modifiait peu l chelle d une vie humaine Entre les deux guerres et m me jusqu en 1945 1950 cette Stabilit perdue est demeur e l horizon de notre soci t effacer les ruines des guerres recons truire l conomie stabiliser le franc restaurer les institutions ont t les principaux objectifs du pays Les perc es que la gauche a tent es ou r ussies en 1920 et plus m dio crement en 1924 en 1935 1936 ou en 1943 1945 visaient souvent ces m mes objectifs Toute la gauche se dressait contre les cons quences des d sordres majeurs qui avaient perturb la stabilit sociale la guerre de 1914 1918 la crise et la menace fasciste des ann es 1930 l occupation allemande des ann es 1940 Une partie de la gauche et non les seuls communistes visait en outre bouleverser l ordre ancien parce qu il tait incapable de pr server la fiabilit sociale la crise et la guerre tant analys es non comme des accidents mais comme les fruits amers d un capitalisme condamn au d clin Pourtant une novation d cisive est intervenue apr s la seconde guerre mondiale Elle a d abord t per ue comme un nouvel accident du ca
133. bles administratifs et d usagers qui auraient convenance l emploi d autres proc dures seraient pr ts dire leur mot ce sujet et faire beaucoup de bruit pour que les actes suivent les paroles UN SYST ME DE D CISIONS Retour la table des mati res Le syst me des d cisions qui sourd de ce r seau est lui aussi compos d l ments in gaux et sp cialis s Chaque type de d cision a sa logique propre dont il peut tre fait meilleur usage que d en tirer argument pour d noncer les contradictions de la bourgeoisie niant elle m me ses propres valeurs La C F D T a plus fait que vingt ann es de page du travail dans l Humanit le jour o poussant fond l analyse de la r pression anti syndicale elle a montr que le facteur d cisif un niveau donn des luttes de classes tait moins l insuffisance ou l impr cision des lois que la pratique de tribunaux qui sous la tutelle vigilante de la Cour de cassation vident le droit social de son contenu pour le r duire aux normes du Code civil Mais de telles d couvertes qui pourraient tre ais ment multipli es ne valent que par l action qu elles d clenchent c est dire par l aptitude des diverses forces sociales et politi 1 C est ce qu ont fait les tudiants en mai 1968 pour l Universit mais que n ont ils t pr c d s par les syndicats d enseignants et les partis de gauche Vit on les forces traditionnelles de la gauche se soucier aucu
134. c le gouvernement en place pour obliger celui ci s effacer La police et l arm e n auraient probablement jamais re u l ordre de tirer L eussent elles re u qu elles auraient clat rapidement d chir es par la r volte du contingent les contradictions bien visibles de la police et l impuis sance des troupes fid les contre les ouvriers et les tudiants retranch s dans mille places fortes Peut tre cette r volution e t elle fait autant de morts qu un ou deux week ends de grande circulation Peut tre m me e t elle ici ou l entra n de plus sanglantes batailles Mais en tout cas ce n e t pas t la lutte d un peuple aux mains nues contre la force arm e La r volution se serait ais ment quip e qui en douterait m ditera l attitude du contingent pendant les putschs alg riens ou l ampleur et la rapidit des rappels de traitements obtenus par les syndicats de la D fense nationale ceux des arse naux en particulier M me si la bataille avait t dure la partie pouvait tre jou e et rapidement gagn e L hypoth se la plus vraisemblable est qu une offensive r volutionnaire amorc e vers le 20 25 mai e t t pleinement victorieuse dans le mois qui suivait LES R VEURS Retour la table des mati res Mais ensuite Ici commence le drame Ceux des commentaires r volutionnaires de mai qui ne s arr tent pas au lendemain du premier succ s comme la Porte d un monde ineffable e
135. capitalisme monopoliste d tat Une autre met l accent sur les missions nouvelles de r gulation et de coordination conomiques d sor mais remplies par l Etat et tenant compte de l efficacit certaine de cette d marche y voit l indice d une mutation profonde d un n o capitalisme Une 1 Que les propri taires payant un imp t suffisant soient les seuls lecteurs est donc dans la logique de l poque Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 87 autre encore plus empirique recense les l ments qui composent la vie de tout homme ducation travail revenus consommation logement loisirs etc met en lumi re la d pendance plus ou moins grande mais jamais nulle o l Etat tient chacun de ces l ments et y voit l indice d une politisation vir tuelle de toute la vie civile de toute la quotidiennet Une autre enfin souligne avec toute la force qu appellent les particularit s de la soci t fran aise o le centralisme tatique est extraordinairement vigoureux la confusion pratique qui s est tablie entre le social et l tatique On peut de diverses fa ons mesurer le r le nouveau jou par L tat Ses pr l vements obligatoires imp ts et cotisations sociales ont repr sent en 1967 41 de la production int rieure brute et l on con oit d s lors qu il ne s agit plus comme jadis de faire lever l imp t par un Parlement mais bien de se prononcer simultan ment sur l ensemble des fonctions
136. cation d un ordre politique mondial formera un jour avec le risque d auto destruction atomique de notre plan te le dilemme de toute politique Cela ne suffit pas fonder aujourd hui une politique On peut aussi c der la mode n o m di vale qui privil gie l horizon 2000 et inscrire dans le dernier tiers du XXe si cle des mouvements d j moins impr cis l explosion d mographique mais notre chelle les famines probables et leurs suites la Chine riche comme l est aujourd hui l U R S S l U R S S beaucoup plus puissante que ne le sont aujourd hui les Etats Unis ces derniers comme l Europe et le Japon explorant l au del de l abon dance quelques Br sils en plein essor capitaliste quelques Indon sies ayant relay la Chine dans l invention du socialisme partir de la mis re Ou dans un registre plus dramatique la poursuite et la maturation de cette re des guerres et des r volutions qu annon ait L nine en 1917 Ou m me l ascension vers un conflit mondial avec ses multiples parcours et ses chances de d viation Mais sans nier toute f condit de tels exercices car ils ont au moins le m rite de prouver qu en toutes hypoth ses la conservation l identique de l agencement mondial actuel est impossible on ne peut se r soudre les imiter ici Ces investigations trop longue ch ance ne jettent que de vagues lueurs sur les chemins qu il nous faut prochainement trouver La presbytie e
137. cation des centrales non c g tistes peut exercer sur la r novation de la gauche non communiste Celle c1 ne recevrait que des impulsions lointaines et indirectes la comp tition avec les communistes aurait toutes chances de tourner son d savantage et finalement le r quilibrage des forces de gauche ne serait pas atteint Ainsi la strat gie unificatrice doit tre limit e dans un premier temps Elle doit s inscrire dans une strat gie plus large celle de la concurrence transfor matrice l gard du P C et celle de la r novation de la gauche non commu niste dont ne l oublions pas la C F D T F O et l essentiel de la F E N font partie qu ils en aient ou non une claire conscience En revanche apr s cette premi re r unification syndicale et apr s l mer gence d une gauche r nov e l unification g n rale des syndicats deviendra un objectif raisonnable puisqu elle tendra cr er une force sp cialis e unique polaris e par deux forces politiques alli es mais distinctes ce qui peut former un dispositif dynamique et quilibr 1 Le pr c dent de 1953 1954 vaut d tre rappel Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 203 SYNDICAT S ET PARTI S Retour la table des mati res En attendant que de telles perspectives se r alisent le mouvement syndical continuera d tre sollicit de diverses mani res par les forces politiques Il importe qu en r ponse ces demandes il sorte de
138. ce conomique dominante Le fameux talon or cher aux doctrinaires du XIXe si cle leur h ritier Jacques Rueff et au disciple que ce dernier s tait trouv parmi les gouvernants contemporains n a jamais exist que dans leurs r ves leurs livres et leurs discours Dans les faits c est la Banque d Angleterre qui par son or sa monnaie et son cr dit a servi de centre pendant tout le XIXe si cle un syst me mon taire souple o le cr dit international s tendait peu pr s en Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 40 fonction des besoins et sans respecter une proportion rigide avec les stocks d or disponibles Au XXe si cle l volution des rapports de force a transf r ce pouvoir aux Etats Unis et l exp rience aidant le m canisme de cr ation de cr dits internationaux les tirages sur le F M I a t explicitement inclus dans le syst me moyennant une liaison assez souple avec l or La charte de Bretton Woods ne d crit d ailleurs qu un aspect du syst me Elle omet le fait que la cr ation par les Etats Unis de dollars additionnels accept s par les banques centrales comme monnaie de r serve a t le principal facteur d expansion du cr dit international L actuelle crise mon taire est une crise du cr dit c est la confiance dans l action du banquier am ricain sinon dans sa monnaie qui est en p ril Les rapports de force ont de nouveau volu dans le monde depuis 7944 et le pouvoir in
139. ce que la colonisation cono mique du Tiers Monde s est renforc e Cependant les changements principaux ont eu pour si ge les deux zones principales le monde capitaliste et le camp socialiste Dans le premier la marche de l conomie s est modifi e La crainte mor telle n e de la conjonction pendant les ann es 1930 d une crise sans pr c dent et d un socialisme alors vivace a conduit l invention de nouvelles politiques conomiques La militarisation de l conomie li e la guerre puis la guerre froide l acc l ration des progr s techniques le regain d mogra phique ont restaur puis acc l r la croissance conomique et ont fait d couvrir les vertus apaisantes que l expansion exerce sur les luttes de classes l int rieur des nations Les crises cycliques ont t r duites la dimension de r cessions mineures Le camp socialiste de son c t ne s est pas moins modifi mesure que la dur e et la diversit y faisaient leur uvre Avant 1917 le socialisme tait une id e Jusqu en 1930 Ou 1945 ou m me 1956 selon les hommes et les pays son incarnation l Est tait aussi un id al par contraste avec les r alit s capitalistes proches puis par l effet conjoint de l ignorance et de la propa gande puis par celui de l habitude Dans sa r alit ce socialisme s est r v l comme une technique brutale mais efficace d industrialisation et de d veloppement conomique extensif
140. ci t mais aussi d ouvrir l action politique des voies praticables Dans cette perspective on peut d crire le pouvoir comme la combinaison de trois l ments un r seau de centres de d cision un syst me de d cisions un Jeu de luttes sociales DES CENTRES DE D CISION Retour la table des mati res Les centres de d cision qui sont in gaux et sp cialis s forment un r seau relativement stable dont la composition r sulte certes de la nature profonde de la soci t pour nous le capitalisme mais aussi de son histoire propre et enfin de son niveau de d veloppement conomique Chacun de ces centres pr sente une certaine inertie donc des contradictions dont il peut tre jou Chacun peut tre l enjeu de luttes sociales de conflits politiques aucun n est d dai gner Ceci vaut notamment pour l entreprise o la conqu te de nouveaux pouvoirs syndicaux devrait tre un objectif permanent malgr son al a intrins que qui est le risque d inf odation du pouvoir syndical le risque d int gration on retrouvera ce point 1 C est dire d une insertion nouvelle plus solide et plus puissante des syndicats dans le jeu des divers centres de d cisions constitutifs de l entreprise moderne Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 98 Ceci vaut galement pour tous les centres de la zone tatique o l enjeu techniquement variable de l un l autre est d ouvrir plus largement ce
141. comme r serves mais seulement que la menace d inflation est export e c est d j beaucoup Mais ce n est pas tout En repr tant sur le march de l eurodollar les fonds ainsi re us les banques non am ricaines trouvent comme principaux clients les firmes am ricaines travaillant en Europe celles ci financent par leurs emprunts sur ce march une large part de leurs investissements sur le vieux continent On comprend d s lors que la fa on dont les tats Unis remplissent directement ou par le canal du F M I leur r le de banquier international soit contest e ce r le all ge leurs risques d inflation leur permet de financer un d ficit ext rieur et les aide renforcer leurs positions en Europe au japon au Canada ou dans le Tiers Monde Depuis 1965 1966 le syst me mon taire international craque de toutes parts Une masse incontr lable de capitaux flottants se livre une sp culation tournante dont les objets sont successivement ou simultan ment la fragile livre sterling le dollar jadis solide l or toujours investi de propri t s m ta physiques les monnaies solides le mark le franc nagu re etc et les mon naies qui s affaiblissent le franc depuis 1968 etc Le syst me va craquer s il n est pas r agenc S il craque cela signifiera que les consid rations de d fense mon taire d valuation r ciproque des monnaies de protection offensive ou d fensive contre les modifications soudaines des
142. ctionn en une poussi re de clubs tout en recevant le renfort d une partie des militants de la g n ration perdue de 1956 1961 dirigeants du syndicalisme tudiant notamment et d une partie des oppositions communistes n es de 1955 1960 certains moments le P S U a r ussi en rassembler une large fraction En 1965 1967 la F d ration en a galement attir une partie soit par le canal de la Convention des institutions r publicaines soit par celui du club jean Moulin soit enfin par celui de l U C R G En diff rentes occasions Colloques de 1962 sur la planification d mocratique Colloques socialistes de 1963 1964 Rencontres dites de Grenoble de 1966 1968 l essentiel de cette gauche nouvelle a travaill de concert avec certains responsables d organisations syndicales ou politiques de forme plus classique Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 21 t t avec les communistes l invasion de la Tch coslovaquie par les Sovi ti ques a offert en ao t 7968 un mobile et un alibi pour justifier cette mise en sommeil de l unit la fi vre de mai et l amertume engendr e par le reflux des mois suivants ont emp ch les critiques r volutionnaires ou moder nistes d tendre leur influence la gauche s est pulv ris e Quand par un r f rendum rageur de Gaulle a voulu v rifier son emprise et quand avec lui tout le pays et toute sa classe politique a d couvert quel point mai 7968
143. d e de la France venait de loin mais n tait pas de ce si cle ci ni adapt e au prochain D une autre mani re Thorez avait voulu en 1937 comme en 1948 reprendre des mains de la bourgeoisie le drapeau de l ind pendance nationale Mais l op ration s tait trop souvent d grad e en une exacerbation de cette part du nationalisme qui pouvait tactiquement servir une strat gie internationale Avec de Gaulle son id e de la France a quitt le pouvoir Cependant les forces profondes qui d font l ancienne France poursuivent leur uvre l expansion d racine et d truit de vieilles structures et de vieilles id es l int gration de l conomie la petite Europe et au march mondial d sint gre l identit nationale Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 70 Il n en faut point concevoir des regrets excessifs ni pr ner un protec tionnisme qui d ailleurs ne pourrait plus sauvegarder notre ancien tre collectif d j plus qu demi mort Mais il faut et c est une t che immense dont la recette ne sera ni facile concevoir ni simple d ex cution ni de r alisation rapide d couvrir et affirmer ce qui aujourd hui et pour demain peut d finir et unifier les Fran ais exprimer notre collectivit fonder notre destin commun l gitimer nos institutions Pour y arriver il faudra trouver un nouvel quilibre stable entre un pass immense mais qui seul ne peut engendrer que des nostalgies et un vaste proj
144. d marche politique r fl chie qui organiserait et acc l rerait en le dosant correctement le transfert des pouvoirs de l tat national vers un Etat europ en en formation serait un pro gr s condition que ce transfert soit ajust aux besoins du march certes mais soit aussi compatible avec le projet r formateur dont la r alisation est vis e en France m me c est affaire de compromis Critique politique enfin si l on consid re les cons quences plus long terme que pourrait comporter la rencontre d une exp rience socialiste trop influenc e par les orientations actuelles de l Est europ en et d un centralisme tatique la fran aise On a montr plus haut que la collectivisation tatique des moyens de production jointe l omnipr sence et l omnipotence d un appareil tatique centralis formait la base objective du stalinisme ce n en est sans doute pas la condition suffisante puisque l U R S S actuelle n est plus aussi stalinienne que jadis mais c en est assur ment une condition n cessaire D o cette conclusion d j d montr e la qualit du socialisme que nous r aliserons ou que r aliseront nos petits enfants d pendra pour une bonne part de l aptitude briser l Etat centralisateur dont nous aurons su faire preuve Et si l on veut bien admettre que pour renverser un courant multis culaire il faudra quelques d lais n est il pas temps de s y mettre quelque pronostic que l on fasse sur les c
145. d signer les diri geants effectifs de la firme De nouvelles missions Les firmes publiques ont recevoir des instruc tions pr cises de l Etat et des autres collectivit s publiques d tenant la majorit en leur sein Le Plan offre videmment le lieu et l occasion de On devrait galement se poser la question de savoir s il ne convient pas de donner cer taines administrations le statut de firmes publiques les P et T par exemple ou l Assistance publique Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 169 s accorder sur ces instructions et de les actualiser p riodiquement en tenant compte des besoins et des int r ts g n raux de l conomie nationale Loin de cantonner les firmes publiques dans leur vocation traditionnelle ces instruc tions doivent les orienter vers des initiatives nouvelles De leur c t ces firmes disposant d une beaucoup plus grande autonomie dans la fixation de leur politique de prix et de financement doivent se doter des moyens finan ciers leur permettant de prendre de telles initiatives Naturellement d in vi tables contradictions sont pr voir entre ce que le Plan souhaiterait faire entreprendre aux firmes publiques et ce que de leur propre mouvement elles seront tent es d entreprendre Ce sont l des contradictions saines source d un dynamisme accru mais 1l ne faut pas se cacher que leur solution cas par cas fera souvent probl me Pour r soudre ces probl mes il faut pr
146. d veloppement de l conomie reposera donc pour une part sur la poursuite d une expansion capitaliste Faites des profits Messieurs mais selon le Plan national ou europ en e ce d veloppement reposera aussi pour une part progressivement pr pond rante sur l expansion du secteur public y compris par la prise d initiatives publiques nombreuses soit en r ponse aux besoins de reconversion soit pour suppl er aux insuffisances de l initiative priv e ce d veloppement passera toutes les fois que ce sera possible par une action liant contractuellement des firmes priv es en vue de la r alisation d objectifs planifi s e Je r seau des pouvoirs d j r form d entr e de jeu sera progres sivement mais profond ment remodel e l agencement interne des firmes et la r glementation qui leur est applicable seront model s autant que le permettra la recherche de compromis en mati re europ enne pour rendre plus efficace la plani fication et plus d mocratique la gestion il y aura donc coexistence avec la propri t priv e des firmes mais non avec le type d autorit et de hi rarchie qui d coule actuellement de cette propri t priv e LE D CLIN DE LA PETITE FRANCE Retour la table des mati res Pour qu une telle coexistence durable ait un sens il faut videmment que les diverses forces sociales puissent s y inscrire En faisant une derni re fois retour au jeu des trois grandes tendances qui
147. de son tat pr sent vers une situation o ces fins seront r alisables Y a t il plusieurs chemins y a t il des obstacles d cisifs Les d finitions du socialisme par ses finalit s ne nous clairent en rien sur ces questions L autre type de d finition chappe tout fait ces impr cisions On y tient pour socialiste toute soci t o la propri t collective des moyens de produc tion a t substitu e leur propri t priv e base du capitalisme D o cette cons quence dramatique il faut tenir l U R S S stalinienne pour socialiste au m me titre que la Chine mao ste En ao t 1968 il fallait consid rer la Tch coslovaquie et l U R S S comme des Etats galement socialistes Il est vrai que ce socialisme tout comme le capitalisme est un concept fort g n ral et que sur la m me base la m me tout au moins quant l essen tiel les formations socio conomiques les plus diverses peuvent s tablir comme l observait d j Marx Il est galement vrai qu il serait inhumain c est dire tranger l exp rience pratique des hommes agglom r s en soci t de penser qu une formule magique d organisation sociale pourra vider leurs conflits leurs antagonismes bref leur histoire de toute tension dramatique de tout errement tragique Mais il reste ceci que l histoire a d montr dans quatorze pays de toutes tailles et sous diverses latitudes instaurer la propri t collective des moyens de produc
148. de ce parti en militants additionnels ne saurait faire probl me Toute la difficult est de passer de notre conception actuelle du parti chapelle celle d un parti pluraliste dans son id ologie comme dans l intensit de l adh sion qu il requiert Il serait vain d esp rer qu une telle novation naisse d un miracle aux effets instantan s Elle na tra d un travail patient mais aux cons quences rapidement cumulatives ce point de l analyse deux pr cautions s imposent D une part il n est videmment pas question d ignorer les organisations politiques existantes ni leurs ambitions leurs strat gies et leurs d fauts ou qualit s propres Mais plut t que de se laisser obnubiler par leurs pratiques et leurs caract ristiques essayons de poursuivre l analyse en les laissant un instant encore entre parenth ses La r f rence explicite aux partis politiques que nous connaissons aujourd hui viendra plus loin D autre part il ne faut pas concevoir les d mar ches qui vont tre propos es comme des actions au sommet impliquant au premier chef une r novation par en haut ni non plus comme des actions Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 184 n int ressant que la base Un processus r g n rateur int ressera n cessaire ment tous les niveaux de l organisation politique mais il peut tre entrepris de diverses mani res UNE M THODE ET DES EXEMPLES Retour la table des mati res Pour r nover l
149. de fa on atroce en circonscrivant l aire et les moyens d une Bien qu il date de 1952 l un des textes les plus clairante ce sujet demeure l tat et la D mocratie d Edouard Kardelj Voir galement du m me auteur la Socialisme et la Guerre Julliard 1962 L nine d finit l imp rialisme par la conjonction d une forte concentration de la production et du capital les monopoles d une interp n tration du capital industriel et du capital bancaire d un fort courant d exportation de capitaux de l existence d unions internationales de monopoleurs et d un partage territorial achev du globe Le troisi me et le quatri me de ces caract res font substantiellement d faut dans les rapports entre l U R S S et les autres pays socialistes ou les pays du Tiers Monde qui lui sont plus ou moins li s M me lorsqu il y eut ou lorsqu il y a une certaine exploitation conomique de ces pays par l U R S S ce n est gu re sous la forme d une rentabilisation de capitaux export s mais plut t sous celle de tributs de guerre ou d changes non quivalents A contrario l U R S S pousse syst matiquement ses satellites et ses alli s l industrialisation lourde ce qui est le contraire du colonialisme et m me du n o colonialisme Son imp rialisme n a pas de fortes racines conomiques C est bien d h g monie politique et id ologique qu il s agit dans son cas Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 31 guerre o
150. de t l vision par exemple mais elle pourrait avant long temps en tre au besoin de t l vision en couleurs Quand elles en sont fabriquer la demande les firmes exercent d j un pouvoir sur l avenir mais leur action en ce domaine va beaucoup plus loin Le Nouvel tai industriel Gallimard 1968 Le temps n est plus o les bricoleurs de g nie taient la source principale du progr s scientifique et technique Par les moyens qu elle requiert d sormais la recherche et le d veloppement technologique ne peut s inscrire que dans un nombre limit de canaux aux confins de l tat et de l conomie et cette canalisation rend possible un captage quasi forc vers les grandes firmes d j en place La comp tition internationale est cet gard le principal perturbateur Pour autant que l on puisse attacher quelque valeur cette nonciation exag r ment chronologique les divers stades s enchev trent parce qu leur gard les divers groupes n ont pas atteint la m me puissance la m me maturit N Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 94 C est de leurs d cisions que d pend la marche g n rale de l conomie donc par impr gnation la tonalit de toute la vie sociale Le r le Strat gique de l investissement priv dans la configuration de l quilibre conomique court et moyen terme l atteste Mais sous cet angle on est encore pour partie dans le domaine d un pouvoir virtuel d
151. dicales de la gauche ne sont pas du fait de leurs traditions propres trop exclusivement centr es sur le premier Le monde autre que celui du travail est un domaine politiquement en friche o r gnent sans conteste les id ologies diffus es par les classes dominantes La marmite nationale Retour la table des mati res Vues de France les nations voisines se r duisent ais ment des caract ristiques simples qui ne sont pas toutes superficielles On ne va sans doute pas tr s loin en observant que l Anglais boit du th et l Allemand de la bi re mais on touche d j quelque v rit plus essentielle en voquant l esprit d mo cratique des Anglais et le sens de la discipline des Allemands S il est assez facile de go ter le breuvage qui bouillonne en d autres marmites nationales la m me op ration devient plus d licate lorsqu il s agit de celle o l on vit soi m me Paraphrasant Marx on pourrait dire pas plus qu on ne juge un individu sur l id e qu il se fait de lui m me on ne saurait juger une nation sur sa conscience de soi Dans le miroir que nous tendent les nations avec lesquelles nous nous sommes le plus souvent et le plus durement frott s au cours de l histoire Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 64 donc celles qui nous connaissent le mieux certains traits se laissent aperce voir l g ret individualisme capacit d improvisation faconde raison rai sonnante ou raisonneus
152. du P C n est pas une variable ind pendante Aller gique aux conseils il est en revanche fort sensible aux pressions objectives Ce que la gauche non communiste peut faire de plus utile pour l amener se transformer C est de le soumettre une concurrence exemplaire Pour tre exemplaire la concurrence doit s exercer sur le terrain du projet politique et sur celui des rapports entre organisations de gauche Sur le premier terrain quatre rep res permettent de situer concr tement les endroits o les communistes achoppent ils sont hostiles aux engagements inscrits dans un calendrier pr cis ils ludent la d finition d une politique europ enne ils ludent de m me celle d une politique d aide au Tiers Monde ils sont hostiles enfin la construction d lib r e de contre pouvoirs de centres de d cision publics mais non tatiques C est donc en laborant des projets pr cis et dat s en explicitant claire ment sa politique europ enne et internationale et en multipliant les projets de d mocratisation que la gauche non communiste peut exercer la pression la plus utile Cependant la pression par le projet demeurera virtuelle si elle ne s ac compagne pas du d veloppement d une politique contractuelle largissant l assise et l audience des organisations non communistes Cent intellectuels Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 197 colloquant savamment n meuvent gu re le P C Mille section
153. duelles c est des milliers de reconversions collectives c est dire de reconversions d entreprises qu il faut s attendre se pr parer L accord de f vrier 1969 entre les syndicats et le C N P F est de bon augure cet gard N anmoins le plus dur reste faire tout syndicat qui au niveau de la firme ou de la branche n inscrit pas la reconversion permanente au premier rang de ses pr occupations lude dangereusement ses responsa bilit s quelques nuances pr s ceci vaut aussi bien pour les syndicats de l industrie ou du tertiaire que pour ceux de l enseignement ou de la fonction publique Ce n est l qu un aspect de la centralisation On retrouvera ce probl me au chapitre suivant Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 59 LES CLASSES SOCIALES en de la population TOTALE 1954 1962 1968 1975 1985 Bourgeoisie 4 5 4 5 5 5 5 Classes moyennes traditionnelles 18 19 20 20 21 21 22 professions lib rales ing nieurs et cadres sup rieurs enseignants artisans et boutiquiers Classes moyennes inf rieures 20 20 21 21 ED 22 23 cadres moyens techniciens employ s personnels de service etc Classes ouvri res 2 34 37 36 36 37 36 37 Classes paysannes 23 24 19 20 18 16 17 15 14 LE POIDS CHANGEANT DES CLASSES SOCIALES Retour la table des mati res Dans la France sans paysans qui se pr pare le poids relatif des diverses classe
154. e d pend plus de lui seul L avenir dira si l histoire du P C fran ais rappellera l un de ces mod les L id al serait qu il se d couvre une d marche originale empruntant aux Tch ques ou aux Italiens mais sensible avant tout ce qui est possible ici Peut tre cet id al passe t il par la formation d un P C europ en l chelle du March commun la concurrence s exercerait alors fronts renvers s l encontre de la gauche non communiste consciente des contraintes nouvelles que cr e l int gration europ enne mais qui est loin d avoir su s organiser cette chelle La gauche r nover Retour la table des mati res Encore faudrait il pour exercer une pression transformatrice sur le P C que la gauche non communiste en ait la force H las pour d nombrer toutes les organisations qui la composent il faut un long inventaire difficilement exhaustif Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 198 RUINE OU R NOVATION Retour la table des mati res qui lui rend visite le quartier de la gauche non communiste offre un spectacle d routant Les guides les plus avertis se perdent dans ses d dales et l observateur h site se prononcer est ce une r novation urbaine ou une ruine irr m diable Au centre du quartier dans la cit des mauvaises herbes la vieille b tisse S F I O expose ses l zardes Ceux qui campent dans son voisinage sous les tentes de la Convention
155. e etc Il faut sans doute admettre que c est l une partie de notre v rit donc s interdire de r ver des actions qui requerraient d autres qualit s Ainsi par exemple l id e que le jeu des forces politiques fran aises pourrait se laisser r duire deux ou trois grands partis est elle compatible avec notre temp rament national Que valent les exemples tir s de la pratique politique d autres pals si leur transposition ne peut s accompagner d une mutation rapide de nos caract res propres Ces caract res n ont cependant pas une nature purement psychologique les mentalit s et les institutions se sous tendent mutuellement tout en s adap tant leur mani re et leur rythme l volution plus profonde des relations sociales pr dominantes long terme celles qui r gissent l agencement de l conomie Or cet gard on peut discerner aujourd hui plusieurs d calages manifestes entre cette base sociale et des complexes de mentalit s et d insti tutions qui taient jadis plus solidement fond s INDIVIDUALISTE OU CITOYEN Retour la table des mati res L individualisme fran ais est pour l essentiel un individualisme petit bourgeois qui a m ri dans un pays o la petite paysannerie ind pendante est demeur e plus longtemps et plus massivement qu en toute autre nation capitaliste la classe la plus nombreuse de la nation B n ficiaire avec la jeu ne bourgeoisie industrielle de la R volution de 778
156. e m me suppl ant du Comit central importe beaucoup plus que la d putation Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 164 complexes de la soci t civile emplissent l tat Partout les parlementaires flottent sans grande prise sur la machine sociale aux Etats Unis comme en Grande Bretagne et en France et l on ne sache pas que ce Parlement de substitution que tend devenir le Comit central en U R S S et ailleurs ait plus de prise ou d efficacit encore que l on aimerait y voir plus clair Ceci pos il n est pas souhaitable pour autant de supprimer le Parlement C est plut t de le r inventer qu il s agit Imaginons en effet que le d p rissement de l tat ait t engag selon les orientations dites plus haut Il en r sulterait quatre besoins que seul un Parlement peut satisfaire e Toutes les tensions non r ductibles par le jeu d institutions d centra lis es et coordonn es ont tre r duites et le recours dire amp au suffra ge universel r f rendum etc ne peut qu tre occasionnel laissant place un r ducteur un arbitre permanent autrement dit tous les arbitrages que les instances locales ou r gionales universitaires ou autres n auront pu rendre devront bien tre rendus quelque part le Parlement peut tre cet chelon de dernier recours e Toutes les d cisions tous les arbitrages rendus par l tat central le budget le plan le choix des normes g n rales ou loi
157. e mais elle ne sera acquise qu au prix de difficiles batailles qui auront pour si ge non seulement les tats majors politiques parisiens mais aussi toutes les places fortes politiques locales L enjeu c est dire la reconstruction d une gauche socialiste sera l affaire de tous ceux qui d une part savent que la r volution n est pas l ordre du jour d autre part savent que l accession de la gauche au pouvoir est un leurre si elle ne se traduit pas aussit t par la mise en uvre d un projet r formateur lui permettant de durer et d agir durablement Dans ces limites qui sont fort vastes l objectif est de b tir une force politique qui r ponde des besoins que l on a recens s Equilibrer le P C en influence sinon en lectorat tout en l incitant se transformer Organiser par une politique contractuelle la convergence de tous les efforts politiques syndicaux et non politiques des organisations d j socialistes ou qui peuvent le devenir Elaborer par ce concert un projet r formateur capable de mobiliser l opinion R aliser ce projet par un exercice durable du pouvoir avec le soutien ou la participation communiste Pareil dessein suppose videmment une novation radicale des m thodes des proc dures des moyens et des hommes sans parler des id es Mais l histoire enseigne que tous les partis qui se sont form s gauche sont n s de l assemblage difficile du neuf et de l ancien de beaucoup d ancien
158. e qu l inverse il existe parfois de curieuses corr lations entre le recours des financements compl mentaires divers et de fortes positions dans de vieux appareils La grisaille et la p nurie de ces appareils les privent tous de la possibilit de recourir une main d uvre qualifi e de la dactylo au cadre dirigeant le personnel politique et syndical de rares exceptions pr s supporte mal la comparaison avec le personnel administratif ou avec celui des firmes priv es Si bien qu en fait notre soci t op re collectivement et inconsciemment une trange s lection rebours pour se doter du personnel politique responsable de ses destin es collectives Faire distribuer par le budget de l Etat de larges subventions aux partis et aux syndicats c est faire payer la nation une prime d assurance contre la m diocrit de ses dirigeants Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 177 Le contrat socialiste Les moyens Le cheminement Retour la table des mati res Notre soci t est plus que jamais contrainte au changement Un flux incessant de besoins nouveaux et de revendications l mentaires l y entra ne L innovation technique et la concurrence internationale secouent les entre prises La fin du protectionnisme annonce celle de la vieille paysannerie et des vieilles P M E Les administrations atteintes de cette ob sit qui frappe les tats centralisateurs sont en outre touch es par l an mi
159. e toujours dans les dix quinze prochaines ann es C est l endroit o la crise de Mai et ses suites sont analys es ce qui conduit s int resser notamment deux questions cl s la r volution est elle possible qu est ce que le socialisme peut signifier pour nous Les objectifs chap 6 s inscrivent dans le cadre trac au chapitre pr c dent L objet de ce chapitre n est pas de dresser un programme au sens habituel de la rh torique politique mais bien d esquisser les lignes fondamentales d action que la gauche pourrait utilement se proposer Avec Les Moyens enfin chap 7 cette gauche perd son relatif anony mat c est alors le moment de confronter les analyses et les propositions pr c dentes aux actions et aux perspectives qu offrent les partis syndicats et autres organisations dont la gauche se compose aujourd hui Qu il soit ou non adh rent de l une quelconque de ces formations le lecteur n aura aucune difficult pour adapter sa situation propre les moyens propos s ici Son accord comme son d saccord l obligeront sans doute pour pr ciser sa pens e ou ses critiques reprendre plusieurs des chapitres pr c dents Le lecteur paresseux prouvera peut tre ce moment l envie de lire quand m me le chapitre 4 Pour compl ter ce mode d emploi il peut tre opportun de souligner sans les expliciter ici les th ses principales du livre les le ons pour l avenir qui paraissent d couler des analys
160. e Plan et l I N S E E Les donn es relatives la classe ouvri re sont d une comparabilit douteuse d un recen sement l autre par suite de modifications dans la nomenclature des cat gories socio professionnelles La notion passe partout de tertiaire obscurcit le probl me en feignant d y r pondre Voir Michel Praderie les Tertiaires coll Soci t no 29 ditions du Seuil 1968 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 60 La France difficile gouverner Retour la table des mati res La d mographie et l conomie ne sont pas seules en cause Il est d autres inerties sociales et d autres dynamismes dont la ville la culture et la vie quotidienne permettent de rendre compte TOUS URBAINS L une des transformations les plus frappantes est la rapidit de l urbani sation Certes l Angleterre les Etats Unis ou l Allemagne nous ont pr c d s dans cette voie mais par un glissement beaucoup plus tal dans le temps En France les villes ont gagn 16 millions d habitants depuis 1901 D ici 1985 12 autres millions les rejoindront par croissance naturelle exode rural et immigration De ce fait les villes qui rassemblaient 40 de la population au d but du si cle et 66 en 1968 contiendront alors trois Fran ais sur quatre plus long terme l urbanisation des neuf dixi mes de la population est en vue On pourrait non sans efforts ralentir ou canaliser ce courant mais on ne peut l arr ter
161. e a prouv sa fragilit et sa force Sa fragilit Pendant toute la premi re quinzaine de mai les forces poli tiques de gauche ont offert un spectacle prouvant qui par de tristes p ri p ties a conduit quatre candidatures distinctes pour l lection pr sidentielle Les sondages d opinion ont alors r v l l incompr hension et le d go t de l lectorat et aussi ne l oublions pas la valeur mythique qui s attache l id e d unit de la gauche Ce fut l poque o les candidats de gauche totalisaient au Plus 20 0 0 des intentions de vote On pouvait croire la gauche moribonde Sa force Puis les quatre candidats sont partis en campagne et leur score total a presque rejoint celui qu avait r alis Mitterand au premier tour de la pr c dente lection pr sidentielle r sultat qu annon ait d ailleurs la r guli re progression des intentions de voter gauche enregistr e par les sondages pendant la seconde quinzaine de mai Ainsi malgr l atteinte port e au mythe de l unit et malgr la d sertion des radicaux et de maints leaders S F I O comme Mollet lesquels s taient ouvertement ou sournoisement ralli s la candidature de Poher d s le premier tour alors qu ils avaient soutenu Mitterand en 1965 l lectorat de gauche s est largi c est bien la preuve qu il s tait pass quelque chose un an plus t t Cette preuve est plus clatante encore lorsque l on observe la force relative de chacu
162. e analyse m me s il est d raisonnable de pr tendre inscrire le monde entier et son volution proba ble en quelques pages En fait il s agit l d une vue tr s cavali re qui reprend et r sume en les corrigeant quelquefois les analyses formul es dans un ouvrage ant rieur L h ritage chap 3 r pond un souci analogue grands traits en prenant parfois appui sur l ouvrage pr cit il essaie d tablir les caract risti ques dominantes de la France actuelle et d apercevoir les volutions probables d ici dix ou quinze ans Dans toute la mesure du possible il s agit l d une valuation des donn es objectives qui conditionnent et conditionneront toute politique fran aise 1 R Fossaert l Avenir du capitalisme ditions du Seuil 1961 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 24 Avec Les pouvoirs chap 4 on entre plus pr cis ment dans le champ de la politique puisqu il s agit de revisiter le lieu m me de toute politique Mais bien qu il ait paru souhaitable de commencer par cette exploration essentielle on ne peut cacher qu elle est parfois aride Le lecteur paresseux pourra sauter ce chapitre Le chapitre 5 sur Les possibilit s ouvre la partie la plus politique au sens courant du terme En tenant compte des contraintes ext rieures des donn es objectives nationales et de l analyse pr alable des pouvoirs ce chapitre essaie de circonscrire le champ des politiques possibles en Franc
163. e contrat socialiste 1969 110 Le contrat socialiste Les possibilit s Retour la table des mati res Acc der au pouvoir y durer en user ces trois objectifs sont ceux de toute force politique Pour sa part la gauche fran aise a montr depuis le d but du XXe si cle qu elle r alisait rarement le premier jamais le second et faible ment le troisi me Partant de ce constat l analyse a conduit deux pro positions centrales L une d place les priorit s en affirmant que la gauche doit savoir ce qu elle fera du pourvoir pour d finir en cons quence les conditions de son maintien au pouvoir puis ajuster ces moyens et ces fins la strat gie tendant conqu rir le pouvoir L autre modifie les clairages en situant les pouvoirs enjeux traditionnels des luttes politiques dans le r seau des pouvoirs de toute nature qui consti tuent la structure sociale et en montrant que pour r aliser son triple objectif la gauche doit viser non pas le pouvoir politique stricto sensu mais bien le pouvoir dans la soci t c est dire la polarisation en sa faveur du r seau des Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 111 pouvoirs et la r forme de ce r seau Faute d un tel projet r formateur il n est point de gauche Mais ce projet r formateur n est il pas un euph misme destin aux d li cats et prendre le pouvoir dans la soci t n est ce pas tout bonnement r ussir une r volution On
164. e d une pareille inflexion politique le jeu des institutions et l action des forces politiques ont rempli toute la sc ne comme s ils repr sentaient tout le champ de l histoire De ce fait les grandes forces qui composent notre histoire les trois tendances ont sembl s en absenter un moment d cisif En fait elles sont demeur es sous jacentes et pr tes remplir de leurs affrontements prochains le jeu plus ou moins modifi des institutions qui allait sortir de la comp tition politique La bourgeoisie n a pas de parti Plus exactement les deux tendances bour geoises s expriment travers une vaste gamme de partis La comp tition principale s est livr e entre Pompidou et Poher c est dire entre la pr mi nence maintenue d un parti gaulliste et le reclassement des forces politiques de droite et du centre apr s une phase temporaire d agglutination Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 126 Si Pompidou l a finalement emport c est sans doute parce qu il offrait dans le silence divis de la gauche une solution apparemment plus simple l homme surclassait son concurrent et il apportait en dot un parti une majorit parlementaire et une exp rience gouvernementale sans qu aucune fid lit excessive au gaullisme de son pr d cesseur vienne l entraver vrai dire le vainqueur et le vaincu avaient beaucoup en commun et pour l essentiel leur comp tition tait celle d hommes et d quipes politi
165. e des mati res Depuis plus de vingt ans c est dire depuis que la France s est trouv e engag e dans les aventures simultan es de la d colonisation de l expansion de la d protection conomique et de l int gration europ enne les luttes sociales et politiques y ont t vives mais ont rarement pris la forme d une bataille opposant deux camps aux limites peu pr s stables Presque toujours trois tendances distinctes se sont heurt es en une bataille fronts tournants On ne peut d crire ces tendances en faisant r f rence exclusivement la structure de classes du pays car ce serait nier le poids des traditions id olo giques qui se combinent avec les int r ts conomiques et sociaux pour d terminer les comportements des groupes sociaux On ne peut non plus les d crire en faisant r f rence aux attitudes prises par les organisations politi ques syndicales professionnelles etc car ce serait pr ter ces organisations une stabilit qui leur a souvent fait d faut beaucoup d entre elles ont vu au fil des ans leur contenu social leurs orientations politiques et m me leur repr sentativit se modifier consid rablement beaucoup aussi ont t l enjeu de luttes d influence qui exprim rent pr cis ment l une des batailles sociales en cours Chacune des trois tendances a eu pour moteur des cat gories sociales des fractions de classes aux contours pr cis et stables Chacune a entra n dans le sillage
166. e du r le de l tat L tat partout la port e actuelle de la s paration des pouvoirs au sein de l tat et la structure r elle des pouvoirs d Etat Trois pouvoirs la nature des pouvoirs qui s exercent en dehors de l tat dans le reste de la soci t Le pouvoir dans la soci t civile la structure et la port e de l ensemble des pouvoirs tatiques ou non Le r seau du pouvoir De cette s rie d analyses pourront tre tir es de premi res cons quences les unes toucheront la d mocratie les autres souligneront les risques politiques r sultant d une inexacte appr ciation de ce qu est aujourd hui le r seau du pouvoir La cham bre des machines Qui sont surtout les communistes mais pas en toutes occasions car ils ont deux attitudes l gard du pouvoir l une valable pour les gouvernements d union d mocratique et autres fronts populaires se ram ne finalement au cas pr c dent l autre qui concerne l au del de ces coalitions les lointains du passage au socialisme est ici vis e Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 85 L tat partout Retour la table des mati res Jadis au d but de l re capitaliste la soci t et l tat formaient deux mondes distincts d pendant certes l un de l autre mais aussi oppos s l un l autre C est ce qu expose Hegel dans sa Philosophie du Droit LA SOCI T CIVILE LOIN DE L TAT Pour le dire en un langage moins ph
167. e faut il souligner que sa magie fond e sur une image de fabri cation ancienne op rait d autant mieux qu elle s inscrivait quelques d tails pr s dans le jeu normal des grandes tendances qui font notre histoire La question du pouvoir ne l oublions pas se pose en termes dissym triques pour la droite et pour la gauche De Gaulle a galvanis des forces d sorient es pour restaurer l ordre naturel des choses jamais un candidat pr sident de gauche ne pourra par son seul charisme inverser cet ordre naturel Nier la vertu miraculeuse de l lection pr sidentielle ne revient pas d nier tout int r t cette ch ance Plus que toute autre lection celle ci peut offrir l occasion d un bond en avant un mouvement d j lanc une organisation d j structur e et assise dans tout le pays Cette lection ne peut rien cr er mais elle pourrait tre un amplificateur d cisif Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 180 Il en va de m me de toute lection l gislative ou municipale r gionale ou d partementale professionnelle ou universitaire Toutes peuvent offrir des forces politiques pr existantes et d j en mouvement l occasion de progr s massifs Mais l essentiel est ant rieur toute lection c est de b tir une force politique et de la rendre op rante c est de cr er un canal pour le changement Le reste suivra Une force politique ne se b tit pas pour gagner telle lection m
168. e pernicieuse que commence provoquer l int gration europ enne elles ont soigner ces maux contraires tout en faisant face au gonflement des villes aux aspirations nou velles des r gions et l norme expansion des universit s D tre contrainte au changement ne rend cependant pas notre soci t plus apte l accomplir L inertie des int r ts tablis et des mentalit s traditionnelles oppose toute transformation des obstacles massifs Plus le besoin de changer Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 178 se fait pressant plus la r sistance des victimes r elles ou suppos es du changement qui menace devient dangereuse Reconversion r forme crise contestation sont les mots cl s de notre po que ils expriment la fois le besoin de changement et la difficult de changer Si la gauche veut conqu rir le pouvoir il lui faut comprendre vers quels changements notre soci t est port e et quels obstacles cette pouss e se heurte Il lui faut prendre pour ennemis les int r ts qu expriment ces obsta cles Il lui faut surtout reconna tre et ordonner le potentiel spontan de changement qui se forme dans notre soci t Le reconna tre c est l aider prendre forme et force en largissant aux yeux des acteurs eux m mes le sens et la port e de leurs revendications ou de leurs projets imm diats L ordonner c est assurer la convergence de besoins et de projets pars en un syst me
169. e politique sociale qui depuis plusieurs d cennies s est exerc e en faveur des d sh rit s et surtout en faveur de l emploi de la sant de la culture de l urbanisme le tout dans un contexte de libert politique Dans une certaine mesure ce mod le peut donc nous inspirer Mais le mod le su dois est un produit de l histoire su doise Les donn es qu il pr suppose faible population engagements internationaux limit s et Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 150 l histoire qui l a form nature des forces sociales et de leurs conflits n ont pas d analogue en France si bien que la vis e d objectifs comparables implique id un cheminement diff rent conduisant finalement un r sultat diff rent le capitalisme fran ais est et demeurera plus coriace l insertion internationale de la France plus complexe De plus on ne peut tenir l exemple su dois pour un optimum Le compromis pass entre les forces socialistes et le capitalisme su dois s est stabilis un certain niveau celui d un socialisme redistributeur Le mouvement socialiste en France a souvent caress de plus amples des seins et d ores et d j le degr de p n tration de l Etat dans l conomie est plus pouss en France qu en Su de c est dire que le compromis visable en France doit se situer un niveau diff rent D autres mod les enfin pourraient par quelque c t inspirer l exp rience fran aise certaines des tentatives
170. e rassembler un petit ou m me un gros 40 des suffrages il faudrait y voir non pas l annonce d une remont e mais la confirmation du jugement ici port Voir en annexe p 275 les r sultats des diff rentes lections l gisla tives survenues en France depuis 1945 Il faudra souvent faire r f rence des fragments plus ou moins larges de cet ensemble ce qu un adjectif suffira pr ciser on parlera ainsi de la gauche communiste non communiste syndicale etc Toutes les fois qu il sera question de la gauche sans autre indication ce sera pour d signer selon le contexte soit la totalit confuse que l on vient d voquer soit les seules organisations politiques Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 15 Les le ons du passe Retour la table des mati res La gauche fran aise vit sous le coup d un nouvel chec Les ann es 1968 et 1969 ont pris place dans une s rie d j longue et d une grande r gularit Au XIXe si cle le capitalisme subissait une crise profonde tous les dix ans environ Au XXe si cle le flux et le reflux des combats de la gauche semblent ob ir au m me rythme Impuissante ou complice devant la guerre qui venait la gauche socialiste s est assoupie en 1914 Pour rena tre en 1919 1920 au prix d une fracture jamais r duite On pourrait presque passer sous silence l chec du Cartel des gauches en 1924 si ses raisons ne gardaient une profonde actualit jusqu pr se
171. e une correction utile de cette dissym trie de la gauche 1 Il est peine besoin de souligner que cette proposition a un sym trique vident non sans raisons l opinion communiste craint l atlantisme d une certaine gauche son euro p anisme inconditionnel ou sa perm abilit aux influences capitalistes l ignorer serait se donner bonne conscience peu de frais Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 196 D RACINER L ANTI COMMUNISME Retour la table des mati res Pour triompher de l obstacle majeur que constitue l anticommunisme il n est qu une solution le d raciner r ellement Cela d pend des communistes et de leurs partenaires Les premiers ne constituent plus un bloc homog ne et fig Le P C fran ais bouge lentement mais de fa on perceptible Il faut souhaiter que cette volution s acc l re et conduise la d finition d un projet politique cor respondant aux possibilit s effectivement ouvertes en France mettre un pronostic sur les chances et le rythme de cette volution est impossible de m me qu il est impossible de sugg rer de l ext rieur quelque tactique que ce soit pour h ter cette volution Le P C a ses lois psycho logiques et sociologiques propres dont la premi re est que tout conseil ou tout encouragement venu de l ext rieur suscite de fr quents blocages Quand l ennemi de classe me f licite je me demande quelle erreur j ai commise Cependant l volution
172. ement qu elles aient quelque difficult se remettre en selle Comme il est toujours Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 81 vain de r crire l histoire on s pargnera la peine d imaginer ce qu elles auraient d ou pu faire Le fait est qu elles se sont pulv ris es sous les chocs successifs de 1947 1958 et derechef en 1968 De Gaulle n a pas bris le r gime des partis Il s est install sur leurs d combres et l analyse qu il a donn e de leur faillite tait sereinement d rai sonnable E t il r gn sans discontinuer depuis 1944 que des crises ne dig rant que formellement de celles de la IVe R publique l auraient aussi bien secou Apr s son retour et alors que ce retour m me avait politique ment la valeur d une novation purgeant une partie du passif national les secousses de 1961 ou de 1968 ne l ont pas plus pargn qu il n avait su les pr voir ni les pr venir Son seul m rite est d tre rest longtemps en selle quitte changer de cheval Par cette irr v rencieuse image on ne fait videm ment pas allusion la rotation des Premiers ministres ph nom ne subalterne mais bien aux coalitions de forces sociales et de forces politiques sur lesquelles il s est successivement appuy L essence du gaullisme tait on l a souvent dit proche du bonapartisme celui de Louis Napol on Cette formule de gouvernement suppose un miettement des forces politiques et la possibilit d en coa
173. ement sensible toutes les novations de mai il a trop souvent confondu son action avec celle des groupuscules mais il a aussi clairement senti les faiblesses virtuelles du P C et l ampleur des possibilit s qui s ouvraient tandis que son refus ant rieur de se fondre dans une F G D S aux orientations ambigu s se trouvait valid par l v nement De son c t la C F D T en manifestant une sensibilit parfois compa rable celle du P S U a prouv malgr une grave inf riorit d organisation au regard de la C G T qu elle tait d sormais la centrale syndicale qui monte LA R VOLUTION TAIT ELLE POSSIBLE Retour la table des mati res Pendant quelques jours il a d pendu du bureau politique du P C de l engager Il ne l a pas fait mais s est au contraire employ de toutes ses forces canaliser et contenir le mouvement Pourquoi Le P C pouvait ais ment pousser plus avant le processus r volutionnaire qui s amor ait Il lui e t t facile de porter le mouvement un niveau plus lev La constitution de comit s de gr ve locaux r gionaux et national aurait permis de coordonner l action de prendre en temps utile les initiatives Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 119 propres apaiser l opinion petite bourgeoise inqui te de donner vie en somme un r seau spontan de contre pouvoirs Parall lement il aurait pu inciter la C G T refuser la discussion ave
174. ements les laissent en surpuissance c est dire aptes taler les r percussions internes de leurs actions interna tionales D chirement superficiel galement tant que le r sultat global de leurs actions internationales n est ressenti ni comme un chec politique ni comme un chec moral Ces deux limites peuvent ais ment tre franchies demain que ce soit pas suite d actions dans le Tiers Monde par l effet d une autonomie accrue de l Europe ou par un ventuel r veil du camp socialist Si tel devait tre le cas peut on penser que leur syst me politique leur id ologie et leur volont imaginative trois fadeurs dont l lasticit ne s est jamais d mentie resteront suffisamment souples pour qu une adaptation s op re sans crise aigu Ou faut il envisager que les Etats Unis puissent glisser vers quelque variante nouvelle du fascisme ou de l isolationnisme Il est probable qu un conflit se nouera aux tats Unis m me si rien ne permet encore d affirmer qu il m rira in luctablement dans la prochaine d cennie et que ce conflit sera command par leur r le mondial autant que par leurs probl mes internes Son issue d pendra pour beaucoup de cette virtualit laquelle il deviendra d cisif d apporter maints concours la gauche am ricaine Pour beaucoup aussi du type de pressions que l U R S S et l Europe sauront ou pourront exercer sur les tats Unis Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 44
175. ent comment elle fera pour y durer pendant des ann es ou des d cennies sans se laisser d sar onner ni endormir et elle saura du m me coup com ment s y prendre pour acc der au pouvoir Mais en fait plusieurs ch ances r sultant des automatismes du calen drier politique se pr senteront et quelques tentations pourront surgit ou ressurgir cette occasion Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 179 La plus grave concerne les lections pr sidentielles Chacune leur mani re les candidatures de Defferre puis de Mitterrand puis encore de Defferre ont t marqu es par ce qu il faut bien appeler la tentation du raccourci En 1963 la gauche tait comme aujourd hui dans le marasme La candi dature de Defferre a t jou e par ses plus actifs supporters comme une carte magique ce devait tre le rem de miracle le catalyseur d hommes de forces et d id es qui allait r nover la gauche Pour la circonstance celle ci tait d ailleurs d finie par r f rence au seul ventail parlementaire comme une r surgence de la troisi me force devant contraindre les communistes au soutien La magie n ayant pas op r une autre candidature s est affirm e l automne 1964 Tirant les le ons de l chec pr c dent Mitterrand a mieux d fini sa gauche en visant ressusciter un Front populaire largi aux r pu blicains de progr s et a tent une action moins superficielle pour donner forme une force
176. ent et avec quelques sections syndicales d enseignants en vue de d finir une meilleure implantation scolaire de poursuivre telle action sp cifique ou de lancer telle initiative plus vaste rayonnement Autre exemple encore Dans un pays o la politique contractuelle aurait vu ses applications foisonner un ou plusieurs partis politiques et une ou plusieurs centrales syndicales n h sitent plus souscrire au niveau national un contrat du type suivant en vue des lections qui auront lieu dans un an les dites organisations forment un groupe commun qui tablira le chapitre politique sociale et pour partie le chapitre politique conomique du pro gramme que vont pr senter ce ou ces partis les organisations donnent ce groupe un mandat inscrit dans un d lai pr tabli elles pr cisent le d lai dans lequel chacune d elles aura ensuite se prononcer publiquement sur le travail r alis de la sorte ou mieux la proc dure par laquelle chacune des organi sations fera r agir ses diverses composantes LA FIN D UN PRIVIL GE CONDITION D UN RENOUVEAU Retour la table des mati res Si l objet des contrats peut varier l infini jusqu culminer dans la forma tion explicite de vastes coalitions pouvant inclure partis syndicats et autres associations en vue des grandes ch ances lectorales ou non il reste n anmoins que certaines conditions communes sont respecter en toute hypoth se car elles son
177. ent sur sa vie quotidienne et sur sa d marche politique de guerres et de r volutions multi ples elle subira le contrecoup d ventuelles crises politiques russe et am ri caine elle sera entra n e avec tout le march mondial capitaliste dans une ventuelle crise conomique ou mon taire Mais les contraintes nouvelles que ces v nements susciteront jointes celles que son insertion mondiale comporte pr sentement et celles plus l g res que jamais que son histoire lui a l gu es n abolissent pas sa capacit d initiative Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 52 UNE CHANCE SAISIR Retour la table des mati res Cette capacit d initiative n est d ailleurs pas d une qualit homog ne Cha que pays europ en pris isol ment n en dispose pas galement L Angleterre est malade L Allemagne ou plut t les Allemagnes sont entrav es par leur division encore que chacune d elles exerce une influence rapidement croissante dans sa sph re d action Leur r unification rendrait vie une puissance norme mais c est pr cis ment ce qui la rend improbable avant tr s longtemps jusqu ce que les Russes aient oubli la derni re guerre L Italie n a pas fini de conqu rir le statut de grande puissance europ enne Les autres nations sont d un poids qui restreint leur force ou leur libert La France se trouve ainsi pour un temps et par accident dot e d une capacit de man uvre sup rie
178. erme il est probable qu elle se prolongera par des d veloppements nouveaux Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 79 Un exemple apparemment imaginaire peut en donner l chelle Consid rons l volution long terme des rapports conomiques entre la Corse et le reste de la France la balance commerciale de la Corse est videmment d fici taire et elle n est durablement compens e que par l effet combin de transferts publics ce qui revient dire que l tat d pense en Corse plus qu il n y per oit d imp ts de transferts priv s ce qui fait dire que la Corse exporte des douaniers et des policiers et importe des retrait s et de cessions d actifs en s achetant une maison au pays les Corses du continent s approprient une partie de l actif corse et les touristes d autres provinces charm s par cette le font de m me la Corse est ainsi devenue pour une part la propri t parcelle par parcelle de non r sidents Rien ne permet de penser que la France sera la Corse du March commun Ce qui est probable en revanche c est que les Corses c est dire les r gions d ficitaires ou les branches industrielles d ficitaires vont se multiplier dans toute l Europe des Six tandis que les actions r quilibrantes cesseront d tre le fait exclusif du pays int ress D o trois probl mes des transferts priv s accrus des transferts publics r agencer des cessions d actifs massives S agissant des t
179. ernationale et la diff rence essentielle n est pas dans cette curiosit immense et instantan e mais dans ce que celle ci r v le la vigilance des puissances imp rialistes S agissant du Tiers Monde l inconnue principale est finalement celle ci les guerres et les r volutions dont il sera probablement le si ge auront elles pour effet comme au cours des d cennies pass es de rectifier un peu les zones d influence des grandes puissances tout en cristallisant en quelques points des conflits aigus ou bien d autres volutions plus nouvelles sinon moins dramatiques s y feront elles jour Par exemple les Etats Unis peuvent ils opposer la r volution sud am ricaine le contre feu d un puissant d veloppement capitaliste au prix d un imposant Plan Marshall pour l Am rique latine malgr l chec de leur timide et malencontreuse Alliance pour le progr s Autre exemple la strat gie r volutionnaire chinoise peut elle conduire des r sultats autrement significatifs que ceux des quinze derni res ann es Autre exemple encore les famines mena antes peuvent elles entra ner une red finition de l aide au d veloppement Toutes les questions de ce type ont un trait commun provoqu es par des v nements du Tiers Monde elles impliquent des choix qui pour l essentiel rel vent de l U R S S et des Etats Unis de leurs besoins et de leurs initiatives ventuelles Sauf noter qu plus modeste chelle l Europe pou
180. ersibles ou correctibles Pour faire de bonne politique anti crises il devient donc de plus en plus n cessaire de substituer une politique conomique plus ou moins rel ch e une planification plus m thodique d largir le champ de cette planification et d en allonger la port e Cette orientation impliquerait un resserrement de celles des actions et des proc dures tatiques que les entre prises priv es ressentent comme des contraintes Mais dans l actuelle euphorie du libre changisme triomphant la confiance dans les vertus natu relles du march l emporte g n ralement sur l acceptation de nouvelles contraintes Une illusion ancienne refleurit et cache une n cessit nouvelle Une autre raison de craindre le retour de la crise est souvent avanc e bien qu elle soit plus contestable le marasme du Tiers Monde les oscillations dra matiques de sa capacit d importation donc la difficult d tendre dans cette voie le march capitaliste Il suffit cependant d observer la part modeste et relativement d croissante que le Tiers Monde occupe dans les d bouch s capitalistes pour minorer ce facteur Son importance est politique et on le retrouvera comme tel En revanche d un strict point de vue conomique le monde capitaliste d velopp trouve en lui m me son principal champ d expan sion M me sous l angle de l approvisionnement en certains produits l articu lation avec le Tiers Monde n offre aucune perspective
181. es changes internationaux sont demeur s plus ou moins contingent s et n ont souvent jou qu un r le marginal pour les principaux pays Depuis cette date leur essor s est acc l r leur libert s est affirm e donc leur conductivit des impulsions r cession nistes ou inflationnistes s est accrue Mais comme les Etats Unis et les autres conomies les plus importantes demeuraient pour l essentiel activement expansionnistes peu d impulsions n fastes ont t effectivement transmises Ainsi de 1945 nos jours la crise conomique mondiale a t vit e par le jeu d conomies internes mieux coordonn es et de relations internationales inaptes transmettre les perturbations ou n ayant aucune perturbation majeu re propager lorsqu elles sont devenues aptes le faire La crise a t vit e est elle pour autant d finitivement sortie de notre horizon LES NOUVEAUX RISQUES Retour la table des mati res La r ponse est n gative pour des raisons tr s pr cises qu il faut discerner avant d valuer leur port e probable Il est certain que la coordination interne de chaque conomie nationale continue par bien des c t s de s am liorer Les m canismes stabilisateurs des revenus sont partout en progr s et malgr quelques anomalies comme celle Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 35 qu a connue la France de 1963 1965 le r le conomique et les moyens d action des Etats s affe
182. es rig es en ordres Rarement cette seconde tendance chappe son conservatisme spontan Elle sera suivant l occasion colonialiste ou carti riste mais toujours elle penchera plut t pour la protection la subvention le d gr vement fiscal la d fense du franc le soutien de l pargne l effacement d un Etat trop envahis sant Elle rassemble fid les eux m mes les tenants de l ordre mais le malheur des temps les oblige vivre dans une France en mouvement rapide Il s ensuit un d chirement profond la part la plus bourgeoise de cette ten dance penche toujours vers l ordre ancien la r pression la crispation autour des positions acquises la part petite bourgeoise urbaine ou rurale d chir e d insurmontables contradictions est plus oscillante et subit parfois l influence populaire mais sans continuit LA TENDANCE DU PROGR S SOCIAL ET DES DROITS ACQUIS Retour la table des mati res La troisi me tendance n est pas moins d chir e mais de tout autre ma ni re Lors des grandes pulsions revendicatives ou des grandes batailles politiques elle entra ne le gros de la classe ouvri re et des salari s de l cono mie comme de l administration mais perd une bonne partie de sa capacit d entra nement dans la vie quotidienne Autour des salari s elle influence 1 Bourgeoisie non par son rapport dire amp aux moyens de production mais par sa profonde interp n tration avec tous les nive
183. es communistes acc dait au gouvernement la premi re fois aussi qu elle se r v lait incapable de d finir une politique internationale qui lui soit com mune LA LIB RATION Retour la table des mati res Les contraintes ext rieures sont invoqu es plus juste titre pour expliquer l chec suivant celui de la Lib ration Cette fois en effet la France n avait plus gu re les moyens de r sister aux pressions trang res ni de man uvrer entre elles Les conditions de sa lib ration les accords de guerre de ses grands alli s et sa ruine conomique l avaient plac e sous la d pendance am ricaine et la guerre froide devait l enfoncer dans cette position tout en d chirant plus que jamais les forces de gauche En 1944 1945 quand la nouvelle situation internationale ne s tait pas encore fig e une autre issue tait elle concevable par exemple une sorte de r volution socialiste prolongeant l action der maquis On voit bien cet gard tout ce qui diff renciait la situation fran aise de la yougoslave et tout ce qui la rapprochait de la grecque Voir Alfred Sauvy Histoire conomique de la France entre les deux guerres tome Il Fayard 1967 D finir chemin faisant chacune des notions essentielles qui seront utilis es alourdirait le texte Une table analytique donne en fin de volume les r f rences n cessaires Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 17 Un peu plus tard on aurait pu im
184. es ci vont se heurter rapide ment un blocage financier En outre l effort d quipement joint aux redistributions de population rend caduc le d coupage traditionnel des communes et des d partements Un remodelage profond de la carte administrative est n cessaire les principes et les m thodes en ont t clairement dessin s par Rocard Enfin l effort d urbanisation n cessaire charge et chargera les g n rations de la seconde moiti du XXe si cle de l obligation de payer pleinement des constructions et des quipements qui serviront plus d un si cle ce qui compte tenu des rentes de situations accord es ceux qui sont log s depuis longtemps loi de 7948 etc et ceux qui occupent ind ment les constructions r centes les plus subventionn es H L M aboutit une scandaleuse dispersion du co t final du logement c est toutefois un scandale diffus dont les contours n pousent pas ceux des classes sociales mais plut t ceux des classes d ge TOUS BACHELIERS Retour la table des mati res La ru e vers l cole est d une ampleur comparable la pouss e vers les villes Entre les recensements de 7954 et de 7962 on a compt 1 million d l ves et d tudiants suppl mentaires dont 42 seulement taient dus la vague d mographique Autrement dit si les familles avaient continu de raisonner et d agir comme avant 7939 l effectif suppl mentaire aurait t limit quelque 400 000 l ves
185. es constatations empiriques les d finitions plus savantes du socialisme se r duisent deux types dont l un est dangereusement impr cis et l autre dramatiquement insuffisant Sont impr cises les d finitions num ratives dont les exemples abondent En voici un d excellente facture et que je critiquerai d autant plus volontiers que j adh re tous ses termes le socialisme y est d fini comme une soci t de la responsabilit ce qui d nonce l assimilation si s duisante en France du 1 Voir la Pens e socialiste contemporaine actes des colloques socialistes de 1964 Intervention de Roger Jacques pp 92 93 P U F 1966 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 131 socialisme et de l tatisme une soci t de la solidarit ce qui implique galit des chances et ma trise de la hi rarchie des revenus et une civilisation de l panouissement notamment par l accession la culture l adaptation au changement et le progr s des relations inter personnelles Responsabilit solidarit panouissement n est ce pas d finir une orga nisation sociale un agencement de la soci t par les r sultats qu on en attend Certes ces r sultats sont d cisifs pour les hommes mais la politique commence quand en vue de fins comme celles ci on sait quels moyens employer et comment les mettre en uvre quand on sait galement quels autres moyens bannir Comment peut on faire cheminer la soci t fran aise
186. es dans le pays pour rendre additives les voix de toutes les cat gories sociales oppos es ou opposables aux monopoles et l Etat qu ils dominent ouvriers paysans ing nieurs cadres commer ants artisans petits et moyens patrons fonctionnaires et professions lib rales doivent y trouver leur compte tout comme les retrait s les anciens combattants les parents d l ves les locataires etc Or leurs revendications spontan es sont incoh rentes elles repr sentent par leur masse un ensemble exc dant dura blement les possibilit s de l conomie et leur juxtaposition te de la vraisem blance chacune d elles Par leurs contradictions internes elles obligent d habiles subterfuges formels et leur cohabitation se voile de formules vagues Bref la technique ne se distingue en rien de celle qu emploient la plupart des partis jusqu la droite la plus lointaine si ce n est pas un badigeon doctrinal Le projet r formateur part d un principe oppos celui du programme lectoral traditionnel A l addition des m contentements il s agit de substituer l indication explicite d un chemin effectivement praticable Autrement dit il n y a projet r formateur que si les forces politiques partant d ut potentiel spontan de revendications qu elles ont non pas imagin ou pressenti mais d cel par un dialogue actif avec le pays ont ensuite toujours par un tel dialogue actif ordonn et hi rarchis ce stock imm diat de bes
187. es degr s de libert des deux Allemagnes vis vis de leurs grands tuteurs sont presque du m me ordre sinon de la m me forme Ce qui suppose entre autres une r vision g n rale du syst me des prix et l invention d un m canisme de formation des prix qui ne soit plus arbitraire Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 45 classes dirigeantes que de luttes au sein de celles ci Militaires gestionnaires fonctionnaires et apparatchiks sont porteurs dans l imm diat et terme d int r ts distincts qui les poussent des options contradictoires et les d bats des instances sup rieures du Parti refl tent ces conflits tout en leur imprimant comme il se doit quand les luttes sociales se d nouent en comit s restreints une complexit suppl mentaire celle qui r sulte des jeux individuels et des coefficients personnels Autant que d une gauche am ricaine le monde aurait besoin d une gauche lib rale russe Naturellement des liens existent entre les crises qui menacent les deux Grands Si la crise russe se d nouait provisoirement par un stalinisme nouvelle mani re ce facteur rendrait plus probable une issue droite de la crise am ricaine les Staline engendrent les Mac Carthy mod le 1952 R cipro quement une volution rendant l U R S S plus d mocratique plus stable et aussi plus pr visible dans son devenir politique ouvrirait plus de possibilit s dans l volution am ricaine m me si ce nouveau c
188. es forces politiques et syndicales furent soumises l preuve de v rit Celles dont le r le est de se disputer les faveurs des deux tendances qu anime la bourgeoisie les partis de l ordre et de l expansion celles l donc furent longtemps silencieuses exception faite de l irr el d bat parlementaire sur la motion de censure Le silence fut d abord rompu par les syndicats ind pendants qui de ci de l chez Citro n notamment firent ce pour quoi ils existent Puis par le parti gaulliste qui l appel de son chef fit na tre les comit s de d fense de la R publique comme champignons apr s l averse Puis enfin l approche des lections par la cohorte des ind pendants et autres centristes Mais aucune de ces forces n eut en tant que telle la moindre influence sur la crise de mai Naturellement il n y eut aucune d lib ration d aucune sorte Ces choses se font par conversations changes d impressions propos de table etc Ceci ne signifie d ailleurs pas que s il e t acc d au pouvoir Pierre Mend s France e t t l agent ou le prisonnier de cette tendance il e t t c est bien vident la r sultante du nouveau rapport des forces sociales de toutes les forces sociales qui se dessinait alors et son gouvernement e t t mesure que ce rapport de forces se modifiait le si ge de tensions sans doute tr s vives comme tout gouvernement form en situation de crise Robert Fossaert Le contra
189. es paris sont plus ouverts Certaines des caract ristiques de ce parti sont des plus prometteuses la jeunesse de son encadrement la nouveaut et la pertinence de bon nombre de ses analyses et de ses projets l amalgame qu il a su op rer entre ath es et chr tiens Mais la vis e long terme de ce parti demeure ambigu Son objectif est videmment d tre le noyau d une grande force politique de gauche Mais son option strat gique est moins claire estime t 1l que la r volution est le plus probable des d nouements aux crises conomiques sociales universitaires et Politiques dont la France est grosse ou tient 1l cette r volution pour une ventualit d une probabilit suffisante pour qu il faille en priorit s y pr parer quitte ne pas exclure d autres voies vers le pouvoir ou estime t 1l enfin que malgr la violence ventuelle des crises pr visibles ou possibles il s agit moins d une r volution que d une conqu te plus classique du pouvoir Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 209 L id al serait videmment que le P S U centre son action vers une exten sion multiforme de son activit retrouve le dynamisme novateur qui avait fait de lui le plus influent des partenaires dans les Rencontres de Grenoble et qu il tende ce dynamisme aux probl mes nouveaux n s de Mai et celles des forces nouvelles apparues dans cette p riode et qui peuvent tre arrach es leur r volutionnarisme st rile
190. es pr somptions de plus en plus fortes Le pays pr sumera que la gauche est apte gouverner et lui en donnera le mandat lorsqu il aura tr s concr tement prouv la validit de ses projets et la qualit de ses m thodes de gouvernement Sur le second point la politique contractuelle y compris la proc dure de s lection du personnel politique me para t d cisive Sur le premier l laboration d un projet r for mateur me semble avoir m me valeur Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 190 Pour d finir la notion de projet r formateur le chapitre 4 s est appuy sur une analyse du r seau du pouvoir Cela permettait de voir galement ce que devait tre le contenu d un tel projet non pas son contenu concret c est dire la gamme d taill e des projets partiels dont il doit tre fait mais bien son contenu essentiel c est dire le rep rage du vaste champ des probl mes couvrir Ici c est uniquement la m thode d laboration du projet r formateur qu il faut s arr ter On peut pour la pr ciser prendre deux termes de comparaison le programme lectoral et le contre plan Le parti communiste a pouss la technique du programme lectoral un tr s haut niveau d inefficace perfection Mais si l on prend ici son exemple cela ne veut pas dire qu il n ait point d mules en la mati re La technique est simple un bon programme doit exprimer la plus grande somme des m con tentements d celabl
191. es rassembl es dans cet ouvrage L id e premi re d j pr sent e est que la gauche doit se transformer profond ment pour adapter sa pens e son action et ses objectifs une soci t dont le changement acc l r est devenu la caract ristique essentielle La cl de cette mutation para t tre celle ci e La gauche doit savoir ce qu elle fera du pouvoir e pour d finir en cons quence les conditions de son maintien au pouvoir e puis ajuster ces moyens et ces fins la strat gie tendant conqu rir le pouvoir Prendre le pouvoir comme on peut y durer tant qu on peut en user si on peut a t jusqu ici sa d marche habituelle C est donc de renverser totalement l ordre des priorit s qu il s agit Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 25 N cessaire ce renversement n est pas pour autant facile s il est vrai ce sera l une des conclusions principales que la r volution socialiste classique est peu probable en France avant longtemps Cette conclusion implique en effet que la gauche sauf se cantonner dans l opposition ou guetter une divine surprise doit se concevoir exer ant le pouvoir dans une France encore capitaliste il faut alors explorer tr s avant l hypoth se d une coexistence durable avec le capitalisme Une telle exploration r v le l importance d cisive qui revient la d finition et la mise en oeuvre d un projet r formateur vaste ensemble de projets partiels de
192. est de projet r formateur que s il comporte d abord des chances claires de maintien au pouvoir Le reste est bavardage La gauche doit en somme savoir de quels contre pouvoirs elle va truffer le r seau du pouvoir D o l importance que pr sente bien avant que le pouvoir soit en vue la pression permanente visant cr er de nouveaux contre pouvoirs aussi modestes ou ambigus soient ils largir ou main tenir ceux qui existent d j et diffuser partout o faire se peut dans tous les centres de d cision quels qu ils soient des l ments ou des germes de participation d mocratique Quelques millions de repr sentants populaires actuels ou virtuels mais sachant qu ils vont le devenir se battront toujours mieux qu un peuple propulsant de rares d put s La conqu te DU pouvoir passe par les revendications permanentes de pouvoirs Enfin la n cessit d un projet r formateur a cette autre cons quence des plus utiles elle permet toujours de distinguer les hommes de gauche de ceux qui croient l tre ou qui voudraient faire croire qu ils le sont C est un crit re d autant plus efficace que chacun peut s en servir Les millions de virtuels repr sentants populaires sauront toujours l appliquer leurs probl mes imm diats Et de proche en proche le crit re fonctionne jusqu aux plus hauts responsables politiques 1 Voir Gilles Martinet la Conqu te des pouvoirs ditions du Seuil 1968 Robert Fossaert L
193. et tudiants pour cette p riode L allongement volontaire de la scolarit stimul par le d sir de promotion sociale plus que par l adaptation aux besoins d une soci t technicienne anticipe largement sur la prolongation de la scolarit obligatoire Pareil mouvement outre sa valeur culturelle propre a le m rite de con traindre notre soci t rechercher une d finition plus claire de la commande globale qu elle adresse implicitement l usine formatrice des hommes Cette d marche sans cesse ballott e entre les tentatives d asservissement de l Uni versit aux fins imm diates de l conomie et les tentatives d vasion de l Universit dans le pur univers culturel cr e une tension f conde Mais la scolarisation massive n entra ne pas que des contradictions utiles Elle appara t aussi comme un processus inconscient et involontaire de r duction de la main d uvre active au sens d j pr cis Entre l abr viation de la dur e hebdomadaire ou annuelle du travail l avance vers une retraite 1 Voir D coloniser la province rapport pr sent dans plusieurs Colloques de Grenoble en 1967 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 62 pr coce et le retard dans l ge d entr e en activit s tablit de fait une forte comp tition dans un pays o comme en France le potentiel total de popu lation active est fort peu lastique On pourrait certes imaginer que par une chasse syst matique l
194. et comment y durer une politique contractuelle semble de son c t indispensable pour laborer le projet r formateur et du m me mouvement pour trouver le chemin du pouvoir Que le pouvoir soit en vue par le jeu normal des lections par suite d une crise politique n e des p rip ties de l apr s gaullisme ou par l effet d une crise conomique ou sociale profonde en toute hypoth se la gauche a besoin de savoir au pr alable ce qu elle fera du pouvoir m me si toujours en toute hypoth se une certaine distance s tablira n cessairement entre ses actes et ses projets La gauche en effet n a plus qu un pass Elle est ressentie comme por teuse d une tradition sans rapports vidents avec les besoins actuels Vue d aujourd hui son exp rience ancienne est faite de plus d checs que de succ s Aussi a t elle besoin pour r tablir sa cr dibilit de faire la preuve de son aptitude actuelle gouverner Offrir au pays un contrat du type Faites nous confiance et vous verrez que nous ferons mieux que les autres est cet gard d une efficacit plus que douteuse cela revient supposer le probl me r solu Mais l inverse comment prouver une aptitude gouverner tant que le pouvoir demeure inaccessible Ce pourrait tre un cercle vicieux n tait ce cheminement seul raison nable si l on ne peut prouver avant coup son aptitude gouverner du moins est il possible d anticiper sur la preuve attendue par d
195. et d avenir il faudra aussi dans ce pays qui se voulut et fut comme un absolu de la nation savoir relativiser la nation en faire un relais privil gi dans un ordre qui la d passe Pour se faire frais nouveaux une certaine id e de la France la gauche pourrait disposer d atouts consid rables ne serait ce que pour cette raison capitale le socialisme on le verra c est de rendre une collectivit ma tresse de son destin collectif r inventer un projet socialiste r v ler l identit natio nale c est par deux versants distincts gravir la m me montagne Mais quelle montagne de pr jug s d habitudes et d inerties Il est vrai et c est un autre atout pour la gauche que la concurrence ne sera pas s v re Hormis les porteurs de traditions nationales d su tes les royalistes par exemple et avant longtemps les rares gaullistes fid les l essentiel des forces politiques de la droite et du centre ne se souciera de l identit nationale que dans ses discours lectoraux Pourquoi parce que la ligne de plus grande pente commune toutes les politiques pr visibles de leur part est l acc l ration de l int gration europ enne et atlantiste et de l am ri canisation des modes de vie Pareille volution condamne la France se dissoudre dans le capitalisme mondial et voir ses traits distinctifs se d grader en un provincialisme charmant La gauche pourrait avoir d autres ambitions L CUME Retour la tab
196. et d une insistante nouveaut L ancien le plus encombrant est coup s r la bouillie id ologique dont la gauche est bariol e Que l on entende bien il n est pas souhaitable de jeter Fourier Saint Simon Marx Jaur s L nine Rosa Luxembourg Trotsky ni m me Blum ou Thorez la poubelle il est n cessaire qu on les lise qu on les m dite et que l on tende le champ des curiosit s bien d autres crits beaucoup plus r cents et parfois plus actuels Mais on doit tenir pour n fastes le sous marxisme labor par le P C le sous jaur sisme ou le sous blumisme de fabrication S F I O le n o jacobinisme de certains conventionnels et le r volutionnarisme de quelques P S U Qu il faille multiplier les r f rences les analyses et les projections th oriques certes 1 Mais est il besoin qu un parti s en m le s qualit les partis n ont aucune v rit th orique r v ler on s en serait aper u et ils font fort mal un travail auquel excelle l intelligentsia fran aise En revanche leur app tit doctrinal bloque toute int gration Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 207 politique au point que le plus s r moyen d entraver une action politique est de faire appel quelque puret doctrinale Celui qui crira le br viaire commun tom les paroissiens de la gauche n est pas pr s de na tre La force politique ici vis e ne pourra pas tirer sa coh rence d une impro bable unit doctrinale Elle
197. et dans un concert point trop dissonant Petit petit des m fiances et des barri res tomberaient Le chemin de l unit politique deviendrait de nouveau praticable malgr d in vitables p rip ties locales ou nationales Le reste serait affaire de t nacit et de circonstances C est l avenir que je souhaite la gauche De qui d pend 1il Des organi sations existantes de leurs responsables de leurs militants certes Mais aussi de chacun de nous Chacun conna t dans son lieu de r sidence dans son secteur de travail dans son milieu de vie des dizaines d autres personnes que les p rip ties de l histoire r cente ou plus ancienne et les hasards des trajectoires individuelles ont dispers es aux quatre coins de la gauche mais dont on se dit quand il y aura enfin un vrai parti de gauche en France nous y serons videmment tous C est partir de l et sans respect excessif pour les disciplines d organisation ou les patriotismes de chapelle que la reconstruction doit aussi s op rer Ici un club autonome l une section du P S U ailleurs un club conven tionnel ou ex f d r ailleurs encore une section de l ventuel nouveau parti ex S F I O ailleurs enfin un nouveau groupe former peuvent tre selon les circonstances locales le lieu aujourd hui le plus attractif Renforcer de tels lieux et les forcer s engager formellement ou non dans la voie d une politique contractuelle avec leurs voisins est un pre
198. etour la table des mati res La premi re tendance celle des classes dirigeantes s est g n ralement appuy e sur le gros des cadres de l conomie et de l administration Elle a souvent su entra ner dans son sillage une fraction de la classe ouvri re celle des firmes les plus modernes ou les plus expansionnistes celle aussi pour laquelle l expansion conomique s est traduite par une promotion sociale vers les rangs des cadres et des techniciens et une fraction de la paysannerie celle qui cherche ses ma tres penser aux confins du C N J A et du Centre des jeunes patrons Selon l clairage que jettent sur elle les v nements cette tendance para t n o capitaliste ou technocratique moderniste ou expansion niste Son objectif central est la croissance conomique source et condition de tout progr s Son ma tre mot est la modernisation y compris celle des struc tures Ce n est pas qu elle se veuille r volutionnaire mais elle n h site pas bousculer les structures anciennes pour autant qu elles fassent obstacle l expansion et condition que leur destruction soit peu pr s compatible avec le maintien de la paix sociale et de l ordre politique En finir avec les aventures coloniales quand la situation n est plus tenable puiser hardiment dans l immense r servoir de main d uvre paysanne sou mettre la boutique au vent frais de la concurrence r organiser les professions lib rales les plus moyen geuses ada
199. ettre ce r seau en charge l animer d un influx politique Mais ce r seau a son inertie propre et une dialectique complexe s tablit de la sorte entre la volont politique et le syst me administratif A quoi l on peut ajouter deux remarques dont on tirera plus loin les cons quences On a fait de la s paration des trois pouvoirs une valeur mythique que chaque Constitution se doit d encenser Mais la formation des centres de d cision dont l tat se compose n a t que tr s occasionnellement l uvre du l gislateur Celui ci a parfois nationalis ou d centralis un peu Il n a jamais eu se prononcer sur l agencement des minist res principaux Hormis les tutelles hi rarchiques l activit des centres de d cision tati ques est soumise des contr les qui pour tre tatillons n en sont pas moins internes l ex cutif l exception de celui de la Cour des comptes Mais cette activit ne comporte presque aucune participation directe de repr sentants de l ext rieur qu il s agisse des usagers des administrables ou plus g n rale ment du peuple l Ce qui montrerait par exemple le poids du tr sorier payeur g n ral dans la vie d partementale ou celui de la direction d partementale des Domaines dans la r ussite locale de la politique de construction 2 Et qui comme un lyc e ou une facult jusqu en 1968 ne le sont pas mais disposent cependant de pouvoirs qu ils exercent en propre par exemple
200. eur am ricain ne tient pas seulement son r le de sa puissance conomique et financi re ni du seul jeu du march mondial Il est aussi et dans certaines conjonctures surtout le protecteur militaire la lecture de la presse europ enne apr s l invasion de la Tch coslovaquie en ao t 1968 le montre clairement terme l dification des tats Unis socialistes de l Europe comme puissance autonome suppose que ceux ci soient dot s d une arm e disposant ou non d une force de frappe selon ce que seront alors les relations inter nationales Mais il faudra dans la meilleure des hypoth ses plusieurs d cen nies pour que ces Etats Unis socialistes d Europe arrivent pleine maturit ce qui rend n cessaires des solutions d attente ou de transition y compris dans l ordre militaire Or dans ce domaine il faudra longtemps tenir compte des obligations internationales qui juste titre entravent encore l Allemagne L une des solutions concevables serait de ren gocier avec les tats Unis d Am rique un accord d assistance mutuelle d riv du pacte Atlantique limi tant plus exactement les hypoth ses politiques vis es et rompant tous liens entre l alliance militaire et la d pendance conomique f t ce au prix pour l Europe d une honn te contribution financi re l entretien des forces Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 146 Une autre solution serait de renforcer et d int grer peu peu les arm es
201. euse notre monde va profond ment changer Mais toute la question est de savoir par quels processus selon quels rythmes et avec quels effets probables moyen terme c est dire l int rieur de l horizon ici vis les dix ou quinze prochaines ann es c est par l examen des accidents possibles ou probables que cette question peut trouver r ponse La crise conomique Retour la table des mati res L un des accidents les plus massifs serait une crise conomique mondiale Les crises quasi d cennales du XIXe si cle se laissaient toutes r duire un m me sch ma Dans les quelques pays capitalistes de l poque l essor de la production r sultait des d cisions prises par des milliers d entreprises Ces entreprises taient petites selon nos crit res actuels et donc frapp es de myopie chaque patron ne pouvait apercevoir qu un mince segment du mar ch La mise en uvre de techniques nouvelles la cr ation de produits nou veaux et l extension de la production r sultaient de l addition chaotique de d cisions parses prises l aveuglette Quand par leurs effets conjugu s ces d cisions conduisaient une anticipation excessive sur la croissance possible Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 33 du march la m me contagion qui avait conduit l essor entra nait cette fois le d clin de la production Rien ne venait enrayer cette contraction L tat alors peu actif tait aussi myope
202. exemplaires aux yeux des Europ ens plus longtemps encore avant que leurs r alisations sociales et leur organisation politique gagnent un tel pouvoir attractif et plus longtemps encore avant que la perspective de liens politiques troits avec l Est puisse tre d barrass e de toute m fiance Seule l exp rience tch coslovaque de 1968 s amor ait dans un contexte proche de celui de l Europe occidentale Mais elle semble aujourd hui con trainte l chec ou d infinies lenteurs et l invasion de la Tch coslovaquie par les Russes produira des fruits amers pendant tr s longtemps plusieurs d cen nies peut tre En tout cas il est exclu qu aucun pays europ en ait l envie et la possibilit de se joindre au camp socialiste dans la p riode qui nota int resse La perspective d une attraction d un autre type o la force mili taire russe jouerait son r le ne para t pas davantage retenir une conqu te de la Finlande de l Autriche ou de la Turquie est inconcevable tant elle s apparenterait au d clenchement de LA guerre La seule hypoth se o de telles tentations pourraient poindre r sulterait d une rate conjonction de facteurs dont les principaux seraient un total d sengagement militaire des Etats Unis vis vis de l Europe une insigne faiblesse militaire et politique de celle ci et un raidissement n o stalinien de l U R S S De telles volutions s excluent r ciproquement Sur le second point un nouveau proces
203. ez employ s l expliquer Mais ils n ont gu re t convaincants faute d un r examen complet de leurs m thodes de travail et de leurs objectifs Les citoyens n ont jamais tort de se d sint resser des partis Les partis ont toujours tort de ne par int resser les citoyens La repolitisation aussi enthousiaste qu elle soit a p ch par na vet et par impr paration d o l miettement des forces vives dans tout l ventail politique Les partis de gauche l avaient bien pronostiqu Mais hormis le P S U et quelques compartiments de l ex F G D S ils sont dans la piteuse situation du renard amateur de raisins Les militants spontan s n ont jamais tort de militer Les partis ont toujours tort de ne savoir pas organiser ces militants ce qui quant au fond renvoie au probl me pr c dent Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 104 LA D MOCRATIE R INVENTER Retour la table des mati res Derri re ces r actions on d couvre un probl me immense dont la solution ne peut passer que par un renouveau ce n est Pas assez par une r invention de la d mocratie En rompant les liens traditionnels de la communaut rurale et en disten dant ceux de l Eglise et de la famille la soci t capitaliste se distingue de la f odale parce qu elle produit des individus L une des grandes th ses marxis tes a t de consid rer que cette poussi re d individus se caract risait avant tout par son statut de cla
204. fie partir de l les donn es de l quilibre politique local V rit Grenoble erreur ailleurs Autre cons quence La pression politique doit s exercer pour une part essentielle en faveur de l exercice des pouvoirs nouveaux que la vie m me de la soci t fait appara tre Rien n est plus stupide que le m pris souvent affich par les communistes l gard du Plan plan plan rataplan comme d clarait un jour Beno t Frachon Certes le Plan ne fait pas de miracle et ne modifie pas par sa seule existence les rapports de force dans le pays Mais d s lors qu il est de sa logique d clairer l avenir et d en dessiner un sch ma coh rent et qu il est de sa fonction d influencer plus ou moins bon nombre de d cisions politiques courantes la bataille pour le Plan pour viter qu on l abandonne ou qu on le vide la bataille dans le Plan dans ses instances sur ses m thodes etc la bataille autour du Plan pour y ins rer des projets pr cis exprimant des Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 175 besoins d lib r s collectivement peut tre pour tout ce qui touche la politique conomique un axe privil gi UNE ASSURANCE NATIONALE CONTRE LA M DIOCRIT Retour la table des mati res La seule objection s rieuse que cette orientation soul ve est formul e notamment par certains syndicats Nous n avons pas assez d hommes pas assez de techniciens pas assez de moyens pas assez d argent enf
205. ge parfois combin e avec la pr c dente int resse les ing nieurs et cadres Pris dans leur masse ceux ci constituent aujourd hui objectivement une fraction essentielle du parti de l expansion toujours entra n e par le dynamisme des grandes affaires et de leurs dirigeants m me si une part d entre eux souvent les plus vieux les plus autodidactes se reconna t dans la C G C ce fleuron de la petite France et si une autre part tr s minoritaire est touch e par le syndicalisme c ouvrier Deux changements manifestes attendent cette cat gorie d une part son effectif va continuer de cro tre tr s rapidement donc son statut perdra peu peu ses privil ges d autre part les firmes en grandissant vont donner plus de pouvoirs et plus Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 154 d autonomie plus de cadres tandis que les tensions classiques au sein de vastes organisations vont s accuser La conqu te des ing nieurs et cadres entreprise laquelle les centrales syndicales ont d j commenc de se livrer tandis que les partis de gauche y ont pr t moins d attention deviendra de la sorte un objectif d atteinte moins difficile Enfin et c est la troisi me ligne de clivage la bonne harmonie qui r gne g n ralement entre le milieu des affaires et les cadres dirigeants de l appareil d Etat peut n tre pas ternelle D j l on peut observer que cette harmonie est fonction de l unit de vues du mil
206. h ances du socialisme en France Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 159 RENVOYER L TAT AU CIEL Retour la table des mati res Mais doit il s agir pour autant d un d p rissement de l tat Certes Ce quoi nous assistons en France depuis plusieurs si cles c est la maturation et la prolif ration d un Etat fortement hi rarchis Ce quoi nous assistons depuis quelques d cennies c est la formation et au d veloppement d un secteur conomique dans la d pendance directe de l Etat Ainsi l on peut caract riser notre situation pr sente par quelque galit du type administratif tatique ou nationalis tatique Ou encore d int r t collectif tatique Le d p rissement de l tat commencera du jour ou l tatique cessera d tre l quivalent n cessaire de l administratif du nationalis et du collectif Amorcer un tel processus ne signifie absolument pas qu il faille avant plusieurs si cles d molir l Etat ni m me qu il faille aujourd hui et pour longtemps l affaiblir en aucune fa on bien au contraire c est d abord de le renforcer en l purant qu il doit tre question Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 160 Le premier objectif en effet devrait tre de lib rer les centres de d cision sup rieurs de l tat des missions gestionnaires pour r server leur pleine effi cacit aux seules t
207. h sion politique n est pourtant pas faite de citoyens passifs Nombreux sont ceux qui en diverses occasions font preuve de vell it s politiques ils forment le plus grand parti fran ais celui des adh rents d un jour ou d un semestre vite d courag s par l inadaptation des organisations politiques leurs besoins confus Moins nombreux mais d un effectif cependant trois quatre fois sup rieur celui de toutes les organisations politiques de gauche r unies est l ensemble de ceux qui au del de telles vell it s se sont fix s un stade sp cifique d en gagement politique m me si ces engagements se proclament non politiques par tradition id ologique ou par hostilit diffuse envers ce que repr sente l engagement politique de plein exercice Ce sont les militants syndicalistes et aussi les l ments actifs d innombrables institutions clubs associations familiales associations locales organismes mutualistes coop ratives etc Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 183 SI LE PEUPLE NE VIENT PAS A TOI Retour la table des mati res Les organisations politiques se plaignent des vell it s des premiers mais elles sont plus enclines les expliquer par l immaturit des vell itaires ou par les s ductions de la vie quotidienne que par une autocritique Elles se plai gnent galement des limites que respectent les Seconds et ne voient le plus souvent d autre rem de que la prise de co
208. hie domin e en droit comme en fait par le chef de l Ex cutif il ne lui reste que deux sources d ind pendance le respect de la loi laquelle est changeante et doit toujours tre interpr t e et sa force de caract re S il veut bien risquer de rester en un rang m diocre avec un revenu modeste il pourra retranch dans son inamovibilit de principe dire le droit comme l exige sa conscience Sa justice sera pleinement ind pendante sous r serve d appel ou de cassation Par un paradoxe apparent la justice administrative est beaucoup plus ind pendante cela tient au fait que le Conseil d Etat qui l exerce ou la supervise est une institution autonome et coll giale qui a su affirmer progressivement son autonomie sous une quinzaine de constitutions successives LE PARLEMENT L ind pendance du l gislatif est douteuse Le Parlement n est certes pas subordonn formellement n1 mat riellement l ex cutif Mais les sp cialistes de science politique s accordent consid rer que dans toutes les grandes nations industrielles et quelle que soit la qualit des traditions parlementaires les assembl es l gislatives sont devenues Pour l essentiel des sortes de conseils consultatifs plac s aupr s des gouvernements Le plus souvent ils expliquent cette subordination par l existence d un parti majoritaire ou pr dominant ou m me par celle d une coalition de partis qui rompt la 1 C est dire celle qui juge les litiges i
209. i pos il faut galement admettre qu au cours des derni res d cennies la France a en g n ral enregistr un taux d inflation sup rieur celui que l on pouvait observer expansion gale en d autres pays comparables D o la th se rappel e plus haut En fait cette th se n claircit rien mais masque sous des mots des r ali t s plus profondes qui expliquent parfaitement notre surcro t d inflation D abord la d mographie la France est de tous les pays capitalistes im portants le seul dont l expansion ait repos sur une population active quasi stationnaire Tout coolie s chauffe en tirant son pousse pousse mais il s chauffe plus encore si la charge s accro t sensiblement tandis que sa course progresse Dans la France dont la production a doubl de 1954 1968 alors que la population active s est accrue de moins de 4 il y avait place pour un suppl ment d inflation cause occasionnelle mobile mais cause g n rale unique L ajustement de l quilibre conomique s op re dans tous les pays capita listes soit au d triment des prix soit au d triment de l emploi Autrement dit il est tr s rare que les prix demeurent stables au voisinage du plein emploi L inflation sert ainsi de substitut au ch mage En France elle a d servir aussi de substitut l insuffisant apport de main d uvre additionnelle Pour le reste c est dire pour rendre compte de l ampleur exceptionnelle de certaines pous
210. i que la r volution informatique annonc e r volu tionne quoi que ce soit en juger par le fait qu elle d marre dans un climat de comp tition et non de r novation Partout l ordinateur est pris comme la machine comptable la mode Nulle part il ne donne vraiment lieu cette r invention des circuits d information et de d cision sans laquelle ses prouesses demeurent virtualit s Mais vit on jamais une machine m me riche d immenses potentialit s les affirmer l encontre d institutions et de men talit s n es d une tradition s culaire Oui on vit de tels changements s op rer d s lors que des groupes sociaux pr cis avaient int r t bousculer la position d autres groupes et que la machine pouvait servir cette fin ce qui revient dire que l informatique ne s imposera au sein de l administration que par un long combat qui n est gu re entam et qui spontan ment peut durer plusieurs d cennies UNE CRITIQUE POLITIQUE Retour la table des mati res D ailleurs ce n est pas d une critique empirique mais bien d une critique politique que la centralisation tatique la fran aise est aujourd hui justi ciable La dispersion des pouvoirs actuels de l Etat rendrait elle celui ci moins efficace que l actuelle centralisation Les deux causes sont plaidables en g n ral c est dire si l on additionne en vrac tous les arguments que l une ou l autre peut invoquer Elles ne le sont Plus si l on ordonne
211. iale en ces zones se charge de tensions plus s rieuses D autres les plus hasardeuses sont du type cubain quelles les quels pays loign s de l ex camp socialiste mais suffisamment abrit s de l inter vention imm diate des Etats Unis ou de quelque autre puissance pourront ils voluer jusqu ce stade D autres encore sont l inconnue majeure de la d cennie comme des sui vantes une situation r volutionnaire m rira t elle dans l un quelconque des grands pays du Tiers Monde l Inde ou l Indon sie l Argentine ou le Br sil ou bien encore de fa on plus sporadique dans quelque zone continentale assez vaste comme l esp rait Che Guevara Plusieurs donn es sous tendent ce probl me D abord la distance qui s pare l ind pendance politique du d veloppement conomique L ind pen dance est n cessaire au d veloppement mais non suffisante D autres condi tions restent remplir dont les principales sont de lever les blocages sociaux f odalit latifondisme etc d o le besoin de r volution et d agir bonne chelle en milieu relativement homog ne d o l un des risques de guerres Par ailleurs la r volution n est pas plus que la guerre indiff rente aux puissants d o la dimension internationale que prend toute initiative Bolivar pouvait lib rer toute l Am rique du Sud presque sans mouvoir l Europe mais Guevara n a pas pu attaquer quelques soldats boliviens sans mobiliser la presse int
212. ibilit s d volution offertes la France par son environnement par son pass et par la dynamique des forces sociales qui la composent Dans ce champ de possibilit s quels objectifs la gauche devrait elle s assigner Mais encore une fois pourquoi s en tenir ce champ de possibilit s pourquoi ne pas essayer de bouleverser radicalement les donn es du pro bl me de rompre l encha nement des contraintes qui assurent la p rennit du capitalisme fran ais N est ce pas remiser la r volution au Panth on des dieux morts Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 148 LA R VOLUTION PEU PROBABLE Retour la table des mati res Pourquoi en effet Parce que la politique n est pas la roulette parce qu il est pour toute force politique comptable de l avenir de la soci t d rai sonnable de miser tout cet avenir sur un seul num ro aux chances extr me ment faibles On peut dire qu en France la r volution n est pas l ordre du jour pour les dix ou quinze prochaines ann es qu elle ne peut s y inscrire que par accident mais que l avance vers le socialisme est elle l ordre du jour Reprenons bri vement ces trois propositions qui r sument maintes analyses pr c dentes La r volution n est pas l ordre du jour La France n est pas comme la Russie de 1917 un maillon faible dans la cha ne mondiale de l imp ria lisme Ses contradictions ne la portent pas vers une r volution socialiste in
213. id ologique ce qui ne veut pas dire n gligeable tant que des institutions ne viennent pas accompagner et asseoir le changement c est en quoi la C F D T avait pleinement raison de mettre alors l accent sur le droit syndical dans l entreprise et en quoi la C G T faisait preuve d aveuglement en lui refusant cette priorit La redistribution du pouvoir dans la soci t le nouveau partage des pou voirs est l une des conditions essentielles remplir pour que la coexistence durable avec le capitalisme ne se r solve pas en une duperie du mouvement socialiste Mettre en place et faire fonctionner une conomie mixte s orienter vers un certain d p rissement de l tat s engager dans la voie de compromis euro p ens est un ensemble d objectifs que la gauche peut viser utilement Pour les atteindre sans se fourvoyer c est dire pour garder le pouvoir et pour garder la possibilit d en user il lui faut modifier profond ment le r seau du pouvoir Un chapitre pr c dent a montr toute l importance et toute J ampleur des r formes de structure que r sume cette formule DEUX CONTRESENS Retour la table des mati res Deux contresens sym triques peuvent tre commis ici l un serait de croire que le r seau du pouvoir ne peut tre modifi qu apr s la prise du pouvoir par la gauche l autre serait de croire que ce r seau peut tre durablement et irr versiblement modifi par une lente accumulation de petits progr s
214. identielles Mais c est l une mati re o la subtilit des responsables politiques et de leurs partenaires saurait ais ment dessiner un quilibre si la volont politique en existait En d finitive la politique contractuelle d bouchant sur une s lection des candidats par les associ s au prorata des droits qu ils se seront r ciproque ment reconnus c est dire en fonction du degr de leur association appara t bien comme la cl de plusieurs probl mes la fois Elle est de nature favoriser un d grad infini dans l engagement politi que donc d multiplier les antennes des organisations politiques Elle con duit de la sorte sortit les partis de leur ghetto les arracher aux d lices de la Rien ne s opposerait en outre ce que certaines organisations syndicales ou autres ayant t li es par contrat avec diverses formations politiques soient associ es au choix de leurs candidats respectifs si le mode de scrutin ou la strat gie lectorale des partis con duit des candidatures distinctes Mais on peut penser que dans cette ventualit la pression pour l unit de candidature s en trouverait renforc e Faut il s en plaindre d s lors que le choix des candidats ne serait plus le privil ge de vieux appareils Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 187 classe politique pour les enraciner dans le peuple ce sera peut tre un magma qui se substituera aux actuelles chapelles mais u
215. ient ressenti l une ou l autre des p rip ties de ce printemps comme un grave chec Entre ceux qui croyaient avoir manqu de peu la R volution et ceux qui plus prosa quement avaient perdu leur mandat parlementaire les diff rences pouvaient tre immenses mais le malheur tait devenu pour un temps leur d nominateur commun N anmoins d illusoires esp rances se nichaient encore au creux de ce malheur De plusieurs fa ons la gauche se croyait apte b n ficier de l bran lement de Mai De toute fa on l in vitable effondrement du gaullisme lui offrirait un jour sa chance Puis de Gaulle est parti et les cohortes de la gauche se sont lanc es en rang pars vers une nouvelle d faite lectorale Un candidat unique avait recueilli Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 14 en 1965 un petit tiers des suffrages quatre candidats se r clamant chacun de la vraie gauche ont difficilement totalis en 1969 un peu moins de voix Pompidou est appel pr sider la R publique jusqu en 1976 et d j les anciens combattants de l apr s gaullisme battent le rappel pour l apr s pompidolisme Mais le c ur n y est pas et plut t que de tirer de nouvelles traites sur un avenir douteux il est grand temps de faire rendre l effon drement de la gauche ce qu il peut produite de plus utile un peu de lucidit Comprendre son chec en tirer les le ons et s il se peut proposer une nou velle politique pou
216. ieu patronal Des tensions plus vives y porteraient donc atteinte Et surtout il d pend de l imagination r formatrice de la gauche autant que de sa capacit de pression de modifier cette situation Tout centre de d cision administratif a une mission pr cise et une relative autonomie Plus les luttes sont vives autour des d cisions qu il doit prendre plus cette administration glisse vers l arbitrage Le jour o les syndicats de la sid rurgie exemple entre mille auront d fini leurs projets d avenir et les auront soutenus durablement publiquement et bruyamment le nouveau plan d aide la sid rurgie ne pourra plus se pr parer ni s ex cuter leur insu clandestinement UN CHEMIN PRATICABLE Retour la table des mati res Ainsi donc il d pend des strat gies politiques mises en oeuvre par la gauche que la polarisation des int r ts sociaux ou si l on veut le front des luttes de classes soit profond ment modifi e Pour tout dire on doit m me penser que sans une telle redistribution de ses lignes d action la gauche n aura dans l avenir pr visible aucune chance de revenir au pouvoir autre ment que par accident et pour un bref s jour g n rateur de nouvelles amer tumes l inverse si la gauche sait red finir ses lignes d action elle peut bon droit se poser en candidate au pouvoir dans une soci t en changement rapide elle peut retrouver la fonction qu elle n aurait jamais d abandonner cel
217. il le rappeler Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 16 Tant qu il gouverna le Front populaire fit une politique conomique d plorable qu on la juge d un point de vue socialiste ou dans une perspective de gestion loyale A tout prendre les v ritables victoires de 1936 celles qui devaient survivre aux joies de ce printemps et aux amertumes des ann es suivantes sont le sursaut de dignit de la classe ouvri re la promotion de quelques milliers de nouveaux militants et les premi res r formes de structure Ce bilan sommaire est injuste sur un point au moins il ne dit mot du contexte international dans lequel le Front populaire naquit et mourut Ses dissensions la bri vet de son exp rience et son chec final ne sont ils pas imputables avant tout cet environnement Sans doute Mais les circons tances internationales constituent rarement des contraintes absolues ni des contraintes absolument ext rieures On reviendra plusieurs fois sur ce probl me qui est d appr cier la force et la mall abilit des contraintes ext rieures et de juger leurs liens avec les actions des forces politiques internes En 7936 le Front populaire a certes subi la mont e vers la guerre comme il avait t port par la mont e du fascisme et de l anti fascisme La guerre d Espagne o se jouait l avenir de l Europe l a divis C tait la pre mi re fois qu en France une coalition g n rale de la gauche soutenue par l
218. ilosophique regardons la France de Louis Philippe le roi bourgeois La soci t civile celle que forment les individus promus citoyens par la R volution de 1789 est le domaine de la famine et de l conomie c est le syst me des int r ts individuels Entre les individus les rapports s tablissent par contrat d homme homme L homme patron et l homme ouvrier se lient par un libre contrat de travail Ni l un ni l autre ne peut se liguer avec ses semblables et former ce que nous appellerions un syndicat la loi Le Chape lier y veille qui depuis 1791 prohibe toute coalition L tat plane tr s loin au dessus de cette soci t civile form e de bourgeois et d ouvriers et pour les quatre vingt cinq centi mes de paysans incultes pars sur leurs terres Il a pour fonction de prot ger la famille et de diriger la soci t civile Mais il la dirige au sens tymologique du mot c est dire qu il lui impose un ordre il cr e et fait respecter un droit celui que Napol on a fait codifier Les instruments dont l Etat a besoin sont donc tr s limit s l arm e pour exprimer sa souverainet la justice pour dire le droit la police pour maintenir Marcuse observe juste titre que les cat gories de la th orie sociale se sont d velopp es l poque o les besoins de refus et de subversion faisaient corps avec des forces sociales effectives et agissantes Ces cat gories taient essentiellement des concepts n ga
219. in pour nous en doter donc nous ne pouvons pas suivre quand bien m me nous le vou drions C est vrai Mais ind pendamment du n cessaire rel vement des cotisations syndicales selon une progression au moins aussi rapide que celle des salaires nominaux cela ne signifie t 1l pas que les forces syndicales ont modifier radicalement leur politique financi re Si depuis dix ans telle centrale publiait et vulgarisait p riodiquement un budget ambitieux faisant appara tre les concours financiers massifs dont elle a besoin pour accomplir correctement toutes les t ches auxquelles ce que l on pourrait appeler la fonction officielle du syndicalisme doit l entra ner si depuis lors elle menait une campagne instante et r p t e pour qu une subven tion annuelle progressive et non affect e lui soit vers e par le budget de l tat aurait elle eu satisfaction aussit t ou seulement en 1963 1964 apr s la conf rence des revenus ou seulement le 2 6 mai 1968 Grenelle En fait 1l n est pas trop tard pour s y mettre et l observation vaut pour toutes les fortes syndicales et politiques il faut viser pour elles d impor tantes et r guli res subventions publiques non occultes ni indirectes ni parcimonieuses ni m me r vocables sans p ril politique C est affaire d obsti nation C est aussi tout prendre l un des principaux progr s que l on pourrait faire accomplir toute la vie publique fran aise Il peut para
220. ine o quelques innovations sont apparues est celui des conventions collectives dans nombre de firmes publiques des statuts voquant souvent celui de la fonction publique ont t tablis dans quelques cas des initiatives sociales marginales ont t prises telle la g n ralisation d une semaine de cong s pay s suppl mentaire partir de chez Renault Pour l ouvrier pour le salari de tout niveau l Etat patron se diff rencie faiblement d un patron ordinaire D s tatiser les firmes publiques et les re nationaliser est un objectif de premi re importance Pratiquement cela revient leur donner de nouveaux propri taires de nouvelles missions de nouvelles orientations De nouveaux propri taires Il importe en effet que les firmes publiques jouissent d un statut assurant leur d pendance vis vis de la collectivit et non vis vis de l tat Celui ci minoritaire dans leurs conseils doit y si ger avec d autres l ments collectivit s locales syndicats ouvriers et patronaux Universit etc de telle fa on que des personnes morales de droit public ind pendantes les unes des autres y soient ensemble largement majoritaires ces m mes personnes morales ayant vocation charger s par ment ou conjointement des organes de contr le de veiller la conformit des politi ques suivies avec les missions assign es Le conseil d administration de chaque entreprise publique doit avoir seul le pouvoir de
221. ion sociale doit accorder autant de prix leur agencement correct qu celui de la production PAL On peut prendre une mesure indirecte de cette transition de la n cessit vers l abon dance en observant la place d croissante tenue dans la population active totale par les traiteurs de mat riaux c est dire ceux qui mat riellement approprient la nature aux besoins humains et corr lativement la place croissante tenue par les traiteurs d infor mation c est dire ceux dont le travail ne s applique pas une transformation mat rielle quelconque Les premiers formaient encore en 1940 les deux tiers de la population active am ricaine Ils n en forment plus que la moiti Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 139 5 D une fa on plus g n rale le socialisme doit se d finir comme une r organisation du r seau des pouvoirs dans une soci t r organisation dont les fins premi res sont de lever les obstacles une meilleure ma trise collec tive du d veloppement social Si comme il me para t d cisif cette ma trise implique un affrontement clair et r ductible des in vitables conflits d int r ts elle suppose de ce fait un syst me quilibr de contre pouvoirs en m me temps qu un renforcement des pouvoirs de coordination et d arbitrage En clair et pour ne prendre que des exemples fran ais cela revient dire notamment qu il est sans doute n cessaire de rectifier la fronti re entre
222. ions se soient pleinement rapproch es La premi re de ces d marches attesterait la la cisation du S G E N renfor cerait maintes quipes de la F E N par l appoint de militants remarquables mais souvent isol s et d montrerait que la Strat gie unificatrice n quivaut pas la subordination par la C F D T des syndicats qui lui sont aujourd hui ext rieurs Elle pr parerait un ult rieur rapprochement organique de la F E N et de la C F DT La seconde d marche renforcerait dans un secteur social dont la con qu te est on l a vu un objectif essentiel la minorit aujourd hui syndiqu e hors la C G C et pourrait sans doute exercer terme un effet d entra nement sur les l ments vivants qui commencent se d gager de cette respectable conf d ration supposer que ces exemples soient pertinents il ne faudrait pas en tirer cette cons quence paradoxale que l unification doit syst matiquement passer par de tels d tours Pour l essentiel C est de rapprochements directs de cr a tion d organes communs de conversion d accords d unit d action en accords d unification qu il doit s agir Ces rapprochements et ces accords doivent videmment recevoir l actif soutien des bases syndicales pour prendre forme Mais il est souhaitable qu ils ne se concr tisent qu au niveau des d partements des r gions des f d rations Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 202 et des conf d rations et non d ab
223. ique r alis e avec le traitement de textes Microsoft Word 2001 pour Macintosh Mise en page sur papier format LETTRE US letter 8 5 x 11 dition compl t e le 22 ao t 2003 Chicoutimi Qu bec b Fait avec Macintosh Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 3 Robert Fossaert Le contrat socialiste Paris ditions du Seuil 1969 286 Pages Collection L histoire imm diate Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 4 Le contrat socialiste La gauche est d faite Apr s avoir subi bien d autres checs elle vient de perdre la premi re bataille de l apr s gaullisme Jamais le pouvoir n a sembl aussi loin de son atteinte Jamais non plus la gauche n a t ce point inattentive aux changements de la soci t qu elle voudrait transformer Evaluant mal les contraintes qu im posent notre environnement international et notre h ritage historique analy sant mal le r seau des pouvoirs qui r gissent notre pays la gauche trop souvent gesticule en croyant agir La premi re tape de sa r novation est donc de mieux comprendre la soci t o elle vit Mais une seconde tape est tout aussi n cessaire c est d in venter un nouveau comportement politique dans lequel le projet l emportera sur le discours et le contrat sur la tactique Comme il montre que ces deux tapes peuvent tre rapidement parcou rues ce livre est un livre optimiste Il n apportera certes a
224. l tre le Ille Reich L U R S S est aussi une puissance h g monique mais non imp rialiste La diff rence est d ordre conomique et peut laisser indiff rents les Tch ques ou les Hongrois Mais elle peut tre importante pour l avenir car l h g monie et l imp rialisme n ayant pas les m mes racines ne sont pas justiciables des m mes volutions Les deux h g monies l am ricaine et la russe s tayent l une l autre en se neutralisant partiellement Ainsi la convergence ancienne des grands syst mes de contradictions qui tait l antagonisme du socialisme et du capitalisme s est paradoxalement substitu quelque chose qui sans aller jusqu au soutien r ciproque des r gimes conomiques et sociaux n en est pas moins un appui r ciproque des puissances politiques Parce qu ils ne peuvent en venir J explication finale les deux principaux partenaires du monde moderne tout en continuant de se tenir en respect secr tent une sorte d ordre mondial La crainte de voir un conflit local d g n rer en une guerre incontr lable ne les emp che pas d agir ouvertement ou sournoisement pour renforcer ou largir leurs positions mais elle les oblige souvent contenir leur action ou r primer une pouss e locale trop forte Chacune dans son quartier les deux h g monies tendent gendarmer le monde Elles le font m me parfois de concert dans les zones d influence douteuse comme au Moyen Orient Elles le font encore
225. l soit exode rural ou construction autoroutes ou quipe ment scolaire quilibre de la s curit sociale ou choix d une politique indus trielle etc ne peut plus conna tre qu une seule solution ou la rigueur des 1 Sans omettre videmment tous les probl mes d ordre international Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 78 solutions qui ne se diff rencient au terme de plusieurs ann es que par quel ques d cimales d cart Comme en outre les techniciens avocats de telles m thodes ont pour interlocuteurs des hommes politiques qui se laissent d autant plus volontiers s duire par la technicit de leurs experts que la solution retenue flatte leurs pr jug s on comprend la m fiance croissante que les hommes politiques de gauche cart s du pouvoir depuis dix ou vingt ans manifestent l gard de ces m thodes et par extension de ces probl mes Ce qui revient jeter l enfant avec l eau du bain car ces probl mes existent et sont d cisifs et les m thodes elles m mes ont leur utilit Un mauvais mod le vaut mieux qu un bon flair car il oblige int grer beaucoup de donn es m me s il ne peut jamais fournir la solution d aucun probl me politique Sa mission est d clairer des choix qui restent faire Et puis la substance m me de la politique est ailleurs Elle appara t lorsqu il faut comme il se doit traiter de front vingt probl mes majeurs reten tissant n cessairement
226. la gauche plus que communiste Ainsi la visite s ach ve par une qu te comme 1l se doit les gauches sont pauvres et ont plus de projets que de finance L ennui est que toutes veulent b tir sans trop se soucier des projets voisins que la ruine est le plus s r r sultat de leurs efforts dispers s et que pour r ussir une r novation urbaine exige que l on d molisse autant ou plus que l on construira Mais comparaison n est pas raison C est de r novation politique qu il s agit et non de r novation urbaine Pour en traiter la meilleure m thode para t tre de proc der rebours c est dire de caract riser le r sultat souhaitable avant d examiner les chemi nements concevables pour l atteindre Le r sultat souhaitable tient en deux mots un syndicat et un parti L un et l autre sont indispensables pour que le P C soit incit se transformer pour que l alliance des gauches soit possible et pour qu elle ait chance de vaincre puis de r aliser ses projets UN SYNDICAT POUR LA GAUCHE Retour la table des mati res La formation au c t de la C G T d une centrale syndicale unique est le seul moyen d quilibrer celle ci de b tir un appareil d une puissance compa rable ou sup rieure donc de faire preuve en situation de crise d un capacit d action et de liaison qui soit bonne chelle Cette centrale est tout aussi n cessaire hors les p riodes de crise Seule l unification des syndicats n
227. large cart Il faudrait que la gauche renaisse pour le combler L Voir chapitre 2 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 83 Le contrat socialiste Les pouvoirs Retour la table des mati res Deux chapitres viennent d explorer les possibilit s offertes la France par son environnement et par son h ritage c est dire par les autres et par elle m me Discerner ces possibilit s est l enjeu du d bat politique Les exploiter est l enjeu du pouvoir Telles sont du moins les id es re ues Mais la derni re de ces id es comporte une lourde quivoque Elle impli que que le pouvoir est d une qualit homog ne d une nature semblable pour toutes les forces politiques comme si l appareil gouvernemental offrait tous les gouvernants les m mes possibilit s gauche cette quivoque est per ue confus ment ou brutalement mais elle n est pas lev e pour autant Les uns estiment simplement que la prise du pouvoir par la gauche entra ne une sorte de renversement des influences et des opinions publiques les poss dants deviennent m fiants et les masses populaires confiantes Garder la confiance de celles ci vaincre ou d sarmer la Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 84 m fiance de ceux l ainsi se r sume leur sagesse Les autres estiment que la conqu te du pouvoir prend son v ritable sens par la R volution c est dire par la destruction des rapports de production capitaliste
228. latante ait abouti un mot d ordre pourtant erron lection trahison L norme d calage entre la r alit sociale et la pratique d mocratique a conduit une situation ambigu o avant mai deux termes concurrents s additionnaient plus qu ils ne s opposaient d politisation et repolitisation D politisation parce que le jeu formel et spasmodique de la d mocratie joint aux checs r p t s des forces d mocratiques que sont ou doivent tre les partis de gauche et au spectacle inlassablement r p t de leurs carences en face des probl mes nouveaux du monde actuel ne pouvaient qu y conduire Repolitisation parce qu c t des centres de d cision assujettis la proc dure lectorale et parfois tr s loin d eux ces probl mes nouveaux se posaient de fa on si int ressante ou si aigu qu il fallait bien s en occuper On vit des hommes militer dans les conseils de r sidents et les A S S E D I C faire de la s curit sociale plut t que du conseil municipal s activer au Plan dans les C O D E R ou dans des groupes locaux spontan s et s y soucier de leur avenir plus qu en tout autre lieu Mais tout ce qui vient d tre dit l imparfait serait il devenu inexact depuis Mai Ces r actions contradictoires ou compl mentaires sont galement insa isfaisantes La d politisation aussi justifi e soit elle a valeur de soutien incondi tionnel la droite Les partis de gauche se sont ass
229. le capitalisme avant comme apr s son accession au pouvoir LE MOD LE SU DOIS Retour la table des mati res Pour rendre cette perspective plus sensible on peut la situer par r f rence quelques mod les trangers Le mod le qui s impose spontan ment notre histoire est celui des tats Unis le jeu du march mondial et l action du capitalisme fran ais poussent l imiter encore que l archa sme la tradition la culture et le temp rament national freinent cette imitation ou la d forment plus ou moins heureusement Affaiblir sensiblement la contagion de ce mod le est un premier objectif Il suppose que les fronti res nationales ou europ ennes voir chapitre 5 soient rendues moins poreuses et que l action du capitalisme fran ais ou europ en devienne contenable et orientable Le principal rival du mod le am ricain est th oriquement celui de l U R S S Mais on l a discut pour conclure qu il ne constituait pas un socia lisme exemplaire il s en faut Comme en outre la r volution socialiste classi que n est pas l ordre du jour il ne peut tre question tout au plus que de s en inspirer avec circonspection Le mod le su dois a plus d attraits Il se caract rise par la forte expansion d une industrie puissante dans un pays largement associ aux changes internationaux en quoi il se distingue peu d une conomie capitaliste comme celle des Pays Bas mais aussi par la pers v rance d un
230. le d agent privil gi de la transformation sociale Ce sera ce ne pourra tre qu une bataille difficile o la formation d un faisceau convergent de toutes les volont s transformatrices parses sera des plus ardues o la capacit de man uvre des forces Politiques adverses s mera maintes confusions o la volont de r sistance des int r ts traditionnels et des puissances conomiques prendra des formes multiples de la r pression la s duction Mais c est une bataille qui vaut d tre men e parce qu elle peut conduire un r sultat sans pr c dent prendre le pouvoir pour y rester durablement et pour s en servir utilement Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 155 S en servir utilement Cela revient op rer trois transformations structu relles gr ce auxquelles l aptitude de notre soci t changer ce qui on s en souvient touche la nature m me du socialisme sera radicalement am lior e e faire d p rit l Etat e cr er une conomie mixte e partager les pouvoirs Le d p rissement de l tat Retour la table des mati res Parler d un d p rissement de l tat c est en France s exposer au ridicule l tat y est plus puissant et plus ramifi que jamais et en son sein une pouss e centralisatrice s culaire a jusqu ici balay tous les obstacles r duisant les collectivit s locales au r le de succursales sans pouvoirs d un si ge social retranch dans les minist
231. le des mati res Avant de reposer le couvercle de notre marmite nationale il faut encore dire un mot de l cume qui s y forme en abondance d s qu un v nement majeur agite le pays Il y a dans notre fonds historique commun et sp ciale ment dans les exp riences diverses qu ont v cues les g n rations encore actives aujourd hui assez de passions refoul es pour nourrir plusieurs guerres civiles mais selon des lignes de rupture qui loin de co ncider avec les luttes nouvelles utiles mener les prennent souvent de biais et quelquefois drama tiquement La profonde d faite de 1940 et la fausse victoire de 1945 les souvenirs de la collaboration les drames de la d colonisation et jusqu la vieille querelle Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 71 de la S paration de l glise et de l tat p sent encore sur l opinion fran aise La gauche dispose en outre d un tr sor propre de scissions et de ruptures o peuvent tre puis s des arguments pour servir toutes les querelles m me les plus inutiles La politique doit certes jouer des passions humaines Mais elle doit aussi choisir les passions dont elle joue si elle veut tendre certaines fins La retraite du combattant le privil ge des bouilleurs de cru l aum nerie des lyc es seront ils encore l ordre du jour de nos d bats en 1975 1980 ou les aurons nous remplac s par des pr occupations plus actuelles Trois tendances Retour la tabl
232. lement assembl e d lib rante natio nale ne soit que le couronnement d une pyramide d assembl es non moins d lib rantes et qui viendraient flanquer chacun des niveaux locaux ou Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 165 sp cifiques d organisation des pouvoirs publics La reviviscence des conseils municipaux l panouissement de conseils r gionaux la cr ation de conseils non d coratifs pour d lib rer de la justice de l information des universit s et des autres institutions autonomes est la condition sine qua non de toute renaissance parlementaire La d mocratie des 500 lus du peuple sera efficace s ils couronnent un syst me comportant des centaines de milliers d lus publics tous niveaux eux m mes repr sentants d un pays o des millions de citoyens actifs jouiront dans les diverses instances de la soci t civile de quelque pouvoir Sans revenir sur les d bats qui de 7962 1965 firent les d lices des organisations de gauche il faut pr ciser galement le r le du pr sident de la R publique et du gouvernement dans un tel sch ma Le d p rissement de l Etat ne doit certainement pas commencer Par une r duction majeure des pouvoirs du chef de l Etat ni par le retour un mode de d signation autre que le suffrage universel Ceci pour une raison qui doit peu au droit consti tutionnel et beaucoup au jugement politique quelles que soient les conditions dans lesquelles la gauche reviendra un
233. les en particulier l attrac tion que le mouvement tudiant a exerc e sur une partie de la jeune g n ration chez les ouvriers les employ s et les cadres et ils supposent que cette attraction se poursuivra et s tendra de plus larges segments de ces cat go ries sociales D s lors aux deux tendances contrast es qui expriment la bour geoisie r pondraient l avenir deux tendances se diff renciant nettement au sein de la classe ouvri re Le d faut irr m diable de cette analyse c est qu elle n glige le caract re ph m re des classes d ge Un tiers au moins des tudiants qui ont fait mai 1968 avait d j quitt l Universit en juillet 1969 Tout est toujours reprendre dans ce milieu de transition l histoire de l U N E F le montre assez Or les militants des groupuscules comme ceux de l U N E F encadrent faiblement la masse tudiante qu ils ont massivement entra n e en mai Si la situation politique ne leur offre pas en temps utile d autres chances d explo sion ils sont condamn s au repli groupusculaire Et les explosions ne naissent pas artificiellement Toutes les fi vres r volutionnaires retombent et si elles doivent ressurgir ce ne peut tre qu autrement et allleurs car le b n fice de la surprise est perdu Tout gouvernement et pas seulement en France sait d sormais que l agitation tudiante peut d clencher une r action en cha ne et la le on ne sera pas perdue d s 1968
234. les moyens requis pour les atteindre En fait les contre plans qui ont t esquiss s en 1964 1965 ont comme le note julien Ensemble t dessin s l envers c est dire d en haut et ont seulement offert l occasion de d bats de principe ou de m thode Un contre plan s int grant v ritablement dans un projet r formateur suppose un travail l endroit c est dire l laboration la base de projets multiples et leur synth se progressive en un ensemble Ceci rappel il faut encore noter que dans sa conception de 1964 1965 le contre plan a peut tre c d une exigence irr aliste d id al rationnel Etablir un projet global d une coh rence aussi rigoureuse que celle du Plan tait peut tre une ambition d raisonnable ne serait ce que pour cette raison dans l la boration du Plan le patronat et pr sent dans celle du contre plan cet absent se voit substituer un patronat imaginaire dont le comportement suppos oscille selon les temp raments entre celui du lion et celui du mouton D s lors le plus parfait des contre plans labor s dans l opposition ne pourrait par suite d un changement de pouvoir devenir du jour au lendemain un plan ex cutoire m me si une miraculeuse co ncidence de dates r duisait peu de choses les difficult s techniques En tout tat de cause il faudrait le refaire avec la participation effective du patronat et des autres partenaires d faillants N anmoins cette critique
235. les superstructures Ces rapports sont la base de la soci t dans l exacte mesure o elle d pend de fa on vitale de sa production Elle en d pend certes et de fa on vitale mais moins qu il y a un si cle moins qu il y a vingt ans et cette d pendance peut continuer de d cro tre L humanit ne sautera pas un beau jour du r gne de la raret dans celui de l abondance ce sera c est d j un long processus Quant aux superstructures leur d pendance l gard des rapports de production est ce point m diatis e qu il est prudent de ne point l exag rer d autant que la pratique des pays dits socialistes a tout comme celle des pays capitalistes montr toute la diff rence qui pouvait s tablir entre deux pays de base semblable d s lors que certaines superstructures taient tout autrement agenc es faut il rappeler qu en 1936 la France et l Allemagne avaient la m me base conomique ou que l Albanie et la Yougoslavie ont aujourd hui la m me base Concr tement ces fameuses superstructures comprennent des institutions telles que l universit et l cole la justice l arm e la police la presse la t l vision etc Le statut effectif de ces institutions qui para t subsidiaire dans la conception marxiste traditionnelle semble au contraire exp rience faite devoir tre tenu pour essentiel la qualit du socialisme que l on entend construire En d autres termes le socialisme comme m thode d organisat
236. les uns sur les autres L expert peut en isoler un Le politique doit en ma triser tout le faisceau et ce moment l ampleur strat gique des choix simultan s se r v le pleinement C est sous vingt angles toute la vie des hommes qui est en cause Autrement dit l illusion technocratique est de faire comme si la multi plicit des r les sociaux des individus tait le fait d hommes distincts A la suivre on pourrait croire que la France compte 10 millions d automobilistes plus 12 millions de scolaires plus 8 millions de locataires et 6 de propri taires plus 13 millions de salari s plus 15 millions de m nages sans compter les provinciaux les assur s sociaux et bien d autres mais ou ne trouverait nulle part les 50 millions de Fran ais ces tres technocratiquement tranges qui cumulent non sans d chirements de multiples qualit s L OUBLI DE L AVENIR Retour la table des mati res La troisi me illusion est plus grave encore car elle touche la discon tinuit majeure de notre volution int rieure ce serait d ignorer la nature et l ampleur des inflexions ou des mutations que nos probl mes fran ais vont conna tre du fait de l int gration europ enne et du libre changisme mondial qui l enveloppe D ici 1980 1985 la situation devrait pourtant changer plus cet gard qu elle n a chang depuis 1958 En effet l union douani re d j acquise est loin d avoir produit toutes ses cons quences et t
237. leur activit pour les asservir au sens cybern tique du terme une politique nationale clairement d finie Ceci sous deux condi Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 172 tions qu une strat gie europ enne ad quate accompagne ce processus et qu une pouss e transformatrice puissante s exerce aussi au sein des firmes priv es comme d ailleurs des firmes sous contr le tranger Cette pouss e transformatrice devrait s inspirer des exp riences dont on a d j souhait le d veloppement dans le secteur public c est dire de ce que l on a appel la recherche d une gestion avanc e management et pouvoir syndical Une telle orientation retrouve l une des aspirations profondes du mouve ment de Mai la volont de rendre plus humains les rapports de travail et de commandement dans l entreprise Elle permet aussi de trouver la cl d un double probl me la conqu te des cadres au socialisme et la r conciliation des ouvriers avec le socialisme On a dit plus haut combien la conqu te des cadres serait difficile mais importante Une d mocratisation de la gestion des entreprises les int resserait au Premier chef La r conciliation des ouvriers peut davantage surprendre Il s agit cependant d un probl me crucial Le travail ouvrier est v cu comme une mal diction La r volte ouvri re quand elle d passe les revendications imm diates exprime une aspiration un mieux tre qui se range verbalement sous
238. lexe Ils vivent dans deux mondes trangers l un l autre D une part ils sont farouchement europ ens Ils veulent d un m me lan l entr e de la Grande Bretagne et de tous les pays de la Zone de libre change dans le March commun et la constitution rapide d un gouvernement et d un parle ment lectif europ ens comme s il n y avait aucune contradiction entre ces deux projets D autre part ils apportent d honn tes contributions aux program mes qui s laborent dans la gauche fran aise et y souscrivent souvent des 1 Sauf pour certains gauchistes sauter du cadre national la r volution mondiale Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 140 projets dont on peut se demander s ils sont compatibles avec les options pr c dentes Leurs contradictions se r sorbent g n ralement en une hi rarchie pas toujours tacite d abord faire l Europe le plus d Europe possible ensuite s il se peut faire le reste Ceci est sp cialement vrai pour une partie de la social d mocratie fran aise qui transcende ses checs par cet alibi grandiose nous aurons au moins aid faire l Europe Le malentendu entre socialistes et communistes dans la plate forme commune de f vrier 1968 prend ainsi toute sa mesure n avoir pas de projet europ en commun c est en fait n avoir aucune politique commune Cela dit le probl me est de taille Essayons en premier lieu de l inscrire dans un champ d hypoth ses raisonn e
239. liser des fragments en alliances variables ainsi qu une relative instabilit des rapports de force entre les principaux groupes sociaux De Gaulle a jou de ces deux conditions sans vouloir fonder une force politique sp cifique un parti Il a cr des rassemblements des unions donc des amalgames changeants d hommes et de forces qui souvent n avaient en commun que leur foi gaulliste D autres que de Gaulle songeant sa succession se sont employ s faire du gaullisme un parti o plut t construire un parti dans le gaullisme Pompidou a t leur leader C tait l une entreprise quivoque elle semblait conforter le r gime elle le minait en fait non seulement parce qu elle contri buait rendre acceptable puis souhaitable l id e d un gaullisme sans de Gaulle mais aussi parce qu elle en d viait le sens et la port e En b tissant un parti les gaullistes ont commenc se priver de leur carte ma tresse de leurs possibilit s bonapartistes c est dire de leur aptitude f d rer au gr des circonstances des forces tr s diverses exprimant des int r ts sociaux diffici lement conciliables En glissant du rassemblement au parti ils ont com menc glisser vers la formation d une droite conservatrice M me si l entreprise s est d abord r v l e rentable aux lections l gislatives de 1968 et pr sidentielles de 1969 ses cons quences terme seront lourdes la force du nouveau parti ent
240. listes d U N E F Renouveau un succ s non n gligeable aux lections universitaires Les ex f d r s avaient de leur c t enregistr sans nostalgie apparente l exode des radicaux et entrepris sans imagination ni vigueur la cr ation d un nouveau parti socialiste o la S F I O et la Convention devaient se fondre avec l U C R G et l U G C S mais le c ur n y tait pas et le calendrier devait se r v ler peu favorable Le P S U ragaillardi par les recrues de Mai qui formaient plus de 40 de son effectif encore modeste affirmait sa vocation socialiste mais h sitait entre l espoir falla cieux d une issue r volutionnaire relativement proche et la difficile invention d un r formisme r volutionnaire contradiction qui se traduisait par de beaux d bats et de pi tres tactiques Les groupuscules enfin avaient presque tous retrouv en se multipliant par scission leur tre d avant Mai seule se distinguait quelque peu l ancienne J C R d sormais affili e la IVe Interna tionale En avril cette gauche multiple ne croyait pas la victoire des non Elle n tait pas pr te succ der au gaullisme et n anmoins elle ne pouvait que lui succ der du moins chacune de ses fractions l avait assez r p t pour y croire Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 127 Quand l histoire indiff rente au syllogisme a tourn la page la gauche a connu en un mois deux preuves contradictoires Ell
241. lonialisme politique m me l Angleterre ach ve de d nouer les liens militaires commerciaux mon taires et financiers par les quels son ex Empire l entrave Les protagonistes des grandes guerres euro p ennes avant tout la France et l Allemagne sont lanc s dans une union conomique qui les met hors d tat de se combattre L lan conomique pris par l Europe depuis 1945 et qui lui a permis de rattraper une bonne partie de l avance qu avaient les Etats Unis a favoris la convalescence de l Italie et surtout de l Allemagne au sortir du fascisme l volution de l Espagne depuis quelques ann es atteste l influence au moins partielle de ce fadeur Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 48 Moins d pendante de son pass plus riche et plus forte l Europe a pu d lib r ment ou non entreprendre de r valuer ses rapports avec les deux Grands d autant plus facilement que depuis les ann es 1948 1955 l quilibre de ces puissances s op re de moins en moins chez elle Du blocus de Berlin au trait de paix autrichien l Europe tait l un des champs principaux de la guerre froide Celle ci s est d sormais d plac e vers d autres terrains malgr l au tomne hongrois de 1956 et l t tch coslovaque de 1968 L Europe se soucie d sormais des march s orientaux et de la p n tration conomique am ricaine et plus seulement de la d fense atlantique Non sans h sitations n1 oscillations sa crainte d une agression sovi
242. mation concerne l adaptation permanente des travailleurs aux condi tions rapidement changeantes de leur emploi O sont les projets de la gauche ce sujet va t elle attendre que t probl me ait m ri jusqu la prendre contre pied ou va t elle laisser l initiative d autres forces politiques Pour la gauche l pargne est souvent situ e sur la face cach e de la lune On s int resse plut t l investissement et ayant peu lu Keynes ou Marx on ignore souvent la n ces saire galit de l investissement et de l pargne N Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 100 l inertie est forte en temps ordinaire Ainsi la haute administration des Finances a travers sans trop d mois la p riode du Front populaire et depuis 1958 l Universit traditionnelle a longtemps pass non sans raisons pour l un des sanctuaires de la gauche traditionnelle Ces exemples tr s visibles sont l indice d une v rit plus vaste et plus discr te Des inflexions donn es dans une conjoncture politique peuvent porter des effets survivant longuement aux conditions qui leur ont donn naissance et ce tant que la retraite ne tourne pas en d route Les comit s d entreprise le Plan et les nationa lisations de 1945 1946 ne sont pas devenus de pures institutions bourgeoises ou capitalistes en mai 1947 apr s l viction des communistes ou en juin 1951 lorsque la S F I O entreprit une cure d opposition CONTRE POUVOIRS ET
243. mboles de ce lent ralliement l incendie des voitures joua sponta n ment puis publicitairement un tr s grand r le Chez les gr vistes les minorit s les plus combatives taient form es de deux l ments distincts Au premier plan se situ rent les jeunes ouvriers qui d s le d but de l ann e avaient soutenu les gr ves sauvages de Caen et du Mans et qui jou rent un r le d cisif dans le d clenchement de la gr ve Les m mes devaient en juin poursuivre les durs combats de Flins et de Sochaux Par ailleurs les ouvriers qualifi s et les techniciens de la nouvelle classe ouvri re associ s parfois des groupes de cadres anim rent dans quel ques dizaines d usines et de laboratoires la r flexion sur l autogestion Ces deux minorit s exerc rent sans doute une influence tr s forte sur la d cision de rejeter le constat de Grenelle et sur la poursuite des gr ves Ces minorit s parfois tr s puissantes trouvaient soit du c t des grou puscules soit aupr s du P S U ou de la C F D T des r f rences politiques clairant leur situation et leur action En revanche la grande masse du pays et sp cialement l opinion flottante des petites bourgeoisies urbaines et des salari s des entreprises aux structures syndicales trop faibles ou trop fra ches v cut cette p riode sans r f rences ai projets politiques comme une suite d entra nements sentimentaux Elle fut balanc e entre la sympathie et la crainte
244. ment et dont c est humain il aimerait bien conqu rir la ma trise A tout le moins y pouvoir quelque chose Les tudiants estiment que l enseignement et les examens sont des sujets sur lesquels ils ont quelque chose dire Les copropri taires ont re u par une cons quence m canique des principes du droit le pouvoir de g rer collec tivement leurs probl mes de copropri t et ils tic s en privent pas Les On pourrait tout aussi bien dire que la bourgeoisie a lu Marx et l a compris En fait elle a plut t entendu L nine et ce qui a suivi 2 Toujours la logique du syst me des d cisions Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 105 locataires feraient volontiers de m me on le voit dans les conseils de r si dents Les parents d l ves partageraient volontiers avec les professeurs les pouvoirs que l administration sup rieure d l gue aux proviseurs et ils en annexeraient volontiers d autres Les lyc ens eux m mes sont pr ts en prendre leur part Les mille habitants du p t de maisons o j habite d couvri raient volontiers que si selon le projet d Alphonse Allais on transplantait leur immeuble la campagne ils formeraient alors un village dot d un conseil d lib rant de leurs probl mes C est trop peu et l on va d ailleurs agglom rer les villages soit 1 transposons le probl me l chelle de mon quartier ce qui lui donnera plus de corps Faut il en outre parler de l app tit de pou
245. mer tous ses besoins a quelque peine se reconna tre dans leurs d cisions D autant que ses lus et c est la seconde critique sont son image divers ordinaires et m diocrement sp cialis s Le bon sens populaire dont ils manent est il d un grand secours devant la technicit r guli rement croissante des options prendre Le d clin de l institution parlementaire est d ailleurs d montr par les choix pratiques des hommes qu elle devrait int resser L ambitieux qui h site entre plusieurs carri res ne range pas le d put au sommet de son chelle de valeurs et pour peu que l on prenne avec respect ces termes ambitieux et carri re n a t il pas raison de consid rer qu un directeur de minist re un leader syndical ou un P D G disposent d un pouvoir social et politique bien sup rieur celui d un d put Si bien qu au passage on peut d gonfler une vieille outre celle qui repr sente le gouvernement d assembl e comme sup rieur toute autre modalit d exercice du pouvoir M me si la critique justifi e du pouvoir personnel exerc par de Gaulle lui a rendu quelque verdeur cette id e ch re la gauche communiste et parfois pr sente dans l autre gauche n a plus de signification Saint Just est mort et apr s lui la soci t que la d lib ration des repr sentants du peuple pouvait exprimer et conduire est morte galement Les int r ts 1 Dans la hi rarchie communiste tre membr
246. mier objectif Pousser Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 210 obstin ment chacune des organisations auxquelles on appartient se lier ses voisines rivales en est le corollaire Si cette pression se dessine le jeu des organisations les contraintes de l action politique et les exigences du calen drier auront une bonne chance de faire le reste Sinon la gauche parpill e le restera longtemps Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 211 Conclusion Retour la table des mati res En mai 1968 une p riode de notre histoire s est achev e Quittant le pouvoir un an plus tard de Gaulle a ponctu ce changement La famille l cole l entreprise l administration et la r publique doivent se d finit frais nouveaux Une soci t dont l volution avait chang de rythme est entr e en r volution Son avenir ne peut plus tre un pass reconduit et lentement d form Dans la premi re exaltation de cette d couverte beaucoup de ceux qui elle est due ont saut du pass dans le r ve On doit les comprendre non les flatter Comme tout doit changer 1ls ont cru que les anciennes r volutions leur offriraient d utiles mod les C tait oublier que depuis 1871 Ou 1917 l histoire s est poursuivie que de P kin ou de La Havane Paris la distance n est pas mesurable en kilom tres C tait ignorer qu un tout doit changer n entra ne pas pour autant un tout est possible Rober
247. mplexe de pouvoirs Il en va de ces innombrables centres de d cision comme des tats dans la vie internationale Le pouvoir de la Tanzanie ou celui du Nicaragua ne se font sentir qu l int rieur de leurs fronti res ou dans leur voisinage Imm diat alors que le pouvoir des Etats Unis est perceptible dans le monde entier Pourtant toutes les Tanzanie et tous les Nicaragua forment aussi par leurs r actions parses ou par le jeu d institutions comme les Nations unies une opinion publique dont tous les pouvoirs sup rieurs tous les Etats Unis doivent tenir compte Les familles les associations de p cheurs la ligne les clubs automobiles et bien d autres centres de d cision d un poids comparable sont les Nicaragua de notre soci t nationale Beaucoup moins n gligeable est le r le des grandes f d rations sp cialis es que ces Nicaragua peuvent former les consomma teurs les automobilistes les t l spectateurs les cin philes les locataires les anciens combattants les coop rateurs les mutualistes et chacun pourra ais ment allonger cette liste sont ou peuvent tre assembl s en associations puissantes dont le poids dans la soci t peut tre consid rable Si parmi les exemples cit s la France s illustre plus par a puissance de ses anciens com battants que par celle de ses coop rateurs ou de ses consommateurs d autres pays comme l Angleterre la Su de ou l Allemagne offrent des exemples inverses La fr q
248. munistes s accrochent obstin ment au cadre national dont ils ont l exp rience La logique de leur attitude les conduit rechercher une d sint gration du March commun m me si depuis quelques ann es 1ls ont abandonn ce mot d ordre et tiennent l Europe des Six pour un fait Loin d avoir explor les cons quences politiques qu aurait ce fait s ils avaient participer au gouvernement ils continuent d articuler des projets incompa bles avec le March commun Tant qu ils n auront pas r vis cette attitude il faut donc les tenir pour des partisans du repli national l inverse d autres courants de la gauche dont la plupart des socialistes ludent la contradiction par un saut m taphysique l Etat n est plus l chelle du march qu cela ne tienne constituons aussit t un Etat europ en transf rons lui les pouvoirs n cessaires et flanquons le d un Parlement lu au suffrage universel Fort bien Mais en admettant m me que l accord sur cet Etat se fasse vite six sept ou treize peut on esp rer que son quilibre politique reproduirait miraculeusement le rapport de forces favora ble la gauche qui par hypoth se se serait tabli en France Sauf se fier aux harmonies politiques pr tablies il faut admettre que la conjoncture politique nationalement favorable se diluerait dans une conjoncture politique europ enne beaucoup plus classique Il y aurait peut tre un Etat europ en mai
249. n es 1930 les grandes tendances de l volution mondiale se laissaient assez bien ranger dans l un des sch mas marxistes simplifi s en usage l poque Trois syst mes de contradictions se d ga geaient du flot disparate des v nements et convergeaient en un conflit central Les rivalit s inter imp rialistes l antagonisme entre colonies et m tropoles et les luttes de classes internes s ordonnaient autour de la lutte mondiale entre le socialisme incarn par l U R S S et le capitalisme ailleurs pr dominant Ensuite 1l est vrai ce sch ma se r v la d une efficacit beaucoup plus douteuse pour int grer les cons quences de la crise conomique mondiale la mont e du fascisme ou le d clenchement et le d roulement de la seconde guerre mondiale Il surestimait les conflits fond s sur les int r ts conomiques des classes et des nations et n gligeait par trop la force des nationalismes et l action relativement autonome des id ologies N anmoins on peut en tenant compte de ses limites prendre ce sch ma comme point de d part d une analyse du monde actuel Mais il faut pour cela changer la cl de vo te du syst me apr s Hiroshima l affrontement du socialisme sovi tique et du capitalisme mondial s est mu en un quilibre de la terreur DEUX H G MONIES Retour la table des mati res L existence de deux puissances pr pond rantes aptes se d truire r cipro quement et faire dispara tre to
250. n ral de l ducation nationale affili la C F D T S N E Sup Syndicat national de l enseignement sup rieur Socialisme actualit du Socialisme d finition du Socialisme fondement du Socialiste camp Soci t civile Souverainet populaire Stalinisme Su dois mod le Syndicats Syst me mon taire international T Technique et d mocratie Technocratie T moignage chr tien Tendances d finition des Tendances de l expansion Tendances en mai 1969 Tendances depuis mai Tendances et organisations politiques Tendances et organisations syndicales Tendances de la petite France e la petite France Tendances du progr s social e des droits acquis Tendances du progr s social et des droits acquis Tendance quatri me Tiers Monde Troisi me force U U C R G Union des clubs pour le renouveau de la gauche U E C Union des tudiants communistes U G C S Union des groupes et clubs socialistes U N E F Union nationale des tudiants de France nion fran aise nit politique nit syndicale etete Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 13 Le contrat socialiste L chec Retour la table des mati res La gauche fran aise est atterr e D un printemps l autre elle semble s tre puis e d espoir et de honte Ses diverses fractions ne s taient pas toutes reconnues dans l efferves cence de mai juin 1968 mais toutes ava
251. n des masses pour renforcer sa position elle n aboutit qu des r sultats limit s et temporaires Elle ne peut exercer pleinement le pouvoir et y durer qu en modi fiant d entr e de jeu le r seau du pouvoir d une fa on telle qu un quilibre nouveau s y dessine quilibre compatible avec ses projets et sa survie Ce que doit tre cette modification ne rel ve pas d une recette unique ni d une recette simple Cela d pend de la conjoncture des rapports de force et de l ampleur de ses projets Mais certains facteurs ne peuvent tre appr ci s sur le tas sans prendre le risque d un chec la preuve en a t donn e Ils doivent donc tre anticip s et la gauche doit avant d acc der au pouvoir savoir ce qu elle fera pour y tenir dans toutes les hypoth ses raisonnablement envisageables D s lors elle doit avoir ce que l on appellera un projet r formateur Celui ci peut n tre pas public en tous ses d tails il peut et il doit comporter des variantes mais il ne peut pas ne pas tre Sinon la gauche ne va pas au pouvoir Elle n envisage que d y passer ou pire d y faire une politique tran g re ses vues Et il ne suffit pas qu elle ait inscrit dans son ou ses pro grammes un catalogue impr cis de r formes de structure pour remplir cette 1 Elle ne l est pas du point de vue de la mutation lente des structures 2 Voir chapitre 7 p 242 sq Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 109 condition Il n
252. n des courants de gauche La candidature de Defferre porteur des espoirs de la grande f d ration de 1963 1964 s est traduite par un r sultat plus que m diocre malgr le secours de Mend s France fourvoy dans cette impasse Celle de Rocard a consolid la difficile perc e du P S U Celle de Krivine a confirm l existence aux confins du P C d un courant r volution naire qui pourrait devenir une composante durable de notre histoire Celle de Duclos enfin a confirm l audience quivoque mais majoritaire que le P C a su conserver dans la gauche fran aise La gauche s est ainsi r v l e pleine de timides promesses et de vastes souvenirs cahotique mais puissante triste mais inlassable Rocard a eu raison d axer sa campagne sur ces deux th mes connexes r inventer le socialisme et reconstruire la gauche C est bien le probl me et il peut recevoir une solution UN AVENIR AGIT Retour la table des mati res L apr s gaullisme sera une phase agit e de notre histoire car le rythme et l ampleur des changements profonds que va vivre la France demeureront des plus puissants alors que pour un temps son syst me politique branl au printemps 1968 et rafistol au printemps 1969 va tre d une grande fragilit L Voir chapitre 3 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 128 Dans cette situation qui pourrait se traduire par des crises graves la premi re tendance continuera de pr ner l e
253. n magma vivant un tre politique en devenir Elle conduit enfin r g n rer la gauche socialiste selon une m thode dont celle ci gardera l exclusivit On voit mal en effet le parti gaulliste ou les organisations de la droite classique ou centriste livrer le choix de leurs candidats aux al as d influences populaires ni officialiser d autres influences par des proc dures ouvertes au regard Pour le parti communiste le diagnostic est tout aussi net court et moyen terme il pourrait sans doute habiller d un recours aux d l gu s des organisations de masse qu il anime une proc dure d apparence r nov e dont son appareil n aurait cependant pas perdu le contr le mais ce faux semblant aurait peu de cr dit plus long terme n an moins il est peut tre permis d esp rer qu il en aille autrement que l ouverture soit effective ce serait alors un P C diff rent de ce qu il est aujourd hui et on le verra rien n est plus souhaitable que cette mutation Mais en attendant qu elle se fasse seule la gauche socialiste peur s engager dans cette voie Y aura t elle tout enti re convenance Ou la volont de certains de ses appareils de garder leurs pr rogatives exclusives sera t elle vive Multiplier les initiatives locales r gionales sectorielles et s il se peut nationales en vue d une politique contractuelle est aussi le moyen de d celer et d isoler les conservateurs de la gauche DES CONTRATS POUR QUOI FAIRE
254. n ne venait pas de la seule France Toujours est il que ce match nul a conduit une Stagnation du March commun au voisinage de l union douani re L atlantisme ou l autonomie le statu quo ou l largissement l ascension lente ou acc l r e vers un statut politique de l Europe demeurent des choix ouverts L EST ET LE TIERS MONDE Retour la table des mati res L avenir prochain de l Europe occidentale semble se r duire au choix de l un de ces trois termes une prolongation du statu quo une volution vers l autonomie une dissolution dans l atlantisme Mais ne manque t il pas deux autres termes au moins dont l un serait une attraction vers l Est et l autre un nouveau processus r volutionnaire Sur le premier point le doute n est pas permis l Est a durablement perdu son pouvoir attractif Il est vrai que la capacit d importation de l U R S S et de ses voisins attire de plus en plus l attention de l Europe occidentale que Fiat ou Renault constructeurs d usines en U R S S auront maints mules et qu un d veloppement des changes avec l Est peut tre la cons quence d une volution de la C E E vers l autonomie Vrai galement qu une issue lib rale la crise qui m rit l Est pourrait tre de nature stimuler et soutenir cette Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 51 volution Mais il faudra de longues ann es avant que les prouesses cono miques de l U R S S puissent devenir
255. n nouveau mode d emploi Le choix d pend de chacun de nous Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 213 Annexe Retour la table des mati res La gauche lectorale r sultats des lections l gislatives en France m tropolitaine En des suffrages exprim s Oct juin Nov juin Janv Nov Nov mars juin 1945 1946 1946 1951 1956 1958 1962 1967 1968 1 P C F et apparent s 26 1 26 2 28 6 26 9 25 9 19 2 21 8 295 20 2 Autres gauches U F D 1 2 2 2 3 3 9 P S U etc 3 S F I O et apparent s 23 4 21 17 8 14 6 15 2 1557 12 4 3 bis F G D S 18 8 16 5 4 R G R Radicaux et 10 5 11 5 12 4 10 12 5 7 3 6 i 3 apparent s TOTAL DE LA GAUCHE 49 5 47 2 46 4 41 5 44 1 35 9 36 2 37 43 34 94 TOTAL DE LA GRANDE 60 58 7 58 8 51 5 53 6 43 2 42 2 43 6 40 4 GAUCHE 5 25364 Trois phases 1 La Lib ration entre 50 et 55 2 La IVe R publique peine plus de 40 3 La Ve R publique peine plus de 35 volution pou pr s parall le celle de la gauche proprement dite Le seul cart noter celui de 1956 correspond la victoire du Front r publicain S il y a lieu premier tour seulement 2 Ce premier total exclut de la gauche tous les radicaux et y inclut l ensemble des autres formations ce qui revient faire l hypoth se implicite suivante il y a des radicaux de gauche exclus de ce fait et des socialistes de droite ou d extr me droite inclus de ce fait on
256. naires par exemple la Compagnie Bull il y a quelque dix ans etc D autre part la propri t cristallise des syst mes d int r ts dont l exp rience a montr en toutes circonstances qu il en r sultait deux cons quences irr pressibles un durcissement des tensions sociales jusqu au conflit ouvert et en p riode calme un automatisme de la distribution primaire des revenus qui contredit spontan ment les imp ratifs de l efficacit conomique et de la justice sociale Autrement dit toute distribution de revenus op r e par les entreprises capitalistes a besoin d tre corrig e par un syst me complexe d imp ts d allo cations de subventions et de transferts divers pour que l quilibre conomi que ait meilleure chance d tre atteint et pour que les normes de justice sociale sur lesquelles le consensus d une nation s est d gag un moment donn puissent tre peu pr s atteintes LES MANQUES Retour la table des mati res La suppression de la propri t priv e des moyens de production ou m me simplement des principaux moyens de production ferait certes dispa ra tre la source toutes ces difficult s Mais en juger par l exp rience des actuels pays socialistes cette suppression fait aussi appara tre certains manques Elle r duit l autonomie des firmes donc elle cr e des conditions favorables une centralisation administrative des d cisions conomiques qui peut tre Robert Fo
257. nement de la mise en place r cente et plus qu demi manqu e d un institut de d fense des consommateurs 3 Voir Hubert Lesire Ogrel le Syndicat dans l entreprise coll Soci t no 21 ditions du Seuil 1967 N Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 99 ques en l occurrence les autres centrales syndicales comprendre leur port e et a en tirer parti Ensemble le r seau des pouvoirs et le syst me des d cisions d finissent les fonctions qu exerce la soci t et contrario celles qui chappent l em prise sociale par ignorance impuissance ou choix politique Ces fonctions on l a dit sont justiciables d une infinit de classements De cette remarque d coulait l inutilit d entreprendre une analyse fonctionnelle de l Etat Mais autre chose est d apercevoir dans une situation donn e les fonctions dont l exercice est pour un temps politiquement d cisif De ce point de vue chacun savait depuis quelques ann es que la formation des hommes tait devenue l une des fonctions sociales les plus importantes mais tr s rares furent ceux qui en tir rent des cons quences politiques claires et pratiques on pourrait on devrait d battre du point de savoir quelles sont aujourd hui et quelles seront demain celles des autres fonctions sociales propos desquelles des probl mes politiques aigus vont se nouer ou peuvent tre nou s l information l pargne la pr vision d autres encore L
258. nent les uns aux autres sur les divers fronts h rit s de la guerre froide avec une densit particuli rement lev e dans les zones p riph riques Il serait arbitraire d inventorier la liste des pseudo Etats nationaux n s de la d colonisation et dont les fronti res artificielles seront l enjeu de luttes tribales nationales ou d inspiration n o colonialiste Il serait hasardeux enfin d attacher tel ou tel de ces conflits multiples une probabilit plus forte qu d autres car ces guerres supposent pour m rir que les Grands ou d autres acteurs part enti re puissent les ignorer voire les provoquer ne veuillent point les ma triser ou s y prennent tardivement ou malhabilement Le probable et seulement que plusieurs m riront Les r volutions du Tiers Monde ne constituent pas un ph nom ne totale ment distinct de ces guerres non que chacune de ces derni res ait une valeur r volutionnaire m me potentielle mais bien parce qu l inverse il est peu de r volutions concevables dans le Tiers Monde sans cons quences guerri res Mais les r volutions envisageables peuvent tre de plusieurs types Les unes peine discernables des coups d Etat taient monnaie courante en Am rique du Sud le sont devenues dans le monde arabe et en Afrique mais peuvent de moins en moins se r duire de simples rel ves d quipes Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 42 gouvernementales tant la situation soc
259. non immuable mais voluant fort lentement de son propre mouvement tout au moins Chaque centre de d cision se d finit par la comp tence qui lui est impos e par des moyens dont il a rarement la ma trise et par ses articulations avec le reste de la structure administrative et avec la soci t civile Du fait que sa comp tence est d finie d en haut et du fait que ses moyens en personnel et en mat riel sont le plus souvent r gis par un autre centre de d cision on pourrait tre enclin douter du pouvoir de tels centres mais ce serait une erreur grave Le directeur du Tr sor au minist re des Finances ne peut sans doute pas d cider tout seul d engager un administrateur suppl mentaire de licencier une dactylo ou d acheter un nouveau fauteuil mais les pouvoirs qu il exerce l gard des banques publiques ou priv es de la Bourse de maints autres services minist riels trangers la rue de Rivoli etc en font l un des hom mes les plus puissants de France Sans doute ne prend 1il aucune d cision importante sans l aveu de son ministre mais ce ministre ne peut exercer qu une tutelle s lective ou occasionnelle condition encore d tre qualifi pour cela ce qui au minist re des Finances est plus fr quent qu ailleurs Il faudrait mais ce n est pas notre objet consacrer des pages la seule description grossi re de la structure administrative consid r e comme un Par un centre hi rarchiquement s
260. ns l ordre avait repris l initiative au sortir d une trop longue stabilisation La relance de l conomie tait l ordre du jour la concentration et la modernisation des Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 112 firmes plus actives que jamais la politique industrielle venait d tre invent e le ch mage tait un peu excessif mais on pouvait en escompter une mod ration des hausses de salaires apr s quoi l expansion r tablirait sans doute un quasi plein emploi Parmi les urgences il s agissait d abord de donner sa pleine force la politique industrielle puis de mettre l Universit en mesure de suivre le train de l expansion pour reprendre ensuite l affaire paysanne La tendance de l ordre ancien ou de la petite France tait plus inqui te ce qui apr s tout est de sa nature En bloquant trop durement les prix la stabilisation op r e par Giscard d Estaing l avait certes irrit e Mais ce d faut pr s la politique de 1963 1965 lui plaisait bien la hausse des salaires avait t convenablement ralentie la croissance des subventions l agriculture d ment soutenue et surtout le Franc l Epargne l Or et l Equilibre du budget avaient t correctement soign s Cette sage politique tait d sormais rem plac e par une reprise de l agitation ant rieure Debr succ dait Giscard et ce l cheur n avait il pas nagu re port puis trahi les espoirs de l Alg rie fran aise en reven
261. nstituer un groupe d tudes sur l avenir de cette zone Par sous contrats divers comit s d entre prises de la r gion se joignent ce groupe et le chargent notamment de d signer les experts comptables auxquels ils auront recours pour l exercice de leur mission partir d un tel noyau un r seau de plus en plus dense d arti culations distinctes et sp cifiques peut s tablir en de multiples directions avec des municipalit s des organismes de H L M des coop ratives de consommation avec des organes plus ou moins analogues cr s en d autres r gions avec des f d rations syndicales etc Autre exemple deux sections syndicales d ing nieurs et cadres une ou plusieurs sections d organisations politiques et un bureau d tudes se pr occu pent selon un sch ma quivalent de l avenir des entreprises d une localit et Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 185 des perspectives offertes aux ing nieurs et cadres par la mise en place dans ces entreprises de formules modernes de management Autre exemple contrat entre une association d lus locaux et une ou plu sieurs organisations politiques pour l laboration concert e d un projet de r organisation des structures communales dans une zone donn e Autre exemple encore une ou plusieurs sections locales de partis politi ques passent dans une grande agglom ration un contrat avec diverses asso ciations de parents d l ves de divers ordres d enseignem
262. nt tudiant si toutes ces forces avaient galement conjugu leur action pour obtenir que la classe ouvri re victorieuse Grenelle ou en variante renfor ant par des accords sectoriels les premi res victoires de Grenelle reprenne le travail en bon ordre de bataille et si enfin la coalition des gauches unies avait pr sent un front sans failles aux lections l gislatives qui en juin ou br ve ch ance eussent t in vitables En cela le P C s est r v l obstin ment fid le la strat gie qu il mettait en oeuvre depuis des ann es Mais cette strat gie de validit douteuse avant mai 1968 venait de perdre toute signification En niai le P C ne pouvait plus prendre pour seuls interlocuteurs la F G D S et les syndicats et tenir pour n gligeable ou canalisable le mouvement tudiant et cette part du mouvement ouvrier qui chappait la tutelle de la C G T Il ne pouvait plus esp rer une avance pr cautionneuse vers une victoire lectorale lors d un scrutin norma lement d cid par l autorit l gitime Surtout il ne pouvait plus arriver au pouvoir sans modifier les positions et les analyses qui taient les siennes D j on l a not la plate forme commune p chait par l absence d une politique internationale viable en mati re euro p enne notamment Mais apr s tout un gouvernement aurait pu vivre quelque temps en faisant peut tre l impasse sur ces probl mes et en mettant ce d lai profit
263. nt les crises mon taires spontan es ou provoqu es ont toujours t fatales aux gou vernements de gauche m me les plus mod r s en France comme ailleurs Wilson et ses amis fran ais peuvent encore m diter l exp rience que v cut Herriot LE FRONT POPULAIRE Retour la table des mati res L tape suivante celle de 1936 passe g n ralement pour un succ s d importance historique Le Front populaire n a t il pas entrav le fascisme mena ant la classe ouvri re occupant les usines n a t elle pas pris la mesure de sa force les masses populaires n ont elles pas conquis les cong s pay s les 40 heures les d l gu s d importantes hausses de salaires quelques nationalisations et un d but d organisation des march s agricoles C est vrai Mais la coalition victorieuse de 1936 n a pas su garder le pouvoir plus de dix huit mois ni en faire usage plus de quelques semaines et seulement pour parer au plus press Stimul e par la crise et la menace fasciste la gauche avait su vaincre Victorieuse elle ne sut exploiter sa vic toire ne voulant ou ne pouvant faire une r volution ne pouvant ou ne sachant faire autre chose il lui restait savoir terminer une gr ve et g rer loyale ment Ce qu elle fit jusqu ce que sa propre majorit parlementaire se f t divis e puis d chir e c est le Parlement lu en 1936 qui d cida la chasse aux communistes de 1939 et porta P tain au pouvoir en 1940 faut
264. nt ressant l tat par opposition la justice tout court qui ne peut se prononcer d s que l tat est en cause Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 89 s paration de l ex cutif et du l gislatif L argument est de poids les exemples am ricain anglais ou allemand le montrent bien La Ve R publique a align la situation fran aise sur ces exemples trangers Mais pourquoi en est il ainsi Pourquoi le Parlement que la tradition jacobine consid re comme la repr sentation nationale comme le si ge d la souverainet populaire perd il cette souverainet C est qu il n a plus gu re de prise sur les r alit s sociales Depuis que l tat doit l gif rer de fa on continue et sur tout depuis que ses int r ts directs ses actions et ses responsabilit s se sont multipli s l infini le Parlement s puise Suivre le train En outre l complexit des affaires s est accrue plus vite encore que leur volume et l on chercherait en vain m me en France cinq cents Pic de la Mirandole pouvant rivaliser de savoir avec les arm es d experts que les ministres tra nent dans leur sillage ou tiennent en r serve pour tout d bat D o en tous pays et en tous r gimes une impitoyable s lection Le champ effectif de la loi c est dire de la d cision parlementaire s est r duit presque rien soit par cette s lection hasardeuse qu imposent les limites du calendrier soit par une d cision expresse pleins
265. nt d j trac s Ils n annoncent pas les p rip ties qui feront la une des journaux mais ils garniront assur ment toutes les pages int rieures Tous ont t rapidement explor s ci dessus et peuvent tre rappel s d un mot qui marque soit une volution soit un conflit industrialisation concentration exode rural subi frein ou orient urbanisation scolarisation d centralisation ou raidisse ment jacobin d protection ou non etc C est aussi en son sein qu est recrut e la grande majorit des juges lus des tribunaux de commerce N est il pas vrai par exemple que les comportements lectoraux sont d une assez grande stabilit depuis fort longtemps alors m me que la soci t fran aise se transforme profond ment N Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 77 L ILLUSION POLITIQUE Retour la table des mati res partir de l plusieurs illusions sont possibles L une qui serait politique au sens p joratif du terme serait de tenir ces probl mes pour secondaires sinon n gligeables et de centrer toute l attention sur les questions qui se d ploieront dans le champ clos des institutions politiques les p rip ties insti tutionnelles de l apr s gaullisme le r le du S nat le maintien ou non des conseils g n raux la mise en place ventuelle de conseils r gionaux etc L illusion ici est double Elle est de ne pas voir que presque toutes ces questions politiques au
266. ntable s offrait Ils ont eu tort de ne point s y engager mais il serait na f d en marquer de la surprise depuis 1936 ou 1946 l imagination semble avoir perdu le pouvoir au P C Spontan ment et confus ment c est pourtant cette voie nouvelle qui se dessinait peut tre avec la solution Mend s France Mais il serait injuste de faire porter aux seuls communistes un refus de s y engager dont ils n ont que la responsabilit principale parce qu ils d tenaient la force principale Les perspectives ouvertes par Mitterrand parlant au nom de la F G D S manquaient singuli rement de clart et de port e dans le feu de l v nement Celles que dessinaient chacun de son c t le P S U et la C F D T souf fraient de bien des confusions Parler de pouvoir ouvrier de pouvoir syndical ou de pouvoir tudiant touchait l essentiel mais ce n taient encore que des mots justes lanc s d une voix trop faible Mend s France lui m me perdit trop de temps avant de se lancer et se trompa d interlocuteurs plus que Bill res ou Mollet c tait alors Waldeck Rochet qu il fallait con traindre bouger Bref la situation offrait d immenses possibilit s mais les forces qui auraient pu les exploiter taient trop fr les La r volution de 1968 n a pas eu lieu cras e par les souvenirs et les s quelles de 1917 et de 1936 c est dire par un pass mort 1 Voir chapitre 6 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969
267. ntement indirect ne font pas d faut Mieux on les a plus d une fois vus teindre de concert un incendie naissant m me quand ils avaient aid l allumer D s lors l axe principal de la dissuasion s est peut tre d plac en ceci que l U R S S demeure visc ralement oppos e toute bombe allemande et que les Etats Unis ont de la bombe chinoise une crainte plus vive ou moins rationnelle que de la bombe russe Il reste que les encha nements par lesquels l escalade des deux Grands aux extr mes peut tre enclench e ne manquent et ne manqueront pas D s aujourd hui ou tr s bient t la Chine et un peu la France pourront jouer leur partie dans ces encha nements Demain il se pourrait que d autres partenaires se manifestent L accident et le suicide mis part il n y avait nagu re qu une peur de la bombe et son effet dissuasif tait certain Il semble y avoir d sormais deux r actions distinctes la peur dissuasive et l ignorance du danger virtuel Mais les cons quences que cette scission comporte virtuellement dans la strat gie chinoise ou am ricaine ne sortent finalement pas des limites o le probl me tait nagu re inscrit guerre atomique seulement par accident poursuite des guerres p riph riques C est peut tre simplement la dose des guerres r volu tionnaires qui se fera plus forte Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 47 Le monde vu d Europe Retour la table des mati res
268. nternationale va relancer le d bat sur l opportunit d une politique mon taire commune voire sur celle d une monnaie europ enne Si de plus un regain de pression sovi tique comparable l invasion de la Tch coslovaquie devait se manifester cela ranimerait le conflit entre partisans d une arm e europ enne fid les de l Alliance atlantique et explora teurs d un nouveau partnership avec les Etats Unis Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 141 Pour couronner le tout on peut penser enfin que le d bat sur l opportunit d un Etat europ en f d ral ou conf d ral est appel reprendre de plus belle Hormis les troubles d s la propagation d une crise conomique mondiale d assez forte intensit et supposer que les gauches europ ennes au pou voir ou dans l opposition soient demeur es tout ce temps dans leur actuelle prostration l Europe se retrouverait dans une dizaine d ann es gu re plus unie politiquement qu elle ne l est aujourd hui mais beaucoup mieux soud e au march mondial capitaliste et l organisation atlantique telle est en effet sa plus forte pente S1 par la carence des gauches en France comme ailleurs l Europe devait effectivement suivre cette pente elle y perdrait une chance essentielle et peut tre pr caire En effet s il est vrai que l Europe est aujourd hui plus libre de choisir son avenir qu aucun moment depuis le d but du si cle pareille possibilit
269. ntr le la satellisation des orga nisations sp cialis es qui les rassemblent Ces deux d marches tendent finale ment perp tuer une situation insatisfaisante Pour la modifier radicalement une reconversion totale est n cessaire Quand le peuple se d tourne des partis quand des militants campent loin d eux n est on pas en droit de penser que ce sont les partis et eux seuls qui ont tort D s lors la seule d marche qui puisse conduire des r sultats plus satisfaisants est de modeler les activit s et les structures des organisations politiques sur les besoins et les volont s de ceux qu elles ont vocation rassembler A l gard de tout homme en toute situation la question que doit se poser un parti n est pas comment le faire adh rer pour qu il renforce les moyens permettant de remplir les t ches que nous nous sommes fix es mais bien comment pouvons nous l aider s organiser l o il est pour qu il puisse tudier plus efficacement les probl mes qui l int ressent et conduire les actions dont il prouve le besoin alors seulement peut venir cette autre question comment pouvons nous inciter une fraction des hommes orga nis s de la sorte se m ler de t ches plus complexes ou plus diversifi es mais cette derni re question est sans difficult s d s qu il existera autour d un parti une vaste zone de groupes comit s associations clubs et autres cercles l approvisionnement
270. ntrat social en France fragilit qui se traduit notamment par une extravagante consommation de Constitutions depuis 1789 et plus g n ralement par le faible respect accord aux institutions et aux normes juridiques Ou faut il invoquer ce propos la disparition avec la royaut d une source de l gitimit traditionnellement admise Ce qui est s r c est qu il fallut plus d un si cle pour que la grande masse des poss dants et certaines institutions comme l glise acceptent enfin la R volution de 1789 et la R publique qui en tait finalement issue Faut il penser par ailleurs que la France longtemps tenue pour la fille a n e de l glise ait trouv dans ce d saccord s culaire entre l autorit tem porelle qui s imposait tous et l autorit spirituelle qu une grande majorit reconnaissait l occasion d un d chirement profond La difficile s paration de l Eglise et de l Etat au d but du si cle incite le croire En tout cas la gauche fran aise est n e en s opposant au capitalisme l Etat et l Eglise si bien qu on a pu la d finit parfois comme l addition de minorit s et de r volt s On y a longtemps trouv plus de protestants de juifs de franc ma ons ou d ath es que de catholiques pratiquants plus d intellectuels et d enseignants que d employ s ou de fonctionnaires plus d habitants des grandes villes les d racin s que de provinciaux et enfin ce qui est plus normal plus d o
271. ocratie le pouvoir du peuple exerc par le peuple pour le peuple Si elle le craignait faute de pouvoir changer de peuple il ne resterait qu changer de gauche Une bonne partie de celle ci il est vrai s en tient toujours consciemment ou non la tradition jacobine de la souverainet populaire Le peuple y appara t comme un souverain pisodique qui doit d l guer ses pouvoirs aux repr sentants qu il lit et retourner sagement ses pr occupations quoti diennes sauf quand ses repr sentants l appellent aux armes aux barricades ou derechef aux urnes Cette conception tr s globale de la souverainet populaire a conduit renforcer la centralisation tatique h rit e de l Ancien R gime On la retrouvera lorsqu il s agira de plaider le dossier d une d centralisation radicale chapitre 6 R seau aux mailles multiples le pouvoir appelle une d mocratie aux formes non moins multiples et de plus aux formes modelables selon les exigences sp cifiques des fonctions sociales r gir et des centres de d cision d mocratiser Les besoins de la d mocratie ne sont videmment pas les m mes en mati re d information et en mati re de planification Mais cette 1 voir les rapports difficiles qu entretiennent les maires et les conseils de r sidents on devine l ampleur de ces secousses Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 106 vidence est de celles sur lesquelles la r flexion de la gauche non
272. oins et l ont aussi concr tis en propositions sp cifiques Certes ces arbitrages et ces laborations pourront susciter des r actions hostiles de la part d int r ts qui s estimeront l s s au passage C est tout ce que vous faites pour les anciens combattants et des querelles d cole entre tenants de projets concurrents r actions et querelles qui sont de nature provoquer un d chet lectoral Mais l inverse l obtention d un programme r el o ce qui est crit l avance Peut tre ensuite tenu n est elle pas de nature compenser largement ce d chet Si la S F I O avait su refuser son investiture Lacoste en souvenir de la guerre d Alg rie elle aurait sans doute perdu beaucoup de voix en Dordogne mais n en aurait elle pas du m me coup gagn beaucoup plus dans le reste du pays Il en irait de m me si l on substituait un projet r for mateur de vagues et verbeux programmes lectoraux La m thode du contre plan s apparente de plus pr s celle du projet r formateur plus exactement elle en est un cas particulier Le contre plan 1 De tels projets n ont de sens que s ils naissent d une laboration collective Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 191 dans son principe est destin rassembler en un contre projet oppos au plan l ensemble des contre propositions et des variantes exprimant m me ch ance que le plan les objectifs que la gauche estime n cessaires et
273. oire r cente Cela suppose un choix raisonn des caract res pr pond rants que l on reconna t ce proche pass et la situation actuelle et de m me un jeu rai sonn d hypoth ses pour situer les principaux n uds de probl mes qui vont se former jauger la probabilit de leurs divers d nouements concevables et discerner les constellations ma tresses qu ils peuvent dessiner C est donc un jeu mais au sens o l entend la th orie des jeux celle qui fonde toute strat gie Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 27 D ailleurs toute r flexion politique fait appel une certaine id e de l ave nir L ennui est que trop souvent dans la gauche fran aise cette id e n est gu re labor e si bien que croyant envisager l avenir on y inscrit sourdement de lourds et vagues pr jug s enracin s dans l action pass e les exemples ne feront pas d faut Il faut galement choisir un horizon Il serait certes facile et stimulant de raisonner tr s long terme mais avec quel b n fice On peut par exemple extrapoler la croissance d mographique mondiale et d couvrir que d ici peu de si cles elle conduit par del famines et guerres pronostiquer pour le monde entier une densit de population sup rieure celle de HongKong aujourd hui On en d duira que la ma trise mondiale des naissances et la colonisation plan taire sont l horizon lointain de notre histoire et que par cons quent l difi
274. oisie en ont t le r sultat Il suffit de rappeler l norme prestige de l adjectif petit dans notre vocabulaire politique pour mesurer la grande puissance de cette mentalit En outre c tait ne l oublions pas une petite bourgeoisie dominante rurale L es prit national s est donc charg des valeurs propres a une soci t rurale r gie par le Code civil le bien au soleil le bas de laine l go sme corrig par une solidarit qui s arr te aux voisins imm diats Depuis 7945 la d gradation des bases m mes de cette civilisation petite bourgeoise s est op r e en catastrophe On peut en prendre la mesure en notant que dans le partage du revenu national les revenus de la propri t et de l entreprise allant aux particuliers en absorbaient encore la moiti en 7938 et n en forment plus qu un bon quart trente ans plus tard Cependant les valeurs petites bourgeoises survivent leur terre nourri ci re La mythologie fran aise de l pargne continue d accorder la terre et a l or une fonction aussi privil gi e qu irrationnelle La propri t fonci re extr mement dispers e par l effet du Code civil demeure un blocage puissant oppos aux plus timides actions L expropriation pour cause d utilit publique se dilue de ce fait en proc dures longues et on reuses Le remembrement des sols cultivables s ternise Une ventuelle municipalisation des terrains b tir ou un r am nagement des structures fonci
275. oisivet on adjoigne ce potentiel les adultes inactifs mais 1l serait d raisonnable de surestimer cet appoint Le principal secours d ailleurs utilis est l immigration si bien que le travail des Alg riens et des Portugais auxquels la France est loin d tre aussi reconnaissante qu elle le devrait appara t objectivement comme la condition d une prolongation g n rale des tudes On ne peut en une g n ration allonger de cinq ans la scolarit moyenne ou avancer de cinq ans la retraite sans craser les actifs d un surcro t de travail D o des choix in luctables et qui jusqu pr sent ont t op r s de fa on implicite c est dire l aveuglette L AU DEL DU TRAVAIL Retour la table des mati res Une abondante litt rature rarement d nu e d arri re pens es int gratrices a t consacr e aux changements manifestes dont la vie quotidienne est le lieu L abondance l quipement m nager la motorisation l invasion estivale de l Italie et de l Espagne le tranquillisant quotidien distribu par la t l vision ont ainsi fait l objet de maintes analyses La dynamique de la consommation a t si puissante depuis vingt cinq ans que le ralentissement de la croissance annuelle des revenus r els c est dire du pouvoir d achat suffit lorsqu il intervient cr er un net malaise social Il est certes l gitime de tendre canaliser et corriger cette dynamique pour faire une meilleure
276. omplie Si l arsenal des instruments de politique conomique s est rouill depuis 1963 ce n est pas seulement par l effet m canique du trait de Rome mais aussi par celui d un lib ralisme d lib r ou sournois voire d un manque d imagination On pourrait en multiplier les exemples dans l ordre financier l Etat banquier comme dans l ordre industriel des initiatives publiques et en maints autres domaines Simultan ment l essentiel est d apercevoir les besoins objectifs qui peu vent tre communs toute l Europe ind pendamment des coalitions politiques au pouvoir chez chacun des Six ou des nouveaux venus ind pendamment de leurs pr f rences Certains de ces besoins sont d ordre conjoncturel soit qu il faille comme en 1965 1967 relancer des conomies h sitantes en synchronisant les politi ques de relance soit qu il faille comme en 1969 coordonner ces politiques pour ma triser les risques inflationnistes sans casser l expansion D autres besoins sont d une nature moins changeante Les p rils dont la crise mon taire internationale menace l Europe peuvent la rendre solidaire De m me ses besoins en certains domaines sp cifiques ceux notamment qui rel vent d une technologie avanc e et dispendieuse a ronautique recherche spatiale utilisation industrielle de l nergie nucl aire branches avanc es de la chimie de l lectronique production d ordinateurs etc L Voir chapitre 3 Robert Fossaert
277. on c g tistes peut donner au syndicalisme la confiance en soi sans laquelle il continuera de tourner autour des actes politiques programmes lections etc comme un chat autour d une jatte de lait trop chaud Seule cette unification permettra au syndicalisme de s engager pleinement dans ce qu on a appel la politique contractuelle ou m me d exploiter pleine ment les possibilit s qui lui sont virtuellement ouvertes par le jeu de la planification et des autres proc dures publiques de concertation Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 200 Seule enfin cette unification lui permettra de se doter bonne chelle des moyens techniques qui lui font d faut d exercer sur les pouvoirs publics une pression suffisante pour obtenir les concours mat riels et financiers requis pour l exercice de son r le officiel et d exercer sur ses propres adh rents l action ducative n cessaire au rel vement sensible des cotisations Tout ceci sans parler de l effet d entra nement qu aurait cette unification aupr s d une partie des non syndiqu s et de l effet de concurrence transfor matrice qu en subirait la C G T car ce qui vaut pour le P C vaut aussi pour la C G T cette diff rence pr s que cette derni re sera peut tre plus sensible la concurrence et que ses adaptations p seront sur le P C Dans cette perspective un r le d cisif est d sormais imparti la C F D T ce n est pas une opinion mais un fait Ce f
278. on in luctable des deux structures Ceci est le lot de tout Etat indus triel d velopp Les Etats Unis l U R S S et la France connaissent galement cette intrication de l conomie et de l Etat m me si cette situation commune ne conduit pas n cessairement au m me r sultat la m me politique Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 96 L interp n tration de l conomie et de l tat se traduit par le fait que les centres de d cision politico administratifs et les centres de d cisions cono miques d une taille suffisante sont fonctionnellement articul s les uns sur les autres par de nouveaux liens l achat vente et l directive politique dilu e en d cision administrative s adjoignent l incitation la n gociation la concer tation La possibilit et le besoin d une programmation d une planification naissent irr sistiblement dans ce contexte DES POUVOIRS DIFF RENTS Retour la table des mati res Malgr cette interp n tration les pouvoirs qui s exercent dans le domaine de l tat et dans celui de l conomie sont ils d une nature diff rente La th orie politique inspir e par Max Weber incline le penser L tat disposerait d un pouvoir de qualit sup rieure parce qu il d tiendrait le mono pole de la force l gitime Il impose des contributions il dispose par ses juges du pouvoir d attenter aux biens la libert ou m me la vie des citoyens qui enfreignent les loi
279. ons contractuelles avec les organismes les plus divers et que chacun de ces contrats ait comport l enga gement d offrir chacune des organisations co contractantes un nombre donn de mandats en vue de la d signation des candidats aux l gislatives Imaginons m me que les mandats ainsi n goci s selon l importance intrin s que des contrats et des organisations co contractantes atteignent au total un nombre sup rieur celui des mandats dont de par ses statuts propres et de par les engagements pris l organisation politique elle m me dispose au profit de ses propres adh rents Faut il ensuite beaucoup d imagination pour penser que la convention d partementale qui rassemblera tous ces mandats pour proc der au choix des candidats aboutira m me si elle est le si ge d empoignades s v res un choix plus significatif et plus efficace que celui qui r sulte des proc dures et des errements actuels Non il est bien vident que la difficult est en amont dans l invention et l exp rimentation d une politique contractuelle mais qu supposer ce stade atteint un immense progr s en d coulerait L organisation politique s irrigue rait d une vitalit nouvelle en mettant l une de ses pr rogatives essentielles dans le domaine contractuel Sans doute y aurait il quelques difficult s techni ques surmonter pour que la proc dure propos e puisse fonctionner aussi bien l chelon municipal qu celui des pr s
280. ons de personnel il serait tout fait regrettable qu elle s inclin t passivement c est d une offensive qu il s agirait alors et pour tout dire d une offensive politique portant le d bat sur la place publique et le confortant d actions lat rales aupr s des organisations politiques de la gauche Car enfin pourquoi penser que seuls les partis auraient quelque chose demander aux syndicats et non l inverse Naturellement le recours la politique contractuelle peut tre sur le plan local ou sectoriel d un grand secours dans cette strat gie unificatrice Mettre de la sorte l accent sur la C F D T n implique pas qu elle seule ait jouer un r le actif Pour la tr s grande majorit des militants et des dirigeants de tout niveau de F O comme de la F E N la r unification syndicale peut tre v cue au del des initiales m fiances de boutique comme une victoire comme le r sultat de leur propre offensive L objectif en effet n est videm ment pas de fondre F O et la F E N dans une C F D T demeurant ce qu elle 1 Ceci concerne les dirigeants locaux et f d raux autant que les conf d raux Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 201 est aujourd hui ni de subordonner tous niveaux les dirigeants actuels de F O et de la F E N aux actuels dirigeants de la C F D T Pareille fusion suppose n cessairement une refonte g n rale des structu res des statuts et des directions syndicales et sans dou
281. onsid r s bien au contraire comme de la belle et bonne monnaie qu il faut faire travailler Les banques pr tent donc ces dollars contre int r t qui en a besoin ainsi est n le march de l euro dollar qui est fort prosp re Tout se passe comme si la banque centrale d un pays quel conque pr tait une somme aux Etats Unis et pr tait la m me somme par interm diaire interpos bien s r son client sur le march de l euro dollar Pour les tats Unis tout va bien un cr dit tranger ponge leur d ficit Pour le pays qui accepte les dollars en monnaie de r serve niais ne s interdit pas de les faire travailler en attendant de les red penser il y a en somme un pr t l tranger aux tats Unis sans pr l vement de pouvoir d achat sur place Ainsi en acceptant les dollars comme r serves chaque pays aide les tats Unis r duire chez eux le risque d inflation la guerre du Vietnam ou les exportations de capitaux peuvent d s quilibrer la balance des paiements sans mettre l conomie am ricaine en p ril Chaque pays court aussi le risque de provoquer chez lui une pouss e inflationniste L accroissement de ses r serves augmente sa masse mon taire et rend plus d licat l ajustement de celle ci aux besoins de l conomie natio nale On ne peut pas dire comme Rueff que l inflation est export e des Etats Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 38 Unis vers les pays qui acceptent les dollars
282. ont pr ts se battre pour garder un label qui garderait leurs yeux quelque valeur lectorale m me s ils d tiennent encore de ci de l quelques positions influentes dans les partis ou les corps lectifs 1ls n en sont pas moins trangers la gauche socialiste qu il s agit de former Etrangers parce qu ils ne sont porteurs d aucun projet significatif pour la France de demain et pour sa transformation socialiste Pour donner vie une organisation politique qui ait chance de r g n rer la gauche socialiste de la reconstruire il faudra finalement rejeter ces hommes Mais cette bataille s v re ne doit pas pour autant se mener coup d anath mes ni s assigner pour objectif la cg mort politique des exclus Il ne faut pas oublier en effet que ces hommes irrecevables comme socialistes peuvent tre assez souvent de bons r publicains c est dire des hommes ayant une conception lib rale de ce que doivent tre le jeu des institutions politiques ou le r gime des libert s publiques Il est donc souhaitable qu en les repoussant la gauche socialiste leur offre une chance de se constituer en une force politique du centre gauche en un n o radicalisme de bon aloi Il est possible que dans certaines conjonctures politiques ce courant aujourd hui diss min dans les diverses organisations dites de gauche ou sur leurs confins r ussisse m me en s unifiant se parer d un prestige occasionnel si l affaire
283. ord au niveau des entreprises Il faut en effet que la r unification s op re dans des conditions claires qu elle ne soit ni porteuse de scissions prochaines ni enveloppable dans un enthousiasme pr matur pour l unit syndicale totale Or on peut craindre que l enthousiasme unitaire des adh rents de base soit stimul et canalis par les organisations c g tistes et que celles ci tentent de faire pr valoir l id e d une r unification syndicale totale Cette perspective souhaitable terme est tour fait contre indiqu e en premi re tape En effet tant que le rapport des forces au sein de la gauche n aura pas t radicalement modifi l unit syndicale totale serait quivoque Par modification du rapport des forces il faut entendre la formation d une centrale syndicale faisant le poids au regard de la C G T et la formation d un parti politique faisant un poids suffisant au regard du P C Tant que la premi re de ces conditions ne sera pas remplie l unit syn dicale entra nerait une pr pond rance de l influence c g tiste au sein de la centrale unifi e On peut discuter du point de savoir si cette unification syndicale accentuerait utilement la pression transformatrice exerc e sur le P C Mais m me supposer qu il en soit ainsi on aboutirait n anmoins la diffusion de l influence communiste r nov e sur la centrale syndicale unifi e et l on perdrait le b n fice de l effet stimulant que la r unifi
284. organisation politique de la gauche une politique con tractuelle est n cessaire En d autres termes les organisations politiques doi vent par tous les moyens s efforcer de se lier contractuellement avec les autres associations groupes syndicats clubs comit s etc d j existants Elles doivent de m me tendre multiplier les correspondants de ce genre en susciter de nouveaux Parler de contrat en la mati re c est faire r f rence une forme juridique contraignante Un contrat est un engagement bilat ral ou multilat ral dont l objet les modalit s et la dur e sont clairement pr cis s Par nature le contrat est d une plasticit infinie il peut intervenir du niveau local au niveau national ou pourquoi pas europ en Il peut concerner deux dix ou cent organisa ons Il peut tre pass entre des organismes aux statuts juridiques les plus divers de l ph m re comit de vieilles institutions ayant pignon sur rue Il peut tre reconduit ou abr g amend ou d multipli etc De m me son contenu pratique peut varier l infini si bien qu il faut laisser l imagination le soin d en explorer les possibilit s et l exp rience le soin de d canter peut tre quelques contrats type aux clauses bien ajust es aux besoins En voici d hypoth tiques exemples Dans une zone industrielle une section d un parti et une union locale de syndicats signent avec un bureau d tudes un contrat pour co
285. ou pouvoir centriste PART DE LA PRODUCTION contr l e par le secteur public 10 8 12 20 30 le secteur multinational 10 15 25 8 12 le secteur priv national 80 63 77 58 72 PART DE L INVESTISSEMENT assur e par le secteur public 35 25 40 40 60 le secteur multinational 10 15 25 S 10 le secteur priv national 55 35 60 30 55 Quelle que soit la valeur de ces chiffres ils permettent de se repr senter clairement ce que sera la position des firmes nationales priv es coinc es entre le secteur public et le secteur sous contr le tranger Pour s en tenir la seule hypoth se d une gauche r formatrice ayant acc d au pouvoir quelle attitude peut on attendre des firmes priv es nationales Li es au secteur public par de multiples march s li es l Etat par un endettement non n gligeable sid rurgie et bien d autres branches menac es de diverses concentrations ces firmes priv es seront sans doute souvent pr tes contracter avec des firmes publiques des administrations tatiques ou r gionales les conventions les plus diverses pour assurer leur propre activit Autant 1l faut s attendre de leur part une lutte mort contre la nationalisation et contre tout autre collecti visation formelle autant il est probable que le processus spontan d inter p n tration d interd pendance croissante des firmes peut tre mis profit pour canaliser et orienter
286. ources normales gr ce auxquelles elles auraient Pu d velopper davantage leur action et l tendre de nouveaux domaines Bref il a nui au dynamisme du secteur publie de l conomie La carence r sulte en partie de cette politique financi re en partie aussi du souci politique de ne point porter ombrage au secteur priv apr s la vague des nationalisations Toutes les firmes nationalis es ont continu d exercer leur activit presque comme avant souvent avec les m mes dirigeants toujours avec les m mes m thodes et avec les m mes objectifs Elles n ont pas t incit es red finir leur vocation ni leur gestion Conservant leur vocation ancienne elles n ont pas t pouss es prendre des initiatives nouvelles et quand la tentation leur en est venue elles en ont t le plus souvent emp ch es La production de machines outils est en France l une des faiblesses essentielles de l industrie et Renault initiateur pour ses besoins propres des machines transfert pouvait s y lancer on l en a emp ch Le charbon est d tr n par d autres sources d nergie mais la carbochimie est une activit d avenir il a pourtant fallu attendre 1967 pour qu enfin les Charbonnages de France engendrent Chimie de France enfant d ailleurs encore ch tif La S N C F a t cantonn e dans son domaine sans tre incit e d aucune mani re tendre son activit tous les transports Robert Fossaert Le contrat socialiste
287. ours russe devait tous comptes faits rendre le socialisme plus exemplaire D AUTRES CRISES ET LA GUERRE Retour la table des mati res Parmi les accidents politiques majeurs que l on vient d envisager aucune place n a t faite aux puissances autres que les deux Grands Est ce dire que la succession de Mao Ts toung ou de de Gaulle voire celle de Wilson seront d une faible port e Pour la Grande Bretagne la r ponse est n gative au mieux on peut esp rer que ce pays malade sera entr en convalescence avant la fin de la pro chaine d cennie Pour la France il ne sera point trop de tout ce livre pour en juger avec d tail Pour la Chine enfin la r ponse renvoie une inconnue majeure d j ren contr e celle de l efficacit de la strat gie r volutionnaire mondiale qu elle pr conise Restent deux autres nations de premier plan l Allemagne et le Japon On retrouvera la premi re en traitant de l Europe Quant au Japon sa lanc e actuelle tend faire de lui avant longtemps la troisi me puissance conomi que mondiale Mais il y a dans son expansion conomique un l ment de fragilit financi re qui pourrait en faire la principale victime d une ventuelle crise conomique En outre c est un pays dont la sph re d action est presque de tous c t s cantonn e par l U R S S la Chine et les Etats Unis L ensemble 1 L incertitude des proc dures par lesquelles les dirigeants russes se
288. out pouvait s arranger cahin caha en quelques trimestres en ne laissant subsister du malaise accumul depuis quelques ann es qu une envie diffuse de changer de politique de changer d quipe de donner sa chance une gauche point trop agressive ni maladroite UNE QUATRI ME TENDANCE Retour la table des mati res Tout pouvait s arranger sauf accident impr vu et la zone o m rissait l impr vu chappait aux regards ce n tait pas l un des th tres habituels des luttes politiques La turbulence tudiante oscillait entre la page des faits divers et les petites nouvelles de politique int rieure moins qu elle n apparaisse comme un acc s local d une fi vre internationale On attendait que jeunesse se passe sans voir que le nombre des tudiants avait plus que doubl en cinq ans que la r forme Fouchet n tait pas re ue comme l une quelconque des innom brables petites r formes scolaires ou universitaires lanc es depuis dix ans que l enthousiasme suscit de ci de l par l h ro sme vietnamien ou le lyrisme de Guevara politisait quelques quipes loin de toute influence des forces politi ques traditionnelles Celles ci n avaient aucune perspective exaltante offrir la jeunesse tudiante ni m me aucune connaissance claire de ses besoins La plate forme commune de la F G D S et du P C f vrier 1968 proposait bien d affecter des cr dits quivalant 6 du revenu national au service national de
289. parfois tardif o leurs int r ts directs sont en cause la sc ne politique est n cessairement peupl e par les autres Et les d cisions politiques qui doivent embrasser la totalit des donn es et des contraintes du moment sont n cessairement prises par ces autres Si les d cisions sont mauvaises ou m diocres on peut m me sur les Aventins s en trouver confort ne l avait on pas annonc Mais la p rennit de la droite au pouvoir et la m diocrit des performances de la gauche ne sont elles pas dues pour une bonne part ce refus de l engagement total ce complexe des mains sales Sans doute ne faut 1l pas souhaiter que les syndicats pour s en tenir eux en viennent se consid rer comme de pures forces politiques Ils ont leur mission sp cifique et il importe qu ils la remplissent en toutes circonstances et qu ils gardent en toutes circonstances les moyens de la remplir m me si la gauche est au pouvoir m me si le pays est devenu socialiste La qualit de la gestion politique que r alisera la gauche la qualit m me du socialisme en d pendent 1 Jacques Julliard Esprit mars 1969 pp 534 535 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 204 Mais de cette n cessaire autonomie l abstention de toute action politique la distance est immense En pratique elle est toujours combl e dans l impro visation les jours de temp te on l a bien vu pendant la guerre d Alg rie comme
290. parit s mon taires vont jouer un r le croissant dans la politique des Etats D s lors au lieu d tre un outil relativement neutre au service des chan ges la monnaie internationale sera un probl me en soi r soudre sans toujours tenir compte des cons quences des solutions adopt es sur le volume et l expansion des changes A la limite l ombre de 1931 se profile l hori zon cette ann e l alors que la grande crise commen ait s apaiser la d va luation de la livre sterling entra na un d mant lement du syst me mon taire de l poque et par ses cons quences relan a approfondit et prolongea la crise mondiale CRISE OU CATACLYSME Retour la table des mati res Des remarques qui pr c dent une conclusion se d gage l une ou l autre des prochaines r cessions p riodiques peut d raper jusqu la crise l affai blissement de la volont et de la capacit coordinatrices des Etats peut y conduire la plus forte conductivit des changes internationaux peut en tendre le champ et en aggraver l intensit la rupture mena ante du syst me 1 D j la volont de r duire le d ficit ext rieur et de sauvegarder la monnaie l emporte trop souvent sur celle de r duire le ch mage de stimuler le plein emploi l Angleterre et la France en sont ce stade d plorable Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 39 mon taire international peut en accro tre l ampleur et la dur
291. part la satisfaction des besoins collectifs de consomma tion ce qui est la condition premi re de toute r sistance l am ricanisation des modes de vie Mais il serait illusoire de penser que pareille correction soit facile d cidable d autorit et r alisable bref d lai Ce serait ignorer la force des besoins inassouvis des millions de Fran ais aux revenus faibles ou moyens La contagion de l abondance a pour effet de transformer la nature m me de la mis re plut t que de la r duire La mis re ancienne qui est le d nue ment survit au milieu d une soci t trop souvent indiff rente les immigr s beaucoup de vieux tous les handicap s en demeurent les victimes principales A leurs c t s une mis re moderne est apparue Cette mis re l est confor table elle na t pr cis ment de l endettement massif auquel trop de jeunes m nages sont contraints pour se loger s quiper la mode de ce temps et disposer d une automobile Le non Patrimoine la dette quivalant plusieurs ann es de salaire en sont le r sultat Encore supportable tant que l expansion demeure forte ce r sultat se r v le dramatique d s que la menace de ch mage r appara t m me lointaine Un conditionnement massif est op r pour susciter et aviver les besoins de consommation individuelle la publicit et tout simplement le spectacle Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 63 ostentatoire de la consommation des nan
292. partiels Ni la th se du tout ou rien ni celle du patient grignotage ne sont exactes La premi re sous estime le poids des luttes sociales pr c dant la prise du pou voir l exemple de mai 1968 l a montr s agissant du droit syndical dans Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 174 l entreprise Mais ce n est pas l une victoire absolue un acquis d finitif ce n est qu un point d appui nouveau il vaudra ce que sauront en faire les syndicats dans les ann es venir donc dans des contextes variables La revendication de pouvoirs nouveaux et la d fense des pouvoirs d j acquis sont indispensables en tous domaines et tous niveaux Elles per mettent d laborer peu peu la r forme d ensemble du r seau du pouvoir et dispensent de l improviser le moment venu Elles peuvent aussi conduire des succ s occasionnels Elles constituent l enjeu qualitatif de toutes les luttes sociales non pas en opposition avec les revendications quantitatives mais en compl ment de celles ci Par ailleurs il faut se souvenir que tous les pouvoirs ne naissent pas d un conflit tendant r agencer des institutions existantes comme si la quantit totale de pouvoir existant dans une soci t tait fix e une fois pour toutes En fait la soci t conquiert des pouvoirs suppl mentaires par son d veloppement technique par son expansion conomique et peut tre plus encore par l volu tion spontan e ou forc e de ses struc
293. pects li s d un m me processus a mal r sist l preuve des faits Selon les pays l effectif de la classe ouvri re se Stabilise ou commence d cliner la France arrive au premier de ces stades Parall lement les activit s non industrielles prennent une part croissante dans l accumulation du capital De ce fait les r f rences traditionnelles la mission historique du prol tariat et au r le dirigeant de la classe ouvri re sont en p ril mesure que leur support cesse de cro tre En revanche une autre id e s culaire voit sa confirmation renouvel e d ann e en ann e celle suivant laquelle l accumulation du capital s accompa 1 M me dans l hypoth se o l effort maximum serait d cid pour nourrir le Tiers Monde le plein emploi de toute l actuelle paysannerie fran aise ne pourrait tre assur Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 58 gne d une puissante tendance la centralisation et la concentration En clair l industrie et les autres branches de l conomie se concentrent en unit s de plus en plus grandes li es entre elles de plus en plus souvent par des liens d affiliation de vastes groupes Point n est besoin de fournir d exemples alors que l action spontan e des firmes et la politique des pouvoirs publics tendent depuis quelques ann es rendre plus comp titives les structures de l conomie fran aise et que la presse quotidienne en rapporte les effets massifs
294. pitalisme et c est l une des th ses essentielles de ce livre sa port e n a pas encore t clairement mesur e par le gros de la gauche c est que le changement rapide a succ d la stabilit ancienne La croissance conomique et l urbanisation se sont prodigieusement acc l r es l empire colonial et le protectionnisme ont disparu l int gration europ enne s est amorc e les modes de vie les syst mes de pens e la diffusion de la culture sont en plein bouleversement L avalanche des changements se poursuit depuis vingt ans et va se prolonger La politique avait autrefois r soudre des probl mes d ajustement Elle est faite aujour d hui de mutations provoquer ou canaliser Une seconde novation contemporaine de la premi re a t provoqu e par le nouvel quilibre international A l ancien jeu complexe des puissances a succ d une r gle nouvelle Deux grandes puissances nucl aires se tiennent en respect minorent le jeu des autres puissances et figent plus ou moins le partage id ologico politique du monde La France vit ainsi dans un espace politique nouveau elle change plus puissamment que Jamais et ce changement ouvre de nouvelles possibilit s d action politique Mais elle est inscrite dans un champ de forces international Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 23 qui rend beaucoup plus difficile sinon impossible d atteindre l ancien objectif de la gauche r volutionnaire Cependant une trop
295. plus M me d un difice syndical l autre les itin raires sont complexes pour aller du building C F D T a la r sidence F E N il faut traverser l immeuble F O dont les portes restent parfois obstin ment ferm es Les v ritables explorateurs de la gauche se reconnaissent ceci aucune impasse ne leur est inconnue C est en effet dans les traverses et les culs de sac de ce quartier contourn que se cachent les constructions les plus pittores ques les pavillons modern style de Technique et D mocratie ou d Objectif 72 ne pas confondre avec Horizon 1980 esquisse ambitieuse dont il ne reste plus rien les baraques occasionnelles des colloques et des comit s les locaux enfum s o s inventent d improbables revues les demeures isol es o r vent les nostalgiques d un pouvoir perdu ou insaisissable 1 Voir acques Mandrin Socialisme ou social m diocratie ditions du Seuil 1969 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 199 Les meilleurs guides ach vent toujours leurs visites comment es par un pieux p lerinage ils montrent au spectateur bahi le vaste terrain vague o campera demain au retour de son exil la l gion des gaullistes de gauche Ils pourraient tout aussi bien l achever l autre extr mit du quartier par ce camp retranch o des bandes juv niles ont plant leurs drapeaux rouges et noirs Mais les guides sont gens respectables et ils voudraient ignorer ces intrus ces hommes de
296. pter les structures de l administration ou la production de l universit aux besoins de l conomie moderne respecter la fronti re entre le secteur public et le secteur priv mais rendre le premier plus efficace et concentrer le second le tout en s engageant avec une prudente hardiesse sur la sc ne europ enne et internationale telles sont les principales vis es de cette tendance Sa devise est en somme le mouvement dans l ordre et toute sa contra diction tient dans ces deux mots Assez de mouvement pour que les fruits de Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 73 l expansion nourrissent une expansion accrue et apaisent les revendications paysannes et salariales afin que l ordre soit maintenu Pas trop de mouvement pour que les situations acquises ne soient pas d rang es au point de troubler l ordre LA TENDANCE DE LA PETITE FRANCE Retour la table des mati res L ennemi quotidien et l indispensable alli de cette premi re tendance est form par les gros bataillons de la petite France celle qu il faut secouer parce qu elle fait obstacle la modernisation mais celle sans qui le jeu politique perdrait son contrepoids massif la bourgeoisie des P M E la petite bour geoisie de la boutique et de l artisanat la paysannerie du bl et de la betterave soutenue pour la d fense des prix agricoles par celle de la viande et du lait la bourgeoisie enfin de l arm e de m tier et des professions lib ral
297. que ses industriels Les syndicats n avaient pas la force de stabiliser les revenus Aucune distribution sociale ne venait compenser massivement les pertes La crise tait donc in vitable et immaftrisable N e d occasions diver ses elle survenait avec r gularit parce que le cycle d accumulation du capital tait assez r gulier compte tenu des techniques en usage et de l lasticit pro cur e au syst me par le vaste champ conqu rir progressivement pour l annexer au march capitaliste conomie marchande paysanne et domaines coloniser Elle clatait le plus souvent dans l conomie alors la plus d ve lopp e celle de l Angleterre d o elle propageait ses effets dans le monde capitaliste entier par contraction des changes internationaux Bref la crise mondiale tait le fait d conomies nationales incoordonn es en leur sein et li es entre elles par des changes internationaux bons conducteurs Naturellement ce sch ma tendait se compliquer mesure que l aire capitaliste s tendait et parall lement les crises tendaient s approfondir Apr s la guerre de 7974 1918 qui en termes conomiques eut par bien des c t s les m mes effets qu une crise classique deux complications apparurent de surcro t l accession des Etats Unis au r le d conomie dominante et la quasi destruction de l ancien syst me mon taire international Elles donn rent la crise de 1929 une ampleur sans pr c dent LA CRISE
298. ques plus que de strat gies Fallait il changer de personnel et peut tre aussi de m thodes ou garder les m mes Le vote a tranch Mais la forte ressemblance des programmes et des options des deux prin cipaux concurrents atteste que la France repue de grandeur et de grandi loquence a voulu se jeter dans le confort la bonne vie le calme Pendant quelques semaines le pays a communi dans les valeurs de la petite France il a r v d une situation miraculeuse o l branlement de Mai serait non advenu o les mutations en cours seraient ni es ou r solues sans toucher au statu quo La gloire imm diate du paisible Poher apr s le r f rendum d avril 1969 a d abord traduit cet lan Le ralliement imm diat de Pompidou aux m mes th mes leur a permis de s panouir Mais tous les r ves sont brefs et le pays a commenc de d couvrir d s le lendemain de l lection que celle ci n avait pratiquement r solu aucun probl me hormis le choix des hommes La troisi me tendance de son c t s est trouv e d chir e entre toutes les forces nouvelles ou traditionnelles qui se r clament d elle La gauche a ainsi offert un spectacle paradoxal qui m rite analyse De juillet 1968 avril 1969 elle n avait rien entrepris de significatif Le P C avait fait le gros dos sous l orage puis avait patiemment entrepris de capter le reflux d apr s Mai il avait ainsi repris le contr le du S N E Sup et enregistr autour des
299. r formes de structure destin es modifier le r seau des pouvoirs le garnir de contre pouvoirs rendre possible l accession et le maintien de la gauche au pouvoir Car cette accession ne l oublions pas est contraire l ordre naturel des choses et la prise du pouvoir est un processus parfaitement dissym trique la droite et le centre s y inscrivent tout naturelle ment la gauche d range Il lui faut d ranger beaucoup et vite et fort pour durer Non moins important est cet autre besoin qui en de du pouvoir condi tonne tout progr s il lui faut inventer un nouveau comportement politique tisser de nouveaux liens avec la masse du pays reconqu rir l audience des cat gories sociales qui se d tournent d elle r agencer ses structures propres bref se red finir et non par des mots mais en actes Pour amorcer pareille volution partir du marasme actuel c est l invention d une politique contrac tuelle qui est propos e Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 26 Le contrat socialiste L environnement L horizon Retour la table des mati res Donc le premier probl me est d valuer la marge de man uvre que l envi ronnement international laisse toute politique fran aise Il ne s agit videm ment pas de pr dire des v nements pr cis Mais si l avenir ne se laisse pas deviner ce n est pas pour autant un espace informe on peut explorer les avenues qu y projette notre hist
300. r au magma gaulliste Mais tout ce livre entend montrer que la gauche n a de chances de revenir utilement au pouvoir que si elle remplit les conditions suivantes assembler en un projet r formateur coh rent toutes les aspirations au progr s social affirmer sa vocation majoritaire son caract re normal voir chap 3 s identifier un nouveau projet national c est dire r v ler l identit nationale actuelle inventer une structure d organisation et une d marche strat gique nouvelles reconstruire la gauche Toutes ces conditions convergentes forment le v ritable obstacle franchir Que la gauche sache franchir cet obstacle et elle saura du m me lan sauter la barre de l lection pr sidentielle ou capter le courant de quelque nouveau mai 1968 ou plus g n ralement prendre le pouvoir dans les conditions et les formes que l histoire lui offrira En d autres termes discuter de l lection pr sidentielle comme d une proc dure ren dant plus ou moins difficile l acc s de la gauche au pouvoir est un probl me secondaire Le vrai probl me est on l a dit de savoir comment durer au pouvoir et de savoir qu y faire Le reste suivra L une des rares exceptions est Maurice Bertrand Pour une doctrine militaire fran aise coll Id es 1965 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 166 fonction polici re m rite d tre tudi e en tenant compte son niveau des r formes propos es dans l ordre judiciaire et dan
301. r la gauche tel est l objet de ce livre Est ce dire que LA gauche existe et qu on peut en faire l objet de r flexions utiles En v rit la gauche est une notion aussi vague que vivante et l on verra que d en mieux cerner les contours actuels et futurs est l une des conditions de tout renouveau politique Mais il faudra du temps et quelques d tours pour d caper ce vocable Au d part il suffit de noter que la gauche est prise ici dans son acception la plus large comme l ensemble des individus et des organisations qui se r clament d elle N e du classement parlementaire tendue au corps lectoral et m me toute la soci t la gauche inclut de la sorte des formations politi ques qui pr sentent des candidats aux lections parti radical S F I O Convention P S U P C Ligue communiste et d autres qui par faiblesse ou par principe s en sont tenues cart es clubs comit s groupuscules etc Elle comprend galement la plupart des organisations syndicales et bon nombre de formations dont l objet proclam est social plus que politique telles les f d rations de locataires ou les coop ratives de consommation A travers tous ces organismes elle int gre ou influence des millions de Fran ais adh rents plus ou moins ph m res lecteurs plus ou moins versatiles 1 Si quelque temps apr s la parution de ce livre des lections l gislatives devaient offrir aux partis de gauche l occasion d
302. rait d raisonnable d imaginer ici et aujourd hui ce que pourrait en tre le contenu d taill Leurs lignes g n rales en revanche se laissent clairement apercevoir Lier toute tape nouvelle de l int gration la sauvegarde corr lative des moyens de r aliser en France tel oit tel chapitre du projet r formateur Ne renforcer les pouvoirs europ ens n avancer vers un Etat europ en que si la politique d finie tend assurer l autonomie croissante de l Europe Garantir les int r ts europ ens en France dans l exacte mesure o notre libert d action serait assur e LES TATS UNIS SOCIALISTES D EUROPE Retour la table des mati res Il reste que cette voie ne peut correspondre aucun quilibre durable De tels compromis peuvent rendre de r els services une gauche acc dant au pouvoir Ils peuvent m nager quelques ann es de d lai Ils ne peuvent tenir lieu d orientation politique fondamentale Celle ci peut se d finir par r f rence un objectif lointain mais non irr aliste en juger par la situation pr sente et prochaine de l Europe dans le monde b tir les Etats Unis socialistes d Europe occidentale Vers cet horizon plusieurs lignes d action se dessinent 1 Par exemple en s interdisant toute nationalisation en ce domaine ou plus g n ralement en se tenant pour li par toute indemnisation que d ciderait la Cour de justice euro p enne Robert Fossaert Le contrat socialiste 19
303. ransferts publics dont on voit se dessiner l ampleur dans le financement de la politique agricole commune deux tendances tr s fortes se profilent d j l une vers l homog n isation des fiscalit s d o parmi d au tres un probl me politique majeur pour la France o les imp ts directs actuels sont faibles n en d plaise la C G C l autre vers le gonflement du budget europ en au d triment des budgets des tats S agissant des cessions d actifs c est toute la question de la nationalit des entreprises qui se trouvera progressivement pos e avec une vigueur d autant plus grande que l Europe sera elle m me plus ouverte aux capitaux ext rieurs On sait que les juristes ont fait de la nationalit des soci t s l un des d bats d licieux du droit international priv Est ce la localisation du si ge social ou la nationalit des principaux actionnaires qui fournit le crit re distinctif On peut se d sint resser de cette querelle byzantine pour formuler autrement le probl me Qui pour une entreprise donn e a pouvoir de prendre les d cisions cl s A quelles incitations et quels contr les politiques ce pou voir est il en fait soumis Et subsidiairement de quel pouvoir politique d pend il de modifier radicalement cette situation Il appara t alors que dans la d cennie venir beaucoup de firmes aujour d hui fran aises ou allemandes ou italiennes ces trois titres vont voluer vers un statut
304. rat socialiste 1969 107 On peut observer enfin que la d fense des libert s publiques tout comme celle des droits individuels contre l arbitraire la garde vue la torture et autres vices de notre poque suppose une infrastructure sociologique ou institutionnelle tr s forte Au si cle dernier il fallait peu d argent pour fonder un journal et quelque ind pendance d esprit pour d fendre avec acharnement un particulier La soci t tait ainsi faite qu il se trouvait souvent des bourgeois ind pendants pr ts soutenir de telles causes individuelles surtout si quelque autre bour geois point trop obscur en tait victime C tait tout le moins la belle poque des libert s individuelles bourgeoises Aujourd hui les bases de cette ind pendance d esprit se sont r duites presque rien Les individus libres de toutes contraintes sont rares L tat ou le salariat les contiennent de mille mani res La r invention de la d mocratie passe donc galement par la cr ation ou l am nagement d institutions de centres de d cision ayant mission de d fendre les libert s publiques ou de soutenir les droits individuels et disposant de moyens ad quats Presque tout reste faire pour d finir de telles institutions et pour en imposer la fondation La chambre des machines Retour la table des mati res Si le pouvoir est bien cette organisation complexe que l on a analys e deux cons quences pr cises en d co
305. ravera la capacit de man uvre la mani re de de Gaulle de son successeur cette force politiquement mieux situ e que le gaullisme originel Incitera les autres forces politiques se mieux d finir et l on peut douter par exemple que le pompidolisme de gauche succ de du gaullisme de gauche avec autant de facilit que Pompidou a succ d de Gaulle cette force enfin s appliquant avec moins de souplesse une France toujours en changement et toujours instable pourra donner ses dirigeants la tentation d imposer s ils ne peuvent plus composer Souligner l instabilit de la France c est faire appel des donn es d exp rience Notre pays ballott par les volutions massives de ses structures et 1 Voir Marx les Luttes de classes en France et le 18 Brumaire de Louis Bonaparte Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 82 d chir par les tensions de son histoire r cente para t souvent tituber On conna t le th or me de No l No l qui tablit que la population fran aise peut doubler presque instantan ment On a pu le v rifier Paris et en d autres villes en 1944 quand les foules qui acclamaient P tain furent suivies quel ques jours plus tard par d autres foules qui acclamaient de Gaulle On a pu le v rifier encore Paris entre le 13 et le 30 mai 1968 quand on vit la sympathie de la petite bourgeoisie baller de la manifestation des gauches celle du gaullisme On aurait pu le
306. regroupent ces forces sociales on pourra juger de leurs volutions spontan es probables et du parti que la gauche pourrait en tirer Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 152 La caract ristique centrale de la France d ici 2980 1985 semble devoir tre celle ci le syst me que composent ces trois tendances va se modifier progressivement et profond ment C est celle de la petite France ou de l ordre ancien qui spontan ment doit perdre de sa puissance il d pend des luttes politiques qu elle perde aussi de son influence Dans la France d sormais sans fronti res l industrie le com merce la banque et d autres secteurs moins importants de l conomie urbaine sont appel s changer de centre de gravit la grande arm e des petits patrons sera d cim e Sans doute serait il illusoire d imaginer que d ici une dizaine d ann es Renault sera d j devenue une firme moyenne parmi d autres Mais il serait plus illusoire encore de ne pas pr voir une r duction sensible du nombre et de l influence des actuelles P M E L effectif total des firmes sera peut tre faiblement modifi mais ce ne pourra tre que par une extension de l artisanat de service des boutiques li es des cha nes et des sous traitants De ce fait il est probable que des discontinuit s sociales de plus en plus nettes s tabliront entre les firmes modernes les s quelles des P M E un artisanat plus touffu et un commerce plus organis
307. respectivement les principes ordonnateurs de ces deux ensembles Mais sit t affirm e cette distinction doit tre profond ment corrig e D abord parce que certains sous ensembles de l conomie les groupes et les grandes firmes pris chacun isol ment red couvrent leur chelle une situation apparent e celle du domaine tatique Chacun est un ensemble hi rarchis de centres de d cision et conna t des probl mes semblables a ceux d toute administration de toute bureaucratie ceux dont traite la sociolo gie des organisations Ensuite parce que la sph re tatique comprend aujourd hui de tr s nombreuses entreprises conomiques Or le statut de ces entreprises et qui voque Elles s inscrivent dans la structure conomique et subissent si loi celle du march Mais avec plus ou moins de force elles sont galement int gr es la structure tatique et sa hi rarchie D o une contradiction profonde entre leurs deux lois qui se traduit par une politique de prix irrationnelle par une fid lit plus grande de l investissement des firmes publiques aux objectifs planifi s etc Enfin et surtout il faut prendre conscience des cons quences majeures qu entra ne le quasi remplissage de tout l espace compris entre le ciel et la terre pour suivre l image inspir e de Hegel remplissage r sultant de la prolif ration de l Etat et de la centralisation du capital il s ensuit une inter p n trati
308. rigeants effectifs actionnaires minoritaires ou managers l abri de l agitation des actionnaires Mais elle tire l essentiel de ses ressources additionnelles de l autofinancement c est dire des profits non distribu s Elle r gle en outre avec une bonne pr cision le volume de ses profits pr sents et prochains pour disposer de ces ressources et de cette libert Pareil r glage la conduit certes fa onner les besoins des consommateurs par le mart lement publicitaire ou souvent aussi peser sur les d cisions tatiques pour obtenir les d bouch s n cessaires mais il la conduit galement pr voir ce que pourront tre les besoins et les capacit s du march national ou international pour y ins rer durablement une produc tion dont les d lais de r ponse de la recherche la s rie se sont allong s plusieurs ann es On touche ici de par la croissance m me des firmes un d placement important des limites du capitalisme 1 C est dire pour permettre la mise en oeuvre de techniques nouvelles et de nouvelles formes d organisation du travail 2 Le Nouvel tat industriel Gallimard 1968 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 134 DEUX LE ONS Retour la table des mati res Sans d former exag r ment l analyse de Marx on peut affirmer qu elle correspondait cette tape de l histoire o L Etat planait au ciel d une soci t civile lointaine voir chap 4 L nine et d
309. rmissent Mais ces progr s ne sont pas la mesure des besoins qui se dessinent dans trois domaines au moins D abord la part du commerce ext rieur s accro t dans l quilibre conomi que de chaque nation Donc une fraction croissante de l activit conomique rel ve d actions ou d incitations que l Etat national ne peut exercer seul d incitations que d autres Etats peuvent par action ou par omission rendre inefficaces Ce fait est sp cialement sensible au sein du March commun o la croissance des changes a battu tous les records mondiaux En 1957 chacun des Six pouvait de son c t ma triser d une certaine mani re sa propre cono mie Depuis lors une part des six conomies a chapp l emprise de l un ou l autre des six gouvernements sans tre soumise a une nouvelle politique co nomique organis e la bonne chelle On pourrait penser que cette carence r sulte du fait que l Europe des Six n a pas su faire progresser son organisa tion politique au rythme de son int gration conomique C est en partie vrai mais l n est pas l essentiel la vague libre changiste qui d ferle depuis 1958 1860 dans le monde capitaliste tout entier a partout fait appara tre des degr s divers ces marges croissantes incoordonn es Le commerce international libre est bon conducteur d impulsions conomiques on l a vu Le commerce inter national en croissance rapide est en outre un d r gleur virtuel des politiques
310. ront pour contenu et pour moteur les v ritables probl mes recens s plus haut Le nier revient prendre la politique pour une fin en soi L admettre autrement qu en paroles est n anmoins si difficile que l habitude tend l emporter Elle est aussi de croire que le pays peut se passionner autant que la classe politique pour le jeu des institutions politiques Ses vraies pr occupations ne sont pas l mais bien dans le traitement r el des probl mes majeurs qui gouvernent sa vie Et s il lui arrive de se passionner un jour d lection ou de d bat t l vis pour un conflit centr sur la marche des institutions politiques cette passion n est pas tr s diff rente de celle qu il accorde au Tour de France ou aux jeux Olympiques La premi re illusion r duit la politique aux jeux du cirque L ILLUSION TECHNOCRATIQUE Retour la table des mati res La seconde est de nature technocratique Pris isol ment tous les probl mes recens s se laissent r duire un ensemble simple de donn es Si celles ci sont nombreuses et si leurs liaisons sont complexes le secours d un mod le conom trique rendra le tout math matiquement maftrisable sauf Perdre au passage tout ce qui se refuse la mesure Ajoutons cela une id e bien inten tionn e mais rudimentaire des besoins humains et une id e fort exigeante des contraintes financi res respecter et le tour est jou il appara t alors que le probl me quel qu i
311. rrait tre courte arbitrages nationaux dans l laboration d un projet r formateur gestion des organes nationaux presse etc fixation des strat gies politiques et lectorales dans des domaines d limit s lections l gislatives et pr siden elles groupes parlementaires conflits conomiques ou politiques d ampleur nationale etc concertation ou n gociation avec d autres organisations nationales sanction des infractions locales explicitement pr vues Pour le reste l chelon national aurait surtout exercer une mission de coordination et de p dagogie Quels moyens d action Aucun moyen d action politique n est d daigner a priori Ni le bulletin de vote ni la manifestation ni la gr ve ni l occupation des lieux de travail ou d tudes ni d autres actions plus violentes encore ne sont privil gier ou d daigner Accepter toute cette gamme de moyens comme l ments d une offensive ou d une riposte gradu es n est d ailleurs pas l objet d un d bat de principe m me certains des pacifistes les plus imp 1 Sous des formes diff rentes la situation est la m me au sein du P C F et plus forte raison du mouvement communiste international Il n y a pas de doctrine communiste coh rente et g n ralement admise Point n est besoin pour en juger de lire entre les lignes de l Humanit Il est un bien meilleur test c est d observer la prodigieuse diversit d opinions des communistes au moment o il
312. rrait elle aussi faire preuve de quelque initiative Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 43 UNE CRISE POLITIQUE AUX TATS UNIS Retour la table des mati res L avenir probable des tats Unis et de l U R S S retentit de la sorte sur l univers entier D o le poids de cette question quelque accident politique majeur peut il se produire en l un ou l autre de ces pays Dans les deux cas la r ponse est ouverte quoique de fa on diff rente On peut se demander en effet si une crise politique plus ou moins grave n est pas en train de m rir aux Etats Unis Le trouble des esprits et le d r glement partiel des institutions politiques sp cialement des partis ne sont que des indices superficiels Plus profond ment ce qui est en cause tient au m rissement des contradictions propres ce pays le conflit racial souvent doubl d un conflit social implicite le d sarroi de larges couches de jeunes et de salari s dans l univers de l abondance n o capitaliste demain peut tre si la crise conomique r appara t le r veil de tensions sociales plus classiques et aussi dominant le tout l articulation sur le reste du monde Puissance pr dominante les tats Unis sont de ce fait au c ur de toutes les contradictions mondiales Ils ont sans cesse d finir leur fonction internationale et ils s y d chirent in vitablement Mais ce d chirement peut demeurer superficiel tant que leurs engag
313. rri re pens es et m me les absences de pens e Trop souvent le socialisme est ainsi ce qui sera ou ce qu on fera plus tard quand les choses iront autrement quand le capitalisme aura t remplac Remplac par quoi par le socialisme juste ment Et l on continue de tourner en rond RECHERCHE D UNE D FINITION Retour la table des mati res Le socialisme d signe aujourd hui une collection disparate de situations ou d actions pr cises qui se r duisent ceci c est le d nominateur commun de l U R S S des d mocraties popu laires de la R D A la Tch coslovaquie de la Chine de la Cor e de la Mongolie du Vietnam et de Cuba sans oublier la Yougoslavie ni l Albanie C est aussi d une autre mani re le d nominateur commun des politi ques men es pendant des d cennies dans les pays scandinaves c est encore le plus petit commun d nominateur de politiques men es en divers pays du Tiers Monde c est enfin le d nominateur commun de politiques men es ou projet es en divers pays d velopp s de la social d mocratie allemande au travaillisme australien Naturellement quand les forces socialistes en tous pays se d clarent telles et affirment tendre la r alisation du socialisme dans leur zone d action elles op rent de s v res discriminations dans ce stock d exp riences et compl tent ce qu elles en retiennent par l expos d intentions souvent fort vagues Par del c
314. rs ne peut tre con u comme la substitution au statu quo de quelque distribution nouvelle parfaite ment quilibr e et clairement pr tablie jusque dans ses d tails Ce ne peut Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 173 tre qu un processus complexe le r sultat longtemps pr caire ou int grable de pressions men es bon terme mais a renouveler sans cesse Par ailleurs ce partage ne doit pas tre con u comme le fruit de batailles p riodiques entre lesquelles un quilibre temporaire s tablirait Il suffit d observer le reflux qu a subi apr s juillet 1968 l influence syndi cale dans les entreprises petites et moyennes o elle venait de na tre ou de rena tre en mai puis d observer la stabilisation voire la remont e partielle qui a pu r sulter de la nouvelle l gislation promise Grenelle et promulgu e en janvier 1969 puis d observer encore le lent grignotage jurisprudentiel auquel cette nouvelle l gislation risque d tre soumise pour admettre que jamais cette mer ne reste tale Il en va de tous les pouvoirs comme du pouvoir syndical ils oscillent et fluctuent partir des institutions qui leur servent de point d ancrage Le pouvoir patronal lui m me s est vid de tout contenu vers la fin mai 1968 comme se vide de sang le cerveau d un homme en syncope Apr s juin ce pouvoir patronal ne s est pas retrouv comme avant Quelque chose avait chang mais ce quelque chose est d ordre
315. rtains accidents politiques majeurs Sans jouer au proph te on peut donner un aper u plus concret mais purement illustratif de ce que pourrait tre une crise du type envisag recul de la production dans plusieurs pays stagnation des revenus de la majorit et recul des revenus d une minorit de la population pendant deux ou trois ans ceci par exemple en Europe et aux Etats Unis avec une situation plus grave en Grande Bretagne et peut tre dramatique au japon ou dans les nouveaux pays capitalistes comme le Br sil la C te d Ivoire ou la Turquie Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 41 Les crises politiques Retour la table des mati res Ces accidents politiques majeurs peuvent tre des plus vari s Par commodit on peut n anmoins les ranger en trois s ries La premi re la plus classique est celle des guerres et des r volutions dans le Tiers Monde La seconde qui fera peut tre l originalit des ann es 7970 est celle des crises politiques chez les deux Grands La derni re celle de LA guerre LES R VOLUTIONS DU TIERS MONDE Retour la table des mati res Sur la premi re s rie celle des guerres et des r volutions dans le Tiers Monde le pronostic n est ni difficile ni douteux elle se poursuivra Il serait oiseux de dresser la liste des guerres potentielles dont notre monde est gros comme les ceintures volcaniques sur les cartes g ographiques ces points chauds s encha
316. s S1 l on saute de Louis Philippe Charles de Gaulle le spectacle change consid rablement l image ancienne d un tat couvrant comme d un d me c leste la terre lointaine o s activent les hommes les substituts abondent La presse des P M E utilise volontiers celle d une pieuvre bureaucratique touffant les pau vres entreprises par ses tentacules r glementaires et fiscaux Le maquis des lois et des circulaires le monde kafka en des bureaux la pompe phynances ubuesque ont aussi leurs adeptes L tat jadis ext rieur la soci t civile la p n tre de toutes parts Il et devenu le principal acteur de la vie conomique le premier des propri taires le plus grand des patrons le plus gros des banquiers mais aussi la plus active des petites s urs des pauvres l instituteur et l informateur et encore le coordinateur et le planificateur de l conomie La soci t civile le lui a bien rendu Les individus pars qui la formaient jadis se sont rassembl s en de vastes conglom rats Les capitalistes ont pros p r jusqu former des monopoles immenses Les ouvriers les paysans les tudiants et jusqu aux fonctionnaires se sont agr g s en syndicats D o plusieurs analyses nouvelles dont aucune n est fausse ni compl te L une privil gie la centralisation du capital qu ont op r e les groupes finan ciers souligne leur interp n tration avec le pouvoir d Etat et caract rise notre soci t comme un
317. s il peut aussi les exproprier pour cause d utilit publique il peut encore les mobiliser ou r quisitionner leurs biens en cas de guerre il peut enfin m me en temps de paix imposer par la force publique le respect de l ordre tabli Mais cette th se n est pas convaincante Il est une autre violence tout aussi l gitime mais beaucoup plus sournoise qui vient appuyer puissamment le pouvoir conomique c est de lui que d pend faut il le souligner le salaire et l emploi de tous les salari s le d bouch de tous les producteurs ind pendants la client le de tous les commer ants et de toutes les professions lib rales Cette violence latente et diffuse vaut bien l autre pour ce qui est de fonder et de maintenir l ordre social Si bien qu l inverse de Max Weber la th orie politique marxiste analyse en d autres termes les rapports entre le pouvoir tatique et le pouvoir cono mique Elle accorde la primaut ce dernier tant qu il s agit d analyser ce qu est la soci t capitaliste l Etat appara t ainsi comme le gardien des int r ts g n raux de la bourgeoisie dominante Puis par une dialectique fort com pr hensible elle renverse cette priorit d s qu il s agit de d finir les moyens de transformer la soci t capitaliste l Etat devient alors l enjeu central le probl me fondamental de toute r volution est celui du pouvoir dans l Etat souligne L nine Les ph nom nes physiques sont soumis
318. s La petite propri t donne au capital une base de masse c est le cul de plomb du syst me L autre solution ne va pas sans risques en abandonnant la petite propri t au jeu du march capitaliste elle pourrait conduire des tensions graves qui faute d tre canalis es par les forces de gauche nourriraient des r flexes poujadistes sinon fascistes Aussi bien ne s agit il pas d abandonner ces cat gories sociales leur sort mais de substituer des politiques qui se veulent d fensives et qui sont tout au plus 1 Dont certaines pourront tre petites mais fond es sur une technique nouvelle et non plus sur l exploitation d une main d uvre arri r e Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 153 retardatrices d autres politiques qui adaptent les r formes n cessaires aux besoins des int ress s La paysannerie pauvre a besoin d une politique de restructuration et non d un soutien inconditionnel des prix elle a aussi besoin d une politique de d veloppement industriel plus que de l lectrification des carts ruraux ou de la pr servation de lignes ferroviaires d sert es elle a enfin besoin d une poli tique d animation r gionale mais qui ne dilapide pas ses bienfaits n cessaire ment limit s sur les quasi d serts comme sur les r gions ranimables L artisanat et la boutique ont besoin non d une immunit fiscale mais de structures coop ratives Les P M E n ont d autre besoin que d tre abandon
319. s On conna t la situation actuelle du March commun voir chapitre 2 Que va devenir cette Europe naissante au cours des dix ou quinze prochaines ann es O VA L EUROPE Retour la table des mati res D s que de Gaulle se fut retir le ralliement l Europe de tous les leaders de l ex majorit gaulliste s est effectu sans d lai Entre Poher et Pompidou c tait qui serait le plus europ en On peut donc penser que les blocages gaullistes seront d sormais lev s Que va t il se passer d s lors L adh sion de la Grande Bretagne et de ses associ s pourrait tre acquise en peu d ann es elle deviendrait ensuite effective au terme d une transition de quelques ann es Ainsi largie l Europe acc l rera sans doute la r alisation de son union conomique en harmonisant les r gles non douani res qui influencent les changes et en unifiant plus ou moins le gros de la fiscalit indirecte Spontan ment elle sera aussi mieux dispos e que jamais des baisses sensibles du tarif ext rieur commun la combinaison du tarif actuel avec les droits scandinaves ou britanniques venant renforcer et relayer l effet du Kennedy Round Dans ce contexte nouveau il est probable que la restructuration des firmes ira bon train et que la politique agricole commune trop on reuse et contraire la tradition de l Angleterre et de ses alli s sera r duite peu de choses Par ailleurs la poursuite de la crise mon taire i
320. s es inflationnistes et de leur vitesse de propagation il Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 68 para t raisonnable de voir dans l inflation le corollaire de l individualisme petit bourgeois les s quelles parfois normes des protections douani res et fiscales accord es aux petits paysans aux petits commer ants aux petites professions lib rales et qui par ricochet b n ficiaient souvent plus aux moins petits de ces m mes branches n avaient pas qu un co t direct mesu rable dans le budget de l tat mais aussi un co t induit en ce qu elles offraient maintes occasions de profiter en l amplifiant du glissement des prix Ce dernier facteur est d crit au pass parce que le type de concurrence qui s est tabli apr s dix ans de March commun semble l avoir presque d racin au moins dans toutes les activit s d j directement expos es la concurrence internationale Telle est du moins l impression que donne le mouvement des prix apr s mai 1968 en d autres p riodes cette conjoncture e t t favorable une inflation plus forte que celle que l on a effectivement observ e LA GAUCHE ADDITION DE MINORIT S ET DE R VOLT S Retour la table des mati res L individualisme et le jacobinisme partout d celables ne suffisent cepen dant pas rendre compte de toutes les particularit s de notre temp rament national Peut on par exemple imputer eux seuls la fragilit du co
321. s les options majeures de politique internationale ont tre contr l s et c est l affaire du Parlement e __ Ensuite l humeur du pays doit tre sans cesse jug e donc exprim e ce que le Parlement excelle faire sans qu il faille pour autant attacher cette expression de l opinion publique le pouvoir de mettre ais ment tout gouvernement en p ril e Enfin la structure des organes autonomes doit tre fond e sur une multiplicit de sources de pouvoir s quilibrant les unes les autres et le Parlement peut tre cette fin un excellent relais de l opinion g n rale pour d signer une partie des dirigeants d autorit s nouvelles en mati re d information ou de justice par exemple mais aussi en mati re universitaire ou dans tel autre domaine sp cialis Ainsi le Parlement garde une raison d tre d autant plus forte que l tat l ex cutif central est mieux pur et renforc Mais pour qu il remplisse ces t ches deux conditions au moins sont remplir La premi re est que chaque parlementaire dispose des moyens en hommes et en cr dits lui permettant de remplir sa fonction qu il n ait que cela faire quitte n tre r ligible qu un temps limite et que l institution parlementaire ajuste ses m thodes de travail ses fins actuelles notamment en rar fiant les s ances pl ni res et en donnant pouvoir de d cision sauf appel ses commissions r nov es La seconde condition est que le Par
322. s celui de la d centralisation et d autre part qu avoir une politique de l arm e et de la conscription ne se r duit pas la d finition d une politique internationale et d une politique militaire 1l y a aussi une institution dot e de son inertie propre et qui appelle examens et propositions L conomie mixte Retour la table des mati res La refonte de l Etat ne doit pas se limiter son domaine propre c est dire la seule sph re admimistrative Le secteur public de l conomie m rite galement bien des r visions POUR LA NATIONALISATION DES NATIONALIS S L essentiel cet gard est sans doute ici encore de briser l quivalence 211 entre public ou nationalis et tatique L tat n est pas la Nation E D F ou Renault n ont pas tre la propri t de l Etat pour servir l int r t collectif Si l on cherche pr ciser ce que signifie pratiquement cette propri t de l Etat dans le secteur nationalis trois mod les se pr sentent Renault correspond au premier le Parlement a vinc le propri taire de cette firme pour sanctionner sa collaboration pendant la guerre il y en avait bien d autres et pour donner une satisfaction symbolique la classe ouvri re Devenu propri taire l Etat s est content de nommer un P D G et de souscrire tardivement quelques augmentations de capital Pour le reste tout donne penser que cette firme v cu comme une firme
323. s centres au contr le et la pression populaires Ici il s agira d imposer un ajustement de l action aux besoins des administr s L il s agira de provoquer l clate ment ou la r forme int grale d organismes devenus incapables de remplir leur mission Plus g n ralement il s agira de faire clater le syst me abusivement et dommageablement centralis qui nous est propre pour largir la marge pratique d autonomie de nombreux centres Souvent encore il s agira de tendre vers la cr ation de nouveaux centres de d cision pour donner forme de nouveaux int r ts sociaux 2 Toujours enfin il s agira d inscrire une active participation contestation dans tous les lieux o se coordonnent les d cisions de centres nombreux ou importants et pas seulement au Parlement La gauche syndicale et politique doit apprendre se servir mieux qu elle ne l a fait du Plan de l I N S E E du Conseil national du Cr dit du Conseil sup rieur de l ducation et de la Recherche et de dizaines d autres lieux de ce genre Elle doit aussi tenter sans cesse de s ins rer en bien d autres lieux plus discrets Un seul exemple l a t on jamais vue proposer une autre proc dure de pr paration budg taire avant le d bat parlementaire que celle qui subordonne actuellement quarante ministres et leurs services quarante administrateurs de la rue de Rivoli et s est on demand combien il est en France de syndicalistes et de maires de responsa
324. s d serts fran ais 5 paysans 20 ouvriers 75 tertiaires Le poids changeant des classes sociales La France difficile gouverner Tous urbains Tous bacheliers L au del du travail La marmite nationale Individualiste ou citoyen L ternel jacobin La France inflationniste La gauche addition de minorit s et de r voltes L cume Trois tendances La tendance de l expansion La tendance de la petite France La tendance du progr s social et des droits acquis Des tendances aux organisations Trois illusions L illusion politique L illusion technocratique L oubli de l avenir Un probl me 4 Les pouvoirs L tat partout La soci t civile loin de l tat L Etat dans la soci t civile Trois pouvoirs La justice Le Parlement L ex cutif Le pouvoir dans la soci t civile Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 7 Le r seau du pouvoir L interp n tration de l conomie et de l tat Des pouvoirs diff rents Des centres de d cision Un syst me de d cisions Les luttes sociales Contre pouvoirs et r formes de structure Un r seau sans fronti res La d mocratie La d politisation La d mocratie r inventer Des libert s publiques La chambre des machines Les possibilit s Mai 1968 Les trois
325. s de l avant guerre sinon Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 188 du XIXe si cle Certes les bureaux d tudes co tent cher s ils sont de qualit Mais pour un temps la mobilisation de tout le travail b n vole que les hommes des bureaux d tudes sont pr ts consacrer des tudes politiques et l agencement cette fin de structures de travail suffiraient sinon pourvoir aux besoins du moins combler une partie des lacunes les plus graves Tout parti tout syndicat qui ayant un adh rent ou un sympathisant ing nieur cadre ou chercheur sp cialis ou sp cialisable dans cette activit l emploie uniquement au train train des r unions et autres collages d affiches commet un gaspillage inadmissible Cette premi re direction celle de la recherche doit inclure la recherche des utilisations Rares sont les hommes politiques qui savent appr cier toute la port e d une recherche nouvelle Certains attendent des chercheurs et des intellectuels en g n ral de quoi illustrer leurs id es pr con ues et les com munistes ne sont pas seuls s illustrer de la sorte D autres sont l aff t de la nouveaut du d tail qui fera mouche du document qui mettra un ministre en difficult dans quelque joute oratoire mais cette utilisation l gitime de sous produits passe c t de l essentiel Rares sont ceux qui ont besoin de comprendre pour ajuster leur action Un dialogue multiforme entre chercheurs
326. s de tous ceux des pouvoirs que peuvent l gitimement revendiquer les villes et les r gions les universit s autonomes et autres tablissements publics les services de s curit sociale etc et tous ces niveaux l ouver ture syst matique de l administration non seulement par une politique d accor tes relations publiques mais par une association organique des administr s l art d administrer telles sont les trois orientations principales qui paraissent m riter d tre concr tis es sur le tas et selon les besoins exprim s dans chaque secteur par des projets pr cis dont la gauche devrait se faire l agent l avocat et le r alisateur Il faut encore aller plus loin Il est en effet des fonctions aujourd hui remplies par l Etat ou par ses reflets faiblement autonomes et qu il serait bon de sortir totalement de la sph re tatique ou administrative Les institutions vis es ne doivent certes pas tre rendues l initiative priv e mais l int r t collectif dont elles sont porteuses gagnerait s exprimer par un agencement non tatique la qualit de notre vie d mocratique et demain de notre socia lisme en d pend En voici deux exemples Idem moins mais qui s en plaindrait et pour quelles raisons que la majorit en place ne s empare de telles orientations 2 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 162 On a beaucoup d battu du statut de l O R T F et l accord semble unanime pour car
327. s diverses Les unes qui nous importent peu d coulent de la menace r elle ou virtuelle que le communisme repr sente pour l entreprise priv e on con oit que dans sa g n ralit le patronat soit anti communiste et doive le demeurer Les autres racines qui sont ici d cisives tiennent aux communistes eux m mes et d coulent du stalinisme 1 Celle donc qui se reconna t au crit re d fini p 134 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 194 L volution stalinienne du socialisme sovi tique de 1923 19 53 n a pas fini de produire des effets en retour La d koulakisation la terreur polici re les purations les proc s les raillions d intern s la satellisation des pays voisins sont loin d tre oubli s m me si par certains c t s l U R S S actuelle semble avoir rectifi ces erreurs et s il se peut r par ces crimes La crainte des rechutes staliniennes est fond e sur deux faits l absence de garanties contre leur retour et la persistance parfois aigu de certaines mentalit s et de certains comportements typiquement staliniens L absence de garanties a t illustr e depuis 1953 par le fait qu aucune proc dure intelligible et aux effets pr visibles ne r gle la succession des quipes dirigeantes sovi tiques Brejnev et Kossyguine finiront ils comme Khrouchtchev comme Boulganine comme Beria comme Staline ou comment Cette incertitude fondamentale est d une immense port e car les
328. s entrent en opposition ou quittent le parti Or ce test s applique depuis 1945 des centaines de milliers de personnes car nul ne l ignore le plus important parti fran ais serait celui des anciens communistes Mais il ne na tra jamais en sortant du parti ces hommes ont perdu leur d nominateur commun qui tait une pratique nimb e d une id ologie qu ils prenaient de moins en moins souvent pour une doctrine ou pour une th orie scientifique Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 208 nitents surent s opposer l occupation nazie les armes la main L objet du d bat est plut t d appr cier les moyens que requi rent les circonstances Mais la r ponse doit varier comme ces derni res Quels modes d organisation Sans doute est ce ici qu il faut souhaiter un large effort d imagination Ni la section d entreprise ni la section locale ni leur embo tement pyramidal jusqu au centre national ne sont des panac es C est en fonction des besoins des hommes des possibilit s qu il est souha table d organiser autour d un axe central ayant qualit pour conna tre de tous les probl mes de sa comp tence dans un ressort g ographique donn une grande diversit de groupes de comit s de branches sp cialis es Il est m me souhaitable que place soit faite sur des bases variables d finissables presque cas par cas toutes les formes d affiliation individuelle ou collective partielles ou temporaires
329. s et cat gories sociales se modifie rapidement Le d clin des classes paysannes n a pas pour corollaire un gonflement de la classe ouvri re mais plut t un renforcement des classes moyennes urba nes Ce dernier est d autant plus spectaculaire que deux mouvements crois s s y inscrivent Certaines des classes moyennes traditionnelles celles de l arti sanat et plus encore de la boutique ont amorc un d clin d j sensible et qui s acc l rera probablement En revanche la part principale de la progression est imputable aux ing nieurs techniciens et cadres de tous rangs On com prend d s lors que la dispute soit vive chez tous les marxistes pour savoir si ces l ments font partie de la classe ouvri re s en rapprochent ou en demeu rent essentiellement distincts Par del ce d bat il faut souhaiter qu un regain d attention soit accord notamment par les sociologues et les statisticiens l analyse des classes sociales Le vaste monde des bureaux des laboratoires et des facult s demeure m connu alors que les principaux changements dans la structure de la population viennent s y inscrire 1 Tableau tabli selon la m thode d crite dans l Avenir du capitalisme partir des recen sements de 1954 et de 1962 et des premi res indications disponibles sur le recensement de 1968 Les estimations relatives 1975 et 1985 sont fond es sur diverses pr visions d volution de la population tablies notamment par l
330. s la gauche serait condamn e la gestion loyale La voie du repli national conduit en toutes hypoth ses des difficult s conomiques majeures restriction des changes mesures de r torsion insta bilit mon taire accrue risque d un retour au protectionnisme interne avec Et aussi d int r ts fran ais inscrits en d autres pays ce qui accro t d autant leurs possibilit s de r torsion Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 143 toutes les cons quences qu aurait ce retour dans notre pays qui poss de en la mati re une tradition s culaire Celle du saut soudain vers l tat europ en conduit quant la r alisation des projets sp cifiques de la gauche vers des difficult s politiques majeures vers l impuissance D INDISPENSABLES COMPROMIS Retour la table des mati res La voie suivre pour surmonter ces contradictions doit tre diff rente c est celle du compromis Elle doit tendre tout la fois r server la plus grande capacit possible l tat national et cheminer vers un tat europ en dot de pouvoirs ad quats et menant une politique socialiste Elle doit combiner cette fin les pressions et les accords transitoires Au d part aujourd hui ou dans quelques ann es la premi re action dans cette voie doit tre de ressaisir tous ceux des moyens d action qui ont t laiss s l abandon sans que cet abandon soit n cessaire l int gration d j acc
331. s la position d un banquier qui s ou vrirait lui m me un cr dit illimit et non remboursable En acceptant ces dollars dans leurs r serves les banques centrales des pays d Europe et d ailleurs valident ce cr dit Tout se passe alors comme si ces pays consen taient un cr dit aux tats Unis pour relayer celui que le banquier am ricain s est accord lui m me A ce stade donc tout va bien Mais si le flux de dollars suppl mentaires continue de s couler pendant des ann es les banques non am ricaines en viennent in vitablement s inqui ter Un banquier ne peut pas accepter d ouvrir des cr dits illimit s sans en voir la sortie Il l accepte d autant moins qu il n a en la circonstance aucune initiative puisque le banquier am ricain d cide seul C est pourtant ce qui s est pass depuis une dizaine d ann es D o la m fiance progressive dont le dollar a fait l objet En outre partir de 1966 l apport annuel d or suppl mentaire au syst me mon taire s est tari parce que les achats sp culatifs des particuliers et les besoins industriels ont absorb toute la production nouvelle Certaines des cons quences de la pr minence du dollar ont alors t examin es de plus pr s On a soulign le fait que les dollars re us par les banques non am ricaines ne sont pas consid r s comme des titres de cr ance correspondant au cr dit accord et que l on doit stocker jusqu leur recou vrement Ils sont c
332. s ne s est gu re m l de l agencement interne de la firme C est seulement dans l ordre de la politique financi re des entreprises que la nationalisation a chang quelque chose et pas toujours en mieux Les actionnaires ont d cider d ventuelles augmentations de capital L Etat pour sa part s est longtemps refus largir le capital de ses firmes et les a orien t es vers de trop larges emprunts obligataires pour financer leurs investisse ments Mais surtout il a abus de sa qualit de propri taire pour imposer ses firmes des obligations d raisonnables politique de bas tarifs d gr vements au b n fice de certaines cat gories sociales tels les divers tarifs r duits de la S N C F etc Ce qu il y a de critiquable dans cette fa on de proc der doit tre clairement compris Il n est pas d raisonnable de pratiquer des prix ou tarifs minor s au b n fice de telle ou telle cat gorie sociale c est affaire de d ci sion politique dans une situation donn e et en vue d objectifs sociaux qui peuvent le justifier Mais de telles d cisions supposent que la collectivit nationale s impose un sacrifice au b n fice d une cat gorie d favoris e donc que l imp t vienne financer cet effort Bien au contraire l Etat a trop souvent lud cette solution et a impos ses firmes de minorer elles m mes leur compte les prix ou tarifs Il a de la sorte d sorganis leur gestion Il les a galement priv es des ress
333. s ou qui ass chent la tr sorerie de leurs entreprises pour filer en Suisse les vendredis o la d valuation semble imminente L Voir chapitre 4 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 67 LA FRANCE INFLATIONNISTE Retour la table des mati res Individualiste et centralis e la France est elle galement inflationniste La th se est souvent soutenue On souligne volontiers les r flexes inflation nistes des patrons fran ais sensibles aux commodit s de la hausse des prix pour financer les hausses de salaires et la croissance des investissements On d nonce de m me l action inflationniste de syndicats trop revendicateurs et de paysans crisp s sur la d fense de leur pouvoir d achat par la manipulation des prix agricoles sans parler des commer ants amplificateurs par profession de toutes les hausses venant leur port e Tous ces sympt mes ont effectivement t observables en diverses conjonctures mais ils ne suffisent pas diagnostiquer le mal Au d part il faut se souvenir que l inflation est dose mod r e chose n cessaire elle ac compagne in luctablement toute expansion soutenue La seule politique totalement anti inflationniste que l on sache pratiquer passe par un sensible ralentissement de la croissance et par l acceptation d un fort volant de ch ma ge Encore n arrive t on pas toujours par ces rem des juguler le mal l inflation et la r cession peuvent cohabiter Cec
334. s ou f d rations syndicales concertant leur action avec des organisations politiques et sociales diverses auraient un tout autre poids Exemplaire par son objet la concur rence devient alors efficace par son impact Pour agir il faut avoir une politique et une organisation Les communistes disposent au moins de cette derni re Ils se sentiront concurrenc s lorsqu ils trouveront leur c t une organisation de poids respectable et une Politique exer ant un attrait sur le pays Alors ils prendront conscience de leur retard Qui dit concurrence ne dit pas lutte mort L Allemagne et la France se sont livr maintes guerres elles sont aujourd hui en concurrence dans une entreprise commune Il peut il doit en aller de m me au sein de la gauche La pression exercer sur le P C a pour objet principal de l aider de l obliger se transformer c est seulement dans l ventualit o il se r v lerait incapable d une telle mutation que l v nement aidant la concurrence aboutirait mais dans quels d lais le surclasser En fait l histoire des P C le montre ces organisations sont transformables et sont aussi mortelles le P C hongrois s est volatilis en 1956 le P C cubain s est fait doubler dans un virage r volutionnaire puis annexer dans une force nouvelle le P C sovi tique a connu plusieurs avatars le P C tch coslovaque a r alis de l int rieur une profonde r novation dont le succ s ou l chec n
335. s pas a DU BESOIN DE CHANGEMENT AU SOCIALISME Retour la table des mati res Le constat d chec serait sans appel s il n tait d autres vidences L id e de socialisme n a rien perdu de sa force on l a bien vu en mai 1968 On pourrait penser que cette nouvelle vogue est un pur mouvement id olo gique les hommes n ont ils pas toujours nimb leurs lans et leurs actions d un brouillard de mots riches et vagues emprunt s aux discours de leurs pr tres ou de leurs philosophes Toutefois le complexe d actions et de pas sions qui s enveloppe dans l id ologie socialiste pr sente une particularit jamais d mentie 1l se d veloppe toujours partir des d r glements de l organisation sociale il exprime toujours les tensions les plus aigu s d une soci t Fondamentalement le socialisme traduit l aspiration une soci t mieux agenc e une soci t faite par les hommes pour les hommes Cet incoercible besoin est inscrit dans l histoire Sa naissance et sa matu ration co ncident avec celles du capitalisme c est dire avec un changement d cisif dans le rythme de l histoire sociale Sous l Ancien R gime l agencement social se transformait peu et fort lentement Le capitalisme a boulevers cet ordre s culaire en organisant de fa on autrement productive la coop ration bien involontaire des hommes D une fa on productive de beaucoup plus de richesses mat rielles mais aussi de relations
336. s qui sous tendent l tat bourgeois et par la formation de rapports de production socialistes qui permettent l dification d un tat socialiste La premi re attitude est ambigu Elle peut conduire la gestion loyale comme aux r formes de structures La seconde ne l est pas moins dans la mesure o elle ne s articule pas clairement sur la premi re qui doit n anmoins la pr c der dans toute transition pacifique vers le socialisme Dans la mesure galement o les rapports de production socialistes et l tat socialiste qu elle prend pour objectif demeurent impr cis s les pr c dents sovi tique et autres tant plus ou moins critiqu s mais non remplac s par des propositions positives Mais surtout ces deux conceptions appellent une critique fondamentale Toutes deux supposent que le pouvoir s identifie au pouvoir d tat et subsi diairement que le contr le du pouvoir d tat avant la r volution s identifie l activit d un gouvernement soutenu par une majorit parlementaire elle m me confort e par la pression des masses Ces deux suppositions ne sont pas inexactes mais elles sont gravement incompl tes Ce qu elles laissent chapper est d cisif pour la strat gie de la gauche et pour l invention d un socialisme d mocratique Pour en juger il faut regarder sous divers angles l agencement actuel de la soci t et de l Etat A cette fin le pr sent chapitre examinera successivement l extension pr sent
337. ses int r ts de classe pour transformer une vague internationale de sp culation en faveur du mark en une pouss e presque irr sistible l encontre du franc La d valuation que la bourgeoisie d affaires souhaitait d s juin a sembl in vitable Pourtant de Gaulle n en a pas voulu parce qu elle lui aurait fait perdre ce qu il croyait tre l arme essentielle de sa politique internationale Il a donc fallu serrer les freins couper dans le Budget restreindre le cr dit rendre le contr le des changes enfin s v re En novembre de Gaulle s est ainsi enfer m son tour dans la piteuse situation o Wilson s tait plac depuis son accession au pouvoir en 1964 Mais ce que la calme Angleterre peut suppor ter des ann es durant ne pouvait tenir dans la France vacillante et nerveuse d apr s Mai Le gaullisme lui m me ne pouvait s identifier au wilsonisme sans p rir Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 125 L affaire aurait pu tra ner quelques mois quelques ann es m me De Gaulle l a abr g e en voulant une nouvelle fois forcer le destin Peu importe qu il ait tent d effacer Mai par un nouveau pacte de confiance populaire ou qu il ait r v de r quilibrer en sa faveur le syst me des int r ts sociaux et des forces politiques par les s ductions brumeuses de la participation ou encore qu il ait voulu surclasser l outrageante victoire lectorale de son ex Premier ministre et faire rentrer dans le
338. simplifications suivantes la troisi me tendance s identifie grosso modo la gauche les deux premi res s appuient sur toutes les formations politiques de l extr me droite au centre gauche mais s efforcent de les orienter vers des choix politiques diff rents Pour le reste il faut videmment nuancer cette premi re approximation d s que l on veut analyser une situation ou une formation pr cises Parce que l opinion s est fragment e au fil de l histoire en cinq ou six courants n s de la rencontre d int r ts de doctrines et de traditions Soit pour largir l assise de la majorit vis e c est la technique des fronts des blocs etc soit parce que la nature m me de l lection y contraint c est la novation simplifica trice r sultant de l lection pr sidentielle au suffrage universel N Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 76 La correspondance est plus directe entre les tendances et les organisations syndicales ou professionnelles Le C N P F gardien des int r ts communs du patronat a longtemps t plus repr sentatif du gros de la bourgeoisie que de la grande bourgeoisie il est toutefois devenu depuis quelques ann es le si ge d une lutte d influence entre modernistes et archa ques et le remplacement de Villiers par Huvelin a marqu le recul des seconds sinon la victoire des premiers Par contre la petite France r gne sans rivale dans la Conf d ration g n rale des P M
339. sociales nouvelles et d institutions de plus en plus complexes et raffin es Le travail salari l instruction obligatoire la conscription g n ralis e le suffrage universel la t l vision pour tous sont parmi bien d autres les plus manifestes de ces productions Le besoin de changer d lib r ment la soci t qu exprime le socialisme est n de l exp rience pratique d hommes vivant dans cette soci t en change ment spontan de plus en plus rapide que sous tend le capitalisme Il tait donc normal que la pens e socialiste s attache d couvrir les freins que la soci t capitaliste oppose au changement Marx les a situ s dans la propri t priv e des moyens de production L abolition de cette propri t priv e des moyens de production lui est donc Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 133 apparue comme l objectif central assign la politique du changement com me la cl de toute r volution conduisant au del du capitalisme Apr s Marx le capitalisme a poursuivi son histoire Il a continu de changer Pour la part pr pond rante de l conomie la propri t priv e jadis personnelle est devenue collective celle tout au moins d une collectivit de capitalistes les actionnaires Elle est m me devenue en principe celle de toute la collectivit nationale dans le secteur public de l conomie Ce faisant l obstacle que la propri t priv e oppose au changement s est d plac
340. souvent aux deux Grands car le monde ou plus exactement le Tiers Monde continue d tre le si ge de guerres et de r volutions par lesquelles il cherche surmonter ses contradictions s arracher sa mis re et par lesquelles il aboutit aussi rectifier plus ou moins le contour des zones d influence des deux gendarmes et de leurs auxiliaires Mais cet embryon d ordre mondial n offre encore aucune chance claire de durer Des normes internationales ont bien t esquiss es pour r gir deux des probl mes d essence supranationale que conna t notre monde l atome et l espace Mais aucune norme ne se dessine pour r gler d autres probl mes de m me essence qui seront n anmoins d une port e d cisive la faim et la surpopulation Le Tiers Monde appara t ainsi comme le lieu des contradictions les plus aigu s Le n o colonialisme des Etats Unis et des autres puissances capita listes s accommode bien d une ind pendance politique souvent formelle mais entrave la plupart des tentatives de d veloppement conomique autonome La crainte des implications mondiales de toute r volution locale conduit par ailleurs l U R S S la plus grande circonspection N anmoins le Tiers Mon de bouge entre la gesticulation impuissante que traduisent les coups d Etat en cha ne et les tentatives r volutionnaires parfois aventureuses son destin vacille Ici plus que partout le maintien du statu quo est impossible Robert Fossaert Le contrat
341. squis sent le plus souvent une double hypoth se Ils imaginent qu en France m me les forces bourgeoises d abord battues auraient fini par entreprendre une contre offensive mais auraient t rapidement d faites par une escalade de type cubain il s en serait suivi une socialisation rapide en peu d ann es ou en peu de mois de toute l conomie Ils imaginent aussi qu en Europe la contagion r volutionnaire aurait gagn comme un incendie de for t Les plus optimistes sensibles au r le des tudiants allemands et italiens aper oivent une Europe socialiste br ve ch ance Les autres acceptent d envisager un reflux suivi m me d une d faite de la r volution en France mais tiennent pour mineures ces p rip ties de la r volution mondiale enfin relanc e Ce sont l des vues tout fait d raisonnables L insurrection par hypo th se victorieuse en juin aurait eu pour premier effet de rendre vigilantes 1 Ravitailler les villes m me en essence multiplier les manifestations donc disperser les forces de police et rendre les barricades et les incendies de voitures inutiles etc Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 120 toutes les bourgeoisies d Europe Qui du S D S ou du gouvernement allemand e t le premier mis l autre mal Quel relais ouvrier le mouvement tudiant allemand pouvait il escompter La situation e t t moins d favorable en Italie Soit Mais quelle e t t l attitude
342. ssaert Le contrat socialiste 1969 136 efficace au stade de la p nurie ou du d veloppement extensif mais qui cesse de l tre lorsque la croissance requiert l innovation plus que l imitation Il faut toutefois souligner que cette r duction partout constat e et plus r cemment parfois corrig e n est pas une n cessit naturelle L autonomie des firmes peut subsister ou tre restaur e mais ne reposant plus sur la propri t priv e elle doit trouver un autre fondement En pratique les formules qui ont t exp riment es tendent substituer la propri t des moyens de production par le peuple tout entier une pro pri t qui est soit celle du collectif des travailleurs firme par firme soit celle plus composite de ce collectif associ aux autorit s locales aux repr sentants de l Etat et parfois m me ceux des utilisateurs Les indices concrets de l autonomie des firmes sont la capacit d initiative dans la fixation des plans de production et dans la recherche des d bouch s le pouvoir de d cision en mati re d investissements nouveaux et sp cialement d investissements autofinanc s la marge de man uvre pour la fixation des revenus et le r le d volu au profit commercial comme indicateur de r alisa tion du plan et comme source d autofinancement et de revenus additionnels Propri t collective centralis e ou relative autonomie des firmes dans les deux cas apparaissent clairement cert
343. sse et qu elle pouvait s ordonner en un front de combat d s lors que les int r ts de classe s exacerberaient et que par l action du parti r volutionnaire la conscience de classe serait diffus e et aiguis e Pour le reste l histoire globale de la soci t pouvait s observer d un regard froid comme un processus d histoire naturelle telle devait tre cil parti culier l attitude des individus conscients Un si cle plus tard les choses ont chang Le d veloppement social n est sans doute pas devenu une histoire ma tris e mais c est de moins en moins un processus d histoire naturelle La soci t n est plus globalement ou collec tivement inconsciente m me si elle est loin de prendre clairement conscience d elle m me et de son devenir A t tons elle pr voit et programme non sans quelques succ s L individu de son c t est de plus en plus difficilement conscient parce que les mod les v hicul s par les partis ayant vocation veiller sa conscien ce ont d coll du r el et plus g n ralement parce que la soci t prodigieuse ment complexe que nous formons se laisse moins ais ment appr hender dans sa totalit En m me temps cet individu plus gar que conscient est activement sollicit de toutes parts La soci t l envahit Il se sentirait irr m diablement perdu si ne s offraient sa port e imm diate quantit de rouages sociaux dont 1l peut pleinement comprendre le fonctionne
344. sse pleinement il faut donc admettre que les gouvernements des diff rents Etats int ress s seront para lys s devant elle affol s et ignorants comme leurs pr d cesseurs des ann es 1930 aveugles et impuissants comme leurs devanciers du si cle dernier et cela alors que les politiques anti cycliques ont fonctionn de fa on efficace pendant deux ou trois d cennies et que l enjeu politique de la crise demeure assez puissant pour motiver les actions les plus audacieuses Car une crise grave faut il le montrer aurait dans le inonde complexe et d chir des ann es 1970 des cons quences politiques au moins aussi dramatiques que dans celui des ann es 1930 La dimension de l enjeu et les le ons de l exp rience ne suffisent pas garantir une pr vention ou un traitement pleinement efficaces mais elles semblent au moins promettre une forte volont d action Pour qu il en aille autrement il faudrait soit une crise d une complexit telle qu elle d sarme pour un temps les Etats et seul le probl me mon taire international para t de nature provoquer pareille paralysie soit la conjonction de la crise cono mique avec d autres accidents majeurs de nature politique hypoth se sur laquelle on reviendra plus loin Mais tandis que le probl me mon taire m rit sa solution se dessine d j Le fond du probl me est historico politique Le r le de banquier international appartient qu elle le veuille ou non la puissan
345. st un d faut politique C est donc un horizon plus court de l ordre de dix quinze ans qu il sera fait r f rence Ce d lai sera retenu non point parce qu il inclut en principe deux s ries au moins d lections pr sidentielles l gislatives et locales mais bien parce qu au rythme actuel de notre histoire il d finit tout la fois le plus long des avenirs utilement prospectables et un champ suffisant pour que notre histoire puisse changer de sens La premi re de ces affirmations est empirique les probl mes d j m rs ou qui vus d aujourd hui semblent devoir m rir dans la prochaine d cennie sont assez nombreux pour que leurs combinaisons soient d une effrayante multiplicit mais comme il s agit de probl mes pr sents ou proches il n est pas possible de les luder la myopie est aussi un d faut politique et plus grave que l autre 1 Voir par exemple H Kahn et J Wiener l An 2000 R Laffont 1968 Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 28 La seconde affirmation est v rifiable Il suffit de d couper dans notre histoire r cente une tranche quelconque de dix ou quinze ann es pour juger des changements qu elle apporte m me en p riode relativement calme S il s agit en outre d entreprendre une action la d cennie fait galement bonne mesure c est par exemple le temps qu il fallut pour former un P C en France Le cadre Retour la table des mati res Jusqu au d but des an
346. ste 1969 90 d cision publique Seulement cette omnipr sence de l ex cutif est aveuglante elle emp che de voir de quels pouvoirs pr cis l Etat dispose et comment ils sont agenc s D o la tentation de classer fonctionnellement les missions de l tat et de prendre chacune de ces fonctions pour un pouvoir r el On dira de la sorte que l tat tout en continuant de policer de juger et d exprimer vers le reste du monde la souverainet nationale est galement dot du pouvoir d enseigner d informer et de celui d orienter l conomie sans parler du pouvoir de coor donner toutes ces fonctions en une politique s il se peut coh rente Mais la liste des fonctions que remplit d sormais l tat est dans son principe in puisable et dans son contenu effectif un moment donn assez contingente Les conjonctures conomique et politique d placent sans cesse l axe de son activit Ou l tendue de son front d attaque Ni la trop classique s paration des pouvoirs ni l analyse fonctionnelle n cessairement arbitraire ne permettent de concevoir clairement ce qu est l Etat Mieux vaut cette fin Voir comment il est organis pour d cider Sous cet angle L tat appara t comme une norme conf d ration de cen tres de d cision qui sans tre jamais Pleinement autonomes ne sont non plus jamais totalement d pendants et qui surtout sont d un poids in gal Ces cen tres de d cision forment une structure complexe
347. structures politiques administratives et conomiques de l U R S S n opposent encore qu une tr s faible r sistance la centralisation absolue de tous les pouvoirs Le risque de tyrannie demeure ouvert Sans doute si l volution accomplie depuis 1953 se prolongeait pendant plusieurs d cennies en suivant plut t la pente qui s tait dessin e jusqu en 1960 cette inqui tude serait elle lev e Mais on est encore loin de compte et des faits comme les r cents proc s d intellectuels ou l invasion de la Tch coslovaquie attestent la persistance de traits staliniens Le syst me sovi tique demeure inqui tant Cette inqui tude se reporte sur le P C fran ais dans la mesure o il appara t encore profond ment li l volution de l U R S S nonobstant sa d sapprobation nuanc e de l intervention en Tch coslovaquie Ce parti a t form dans une situation et selon des m thodes telles que le stalinisme l a marqu Son organisation et sa vie internes son id ologie et sa politique ont pr sent d vidents caract res staliniens qui sont loin d tre tous effac s encore qu ils r gressent rapidement Le cordon ombilical entre le P C fran ais et l U R S S semble n tre pas encore coup Cela ne veut plus dire que ce parti soit aux ordres de Moscou mais simplement qu il ne se con oit pas encore comme un tre autonome dont la t che premi re serait de d finir et de pratiquer mit politique fran aise et non de d finir ou d
348. succ dent affecte gravement la cr dibilit de leur politique Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 46 de ces donn es peut conduire des changements massifs par exemple une pouss e r volutionnaire ou militatiste succ dant une grave crise conomi que d faut d un tel accident la voie la plus probable du d veloppement japonais passe par la conqu te pacifique des march s chinois et sib rien par l expansion d un n o colonialisme japonais en Asie du Sud Est et par le renforcement de la concurrence japonaise sur le march capitaliste mondial tous d veloppements qui n auraient qu une influence mineure sur l Europe occidentale Vient enfin la crise politique majeure LA guerre Comment sa probabilit se mesure t elle pr sentement et pour la d cennie venir Certes le probl me s est plus ou moins d form depuis dix ans En 195 8 ni la Chine ni la France ne disposaient d armes atomiques En 19 5 8 encore aucun trait international ne r gissait les exp riences nucl aires ou la proli f ration Bien que cette derni re accroisse le risque de guerre par accident le duel suicide des deux Grands demeure la norme supr me la grande dissua sion On peut m me penser que depuis dix ans l objet principal de cette dissuasion s est d plac Sauf au Vietnam Russes et Am ricains ne se livrent plus aucune guerre par pays interpos alors que les foyers divers o pourrait s exercer leur affro
349. sus r volutionnaire la r ponse doit tre r serv e L volution de l Europe vers l autonomie peut th ori quement prendre une telle forme Pratiquement on peut douter qu il en aille ainsi comme le montrera plus loin une analyse de la crise fran aise de mai juin 1968 des prolongements qu elle aurait pu conna tre l poque et des suites qu elle est de nature entra ner Il faut noter par ailleurs combien les relations entre le Tiers Monde et l Europe sont paradoxales Ce continent qui fut jadis le club des puissances coloniales d couvre aujourd hui les commodit s de la d colonisation politi que Tandis que les proc dures d aide conomique fond es sur la comp tition entre les deux Grands se tarissent progressivement l Europe continue de fournir relativement sa richesse propre une contribution non n gligeable sp cialement destination de l Afrique jadis sa chasse gard e contribution dont l efficacit conomique n a rien d exemplaire mais dont l efficacit politique est assez grande l Europe pratique un n o colonialisme mod r ment confiant en l avenir Hormis le Moyen Orient il n est aucun point chaud du Tiers Monde o ses int r ts et ses passions soient massivement investis Ainsi l Europe prise globalement peut traverser la prochaine d cennie d une allure plus libre que nagu re Tout ne lui est pas possible elle ne veut ni ne peut se lier l Est elle ne pourra viter le retentissem
350. sym trique Quand la droite ou le centre m l s en proportions variables acc dent au pouvoir 1l leur suffit d occuper les trav es du Palais Bourbon et les fauteuils minist riels Le reste va de soi Tout le r seau du pouvoir est agenc de fa on fonctionner normalement quand le pouvoir est en de telles mains Les entreprises tournent L arm e et la police ob issent Les minist res administrent La magistrature juge Etc Il peut y avoir occasionnellement des p rip ties mais elles sont n gligeables sauf au voisinage de la crise de r gime mai 1958 certaines semaines de 1960 et 1961 mai 1968 Le pouvoir en place peut tre passif comme Laniel ou r formiste comme Debr la diff rence est sinon l g re du moins secon daire toutes ces variantes demeurent dans l ordre normal des choses elles sont naturelles Si la gauche acc de au pouvoir et de fa on fort nette comme en 1936 ou la Lib ration ou dans l hypoth se qu envisageaient de concert le P C et la F G D S ou plus encore par un mai 1968 il en va tout autrement Point n est besoin de d crire ce qui se passe alors L histoire m me si elle ne se rejoue jamais l identique le montre clairement La gauche ne peut pas prendre le pouvoir comme la droite ou le centre Pour elle le pouvoir d Etat n est pas le seul prendre Si elle se contente de sa majorit parlementaire ou de ses maroquins elle ne prend rien Si elle se fie la seule pressio
351. t Les moyens Le cheminement Une politique contractuelle Un nouveau comportement politique Si le peuple ne vient pas toi Une m thode et des exemples La fin d un privil ge condition d un renouveau Des contrats pour quoi faire Un projet r formateur Les communistes L anti communisme D raciner l anti communisme Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 9 La gauche r nover Ruine ou r novation Un syndicat pour la gauche Syndicat s et parti s Un parti pour la gauche socialiste Conclusion Annexe Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 10 Table analytique A Anticommunisme Arm e A S S E D I C Association pour l emploi dans l industrie et le commerce B Banque nationale d investissement Bonapartisme Bourgeoisie Budget C Candidats d signation des Capitalisme Capitalisme monopoliste d tat Capitalisme n o C E E Communaut conomique europ enne gt March commun Centres de d cision Centralisation C F T C Conf d ration fran aise des travailleurs chr tiens gt C F D T C F D T Conf d ration fran aise d mocratique du travail C G C Conf d ration g n rale des cadres C G T Conf d ration g n rale du travail Chambres des machines Classes moyennes Classes ouvri res Classes paysannes Clubs Club jean Moulin C O D ER
352. t Fossaert Le contrat socialiste 1969 212 Comme ils veulent une soci t plus humaine ils esp rent y atteindre en formant une soci t plus simple o les hi rarchies les bureaucraties les technocraties les rouages infinis de la division sociale du travail disparaf traient ou perdraient leur opacit Mais entre la communaut villageoise de jadis et l re lointaine o des automates produiront le n cessaire la soci t est condamn e la complexit par ses ambitions m mes Il n existe pas d homme qui puisse concevoir clairement en toutes ses parties l agencement social actuel Il n existe pas de soci t qui puisse satisfaire les besoins des hommes d aujourd hui ceux des contestataires de mai comme ceux des conservateurs de juin sans le secours d une immense et obscure machine sociale L exaltation devait donc retomber Mais le ferment demeure et travaille tout le pays La responsabilit politique des hommes de ce temps est immense car nous sommes au carrefour de plusieurs avenirs La force nouvelle qui s est manifest e en mai peut se fourvoyer et pas seulement en visant une r volution improbable on oublie trop souvent qu apr s avoir invent le socialisme les saint simoniens fond rent des banques d affaires Les gendarmes de l ordre tabli peuvent se raidir jusqu au fascisme Les marais de tous les centres peuvent engluer l espoir La gauche peut aussi se r g n rer se r inventer et donner du socialisme u
353. t de combattre efficacement les tendances la fonctionna risation du personnel qui sont d j apparues en diverses parties du secteur public et de d velopper des exp riences progressives et prudentes Si le secteur public de l conomie n est pas le lieu privil gi de l exp rimentation d une gestion moderne et d mocratique il perd une bonne part de sa raison d tre Sa raison d tre est en effet d entra ner les autres firmes mais aussi de cr er de nouveaux rapports de travail Il n y a pas que la quatri me semaine de cong s pay s qui puisse faire tache d huile Le dynamisme conomique et social du secteur public est l une des cl s de la coexistence durable avec le capitalisme C est de lui que d pend la 1 Ce n est pas la seule solution des organismes plus sp cialis s et plus diversifi s peuvent coexister Le probl me vis ici n est pas de d signer l agencement institutionnel qui serait le mieux fond techniquement mais plut t de souligner les orientations politiques devant inspirer cette restructuration Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 170 victoire long terme de ce pari strat gique de ce d tour impos vers le socia lisme Cela suppose que les firmes publiques existantes celles qui pourront tre cr es pour satisfaire de nouveaux besoins et celles enfin qui pourront r sulter de nouvelles nationalisations sauront prendre toutes ensemble une part croissante dans la prod
354. t de la nature m me du contrat La premi re est qu il y ait engagement pr cis en vue de fins bien d ter min es en quoi cette proc dure se diff rencie de la technique des comit s ph m res d un emploi si fr quent et d une port e si al atoire La seconde qu il y ait attribution de moyens en hommes en locaux en cr dits etc en vue d atteindre la fin vis e La troisi me qu il y ait d lai et proc dure explicite de d nonciation et de reconduction La gauche ne conna t que les embrassades et les ruptures Elle a tout gagner pratiquer aussi les commandes et les livraisons Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 186 La quatri me qu il y ait r ciprocit des prestations un contrat est un con cours de moyens en vue d une fin commune si limit e soit elle La cinqui me enfin et de loin la plus importante et que les organisations politiques prennent en outre des engagements sp cifiques et unilat raux Lesquels D offrir tous leurs co contractants un droit de participation la d signation des candidats pour toute lection politique L lecteur vote en faveur de candidats la s lection desquels il n a aucune part Rompre avec cet mage est une condition fondamentale de tout renouveau politique renouveau d mocratique mais aussi renouveau des organisations politiques Imaginons que dans un d partement la f d ration d un parti politique ait pendant des ann es multipli les acti
355. t et C est encore un r ve La gauche s est affaiblie mais sa fraction communiste n est pas la plus atteinte D autres ou les m mes ont parfois imagin et parfois exp riment des coalitions o la gauche non communiste devait entra ner des alli s pris sur sa droite sans perdre de sa libert d allure Ce n est plus un r ve mais un 1 Les laiss s pour compte de l expansion les retards de la planification les carences de la pr vision etc Finalement l insuffisante ambition de la soci t pour servir les hommes qui la forment Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 193 mauvais souvenir l exp rience a t faite de 1947 1958 et m me apr s elle a encore t tent e par ceux des socialistes qui se ralli rent Poher d s le d part de de Gaulle On touche ici une contradiction des plus graves pour l avenir de la gau che Si l on consid re comme tout ce livre a essay de le faire les probl mes r els qui se posent et se poseront dans notre pays il n y a videmment qu une seule gauche significative celle qui se donnera pour objectif de ma triser et de conduire le changement de la soci t Mais si l on consid re l actuel dispositif des forces politiques et des opinions publiques de gauche il faut bien constater que le chemin suivre est loin d tre clairement aper u et que les h sitations les confusions et les app tits qui animent trop d hommes de gauche peuvent les pousser
356. t plus longuement que les statistiques disponibles et notamment la comptabilit nationale ne visent pas clairer ce partage d influence M me entach s d erreurs prenons les n anmoins comme base puisque l objectif vis est non pas de mesurer les situations acquises mais d apercevoir les tendances de l volution possible 1 Comme ceux qu leur mani re le C E A le Plan Calcul et divers autres quasi contrats entre firmes priv es et minist res tendent satisfaire 2 Les chiffres indiqu s diff rent de ceux qui ont t cit s page 106 parce qu ici l industrie est seule prise en consid ration Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 171 Si l conomie fran aise se d veloppe au cours des dix quinze prochaines ann es au m me rythme qu au cours des dix quinze derni res ann es si le pouvoir politique reste entre les m mes mains coalitions gaullistes ou cen tristes et si enfin la p n tration trang re garde son lan actuel un premier avenir se dessine Si la gauche vient au Pouvoir largit quelque peu et dynamise sensi blement le secteur public et si enfin elle r ussit contenir la pression am ricaine un autre avenir se dessine En partant des valuations pr c dentes on peut illustrer chacun de ces deux avenirs par quelques chiffres HYPOTH SE SUR L INDUSTRIE FRAN AISE Vers 1980 1985 En 1969 Avec statu quo Avec une gauche politique variante r formatrice au gaulliste
357. t qu une coalition de gauche acc dant au pouvoir en France par exemple pourrait en jouer avec audace en s appuyant sur les int r ts et les contradictions des partenaires europ ens et am ricain et en jouant aussi des besoins et des probl mes propres au camp socialiste et au Tiers Monde dont par simplification 1l n a pas t tenu compte ici Mais l inverse les partenaires europ ens et am ricain auront videm ment tendance jouer pleinement des int r ts et des contradictions de la France ou de tout autre pays engag dans une exp rience de gauche pour l emp cher de quitter le droit chemin C est dire combien il importe que les forces politiques de gauche passent entre elles avant d aborder le pouvoir un accord viable sur la politique europ enne et internationale A d faut ce sont leurs contradictions internes qui offriraient le meilleur point d appui aux pressions trang res Une France socialiste dans une Europe capitaliste int gr e est une contradiction dans les termes Mais une France exp rimentant une d marche originale vers un socialisme diff rent du mod le sovi tique dans une Europe en voie d int gration ce n est plus une contradiction c est une exp rience difficile mais possible Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 147 Le contrat socialiste Les objectifs Une coexistence durable Retour la table des mati res Le chapitre pr c dent a cern les poss
358. t socialiste 1969 118 gauche il en fut souvent de m me Toutes les forces politiques group es dans la F G D S furent absentes de l histoire qui se faisait Le premier r le revint aux groupuscules initiateurs du mouvement Leur strat gie de type gu variste o l invention l audace et l imagination sont d cisives fit d abord merveille Puis leurs rivalit s et leurs faiblesses jointes au barrage syst ma tiquement dress par le P C et la C G T aboutirent les cantonner de rares exceptions pr s sur leurs bases de d part La vedette passa la C G T et au P C qui donn rent une clatante d monstration de leur force de leur capacit d organisation de leur rapidit de r action et aussi de leur volont de ne point faire en l occurrence usage de cette force pour r aliser leur but proclam la r volution socialiste ne l oublions pas L une des surprises de ce mois fut le r le jou par le P S U et par la CFDT Le premier qui n en finissait pas de na tre trouva enfin l occasion de conqu rir une audience nationale Il n tait certes pas la mesure de l v ne ment mais du moins il tait mieux que toute autre force politique pr par le comprendre C tait en effet le seul parti de gauche ayant tabli et gard de larges contacts dans deux des milieux sociaux les plus influents de cette p riode la gauche tudiante et la nouvelle classe ouvri re En se r v lant plein
359. te aussi l adoption d un nouveau sigle Elle suppose aussi une certaine vigilance En effet l addition de la C F D T de la F E N et de F O pourrait si elle tait mal conduite n tre que l addition de leurs d fauts de leurs faiblesses chacune de ces organisations a sa droite ses nostalgies son pass et son passif Aussi faut il souhaiter que la r unification syndicale soit men e avec force mais avec circonspection l unit pour l unit n est pas un mot d ordre l unification contr l e dans l action en est un Il est souhaitable que beaucoup de tissu conjonctif pousse entre ces trois centrales pour que ces organismes entrent en symbiose surmontent les risques de rejet puis se cr ent une identit nouvelle et unique La C F D T peut jouer un r le essentiel dans cette volution mais elle ne d tient pas pour autant le monopole de l initiative Peut tre m me lui faudrait il accepter d apparents d tours qui auraient valeur de gage et d investissement pour faciliter ce mouvement En voici deux exemples hypoth tiques Pourquoi le S G E N n envisagerait 1l pas un moment donn de se fondre dans la F E N soit par l effet d une n gociation collective soit m me en se dissolvant Pourquoi les ing nieurs et cadres de la C F D T et de F O d j rassembl s en unions conf d rales qui doublent leurs affiliations f d rales n envisageraient 1ils pas de fondre leurs unions avant que leurs deux conf d rat
360. tendances avant mai Une quatri me tendance La r volution La surprise L incertitude L preuve de v rit La r volution tait elle possible Les r veurs Les r alistes La r volution d mocratique La suite L ann e wilsonienne du gaullisme Les premiers mouvements de l apr s gaullisme Un avenir agit Le socialisme Recherche d une d finition Du besoin de changement au socialisme Deux le ons Les blocages Les manques Le socialisme pour nous L Europe Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 8 6 FA O va l Europe La gauche et l Europe une contradiction De fausses solutions D indispensables compromis Les tats Unis socialistes d Europe Les objectifs Une coexistence durable La r volution peu probable Le mod le su dois Quelle dur e Quelle coexistence Le d clin de la petite France La tendance de l expansion et ses clivages Un chemin praticable Le d p rissement de l tat Une critique politique Renvoyer l tat au ciel D centraliser et d s tatiser Mort du Parlement et renaissance des Parlements L conomie mixte Pour la nationalisation des nationalis s Les trois p les de l conomie Le partage des pouvoirs Deux contresens Une assurance nationale contre la m diocri
361. ternational de cr ation mon taire doit tre r agenc pour en tenir compte et pour contenir les carts du trop puissant banquier am ricain No nobstant l opposition fran aise les accords d j sign s Stockholm en 7968 ont trac une premi re solution Un syst me de distribution p riodique de cr dits internationaux a t cr les droits de tirage sp ciaux et les normes de cette distribution ont t fix es de fa on telle que l Europe des Six si elle est unanime a pouvoir de veto Ainsi a t reconnu le principal changement sur venu depuis 7944 dans les rapports de force mondiaux la remont e de l Europe et sa puissance virtuelle c est dire li e l intensit de son int gra tion conomique et politique Certes la crise mon taire n a pas encore fini d taler toutes ses manifes tations certes la solution dessin e n est ni parfaite ni durable Mais il est permis de pronostiquer que l effondrement du syst me mon taire ne fera pas comme en 1931 rebondir une ventuelle crise conomique Il est probable que pour la prochaine d cennie nous irons plus avant dans la crise mon taire nous irons peut tre jusqu la crise conomique carac t ris e Mais elles ne conjugueront sans doute pas leurs effets de fa on dramatique De son c t la crise conomique si elle a lieu a de fortes chan ces d tre ma tris e avant de tourner au cataclysme Sauf r p tons le si elle se combine avec ce
362. tes la relance autant qu la circonspection Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 115 Puissance du choc initial conjoncture malsaine relance et circonspection Il n en fallait pas plus pour que le mouvement s panouisse longuement et r v le dans son anarchique nouveaut les maux les plus profond ment ressentis par les hommes La r volte tudiante a conduit une sorte de muti nerie g n rale l encontre de tous les gouvernements particuliers Mutinerie si g n rale que tous les gouvernements et d abord LE gouvernement en furent d sar onn s La question du pouvoir des pouvoirs et de leur redistribution tait partout pos e La r volution tait elle alors possible La r volution Retour la table des mati res Avant d envisager ce qui aurait pu se produire il faut se souvenir de ce qui s est pass cette fin cent livres et autant de chronologies sont disponibles Mais les analyses faisant explicite r f rence au jeu profond des grandes forces sociales sont plus rares et l on s en tiendra ici ce seul aspect LA SURPRISE Au matin du 11 mai apr s la premi re nuit des barricades la grande majorit des Fran ais se trouva en sympathie avec les tudiants La police et le gouvernement n eurent droit aucune indulgence Pompidou retour d Afgha nistan dut capituler sur toute la ligne en donnant pleine satisfaction aux trois revendications tudiantes du moment Le tablea
363. tifs et oppositionnels qui d finissaient les contradictions vivantes de la soci t europ enne au XIXe si cle La cat gorie soci t elle m me exprimait le conflit aigu entre la sph re sociale et la sph re politique c tait la soci t en tant qu antagoniste de l tat l Homme unidimensionnel ditions de Minuit 1968 Cela n a rien voir avec le dirigisme moderne Bien au contraire le laisser faire est de r gle cette norme lib rale exprime la relative libert de la soci t civile celle notam ment de la libre entreprise N Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 86 l ordre public et bien s r le percepteur pour subvenir ses besoins financiers d ailleurs modestes L imp t est ainsi le lien principal entre la soci t civile et l tat la contri bution qu il pr l ve de diverses mani res sur chaque individu C est donc l occasion principale de conflit entre eux Pour r soudre cette contradiction la soci t civile d l gue au sein de l Etat ses repr sentants afin qu eux seuls aient pouvoir de lever l imp t Le Parlement est une institution impos e par la soci t civile pour mettre un terme l arbitraire de l imp t C est aussi par extension la source de toute modification des normes de droit impos es par l Etat la soci t civile et ce d autant plus ais ment que ces modifications sont rarissimes L TAT DANS LA SOCI T CIVILE Retour la table des mati re
364. tion n est pas une condition suffisante pour constituer une soci t de la responsabilit et de la solidarit ni une civilisation de l panouissement Il ne faut pas se payer de mots une bonne partie de la gauche non com muniste ne sait pas clairement ce qu elle appelle socialisme Quant la gauche communiste toutes restrictions mentales et toutes arri re pens es prises en compte elle assimile le socialisme avec ce que l on pourrait faire de mieux en s inspirant de l exemple des actuels pays socialistes L impr cision des uns et la fascination des autres proviennent d une m me source L identification du socialisme et de la propri t collective des moyens de production trouve ses lettres de noblesse chez Marx et chez L nine d o le blocage des communistes et de maints autres courants marxistes Mais elle 1 II faut rendre Roger Jacques cette justice que notamment dans divers articles de la revue Citoyens do il a montr qu il n ignorait ni ne sous estimait aucune de ces ques tions ceux qu irriterait ce vocabulaire typique des chr tiens de gauche il est conseill de relire les oeuvres du jeune Marx ils y trouveront dans d autres formulations le m me lan vers les m mes fins N Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 132 trouve aussi dans l histoire des pays socialistes tant d illustrations dramati ques que le reste de la gauche en France comme ailleurs est fig dans un tout mai
365. tique avant longtemps terme le changement le plus important est sans doute l exp rience acquise par toute la jeune g n ration celle qui a v cu Mai comme une r vo lution Les tudiants bon nombre de lyc ens et beaucoup de jeunes salari s ont d couvert leur force Sur la soci t o ils vivent ils ont plus appris en six semaines qu en des ann es de cours magistraux ou de stages syndicaux Nul ne sait au juste quelles marques durables cette exp rience laissera au plus grand nombre d entre eux Mais la diff rence de leurs a n s de 1956 1961 ce n est pas une g n ration que l on a perdue c est une g n ration qui s est r v l e elle m me L avenir appartient aux syndicats et aux partis qui sauront s ouvrir cle s enrichir de son nergie et la canaliser vers des voies praticables De ces trois conditions aucune n est secondaire Le socialisme Retour la table des mati res L un des triomphateurs de mai 1968 est le socialisme Avec une fringale juv nile bien des tudiants nagu re l ves studieux de ma tres qui souvent manipulaient ce vocable avec de longues pincettes se sont empar s du voca bulaire traditionnel de la gauche Les mots us s ont repris dans ce contexte exaltant une saveur nouvelle Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 130 Le socialisme n en reste pas moins un terme quivoque Il peut tout recouvrir les espoirs les plus riches comme les plus flous les a
366. tis en sont les agents Mais le d con ditionnement ne peut na tre d un simple contr le de ces supports C est par une progressive substitution d une autre image d un autre mod le de civilisation que l inflexion peut tre donn e en tenant compte de la satisfaction n cessaire des plus puissants besoins d j lanc s Concr tement aucune contre publicit ne fera perdre le go t de l automobile m me si elle peut aider en bannir l usage au c ur des agglom rations et ceci n est qu un exemple Le travail a cess d tre le p le unique dans la vie de la grande majorit sans que l on sache pour autant situer pr cis ment le ou les autres p les A titre de pur exemple on retiendra que la plupart des salari s sont aussi des automobilistes et que chaque ann e ils passent en moyenne au volant de leur voiture plus de la moiti du temps qu ils consacrent par ailleurs au tra vail Cela ne veut pas dire que l automobile ait d aucune fa on valeur de p le concurrentiel du travail Mais cela signifie que l ensemble des activit s humaines tourn es vers la consommation les loisirs les vacances etc tend s ordonner en un syst me de besoins et d int r ts distinct sinon ind pendant du syst me centr sur le travail Il y a dans la vie et la conscience des travailleurs deux univers celui du travail et l autre Et l on peut se demander si les m thodes d action ou les normes de pens e des organisations politiques et syn
367. tre maintes boucles en plus de celles que l on a voqu es On y verrait la Banque de France et la direction du Tr sor s articuler respec tivement sur la Banque des R glements internationaux et sur le Fonds mon taire international ou le quai d Orsay se brancher volens nolens sur le machin des Nations unies Plus importantes rep rer sont les mailles administratives et conomiques d o partent des connexions vers d autres pays plus ou moins subordonn s ceux d Afrique noire par exemple car le n o colonialisme a des ancrages pr cis Mais aussi les mailles du r seau fran ais qui sont plac es en fait sous la d pendance de centres de d cision trangers telles les filiales des firmes am ricaines ou europ ennes L un des effets de l int gration europ enne et du libre changisme est d j et sera de plus en plus de multiplier les articulations de ce type Un autre effet non moins important est de mettre en veilleuse l activit de divers centres de d cision de l ordre tatique les douanes par exemple ou de r duire l emprise Il est utile d anticiper sur des d veloppements qui trouveront place plus loin afin de bien marquer les fonctions strat giques successives des contre pouvoirs a Les pr voir les projeter les populariser est une partie int grante du projet r for mateur voir p 242 b R aliser ces projets sit t l accession au pouvoir est l une des conditions essentielles pour que la gauche r
368. ts progressivement cumulatifs L un tait de bouleverser profond ment le r seau du pouvoir en touchant peu la sacro sainte propri t priv e des moyens de production mais en rendant l Universit et l O R T F autonomes en ouvrant de larges pouvoirs aux syndicats dans les entreprises en d centralisant l appareil d Etat et en restructurant ses organes d cisifs de contr le et d incitation conomique etc L autre tait de mettre le pouvoir politique entre les mains d une coalition de gauche faiblement d pendante des appareils politiques traditionnels et que le suffrage universel e t ratifi e avec le m me lan qu il a vot gaulliste La victoire lectorale va toujours au vainqueur politique Les communistes n ont pas voulu se lancer dans une telle voie ils di raient s y aventurer Ils n y taient pas pr par s Ils ne s taient jamais clairement repr sent ce que pourraient tre leur politique internationale leur politique int rieure leur politique conomique ou m me le r le de leur parti dans une telle ventualit Autrement dit ils ne s taient jamais imagin coexistant durablement plu sieurs d cennies au pouvoir avec d autres et ce dans un pays o un secteur capitaliste subsisterait durablement plusieurs d cennies La r volution classique tait impossible et ils ont eu raison de ne pas l entreprendre Une autre voie r volutionnaire lente mais praticable inexplo r e mais inve
369. ture qui occupent la sc ne politique sont complexes Les int r ts qui fondent ces trois tendances s enracinent dans la vie cono mique quotidienne s largissent aux autres formes de la vie sociale pour autant qu elles interf rent directement avec la vie conomique et se colorent de traditions id ologiques l inverse les organisations politiques sont sp cialement en p riode lectorale les gardiennes et les b n ficiaires des clivages id ologiques que l histoire a dessin s puis dans le quotidien de la politique les gestionnaires et les arbitres des probl mes de tout ordre que suscite la situation internationale et nationale et dans cet ensemble les int r ts li s la vie conomique quotidienne ne trouvent souvent qu une r fraction tr s d for m e Un Pinay a repr sent nagu re l id al de la petite France peu avant qu un Poujade en exprime la r volte La candidature d un Mitterrand aux pr siden tielles de 1965 s est largement appuy e sur la troisi me tendance Mais chacun de ces hommes politiques est la fois menac de ne pas toucher toute la tendance qu il vise et tent d largir son audience vers d autres cat gories sociales Seul de Gaulle a r ussi capter un tr s large soutien des deux bourgeoisies c est dire des deux tendances qu elles animent tout en mor dant beaucoup sur la troisi me tendance C est donc seulement en toute premi re approximation que l on peut retenir les
370. tures on l a bien vu en analysant le chemin parcouru par la soci t fran aise depuis un bon si cle De cette con qu te de pouvoirs additionnels d coulent certaines cons quences politiques D abord il importe de donner forme tous ceux des int r ts sociaux qui malgr leur puissance virtuelle demeurent diffus faute d tre canalis s et organis s On retrouve ici une num ration d j faite celle des copropri taires des locataires des r sidents de grands ensembles des parents d l ves des tudiants des lyc ens des jeunes des concitoyens d un m me quartier mais encore des consommateurs des usagers de tels services publics et peut tre aussi des salari s consid r s collectivement non pas comme travailleurs c est l affaire des syndicats mais dans leurs autres int r ts sociaux trans ports habitat loisirs vacances etc Qu il existe d j des institutions embryonnaires dans ces divers domaines que certaines de leurs exp riences aient t d cevantes qu en particulier la technique du P C habile sp cialiser des organisations de masse et en faire des courroies de transmission de la politique du parti ait exerc maints ravages toutes ces objections n emp chent qu il demeure important de donner vie et forme de donner du pouvoir ces int r ts pris en eux m mes et pour eux m mes on commence par se battre pour avoir de l eau dans sa baignoire et il arrive parfois qu on modi
371. tus que l opposition de gauche ne manquait aucune occasion de la mettre l preuve par ses motions de censu re Ce n tait pas la mise mort mais d j la pose des banderilles Cependant cette perspective ne faisait pas l unanimit de la gauche Les critiques sarcastiques des groupuscules qui allaient s panouir en mai 7968 demeuraient confidentielles elles n aga aient que le P C soucieux de maintenir le vide et le silence sur sa gauche Celles du P S U et d autres milieux de la gauche nouvelle non ralli s la F d ration irritaient davan tage cette derni re Mais en apparence ces critiques r volutionnaires ou modernistes demeuraient marginales dans le gros de la gauche la confiance r gnait sinon l harmonie Apr s les barricades les gr ves et les occupations d usines de mai 7966 apr s les batailles et les lections de juin il ne restait rien de la Strat gie qui s tait affirm e depuis 7965 L chec lectoral a provoqu la d bandade de la F G D S et l enterrement de la plate forme commune sign e quatre mois plus L expression gauche nouvelle est apparue vers 19 5 4 pour d signer un ensemble de journalistes d intellectuels de syndicalistes et de militants divers li s de fa on tr s l che par un commun besoin de donner la gauche un autre visage que celui du P C ou de la S F I O Le mend sisme a capt l essentiel de ce courant jusque vers 1956 Ensuite il s est fra
372. u e en deux temps Apr s les ann es 7958 1962 o les appareils socialiste et communiste firent le dos rond et o la seule gauche active fut celle de l U N E F des clubs et de certains syndicats ouvriers ou paysans quelque chose se dessina vers 7963 Il y eut l op ration X Defferre tentative ambigu qui voulait r g n rer la S F L O inventer un nouveau parti pour la gauche non communiste servir d axe une coalition soutenable par les communistes et qui p rit apr s s tre d grad e en un simple avatar de la troisi me force Il y eut d abord h sitante puis pers v rante l affirmation d une volont communiste de r insertion active dans le jeu politique de la gauche volont qui devait finalement trouver un d bouch dans la campagne pr sidentielle de 1965 La candidature de Mitterrand cette lection servit de catalyseur plusieurs des courants profonds et convergents qui travaillaient alors la gauche fran aise Le P C y vit l ouverture qu il cherchait La S F I O y trouva l occa sion de reprendre sur d autres bases la tentative amorc e par Defferre de f d rer autour d elle une partie de la gauche non communiste Avec enthou siasme ou avec r signation bon nombre de clubs enfin saisirent l occasion de s amalgamer une entreprise nouvelle et une formation politique de plein exercice 1 Aux rangs desquels on pourrait presque inscrire les groupes qui allaient former le P S U et ce
373. u changea apr s la manifestation du 13 mai et la rapide contagion des gr ves et des occupations d usines La petite France red couvrit avec une am re volupt son ennemi pr f r le communisme de toujours et lui imputa sans faire le d tail la responsabilit de tout le d sordre mena ant Mais pour quelques jours cette tendance fut priv e d influence La presse et la radio gagn es par l motion et ivres d un peu plus de libert perdirent de leurs r flexes La petite bourgeoisie parisienne et bient t la provinciale bascul rent sentimentalement vers le peuple qui talait sa force Il fallut que la gr ve s installe et dure que les manifestations de rue se multiplient que la Bourse soit incendi e que le tabac ou l essence viennent manquer pour que la r cup ration devint possible Peu peu la petite bourgeoisie rentra dans l ordre bient t suivie d l ments divers et de plus en plus nombreux 1 Cette formule lucide est de Bertrand de Jouvenel Analyse et Pr vision VI 3 1968 p 581 Les gouvernements particuliers qu il vise correspondent aux centres de d cisions analys s au chapitre pr c dent Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 116 smigards voulant reprendre le travail apr s Grenelle femmes inqui tes devant la poursuite de la gr ve puis minorit s hostiles la poursuite des occu pations puis majorit s heurt es par la t nacit des minorit s combatives Parmi les sy
374. u en savent et en sentent nos hommes poli tiques sexa ou septuag naires Pour juger de ce que la France sera en 1978 Ou en 1988 et de ce que sera alors l action politique il faut plus d imagination que de souvenirs plus d invention que de doctrine C est pourtant en vue de ce monde l qu il faut aujourd hui tirer des ruines et des promesses de la gauche de quoi b tir une force politique Une politique contractuelle UN NOUVEAU COMPORTEMENT POLITIQUE Retour la table des mati res Prendre appui sur la volont de changement dans une soci t qui change plus que jamais est une entreprise qui requiert avant tout un nouveau compor tement politique de la part des responsables et des militants de tout rang dans les organisations politiques comme dans les organisations syndicales La principale le on des checs pass s est en effet que beaucoup de ces respon sables et militants ont autant apprendre qu enseigner Ils ne sont pas porteurs d une v rit r v ler mais beaucoup plia modestement d une exp rience qui peut tre utile Quand Decazeville tait bloqu e par des mois de gr ve c e t pu tre l occasion d apprendre tr s concr tement ce que sont les besoins et les diffi cult s de la reconversion les causes et les effets du d p rissement r gional de m me quand les mineurs firent gr ve en 1963 Quand la fin de 1967 la longue gr ve de la Rhodiaceta se produisit c e t pu tre l occasion
375. u influence l glise d appartenir la gauche et normal pour la gauche que des catholiques nombreux s y int grent La r alisation d un tel objectif affirmer la gauche comme norme donc affirmer sa vocation majoritaire suppose son tour la r alisation d une con dition plus ambitieuse encore r v ler la France son identit nationale C est en effet de r v ler et non de retrouver cette identit qu il s agit La France c est dire la plupart des Fran ais n a plus une claire con science d elle m me parce que les possessions les institutions et les attributs qui constituaient nagu re encore son identit sont disparus ou d clinants Elle a d capit ou chass ses derniers rois son glise vacille son Empire est mort elle s est puis e dans sa derni re victoire celle de 1914 son assise rurale et petite bourgeoise s vanouit Il lui reste un Etat immense et abstrait une Universit d sempar e une conomie qui s ouvre tous vents plus vite qu elle ne se renforce une langue qui se d grade en franglais l image de ses modes de vie Deux tentatives r centes pour rendre aux Fran ais conscience de ce qu ils sont ont chou De Gaulle a voulu r affirmer une certaine id e de la France qui tait un sublim de ses grandeurs pass es Son pari quasi pasca lien Dites vous grand et vous serez grand a chou faute de moyens peut tre mais surtout faute de pertinence cette i
376. u stade alors atteint mais introduit seulement une donn e suppl mentaire l accord des collectifs int ress s devient n cessaire pour que de nouvelles concentrations aient lieu Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 138 d int r ts sociaux et d offrir un premier chelon o les arbitrer tout en demeu rant accessible la participation directe ou m diate de chaque travailleur au pouvoir ceux des pouvoirs qui le concernent le plus directement Mais ce niveau elle requiert videmment un compl ment qui est le d veloppement des proc dures et des institutions d information de concer tation et de coordination pour nouer l chelle de la soci t tout enti re le syst me d int r ts conflictuels dont cette soci t est form e pour arbitrer entre ces int r ts et pour rendre les arbitrages op rants c est dire accept s et de nature d placer les conflits Autrement dit elle requiert un Plan une politi que conomique et un syst me complexe d institutions politiques fonction arbitrale 4 De cette exp rience 1l r sulte enfin une vidente le on c est que dans une soci t d velopp e le probl me du statut des moyens de production est loin d puiser la question de l agencement social sans que l on puisse se contenter de la th orie suivant laquelle les rapports de production ainsi d finis forment la base de la soci t et commandent l agencement de tout le reste de toutes
377. uction et dans l investissement et sauront gale ment s inscrire dans une active strat gie europ enne LES TROIS P LES DE L CONOMIE Retour la table des mati res L conomie mixte qui est ici propos e comme tape interm diaire comme modalit d une coexistence durable avec le capitalisme sera n cessairement une conomie tripolaire elle l est d j et c est de r organiser le jeu et la puissance de chacun de ses trois p les qu il s agit Ces trois p les sont le secteur public le secteur priv sous la d pendance des firmes multinationales et le secteur priv national Pour fixer les id es on peut tr s sch matiquement caract riser ainsi leur influence relative dans l industrie fran aise actuelle Le secteur public assure environ 10 de la production il r alise pr s de 35 de l investissement 11 contr le ou influence par l action de l Etat des banques publiques et des proc dures tatiques de finance ment plus de 60 de l investissement le secteur multinational de son c t contr le sans doute un peu moins de 10 de la production et un peu plus de 10 de l inves tissement mais son dynamisme est grand et sa part tend s accro tre le secteur priv national enfin doit tre l origine d environ 80 de la production et d un peu plus de 55 de l investissement Tous ces chiffres ont une valeur tr s approximative et l on pourrait leur propos ergoter d autan
378. ucune consolation ceux qui s obstinent pr parer le Front Populaire ou la R volution de 1917 Mais tous les hommes de gauche qui veulent agir dans et sur la France des ann es 1970 il propose plus qu un espoir une m thode Robert Fossaert N en 1927 conomiste Dirige la collection Soci t aux ditions du Seuil A t l un des animateurs des Rencontres socialistes de Grenoble L Histoire imm diate collection dirig e par Jean Lacouture Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 Table des mati res Table analytique 1 L chec Les le ons du pass Le Front populaire La Lib ration Le Front r publicain Vers mai 1968 Du pass faisons table rase L avenir inventer 2 L environnement L horizon Le cadre Deux h g monies Un monde fig et instable La crise conomique La crise oubli e Les nouveaux risques Le d sordre mon taire international Crise ou cataclysme Les crises politiques Les r volutions du Tiers Monde Une crise politique aux tats Unis La crise de l U R S S D autres crises et LA guerre Le monde vu d Europe L Europe plus libre L Europe des Six L Est et le Tiers Monde Une chance saisir Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 3 L h ritage La France gouverner La France trop vieille et trop jeune Le
379. ue des pouvoirs s exercent dans le domaine de l Etat et dans celui de l conomie n est pas douteux mais n y a t il pas entre ces pouvoirs une diff rence fondamentale Qu elles soient ou non diff rentes ces deux s ries de pouvoirs sont articul es l une sur l autre mais quelle est la nature de cette articu lation Origine et Espoirs de la planification fran aise Dunod 1968 2 Par simplification on n gligera dans ce qui suit les autres centres de pouvoirs recens s dans la soci t civile ceux notamment que constituent les divers types d associations Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 95 L INTERP N TRATION DE L CONOMIE ET DE L TAT Retour la table des mati res Les centres de d cision composant la sph re conomique forment assu r ment une structure Mais le mot structure est un terme dangereusement vague qui d signe dans ce qu il a de durable tout ensemble organis et qui ne pr cise en rien la nature de cette organisation Or la nature des structures tatique et conomique n est pas la m me L tatique est hi rarchis e c est dire form e de centres de d cision dont les comp tences sont d finies et contr l es d en haut tandis que l conomique est libre c est dire form e de centres de d cision ind pendants les uns des autres quoique li s entre eux par des liens n cessaires d achat et de vente La directive politique et la loi du march sont
380. uente faiblesse des associations de ce type le nombre des int r ts collectifs qui ne sont organis s qu une chelle d risoire et enfin la tendance la satellisation de ces associations par les organismes politiques sont en France trois d fauts majeurs Parmi ces associations certaines pr sentent une importance particuli re par leur objet ou par leurs moyens les syndicats les partis les glises et surtout la catholique Point n est besoin d y insister Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 93 Reste le domaine principal de la soci t civile celui de l conomie Chaque entreprise est videmment un centre de pouvoir pour ce qui est de son domaine propre D s que l on quitte la cat gorie nombreuse des entre prises individuelles Pour entrer dans la zone du travail salari ce pouvoir se charge d implications extr mement importantes c est de lui que d coulent l emploi le revenu les conditions de travail l horaire et le genre de vie l avenir m me des salari s et de leurs familles mesure que l on s l ve dans l chelle des firmes leur structure se complique jusqu donner naissance une d multiplication du centre de d ci sion patronal en une architecture de plus en plus complexe de centres de d cision hi rarchis s Dans sa forme la plus volu e ce sera la technostruc ture ch re Galbraith S lever dans l chelle des firmes c est videmment suivre les progr s de la
381. ulent D abord on comprend mieux l illusion dramatique o les socialistes italiens se sont plong s en acceptant comme le leur sugg rait Nenni d entrer tout prix dans la chambre des machines cette fameuse stanza dei bottoni o seraient rassembl s les principaux leviers du pouvoir On chercherait vainement dans tout Paris pareil endroit Ni la Chambre des d put s ni les minist res ni aucun des postes auxquels le gouvernement peut nommer ne constituent en eux m mes ce haut lieu Le pouvoir n a pas de si ge social pas m me l lys e Un changement de majorit parlementaire un renouvellement d quipe minist rielle l lection d un nouveau chef d Etat ne sont que les pr liminaires un changement dans l utilisation du pouvoir et a fortiori dans sa structure De telles modifications de majorit s parlementaires ou d quipes gouverne mentales se sont produites dans le pass et elles n ont m me pas toujours laiss des traces visibles Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 108 Ces modifications ouvrent des possibilit s rien de plus C est apr s que tout commence de la force politique du courant populaire de l intensit actuelle ou potentielle des luttes sociales de l habilet man uvri re des lus et des gouvernants et surtout de la qualit pr cise de leurs projets d pend la suite Car C est la seconde cons quence la prise du pouvoir est un pro cessus parfaitement dis
382. un centre coordonn de pouvoir Peut on notamment d couvrir dans cet ensemble la division du travail dont Montesquieu a fait la th orie l image de l exp rience anglaise de son temps dont la R volution fran aise a fait sa loi et dont les r dacteurs de Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 88 Constitutions et les professeurs de droit constitutionnel reprennent pieusement la tradition celle des trois pouvoirs dont la s paration prot gerait le citoyen des abus Un l gislatif exprimant la souverainet populaire en normes de droit un ex cutif mettant ces lois en oeuvre un judiciaire veillant leur respect Ce sch ma correspondait un peu la r alit fran aise sous Louis Philippe et sans doute mieux celle des d buts de la Ille R publique Mais il n a plus grande signification aujourd hui LA JUSTICE Retour la table des mati res L ind pendance du judiciaire est un souvenir ou un espoir En pratique la justice est rendue par un corps de fonctionnaires peine plus autonomes que les percepteurs et moins que les enseignants Au p nal la justice a pour puissant fournisseur la police et n y peut mais En toutes juridictions elle a pour tuteur le Parquet corps de magistrats explicitement subordonn s au garde des Sceaux Comme en outre la carri re normale de tout magistrat r sulte d une navette fr quente entre le Parquet et le Si ge et que son avan cement est r gi par une hi rarc
383. up rieur et pour les plus lev s par le gouvernement ou par la loi Il y a ainsi dans chaque minist re sous des noms variables une direction sp cialis e dans les probl mes de personnel et de mat riel Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 91 r seau de centres de d cision relativement autonomes Il faudrait cette fin clairer les rapports entre les principaux centres qui composent un m me minist re apercevoir les articulations et les hi rarchies d un minist re l autre Puis sous un autre angle dessiner les liaisons qui joignent les centres parisiens leurs antennes locales montrer les bouclages qui se forment avec des bonheurs divers certains niveaux tel celui des pr fectures r gionales ou d partementales Puis encore d couvrir la valeur de centre de d cision local que prennent souvent ces antennes locales Il faudrait enfin sortir du champ d action de L Etat proprement dit pour explorer celui des collectivit s locales et des tablissements publics dits autonomes Sortir aussi du champ d action de l administration proprement dite pour d couvrir l immense domaine des organismes vocation sociale s curit sociale assistance publique etc et des organismes publics de l ordre conomique Ce parcours achev quelques id es seraient fortement valid es Le pou voir d Etat se compose d un r seau de centres de d cision relativement autono mes L exercice du pouvoir revient m
384. ur les deux premiers qui contr lent respectivement la police et l arm e il est bien vident qu une direction communiste ne sera admissible avant longtemps que si un syst me quilibr de contre pouvoirs vient contrebalancer les risques r els ou imaginaires qui pourraient en r sulter En clair cela signifie par exemple que le projet r formateur des gauches unies devrait express ment pr voir un quilibre des pouvoirs si l un dirige la police un autre dirigera l arm e etc et un agencement institutionnel garantissant qu il ne s agit pas l d une sym trie factice ou pr caire Pour les deux derniers minist res le probl me est diff rent C est seule ment au moment o les gauches unies auront d fini de concert une politique internationale et europ enne ou encore une politique conomique qui leur soient communes que la pr sence d un ministre communiste au Quai d Orsay ou rue de Rivoli deviendra envisageable tous ces titres on est loin de compte En attendant la crainte du com munisme p se sur le comportement de la gauche non communiste avec d autant plus de force que la puissance relative du P C exc de celle de ses alli s ventuels tant par l audience lectorale que par la vigueur et la disci pline de l organisation Mais il serait malvenu de reprocher au P C son poids relatif et ce n est pas d un camouflage ou d un quelconque sacrifice volontaire op r s par les communistes qu il faut attendr
385. ur les dix ou vingt prochaines ann es l ensemble des probl mes qui se poseront en tout tat de cause la France sera au moins aussi vaste et complexe qu au cours des dix ou vingt derni res ann es En tout tat de cause c est dire abstraction faite de son ventuelle volont de changements suppl mentaires De Gaulle apr s bien d autres a un jour caract ris notre poque par le mot de mutation Il avait raison Le fleuve de notre histoire a rompu son cours vers 1945 Pour se porter vers un autre lit Ce n est pas une r volution ce n est pas non plus une simple volution e La France a entrepris de rattraper le retard de son d veloppement capitaliste traditionnel d protection d clin des petites bourgeoisies e tout en s engageant dans un d veloppement n o capitaliste concen tration r volution technologique e en participant la pouss e mondiale de libre change sous la forme originale et aigu de l int gration europ enne e en relevant les ruines de sa plus profonde d faite e en achevant sa crise coloniale e eten portant la charge d un net redressement d mographique Chacune de ces six volutions aurait suffi marquer cette p riode de quel que originalit Leur cumul est sans pr c dent pour une phase non r volutionnaire On con oit d s lors que toutes les forces politiques aient t d sar on n es depuis vingt ans et voir de quoi demain sera fait on con oit gal
386. ure celle des autres nations du continent Ce n est pas parce que de Gaulle a r v l cette situation en en jouant qu il faut la nier Il serait fort dommageable pour la France et plus encore pour l Europe qu apr s de Gaulle et par r action contre son style pareille possibilit demeur t inemploy e Enfin les contraintes qui p sent sur l Europe ou sur la France doivent toutes et en toute occasion tre soumises une double pes e il faut comme nous avons tent de le faire en valuer la force objective et il faut aussi parce qu elle est toujours diff rente en valuer la force subjective L id e que les gouvernants les responsables politiques les militants ou les citoyens se font de ces contraintes peut tre entach e d erreur Mais surtout elle tend toujours par pr f rence id ologique ou par tradition en m sestimer la valeur absolue et les proportions Il y a dans toute politique tenant compte d un syst me donn de contraintes une part d illusion et une part d acquiescement Le lien traditionnel du P C fran ais avec l U R S S et son id ologie propre le conduisent spontan ment surestimer la noirceur de l imp rialisme am ricain et sur valuer les aspects positifs du camp socialiste m me lorsque ce parti en vient comme en 1968 d sapprouver formellement un acte particulier de la puissance sovi tique Les exp riences pass es de la social d mocratie fran aise expliquent de m me une sur
387. ure actuelle des limites inh rentes au capitalisme Elles se r duisent ceci aux difficult s que comporte toute tentative de coordination du d veloppe ment social la propri t priv e des moyens de production ajoute des difficult s suppl mentaires que l on peut exactement cerner e Mais a contrario l exp rience des principaux pays socialistes fait de son c t appara tre d une part les manques r sultant de la disparition de la propri t priv e des moyens de production et d autre part certaines des limites les plus dangereuses qui survivent au capitalisme Reprenons ces deux points Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 135 LES BLOCAGES Retour la table des mati res Les difficult s qu oppose la propri t priv e au d veloppement social peuvent se d crire sous deux rubriques D une part elles se traduisent par des blocages pr cis dont la liste serait longue propri t fonci re entravant l urbanisation ou la reconversion de la paysannerie pr pond rance d int r ts priv s strat giquement situ s retardant bon nombre de reconversions indus trielles de r organisations commerciales ou financi res ou conduisant faire prendre en charge par la collectivit leur co t excessif parce que tardif blocage du d veloppement de certaines firmes ou de certaines productions parce que la mobilisation de capitaux additionnels mettrait en p ril les int r ts du groupe dirigeant d action
388. ut tre r pond sinon un espoir politique r el du moins un besoin psycho sociologique vident La R volution m me improbable a besoin d un drapeau et celui du P C a rosi avec le temps Les trotskystes ou d autres peuvent prendre le relais S ils r ussissent faire vivre un parti ils maintiendront actif un ferment r volution naire utile la soci t 1ls exerceront sur le P C une pression lat rale qui peut contribuer son volution et besoin urgent ils purgeront la gauche socialiste de sa r volutionnarite d apr s Mai Ce n est assur ment pas de cette gauche r volutionnaire que d pendra dans la prochaine d cennie la transformation de notre pays et la gauche socialiste dont l essor est souhaitable doit en le sachant se d marquer nettement de ces mainteneurs du vieil id al r volu tionnaire fussent ils jeunes et parfois remuants Si la gauche r volutionnaire mijote dans un secteur pr cis la gauche r publicaine est plus diffuse elle fermente de tous c t s et menace de tout contaminer Cette gauche est dite telle par l effet d un long usage verbal qui cr e aujourd hui plus d illusions qu il ne porte de r alit s C est celle o se rangent avec les radicaux certains des socialistes et la plupart des r pu blicains de Progr s Ces hommes leurs client les et parfois leur lectorat ont jadis ou nagu re plus ou moins appartenu la gauche M me s ils croient en tre encore m me s ils s
389. utation qui entrait en sc ne C tait aussi une g n ration qui n avait v cu aucune guerre mais que la t l vision avait initi e toutes celles dont le monde est d chir Comme en tous pays elle se r v lait perm able cet autre probl me comment mettre terme au d sordre mondial toujours renaissant par une r volution malgr la bombe qui fascine les vieux Charg e de ces ferments r volutionnaires et porteuse d un Style nouveau cette g n ration tudiante allait se r v ler beaucoup moins sensible que les pr c dentes aux influences que nagu re encore les trois tendances de la soci t fran aise exer aient sur elle L attraction id ologique manant du troisi me courant ne jouait plus apr s le bannissement des militants tudiants L attraction sociale exerc e par les deux autres courants s affaiblissait aussi Cette attraction sociale se fait habituellement sentir par l origine et par la destination des tudiants Mais l origine sociale des tudiants se modifiait sensiblement beaucoup provenaient de cat gories sociales auxquelles l acc s l enseignement sup rieur avait longtemps t barr Leur destination n exer ait plus le m me attrait non plus Certes beaucoup d tudiants demeuraient sensibles aux n cessit s ou aux commodit s de leur carri re future assurer la rel ve de papa dans quelque fief de la petite France ou s inscrire dans l appareil de l tat ou des grandes firmes Le f
390. ute humanit de la plan te a profond ment boulevers les proc dures anciennes de r solution des contradictions interna tionales jusqu pr sent les complications ult rieures n es de l entr e de la Grande Bretagne de la France et de la Chine dans le club atomique n ont Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 29 gu re perturb ce nouvel quilibre pas plus que l opposition entre la Chine et l U R S S sur la strat gie r volutionnaire mondiale L essentiel demeure l impossibilit d une guerre directe autre que techniquement accidentelle entre les grandes puissances donc l impossibilit de guerres confrontant leurs proches et principaux alli s donc la relative stabilit du partage id ologico politique du monde qui s est tabli de facto ou de jure apr s le conflit de 1939 1945 donc enfin le rejet de la guerre vers les confins du monde indus triel En d autres termes l affrontement du socialisme et du capitalisme est enray parce qu il tend au duel suicide De ce fait chacun des trois syst mes de contradictions qui convergeaient vers cet affrontement s est mis vivre d une vie nouvelle Les rivalit s inter imp rialistes ont r trograd du plan militaire au plan conomique L antagonisme entre colonies et m tropoles a certes m ri puisqu il tait p riph rique jusqu une d colonisation politique presque g n rale mais il a en m me temps gard l essentiel de sa force par
391. uverte comme au Vietnam Elles le font enfin lorsque ce qui est localement contest est non pas l ordre mondial mais seulement la forme ou l intensit de l une ou l autre h g monie par exemple en Hongrie et en Tch coslovaquie d une part au Guat mala au Liban ou Saint Domingue d autre part La position des deux Grands n est d ailleurs pas sym trique ni gale La dissym trie tient la diff rence partielle des enjeux les int r ts conomiques motivant moins fortement l U R S S L in galit se d forme et se d place et rend plus offensive la puissance h g monique qui surclasse l autre jusqu en 1950 1951 la pr pond rance am ricaine semblait incontest e sauf en Europe centrale et en Chine De la guerre de Cor e aux ann es 1958 1960 la capacit offensive stimul e parle rattrapage atomique la r volution chinoise et l avan ce spatiale a chang de camp Ces derni res ann es avec la relance de l conomie am ricaine l essor de sa technologie et les dissensions du camp socialiste la supr matie est redevenue am ricaine UN MONDE FIG ET INSTABLE Retour la table des mati res L ordre mondial tout relatif que fait r gner l inassouvissable tension entre l U R S S et les Etats Unis n est donc pas fig La modification des rapports de force entre les deux Grands et leurs actions offensives ou d fensives le font plus ou moins voluer L initiative de ces actions ne revient d ailleurs pas
392. uvriers que de paysans Des traces actives de ces d calages sont encore tr s perceptibles aujourd hui la m fiance l gard des catholiques de gauche tenus pour des hybrides douteux la d formation ouvri riste etc Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 69 L h ritage id ologique que charrient inconsciemment nos contemporains de gauche ou non p se lourdement sur tous leurs comportements Sans doute son effet le plus manifeste est il celui ci la gauche demeure trop souvent per ue m me par ceux qui la composent comme une n gation et donc com me une anomalie Il est normal d tre de droite ou du centre ou ce qui revient souvent au m me de se croire apolitique La droite et le marais s iden fient tout naturellement la Nation la Patrie en m me temps qu l ordre ils ont m me apr s leur conversion tardive entrepris de s annexer la R publique comme le montrent tous les sigles gaullistes utilis s depuis 1958 de l U N R aux C D R Ce ne sera pas le moins ambitieux des objectifs pour la gauche que de renverser cette pr somption et d appara tre son tour comme l opinion normale qui rend minoritaires et atypiques les opinions hostiles Il faudra pour cela bien des efforts bien des changements qu il devienne normal d tre syndiqu qu il devienne normal pour l immense majorit des salari s de se reconna tre dans les formations politiques de gauche qu il devienne normal pour ceux q
393. v rifier les 23 et 30 juin 1968 Si d aventure les p rip ties de la fin mai 1968 avaient conduit Mend s France au pouvoir il aurait videmment obtenu la m me majorit crasante que le gaullisme a trouv e On a pu l apercevoir enfin dans la crue soudaine des intentions de vote en faveur de l inconnu Poher que les sondages de mai 1969 ont mesur e avant d en r v ler la d crue non moins soudaine Moins mesurable ce vacillement a t perceptible encore en d autres p riodes de crise en 1947 lorsque la guerre froide a d chir le syndicalisme fran ais en 1956 en 1958 et plus encore en 1961 par l effet de la guerre d Alg rie C est ainsi il y a quelque chose d instable dans notre pays qui tient sans doute l oblit ration de son identit nationale et l ampleur des secous ses qu il subit Et il en subira n cessairement d autres dans la prochaine d cennie en douter serait pur ang lisme D o cette contradiction surprenante cl de notre histoire prochaine prendre la France comme une unit dans le monde actuel on d couvre qu elle jouit potentiellement d une libert d allure tr s grande dans une Europe occidentale plus libre que jamais d inventer son histoire Mais prendre la France dans sa diversit interne on la d couvre forte et active mais aussi f brile et divis e Entre les possibilit s d action internationale virtuellement ouvertes au pays et sa capacit effective d action il y a un
394. valuation du r le pr sent des Etats Unis et plus particuli rement des bienfaits actuels de l atlan tisme On pourrait multiplier et affiner de tels exemples ils suffisent situer le r le de l illusion Quant l acquiescement c est un autre probl me toute contrainte peut toujours tre transgress e mais au prix de cons quences que l on peut soit ignorer soit m priser La politique juste n est ni celle qui s en tient strictement au respect des contraintes reconnues ni celle qui en fait fi en toutes occasions Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 53 C est celle qui anticipant les cons quences des actions projet es les tient pour acceptables ou souhaitables Entre le tout est possible rarement vrai et le rien n est possible toujours mena ant le chemin est trouver Robert Fossaert Le contrat socialiste 1969 54 Le contrat socialiste L h ritage La France gouverner Fonder l avenir sur un h ritage est l un des ressorts de la com die classique C est aussi l un des devoirs de toute politique toute soci t pr sente une certaine inertie au sens physique du terme qu elle oppose la volont et l action de ses gouvernants LA FRANCE TROP VIEILLE ET TROP JEUNE Retour la table des mati res L l ment premier de notre h ritage est d ordre d mographique Saign e par la guerre de 1914 1918 la France a t sensibilis e ce probl me entre les deux guerres mais
395. variables l affrontement droite gauche ne se confond pas aujourd hui avec la querelle de la d centralisation le r f rendum d avril 1969 l a bien montr La coexistence d un tat puissant et de structures industrielles archa ques a longtemps inhib l esprit d entreprise le capitalisme fran ais n a gu re t le fait de grands aventuriers Il en est r sult des cons quences qui survivront sans doute quelque temps encore la r forme des structures industrielles aujourd hui en cours le go t de l Etat protecteur m me s il n est plus protec tionniste la m fiance devant toute organisation professionnelle qui aurait le pouvoir de d cider par dessus la t te de chaque patron ce qui fait du C N PF l un des syndicats patronaux les plus faibles du monde capitaliste et ce qui par contrecoup rend les syndicats ouvriers m fiants l gard des contrats et des accords nationaux puisque sur le tas le patron continue de n en faire qu sa t te Toutes ces attitudes commencent changer mais avec quelle lenteur Il suffit d observer la r sistance opini tre et victorieuse que les petits et moyens patrons ont oppos e la loi de 1968 sur le droit syndical dans l entre prise pour en juger Cet individualisme apeur du petit patronat s accompagne d ailleurs tr s souvent d un incivisme aigu les patrons seuls ma tres bord sont aussi ceux qui vendent leurs firmes au plus offrant des investisseurs tranger
396. voir que pourraient prouver l ouvrier ou le fonctionnaire Faut il observer le z le que suscitent les mutualit s et les coop ratives en milieu rural c est dire l o elles ont un contenu vident Cette liste qui pourrait tre ind finiment allong e est plus que suffisante Il y a dans la d mocratie fran aise quelque deux cents mille lus de tous rangs dans les institutions politiques et sans doute autant dans les institutions sociales des syndicats de salari s ceux de copropri taires Il y a dans la soci t fran aise place pour plusieurs millions d lus tous niveaux Inscrire une participation d mocratique dans le plus grand nombre de centres de d cision serait potentiellement la plus f conde des r formes de structure Cette g n ralisation de la d mocratie bousculerait n cessairement bien des organisations existantes Les conseils municipaux et g n raux seraient des plus secou s non pour dispara tre mais pour se re situer par rapport aux nouveaux pouvoirs d mocratiques La gauche n en ferait elle pas les frais surtout si de telles r formes taient conc d es par une majorit r action naire La belle objection que voil et comme elle justifie bien l imputation de conservatisme parfois m rit e par la gauche traditionnelle Car enfin craint elle de perdre de son autorit de son influence et de ses militants utiles en faisant sienne la vieille d finition que Lincoln donnait de la d m
397. x la r volution de Mai pourrait bien aboutir l am ricanisation des universit s On voyait venir sans grande crainte la participation dans l entreprise Bref on s y pr parait dig rer sans aigreurs les maigres r formes d apr s Mai L expansion serait comme toujours la potion souveraine Entre ces deux m thodes la r pression et la fuite en avant le gou vernement a d abord man uvr et compos Il a r cup r l O R T F et donn du jeu l Universit Il a d cor les policiers fid les et rel ch les leaders tudiants un temps arr t s Il a enfin relanc l conomie en adjoignant la demande suppl mentaire n e des hausses de salaires d exceptionnelles facili t s de cr dit aux entreprises mais ici galement il composait car son objectif n tait pas la recherche du maximum d expansion mais bien celle du mini mum d agitation sociale et il fallait cette fin mettre la petite France en mesure de payer le nouveau S M I G sans courir la faillite La faillite des firmes retardataires a t vit e Celle de la monnaie nationale a t rapproch e d autant D s novembre 1968 tandis qu une agita tion tudiante end mique maintenait la balance incertaine entre les efforts de s duction et les volont s de r pression la bonne bourgeoisie fran aise a pris le relais des tudiants dans l assaut du r gime Il lui a suffi de s abandonner sa pente de pr f rer ses int r ts de tr sorerie
398. xpansion comme rem de tous les maux et la seconde d appeler la vigilance et la r pression Mais les chances de l expansion sont douteuses et ne d pendent qu en partie du gouvernement fran ais Quant aux tentations r pressives elles pour raient s enfler dangereusement D j un n o poujadisme boutiquier prend tournure et la querelle des appariteurs muscl s montre jusqu o le besoin d ordre parfois nourri par la gesticulation r volutionnaire pourrait conduire Si ce grouillement encore confus trouvait dans une crise conomique s v re un aliment de choix une v ritable pouss e fasciste pourrait se dessiner en France C est un risque majeur sinon des plus probables Il suffit qu il existe pour motiver de la part de la gauche non pas une vigilance verbale mais une nouvelle offensive Une offensive vers quoi Les groupuscules n ont qu une id e cet gard recr er une situation r volutionnaire comme en Mai et obtenir cette fois que la classe ouvri re ce reprenne des mains d biles des tudiants le drapeau de la r volution Peut on penser que ce la quatri me tendance qu ils ont form e et entraf n e en Mai pourra devenir une composante durable de la soci t fran aise Peut on penser en d autres termes que la cat gorie sociale des tudiants pourra exercer un effet d entra nement et de polarisation sur d autres forces sociales Certains le croient ou l esp rent Ils sont sensib
399. yougoslaves d autogestion certaines des promesses du printemps tch coslovaque voire m me certaines des exp riences cubaines Mais en d finitive par del toutes ces r f rences c est d une entreprise originale qu il s agit ici S il voit le jour le socialisme la fran aise aura eu des pr d cesseurs plus que des pr c dents QUELLE DUR E QUELLE COEXISTENCE Retour la table des mati res S1 la perspective doit tre celle d une coexistence durable avec le capita lisme de quelle dur e s agit il et que veut dire cette coexistence la premi re question il ne pourra y avoir de r ponse qu apr s coup C est parce que la r volution semble pratiquement impossible et subsi diairement parce que le socialisme que les r volutions r ussies ont jusqu ici produit demeure de qualit douteuse qu il faut coexister avec le capitalisme Pendant combien de temps Cela d pendra de plusieurs facteurs dont la port e chappe au pronostic dat Quand la conjoncture politique nationale et internationale aura volu de fa on telle que le champ des possibilit s puisse inclure derechef la r volution l impatience pourra l emporter sur la tempo risation Mais si dans ce d lai l exp rience faite ou en cours laisse apercevoir plus clairement ce que peut tre le socialisme vis ou r v le les capacit s volutives de la coexistence durable elle m me le besoin de r volution pourra s tre affaibli nonobstant

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