Bouffartigues (pdf
Contents
1. action collective et syndicale Ils reposent toujours sur les moins pr caires des pr caires car il n est pas d action collective sans un minimum de ressources pour l action Ces derni res s appuient toujours sur des l ments de stabilit des collectifs de travail pr sents au c ur m me des zones de pr ca rit pour des raisons d exigences productives d ef ficacit de s curit ou de qualit des prestations Si l emploi divise le travail unit BARNIER 2006 ou du moins divise moins Certes une communaut professionnelle autonome reste la communaut pertinente de l action collective la plus solide SEGRESTIN 1979 La conflictualit vivace La Poste repose d abord sur cette derni re Mais les gr ves dans la restauration rapide montrent galement l existence de communaut s groupe sans v ritable qualifi cation m me si aucune exp rience professionnelle n est d pourvue de dynamique d apprentissages de capacit s nouvelles et d attente de reconnaissance de celles ci Dans l exp rience de la pr carit profes sionnelle disqualification arbitraire et non reconnais sance se heurtent des r sistances particuli rement chez les nouvelles g n rations longuement scola ris es Apr s un conflit m me court les relations sont plus humaines Les salari s veulent juste tre respect s MABROUKI 2004 p 32 Mais il y a loin de ces r voltes l2. tives Mission de la recherche de La Poste ZARIFIAN P 2005 Tensions et esprit de r volte dans les entreprises de services in Denis J M eds Le conflit en gr ve Tendances et perspectives de la conflictualit contemporaine Paris La Dispute Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 43
3. in Denis J M eds Le conflit en gr ve Tendances et perspectives de la con flictualit contemporaine Paris La Dispute CINGoLANI P 2005 La Pr carit collection Que sais je Paris PUF Davezies P 2006 Activit subjectivit sant in Thery L eds Le travail intenable Paris La D couverte Durrour C HEGE A 2005 Emplois pr caires emploi normal et syndicalisme Chronique internationale de lI 97 pp 5 21 MaBroUKkI A 2004 G n ration pr caire Paris Le cherche midi Macaun J 1974 Vrais et faux salari s Sociologie du travail n 1 MarTUCELLI D 2004 Figures de la domination Revue fran aise de sociologie 45 3 pp 469 497 MourIAUX R 2005 Le syndicalisme en France collec tion Que sais je PUF NKOUACHET R N 2005 La pr carit de l emploi au service de la prosp rit du fast food Sociologie du tra vail n 4 PAUGAM S 2002 Le salari de la pr carit collection Quadrige Paris PUF PERNOT J M 2005 Syndicats Lendemains de crise collection Folio Actuel Paris Gallimard PERNOT J M 2007 Syndicats et sous traitance aux Chantiers de l Atlantique IRES SEGRESTIN D 1979 Les communaut s pertinentes de l action collective Revue fran aise de sociologie 29 171 203 ZaARIFIAN P 2003 La cohabitation fonctionnaires et agents contractuels La Poste tat des lieux et perspec
4. riode La courbe de la d syndicalisation qui intervient partir de la fin des ann es 1970 est associ e de mani re suffisam ment troite avec celle de la mont e du ch mage et de la d stabilisation de l emploi pour admettre qu il s agit de l un des facteurs cette chute Les formes d emploi flexibles sont de fait un obstacle la participation syndicale seuls 2 4 des salari s en CDD ou en int rim sont syndiqu s AMOSS PIGNONI 2006 En dehors de la CGT tous les syndicats ont d laiss l organisation des ch meurs Le syndicalisme appara t aujourd hui repli dans le secteur public et les grandes firmes du secteur priv au sein desquels il est souvent davan tage repr sentatif du salariat interm diaire que des 34 Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 travailleurs du bas de l chelle Plusieurs recherches ont montr les relations entre pr carisation profes sionnelle et sociale et prise de distance avec la vie syndicale et politique Des comparaisons internatio nales enfin ont montr combien l emploi pr caire mettait partout le syndicalisme au d fi de repenser son mode de contribution l unification du salariat Durour Hece 2005 L affaiblissement du syndicalisme et le recul en longue dur e des journ es de gr ve indica teur d une forme longtemps canonique d action salariale ne signifie pas la fin de la conflictua lit sociale au travail mais le
5. tions sur les 35 heures 40 des Acos sont sur CDD ou CDII Les recrutements r alis s cette occasion sont pour une part des transformations d emplois pr caires en emplois stables En 2004 sont sign s dans l activit courrier par tous les syndi cats sauf SUD les accords de Vaugirard Leur mesure phare est la fin du temps partiel impos et la transformation de 10000 CDD en CDI sur deux ann es 5 Deux ann es plus tard le bilan appara t mitig L emploi pr caire se tasse mais les recrute 3 Ce qui ne signifie pas que les facteurs b n ficiant d un CDI chappent tous cette pr carit du travail notamment au cours de leur p riode d apprentissage s ils sont recrut s directement sur CDI ou m me au del de cette p riode en attente d tre titulaire d une tourn e Les syndicalistes insistent d ailleurs sur ce ph nom ne pour construire du commun entre exp riences diversifi es de la pr carit celle des CDD et des autres postiers quitte parler de pr carisation de l ensemble des postiers Les d clinaisons locales de l accord de d pr carisa tion dit de Vaugirard cf plus loin pr voient d ailleurs des contre parties en termes de flexibilit interne sous forme de polyvalence sur diff rentes tourn es 4 Un exemple parmi d autres Une gr ve de trois semaines paralyse en 2006 les trois agences locales de ColiPoste activit colis du groupe Le
6. des statuts d emploi mais de la d pendance et de la fragilit conomiques des entreprises qui s accentuent tendanciellement au fil d une sous traitance en cascade accompagn es d une d gradation de la condition salariale Emploi conditions de travail risques professionnels 10 et relations professionnelles tendent se d t riorer avec le rang de l employeur formel dans la cha ne des rapports de sous traitance tel point que pour un syndicaliste le v ritable pr caire est celui qui ne sait pas ce qu il devient plus d un mois Ce n est pas un hasard si aucune implantation syndi cale n a pu tre observ e au del d entreprises sous traitantes de premier rang Il est vrai que les grandes firmes donneur d ordre ont fait le choix au cours des derni res ann es de fid liser une partie de leurs sous traitants de premier rang comme les entreprises g n rales de mainte nance Le salariat de la sous traitance appara t donc de plus en plus diff renci Mais il n est jamais l abri de la perte du march confi l employeur de la non application de l obligation de reclasse ment ou d une r embauche par le repreneur des conditions d emploi inf rieures La pr carit des statuts d emploi est d autant plus fr quente que l on s loigne du premier cercle des entreprises sous traitantes La pr carit du travail prend la forme de la segmentation des collecti
7. jeunes des deux sexes qui y transitent notamment mais pas seulement les tudiants il s agit d un petit boulot alimen taire et provisoire parmi d autres Au terme de quelques mois on y est d j ancien Loin d tre un obstacle cette tr s forte mobilit est l un des ressorts du consentement un travail tr s intense et contraignant aux c t s des caract ristiques sociales des salari s proximit des origines et de g n ration favorisant une ambiance familiale et un rapport ludique aux d fis productifs et de l organisation du travail dans laquelle contraintes industrielles marchandes et domestiques s pau lent CARTRON 2005 Et quand apparaissent des vell it s de r sistance collective ou syndicale elles sont vivement combattues par les directions Pourtant plusieurs gr ves dont certaines tr s longues sont intervenues au d but des ann es 2000 chez Mc Donald s ou Pizza Hut Au Mc Donald s de Strasbourg Saint Denis Paris un premier conflit a paralys le restaurant pendant 115 jours fin 2001 suivi par un second plus long encore une ann e en 2003 2004 Le premier fait suite au changement de g rant 15 il est d clench par le licenciement de cinq d l gu s du personnel pour vol Tous sont swing managers premier niveau d encadre ment ou managers etmembres de la CGT La gr ve fortement m diatis e et soutenue par un comit de soutie
8. mercenaires stabi lit de l emploi et territoriale pour les autres Quitter le restaurant et le secteur majorit Promotion hi rarchique minorit Mobilisation des pr caires Non Non Oui Strat gie collective de s curisation professionnelle Respect du Code du travail Limiter l emploi pr caire Transformation CDD et CDI temps partiel en CDI temps complet Respect du Code du travail Homog n iser conditions HSCT Limiter l emploi pr caire Reprise acquis en cas licenciement Respect du Code du travail Reconnaissance de l anciennet Obstacles sp cifiques l action syndicale T lescopage syndicalisme fonctionnaire salariat priv Division intra salariale organiques sous traitants R pression Instabilit rapport Instr au travail tudiants dispersion soumission R pression Turn over syndical D fis pos s Organiser les pr caires Contenir la flexibilit interne Crise du syndicalisme Peser sur avenir de La Poste Organiser les entreprises ST Sortir de l entreprise du site et de la branche Reconstruire entit pertinente Articuler aide individuelle et mobilisation collective Crise du syndicalisme Peser avenir branche et firmes Organiser les salari s Sortir de l entreprise Alliance clients autres mouvements Articuler aide individuelle et mobilisation collective Crise du syndicalisme niques et quelques rares grand
9. organisation collective et la syndicalisation durables La question de la forme syndicale qui peut faire sens dans les perspectives individuelles de stabilisation ouvertes aux pr caires se pose de mani re n cessairement diversifi e selon les contextes Et la rencontre est elle toujours possible entre pr caires et syndicalistes compte tenu de la distance entre les profils sociaux et culturels des uns et des autres Notre recherche montre qu elle est incontestablement plus facile quand ces profils sont proches comme dans le cas de La Poste que quand ils sont loign s comme dans le cas de la restauration rapide On rejoint ici les conclu sions de la comparaison internationale conduite par PIRES L exigence de renouvellement pr sent e aux syndicalismes n est pas nouvelle mais les trans formations li es aux relations d emploi la rendent aujourd hui beaucoup plus radicale Il s agit d aller chercher dans des endroits o ils sont absents des 16 Cf par exemple l article pionnier de Jacques MaGauD 1974 salari s qui pr sentent des caract ristiques sociales loign es de celles de la majorit de leurs mandants L enjeu est de savoir si le syndicalisme peut servir de lieu d identification une palette plus large de populations salari es souvent en rupture avec les syst mes d alliance internalis s au sein du salariat ancien Durour HEGE 2005 p 21 22 Cette derni re difficult e
10. ou de travail non traditionnelles et les caract ristiques sociales des travailleurs permet d viter la pente mis rabiliste d un tel amalgame Bouruis Witts 2001 Maints travaux ont montr que la discontinuit des p riodes d emploi pouvait dans certaines conditions tre relativement ma tris e par les salari s Reste que les statuts d emploi pr caires sont aujourd hui dans trois cas sur quatre subis et non choisis et qu ils prot gent cinq fois moins bien du ch mage que les emplois sur CDI Les jeunes y sont nettement surexpos s sans que ces emplois soient r serv s une file d attente dans laquelle patien teraient les outsiders aux portes du noyau de stabi lit des insiders Si une majorit d entre eux peut esp rer quitter le monde du travail pr caire et non qualifi en cours de carri re ce n est pas n cessaire ment le cas pour ceux qui cumulent faibles ressources scolaires et position domin e dans les rapports de sexe ou de race AMOSS CHARDON 2006 D stabilisation de l emploi et difficult s du syndicalisme Appr cier le r le qu a pu jouer la d stabilisa tion de l emploi dans la crise du syndicalisme en France exc de largement l ambition de ce texte On sait combien cette derni re fait l objet de th ses distinctes Certains chercheurs mettent en avant son institutionnalisation et sa professionnalisation associ es son loignement de sa base s
11. significative des CDD et du moins dans le d partement tudi renouveler l influence syndicale chez les nouvelles g n rations de postiers En puisant dans l h ritage des succ s des luttes anciennes pour la titulari sation des auxiliaires le syndicalisme parvient dans ce cas formuler des r ponses encore perti nentes Reste qu une partie importante des pr caires ne parvient pas s inscrire dans la file d attente qu elle est tr s d munie au cours des s quences de non emploi et que la relation entre syndicats et salari s demeure marqu e par l utilitarisme Et faute de peser sur les orientations strat giques d une entreprise sujette aux logiques de la d r glementa tion les syndicats influencent finalement peu les grands choix en mati re de gestion de l emploi et du travail Sites p trochimiques fragilit des initiatives syndicales face la pr carit sous trait e Si le syndicalisme des postiers a mis quelques ann es prendre la mesure de la rupture introduite par des Acos aux c t s des fonctionnaires c est pr s d une vingtaine d ann es qui s coulent entre les ann es 1970 quand les firmes s engagent dans des politiques d externalisation syst matique et le milieu des ann es 1990 o des syndicats tentent quelques adaptations substantielles de leurs modes de r ponse Ils le font dans un contexte marqu par l irr versibilit de fait d une g
12. sup rieur la moyenne nationale L objectif est que les gens qui rentrent dans la bo te aient une pers pective de CDI le plus rapidement possible De fait l accord d partemental institutionnalise un parcours de stabilisation bas sur l anciennet et scand par des seuils dont le terme est pour les facteurs au del de l acc s au CDI la titulari sation sur une seule tourn e La direction de l entreprise r gule ainsi l embauche et la gestion des d butants dans une perspective plus propice leur engagement professionnel et au souci de qualit de service La question reste pos e du poids qu occupera l avenir le recrutement sur CDD par rapport d autres modalit s s il devait rester pr pond rant on pourrait interpr ter ce type d accord comme une r gulation conjointe d une file d attente aux portes d un march interne du travail s il devait diminuer sensiblement les syndicats seraient parvenus r duire une modalit centrale de la pr carit professionnelle La Poste Pr carit et pr caires occupent galement une certaine place dans l activit syndicale ordinaire n cessairement in gale selon la densit et le dyna misme des quipes syndicales au niveau des tablis sements prises de parole tracts prise en charge de cas individuels Toutefois l interpellation collective des pr caires est rare et la mobilisation collective de ces derniers plus
13. une r volution silencieuse s op re au sem de l emploi statutaire avec la mont e en puissance d un salariat de droit priv 36 Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 suite la transformation de La Poste d une admi nistration d tat une entreprise publique aux c t s des fonctionnaires les agents contractuels Acos repr sentent aujourd hui 40 des effectifs Si la part des emplois de statut pr caire au sens strict CDD int rim CDII contrat dur e ind termin e intermittent oscille de 8 11 dans l ensemble des effectifs au cours des dix derni res ann es il faudrait leur ajouter les CDI temps partiel contraint galement consid r s comme pr caires dans les derniers accords collectifs de d pr carisa tion Le fort taux de syndicalisation 20 25 ne doit pas occulter l affaiblissement et la division des syndicats ou la non g n ralisation de conflits du travail nombreux mais localis s Enfin les Acos ont un statut professionnel sensiblement d grad eu gard aux fonctionnaires et ce sont pour la plupart d anciens CDD qui forment ainsi un vecteur central du remodelage en cours de la main d uvre 2 Les h sitations des orientations syndicales leur endroit sont significatives du paradoxe face auquel elles se trouvent devoir s emparer de la d fense des salari s appel s devenir majoritaires sans renoncer se
14. GoLANI 2005 on distinguera trois sens le travail ou l emploi pr caire les salari s pr caires la pr carit comme manifestation sp cifique de la pauvret en s int ressant ici surtout aux deux premiers On pr cisera avec S Paugam 2002 que emploi et travail pr caires ne se confondent pas mais se combinent diversement et se superpo sent parfois La notion de pr carit d emploi est li e au contrat de travail pr carit de droit elle n est qu une composante de l instabilit d em ploi pr carit de fait celle de pr carit du travail s applique l activit de travail ses conditions sa reconnaissance pratique et symbolique La pr carit d emploi de droit est la plus visible d signant les formes juridiques qui s cartent de la norme du CDI temps plein avec un seul employeur La pr carit du travail ne concerne pas que les salari s en emploi pr caire mais les affecte plus syst matiquement On ajoutera la pr carit de l emploi et du travail la pr carit des relations professionnelles ineffecti vit ou faible application du droit du travail et du droit syndical composantes actives des premi res sur deux de nos trois terrains d enqu te Tous les salari s sur statut d emploi pr caire ou dans des situations d emploi pr caires de fait ne se vivent pas et ou ne peuvent tre consid r s ipso facto comme pr caires La distinction entre les formes d emploi
15. SYNDICATS ET PR CARIT Pr carit s professionnelles et action collective La forme syndicale l preuve Paul Bouffartigue Trois tudes de terrains contrast s au plan des formes de pr carisation de l emploi et des modalit s de l action syndicale et collective montrent que la notion de pr carit est relative pol mique et normative et comment elle remet en question les assises sociales et institutionnelles du syndicalisme A La Poste le syndicalisme parvient contenir la pr carisation de l emploi et renouveler son influence chez les salari s qui int grent l entreprise via l emploi instable Sur des sites p trochimiques quelques exp riences fragiles tentent de faire face la pr carit sous trait e Des gr ves ont clat dans la restauration rapide sans que le syndicalisme ne s y implante significativement La remise en question de la forme syndicale est d autant plus radicale qu est boulevers e la pertinence de la double r f rence l entreprise et la branche d activit comme fondements de l organisation et de la repr sentation syndicale et que l espace professionnel concern offre peu de perspectives de stabilisation Le lien troit entre la pr carisation de l emploi et du travail et l affaiblissement du syndica lisme semble aller de soi L tymologie du mot pr caire precarius obtenu par la pri re comme le mouvement de la jeunesse scolaris e contre le CPE expr
16. aphie AMOSS T 2004 Mythes et r alit s de la syndicalisa tion en France Premi res synth ses n 44 2 octobre AMOSS T Pignoni M T 2006 La transformation du paysage syndical depuis 1945 Donn es sociales Paris Insee AMOSS T CHARDON O 2006 Les travailleurs non qualifi s une nouvelle classe conomie et statis tique n 393 394 ANDOLFATTO D LABB D 2006 La transformation des syndicats fran ais Vers un nouveau mod le social Revue fran aise de sciences politiques vol 56 n 2 BARNIER L M 2006 Du travail collectif au statut col lectif in Artous A eds Travail critique du travail et mancipation Paris Syllepse BOUFFARTIGUE P PENDARI S J R PEROUMAL F PER RIN E Avec la participation de Bouteiller J Con TREPOIS S FRIBOURG B JEAN R ORBAN E Samzun T 2007 Action collective et pr carit s Le syndicalisme l preuve Enqu te sur trois secteurs d activit Poste sous traitance p trochimique restauration rapide LEST Mars Bouruis A Wis T 2001 L clatement de l emploi traditionnel Les d fis pos s par la diversit des emplois typiques et atypiques Relations industrielles 56 1 56 89 CARLIER A TENRET E 2007 Des conflits du travail plus nombreux et plus diversifi s Premi res synth ses 08 1 CARTRON D 2005 Engagement dans le travail et dans la gr ve chez Mac Donald s
17. ariat et des ressources disponibles en mati re d action syndicale et collective La seule des trois dans laquelle des r sultats significatifs sont obtenus en mati re de d pr carisation et de renouvellement de la syndicalisation est celle de la grande entreprise statut avec unicit d employeur pour les stables comme pour les pr caires et o le syndicalisme conserve la fois des assises institutionnelles et une base sociale relativement fortes Les quelques initia tives syndicales intervenues dans le monde de la sous traitance p trochimique apparaissent d chelle tr s modeste eu gard la puissance du processus d externalisation des activit s et d clatement juri dique des collectifs productifs Quant aux unit s de la restauration rapide bas e structurellement sur Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 41 l appel une main d uvre juv nile hyper mobile on voit mal comment le syndicalisme pourrait dura blement s y implanter C est sans doute ce dernier cas de figure qui invite le plus renouveler ou largir les premi res approches dualistes des enjeux de la d stabilisation des formes d emploi 16 d sor mais cette derni re n affecte pas que la p riph rie d un noyau stable mais caract rise le fonction nement de secteurs d activit entiers notamment dans le commerce et les services Pourtant m me dans ces contextes existent des embryons d
18. conflit est d clench par des sanctions li es des accusations de vol Il porte galement sur le management par le stress la charge de travail excessive mais aussi sur l emploi volant de remplacement brigade de tri et passage de tous les CDD en CDI 5 La CGT motive sa signature notamment par le fait que l accord soit r alis partir des revendications des salari s et non du cahier revendicatif patronal SUD justifie son refus par son caract re insuffisant et incomplet et son inscription dans l clatement de l entreprise il ne concerne qu un des quatre m tiers du groupe Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 37 ments sur CDD se poursuivent L objectif affich de leur limitation 5 des effectifs s loigne Dans le d partement o l enqu te a t conduite un important conflit intervient d but 2005 6 et le dialogue social est pratiquement suspendu pendant plusieurs mois L accord national n est donc d clin que dix huit mois plus tard La CGT ici en position tr s dominante 7 s est efforc e d encadrer les contreparties qui sont autant de concessions en mati re de principes accepta tion de tests dans la p riode qui suit la premi re embauche et non pas avant et de la polyvalence sous la forme d une int gration au sein de volants multisites contreparties jug es acceptables en change d un taux de d pr carisation
19. d marches vont de la d fense des salari s de la sous traitance pr sents sur le site la mise en place de collectifs de site 12 en passant par l action en amont des clauses du contrat de sous traitance et l ouverture du CHSCT du donneur d ordre aux salari s sous traitants Le dernier mod le d action transcende plusieurs sites industriels pour s tablir l chelon d une zone territoriale plus large La pertinence de cette derni re renvoie l unit g ographique r elle au sein de laquelle circulent nombre de travailleurs de la sous traitance C est dans ce mod le que s inscrit un collectif d partemental multiprofessionnel de la sous traitance 13 ou une coop ration entre une dizaine de CHSCT d entreprises donneur d ordre et sous traitantes de la zone concern e Il reste que ces deux derniers types d initiative restent tr s fragiles voire marginaux et demeurent finalis s de mani re r aliste par les deux objec tifs de base traditionnels faire appliquer le droit du travail et implanter le syndicat l o c est possible 12 Un collectif informel existe pendant quelques ann es PUL de la zone commune dont le site de la Shell est le premier p le d activit Il regroupe des syndicalistes du plus important syndicat de la firme pharmaceutique ils en sont l initiative partir de leur exp rience sur les questions de sant et de s cu rit et quelques syndica
20. deux principaux sites PETROX complexe p trochimique comprenant une raffinerie et plusieurs unit s chimiques employant 1500 salari s directs et autant de salari s ext rieurs Vingt des 500 entreprises sous traitantes absorbent 65 du chiffre d affaires sous trait et CHIMIX qui fabrique des produits issus du chlore emploie 380 personnes et sous traite avec cinquante firmes Une enqu te par questionnaire a galement t r alis e aupr s de 100 salari s accueillis la permanence juridique d une des UL Restauration rapide Quatorze entretiens ont t r alis s aupr s de syndicalistes et d animateurs des gr ves du d but des ann es 2000 principale ment chez Mc Donald s gr ves de 2001 2002 puis de 2003 2004 au restaurant de Strasbourg Saint Denis secondairement chez Pizza Hut Ces gr ves ont galement fait l objet d observation directe Tracts articles de presse et film documentaires ont galement nourri l analyse de ces conflits firmes priv es o la pr carit d une fraction des travailleurs intervenant sur les sites est en quelque sorte sous trait e d autres employeurs et o la syndicalisation ne concerne que les salari s orga Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 35 Tableau 1 Les trois secteurs d activit tudi s La Poste Sous traitance p trochimique Restauration rapide Effectif dont pr caires 300000 g
21. e en partie la prise de distance op r e ult rieurement par plusieurs des leaders de ces gr ve par rapport l engagement syndical Les trajectoires biographiques des jeunes anima teurs des gr ves montrent que le d clencheur de leur engagement dans l action est moins la r volte contre les conditions de travail et d emploi en elles m mes qu une rupture entre leurs esp rances et la r alit de leurs positions professionnelles Les plus engag s dans l action sont parmi les plus anciens par ailleurs souvent membres de la hi rarchie interm diaire des restaurants Ils vivent comme une trahison le sort qui leur est fait Nombreux sont ceux qui bien que largement issus des immigrations africaines sont en SYNDICATS ET PR CARIT position de d classement social et ou scolaire relatif Dans tous les cas ils puisent dans des valeurs h rit es de leurs univers de socialisation des raisons de refuser d aller plus loin dans le consentement des modes de management qui tendent les mettre en contradiction avec eux m mes ou avec leurs coll gues quipiers Un engagement syndical durable peut alors quand il n est pas n goci contre un d mission devenir un mode de professionnalisation alternatif et un moyen de tenir de mani re exceptionnellement longue dans un contexte de travail p nible Les conflits de la restauration rapide sont ils destin s rester sans lendemain Si l organisation
22. encore La convention selon laquelle un CDD ne fait pas gr ve est tr s large ment partag e et leur syndicalisation n est gu re sollicit e Par contre en se syndiquant assez massi vement peu de temps apr s l obtention de leur CDI les anciens pr caires t moignent d une sorte de reconnaissance de dette l gard des syndicats 6 Les facteurs se sont mis en gr ve pendant trois semaines suite une importante restructuration des activit s de distri bution sur la seconde agglom ration urbaine du d partement Le passage au tri alphab tique se traduit par l exclusion des facteurs des op rations de tri g n ral et par vingt cinq suppressions d emploi Le travail reprendra avec la sauvegarde de la moiti d entre eux 7 Elle y recueille 51 5 des voix 34 8 au plan national et 56 5 39 2 dans les seules activit s courrier SUD avec 20 des suffrages a localement la m me influence qu au plan national Un des ressorts de ce mouvement d adh sion r side dans la proximit sociale tr s forte de ces pr caires par rapport au milieu postal plus de la moiti ayant un membre de leur famille travaillant ou ayant travaill La Poste 8 L action syndicale sur le terrain de la pr carit appara t donc ici relativement efficace et ce sur un triple plan elle parvient contenir la pr carisation des statuts d emploi accompagner la stabilisa tion professionnelle d une fraction
23. fs de l isolement et du nomadisme professionnel des ouvriers de leur surexposition tr s nette aux accidents du travail et aux maladies professionnelles Quant la pr carit des relations professionnelles elle se signale par la fr quence de la r pression antisyndicale Les syndicalistes rencontr s distinguent volon tiers deux types d ouvriers de la sous traitance cf encadr 2 Le premier minoritaire particuli re ment individualiste et loign du syndicalisme est le mercenaire Souvent int rimaire ou faux artisan son mode d emploi est choisi et non subi il s appuie sur une qualification recherch e pour vendre au meilleur prix une prestation de travail dont les conditions lui importent peu Le second est celui qui subi sa pr carit C est d abord la peur du ch mage et l espoir d un statut plus stable qui le tiennent distance du syndicalisme m me s il peut s en rapprocher ponctuellement sur un mode instrumental tudi e partir de la seule CGT l activit syndi cale en direction de la pr carit sous trait e se d ve SYNDICATS ET PR CARIT Encadr 2 Pr carit choisie pr carit subie les pr caires vus par deux syndicalistes Il y a deux sortes d int rimaires ceux qui le subissent pour diff rentes raisons trop jeunes trop vieux et ceux qui le revendiquent qui ne veulent que a qui ne veulent pas de relation avec les CDI ceux qu on appel
24. imant autant le refus de l arbitraire que de l incertitude du lendemain rap pellent que la mise en ins curit des travailleurs signifie d abord leur soumission au pouvoir discr tionnaire des employeurs Cependant faute d inter roger l vidence de ce lien on risque de le natura liser les processus qui sont au principe de la crise profonde du mouvement syndical ne d bordent ils pas amplement ceux qui tiennent la d stabilisation des formes d emploi et au ch mage de masse Et le retour de l ins curit sociale n offre t il pas des espaces l action collective pour la dignit de la condition salariale dans un contexte o tout montre la persistance d une conflictualit sociale LEST CNRS universit Aix Marseille I et II E mail paul bouffartigue univmed fr Une premi re version de ce texte a t pr sent e aux XI Journ es internationales de sociologie du travail restructurations pr carisation et valeurs Londres 20 21 22 juin 2007 sous le titre Pr carit s professionnelles et action collective Enseignements d une recherche sur trois terrains contrast s Il s appuie sur une recherche r alis e pour le compte de la Dares P BOUFFARTIGUE J R PENDARI S F PEROUMAL E PERRIN Avec la participation de J Bouteiller S Contrepois B Fribourg R Jean E Orban T Samzun Action collective et pr carit s le syndicalisme l preuve Enqu te sur trois secteurs d activi
25. l a sorti souvent je suis d accord avec vous avec ce que vous dites mais non Ce qui est faux Parce que dans ma bo te personne ne sait qui est syndiqu nous on le sait mais pas le patron Certains des CDD qui viennent nous voir nous disent qu ils sont syndiqu s isol s mais personne n est venu nous voir pour se syndiquer lls viennent nous demander de l aide Les gars qui viennent te voir c est ceux qui pensaient qu ils allaient tre embauch s et qui comprennent qu ils ne le seront pas Pour les pr caires le syndicat sert d avocat d assis tante sociale de conseiller juridique de conseil technique sur les conventions collectives mais on est pas un outil revendicatif on est un d fenseur Syndicaliste sous traitant de premier rang loppe selon quatre registres deux assez classiques les deux suivants plus novateurs les trois unions locales dont rel vent les sites p trochimiques accueillent des salari s isol s priv s du soutien d un syndicat d entreprise tr s souvent pr caires et s efforcent de les orga niser voire de les soutenir juridiquement 171 10 Accidents avec arr t et occurrence des maladies profes sionnelles sont sept dix fois plus lev s que chez les salari s directs du donneur d ordre 11 La moiti des personnes accueillies par une des perma nences juridiques d une des UL ne sont pas sur CDI temps p
26. le les forfaitaires en fait des ind pendants les mercenaires ceux qui sont pay s la t che au pouce c est dire la longueur de tuyaux soud s et qui se font 1 200 1 500 francs par jour C est norme ce qu ils gagnent c est quatre fois ce que je gagne Ce sont des gens qui sont tr s forts dans leur m tier Ceux l c est m me pas la peine d aller les voir des jeunes autour de 30 35 ans qui viennent de se marier faut que a rentre II faut les voir dans les ateliers ils ne l vent pas la t te parce qu ils sont pay s au pouce des gens qui sont tr s comp tents dans leur m tier et qui restent 12 heures par jour IIs sont capables de souder dans des positions inima ginables et c est toujours nickel C est des artistes IIs ont une force de travail qui est quand m me impressionnante parce qu ils sont attir s par le gain D s fois ils ne mangent pas ils font non stop Je pourrais faire respecter les temps de pause Mais avec les mercenaires si je lui dit d arr ter 20 minutes je lui fait p ter 30 ou 50 euros Il va me dire oui mais d s que je tourne le dos il repart Syndicaliste sous traitant de premier rang Ceux qui subissent la pr carit c est la peur et l esp rance d tre bien vu du patron Les gens ont dans la t te si je suis CGT si je me fais voir si je m engage je ne travaille plus On me
27. lein Femmes et jeunes sont galement surrepr sent s Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 39 L implantation au sein des PME en particulier au sein de sous traitants reste l horizon privil gi de cette activit avec quelques r sultats chez des sous traitants de premier rang quand ils sont parvenus s implanter au sein d entreprises sous traitantes les syndicats s effor cent d y limiter le nombre d emplois pr caires et d y obtenir des transformations en CDI d y faire respecter le droit du travail ainsi que les normes en mati re de conditions de travail d hygi ne et de s curit individuelle et collective Conscients que les sources de la pr carit se situent tr s largement en dehors des limites de leur entreprise ces syndicalistes sont parmi les plus acquis l id e selon laquelle il convient de sortir de ces limites Les risques professionnels sont le domaine privil gi partir duquel les clauses des contrats de sous traitance peuvent tre d nonc es et modifi es la surexposition des travailleurs en sous traitance est manifeste et les enjeux de sant et de s curit au travail sont tr s li es dans ces indus tries aux enjeux de s curit des installations et de l environnement Au travers du syndicalisme de site on rencontre des initiatives qui peuvent tre prises par des syndicalistes qui rel vent du personnel direct du donneur d ordre Ces
28. listes d entreprises sous traitantes de rang 1 et de l int rim 13 Plus officiel que le pr c dent il est cr en 1997 dans le cadre de l UD l initiative d un responsable de la p trochimie et appuy par des militants de la construction Il regroupe trois f d rations professionnelles chimie construction et m tal lurgie trois UL et une dizaine d entreprises Pour nombre de syndicalistes les pr caires de la sous traitance restent invisibles Les militants les plus impliqu s dans leur d fense ont d ailleurs acquis une sensibilit sp cifique la pr carit au travers de leur biographie Les concurrences et hi rarchies au sein du salariat se retrouvent au sein du syndicalisme mis en demeure de les transgresser en vue de recons truire des solidarit s plus larges en son sein D finir les nouvelles entit s pertinentes de l action collective appara t la fois indispensable et risqu au regard des h ritages qui font encore r f rence Restauration rapide la port e de gr ves improbables Dans ce secteur tout ou presque semble rendre fort improbable l action collective et l implanta tion syndicale classiques 74 S il symbolise bien le pr cariat des services c est moins au travers des statuts d emploi offerts bien qu il s agisse massive ment d emploi temps partiel que d une tr s forte instabilit professionnelle de fait Nkouachet 2005 Pour la plupart des
29. lui des fonctionnaires ZARIFIAN 2003 SYNDICATS ET PR CARIT de sa tourn e 3 Ces s quences d apprentissage supposent un fort engagement professionnel sans autre contrepartie que l esp rance d une stabilisa tion ou l inverse la contrepartie de la bri vet de la dur e d emploi Si cette polyvalence reste g n ralement limit e au cadre d un m me bureau et du m me type d emploi elle peut s tendre plusieurs tablissements et types d emploi La pr carit des relations professionnelles bien moins marqu e que sur nos deux autres terrains n est cependant pas inconnue La Poste la fr quence des recours juridiques pour usage abusif de CDD le montre des responsables des ressources humaines de l entreprise reconnaissant volontiers leurs diffi cult d appropriation du Code du travail et de la complexit des r gles juridiques dans un monde professionnel hybridant les r f rences la fonction publique et au droit priv Au cours des derni res ann es la pr carit de l emploi a t la fois un des th mes centraux explicites de l activit syndicale sous la forme de recours juridiques particuli rement pris s par SUD de la n gociation collective et de l activit syndicale ordinaire et composante r currente des conflits portant d abord sur les conditions de travail et sur les effectifs 4 la fin des ann es 1990 la veille des n gocia
30. mps la r sistance la pr ca rit dans les nouvelles g n rations manifeste dans la restauration rapide comme dans d autres luttes est prometteuse Une meilleure connaissance par les jeunes de leurs droits l or e de leurs premi res exp riences professionnelles dans ces vastes zones du pr cariat sans droit ne pourrait elle pas tre une des priorit de l action syndicale SYNDICATS ET PR CARIT Bien d autres d fis sont pos s au syndicalisme entrevus sans tre approfondis au cours de notre enqu te et qui participent de ses difficult s multi formes y compris sur le terrain des pr carit s profes sionnelles promouvoir en son sein des leaders repr sentatifs de la diversit actuelle du salariat pr caire sortir d une relation de don contre don aux salari s pour accompagner leur d veloppement d un pouvoir d agir autonome Davezies 2006 faire face la disparition des grandes esp rances sociales qui soutenaient l action quotidienne et des modes ant rieurs d agr gation de la repr sentation salariale PERNOT 2005 dit autrement prendre en compte l ench ssement dela crise syndicale dans celle de la repr sentation politique peser sur les orienta tions gestionnaires et strat giques des firmes nouer des alliances avec la n buleuse d autres mouvements sociaux contestant leur mani re le capitalisme lib ral Autant d objets de recherches d velopper Bibliogr
31. n ext rieur tr s actif prend fin avec la r int 14 On prend appui ici principalement sur PEROUMAL F et PERRIN E Luttes et syndicalisme dans la restauration rapide parisienne in BOUFFARTIGUE P et al op cit 15 Plus de 80 des restaurants de cette enseigne rel vent de ce mode de gestion 40e Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 gration des licenci s Le second est aussi provoqu par le licenciement d un d l gu membre cette fois de la CGC et par ailleurs directeur adjoint Il prend cette fois la forme d une occupation des locaux le r le du comit de soutien est plus faible La CGT n y participe plus et contr le de plus pr s le conflit Si le d l gu licenci est r int gr et une augmentation salariale obtenue les syndicalistes vis s par le licen ciement lors du premier conflit acceptent de n gocier leur d part L implantation syndicale en sort affaiblie d autant plus que plusieurs animateurs de la premi re gr ve ont pris leur distance avec le syndicat Trois ans plus tard dans le m me restaurant c est une liste ind pendante qui devance la CGT aux lections professionnelles laquelle ne conserve que huit adh rents sur une cinquantaine de salari s Le r le d terminant jou dans certains de ces conflits par un comit de soutien non strictement syndical et ext rieur aux collectifs en gr ve ici au cours de la premi re gr ve a t s
32. n noyau salarial central fasse encore sens la fois dans les esp rances indivi duelles des pr caires et dans une strat gie collec tive de s curisation Dans le second cas l unifica tion du statut reste re construire sur des bases productives et territoriales incertaines Dans le troisi me l am lioration substantielle de la condi tion salariale appara t comme un objectif hors de port e court terme m me si toute exp rience laborieuse est porteuse d apprentissages ven tuellement enrichis par des pratiques de r sistance ou d action collectives valorisables ult rieure ment dans d autres mondes professionnels Dans le monde de la sous traitance comme de la restaura tion rapide obtenir effectivit du droit du travail et des relations professionnelles reste encore souvent le seul horizon d une action syndicale sans cesse reprendre 17 17 On en trouvera des exemples dans la monographie r alis e par Jean Marie Pernot sur l exp rience de L Union syndicale multiprofessionnelle CGT du site des chantiers navals de Saint Nazaire PERNOT 2007 42e Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 Red ployer vers le pr cariat les forces syndicales encore tr s largement ancr es dans le noyau prot g du salariat ne va pas sans fortes tensions De nos trois terrains seule la sous traitance p trochimique a t le lieu d bauches revendicatives allant dans ce sens En m me te
33. ntable une implantation syndicale malgr l appari tion de quelques gr ves spectaculaires Pour finir la comparaison de ces trois configurations montre l enjeu crucial des mod les pertinents de s curi sation professionnelle opposer aux pr carit s professionnelles D finir la pr carit Plut t que d enfermer apriori la notion de pr carit dans une d finition savante il est apparu f cond de prendre acte de sa puissance et de sa polys mie dans les repr sentations ordinaires du Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 33 monde social Cat gorie normative et pol mique s il en est elle est utilis e d abord pour d noncer comme a normale une situation ou une condition au regard d une norme positive de stabilit ou de s curit Cat gorie toujours relative et relationnelle donc c est une construction sociale susceptible de conna tre de grandes variations selon les contextes et les acteurs La distance semble consid rable entre le CDD de La Poste inscrit dans une sorte de file d attente pour l acc s l emploi stable de la grande firme publique et l quipier de Mc Donalds ne passant que quelques semaines dans un des multi ples petits boulots n cessaires la poursuite de ses tudes Et pourtant dans chacun des cas la notion d emploi pr caire fait sens Toutefois quelques points de rep res concep tuels et empiriques doivent servir de boussole Avec P CIN
34. ociale ADOLFATTO LABB 2006 D autres avancent d abord le r le de la crise conomique comme de la division et de la d sorientation strat gique des syndicats MourIAUx 2005 Cette crise touche la plupart des pays anciennement industrialis s mais elle est particuli rement accus e en France Un simple regard sur l volution du taux de syndicali sation dans notre pays depuis soixante ans sugg re la complexit et la multicausalit du ph nom ne Plus du quart des salari s est syndiqu dans l imm diat apr s guerre contre 8 aujourd hui AMOSS 2004 Mais cette chute sanctionne une volution en quatre temps une diminution rapide et r guli re jusque la fin des ann es 1950 une l g re remont e des ann es 1960 au milieu des ann es 1970 un nouveau d clin jusqu au d but des ann es 1990 suivi d une stabilisation On le sait en longue dur e le taux de syndicalisation en France appara t comme l un des plus faibles des pays industriels les p riodes d intense conflictualit sociale et poli tique le Front Populaire la Lib ration se tradui sant par des vagues de syndicalisation relativement ph m res Au cours des Trente Glorieuses les volutions apparaissent donc paradoxales ressac de la vague exceptionnelle de la Lib ration puis conso lidation associ e celle de la soci t salariale et du compromis conomique et social keyneso fordien qui singularise cette p
35. oulign Issu du r seau stop pr carit r cemment cr regroupant des militants venus d horizons politiques et syndicaux divers valorisant le pragmatisme et la non instrumen talisation du mouvement il participe de la construc tion de la cause gr viste et de la mont e en g n ralit des registres de justification On passe d une gr ve d mdignation et de d nonciation personnalis e du g rant une plate forme revendicative standard incluant des demandes sp cifiques au conditions locales de travail bref une gr ve critique dans laquelle l organisation du travail et de l emploi consi d r e hier comme normale est d sormais jug e anormale CARTRON 2005 D autres aspects des modalit s de la mobilisation collective sont notables occupation de restaurants non gr vistes et diffusion partielle du conflit au sein de la cha ne usage d in ternet et des t l phones portables afin de coordonner quotidiennement les actions disqualification symbo lique de l enseigne aupr s des clients par d tourne ment de ses slogans publicitaires mise en place d un ph m re collectif restauration rapide au sein de la CGT qui participera de la construction ult rieure du r seau stop pr carit Nombre de ces modalit s de lutte et des styles militants qui les portent entrent en tension avec la culture port e par les syndicalistes plus institutionnels tels les permanents ce qui clair
36. r f rer au fonctionnariat comme mod le statu taire C est au travers de tensions internes et apr s un certain d lai d adaptation que les syndicats se sont tourn s vers les Acos Mais d un syndicaliste l autre la notion de pr carit prend des contours tr s variables tr s larges quand elle d signe l en semble de ceux qui ne sont pas fonctionnaires plus troits quand elle se limite aux seuls contractuels cart s du CDI temps plein Dans le secteur de la distribution du courrier les CDD sont utilis s principalement la fois pour remplacer des absents notamment lors des cong s occuper des postes laiss s vacants du fait d un sous effectif chronique ou de la longueur des d lais d affectation et former et s lectionner les agents dont certains sont destin s tre recrut s en CDI Deux profils polaires y cohabitent entre lesquels les fronti res ne sont pas tanches des salari s en qu te d un salaire d appoint ou d un emploi d attente tels des tudiants et d autres s inscrivant dans une voie d acc s l emploi postal stable La pr carit du statut se redouble tr s nettement d une pr carit du travail tous les facteurs en CDD roulent sur plusieurs tourn es chacune n cessite un temps d apprentissage au cours duquel la dur e de distribution d passe celle du facteur titulaire 2 Leur salaire est estim inf rieur d un tiers ce
37. rande partie du ph nom ne de sous traitance la r internalisation des activit s n est plus gu re cr dible et par leur affaiblissement substantiel au sein m me des firmes 8 Une enqu te par questionnaire conduite aupr s de 430 CDD et CDI r cents taux de r ponse 40 fait tat de 38 de syndiqu s chez les CDI 5 chez les CDD Au cours de notre enqu te une gr ve a paralys pendant trois semaines les trois agences locales de ColiPoste Presque tous ses jeunes leaders sont d anciens pr caires cf note 4 9 Le v cu difficile des p riodes de ch mage entre deux CDD fait partie des apports du groupe de paroles de pr caires de La Poste que nous avons constitu complexit des d marches et des d lais n cessaires pour faire valoir ses droits indemni sation statut de captivit professionnelle par rapport cet employeur accepter un autre emploi c est prendre le risque de ne plus tre disponible pour La Poste et donc de sortir de la file d attente Abandonn s par l entreprise au cours de ces moments ils le sont aussi par les syndicats 38 Travail et Emploi n 116 Octobre d cembre 2008 donneur d ordre l emploi y a t consid rablement r duit sans conflits sociaux majeurs via des plans sociaux particuli rement g n reux et le d veloppe ment de l actionnariat salari Ici la pr carit d emploi ne prend pas d abord la forme de la pr carit
38. renouvellement et l invisibilisation partielle de cette derni re si sa forme canonique la gr ve est en d clin d autres formes refus d heures suppl mentaires p titions d brayages de courte dur e progressent DENIS 2005 CARLIER TENRET 2007 Apparaissent plus r pandues encore les situations d esprit de r volte sans r volte ZARIFIAN 2005 de consentement critique MARTUCELLI 2004 ou de r sistance individuelle qui fournissent un terreau potentiel de ressourcement de l action collective Le syndicalisme a toujours t confront au d fi de la construction d une repr sentation commune du salariat partir de l h t rog n it de ce dernier Au d but du XX si cle en France c est la branche d activit professionnelle qui est devenue sa base organisationnelle sur laquelle l entreprise est plus tard venue se greffer Son influence s est diffus e de ses places fortes vers les p riph ries du salariat au travers du m canisme de la r gulation fordienne C est ce processus qui s est invers avec la crise de cette derni re En particulier la dispersion du salariat dans des tablissements de petite taille et la multi plicit des branches professionnelles dont rel vent les travailleurs intervenant sur un m me site sont des cas de figure qui interrogent radicalement le mode d organisation syndical quelles conditions et sous quelles modalit s le syndicalisme pou
39. roupe 2005 CDD et CDI 8 15000 tang de Berre 2000 Dont 20 30 en sous traitance 113000 2004 CDD 7 Temps partiel 64 Moins d un an d anciennet 34 Pr carit de l emploi 1 CDD 2 Autres CDI temps partiel int rim sous traitance 1 Fragilit des sous traitants 2 Emplois pr caires chez les entreprises sous traitantes 1 Instabilit main d uvre 2 Temps partiel Pr carit du travail Polyvalence avec formation insuffisante Ex facteurs rouleurs Externalisation du sale boulot dont enjeu sant au travail Fragment pr carisation des collectifs de travail Nomadisme g ographique Intensit du travail Horaires de travail flexibles et fragment s Pr carit des relations professionnelles Abus dans l usage CDD un CDD ne fait pas gr ve Mais forte syndicalisation chez salari s stables G n ralis e sauf chez quelques entre prises sous traitantes de premier rang G n ralis e sauf implantation Syndicale ponctuelle Profil social de la main d uvre pr caire CDD jeunes mixit proches des postiers stables Ouvrier masculin Qualifi dont mercenaires Et non qualifi Jeunes mixit tudiants origine populaire Svt immigr e Tr s instables Autres salaires Moins instables Avenir professionnel pensable pour les salari s Emploi stable La Poste pour une partie importante Tenir pour les
40. rrait il renouer avec une ambition de solidarisation de fragments d un monde du travail aujourd hui miett Ces questions se posent a priori de mani re assez diff rente selon les contextes qui combinent modalit s de la pr carit professionnelle et ressources syndicales Les trois terrains tudi s correspondent trois cas de figure typiques des modalit s de d stabilisation du salariat associ es des ressources syndicales diff renci es cf tableau 1 et encadr 1 La Poste est une grande entreprise publique dans laquelle il s agit principalement d une dualisation des statuts d emploi chez le m me employeur avec un syndi calisme encore bien implant chez les salari s stables 1 La p trochimie correspond de grandes 1 L emploi pr caire est estim 15 dans la fonction publique le taux de syndicalisation galement contre 5 dans le secteur priv SYNDICATS ET PR CARIT Encadr 1 M thodologie L enqu te principalement qualitative s est d roul e entre 2003 et 2006 dans la r gion de Marseille et de l tang de Berre pour les deux premiers terrains en r gion parisienne pour le troi si me Elle est bas e principalement sur la r alisa tion de soixante entretiens aupr s de syndicalistes et de salari s non syndiqu s La Poste L tude a t conduite principalement dans ce qui est d sormais l un des quatre m tiers du groupe le courrier plus pr cis men
41. s sous traitants de premier rang La restauration rapide enfin forme un secteur qui est dans son ensemble marqu par une tr s forte instabilit de la main d uvre une tr s faible pr sence syndicale mais par l apparition ces derni res ann es de quelques gr ves parfois tr s longues Nous avons donc trois configurations tr s contrast es au plan de l histoire du secteur d activit du statut de l employeur principal de la pr sence syndicale comme du profil social des salari s Mais dans les trois cas se superposent troitement sans bien s r se recouvrir instabilit d une fraction plus ou moins importante des salari s et difficult s de la syndicalisation Sur ces trois terrains enfin le syndicalisme concern est incarn par la CGT soit qu il s agisse du seul syndicat animateur des conflits tudi s restauration rapide ou initiateur d exp riences de coordinations de site ou inter sites sous traitance p trochimique soit qu il soit en position localement tr s dominante La Poste On ne pr tend donc pas rendre compte ici de la totalit des orientations et pratiques syndicales eu gard la flexibilit de l emploi La Poste la pr carit de l emploi contenue Deux traits majeurs semblent distinguer la plus grande entreprise de France la r sistance de l emploi statutaire la puissance des syndicats et l orientation contestataire des deux plus influents CGT et SUD Mais
42. socio conomique du secteur semble interdire struc turellement un mode traditionnel d organisation syndicale quelques noyaux de syndiqu s parvien nent s y implanter ici ou l et des formes de coor dination ou de collectif plus larges sont apparues Au del des exp riences militantes sont suscepti bles de se diffuser dans les divers mondes du travail pr caire desquels nombre de ces salari s risquent de demeurer captifs Queis mod les de stabilisation La pr carisation professionnelle prend de multi ples formes lesquelles ne se t lescopent pas selon la m me intensit avec la forme syndicale Elle semble saper d autant plus radicalement les fondements du syndicalisme h rit de la p riode fordienne qu elle prend des formes elles m mes radicales C est le cas notamment quand elles conduisent vider d une grande partie son contenu la double r f rence l en treprise unit de temps de lieu et d action et la branche comme lieux de stabilit d identification et de n gociation collectives bases sur lesquelles cette forme syndicale s est difi e Et quand appa raissent ces vastes espaces de transition ou de rel gation professionnelles qui n offrent gu re de p les positifs d identification et de stabilisation C est la conclusion sur laquelle d bouche notre comparaison entre trois situations typ es la fois du point de vue des modalit s de d stabilisation du sal
43. st donc d autant plus pineuse que les anciennes r ponses semblent encore les plus efficaces comme on le voit avec le cas de La Poste Ailleurs c est bien la capacit de l ancienne forme syndicale se red ployer sur d autres bases la fois interprofessionnelles et territoriales qui est en cause Or par exemple la conception interprofessionnelle de la vie syndicale est encore aujourd hui domin e dans la CGT par l id e que s en font les statutaires ce qui ne facilite gu re la conqu te de nouvelles terres de mission PERNOT 2005 p 188 Opposer aux pr carit s professionnelles la pers pective d une s curisation sociale et profession nelle est sans doute pertinent condition pour les syndicats de parvenir la d cliner concr te ment partir de luttes et d exp riences encore tr s embryonnaires et de prendre en compte les pers pectives objectives comme subjectives cr dibles comme d sirables de s curisation du point de vue des salari s pr caires concern s On a peut tre ici la meilleure clef de lecture des difficult s et des potentialit s de l action collective et syndicale sur nos trois terrains La notion de s curisation ne saurait prendre en effet le m me visage La Poste sur les sites industriels aux collectivit s de travail clat es et dans la restauration rapide Il n y a que dans le premier cas que la promotion vers le statut professionnel d u
44. t La Poste sous traitance p trochimique restauration rapide LEST mars 2007 Sur les trois terrains c est le cas de la CGT qui a t privil gi compte tenu de sa pr pond rance dans les deux premiers et de sa plus pr sence dans les gr ves dans le troisi me En posant l hypoth se qu il s agit de la crise d une forme historique du syndicalisme celle h rit e de la p riode keyneso fordienne en tudiant sur des terrains d enqu te diversifi s la mani re dont les syndicats affrontent les pr carit s professionnelles et dont s exprime la conflictualit on se veut attentif aux signes de renouvellement et de ressourcement pouvant dessiner une nouvelle forme syndicale En adoptant une d finition large a priori de la pr carit professionnelle on peut explorer d abord une large palette des formes concr tes de la d sta bilisation du salariat avant de s interroger sur les relations entre les difficult s du syndicalisme et la d stabilisation de l emploi La Poste ensuite le nouveau visage du clivage statutaires hors statuts ne laisse pas le syndicalisme d sarm d autant plus que ce dernier conserve des forces significatives Sur les sites p trochimiques la pr ca rit appara t largement sous trait e et plus diffi cile combattre Dans la restauration rapide enfin le turn over consid rable et le poids des tudiants semblent constituer un obstacle gu re surmo
45. t la distribu tion non les centres de tri Les emplois concern s sont donc ceux de facteurs et d agents de collecte et de tri rattach s aux bureaux L activit courrier mobilise dans le d partement tudi 5000 des 9000 emplois offerts par La Poste Deux mono graphies de bureaux ont t r alis es une unit de taille moyenne 37 tourn es 67 emplois fortement syndiqu e mais au climat social assez consensuel et une unit de grande taille 250 tourn es 400 emplois peu syndiqu e r cemment r organis e sur la base de la centralisation et de l alphab tisation du tri g n ral au prix d un important conflit Une vingtaine d entretiens individuels ont t r alis s aupr s de responsables de l entreprise n 6 de syndicalistes n 7 de salari s pr caires n 9 Sept autres pr caires ont particip un groupe de paroles Elle s appuie galement sur une enqu te postale aupr s de 450 pr caires et CDI r cents 155 questionnaires retourn s Sept autres entretiens ont t r alis s aupr s de jeunes gr vistes de l activit colis ColiPoste sur CDI mais presque tous anciens pr caires Sous traitance p trochimique Seize entretiens individuels et collectifs ont t conduits aupr s d une trentaine de syndicalistes dont des militants de quatre sous traitants de premier rang m tal lurgie m canique et instrumentation lectricit On s est focalis sur
Download Pdf Manuals
Related Search