Fonctionnement, usage et perception d`un corps sans mode d`emploi
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1. CANGUILHEM G Milieu et normes de l homme au travail propos d un livre r cent de Georges Friedmann 1947 in Cahiers internationaux de sociologie n 23 Paris Seuil vol I 1947 p 120 136 CANGUILHEM G La Connaissance de la vie 1952 Paris Vrin 1992 CANGUILHEM G article Vie de l Encyclop die Universalis 1974 CANGUILHEM G d ologie et rationalit dans l histoire des sciences de la vie Paris Vrin 2000 CANGUILHEM G Le Cerveau et la pens e 1980 in Georges Canguilhem Philosophe historien des sciences actes du colloque 6 7 8 d cembre 1990 Paris Albin Michel 1992 p 11 33 HACKING I Canguilhem parmi les cyborgs 1998 in BRAUNSTEIN J F dir Canguilhem histoire des sciences et politique du vivant Paris PUF 2007 p 113 142 HOQUET T De Canguilhem aux cyborgs Critique 1 2009 n 740 741 p 106 119 WITTGENSTEIN L Recherches philosophiques 1953 Paris Gallimard 2005 WITTGENSTEIN L Cahier bleu 1934 in Le Cahier bleu et le cahier brun Paris Gallimard 2004 coll Tel 22 CANGUILHEM 1980 BD 2012 14 7 142. r duire sans reste le fonctionnement organique celui d une machine un peu plus complexe que celles que nous sommes actuellement capables de fabriquer Un tel d ni de r alit physiologique manque tout autant le d bat qui constitue le d fi repr sent par une intervention technique compr hensive c est dire saine contribuant la sant de son objet sur le vivant Comment en effet comprendre les rejets les dysfonctionnements sinon impr visibles du moins inattendus et les effets secondaires voire pervers d associations du m canique l efficience organique si le corps n tait qu une machine comme les autres b du point de vue de l usage Qu est ce que les descriptions ph nom nologique et grammaticale de ce fait trivial que notre corps n a pas de mode d emploi nous apprennent sur cette diff rence entre les usages ou mani res de faire techniques et vitaux Contre l illusion selon laquelle une pratique pourrait tre anodine aller de soi pour tout le monde c est dire n engager rien on aimerait s attarder sur l asym trie suivante en droit tout fonctionnement m canique pourrait tre d crit sous la forme d une marche suivre or il est tellement absurde de pr tendre le faire pour les gestes de notre corps qu l inverse c est bien plut t aux gestes de notre corps standardis s que 1 Il y a une pathologie biologique mais il n y a pas de pathologie physique ou chimique ou m ca
3. autrement dit que la r action soit en fait sous tendue par une attention de l organisme qui remarque le signal et pour cela l a anticip cherch Le milieu ne peut imposer aucun mouvement un organisme que si cet organisme se propose d abord au milieu selon certaines orientations propres Une r action forc e c est une r action pathologique En fait il arrive assez souvent qu une condition ext rieure induise m caniquement une r action organique mais dans ce cas l absence de m diation active tamponnant 5 CANGUILHEM 1943 p 117 6 CANGUILHEM 1947 BD 2012 9 14 l cart est le signe d un tat pathologique tout se passe comme si faute de pouvoir faire autrement l organisme se laissait provisoirement conditionner de l ext rieur Or une telle alternative entre initiative ou m diation et d termination directe n est jamais exclusive rien ne fait exception au d terminisme physique mais quelle vie serait vivable en tant de part en part d termin e par sa situation Au contraire il s agit toujours d une tension entre du plus et du moins tension qui se traduit qualitativement par une exp rience vitale de recherche de solutions ponctuelles l organisme tente d adapter son milieu autant qu il s adapte lui afin d essayer de vivre le plus en sant dans chaque situation En parlant d ordre de propri t s pour d finir l organisme et par opposition un syst me de l
4. cette main artificielle aurait alors une plus grande r solution d input hyper sensorialit notamment proprioceptive et d output motricit ultra fine avec des mat riaux supra conducteurs l information nerveuse pourrait y circuler plus rapidement d o de meilleurs r flexes Que demander de plus une main Mais quoi cela resterait encore ma main cet organe que je dois assumer diriger et dont c est moi de me servir Aussi perfectionn e soit elle cette main artificielle apporterait bien plus d informations mon syst me nerveux central cerveau ou moelle pini re mais encore me faudrait il contr ler ces r flexes pour qu ils valent quelque chose Divisera t on les gestes de la main en l ments simples dont la coordination serait automatiser en t ches Surtout supposer que ce soit chose concevable est ce vraiment l avoir une plus grande ma trise de ce que peut accomplir une main Peut on en effet am liorer qualitativement la souplesse de fonctionnement d un organisme sain Si elles sont des anticipations actives du corps les r gulations physiologiques peuvent elles tre informatiquement anticip es Les compensations peuvent elles tre mul es par un traitement d information Que voudrait dire le fait de confier par exemple le contr le de mon quilibre une d termination externe b pour quel usage Bien s r mes capacit s intellectuelles auront elle m mes t
5. mais sur celui de la perception qui est l interaction premi re au sens o toutes les autres la pr supposent Telle serait du moins l interpr tation qu on avancerait de ce troisi me fait L hypoth se audacieuse que proposaient il y a quelques ann es Alain Berthoz et Jean Luc Petit pour reconsid rer la perception comme sous tendue par une anticipation 2 Pour paraphraser Wittgenstein tout le monde sait lever le bras mais personne ne sait comme il s y prend pour le faire m me celui qui par ailleurs sait comment a marche a des notions d anatomo physiologie Il serait absurde de pr senter une s ance de r adaptation par exemple comme la mise en pratique de notions th oriques pr c demment apprises dans une salle de classe ce n est tout simplement pas comme cela qu on s y prend pour accomplir un geste 3 L organisme dot d un cerveau proc derait en toutes circonstances une anticipation centrale par rapport la d termination de la r ceptivit des capteurs sensoriels p riph riques Le cerveau est pr dicteur S annoncerait l une r vision d chirante du paradigme classique aux termes de laquelle l anticipation au lieu d une exception se d couvrirait tre la vraie r gle d un comportement intelligent BERTHOZ PETIT 2006 p 35 BD 2012 3 14 pourrait servir de mod le heuristique pour r valuer bien d autres formes d interaction commencer par les plus organi
6. pr sent circonscrit de mani re assez l che ce en quoi il y avait diff rence de r gime entre l organisme et la machine cette diff rence a t bien plus sugg r e qu analys e Le cadre de cette intervention est trop d limit pour en faire une d monstration et il faudrait d abord d terminer si c est l chose possible par contre il est indispensable quand on voque d une part les perspectives de recherche future dans le domaine de l interaction homme machine et d autre part les perspectives critiques quant l id ologie latente d augmentation de serrer de plus pr s en quoi consiste l irr ductibilit du fonctionnement organique son homologue m canique On croit que le progr s technologique ne peut pr tendre atteindre quelque chose comme des dispositifs int gr s sans avoir au pr alable d fini le propre de l int gration physiologique et d termin en cons quence les conditions techniques auxquelles cette int gration pourrait tre mul e voire coordonn e avec les op rations d un syst me informatique Jusqu o la logique de notre corps est elle assimilable celle d une machine le plus important n est pas tant de choisir telle r ponse pr tendument plus vraie qu une autre mais bien de reconna tre la question comme telle pour assumer la r ponse donn e comme une d cision qui se discute qui fait d bat C est pourquoi plus on avance dans cette intervention ve
7. ventail de possibles r alisables le cas ch ant Ici le malentendu qui rendrait d sirable en soi une telle augmentation tient aux liens de cause effet ou ce qui revient au m me aux id es apparemment consistantes d adaptabilit et de possibilit qu elle pr suppose d tre adapt en g n ral Tout cela repose sur l id e que mon corps aurait lui m me un rapport instrumental avec l environnement qu il s y ins rerait comme un contenu dans un contenant que l adaptation consisterait avoir les gadgets les trucs r pondant autant de sollicitations ponctuelles successives Mais ce paradigme d interactivit est celui des jeux vid os il est au moins suspect qu on assimile sans justification l immanence de notre corps dans le monde l immersion d un joueur dans un univers virtuel N est ce pas l le signe d un pr jug Car s il fallait justifier cet amalgame comme un mod le ne serait on pas amen expliciter une r duction de l environnement une somme de stimuli un syst me de variables bref quelque chose qui ne rend volontairement pas compte de la qualit de notre exp rience mais d cide par un geste de r duction m thodologique de ne tenir compte que de ce que la th orie juge causalement significatif Or qui modifierait son corps pour le faire mieux cadrer avec les derniers r sultats scientifiques 3 une analogie pour toucher du doigt le point de passage d un r gime l autre On a jusqu
8. d cupl es au pr alable par un dispositif analogue si bien que le traitement du flux d informations nerveuse n aurait pas tre sous trait par des algorithmes de comportement Toutes mes aires c r brales pourraient ainsi tre appareill es si bien que mes connections neuronales se feraient alors plus vite en un r seau plus tendu plus syst matique a t on envie de dire et de fa on plus durable m morisation d finitive instantan e Mais l encore pourquoi l augmentation technologique d une fonction comme notre activit cognitive mais c tait d j le cas avec la main a t elle tendance s parer sa r alisation de l exp rience subjective le v cu de ce que a fait what it is like d accomplir cette fonction Pourquoi ai je l impression en m y projetant de parler de ces gestes actes ou pens es que je suis cens faire comme si je d signais par l des leviers que j actionnais et des boutons que je pressais Est ce que derri re ces connections neuronales assist es par ordinateur ce n est pas toujours moi qui pense Mais alors est ce qu en pensant moi m me j utilise ces connections neuronales Pour d sirer augmenter une fonction il faut donc l avoir d limit e c est dire r duite ses op rations classer et associer m moire calculer en appliquant une fonction des donn es raisonner coder d coder pour changer des i
9. diff rence entre les fonctionnements machinique et organiques Pour en rendre compte et contre une lecture trop litt rale des mod les de biologie mol culaire par exemple on avancerait l interpr tation suivante qu elle soit r paratrice compensatrice ou augmentatrice l application de d veloppements technologiques l organisme proth ses orth ses et le cas ch ant cyberth ses met toujours en jeu la rencontre de deux logiques de fonctionnement aux modalit s sinon diff rentes quoique compatibles dans une certaine mesure du moins non quivalentes celle de la machine et celle de l organisme Or le d fi de la recherche future sur la relation entre homme et machine est ici de comprendre la nature de cette diff rence pour d passer le double cueil du dualisme st rile obscurantiste et du r ductionnisme pathog ne brutal En effet un dualisme de type bergsonien entre le m canique et le vivant est si unilat ralement sch matique qu il emp che un d bat pourtant aussi urgent que f cond quelles conditions techniques l introduction de syst mes artificiels au plus intime de notre physiologie spontan e peut elle r ussir l osmose qui seule permet une interactivit assez fine et souple pour ne pas ali ner l organisme c est dire le m caniser litt ralement le r duire un fonctionnement pathologique Mais tout aussi st rile que le dualisme serait un monisme consistant
10. en sachant ce que l on fait car mesure que le d veloppement technologique se d ploiera la confusion de ces deux registres rendra la technique aussi r ductrice qu assujettissante clairer alors la nature de l irr ductibilit ici postul e mais encore seulement d crite suppose paradoxalement de passer une analyse conceptuelle qui montre quoi tient l insuffisance du dualisme La question devient en effet en quoi consiste la diff rence de modalit qui rend le fonctionnement organique non superposable un fonctionnement m canique devant pourtant le relayer le m diatiser voire le r guler Comment concevoir les dispositifs techniques de mani re ce qu ils ne restent plus plaqu s sur l activit organique mais soient au contraire endog n is s par elle c est dire int gr s par le corps comme quelque chose qui lui serait vraiment propre jusqu ce qu au lieu de les percevoir on per oive travers eux c du point de vue de l interaction Quelle conclusion ergonomique tirer de ce fait physiologique que notre organisme anticipe constamment les sollicitations du milieu de mani re gagner l initiative sur lui pour se l adapter au moins autant qu il s adapte lui Car si toute utilisation de mon corps d une machine est une interaction avec l environnement cette interaction ne doit pas tre con ue sur le mod le d un traitement d information stimulus r ponse intelligence artificielle etc
11. est une pratique avec les signes bref un jeu de langage et c est pr cis ment l que passe la diff rence entre le machinique et le normatif Parler c est signifier donner entendre parce que penser c est vivre dans le sens Le sens n est pas une relation entre il est relation C est pourquoi il chappe toute r duction qui tente de le loger dans une configuration m canique Les machines dites intelligentes sont des machines produire des relations entre les donn es qu on leur fournit mais elles ne sont pas en relation ce que l utilisateur se propose partir des relations qu elles engendrent pour lui 2 Ainsi r inscrit dans une interaction elle m me con ue sur le mod le de la perception signifiante de la pens e l usage de la machine se r v le bien tre la mise en relation de deux logiques machinique et normative dont la compatibilit doit tre prise en charge et assum e pour tre rendue possible des conditions acceptables Conclusions Il serait absurde de pr tendre conclure l o on a voulu poser question en d gageant un probl me On veut pourtant insister encore une fois sur les enjeux d une r flexion collective et pol mique autour d une interrogation qui est tout sauf anodine nous qui construisons des machines notre image et notre usage comment concevons nous de fait tel que cela est trahi concr tement par nos fa ons de faire le fonctionnement de no
12. nos ordres normatifs sur un ordre m canique alors que la technologie devient de plus en plus invasive est de se laisser de moins en moins les moyens la latitude d action par rapport aux programmes de provoquer assumer et cultiver soi m me des carts l ordre carts qui font pourtant notre ma trise notre puissance et notre sant Or une telle d pendance croissante effet de la r duction du normatif au m canique est pathog ne risques psychosociaux mutilante jusqu rendre litt ralement la vie invivable c du point de vue de l interaction Pourtant ce n est pas seulement pour se d fendre contre les exc s d une application unilat rale de la technologie aux corps qu il faut r fl chir ensemble et d battre sur les modalit s d une interactivit organisme machine vraiment intelligente c est dire qui reposerait sur l interaction pr existante du corps avec son milieu Puisque la technique modifie radicalement son environnement elle peut offrir au corps humain des opportunit s d accroissement de sant bien pos e la probl matique de l HA est une chance saisir Annexe titre d illustration du probl me qui a fait l objet de cette intervention on ne r siste pas au plaisir de pr senter le cas suivant accompagn d un tr s court commentaire partir d un rapprochement avec une citation d auteur En 1996 apr s la victoire de Garry Kasparov contre Deep Blue les informaticiens en vue de perf
13. plus fort possible La viabilit devient le crit re intrins que de la distinction entre normal et pathologique si par ce terme on entend l panouissement d un organisme dans son milieu sa puissance de l adapter plus encore que celle de s adapter lui b autour de l usage Mais on n a mentionn pour l instant que la r gulation interne l organisme c est dire une activit qui ne me concernait qu indirectement Qu en est il de ce que je fais avec mon corps Si de son c t celui ci s auto r gule par un effort de m diation est ce que mon emprise sur ce corps que j appelle mien ne le plie pas ma volont N est ce pas de cette transitivit instrumentale que je fais l exp rience tous les jours Quand je bouge le bras volontairement je ne me sers d aucun moyen pour provoquer le mouvement Mon souhait n est pas non plus un tel moyen N avons nous pas tendance supposer un vrai acte derri re l acte apparent par exemple en se repr sentant le geste physique comme attendant pour commencer que se termine le geste mental par lequel notre volont esquisse et r alise pour ainsi dire symboliquement ce m me geste qui sera concr tis par le corps 7 CANGUILHEM 1952 p 204 8 CANGUILHEM 1943 p 120 9 ibid p 122 10 ibid p 132 11 WITTGENSTEIN 1953 614 BD 2012 10 14 Mais n oublions pas ceci quand je l ve le bras mon bras se l ve D o c
14. qu on puisse tenir compte de cette diff rence de comportement entre corps physique et corps biologique sans se pr occuper de leurs natures respectives seul le mode d intelligibilit appel par les ph nom nes doit nous occuper Autrement dit perd on en pertinence lorsqu on r duit un ph nom ne biologique sa mod lisation infiniment approch e L analogie porte donc d une part sur la courbe la fonction au sens math matique du terme ou enfin la variation continue r elle physique trivialement un mouvement de chute libre qu elle d crit et d autre part sur le geste accompli avec gr ce la fonction motrice ma tris e la perfection ou enfin le mode d existence organique o celle ci tire son origine et son sens Pr cisons donc l asym trie entre d une part le calcul de la d riv e et d autre part la mod lisation fine d une fonction organique Pour pouvoir mod liser une telle fonction il faut la d finir c est dire l isoler et la simplifier de fait et n cessairement on la r duit un syst me ferm aux variables limit es une combinatoire Or en faisant cela on la traite d j comme une machine et c est l gitime bien s r De m me en installant une proth se dans un corps malade c est bien cette fonction mod lis e qu on cherche remplacer la proth se se comportant alors comme une machine jouant un certain r le BD 2012 7 114 Mais peut on pour autant passer la limite pou
15. Fonctionnement usage et perception d un corps sans mode d emploi Barth lemy Durrive Communication au colloque L humain augment tat des lieux et perspectives critiques 14 12 12 ISCC On cherchera dans cette intervention d gager et clarifier une question centrale quand il s agit d interaction homme machine notre corps fonctionne t il de la m me mani re que fonctionne une machine Plus pr cis ment si nous expliquons tellement bien le corps en l envisageant comme une machine est ce parce que fondamentalement il n y a aucune diff rence entre leur mode de fonctionnement Influenc s par notre culture techno scientifique nous parlons et pensons tous la plupart du temps exactement comme si la r ponse positive cette question allait de soi Mais agissons nous de la m me mani re Nous comportons nous vraiment comme si l utilisation de notre corps ne diff rait en rien de l utilisation d une machine Si tel n tait pas le cas si la question faisait suffisamment probl me pour qu on s y arr te le temps d un d bat est ce que la mani re dont nous concevons nos machines ne devrait pas tre dite relative un parti pris parmi d autres possible savoir consid rer r solument et ouvertement le fonctionnement du corps comme celui d une machine Mais alors ce ne serait d j plus qu un probl me th orique puisque la r ponse cette question engagerait explicitement une certaine pratique des c
16. achine En fait il s agit l d une contre utopie en tant que telle elle pointe donc un risque bien r el se rendre la vie invivable mais la croire elle m me possible rel verait du m me malentendu sur le fonctionnement l usage et l interaction de notre corps qu entendre litt ralement l id e d augmentation humaine Car qu il soit malade hors norme ou handicap mon corps c est toujours un moi qui existe et pour cela d tourne et me subordonne les conditions objectives de l environnement et ce moi ce n est pas l ego narcissique mais le sujet de l action 4 Ceci tant dit en insistant sur la pr position derri re une certaine fa on d exag rer l importance de la recherche d veloppement sur les proth ses risque en effet de mettre au second plan ce quoi son sens est en fait enti rement subordonn la r ducation la th rapeutique et l insertion des patients BD 2012 4 14 Pour montrer ces trois points mettons nous en situation et supposons r alis es toutes les conditions techniques qu on voudra quel sens cela aurait il de demander changer ma main saine contre une proth se Qu esp rerait on y gagner a pour quel fonctionnement Une proth se de main pourrait bien s r tre plus r sistante plus souple articulations 360 plus forte au sens d une force m canique on pourrait imaginer qu un savant rec blage des nerfs d cuple les terminaisons nerveuses
17. ditionnement c est une tentative pour imposer un certain r f rentiel et c est en ce sens que l interactivit pourrait tre repens e On a fini par d couvrir que pour qu il y ait environnement il faut qu il y ait centre C est la position d un vivant se r f rant l exp rience qu il vit en totalit qui donne au milieu le sens de conditions d existence Seul un vivant infra humain peut coordonner 12 WITTGENSTEIN 1953 621 13 WITTGENSTEIN 1953 626 14 WITTGENSTEIN 1934 p 6 7 15 CANGUILHEM 1952 p 152 16 CANGUILHEM 1977 p 117 BD 2012 11 14 un milieu Expliquer le centre par l environnement peut sembler un paradoxe 7 Un centre ne se r sout pas dans son environnement Un vivant ne se r duit pas un carrefour d influences 18 De m me est ce en ce sens que l ordre normatif refl te un jugement normatif de l organisme sur son milieu et particuli rement chez le vivant humain o le milieu est tr s largement constitu de signes ou normes ant c dentes M me chez une amibe vivre c est valoriser les objets et les circonstances de son exp rience c est pr f rer et exclure des moyens des situations des mouvements La vie c est le contraire d une relation d indiff rence avec le milieu 1 Si la vie est interaction avec le milieu la pens e tant une des activit s de la vie ne sera donc plus log e l int rieur d un espace mental c
18. e probl me que reste t il donc quand je soustrais le fait que mon bras se l ve du fait que je l ve le bras Les sensations kinesth siques sont elles donc mon vouloir 1 Bien s r une fois sorti des formes caricaturales de ce dualisme tre dans son corps comme un pilote en son navire nous ne le reconnaissons plus mais est ce assez pour l avoir d pass Lorsque je touche cet objet avec une canne j prouve la sensation tactile au bout de la canne et non dans la main qui la tient Cela veut il dire C est comme si j avais des terminaisons nerveuses au bout de la canne Inversement parvenons nous rendre compte de ces exp riences d utilisation rapproch e o je ne fais plus qu un avec la machine autrement qu en s assimilant litt ralement cette chose qu on manipule Que voulons nous dire alors en s exprimant ainsi O situe t on alors l action Est ce moi ou la machine qui agit Ou alors est ce la question qui est mal pos e prenant trop litt ralement certaines fa ons de parler Il est donc trompeur de parler de la pens e comme d une activit mentale Nous pouvons dire que la pens e est essentiellement l activit qui consiste op rer avec des signes Cette activit est accomplie par la main quand nous pensons en crivant Si d ailleurs nous parlons du lieu o la pens e se d roule nous sommes fond s dire que ce lieu est le pap
19. ectionner la machine auraient demand au champion Combien de coups calculez vous l avance et celui ci aurait r pondu Un seul le bon Ici le pr suppos de la question tait que le logiciel d chec imitait la mani re de penser humaine Or ce n est pas le cas nos modalit s de raisonnement ne sont pas superposables au traitement de l information par un syst me d analyse logique En 1997 Deep Blue gagne la revanche ce genre de comp tition homme machine perdant du coup tout int r t L mulation de nos pratiques par des moyens diff rents peut donc videmment tre plus performante qu elles mais l n est pas la vraie question Ce qui nous semble tre par contre la question d cisive et urgente trop souvent masqu e par des fantasmes formul s l interrogative est illustr e par les termes dans lesquels ce d bat s est pos Les mots employ s trahissent notre double difficult penser l intelligence en terme d activit normative c est dire sortir du mod le de l intelligence artificielle autrement dit penser une interactivit capable d int grer dans nos mod les explicatifs organisationnels etc la multidimensionalit des situations concr tes multidimensionnalit qui complexifie structurellement les r gles du jeu dans le r f rentiel desquelles on est intelligent 21 Encore qu uniquement a dans un syst me ferm o les r gles sont des va
20. es grammaticales c pour cerner de plus pr s quoiqu indirectement la nature de ce qui diff rencierait les fonctionnements organique et machinique on risquera une comparaison analogique entre la mise en quation d une courbe et la mod lisation d une fonction biologique d enfin de fa on beaucoup plus rigoureuse on pr sentera les concepts de deux auteurs de la tradition philosophique permettant de penser la fois la distinction et les conditions de coop ration entre ces deux r gimes d ordre que sont le normatif d une part et le m canique de l autre Doctorant CERPHI cole Normale Sup rieure de Lyon BD 2012 1 14 1 trois propositions pour rapprocher et interpr ter trois faits La logique de notre corps est elle assimilable celle d une machine Pour poser une question qui ne se pose pas d elle m me on peut commencer par aller contre l vidence et avancer trois faits dont les implications contredisent notre r ponse spontan e La question initiale gagnerait ainsi en relief pris au s rieux ces petits faits ne r v lent pas seulement l espace d un d bat derri re la fausse vidence initiale mais surtout les enjeux importants et pol miques des choix que nous faisons en prenant sur ce probl me tel ou tel parti qui ne va plus de soi a du point de vue du fonctionnement Qu est ce que le fait pist mologique que seul l organisme tombe malade nous apprend sur cette
21. hoix des pr f rences assum es comme telles on pourrait en droit faire figurer dans la notice le mode d emploi des machines con ues sur ce mod le une mention du type le fonctionnement optimal du produit sera obtenu par un usage machinal Qu est ce exactement qui para t baroque ou d plac dans une telle id e N est ce pas justement le fait qu on reconna t par ailleurs mais dont il s agit ici de commencer tirer toutes les cons quences que notre interaction avec nos milieux de vie n est en aucun cas superposable l interaction d une machine m me intelligente avec des stimuli On abordera donc ces trois dimensions fonctionnement usage et interaction ou perception de la diff rence de logique de modalit d ordre qui s pare la machine de l organisme et peut par cons quent aussi les associer mais on le fera simultan ment et non chronologiquement La m me id e sera d velopp e selon quatre angles diff rents qui correspondent quatre niveaux d approfondissement a pour aller droit au but on proposera trois interpr tations th tiques de trois faits par d finition objectifs donc incontournables b pour orienter plus directement le propos sur les questions de recherche mergentes qu on souhaiterait voir d velopp es quant aux suppl ances technologiques aux d ficiences fonctionnelles et notamment sensorielles on proposera une exp rience de pens e ouvrant quelques remarqu
22. ier sur lequel nous crivons 1 Mais nous comportons nous vraiment diff remment de ce dualisme s imaginer agir derri re son propre corps ou de ce f tichisme imaginer un objet qui agit en d crivant notre interaction avec le monde et son r seau ustensilier c autour de l interaction qui est pleinement une perception une anticipation Il est courant d affirmer que l importation en biologie de mod les machiniques visait en purer un finalisme r siduel mais con ue par un ing nieur pour une t che bien d termin e y a t il plus finalis qu une machine Notre tendance penser l organisme dans son fonctionnement et par cons quent dans son interaction avec l environnement comment une machine ne manquerait elle pas justement ce qui fait la sp cificit de l interactivit organisme milieu savoir qu elle n est pr d termin e par aucun r f rentiel Un organisme a donc plus de latitude d action qu une machine Il a moins de finalit et plus de potentialit s Ni finalit ni hasard qu est ce donc que l opportunisme des tres vivants 1 C est en reconsid rant l interaction entre les p les jusque l oppos s comme l int rieur et l ext rieur qu on comprend en quoi consiste la normativit pour vivre en sant l organisme a besoin de r unir lui m me dans son milieu les conditions de ses quilibres En ce sens l initiative gagner sur le con
23. ne Loin d tre dualiste chacune de ces conceptualit s s efforce de distinguer deux r gimes pour mieux les coordonner de plus ces deux fonctionnements ou fa ons de mettre en ordre sont toujours pens s dans une relation telle que l un merge de l autre a autour du fonctionnement Pourquoi cette distinction conceptuelle Ne peut on pas s en passer Ne peut on pas consid rer qu il va de soi que l organisme fonctionne comme la machine puisque tous deux sont soumis au m me d terminisme physique La question se pose t elle vraiment On pourrait nous objecter que les constantes biologiques exprimeraient l effet sur le vivant des conditions ext rieures d existences et que nos suppositions sur la valeur normative des constantes seraient d pourvues de sens Elles le seraient assur ment si les caract res biologiques variables traduisaient le changement de milieu comme les variations de l acc l ration due la pesanteur sont en rapport avec la latitude 5 Mais est ce le cas Le fonctionnement hom ostatique peut il tre int gralement expliqu selon le m me mode d intelligibilit que les ph nom nes physiques Est ce la m me causalit m canique directe qui s applique lorsque par exemple la perception d un stimulus visuel proche d clenche la fermeture r flexe des paupi res Ou l inverse est ce que ce type d exemple ne montre pas plut t qu une r action physiologique suppose que le stimulus soit per u
24. nfos communiquer Est ce un hasard si cela correspond ce que mesure un test de QI En fait pour vouloir troquer un corps sain contre une proth se il faut avoir un sch ma de l action qui confond compl tement les pratiques et les t ches il faudrait soutenir s rieusement que nos gestes r sultent de la r alisation pas pas d une marche suivre du type d un mode d emploi BD 2012 5 14 c pour quelle interaction c est dire quel mode de perception Mais admettons pour l exp rience que je sois dans mon corps comme un pilote en son navire autrement dit que que ma d cision aurait un rapport instrumental mon corps que j aie un rapport d usage aux organes formant mon organisme qui soit superposable celui que j ai avec des ciseaux C est cette condition seulement qu on peut discuter le cas du cyborg cybernetic organism un organisme dont l adaptation au milieu serait technologiquement assist e c est dire dont les r gulations hom ostasiques seraient informatis es de sorte que il resterait viable en contact direct avec des milieux hostiles typiquement dans l espace sans combinaison Th oriquement donc une proth se d organes tels que des branchies artificielles donnerait au cyborg une meilleure adaptabilit en g n ral puisqu il serait de ce fait par cette possession adapt un nouveau milieu possible avantage virtuel qui viendrait s ajouter son
25. nique CANGUILHEM 1943 p 78 BD 2012 2114 nous faisons ultimement r f rence pour peler la marche suivre Tout cela nous para t signifier qu on n utilise pas son propre corps comme la machine s utilise elle m me et surtout qu on n utilise pas son corps comme on utilise les machines avec son corps Ainsi l insuffisance du monisme s tablit elle souvent par une description ph nom nologique je sais d exp rience que contr ler une machine aussi perfectionn e et interactive soit elle ne fait tout simplement pas la m me chose au sens de ce que a fait what it is like que de lever mon bras pour faire un mouvement de brasse La double question est alors si cette diff rence qualitative est d finitive et pourquoi elle serait ainsi irr ductible tandis que l enjeu d un tel questionnement est videmment la g ne persistante ou non que ressentirait l utilisateur d une proth se intelligente lorsque la rigidit d un r tro contr le cybern tique impr cision irr gularit fragmentation sch matisme d connexion du contexte interf rerait avec la souplesse conserv e par le reste de son corps Le d fi de la recherche future sur la relation entre homme et machine est ici de cerner tout ce qui s pare la pratique suivre une r gle de la t che r aliser un programme l activit du processus mais justement pour mieux les rapprocher les coordonner les dialectiser
26. ogique de notre corps est elle assimilable celle d une machine pos e jusqu ici de fa on th orique propos de l hybridation technologique cette question para t plut t sp culative alors qu en fait il n en est rien Tout ce qui s pare les cas de compensation logique th rapeutique d ventuels cas d augmentation logique d optimisation le montre bien Bien s r le perfectionnement technologique des proth ses est un enjeu important derri re la r ducation la th rapeutique et l insertion Si je perds une main ou si je suis n sans main ma vie sera videmment facilit e si j ai ma disposition un outil plus performant plus polyvalent et moins contraignant que les diff rentes solutions que je trouvais jusqu alors aux probl mes de la vie quotidienne Mais quoi que l avenir techno scientifique nous r serve une proth se bionique restera toujours un outil pour moi un outil de m me nature que ceux que j utilisais avant un outil avec lequel j entretiens le m me rapport qu avec les pr c dents un rapport d usage Toute automatis e que ma proth se puisse tre les t ches qu elle r alisera seront toujours subordonn es mon effort pour vivre dans le monde Si tel n tait plus le cas si le dispositif technique devenait invasif au sens d ing rent s il se mettait pr tendre prendre mes d cisions ma place pour me les faire ex cuter qu aurait il fait de moi sinon une machine de m
27. ois nous voulons d signer une organisation de puissances et une hi rarchie de fonctions dont la stabilit est n cessairement pr caire tant la solution d un probl me d quilibre de compensation de compromis entre pouvoirs diff rents donc concurrents Le programme r gissant l ordre m canique d un logiciel est il dans une situation comparable Un algorithme de choix comme celui par exemple d un ordinateur d chec cf annexe peut sans aucun doute trouver un compromis quantitatif mais peut il valuer une situation autrement que par r f rence aux crit res qu on lui a programm s Car qui dit ordre normatif dit appel un jugement normatif c est dire un jugement de valeur les compromis qualitatifs de notre exp rience quotidienne sont des pr f rence et des exigences qui ne sont donc ni purement rationnelles ni seulement motionnelles La maladie est une norme de vie mais c est une norme inf rieure en ce sens qu elle ne tol re aucun cart des conditions dans lesquelles elle vaut incapable de se changer en une autre norme Le malade est malade pour ne pouvoir admettre qu une norme tre en bonne sant c est pouvoir tomber malade et s en relever c est un luxe biologique 1 La finalit qu on mentionne souvent propos des ph nom nes biologiques ne serait ainsi que la marque de cette normativit l exigence pour l organisme de vivre au sens le
28. ques Le d fi de la recherche future sur la relation entre homme et machine est ici de repenser l interactivit comme un moment de vie au sens de sant autrement dit de se donner les moyens techniques pour que l utilisation d une technologie ne soit plus ali nante mais r ellement dynamique compr hensive libre c est dire pour qu elle respecte et prolonge les initiatives de notre corps Car la question de l interaction homme machine devient alors de savoir dans quelle mesure les anticipations algorithmique de la machine ne court circuitent pas mes anticipations physiologiques force de vouloir les pr venir les devancer Comme sugg r en annexe le probl me est ici de savoir si l mulation de nos mani res de faire par une automatisation croissante ne risque pas de plaquer de fa on contraignante une logique rapport e le traitement syst matique d un signal sur un mode d interaction qui lui serait en fait incommensurable Du point de vue strictement technique le d fi technologique serait alors de mettre en commensurabilit d une fa on qui soit satisfaisante les modes d interaction que le m canique et l organique entretiennent chacun avec l environnement de fa on les faire coop rer de mani re plus endog ne d un c t souple de l autre 2 comment faut il concevoir son propre corps pour pr tendre l augmenter en rempla ant une partie saine par une proth se une exp rience de pens e La l
29. r conclure de ces deux approximations th oriques et techniques qu une fonction saine in situ n est rien d autre que cela Par analogie est ce que une courbe n est r ellement rien d autre que l addition de segments infiniment petits En effet peut tre n est ce que parce que dans le corps malade la fonction d ficiente se comportait d j comme une machine et ce anormalement qu on consid re comme une am lioration son remplacement par une autre machine plus performante Car qu il s agisse de fonctionnement organique d usages dans les pratiques ou d interaction entre un vivant humain ou non et ses conditions de vie sant ma trise et autonomie ne consistent jamais dans la r alisation sans d faut d un ordre pr d termin Ce mod le du z ro d faut c est par contre le seul qui corresponde l id al du r gime m canique typiquement le logiciel parfait Au contraire si tout fonctionnement organique et tout usage sont des interactions l id al de sant et l id al de ma trise consistent dans la puissance avec laquelle on parvient assumer g rer et anticiper les carts l ordre carts irr ductibles et jamais n gligeables pour r aliser cet ordre d sir Or de ce nouveau point de vue viter une fois pour toutes ces carts les rendre impossible en pr voyant tout avec un degr infinit simal d incertitude est ce vraiment le fa te de la puissance n est ce pas plu
30. riables d terminables b selon un crit re unidimensionnel typiquement quantitatif et c pour des r sultats pouvant tre atteints par exhaustion cf les r solutions num riques de l assistant de preuve BD 2012 13 14 C est cette ouverture des situations concr tes donc leur irr ductibilit un syst me de variables qu a pens e Wittgenstein sous le concept de jeu et c est par une culture habile de cette ouverture que lui comme Canguilhem ont en quelque sorte d fini l intelligence Pas d invention sans conscience d un vide logique sans tension vers un possible sans risque de se tromper Quand on a demand Newton comment il avait trouv ce qu il cherchait il aurait r pondu En y pensant toujours Quel sens faut il donner cet y Quelle est la situation de pens e o l on vise ce qu on ne voit pas Quelle place pour cet y dans une machinerie c r brale qui serait mont e pour mettre en rapport des donn es sous contrainte d un programme C est cette derni re question qui nous para t aujourd hui urgente pour comprendre la fois la diff rence le mode d interaction et surtout les conditions d une coop ration saine entre l organisme tel qu il est et la machine telle qu elle pourra tre Bibliographie BERTHOZ A PETIT J L Ph nom nologie et physiologie de l action Paris O Jacob 2006 CANGUILHEM G Le Normal et le pathologique 1943 Paris PUF 2009
31. rs la pr cision plus on s efforcera de formuler sous la forme de questionnement les interpr tations propos es la discussion BD 2012 6 14 En voici la premi re g om trie analytique et calcul diff rentiel permettent de manipuler parfaitement une courbe en la traitant dans la fonction faisant varier son coefficient directeur comme si c tait l une somme infinie de segments infinit simaux La mod lisation physique fait tr s l gitimement de m me avec les ph nom nes de variation continue le passage la limite par lequel on r duit sans reste la variation son approximation infiniment pr cise pour en d terminer la raison c est dire en crire la fonction est justifi par le fait que la valeur de la tangente tend tellement co ncider avec la valeur instantan e th orique de variation continue qu il n y a m me plus de sens les distinguer mesure que le pas va vers l infinit simal l cart entre courbe et droite l erreur d approximation devient si insignifiant que leur diff rence devient n gligeable donc leur distinction absurde En math matiques comme en physique il n y a aucun sens distinguer la courbe et sa fonction le ph nom ne et son mod le et ce pr cis ment parce que temps et espace y sont n cessairement et l gitimement r duits des variables uniformes parce que donc la continuit y est seulement la r p tition accumulative de l homog ne Encore une fois p
32. s semblables Voil tant bien que mal cette intervention voulait montrer l urgence de la question a du point de vue du fonctionnement Science et technologie tirent leur puissance d une r duction n cessaire et l gitime des probl mes humains des probl mes techniques Or au XXIe comme au XVIlle si cle il y a une certaine na vet faire comme si l op ration inverse allait de soi faire comme si les probl mes humains n taient qu une complexification de probl mes techniques et qu ils trouveraient comme tels leurs solutions d finitives et s res Mais on ne peut pas plus provoquer la sant que produire l autonomie De ce point de vue d passer la finitude humaine par la technologie est litt ralement une baudruche si l id e d augmentation humaine a un sens a ne peut donc pas tre celui l 17 CANGUILHEM 1952 p 122 18 ibid p 197 19 CANGUILHEM 1974 20 CANGUILHEM 1980 BD 2012 12 14 b du point de vue de l usage Bien s r la technologie se d veloppe de fa on exponentielle mais sur un plan celui de la technique bien s r elle n a aucune limite technique dans la mani re dont elle modifie notre existence mais dans ces modifications m mes dans leur effectivit tout n est pas qu une question de technique Il serait d ailleurs tout aussi insuffisant d y ajouter comme c t et de morale En fait le risque r el continuer de r duire
33. t t le comble de la fragilit Ainsi par exemple loin de consister mettre un pied devant l autre marcher consiste bien cultiver savamment un d s quilibre c est dire se mettre en danger pour encha ner avec adresse les chutes vit es parce que risqu es Loin donc d tre esquiv s les carts l ordre sont recherch s pour tre cultiv s comme des opportunit s c est bien pourquoi celui qui refuserait cat goriquement de prendre le moindre risque sous pr texte d attendre d tre s r de ma triser toutes les conditions sous forme de variables resterait sur place Or de ce nouveau point de vue ce serait une telle prise de risque que le corps malade ne peut plus se permettre car sa maladie consiste en une difficult m diatiser les carts son propre ordre de fonctionnement rigide et donc pr caire C est en cet unique sens qu on entendait l instant l id e que la fonction malade se comportait d j comme une machine Dans les cas o elle est possible la gu rison sera la r cup ration de cette souplesse de fonctionnement de cette puissance d adaptation Dans les cas o elle est impossible le remplacement de la fonction organique par un dispositif d adaptation m canique am liore sans conteste la qualit de vie du patient mais elle ne sera toujours qu un pis aller En effet dans l conomie dynamique d un corps malade une fonction d ficiente peut ne plus fonctionner du tout mais elle pe
34. ue quand on veut pr senter la pens e d un auteur surtout quand elle est innovante et pourtant un tel expos serait parfaitement inutile pour le travail collectif pr sent ou les recherches futures dans le domaine C est pourquoi fid le d ailleurs en cela la pratique des auteurs en question on s efforcera de montrer bri vement l op rationnalit de ces concepts quoi servent ils et donc qu est ce que a change concr tement de se poser la question qu ils nous permettent de poser Georges Canguilhem 1904 1995 et Ludwig Wittgenstein 1889 1951 sont deux auteurs de la tradition philosophique qui n ont pas grand chose en commun si ce n est que le premier a lu appr ci et un peu utilis le second mais c est le rapprochement de leurs analyses centr es respectivement sur l activit vitale et sur l activit signifiante qui ouvre un champ de questionnements aussi radicaux que f conds En l occurrence autour de la question comment fonctionne un vivant humain on s int ressera au concept que chacun de ces auteurs pr sente comme une alternative l ordre m canique caract risant la machine la norme ordonnant selon Canguilhem la r gulation hom ostatique suivant un ordre normatif et la r gle immanente aux pratiques gouvernant selon Wittgenstein un jeu typiquement un jeu de langage situation o se r v le l usage toujours ouvert ambigu et donc pluriel du sig
35. uisqu ils sont quantitatifs les carts sont insignifiants donc n gligeables c est dire r ductibles sans reste d s qu ils deviennent comparativement tr s petits Mais en biologie En va t il de m me quand pour l organisme aucune variation si infime soit elle ne saurait tre n gligeable d s lors que toutes peuvent se r v ler anormale pathologique voire l tale Ce n est pas une question de pr cision un cart l ordre peut tre quantitativement microscopique il est si peu insignifiant qu en certaines circonstances il pourra se r v ler d l t re Ce n est pas non plus une question de complexit il ne s agit pas de grain de sable venant enrayer la machinerie fine car il s agit encore l d horlogerie d ordre m canique Il s agit d une acception alternative des mots n gligeable ou insignifiant pointant vers une seconde dimension du ph nom ne organique Du point de vue d un organisme serait n gligeable ce qui ne porterait pas cons quence ce qui serait b nin anodin ce qui ne poserait pas de difficult de m me de son point de vue ce qui serait insignifiant n aurait aucune signification aucune valeur c est dire aucun int r t Grammaticalement on est ici dans un registre qualitatif qui tranche avec l uni dimensionnalit quantitative des mod les physiques Aucune implication d ordre ontologique n est signifi e dans cette remarque il nous semble
36. ut aussi fonctionner tant bien que mal et la rigueur c est dire dans des conditions d termin es Dans ces deux cas le probl me n est pas tant que l quilibre organique ne serait plus adapt son milieu c est que son adaptation n est plus une initiative mais une r action L exemple classique du pacemaker le montre bien ce dispositif m canique am liore vraiment la condition organique parce qu il conf re au corps un degr sup rieur d autonomie par rapport aux d terminations externes Mais la question est ouverte est ce encore le cas lorsque ce corps est en bonne sant Est ce qu un dispositif technologique peut am liorer mon autonomie non pas au sens d augmenter mon ind pendance vis vis d l ments ext rieurs trivialement l autonomie d une batterie mais bien au sens de me donner une plus grande marge d initiative pour anticiper et d tourner les conditions du milieu C est cette question que nous semble tenir le d fi de l hybridation technologique notamment vis e sanitaire BD 2012 8 14 4 distinguer et articuler les concepts d ordres normatif et m canique pour faire dialoguer deux paradigmes modes d intelligibilit Notre seconde et derni re formulation de l interpr tation propos e essaiera d tre aussi probl matique interrogative tout en tant enfin plus rigoureuse Il n est pas facile d viter un expos dogmatique ou doxographiq
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