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Thomas Bauer - Dalhousie University

1. Anthony Burgess propos recueillis par Robert Louit Le magazine litt raire n 459 40 ans de litt rature d cembre 2006 page 44 89 semble r tive toute forme de transformation rapide individuelle radicale n en d plaise notre engouement tout philosophique pour la puissance de la pens e engouement bien moins rationnel que nous le souhaiterions Cet enchev trement qui constitue nos usages du monde met en exergue la fiction sous sa forme rituelle au c ur de nos existences et rend n cessaire la question du comment trop longtemps substitu e celle non moins mythique du pourquoi Ainsi Marc Aug prenant en compte la question du rituel dans notre monde contemporain sous la forme du comment l voque en terme de dispositif C est un tel dispositif celui dont l absence fait plus encore ressentir la n cessit que nous proposons d appeler rituel Le rite se d finira ainsi comme la mise en uvre d un dispositif finalit symbolique qui construit les identit s relatives travers des alt rit s m diatrices Il est int ressant de noter qu ce stade c est encore une forme de qualification soustractive celui dont l absence fait plus encore ressentir la n cessit qui nous permet d voquer notre rapport au monde Ainsi au del du fonctionnement rituel il y a le vide vide qui se traduit en terme social par inadaptation marginalisation violence d
2. corps et cris Cet crivain voyageur ayant lui m me go t aux joies de la croisi re en M diterran e comprend dans quelle mesure la mer leur offre l occasion de fuir les esclavages Guitard Auviste 199 qu elles vivaient au quotidien Il se fait m me leur porte parole raison pour laquelle sans doute il ironise propos de leur hypoth tique voyage de noces Il portera une attention toute particuli re Ella Maillart subjugu par sa d termination que rien ne viendra alt rer et il lui tirera un coup de chapeau Guitard Auviste 199 Apr s maintes rencontres en des lieux charg s d motions il crira en effet son sujet Visage solidement construit comme un palais de bonne poque avec un nez droit un menton conqu rant des pommettes bien sculpt es ses mains sont viriles ses grands pieds sont ceux d un coureur d univers Bouvier 125 Emmen es par la charismatique vagabonde des mers les cinq navigatrices vont marquer les esprits des ann es 20 dont celui du 3 Une belle photographie du jeune Morand sur un voilier est pr sent e dans un recueil de textes choisis par Michel Bulteau Cf Paul Morand Au seul souci de voyager Paris Louis Vuitton 2001 p 195 26 Commandant de Vaisseau Georges H bert Ce p dagogue va en effet cr er Deauville en 1929 une Ecole Nautique F minine bord d un joli trois m ts de 150 tonneaux l A cyon o les l
3. La femme dans le miroir m a fait peur Une vision de moi dans dix ans transpirant au moindre mouvement et le cheveu mou et rare comme ont les femmes ob ses 64 Ce n est pas seulement dans sa relation avec elle m me que la narratrice prouve des motions contradictoires au sujet de son corps plusieurs reprises elle observe le d sir de se cacher en hiver lorsqu elle s enveloppe dans s es capes et elle se cache sJon corps 52 ou lorsqu elle se sent paisible dans un caf parce que pJersonne ne fai t t attention elle elle est invisible 65 Cependant propos de sa m re la narratrice dit J ai souvent envie de la forcer me regarder regarder mon corps ce qu il est devenu Parle t on des monstres dans ses magazines glac s en fait on mention 52 Il y a dans ces remarques une attitude agressive envers sa m re ce qui constitue une premi re indication des actions que va prendre la narratrice pour se r concilier avec son corps et rejeter les contraintes des valeurs de la soci t de consommation Dans L obsc nit du roman contemporain Michel Biron pr sente La danse juive comme un roman de t moignage qui t moigne de l exp rience de l individu ob se dans la soci t contemporaine Cependant une telle analyse nie la narratrice la possibilit d agir et donc nous ne nous fondons pas sur cette th orie dans ce projet 58 C est ca
4. l origine s crit le verbe le chant tremplin de l imaginaire ouvre la porte sur l infini 7 Au del de ce qu elle nonce la voix d elle m me se fait cr ation recr ation de la terre et des tres puisque tout le reste du monde s vanouit ou plut t s inscrit dans ce bruit d elle Musique par laquelle s accompliront galement toutes les sublimations venir puisqu au del de la m lodie verbale le texte se charge de transmuer les signes en mots les mots en images et les images en sens Dans l univers aragonien la sc ne de premi re vue succ de ainsi invariablement la sc ne du premier chant gr ce auquel sons et regards s unissent au gr d un imaginaire du mouvement perp tuel rythm par le chant comme un miroir tournant o l image y change de tout le mouvement qui l habite La voix de la femme aim e se pare alors du vertige d une union qui pour n tre pas r ellement charnelle n en est pas moins emprunte d une v ritable sensualit Je suis uniquement cette clameur vers toi c est dire Cette 7 La mise mort op cit p 357 Ibid p 16 Ibid p 358 224 clameur de vous Madame dans ma chair Cet pouvantement de n tre plus moi m me Le passage du chant au corps de l image la sensation ne s op re donc pas sans douleur dans la mesure o le son r v lateur du chant aragonien c l bre l existence en m me tem
5. tre le sujet de la v n ration du p re et d autrui D ailleurs selon Baechler la carence paternelle peut litt ralement d boussoler l enfant Baecher 345 Il est clair que Steiner est d boussol par l absence du p re Il n a pas de crit res sur lesquels il peut baser son identit Baechler propose qu une cellule familiale solide et surtout une forte figure paternelle permettent l enfant d imiter ses parents lorsqu il con oit son identit Il pr cise que l orphelin se sent d sorient et puis parce qu il n a aucun point de d part Leur personnalit est mal rassembl e sans ossature ni ligne de force Baecher 343 En effet Steiner invente une histoire familiale afin de compenser son identit d ficiente Il se dit que son p re tait marin et que sa m re tait une prostitu e Il se sent toutefois au bord d un gouffre aval par ses d ceptions d enfance Ainsi veut il punir m taphoriquement ses parents de l avoir abandonn en les imaginant souffrir dans les tableaux de Bosch qui d peignent toujours la souffrance humaine et la condamnation des p cheurs En italique dans le texte 185 Steiner d cida qu il tait l homme aval par un gros poisson rond dans le bas du panneau droit repr sentant l enfer dans le triptyque Le chariot foin du monast re de San Lorenzo Voil naufrag et aval par un monstre des ab mes Et puis droit en
6. Errances Montr al XYZ diteur 1996 486 p Les langages de la cr ation Montr al Nuit blanche diteur 1996 75 p 122 La danse macabre du Qu bec Montr al XYZ diteur 1999 87 p Le ma tre de jeu Montr al XYZ diteur 1999 259 p Saltimbanques Montr al XYZ diteur 2000 378 p Les amants de l Alfama Montr al XYZ diteur 2003 208 p L amour du lointain Montr al XYZ diteur 2004 309 p La gare Montr al XYZ diteur 2005 210 p Le fou de Bosch XYZ diteur 2006 223 p 2 Articles et ouvrages consult s Bordeleau Fran ine Sergio Kokis Le carnaval des morts dans Lettres Qu b coises 80 1995 pp 10 11 Chevalier Jean et Alain Gueerbrant Dictionnaire des symboles Paris Ed Robert Laffont 1982 1060 p Dictionnaire des mythes litt raires sous la direction de Pierre Brunel Monaco Ed Du Rocher 1988 liade Mirc a Le sacr et le profane Paris Gallimard 1998 185 p Frye Northrop and Jay Macpherson Biblical and Classical myths The mythological framework of western culture Toronto University of Toronto Press 2004 471 p Frye Northrop The Great Code The Bible and literature Toronto Academic Press Canada 1982 261 p Frye Northrop Le grand code La Bible et la litt rature traduit de l anglais par Catherine Malamoud Paris Seuil 1984 384 p 123 Harel Simon Le voleur de parcours Montr a
7. la d cision qu elle a prise En fin de compte nous remarquons un th me g n ral de continuation dans le monde des vivants et dans l espace entre deux Il faut noter que le seul personnage qui prouve une transformation d finitive est Yan Zi comme l crivaine nous laisserons la signification de ce fait ouverte aux interpr tations du lecteur 196 OUVRAGES CITES Ouvrages primaires Chen Ying L Ingratitude Montr al Lem ac 1995 Houde Nicole Une folie sans lendemain Montr al Pleine Lune 2002 Kokis Sergio Le Fou de Bosch Montr al XYZ 2006 Monette H l ne Unless Montr al Bor al 1995 Turcotte lise L le de la Merci Ottawa Lem ac 1997 tudes critiques portant sur les ouvrages primaires Bordeleau Francine Hiver 1995 10 11 Sergio Kokis Le Carnaval des morts Lettres qu b coises 80 Printemps 1998 9 10 Ying Chen la dame de Shanghai Lettres Qu b coises 89 Cormier P n lope 13 d cembre 20021 2 Le ch timent de Dieu L Accent Acadien http www library newscan com Biblio Frames FrameMain asp 13 d cembre 2002a 2 Les livres en quelques lignes L Acadie Nouvelle http www library newscan com Biblio Frames FrameMain asp Martel R ginald 7 septembre 1997 B3 lise Turcotte une uvre forte La Presse http www library newscan com Biblio Frames FrameMain asp 3 septembre 1995 B3 Une
8. A travers ces trois tableaux Monory essaie de nous transmettre un message l espace et le temps sont des exp riences v cues par les individus conditionn s par leur contexte historique et social En retour par la construction de l exp rience spatio temporelle c est l exp rience de l tre au monde qui est mis en jeu C est pour cela que le montage de Monory n est pas analytique ni critique il est romantique La juxtaposition de diverses perceptions spatio temporelles veille chez le spectateur une nouvelle exp rience reconstruite charg e d une forte teneur sentimentale il est merveill par l paisseur de son exp rience existentielle BIBLIOGRAPHIE Aumont Jacques L image Nathan 1990 Benjamin Walter uvre Folio Essais trad de l allemand par Maurice de Gandillac Rainer Rochlitz et Pierre Rusch Gallimard 2000 Bergala Alain nitiation la s miologie du r cit en images Les cahiers de l auto visuel 1977 Francastel Pierre Peinture et soci t naissance et destruction d un espace plastique de la rennaissance au cubisme Deno l Gonther 1977 278 Frydman Maurice Je suis entretiens avec Nisargadatta Maharaj recueillis par Maurice Frydman trad de la version anglaise Les deux oc ans 1982 Lessing Laocoon dition fran aise int grale coll Savoir sur l art L Hermann diteur des sciences et des arts 1990 Le Thorel Pascal Monory Paris mus e 200
9. Au dessus du b tail ahuri des humains c est sur ce vers si l on excepte le Salut initial que s ouvre le recueil des Po sies La foule est donc d embl e m pris e par le po te Car cette autre figure celle du cr ateur solitaire grandement h rit d un romantisme baudelairien que met en sc ne Mallarm est en quelque sorte l autre p le qui s oppose la multitude l ahurissement de la foule Comme nous l avons vu le po te et d j cette orthographe particuli re du mot est significative n utilise pas m me le langage des hommes il prouve le besoin de s inventer une langue que seuls quelques lus parmi la foule comprendront Cette id e entre pleinement dans la po tique de l nigme nonc e plus haut celui qui aura su r soudre l nigme que pose le 7 S Mallarm Vers de circonstance Paris Gallimard po sie Gallimard 1996 p 69 8 S Mallarm Le Guignon in Po sies op cit p 4 Il en emprunte certes certains mots mais dans un usage tout diff rent puisque comme nous l avons vu non r f rentiel 45 po me qui aura su en percer le langage et lui seul s ouvrira l uvre dans toute sa grandeur dans toute sa beaut Tout crit ext rieurement son tr sor doit par gard envers ceux dont il emprunte apr s tout pour un objet autre le langage pr senter avec les mots un sens m me indiff
10. Ici dans la maison blanche de la rue Saint R al au bord de la rivi re des Prairies tout pr s de l le et de la voie ferr e pas loin non plus de la prison Bordeaux se cache une douleur aussi secr te et inattendue qu une photo de mariage dissimul e sous un grand cahier au fond d un tiroir ferm cl IM 13 14 L crivaine cr e un espace romanesque isol et statique D un c t et de l autre la maison est s par e du monde ext rieur par des abandon conscient Selon Baechler la mort et le d laissement repr sentent des d ceptions pour l enfant 339 176 obstacles tels que la rivi re l le et la voie ferr e soulignant le motif d enfermement D ailleurs la mention de la proximit de la prison Bordeaux n est point anodine elle cimente le rapport m taphorique entre la maison et la prison et rappelle implicitement au lecteur de garder ce lieu l esprit Dans ce passage nous relevons la premi re instance de l image r currente d un personnage qui tourne son regard tel un prisonnier de l int rieur vers l ext rieur de la maison familiale Notons galement la pertinence symbolique de la photo de mariage H l ne qui se sent emprisonn e par le contr le parental place une photo de mariage de ses parents au fond d un tiroir ferm cl Elle leur inflige quoique symboliquement le m me emprisonnement dont elle se croit victime Selon Oore la famille la
11. Je lis parmi de nombreux exemples semblables la description d un roi de la pluie en Afrique qui les gens viennent demander la pluie lorsque vient la saison des pluies Or cela veut dire qu ils ne pensent pas r ellement qu il puisse faire de la pluie ils le feraient autrement pendant la saison s che durant laquelle le pays est un d sert aride et br l Ainsi ces exemples montrent les garements auxquels on s expose en th orisant l o il faudrait se borner d crire des pratiques Cela tant ce que je voudrais mettre en exergue pour l heure propos de ces r cits mythiques est le fait qu ils m lent des 14 Mirc a Eliade Aspects du mythe Folio essais Gallimard Paris 1963 249 pages page 36 15 Ludwig Wittgenstein Remarques sur le rameau d or de Frazer op cit page 22 75 connaissances scientifiques un r cit imaginaire de l origine En ce sens la mythographie est un exercice pluridisciplinaire qui fait merveilleusement coexister des connaissances techniques et des croyances Ainsi compr hension et cr ation se trouvent imbriqu es dans cette fa on particuli re de faire des mondes dont nous avons perdu la logique en raisonnant sans cesse de mani re dichotomique Pourtant si nous avons perdu la vision mythographique au sens o nous avons tendance consid rer ces formes de r cit comme de pures fantaisies dans notre gestualit et dans les r ponses que l on peut d
12. On se trouve donc dans le cas du po me mallarm en devant un texte la fois clos se suffisant lui m me parfaitement retir du monde et qui multiplie malgr tout les significations qui propose au lecteur une quasi infinit de lectures qui est en un sens infiniment ouvert Nous allons donc voir pr sent comment dans cette unit s mantique qu est la phrase Mallarm par le biais d une syntaxe d tourn e qui lui est propre va de nouveau multiplier les lectures et faire de la phrase elle m me le symbole de sa po tique du labyrinthe En effet la phrase est dans la grammaire fran aise une unit signifiante On pourrait ainsi l imaginer comme fil d Ariane guidant le lecteur jusqu la fin du texte mais aussi jusqu sa signification Le travail effectu par Mallarm sur la phrase va donc s apparenter une rupture de ce fil une v ritable d construction de l effort fait pour guider le lecteur 10 p Val ry Avant Propos in Vari t I Paris Gallimard 1948 p 105 38 propos de cette syntaxe r invent e Mallarm crit un balbutiement que semble la phrase ici refoul dans l emploi d incidentes multiple se compose et s enl ve en quelque quilibre sup rieur balancement pr vu d inversions La syntaxe serait donc cette composition cet quilibre sup rieur qui permettrait le sens Mallarm ne cherche pas perdre le lecteur sans rais
13. Selon lui la puissance d vastatrice du trauma surgit plut t de sa capacit produire une rupture de sens v cue chez le sujet comme une d symbolisation existentielle En effet l impossibilit de comprendre le trauma de lui donner un sens serait la cause principale d un schisme psychosocial Mais comment le sujet est il d abord incapable de nommer la trop grande blessure Comment vit il une fracture psychique et sociale et un sentiment de non existence De quelle fa on le sujet int riorise il la n gativit de l v nement traumatique et surtout de comment parvient il en liquider sa violence D abord si la r action naturelle au trauma est l incapacit de le dire c est parce que celui ci est v nementiel Aboutissant un r sultat dont l importance pour l individu qui le vie est plus lev e qu un simple fait anodin de son existence l v nement est plus qu une occurrence qu une circonstance qu un fait Il est calamit catastrophe d sastre chose qui accroche et d stabilise le sujet qui l a v cu L tiopathog nie de la n vrose traumatique est v nementielle L v nement est un traumatisme psychique violent soudain v cu comme un danger extr me mena ant l int grit physique J Herman Trauma and Recovery New York Basic 1992 p 1 6 C Caruth Interview with Robert Jay Lifton Trauma Explorations in Memory p 153 150 du sujet et dans un
14. c est qu il n est pas suffisant que ce dernier soit crit une seule fois il n cessite une r criture une duplication scripturale C est partir de cette constatation que nous nous proposons de penser la n cessit de r crire le trauma comme moyen de le g rer Dans un premier temps nous tenterons de faire ressortir quelques l ments caract ristiques d une premi re tentative d criture notamment explicit s par Herman et Caruth dont le but est de permettre au sujet de recoller les morceaux de la fragmentation traumatique Mais nous nous poserons aussi une question fondamentale dans quelle mesure une seule criture serait elle insuffisante Comment et pourquoi la narration r p t e d une m me trame historique nous permet elle d affirmer que le sujet puisse vivre une laboration plus compl te Par exemple nous pensons au r cit de Sylvia Fraser qui raconte le trauma de l inceste p re fille Now I close my father s coffin Now I am flying a seabird on its way to the ocean My other self is dead My father is dead The king is dead Now I close the coffin truly close it My Father s House p 242 158 crire le trauma une cure incompl te Plusieurs critiques se sont entendus pour dire que l avortement dans Les armoires vides repr sente la d chirure sociale de Denise Lesur En effet Bacholle Bo kovi confirme que la grossesse de la jeune narratrice g e de
15. ces quatre jeunes femmes ne comptant gu re plus de soixante dix ans selon ses propres mots on voit l une petite exag ration de sa part visant certainement magnifier un peu plus leur exploit Elle fut l une des repr sentantes de la d l gation suisse aux preuves nautiques des Jeux Olympiques de Paris en 1924 Exp dition au cours de laquelle elles seront rejointes pour un temps par Mariel Jean Brunhes et Henri Benedict le jeune fr re des s urs de Saussure 25 Ayant fr t un cotre de quelques tonneaux pendant plusieurs mois elles navigu rent en M diterran e orientale et visit rent la Gr ce la Cr te et les les de la mer g e Sans autres armes qu un gramophone sans autre approvisionnement que quelques bo tes de conserve Miles Ouli et de Saussure nous ont donn une merveilleuse le on d ind pendance et d endurance sportive et leur voyage est le type de l itin raire gratuit Chaque page de leur journal est un hymne la libert une libert achet e non avec de l argent mais du courage de la force physique de l exp rience science nautique et art culinaire voil des femmes qui ne co teront pas cher leurs poux pendant le voyage de noces 65 66 Par le style direct et simple qui caract rise son criture l auteur d Ouvert la nuit expose un sentiment d amusement et d engouement l gard de celles qui voyagent comme les hommes et revendiquent leur libert
16. espace s il y en a s ouvre de tous c t s vers d autres espaces Il n y pas de profondeur comme dans l espace de la m moire et celui du r ve car la profondeur connote le temps et que le temps dispara t dans le pur tre Devant celui ci le d sir se r tr cit m me la m moire s arr te la rature d une photo par des courbes blanches connote l effondrement de la m moire L homme sans m moire ni d sir est celui qui est d pourvu de son identit personnelle pour se fondre dans la non identit de la transcendance la lumi re se projetant de loin claire les deux personnages qui s treignent sans que l on voie leur visage La voleuse et son complice servent de double l un l autre la retrouvaille des deux personnages signifie la retrouvaille de l homme avec lui m me Le bonheur dit Hegel c est se retrouver soi m me dans son tre Le pur tre dirions nous c est se retrouver soi m me ici et maintenant 16 Lyotard voit en j suites la m me morphologie perverse la m me incapacit d investir et la m me jouissance dans l imprudence libidinale qui est aussi l extr me prudence la m me relation au jeu comme on dit jouer avec le feu la m me indiff rence dans la recherche des plus grandes diff renciations le m me flegme de la passion que chez le dandy et que chez le capital Pour Lyotard le dandy est j suite sans J sus qui se pr occupe de se perdre et sans rien
17. int rieur La composition souligne la perspective qui donne une impression de profondeur de l espace Les ustensiles et le cr ne font partie des objets privil gi s de la nature morte en anglais still life dans laquelle la vie vivante s arr te Au dernier plan l image du tigre donne un effet de catalogue nature morte faite de choses vivantes pour reprendre l expression de Lyotard Tout cela concourt donner Lyotard utilise le mot catalogue pour d signer l esth tique de Monory ainsi que celle des hyperr alistes L art de catalogue r side dans des objets exhib s pour susciter et suspendre le d sir de prendre la pulsion d emprise L il est coll par les choses montr es elles avancent vers nous font pression contre la paroi du tableau nous investissent imp rieusement font ventouse M me quand il repr sente des tes vivants en mouvement Monory ne manque pas arr ter l image Plus loin Lyotard continue ces mouvements sont arr t s clich s M me le flou voque l instantan photographique pris et arr t sur un mobile dou d une tr s grande vitesse Tableau vivants comme dans les dessins de 265 une impression d arr t de la vie L homme intercal parmi ces natures mortes devient lui m me la nature morte il ne cherche pas dominer les objets ni se faire ressortir par les objets Il est humble il est l un d eux
18. int rieure entre la raison et la folie Felman 63 L incapacit de raisonner distingue le v ritable fou de ceux et celles qui se croient malades mais ne le sont point En effet ce d raillement de la raison pousse Chut ext rioriser sa violence int rieure for ant les autres le rejeter afin de se prot ger la dynamique de la survie du plus fort infiltre le contexte familial Par cons quent les signes pr curseurs du suicide passent inaper us Lorsqu il d clare Unless J suis pas fait pour vivre elle se sent sauv e par la cloche quand le t l phone sonne U 39 Walter ignore la mont e de la folie chez son fils U 44 De plus lorsque Unless essaie de discuter de Chut avec Milou elle joue l vasive elle n a pas le go t d appeler son fr re U 49 D ailleurs quand Red apprend que Chut se trouve chez Unless au lieu de s inqui ter pour son fr re elle dit Unless de le faire sortir de chez elle U 40 On fait attention lui seulement lorsqu il appara t de fa on inattendue dans l espace personnel de l un d eux comme il le fait chez Unless U 36 et la maison familiale lors de son suicide U 53 Selon Oore la maladie mentale de Chut et le dysfonctionnement de la famille clat e repr sentent deux causes de son suicide 2003 47 Compte tenu du silence associ avec le vide int rieur et la solitude de sa maladie mentale il semble tre appropri que Chut
19. op cit p 184 7 Y Bonnefoy La Hantise du ptyx in L imaginaire m taphysique Paris Editions du Seuil 2006 p 101 121 3 Ibid p 106 42 doubl e d une recherche constante sur le vocabulaire Mallarm invente dans le recueil des Po sies l image du ptyx un langage nouveau auto r f rentiel purement po tique Les langues imparfaites en cela que plusieurs manque la supr me crit il par ailleurs dans la Crise de vers Le langage po tique qu il met au point serait il d s lors cette langue supr me En effet Mallarm semble d plorer la pluralit des langages qui pour d signer un objet quelconque ont recours diff rents mots Or on l a vu Mallarm cherche quant lui dans ses po mes non plus se r f rer un objet ext rieur mais une notion pure pure et qui ne peut donc tre nomm e dans un langage par essence imparfait Ce r ve d une langue nouvelle est au centre de son uvre En effet la distinction qu il effectue entre un langage journalier prosa que et une langue hautement po tique est fondamentale La po sie sera chez Mallarm le lieu d une forme d Id al Il s agira donc paraphrasant une phrase c l bre de d peindre non plus l objet ni a fortiori de le nommer mais de s attacher l impression produite par les mots eux m mes L invention de cette langue nouvelle met donc le lecteur au premier plan ce sera d so
20. tait le fourbi vision hypoth tique qui singe sans y prendre go t une v rit ternelle Cette phrase se pose donc comme une hypoth se de travail qui seule permet mon sens une forme de comparatisme philosophique faisant appara tre les connexions interm diaires que les grands syst mes s ing nient masquer en l gants prestidigitateurs En effet il s agit de d tecter sans tenter de ceindre des d p ts mythologiques des ritualit s fonctionnelles lesquels constituent notre exp rience humaine de ce grand fourbi qu il s agisse de l enfance de l humanit ou de celle de chacun de ses exemplaires Cependant vitons d ores et d j un cueil qui nous tend les bras du fait de cette expression fallacieuse d enfance de l humanit En effet il ne s agit pas pour moi de dire que le bon sauvage l homme naturel l homme a culturel entretient un rapport fictionnel au monde de m me que les enfants se racontent des histoires Non mon propos est bien le suivant l homme dans la construction m me de son univers c est dire de la r alit terme sur lequel nous reviendrons videmment ne sait faire autrement et cela quelque soit la nature de ses entreprises que de se r approprier ce fourbi ce vague monde hostile c est dire litt ralement de l inventer nouveau En ce sens l tranget des mots dans la p riode d apprentissage Ludwig Wittgenstein Remarques
21. tu pr sent ou absent r el ou fictif La g mellit des processus d invention et d namoration est ici flagrante puisque toutes deux r sultent d une m me d marche celle par qui le r el se d voile d tre imagin Puisqu au niveau de toute communication il y a d centrement du sujet de l nonciation par rapport au signifi le d sir primaire l origine de toute sublimation ne peut donc trouver s exprimer que dans la mise en art de m me que le dialogue Blanche ou l oubli Annexes cit in C Narjoux Le mythe ou la repr sentation de l autre dans l uvre romanesque d Aragon op cit p 308 233 avort ne peut reprendre vie que dans l change tacite instaur par l uvre ouverte Aussi partant des r veries solitaires et autres fantasmes individuels le discours se partage et s tend faisant de l homme l artisan de sa vie r v e et de l crivain le vecteur privil gi d un langage particulier celui du dialogue retrouv par le biais de ces songes partag s que sont les romans L art de r ver par crit Ainsi face l incompr hension de nature qui renvoie les amants dos dos l uvre d art appara t comme une tentative de connaissance et de compr hension de l autre en m me temps qu elle devient le moyen privil gi de l exploration de l infini du d sir et de l amour Le texte se veut qu te et comblement de soi et de l autre
22. 2004 524 pages Eliade Mirc a Aspects du mythe Folio essais Gallimard Paris 1963 249 pages Engel Pascal La norme du vrai Philosophie de la logique Nrf essais Gallimard Paris 1989 472 pages Glissant Edouard Une nouvelle r gion du monde Esth tique I Nrf Gallimard Paris Goffman Ervin La mise en sc ne de la vie quotidienne 1 la pr sentation de soi traduction fran aise d Alain Accardo Le sens commun Les ditions de Minuit Paris 1973 251 pages Goodman Nelson Mani res de faire des mondes traduction fran aise de Marie Dominique Popelard Folio essais Gallimard Paris 1992 228 pages Jarman Darek Witigenstein le film traduction fran aise de Patricia Farrazi ditions de l clat Paris 2005 173 pages Jeudy Henri Pierre Fictions th oriques Manifeste Editions L o Scheer Paris 2003 171 pages Leiris Michel Biffures La r gle du jeu I L Imaginaire Gallimard Paris 1975 302 pages Livet Pierre Les normes Vocation philosophe Armand Colin Paris 2006 168 pages 105 Murdoch Iris L attention romanesque Ecrits sur la philosophie et la litt rature traduction fran aise de Denis Armand Canal Contretemps La table ronde Paris 1997 377 pages Musil Robert L Homme sans qualit s tome I traduction fran aise de Philippe Jaccottet Editions du Seuil Paris 1956 833 pages Pauls Anne Le facteur Borges traduction fran aise de Vincent Raynaud Christian
23. 74 Bi On trouve chez Nietzsche un loge du suicide Pour lui il faut se sentir libre de se tuer car c est un service que l on se rend soi m me et que l on rend galement aux autres quand la vie est devenue insupportable Source Nietzsche fr wikipedia org Par ailleurs nous choisissons de ne pas tudier la notion du suicide puisque ce th me n est pas pr sent dans l Apocalypse Johannique 117 amants de l Alfama fait une remarque d une grande pertinence pour comprendre le tourment intime de Steiner Elle remarque que penser la mort ne veut pas dire qu on la trouve importante a peut aussi vouloir dire qu on a peur de la vie AA 61 Le devenir de l artiste mort et transfiguration Gandalf est n et je ne crois pas que Wilhelm Lutz ait jamais regrett sa m tamorphose Mort et transfiguration c est ainsi qu il d crit le devenir de l artiste S 239 Pour le personnage de Wilhelm Lutz dans Saltimbanques la transfiguration est un cheminement n cessaire pour sonder la nature profonde de son existence Elle offre la possibilit de se r aliser pleinement de transcender la r alit quotidienne et de combler le vide essentiel caus par la finitude de l homme L art laisse libre cours la voie int rieure alors que la vie pose des obstacles insurmontables Pour le docteur en philosophie il est presqu impossible de participer au monde autrement que par l art vu
24. Kennedy met l accent sur l importance du th me de l eau qui est souvent coupl avec une image d avalement Pour 15 Terme employ par Cox qui vient de The Reproduction of Mothering de Nancy Chodorow Selon Cox la pseudo symbiose est la r action d angoisse de la m re lorsque sa fille manifeste le besoin d individualisation 136 18 Cox note Yan Zi parle d elle m me comme d objet de cette reproduction et comme d une autre personne sa fille avant de pouvoir consid rer le moi dans ce qu il reste 142 travers son suicide Yan Zi d sire nier son r le de fille d truire la notion qu elle est une simple reproduction pour enfin devenir un tre autonome 1 Il est important de noter que l tude que fait Kennedy se base sur les th ories de Jung et analyse le r le du conscient et de l inconscient En ce qui concerne la relation m re fille Kennedy souligne le fait que la m re demeure un symbole de l inconscient Puisque l inconscient est ins parablement li au soi la mort se pr sente la fille comme son seul moyen d chapper la m re Kennedy note 182 elle la filiation du th me de l eau sugg re que la m re occupe l inconscient de la fille Ce qui nous int resse ici est que les th mes d avalement et d eau co ncident souvent avec l image du corps maternel J avais parfois l impression qu elle avait envie de m avaler viva
25. La femme entour e d ploie ses bras grands ouverts en regardant en bas En haut gauche dans un rectangle minuscule on voit un chef d orchestre en train de diriger Il ouvre ses bras avec sa baquette bouche b ante La troisi me image pouse le cadre du tableau les 17 Monory op cit p 139 18 Pour Lessing l artiste doit choisir un moment f cond puisque la peinture est contrainte de repr senter un seul moment Or cela seul est f cond qui laisse un champ libre l imagination Plus nous voyons de choses dans une uvre d art plus elle doit faire na tre d id es plus elle fait na tre d id es plus nous devons nous figurer y voir des choses Or dans le cours d une passion l instant du paroxysme est celui qui jouit le moins de ce privil ge Au del il n y a plus rien et pr senter aux yeux le degr extr me c est lier les ailes l imagination Ne pouvant s lever au dessus de l impression sensible elle doit se rabattre sur des images plus faibles et craindre de se limiter ce qui lui para t dans la pl nitude du visible Lessing Laocoon dition fran aise int grale coll Savoir sur l art L Hermann diteur des sciences et des arts 1990 p 56 273 deux autres y sont ins r es Cette image repr sente l instant de Pexplosion les constructions clat es en morceaux qui s envolent en Pair un soldat sortant de sa voiture est en train de tirer sur un autre soldat
26. Pris d un vent de panique les m les siciliens se d m nent pour sauver leur r putation et faire oublier que l un d entre eux a failli La d couverte de la tare d Antonio pr figure la d composition de la famille Magnano Incapable de concilier des croyances contradictoires son oncle se suicide Peu apr s la suite d un bombardement le corps de son p re est retrouv dans les d combres d un quartier mal fam o il tait parti retrouver sa ma tresse Malgr la disparition de ses proches et l effroyable vision de sa ville d vast e par la guerre Antonio demeure accabl par son infirmit et sa diff rence Le bel Antonio se referme sur le pitoyable spectacle d un homme sanglotant comme un enfant jamais prisonnier d un carcan id ologique dans lequel la virilit brutale et le culte du m le dominateur apparaissent comme des imp ratifs inviolables Cripure et Antonio deux personnages en crise Dans ce premier chapitre nous voudrions montrer que Cripure et Antonio peuvent tre consid r s comme des figures embl matiques du roman du 20 si cle dans la mesure o ils constituent des personnages en crise Cette r flexion nous semble indissociable de la question des rapports entre devenir individuel et Histoire collective car c est d abord par leur passivit et leur indiff rence face aux drames historiques que Cripure et Antonio s apparentent des personnages en crise Portr
27. Une folie sans lendemain Pour en noter deux ils sont exclus de la soci t cause de leur folie et se suicident subs quemment Viau propose que les fous dans les uvres de Ferron connaissent des secrets qui d passent l entendement humain Leur folie est souvent signe de profondeur de fantaisie et d illumination Viau 276 La folle Edm e de Houde apporte au texte le m me genre d illumination de g nie que les personnages de Ferron Cette image positive du fou subvertit en la nuan ant la notion de ce que c est que d tre autre 7 Terme emprunt la th orie du postmoderne de Janet Paterson 26 P n lope Cormier remarque l importance du lignage f minin dans ce roman M me si tous les personnages ne sont pas physiquement pr sents dans le r cit on peut n anmoins facilement reconstituer l arbre g n alogique du personnage 189 sa fille Sylvie et sa m re Edm e voire tout son lignage f minin au centre d un univers qui leur est propre Le passage ci dessous illustre ce syst me quatre g n rations de femmes se ressemblent chacune se trouvant sous un signe de lunivers La terre et ma m re m attendent Je vais bient t m enfoncer dans le noir je suis pr te voyager dans les entrailles du doute J aper ois d j ma grand m re impatiente qui brille comme une toile dans la nuit Je l examine de ce brouillard qui respire si mal Ma fille me dit Je t aime je t
28. alit d un monde absurde et fuite salvatrice dans l univers rassurant du songe tels semblent tre les pierres angulaires de toute une partie de ces uvres pour le moins atypiques mi chemin entre tradition et renouveau filiation et d chirure Aussi imaginaire et fantasme paraissent ils s unir au gr des processus de l laboration psychique faisant peu peu du malheur d aimer le th tre de toutes les transfigurations imageantes par lesquelles le fantasme amoureux semble ne pouvoir se r fl chir qu au miroir de l imaginaire De L amour ou du d sir d aimer Des souffrances et douleurs inh rentes lamour il est constamment fait tat et nul ne songerait encore nier le caract re trompeur et illusoire que celui ci peut parfois rev tir Cependant il semblerait pourtant qu au del d une simple tendance occidentalisante faire du malheur la condition m me de L Aragon La Diane fran aise 1946 Il n y a pas d amour heureux Seghers Paris Ibid La mise mort 1965 Gallimard Folio Paris 1965 4 Ibid Blanche ou l oubli 1967 Gallimard Folio Paris 1972 Ibid Th tre Roman 1974 Gallimard L Imaginaire Paris 1974 Ibid Aur lien 1944 Gallimard Folio Paris 1988 217 lamour puisse subsister une clause sentimentale sous jacente si profond ment ancr e dans la conscience humaine qu elle ne se trahit que
29. art l poque de sa reproductibilit technique il d finit l aura d une uvre d art comme le hic et nunc de l uvre d art l unicit de son existence au lieu o elle se trouve Plus loin il voque l aura d un objet historique en disant que ce qui fait l authenticit d une chose est tout ce qu elle contient de transmissible de par son origine de sa dur e mat rielle son pouvoir de t moignage historique tandis que l aura d un objet naturel se d finit comme l unique apparition d un lointain Dans Sur quelques th mes baudelairiens il voque bri vement l aura d un objet offert l intuition comme l ensemble des images qui surgies de la m moire involontaire tendent se grouper autour de lui l aura correspond en cette sorte d objet l exp rience m me que l exercice s dimente autour d un objet d usage Nous entendons ici par l aura de la transcendance l ensemble des images ses sensations des id es provoqu es par la perception directe de la transcendance Walter Benjamin L ouvre d art l poque de sa reproductibilit technique dans uvre II op cit Sur quelques th mes baudelairiens bid p 329 390 274 de substitution celui de la transcendance au del de la perception par le sentiment humain du sublime celui du sublime en tant que sentiment par le sublime en tant que repr sentation Pourtant
30. c est l exigence de ne pas s arr ter en chemin le plus confortable soit il Elle nous pousse la d couverte l aventure intellectuelle S il n y a plus de myst re finie la libert p 468 Frye Northrop Le grand code p 198 108 Sergio Kokis L aspiration la nouvelle J rusalem se fait dans l ici et le maintenant car l apocalypse chez Kokis est une apocalypse int rieure La r surrection ne se fait pas dans l av nement de la mort physique mais plut t dans le d passement de la mort en vie Il s agit d une qu te de transcendance et de transfiguration Mort et libert Dans La danse macabre du Qu bec Sergio Kokis explique que c est la tension antagonique entre ces deux p les de la vie et de la mort qui fait vibrer le moment pr sent de toute action humaine La mort c est d ailleurs ce qui rend belle la vie sans tre destin pourrir et dispara tre comment appr cier le moment pr sent MJ 141 Par cons quent le concept de libert devient le corollaire de celui de la mort Les tres humains savent qu ils meurent donc ils sont libres MJ 88 Il ne reste l homme que le pouvoir de se choisir dans les limites de sa condition MJ 92 puisque le salut de l homme est une pure illusion religieuse selon Lucien Tu vivras et tu mourras seul et ta vie sera ce que tu auras pu en faire MJ 225 La qu te du personnage de Boris dans rrances
31. ce qui donne un sentiment d isolement total malgr leur copr sence dans le m me espace On ne peut pas dire s ils sont vraiment dans le m me espace di g tique on a plut t l impression que le m me espace onirique r unit les diff rents espaces dispers s ou les diff rents instants du d roulement du r ve Il merge ici une structure du r cit l espace du r ve est le discours du narrateur qui organise l histoire et produit tous les discours seconds Nous avons voqu le c t sc nographique de l espace onirique d autant plus que l h t rog n it spatiale au sein d un espace homog ne fait penser au soliloque auquel chaque 14 Comme le dit son tymologie ce terme technique d signe l art de peindre en perspective les d cors de la sc ne l italienne puis plus largement l art de planter les d cors enfin la fa on dont se sont repr sent s les lieux Jacques Aumont op cit p 177 5 L laboration du r ve partout o elle se produit transforme les rapports temporels en rapport spatiaux et les fait appara tre sous cette derni re forme Supposons qu au cours du r ve nous voyions se d rouler une sc ne entre deux personnes qui paraissent tr s petites et fort loign es comme si elles taient observ es l aide d une jumelle de th tre tenue l envers La petitesse l loignement ont un sens identique ils traduisent l loignement dans le temps et nou
32. contempler grimpant pieds nus dans la m ture 25 Le voyage entrepris par Hermine de Saussure et Marthe Ouli repr sente le premier volet de ce p riple en Gr ce Dans un livre publi en 1926 aux ditions Hachette La Croisi re de Perlette 1 700 milles dans la mer Eg e elles racontent leur histoire dont la description au d part du Pir e en date du 24 novembre 1923 donne le ton Lentement nous sortons des jet es et contournons la presqu le d Akt o nous mouillons la tomb e de la nuit Nous jouissons enfin du calme 16 Le deuxi me volet caract rise l exp dition effectu e en 1925 quatre puisqu Ella 77 Alias Madame de la mer telle que l a surnomm e le po te Rab ndranath Tagore 24 Maillart et Yvonne de Saussure rejoignent leurs camarades Le jour du d part chacune d elles affiche avec bonheur une personnalit atypique Hermine de Saussure alias Miette fille d un officier de marine licenci e en lettres classiques me du groupe et capitaine de la Bonita a r solu de vivre fond ses id aux de jeunesse Ella Maillart qui recevra dans le r cit de Peter Fleming le surnom de Kini second du bord barreuse de voiliers de jauge internationale hockeyeuse skieuse vit une exp rience qui d cide de sa destin e de bourlingueuse Marthe Ouli surnomm e Patchoum par Ella Maillart ma tre coq et chef m canicien bord
33. de d ni de contournement ou de violent face face l cart de l Histoire Tous les attributs partag s par Cripure et Antonio laissent deviner combien leur rapport l Histoire est probl matique Passifs r sign s et d sabus s ces personnages se situent en effet en marge des mouvements de l Histoire Leur silence et leur mutisme invitent le lecteur d passer les versions officielles de l Histoire pour deviner en pointill s une Histoire autre non plus totale in branlable et achev e mais fragmentaire personnelle et discontinue l vidence du fait historique Antonio et Cripure opposent le doute et le scepticisme Rejetant toute croyance ils d noncent la vision t l ologique de l Histoire et le mythe du Progr s Contre le discours dominant qui s acharne justifier la guerre en tant que n cessit historique la d rive de Cripure et d Antonio met l accent sur la contingence l absurdit et l inutilit de ce drame travers l impuissance et la st rilit d Antonio la bassesse et l puisement de Cripure c est en fait une v ritable contre Histoire qui se tisse en de des doctrines impos es et des ambitions totalitaires Drame collectif et trag die priv e Nous nous sommes attach s montrer dans quelle mesure les protagonistes du Sang noir et du Bel Antonio peuvent tre vus comme deux personnages en crise Pour mieux comprendre en quoi ils s opposent aux personnag
34. dent pas comme c est le cas pour le conte En r alit elles subissent la force centrip te de l nonciation en je qui donne naissance un processus de r currences tissant des sous r seaux sp cifiques chaque fonction Cette criture ne serait donc pas le r sultat d un travail planifi mais d une logique intuitive C est pourquoi ces quatre fonctions transformation rencontre sexualit errance r apparaissent dans chaque s quence du r cit Individuellement elles pr sentent de multiples niveaux de lecture mais collectivement elles donnent au r cit une assise qui m ne le lecteur en r action avec l nonciation une certaine intimit avec le texte Cette familiarit pr sente l avantage d une proximit de lecture et le d savantage d une promiscuit dont le r sultat serait la contamination d une m tamorphose textuelle Toutes les fonctions dans leurs intrications respectives la subiraient et tout lecteur dans son approche du texte l endurerait galement D observateurs attentifs nous acquerrons finalement par la pr sence des fonctions et de cette contagion niveau multiple le statut de voyeurs Car si le lecteur invoqu en d but de r cit en est exclu en fin seule lui reste la conscience d avoir accompagn la narratrice dans une histoire pr sent e comme termin e d s la premi re page Or non seulement l histoire ne l est pas en derni re page mais les interpr tations sur le devenir de l h ro
35. jug s et les contraintes de la soci t contemporaine Son argument a influenc notre lecture de La danse juive nous permettant d identifier le projet de la narratrice cependant la narratrice est loin d tre une simple incarnation de la th orie de LeBesco 53 pas robuste elle consiste de plats all g s de caf instantan de lait vapor et de soupes en conserve 83 13 84 79 Cette sous consommation de nourriture est d lib r e la narratrice remarque lorsqu elle lit les magazines de sa m re qu elle se plonge dans des recettes complexes que s a m re ne fait jamais Les photos de magazines ne souillent pas sa cuisine 84 L id e de la nourriture est consommer mais la nourriture elle m me ne l est pas Ainsi la m re conserve t elle sa figure d individu sauv Dans une soci t de consommation la consommatrice id ale est mince parce qu elle a visiblement de l espace remplir et elle a donc une raison de consommer Dans le cas de la m re elle remplace la consommation de nourriture avec une consommation religieuse d hebdomadaires de magazines f minins et de mobilier 11 51 84 74 Par exemple la narratrice note Ma m re change le mobilier au gr des revues de d coration et des propos que tient la g rante de la boutique voisine de celle o elle travaille avec madame Dufresne 74 La narratrice observe aussi que sa chambre de jeunesse a t compl tement red co
36. laquelle induit une pr tention l ontologie du fait n est pas renoncer une description correcte du monde et encore moins la possibilit de conna tre Comme le fait remarquer le m me Putnam dans Fait valeur Ce que je suis en train de dire c est qu il est temps de cesser d assimiler objectivit et description Ici se profile autre chose encore car la remarque de Putnam a valeur pr ventive contre les mauvaises interpr tations de l entreprise wittgensteinienne En effet si le philosophe autrichien veut tenter de faire de la philosophie une description des pratiques ce n est pas pour retrouver la voie de la v rit mais bien pour nous donner voir des fa ons de vivre ensemble et ouvrir ici la br che d une thique diff rentielle C est en cela que l irr alisme wittgensteinien est galement une approche pragmatique de la r alit Tiercelin cite Pierce Le pragmatisme crit Pierce dans une veine pr wittgensteinienne ne r sout aucun probl me r el Il montre seulement que les probl mes suppos s ne sont pas des probl mes r els Mani res de faire des mondes Ainsi Cora Diamond dans son livre intitul L esprit r aliste d fend le caract re r aliste de Wittgenstein en rompant avec la connotation philosophique du terme telle que je l voquais pr c demment et en d fendant l id e selon laquelle le vrai r alisme est un retour l attention port e la vie humaine
37. le r gime en place qui ne tol re aucune opposition Ce microcosme est l image d un syst me totalitaire o Nicolas serait l incarnation de la Loi celui qui voudrait enfermer l ensemble de la population dans une sorte de pens e unique Est ce un hasard si Tzvetan Todorov dans M moire du mal tentation du bien 2000 en num rant ce qu il nomme les grandes h catombes du XX si cle nous fait part de cette interrogation lourde de sens finira t on par nommer un jour le notre notre si cle le si cle des T n bres Probablement puisque le XX si cle fut g n rateur des totalitarismes les plus meurtriers que l histoire ait jamais connu le communisme en Union sovi tique le nazisme en Allemagne le fascisme en Italie et le Franquisme en Espagne D autant plus que Pinter dans son discours d nonciateur accuse ouvertement les Etats Unis d tre responsable de l av nement de plusieurs dictatures dans le monde apr s la deuxi me guerre mondiale 7 Ce sont les derniers mots prononc s par Berenger la tomb e du rideau de Rhinoc ros 1959 de Ionesco Gussow Mel Conversations avec Harold Pinter trad Isabelle D Philippe Paris Deno l 1998 p 96 25 Todorov Tzvetan M moire du mal tentation du bien Paris Robert Laffont 2000 p 17 210 Les Etats Unis ont soutenu et dans bien des cas engendr toutes les dictatures militaires droiti res apparues dans le m
38. ler un certain universel celui de l homme pris dans la tourmente de l Histoire sans la comprendre mais qui refuse d accepter les discours officiels et les id ologies dominantes On pourrait reprocher Guilloux et Brancati de ne pas prendre plus ouvertement position face aux d sastres qui constituent l arri re plan de leurs romans Mais cette irr solution et cette pluralit de voix en sont pr cis ment les principales qualit s C est peut tre la plus grande force du Sang noir et du Bel Antonio que de montrer le danger des visions syst matiques de l Histoire et de privil gier les histoires domin es aux Histoires dominantes Il y a l pour Guilloux comme pour Brancati une mise en garde sur le danger de penser comme tout le monde autant qu une exigence intellectuelle et thique celle de la vigilance BIBLIOGRAPHIE uvres de r f rence Brancati Vitaliano I bell Antonio Milano Mondadori Classici Moderni 2001 Le bel Antonio traduction d Armand Pierhal Paris Laffont Pavillons Poche 2006 Guilloux Louis Le sang noir Paris Gallimard Folio 2000 Autres uvres de Louis Guilloux et de Vitaliano Brancati cit es ou consult es Brancati Vitaliano Don Giovanni in Sicilia in Romanzi e saggi d Marco Dondero Milano Mondadori I Meridiani 2003 142 Le vieux avec les bottes Il vecchio con gli stivali e altri racconti traduction de Jea
39. lettre tout de suite malgr s a t te qui tourne et s es naus es Il faut que cette histoire cesse parce que elle a peur du m pris 118 Cependant la narratrice se sert du conseil de Mel que les changements doivent en premier lieu prendre place dans la t te avant d tres visibles elle passe l action apr s une p riode de contemplation Pourtant elle modifie le conseil pour lui permettre 7 n A A Puisque la narratrice refuse de payer la consommation le mot lui m me signale le r le symbolique du geste de la narratrice 60 de passer l action contre ceux qui l emp chent de changer sa perception d elle m me Apr s avoir rompu avec ceux qui lui imposent l id ologie de la soci t de consommation la narratrice cherche retrouver ce qui lui a t ni dans l effort d imposer l id al social Ainsi pour se permettre de changer son opinion de soi la narratrice rend visite la famille de son p re au Nord En apprenant la mani re que son p re lui a impos des contraintes de la soci t de consommation la narratrice d cide qu elle doit chercher ce qu il a ni 141 De plus elle est port e visiter sa grand m re et sa famille parce que en se rendant compte de sa grosseur et de l effet de celle ci sur son corps elle est de plus en plus consciente de la famille qu elle ne conna t presque pas Cette prise de conscience est graduelle puisqu elle doit aller co
40. lier le r el traumatique par l am nagement narratif pour mieux voir de quelles fa ons le sujet d abord incapable de nommer la trop grande blessure donne un sens au non sens traumatique c est ainsi qu il appr hende l impact psychosocial du trauma qu il noue les fils rompus de son histoire Si le sujet vit une fracture psychique et sociale et un sentiment de non existence nous le pensons primordial de voir comment le sujet par l entremise de la narration int riorise dans un premier temps la n gativit de l v nement traumatique pour dans un deuxi me temps parvenir en liquider la violence Dans ces conditions comment transforme t il cette histoire d cousue d ni e de sens logique en un r cit compr hensible r v lateur d une th rapie r ussie Le paysage litt raire contemporain la scriptoth rapie Maintes tudes d montrent les effets b n fiques de l criture d v nements douloureux tant dans la sph re priv e abus sexuel inceste que dans la sph re publique trauma de guerre Ils semblent s entendre sur un ph nom ne relatif la r action du sujet dans l apr s coup de l v nement traumatique l impossibilit de le dire d en parler Un regard rapide sur le paysage litt raire contemporain Sylvia Fraser Audre Lorde Camille Lorence suffit Greg Forter Freud Faulkner and Caruth Trauma and the Politics of Literary Form dans NARRATIVE Ohio v
41. ma purificateur dans l uvre de Mallarm Toutefois ce n est plus d une absolution religieuse qu il est seulement question m me si le th me du p ch continue de tenir une place fondamentale dans les Po sies mais plut t d une purification dans le langage m me On l a vu Mallarm cherche exprimer dans sa po sie la notion pure Le langage po tique n est donc jamais s par de 3 S Mallarm Le Myst re dans les Lettres in Igitur Divagations Un coup de d s op cit p 281 1 L exemple le plus fameux tant le labyrinthe de la Cath drale de Chartres 46 cette id e de puret Comme on l a vu seul celui parmi les lecteurs et la foule qui saura r soudre l nigme que pose le po me pourra acc der sa signification profonde son tr sor son azur Or celui ci qui aura travers les preuves qui aura accompli le processus se trouvera donc l int rieur du langage po tique nouveau purifi de la mat rialit m prisable de la langue journali re que se partage le b tail Le po me est donc dans cette optique un processus purificateur un lent abandon d une langue prosa que vers un langage po tique pur C est dans cette id e que r side le c ur de la po tique du labyrinthe mise au point par Mallarm Il y a donc une v ritable opposition entre le pur et P impur entre l lu et la multitude On retrouve cette id e dans le voc
42. r par le pouvoir disciplinaire o de toute vidence le pouvoir s exerce sans partage Cette instance de contr le individuel t moigne d un dysfonctionnement d un d s quilibre que Foucault qualifie de surpouvoir monarchique lorsque le droit de punir s identifie avec le pouvoir personnel du souverain et c est exactement le cas avec Nicolas Transposition politique de Dieu sur terre Nicolas clame que Dieu est du c t du pouvoir et non de la dissidence pour ainsi l gitimer des exactions commises au nom du sacr du saint et de l indemne pour pr server le royaume de Dieu to keep the world clean for God p 246 Mais si l on admettait que le cerveau humain est une norme machine imiter comme dirait Ren Girard alors quel geste imiterait Nicolas arch type de l individu au pouvoir Impossible de r pondre cette question sans tenter de r pondre une autre question qui lui est ant rieure 10 Proverbe assyrien rapport par Paul Ric ur Op Cit P 183 11 I run this place God speaks through me p 225 Foucault Michel Surv iller et punir Naissance de la prison Paris Gallimard 1993 1975 p 95 204 De quoi est fait l imaginaire collectif de certains groupes humains D un point de vue mythologique c est par la Guerre et le Meurtre que l Ennemi originel est finalement vaincu dans la th ogonie babylonienne En effet le mythe cosmogonique raconte qu
43. ritablement connu Toutefois s ils ne se r f rent plus rien d ext rieur les mots vont d sormais se r fl chir l un dans l autre cr er un tissu s mantique complexe qui fait du langage lui m me le v ritable sujet du texte mallarm en Il faudra donc accorder une importance particuli re l tymologie aux sonorit s etc Le d but du Sonnet en yx est caract ristique Dans le premier vers on se trouve face au myst rieux onyx Or tymologie nous apprend que ce mot grec peut d signer les ongles mais aussi une pierre pr cieuse dont la couleur se rapproche de celle des ongles Onyx renvoie donc clairement aux purs ongles du d but du vers La d dicace se refermant en quelque sorte sur elle m me pi g e par ces deux termes synonymes qui miroitent l un dans l autre On peut donc voir dans ce premier vers et dans ce mouvement aboli comme un symbole de la po tique de Mallarm le langage comme le po me ou le mouvement vers l absolu comme le couloir d un labyrinthe ne renvoie jamais qu lui m me Le cas du miroir vide Mallarm et le ptyx Ainsi d onyx l tymologie grecque de l tymologie aux purs ongles c est un parcours labyrinthique se refermant sur lui m me que le lecteur devra suivre Or si comme on l a constat les mots perdent en un sens leur valeur r f rentielle c est aussi outre cette volont de faire du
44. soudre sa lecture qui aura su comprendre son langage Une telle id e implique donc que ce soit bien la qu te elle m me du sens qui se trouve au centre de la po tique de Mallarm Mallarm et la tradition de l nigme La volont d une langue nouvelle propre la po sie ne date pas de Mallarm le fait d j qu elle soit rim e jusqu au XIX si cle distingue la po sie de la prose Mallarm si avant gardiste puisse t il nous para tre aujourd hui appartient en un certain sens une tradition L obscurit de son uvre qui participe la distinction entre une langue prosa que et une langue po tique rejoint en effet la tradition de l nigme en po sie on songe aux nigmes de Straparola certains po mes des Mille et une Nuits aux fables populaires qui cachent parfois leur morale sous une nigme etc Comme le rappelle Paul B nichou l nigme est une obscurit volontaire mais provisoire un sens chercher et trouver faute de quoi on reste tranger au po me La qu te de la signification se trouve donc dans une telle po tique au centre m me du texte Il me semble int ressant dans cette optique de m arr ter un instant sur les Vers de circonstance de Mallarm qui illustrent de fa on quelque peu simplifi e cette id e En effet ces courts po mes en g n ral des quatrains que Mallarm consid rait comme une v ritable partie de son uvre fonctio
45. tent sans lien logique et chronologique apparent qui s interp n trent et qui se tissent dans la plupart des s quences du r cit en sous r seaux narratifs Ceux ci viteront sans doute notre tude la tentation d tablir une structure profonde et derni re du texte multiplier le paradigme de chaque code pour lui pr f rer la structuration la structure le jeu des codes non le plan de l uvre En outre chacune de ces fonctions est li e au moins un effet stylistique qui lui est propre et que nous tenterons de mettre en lumi re La transformation La fonction de la transformation et de ses effets charpente litt ralement tout le livre Elle y est pr sente chaque page ou presque et nourrit de fa on continue la trame de l histoire Trois mouvements qu il serait difficile de fixer dans la chronologie du texte tant les r p titions retours et exp riences sont nombreux l articulent Ils sont toutefois identifiables le premier est celui qui conduit la transformation de la narratrice en truie le deuxi me une prise de conscience de cette transformation le troisi me des tentatives successives de ma triser le ph nom ne de la m tamorphose De prime abord une joyeuse et na ve inqui tude je me suis trouv e incroyablement belle mais en plus app tissante traverse les sections deux et trois o les effets b n fiques de la transformation s estompen
46. tous mis ricorde Le th tre anglais des ann es 1950 nos jours ne manque pas de tendre un miroir grima ant au monde moderne qui replonge le spectateur lecteur dans l effroyable terreur cyclique 1 Ric ur Paul Finitude et culpabilit 2 La symbolique du mal Paris Aubier 1963 207 me qu a connu le XX si cle Nicole Boireau r sume de fa on pertinente la dynamique qui anime une grande partie des repr sentations th trales du si cle dernier et qui mettent en sc ne cette violence ritualis e Elle affirme que la th tralisation du rituel renoue avec les origines de la culture et appelle la lucidit sur ses m canismes les plus terrifiants En effet car c est la prise de conscience d une telle violence ritualis e qui se transmet d un si cle l autre en transgressant toute loi divine et morale que le th tre de Harold Pinter nous fait acc der Le triomphe des m canismes victimaires labor s par l Antiquit est c l br dans le th tre de Pinter afin de nous rappeler que la culture du monde moderne est bas e sur l immolation de la victime missaire pour le salut non de la communaut toute enti re mais au profit d un seul individu l lu trahissant ainsi son r le de l gislateur protecteur Nicolas dans One for the Road comme nous l voquions pr c demment se croit investi d une mission divine Son r le tel que nous le perce
47. velopper une attitude saine envers elle m me la narratrice doit retrouver son lien avec l h r dit qui lui a t ni et elle doit rejeter les contraintes de la soci t de consommation Afin d entamer son rejet des valeurs de la soci t de consommation la narratrice rompt son amiti avec Alice et termine sa relation avec son amant Mel Ensuite la narratrice voyage au Nord pour voir la famille de son p re Finalement n ayant pas r ussi trouver l ce qu elle cherchait elle passe au meurtre de son p re acte la fois pr m dit et inattendu La rupture avec Alice est signal e par le refus de la narratrice de payer la consommation de son amie geste de rupture mais aussi dans son expression un symbole du refus de l id ologie de consommation d Alice La rupture avec Mel est effectu e par le moyen d une lettre une lettre dans laquelle la narratrice dit explicitement Mel qu elle ne veult pas tre sauv e 118 la suite de son infarctus et de son s jour l h pital Mel fr quente un groupe pour perdre du poids et laisse des messages pour la narratrice lui disant que pour maigrir nous devons d abord mincir dans la t te 107 La narratrice identifie les efforts de Mel perdre du poids comme des efforts de parvenir tre sauv 67 et la narratrice les refuse Il est si important pour la narratrice d chapper aux propositions nuisibles de Mel qu elle lui apporte la
48. ves encadr es par de vieux marins exp riment s apprendront tous les rudiments de la voile En outre elles ont ouvert la voie aux grandes navigatrices qui viendront plus tard illustrer les pages de L quipe Florence Arthaud Isabelle Autissier ou Ellen Mac Arthur Avec le recul on peut dire qu Alain Gerbault et Paul Morand font partie de ces pr curseurs qui tr s t t c l br rent l incroyable sportivit de ces navigatrices Cette microsociologie de la voyageuse Berthier 2008 examin e travers le regard de quelques crivains voyageurs savoir Ren Trintzius Pierre Mac Orlan Paul Morand ou Alain Gerbault permet de faire ressortir les prouesses de quelques aventuri res titre d chantillon repr sentatif le choix de quatre portraits de femmes aux profils diff rents une aviatrice une nageuse de marathon une femme reporter une navigatrice a permis d clairer ce point de vue Peu importe au fond qu elles soient des h ro nes r elles ou fictives ce qui compte c est l imaginaire du vagabondage au f minin qu elles inspirent Ces auteurs traduisent l impression g n rale ressentie par les hommes de l poque la grande majorit tait tonn e de voir ces femmes r aliser ce qu eux m mes taient incapables de faire Certaines ont pris de tr s grands risques par exemple Ella Maillart envoy e par Le Petit Parisien en grand reportage pour examiner le comportement du nouvel occupan
49. 23 ans repr sente un atavisme de classe atavisme qu il prouve en citant le roman l tude o figure la r action de la m re de Lesur apr s que sa fille lui ait avou e son secret T es all e aux bois Elle m a frapp e deux gros coups de poing dans le dos Le p re Forain lorgnait par l embrassure de la porte Plus un endroit de propre et de libre elle m a arrach e brandie toute nue dans la cuisine corch e de morale de haut en bas Ce que Bo kovi a pu signaler c est l importance de l impact des institutions sociales famille religion dans le processus de r pression et de d chirure sociale que vit la narratrice Cependant sa critique n glige de montrer dans quelle mesure la narration en soi du trauma adjuvant principal de la d charge traumatique performe l acte de lib ration Car si le r cit parle de l avortement et que ce mot avortement qui vient du latin aboriri dont l ant c dent ab suivi du suffixe oriri signifie le contraire de na tre c est dire mourir c est que le texte se doit d tre l exp rimentation de ce meurtre D autres critiques tel que Delvaux le pr cise en disant que l avortement doit devenir crit et l crit avortement S il est vrai alors que ce roman qui figure comme la premi re narration du r cit de l avortement met en sc ne la d chirure sociale comme v ritable menace l int grit du sujet L
50. B nichou consacre la premi re version de ce sonnet in op cit p 177 187 37 Une autre lecture consisterait ne consid rer le texte que sous un point de vue purement musical Mallarm apr s tout ne r vait il pas selon la formule de Paul Val ry de reprendre la musique son bien Les effets d assonances et d allit rations les rimes la subtilit des sonorit s tout cela participe pleinement au sens Enfin une troisi me lecture consisterait tudier le Sonnet en yx dans sa spatialit les deux fois un quatrain et un tercet qui repr senteraient la Grande Ourse r fl chie dans un miroir la disposition v ritablement en X du texte dont le point de rencontre des deux traits serait au milieu du septi me vers s en est all l absence etc Cette courte analyse ne vise qu d montrer la fa on dont Mallarm fragmente la signification de son po me bien s r ce sont ces trois lectures qu il faudrait tout ensemble rassembler afin d obtenir une v ritable explication On ne peut se contenter d une lecture uniquement musicale par exemple Mallarm en multipliant les possibilit s de lecture en proposant diff rents acc s galement l gitimes cr e une impression de labyrinthe Dans une telle po tique le lecteur doit donc choisir comme on choisit une voie plut t qu une autre telle ou telle autre lecture tel ou tel autre chemin Une syntaxe labyrinthique
51. Bourgois diteur Paris 2006 188 pages page 170 Platon La R publique traduction fran aise de Robert Baccou GF Flammarion Paris 1966 610 pages Poe Edgar Allan Philosophie de l ameublement traduction fran aise de Claude Richard in Contes essais po mes Bouquins Robert Laffont Paris 1989 1600 pages pages 1056 1061 Prigent Christian Denis Roche Po tes d aujourd hui Seghers Paris 1977 189 pages Putnam Hillary Fait Valeur la fin d un dogme et autres essais traduction fran aise de Marjorie Caverib re et Jean Pierre Cometti Collection Tir part Editions de l clat Paris 2004 187 pages Roche Denis Ellipse et laps Collection photo cin ma Maeght diteur Paris 1991 167 pages Tiercelin Claudine C S Peirce et le pragmatisme Philosophes PUF Paris 1993 123 pages 106 Wittgenstein Ludwig Remarques sur les fondements des math matiques dit es par G EM Anscombe GH Von Wright et Rush Rhees traduction fran aise de Marie Anne Lescourret Biblioth que de philosophie Gallimard Paris 1983 351 pages Remarques sur la philosophie de la psychologie 1 traduction fran aise de G Granel Editions T E R Mauvezin 1989 244 pages Tractatus logico philosophicus traduction fran aise de Gilles Gaston Granger Tel Gallimard Paris 1993 121 pages Le cahier bleu et le cahier brun traduction fran aise de Marc Goldberg et J r me Sackur Tel G
52. Elle se soumet chaque jour un entra nement s rieux un entra nement mesur par des machines et des tableaux quadrill s 28 son corps est fa onn par ses deux heures d exercice quotidien un muffin au son dans son sac main muffin qu elle cuisine elle m me pour en contr ler le contenu en gras 91 Dans l id ologie de la soci t de consommation identifi e par Baudrillard Alice fait preuve d une d votion envers son corps qui est n cessaire pour atteindre le salut Cependant le r sultat pour Alice de cet entra nement et de cette attention intense sa di te est un corps o les os de clavicule sont clairement visibles et ceux de sa cage thoracique peuvent presque tre compt s sous son v tement moulant 101 La narratrice juge que cet entra nement a produit pour Alice un corps sec et dur qui accuse son ge 4 D PR G z Il s agit ici d un synonyme de underconsumption autre terme anglais employ par Baudrillard dans La soci t de consommation 55 28 91 99 Les efforts pour atteindre l id al ont donc eu pour Alice des effets nuisibles et vidents sur sa sant corporelle Alice travaille une mission de t l sur la consommation 92 En parlant de garanties sur les voitures et de consommateurs abus s on pourrait croire que son travail s oppose l id ologie consum riste 92 Cependant ce n est que l undercon
53. En Bosch il trouve le mentor qui l aide cheminer avec une finalit FB 81 L uvre de Bosch ouvre la voie la transfiguration de Steiner Plus il l tudie plus il se rend compte que seule la vie contemplative prot ge l me humaine contre la folie des hommes FB 80 La vie d ailleurs est d crite comme un p lerinage individuel vers le salut par les crivains qui ont influenc Bosch FB 79 Voil pourquoi Steiner pr pare un p lerinage vers Compostelle Voil l id e tre un p lerin FB 112 Or l id e du p lerin exprime non seulement le caract re transitoire de toute situation mais le d tachement int rieur par rapport au pr sent et l attachement des fins lointaines et de nature sup rieure Le p lerinage correspond parfaitement la situation de Steiner qui accomplit son temps d preuves pour faire la paix avec la mort FB 131 Et m me si le combat va tre long avec la mort inexorable au bout du chemin son projet de fuite lui donn e des possibilit s nouvelles FB 120 Lorsqu il abandonne ses pipes dans sa chambre il sent tout le poids de sa d cision irr versible et une sensation de libert enivrante se d gage de ce rite initiatique Lukas Steiner s appr te subir la mort symbolique pour donner naissance Zvat Steiner Vous n tes pas un ti de et je ne vous cracherai pas de ma bouche comme dit saint Jean FB 112 C e
54. Et c est parce que ces dimensions demeurent somme toute occult es qu elles sont livr es l interpr tation de chacun Enfin si le but de l histoire nous chappe peut tre il n en reste pas moins qu une autre fonction y r pond dans sa d clinaison narrative s apparente notre interrogation de lecteur puisqu il s agit de la fonction de l errance Errance La fonction de l errance s articule selon trois types de lieux Les premiers ont trait l humanit de la narratrice la parfumerie l appartement d Honor un caf l h tel l glise les deuxi mes son animalit le square les gouts la crypte de la cath drale la for t les troisi mes un tat interm diaire dans la rue chez le marabout l asile chez Yvan la campagne la ferme de sa m re Certes les choses ne sont pas aussi simples que nous voudrions le croire puisqu il arrive la narratrice par Compagnon Antoine Le D mon de la th orie Litt rature et sens commun 44 Certains diteurs potentiels de Truismes avaient demand Marie Darrieussecq de changer la fin de son roman estimant sans doute que cette fin n en tait pas une Marie Darrieussecq parle des ditions P O L p 43 255 exemple de se transformer en truie chez Honor et de retrouver forme humaine au square Toutefois les dispositions pr c demment formul es r pondent un besoin narratif d ad q
55. Genevi ve Brykman et Roselyne D gremont GF Flammarion Paris 1998 297 pages Bloch Ernst Experimentum Mundi question Cat gories de l laboration Praxis traduction fran aise de de G rard Raulet Payot Paris 1981 273 pages Borges Jose Luis Fictions traduction fran aise de P Verdevoye Folio Gallimard Paris 1983 183 pages Bouveresse Jacques La force de la r gle Wittgenstein et l invention de la n cessit Collection critique Les ditions de Minuit Paris 1987 175 pages Wittgenstein la rime et la raison Science thique et esth tique Collection critique les ditions de Minuit Paris 1973 278 pages Le pays des possibles Wittgenstein les math matiques et le monde r el collection critique Les ditions de Minuit Paris 1988 219 pages Bouvier Nicolas L usage du monde Petite biblioth que Payot Paris 1992 418 pages Chobeaux Fran ois les nomades du vide La d couverte Poche Paris 2004 133 pages Cometti Jean Pierre Le philosophe et la poule de Kircher quelques contemporains ditions de l clat Paris 1997 167 pages 104 Cortazar Julio Marelle traduction fran aise de Laure Guille Bataillon et Fran oise Rosset L imaginaire Gallimard Paris 1966 590 pages Diamond Cora L esprit r aliste Wittgenstein la philosophie et l esprit traduit de l anglais par Emmanuel Halais et Jean Yves Mondon Science histoire et soci t PUF Paris
56. Grammaire fran aise dition refondue par Andr Goosse DeBoeck Duculot Paris Louvain la Neuve 13 dition 1993 1997 Levi Strauss Claude Anthropologie structurale deux Paris Plon 1973 Propp Vladimir Morphologie du conte Paris Seuil Points 1928 1970 Rosenthal Robert amp Jacobson Lenore Pygmalion l cole L attente du ma tre et le d veloppement intellectuel des l ves Bruxelles Casterman trad de l am ricain par Suzanne Audebert et Yvette Rickards 1971 Todorov Tzvetan Introduction la litt rature fantastique Paris Seuil Points 1970 Le montage et l exp rience de l espace temps chez Jacques Monory Jia Zhao Universit de la Sorbonne Nouvelle Le temps et l espace ne sont pas simplement une circonstance o le sujet r alise son exp rience ils constituent l exp rience elle m me Comment les images fixes non temporalis es peuvent elles rendre l exp rience du temps et de l espace Nous choisissons pour cette r flexion le cas du montage dans la peinture Devant le montage comme discours nous nous confrontons une exp rience de l espace temps diff rente de celle que nous avons dans notre perception normale Notre interrogation sur le rapport entre le montage et l exp rience du temps et de l espace s appuie sur l analyse de trois tableaux de Jacques Monory Les trois tableaux que nous choisissons tudier ne sont que trois modes entre aut
57. L instant durable de l assassin est un instant qui s int riorise dans la cha ne temporelle Paradoxalement quand cet instant accepte sa position dans la dur e il d passe sa petitesse en tant que cha non et devient la cha ne m me Tous les instants viennent lui s absorbent en lui Un instant int rioris dans la dur e est un instant qui s ouvre les fen tres transparentes donnent sur un autre paysage un au del la lumi re du jour inonde partout l int rieur du restaurant Cette uvre ouvre la s rie des tableaux qui ont pour nom commun la couleur Le peintre joue ici avec les connotations des diff rentes couleurs ainsi que les effets motionnels que la combinaison de ces couleurs peut provoquer La partie gauche est imbib e dans un vert clair tandis que la partie droite est d un bleu fonc embl matique de l uvre de Monory Le vert est une couleur de la vitalit il fait allusion l accumulation de la libido la charge du d sir L assassin court vers l instant explosif en ne faisant de l accumulation libidinale qu un processus que l on peut br ler toute vitesse Son but ultime son seul but d ailleurs est de d charger son nergie en un seul instant Si la plupart du temps chez Monory l assassin se pose souvent comme un dandy qui tue pour la simple volupt et qui par cons quent retarde l infini la r alisation du meurtre ici le meurtrier perd son sa
58. Sang noir Leurs positions id ologiques sont pour le moins embrouill es l oncle d Antonio h site entre catholicisme et communisme son cousin Edoardo se rallie aux socialistes apr s avoir t fasciste et Antonio lui m me para t indiff rent aux secousses qui agitent le monde Quelques rep res historiques quelques dates et allusions des v nements cl s pars ment le roman mais la progression temporelle fantaisiste semble n ob ir qu aux caprices du narrateur L existence des personnages n est gu re modifi e par les faits historiques La seule v ritable pr occupation des personnages du Bel Antonio c est le d sir sexuel qui les travaille sans rel che et supplante chez eux toute autre inqui tude Or cet acharnement du Pour une introduction l histoire de l Italie fasciste se reporter l essai de Pierre Milza et Serge Berstein Le fascisme italien 1919 1945 Paris Seuil 1980 138 m le faire la preuve de sa virilit peut tre compris comme une m taphore des valeurs glorifi es par le r gime fasciste C est l une hypoth se qu il faut avancer avec prudence car rien dans le roman de Brancati ne permet d affirmer avec certitude que l auteur a voulu percer ainsi jour la grande m canique id ologique mise en place par le fascisme D ailleurs on pourrait aussi consid rer que le culte de la virilit affich par ses personnages est pour le romancier l occasio
59. Suzanne Aur lien ou l criture indirecte Paris Champion Unichamps 1988 Sur Jean Aragon le r alisme de l amour Paris Editions du Centurion Humanisme et religion 1966 Thietard Marie Catherine Le malheur d aimer ou l origine d une po tique du songe dans Aur lien et les derniers romans d Aragon Lille ANRT 1990 241 Articles et revues Bougnoux Daniel la langue ardente de l orage Pleine Marge n 12 d c 1990 pp 79 87 Silex Aragon Aur lien T l vision n 8 9 1978 R f rences bibliographiques Barthes Roland Fragments d un discours amoureux Paris Le Seuil Tel Quel 1977 Bellemin Noel Jean Psychanalyse et litt rature Paris PUF Quadrige 2002 Doubrovski Serge Autobiographiques Paris PUF Perspectives critiques 1988 Dumoulie Camille Cet obscur objet du d sir essai sur les amours fantastiques Paris L Harmattan 1995 Durand Gilbert Les structures anthropologiques de l imaginaire 1969 Paris Dunod Psycho Sup 1992 Platon Le Banquet 384 Paris Flammarion GF 1964 Rousset Jean Leurs yeux se rencontr rent ou la sc ne de premi re vue dans le roman Paris Jos Corti 1984 Starobinski Jean L il vivant II La relation critique Paris Gallimard Le Chemin 1978 uvres litt raires Breton Andr L Amour fou 1937 Paris Gallimard Folio 1991 Verlaine
60. Un ensemble de superlatifs vient alimenter le discours de l auteur afin de montrer P exploit sportif remarquable 78 qu elle est en train d accomplir C est la duchesse qui un beau matin avait lu dans l dition de Paris d un journal britannique qu une jeune nageuse dont les performances taient relat es au complet allait partir de Douvres pour traverser le Pas de Calais Certes la saison tait fort avanc e puisqu on touchait aux premiers jours d octobre mais il faisait ti de encore et le r dacteur expliquait que les courants ce qui n tait pas d montr taient singuli rement moins violents apr s l quinoxe La jeune nageuse s appelait Zizi Tricart elle tait g e de vingt ans elle avait gagn tous les championnats qui sont accessibles une jeune na ade et voulant achever une saison brillante par une performance inoubliable elle pr tendait traverser le Channel 76 77 Cette aventureuse 83 qui faisait le Plongeon de la Mort dans les f tes nautiques et participait tous les championnats possibles symbolise l excellence physique En s engageant dans un tel raid en tra ant sa propre route au gr du vent et des courants et en l Nous nous appuyons entre autres sur les dictionnaires biographiques ou annuaires des gens de lettres consultables la BNF En l occurrence ici Qui est ce Ceux dont on parle 1934 17 En 1906 il soutint une th
61. Vitaliano Brancati op cit 140 Professeur de lettres et universitaire de renom cet esprit d une rare lucidit prit rapidement ses distances avec le fascisme et s exila aux Etats Unis o il devait conna tre une brillante carri re politique et universitaire S enthousiasmant alors pour le fascisme le jeune Brancati commit la m prise de voir dans le roman Rube publi par Borgese en 1921 l exaltation des valeurs consacr es par le fascisme Dans un roman intitul L ami du vainqueur 1932 Brancati entend d passer son compatriote en s inscrivant tr s clairement dans la ligne id ologique fasciste Fier d tre accueilli comme l un des chantres du fascisme il crit Borgese pour lui recommander de manifester plus ouvertement ses sympathies fascistes dans ses crits Avec indulgence Borgese dissipe le malentendu assure Brancati qu il restera sur ses positions antifascistes et lui conseille bienveillant d attendre quelques ann es avant de le juger Cette r ponse branle profond ment Brancati qui pressent peut tre d j la na vet et l arrogance de son attitude Quelque temps plus tard il s loigne des cercles intellectuels fascistes La censure de son r cit Singuli re aventure de voyage 1934 met fin la p riode fasciste de Brancati Il quitte Rome alors que tout le promettait une destin e glorieuse comme chantre du r gime et regagne la Sicile o il sera professeur d italien et
62. a aussi trait la libido mais c est une libido qui prend son temps se d charger L assassin sent l approche de la mort il ne cherche pas s chapper ni courir sa rencontre il s immobilise il attend que la mort vienne lui La mort pour lui est le d chargement supr me d nergie qui ne se fait pas en un seul instant Il sait parfaitement que la mort n est pas la dissolution soudaine de soi dans l intemporel que mourir c est faire l exp rience de la dur e C est en attendant de mourir que l on per oit la pure dur e telle qu elle est En retour gr ce la dur e la mort re devient une exp rience vitale que l homme moderne perd peu peu dans son ali nation Ainsi l assassin prend tout son temps pour mourir il n attend pas l instant final du d chargement de la vie car tous les instants sont gaux pour lui ou plut t tous les instants s unissent en un seul instant qui est le pr sent Triomphe de l assassin celui qui ne pr tend aucun instant gagne toute la dur e 8 Au sens o Lyotard donne l ouvrier dans le roman de De Quincey qui va pargner des secondes en se h tant de produire sa corde plus vite que le temps de travail social moyen ne le comporte pour sauver l enfant des mains de l assassin dandy Ibid p 77 En parlant du Sacrifice d Isaac du Caravage qui repr sente un instant imm diatement pr c dant le meurtre Lo
63. a bit Pissed on the rugs that sort of thing p 228 Drink up It Il put lead in your pencil And then we ll find someone to take it out p 246 Les livres et le stylo symboliseraient les id es subversives dont Victor est porteur Elles seraient per ues comme un fl au dont il faut emp cher la propagation pour pr server l ordre public Sa mise en quarantaine est symbolis e par l espace clos o se d roulent les interrogatoires Victor Gila et Nicky sont l autre pour le r gime de Nicolas puisqu ils refusent de capituler face un conformisme qui d sire les enfermer dans un ensemble totalitaire Nicolas Pd go for me if I were you Victor The trouble about you although I grant your merits is that you re on a losing wicket while I can t a foot wrong We are all patriots we are as one we all share a common heritage Except you apparently p 232 Nicolas Are you Gila prepared to defame to debase the memory of your father Your father fought for his country I knew him I revered him Everyone did He believed in God He didn t think like you shitbags And he did die he died he died for his God You turd To spawn such a daughter What a fate Oh poor perturbed spirit to be haunted for ever by such scum and spittle p 240 7 Etrange co ncidence qu est celle qui a g n r cette folie meurtri re avec celle qui a men toute une communaut se li
64. annon ant Cripure qu on le renvoie au front pour la cinqui me fois la cruelle insistance avec laquelle la famille d un jeune homme mutil au front exige qu il endosse son uniforme de lieutenant pour une f te C est travers de tels pisodes narratifs par petites touches que Guilloux parvient voquer toute la souffrance et l horreur de la guerre En s attachant d crire quelques existences bris es en nous plongeant dans l intimit de familles an anties o les p res et les fils sont devenus des ennemis le romancier r ussit exprimer bien davantage qu en repr sentant une masse anonyme prise dans le feu des combats Privil giant ainsi le destin individuel la destin e collective Le Sang noir atteint une extraordinaire puissance d vocation Guilloux recourt cette m me technique pour d noncer avec une ironie parfois insupportable les mentalit s et discours pr valant l arri re culte de la virilit guerri re patriotisme effr n et brutal esprit gr gaire hypocrisie et veulerie Il organise son roman selon un principe de d calage entre l essentiel et le trivial la gravit du d sastre et la futilit des propos insignifiants Ce proc d efficace lui permet de mettre l accent sur l aveuglement et la vulgarit du discours officiel r cup rant la catastrophe pour se consolider Le rapport des personnages du Bel Antonio l Histoire semble plus compliqu que dans Le
65. automatique et commune entre sens et usage correspondance dont nous nous soucions peu tort car cette pratique en dit long ou plut t nous montre beaucoup de liaisons interm diaires de notre fa on de penser On constate donc une dilatation du vocabulaire augmentation du nombre de mots pour une d perdition du sens chaque mot voit le nombre des usages r duit En fait tout se passe comme si nous utilisions de plus en plus de mots pour dire de moins en moins de choses A contrario les anciens avaient moins de mots mais ceux ci pouvaient prendre des sens tr s variables selon le contexte d usage Cette diff rence d usages du langage n est pas une simple maniaquerie de linguiste bien qu elle puisse expliquer par ailleurs en partie les difficult s de traduction elle se r percute automatiquement sur la fa on de concevoir le monde En effet la s quentialisation syst matique du langage prend forme dans un d coupage de plus en plus sp cialis des 84 formes du discours c est dire des savoirs Ainsi si l humaniste du XV me si cle est un rudit aujourd hui les philosophes ne comprennent plus les crivains qui ne comprennent plus les scientifiques Ce d coupage va m me plus loin puisque les philosophes entre eux selon leurs sp cialisations leurs continents et leurs ma tres penser ne peuvent m me plus dialoguer Parfois m me c est l h ritage d un philosophe comme Wittgenstein qui se voit am
66. autre tendent la concordance symbolique de l tre au sein de la totalit retrouv e A l absolu amoureux pourrait donc r pondre l infini romanesque infini des formes et des signes mais galement infini d un discours enfin ouvert et d une parole pleine Et tous deux port s par la puissance signifiante d un double discours s acheminent insensiblement vers la voie des songes comme sc ne privil gi e de la r solution du conflit larv de l identit en suspens L infini devient alors cette immensit des possibles dans laquelle le roman cherche son tour atteindre son point ultime celui du trouble et de l merveillement mais aussi celui d un verbe incantatoire caract ris par l iconicit jubilatoire de l criture Aussi les figures de l imaginaire par leur r currence signifiante tendent irr m diablement faire du roman la fois le vecteur d expression des fantasmes et le support mat riel de leur r alisation En effet le style d ploy par l auteur en reproduisant la coh rence inconsciente du cheminement onirique conduit in vitablement les personnages sur la route de l absolu en m me temps qu il guide le lecteur dans l univers symbolique des r veries arch typales Le texte serait donc cet trange miroir du monde o se d ploient les repr sentations les plus authentiques dans la mesure o dans l uvre le d sir vit d une vie singuli re d une vie d tourn e trans
67. ces contraintes La caract ristique la plus vidente qui classifie la narratrice comme citoyenne non d sirable est sa taille Comme elle se d crit elle est une grosse femme ob se tr s voyante 17 Contrairement sa m re ou Alice la narratrice n prouve aucun d sir de maigrir 67 Elle prouve du plaisir en mangeant et jouit du pouvoir sexuel de son gros corps 15 24 etc 32 52 113 Lorsqu elle consomme de la nourriture ce n est pas le compte calorique ou le contenu en gras qui lui importe mais la sensation que provoque la nourriture la texture de la nourriture et les sensations de bien tre apr s avoir mang 69 24 66 De plus que par sa taille la narratrice n est pas une citoyenne id ale de la 56 soci t de consommation parce qu elle ne consomme que faiblement les biens de consommation Il ne s agit pas de l inconspicuous consumption non plus Contrairement Alice la narratrice ne se d finit ni ne se valorise par une limitation de consommation Cependant elle marche presque toujours lorsqu elle doit se rendre quelque part elle vit dans un appartement qui n est ni excessivement grand ni excessivement cher et puisqu il est difficile de se trouver des habits dans sa taille elle ach te rarement des v tements 18 26 50 etc 12 38 Elle ne fait pas mention de son achat d autres biens de consommation et m me passe les magazines que lui donne sa m re sa voisine r duisa
68. chez l tre humain l homme a besoin de la transcendance pour d passer sa finitude quelque soit le moyen Pourtant la question est que quand la transcendance n est plus en lui ni en dehors de lui c est dire qu il est encore possible de l acqu rir par l exp rience o peut il encore aller la chercher La r ponse est sans doute ceci il ne peut que se construire une transcendance au prix de sa propre existence Mettre en sc ne la mort par le geste sublime tendu vers le ciel transformer la destruction de l existence en une esp ce d op ra glac l r side le bouquet final de la qu te instinctive de la transcendance chez l humanit Conclusion On voit que la composition des tableaux de Monory demeure conforme au sch ma h rit du Quattrocento Le montage auquel il proc de ne vise pas d composer l espace et le temps comme le font les artistes du cubisme analytique Au contraire il conserve la visibilit des espaces temps uniques pour les mettre en parall le Son montage ne passe pas par le d montage et le remontage c est plut t un proc d de rajout En d autres termes le montage monorien n a pas pour but de d truire un instant pour mettre nu le caract re fabriqu reconstitu synth tique de l instant pr gnant il conserve chaque instant commune Paul Val ry cit par Benjamin dans Sur quelques th mes baudelairiens op cit p 36
69. clairement que la consommation et la soci t de consommation sont les causes du malheur de sa m re de sa difficult d tre authentique et de vivre pleinement Au contraire la m re est minuscule dans cette pi ce trop grande dans sa grosse maison inutile 74 La narratrice croit que sa m re serait beaucoup plus heureuse si elle pouvait retourner son village natal qui est loign de tout centre de consommation 83 Cependant sa m re ne peut d m nager parce qu elle n est pas la propri taire de sa maison c est le p re de la narratrice qui la poss de 83 Ceci est une indication du r le que joue le p re de la narratrice comme agent des contraintes de la soci t de consommation r le que nous examinerons plus loin pour le moment notons seulement que le sort de la m re indique la difficult d chapper la soci t de consommation une fois qu on en fait partie Comme la m re de la narratrice l amie de la narratrice Alice est aussi une consommatrice id ale Elle est mince et se d finit au moyen du inconspicuous consumption Cependant elle sert davantage comme cible de ridicule pour la narratrice alors que la narratrice prouve de la sympathie pour sa m re elle n a que du d dain pour Alice car celle ci a recours des mesures extr mes pour se conformer l id al de la soci t de consommation Selon la narratrice Alice maintient sa figure mince au prix de grands efforts
70. couvr imes en effet que chacun des sympt mes hyst riques disparaissait imm diatement et sans retour quand on r ussissait mettre en pleine lumi re le souvenir de l incident d clenchant veiller l afject li ce dernier et quand ensuite le malade d crivait ce qui lui tait arriv de fa on fort d taill e et en donnant son motion une expression verbale Il faut que le processus psychique 15 C Barrois Les n vroses traumatiques Paris dition Dunod 1988 p 169 16 S Freud et J Breuer tudes sur l hyst rie p 5 6 154 originel se r p te avec autant d intensit que possible qu il soit remis in stadium nascendi puis verbalement traduit L expression talking cure qu Anna O baptisa exprime astucieusement ce d sir de faire ressortir de ramener la surface par la parole les d sirs inconscients refoul s qui s articulaient lors des sympt mes hyst riques mais qui demeuraient jusque l incompr hensibles pour le sujet qui les ressentaient En traitant la question des n vroses du trauma Freud et Breuer stipulent qu un rem de l hyst rie est possible gr ce aux repr sentations successives et r p t es du trauma indicible dont le refoulement causerait sa pathologie M me si ses travaux clairent l importance d une catharsis l aide de mots ils s en tiennent cependant la sexualit f minine et ignorent l importance que peut avoir le contexte
71. d finition ne s enregistre pas Qui se d fait plut t Comme le r ve En ce sens la constante id alisation de l amour au sein des couples aragoniens pourrait d couler d un double processus d assimilation et d vasion la vague de r ves relayant insensiblement le miroir des sentiments Parce que l homme est un r veur d finitif et que l amour est l oxyg ne de s es r ves il n est pas tonnant alors que d imaginaire en cr ation le roman se dresse comme le support privil gi de la passion mythifi e Ainsi de lettres en signes de d sillusions v cues en extases compos es l criture romanesque rev t au sein du couple une r elle ambivalence puisque transportant les tres dans un monde et un temps fictifs elle les loigne de l tre aim en m me temps que de la r alit et du temps pr sents La transposition succ de donc la m tamorphose lieux et personnes enfantant d cors et personnages Ainsi des songes communs de fusion ternelle aux vasions solitaires les mots se perdent et s entrechoquent venant nourrir la trame des amours sanctifi es Et du songe offert l art de r ver par crit toujours l union c toie la fuite Les amants plus proches de n tre pr sents contribuent laborer au c ur m me de l change une v ritable po tique de l amour in absentia Le partenaire si proche soit il n est au demeurant rien du plus qu
72. d pendant de notre ducation et de notre culture Nous voyons ce que nous pouvons et par l et cela d s le Tractatus c est notre acc s aux faits qui est mis en doute par Berkeley et le philosophe autrichien Voil de quoi embarrasser consid rablement les interpr tants r alistes Les r alistes pour se r approprier au moins le Tractatus n ont donc pas d autre solutions que d en passer par la pirouette dichotomique par faire ce qu on ne fait jamais dans la vie part dans le cadre de pathologies graves se scinder en deux Pour autant 1l ne s agit pas non plus pour moi de mettre le Wittgenstein du Tractatus et ses crits post rieurs sur un m me plan Il ne s agit Ludwig Wittgenstein Tractatus logico philosophicus op cit page 93 George Berkeley Trois dialogues entre Hylas et Phylonous traduit par Genevi ve Brykman et Roselyne D gremont GF Flammaion Paris 1998 297 pages page 120 96 pas de substituer la confusion la rupture il nous faut tenter d appr hender des changements en tant que tels Ainsi Wittgenstein n est pour moi ni un m taphysicien d u ou d chu ni un pur th rapeute il est avant tout un conteur un griot au sens litt ral au sens o il nous raconte astucieusement nos histoires de famille nos fa ons de faire La figure de l aveugle la signification que Wittgenstein tente de saisir dans les Remarques sur la philosophie de la psychologie est tr s riche car
73. dans La 5 Frye Northrop and Jay Macpherson Biblical and Classical Myths Traduction libre de la citation The Creation is not primarily the beginning of nature as such but the beginning of conscious understanding p 227 14 liade Mirc a Le sacr et le profane p 155 5 Idem 16 Cartafan Serge Philosophie et spiritualit www sergecar club fr 112 gare renvoie au vide au silence au d pouillement et cette parenth se dans le temps permet Adrian de faire le point et de changer d existence Autrement dit elle devient l instance g n ratrice de sens Plus pr cis ment le kairos ce moment actuel qui permet Adrian de confronter deux ordres de r alit celle de sa vie ant rieure et celle de sa nouvelle existence Ainsi pour conna tre une transfiguration Adrian doit atteindre ce gisement de sens dissimul au c ur de son s jour Vokzal sens qui se r v le par la rupture avec le quotidien Peu peu il se rend compte que vivre dans une pure tape lui fait dire des paroles propices jouer les m taphores du d tachement G 204 La transfiguration d Adrian est progressive elle comprend un long travail de deuil Ce qui arrange les choses est le fait de vivre jusqu au bout les situations difficiles jusqu sati t ou l c urement pour les purger d finitivement de leur impact initial pour s y habituer et les incorporer dans une signification nouvelle G
74. de l homme et du monde Dans une ultime tentative de r habilitation de la parole amoureuse faite dialogue et non plus discours le romancier nous conduit travers les h sitations et t tonnements de l criture sur la grille des mots devenus clefs alors que les signes se sont faits sens Cette valeur r v latrice de la litt rature appara t d ailleurs avec clart dans les derniers romans aragoniens o les personnages devenus eux m mes cr ateurs s interrogent sur le langage de l amour et du couple au regard du fascinant pouvoir des mots de qui d pendent la chute ou le salut de l homme pris dans les mailles d un langage souvent f cond mais parfois destructeur Aragon romancier tentera donc de transposer travers ses uvres cette po tique du songe et de la r verie propre au discours amoureux d introduire dans la cr ation romanesque cette vague de r ves pleinement assum e par des personnages institu s auteurs Parce que le propre du roman est d tre une voix il n est donc pas tonnant que ce soit par lui que renaisse le dialogue avort Il est le m diateur id al celui qui pr serve la dynamique du d sir tout en la d passant dans la mesure o tout la fois metteur et r cepteur le texte jugule la peur de l autre dans le jaillissement du moi profond des origines Succ dant au personnage transfert l objet m diateur laisse donc l tre la possibilit de dire le je sans
75. donne l adresse d Yvan la narratrice p 122 D autres par contre sont al atoires comme celle d Honor de la dame chamane de Marchepi de En r alit le fil de leur apparition construit une dynamique du r cit dont la logique est l pour dessiner sur la trame des rencontres collectives une direction narrative La fonction de rencontres collectives et individuelles r pond donc au double souci de construire l arri re plan fictif d une soci t en phase avec l volution de la narratrice et d en tracer les points de rencontre vers son destin personnel Or entre les relations de la narratrice avec la collectivit et avec les individus s immisce une autre fonction celle de la sexualit 253 Sexualit Elle relie les pr c dentes fonctions de la transformation et de la rencontre par une exploration des possibilit s sexuelles de l tre humain Car de ce point de vue rien ici n est banal Des relents de prostitution plus ou moins consentie et par la suite plus ou moins d sir e la narration explore sans discontinuer les interfaces sexuelles possibles et imaginaires d un personnage soumis aux changements continuels de son corps et de ses pulsions Or dans cette profusion clectique de pratiques sexuelles l un des effets souvent affich est celui du non dit Beaucoup ont trait aux errements sexuels de l h ro ne Le directeur de la parfumerie m avait fait mettre genoux devant lui et pendant
76. e il ne serait pas plus troublant de r pondre l enfant Papa et maman ont chacun une petite graine qui se sont m lang es ce qui resterait somme toute plus proche de ce que l on sait scientifiquement sur la procr ation Cela tant ce sont les repr sentations de l homme et de la femme qui s en trouveraient modifi es et c est justement ce qui est en jeu dans cette r ponse rituelle La ritualit est au c ur de nos vies et cela m me dans la 76 contemporan it Si nous avons donc des difficult s voir les r cits mythiques comme des liaisons interm diaires tout en continuant transmettre au moins oralement certaines de nos repr sentations mythiques certains crivains recr ent mon sens une forme de mythographie du monde moderne Les exemples sont nombreux et j ai bien trop peur de mal les choisir Borges l crivain la folle rudition me semble incarner parfaitement ce renouveau de la figure du mythographe Alan Pauls dans un manuel d utilisation consacr la lecture de l crivain argentin d crit ceci Ce n est pas la V rit de la m taphysique qui passe travers l exemple du truco et l infini ne franchit pas intact le tamis de la bo te biscuits Mais dans le frottement entre l id e et son incarnation entre la haute culture et les illustrations populaires na t une chose qui s appelle fiction une chose faite de traductions manqu es d insuffisance
77. elle r v le tout la fois la virtuosit du conteur qui d crit une figure humaine qui se laisse peu dire mais veut bien parfois se montrer tout en rendant lisible l autonomie de nos formes de langage vis vis des faits 205 Que dois je donc dire qu un aveugle la signification n est pas en tat de r agir ainsi ou que simplement il ne pr tend pas avoir ressenti sur le moment la signification que donc il n a simplement pas fait usage d une image particuli re Ainsi cette fiction d velopp e par Wittgenstein nous permet de comprendre concr tement que le sens n est pas autre chose que l usage mais encore que au del de l usage il n y a pas des faits auxquels nous aurions directement acc s mais un certain usage du monde L erreur que nous sommes susceptibles de faire pourrait s exprimer nous cherchons l utilisation d un signe mais nous la cherchons comme s il s agissait d un objet qui coexiste avec le signe l une des raisons de cette erreur et nouveau que nous cherchons une chose qui correspond un substantif Ainsi par l usage de la figure fictionnelle de l aveugle la signification prend corps une autre facette de cet irr alisme wittgensteinien qui nous ram ne encore une fois la n cessit de nous borner la description de nos usages du monde C est 4l Ludwig Wittgenstein Remarques sur la philosophie de la psychologie D traduit de l allema
78. en raison de sa difformit ridiculis par les lyc ens qui le surnomment Cripure par cho la Critique de la raison pure cet individualiste d fend les id es les plus contradictoires mais se montre incapable d agir en accord avec ses principes Dans sa jeunesse Cripure a connu son heure de gloire Paris en r digeant une th se sur un penseur nomm Turnier puis une tude sur la philosophie indienne demeur e c l bre Mais rapidement son nom est tomb dans l oubli et un mariage rat a pr cipit sa ruine chou dans une petite maison de Saint Brieuc Georg Luk cs La th orie du roman p 4 4 Louis Guilloux Le Sang noir 1935 Paris Gallimard Folio 2000 Toute r f rence ult rieure se basera sur cette dition 127 vivant avec une servante dont il a eu un fils et sur laquelle il d cha ne sa rage et son amertume Cripure fait partie de cette cohorte de vaincus en bout de course qui hantent le roman des 19 et 20 si cles Apr s avoir assist contrec ur une r ception en l honneur de la femme du d put Faurel Cripure accompagne jusqu la gare le proviseur du lyc e celui ci ayant appris que son fils va tre fusill Un attroupement arr te les deux hommes Des soldats interdisent aux familles de suivre jusqu au quai les hommes appel s rejoindre le front La contestation gronde les protestations pacifistes s unissent aux accusations contre le gouvernement et les poi
79. encore d une quelconque causalit psychologique il n en demeure pas moins que les comportements que l on tiendrait pour les plus naturels sont ceux l m me qui rel vent du d terminisme le plus prononc Et les personnages aragoniens condamn s abriter toute la for t des hommes doubles dans un corps unique paraissent l prouver avec d autant plus de force qu ils sont la fois profond ment solitaires et litt ralement d multipli s selon les masques que douloureusement ils sont conscients de porter Et 7 Th tre Roman op cit p 29 8 Expression emprunt e Daniel Bougnoux Au miroir de l amour aur ol de liens Silex n 8 9 1978 p 40 Le terme d homme double appara t pour la premi re fois dans Les Beaux Quartiers 1936 Paris Gallimard Folio 1989 p 354 puis est repris dans La mise mort op cit p 99 218 par tout moi ce tremblement de sang comme mille clignotements de lumi res dans ma nuit le sentiment trange de n tre pas ma tre de soi D tre la merci de soi De cet autre en moi que j appelle soi Autre moi ou autre je quoi qu il en soit il semble tabli que les voix du discours r percutent ind finiment celles les ayant pr c d es faisant de l tre une sc ne privil gi e r sonnant des chos lointains d un pass archa que toujours enfoui et chaque fois exhum Et l espace amoureux son tour constitu
80. et une tentative d chapper son suicide Au demeurant ce sch ma n est pas celui du livre qui se termine ici mais d un autre qui pourrait commencer n importe o puisque quoi qu il arrive le signifi textuel n atteint jamais son but et ne peut donc constituer qu un langage suspendu au fil d une hypoth tique r ception d une langue en devenir pour un livre venir texte sans fin o le roman n est pas ce qu il f t mais ce qu il pourrait tre Le don de l uvre serait donc celui de la mise en pr sence par l interm diaire d une mise en mots qui d s lors n est plus mortif re mais minemment altruiste dans la mesure o elle partage son lan et ne se cl t plus sur la solitude des mots tus Si le roman est ailleurs c est pr cis ment dans cette convocation r it r e qu il se niche Convocation du signifiant lanc vers cet autre sans qui le m me ni le moi ne sont plus vers le lecteur fraternel l aimant compatissant voire le texte r fl chissant con us comme autant d incarnations de l Autre signifiant Ce visage de l Autre enfin accueillant fort de sa force conjuratoire semble tre m me de r soudre les conflits ant rieurs son apparition Il n est plus l inqui tant catalyseur des hantises mais se fait catharsis bienfaisante les brouillards du non sens se dissipent sans que la puissance vocatoire du songe partag ne se d
81. fluidisation dans la dur e Ce qui fait la nuance entre la vue et l ou e c est que l on a plus tendance identifier ce que l on voit comme objet de perception en dehors du sujet et incorporer ce que l on entend comme une partie du sujet Cela explique peut tre partiellement pourquoi la musique pr te davantage la m ditation que l art visuel d autant plus que la musique est un art de dur e et que la dur e est plus en accord avec la m moire qui est le moteur de la construction de l identit du sujet Le sentiment de sublime provoqu par la musique intervient au moment o la transcendance commence se s parer de l homme Au lieu de se voir partie int grante de la transcendance l homme transforme celle ci en une exp rience qu il vit et qu il peut incorporer en lui m me Pourtant l exp rience n est pas immanente au sujet car dans l exp rience il y a toujours le monde 219 l espace et la m moire le temps L exp rience est quelque chose que l homme doit acqu rir avant et m moriser apr s elle n est pas immanente pour lui Ceci dit la dualit sujet objet est essentielle pour faire une quelconque exp rience Ainsi le divin n est plus consubstantiel l humain il devient une exp rience acqu rir Au lieu de se maintenir intact l homme recherche les exp riences afin de se compl ter par l objet C est le moment o l pop e fait place au roman l homme t
82. fortiori N anmoins clients et clientes se succ dent la parfumerie pour jouir des services sexuels de la narratrice qui s acquitte bon gr mal gr de ses t ches suivant les tats plus ou moins avanc s de sa m tamorphose Tous sont l pour en profiter La fonction de rencontres collectives est de fait pr sente dans le r cit pour le contextualiser Le d cor ainsi cr offre en arri re plan un tissu social pour le moins particulier et que le lecteur ne met pas longtemps deviner fictionnel Dans cet univers les rapports sociaux que les personnages du roman entretiennent entre eux sont d voy s et il est rapidement vident que la fiction ne rejoint pas la r alit Elle la copie l amplifie s en loigne Or si la fonction de rencontres collectives correspond la mise en place d un d cor social fictif qu en est il pour les rencontres individuelles Il n est plus question ici de peindre un d cor de relations sociales mais de faire avancer les intrigues du roman N anmoins la difficult de situer ces progr s se rencontre galement dans la narration elle m me L un des effets stylistiques qui y contribue est l asynd te absence de liaison entre syntagmes et propositions En effet elle offre une tr s grande libert narrative l crivain Le marabout m a donn sa carte il m a dit de revenir le voir si a continuait Nous avons sympathis Le marabout riait beaucoup parce que la diff rence
83. has been noted by the most respected authorities it is beautiful The purest most harmonious thing there is Sexual intercourse is nothing compared to it p 229 Pour se maintenir au pouvoir Nicolas doit radiquer toute source de d plaisir pouvant causer sa perte Si l on en croit la th se que d veloppe Freud dans son essai Au del du principe de plaisir 1920 Victor serait per u comme privateur potentiel s il venait renverser le gouvernement de Nicolas Frayeur peur et angoisse sont des sensations d sagr ables qui proviennent de la r alit du danger auquel Nicolas devrait ventuellement faire face 2 Pinter Harold Art v rit et politique Op cit 211 Ce qui expliquerait mais en aucun cas ne l gitimerait son acte lorsqu il ordonne l ex cution de Nicky le fils de Victor g de sept ans car il verrait en lui un vengeur potentiel La pr vention et l autod fense seraient donc l origine de tous les m canismes victimaires dont les individus et les Etats se rendraient coupables Mais jusqu o peut on accepter qu un pr tendu patriotisme puisse servir de couverture pour l gitimer la violence gratuite Tu aimeras ton prochain comme toi m me Pr cepte chim rique qui perd toute signification face toutes les horreurs dont l homme se fait volontiers l auteur viol collectif exploitation collective torture collective sacrifice collectif ex cution coll
84. identit Je songe ce rendez vous et j ai l impression de me diluer de ne plus m appartenir Habituellement je pique une crise de qui suis je Pendant des ann es je me suis dit Ma m re va t elle me poursuivre ainsi tout le temps Je sentais s imprimer dans mon cou le chanvre tress la corde se resserrait une image m avalait et coupait ma respiration quatorze ans j avais d couvert ma m re pendue dans le hangar derri re la maison Puis toujours 2 En italique dans le texte 186 ma m re se dressait devant moi le visage violac le cou rompu les jambes ballantes FSL 13 Ce passage qui se trouve au d but du roman annonce l importance du th me de la non s paration corporelle de la m re et de la fille que nous avons d j explor dans L Ingratitude Lorsque C line se rem more le jour o elle a d couvert sa m re pendue dans le hangar elle revit le moment comme s il s agissait de son propre suicide Il est manifeste que ce souvenir la hante et influence directement la construction de sa propre identit Ainsi dans ce roman le th me de la relation entre m re et fille pr sente non seulement le r le de l h r dit et de la m moire mais aussi le lien motionnel et corporel entre m re et fille Depuis son adolescence C line a l impression d tre la prisonni re d une corde illusoire elle frottai t s on cou FSL 14 Tout comme les s urs da
85. l aim e malgr tout I 101 Il est int ressant de noter que Ying Chen affirme que la relation m re fille ou parent enfant est une relation d amour fondamentale Bordeleau 1998 10 Selon Bachelard l eau subsiste en tant que source cruciale de l intimit et de la mort Il crit que la peine de l eau est infinie 1964 9 Le fait que la fille associe la m re l eau indique qu elle d sire plus d intimit entre elles Inversement la m taphore qui compare la rivi re qui entra ne Yan Zi vers maman comme Seigneur Nilou peut tre conduisait ses lus vers son royaume implique que leur relation est aussi fatale que celle qu ont les lus avec Seigneur Nilou le roi du royaume des morts Dans ce roman les motions d amour et de haine se heurtent l une l autre infusant le texte d une violence pr te clater Nous pouvons conclure que cette dichotomie explosive d amour et de haine qui d finit la relation de la m re et de la fille est la cause principale de la mort de Yan Zi L Orphelin d boussol dans Le Fou de Bosch Dans Le Fou de Bosch le myst re autour de son histoire personnelle hante Steiner et influence ses croyances fondamentales ainsi que ses actions les plus significatives Est ce que mes parents naturels ont jou un r le quelconque dans la transmission de cette affinit et avaient ils conscience de cela C est aga ant tout de m me de leur devoir quelqu
86. la de pour tre ce point ensorcelante pr sent que les temps r volus me reviennent U 30 187 d amour et de solidarit que la m re inspire elle sa s ur et son fr re ils avaient r cit le chapelet en vrais philistins ignorant qui avait t Edm e Ma s ur Denise mon fr re Carol et moi avions refus de les imiter nous avions cri Vive la lutte sans comprendre nous aussi de quoi il tait question FSL 14 Ce souvenir de l indiff rence des gens de la communaut face au d c s de sa m re et de leur incapacit de comprendre sa folie affecte C line profond ment M me tr s jeune elle savait qu il lui fallait an antir cette image injuste de sa m re Il n est pas surprenant donc que lorsqu elle apprend qu elle mourra elle m me bient t d un cancer foudroyant FSL 16 elle d cide de quitter Montr al pour retourner et mourir au village et dans la maison o sa m re s est suicid e Les membres de la communaut sont choqu s par son retour qu ils consid rent comme un acte provocateur C est bien le cas C line semble croire que sa propre mort est li e la mort de sa m re et elle vise se d faire de cette dimension de ch timent qui fait partie int grante de sa vision du pass C est dans cet environnement douloureux que C line r dige un m moire consacr enti rement l histoire de sa m re Au d but le m moire peint un
87. langage le v ritable sujet du texte un positionnement philosophique de la part de Mallarm Je m attarderai pour illustrer cette id e sur le fameux ptyx du m me Sonnet en yx Nul mot sans doute du vocabulaire mallarm en n aura engendr autant d interpr tations diff rentes voire contradictoires au long du XX si cle Et en effet comment interpr ter ce terme 17 On retrouve ici au risque de se r p ter l id e fondamentale de po me ferm sur lui m me 18 On rappelle le vers initial de la seconde version du texte Ses purs ongles tr s haut d diant leur onyx 41 myst rieux inexistant en fran ais On conna t bien s r la lettre Lef bure dans celle ci Mallarm assure qu il pr f rerait que ce mot n existe dans aucune langue afin de lui donner le charme de le cr er par la magie de la rime Le ptyx serait il donc un mot purement musical sans signification aucune Dans la premi re version du texte intitul e Sonnet all gorique de lui m me le ptyx est un insolite vaisseau dans la version d finitive celle des Po sies il devient le d j entrevu aboli bibelot Certains pr f reront recourir une explication tymologique Ainsi Paul B nichou qui rappelle qu une forme grecque du mot existe qui signifie pli ou repli et par extension toutes sortes d objets creux ou profonds Plus r ce
88. le d roulement de l intrigue D une certaine fa on la fonction jJouerait dans l intrigue un r le d articulation entre deux situations narratives Ce n est cependant pas ce point de vue que nous adopterons ici Celui de Claude Levy Strauss une fois encore semble en effet correspondre de plus pr s notre projet Parmi les trente et une fonctions qu il Propp distingue plusieurs apparaissent r ductibles c est dire assimilable une m me fonction r apparaissant des moments diff rents du r cit mais apr s avoir subi une ou plusieurs transformations D s lors cette remarque que nous rigerons en principe m thodologique pourrait elle s appliquer d autres types de r cits o les situations narratives seraient particuli rement difficiles distinguer Sous certains aspects Truismes de Marie Darrieussecq r actualise le fond commun de nos contes les plus connus ne serait ce que par la pr sence du loup et du cochon ici truie Mais s il para t difficile partir de ces seuls indices de cat goriser cette uvre il n en est pas moins possible de remarquer la volont sans doute ironique de l auteur d y faire r f rence En premi re lecture le r cit offre une fresque narrative tout fait fascinante Elle semble avoir t crite sans v ritable structure et sous l impulsion d un lan incontr lable En deuxi me lecture Levi Strauss Claude Anthropolog
89. le supprime La grande songerie Parce que le v cu de l amour est indissociable de la trame magico romanesque sur laquelle il se d ploie le sentiment refl t au prisme de l image rev t bien souvent une v ritable valeur symptomatique En effet la fois tentative d union et processus de singularisation il individualise la parole en m me temps qu il universalise l motion d vidant les fils d un imaginaire particulier puisque duel Parce que la passion ne s exprime que m taphoriquement et que l ineffable absolu du temps ne se dit pas mais se peint l uvre pourrait se dresser comme ce qui bien au del de l amour fait clore la v rit Le discours amoureux est certes essentiellement solitaire mais le sujet de l amour ne se construit pourtant que dans l change serait t 1l fictif avec l objet de ses d sirs Je cherchais un interlocuteur dira Romain Rapha l d t il me fuir m viter A lui s adressaient mes divagations je me nourrissais des siennes L autre de qui l amoureux d pend intimement est donc la fois l objet premier de la qu te identitaire en m me temps que son issue funeste parce qu l Th tre Roman op cit p 385 231 annihilante L oscillation intime de l homme r el et de son double symbolique semble ainsi pouvoir englober du m me coup la double instance narrative et le couple amoureux dans la mesure o l un comme l
90. les amants aragoniens pallient la d faillance fonci re de la communication avort e par le foisonnement de ces objets transitionnels que sont les uvres d art Le personnage artiste parce qu il est la fois auteur et spectateur de sa propre existence se lance corps perdu dans le temps retrouv d une aventure passionnelle des plus obs dantes celle par qui sa vision se d forme mesure que son tre se d double Et l uvre dans sa double dimension fantasmatique transmet dans un m me lan l archa sme pulsionnel inconsciemment li au locus originel et le m canisme axiologique de l art comme lieu du r el singuli rement d mystifi car apr s tout le roman c est le moment interm diaire o le mot vid de son premier sens est ouvert au sens nouveau mais pas encore occup par lui ce moment est le r gne de la disponibilit tout peut encore se faire comme ceci ou comme cela Il n est d ailleurs pas d nonciation qui ne soit une co nonciation ou du moins une co affirmation dans la mesure o il n y a pas un h ros qui n aie son double effectif ou symbolique pas une parole la sienne ou celle de l autre qui ne soit aussi l amorce d un dialogue r pondant la s paration S paration de l amant et de l aim e pour qui l change ne suffit plus mais galement rupture ancestrale du ogos et du muthos dont les discours latents ne sont jamais adress s qu un hypoth tique
91. m taphore d Ad la de comme sorci re U 29 La figure matriarcale d un c t et de l autre est condamn e pour la souffrance de ses descendants Selon Aziza la sorci re est l antith se de l image id alis e de la femme elle est redoutable Aziza 1978b 169 Il est probable que l image n gative que les enfants ont de la figure matriarcale d coule du fait que selon eux le d part de la m re a d clench toute la souffrance familiale Il est clair que dans Unless la pique h r ditaire ainsi que les sentiments d abandon prouv s par les enfants d Ad la de ont eu des effets d sastreux voire fatals dans le cas du fils amoch U 30 L exclusion du fils fou dans Unless Bien qu il soit probable que Chut ait h rit dans une certaine mesure sa folie de sa m re et qu il ait s rement souffert cause du 172 d part de celle ci il serait r ducteur de la d nommer comme le seul personnage coupable d avoir d u Chut Nous avons d j not dans le premier chapitre que Chut a t tiquet comme un malade mental par les psychiatres cause de cette tiquette il est consid r comme tant autre non seulement par la soci t mais aussi par sa propre famille La folie de Chut constitue pour les autres membres de la famille le point aberrant qu il ne faut pas atteindre Comme son pr nom l indique ce niveau de d sarroi pourrait pr cipiter u
92. me permettait de mettre un peu d ordre th orique dans ma fa on d tre AL 176 109 L Apocalypse pour Boris est dans le pourrissement du quotidien Dans L amour du lointain Kokis crit que tout arr t de parcours implique la destruction de la libert et cela implique la perte de la spiritualit et l envasement dans la mort en vie AL 244 Or on trouve dans le commentaire pr c dent de L Apocalypse une perspective qui s int resse davantage la coexistence du temps pr sent et de l re nouvelle D s lors L Apocalypse n a plus le r le de symboliser les tapes pr paratoires l av nement final mais plut t de provoquer le r veil spirituel dans le pr sent Le temps est proche Ap 1 3 Curieusement la fin du roman la lettre d Olga pr cise que le recueil de Boris a une r ception favorable en Europe qu il est compar Pasternak pour mettre en garde le lecteur na f E 436 Se peut il que cette comparaison soit un clin d il au recueil de Pasternak intitul La seconde naissance Kokis n est pas un ti de crit Francine Bordeleau en qualifiant la prose de Kokis Mais peut tre fait elle allusion ici l urgent d sir de transfiguration et la force spirituelle des personnages de Sergio Kokis Car il faut comprendre que pour Kokis ainsi que pour ses personnages il est bien ici le Jugement dernier du chapitre XX de L Apocalypse et so
93. monde pour reprendre l expression d un journaliste de l poque fut attir e par l aviation d s l adolescence et fit son bapt me de Pair sur un Moth Gipsy d s sa majorit Sa notori t elle la doit particuli rement un premier vol audacieux largement couvert par la presse fran aise qui devait rallier Paris Saigon Les r dactions ayant propos aux lecteurs de suivre au jour le jour les aventures de l h ro que aviatrice Desanti 227 lev rent en d finitive Le 30 novembre 1934 lors d un exercice d entra nement Guyancourt dans les Yvelines son Caudron Rafale s crasa l or e du bois On peut citer par exemple celles d Antoine Redier H l ne Boucher jeune fille fran aise 1935 de Jacques Mortane H l ne Boucher aviatrice 1936 et de Ren Chambe H l ne Boucher pilote de France 1937 Elle excellait dans les acrobaties a riennes mais l exploit de sa vie fut de traverser la Cordill re des Andes le 1 avril 1921 en 4h 17 Ancienne m canicienne dans une fabrique de chaussure s approprie les 28 et 29 juillet 1929 le record du monde de dur e f minin avec un vol de 26h48 6 L cho des Sports 4 d cembre 1934 H l ne Boucher au rang de star malgr son chec Elle s adonna par la suite de multiples disciplines telles que le rallye la voltige a rienne ou les courses de vitesse laissant ainsi derri re elle un palmar s impressionn
94. n est combl Du d sir au manque de la pulsion au fantasme de l aspiration l app tence il n y a d ailleurs qu un pas que seule une rh torique interne permet de franchir Incapables de se r aliser pleinement dans le cadre de la relation v cue les aspirations amoureuses se retranchent automatiquement dans l espace illusoire d un imaginaire transpos par une langue m taphorique A l indigence sensuelle r pondra donc l image de la faim la foule des conqu tes ph m res celle du d sert des sentiments comme l treinte du vide se superposera la possibilit d un continent mordre Autant d images magnifi es d un manque fondamental qui semble tre l essence m me de l amour puisque du point de vue des motions l opulence autant que la 38 C Dumoulie Cet obscur objet du d sir essai sur les amours fantastiques L Harmattan Paris 1995 p 14 Blanche ou l oubli op cit p 395 Aur lien op cit p 697 4l Blanche ou l oubli op cit p 501 2 Les aventures de T l maque op cit p 136 228 d ficience ouvrent sur une m me incompl tude Et le r investissement de la flamme en tant que symbole de la passion exacerb e traduirait la fois l mulation et la destruction cons cutives l acte d amour Une flamme double qui serait donc celle d un d sir ardent qui se consume de ne pas s accomplir et dont le manque f d rateur enveloppe de sa
95. n est pas le commencement de la Nature Harel Simon Le voleur de parcours p 160 Chauvin Dani le Apocalypse Dictionnaire des mythes litt raires p 119 Idem ll Frye Northrop and Jay Macpherson Biblical and Classical Myths The book of Revelation is a panorama of certain things in human experience taking on different forms p 225 Comme dans les chapitres pr c dents nous paraphrasons les citations pertinentes notre tude C est dans le but d all ger le texte et de faciliter la lecture 12 Perspectives particuli res de l Apocalypse johannique Introduction L Apocalypse La Bible p 1793 111 proprement dire mais le d but de la connaissance consciente Cette conscience n est elle pas avant tout celle de la mort Kokis reconna t que ce th me est omnipr sent dans ses livres parce que c est uniquement dans la conscience de la mort qu on peut comprendre la vie et le combat des hommes AL 306 L Apocalypse malgr son aspect eschatologique repr sente ainsi une fin paradoxalement ouverte elle permet le renouveau existentiel tant recherch par les personnages de Kokis La structure d une telle qu te spirituelle se retrouve dans La gare et dans Le fou de Bosch Les h ros quittent tous deux leur espace familier pour r pondre un appel int rieur Ils prouvent la mort symbolique et s veillent un tat nouveau par la transfiguration Mir
96. ne qui est en repr sentation nous y rep rons trois ordres d espace temps et nous les nommons respectivement espace temps de la m moire espace temps du r ve et espace temps de l tre nous expliquerons le sens de ces d nominations plus loin Ces trois espace temps sont encha n s entre eux sous forme circulaire il n y pas de commencement ni de fin mais ils sont dispos s de fa on rendre la valeur propre chacun L espace temps de la m moire occupe tout l arri re plan celui du r ve au second plan droite celui de l tre est au premier 10 Monory ibid p 182 1l L inscription n est pas compl te dans le tableau 268 plan en plein milieu Les trois espaces sont raccord s par un objet ing nieusement dispos de fa on faire correspondre les diff rents espaces la porte qui ouvre l espace du r ve l espace de la m moire une sorte de commode basse encha ne l espace du r ve celui de l tre La fluidit de l encha nement des espaces est d autant plus sensible que tout le tableau est plong dans un jaune clair lumineux On peut toujours trouver tant bien que mal un r cit dans l encha nement de ces images l arri re plan indique le temps et le lieu o se d roule l histoire le second plan repr sente une sc ne de vol le premier plan met en avant la sc ne de retrouvailles N anmoins le r cit ainsi d duit partir du montage n est pas aussi coh rent qu
97. pop e sans gloire Le drame d une g n ration cras e par ces bourgeois qui occupent toute la place La Presse 197 http www library newscan com Biblio Frames FrameMain asp Oore Ir ne 2003 tre ou ne pas tre le suicide dans L Ingratitude de Ying Chen dans Unless d H l ne Monette et dans L le de la merci d lise Turcotte Dalhousie French Studies 64 46 57 2002 Unless La construction d une identit dans un monde post no future Identity Community Nation Essays on Canadian Writing ds Danielle Shaub et Christl Verduyn Jerusalem The Hebrew University Magnes Press 170 182 Saint Martin Lori Summer 2001b 60 83 Infanticide Suicide Matricide and Mother Daughter Love Suzanne Jacob s L Ob issance and Ying Chen s L Ingratitude Canadian Literature 169 1994 La Maison du remous de Nicole Houde ou le roman de la terre au f minin Qu bec Studies 17 187 198 2001 The Other Family Romance Daughters and Fathers in Qu bec Women s Fiction of the Nineties Doing Gender Franco Canadian Women Writers of the 1990s Madison Fairleigh Dickinson a 169 185 Ouvrages th oriques et g n raux Bachelard Gaston L Eau et les r ves France Jos Corti 1942 Baechler Jean Les Suicides Paris Calmann L vy 1975 Durkheim mile Le Suicide tude de sociologie Paris Presses universitaires de France 1960 Felman Shoshana La F
98. profond de l tre dans ses rapports avec l autre le monde ext rieur et lui m me Le patient traumatis ne se reconna t plus il n est plus comme les autres il est comme ali n fig dans une temporalit et dans P Janet Psychological Healing 1919 vol 1 trad E Paul et C Paul New York MacMillan 1925 p 661 63 10 M Merleau Ponty Sens et non sens Paris Nagel 1947 p 124 125 152 la difficult voire l impossibilit de donner un sens ce qui lui ll arrive Une cons quence majeure du bouleversement auquel fait r f rence Chidiac dont l effet majeur serait la paralysie spatio temporelle ou l impossibilit de donner un sens son existence se manifeste concr tement par l intrusion r p titive et involontaire de souvenirs A la fin du 19 si cle Freud et Breuer expriment cette id e de r p tition involontaire dans leur th orie de la psychanalyse du trauma et surtout de l hyst rie o ils s int ressent la gestation des souvenirs involontaires dans le cadre des troubles psychiques Freud called the repetition compulsion those re enactments in the present of psychic events that have not yet been safely consigned to the past that retain the visual and affective intensity of lived rather than remembered experience and that disrupt the unruffled present with flashbacks and terrifying nightmares intrusive fragments of an unknown past that exceeds the selfs rel
99. quatre vingt jours Ch re Tita na c est gr ce au Tour du monde que je t ai vraiment connue Donc le Tour du monde tait merveilleux Je t aime et je t embrasse du fond du c ur Heimermann 177 22 plut t qu produire des r cits haletants Mais ensuite il examine la construction de l intrigue et de ses personnages car les monstres qui peuplent l le d Atkinson ressemblants trangement ceux du docteur Moreau sortent tout droit de l imaginaire de son auteur et traduisent selon lui ses angoisses c est une sorte de poubelle g ante et aride un enfer sans feu o les mauvaises pens es de chacun de nous trouvent un refuge et une caricature d organisation V L univers romanesque de Tita na refl te une volont de se conna tre travers les d ch ances relatives du corps et de l me et en m me temps une harmonieuse connaissance de l amour o chacun quelle que soit son origine peut d fendre sa chance V Jeune ind cise et fougueuse Tita na semble se poser beaucoup de questions sur le sens de la vie et cherche encore au c ur de ces Ann es folles trouver sa place En mettant en relief le caract re sportif bourlingueur et s ducteur de Tita na Mac Orlan s inscrit au m me titre que Ren Trintzius ou Robert Dieudonn dans la lign e des portraitistes sympathiques leurs mod les Il d crit l image d une aventureuse bousculant les convention
100. que je m acquittais de ma besogne je songeais ces produits de beaut p 15 d autres aux lieux visit s On peut bien gagner sa vie l Aqualand p 13 Si comme le dit Umberto Eco le texte est une machine paresseuse qui exige du lecteur un travail coop ratif acharn pour remplir les espaces de non dit ou de d j dit rest s en blanc les non dits font appel au lecteur qui les identifie mentalement De cette phase d identification suit celle de la reconstitution de ce qui n est pas dit le lecteur faisant alors partie int grante du processus narratif de l histoire Or la subtilit du proc d met contribution la part active voire imaginative du lecteur lequel est explicitement invoqu par la narratrice d s les premi res pages Je supplie le lecteur le lecteur ch meur en particulier de me pardonner ces ind centes paroles p 12 L humour cynique qui fait sourire et grincer la fois est l un des effets les plus vidents de cet exercice de style Toutefois c est en fin de livre au moment o la narratrice rencontre Yvan que le proc d du non dit est clairement r activ Il ne fonctionne plus cependant car le lecteur pr text n est plus identifiable avec le lecteur invoqu aux premi res pages Bon apr s vous connaissez la suite p 114 Bien entendu la suite nous ne la connaissons pas Et le jeu subtil qui a nous fait participer la narration de l h
101. qui constituent notre r alit notre 32 Fran ois Chobeaux les nomades du vide La d couverte Poche Paris 2004 133 pages pages 59 60 3 Mirc a Eliade Aspects du mythe op cit page 181 91 forme de vie et qui passe par la fiction narrative et ou visuelle fonctionne de la m me mani re Il s agit bien toujours de descriptions de circonstances lesquelles nous permettent de comprendre comment agir et ne sont pas absolument morales En effet comme nous l avons vu pr c demment les pratiques initi es ne sont pas n cessairement justifi es rationnellement elles sont aussi l cho de nos croyances et de nos peurs ces derni res ayant bien souvent pour cons quence des attitudes de m fiance vis vis de la diff rence voire de la haine et des replis identitaires individuels ou sociaux que l on conna t bien dans nos soci t s contemporaines Pour reprendre un des mes exemples dans le film de Kubrick Orange m canique le jeune h ros sortant de son traitement cin matographique et ayant perdu toute capacit de violence est presque tout autant incapable de s int grer socialement il est sans cesse malmen ses victimes se vengent et ainsi donnent voir en chaque homme la propension tre un bourreau Orange m canique par le truchement fictif nous am ne un constat peu glorieux notre usage du monde et la possibilit de notre vivre ensemble tiennent galement une certaine proportion de violence e
102. rarement En effet bien en de d une fallacieuse sinc rit semblent se nouer les liens d un curieux atavisme la fois individuel et communautaire qui de fopoi amoureux inconsciemment int rioris s en mim tisme culturel tend envisager les comportements amoureux sous l angle de la pr d termination bien plus que de la spontan it L amour y tant d embl e positionn comme le creuset mouvant des illusions voil es de l individu comme avatar de sa propre identit au sentiment comme reflet biais d arch types originels tout porte difier l espace des passions en v ritable sc ne au centre de laquelle se jouent ind finiment les m tamorphoses du d sir et de l motion Aussi c est avant tout parce que l amour aussi est un th tre qu il s enlise dans les affres du para tre et de la s duction Et celle ci devenant au fil du temps parade et rituel le sentiment peu peu n est plus appr hend qu en tant que spectacle hont t moin de l hypocrisie g n ralis e Aussi de repr sentations en exutoires les stratag mes s ench ssent au fil des mots faisant des chim res du dire les piliers du faire Le jeu d s lors qu il s exprime prend corps et se fige p trifiant le dialogue dans les strates l nifiantes d un monologue st rile parce qu gotiste Au miroir de l amour aur ol de liens Qu il s agisse de st r otypes culturels esth tiques ou
103. rent on gagne de d tourner l oisif charm que rien ne l y concerne premi re vue crit Mallarm dans un article intitul Le Myst re dans les Lettres Autrement dit le texte mallarm en qui r serve sa signification son tr sor ceux qui auront su passer les preuves cr e pour le reste de la foule un autre sens indiff rent une sorte de fausse piste qui permet de se d barrasser des lecteurs non dignes On retrouve ici bien entendu une id e infiniment proche de celle qui r gne dans une construction labyrinthique Mallarm invente proprement parler des impasses l int rieur de son texte Il appartiendra donc au lecteur et lui seul de ne pas se laisser leurrer de poursuivre son garement de r soudre nigmes et preuves pour arriver enfin l aboutissement de sa qu te le tr sor du texte son v ritable sens Un processus purificateur Il y a donc dans la po tique de Mallarm comme dans un labyrinthe l id e de qu te associ e aux id es d garement de pi tinement de fausses pistes de retours en arri re etc Le lecteur devra suivre un parcours traverser les preuves du texte pour arriver ses fins Ce processus rappelle celui des labyrinthes que l on voit dans certaines glises le p nitent doit y suivre un chemin purificateur qui le m nera au centre du labyrinthe o il se verra lib r de ses p ch s On retrouve ce sch
104. sa condition physique de nain C est pourquoi selon Gandalf il faut apprendre se d guiser comme les personnages qu on d sire tre S 276 De cette flexibilit existentielle proc de une transformation qui permet l artiste de participer la re cr ation de soi Cette vision de la vie co ncide parfaitement avec l enseignement du Zarathoustra de Nietzsche qui invite l homme se recr er Cr er est le grand rachat de la souffrance et ce qui rend la vie l g re Mais pour tre cr ateur il est besoin de peine et de force m tamorphose Oui certes en votre vie il faut que maintes fois am rement mouriez vous les cr ateurs Soyez ainsi porte parole et justificateurs de tout ce qui appartient au p rissable C est donc consciemment que Wilhelm Lutz choisit d incarner Zarathoustra sur sc ne puisqu travers lui il sollicite une nouvelle volont de puissance chez l homme Sa m tamorphose en Gandalf est garante du message de Zarathoustra celui de lib rer le 5 Nietzsche Friedrich Aux les Fortun es Ainsi parlait Zarathoustra p 119 118 surhomme en soi et d en faire sa meilleure cr ation N est ce pas d ailleurs ce que chaque artiste cherche atteindre Dans L amour du lointain Kokis explique que la cr ation mobilise parfois des secteurs myst rieux de notre tre au monde AL 47 C est bien cela que font appel les artistes du cirque Alberti
105. se meurt de ce qu il a tout jamais manqu de dire alors que le r cit de l imaginaire rena t de cette m me mise mort Aussi les mots du couple ayant sombr dans les confins de l aphasie l amoureux contraint enlacer une chim re n a plus d autre moyen de converser que ceux offerts par la lettre et le roman o mentir permet d atteindre la v rit 17 La mise mort op cit p 335 18 Ibid pp 168 et 171 1 Aur lien op cit p 687 2 La mise mort op cit p 147 222 Les tropes de la sublimation Art de la fugue ou loge de la feinte le discours aragonien parce qu il conjugue sans cesse l amour sur le mode du r ve solitaire ou partag t moigne d une attirance profonde pour les myst res d un langage aux multiples facettes Ainsi les mots s ils garent l tre peuvent galement participer d une reconqu te essentielle celle par qui le r el se d voile de se d rober dans la mesure o inond de la toute puissance du songe l amoureux atteint l infinie richesse du sens De vie r v e en songes incarn s les limites du r el vacillent alors de s ench sser jusqu l vanescence Aussi prise au c ur d une dialectique onirique la r alit se d multiplie l envi recouvrant tout aussi bien la sc ne externe du monde que la sph re interne des sentiments Les m mes termes d finissent d ailleurs sous la plume de l auteur amour
106. son testament Brancati avait en effet sugg r On peut aussi publier mon dernier roman Paolo il caldo en pr venant le lecteur qu il manque encore deux chapitres dans lesquels on aurait racont que la femme de Paolo ne revenait plus et que celui ci dans des acc s r p t s de jalousie s embrouillait de plus en plus lui m me jusqu sentir l aile de la stupidit lui effleurer le cerveau Emorroidi sempre meglio farsi operare Vitaliano Brancati et Leo Longanesi Piccolo dizionario borghese in Vitaliano Brancati Lettere al direttore Milano Bompiani I Grandi Tascabili 1995 p 112 Madre Scegli fra me e tua madre Id p 114 3 Siciliani Presi uno a uno sono simpatici Id p 117 Louis Guilloux Le Sang noir p 242 5 Id p 26 6 Si pu anche pubblicare il mio ultimo romanzo Paolo il Caldo avvertendo il lettore che mancano ancora due capitoli nei quali si sarebbe raccontato che la moglie non tornava pi da Paolo ed egli in successivi accessi di fantastica 134 Du reste d s son roman Singuli re aventure de voyage qui marque sa rupture avec le r gime fasciste les personnages n s sous la plume de Brancati seront presque tous des d s uvr s se laissant porter par le cours des v nements et risquant tout instant de sombrer dans l idiotie Dynamiques de fuite et de recroquevillement Si la m diocrit et le ratage sont les tra
107. sur mon prochain Que me veut mon prochain Mes faits et gestes sont ils la reproduction mim tique d un geste ancestralement meurtrier Autant de questions auxquelles nous allons tenter de r pondre tout au long de notre expos Objecteur de conscience comme il se d signe lui m me Harold Pinter d clare tenir sa maxime de cette phrase que prononce Petey au moment o Stan est sur le point d tre emmen par Goldberg et McCann Stan don t let them tell you what to do Il confie Mel Gussow qu il a suivi ce pr cepte toute sa fichue vie Aujourd hui plus que jamais Et aujourd hui plus que jamais Pinter montre un int r t particulier pour la cause des Droits de l Homme Son adh sion au Pen Club et Amnesty International marque un tournant d cisif dans sa vie et son th tre C est au courant des ann es 1980 que la cr ation artistique de Pinter passe d un th tre nigmatique un th tre politique ouvertement engag Ainsi l engagement politique du th tre de Pinter trouve son ultime expression dans One for the Road ainsi que dans Mountain Language 1988 Ces deux pi ces sont une s rie d images chocs br ves et brutales nous dit Pinter Cependant ce dont nous sommes r solument convaincues c est que son th tre a toujours t cette fresque gigantesque qui Pinter Harold Art v rit et politique in Le Monde d cembre 2005 Car en 1948 r
108. t de consommation nonc es par Baudrillard et LeBesco indiquent l origine culturelle de l hyperconscience de taille qui est pr sent e dans La danse juive Dans La danse juive la m re de la narratrice est une citoyenne id ale de la soci t de consommation Mince elle est obs d e par la propret et consomme les magazines et la mode la place de la nourriture La narratrice dit que sa m re a une silhouette lanc e elle ne deviendrait jamais grosse Tremblay 14 La m re a une pr disposition g n tique la minceur mais elle garde sa figure aussi par mesure d une faible consommation de nourriture Le r le de la m re comme symbole du refus social de la nourriture est pr figur d s sa pr sentation la narratrice indique que sa m re remplace ses dents en grima ant ce qui signifie que le moyen de la consommation de la nourriture les dents ont m me t d truites par la soci t de consommation 11 La narratrice remarque que le frigo de sa m re est vide seulement du coke et des viandes froides Le cong lateur est plein de plats cuisin s all g s et congel s 83 La nourriture que mange sa m re n est sujet en ce qu il a rapport au rejet de la soci t de consommation de la narratrice cependant une analyse plus pouss e de ce th me serait profitable Dans Revolting Bodies LeBesco pr sente aussi la n cessit pour les personnes ob ses de prendre action contre les pr
109. tecte l erreur dans le temps d h sitation et de doute Pour autant la vie en soci t est r gie par l id e qu il ne s agit pas seulement de se r f rer une r gle et de la suivre il s agit plus profond ment de s y conformer D s lors comme l explique avec une grande clart Pierre Livet il ne s agit plus de r gles mais bien de normes Or les normes sociales n exigent pas qu on les suive Elles sont satisfaites d s lors que l on s y conforme Dans la mesure o les normes sont li es des sanctions nous reviendrons sur ce point ces sanctions ne peuvent se d clencher simplement parce que nous soup onnerions quelqu un de ne pas vouloir suivre la norme mais de simplement s y conformer Et les normes limitent donc notre capacit critiquer les conduites de nos semblables parce que nous les soup onnons de ne pas avoir les m mes intentions que nous Jacques Bouveresse La force de la r gle Wittgenstein et l invention de la n cessit Collection critique Les ditions de Minuit Paris 1987 175 pages page 38 10 Pierre Livet Les normes Vocation philosophe Armand Colin Paris 2006 168 pages page 30 72 Les normes sont donc plus directement li es la d tection de leurs transgressions De ce fait et cela pour revenir enfin notre conception de la r alit si nous consid rons les r gles qui r gissent notre rapport au grand fourbi non plus comme des r gles dont l
110. tirer de l elle me l a promis Pas de tentative de suicide par exemple O K d abord j en tais rendue l mais grouille U 177 L ouvrage On Death and Dying d Elisabeth K bler Ross porte sur la psychologie de la mort Elle propose que le deuil constitue un processus qui comprend cinq tapes la n gation la col re le marchandage la d pression et l acceptation Nous relevons la repr sentation de chacune de ces tapes un degr plus ou moins important dans Unless K bler Ross souligne que l espoir sous tend toutes les tapes K bler Ross 122 l espoir semble sous tendre galement le texte de Monette m me lorsque les s urs sont en deuil 193 La r unification des morceaux implique que l clatement familial U 17 s ach ve Nous remarquons d ailleurs que c est l affection qui les lib re Il est clair que l amour de soi et lamour pour l autre repr sentent la lib ration de la d pression et du d sespoir Selon Oore face l clatement et la fragmentation face la douleur et la souffrance Unless et Red se placent du c t de la vie 2002 181 En effet le suicide repr sente du moins pour Unless et pour Red une solution d finitive un probl me temporaire On n a qu attendre grandir et apprendre pour arr ter de se tuer U 185 Le naufrage rupture du silence dans l le de la Merci Lorsqu H l ne apprend la mo
111. tous les risques de mourir en chemin deviennent n gligeables devant le danger de d saffection de sa propre 113 personne G 197 Cette libert qui s ouvre devant lui signifie qu il accepte son tat nouveau Vokzal lui fait prendre conscience que la mort agit sur notre existence comme le d clic pour l action G 199 Mais encore la transfiguration d Adrian est elle compl te Le vieux dicton cit par le chef de gare sugg re pourtant qu il est impossible de faire fi de notre exp rience de vie Ne me devancez pas je ne saurais pas vous suivre Ne me suivez pas je ne saurai pas vous guider Marchons plut t c te c te et nous arriverons peut tre quelque part G 209 Chose certaine ce dicton pr figure la transfiguration de Lukas Steiner dans Le fou de Bosch Une transfiguration dans laquelle Lukas et Zvat cheminent c te c te jusqu la mort inexorable au bout du chemin Zvat tait d cid porter fi rement Lukas et non pas avec honte mais il ne lui laisserait d aucune fa on le droit de lui dicter sa conduite FB 164 Mais d abord penchons nous sur la hantise des catastrophes de l humanit qui habite Lukas Steiner Toutes ces visions de morts et de Jugement dernier sont des visions int rieures Elles sont la projection d une obsession tr s personnelle celle de l extinction d un feu tout int rieur Les images de cataclysmes o l humanit p cheresse p r
112. tout fait l abolir dans le il qu il repr sente Le th tre des passions transpos dans l aire langagi re donne alors naissance l ar ne vide de la voix narrative 5 Blanche ou l oubli op cit p 251 L Aragon cf titre de l ouvrage Une vague de r ves op cit 234 comme medium de l indicible Par ailleurs le texte crit pr sente le double avantage de l coute attentive et de l expression exalt e et pour que les interlocuteurs se rejoignent enfin l ar ne langagi re doit alors s envisager transversalement afin qu la voie d acc s des lettres comme miroir se substitue le roman en tant qu ouverture vers le chemin des fables L amant aragonien en prenant le relais de l auteur crit donc pour permettre que s tablisse entre l homme et la femme le dialogue vrai toujours d tourn de sa route la conversation par le roman qui est le langage m me de lamour de la r alit appel e amour Puisque le personnage authentifie le texte plus qu il ne l irr alise la m taphore du th tre comme mise en lumi re de l ombre fantasmatique se d ploie davantage et c est tout naturellement dans Th tre Roman qu elle atteint son apog e Le th tre est donc le nom que je donne au lieu int rieur en moi o je situe mes songes et mes mensonges L uvre ainsi red finie se dresse alors comme une tentative d mesur e d acc der dans le
113. trame historique d un m me v nement dans le but de le retranscrire autrement facilite la liquidation plus compl te de la charge traumatique Cette r ussite sera concr tis e par l expression d un sujet dont la volont est de r crire son histoire de se r crire une histoire plus coh rente de se historiciser Il sera question de voir comment le dispositif narratif du t moignage nous permet de dire que le sujet Ernaux g re le trauma de fa on plus compl te Est ce parce que le r cit est plus tardif plus r fl chi Si f lla pratique du t moignage des r cits de rescap s aux romans tr s contemporains est l pour donner voir des faits les rappeler la m moire collective les faire revivre au cours d une exp rience textuelle parfois traumatisante comment performe t elle lacte de lib ration du sujet 36 A Ernaux L v nement p 112 7 I Agger et S Jensen Testimony as Ritual and Evidence in Psychotherapy for Political Refugees p 116 38 M Bornand T moignage et fiction Les r cits des rescap s dans la litt rature de langue fran aise 1945 2000 Gen ve Librairie Droz 2004 p 228 163 En somme nous t cherons de prouver dans notre m moire de ma trise que l criture r p t e d un m me sch me th matique travaille plus efficacement le processus de r int gration de la m moire du trauma L criture est donc un m dium th rapeutique privil gi gr ce auqu
114. tre est ce parce que celle ci englobe tout la fois l universel et le singulier l intime et le public le m me et l autre Creuset de hantises personnelles perp tuellement transform es et Platon Le Banquet Paris Flammarion GF 1964 p 67 216 miroir de l humanit la plus primitive l amour s offre d embl e dans toute la complexit de son tre Parce qu issu des pulsions les plus primitives le malheur d aimer fruit de l in vitable union de l intangible et du concret semble n cessairement devoir se doubler du besoin de r ver Aussi celui pour qui il semble vident qu il n y ait pas d amour heureux peut il appara tre comme l un des exemples les plus significatifs de toute cette conception occidentale de l amour du point de vue romanesque en tout cas Bien qu inspir e de l uvre romanesque dans sa globalit la pr sente tude ne s appuiera pourtant que sur quelques uns des derniers romans aragoniens que sont La mise mort 1965 Blanche ou l oubli 1967 et Th tre Roman 1974 dans la mesure o ceux ci correspondent davantage la probl matique retenue Toutefois Aur lien 1944 bien qu appartenant au cycle du Monde R el semble galement devoir s int grer dans une telle optique En effet go t de l absolu volupt d une relation qui paradoxalement ne se d ploie qu au bord de l ab me abdication devant la r
115. volte Sans eux crivit Ella Maillart nous aurions pu oublier que cette Europe d apr s guerre ne nous inspirait que de l antipathie Vibart 49 Elles d cident alors de profiter de la vie en larguant les amarres du c t de Nice d s l arriv e de l t Bouvier 119 C est en 1923 qu elles d cident d effectuer une croisi re en mer g e et font la connaissance d Alain Gerbault par l interm diaire de Virginie Heriot Ils ont re u tous les trois une ducation anglaise partagent une m me rudition hell nique et font preuve d nergie sportive leur complicit est imm diate Vibart 49 Au milieu des cartes Ouli Saussure 10 qui s amoncellent dans le Firecrest Ella et Hermine passent alors des soir es inoubliables couter attentivement les r cits et projets d Alain Gerbault Signe du destin ou de leur amiti ils se croisent r guli rement dans les diff rents ports de la c te m diterran enne et notamment Cannes o le jeune navigateur pr pare judicieusement sa future travers e de l Atlantique en solitaire Lorsqu il crit le r cit de son pop e publi en 1924 il leur fait un clin d il logieux c t de mon Firecrest se trouve Perlette un petit bateau de sept m tres de long appartenant deux jeunes filles qui en constituent tout l quipage Leur audace est tr s admir e de tous les p cheurs et les fl neurs le long du quai s attardent les
116. vuls par tout ce qui touche la guerre il refuse d accomplir son service militaire 4 Pinter The Birthday Party London Faber and Faber 1991 1959 p 86 Ibid p 99 Ibid p 98 201 s emploie vouloir r pondre des questions politiques sur l usage de la violence et de la confiscation du pouvoir dont le seul but serait l asservissement de l homme par l homme En effet les racines profondes de One for the Road se trouvent incontestablement dans les premi res pi ces de Pinter Lorsque Mel Gussow interroge Pinter sur ce qui a bien pu provoquer l criture de cette pi ce il r pond par Le monde o volue la pi ce n occupait pas seulement mes pens s depuis de nombreuses ann es mais je l avais m me exprim d une fa on ou d une autre dans mes premi res pi ces L une c est L Anniversaire qui date de 1957 je crois L autre est ma derni re petite pi ce Langue de la montagne Toutes deux concernent l oppression et l individu et je trouve tr s trange de m apercevoir apr s toutes ces ann es que les deux pi ces se font en fin cho Un pour la route tra ne depuis longtemps L Anniversaire contient m me des bribes d Un pour la route Pinter le dramaturge est d sormais convaincu que le discours qui ne conduit pas l action qui pire encore la pr vient est une mal diction Pr sent e pour la premi re fois au Lyric Theatre Studio en mars
117. y ni uvre ni bilan ni savoir ni sagesse dans le s jour des morts o tu ten iras Qo 9 10 point de son existence C est quand on est le plus savoureux qu on doit cesser de se faire manger Que votre mort mes amis ne soit blasph me contre l homme et contre la Terre En votre mort doivent brasiller votre esprit et votre vertu encore sinon sera manqu e votre mort Ainsi parlait Zarathoustra p 102 3 La Bible p 1050 Cette conclusion tir e du Livre de L Eccl siaste annonce notre prochain chapitre 121 Sigles utilis s uvres de Sergio Kokis Livres bibliques AA Les amants de l Alfama 2003 Ap Apocalypse AL L amour du lointain 2004 Qo Eccl siaste ou Ooh leth E Errances 1996 FB Le fou de Bosch 2006 G Lagare 2005 MJ Le ma tre de jeu 1999 PM Le pavillon des miroirs 1994 S Saltimbanques 2000 C est dans le but de r duire les appels de notes et d all ger la lecture que nous abr geons les r f rences La Bible en indiquant entre parenth ses le sigle suivi du chapitre et du verset Ces sigles sont utilis s par la Soci t biblique fran aise dans les notes et les indications qui compl tent l dition de La Bible que nous employons La Bible TOB Soci t biblique fran aise amp Editions du Cerf Paris 1988 BIBLIOGRAPHIE 1 Romans et autres crits de Sergio Kokis Kokis Sergio Le pavillon des miroirs Montr al XYZ diteur 1994 367 p
118. 0 7 les principes du cubisme analytique consistent pour l essentiel on le sait tirer les cons quences de la le on de C zanne selon laquelle toute figure naturelle peut se d composer en volumes simples sph res cubes etc et d autres part multiplier les points de vue diff rents sur le m me sujet l int rieur d un seul tableau Ce second principe am ne construire le tableau comme un collage imaginaire de fragments poss dant chacun sa logique spatiale et aussi souvent sa logique temporelle Jacques Aumont op cit p 189 277 pr gnant ainsi que leur teneur sentimentale en vue de faire contraster les diverses exp riences spatio temporelles Couleur n 1 r v le les deux visages d un m me instant celui ci peut tre v cu comme un instant explosif ou une simple dur e la perception distinctive des diff rentes modalit s temporelles en l occurrence le sens de l instant et celui de la dur e est brouill e La voleuse n 4 encha ne trois espaces temps diff rents et les fait correspondre trois r alit s diff rentes savoir la m moire le r ve et le pur tre C est ainsi que les espaces temps comme construction objective se transmuent en exp rience int rieure Op ra glac n 9 rapproche trois instants en les examinant sous un m me angle le sublime Les trois instants semblables transmettent trois significations diff rentes d une m me exp rience
119. 1984 One for the Road s ouvre sur le personnage de Nicolas qui ordonne qu on lui ram ne Victor un homme meurtri dont les v tements sont d chir s Cette sc ne comme toutes celles qui vont suivre se d roule dans un espace clos o torture et violence sont les ma tre mots Victor est face son bourreau Apr s avoir subi un premier interrogatoire les lumi res s teignent et se rallument pour clairer la sc ne o Nicolas est en pr sence d un petit gar on Nick C est le fils de Victor Lui aussi droit un interrogatoire m me s il ne semble pas tre victime d une quelconque violence physique Les lumi res s teignent une seconde fois c est Gila femme de Victor et m re de Nick qui cette fois se trouve en pr sence de Nicolas Elle est viol e plusieurs fois par Nicolas et ses hommes Au cours de la derni re sc ne Nicolas annonce Victor qu il va tre lib r apr s avoir accept de prendre un verre 7 Gussow Mel Conversations avec Harold Pinter trad Isabelle D Philippe Paris Deno l 1998 p 120 SCarlyle cit dans Steiner George Langage et silence Paris Seuil 1969 p 81 202 avec son tortionnaire Cependant il lui annonce qu il avait d cid de garder Gila une semaine suppl mentaire tandis que le sort du petit gar on demeure inconnu m me si tout porte croire que Nicolas mis fin ses jours Aucune indication spatiale ou temporelle ne nous est r v l e Nous
120. 200 En effet Adrian s accroche au pass pour la simple raison qu il lui procure une certaine s curit Sauf que le rite de passage s installe de lui m me puisqu partir du moment o Adrian se retrouve dans cette gare tout le reste s encha ne avec une logique implacable et il est impossible de reculer G 136 Ses biens sa famille et son identit sont tous rest s derri re pour pr cipiter le point tournant de son existence Il doit bien malgr lui enfiler les v tements de quelqu un d autre puisque les siens sont sales G 97 Au fil du temps et des prises de conscience Adrian troque ses souliers contre des godillots militaires d un soldat d serteur G 133 Curieusement ils sont beaucoup plus confortables m me s ils provoqu ent chez lui un sentiment d sagr able comme s ils repr sent ent la perte d finitive de son identit citadine G 133 C est que son d sir de changer d existence demeure encore inavouable sans compter cette affreuse angoisse devant les nouvelles possibilit s Il oscill e ainsi entre sa vie ant rieure et cette br che b ante d une vie nouvelle pleine de possibilit s G 177 Adrian devient Joseph Adrian ou Joseph cela revient de plus en plus au m me mesure que le temps passe G 157 Il s agit maintenant pour Adrian de d passer l inertie l envasement dans la mort en vie de Vokzal et de repartir pied la fin du roman
121. 21 Kokis Sergio Les langages de la cr ation p 27 2 Oore Ir ne L itin raire cr ateur dans l uvre romanesque de Sergio Kokis Voix de la francophonie 2000 pp 235 245 31 Ibid p 236 7 Dans De la libre mort Nietzsche dit qu on doit apprendre mourir qu il est n cessaire de s accomplir en tant que cr ateur afin de mourir au plus haut 120 Enfin le message de L Apocalypse concerne les personnages de Kokis Loin de proposer un futur utopique dont l attente permettrait de se d sint resser du pr sent ou de se r signer vivre d tach s de leurs passions il fait appel un vif d sir de transfiguration Que celui qui a soif vienne Ap 22 Le personnage de Kokis est investi d une libert provisoire et il n a qu l exercer afin de s accomplir Heureux et saints ceux qui ont part la premi re r surrection Sur eux la seconde mort n a pas d emprise Ap 20 et chacun est jug selon ses uvres Lorsque Lucien s adresse pour la derni re fois Ivan dans Le ma tre de jeu n voque t il pas sa mani re l pilogue mobilisateur de L Apocalypse qui invite l homme se pr parer tout de suite l av nement Le temps est court laisse moi parler et coute MJ 224 Tout compte fait c est ici sur Terre que les personnages de Kokis font de leur existence une exp rience enrichissante puisque comme le dit L Eccl siaste il n
122. 6 Lyotard Fran ois L assassinat de l exp rience par la peinture Monory Le Castor Astral 1984 Marin Louis Etudes s miologiques critures peintures Klincksieck 1971 Panofsky Erwin La Perspective comme forme symbolique et autres essais traduction sous la direction de Guy Ballang pr c d s de la question de la perspective par Marisa Dalai Emiliani Editions de Minuit 1975
123. 86 le prestige ne s affiche pr cis ment plus par l ostentation mais par la discr tion le d pouillement et l effacement 130 C est dans la minceur que ces deux mani res de se diff rencier dans une soci t de consommation entrent en conjonction Le corps mince est une manifestation d une underconsumption de nourriture c est dire on ne mange pas afin de maintenir une minceur et en m me temps cela manifeste un gaspillage de nourriture puisque la seule raison d tre de la nourriture est sa consommation C est aussi dans une telle situation qu une valeur morale s attache la minceur lorsque le gaspillage est valoris en tant que inconspicuous consumption la consommation ostensive de nourriture manifest e par le corps gros est per ue comme gaspillage de nourriture puisqu il s agit d une consommation de plus de ce qui est n cessaire pour bien alimenter le corps Baudrillard tablit le lien entre la valeur morale de consommation produite par les principes de gaspillage et l underconsumption et la taille du corps lorsqu il soutient que le corps est devenu objet de salut 200 Dans la soci t capitaliste le corps a pris la fonction morale et id ologique de celle de l me 200 Ainsi il identifie la croyance de cette soci t que si vous ne faites pas vos d votions corporelles si vous p chez par omission vous serez punies Tout ce dont vous souffre
124. Ces Aventuri res des Ann es 20 Thomas Bauer Universit Paris Ouest Nanterre La D fense Beaucoup d obstacles s opposent la m diatisation des championnes Seules quelques femmes d exception ont eu la chance de pouvoir laisser leur nom dans l histoire du sport comme la joueuse de tennis fran aise Suzanne Lenglen dont le nom a circul dans les plus grands journaux du monde entier Les Ann es folles ayant t l occasion pour les femmes de faire un grand pas en avant nous avons voulu savoir si les crivains avaient c l br les prouesses des jeunes aventuri res de l poque Ella Maillart Alexandra David Neel Gertrude Ederl Maryse Hilsz etc et si tel tait le cas la mani re dont ils les avaient d crites Ces portraits d aventuri res pr sent s par des crivains voyageurs que sont Ren Trintzius Pierre Mac Orlan Paul Morand ou Alain Gerbault sont tout fait singuliers Sachant que la grande majorit des hommes tait tonn e de voir ces h ro nes r aliser ce qu eux m mes taient incapables de faire ils ont exprim un sentiment d admiration en voquant explicitement leur caract re bien tremp ou en composant leur double romanesque Lorsque Blaise Cendrars rencontre pour la premi re fois lisabeth Pr vost en 1938 cette jeune voyageuse de vingt trois ans vient tout juste de traverser l Afrique bord d une vieille Ford Fascin par son charisme ses prodigieuses exp ditions et s
125. Einaudi 1970 Sipala Paolo Mario dir Vitaliano Brancati nella cultura europea Atti del Convegno internazionale di studi Siracusa Ediprint 1987 Spera Francesco Vitaliano Brancati Milano Mursia 1981 146 Zappula Muscar Sarah Il pi giusto elogio Brancati tra Borgese e Sciascia in Annamaria Andreoli dir Dalla Sicilia all Europa l Italia di Vitaliano Brancati catalogue de l exposition tenue la Biblioth que Nationale de Rome en mars et avril 2005 Roma De Luca 2005 Zarcone Salvatore La carne e la noia La narrativa di Vitaliano Brancati Palermo Novecento 1991 Le trauma et l indicible ou de la n cessit de r crire le r cit de l avortement dans Les armoires vides et L v nement d Annie Ernaux Eftihia Mihelakis Universit McGill Plusieurs travaux se sont pench s sur la question de l indicible du trauma dans la litt rature de l apr s guerre Shoah Hiroshima et Nagasaki Maintes tudes ont aussi t consacr es concernant les textes d crivain e s contemporain e s la n cessit d crire le trauma comme moyen th rapeutique ou curatif Cependant peu de travaux se sont int ress s mettre en relief la notion de r criture du trauma de l avortement chez Annie Ernaux Or chez elle la r p tition d une m me trame historique est un sch me fondamental puisqu elle publie en 1964 le roman Les armoires vides et en 2000 le t moignage au
126. Le personnage de Makarius Leichen le Cadavre est l pour rappeler que tout pointe vers la mort Tout au long de la trilogie des saltimbanques son personnage constitue l all gorie de la Mort Son masque blanc tel un outil de r v lation permet de d voiler sa nature propre Le masque d masque ainsi la mort ce n est pas un d guisement pour se cacher comme peuvent le penser les gens du commun S 275 D ailleurs selon le mime Makarius c est le masque qui transcende tous les artifices techniques et tout le bavardage du monde qui tendent leur tour faire oublier notre condition mortelle S 276 Aussi est il tout fait juste qu en portant le masque Makarius devienne le mime qui se d ploie en un ballet aussi trange qu inqui tant presque comme s il s aglit de deux personnes simultan ment sur les planches S 273 Mort et transfiguration tel est le devenir de l artiste S 239 L acte cr ateur puise donc au plus profond de l tre il ne r pond pas des questions il en pose telle une qu te de sens qui accorde un temps d illumination r it rable chaque cr ation AL 55 C est que l artiste est conscient de l impasse dans laquelle l tre humain se trouve Il a besoin de se sentir vivant Nous allons notre propre perte du simple fait d tre vivant S 213 et puisqu il n y a pas de retour chacun est ainsi son propre chec dans une descente vers la mort
127. Le probl me est le suivant si ce que nous appelons r alit est en somme une version ordonn e de ce vague mue par la relativit des points de vue comment se fait il que au sein d une m me communaut nous nous accordions tous peu pr s sur ce que nous consid rons comme telle Cette question qui prend tout l apanage de la pertinence n en a que les plumes En fait c est un cas typique de question pour philosophes c est dire un peu abruptement une question que personne ne se pose non pas par paresse ni par manque de qualification mais bien parce que cela va de soi Cette interrogation que je me formule bonne l ve est un nonc vide Nous apprenons par r p titions la transmission est g ologiquement stratifi e en couches r guli res il n y pas d autres mani res d apprendre Ainsi comme l crit Nelson Goodman La largesse d esprit ne saurait se substituer au dur Ernst Bloch Experimentum Mundi question Catg ories de l laboration Praxis traduction de G rard Raulet Payot Paris 1981 273 pages page 12 69 labeur Nous avons tendance penser que la r appropriation de ce fourbi hostile et sans forme l invention du r el rel ve d une paresseuse fantaisie repoussoir de la connaissance or l activit imaginative est rigoureuse et se conjugue avec la compr hension Selon Iris Murdoch La fantaisie est l ennemi rus de l imagination intelligente d
128. M me si ce sont les conseils de son p re ce sont aussi les conseils qui portent la narratrice visiter sa famille au Nord et agir contre son p re L acte ultime du rejet des contraintes de la soci t de consommation par la narratrice est le meurtre de son p re Le p re de la narratrice lui rend visite son appartement Il l ignore parlant sur son cellulaire et puis 1l crie qu elle n aurait pas d visiter sa famille 141 142 C est une n gation explicite du pouvoir de la narratrice de se d finir de trouver un mode de vie dans lequel elle peut se sentir l aise Lorsque la narratrice tend la main pour prendre un biscuit afin de se conforter son p re se f che encore plus et le lui interdit violemment Il m arrache la bo te des mains et la lance du bout des bras 142 C est cet instant que la narratrice le tue Elle rejette le pouvoir de son p re de lui dicter ce qu elle peut faire elle rejette aussi son pouvoir de la limiter aux contraintes de la soci t de consommation Ainsi le parricide qui termine La danse juive de Lise Tremblay est la culmination d un processus de prise de conscience de la narratrice Devenue consciente de sa graisse et de l effet nuisible de l id ologie de la soci t de consommation qui valorise les corps minces la narratrice essaie de r soudre son conflit interne c est dire la tension dans sa fa on de se percevoir Pour r aliser ce projet elle coupe
129. Mallarm est il obscur Pourquoi la lecture de ses po mes s apparente t elle un itin raire initiatique un parcours ponctu d preuves Je me pencherai dans un dernier temps sur cette id e d garement significatif c est justement par ces preuves par ce processus que le po me trouve son sens Le po me comme labyrinthe Dans un texte de 1870 sobrement intitul Le sonnet Th ophile Gautier d crit le po me comme ferm sur lui m me comparable en cela une petite pi ce d mail finement travaill e et contenant tout un monde Bien entendu un tel point de vue n est pas tranger aux doctrines de l art pour l art desquelles Mallarm fut proche Le point de d part de textes comme les ventails voire m me le Toast fun bre et sa fameuse coupe vide est il tout fait diff rent bien que ces textes naturellement d passent de loin cette probl matique C est donc l le premier point de comparaison sur lequel je m attarderai le po me dans la pens e de Mallarm est comme un 35 labyrinthe ferm sur lui m me Il contient tout r el et en lui m me demeure son commencement et sa fin De la m me fa on que dans une construction labyrinthique les voies dans l uvre po tique de Mallarm se multiplient comme autant de chemins de possibilit s de lecture Le po me clos Le po me serait il donc un lot parfaitement d tach du monde un objet r
130. PM 254 C est devant le constat de ce d clin qu mergent le d sir de transcendance et l aspiration la transfiguration D ailleurs selon les artistes du cirque Alberti l image noble de la mort ram n e la surface la totalit de l existence S 275 Voil pourquoi la vie d artiste ne s arr te Jamais ils uvrent par peur de la mort pour combattre le vide dans l illusion que la vie existe vraiment et qu elle vaut la peine d tre v cue S 37 Dans son article Quand le je est un e Autre Janet Paterson observe que le changement repr sente le recommencement et que 2 Thid p 117 119 c est le pass qui permet un renouveau existentiel Il est donc n cessaire pour les artistes d effectuer un travail de deuil par rapport leurs exp riences et d approcher la mort symboliquement Apr s tout ces images sont une forme palpable de transcendance la seule que je connaisse PM 369 note le narrateur du Pavillon des miroirs L itin raire de l artiste n a qu un but celui de s habituer la mort toutes ces images pour l apprivoiser PM 370 Le mythe de L Apocalypse est donc paradoxalement un mythe de cr ation puisque le travail de cr ation recr l tre L art invite contempler vivre un moment d ternit et atteindre la dimension spirituelle C est la fois une m ditation sur la mati re et une r flexion sur le temps q
131. Paul Po mes saturniens 1866 Paris Gallimard Folio Plus Classique 2005 Analyse de Truismes 1996 de Marie Darrieussecq sous l angle critique de la Morphologie du conte de Propp Philippe Willocq Haute Ecole Libre Mosane En 1996 paraissait aux ditions P O L Truismes le premier roman de Marie Darrieussecq Le succ s retentissant de ce roman inclassable a pour ainsi dire r actualis le fond commun de nos contes les plus connus ne serait ce que par la pr sence des motifs dits merveilleux de la m tamorphose du loup et du cochon ici truie pour ne citer que ceux l Mais s il para t difficile partir de ces seuls indices de cat goriser cette uvre fantastique au sens todorovien du terme il n en est pas moins possible de remarquer la volont sans doute ironique de l auteure d y faire r f rence La grille d analyse de Vladimir Propp adapt e la contemporan it de notre sujet nous permettra t elle de d couvrir en quoi ce roman sans v ritable structure apparente conditionne les lin aments de notre lecture et de son fonctionnement C est ces r ponses que notre tude sera d di e offrant cette fresque narrative envo tante notre propre fascination Par fonction nous entendons l action d un personnage d finie du point de vue de sa signification dans le d roulement de l intrigue Vladimir Propp Introduction La Morphologie du conte de Propp a depuis longte
132. a Pierre Histoire de la France au XX si cle Tome I 1900 1930 Paris Complexe Historiques 1999 Di Grado Antonio Vitaliano Brancati Antonio Magnano e altro E tra l altro le ragioni di un convegno Introduzione in Daniela Battiati dir Vitaliano Brancati Da Via Etnea a Via Veneto actes du colloque Da via Etnea a Via Veneto Vitaliano Brancati quarant anni dopo sept oct 1994 Roma Fahrenheit 451 2001 L orologio di Brancati spazio e tempo a Nataca in Paolo Mario Sipala dir Vitaliano Brancati nella cultura europea Atti del Convegno internazionale di studi Siracusa Ediprint 1987 Ferretti Gian Carlo L infelicit della ragione nella vita e nell opera di Vitaliano Brancati Milano Guerini e Associati 1998 Ferroni Giulio Introduzione Brancati Vitaliano Romanzi e saggi Milano Mondadori I Meridiani 2003 Giannetti Valeria Textes provisoires et strat gies de la repr sentation du personnage chez Vitaliano Brancati in Dominique Budor et Denis Ferraris dir Objets inachev s de l criture Paris Presses de la Sorbonne Nouvelle 2001 Godard Henri Louis Guilloux romancier de la condition humaine Paris Gallimard 1999 Grenier Roger Entretiens avec Louis Guilloux vol 1 2 et 3 France Culture 7 11 avril 1975 144 Hue Bernard Romans de guerre genre faux Situation de Louis Guilloux par rapport Barbusse E J ng
133. a sauv la vie Il fallait avoir la force de croire cet enfant qui nous signalait des brigands mais j avais mon f tiche la branche de feuillage oubli e par toi 223 La fa on dont Andr va vibrer pour cet exploit montre quel point il estime son audace Tel un aficionado l aff t de la moindre information il parcourt quotidiennement les principaux journaux le Berliner Tageblatt le Montag le B Z Mittag ou encore le Weltspiegel D sormais une m me passion unit les deux protagonistes comme le signale Claude Leroy 2006 167 et le rythme du r cit s acc l re de plus en plus l approche du d nouement la fin de l intrigue c est en aviatrice h ro que qu elle se pr sente devant Andr le soir de son arriv e au Sportpalast Il n a alors plus d yeux que pour elle et lorsqu il envoie un t l gramme sa famille pour leur annoncer son mariage c est par ces mots qu il leur pr sente Ingrid Chers Parents Je me marie avec h ro ne raid en toile 222 Ce n est plus seulement de la charmante sportive qu Andr est tomb amoureux mais bien de la courageuse aviatrice Le choix d une Allemande pour incarner la femme nouvelle permet Ren Trintzius d id aliser le portrait de l aviatrice Son personnage illustre cet imaginaire collectif qui se diffuse la fin des ann es 20 et au d but des ann es trente puisque quatre ans plus tard en 1933 on retrouve une image simil
134. abulaire utilis par Mallarm construit sur cette opposition Au pur est donc souvent associ e la p leur la lumi re une certaine forme de virginit Pair pur et limpide et profond du matin Vers l azur attendri d octobre p le et pur On retrouve parfois la forme d un ange pour exprimer cette puret Et vers le ciel errant de ton il ang lique Je me mire et me vois ange La po sie de Mallarm serait d s lors un processus vers une plus grande puret vers la perte d une mat rialit abhorr e tant dans le langage que dans l tre qui devient ange un long processus vers l acceptation de la Mort et du N ant Conclusion La po sie de Mallarm apr s celle de Baudelaire invente donc son tour pour reprendre l expression d Yves Bonnefoy la mort Car l se trouve peut tre la plus profonde question que posent les Po sies Dans l utilisation d un langage auto r flexif dans le recours constant l obscurit c est creuser le texte jusqu au N ant qu invite l auteur Le lecteur trouve alors et c est l la grandeur de Mallarm dans le po me un cho de sa propre 3 S Mallarm Le Sonneur in Po sies op cit p 18 3 S Mallarm Soupir in Po sies op cit p 23 Ibid 35 S Mallarm Les Fen tres in Po sies op cit p 11 Y Bonnefoy Les Fleurs du Mal in L improbable et au
135. aduction de Labat de ce po me pique dans son ouvrage Royaut voici ce que rapporte Paul Ric ur dans Finitude et culpabilit Op cit p 169 selon le r cit en effet les plus jeunes des dieux troubl rent la paix primitive du vieux couple Tiamat et Apsu ils troubl rent les sens de Tiamat en faisant du vacarme dans les demeures c lestes 1 23 24 alors Apsu d sira les d truire et Mummu son fils et son vizir lui proposa un plan lorsque Apsu l eut entendu son visage s illumina pour le mal qu il m ditait contre les dieux ses fils I 52 Mais le vieux dieu fut tu avant que ce projet p t tre r alis Et Mardouk eut t cr un dieu fut engendr le plus puissant et le plus sage Tiamat enflamm e de rage enfanta des monstres vip re dragon sphinx grand lion chien fou homme scorpion Il 1 3 205 Face leurs responsabilit s ces m mes dirigeants finissent toujours par trouver une justification leurs actes dans la simplicit de l une des plus d concertantes expressions on ne fait pas d omelette sans casser des ufs Entre banalisation et justification d une violence dite fondatrice tous joignent leur voix celle de Sade qui se lamente face une providence qui serait la source du mal et qui r futerait la responsabilit de l tre raisonnable qu est l humain O souveraine Providence pourquoi faut il que les moyens de l
136. affrontent dans des joutes un plongeoir a m me t install en contrebas du pont des Invalides 19 sur elle l assimilait po tiquement la sir ne 142 L ondine aventuri re poss derait toutes les qualit s en somme pour participer cet effet de contraste tant recherch le cran la r sistance l adaptabilit sans omettre le charme Contrairement l h ro ne de Deutschland qui manifeste son ind pendance en faisant seule le choix de partir en raid a rien pour mettre l preuve son amour Zizi Tricart s engage dans ce marathon aquatique sous l impulsion d un p re davantage pr occup par les retomb es financi res Bien des diff rences les s parent on le voit et pourtant ces deux personnages ont en commun la description d un portrait flatteur En est il de m me pour les aventuri res r elles de l poque L aventureuse Tita na Lorsque Tita na pseudonyme d Elisabeth Sauvy accepte que Pierre Mac Orlan pr face son roman La B te Cabr e 1925 elle ne savait pas encore le sort que l crivain allait lui r server La seule chose dont elle tait peu pr s s re est qu il serait sensible son r cit d aventure maritime N oublions pas qu cette date en effet l ancien rugbyman devenu crivain voyageur avait publi Le Chant de l quipage 1918 bord de l Etoile Matutine 1920 ainsi que son Petit manuel du parfait aventurier 1920 Pourtant contre
137. aime pour toujours Je lui r ponds Je t aime Je n ai lui offrir que l un de ces soleils qui entre avec ma main dans l obscurit de la terre De l o je serai d sormais j couterai l cho du pr nom de ma fille toute la terre portera en secret son pr nom FSL 79 Lori Saint Martin remarque que le rapport m re fille dans La Maison du remous de Houde est plein de douleur et d une douceur terrible 1994 192 Cette affirmation s applique galement ce roman et est bien illustr e dans le passage ci dessus Bien que les souvenirs de sa m re de la folie et du suicide de cette derni re voquent chez C line des sentiments de perte et d abandon le sentiment qui r gne est celui de l amour Le syst me de r f rences de Houde associe la grand m re avec une toile dans la nuit un l ment distant qui sert toutefois d clairage dans principal sur quelques g n rations Les liens m re fille sont particuli rement porteurs de sens si C line d cide de revenir mourir dans son village natal c est bien pour r gler une fois pour toutes notamment par l criture cr atrice ses prises avec le suicide de sa m re Et si sa fille Sylvie lui est si ch re c est un peu parce qu elle lui a permis de red finir et de red couvrir sa relation avec sa m re 2002b 2 27 Dans son article La Maison du remous de Nicole Houde ou le roman de la terre au f minin Lori Saint Martin soulig
138. aire dans le long 15 m trage d Henri Decoin Les Bleus du ciel 1933 Dans ce film Jean Pierre le petit m cano alias Albert Pr jean met tout en uvre pour d clarer sa flamme Jeannette R my Blanche Montel une s duisante pilote qui fait la fiert d un club a ronautique Les traits de Jeannette sont quasi identiques ceux d Ingrid Une nageuse de marathon prise en mod le De l aviatrice la nageuse de l ange l ondine il n y a parfois qu un pas Tout comme Ren Trintzius fait la part belle l a rienne Ingrid Robert Dieudonn met lui aussi l honneur une aventuri re dans son roman Le Pur sang 1923 travers la description d une nageuse de marathon Il faut d embl e pr ciser que l ambition de Dieudonn est ici tout autre que celle de l auteur de Deutschland car s il rige son h ro ne en mod le d excellence sportive c est afin de mieux d noncer l eug nisme id ologie encore pr sente dans la soci t d apr s guerre Le duc de Marly un richissime sportsman est d u par les r cents r sultats de ses chevaux de course ce qu il n appr cie gu re ayant d bours beaucoup d argent pour acqu rir ces purs sangs de haute lign e C est alors qu un jeune homme de 30 ans Eug ne Roucheron s entretient avec lui sur cette question h r ditaire Il lui tient t te en affirmant que la naissance ne joue aucun r le dans la performance sportive P
139. aire m taphysique Paris Editions du Seuil 2006 Friedrich Hugo Sfructure de la po sie moderne Paris LGF Le livre de poche 1999 Mallarm St phane uvres compl tes Paris Gallimard Biblioth que de la Pl iade 1988 Po sies Paris Gallimard po sie Gallimard 1992 Igitur Divagations Un coup de d s Paris Gallimard po sie Gallimard 2003 Vers de circonstance Paris Gallimard po sie Gallimard 1996 Pelletier Anne Marie Fonctions po tiques Paris Klincksieck 1977 Val ry Paul Vari t I Paris Gallimard 1948 Le rejet des contraintes de la soci t de consommation dans La danse juive de Lise Tremblay Georgia Carley L acte meurtrier qui conclut La danse juive de Lise Tremblay choque cause de son caract re apparemment impr vu cependant une analyse des changements psychologiques subis par la narratrice r v le que cet acte est conforme la tentative de cette derni re de trouver un moyen de vivre sainement dans une soci t qui m prise les individus ob ses Son acte de parricide est un geste symbolique du rejet des contraintes impos es aux individus ob ses par la soci t de consommation contemporaine Au cours du roman la narratrice est hyperconsciente de l effet nuisible qu a la soci t sur sa propre sant psychologique et physique ainsi que sur celle des personnes qui l entourent La narratrice refuse l id e que en maigrissant el
140. aissent par bien des aspects plus traditionnels Cependant les uvres de Guilloux et de Brancati poss dent une caract ristique commune qui constitue galement leur principale originalit leur intrigue gravite autour d un pisode historique voqu par l interm diaire d un protagoniste singulier situ en marge de son milieu social cet gard la d marche suivie par les auteurs du Sang noir et du Bel Antonio est aux Dans ses entretiens avec Roger Grenier sur France Culture avril 1975 Guilloux carte tout rapprochement entre Ulysses et Le Sang noir Compte tenu de la familiarit de l auteur avec la litt rature anglaise d une part et de sa r ticence se livrer en entretien de l autre on peut tre tent de mettre en question cette affirmation p remptoire C est la position adopt e par Henri Godard dans Louis Guilloux romancier de la condition humaine Paris Gallimard 1999 Voir aussi l article de Jean Louis Jacob Louis Guilloux Continuit et ouverture in Jean Louis Jacob dir Louis Guilloux Actes du Colloque de Cerisy sur Louis Guilloux et les crivains anti fascistes Quimper Calligrammes 1986 C est le cas par exemple des Ann es perdues 1941 ou de Don Juan en Sicile 1942 126 antipodes de la mission que le critique hongrois Georg Luk cs assigne au roman historique charg d exprimer travers des destin es individuelles exemplaires les probl mes
141. ait du h ros en n gatif La psychologie autant que la physionomie de Cripure et d Antonio les situe l oppos des personnages de la grande tradition du roman r aliste cet gard les figures centrales des romans de Guilloux et de Brancati apparaissent bien comme des h ros en n gatif Tous deux pour commencer sont des individus m diocres vou s la d sillusion et l chec Si Cripure a choisi de consacrer une th se au philosophe Turnier c est parce que ce dernier est pour lui un mod le autant qu un fr re d infortune Turnier avait t d s le coll ge un personnage extr mement brillant et selon ce qu crivait Cripure marqu 130 Marqu videmment pour la d faite l oppos du roman de formation Le Sang noir et Le bel Antonio mettent en sc ne des personnages sans ambitions et sans avenir passifs et fragmentaires D s les premi res pages du r cit de Brancati Antonio Magnano nous est pr sent comme en creux travers diverses notations n gatives Tout au long du roman le jeune homme se trouve rel gu au statut d objet Objet de d sir de pouvoir de discours ou d infamie Antonio n existe qu travers la parole et le regard des autres comme mat rialisation de leurs fantasmes Son visage d une inexprimable beaut n est qu une fa ade o s impriment les motions et les sentiments de celui qui le contemple Tout comme Cripure Antonio e
142. aldo s av re tout aussi convaincante pour l tude du Bel Antonio La critique montre que la plupart des personnages romanesques de Brancati naissent partir d un processus d videment Tout se passe alors comme si l inaboutissement de la narration tait fonction de la difficult de d finition de son objet savoir le personnage lui m me la repr sentation de celui ci tant inachevable le r cit lui m me demeure inachev op cit p 112 3 131 Des personnages vicariants Vou es l ennui les figures cr es par Guilloux et Brancati s inscrivent dans la cat gorie des personnages vicariants c est dire de tous ces personnages vivant pour ainsi dire par procuration L arch type du h ros vicariant trouve sa pleine expression dans le personnage du roman de formation ou d apprentissage En effet le processus d imitation le d sir mim tique et le choix d un mod le galer ou surpasser sont au principe m me de ce genre romanesque Ayant habituellement pour protagoniste un jeune homme ambitieux avide de d passer celui qu il a retenu comme son mod le le roman de formation accorde une place d cisive l apprentissage par imitation et volont d mulation Mais ni Le Sang noir ni Le bel Antonio ne font partie de cette vaste famille romanesque Contrairement aux h ros de L ducation sentimentale de Splendeurs et mis res des courtisanes ou de Le Rouge et le Noir Cripure et An
143. alement d peint avec vigueur par le biais de grandes images originelles toutes supposant ravages et d vastation Du cyclone voqu par Aur lien la temp te annonciatrice du cri dont parle Romain les manifestations naturelles apparaissent chez l auteur comme les plus aptes traduire la force et la violence d un plaisir globalement tu D s lors si le temps prend sa ravageuse origine 8 G Bataille cit in R Barthes Fragments d un discours amoureux op cit pp 207 208 44 Aur lien op cit p 221 4 Th tre Roman op cit p 387 229 dans l essence m me des passions il y puise galement l l ment g n rateur de sa dissolution La vie du temps comme celle du d sir n aspirerait donc qu la mort dans la mesure o pour elle exister c est essentiellement ressusciter l instant d j enfui A l origine de la toile fantasmatique la femme se dresse comme la figure sublim e de la destin e humaine elle est la source intarissable des r veries renouvel es et le merveilleux de sa pr sence mat rialisant les songes elle se fait invitation entrer dans le temps puisque le temps c est elle Elle est ainsi celle par qui le monde ext rieur se concr tise et se d voile tout prend d elle r alit les choses et les mots les tres et le temps Aussi une fois le choc de la premi re rencontre pass e le temps ne peut plus se diviser qu en deux p
144. allimard Paris 1996 313 pages Articles Armel Aliette Enfants et victimes de bourreaux Le magazine litt raire n 467 septembre 2007 pages 50 51 Burgess Anthony propos recueillis par Robert Louit Le magazine litt raire n 459 40 ans de litt rature d cembre 2006 page 44 2006 216 pages Gargani Aldo G Ethique psychanalyse et criture philosophique traduction fran aise de Serge Claeys Actes du colloque Wittgenstein et la critique du monde moderne essais La lettre vol e Bruxelles 1996 125 Pages Savary Claude Wittgenstein De la philosophie comme th rapie linguistique de la po sie Revue canadienne d esth tique volume 10 automne 2004 revue lectronique de la soci t canadienne d esth tique Wittgenstein Ludwig Remarques sur le rameau d or de Frazer traduction fran aise de Jean Lacoste Qwest ce que croire Agone n 23 Marseille 2000 211 pages pages 12 31 Apocalypse mort et transfiguration dans l uvre romanesque de Sergio Kokis Norma Kjolbro L Apocalypse est le dernier livre du Nouveau Testament Elle raconte la fin violente du monde avec des visions catastrophiques et infernales Les lus sont gratifi s d une r surrection promis une J rusalem nouvelle Il n y a plus ni deuil ni cri ni souffrance Quant aux l ches aux infid les aux d prav s aux meurtriers aux impudiques aux magiciens aux idol tres et tous les menteurs
145. amily Romance Daughters and Fathers in Qu bec Women s Fiction in the Nineties Doing Gender Franco Canadian Women Writers of the 1990s Paula Ruth Gilbert et Roseanna L Dufault eds Madison Fairleigh Dickinson University Press 2001 Tremblay Lise La danse juive Montr al L m ac diteur Inc 1999 Wattanasuwan Krisadarat The Self and Symbolic Consumption Journal of American Academy of Business Cambridge Vol 6 no 1 Mars 2005 179 184 Au commencement tait le fourbi essai sur la fiction et le r el Marielle Chauvin Paris 8 L objet de ma th se est d interroger la fiction l uvre dans les uvres d art dans une aspiration wittgensteinienne Pour ce en partant d une hypoth se irr aliste Au commencement tait le fourbi je propose d interroger les rapports entre la fiction et le r el Dans les Remarques sur le rameau d or de Frazer Wittgenstein crit On pourrait presque dire que l homme est un animal c r moniel C est sans doute en partie faux en partie d pourvu de sens mais il y a aussi quelque chose de correct l dedans En ce sens le premier objet de mon travail est de comprendre la fiction l uvre c est dire en action en marche dans nos vies dans toute la ritualit qui assure son fonctionnement et sa transmission Ainsi nous verrons comment la fiction appara t dans son corps ritualis d s lors que l esprit s veille car comme l cr
146. ans d Aragon op cit p 317 5 Th tre Roman op cit p 264 220 se d roulent les rapports amoureux comme autant de combats o l ventualit de la mort bien loin d tre exclue se dresse comme l issue fatale et secr tement d sir e Les multiples images figures et symboles se fondent de roman en roman en constellations signifiantes au c ur desquelles les amours aragoniennes acc dent au rang des grandes qu tes originelles Pourtant au del des artifices et stratag mes le masque parfois se fissure laissant deviner les lointains chos de la parole tue La com die des sentiments ne se donne donc pas n cessairement et dans les flottements du conscient et de l inconscient la part du jeu et de l aveu s intriquent bien souvent tel point que l amant lui m me ne parvient pas toujours les d partager Le th tre ayant si profond ment investi l espace intime les rapports amoureux ne se d clinent plus seulement sur le mode de la repr sentation mais n existent que par elle Du palpable l intangible de la mat rialit des corps l pure des sons le d cor se transpose et le sens se creuse interrogeant sans cesse le jeu des fronti res entre r alit et fiction Quand est le vrai de vivre je vous prie Quand est mentir et le th tre Les jeux de Pamour et du langage Parce que la d claration ne porte pas sur l aveu de l amour mais sur la forme infiniment comm
147. ant Bient t naissent les premiers soup ons ce m me Antonio qui passe aux yeux de tous pour le plus fougueux des amants n aurait pas m me r ussi honorer sa femme Rapidement le scandale clate au grand jour entra nant l humiliation et le d shonneur des Magnano Le notaire Puglisi fait annuler le mariage et Barbara quitte Antonio pour le richissime duc de Bronte Au d sespoir Antonio se r fugie dans sa chambre d enfant et refuse de recevoir des visites Lorsque son oncle est de passage Catane pourtant il se confesse longuement lui et lui fait le r cit d taill de son infortune Peu peu Antonio renoue avec son cousin Edoardo sort de sa longue convalescence et recommence s aventurer dans les rues de Catane Il fr quente sans grande conviction le cercle socialiste de l avocat Bonaccorsi mais ne peut oublier sa honte et sa souffrance L infirmit d Antonio r v l e ses amis et son p re se pr cipitent corps perdu dans 5 Vitaliano Brancati I bell Antonio 1949 Milano Mondadori Classici moderni 2001 Toute citation dans le texte original s appuiera sur cette dition Pour la traduction fran aise nous nous r f rerons la version d Armand Pierhal publi e chez Robert Laffont Pavillons Poches dans l dition de 2006 129 l assouvissement de leurs pulsions sexuelles pour se convaincre qu ils n ont pas t contamin s par l impuissance d Antonio
148. ant D autres a riennes furent remarqu es mais n eurent pas le m me succ s On pense entre autres l actrice Gaby Morlay qui f t la seule femme fran aise et peut tre au monde poss der en 1920 les trois brevets de pilotage sph rique avion et dirigeable ou encore Mme Peuillot qui se jeta en parachute en 1921 au meeting de Dinan une hauteur de trois cents m tres Laget Mazot 320 l instar de lady Hailsham qui conduisit une 140 HP de course l a rodrome de Brooklands dans un roman de Louis H mon 216 217 ou de Dani le Kimris qui sillonne les routes du sud de la France bord d une torp do dans un roman de Raymond de Rienzi la course automobile au f minin se d veloppe galement dans les pays occidentaux Les femmes de plus en plus nombreuses obtenir leur permis de conduire sont d sormais admises dans certaines comp titions ex Violette Morris dans le Bol d or des voiturettes et quelques unes d entre elles osent m me se pr senter au d part de rallyes Le 30 novembre 1926 Match L Intran publie un article Une femme au volant dans lequel on peut lire l extrait suivant Beaucoup de nos gracieuses conductrices seraient capables d en remontrer leurs coll gues masculins La femme est maintenant familiaris e avec l automobile et le volant n a plus de secret pour elle Sensible cette g n ration de femmes nouvelles un photographe immortalisa la c
149. antatrice Marthe Chenal 1881 1947 habill e pour l heure en pilote et montrant son coup d il bord d une automobile de course La motocyclette qui n est pas sans 7 Alors qu elle commence jouer dans les court m trages de Max Linder et les pi ces de Sacha Guitry Gaby Morlay 1893 1964 se passionne pour le pilotage Elle est m me photographi e dans un num ro de Femina en avril 1925 avec un mod le d aviatrice de Jean Patou 8 Bulletin des Soci t s F minines Fran aises de Sports et Gymnastique n 1 juillet 1920 p 7 Cette expression imag e permet de d crire l attitude de la cantatrice se penchant l g rement sur le c t pour visualiser la route 10 annoncer le futur roman d Andr Pieyre de Mandiargues 1963 connut elle aussi quelques adeptes tels la Fran aise Madeleine Godefroy la Russe Alice Charkasova ou la Belge Justine Tibesav qui rallia Saigon Paris En marge de ces passionn es de la vitesse les campeuses qu elles soient routi res scouts ou claireuses pr f r rent la vie champ tre ou montagnarde Symbole m me de l mancipation Desanti 211 cette vogue fut largement port e par le scoutisme f minin Ch routre 16 dont le mouvement initialement r serv aux jeunes gens fut fond en 1907 par le g n ral britannique Baden Powell L h ro ne d un roman de Jean Fayard Margaret est ainsi pr sent e comme une jeune Anglaise sportive et excentriq
150. appara tre alors comme une lente construction une laboration d images et de fantasmes qui n est peut tre pas sans rapport avec une entreprise d criture avec ce roman qui nous chappe et dont le sens constamment se d robe en d jouant notre d sir d un accomplissement narratif et herm neutique Mais toute uvre humaine ne pr sente t elle pas sa lecture des visages qui font se lever l horizon de la compr hension ces grandes images imm moriales qui ne sont rien d autre que celles que nous ressassent ternellement les r cits et les figures mythiques Prise dans la foule de ces millions de Visages contradictoires contenue dans l escargot tournant du temps la langue se dresse s lance et se d ploie ternellement au regard de ces structures primordiales qui sont la fois le mat riau explicite de la lecture aragonienne et l instrument de la re lecture de son uvre par l crivain et son auditoire La pens e mythique appara t au fil des uvres comme la cause et le but de la qu te entreprise celle de l Autre fascinant Ainsi les multiples orientations de cette rh torique ch re Aragon constituent elles autant de preuves que l enjeu de la repr sentation de l Autre n est autre que l identit aragonienne elle m me cartel e entre ses deux d sirs inverses Si l amour est r inventer il semble donc que cela ne puisse se fa
151. applicabilit sugg re une zone d ind termination mais comme des normes d s lors notre rapport culturel aux autres versions possibles de ce grand fourbi ne se fera plus sous l gide d un comparatisme curieux mais prendra videment les traits d un jugement de valeur Il me semble cependant que la distinction norme r gle n a pas seulement faire une diff rence de rapport avec la transgression il s agit avant tout en mon sens d une occultation majeure de la cr ativit La question des r gles est centrale dans la pens e wittgensteinienne En effet il s int resse notre langage d un point de vue de grammairien c est dire sous l gide de ses r gles Les math matiques font l objet d un grand int r t dans la mesure o elles repr sentent la forme langagi re r gl e par excellence et pour finir son ethnologie fictive porte souvent sur une suspension hypoth tique de l une de nos r gles Imaginez cette possibilit trange nous aurions jusqu pr sent toujours commis une erreur de calcul dans la multiplication 12 x 12 On peut se demander quel est l int r t de ce jeu suspensif qu aime pratiquer Wittgenstein Il me semble que cette d marche quasi oulipienne tend montrer non pas tant la relativit des r gles qui r gissent notre vivre ensemble que leur cr ativit C est l invention perp tuelle de nos formes de langage que le philosophe nous donne voir Bouv
152. aque cas ces attributs constituent un mat riau brut qui est ensuite fa onn par la constellation complexe des diff rents modes de comportement propre chaque culture Dans ces conditions tre r ellement un certain type de personne ce n est pas se borner poss der les attributs requis c est aussi adopter les normes de la conduite et de l apparence que le groupe social y associe Ce propos sociologique bien que s int ressant davantage la structure sociale qu la forme de vie donne voir cette connexion interm diaire liant existence et r alit dans une ritualit partag e Pour autant il me semble que ce que Goffman d crit comme tant le fonctionnement de celui qui est r ellement correspond davantage l adoption de r gles plut t que de normes Cette distinction n est pas une simple subtilit de vocabulaire et les deux termes r gle et norme recouvrent des modalit s diff rentes lesquelles entrent en ligne de compte d s lors qu il s agit de ce que l on admet comme r el et surtout dans sa forme comparatiste En fait il s agit pour moi de donner voir le fait que d s lors que deux conceptions de la r alit s opposent nous avons tendance juger en termes de vrai et de faux Repositionnons nous dans la conception ludique et th trale propre Goffman car cette posture permet de donner voir Erving Goffman La mise en sc ne de la vie quotidienne 1 la pr sen
153. aque parole ici ressemble une accusation Une provocation Mieux vaut se taire Ainsi rien ne peut aller plus loin IM 113 114 Alors que la carence parentale entra ne H l ne se rebeller et devenir agressive son impact sur Lisa est subtil mais d tectable Il est clair que le dysfonctionnement familial m ne les membres de la famille ignorer les signes pr curseurs du suicide Au lieu d ext rioriser la frustration qu elle ressent comme le fait sa s ur Lisa l int riorise jusqu au jour o elle implose en se tuant au grenier En effet la m re r nove le grenier pour s y cr er un lieu de refuge elle interdit aux enfants d y mettre les pieds Sur le plan symbolique le grenier s difie comme une manifestation visible de la distance que la m re met entre elle et ses enfants Tout comme pour Chut dans Unless le choix du lieu du suicide rend la m re coupable explicitement De plus lors de ce moment crucial la notion de la prison comme symbole des sentiments d enfermement prouv s par les enfants devient encore plus pertinente Lisa s est pendue la poutre Pendue ce mot suffit maintenant pulv riser tout ce qu H l ne a appris entendu compris au cours de sa vie Pendue comme le prisonnier dans le d me comme tous ceux qui se pendent avec une corde IM 199 Il est important de noter que tout comme le r cit de Monette celui de Turcotte est infus d un syst me de sens Ce mom
154. ar exemple lui explique t il il serait absurde de croire qu un athl te complet mari une excellente sportive donnerait naissance un champion en herbe Le duc croyant ferme en sa th orie lamarckienne lui lance alors un pari rappelant quelque peu celui que Jules Verne fit jouer son Phileas Fogg D ici vingt ans il lui pr sentera un pur sang n de parents excellant dans le sport Il met alors tout en uvre pour trouver le couple id al et commence concr tiser son projet en unissant Prosper Meynadier un livreur de journaux courant incroyablement bien le marathon et Zizi Tricart une nageuse hors pair La vie embourgeois e du couple et de leur prog niture Napol on ne leur convient cependant pas Prosper devient fain ant parie de l argent se s pare m me de Zizi Quant 14 Film r alis avec la collaboration des aviateurs fran ais et notamment Maryse Hilsz et le concours du Minist re de l Ai r Archives fran aises du film CNC 78395 Bois d Arcy 16 Napol on il fl ne court les filles devient alcoolique et fait les quatre cents coups Le duc doit se rendre l vidence surtout lors de la premi re comp tition de cross country de Napol on o celui ci abandonne pitoyablement L pilogue montre que Roucheron avait raison ce n est pas la race qui fait un champion mais la volont et le courage d un individu Ce roman satirique sert de contrepoids aux discours politiques s
155. assionn s ayant salu la bravoure des sportives BIBLIOGRAPHIE Berger Marcel Histoire de quinze hommes Paris Ferenczi 1924 Berthier C cile Quand les gar onnes voyagent dans l ouvrage dirig par St phanie Bung et Margarete Zimmermann Gar onnes la mode Berlin et Paris dans les ann es 20 Revue Querelles 2006 133 147 Les bourlingueuses de la plume Portraits de voyageuses crivains dans l entre deux guerres dans Femmes au bord de l auteur sous la direction de Myriam Boucharenc Belph gor vol VII n 2 juin 2008 Boucharenc Myriam L crivain reporter au c ur des ann es trente Villeneuve d Ascq Presses Universitaires du Septentrion 2004 Boulenger Marcel Le Sport et ses as Revue des Deux Mondes 15 ao t 1925 Bouvier Nicolas L chapp e belle Eloge de quelques p r grins Gen ve M tropolis 1996 Cabanel Jean Ren Trintzius Triptyque Lettres Arts Sciences n 55 f vrier 1932 p 3 11 Cit par M Zimmermann Entre Caligari et Giraudoux Deutschland 28 1929 de Ren Trintzius sous la direction de W Asholt et CI Leroy Paris Berlin Moscou Regards crois s 1918 1939 RITM n 35 Universit Paris X Nanterre 2006 Canudo Ricciotto L Autre Aile Paris Fasquelle 1924 Cendrars Blaise L Homme foudroy 1945 Paris ditions Deno l textes pr sent s et annot s par Claude Leroy 2002 vol 5 Cha
156. ation du groupe elle la consommation est donc la fois une morale un syst me de valeurs id ologiques et un syst me de communication une structure d change 109 Dans ce syst me de communication qui accorde les valeurs morales il y a deux principes de base le gaspillage et l underconsumption 48 129 Le gaspillage semble tre une folie une dysfonction de l instinct 48 parce qu il s agit d une consommation de biens qui ne sont pas n cessaires Cependant Baudrillard note qu travers toutes les poques les classes aristocratiques ont affirm leur pr minence par moyen du gaspillage 49 Cela indique que Dans La soci t de consommation Baudrillard emploie le terme anglais cunderconsumption pour exprimer la surdiff renciation par moyen de la discr tion 130 Nous conservons la terminologie de Baudrillard pour pr server la clart de son analyse 51 le gaspillage est n cessaire une fonction essentielle dans la soci t de consommation parce que le surcro t de d pense le superflu l inutilit rituelle de la d pense pour rien devient le lieu de production des valeurs des diff rences et du sens c est dire l origine du langage de la consommation 49 Dans des soci t s de consommation industrialis es une m taconsommation de underconsumption se d veloppe 129 Parce que les biens de consommation sont trop r pandus
157. atively coherent and integrated story about itself Si nous nous appuyons aussi sur d autres tudes psychanalytiques nous pourrons penser Yves Ranty pour en nommer qu un qui font aussi r f rence aux types de r p titions involontaires c est que la notion de r p tition involontaire semble tre un effet incontournable lorsque nous parlons de trauma Dans le sillage des crits sur le trauma ce qui ressort indubitablement c est l impossibilit de liquider la charge traumatique qui g t au c ur de l existence du sujet sous forme de souvenirs r p titifs par la parole En effet l e traumatisme psychique est un effondrement du sens et des significations autrefois chang es stabilis es 1l N Chidiac Trauma et cr ativit exemple de l atelier d criture Traumatismes psychiques prise en charge psychologiques des victimes Elsevier Masson 2007 p 174 12 S Freud et J Breuer tudes sur l hyst rie p 8 5 Y Ranty Les somatisations p 95 14 les sympt mes de la n vrose d angoisse les sympt mes psychon vrotiques et les sympt mes psychosomatiques cardio vasculaires digestifs cutan s Y Ranty Ibidem p 95 153 dont l immense treillis se pr tait g n ralement tous Le sujet ressent cet arr t du d veloppement normal de sa vie par la gestation r p titive et involontaire de souvenirs du trauma comme une crise comme une rupture d borda
158. attention sur un personnage en retrait de la soci t travers cette figure marginale et insolite ils entendent revisiter avec un regard neuf un bouleversement historique la fin de la Grande Guerre chez Guilloux l ascension puis la chute du fascisme chez Brancati L impuissance sexuelle du jeune Antonio Magnano chez l crivain sicilien la difformit et l anticonformisme de Cripure dans l uvre du romancier breton conf rent aux protagonistes de ces romans une puissante originalit et une violente charge politique Par l interm diaire de ces personnages en crise prisonniers d une trag die individuelle alors que se noue un drame historique collectif Guilloux et Brancati esquissent une Histoire fondamentalement autre non plus totalisante ou syst mique mais discontinue fragmentaire en pointill s Introduction Habituellement consid r s comme des crivains mineurs les romanciers Louis Guilloux 1899 1980 et Vitaliano Brancati 1907 1954 n ont pas transform les formes romanesques comme ont pu le faire diff rents titres Flaubert Dosto evski Kafka ou Joyce une poque o les fondations m mes du roman se trouvent profond ment branl es les uvres de ces deux auteurs peuvent nous d router par leur caract re conventionnel et leur apparente indiff rence aux inventions de leurs contemporains La construction du Sang noir et du Bel Antonio tout d abord est pour le moins traditionnelle On rapp
159. au grand myst re de la lecture ou que novice encore on vient peine de le p n trer les mots appr hend s par la seule audition se pr sentent sous d tranges figures qu on aura peine reconna tre lorsqu on les verra en noir sur blanc crits Que de monstres oraux se trouvent ainsi forg s Que de cr ations saugrenues se mouvant sur un plan qui plus tard semblera fantastique Ainsi c est au d tour de l interm diaire l effort de la vision de ces connexions triangulaires entre moi le monde et des outils qu appara t la fiction l o on ne voudrait pas la trouver au commencement de notre apprentissage du monde l origine m me de notre ducation L exp rience fictionnelle enfantine rapport e par Leiris n est pas sans rappeler notre rapport l Autre aux autres je veux dire par l ceux que l on d finit n gativement et avant toute chose par leurs diff rences En effet comment qualifions nous les langues que nous ne comprenons pas celles qui n cessitent une articulation particuli re que notre apprentissage ne nous a pas donn l occasion d exercer barbarismes borborygmes Voil le retour de ces monstres oraux que convoque l crivain anthropologue la rem moration de l apprentissage de sa propre langue celle que l on nomme maternelle et que l on ne saurait corcher la diff rence de ces autres dont les performances labiales sont po
160. auteur et voyageuse cultive sa passion pour l arch ologie qu elle mettra profit tout au long de sa vie En 1930 cette derni re racontera avec un enthousiasme encore intact dans Quand j tais matelot cette exp rience fabuleuse v cue en mer par cet quipage exclusivement f minin de 92 ans 16 Car bien que Marthe Ouli d finisse la navigation comme un magnifique sport d quipe 68 chacune de ces jeunes femmes dut affronter les longues heures de la solitude En effet face soi m me dans un dialogue direct du corps avec la nature Griffet 69 c est un retour soi qu impose ce type de voyage et l une des bribes de sagesse d Ella Maillart l explicite En naviguant j ai eu le sentiment d tre seule sous le ciel d tre seule avec Dieu On se pose alors la question primordiale Que fait on ici bas 18 Fantastique exercice dans la mesure o elles tonn rent beaucoup de monde en man uvrant habilement leur voilier v tues de tricots marins raies blanches et bleues d un fichu rouge autour du cou et d un gros pantalon de toile Ouli 35 Cette situation tait si improbable que lorsqu elles voulurent d barquer La Maddalena elles furent soup onn es d espionnage par les autorit s italiennes Ouli 74 Ce voyage les conduisit en Corse en Sardaigne en Sicile sur les les ioniennes et Ithaque Dans son loge du repos Paul Morand rendra hommage
161. availl e et inscrite plus sobrement que dans le roman crit ant rieurement nous permettront de conclure que la gestion du trauma semble accomplie BIBLIOGRAPHIE CORPUS PRIMAIRE Ernaux Annie L v nement Paris Gallimard 2000 Les armoires vides Paris Gallimard 1974 OUVRAGES TH ORIQUES Barrois C Les n vroses traumatiques Paris dition Dunod 1988 Bornand M T moignage et fiction Les r cits des rescap s dans la litt rature de langue fran aise 1945 2000 Gen ve Librairie Droz 2004 Caruth C Trauma Explorations in Memory Baltimore Johns Hopkins University Press 1995 Uncaimed Experience Trauma Narrative and History Baltimore Johns Hopkins University Press 1996 Chidiac N Trauma et cr ativit exemple de l atelier d criture Traumatismes psychiques prise en charge 165 psychologiques des victimes Elsevier Masson 2007 p 169 179 Danieli Y Treating Survivors and Children of Survivors of the Nazi Holocaust in Post Traumatic Therapy ed F Ochberg p 278 94 Forter G Freud Faulkner and Caruth Trauma and the Politics of Literary Form dans NARRATIVE Ohio vol 15 no 3 octobre 2007 Ohio State University p 259 285 Freud S Manuscrit E 1894 In La naissance de la psychanalyse Paris PUF 1979 Freud S et J Breuer Anna O tudes sur l hyst rie Paris Hatier 1990 Henke S Shattered Subjects Trauma and Test
162. avons le m me plaisir voler dans les magasins les boutiques de v tements les bijouteries tr s chics nous courons parmi les couloirs les rues des labyrinthes Malgr le titre et Pinscription les tableaux dans la s rie repr sentent peu des sc nes de vol par contre le peintre se plait brosser des sc nes de retrouvailles entre la petite voleuse et son complice soit ils courent l un vers l autre soit ils s treignent De l aveu propre de Monory la voleuse qu il met en sc ne dans cette s rie est sa fille tandis que le complice est le peintre lui m me Il est vident que Monory ajoute plus de tonalit humaine et enjou e dans cette s rie du jeu plut t que d aspect criminel C est pourquoi la majorit des tableaux de cette s rie sont teint s d amour euphorique quoi que le sentiment d inqui tude persiste Cela est particuli rement vident dans la voleuse n 4 que nous choisissions d tudier Ce tableau de Monory est un peu particulier en mati re de montage Si le d coupage de la plupart des tableaux monoriens se fait de fa on nette les diff rentes composantes du montage sont s par es l une de l autre et bien encadr es par des contours nets ici les lignes d marcatives font place une sorte de fondu Les fronti res entre images s dulcorent les images peuvent tre per ues dans leur globalit comme un tout organique Pourtant ce n est pas un espace temps homog
163. bres L uvre se cl t donc sur elle m me elle se renferme sur son dire et plus encore sur son silence et je me prends penser que c est cela mourir devenir un discours au mieux un silence Pouss par amp S Doubrovsky Autobiographiques op cit p 72 Les aventures de T l maque op cit p 253 68 J Lacan cit in M C Thietard Le malheur d aimer ou l origine d une po tique du songe dans Aur lien et les derniers romans d Aragon op cit p 502 S RAVIS Aur lien ou l criture indirecte Champion collection Unichamps Paris 1988 p 40 7 Th tre Roman op cit p 416 237 l ardeur de cette qu te signifiante le romancier et du m me coup le lecteur emport bon gr mal gr dans le tourbillon des signes hisse l infini son texte vers l autre Infini du temps tendu dans l instant suspendu de l agonie sugg r e mais galement infini du sens d multipli et de la voix r p t e dans lesquels l auteur Tantale d sabus mais non pas d sesp r persiste croire en l av nement toujours repouss de l uvre ultime au miroir de laquelle se r soudront toutes les antinomies Dans un univers romanesque ce point boulevers la coexistence d une criture suicidaire et d une volont de vie s entrecroisent sans cesse venant alimenter la dichotomie initiale du roman comme miroir invers dans la mesure tout roman est la fois un suicide
164. c a Eliade explique que le symbolisme du passage exprime une condition sp cifique de l existence humaine une fois n l homme n est pas encore achev il doit na tre une deuxi me fois Pour ce faire il doit se consacrer la marche vers la v rit un genre d itin raire spirituel de p lerinage qui ouvre l acc s la transformation ontologique Le personnage d Adrian dans La gare est dans une impasse transitoire lorsqu il choue Vokzal Cette rupture avec le quotidien d clenche ce qui deviendra le passage entre la mort en vie et la vie libre pour Adrian Le village de Vokzal se pose comme un point de non retour il est impossible de rester Vokzal pour la m me raison qu il est impossible pour l homme de r trograder lorsqu une prise de conscience lui offre de nouvelles possibilit s Vokzal qui signifie gare en russe n est qu un lieu de passage entre deux modes d existence Une gare c est plut t un simple croisement de chemins une tape G 83 il faut partir de Vokzal Par ailleurs ce petit village perdu au milieu de la steppe constitue un arr t dans le temps L attente d Adrian prend l aspect d une eau stagnante et dissimule un grand d ploiement d nergie spirituelle G 199 Milan Kundera crit dans La lenteur qu il existe un lien entre le lenteur et la m moire entre la vitesse et l oubli Cette lenteur cr e par la steppe
165. caricature essaie de repr senter le monde partiellement d chu tel qu il est et du m me coup de produire quelque chose de beau et de plaisant L artiste crivain ou plasticien tente donc l aide de mat riaux divers par le biais de diff rentes formes langagi res de d crire l usage du monde de comprendre les pratiques humaines en s int ressant leur mise en uvre leur fonctionnement en tentant donc de voir l humain dans sa gestualit II me semble que le portrait qui se dessine ici en filigrane n est pas seulement celui 17 Platon La R publique traduit par Robert Baccou GF Flammarion Paris 1966 610 pages page 149 R publique III 398 a 18 Iris Murdoch Le feu et le soleil in L attention romanesque op cit page 363 78 de l artiste pris dans sa g n ralit il s agit me semble t il d un portrait de Wittgenstein qui fut par ailleurs mais certainement pas par hasard le professeur de philosophie d Iris Murdoch L uvre de Murdoch r v le t elle sa part non crite La mont e des circonstances Irr alisme L artiste le philosophe le philosophe artiste l homme de savoir et les conteurs d histoires pr cheurs de bonnes paroles ou oiseaux de mauvais augure tentent donc de nous livrer une description convaincante du grand fourbi afin de le rendre viable afin de le rendre r el afin que nous puissions y vivre sans y mourir de peur sans s y entretuer c
166. ce qu il lui a interdit Pendant que la narratrice visionne l mission de son p re le souvenir de la r ception au sous sol revient Il y a le regard de mon p re pos sur moi mon p re qui ne peut pas me cacher Je revois la pi ce remplie d inconnus et une grosse adolescente qui fait le tour des petits groupes et parle des gens embarrass s de d couvrir que mon p re a une fille comme cela ils n en reviennent pas La grosse adolescente parle elle dit des obsc nit s Je revois cette adolescente j ai honte de son impudeur 97 Ce souvenir de la r ception est l cho du souvenir ant rieur mais il y a l des changements importants Elle n est plus passive dans le sc nario elle agit contre les contraintes que lui impose son p re La narratrice a honte de son action parce que adolescente elle ne comprenait pas vraiment pourquoi elle agissait contre son p re au moins elle n avait pas les raisons qu elle a maintenant comme adulte La narratrice pense son action lorsqu elle visionne la premi re mission de son p re La deuxi me mission pointe de fa on symbolique au processus de d couverte qu entreprend la narratrice Dans cette mission le protagoniste survole le Nord en h licopt re et puis doit faire un atterrissage forc 127 Cela 62 indique que le survol du Nord est important il est essentiel de le voir mais il ne faut pas atterrir l au risque de ne jamais repartir
167. ce se forme en prenant un air de langage et dans lequel se r sout finalement l antinomie fondamentale Cependant si la structure labyrinthique ouvre l infini fertile du sens sans cesse r investi elle sugg re galement la cl ture mortif re d une parole qui finalement ne dialogue plus qu avec son propre cho puisqu elle implique n cessairement le mouvement al atoire de qui appelle l alt rit tout en s en prot geant ancrant ainsi le texte et son auteur dans un processus st rile d auto contemplation La mise mort Le choix du roman comme support passionnel se pare alors d un double halo signifiant celui de l change fertile parce qu altruiste et celui d une fascination sp culaire st rile parce que solipsiste Ainsi port par la pr gnante actualit de ces voix mortes qui se sont tues et captiv par le pouvoir hypnotique de sa propre langue int rieure l auteur oscille dangereusement entre l l vation cr atrice et le suicide narcissique Energie vitale contre tentation mortif re telle semble tre la grande loi de cette litt rature absolutiste pour qui rien n est jamais assez quelque chose et dont l ambivalence fonci re confine la pens e mythique ou du moins collective S articulent alors inlassablement le singulier et l universel d une mythologie structurale o le miroir du texte refl te l infini l homme et ses pulsions le romancier e
168. choisit de se suicider avec une carabine une action bruyante et d vastatrice qui s oppose au n ant qu il combat en lui et refl te l clatement familial U 17 La carence parentale dans L le de la Merci La meilleure d finition de la carence parentale serait le fait pour des parents de d cevoir les attentes conscientes ou inconscientes de leurs enfants Baechler Baechler crit Que faut il entendre par d cevoir Ce peut tre la mort 339 Nous avons d j explor la d ception qu a prouv e Chut cause de la disparition de sa m re nous avons Unless d crit le vide int rieur ressenti par Chut comme tant le n ant Il n avait qu tuer une toute petite chose en lui Le n ant U 59 Sa disparition marque le fils autant que sa mort l aurait fait Nous pouvons m me soutenir que sa disparition avait un effet plus n faste sur l esprit du fils puisqu une mort peut tre accidentelle alors que la disparition constitue un 175 galement not celle de C line apr s le suicide de sa m re et celle qu a v cue Steiner apr s son abandon l orphelinat Dans ces trois cas la d ception est flagrante les parents ont d laiss leurs enfants sans aucune explication sans un mot de r confort M me dans L Ingratitude la violence maternelle fait que la d ception v cue par la fille est manifeste Par contre dans L le de la Merci la carence parentale est beauco
169. cit s de gestion du sujet c est que le trauma est de l ordre de l incompr hensible mais plus encore de l indicible Comme l explique Herman t he ordinary response to atrocities is to banish them from consciousness Certain Il sera souvent employ comme pith te du nom v nement Il signifiera naissance du trauma gr trauma blessure gr genos origine plus sp cifiquement sc ne causant produisant chez l individu un le trauma S Freud cit dans L M Morfaux Vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines Paris Armannd Colin 1980 p 373 4 S Freud Manuscrit E 1894 In La naissance de la psychanalyse Paris PUF 1979 p 82 149 violations of the social compact are too terrible to utter aloud this is the meaning of the word unspeakable D s lors nous sommes port s poser les questions suivantes Quels seraient les facteurs tiologiques de cette incapacit de dire le trauma Quels sont les effets du trauma indicible qui ont t enregistr s dans les tudes scientifiques Prol gom nes du trauma un travail d criture n cessaire Les maintes tudes qu a effectu Robert Jay Lifton propos du trauma historique tel que celui de la Shoah de Hiroshima de la guerre du Vietnam r it rent cette impossibilit de dire le trauma tout comme l a mentionn e Herman Le trauma s apparenterait moins un v nement d une violence physique incommensurable
170. contexte d insuffisance de moyens pour y faire face avec une absence de secours venant de l ext rieur C est pourquoi la proximit conceptuelle du trauma et de l v nement r v le l incapacit profonde du sujet s en distancier s en d faire ou tout simplement dit en parler La crise langagi re octroie au sujet la capacit de saisir le sens de l v nement la v rit de l v nement traumatog ne D s lors l int r t de la th orie psychanalytique se d voile dans la mani re dont elle instaure chez le sujet le travail de possession de r appropriation de cet v nement a priori inaccessible dans et par le langage Car si la psychanalyse s int resse moins la validit historique de l v nement traumatique elle aide instaurer chez le sujet la capacit de dire sa v rit de t moigner d un v nement qui lui tait l origine inatteignable fuyant car v cu de trop proche It was the very circumstance of being inside the event that made unthinkable the very notion that a witness could exist The historical imperative to bear witness could essentially not be met during the actual occurrence Dori Laub justifie l an antissement du dicible par la distance qui s pare le sujet de l v nement v cu Dire la blessure du trauma dans l imm diatet de son exp rience est irr m diablement vou l chec une impossibilit langagi re car l v nement ex
171. contraintes logiques que toute s rie d v nements ordonn e en forme de r cit doit respecter sous peine d tre inintelligible Cette diff rence fondamentale d approche entre l tude de Propp et la n tre r v le deux modalit s particuli res D une part la forme de notre travail ne s attache pas une comparaison de plusieurs textes d un genre voisin mais une tude de s quences internes et continues un seul et m me r cit D autre part la nature m me de Truismes s apparente au fantastique dont la d finition donn e par Todorov le fantastique c est l h sitation prouv e par un tre qui ne conna t que les lois naturelles face un v nement en apparence surnaturel modifie notre lecture du r cit d autant que l h sitation est la premi re condition du fantastique On peut toutefois dire que dans Truismes l h sitation se d polarise relativement vite d s que la narratrice 6 Voir l annexe en fin de document et les deux tableaux relatifs l organisation du roman 7 Bremond Claude Communications L analyse structurale du r cit p 66 Todorov Tzvetan Introduction la litt rature fantastique p 29 Todorov Tzvetan op cit p 36 245 s est effectivement chang e en truie et que h sitation ou pas la nature fantastique du r cit perdure D s lors il est possible d identifier partir de notre d finition quatre fonctions qui se r p
172. ctions g nitrices Or Dieudonn ayant l amertume habituelle des observateurs de m urs Pouillart Willems 27 transpose ces croyances en faisant parler l un de ses personnages le v t rinaire Capron en ces termes les femelles qui ont des aptitudes remarquables pour le sport sont bien moins dou es pour la maternit 101 Pour montrer l absurdit de tels propos l auteur tourne en d rision cette controverse en choisissant Zizi Tricart comme nom romanesque Comment ne pas penser en lisant cette fiction 5 Il y a une rubrique quotidienne L uvre sportive o l on donne les principaux r sultats sportifs et compte rendus des grandes manifestations 17 populaire destin e un public masculin une connotation sexiste dont la tonalit est incontestablement ironique On retrouve bien ici l humour d un intellectuel de gauche qui crivait galement dans La Vie Parisienne Cet crivain engag politiquement qui plus est docteur en droit prend le contre pied d une telle opinion conservatrice pour mieux la bousculer Son roman va donc prendre revers cette politique eug niste en vantant les qualit s physiques exceptionnelles de la future maman Si les personnages qu il propose dans ses romans ne sont pas des h ros que ce soit dans La Vedette 1920 Bordeaux Paris 1923 B bert ou la vie rat e 1929 celui de Zizi Tricart n en demeure pas moins une championne h ro que
173. culier lorsque les s urs commencent accepter la mort de leur fr re Les trois s urs succombent une une la d pression et se heurtent la question imparable comment se permettre le bonheur quand l autre n est lus l d l aut hoisi 1 rt D abord c est Unl i plus l quand l autre a choisi la mort D abord c est Unless qui se prive de bonheur Sherpa dit que Chut est bien mieux l o il est et que j ai droit au bonheur je me roule en boule sur le tapis et j entends un silence de mort c t du d sir et dedans U 61 62 Il est clair que la d pression d Unless s aggrave progressivement apr s la mort de Chut Elle se sent refroidie et repousse son amant se croyant incapable de ce genre de rapprochement Pourtant elle souligne que pour elle le d sespoir est temporaire Elle reconna t la nature contradictoire de la vie et l accepte L atmosph re est pas endurable Mais vous savez j aime la vie U 75 Lorsque la d pression d Unless s installe le lecteur s attend ce que le suicide resurgisse comme th me principal du roman Bien qu il rejaillisse syst matiquement le texte le subvertit travers son style la fois ludique et fragmentaire Notons l allusion faite la noyade dans le passage suivant J ai crit JE T AIME au feutre sur le mur face au lit Puis je suis all e me noyer Dans mon bain Puis devant la t l U 117 Cette sub
174. d autres particularit s de nos tentatives cognitives En effet comme nous l avons d j voqu ult rieurement au del de la pratique il n y a que d autres pratiques que nous tentons de r inventer et de ce fait la relativit prend un peu la forme d une circularit En un sens l hypoth se pos e par Borges dans les Ruines circulaires laquelle pr sente un homme qui serait le r ve d un autre homme qui serait le r ve d un tiers encore etc pr sente bien les caract res de l irr alisme au sens o elle n est ni r aliste ni id aliste mais n est certainement pas d pourvue d un certain sens de l observance et d acuit L emploi du terme observance n est pas ici une n gligence de ma part il ne s agit pas d un vague cousin du mot observation dont j aurais us pour varier et divertir Non je l emploie en tout tat de cause c est dire dans l acceptation de son contexte religieux En effet l observance est l accord de son comportement et de ses pratiques des r gles religieuses En somme il s agit bien de r gler son usage du monde sur le respect et l habitus d une certaine ritualit entendue ici dans sa force r p titive et sa part de mysticisme Il me semble que Borges r ussit cela donner voir la ritualit des comportements humains Il crit d ailleurs dans Tl n Uqbar Orbis Tertius autre nouvelle Le fait que toute philosophie soit priori un jeu
175. d de sa nouvelle identit FB 165 C est que Steiner se sait condamn la seconde mort l enfer donc et gr ce la transfiguration il a droit la r surrection Toutes les r f rences Jonas dans le ventre de la baleine sont ainsi troitement li es l obsession du Jugement dernier de Steiner Pour Steiner les hommes n ont pas acc s au paradis mais plut t une descente aux enfers telle que repr sent e dans Le 0 Ibid Pont Le dictionnaire des symboles p 778 2 La Bible La Transfiguration Marc 9 p 1490 116 jugement dernier de Bosch C est d ailleurs dans le coin du panneau droit du triptyque repr sentant l enfer qu il reconna t son p re aval par le poisson FB 185 Mais le symbolisme de Jonas apporte une lueur d espoir pour les justes puisqu on y retrouve la fois la descente aux enfers et la r surrection En effet dans le r cit de La Bible Jonas est puni par Dieu et ne peut pas fuir Cave cave Deus videt Il demeure dans les entrailles du poisson trois jours et trois nuits jusqu ce que le Seigneur le d livre Voil ce qui hante Steiner Il souhaite la r demption de son me L entr e dans la baleine c est l entr e dans l obscurit l interm diaire entre deux tats d existence la mort initiatique la sortie c est la r surrection La mort rendit ses morts la mort et l Had s rendaient leurs morts et chacun fut
176. d histoire Tout en continuant collaborer dans des revues fascistes il crit des romans et des nouvelles d non ant par allusions la politique fasciste Refusant l instar de Guilloux de se rallier une cause id ologique condamnant dans l imm diat apr s guerre la conversion soudaine des fascistes d hier en antifascistes Brancati a toujours fait preuve de la plus grande m fiance vis vis des communistes Ces quelques indications biographiques disent combien pour Brancati comme pour Guilloux l individualisme et le recul face l Histoire sont des imp ratifs thiques Dans cette perspective la volont de retracer des parcours individuels plut t que le destin d un peuple ou d une nation traduit une profonde m fiance vis vis des instincts de masse et des folies meurtri res collectives Conclusion L tude compar e du Sang noir et du Bel Antonio montre toute la complexit de la mise en sc ne de l Histoire dans le roman En privil giant l ambigu t et les contradictions Guilloux et Brancati 141 semblent inviter leur lecteur se d fier de tout jugement h tif sur un pisode historique En d pit de positions id ologiques radicalement oppos es les deux crivains peuvent tre rapproch s par la pr f rence qu ils accordent l exp rience individuelle sur le drame collectif travers la d route singuli re d un personnage marginal et isol ils parviennent saisir et r v
177. d une poque donn e Notre essai se propose d tudier la mise en sc ne singuli re et ambigu de l Histoire telle qu elle se d ploie dans les romans de Guilloux et de Brancati Apr s un bref r sum du Sang noir et du Bel Antonio nous t cherons de montrer en quoi Cripure et Antonio Magnano les protagonistes de ces r cits peuvent tre consid r s comme des h ros en crise Enfin nous nous int resserons la question complexe de l articulation entre la trag die individuelle et la destin e collective Les antih ros de Guilloux et de Brancati se pr sentent comme des tres prisonniers d un tourment intime pris dans une trag die priv e au moment o se nouent le drame d un peuple et la faillite de l humanit En d cidant de conf rer une position centrale des personnages demeur s l cart des secousses de l Histoire ces auteurs s loignent r solument de la tradition du roman historique et proposent un nouveau mode d inscription de l Histoire dans la fiction Il s agit alors de comprendre comment en retra ant une trajectoire discontinue et singuli re Guilloux et Brancati parviennent saisir une r alit collective et dans le m me temps d velopper une r flexion critique sur le rapport de l individu l Histoire Publi en 1935 Le Sang noir retrace la journ e d errance d un professeur de philosophie travers les rues de Saint Brieuc en l ann e 19174 Humili
178. de moi l id e de limiter l usage de la fiction aux seules activit s artistiques Non il s agit bien de montrer que lorsque l on veut donner voir dans un discours philosophique le fait que la construction de la r alit dans toute forme de vie passe par des pratiques ritualis es le po tique s en m le toujours un peu C est pour ses raisons que Wittgenstein est souvent qualifi d obscur d trange voire de mystique Comme l crit Claude Savary C est au moyen d interrogations continuelles qu une mani re po tique de faire sert de matrice au discours philosophique Ce rappel r flexif qui recadre plus largement le propos est important car c est bien la conception du r el qui est en jeu et pas seulement la conception artistique m me si les deux sont videmment li es En effet parler d une pratique po tique uniquement en termes d activit artistique peut tr s bien Christian Prigent Denis Roche Po tes d aujourd hui Seghers Paris 1977 189 pages page 69 Denis Roche Ellipse et laps Collection photo cin ma Maeght diteur Paris 1991 167 pages page 69 7 Claude Savary Wittgenstein De la philosophie comme th rapie linguistique de la po sie Revue canadienne d esth tique volume 10 automne 2004 revue lectronique de la soci t canadienne d esth tique 83 s accommoder d une conception r aliste ou id aliste du r el Par contre reconna tre la fict
179. de nos couleurs lui si noir et moi si rose maintenant le mettait de bel app tit Il fallait toujours qu on se mette quatre pattes devant la glace et qu on pousse des cris d animaux Les hommes sont tout de m me tranges p 44 251 Le texte peut passer all grement d une action Le marabout m a donn sa carte un avis personnel Nous avons sympathis un retour sur la relation de la narratrice avec le marabout finalement une g n ralisation pleine d un humour pour le moins d cal Et ceci sans un seul mot de liaison entre les phrases de cet extrait Une bonne partie du r cit est de m me facture et les rencontres individuelles qui s encha nent semblent galement soumises cette irr sistible libert narrative Elles y apportent toutefois les dispositifs d volution de la narration le directeur de la cha ne p 11 offre la narratrice un emploi donc une position sociale la rencontre avec Honor p 12 mime une vie de couple pour le moins tourment e la rencontre avec la dame chaman p 20 veille les interrogations de la narratrice le marabout africain qui fait suite la dame chaman d passe l interrogation en tentant de trouver un rem de ses transformations mais il fait plus que cela puisqu il stimule la m tamorphose en pin otant la narratrice laquelle se retrouve avec un bleu qui voluera en mamelle la dermatologue ap
180. de sens lorsque par leur moyen en passant par elles il les a surmont es Il doit pour ainsi dire jeter l chelle apr s y tre mont Il faut d passer ces propositions pour voir correctement le monde Dans la proposition 6 54 Wittgenstein renvoie dos dos les r alistes dans son usage philosophique traditionnelle c est dire ceux qui pensent que la philosophie donne acc s des v rit s sur le monde et les id alistes via le terme m taphysique qui pensent galement que l on peut atteindre la v rit par des voies sup rieures En somme Wittgenstein ne veut emprunter ni la voie terrestre ni la voie c leste il dessine une troisi me voie que j ai nomm e irr aliste et que Diamond nomme nouveau r alisme Pourtant le philosophe n emprunte pas mais dessine esquisse laisse imaginer et c est en ce sens que ses propositions sont avant tout celles du possible Il me semble justement que la lecture jumel e des propositions 6 53 et 6 54 ne dit litt ralement pas autre chose que cela j ai dessin un monde parfait regardez le et clatez de rire car celui ci est probable comme les autres c est un bon roman n est ce pas appr hendez le comme une diff rence part enti re un aspect parmi d autres Le nouveau r aliste p che 4 Cora Diamond L esprit r aliste Wittgenstein la philosophie et l esprit traduit de l anglais par Emmanuel Halais et Jean Yves Mondon Science histoire
181. dialectique une philosophie des Als Ob a contribu les multiplier Les syst mes incroyables abondent mais ils ont une architecture agr able ou sont de type sensationnel Les m taphysiciens de Tl n ne cherchent pas la v rit ni m me la vraisemblance ils cherchent l tonnement Ils jugent que la m taphysique est une branche de la litt rature fantastique Ils savent qu un syst me n est pas autre chose que la subordination de tous les aspects de l univers l un quelconque d entre eux D une mani re po tique l crivain nous donne voir la ritualit l uvre dans nos pratiques y compris philosophiques Ces philosophes ci ont cess d tre fascin s par leur propre image Jorge Luis Borges Tl n Ugbar Orbis Tertius in Fictions traduit de l espagnol par P Verdevoye Folio Gallimard Paris 1983 183 pages pages 11 31 page 20 93 Wittgenstein pourrait tre l un de ces dr les de m taphysiciens dont le parcours refl te un peu le relativisme des sages de Tl n d un Tractatus cr ateur d un monde parfait des Recherches qui aiment se perdre et s garer dans les multitudes de la diversit des usages Dans le film Wittgenstein de Derek Jarman Keynes raconte sa propre histoire au philosophe mourant en voquant ce parcours fantastique Il tait une fois un jeune homme qui r va de r duire le monde de la pure logique Et comme c tait un jeune homme intell
182. donner sans se donner Lyotard op cit p 57 58 272 Instant sublime geste ternis Op ra glac n 9 1975 La s rie op ra glac a pour but de repr senter la vie humaine saisie sur le vif dans ses moments les plus dramatiques Tous les tableaux dans la s rie d crit un instant arr t dans son plein d veloppement c est souvent le paroxysme de l volution de l action qui est mis en image Ces instants du paroxysme contrairement ce que Lessing croyait envo tent le spectateur et le mettent dans un tat d extase dans lequel justement l imagination s arr te Le tableau n 9 dans la m me s rie saisit trois moments diff rents reli s par le m me geste Il s agit du geste sublime d ploy dans sa dimension quelque peu path tique L op ra glac en l occurrence c est le sentiment sublime instantanis et ext rioris par le corps humain En revanche le geste arr t dans son plein d ploiement est en quelque sorte mus ifi par l instant sublime qui lui attribue une signification en le d livrant de son caract re ph m re dans l encha nement de l action Les trois instants se d roulent dans des espace temps diff rents En haut droite dans un rectangle de taille moyenne est repr sent un morceau de la fa ade d un monument historique Le morceau est centr sur une statue d un groupe compos par une femme nue entour e par d autres personnes aussi nues
183. e critique consacr e Mallarm s est vue prosp rer au point de faire au cours du XX si cle d un crivain relativement incompris en son temps l une des figures majeures de notre modernit C est en tout cas le point de vue que donne Hugo Friedrich en 1956 dans son c l bre ouvrage Structures de la po sie moderne Mais si les commentaires se sont multipli s si l influence du po te sur la litt rature contemporaine n est plus d montrer n est ce pas avant tout pour sa proverbiale obscurit que Mallarm fascina tant le si cle dernier H Friedrich Structures de la po sie moderne Paris Librairie G n rale Fran aise Le Livre de Poche 1999 33 L herm tisme de cette uvre est la fois redout et exalt d clare Hugo Friedrich D s lors la volont d clairer l obscurit mallarm enne est devenue un lieu commun de la critique litt raire Paul B nichou ira jusqu en faire avec son ouvrage Selon Mallarm le couronnement de toute une uvre Il ne s agira pas dans les pages qui suivent de trouver une nouvelle explication mais d accepter l obscurit en tant que telle L uvre de Mallarm marque un tournant dans la po sie occidentale justement parce que la premi re elle ose remettre en question la relation qu entretient dans le texte le langage avec le sens Il faudra donc consid rer l herm tisme non plus comme faisant ob
184. e partie que ce soit de ma nouvelle existence eux qui m ont 184 abandonn Et s ils avaient fait expr s de me laisser l en sachant que l id e migrerait en moi t t ou tard FB 86 Nous constatons qu il ne s agit pas ici de la transmission h r ditaire d une maladie mais d une affinit Steiner bute toujours contre l id e que parce qu il a t abandonn il est inf rieur Selon lui les autres se moquai ent du fait qu il tait un tranger un errant affol parcourant le monde On riait de sa b tardise FB 106 L absence de parents a cr un vide irr m diable dans sa vie Dans ce passage il devient clair que m me lorsqu il s agit de sa plus grande d couverte c est dire de son r le comme le personnage central le Christ dans les peintures de Bosch ses pens es retournent toujours ses parents il ne les a jamais connus n anmoins il leur attribue un r le dans sa vie pr sente En effet puisqu il ram ne toujours le pass au pr sent les d ceptions qu il a v cues pendant son enfance finissent par le d finir il est orphelin abandonn et d pourvu de l identit concr te qui provient d une histoire familiale Il est n cessaire de commenter ici la signification symbolique de sa vision de lui m me comme tant le Christ de Bosch Le Christ est le Messie le fils de Dieu Or le Christ est l inverse de l orphelin Il repr sente ce que Steiner a toujours convoit
185. e Mardouk le plus jeune des dieux a eu raison de Tiamat m re originelle du d sordre et responsable du chaos dans le drame de la cr ation Mardouk aurait fait triompher l ordre sur le chaos par le meurtre Cependant la question que nous n avons pas encore soulev e jusqu pr sent est relative aux raisons qui ont men au chaos La r ponse se trouve notre avis dans la th orie girardienne sur le mim tisme et la violence r ciproque Selon le po me pique de Babylone Tiamat engendra des monstres pour venger le meurtre de son poux le vieux dieu Apsu La violence r ciproque de Tiamat atteste d une violence ant rieure au chaos donc ant rieure l ordre et que l ordre fut conquis lui aussi par la violence cr ant de la sorte la fameuse vengeance en cha ne que per oit Ren Girard comme paroxysme et perfection de la mim sis Rien de plus troublant que de constater que la violence est fondatrice D autant plus que ces v nements furent suivis de la naissance de la figure du Roi qui avait pour mission de faire r gner la justice Mais pour que cela soit possible le roi devait reproduire ce m me geste meurtrier par lequel l ordre fut conquis afin de pr server le royaume de Dieu Les dirigeants politiques d un monde dit moderne reproduiraient ils ce m me geste ancestral 5 Ric ur Paul Finitude et culpabilit 2 La symbolique du mal Paris Aubier 1963 14 En s appuyant sur une tr
186. e Sang noir Bien videmment Cripure n est pas le porte parole des id es de son auteur cette poque elles s expriment plut t par l interm diaire du jeune Lucien Bourcier qui la fin du roman s appr te partir en Russie pour soutenir la cause des communistes Toutefois la position de d calage et de marginalit dans laquelle se trouve Cripure proc de bien pour Guilloux d un imp ratif thique de l exigence de n tre inf od aucun parti cet gard la pr f rence accord e aux trag dies priv es r v le combien pour le romancier breton se tenir l cart des mouvements de foule et des r flexes communautaires est primordial De son c t Brancati a t profond ment marqu par l enseignement d un autre crivain sicilien G A Borgese Cf Yves Pri L ombre de Palante art cit Cf aussi Henri Godard Louis Guilloux romancier de la condition humaine op cit consulter en particulier le chapitre intitul Note Palante Lequier Cripure et Louis Guilloux Souvenirs sur Georges Palante op cit 25 Sur les rapports de Brancati avec Borgese on pourra lire avec profit Francesco Spera Vitaliano Brancati op cit Vanna Gazzola Stacchini La narrativa di Vitaliano Brancati Firenze Leo S Olschki 1970 Sarah Zappula Muscar Il pi giusto elogio Brancati tra Borgese e Sciascia in Annamaria Andreoli dir Dalla Sicilia all Europa l Italia di
187. e au dernier plan On peut lire cet alignement diagonal comme une concr tisation du temps qui immerge l espace o se trouve l assassin le temps qui s tire en une dur e l homme est la fois en proie l assassin qui le poursuit et la mort qui l attend De la poursuite la mort il n y a qu un instant l instant de l assassinat le tir de l arme feu Pourtant on sent l tirement de cet instant c est donc un instant qui regroupe un flux du temps un instant qui se r p te l infini c est dire un instant durable Le contraste entre l instant de l assassin et l instant de l assassin est renforc par la configuration de l espace Le choix de l emplacement des deux personnages d note une intention d ext rioriser l exp rience du temps par la repr sentation de l espace L assassin se trouve dans la rue donc l ext rieur La femme et l homme qui la retient remplissent le premier plan l espace est encombr par la pr sence des deux personnages Comme nous l avons indiqu plus haut le temps que la femme assassin est en train de vivre est un instant explosif qui r cuse la dur e Ainsi c est un cha non qui ne se contente plus de sa finitude et veut sortir de la cha ne interminable dont il fait partie Un instant qui veut sortir de la dur e c est un instant qui s ext riorise et se met en avant En opposition l assassin se place l
188. e connaissance Mais ils le disent au nom de conceptions radicalement diff rentes de la v rit pour le premier le vague est un trait de notre connaissance parce que la r alit ne peut pas elle m me tre vague alors que pour le second le vague est un trait de notre connaissance parce qu il ne peut tre un trait d autre chose car aucune r alit transcendante notre connaissance n existe A d faut de la possibilit m me d une qualification positive les silences de notre vocabulaire sont parfois aussi loquents que sa dilatation il me faut donc m avouer moi m me mon irr alisme latent Si je manque de r alisme et d id alisme je ne veux pas manquer de courage Cette attitude thique est par ailleurs inspir e par le philosophe autrichien dont Aldo G Gargani rapporte des paroles en tout point po tiques Le courage et non le talent m me pas l inspiration est le grain de moutarde qui cro t jusqu devenir un grand arbre Si la qualification soustractive de cette Pascal Engel La norme du vrai Philosophie de la logique Nrf essais Gallimard Paris 1989 472 pages page 273 2 Aldo G Gargani Ethique psychanalyse et criture philosophique traduit de l anglais par Serge Claeys in Wittgenstein et la critique du monde moderne essais La lettre vol e Bruxelles 1996 125 Pages pages 63 82 page 68 80 posture se confond donc avec l irr alisme un adjectif convenablement p
189. e d crire les pratiques de sa Cacanie Il s agit de s exercer voir l usage du monde et il est int ressant de noter que Nicolas Bouvier dans son ouvrage du m me titre L usage du monde voque cette absence de qualit s dans sa positivit soustractive posture irr aliste de l infatigable curieux Comme une eau le monde vous traverse et pour un temps vous pr te ses couleurs Puis se retire et vous replace devant ce vide qu on porte en soi devant cette insuffisance centrale de l me qu il faut bien apprendre c toyer combattre et qui paradoxalement est peut tre notre moteur le plus s r Ces citations de Musil et de Bouvier ne manquent de po sie et il est notable que dans cette possibilit particuli re de voir et de d crire l acte po tique est bien souvent le chemin le plus praticable Le po tique rend possible cette description des usages D ailleurs Wittgenstein tout en souhaitant faire de la philosophie une description des pratiques humaines d clarait que celle ci devrait s crire comme de la po sie Ce n est donc pas n cessairement par erreur ou par hasard que Denis Roche po te et photographe a rendu hommage au philosophe autrichien dans la composition d images photographiques mettant en sc ne un appareil photo images que Jj voquerai plus en d tails ult rieurement On retrouve dans la pratique po tique de Denis Roche cette m me n gativit l uvre cette tierce po
190. e d r glement qui affecterait jusque dans la lecture notre perception de l histoire cont e Un bel exemple de cette perception alt r e dans la narration et de notre lecture de cette narration se rencontre dans le passage suivant 7 Grevisse Maurice Le Bon Usage Grammaire fran aise section 671 c p 1025 247 j avais un peu de mal me reconna tre ce que j ai cru voir d abord c est un cochon habill dans cette belle robe rouge un cochon femelle en quelque sorte une truie si vous voulez Ensuite j ai cru me rendre compte que ce n tait qu une illusion d optique que cette impression de groin et d oreilles un peu pro minentes et de petits yeux et tout a n tait due qu l atmosph re campagnarde qui se d gageait de l affiche et surtout ces kilos en trop que j avais p 77 Nous y retrouvons d ailleurs l h sitation j ai cru voir j ai cru me rendre compte que ce n tait qu une illusion d optique impression ch re Todorov notre trait stylistique passage du je au a et de ses variantes m diateur entre le r cit narr et le r cit lu Au del de cette section six le m me trait stylistique perdure mais pour rester dans un registre de langue adopt depuis le d but du r cit et mimant une narration proche de l oral Une fois acquise l vidence de cette transformation pour la narratrice et pour le lecteur ouvre une double direction qui traduit d ailleurs de
191. e du temps et de l espace Autrement dit comment faire correspondre l espace temps repr sent dans un m dium qui a ses limites repr sentatives l espace temps v cu comme exp rience Nous choisissons pour cette r flexion le cas du montage dans la peinture Contrairement ce qui se passe dans l image temporalis e comme le cin ma o le montage vise le plus souvent donner l illusion de la continuit par le code m tonymique de l articulation des plans Fran ois Lyotard L assassinat de l exp rience par la peinture Monory Le Castor Astral 1984 p 7 2 Jacques Aumont L image Nathan 1990 p 79 Pierre Francastel Peinture et soci t naissance et destruction d un espace plastique de la renaissance au cubisme Deno l Gonther 1977 p 39 262 par exemple la succession des instants chronologiques et la pr sentation successive des fragments d espaces appartenant l espace homog ne de la sc ne di g tique le montage dans la peinture brise cette illusion en juxtaposant les diff rents espace temps dans le m me cadre Le montage dans la peinture produit un effet de choc qui pourrait troubler la tranquillit du spectateur dans sa contemplation d une image qui devrait autrement tre saisie dans sa globalit Devant le montage comme discours nous nous confrontons une exp rience de l espace temps diff rente de celle que nous avons dans notre perception normale Notre int
192. e le tableau Cette derni re invite le spectateur la contemplation devant elle il ne peut s abandonner ses associations d id es Walter Benjamin L ouvre d art l poque de sa reproductibilit technique derni re version de 1939 dans uvres II Folio Essais trad de l allemand par Maurice de Gandillac Rainer Rochlitz et Pierre Rusch Gallimard 2000 p 269 316 263 Un instant deux temporalit s Couleur n 1 2007 Le tableau est compos de deux parties la partie gauche est le fac simil d une affiche d un film intitul gun crazy Elle repr sente une femme en train de tirer sur une cible que l on ne peut pas identifier faute de rep re hors champ Un homme c t d elle essaie de l emp cher avec toute sa force Dans la partie droite un homme assis dans un restaurant d sert a l air en train de m diter Si l on relie ces deux images mont es c te c te par une sorte de logique di g tique on peut en d duire une histoire d assassinat la femme gauche est prise dans une folie de tuer l homme droite attend sa mort Ces deux images sont raccord es par le pistolet de la femme tendu justement sur la m me ligne du bord des fen tres du restaurant On peut dire que c est le m me instant que les personnages sont en train de vivre l instant de l assassinat Or le m me instant signifie deux temporalit s tout fait diff rentes ou plut t les deux p
193. e manifestait sous forme de souvenirs incompr hensibles involontairement r p t s Yael Danieli speaks of the importance of reclaiming the patient s earlier history in order to re create the flow of the patient s life and restore a sense of continuity with the past Cr er le 7 C Caruth Unclaimed Experience p 4 1 B van der Kolk et O van der Hart The Intrusive Past The Flexibility of Memory and the Engraving of Trauma in C Caruth Trauma Explorations in Memory 1995 p 158 182 ici p 176 7 Y Danieli Treating Survivors and Children of Survivors of the Nazi Holocaust in Post Traumatic Therapy ed F Ochberg p 286 cit dans J Herman Trauma and Recovery p 176 156 traumatoscript c est crire le d sir de saisir l incompr hensible Le paradoxe qui surgit est alors celui d un script qui na t de l chec de la parole d une mutit envahissante qui fige le corpus m moriel du sujet dans un lieu hors de son histoire hors de sa compr hension existentielle et qui par la transformation scripturale de celui ci suture la d chirure traumatique inaugurale et r tablit un sens au parcours existentiel du sujet En d autres mots the emphasis on traumatic textualities in this sense on texts whose significance lies in part in their cognitive indigestibility has helped to hold open an important area of interdisciplinary exchange Ainsi le plus important est de d
194. e telle id e permettant de voir en Ibid p 132 SP B nichou Selon Mallarm Paris Gallimard 1995 34 l uvre de Mallarm non plus seulement une po tique de l criture mais bien une po tique de la lecture Ce rapprochement entre le th me du labyrinthe et l uvre de Mallarm n est nullement fortuit En amateur clair de litt rature celui ci aura maintes fois rencontr celui l figure centrale de ses lectures privil gi es des Mille et une Nuits aux romans gothiques et notamment le Vathek de Beckford qu il pr fa a en passant bien entendu par la mythologie grecque Cette figure du labyrinthe fascinante et qu il serait vain de r duire un simple jeu on tudiera les diff rentes dimensions moins ludiques que spirituelles ou philosophiques du labyrinthe se retrouve donc nouveau centrale dans les textes de Mallarm On verra ainsi en un premier temps en quoi le po me mallarm en parce qu il est ferm sur lui m me et parce qu il multiplie ses possibilit s de lectures s apparente un jeu labyrinthique Je m attarderai ensuite sur la question du langage j essaierai de d montrer comment Mallarm dans sa po sie tisse un vaste r seau dans lequel les mots sont en constant jeu de miroir Puis nous verrons en quoi le processus labyrinthique qui tend vers le sens d voil du texte peut encore se rattacher la tradition de l nigme en po sie Pourquoi
195. ective telles sont les voies cens es mener la d mocratie dans un monde dit moderne Telles sont les raisons qui poussent Freud se r volter et manifester son indignation face ce pr cepte biblique D o son interrogation Comment aimer comme moi m me celui qui me veut du mal et qui convoite ce qui m appartient Le processus de diabolisation est irr versiblement enclench Pour l homme le prochain n est pas seulement un auxiliaire et un objet sexuel possible mais aussi un objet de tentation L homme est en effet tent de satisfaire son besoin d agression aux d pens de son prochain d exploiter son travail sans d dommagement de l utiliser sexuellement sans son consentement de s approprier ses biens de l humilier de lui infliger des souffrances de le martyriser et de le tuer C est ainsi aussi r ducteur que cela puisse para tre que One for the Road de Pinter apporterait confirmation de la r gressivit girardienne selon laquelle la culture humaine serait forg e dans le sang et la violence depuis la Cr ation Pinter cr e pour d noncer une vision manich enne du monde et de sa complexit des personnages qui r actualisent consciemment ou inconsciemment des m canismes immunitaires et auto d fensifs sous pr texte de pr server l indemnit et la stabilit de la communaut par l radication de la r incarnation du chaos originel Au nom de la r conciliation et du sa
196. el le sujet esp re sortir de l an antissement psychosocial caus par le trauma mais la r criture semble plus apte permettre au sujet de retrouver la dimension de sa propre histoire et par ce fait m me se r int grer dans l Histoire c est dire se valider valider son existence son historicit Le deuxi me chapitre de notre m moire offrira une analyse de la premi re trace scripturale du trauma de l avortement telle qu elle se montre dans Les armoires vides Il s agira par exemple de voir dans quelle mesure les traces psychonarratives s organisent autour d une narratrice sujet Denise Lesur qui est psychiquement et socialement d vast e par le trauma indicible qu elle relate Nous nous r f rerons deux textes de G rard Genette soit Figures III et Nouveau discours du r cit afin d analyser la fa on dont se structurent entre autres l ordre multiplicit des analepses et des prolepses la vitesse variations multiples du tempo narratif la fr quence l importance de l it ratif le r cit de pens es effervescence de niveaux discursifs enchev tr s Notre objectif sera de montrer comment la forme que prend l criture performe l expulsion de l avortement et par ce fait m me cherche produire une liquidation de la charge traumatique De plus les mat riaux n cessaires la configuration psycho narrative du sujet seront puis s dans les diff rents textes du premier chapitre D
197. elle difficult de se souvenir de concentration En ce d but d histoire l humour cynique qui se d gage d embl e s oriente vers le lecteur le lecteur ch meur en particulier p 10 Et pour cl turer son r cit la narratrice d clare qu elle crit d s que la s ve tombe en elle et que sous la lumi re froide elle reli t s on cahier p 158 L humanit de la narratrice est donc directement conditionn e l acte d criture et celui de sa relecture Car c est l que le lecteur invoqu plus haut se distance du lecteur r el Notre lecture du r cit vient apr s les lectures successives de la narratrice La distance cet instant pr cis ne fait plus aucun de doute sur cette mise en abyme de l crivain et de son acte d criture indissociable d une relecture laquelle nous ne pouvons participer qu posteriori Cons quence directe de cet effet narratif le lecteur du d but celui qui aurait pu nous faire sourire a subi les cons quences d une volution 249 laquelle il a t soumis volontairement ou pas cela reste d terminer tout au cours du r cit En marge de ces trois mouvements existe galement un effet de contamination de la transformation En arri re plan les lieux comme la parfumerie les squares l asile subissent des changements parfois li s la narratrice et sa m tamorphose progressive parfois parall les ce qu elle vit l identique des bouleversem
198. elli Giovanni Vitaliano Brancati tra fascismo e gallismo Manduria Bari Roma Piero Lacaita 1989 Mosse George L L image de l homme L invention de la virilit moderne The Image of Man The Creation of Modern 145 Masculinity traduction de Mich le Hechter Paris Abbeville 1997 Onfray Michel Physiologie de Georges Palante Pour un nietzsch isme de gauche Paris Grasset 2002 Pelletier Yannick d Le Mal absolu Actes du colloque Louis Guilloux et la guerre Saint Brieuc ditions Ville de Saint Brieuc 1995 Des t n bres l espoir Essai sur l uvre litt raire de Louis Guilloux Ar Releg Kerhuon An Here 1999 Pri Yves L ombre de Palante in Jean Claude Xuerebe dir Ecriture autobiographique et carnets Albert Camus Jean Grenier Louis Guilloux Rencontres m diterran ennes B d e Folle Avoine 2001 Roger Philippe rude cole criture et id ologie chez Louis Guilloux in Jean Louis Jacob dir Louis Guilloux Actes du Colloque de Cerisy sur Louis Guilloux et les crivains anti fascistes Quimper Calligrammes 1986 Sarrabayrouse Alain D ni des valeurs valeur du d ni dans Le Bel Antonio de Vitaliano Brancati Grenoble ELLUG 2006 Sciascia Leonardo Del dormire con un solo occhio in Brancati Vitaliano Opere 1932 1946 Milano Bompiani 1992 Leonardo La corda pazza Scrittori e cose della Sicilia Torino
199. ement pr sident aux relations Dissimul es sous le masque de l hypocrisie et de la perversion on ne saurait ais ment distinguer personne et persona expression et repr sentation Et puisque le personnage est la personne et le masque est le vrai tout sentiment semble n cessairement devoir relever du travestissement L amour s appr hende donc comme un infini spectacle dont les sc nes se d roulent au c ur m me de l homme devant lui malgr lui de l effervescence des coulisses l euphorie des planches de l entr e en sc ne au tomb de rideau A la fois acteurs et spectateurs les partenaires s ab ment dans le jeu troublant des passions dont m me les aveux s assimilent des r pliques infiniment r p t es Donnez moi votre main pour venir saluer Ma ch re cet absent public que l un pour l autre Encore une fois nous f mes La repr sentation repose alors non seulement sur les attitudes mais galement sur les ruses d un langage aux mille facettes puisqu aux mots menteurs se joignent parfois les mensonges du corps Dans le cadre du duel amoureux les espaces de la plus intime proximit se transmuent en de v ritables seuils symboliques l or e desquels 12 J Rousset La litt rature de l ge baroque en France Circ et le Paon Jos Corti 1954 cit in M C Thietard Le malheur d aimer ou l origine d une po tique du songe dans Aur lien et les derniers rom
200. en un d membrement grotesque et st rile tu prends la t te et je garde le reste qui ne d voile qu un toc dichotomique que l on emploie tout va d faut d tre en mesure de d ployer une pens e Ainsi il n y a peut tre que dans cette mani re po tique que l on retrouve un peu la possibilit d une description harmonieuse de l homme en son contexte Comme l crit Edouard Glissant dans son intense densit La po sie est le seul r cit du monde et elle discerne ces pr sences et elle rajoute aux paysages et elle r v le et relie les diversit s et elle devine et nomme ces diff rences et elle ouvre tellement longuement sur nos consciences et elle ravive nos intuitions Au long de ce temps qui nous concerne et passe pour nous elle d signe et elle accomplit cette quantit des diff rences qui se r alise et qui fournit au mouvement et donne vie l infinissable et l inattendu Ceci en dit long sur notre approche terrifiante du m lange qui nous rend si incapable de comprendre des formes complexes de pens es aussi bien Wittgenstein que les rites primitifs incompr hension qui se manifeste dans l miettement l appauvrissement et la haine enfin Penser une version irr aliste du r el semble tre une contradiction dans les termes et ainsi nous oblige presque afin de ne pas para tre incoh rent prendre parti dans le d bat r aliste antir aliste En effet adopter une telle pos
201. en premier plan gauche le soldat cible a l air de s effondrer il se renverse en arri re son bras droit dirig vers le haut Le montage a pour but de creuser les significations du m me geste dans des circonstances diff rentes Le peintre veut nous montrer par la juxtaposition des trois images de bras ouverts comment le m me geste peut produire le m me pathos du sublime dont le sens varie d une image l autre une esp ce de petit panorama de la typologie du sublime li l id e de la transcendance L image de statue rattach e au monument historique ne pr sente pas un instant proprement dit Le monument historique rel ve du domaine de l ternit c est un instant inscrit une fois pour toute dans l histoire de l humanit Le monument historique trahit la volont de l homme de simuler l aura de la transcendance en la rendant g ographiquement plus proche de lui et en condensant l histoire en un instant En effet la transcendance est un lointain en double sens d une part elle est l Au del en opposition de l Ici bas d autre part elle est l ternit sans commencement ni fin partant intemporel Capturer l espace temps infini dans la finitude d un monument concret et limit devant lequel se provoque le sentiment du sublime voil l ambition de l humanit rendre la transcendance Il y a une double op ration Benjamin a donn plusieurs descriptions de laura Dans L ouvre d
202. en prendre conscience Telle est peut tre la vision de Wittgenstein dans le Tractatus tentant de mettre jour un monde clair et distinct il se rend compte au fur et mesure de sa m prise et du fait qu il est en train d riger un mur tout autour du lieu D autre part ce cercle n est pas de craie il n a pas de substance et se constitue au regard de nos projections et de nos d sirs multiforme 1l s incarne dans l ambition philosophique En fait notre cercle ressemble beaucoup Neverland le pays imaginaire de Peter Pan qui se caract rise par son adaptabilit il prend la forme de nos pens es Dans le conte si vous ne croyez pas Neverland vous ne pouvez pas vous y rendre Peut tre qu en philosophie si l on consid re en wittgensteinien qu il n y a pas d nigme et que cette hypnose ne peut donc en tre une le cercle 102 s ouvre Ainsi Cometti crit dans le philosophe et la poule de Kircher Il ne s agit pas seulement de sortir du cercle mais de savoir comment il faut s y prendre pour ne pas s agiter dans le genre de mouvement d sordonn que favorisent tout particuli rement les situations de panique Renoncer toute forme d id alisme ou de r alisme c est renoncer aux nigmes c est renoncer la reconnaissance d un existence ontologique du cercle hypnotique A partir de l on peut peut tre imaginer les conditions de l enchev trement des faits et des r gl
203. encement de l effort intellectuel chaque fois et pour chaque exemple De m me comme nous l avons d j signal pr c demment le voir est un sport laborieux et ingrat Rien n est acquis jamais pour voir la diversit des pratiques il faut se pencher infiniment sur le fini totalement sur le particulier rigoureusement sur le futile Il me semble que l attitude pragmatique n est rien d autre que cela cette attention particuli re qui permet de voir Pour autant le pragmatisme mauvais presse C est peut tre le isme qui lui donne cette mauvaise mine En effet il est associ dans les esprits une grotesque synth se entre la d magogie et l opportunisme Peut tre avons nous simplement peur de red couvrir une utilit philosophique dont les Anciens n avaient pas rougir Nous pr f rons trop souvent nous r fugier et nous regrouper sur nos acquis nos ismes isthmes plut t que de plonger dans la jungle des pratiques La peur de vivre s est elle malencontreusement aventur e jusqu en philosophie Go the 77 Jacques Bouveresse Wittgenstein la rime et la raison Science thique et esth tique Collection critique les ditions de Minuit Paris 1973 278 pages page 12 86 bloody hard way disait Wittgenstein ses l ves Avons nous oubli ce cri Le cri est un rhizome crit Edouard Glissant c est dire la possibilit de la cime et de la racine de la pro
204. enfer sans autres pr cisions comme il a v cu Aval par un poisson ce n est que justice Est ce que moi je n ai pas t aval par l orphelinat Alors cr ve Quant ma m re il y tellement de putes dans ces tableaux et elles se ressemblent toutes que ce serait absurde de vouloir l identifier FB 85 Il est int ressant de noter que cette digression dans l imaginaire s enracine dans l inconscient du fou avec le temps elle se transforme en v rit pour Steiner En effet la fin du roman il se noie pour sauver son p re de ce poisson fictif qu il a lui m me invent En fait la perte d un parent par la mort ou par une s paration d finitive m ne l enfant vouloir rejoindre celui qui est parti de conna tre le m me sort Baechler 342 Steiner peut donc rationaliser son d sir de se tuer puisqu il va finalement rejoindre ce p re mythique Notons galement que Steiner accorde sa m re le m tier de prostitution Il semble logique de d duire donc que Steiner recherche la compagnie des prostitu es afin de combler le vide laiss par sa m re La hantise de la m re pendue DANS Une folie sans lendemain Dans Une folie sans lendemain la lign e de femmes demeure au c ur du monde de C line et de sa fille Sylvie Tout comme dans Unless la figure matriarcale repr sente un point de d part pour l exploration de l histoire familiale C est une dr le d histoire que l
205. ent douloureux o la famille est frapp e par le secret trop puissant de Lisa r v le au lecteur que l crivaine avait cach des indices pr sageant cet incident tout au long du roman Effectivement dans le chapitre 6 les trois enfants sortent de la maison pour une promenade jusqu la prison Cette excursion est la premi re et la seule qu ils font tous ensemble Alors que Samuel semble tre le plus affect lors d une relecture du roman le lecteur d couvre que cette sc ne pr sage la pendaison de Lisa Notons l int r t 10 T est important de noter que selon Matthew Boudreau la violence quotidienne au sein de la famille est une source de grandes tensions et ces incidents pr cipitent leur tour l mergence du caract re violent des jeunes dans la famille Boudreau 27 l Notons la prison finit par faire peur Samuel IM 119 179 qu elle montre l gard du d me qui voque le grenier et de la pendaison des prisonniers Quand la peine de mort existait encore dit soudain Lisa c est l dans le d me qu ils penda ent les prisonniers IM 118 D apr s Durkheim le suicide d coule parfois de limitation D ailleurs selon ce dernier l individu suicidaire a besoin d une mutuelle assistance morale 222 Il est int ressant de noter donc que lorsque la pendaison des prisonniers pique la curiosit de Lisa ce petit indice de la nature de son secret pa
206. ent e de la relation amoureuse c est tout naturellement qu au carnaval des corps succ de la valse des mots En effet qu elle s panche dans les confins de l aveu ou qu elle se r tracte dans les silences du non dit la parole demeure ce qui l aube d une relation d finit l amoureux D s lors puisque l amoureux ne cesse de courir dans sa t te d entreprendre de nouvelles d marches et d intriguer contre lui m me s on discours n existe jamais que par bouff es de langage qui lui viennent au gr de circonstances infimes al atoires Parce que l incommunicabilit est inh rente aux relations amoureuses en s insinuant par les br ches du d cor elle finit de creuser au sein du couple l cart n de la th tralisation La parole sans cesse tiraill e entre le verbe et le n ant n change plus Ibid p 30 15 J Lacan cit in J Belemin Noel Psychanalyse et litt rature Paris PUF Quadrige 2002 p 87 16 R Barthes Fragments d un discours amoureux op cit p 7 221 mais s enferme dans un code qui a pour seul avantage de retarder le d part d emplir l espace et le temps Des mots qui agressent ceux qui d livrent la communication rel ve davantage de l affrontement que de la communion Dire l amour reviendrait donc en quelque sorte le d sacraliser faire surgir sur la sc ne collective des aspirations jusqu alors int rioris es Et bie
207. entendement humain Cette d finition de la libert de la part de la m re illumine deux v rit s essentielles pour sa fille l existence du doute et la possibilit de la libert Ces deux th mes sous tendent l intrigue du roman et relient les femmes d une g n ration l autre les s urs d Edm e sont les premi res douter de leurs corps C line lors de sa lutte avec le cancer est la derni re en douter C est travers son exploration de ses souvenirs d enfance que C line d couvrira ce que sa m re entendait par cette m taphore des fleurs qui s panouissent la faiblesse du corps ne fait que souligner la puissance de l esprit et l importance de l amour Il est essentiel de noter que des similitudes importantes entre C line et sa m re se pr sentent au cours de la r daction du m moire Alors que C line invente un t moin Jenny Marx pour la soutenir dans les moments difficiles la m re imagine Rosa Luxembourg ses c t s lorsqu elle se sent accabl e D ailleurs nous constatons que l crivaine infuse le texte d un syst me de r f rences qui met l accent sur la connexit de toutes les femmes de cette famille L crivaine place ce monde de femmes C line Dans son ouvrage Les Fous de Papier Robet Viau tudie Baron un personnage fou des Roses Sauvages de Jacques Ferron Baron se suicide Nous remarquons qu une multitude de similarit s existe entre Baron et Edm e d
208. ents deviennent irr versiblement li s D ailleurs elle note que l endroit du suicide rappelle les lieux sombres profonds enfonc s qui sont des arch types de la matrice maternelle Fall 2003 48 Bien que l omnipr sence de la figure matriarcale est manifeste depuis le d but du roman apr s la mort de Chut le va et vient entre le pass et le pr sent s amplifie mettant l accent sur le fait que les autres enfants d Ad la de seront galement incapables d chapper son influence Dor navant la question perp tuelle devient Qui sera la prochaine tre atteinte de folie succomber cette tentation de renoncer la vie Puisque l optique narrative se d place entre les trois filles chaque s ur ajoute au r cit sa propre opinion sur l influence maternelle et g n tique R ginald Martel crit elles s aventurent dans l exploration de la m moire familiale fouilles arch ologiques qui pourraient leur r v ler ce qui n est pas rien le plus petit commun d nominateur de leurs trois destins une m re folle ou partie d une autre mani re et un p re qui n est plus que le survivant d sol d un temps qui ne l a pas combl Martel 1995 B3 Bien que toutes les trois interrogent le r le qu a jou la m re il n est pas surprenant que ce soit Milou l a n e et celle qui a pris la place de la m re apr s sa mort qui accuse le plus ouvertement la m re du suicide de Chut I
209. ents politiques guerre pid mie et famines p 121 s immiscent dans l histoire sans que l on sache r ellement quoi tous ces changements sont dus ou s ils sont li s ce que vit la narratrice Il en va de m me pour les personnes qu elle c toie certains clients commen aient braire d autre renifler comme des porcs et de fil en aiguille ils se mettaient tous plus ou moins quatre pattes p 26 27 et qu elle rencontre Yvan en tant le meilleur exemple Yvan m a dit un jour on tait comme tout le monde le lendemain on se retrouvait braire ou rugir dans son cas il avait r ussi se r gler sur la Lune p 123 Ces effets de contaminations renforcent en sous main la fonction de transformation que nous avons tudi e Et la r f rence une certaine r alit glisse au fur et mesure que le r cit avance vers la r alit reconstruite d un espace fictionnel C est aussi pourquoi dans cet univers qui s affirme progressivement aussi incongru que l histoire qui nous est narr e les rencontres constituent une fonction part enti re D s lors il y a bien une volution de cette fonction au cours de l histoire mais cette progression se fait de mani re improbable Le r sultat narratif qui peut d router cr e donc chez le lecteur une sorte d effet pygmalion de proph tie auto r alisante comme le dirait Rosenthal et qui serait d mentie par la nature
210. er Borgese E M remarque Dos Passos Hemingway in Yannick Pelletier dir Le Mal absolu Actes du colloque Louis Guilloux et la guerre Saint Brieuc ditions Ville de Saint Brieuc 1995 Jacob Jean Louis dir Louis Guilloux Actes du Colloque de Cerisy sur Louis Guilloux et les crivains anti fascistes Quimper Calligrammes 1986 Convergences et divergences des regards sur la guerre Guilloux Giono Gu henno et quelques autres in Yannick Pelletier dir Le Mal absolu Actes du colloque Louis Guilloux et la guerre Saint Brieuc ditions Ville de Saint Brieuc 1995 Lebel Anne Bruits de guerre dans la ville Saint Brieuc dans la guerre de 1914 1918 travers Le Sang Noir de Louis Guilloux R alit historique et traduction romanesque in Yannick Pelletier dir Le Mal absolu Actes du colloque Louis Guilloux et la guerre Saint Brieuc ditions Ville de Saint Brieuc 1995 Loisel Yves Louis Guilloux 1899 1980 Biographie 2 dition Sp ert Coop Breizh 1998 Milza Pierre et Berstein Serge Le fascisme italien 1919 1945 Paris Seuil 1980 Monastra Rosa Maria Il romanzo come cronaca a proposito del Bell Antonio in Daniela Battiati dir Vitaliano Brancati Da Via Etnea a Via Veneto actes du colloque Da via Etnea a Via Veneto Vitaliano Brancati quarant anni dopo sept oct 1994 Roma Fahrenheit 451 2001 Mor
211. er lettre morte aux yeux des progressistes et enfin une troisi me patriotique puisque chaque pays essaie d imposer son mod le tatique y compris travers les exploits sportifs de ses concitoyennes Pour ce qui est du monde de l dition il conna t ce moment l une vogue sans pr c dent pour les biographies romanc es dont celles des aventuriers Berger Levrault lance par exemple en 1928 la collection Les Grandes Vies aventureuses Plon celle des Grandes Figures Coloniales et Au Sans Pareil en 1930 une s rie de m moires v ritables d aventuriers de toutes sortes intitul e Les t tes br l es Leroy 1999 107 Si celles ci publient ou annoncent la parution des vies de grands hommes certes loign s des pr occupations sportives Concini mar chal d Ancre le g n ral Lasalle Gilles de Rais etc il n emp che qu elles contribuent in vitablement la mise en place d une litt rature de t moignage o les conqu rants du sport trouvent leur place Charreton 151 Marcel Boulenger avec son article sur le Sport et ses as 1925 Jacques Mortane et ses As du sport 1931 ou quelques ann es plus tard Joseph Kessel et son Mermoz 1938 participent cette tendance cela il faut ajouter la multiplication des r cits de voyage avec la collection La route de la librairie Alexis Redier dans laquelle Marthe Ouli va publier Quand j tais matelot 1930 Les aventuri re
212. erais fait avorter I 109 181 conscience Me transformer en jets de sang qui survivraient dans la terre noire Maman aussi avait peut tre souhait cela quand les choses allaient mal entre nous I 23 Alors que pour la fille le corps de la m re repr sente la mort pour la m re le corps de la fille signifie sa renaissance Elle cherchait s incarner en moi de peur de mourir J tais charg e de porter en moi l esprit de maman dont le corps pourrirait t t ou tard J tais cens e devenir la reproduction la plus exacte possible de ma m re J tais sa fille 1 96 97 Selon St phanie Michelle Cox la relation m re fille dans ce roman voque le concept de la pseudo symbiose de Nancy Chodorow Cox met l hypoth se que la m re emp che la fille de devenir autonome cause d une absence de rapprochement entre elles 136 Au lieu de tenter de conna tre sa fille la m re semble croire qu il est plus simple de la voir comme la reproduction I 97 d elle m me En se suicidant Yan Zi essaie de se lib rer de cette notion de reproduction Il fallait donc d truire cette reproduction tout prix Il fallait tuer sa fille Il n y avait pas d autres moyens de la rendre plus sage Je ne pouvais pas tre moi autrement I 97 16 Selon Janet Kennedy le roman est impr gn de significations symboliques surtout lorsqv il s agit de la relation m re fille Dans son tude
213. eresse r fl chit sur la fa on dont Wittgenstein con oit les rapports entres les math matiques et le monde r el Wittgenstein d crit le math maticien comme inventant sans arr t de nouvelles formes de repr sentations Son id e est que nous devons concevoir la d monstration essentiellement en termes de modification ou d innovation conceptuelles et non 1 Ludwig Wittgenstein Remarques sur les fondements des math matiques dit es par G EM Anscombe GH Von Wright et Rush Rhees traduit de l allemand par Marie Anne Lescourret Biblioth que de philosophie Gallimard Paris 1983 351 pages page 85 43 d exploration de contenus conceptuels dont les caract ristiques pr existeraient la d monstration Il y a videmment dans cette remarque une claire contestation de notre acc s aux faits de la possibilit philosophique d acc der quelque chose d ant rieur et de plus essentiel que nos pratiques langagi res contestation sur laquelle nous reviendrons Pour l heure il s agit plus simplement de voir la cr ativit des r gles que la mutation normative abhorre et fait dispara tre Wittgenstein attribue la philosophie la seule t che de d crire les pratiques langagi res et nos fa ons d agir ses exercices suspensifs sont une forme de contrainte intellectuelle laquelle le philosophe se soumet afin de mieux se ressaisir du langage En ce sens la comparaison avec l oulipo et en particul
214. errogation sur le rapport entre le montage et l exp rience du temps et de l espace s appuie sur l analyse de trois tableaux de Jacques Monory figure majeure de la Figuration narrative Notre tude ne se veut pas syst matique le montage chez Monory n est qu un cas parmi d autres le montage comme proc d iconographique ne cesse de se renouveler depuis le cubisme les trois tableaux que nous choisissons tudier ne sont que trois modes entre autres de juxtaposer les espace temps dans l ensemble de l uvre de Monory Notre but est de d gager quelques l ments cl s d une exp rience particuli re de l espace temps qui est sans doute partag e par beaucoup de nos contemporains La globalit contemplative est un trait essentiel de la peinture par rapport au cin ma Dans L uvre d art l poque de sa reproductibilit technique Benjamin compare plusieurs endroits ces deux arts Les images qu ils obtiennent l un et l autre diff rent un point extraordinaire Celle du peintre est globale celle du cameraman se morcelle en un grand nombre de parties qui se recomposent selon une loi nouvelle Plus loin il dit l aspect distrayant du film a lui aussi en premier lieu un caract re tactile en raison des changements de lieux et de plan qui assaillent le spectateur par coups Que l on compare l cran sur lequel se d roule le film la toile sur laquelle se trouv
215. ersonnes en question ont deux exp riences temporelles diam tralement oppos es La femme assassin est prise dans son motion qui la pousse vers l acte de tuer ce qui se voit travers son visage crisp et son corps tendu A cet instant elle se trouve dans une sorte d extase qui lui fait oublier elle m me Toute son attention est concentr e sur sa cible mettre fin la vie de celle ci dans le plus bref instant est son seul but Ici le temps se r sume litt ralement un instant le minimum d attente pour attendre le but En ce sens le temps est le pire ennemi de la femme assassin tuer devient une sorte de lutte contre le temps qui retarde qui consume qui angoisse Nous aimerions baptiser cet instant un instant explosif qui se veut r alis sur le champ En revanche l homme qui attend sa mort prend tout son temps pour tre assassin Il se trouve seul dans un restaurant rempli de tables et de chaises Le personnage est au second plan absorb dans ses pens es A c t de lui sont rang s quelques ustensiles Au premier plan est mis en avant un cr ne une all gorie de la mort Au dernier plan est ins r e une image de tigre qui pourrait signifier l assassin qui poursuit le personnage Ce qui manifeste l ing niosit de la composition c est l alignement du cr ne au premier plan de l homme et des ustensiles au second plan et du Pascal Le Thorel Monory Paris mus e 2006 p 243 264 tigr
216. es pisodes de chasse dont t moignent les troph es expos s dans son pavillon des Ardennes l crivain la consid re de facto comme une muse intouchable qu il surnomme alors Madame mon copain Chefdor Quelques ann es plus tard alors qu il ne la fr quente plus il lui rend hommage travers son personnage excentrique Diane de la Panne dans L Homme foudroy Quoi que j en dise je suis oblig d avouer que notre enquiquineuse tait un des meilleurs fusils d Europe tait tr s sport avait un cran magnifique montait divinement bien cheval savait s habiller avait de l abattage et de la conversation bref que c tait une fille patante 65 Comme ce fut le cas pour lisabeth Pr vost les voyageuses des ann es 20 qui brav rent les l ments dans une succession de luttes in gales et de p rils extr mes ne laiss rent personne indiff rent Bourlingueuses exploratrices aviatrices navigatrices nageuses de marathon femmes reporters Boucharenc 105 etc toutes firent preuve d audace leur mani re et attir rent l attention d hommes de lettres pr ts relater leurs fabuleux exploits Certains r dacteurs en chef demand rent m me leurs collaborateurs de trouver un scoop afin de devancer leurs concurrents C est ainsi que Le Matin annon a en premier en 1925 l arriv e d Alexandra David Neel Lhassa apr s huit mois de marche Pourquoi cet int r t m diati
217. es de la connaissance et de la cr ation non pas de cause effet et donc comme quelque chose d m ler mais bien comme la ressource in puisable d un savoir anthropologique prot iforme Ainsi dans cette forme de lib ration coexistent l exigence pragmatique et l irr alisme Tel est je pense la force descriptive et non argumentative de Nelson Goodman La fiction op re dans les mondes r els peu pr s de la m me fa on que la non fiction Cervant s Bosch et Goya pas moins que Boswell Newton et Darwin prennent d font et refont et reprennent nos mondes familiers en les refondant de mani res remarquables et parfois obscures mais finalement reconnaissables c est dire re connaissables Ainsi la posture irr aliste nous permet de voir et de montrer l importance des formes fictionnelles dans la construction de notre r alit Contextualis e la fiction prend corps dans nos pratiques ritualis es dans la force de l habitude l int gration r gul e notre forme de vie 5 Jean Pierre Cometti Le philosophe et la poule de Kircher quelques contemporains ditions de l clat Paris 1997 167 pages page 39 l Nelson Goodman Mani res de faire des mondes op cit page 149 103 BIBLIOGRAPHIE Ouvrages Auge Marc Pour une anthropologie des mondes contemporains Champs Flammarion Paris 1994 195 pages Berkeley George Trois dialogues entre Hylas et Phylonous traduction fran aise de
218. es tres des songes et des mots mais galement reflet biais du temps et des choses Parce que le fantasme amoureux ne saurait se r fl chir autrement qu au regard de l imaginaire il prend donc son essor dans l tonnant pouvoir des mots et pris dans les mailles de cette trange dialectique l homme r ve sa vie bien plus qu il ne s en empare Le couple n est plus qu une instance fictive un palliatif illusoire au sein duquel s enracinent toutes les hantises et n vroses originelles L uvre aragonienne se dresse alors comme le lieu privil gi du r investissement sp culaire int grant tout sujet dans l oscillation perp tuelle du roman comme songe partag Ce qu on a pas ce qu on est pas ce dont on manque voil les objets du d sir et de l amour Autrement dit l objet du d sir ne brille que par son absence et l amour est pr sent comme un trouble qui une fois calm dispara t Naufrage d une passion qui par essence est souffrance ou bien garement volontaire et d lib r en dehors des normes tablies le sentiment amoureux semble ainsi pouvoir s appr hender comme un cart vis vis de qui ne le partage pas une transgression n cessaire et primordiale L amour s exalte donc dans l opposition il ne na t que du conflit sans lequel il v g te et se fige Et si de nos jours la th matique amoureuse appara t comme l une des plus exploit es voire des plus ressass es peut
219. es textes traitant de la th orie de la n gativit tels que ceux de Iser Culler Derrida dans Languages of the Unsayable seront galement n cessaires l analyse du travail de gestion du trauma dans l criture trauma narrative En effet notre objectif sera aussi d analyser comment la th matique du rejet visc ral qui s op re par et dans le langage apophatique du sujet lui permet de ne liquider qu une partie insuffisante de la charge traumatique Le troisi me chapitre nous permettra de nous poser la question suivante qu est ce que la r criture am ne comme r v lation que l criture n arrivait pas combler Nous confronterons les topo psycho narratifs explicit s dans les ouvrages th oriques pr c demment cit s pour prouver comment la gestion du trauma 164 s op re de mani re plus compl te dans l v nement cette fin une tude des proc d s narratifs nous sera fort profitable car elle d montrera que le contexte culturel du sujet se transforme en un processus qui facilite la compr hension de l incompr hensible trauma Encore une fois les mots semblent tre la seule technique que le sujet cette fois ci l crivaine Annie Ernaux poss de pour g rer l emprise du trauma Nous tenterons de prouver que la forme que prend la r criture permet au sujet de colmater la br che psycho sociale instaur e par le choc du trauma de l avortement Le red ploiement des mots la r p tition tr
220. es amen s penser que la sc ne imm diatement v cue d un v nement traumatog ne provoque chez l individu une impuissance une impossibilit de gestion qui surgit involontairement de fa on somatique ou psychique comme si cet v nement d bordait les capacit s de compr hension de gestion du sujet Freud pr cise cet effet que c est une exp rience v cue qui apporte en l espace de peu de temps un si fort accroissement la vie psychique que sa liquidation ou son laboration par les moyens normaux ou habituels choue ce qui ne peut manquer d entra ner des troubles durables dans le fonctionnement nerg tique L v nement est v cu comme un trop plein qui d passe et d stabilise l tat d quilibre d hom ostasie du sujet La vue obstru e d pizelus ne serait elle donc pas un effet physiologique physique de ce trop plein psychique de cette d charge entrav e caus e par le trauma La question du trauma a depuis H rodote beaucoup volu Plusieurs critiques litt raires historiques et psychanalytiques tel que Cathy Caruth Dominik LaCapra et Judith Herman respectivement se sont pench s sur celle ci et plus sp cifiquement sur son effet destructeur Ils semblent s entendre sur le fait que le trauma engendre chez le sujet qui le vit une r action similaire celle signal e par H rodote l incapacit de le g rer S il provoque une r action qui d passe les capa
221. es du roman r aliste il appara t propos aux repr sentations de la virilit sous la p riode fasciste en particulier au chapitre 8 Le nouvel homme fasciste 136 pr sent indispensable de r fl chir la question de leur rapport P Histoire Drame collectif et trag die priv e L ancrage historique du Sang noir et du Bel Antonio est pour le moins complexe Les meutes qui clatent la gare de Saint Brieuc laissent supposer que Guilloux situe son uvre au cours de l t 1917 p riode des grandes mutineries Sous le pr texte de raconter la derni re journ e de Cripure le romancier nous offre un tableau sans piti de la l chet et de la b tise r gnant l arri re du front Contrairement Erich Maria Remarque dans l Ouest rien de nouveau et Ernst J nger dans Orages d acier Guilloux ne d crit aucun moment la vie au front Il y a une raison tr s simple cela handicap de la main gauche depuis son enfance l crivain a t r form et n a donc pas connu le front Sa droiture et son grand respect pour ses proches tomb s au combat expliquent sans doute largement pourquoi Le Sang noir ne pr sente aucune description de la vie au front Mais il convient aussi de comprendre que ce choix rel ve d une intention qui sous tend tout le r cit Au lieu de nous plonger au c ur du conflit et d en raconter la barbarie et la cruaut Guilloux choisit de proc der d une tou
222. esur c est aussi parce que la narratrice ressent sa grossesse et l avortement qui suivra comme un ch timent social comme le vieux p ch inclassable no mortel ni v niel innommable m lange de sale vicieuse r veries molasses pendant l cole et surtout mes parents mon milieu de boutiques 7 M Bacholle Bo kovi Confessions d une femme pudique French Forum vol 28 no 1 hiver 2003 p 91 109 77 A Ernaux Les armoires vides p 147 cit dans M Bacholle Bo kovi Confessions d une femme pudique p 100 28 M Delvaux Histoires de fant mes Montr al Presses de l Universit de Montr al 2005 p 115 159 cracras qui l oblige se ha r d tester son corps se figer dans des souvenirs qui r p tent cette haine profonde pour soi tant donn que la narration r v le une trame historique d cousue comme c est le cas dans ce roman une cure compl te ne peut pas avoir eu lieu C est ce que Judith Herman pr cise lorsqu elle parle de la n cessit de retracer plusieurs fois l v nement traumatog ne Reconstructing of the trauma story begins with a review of the patient s life before the trauma and the circumstances that led up to the event The next step is to reconstruct the traumatic event is a recitation of fact The narrative includes not only the event itself but also the survivor s response to it and the responses of the imp
223. et soci t PUF Paris 2004 524 pages page 245 48 Ludwig Wittgenstein Tractatus logico philosophicus op cit page 112 100 mon sens par exc s il fait de la difficult voir et de ces tentatives un devoir et par l m me renoue inconsciemment avec la recherche de la v rit de la vraie voie juste et bonne moralement Or il me semble que l esprit wittgensteinien est beaucoup plus modeste et improbable Cet esprit r aliste anabaptiste en cherchant l uniformisation passe outre les diff rences le sens du possible et par l scinde En effet comme l explique Diamond dans L thique l imagination et la m thode du Tractatus de Wittgenstein ce ne sont pas les propositions qu il s agit de comprendre mais l homme le personnage Du coup pour le bien tre de l harmonisation de l uvre de Wittgenstein c est l homme et son uvre qu on d cide de sacrifier sur l autel du bon sens Ainsi interpr tants r alistes baptis s ou non se rejoignent dans une m me lecture dichotomique m me si le coup de ciseau n est pas donn au m me endroit Pourtant il me semble que la r sistance intellectuelle qu offre la proposition wittgensteinienne Ethique et esth tique sont une seule et m me chose profond ment li e l expression sub specie ternitatis l embarras des traducteurs pour rendre ladite expression tient toute enti re cette irr sistible envie de donner un coup de c
224. et sociales dans le monde C est en misant sur le pouvoir cathartique du th tre qu une grande partie des dramaturges anglais contemporains mettent en sc ne des pi ces faites d images choquantes et brutales Le but d un tel proc d purgatoire serait de mettre en vidence des choses cach es depuis la fondation du monde afin de rendre l invisible visible la face du monde D finir la r elle v rit de nos vies et de nos soci t s est une obligation cruciale qui 1 x LA EPAF 2 A y Boireau Nicole Th tre et soci t en Angleterre des ann es 1950 nos jours Paris Presses 200 nous incombe tous affirme Harold Pinter le Prix Nobel de litt rature en 2005 Aujourd hui g de 76 ans il se montre plus r solu que jamais fracasser le miroir qui d forme la v rit par la d nonciation La micro lecture de One for the Road pi ce crite en 1983 nous a in luctablement amen s nous interroger sur la mani re dont se traduisent la symbolique du mal ainsi que l usage de la violence au sein des relations humaines Remonter aux sources du mal et de ses manifestations multiples dans One for the Road implique la n cessit de revenir au mythe babylonien de la Cr ation pour ainsi saisir ce qui forme le noyau central de l imaginaire collectif d un groupe humain qui ne con oit son existence que par le sacrifice de son prochain sur l autel de la violence Comment maintenir ma supr matie
225. et son insistance sur l importance de ne pas s abandonner malgr des conditions parfois insupportables qui convainquent Red de ne pas c der la d pression La d pression de Milou est galement tr s inqui tante Toutefois nous remarquons une s rie d indices qui nous laissent croire qu elle aussi veut s en sortir Elle refuse la trousse antipsychotique et les autres torpeurs U 186 parce qu elle ne veut pas retourner chez elle la pharmacie au cou U 177 et elle recherche l affection de ses proches la fin du roman d prim e et dans son lit d h pital elle demande Unless Tu reviens demain U 187 C est ce moment l la mention d un demain qu un nouveau sens d espoir par rapport la condition de Milou s installe v ritablement dans le texte En effet la n gation de la mort du fr re la d pression des s urs et l agression vers soi et vers l autre repr sentent les tapes du deuil et m nent vers l espoir et la r unification de la famille C est Red qui souligne cet esprit de renouveau La r unification des morceaux On est ses proches et a se ramasse Au train o va l affection a lib re et je ne serais pas surprise d y croire en grandissant Je m en viens m re de toute fa on j ai comme d cid d arr ter de me tuer U 185 28 Nous remarquons que c est l amour d Unless qui emp che le suicide de Red Unless va me
226. etir du r el presque retir comme les maux de Gautier de sa propre utilit Dans un article justement intitul Sur le Beau et l Utile Mallarm crit Fa onner exactement veut chez l artisan une esp ce d oubli quant l usage autant que du bibelot seulement la mise en uvre directe de l id e comme l objet se pr sente pour plaire et servir causant une impression toute moderne de v rit pe On ne peut s emp cher de mettre l accent dans cette phrase sur deux termes mallarm ens par excellence d une part bien s r le bibelot et d autre part l id e d oubli que l on retrouve dans la fameuse Crise de vers Le po me bibelot d inanit sonore serait il un objet absent une construction de vide Non pr sence non absence c est ainsi que dans L Entretien infini Maurice Blanchot d finit l oubli Car le po me est bien la fois comme nous l avons vu absence puisqu il est un vide fondamental aboli et pr sence puisqu il est tout de m me cet objet ce bibelot Comme la construction labyrinthique dans le mythe grec le po me existe parfaitement retir du monde puisqu il est en lui m me son propre monde avec ses propres r gles sa propre logique cette id e d un po me clos objet sonore parfait r pond chez Mallarm le r ve d un Livre recueil absolu qui remplacerait non seulement tous les livres exis
227. eur ce qui souligne la s paration entre lui et eux En effet ces sentiments sont renforc s par une rupture dans le texte entre ce qui est dit et ce qui est ressenti Prenons l exemple de la sc ne o Chut se pr sente de fa on inattendue chez Unless apr s avoir t attaqu les paroles et les pens es d Unless s opposent cr ant une tension frappante Pourquoi je te le dirais hein Pour que tu me prennes en piti Pour que t appelles le p re Le fou est ici viens le chercher Je ne vais pas faire a voyons Mais qu est ce qui se passe tes dans un tat terrible je l vois bien T as des probl mes non Chut dis moi quelque chose Il s est rassis Je craignais le pire J essayais d affronter ma peur je luttais pour ne pas fixer mon attention sur certains objets le coucou dans ma cervelle le miroir les couteaux dans le tiroir Je le regardais Il a lev les yeux sur moi Pour me tuer Imb cile je ne me calmais pas U 37 Cette rupture entre ce qui est dit et ce qui est pens met l accent sur l alt rit et l exclusion de Chut Bien que tous les personnages soient li s la folie la violence associ e la folie de Chut souligne le fait qu il se s pare compl tement de la raison Selon Felman le langage de la psychiatrie est fond sur cette s paration 4 Chut avait dit Papa tu ne comprends pas je suis fou U 44 174
228. extes provisoires et strat gies de la repr sentation du personnage chez Vitaliano Brancati art cit p 945 17 Voir Natale Tedesco L invenzione provinciale La poetica dell insignificanza da Viterbo a Caltanissetta in Daniela Battiati Vitaliano Brancati Da Via Etnea a Via Veneto actes du colloque Da via Etnea a Via Veneto Vitaliano Brancati quarant anni dopo sept oct 1994 Roma Fahrenheit 451 2001 18 Se reporter aux stimulantes r flexions de George L Mosse dans L image de Phomme L invention de la virilit moderne The Image of Man The Creation of Modern Masculinity Studies in the History of Sexuality traduction de Mich le Hechter Paris Abbeville 1997 Cet historien consacre d int ressants 135 la difformit de Cripure pitoyable sp cimen d une humanit d chue une poque o les valeurs dominantes sont celles de la force de l intr pidit et de la masculinit les personnages du Sang noir et du Bel Antonio semblent mettre en question et d mentir par leur pr sence m me cette vaste m canique id ologique Les romans de Guilloux et de Brancati illustrent cette r alit avec finesse en sugg rant non seulement que la fuite et le repli sont devenus les seuls modes d existence possibles pour les individus ind sirables mais en d crivant aussi la confrontation des gens normaux l alt rit Confrontation qui se traduit par d autres dynamiques d vitement
229. familiales provoquent le personnage suicidaire passer l acte De plus nous mettrons en lumi re l empreinte que ce suicide laisse sur l histoire personnelle de ceux qui lui survivent 168 La M re Mythique h r dit et m moire dans Unless La possibilit de la transmission g n tique d une pr disposition au suicide constitue une th orie qui pr occupe toutes les disciplines qui tudient le suicide Malheureusement ce concept reste flou parce que scientifiquement il demeure non prouv Durkheim 74 81 D apr s Baechler tandis qu il est possible qu un go t pour le suicide soit transmis h r ditairement il est probable qu il constitue plut t un r flexe conditionn une technique que l enfant apprend de son parent pour viter l angoisse de la vie Baechler 340 Par contre il est tenu pour acquis que certaines maladies d me et de corps et parfois la disposition de l individu par exemple une tendance la m lancolie proviennent des ascendants De nos cinq romans la question de l h r dit est explor e le plus explicitement dans Unless Les s urs de Chut se rem morent leurs souvenirs d enfance et interrogent leur histoire familiale pour enfin trouver la source de leur souffrance et de leur d sarroi C est travers cette enqu te qu elles d couvrent qu elles peuvent condamner la m re disparue ainsi que leur lignage En effet le suicide de Chut soul ve la question jama
230. ffet de r flexion ou devrions nous r fraction cet interstice implique un lecteur dans une h sitation r flective dont il ne peut se d partir En effet l omnipr sence du je s accompagne par la pr sence tout aussi persistante du pronom d monstratif a et de ses variantes cela c ex J tais tr s fi re a se voyait sur les photos a se voyait aussi que j avais grossi mais pas tant que a parce que depuis mon avortement j avais eu des naus es de plus en plus nombreuses et J avais maigri p 32 Suite cet effet de miroir l improbable passage du je au a est mettre en convergence avec l improbable transformation d un tre humain en truie Le pronom personnel je de la premi re personne du singulier suit ou pr c de suivant les moments le pronom d monstratif a qui selon Grevisse s emploient fr quemment pour d signer un tre ou une chose qu on ne veut ou ne peut nommer avec pr cision Nous sommes en effet jusqu la section six dans ce cas de figure o l incapacit volontaire ou pas de nommer explicitement la transformation est relay e au lecteur par ce que l on pourrait qualifier un trait stylistique m diateur De fait ce m dium langagier participe l interrogation du lecteur sur cette part refoul e d animalit qui d faut d tre reconnue et accept e engendrerait dans notre humanit un d r glement et du sens et des sens Et c est c
231. fondeur et de l tendue de l unique et de la diversit Ainsi s esp re la vision irr aliste libre de revoir Ritualit Dire que la r alit n est pas autre chose que l exp rience transmise d une communaut d usages un moment donn de l espace et du temps n est pas sans cons quences sur ce que l on peut attendre esp rer rechercher dans nos diverses tentatives cognitives En effet cette focalisation sur les usages implique un n cessaire abandon de la recherche de la v rit Au del de l usage il y a d autres usages et la recherche de leurs origines de leur essence pour parler en philosophe ne peut tre autre chose que leurs r cits dans lesquels on r invente on r enchante chaque fois ce qui manque la ligne dans l eau le filet de voix dont l cho s est d j dissip Ainsi dans Marelle fiction enqu te dans laquelle il s agit de se perdre pour se trouver Julio Cort zar qui dit d ailleurs tenter de d s crire d crit cette exp rience Je pense aux gestes oubli s aux multiples gestes et propos de nos anc tres tomb s peu peu en d su tude dans l oubli tomb s un un de l arbre du temps J ai trouv ce soir une bougie sur une table et pour m amuser je l ai allum e et j ai fait quelques pas avec elle dans le couloir Elle allait s teindre quand je vis ma main gauche se lever d elle m me se replier en creux prot ger la flamme par un cran
232. fum e les restes calcin s de l inassouvissement D ailleurs refuser laccomplissement au profit de la contemplation renier l importance du corps physique au profit de l image vanescente c est proc der une inversion fort signifiante dans la mesure o c est lamour qui se dresse alors symboliquement comme un organe sexuel d une sensibilit inouie Consumant m taphoriquement l union dans ce qui la sublime il prend litt ralement le relais du corps d faillant Les amants que sont Geoffroy Alfred et Aur lien par exemple pallient par le r el mythifi ce que la sensualit aurait d sir au d versement de l nergie sexuelle se substitue donc l panchement des songes dans la vie r elle Et la femme forte de cette puissance cr atrice qu elle d cline quelquefois en se fondant dans l image prolifique de la Terre originelle pourrait alors appara tre comme le lieu par excellence de la fusion attendue comme le vecteur singulier d une d possession constructive parce que r g n ratrice Aussi la force et la puissance des l ments naturels parce qu elle traduit la soudaine irruption de l amour en m me temps qu elle l inscrit dans le temps appara t comme le creuset id al de cette cristallisation des pulsions dans les mailles d une dur e flottante Et l absolu de l amour n cessitant l art de la fugue il n est pas tonnant que l acte d amour allusif la plupart du temps soit g n r
233. ger sur la plage couter le ressac et ramasser les coquillages qu il rejette C est ce que fait le po te pique On peut aussi voyager sur l oc an On peut le faire pour de nombreuses raisons ou m me sans aucune On peut partir en mer et puis au large aucune terre en vue rien que la mer et le ciel entreprendre une croisi re C est ce que fait le romancier Il est vraiment solitaire et muet Benjamin La crise du roman dans uvre III op cit plan 6 Le civilis des villes immenses revient l tat sauvage c est dire isol parce que le m canisme social lui permet d oublier la n cessit de la communaut et de perdre le sentiment du lien entre les individus autrefois r veill s incessamment par le besoin Tout perfectionnement du m canisme social rend inutiles des actes des mani res de sentir des aptitudes la vie 276 de lui m me parce que l exp rience personnelle qu il pourrait avoir est uniformis e standardis e et mise en marchandise Le monde n est plus celui qui lui tait consubstantiel ni celui qu il essayait de rejoindre par l exp rience mais un monde qui lui est tranger m me tanche Le rapport qu il a lui m me n est plus l harmonie ni le clivage mais l insoutenable l g ret de l tre L homme d pourvu de la transcendance et rompant avec la voie de l exp rience vit dans la vacuit du sens L aspiration l absolu est enracin e
234. guer contre un seul individu dans la mythologie grecque En effet selon le mythe dipe fils de La os et de Jocaste est accus d tre responsable de l pid mie de peste qui s abat sur Th bes pour avoir tu son p re et pous sa m re La population qui se d cimait chaque jour et qui r clamait une explication face un ph nom ne qu elle tait incapable de saisir ne pouvait se r concilier que par l isolement et le sacrifice du bouc missaire que le sacrificateur l oracle autorit incontest e aurait bien voulu leur livrer 209 Nicolas Your son is seven He s a little prick You made him so You have taught him to be so You had a choice You could have encouraged him to be a good person Instead you encouraged him to be a little prick You encouraged him to spit to strike at soldiers of honour soldiers of God p 244 Leur sort est celui de tout libre penseur qui choisit de conserver son originalit et qui crie de toutes ses forces Je suis le dernier homme je le resterai jusqu au bout Je ne capitule pas Comme le dit Pinter toute chose en dehors de la norme est consid r comme un l ment hostile quelque chose qui doit tre r prim et puni Ce sort serait r serv l ensemble des membres qui forment la communaut des dissidents Leur d sob issance refl te une anomie un dysfonctionnement politique qui menace l ensemble du microcosme mais avant tout
235. homme soient assez born s pour ne pouvoir jamais parvenir au bien que par un peu de mal Le th tre de Pinter d nonce les faux semblants des institutions religieuses politiques morales etc de cette logique meurtri re qui gouverne le monde Politicians just don t interest me What if you like interests me is the suffering for which they are responsible It doesn t interest me it horrifies me Very conscious of what s happening in the world Pm not by any means blind or deaf to the world around me m right up to the minute I read the papers I have very strong objections to all sorts of things Pour faire r gner l ordre et pr server le royaume de Dieu dans One for the Road il faut faire appel la violence pour faire r gner la d mocratie dans The New World Order 1993 il faut faire appel la violence pour faire revivre la m moire de Rebecca dans Ashes to Ashes 1996 il faut faire appel la violence pour faire croire aux informations que les autorit s veulent bien faire circuler dans Precisely 1993 il faut faire appel la violence Nicolas parle de morale en s adressant Victor mais il s octroie le droit de le torturer de violer sa femme et m me de tuer un enfant innocent Nicolas sitting Gilla standing Her clothes are torn She is bruised 15 Sade Donatien Alphonse Fran ois de Contes licencieux Gen ve Famot 1974 p 171 16 Pinter cit dans Merritt Susa
236. hose dont on ne sait quoi elle aboutit s intensifie l arriv e du marabout accompagne galement et de fa on explicite l interrogation du lecteur Il m a pass des onguents sur le corps il m a pour ainsi dire auscult e on aurait dit qu il cherchait quelque chose p 42 C est en cela que le myst re de la transformation devient la question centrale du livre Finalement l arriv e du marabout infl chit le continuum de la narration et confirme la transformation de l h ro ne en truie Elle r oriente le r cit dans sa dimension magique et claire la nature profonde d une m tamorphose qui ne se limite pas celle du personnage principal mais tout le roman de fait inclassable De m me la nature hybride de l histoire m le avec bonheur le caract re merveilleux du conte et la perplexit curieuse du lecteur Le d r glement des tres d r glement au sens physiologique des v nements et des p rip ties d bouche pour la narratrice sur un cauchemar celui de n tre pas ce qu elle est celui d tre ce qu elle n est pas Toujours est il que les autres protagonistes apparaissent dans la chronologie du r cit et y reviennent parfois sans pr venir Leur nature correspond une d rivation de la fonction rencontres individuelles et rejoint en cela la construction d intrigues Or certaines de ces rencontres individuelles sont troitement li es c est le cas par exemple du marabout qui
237. i est tangible mais le pr sent est sans cesse renouvelable donc 12 Toutes les r flexions ci dessous se sont largement inspir es de la philosophie indienne de la non dualit notamment de l enseignement de Sri Nisargadatta Maharaj Cf Je suis entretiens avec Nisargadatta Maharaj recueillis par Maurice Frydman trad de la version anglaise Les deux oc ans 1982 269 sans cesse invalid Au mieux on peut dire que le pr sent est l existence infiniment instantan e dans un espace autrement dit le maintenant se trouve dans l ici Dans ce sens le flux du temps se d verse d finitivement dans l espace l espace est le dernier refuge vraisemblable C est sans doute pour cela que le temps de la m moire est m tamorphos en espace dans ce tableau de Monory L arri re plan donne une profondeur tant spatiale que temporelle La rue est d serte une femme marche dans le trottoir avec son chien Elle vient de la profondeur et elle continue de marcher en avant La lumi re blouissante du soleil ou de la lune projette de la profondeur et claire presque tout le tableau est ce la lumi re divine qui donne la splendeur toutes les exp riences en l occurrence spatio temporelles de l tre humain La perspective la profondeur du champ en tant qu invention de repr sentation iconographique la Renaissance marque un jalon historique dans l volution de l exp rience spatiale de l humanit c est le di
238. ie structurale deux p 159 4 Propp Vladimir Morphologie du conte p 30 Levi Strauss Claude Anthropologie structurale deux pp 163 164 244 cependant on constate un d coupage intermittent du texte sous la forme d un interligne Afin d en clarifier la description nous qualifierons ces parties de texte de s quences Cette acceptation devant tre prise non pas au sens linguistique mais narratif du terme Il est souligner galement que le nombre de pages pour chaque s quence tout au long d un livre dont l organisation appara t intuitive est relativement coh rent Parmi ces s quences certaines r currences sous jacentes sont relever Elles sont li es aux actions subies du personnage principal et construisent un sous r seau Il n y a donc pas dans 7ruismes proprement parler pr sence d un r seau explicite o les fonctions la mani re de Propp articuleraient le r cit Il y aurait en revanche et sous forme implicite des s quences narratives dont la coh rence reste questionner Toutefois les inconv nients d une d sorganisation narrative qui n est qu apparente seraient circonvenus par la r currence des fonctions sans logique r p t e de chronologie telles que nous les red finissons Ce ne serait donc plus la succession des fonctions comme c est le cas dans l tude de Propp mais leur r currence qui fonderait le r cit Ces fonctions seraient alors ces
239. ient beaucoup la verve satirique de Gogol et les grands romans de Dosto evski Depuis une dizaine d ann es l uvre de Georges Palante a fait l objet de plusieurs r ditions et relectures socio historiques philosophiques ou litt raires On pourra se r f rer en particulier Michel Onfray Physiologie de Georges Palante Pour un nietzsch isme de gauche Paris Grasset 2002 ou encore aux Actes du Colloque Georges Palante parus sous la direction de Michel Onfray sous le titre La R volte individuelle Saint Brieuc ditions Folle Avoine 1991 Voir aussi Yves Pri L ombre de Palante in Jean Claude Xuerebe dir criture autobiographique et carnets Albert Camus Jean Grenier Louis Guilloux Rencontres m diterran ennes B d e Folle Avoine 2001 10 Sur l influence de Gogol Dosto evski et Tolsto chez Guilloux voir douard Prigent Domaine russe in Yannick Pelletier d Louis Guilloux op cit Voir aussi Louis Guilloux Carnets 2 volumes Paris Gallimard 1978 Au sujet de l inspiration gogolienne dans l uvre de Brancati se r f rer Alfredo Giuliani Tra Gogol e Leopardi La Repubblica 9 10 janvier 1977 p 10 et Ren Tavernier Brancati un Gogol italien Preuves n 107 janvier 1960 pp 23 26 133 Sur le mod le du fameux Dictionnaire des id es re ues Brancati s est amus r diger un Piccolo dizionario borghese qui contient de peti
240. ier avec son instigateur George Perec n est pas sans fondement En effet la disparition des parents de l crivain dans les camps de la mort lui avait t les mots pour le dire les exercices oulipiens l ont rendu possible L extermination avait emport jusqu au langage pour le dire Pour s en ressaisir il lui a fallu utiliser des contraintes comme celle de la Disparition de la lettre E Wittgenstein nous demande sans cesse d avoir le courage de vivre sans cette th orisation philosophique n vrotique Le glissement de la r gularit la normativit qui guide et oblige une s lection du monde sans pour autant prendre l apparence d une contrainte est l expression de cette irr sistible envie de th oriser Elle rejette la cr ativit et par l m me la fiction La r alit en son r cit Au commencement tait le fourbi pourrait tre en tout tat de cause la premi re phrase d une cosmogonie quelconque La cosmogonie est une forme de r cit total car elle relate la fois l origine mythique de l univers et de ses tres mais d crit galement l mergence des soci t s Il est int ressant de noter par ailleurs que ce type de r cit est la Cr ation par excellence 1 Jacques Bouveresse Le pays des possibles Wittgenstein les math matiques et le monde r el collection critique Les ditions de Minuit Paris 1988 219 pages page 63 4 Enfants et victimes de bourreaux Alie
241. igent il y parvint finalement Quand il eut fini il fit un pas en arri re pour admirer son uvre C tait merveilleux un monde d barrass de l imperfection et de l ind termination semblable d infinies tendues de glace brillante qui se d ployaient l horizon Ainsi le jeune homme intelligent regarda le monde qu il avait cr et d cida de partir sa d couverte Il fit un pas en avant et s effondra de tout son long sur le dos Vois tu il avait oubli le frottement La glace tait lisse plane et immacul e mais on ne pouvait y marcher Alors le jeune homme intelligent s assit et pleura des larmes am res Apr s quelques ann es il m rit et devint un vieux sage et il parvint comprendre que la rugosit et l ambigu t ne sont pas seulement des imperfections Elles sont ce qui fait tourner le monde Les philosophes convoitent l gamment le soleil et en attendant ils aiment capturer ses rayons dans de brillants jeux de miroir qui laissent r ver d une infinie tendue brillante et parfaitement intelligible Comme le fait remarquer Poe dans Philosophie de l ameublement La passion de l clat cette id e s tant confondue comme nous l avons d j observ avec celle de magnificence g n rale nous a conduit aussi l emploi exag r des miroirs Nous recouvrons les murs de nos appartements de grandes glaces anglaises et nous imaginons avoir fait l quelque chose de for
242. imony in Women s Life Writing New York St Martin s Press 2000 Herman J Trauma and Recovery New York Basic 1992 H rodote Histoire trad du grec par Larcher avec des notes de Bochard Wesseling Scaliger et al Paris Charpentier 1850 t 2 Janet Psychological Healing 1919 vol 1 trad E Paul et C Paul New York MacMillan 1925 Merleau Ponty M Sens et non sens Paris Nagel 1947 Morfaux L M Vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines Paris Armannd Colin 1980 Ranty Y Les somatisations Paris L Harmattan 1994 van der Kolk B et O van der Hart The Intrusive Past The Flexibility of Memory and the Engraving of Trauma in C Caruth Trauma Explorations in Memory 1995 p 158 182 166 OUVRAGES CRITIQUES ET AUTRES Bacholle Bo kovi B Confessions d une femme pudique French Forum vol 28 no 1 hiver 2003 p 91 109 Delvaux M Histoires de fant mes Montr al Presses de l Universit de Montr al 2005 Ernaux A L criture comme un couteau entretien avec Fr d ric Yves Jeannet Paris Stock 2003 Fraser S My Father s House Time Warner Books UK 1989 La famille clat e Molleen Shilliday Ils ont affirm qu ils taient revenus pour eux les enfants Mais ils auraient d les laisser une tristesse pr cise au lieu de ramener avec eux un malaise si flou qu on ne peut rien en dire un malaise souterrain et apeurant co
243. impr visible du r cit L attente sans cesse r actualis e du r cit aboutit finalement et dirons nous paradoxalement la rencontre cette fois tout fait pr visible de la premi re et de la derni re page bouclant la boucle d une criture celle de l auteur et d une lecture celle du lecteur Le livre reste donc cette pierre angulaire m diateur et intercesseur d id es entre la rencontre de deux alt rit s crire et lire 14 Rosenthal Robert amp Jacobson Lenore Pygmalion l cole L attente du ma tre et le d veloppement intellectuel des l ves 1971 250 Les rencontres collectives et individuelles La rencontre construit v ritablement un autre des sous r seaux du r cit Tant t plurielle tant t individuelle elle s amplifie g n ralement pour multiplier les intrigues Car tout le r cit offre une alternance de r surgences et de disparitions momentan es ou d finitives de personnages que croise la narratrice Or parmi toutes ces rencontres certaines se situent aux articulations essentielles du livre en y apportant les dispositifs d volution du r cit et de l h ro ne Pour en clarifier la nature il faut regrouper deux types de rencontres les rencontres collectives et individuelles Au d part la soci t dans laquelle vit l h ro ne semble bien proche de la n tre Les r f rences au travail p 10 et au mi temps pay presque la moiti du SMIC p 12 y contribuent a
244. in la soci t un h ros qui d sire avoir des activit s plus cr atives Ainsi le traitement imagin par l crivain qui consiste encha ner le jeune d linquant et l obliger voir sans cesse des sc nes de violence voir en fait des images de ses propres actes le gu rit de son asocialit De m me vu sous cet angle les prisonniers platoniciens arrivent enfin vivre la lumi re du jour vivre ensemble sans cha ne apr s avoir subi un traitement identique d crit comme d sagr able par le philosophe grec Ainsi il semble que le passage par la fiction la mise en sc ne du monde puisse permette aux hommes de vivre ensemble c est dire de s entendre sur une conception commune et implicite de la r alit Il y aurait videmment beaucoup dire en appliquant ce constat aux politiques actuelles de pr vention de la d linquance Cela dit en philosophe restons dans notre cercle de craie et sourions la pens e de Wittgenstein pour qui voir un film tait comme une bonne douche apr s un s minaire les claquettes de Fred Astaire et Ginger Rogers ou un western de pr f rence On pourrait dire non sans quelques raisons que Wittgenstein est un rigoriste aux go ts d mod s tant l aspect anthropologique de son uvre donne voir le r el dans son paisseur En effet la r alit appara t comme une coul e flasque et compacte compos e de pratiques ritualis es inextricablement emm l es et ainsi
245. intensifie avec la mort de Chut les fuites de Red la d pression d Unless et sa propre d pression Milou devient obs d e par son d sir de trouver un responsable En fait le ton change radicalement de la premi re description de ses anc tres la deuxi me ci dessous Il est clair que maintenant apr s la mort de Chut et deux doigts d une grave d pression elle m me elle est pr te accuser pleinement ceux du pass pour les v nements du pr sent C est Nadedja Ivanova Tragikovsky la premi re C est elle la dame noire la dame de pique en dessous de la pile la tare g n tique la M re mythique effarouch e par les sensations de la sant dans le plus infirme d tail de la psych C est elle l h r tique celle qu il aurait fallu br ler mais qui se damna seule loin des b chers Nadedja la folle la vagabonde sortie de Russie pour parcourir les routes de sa d mence et veiller aux m diocres soins que requiert une g n alogie Et elle s est rendue jusqu ici la vip re travers les si cles et les hommes et travers mon p re U 67 Il est int ressant de noter que la tare g n tique vient du c t du p re mais d une a eule Ainsi le p re n est pas compl tement disculp pourtant l accent est mis sur le r le de la femme Dans cet extrait Milou caract rise l a eule paternelle comme tant l h r tique celle qu il aurait fallu br ler cette image voque la
246. ionalit au c ur m me de la r alit en la d crivant comme ensemble des pratiques r gl es trace n cessairement une voie autre une troisi me posture ni r aliste ni id aliste peut tre irr aliste Quand bien m me le mot fiction est encore peu apparu dans la tentative r flexive laquelle je m adonne ici le chemin irr aliste en conditionne n cessairement la pr sence La fiction est implicitement pr sente dans cette version ci du monde et c est pourquoi le recadrage pr sent autour de la po tique comme mani re et pas seulement en tant qu acte lequel me semblait n cessaire est une prise de position forte ou plut t l engagement dans une voie d finitivement laborieuse Pour autant si cette voie est glissante et nos outils linguistiques tant sur le plan du vocabulaire que de la grammaire mal adapt s elle est tout autant lib ratrice car elle redonne une certaine viabilit une vision ouverte de la fiction dont notre usage en a terriblement d termin le sens Une langue dite vivante par opposition une langue morte se d finit comme telle tant que ses usages voluent et se modifient encore Ainsi sont dit es tous les ans de nouvelles versions de dictionnaires lesquels font tat de l apparition et de la disparition de certains mots mais aussi de l volution du sens de ces mots De ce fait certains sens se perdent quand certains usages disparaissent Il y a dans notre langage une correspondance
247. iotes enrag s Lucien Bourcier ancien l ve de Cripure bless au front et devenu communiste Sans compter les silhouettes fantomatiques qui clopinent la nuit dans les rues de Saint Brieuc demi r elles et demi n es des hallucinations de Cripure le Cloporte et la petite bossue 128 Le roman de Brancati para t une dizaine d ann es plus tard en 19495 Son intrigue s inscrit entre le d but des ann es 1930 p riode o triomphe le r gime fasciste et les lendemains de la Seconde Guerre mondiale au moment de la lib ration de la Sicile par les troupes anglaises et am ricaines Parvenu Rome dans l espoir d y obtenir un poste haut plac dans quelque minist re ou ambassade le jeune Sicilien Antonio Magnano y dissipe le bien paternel sans r sultat Son extraordinaire beaut d ph be suscite chez toutes les femmes une irr sistible volupt et lui attire les faveurs des plus belles jeunes filles de Rome En d pit de ses nombreux succ s Antonio semble habit par une profonde et inexplicable nostalgie Invit par son p re rencontrer la jeune Barbara Puglisi qui lui est destin e en mariage Antonio regagne Catane mais refuse d abord d pouser la jeune fille pr textant qu il a besoin de temps pour se d cider La beaut blouissante de Barbara l am ne pourtant changer d avis et les deux jeunes gens sont bient t fianc s puis mari s Les ann es passent mais le couple demeure sans enf
248. ir une relation de d pendance une relativit circulaire creuser Des mani res de faire des mondes Relativisme La mise en exergue de cette n cessit d apprentissage et de transmission rituelle des pratiques humaines et cela m me dans nos mondes contemporains peut porter confusion En effet les exemples de d sengagement social sur lesquels j ai pu m appuyer et travers lesquels j ai tent de montrer l importance de la mise en sc ne du r el dans l apprentissage de la vie en commun peuvent tre interpr t s de mani re ontologique comme si les formes de pratiques rituelles transmises via leur simulation taient moralement bonnes par nature Comme l crit Mirc a Eliade propos du mythe Le mythe n est pas en lui m me une garantie de bont ni de morale Sa fonction est de r v ler des mod les et de fournir ainsi une signification au monde et l existence humaine Aussi son r le dans la constitution de l homme est il immense Gr ce au mythe nous l avons dit les id es de r alit de valeur de transcendance se font jour lentement Gr ce au mythe le Monde se fait jour en tant que Cosmos parfaitement articul intelligible et significatif En racontant comment les choses ont t faites les mythes d voilent par qui et pourquoi elles l ont t et en quelles circonstances Quand bien m me l auteur nous parle ici de r cits des origines notre transmission des pratiques
249. ire que dans le cadre fluctuant d une litt rature ouverte parce que duelle puisant dans un long immense et raisonn d r glement de tous les sens et de toutes les formes les figures mouvantes de l alt rit recompos e 77 G Durand Figures mythiques et visages de l uvre cit in C Narjoux Le mythe ou la repr sentation de l autre dans l uvre romanesque d Aragon op cit p 349 78 Th tre Roman op cit p 366 Blanche ou l oubli op cit p 326 L Aragon Le libertinage cit in C Narjoux Le mythe ou la repr sentation de l autre dans l uvre romanesque d Aragon op cit p 350 SA Rimbaud Lettre du voyant 240 BIBLIOGRAPHIE uvres cit es d Aragon Aragon Louis Les Aventures de T l maque 1922 Paris Gallimard L Imaginaire 1997 Aur lien 1944 et 1966 pour la version retouch e Paris Gallimard Folio 2004 La Diane fran aise 1946 Paris Seghers La mise mort 1965 Paris Gallimard Folio 1998 Blanche ou l oubli 1972 Paris Gallimard Folio 2004 Th tre Roman 1974 Paris Gallimard L Imaginaire 1998 Etudes sur Aragon Ouvrages Levi Valensi Jacqueline Aragon romancier d Anicet Aur lien Paris SEDES 1989 Narjoux C cile Le mythe ou la repr sentation de lautre dans l uvre romanesque d Aragon Paris L Harmattan Critiques litt raires 2001 Ravis
250. is inexhaustible de l inn et de l acquis Apr s le suicide de Chut les s urs s acharnent trouver un lien entre la folie et le d part de la m re etle suicide du fils L existence d un rapport entre ces deux v nements devient irr futable lorsque nous analysons la r action d Unless au suicide Une vol e de plumes Ad la de va revenir Il voulait me tuer mais il a essay la carabine avant Quand Tu n as rien voir l dedans Maman Non Pas de plumes Que du sang Non Pas de m re Chambre d isolement Faites signer quelqu un pour les lectrochocs Elle aurait pas d avoir des enfants U 56 C est Unless qui narre ce moment tragique Pour elle le suicide sanglant voque in vitablement les souvenirs traumatisants de la folie et de la disparition de la m re En effet la description de cette sc ne est marqu e par une rupture temporelle entre ces deux moments de perte familiale le lecteur n a aucun point de rep re pour les diff rencier l un de l autre D ailleurs notons que le style En italique dans le texte 169 fragmentaire et imag employ travers le texte prend ici son essor et donc mime le d sarroi que ces deux v nements tragiques ont provoqu L histoire de la m re et celle du fils s interp n trent et r v lent la force complexe qui les relie Selon Oore puisque Chut se suicide au sous sol le m me endroit d o sa m re est partie les deux mom
251. iseau donne voir notre difficult comprendre en termes de totalit car entendons nous bien il ne s agit point d une nigme Cette petite phrase qui n est m me pas une proposition tout juste une forme embryonnaire d une pri re d ins rer elle est entre parenth se la fin de la proposition 6 421 a le pouvoir de nous recentrer sur l inessentiel enfin la culture du diff rentiel Pour l heure contentons nous si je puis dire de l irr alisme c est d j bien assez Ainsi si nous essayons de faire une description du Tractatus nous voyons juste ceci Wittgenstein nous d voile des mani res de faire des mondes C est un manuel qui nous donne voir des secrets de fabrication qui apparaissent du coup morcel s par le philosophe dans l troitesse des ces tiroirs num ros dans ces propositions faibles pr caires absurdes pr cieusement ridicules parfois C est le fonctionnement des tentatives cognitives qui est comme ralenti diss qu et par l m me se r v le en savoir anthropologique Le lisse et le parfait de nos cosmogonies nous semblent tout coup parfaitement suspects Ludwig Wittgenstein Tractatus logico philosophicus op cit page 110 101 et c est sur cette impression que nous jetons l chelle C est dans cette gestualit que se montre le sens du possible cet irr alisme dont on a tort d avoir honte qu on d guise pudiquement en nouveau r alisme a
252. issolve et 7 Ibid p 455 7 Tbid p 418 M Blanchot Le livre venir cit in www mauriceblanchot net 74 Blanche ou l oubli Deuxi me de couverture r f rence cit e in C NARJOUX Le mythe ou la repr sentation de l autre dans l uvre romanesque d Aragon op cit p 19 Blanche ou l oubli op cit p 495 238 l exp rience de l criture devient la base de l change accept et non plus le lieu de sa mise mort L art aragonien appara t ainsi comme l unique issue de tout dialogue l ouverture supr me au terme de laquelle l Autre n est plus l objet d une appropriation mortif re mais la figure magnifi e du temps humain et de ses pouvoirs liants l Autre tant d sign par ces mots le compagnon peut tre mythique que je me suis donn et gr ce auquel le monde prend sens Parce que sa d marche englobe tout la fois le singulier de lamour et l universel de ses repr sentations la difficult fonci re de toute expression et l inach vement constant de l uvre en devenir Aragon se fait l auteur d une dialectique particuli re au sein de laquelle la litt rature se dresse irr m diablement comme une qu te perdue de compr hension Compr hension d un Autre repr sent tel qu en lui m me sans abandonner pourtant l ordre du M me compr hension d une existence qui ne se r v le v ritablement qu une fois invent e coh sion enfin de la somme comple
253. iste en dehors du sens que peut lui apporter un sujet Dans le sillage des crits psychanalytiques sur le trauma Janet tente d expliquer le d mant lement de la parole qui s op re chez le sujet Il pr cise que puisque les souvenirs du sujet ayant v cu un trauma n appartiennent pas son corpus m moriel il serait incapable de dire l v nement lors de sa r alisation Normal memory like all psychological phenomena is an action essentially it is the action of telling a story A Ty Ranty Les somatisations Paris L Harmattan 1994 p 100 8 Dori Laub 1991 No One Bear Witness to the Witness In Testimony Crises of Witnessing in Literature Psychoanalysis and History cit dans Cathy Caruth Introduction Trama Explorations in Memory Baltimore Londres The Johns Hopkins University Press 1995 p 7 151 situation has not been satisfactorily liquidated until we have achieved not merely an outward reaction through our movements but also an inward reaction through the words we address to ourselves through the organization of the recital of the event to others and to ourselves and through the putting of this recital in its place as one of the chapters in our personal history Strictly speaking then one who retains a fixed idea of a happening cannot be said to have a memory it is only for convenience that we speak of it as traumatic memory Pour emprunter le te
254. istoire en tant que lecteurs cr e tout coup une distance qui nous met hors jeu un peu comme si nous ne pouvions plus que suivre cette fois ce qui nous est cont 5 Eco Umberto Lector in Fabula le r le du lecteur ou la coop ration interpr tative dans les textes narratifs p 29 254 On le constate avec cet exemple le proc d du non dit renouvelle la sensibilit linguistique des lecteurs par des proc d s qui d rangent les formes habituelles et automatiques de leur perception Mais ce proc d ne se limite pas la fonction de sexualit Or cette derni re en dehors des outrances sexuelles d bouche sur deux motifs r currents les cycles menstruels de la narratrice et les fausses couches Avec ses changements la narratrice d couvre la difficult de faire face certaines transformations organiques Les menstrues et leur cycle changeant visiblement confirment le d r glement de sa physiologie en pleine mutation Elles sont aussi incontr lables que le reste de la narration qui suit les circonvolutions d une histoire en devenir Plusieurs fausses couches en r sultent jusqu la naissance de six petites choses sanglantes qui remuaient p 96 et qui ne survivront pas Si les petites choses sanglantes restent dans le domaine du difficilement identifiable il en va de m me pour l histoire dont on ne devine ni le but ni la fin du moins en partie puisque la fin rejoint le d but de l histoire
255. it annoncent et pr parent l Apocalypse int rieur de Steiner puisque tout homme a en lui son Patmos 7 Alors que sa nouvelle identit prend forme Steiner se prom ne dans Montr al et se divertit de visions infernales Il s imagin e la rue Sherbrooke transform e en un torrent rouge de lave et de sang allant se d verser dans le gouffre des fondations de la nouvelle biblioth que FB 93 Les sc nes apocalyptiques se multiplient et sugg rent toutes une fin inqui tante Comme l univers de Steiner est constitu de ti des les hommes selon lui vont tous en enfer Tous ces pauvres gens tentent d actualiser tant qu ils sont encore en vie les punitions et les supplices auxquels ils sont irr m diablement condamn s apr s la mort FB 99 Ils m nent une vie d nu e de sens transcendantal contrairement Steiner qui se croit investi d une mission sur Terre depuis qu il a d couvert l uvre de Bosch FB 92 et que toute son existence se trouv e d j transfigur e FB 13 Une journ e fatidique s annonce pour le pauvre Steiner il y trouvera soit la mort soit la 17 Chauvin Dani le Apocalypse Dictionnaire des mythes litt raires p 119 114 transfiguration Ou les deux FB 56 Apocalypse et transfiguration L int r t que porte Steiner l uvre de Bosch est sans doute li au fait que ses peintures sont la projection que Steiner a du monde et de lui m me
256. it encore Wittgenstein dans la m me s rie de remarques La forme de l esprit qui s veille est l adoration Fourbi trucs et m taphysique Le vague et le r el Le monde est un mat riau si peu commode Il grouille bruisse fourmille se d robe sans cesse Il glisse entre les mots mal ajust s il fait la nique nos appareils il se m tamorphose sous nos yeux nous obligeant sans cesse nous re positionner re penser re pr senter Au commencement tait le fourbi tel serait pour moi la premi re phrase d un r cit des origines mythologie personnelle inspir e par Leiris qui sait si subtilement nous faire voir les corr lations pour reprendre une formulation wittgensteinienne entre ce moi grouillant en pleine ducation les mots et le monde Ludwig Wittgenstein Remarques sur le rameau d or de Frazer traduit par Jean Lacoste Qu est ce que croire Agone n 23 Marseille 2000 211 pages pages 12 31 page 20 66 Quand on ne sait pas encore lire quand on n a pas encore appris syst matiquement des listes plus ou moins longues de mots dans un recueil tel que le Pautex destin aux coliers des plus petites classes et gr ce auquel ils peuvent enrichir leur vocabulaire assimilant de le on en le on de nouveaux termes ici group s selon le sens et non class s par ordre alphab tique comme il en est pour les lexiques et dictionnaires quand on n est pas encore initi
257. its distinctifs du personnage par procuration ses modes de d placement privil gi s sont l errance ou le repli Tant t d rivant dans les rues de Saint Brieuc ou de Catane tant t se r fugiant dans leur bureau ou leur chambre Cripure et Antonio ne cessent de fuir leurs concitoyens Lorsque tout Catane apprend la nouvelle de l impuissance d Antonio le jeune homme se retire dans sa chambre d enfant Un long processus de recroquevillement se met alors en place De son c t Cripure s efforce par tous les moyens d chapper aux regards et de se pr munir de la b tise de ses concitoyens il s enferme dans son bureau pour se plonger dans ses souvenirs ou bien tente d oublier sa souffrance et son amertume dans l alcool En recourant cette double dynamique d errance et de recroquevillement Guilloux et Brancati montrent combien l autre le diff rent peinent trouver leur place dans une soci t gouvern e par des id ologies et des discours patriotes et virils Si Antonio a autant de mal assumer son alt rit c est bien parce qu elle est per ue comme une redoutable menace et un germe de subversion par le r gime fasciste De m me pour l excentricit et gelosia si aggrovigliava sempre di pi in se stesso fino a sentire l ala della stupidit sfiorargli il cervello Vitaliano Brancati Paolo il caldo in Opere 1947 1954 Milano Bompiani 1992 p 945 Traduction de Valeria Giannetti in T
258. jug selon ses uvres Ap 20 Serait ce le sens des derni res paroles de Zvat alors qu il invite Steiner abandonner le bateau des morts FB 222 Car c est bien la barque de Charon qui est voqu e ici Celle qui a pour fonction de faire passer aux mes des morts les fleuves qui les s parent des enfers Quoi qu il en soit la mort est lib ratrice pour Steiner Elle met fin toutes ses tristesses ses questions et m me sa peur FB 215 de la m me fa on que la nouvelle J rusalem essui e toute larme car le monde ancien dispar a t Ap 21 La mort est sa r compense et constitue le seul miracle possible pour Steiner FB 215 Il se donne la mort dans une tentative d attribuer un sens sa vie D ailleurs comme le dit le cur de Rotterdam une belle mort elle seule peut parfois donner l impression d une belle vie ceux qui sont d sesp r s FB 181 Mathilde dans Les 71 Cette inscription figure au centre du tableau Les sept p ch s capitaux de J r me Bosch FB 134 Or la signification de cette citation latine nous est donn e sur le ton cynique de Lucien dans Le ma tre de jeu Elle se r f re l omnipr sence de Dieu Cave cave Dominus videt Oui je vois tout Votre merde aussi bien que vos belles actions MJ 188 La Bible Jonas p 730 32 Schmidt Jo l Charon Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine
259. l ditions du Pr ambule 1989 Jolivet R gis Sartre ou la philosophie de l absurde Paris Librairie Fayard 1965 163 p La Bible Traduction oecum nique de la Bible Paris ditions du Cerf 1988 1860 p Nietzsche Friedrich Ainsi parlait Zarathoustra Paris coll Folio Essai Gallimard 1971 544 p Oore Ir ne Itin raire cr ateur dans l uvre romanesque de Sergio Kokis Voix de la francophonie Belgique Canada Maghreb Dir Lidia Anoll et Marta Segarra Barcelone Publications de la Universitat de Barcelona 1999 pp 235 245 Paterson Janet Quand le je est un e Autre l criture migrante au Qu bec Reconfigurations Canadian literature and postcolonial Identities Litt rature canadienne et identit s postcoloniales Ed Marc Beaufort et Franca Bellarsi Bruxelle Peter Lang 2002 pp 43 59 Schmidt Jo l Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine Paris Librairie Larousse 1965 320 p Drame collectif et trag die priv e dans Le Sang noir 1936 de Louis Guilloux et Le bel Antonio 1949 de Vitaliano Brancati Mathieu Laarman Paris X Nanterre La lecture compar e des romans Le sang noir 1936 de Louis Guilloux et Le bel Antonio 1949 de Vitaliano Brancati permet de mettre vidence un proc d singulier d inscription de l Histoire dans la fiction narrative Adoptant une approche contraire celle privil gi e par le roman historique les deux crivains portent leur
260. l y toujours eu dans la froideur de ton sexe enfant abandonnique fils trou des rancoeurs accumul es un corps perdu une femme absente mortelle la plus belle des belles comme si c tait la seule Ta m re La disparue Comme si c tait une pr sence Ce vide L cho Une litanie de l inconscient En te donnant la vie ta m re d sirait ta mort tr sor U 65 En italique dans le texte 170 Ce passage conclut le premier chapitre du roman qui a pour sujet principal l histoire du suicide Le ton est cruel et rancunier elle peint un portrait d une m re qui n a jamais aim ses enfants L image du fils trou qui vient de la froideur du sexe de sa m re implique que Chut tait vou la mort m me avant sa naissance cause de cette m re sorci re U 29 Nous remarquons d ailleurs que le th me du vide souvent associ au fr re est ici li la m re cr ant donc un autre rapport entre eux Il est important de noter que Milou est convaincue que la m re ne les a pas quitt s comme le croit Unless mais qu elle s est suicid e C est peut tre cette th orie de suicide maternel con ue par Milou qui a fait na tre l id e de suicide chez le fils une question laquelle les s urs n auront jamais de r ponse En fait Unless admet que l opinion que son fr re a adopt e par rapport la possibilit que leur m re ait choisi de se suicider lui imp
261. la mani re d une sc ne s emploie ind finiment r employer les grandes images arch typales en latence dans l imaginaire des personnages pour les transposer dans un r el d naturalis par le prisme du regard interne De masques en leurres le sujet semble donc incapable de se positionner en tant que conscience isol e sans cesse emport par le tourbillon des faux semblants Parce que toute identit se fonde dans le creuset du langage mais galement parce que toute relation s enracine dans l change le sentiment amoureux semble alors plus que tout autre devoir s appr hender selon les al as du discours dans la mesure o c est par lui que s instaure la distorsion fondamentale du m me et de l autre Ainsi de phrases en songes d images en signes le roman peu peu transcrit l existence et les symboles transfigurant inlassablement les choses comme les tres on ne saurait plus distinguer la fiction du r el De m me l amoureux incapable d y parvenir de lui m me fixera ses d sirs sur des transferts muets seuls capables de co ncider avec la romance qu il s est assign Pris aux jeux du verbe et des signes prisonnier des conventions tant esth tiques que culturelles l tre perd alors en identit ce qu il gagne en universalit Aussi parce que l espace amoureux se dresse comme le d cor privil gi des motions malmen es il n est pas tonnant de voir les topo litt raires investir
262. la pl nitude Cette primaut de l action sur les mots comme l explique C cile Berthier leur permit de devenir populaires elles ne voyagent pas pour crire comme font leurs confr res crivains voyageurs mais elles crivent pour voyager Ce refus de la posture de l auteur finit par tre payant puisque c est gr ce lui en partie que les bourlingueuses se font conna tre et appr cier Berthier 2008 Inutile de multiplier les exemples pour montrer la r elle popularit que vont conna tre ces nombreuses aventuri res aux profils si diff rents et ses chos chez les gens de lettres Nous souhaitons maintenant examiner sa diffusion sous la plume d crivains pour comprendre ce ph nom ne Ingrid ou la belle et courageuse aviatrice A l exception du roman burlesque de Henry Kistemaeckers Aeropolis ou roman sc nario de Ricciotto Canudo L Autre Aile rares sont les fictions mettre en avant premi re un personnage d aviatrice On trouve plus fr quemment une anecdote rapportant le fait que l h ro ne a r alis son bapt me de l air lors de l adolescence ou particip un vol d exhibition avec un grand pilote Ghyslaine Tr mouliat dans l Histoire de quinze hommes de Marcel Berger est par exemple d crite comme l une des premi res petite fille tre mont e en avion 112 Aussi le 12 roman Deutschland 1929 de Ren Trintzius mettant l honneur une jeune sp
263. la sc ne sentimentale le jeux des tres relayant le fard des phrases La mise distance du m me et de l autre ne pouvant se r aliser que par le biais du langage une infime variation s bauche alors de l id alisation int rioris e au songe partag 1 Th tre Roman op cit p 338 1 Blanche ou l oubli op cit p 272 219 Au th tre des passions rituel et spectacle de l amour Les sch mes et motifs romanesques tant eux m mes la transposition sublim e d un m me r cit existentiel insensiblement le glissement s op re de la fiction la passion de l motion la composition Dans cette mascarade g n ralis e les individus ne semblent plus se singulariser par une personnalit propre mais plut t se d finir par la position typisante qui leur a t attribu e tous endossant leur r le ou du moins tentant d sesp r ment de co ncider l image que les autres leur soumettent Le th me de la strat gie amoureuse para t d s lors parfaitement co ncider avec cette hypoth se selon laquelle le couple serait une entit r gie par des m canismes purement sc niques Le roman semble alors v ritablement s riger comme l espace dramatique par excellence assumant le d ploiement de la ronde des amours fauss es puisque d artifice en clich il d peint en m me temps qu il les d nonce la facticit des sentiments et la part de com die mondaine qui in vitabl
264. la transcendance n est pas s par e de l homme le divin s incarne dans l humain A ce stade de l histoire l homme est encore un tre complet il n est pas ali n de la transcendance c est dire de son origine Un tre complet est en harmonie avec lui m me et avec le monde car il voit en lui m me et le reste du monde la m me incarnation de la transcendance Il aime mettre en repr sentation la transcendance parce qu il en fait partie int grante Pour lui repr senter la transcendance c est se repr senter lui m me et vice versa D o la statue de groupe plaqu e sur avec la construction Le groupe de gens nus dansant et se r jouissant ne connait pas le clivage int rieur il s inscrit dans l espace temps infini et d passe pour cela la finitude de leur corps Ils n ont pas besoin d aller chercher la transcendance ailleurs elle est tout proche d eux elle est dans la vie elle est dans ce monument sublime elle est dans tout un chacun Les bras ouverts de la femme que l on trouve au milieu symbolise le geste triomphal de l humanit euphorique dans son enfance elle accueille tout comme manation de la transcendance elle c l bre le sublime transcendantal en se c l brant elle m me Avec l volution du temps l histoire de l humanit passe du geste de la femme triomphante celui du chef d orchestre En m me temps on passe de la monumentalisation du sublime dans l espace sa
265. le autrefois prisonni re comme la photo Dans le premier chapitre nous avons analys le passage Une Lisa descendue sur terre qui touffe dans sa cellule Une Lisa qui enfin n en peut plus de faire semblant IM 92 Il est pertinent notre analyse de la famille de noter que le mot cellule voque la cellule d une prison D ailleurs apr s leur promenade la prison Bordeaux il devient clair que ce sentiment d emprisonnement a aussi atteint le plus jeune enfant Samuel De retour la maison Samuel dessine des murs un d me des hautes et grillag es des sous terrains ramifi s Il pr pare sa propre vasion IM 119 Il est vident que les trois enfants touffent dans la maison familiale 177 Selon Baechler le parent peut gravement d cevoir son enfant lorsqu il n arrive pas satisfaire l image que tient l enfant d un parent normal 339 Dans L le de la Merci les parents sont souvent distants et indiff rents envers leurs enfants En effet c est surtout lorsque les membres de la famille sont ensemble que cette distance entre eux est mise en relief Viviane est ainsi absente s par e des tres C est arriv peu peu et peu peu H l ne n a plus trouv d adjectif pour d crire sa m re Quant son p re Il a t conquis par le monde ext rieur H l ne l imagine au milieu de sa boutique d ordinateurs Il parle ses clients du ton assur qu il emp
266. le sera sauv e cependant elle prouve de la difficult se valoriser cause de son internalisation du m pris social de l ob sit La narratrice identifie son p re comme celui qui lui a enseign comment se d tester et qui lui a ni la chance de se voir comme tant normale l acte de parricide est donc l ultime effort de la narratrice de se lib rer de ces contraintes Cet essai analysera le d veloppement psychologique de la narratrice pour montrer que le meurtre commis part la narratrice est un acte symbolique de son rejet des contraintes sociales contre les ob ses Cette analyse se fera en quatre tapes en premier nous pr senterons l opinion de la narratrice de celles notamment sa m re et son amie Alice qui ont un corps et une attitude valoris s par la soci t Nous examinerons ensuite le conflit interne qu prouve la narratrice au sujet de son corps et de sa personne Troisi mement nous montrerons que son p re est au c ur du conflit qu prouve la narratrice Enfin nous d gagerons l engagement de la narratrice dans une lutte contre les valeurs sociales culminant dans le parricide De plus dans la conclusion de ce projet nous montrerons que la probl matique pr sent e dans La danse juive est particuli rement pertinente dans le contexte qu b cois ainsi que dans le contexte global 50 L analyse de la probl matique pr sent e dans La danse juive s appuiera sur les th ories de Jean Baudri
267. les liens avec ses amis Alice et Mel qui cherchent atteindre l id al social Ensuite elle visite la famille de sa grand m re pour voir un monde dans lequel les ob ses sont confortables Finalement la narratrice tue son p re qui a renforc les contraintes de la soci t de consommation celui qui lui a ni le monde qui l aurait accept e La probl matique pr sent e dans La danse juive est la fois pertinente dans le contexte qu b cois ainsi que dans le contexte occidental L intrigue de La danse juive se d roule Montr al selon l analyse de Lucie Joubert le choix de Montr al est important parce que en tant que grande m tropole il semble y avoir dans cette ville assez d espace pour un citoyen ob se Cependant cause de ceux et celles qui se fient l id al de la soci t de consommation la ville devient trop petite pour un Dans la version lectronique de l article de Joubert il n y a pas de pagination 63 individu ob se d une fa on que les petites villes au Nord vitent L espace montr alais et qu b cois est ainsi important pour le d veloppement du th me du roman De plus Joubert pense que pour poursuivre son th me Tremblay devrait situer son prochain roman Paris afin d laborer son enqu te de la relation entre la taille du corps et celle de la ville Cette assertion de Joubert indique que Montr al et Qu bec se trouvent dans le contexte occidental Ceci est a
268. leur part se trouve dans l tang embras de feu et de soufre c est la seconde mort Ap 21 Voil de quoi alimenter la conscience populaire d un tourment certain L Apocalypse johannique pr sente un temps lin aire irr versiblement orient vers la mort o l me des hommes sera jug e en fonction de leurs uvres D s lors la finitude propre l homme agit sur l Jexistence comme un d clic pour l action G 199 La condition mortelle devient une r compense car sans elle tout para t fade et r p titif AA 62 Elle conf re l homme une libert qui cependant exige de ne pas s arr ter en chemin l arr t c est la mort PM 364 Par ailleurs l Apocalypse dans son sens grec originel c est d abord la R v lation Elle d signe la vision de Jean de Patmos une vision selon Northrop Frye dont la signification totale peut appara tre tout moment et n importe qui Voici je viens comme un voleur Ap 16 15 Ce chapitre propose d explorer dans l optique du mythe de l Apocalypse le d sir de transfiguration chez les personnages de La Bible L Apocalypse p 1814 Dor navant toutes les r f rences L Apocalypse se feront entre parenth ses dans le texte par le sigle Ap suivi du chapitre et du verset Le concept de libert chez Kokis est expliqu travers les paroles du peintre Gilberto dans le roman Errances La libert
269. linquance nous voil nouveau par la mont e des circonstances parmi les prisonniers de la caverne Fran ois Chobeaux lequel a travaill sur l inadaptation sociale des jeunes occidentaux contemporains ceux qui forment la zone auto proclamation non moins r v latrice dont l absence de qualificatif on attend l adjectif donne voir litt ralement sa n gativit les appelle lui les nomades du vide usage encore une fois de la po tique pour voquer les affres d une vie dans laquelle les pratiques rituelles de la r alit sociale n ont pas t transmises Cette absence de connaissance des rites de la vie en commun enferme l individu dans un errance solitaire puisque l existence m me d une communaut zonarde est illusoire au sens o la solidarit est inexistante ou ph m re Il crit ceci 3l Marc Aug Pour une anthropologie des mondes contemporains Champs Flammarion Paris 1994 195 pages page 89 90 La vie d errant n a rien d exotique ou de folklorique et rien qui puisse laisser penser qu un r el mode de vie une culture sont en train de na tre ici C est un enfermement dans une souffrance individuelle et dans une absence totale de sens L vocation de ces marges de ces individus litt ralement mis hors jeu de la r alit montre l importance de cet apprentissage rituel qui est loin d tre un seul postulat philosophique Cette description donne vo
270. llard nonc es dans La soci t de consommation et de Kathleen LeBesco dans Revolting Bodies The Struggle to Redefine Fat Identity pour d crire l id ologie de la soci t de consommation contemporaine envers le corps de ses membres Les ph nom nes qui sont identifi s et analys s par Baudrillard et LeBesco sont v cus par la narratrice Dans Revolting Bodies LeBesco maintient que dans une soci t capitaliste the attitude toward fatness as a failure of citizenship prevails LeBesco 55 LeBesco base cette assertion sur le fait que dans une soci t capitaliste ce sont les valeurs du caract re moral du travail fort et de la discipline personnelle qui sont valoris es 55 Typiquement dans de telles soci t s les personnes ob ses sont per ues comme ayant manqu de discipline de caract re moral ou n ayant pas accompli le travail n cessaire pour leur assurer une figure mince 23 Ces personnes sont donc jug es mauvais citoyens Dans La soci t de consommation Baudrillard explique comment ces valeurs ont pu prendre une telle importance dans une soci t capitaliste Baudrillard explique que la force consommative qui motive la consommation est une force d origine sociale Baudrillard 103 ce qui entra ne que les produits sont consomm s comme l ments de syst me plut t que pour atteindre un rapport d un individu un objet 104 Ce syst me assure l ordonnance des signes et l int gr
271. loie parfois au t l phone Presque un autre homme Tant mieux pour lui croit elle fermement Un coup de pied sur le mur Tant mieux pour tous les autres IM 25 Manifestement ils demeurent motionnellement s par s H l ne n arrive pas d crire sa m re et croit que son p re devient un autre homme lorsqu il quitte la maison Les enfants ne connaissent point leurs parents et il est vident que les parents ignorent l identit de leurs enfants En effet la relation entre les parents et les enfants est d pourvue de l amour dont les enfants ont besoin pour se sentir int gr s dans le contexte familial L esprit qui r gne est celui de chacun pour soi cette s paration des tres constitue aux yeux des enfants un rejet impardonnable Alors que ce rejet provoque des crises de col re et de violence chez H l ne et chez Samuel Lisa se recroqueville gardant sa souffrance pour elle m me L attention parentale insuffisante ainsi que l agression qui d coule de la d t rioration progressive du mariage de Viviane et de Robert p sent lourdement sur Lisa D ailleurs la tension constante entre la m re et le p re fait que les effets n fastes de la carence parentale sur la plus jeune fille sont aper us sans tre r solus Lisa n a pas l air dans son assiette ces temps ci Ce n est s rement pas cause de moi a r pondu Robert 178 Et tac La conversation s est arr t e l Ch
272. lors que le Tractatus est chef d uvre de m taphysique fantastique quand y coexistent la fois la possibilit de faire des mondes parfaits et celle de s en d livrer La tentative de se d faire de l enchev trement du r el qui m le si bien compr hension et cr ation nous place invariablement dans une posture donquichottesque L exp rience de se battre contre des moulins vent n est pas dans l action si d sagr able elle procure souvent au moins l illusion de lutter C est lorsque l on se sent regard un peu comme dans l exp rience sartrienne de la honte que cet acte devient ridicule Wittgenstein philosophe des Als Ob diss que nos mani res de faire des mondes et nous montre en poules couch es sur le dos alors que nous nous imaginons guerroyant C est Jacques Bouveresse qui le premier dans un philosophe chez les autophages met cette comparaison entre la situation de la philosophie et cette poule hypnotis e la poule de Kircher Cette volaille plac e en position couch e dans un cercle de craie est incapable de se lever ce syndrome est moins frappant en philosophant mais non moins probl matique En effet le cercle hypnotique que l on d couvre aux abords de la philosophie pr sente deux aspects int ressants et non moins insurmontables D une part il est presque invisible en fait c est comme s il fallait d j tre un peu tomb dans le pi ge tre l int rieur du cercle pour
273. lt d aller au del des contraintes psychologiques que lui a impos es son p re Cependant 8 Mel est un personnage tr s int ressant surtout en relation au th me dans La danse juive de l aspect religieux du projet de maigrir une analyse de ce personnage est donc au del du sujet de cet essaie 61 lorsqu elle est questionn e par sa grand m re qui lui demande pourquoi elle est venue elle r pond simplement pour voir 138 Il est important que la narratrice observe ce monde dont elle ne connailt pas les codes mais dans lequel Elle n a aucune trace des douleurs qu elle ressen t parfois avec Alice ou avec s a m re 136 138 Avec la famille de son p re au Nord la narratrice trouve un monde qu elle ne connaissait pas un monde dans lequel les personnes ob ses peuvent se sentir l aise C est le monde que lui a ni son p re et m me si elle voit que c est le monde dans lequel elle se sent plus confortable elle comprend aussi qu elle ne peut pas y rester elle ne peut pas se cacher dans cet endroit de confort sans d abord faire face aux causes de son loignement de cet endroit Ultimement la narratrice ne peut pas viter la confrontation avec son p re le symbole et l outil de toutes les contraintes de la soci t de consommation La narratrice prend conscience du r le qu a jou son p re avant sa visite au Nord mais elle doit suivre les tapes afin de v rifier
274. lus refusent de quitter leur proches La foule des contestataires finit par envahir la gare et Cripure s clipse Ayant entendu son coll gue Nabucet mod le de veulerie et de compromission promettre que les protestataires seraient mat s Cripure lui ass ne une gifle qui lui vaut une menace de duel de la part de son ennemi jur Quelques jeunes gens favorables au professeur de philosophie convaincus qu un duel l p e signerait sa mort obtiennent de Cripure qu il signe un proc s verbal de carence Mais cet arrangement ne fait que porter son apog e la fureur et la honte de Cripure qui s estime tromp et d shonor Le lendemain l aube Cripure part pour sa promenade matinale En son absence sa compagne Ma a lib re ses chiens qu elle laisse batifoler dans la maison De retour chez lui Cripure se fige en ouvrant la porte de son bureau Des bouts de papier d chiquet s par les chiens jonchent le plancher Ce sont les fragments de son grand uvre cette Chrestomathie du d sespoir qu il voulait tre son ouvrage ultime De d sespoir Cripure s empare du revolver qu il cache dans son tiroir et se tire une balle dans la poitrine Autour de Cripure gravitent d autres personnages grotesques ou tragiques prisonniers de leurs destins de solitude et d exil la vieille farfelue Mme de Villaplane perdument amoureuse de son unique pensionnaire le jeune Kaminsky les ins parables Nabucet et Babinot patr
275. lut de la communaut Nicolas proc de l isolement et l an antissement de la victime missaire qui serait 7 Freud Malaise dans la civilisation Op cit p 65 212 selon lui porteuse d une infection qui menacerait l unit de la communaut L infection est symboliquement repr sent e par l intellectuel dissident qui ose manifester sa diff rence face au groupe dominant Et le th tre de Pinter comme celui de tant d autres dramaturges n a jamais t aussi r v lateur des dysfonctionnements socio politiques dans le monde que dans les pi ces de la deuxi me moiti du XX si cle L individu y est comme asphyxi la parole se fait rare parse monosyllabique et le monde qui l entoure se r sume un espace clos o violence sacr et politique deviennent des termes interchangeables et l art de gouverner prend une dimension religieuse susceptible de justifier toutes sortes d exactions Le droit naturel de l individu devient une abstraction la politique un lieu de violence qui transgresse toute forme juridique et l homme prouve une trange jouissance de la souffrance qu il inflige son prochain en donnant expression ses pulsions agressives BIBLIOGRAPHIE Pinter et la critique th trale Esslin Martin Pinter The Playwright London Methuen 1992 1970 The Peopled Wound London Methuen 1970 The Theatre of the Absurd London Pengui
276. m me temps la connaissance de soi et la reconnaissance de l autre comme une machine briser la solitude surmonter la nuit rompre le silence tout en pr servant son ind pendance l gard d une langue jamais v ritablement ma tris e Au morcellement incontournable se greffe irr m diablement la seule puissance reconstituante et liante du songe dont la coh sion ne se fait que dans la reconnaissance et la perp tuation de la mise en pi ces L ternit de l uvre n e de cette discontinuit constitutive de l homme fond dans un m me creuset la p rennit de l art par del son corps morcel mais approche galement les confins du signe et du mythe Si le lecteur peut tre assur de sortir du livre dont il entreprend la lecture il ne ressort cependant jamais totalement indemne de ce labyrinthe o l auteur se joue de lui comme de ses personnages L uvre n a donc pas de fin elle ne peut finir puisque sans cesse renouvel e elle ne commence jamais v ritablement son d veloppement relevant bien plus du temps cyclique des r cits mythiques que de la lin arit romanesque Aussi mimant la figure du labyrinthe l esth tique romanesque constitue t elle la g ographie ST Th tre Roman op cit p 496 Ibid p 275 Ibid p 347 Ibid p 365 235 l gendaire partir de laquelle se fige et se formalise la pens e de l auteur ce lieu de passage o la conscien
277. m commun des objets dans lesquels le sujet s ali ne se perd meurt soi pour parvenir soi pour vivre Ceci dit le temps et l espace le monde ne sont pas simplement une circonstance o le sujet r alise son exp rience ils constituent l exp rience elle m me En effet la repr sentation de nos sensations sous forme temporelle est le r sultat complexe d un travail qui combine les diff rents sens sens du pr sent sens de la dur e etc Le sentiment du temps ne d coule pas de la dur e objective des ph nom nes mais plut t du changement de la perception du temps laquelle r sulte du processus permanent d interpr tation que nous op rons Si la dur e est l exp rience du temps le temps lui m me est toujours con u comme une sorte de repr sentation plus ou moins abstraite de contenus de sensations Autrement dit le temps ne contient pas les v nements il est fait des v nements eux m mes dans la mesure o ceux ci sont appr hend s par nous De m me il n y a non plus une espace en tant qu entit r elle c est une notion form e par le sujet suivant l volution historique de sa perception et de ses connaissances L espace n est pas une r alit en soi dont la repr sentation seule est variable suivant les poques L espace est l exp rience m me de l homme La question se pose comment les images fixes non temporalis es peuvent elles rendre l exp rienc
278. maison sont associ es un malaise continu et bien pire une prison 2003 51 En effet la m re contr le les moindres gestes de ses enfants leurs paroles leurs actions leurs sorties ils n ont pas d amis et la famille ne part jamais en vacances Alors que l histoire tourne principalement autour du personnage d H l ne mettant l accent sur sa rancune et sa col re envers ses parents l crivaine indique implicitement et d une fa on soutenue que cet enfermement affecte le plus profond ment le personnage de Lisa 7 Son p re lui peut passer des heures faire des calculs sur la table de la salle manger Ensuite il va se poster devant la fen tre IM 17 Lisa observe la rivi re par la fen tre IM 194 8 Bien que ce petit d tail semble insignifiant il faut noter qu apr s le suicide de Lisa la derni re page du roman l crivaine fait allusion cette m me photo Elle repense parfois aux d tails r v lant la monstruosit humaine mais son tiroir cl reste vide Plus de cahier plus de photo de mariage Il n y a plus rien IM 202 L criture de ce roman est circulaire les symboles pr sent s au d but sont tiss s travers le roman et prennent tous une signification importante La progression qui se fait en ce qui concerne la photo elle d cide de l enlever du tiroir semble sugg rer que l espoir et le bonheur seront maintenant possibles pour cette famil
279. mans d Aragon op cit p 250 4 L Aragon Elsa p 9 cit in M C Thietard op cit p 28 Ibid Elsa La place de toute chose cit in M C Thietard op cit p 33 La mise mort op cit p 380 5 Ibid p 230 230 interrogent sans cesse la dialectique fonci re du m me et de l autre Dialectique que seul le recours constant aux grandes figures et arch types semble m me d articuler fondant dans un unique creuset les temps humain amoureux et textuel Le temps r v se fondant insensiblement au temps narr les fronti res du fictif et du r f rentiel s abolissent au profit de l trange d voilement d une v rit faite de fiction L absolu de l amour comme v rit supr me se projette vers l infini d une parole qui inapte communiquer se recr pourtant inlassablement de songes singuliers en mythologies universelles du cr ateur la cr ature la suite de l amoureux le romancier partage alors ses songes et ses mensonges au rythme des oscillations du miroir tournant des mots auquel se mirent et son uvre et son tre son devenir et son pass l irr el mat rialis et l authenticit invent e Et puisque l Autre n est jamais que l cho du m me en qui se cristallisent angoisses et d sirs volont d affirmation et r ves de dissolution le roman en tant qu alt rit sublim e d voile l existence et ses limites en m me temps qu il r v le l tre et
280. mbe Ren H l ne Boucher pilote de France Paris ditions Baudini re 1937 Charreton Pierre Les F tes du corps Universit de Saint tienne CIEREC Travaux XLV 1985 Chefdor Monique Madame mon copain Elisabeth Pr vost et Blaise Cendrars une amiti rarissime Nantes Editions Joca Seria 1997 Ch routre Marie Th r se Le Scoutisme au f minin Paris Cerf 2002 Courri re Yves Pierre Lazareff ou le vagabond de l actualit Paris Gallimard 1995 Delporte Christian Les Journalistes en France 1880 1950 Naissance et construction d une profession Paris Seuil 1999 Desanti Dominique La Femme au temps des ann es folles Paris ditions Stock Laurence Pernoud 1984 Le livre de poche 1992 Dieudonn Robert Le Pur sang Paris Ollendorff 1923 Fayard Jean Oxford et Margaret Paris Fayard 1924 Fleming Peter News from Tartary London Jonathan Cape 1936 29 Fouret Claude 1926 La bataille de la Manche la nage Revue STAPS n 66 avril 2004 43 61 Gerbault Alain Seul travers l Atlantique 1924 Paris Grasset et Fasquelle 1991 Griffet Jean Aventures marines Images et pratiques Paris L Harmattan 1995 Guitard Auviste Ginette Paul Morand 1888 1976 L gende et v rit s Paris Balland 1993 Heimermann Beno t Tita na Paris Flammarion 1994 H mon Louis Battling Malone pugiliste 1925 Paris Grasset Les Cahie
281. ment ses magnifiques jambes elles suffiraient d ailleurs me faire perdre toute science sportive si j en avais une 61 pr cise t 1il ce sujet Il n y a rien donc d tonnant ce que Trintzius fasse entreprendre son personnage cette folle aventure a rienne aux c t s d un pilote exp riment Konrad Steyer en passant par des villes exotiques qui faisaient la une des d bats politiques comme Beyrouth par exemple la nouvelle capitale de l Etat libanais L crivain entrelace habilement la fiction et l histoire et il profite de l actualit pour composer les traits de ce personnage f minin En effet le charisme d Ingrid est emprunt ces femmes exceptionnelles qui conquirent jadis l espace sportif a rien telles que les Stelliennes en passant progressivement du statut de passag re celui de pilote sportive Rob ne 174 Si l on reprend les propos de Margarete Zimmermann son exploit et l pisode final racontant son pop e dans le d sert de Gobi voquent les exp ditions de l quipe de Sven Hedin envoy e avec le soutien financier de la Deutsche Lufthansa pour pr parer une ligne a rienne Berlin P kin Zimmermann 63 Contrairement aux photographies d aviatrices que l auteur avait le loisir de voir dans les p riodiques de l poque Ingrid incarne vraisemblablement ses yeux une figure id alis e Comment pourrait on qualifier l h ro sme don
282. mes litt raires Paris F Nathan 1978a L h ritage de la violence dans One for the Road de Harold Pinter Souria Salhi Grandi Universit de Saint Etienne Dans cette tude non exhaustive de One for the Road 1983 de Harold Pinter nous abordons la transposition du religieux dans la sph re politique En d autres termes l instrumentalisation du religieux dans le seul but de justifier tout acte permettant de ce maintenir au pouvoir travers des m canismes conscients ou inconscients qui r gissent le comportement humain et leurs implications dans l exercice du pouvoir Notre lecture de One for the Road est essentiellement bas e sur la th orie de Ren Girard dans le but de comprendre l origine de la violence qui gangr ne l ensemble de la culture humaine En renouant inlassablement vers le crime individuel ou collectif vers la transgression de l interdit vers le sacrifice du bouc missaire en r instaurant la dynamique sacrificielle au centre de la sc ne le th tre nous fait acc der la connaissance Il fait surgir au del des mots un r el d livr de ses costumes de sc ne Par son caract re engag le th tre anglais des ann es quatre vingt a plus que jamais m rit l tiquette politique lorsqu il a d cid de prendre explicitement en charge la d cadence de la condition humaine suite l instauration de nouveaux syst mes et de nouvelles institutions politiques conomiques
283. mme le grondement du tonnerre ou pire encore le d bordement imminent de la rivi re L le de la Merci Les maladies mentales les id es noires un go t pour la solitude la d pression et la manie repr sentent des conditions inn es qui peuvent indiquer la possibilit d une pr disposition au suicide cependant leur existence n entra ne pas n cessairement ce r sultat Selon Durkheim les rapports entre l individu qui se tue et la soci t religieuse domestique ou politique dont il fait partie r v lent les causes du suicide 222 En effet les cinq romans l tude examinent tous le r le de la famille dans la vie du personnage qui se suicide Ils explorent l id e que l h r dit l enfance et la m moire fondent la base de l histoire personnelle et soulignent que ces l ments sont inextricablement li s la conception de la cellule familiale ou l absence de celle ci dans le cas de l orphelin L histoire personnelle forme l identit du personnage qui se suicide et influence ses d cisions D ailleurs lorsque nous consid rons le niveau d interd pendance psychologique entre le personnage et sa famille ainsi que les motions fondamentales lamour et la haine sur lesquelles cette interd pendance est fond e les relations familiales s av rent d une importance singuli re Dans ce chapitre nous examinerons dans quelle mesure l histoire personnelle ainsi que la nature des relations
284. mment Yves Bonnefoy a propos son tour une explication le ptyx mot issu d une faute d impression dans un dictionnaire serait un oiseau nocturne Il serait aussi note toujours Bonnefoy la r union des lettres x et y les lettres des quations qui situent un point dans l espace et p et t les lettres de celles qui se compliquent de la consid ration du temps C est donc semble t il l infini que l on pourrait interpr ter ce mot trouvant sans cesse de nouvelles lectures Or ne serait ce pas justement dans ces infinies possibilit s que r side la signification r elle du mot Le ptyx est un mot vide qui ne renvoie qu lui m me qu sa propre absence L ouverture qu il pr sente sur l infinit des interpr tations est caract ristique de ce que J ai appel la po tique du labyrinthe chez Mallarm C est donc dans la multiplicit des lectures possibles ces chemins labyrinthiques que le mot trouve sa signification essentielle celle justement de se d rober sans cesse d obliger le lecteur revenir sur ses pas se perdre dans ses interpr tations Un langage nouveau L criture de Mallarm se caract rise donc comme on l a vu par une utilisation profond ment personnelle de la syntaxe 1 S Mallarm Lettre Lef bure du 3 mai 1868 2 S Mallarm Po sies Paris Gallimard po sie Gallimard 1992 p 58 1 P B nichou Selon Mallarm
285. mps fait l objet de commentaires et de prolongements dont le contenu a ouvert sans conteste notre vision critique du monde litt raire Actuellement le v ritable int r t de cette tude r side plus dans sa m thodologie que dans ses r sultats La formule morphologique de Propp applicable la plupart des contes est en soi une tentative Propp Vladimir Morphologie du conte p 30 Ibid 243 remarquable de rationaliser ce genre litt raire Mais elle est limit e un type d crit pr cis et sa syst matisation reste confirmer C est en tout cas ce qu crit Claude Levy Strauss Chez Propp le formalisme aboutit la d couverte qu il n existe en r alit qu un seul conte D s lors nous savons ce qu est le conte mais comme l observation nous met en pr sence non pas d un conte arch typal mais d une multitude de contes particuliers nous ne savons plus comment les classer Il n est cependant pas question ici de reprendre ce r sultat et de l appliquer un r cit dont la trame ressemblerait de pr s ou de loin celle d un conte Car cette utilisation en dehors du cursus d fini par Propp n aurait pas de sens r el N anmoins l une des bases m thodologiques de cet ouvrage conserve un int r t tangible pour notre tude La fonction telle qu explicit e par l auteur lui m me est l action d un personnage d finie du point de vue de sa signification dans
286. n a Jamais su accepter l autonomie de sa fille puisqu elle lui a donn sa vie elle la voit comme faisant partie de son propre la page 52 Yan Zi dit que sa m re ne prenait jamais la pr caution de dissimuler l abondance de ses jalousies I 52 180 corps Dans son tude sociologique Les suicides Baechler note que dans un grand nombre de familles o une personne s est tu e la seule motion qui relie les membres de la famille est celle de la haine Baechler 261 Dans L Ingratitude la m re d teste sa fille parce qu elle la voit comme tant diff rente d elle m me d autre part la fille hait sa m re car celle ci refuse de lui accorder le droit sa propre identit Par cons quent leur relation se nourrit de cette haine mutuelle qui se manifeste dans leur conduite et travers leurs paroles la m re menace de battre sa fille mort 1 84 la fille imite la violence de la m re en d clarant qu elle est pr te s empoisonner ou trangler cette femme I 84 La m re annonce qu elle se pendra si sa fille se lib re de la famille I 91 la fille planifie son propre suicide En effet leur violence se fait cho soulignant la fois leur interd pendance et la n cessit de leur s paration Yan Zi croit que le seul moyen d accomplir cette s paration de devenir autonome est travers la violence Nous avions besoin d une s paration brutale d
287. n Books 1980 1961 Gussow Mel Conversations avec Harold Pinter trad Isabelle D Philippe Paris Deno l 1998 8 Boireau Nicole Col re et engagement sur la sc ne anglaise du second XX si cle in Berton Dani le Simard Jean Pierre eds Expression contemporaine et repr sentation s dans le th tre anglophone Collection Coup de th tre Universit Jean Monnet de Saint Etienne RADAC octobre 2005 N 20 p 99 213 Lecercle Ann Le th tre d Harold Pinter Paris Klincksieck 2006 Merrit Susan Hollis Pinter in Play Durham Duke University Press 1990 Naismith Bill Harold Pinter London Faber and Faber 2000 Raby Peter ed The Cambridge Companion to Harold Pinter Cambridge Cambridge University Press 2001 Ouvrages de psychanalyse Bass Henri Pierre et al eds D un si cle l autre la violence en h ritage Paris In Press Editions 2001 Freud Sigmund Malaise dans la civilisation Paris Presses Universitaires de France 1992 1972 Julien Philippe L Etrange jouissance du prochain Paris Seuil 1995 Ouvrages de philosophie Derrida Jacques Foi et savoir suivi de Le si cle et le pardon Paris Seuil 2000 1996 Foucault Michel Surveiller et punir Naissance de la prison Paris Gallimard 1993 1975 Kant Emmanuel Sur le mal radical dans la nature humaine traduction Fr d ric Gain Paris Rue d Ulm 2001 1793 Kloss
288. n Hollis Pinter in Play Durham Duke University Press 1990 p 174 206 L Gila Men Nicolas Have they been raping you She stares at him How many times Pause How many times have you been raped Pause How many times p 237 243 We have a first class brothel upstairs on the sixth floor chandeliers the lot They Il suck you in and blow you out in little bubbles All volunteers Their daddies are in our business Which is I remind you to keep the world clean for God p 246 Victor My son Nicolas Your son Oh don t worry about him He was a little prick Victor straightens and stares at Nicolas Silence Blackout p 247 De qu elle morale parle t il donc Il semble endosser la soutane des calvinistes cossais du XVII si cle et croit avoir pour mission de pr server le royaume de Dieu en semant la terreur autour de lui sans avoir de comptes rendre personne Un fanatisme religieux semblable celui trait par James Hogg dans son roman The Private Memoirs and Confessions of a Justified Sinner 1824 Un titre qui en dit long sur la conception calviniste de la r demption et du salut La description qu en fait James Hogg est en ad quation avec les propos tenus par Saint Paul qui semble affirmer que l abondance du p ch a pour r sultat la surabondance de la gr ce lorsqu il dit que Dieu a enferm tous les hommes dans la d sob issance pour faire
289. n Marie Laclavetine Paris Fayard 1989 Paolo il Caldo in Romanzi e saggi Milano Mondadori I Meridiani 2003 Il borghese e l immensit Scritti 1930 1954 De Feo Sandro et Cibotto G A d Milano Bompiani 1973 Lettere al direttore dir Massimo Onofri Milano Bompiani I Grandi Tascabili 1995 Guilloux Louis Souvenirs sur Georges Palante Quimper Calligrammes 1980 La maison du peuple suivi de Compagnons Grasset Les Cahiers rouges 2004 Carnets Volume 1 1921 1944 Paris Gallimard 1978 Ang lina Paris Grasset 1934 Le pain des r ves Paris Gallimard 1942 Entretiens articles et ouvrages critiques Andr Jacques Guilloux Grenier et la guerre in Yannick Pelletier dir Le Mal absolu Actes du colloque Louis Guilloux et la guerre Saint Brieuc ditions Ville de Saint Brieuc 1995 Andreoli Annamaria dir Dalla Sicilia all Europa l Italia di Vitaliano Brancati catalogue de l exposition tenue la Biblioth que Nationale de Rome en mars et avril 2005 Roma De Luca 2005 Battiati Daniela dir Vitaliano Brancati Da Via Etnea a Via Veneto Actes du colloque Da via Etnea a Via Veneto 143 Vitaliano Brancati quarant anni dopo sept oct 1994 Roma Fahrenheit 451 2001 Becker Jean Jacques La France en guerre 1914 1918 La grande mutation Bruxelles Complexe 1988 Berstein Serge et Milz
290. n architecture On pense naturellement au Coup de d s texte fondateur bien des gards Car dor navant le po me jusque dans sa mise en page fait enti rement sens Par sa disposition typographique le texte mallarm en va se rev tir d un sens nouveau devenir l objet de multiples interpr tations Ainsi dans le fameux Sonnet en yx dont chacun s est acharn percer le sens la disposition des mots l int rieur du sonnet la forme du sonnet elle m me et non plus seulement la signification des termes choisis oriente le lecteur vers une ventuelle signification On peut favoriser la lecture d un po me de Mallarm une interpr tation purement textuelle s mantique mais une lecture musicale ou visuelle pourrait aussi bien s y substituer Mallarm multiplie les chemins On ne peut se contenter d une seule lecture car tout fait sens dans le po me Chaque voie doit tre explor e chaque chemin qui s ouvre doit tre arpent Que l on prenne nouveau l exemple du Sonnet en yx Il existe plusieurs lectures possibles de ce po me La premi re consisterait d chiffrer la langue de Mallarm extraire des mots et de la syntaxe si insolites puissent ils para tre une signification 8 S Mallarm uvres compl tes Paris Gallimard Biblioth que de la Pl iade 1988 p 788 On peut renvoyer pour ce type de lecture aux premi res pages de l essai que Paul
291. n av nement ne se fait pas dans la Mort Il est ce temps d illumination toujours r it rable Car la mort n est pas le point d aboutissement de la vie mais une limite qui d termine l tre au moment de son existence C est cette question ma tresse qui est l au centre de tout depuis le d but la fois comme origine et comme moteur de mon activit incessante AL 214 Le narrateur du Pavillon des miroirs ne souhaite 1l pas triompher de la mort lorsqu il prend conscience du fait que le monde est constitu de ti des PM 283 Cette ti deur est bien celle de la mort en vie qualifi e de menace m taphysique omnipr sente par Kokis lui m me AL 64 Le cas de Boris n est pas diff rent La mort est envisag e comme une limite et non comme un passage et c est cela qui pr cipite son urgence de vivre Les risques les coups de t te ce sont eux le sel de la vie On ne vit qu une seule fois E 431 la fin du roman Boris regarde les amis une derni re fois puis il passe de l autre c t de la barri re Or cette entr e dans une nouvelle 6 Introduction L Apocalypse La Bible p 1793 7 Bordeleau Francine Le carnaval des morts Lettres qu b coises p 10 110 existence lui donne une impression enivrante de libert E 181 Le sens de la travers e d espaces est bien celui de l affranchissement d une inertie Il s agit d chapper la m
292. n de d noncer plaisamment un vice typiquement sicilien Pourtant l impuissance d Antonio intimement li e aux v nements politiques et sa mise l cart donnent penser qu travers le sort du jeune homme et de ses proches Brancati entend faire de son roman une sorte de chronique de l Italie fasciste En revanche le sens donner l impuissance d Antonio ou aux d clarations viriles d Edoardo ou d Alfio est moins clair Brancati en fait il un sympt me r v lateur du d clin et de l croulement du fascisme Veut il au contraire sugg rer que les valeurs fascistes reposent sur l exaltation de la force brutale et d une sexualit conqu rante et condamnent de ce fait les d viants sexuels l ostracisme Comment expliquer alors que certains personnages oppos s au r gime s efforcent de faire la d monstration de leur virilit Brancati aurait il dans l id e de montrer que les id aux et les principes gouvernant le fascisme ont contamin pernicieusement l ensemble de la soci t Au lieu de vouloir tout prix r soudre ces contradictions il faudrait peut tre tenter de les accepter et de consid rer qu elles constituent l une des grandes qualit s du Bel Antonio en tant que r flexion sur le caract re paradoxal et contradictoire de P Histoire Petit d tour biographique La vie et la pens e de Louis Guilloux sont indissociables du parcours singulier de son professeur de philo
293. n plus qu une d formation chaque r v lation op re n cessairement une reconstruction la chose ressentie et la chose dite s opposant autant qu elles se rejoignent Diss mination progressive des mots qui par ailleurs semble galement contaminer les tres dans la mesure o lorsque des amants longuement s par s sont amen s se retrouver le discours se r tracte insensiblement jusqu s annuler dans de vaines banalit s La vraie parole donc serait celle qui se dessine en filigrane qui affleure la surface des mots voil s pour tisser la trame d un discours en arri re plan de ce qui se dit L important l essentiel n tant pas n cessairement ce qu on dit mais ce qu on cache dire autre chose I arri re texte au creux duquel se conjuguent douloureusement l irr m diable couperet des paroles et le poids oppressant des non dits Ainsi bien que min e par l irr versible d ploiement du temps et de ses m tamorphoses la langue appara t malgr tout comme ce qui exprime pleinement les d sirs dans la mesure o elle les manifeste en m me temps qu elle les vide de leur suc Et cette expression parce qu elle ne s labore qu au chevet de l absence demeure essentiellement singuli re s tant d lest e de sa dualit en m me temps que de ses illusions Le discours amoureux parce qu il ne se d ploie et prend forme que dans le creuset des chim res individuelles
294. nd par G Granel Editions T E R Mauvezin 1989 244 pages page 56 Ludwig Wittgenstein Le cahier bleu et le cahier brun traduit de l anglais par Marc Goldberg et J r me Sackur Tel Gallimard Paris 1996 313 pages page 40 97 l ontologie de faits ind pendants de nos usages formant un monde qu il s agirait pour le philosophe de d couvrir qui est mise mal par l entreprise wittgensteinienne La renonciation la puret des faits une r alit d gag e des pratiques humaines ne touche pas seulement l entreprise philosophique elle concerne galement et peut tre avant m me la philosophie les sciences dites exp rimentales Si les entreprises cognitives humaines cr ent le fait tout autant qu elles le comprennent elles sont des Fictions th oriques et comme l crit Henri Pierre Jeudy Une chose est certaine vous n tes jamais en mesure de refuser d accomplir des rituels La rigueur grammaticale propre Wittgenstein son attention donn e aux r gles sa prolixit en termes d exemples invitent donc consid rer l ind pendance de nos formes de langage vis vis des faits et donc les reconsid rer ontologiquement parlant En effet si nous n avons jamais acc s qu des pratiques et des usages croire la possibilit d existence d une connaissance purement objective est chim rique car nous ne d couvrons jamais que ce que nous sommes en mesure de d couvrir n
295. ne l id e que l criture de Houde brise le silence des femmes Elle propose que La Maison du remous r crit un genre qu b cois canonique le roman de la terre du point de vue du f minin sous l angle plus particuli rement du rapport entre une m re et ses filles 1994 187 Nous remarquons donc que dans son premier roman comme dans son deuxi me Houde cr e un univers f minin bas sur l amour partag entre m re et fille un univers qui fonctionne ind pendamment de l univers patriarcal 190 les moments t n breux Comme sa grand m re C line se trouve sous le signe d une toile proche le soleil D ailleurs le texte place la m re Edm e et la fille Sylvie sous le signe de la terre Cette m taphore souligne le fait que ces deux femmes repr sentent les sources principales de vie pour C line Il est important de noter que ces deux femmes de la terre sont aussi li es par la parent physique Sylvie ressembl e tonnamment Edm e FSL 45 En effet la pr sence de Sylvie qui est belle grande et courageuse FSL 47 et qui rit du ch timent FSL 45 48 remet en question l image d Edm e comme tant autre La r unification des morceaux Effets sur la famille dans Unless L attitude adopt e par la protagoniste d Unless vis vis du choix de son fr re devient manifeste lorsqu elle d clare Fausse route Le d go t nous tient U 59 Son incompr he
296. ne personne vers la mort D abord l exclusion familiale de Chut est r v l e travers le concept d oubli il faut oublier celui qui refuse la vie Chut oublie a Il file un mauvais coton Il a dit Walter qu il ne viendrait plus aucune f te Je sais c est mieux comme a Bien s r Je ne m en plains pas U 19 Notons que le fr re est associ imm diatement la rupture familiale qu il cause Les s urs expriment leur soulagement l gard du fait que leur fr re celui qui chute refuse de souper en famille Il est vident que son absence est souhait e parce qu elles ne veulent pas tre contamin es par sa folie destructrice tant donn que chaque membre de la famille reconna t en soi m me la pr sence de la folie l exclusion du fr re est rendue probl matique En effet ant rieurement l introduction du personnage de Chut la narratrice a d j introduit une remise en question du concept de la normalit Lorsque Unless rencontre une ancienne connaissance dans la rue elle a l impression d formante qu elle est gonfl e elle se visualise endormie sur le trottoir U 12 Plus loin elle d nonce explicitement la normalit Aussi t aurais pu laisser faire les effusions de la saine camaraderie a ne me donne rien tu saisis U 13 Elle admet que son point de vue sur le monde est souvent d form et qu elle d daigne toute relation qui l
297. ne restent totalement ouvertes Notre faim de fin ne peut donc pas s y satisfaire laissant notre solitude de lecteur l attrait d une prochaine et insatiable lecture 257 Annexe 1 quilibrage des sections dans son dition P O L En abscisse est consign le nombre de pages par section en ordonn e le nombre de pages Nombre de pages 20 258 2 Sections du livre dans son dition P O L Ordre des D but des Fin des Nombre de sections sections sections pages par section 1 9 10 1 2 10 17 7 3 17 31 14 4 32 46 14 5 46 60 14 6 60 70 10 7 70 86 16 8 86 97 11 9 97 109 12 10 109 118 9 11 118 127 4 12 127 128 6 13 128 137 9 14 138 146 8 15 147 157 10 16 157 158 1 BIBLIOGRAPHIE Barthes Roland S Z Paris Seuil 1970 Bremond Claude Communications L analyse structurale du r cit Paris Seuil 1966 Compagnon Antoine Le D mon de la th orie Litt rature et sens commun Paris Seuil 1998 Darrieussecq Marie Truismes Paris P O L 1996 Eco Umberto Lector in Fabula le r le du lecteur ou la coop ration interpr tative dans les textes narratifs Paris Grasset et Fasquelle traduction fran aise 1985 259 Fanny Clouseau et Karine Le Bricquir Marie Darrieussecq parle des ditions P O L Paris Presses Universitaire de Paris 10 Entretiens 2006 Grevisse Maurice Le Bon Usage
298. ne savons rien concernant les circonstances qui ont men l enferment de Victor Gila et Nick N anmoins ce qui ne fait aucun doute c est le go t amer de la violence inflig e par Nicolas ses victimes Deux hommes sont au centre de la premi re sc ne Nicolas le tortionnaire et Victor la victime premi re vue tout porte croire qu il s agit d une banale illustration d un rapport de force entre le pouvoir en place et la classe dissidente Mais on comprend vite que la port e universelle de la pi ce r side dans des consid rations qui transcendent ce qui caract rise la sph re politique D s les premi res r pliques Nicolas pr tend que Dieu parle travers lui Par son geste il s autoproclame repr sentant de Dieu sur terre et s octroie le droit de punir toute personne qui oserait troubler l ordre divin Nicolas Are you a religious man I am Which side do you think God is on Pm Going to have a drink sss I run this place God speaks through me I m referring to the Old Testament God by the way although l m a long way from being Jewish Everyone respects me here Including you I take it If you don t respect me you re unique Everyone else knows the voice of God speaks through me Yov re not a religious man I take it Pause You don t believe in a guiding light Pause What then Pause Nicolas I run this place God speaks
299. ng froid dans sa course avec le temps A l instar de celui qui court vers la jouissance finale et perd ainsi tout le plaisir de l rotisme celui qui ne vise qu un instant perd tous les instants qui le pr c dent Paradoxalement pris dans son lan vers l instant explosif l assassin ne peut jamais l atteindre il est constamment dans l instant du pr paroxysme Il n y a qu un pas franchir mais il n en est pas capable l instant du d chargement lui chappe Klossowski ou les photos de Zucca c est dire natures mortes faites des choses vivantes Lyotard op cit p 30 32 7 En commentant le dandysme monorien Lyotard cite De Quincey propos de P assassinat de pure volupt Dans un assassinat de pure volupt tout fait d sint ress o il n y avait pas loigner de t moin hostile o il n y avait gagner aucun butin suppl mentaire o il n y avait satisfaire aucune vengeance il est claire que se h ter serait en m me temps perdre tout De Quincey cit par Lyotard ibid p 76 266 pour toujours La femme assassin mobilise toute son nergie pour tirer mais elle n y arrive pas elle n y arriverait jamais car l homme qui l accompagne la retient le destin de l assassin travailleur C est la raison pour laquelle l assassin est pris dans une hyst rie L hyst rie c est le d chargement libidinal chou Le bleu de l assassin
300. nnent sur le principe m me de l nigme Que l on prenne pour illustrer cette affirmation l un des plus beaux de ces Vers de circonstance l intention de M ry Laurent Si la Dame aux doux airs vainqueurs Qui songe au 9 Boulevard P B nichou Selon Mallarm op cit p 20 26 Ne voulait il pas en 1892 les faire diter 44 Lannes T ouvre mon billet comme un c ur Avec ses ongles diaphanes 7 Ce texte a avant tout une utilit il se destine au postier qui devra remettre un billet son destinataire La figure du lecteur est donc bien mise en avant Celui ci devra cependant d chiffrer le po me comprendre son message s il veut d livrer la lettre qui l accompagne la personne et l adresse voulues On se trouve ainsi devant le type m me de l nigme po tique qu il faut d abord r soudre Ces po mes simplifi s que sont les Vers de circonstance illustrent parfaitement cette volont de la part de Mallarm de ne pas donner directement le sens du po me de le cacher sous une nigme qui exigera du lecteur un effort et une r flexion Le po te et le b tail Car la po sie de Mallarm ne se donne pas tous Elle exige de son lecteur un travail d interpr tation et se destine une lite seule qui aura su la parcourir et se perdre dans toutes les voies de son labyrinthe C est un plaisir aristocratique pour Mallarm que celui de la po sie
301. ns Unless qui sont ensorcel es par la m moire de leur m re C line est prisonni re de ses souvenirs d enfance de la folie de sa m re et de son suicide Dans un roman comme dans l autre les filles explorent leurs souvenirs d enfance et leur lignage pour enfin cerner chacune son identit Le sentiment d enfermement qu prouve C line co ncide avec le concept du corps de la m re qui est partag par la fille Au cours du roman il devient clair que C line a d une certaine mani re h rit de l alt rit de sa m re les autres membres de la communaut la consid rent comme tant une extension de sa m re une autre qui apportera de la mauvaise fortune En racontant l histoire de sa m re C line se lib re de la hantise de la m re pendue et op re une sorte de rehaussement de la m re de son statut inf rieur d autre Il est important de noter que c est la communaut qui consid re la m re comme tant autre punie par le ch timent de Dieu Rassembl s devant son cercueil les gens du village avaient proclam qu elle n tait pas une femme de bon sens avec ces mots bizarres qu elle leur jetait la face FSL 14 Pour affronter et d construire cette image statique de la femme folle comme tant autre la narratrice n h site pas faire un commentaire sur l ignorance de la communaut et partager avec le lecteur l esprit 71 Qui tais tu Ad
302. nsion du suicide se refl te dans le jaillissement d une esth tique imag e Remarquons en effet le style adopt pour d crire l enterrement de Chut une photographie la famille clat e au cimeti re En n gatif Milou avait les mains pleines de terre Red en avait aux genoux et Walter restait digne derri re elles Et moi de la terre dans les yeux je les regardais les couleurs tremblent J aurais pris cette photo D velopp le film Comme si la mort tait notre plus r elle communication Une photo d apr s guerre Immuable ruine U 63 Unless esquisse les d tails de ce moment difficile comme si elle les voyait par le prisme d un appareil photo Le fait qu elle dissimule l v nement repr sente son incapacit affronter les motions associ es la perte La photographie symbolise la distance qu elle met entre elle et le chagrin qui va bient t la submerger Elle pr cise que les couleurs tremblent ce qui ajoute l image une qualit kal idoscopique En somme elle alt re la r alit afin de la nier Par ailleurs elle compare sa vision de l enterrement une photo d apr s guerre et une immuable ruine une m taphore repr sentant le morcellement de la famille suivant un suicide En effet l esth tique imag e refl te l tat de choc r gnant 191 Nous remarquons que cet tat de choc et d incompr hension est rapidement remplac par l angoisse en parti
303. nstantan ment comme l indice d une s cheresse intellectuelle sans pr c dent Mais tenons bon Si cette position d inspiration wittgensteinienne n est pas id aliste elle n est pas non plus inspir e par le r alisme En effet nous avons de toute fa on tendance glisser vers des explications causales du monde en glosant sans reddition et sans pudeur sur 79 nos descriptions du grand fourbi lesquelles nous laissent affam s litt ralement sans fin En fait tout se passe comme si les hypoth ses scientifiques ou philosophiques qui sous tendent notre conception du monde s instauraient en grandes v rit s par la force de l habitude par leur aptitude durer ou non Il est int ressant de voir comment lorsque l on part de descriptions deux positions philosophiques id aliste et r aliste apparemment oppos es nous r v lent une m me force de conviction savoir que l homme est en mesure de formuler des v rit s sur le monde Dans les deux cas la v rit est d couvrir En ce sens ces deux conceptions ont galement pour point commun de rejeter le pr lude suivant Au commencement tait le fourbi Au dernier mot il faut substituer le terme de v rit Pascal Engel dans la Norme du vrai fait une synth se de cette origine commune De ce point de vue le r aliste comme l antir aliste sont d accord pour dire que le vague n est pas un trait de la r alit mais de notr
304. nt ainsi l achat des magazines sinon la consommation de leur contenu par deux personnes 16 La narratrice aimerait l opportunit d obtenir des v tements la mode dans sa taille 38 mais autrement ne d sire pas la vie de citoyenne id ale de soci t de consommation comme v cue par sa m re et Alice M me si la narratrice s oppose sa m re et Alice chez qui elle per oit la preuve de l effort de se conformer l id al de la soci t de consommation elle ne peut quand m me pas ignorer qu elle souffre aussi d effets nuisibles dans son corps Au cours du roman la narratrice d crit en d tail l apparence de son corps gros et de la sensation d tre dans ce corps Par exemple lorsqu elle s appr te prendre un bain elle se d crit Mes seins lourds tombent sur mon ventre Les marques de mon soutien gorge sont jamais trac es sur la peau de mes paules Mes hanches sont stri es de veines blues 35 Cette description est pr fac e par le commentaire Je vois mon corps mais je me force l ignorer 35 phrase qui r sume l attitude de la narratrice envers son corps au d but du roman Elle est consciente de son corps et des douleurs que lui impose sa graisse mais elle pr f re ignorer ces derni res Nous observons le m me ph nom ne lorsqu elle remarque mes chevilles me font mal C est l ge Ma graisse commence tre lourde porter Je commence compter mes
305. nte de me reformer dans son corps et de me faire na tre avec une physionomie une personnalit et une intelligence son go t 121 Notons que l action d avaler et le processus de la naissance impliquent la pr sence de l eau Selon Bachelard il existe une relation naturelle entre l eau et la maternit 1964 156 Puisqu il s agit d une relation trop intense entre la m re et la fille 1l n est point surprenant que VYan Zi voie la m re comme tant l incarnation de l eau je pensais l odeur de maman Elle suait lorsqu elle se f chait Elle sentait cette rivi re noire traversant la ville Maman me disait qu il s agissait aussi de ma rivi re en passant par ma rivi re mon c ur palpitait La puanteur de l eau affluait de loin Elle m entra nait vers maman comme Seigneur Nilou que ce concept est mis en relief travers les th mes r currents de l eau et de l avalement Cette derni re utilise le passage ci dessous pour illustrer son opinion Des vagues de poussi re sortant des ruines des anc tres et portant des g n rations de d chets roulent autour d elle et blanchissent ses cheveux sans qu elle s en rende compte maman est en fait aussi innocente et vuln rable comme les autres Elle ignore la poussi re en train de la remplir elle et tout ce qui l entoure Lorsque la poussi re deviendra trop paisse l eau de la mer envahira la ville et les corp
306. nte de le voir plut t que de le penser n en d plaise mes cong n res Tentons donc de d crire la caverne en consid rant non pas sa mont e rude et escarp e mais ce petit mur derri re lequel se cachent les montreurs Julio Cortazar Marelle traduit de l espagnol par Laure Guille Bataillon et Fran oise Rosset L imaginaire Gallimard Paris 1966 590 pages pages 478 479 88 de marionnettes Int ressons nous ces personnages de l ombre peu recommandables selon l avis de Platon Voil donc leur pratique fa onner des statuettes d hommes et d animaux dresser un mur allumer un feu tout a pour mimer la vie pour la jouer devant des prisonniers de surcro t Quelle dr le de ch timent n est ce pas Tout coup en d crivant ainsi le proc d m appara t un air de famille une liaison interm diaire entre deux ch timents le sort des prisonniers platoniciens et le traitement exp rimental du jeune Alex le h ros ultraviolent du roman L orange m canique d Anthony Burgess port l cran par Stanley Kubrick Comme le dit l crivain dont l uvre a fait l objet de nombreux malentendus La violence ne constituait pas l essentiel de l Orange m canique L important pour moi le v ritable sujet tait le d bat philosophique fondamental sur le libre arbitre En effet comme l explique galement l auteur la fin la plus juste de l histoire montre un Alex qui s int gre enf
307. nte de sens Si le sentiment de rupture instaur par le trauma se manifeste par la gestation r p titive et involontaire par un d bordement incontr lable de souvenirs comment le sujet parvient il liquider la charge traumatique reprendre possession de son histoire Inaugur e par Freud et Breuer une alternative quivalente et n cessaire de l acte de catharsis serait la cure par la parole lors de s ances de psychoth rapie par hypnose La r action du sujet qui subit quelque dommage n a d effet r ellement cathartique que lorsqu elle est vraiment ad quate comme dans la vengeance Mais l tre humain trouve dans le langage un quivalent de l acte quivalent auquel l affect peut tre abr agi peu pr s de la m me fa on Quand cette sorte de r action par l acte la parole ne se produit pas le souvenir de l v nement conserve toute sa valeur affective L hypoth se qui se d gage est celle d une th rapie par l instauration d un change langagier instigu par le th rapeute En soumettant la femme hyst rique l hypnose et en lui posant des questions ils l obligent retrouver ses souvenirs traumatiques et les verbaliser leur donner un sens En d autres mots la verbalisation d taill e et r p titive enclencherait selon Freud et Breuer la cessation totale des sympt mes hyst riques Ainsi le pr cisent ils A notre tr s grande surprise nous d
308. ntre le d dain que lui a transmis son p re pour sa famille Ses premi res prises de conscience de sa ressemblance la famille de son p re la d go tent par exemple lorsqu elle remarque Ma sueur sentait de plus en plus le lait suri J ai pens ma grand m re la m re de mon p re que je n avais pas beaucoup connue parce qu il en avait honte Elle avait cette odeur Enfant cela m c urait Mon fr re et moi trouvions qu elle sentait mauvais 64 Cependant pendant sa r v lation la maison de sa m re la narratrice dit Je n arrivais pas voir le lien entre la petite ville au Nord cette grosse maison d sert e et l ob se couch e dans ce lit Un cha non manquait Cela avait un rapport avec ma graisse avec la voix angoiss e de mon p re avec la vie r gl e de mon fr re et le conformisme absolu de ma m re 77 78 La narratrice cherche un lien le cha non manquant parce qu elle sait que cela doit exister Elle sait aussi que ce cha non un lien avec son p re et les manifestations du conformisme aux id aux de la soci t de consommation qu il a impos es sa famille C est pour voir ce lien ce cha non manquant que la narratrice rend visite la famille au Nord La narratrice dit deux reprises Je ne sais pas ce que je suis venue chercher ici et je n arrivais pas comprendre ce que j tais venue faire l 136 138 Ces doutes sont preuves de la difficu
309. ociaux ou m dicaux qui circulaient ici ou l propos de la race fran aise Le duc de Marly incarnant le parfait patriote refl te l esprit du temps en pronon ant des paroles on ne peut plus claires je veux que le premier athl te produit scientifiquement soit un Fran ais 31 Il y a m me semble t il une critique lanc e l encontre du baron Pierre de Coubertin dont le h ros olympique tait dans sa conception l adulte m le individuel et implicitement de couleur blanche Or lorsqu un rabatteur pr sente au duc et son pouse un athl te am ricain pour leur projet la duchesse pousse un cri d effroi en apercevant un n gre 39 en croire Timoth e Jobert les r ticences sont encore grandes l gard de ces sportifs noirs qui faisaient montre d une hypervirilit Jobert L auteur par ailleurs journaliste L uvre un quotidien aux id es radicales socialistes et pacifistes s insurge contre cet imaginaire ridicule de l levage humain 74 titre par ailleurs d un ouvrage du docteur Maurice Boigey publi en 1917 et pose un regard lucide sur ce sujet en tentant de faire entendre raison ses concitoyens De l il soul ve une autre probl matique qui en d coule celle de la f condit des sportives On proclamait l poque notamment des personnalit s comme le docteur Latarjet qu une femme devait viter les efforts trop violents pour pr server ses fon
310. oduire des ruptures radicales dans l uvre d un philosophe ou de n importe quel auteur c est r introduire insidieusement l esprit dichotomique notre propre faiblesse penser notre sempiternelle difficult comprendre la forme d une totalit limit e nos mauvaises habitudes de bons l ves En effet appliquons cela notre propre existence Nos d cisions les plus radicales sont avant tout des actions de changement qui prennent sens souvent dans l obscurit nous faisant appara tre contre jour comme une nigme d int riorit Pourtant nous avons l intuition pour nous m me d une continuit profonde d un lien invisible C est l identit et ce qui nous semble le plus trange et le plus incompr hensible chez l autre se confond avec ce qui est le plus partag par tous notre possibilit de changer Pour reprendre donc une lecture litt rale de ce Tractatus continuons eu plus loin apr s la proposition 5 61 cit e Edgar Allan Poe Philosophie de l ameublement traduit de l anglais par Claude Richard in Contes essais po mes Bouquins Robert Laffont Paris 1989 1600 pages pages 1056 1061 page 1059 7 Ludwig Wittgenstein Tractatus logico philosophicus traduit par Gilles Gaston Granger Tel Gallimard Paris 1993 121 pages page 33 38 Ibid page 93 95 pr c demment Le monde et la vie ne font qu un 5 621 Ainsi dans le Tractatus d j ce qui est reconnu c
311. ol 15 no 3 octobre 2007 Ohio State University p 260 C est le terme employ par S Henke Shattered Subjects Trauma and Testimony in Women s Life Writing New York St Martin s Press 2000 p xii 157 pour constater ce qui est devenu une vidence la floraison d crits sur le trauma personnel Ces textes qui relatent l indicible trauma dans le but de s en lib rer constituent une preuve incontestable de l importance de l criture dans le processus th rapeutique C est justement sur cette n cessit d crire publier que nous nous pencherons dans la pr sente tude plus sp cifiquement sur deux uvres d Annie Ernaux qui traitent du trauma de l avortement qu elle a subi en 1964 l ge de 23 ans Alors que maintes tudes ont t consacr es concernant les textes d crivain e s contemporain e s la n cessit d crire le trauma comme moyen th rapeutique ou curatif peu de travaux se sont int ress s mettre en relief la notion de r criture du trauma de l avortement chez Annie Ernaux Or chez elle la r p tition d une m me trame historique est un sch me fondamental puisqu elle publie en 1964 le roman Les armoires vides et en 2000 le t moignage autobiographique L v nement Si chez elle la n cessit de r p ter pour mieux comprendre le trauma se transpose dans la narrativisation en double d un m me v nement traumatique indicible l avortement
312. olie et la chose litt raire Paris Seuil 1978 198 Kristeva Julia trangers nous m mes Fayard Gallimard 1988 K bler Ross Elisabeth On death and dying London The MacMillan Company 1970 Paterson Janet M Figures de l autre dans le roman qu b cois Qu bec Nota Bene 2004 Paterson Janet M Moments postmodernes dans le roman qu b cois Ontario L Universit d Ottawa 1990 Saint Martin Lori Le nom de la m re M res filles et criture dans la tradition litt raire du Qu bec Qu bec Nota Bene 1999 Taylor Charles Les Sources du moi La Formation de l identit moderne Trad Charlotte Melan on Montr al Bor al 1998 Viau Robert Les Fous de papier Montr al M ridien 1987 M moires de ma trise et th ses de doctorat Cox Stephanie Michelle L exil du moi dans l ecriture de Ying Chen Th se de doctorat Universit de la Louisiane Lafayette 2002 Boudreau Matthew Le meurtre et le suicide La violence absolue dans quelques romans qu b cois M moire de ma trise Universit Dalhousie 2005 Kennedy Janet T Contemporary Canadian women s fiction Jungian reading of Ying Chen s L Ingratitude Christiane Frenette s La Terre ferme Ann Marie MacDonald s Fall On Your Knees and Anne Michaels Fugitive Pieces Th se de doctorat Universit de Sherbrooke 2002 Dictionnaires Aziza Claude et Claude Olivieri Dictionnaire des symboles et des th
313. ombe dans la triste solitude dans sa recherche de l exp rience int rieure Le clivage int rieur est in vitable avec la dualit divin humain l homme n est plus en harmonie avec lui m me ni avec le monde Les bras ouverts du chef d orchestre et sa bouche b ante fait r f rence l homme qui se trouve dans une sorte d extase L extase veut dire sortir de soi m me s oublier et se r fugier dans l exp rience Qu en est il quand l exp rience devient impossible C est ce sur quoi le peintre s interroge dans la troisi me image qui est l clatement de l espace et la mort de l homme L poque moderne a r ussi vacuer le divin de l humain la soi disant postmodernit avance encore plus loin dans cette voie en suspectant toute notion de transcendance Le sentiment de sublime fait m me l objet de raillerie parce que notre poque ne produit plus de sublime Non seulement l homme a d tr n la transcendance mais il se coupe la seule voie qui lui reste vers celle ci savoir l exp rience L individu est ali n de son environnement cause du r tr cissement de l exp rience collective il est aussi bien ali n 2 Benjamin a une jolie comparaison pour la distinction entre l pop e et le roman Pour l pop e l existence est un oc an Rien n est plus pique que l oc an Bien entendu on peut adopter son gard toute sorte d attitudes Par exemple s allon
314. omme r alit et v cu comme tel est circonscrit son propre r cit Il n y a pas de diff rence entre ce que je pratique ce que je dis et ce que je vis il n y a pas d nigme mais un appel certain une forme d exigence du regard Ainsi on trouve en germe cette attention la ritualit et aux pratiques humaines qui sera l objet de celui que l on nomme par faiblesse le second Wittgenstein comme si l identit tait autre chose que cette possibilit de changer La philosophie souffrirait elle de schizophr nie Il est int ressant de remarquer que ces partisans d une lecture dualiste de Wittgenstein sont par ailleurs des interpr tants r alistes En effet si l id alisme pr tend une connaissance de la v rit le r alisme pr tend lui un acc s direct aux faits et donc une autre forme de v rit une v rit inscrite dans le bas des reins du monde qu il s agirait de savoir lire Berkeley met en sc ne Hylas et Phylonous Or si nous supposons qu un aveugle n v nt soudain tre dou de la vue n est il pas manifeste qu il ne pourrait au d but avoir aucune exp rience de ce que la vue peut sugg rer En effet lui r pond Hylas pouss par son bon sens Cette exp rience propos e par Phylonous n est pas sans rappeler l exemple de l aveugle la signification maintes fois utilis par Wittgenstein afin de nous donner voir quel point le regard port sur le monde est
315. on La syntaxe se veut chez lui l ment de compr hension c est un pivot l intelligibilit c est seulement par sa complexit que celle ci pourra livrer l int gralit des significations envisag es Je renverrai pour illustrer la multiplicit des significations l analyse men e par Anne Marie Pelletier dans Fonctions po tiques particuli rement int ressante Dans cet ouvrage on peut voir quel point par leur syntaxe m me trois vers du c l bre Toast Fun bre peuvent donner lieu une multitude d interpr tations Il est important de noter nouveau qu aucun de ces commentaires grammaticalement est erron chaque interpr tation en soi est juste La phrase mallarm enne par la complexit de sa syntaxe est essentiellement polys mique On retrouve donc cette id e de multiplication des possibilit s de lecture dont j ai fait dans cette premi re partie l axe principal des fondements d une po tique du labyrinthe chez Mallarm Un labyrinthe de glaces Cette polys mie fondamentale cr e donc chez le lecteur une sensation d incertitude d garement Quel chemin en effet choisir pour arriver le plus s rement la signification du texte Il semble cependant que dans ce labyrinthe tout fasse sens et comme on l a vu on ne peut se contenter de choisir une lecture et de s y tenir ignorant les autres dimensions du texte 1 S Mallarm Igitur Divaga
316. on de vie Mais elle est rest e dans le monde Vivante IM 202 La gratitude post mortem dans L Ingratitude Nous avons d j not qu travers son suicide Yan Zi d sirait voir souffrir sa m re I 18 et d faifre sa gloire I 13 Cependant une fois sa mort accomplie Yan Zi constate que sa m re se remet plus rapidement qu elle ne l avait pr vu Par cons quent elle prouve une d ception profonde et remet en question l utilit de son acte La m re ach te un oiseau symbole litt raire de libert et d immortalit Aziza 1978a 145 et commence l duquer et le discipliner Ce d veloppement est sous tendu par une ironie acerbe en retrouvant son r le de figure autoritaire la m re subvertit la le on que Yan Zi voulait lui enseigner D ailleurs nous constatons que la vie continue galement pour Chun qui commence sortir avec une autre jeune fille le p re quant lui sombre dans sa d bilit et la grand m re elle vieillit 1 131 Yan Zi regrette de ne plus faire partie du cycle de la vie ce qui pourrait constituer un jugement thique de son acte les tra tres leurs m res continueront morts comme vivants vagabonder se voir exclus du cycle de la vie tre partout et nulle part ne pas tre I 129 195 Pourtant l esth tique de Chen bas e sur la dichotomie et la contradiction renverse ce jugement lorsque la narratrice r alise qu en fai
317. on le croit les r f rences de ces images restent ambivalentes l arri re plan ne donne qu une r f rence flottante de l espace temps est ce la nuit ou le jour Qu est ce que la rue a voir avec les sc nes de vol Qui est cette femme dans la rue La voleuse et son complice sont ils au m me endroit Qu est ce qui se passe entre le vol et leurs retrouvailles Toutes ces questions restent suspendues L essentiel n est pas dans le r cit le montage n est pas l pour recoudre les petits morceaux et dissimuler les intervalles entre ceux ci Le montage dans ce tableau vise plut t mettre en parall le les diff rentes r alit s que tout un chacun vit dans son exp rience int rieure en l occurrence l exp rience de l espace temps Revenons aux trois espace temps que nous avons indiqu s ci dessus L arri re plan est l espace temps de la m moire Nous entendons par la m moire l ensemble du temps qu un tre humain a v cu dans le pass Dans un certain sens le temps en tant qu entit r elle n existe pas c est un produit de la m moire l instant peut se r duire l infini la dur e est le d roulement de la m moire Le pass et le futur en tant qu exp rience int rieure est ce qu il existe un temps en dehors de l exp rience int rieure ne sont que l manation de la m moire l anticipation du futur tant la projection de la m moire du pass Il n y a que le pr sent qu
318. onde l issue de la seconde guerre mondiale Je veux parler de l Indon sie de la Gr ce de l Uruguay du Br sil du Paraguay d Ha ti de la Turquie de Philippines du Guatemala du Salvador et bien s r du Chili L horreur que les Etats Unis ont inflig e au Chili en 1973 ne pourra jamais tre expi e et ne pourra jamais tre oubli e Nicolas serait il la repr sentation symbolique des Etats Unis et de la fa on avec laquelle ils semblent comprendre leur r le dans le monde N anmoins nous concernant Nicolas the soldier of God nous rappelle Hitler qui voulait purifier sa race de toute asociabilit Il comptait parmi les asociaux les juifs les catholiques les protestants les communistes les Gitans les ali n s les incurables les malades mentaux et les homosexuels A tous ceux l tait r serv un seul et m me sort l euthanasie Faire croire au peuple qu une seule cat gorie d tres humains m rite de rester en vie en fut le but D autant plus que Nicolas consid re que donner la mort provoque plus de jouissance que le plaisir sexuel Pour lui le bonheur passerait par la satisfaction de ses instincts le viol et le meurtre en d pit de toute rationalit What about you Do you love death Not necessarily your own Others The death of others Do you love the death of others or at rate do you love the death of others as much as I do Death Death Death Death As
319. ong de cette tude que l id e de po tique du labyrinthe telle que j ai pu la justifier du texte clos la tradition de l nigme et l garement calcul du lecteur illustrait fort bien en quoi Mallarm marquait un tournant dans l Histoire des formes litt raires par sa volont de refermer le texte sur lui m me et de faire du lecteur le v ritable co auteur du texte Cette uvre pose donc en filigrane la question ternelle du sens en litt rature Comment lire un texte Comment lui trouver une signification viable N est ce pas comme le montre Mallarm dans les errements les doutes les remises en question du lecteur que se trouve le v ritable tr sor N est ce pas dans le labyrinthe lui m me dans la qu te que se trouve la r ponse cette nigme Dans les Disciples Sais Novalis pr dit que celui qui saura percer les secrets de la Nature trouvera merveille des merveilles lui m me Le texte mallarm en se cl t finalement sur la 48 m me id e celui qui saura soulever le voile du texte celui l seulement il sera donn de voir comme dans un dernier effet de miroir comme dans une ultime d robade son propre N ant BIBLIOGRAPHIE B nichou Pierre Selon Mallarm Paris Gallimard 1995 Blanchot Maurice L Entretien infini Paris Gallimard 1969 Bonnefoy Yves L improbable et autres essais Paris Gallimard Folio 1992 Bonnefoy Yves L imagin
320. onner aux enfants nous en conservons le sens Dans nos soci t s contemporaines les hommes et les femmes que nous sommes se font les porteurs de repr sentations archa ques de mythes sur notre origine c est dire sur la naissance d un enfant de mani re tout fait consciente et volontaire et cela en d pit des rudiments biologiques que chacun d entre nous a pu acqu rir durant ses ann es de coll ge En effet la question typique de l enfant qui demande sa m re Dis maman comment on fait les b b s celle ci va dans une grande majorit de cas r pondre Papa a mis une petite graine dans le ventre de maman Ce quoi l enfant veill et peut tre d j suspicieux l gard de cette r ponse surprenante lui r pondra Heureusement que mon petit fr re n a pas t une tomate Cela tant dans le r cit il s en est fallu de peu Sans entrer dans les cons quences id ologiques sur la place de Phomme et de la femme que cet exemple courant am ne mettre subrepticement en place depuis la plus tendre enfance il est int ressant de voir que cette description d une pratique contemporaine montre que si nous consid rons comme des sous genres les r cits mythiques d autres cultures nous prenons grand soin des n tres et plus profond ment nous les consid rons comme meilleurs pour nos enfants que la simple v rit biologique Pourtant pour rester dans une explication imag
321. onotonie de la permanence pour s engager dans la voie des transformations des transformations qui doivent se faire dans le hic et nunc en toute libert Mort symbolique et transfiguration Les visions de morts violentes qui mettent un terme la d gradation du monde sont chez Kokis des exp riences int rieures Elles agissent pour provoquer le r veil spirituel La vision ext rieure et impos e d en haut se renverse Tout homme a en lui son Patmos Ce genre de r v lation ne passe pas par la fin du monde et des temps il int gre la mort l assimile pour trouver le chemin de tout ce qui dans le temps et l espace nous prolonge au del de nous m mes Ainsi pour mieux comprendre ce que L Apocalypse raconte il faut transcender la notion du temps tel que nous le percevons Chronos et Kairos pr cis ment C est dans le moment actuel du Kairos grec qu il est possible de percevoir un passage une ouverture du temps L Apocalypse est donc une histoire de signes et non d v nements d images et non de choses Comme le dit Frye il s agit d un panorama de certaines choses qui prennent diverses formes dans le v cu humain D s lors les visions de L Apocalypse n ont plus le r le premier de symboliser les tapes pr paratoires l av nement final mais plut t de souligner la confrontation actuelle de deux ordres de r alit Il faut alors comprendre que la Cr ation
322. onstamment D butant en grande pompe avec un once upon a time cosmogonique au commencent tait le fourbi l vocation de ces monstres grammaticaux fantastiques avec cet amour du merveilleux qui suinte partout et bien contre mon gr rongeant pourtant mon frein afin de ne pas y aller mon tour de mon vangile non canonisable j tais en droit de m attendre des premi res constatations plus panach es Au lieu de cela elles sont sobres minimales Elles ne brillent ni par l ambition r aliste ni par la virtuosit th orique En cela elles se voudraient secr tement d inspiration wittgensteinienne tout en rougissant instantan ment de cette pr tention Mais de quoi s agit t il exactement En essayant de d crire nos pratiques c est dire nos mani res d user de ce monde celles ci sont apparues comme des gestes mus par une certaine ritualit une forme de r gularit Pour autant de par une irr sistible l g ret ou anim s par une secr te envie de prendre cinq minutes la place du P re tant qu il a le dos tourn nous avons tendance glisser subrepticement de la r gularit la normalit En d autres termes nous avons tendance id aliser nos pratiques rituelles vouloir riger les r gles de notre vivre ensemble au rang de v rit s ternelles C est en ce sens que faire taire le proph te se borner philosophiquement ne consid rer que le sympt me descriptif appara t i
323. onstater avec soulagement que lire peut extirper de l animal humain son humanit La prise de conscience de sa transformation suscite chez la narratrice une deuxi me attitude celle qui consiste vouloir ma triser sa m tamorphose Apr s le constat qu elle est soumise la volont de son corps C est mon corps qui dirige ma t te je ne le sais que trop maintenant p 26 aux saign es successives en clinique en passant par un d clic Enfin nouveau il y a eu comme un d clic dans mon cerveau et dans mon corps p 56 lui permettant de redevenir humaine la narratrice re oit galement l aide ext rieure d une dermatologue et de son s rum Le s rum de la dermato tenait bon p 70 Plus m thodiques galement les conseils d Yvan pour se r gler sur la pleine lune n aboutissent pas un r sultat convainquant chaque pleine lune Yvan allait manger un bout Il m avait montr comment adapter mon propre rythme aux fluctuations de la Lune mais j y arrivais beaucoup plus mal que lui Mais le tout tait d y mettre une grande volont p 129 On le constate l h ro ne soumise la volont de son corps inverse la tendance C est cette m me probl matique qui ouvre le d but de l histoire La difficult d crire y est en premier lieu abord e dans sa dimension mat rielle difficult de trouver un stylo de le tenir de garder un cahier propre et une criture lisible puis immat ri
324. ont le pouvoir est plus authentiquement inventif De ce fait notre r alit est mue par la force de l habitude et nous puisons sans cesse dans un fond commun sur lequel nous nous entendons Nous avons par ailleurs galement tendance d nigrer cette puissance coutumi re laquelle il est vrai balaie souvent d un geste la connaissance technique durement acquise Ainsi des tudiants en m decine interrog s dans un bar sur la question de la circulation des liquides dans le corps de leur absorption leur vacuation vont ils pour la plupart dessiner h tivement au dos de leurs sous bock un simple conduit allant de la bouche la vessie Le r el et sa norme Ce que nous appelons r alit et que nous reconnaissons comme telle peut tre en quelque sorte con u comme une vaste forme tiss e des connaissances que nous avons pu acqu rir sur notre milieu de la crainte et de la curiosit que peut nous inspirer ce dernier des hypoth ses plus ou moins probantes sur son origine et la n tre L ensemble du corpus volue videment tel un vaste corps encombrant et malhabile en fonction de la variation de l ensemble de ces crit res dont j ai loin d avoir fait le tour Evidemment cette conception du r el est galement color e de variations qui peuvent tre importantes selon l individu c est dire selon ses croyances sa profession son ge ses coordonn es espace temps Il est vident me semble t il que la
325. ordinaire De ce fait Wittgenstein l irr aliste serait en fait le seul vrai r aliste Le nouveau r alisme emprunte donc les voies de l ordinaire et labore une vision harmonieuse de l uvre de Wittgenstein Cora Diamond tente donc d expliciter souvent avec justesse ce que l on peut d tecter comme des contradictions dans l uvre wittgensteinienne 4 Ludwig Wittgenstein Tractatus logico philosophicus op cit page 111 Hilary Putnam Fait Valeur la fin d un dogme et autres essais traduit de l anglais par Marjorie Caverib re et Jean Pierre Cometti Collection Tir part Editions de l clat Paris 2004 187 pages page 42 46 Claudine Tiercelin C S Peirce et le pragmatisme Philosophes PUF Paris 1993 123 pages page 9 99 Vous pouvez lire le Tractatus comme contenant nombre de doctrines dont Wittgenstein soutient qu elles ne peuvent tre mises en mots de sorte qu elles ne valent pas r ellement comme des doctrines Si vous lisez le Tractatus de cette fa on vous pensez que une fois l chelle rejet e vous avez toujours prises sur certaines v rit s touchant la r alit tandis que vous niez en m me temps que vous disiez effectivement quelque chose de la r alit Cette interpr tation clarifie en un sens la fameuse proposition 6 53 tout en l appauvrissant Mes propositions sont des claircissements en ceci que celui qui me comprend les reconna t la fin comme d pourvues
326. ortant people in her life rJeconstructing the trauma story begins with a review of the patient s life before the trauma and the circumstances that led up to the event Pourtant ce qui ressort le plus de cette premi re reconstruction de la sc ne traumatisante dans Les armoires vides c est l absence d un sujet qui narre une volont d int gration de la sc ne traumatique dans sa trame historique Ce premier r cit de l indicible est un lieu o quelque chose n a pas t r gl puisque l auteur a ressenti vingt six ans plus tard le besoin d crire de nouveau sur cet v nement De plus et Herman le pr cise apr s avoir travaill avec plusieurs victimes de trauma qu il faut pour mieux liquider la charge traumatique retravailler l histoire du trauma jusqu temps qu elle soit r v l e dans son int gralit Or donc la plus grande partie du roman d Annie Ernaux est consacr e aux souvenirs d enfance et d adolescence de la narratrice Lesur La sc ne de l avortement jamais enti rement int gr e dans la narration ne figure que sporadiquement Plut t la voix narratrice du roman appartient Denise Lesur qui en train d avorter dans sa chambre de la cit universitaire remonte en arri re pour proc der une anamn se de sa vie de petite fille d piciers cafetiers allant A Ernaux Les armoires vides p 87 30 J Herman Ibidem p 176 1 M Bacholle Bo ko
327. orte peu Ironiquement c tait la sienne qu elle aurait d solliciter Il est vident que le d part myst rieux de la m re a marqu profond ment ses enfants Chut est hant par le souvenir de son abandon jusqu ce qu il retrouve sa m re du moins au niveau m taphorique travers son choix du lieu de son suicide Il est essentiel de noter que c est galement Milou qui parach ve une fouille arch ologique pour emprunter l expression de Martel afin d explorer la notion de la responsabilit h r ditaire Il m aura fallu d couvrir l histoire l aust rit d bile de grand m re Alicia les frasques de grand p re Ecchymose vieux salaud et de l autre c t j ai pouss trop loin jusqu Nadedja Ivanovna ses enfants ses petits enfants et ce qui en reste maintenant U 29 D abord les liens que Milou trouve entre leur histoire et celle de leurs anc tres ne semblent pas la persuader qu ils pourraient tre g n tiquement responsables de leur souffrance Pourtant mesure Ad la de est partie pour toujours Je voulais convaincre ma s ur Milou mais peu m importait ce que pensait mon fr re U 72 J ai toujours dit que si elle a pris la peine d apporter une valise c est qu elle n avait nullement l intention de se flinguer Milou s est mise divaguer de plus belle Elle est s re de son fleuve U 181 171 que leur chagrin s
328. ortive pr te risquer sa vie par amour en effectuant un tour du monde en avion ouvre une perspective int ressante Mais avant de l examiner commen ons par r sumer ce r cit Andr Lehucher un jeune homme de vingt quatre ans se rend en Allemagne chez un ami lointain de son p re afin d y apprendre le m tier d h telier son arriv e Knesebeck il perd de vue l objectif de son s jour pour se laisser aller aux charmes de deux jeunes femmes Ingrid et Anna dont l aventure amoureuse se traduit par une sorte de chass crois Ingrid puis Anna et Ingrid nouveau En effet si son choix se porte initialement sur Ingrid celle ci ne tarde pas lui t moigner une d saffection lorsqu elle s aper oit de sa nullit sportive 101 102 Au cours d une partie de water polo il se montre maladroit boit la tasse et perd une dent C est alors qu il se tourne vers Anna avec laquelle il va vivre une histoire d amour acc l r e un enl vement des nuits inoubliables de fausses fian ailles une rupture Ingrid se sent coupable de la situation et pour mettre son amour l preuve elle d cide d effectuer un raid a rien de 40 000 kilom tres L arriv e est pr vue Berlin au Sportpalast o Andr participe lui m me au concours vocal Sprich bis du umf llst Parle jusqu ce que tu tombes L annonce de leur mariage rend heureuse la fin du roman Ce texte tir en partie de son exp rience pui
329. ositif l gard de Wittgenstein serait peut tre donc po tique Cet irr alisme philosophique va de pair avec une reconnaissance de la place de la fiction dans ses manifestations rituelles au c ur de notre vivre ensemble En effet les incursions r p t es de Wittgenstein dans le domaine de l ethnologie fictive ont pour but de nous montrer que l adoption d une forme de repr sentation d termin e d une certaine conception du r el d pend bien plus que nous ne le souhaiterions de facteurs circonstanciels qui n ont pas n cessairement une raison d tre pr cise et distincte comme nous avons essay de le voir nous organisons notre fourbi selon nos capacit s d observation et d organisation mais aussi en fonction de nos croyances de nos peurs du r le et de la place que chaque acteur social se doit de tenir et tout se m le si bien que le Thomas des temps modernes peut tr s bien baisser les yeux devant un chat noir encourager ses enfants faire leurs lettres au P re No l ou m me se signer l glise En somme il s agit bien toujours et encore de s efforcer de voir quand on a tendance vouloir juger classifier ordonner en brisant les connexions interm diaires qui existent secr tement entre des attitudes rationnelles et d autres qui le sont beaucoup moins En fait voir est ici con u comme une v ritable activit et non pas comme une m thode d enregistrement passive et pr
330. ouclier utile pour pr server sa personnalit secr te et pudique celui ci a sonn comme un mot de passe aux oreilles de toute une g n ration de lecteurs Lacassin 326 puisque Tita na a toujours eu le souci d introduire l aventure Elle a maintes fois risqu sa vieen parcourant les quatre coins de la plan te chameau en avion sur une go lette en faisant du sleeping car ou bord du Hindenburg le plus grand dirigeable du monde Par exemple lors d un vol bord d un monomoteur biplace pilot par Jacques Richard en vue d interviewer Mustapha Kemal en Turquie elle dut faire un atterrissage forc et regagner la plage la nage En outre elle a pass son brevet de pilote alors m me que le plus grand reporter du moment Albert Londres n est jamais mont en avion L inventeur du fantastique social devait avoir cette repr sentation de Tita na lorsqu il lut La B te cabr e ce qui expliquerait pourquoi il tente de percer sa psychologie en analysant le roman Il commence certes par d crire son style d criture un style franc et net o elle cherche offrir une impression po tique En 1931 lors de la publication de Vol de nuit Antoine de Saint Exup ry lui enverra un exemplaire d dicac A Tita na qui connut tout a qui ce petit livre n apprendra rien mais lui rappellera peut tre ses propres excursions Heimermann 165 4 En 1936 il lui d dicacera son Tour du monde en
331. ous appr hendons le fourbi travers un langage et des pratiques correspondantes si bien que nos faits en sont toujours un peu les enfants Somme toute dire que la ritualit est au c ur de nos pratiques implique galement la pratique de la science puisqu elle concerne la totalit de l exp rience humaine Ainsi nos r gles de vie lesquelles comme nous l avons vu sont v cues en tant que normes dans l exercice de la vie c est dire en tant que bornes du praticable sont galement des valeurs travers lesquelles nous organisons le fourbi Hilary Putnam voque un enchev trement des faits et des valeurs en mon sens il s agit davantage d une co cr ation car le terme utilis par Putnam laisse planer l espoir d une clarification possible et donc le doute sur l existence d une ontologie distincte des faits et des valeurs Nous vivons mal ce renoncement ontologique d une distinction claire car nous le vivons comme un renoncement cette nigme du vrai cette nigme de la nature humaine qui nous rend tellement int ressant et profond Comme l crit Wittgenstein la fin du Tractatus Il n y a pas Henri Pierre Jeudy Fictions th oriques Manifeste Editions L o Scheer Paris 2003 171 pages page 162 98 d nigme C est cette courte phrase qui je pense a la pouvoir de nous lib rer de nos maux philosophiques mais pour l heure contentons nous de montrer que renoncer l objectivit
332. ouvons indispensable de questionner comment le sujet arrive liquider la charge traumatique par les mots mais plus encore par la narration d une histoire car tJrauma seems to be more than a pathology or the simple illness of a wounded psyche it is always the story of a wound that cries out that addresses un in the attempt to tell us of a reality or truth that is not otherwise available Le trauma n est plus une simple pathologie c est l histoire d une voix qui nous raconte l indicible La narration semble tre le lieu privil gi de diss mination cathartique du trauma ce lieu ce texte c est donc le corps m me du trauma un locus scriptural travaill Gr ce l criture le sujet peut liquider de la charge traumatique g n ratrice d une rupture existentielle d une fracture psychosociale Traumatic memories are the unassimilated scraps of overwhelming experiences which need to be integrated with existing mental schemes and be transformed into narrative language The story can be told the person can look back at what has happened he has given it a place m his life story his autobiography La narration du trauma permet au sujet de retrouver sa trame historique et donc se retrouver un sens existentiel une place dans la soci t En transformant les sch mes m moriels du trauma en un script travaill le sujet reprend contact avec la partie de son corpus historique qui jusque l s
333. oux Deutschland 1929 de Ren Trintzius sous la direction de W Asholt et CI Leroy Paris Berlin Moscou Regards crois s 1918 1939 RITM n 35 Universit Paris X Nanterre 2006 St phane Mallarm une po tique du labyrinthe Christopher Bouix Universit de Paris IV Sorbonne Le texte mallarm en n a cess au long du si cle dernier d tre diss qu afin d en carter la proverbiale obscurit nombre de critiques ont tent par diverses m thodes de trouver un sens unique aux Po sies et autres Coups de d s Le parti pris de cet article quant lui est de consid rer l herm tisme de Mallarm comme partie int grante de son uvre L errance du lecteur face un texte dont il ne ma trise pas la signification n tant donc plus la cons quence d une po sie pr nant l art pour l art mais faisant pleinement sens On consid rera donc la po tique de Mallarm non uniquement comme une po tique de l criture mais comme une po tique de la lecture C est par son errance dans ce d dale de mots que le lecteur donne au po me sa signification clat e ses infinies possibilit s de lecture Il s agira donc de voir en quoi par le travail sur la syntaxe et la multiplicit des sens le texte mallarm en est une construction labyrinthique qui comme il se doit tend l id e centrale dans les Po sies de purification Depuis la premi re dition des Po sies en 1899 la litt ratur
334. owski Pierre Sade mon prochain le philosophe sc l rat Paris Seuil 1967 Ricoeur Paul Finitude et culpabilit 2 La symbolique du mal Paris Aubier 1963 214 Anthropologie Frankfort Henri La royaut et les dieux Paris Payot 1951 Girard Ren La Violence et le sacr Paris Editions Grasset 1972 Le Bouc missaire Paris Editions Grasset 1982 Des choses cach es depuis la fondation du monde Paris Grasset 1978 Todorov Tzvetan M moire du mal tentation du bien Paris Robert Laffont 2000 Politique et religion La Bible de J rusalem 14 d Paris Les Editions du CERF 1994 Arendt Hannah Le syst me totalitaire les origines du totalitarisme Paris Seuil 1972 Rollet Jacques Religion et politique Le Christianisme l Islam la D mocratie Paris Grasset 2001 Zarka Yves Charles Figures du pouvoir Etudes de philosophie politique de Machiavel Foucault Paris Presses Universitaires de France 2001 Le fantasme amoureux au miroir de l imaginaire dans l uvre romanesque d Aragon Marie Camille Thomasi L Universit de Corse Puisque le sentiment amoureux na t de la cristallisation mythique bien plus que de l lection spontan e il instaure d embl e la dichotomie fonci re du r el et de l imaginaire de la r p tition et de la mise distance C est donc principalement en tant que miroir qu il sera appr hend miroir tournant d
335. pas surtout le soir 13 Il y a dans ces remarques le sens que si elle parvient r duire le nombre de pas qu elle doit prendre elle sera en mesure d ignorer le fait que le grand poids de son corps lui cause de la 5 P r A Pourtant il faut noter que la narratrice consomme le contenu des magazines elle ne peut chapper la consommation de biens m me si elle rejette les id aux de la soci t de consommation 57 douleur Cependant de cette description des probl mes que lui cause sa graisse nous relevons le fait que ce n est que r cemment qu elle devient consciente de son corps de cette mani re Cette sensation que son corps s alourdit et se d grade est prouv e par la narratrice de plus en plus au cours du roman et r v le ses motions contradictoires envers elle m me Par exemple lorsqu elle s assoit dans l autobus la narratrice remarque J ai du mal reprendre une respiration normale Il me semble que ma poitrine s l ve et s affaisse dans un vacarme infernal Je pense mon ge n arrive pas faire le lien entre cette femme invalide et moi Le mot me surprend m envahit tout enti re 58 La narratrice prouve de la difficult se r concilier au fait que son corps cause de son mode de vie vieillit tout comme celui d Alice Elle ne peut r concilier ce qu elle voit avec son ge encore jeune comme elle se dit en se regardant aux toilettes du caf des Arabes
336. porte un rem de scientifique la narratrice Edgar donne dimension politique de l histoire p 69 le cur p 78 dont le r le est limit apporte bri vement au r cit une r f rence religieuse l homme de m nage de l h tel p 93 travailleur immigr et ill gal n est qu un interm de avant la suite de l histoire Marchepi de p 121 le fanatique se d barrasse du pr sident Edgar contamin par les effets de la m tamorphose le directeur de chez Loup Y Es Tu p 121 Yvan repr sente l alter ego de la narratrice une sorte de miroir heureux d un bonheur condamn ne pas durer la m re p 152 que la narratrice tue lui permet de trouver un refuge une sorte d quilibre entre deux tats Ces personnages aux implications narratives multiples ouvrent une large palette d interpr tations possibles Prenons par exemple l entr e de jeu du marabout africain qui dans son identit premi re cristallise la dimension magique du r cit Par rapport aux autres intervenants il est ext rieur socialement et culturellement 252 mais aussi authentique dans le st r otype que la soci t occidentale se fait de sa repr sentation proprement parler il ne joue pas le r le de d clencheur mais de catalyseur Il accompagne la m tamorphose du personnage principal du roman et la confronte la dualit de son identit Si jusque l le r cit angoissant de la m tamorp
337. portrait d une m re distante et nigmatique Denise plusieurs ann es apr s son d c s m a interrog e Qui tait ce au juste Edm e La r ponse n est pas simple FSL 36 Cependant au fur et mesure que C line labore l histoire l image de la m re comme tant autre se dissipe devant l importance de ses multiples r les f minins elle est fille s ur m re femme et amante Elle r ve de Paris elle communique avec la nature elle devient une m re mythique qui porte en elle la souffrance de la terre FSL 55 En effet c est Edm e qui apprend C line que le corps est l incarnation de la libert et que la terre et le corps f minin sont intimement li s Au printemps elles s affrontaient sur les m thodes de gu rison Au centre du jardin Edm e semait des b gonias et des phlox pour que ses s urs puissent examiner de pr s la libert Julia criait Comment a la libert La r plique d Edm e est 7 En italique dans le texte 7 En italique dans le texte 188 encore grav e dans mon esprit Parce que Paula et Ad la de doutent de leur corps tout le temps tout le temps Les fleurs s ouvrent au grand jour qui coule en elles c est leur lot d tre libres en se tendant vers la lumi re FSL 36 Le m moire de C line souligne le fait que l individu suicidaire recherche avidement un sens de la vie et que ce qu il trouve d passe parfois l
338. posant la r alit en image et l image en r alit A la fois puissance g n rale d unification et figure destructrice de l existence l imaginaire est tous niveaux le lieu de rencontre o coexistent forces de vie et pulsions de mort Et la passion en tant que tension f d ratrice de ces forces contraires op re au fil des r ves l tonnante fusion des aspirations antith tiques pour tisser les liens d une rh torique toute particuli re celle de l existence per ue comme une uvre en gestation Une uvre qui parce qu elle ouvre sur les sph res inexplor es de l alt rit fascinante se fait dialogue et catharsis ouverture f conde et repli salutaire Le r ve en tant que vecteur de 5 On notera double l instance narrative constitu e des discours consubstantiels de l auteur et de son personnage J Starobinski L il vivant II La relation critique Gallimard Le Chemin Paris 1978 p 280 232 l art est donc tout la fois ce qui d voile l inconnu et r tablit l change il est ce par quoi le silence devient signifiant et le discours nigmatique A travers lui se m lent la myst rieuse parole des aspirations singuli res et l univocit du dialogue retrouv Ainsi puisque le langage amoureux s raille dans le monologue alors que discours litt raire op re un d placement symbolique par lequel le texte en s panchant s change son tour il n est pas tonnant que
339. professeur de philosophie de Louis Guilloux Or ce dernier tait atteint d une pathologie nomm e acrom galie qui se traduit par une hypertrophie des os du visage et des extr mit s des membres Ceci explique la difformit dont souffre Cripure qui lui attire les railleries de ses concitoyens Quant Antonio son impuissance sexuelle le place lui aussi du c t des anormaux Dans la Sicile d crite par Brancati le mal d Antonio constitue pour un homme la tare la plus impardonnable Certes l importance accord e au motif de l infirmit dans les uvres de Guilloux et de Brancati n est pas en soi un l ment nouveau Un grand nombre de romanciers avaient d j fait appara tre des personnages infirmes Mais dans Le Sang noir et Le bel Antonio l infirmit physique n est qu un sympt me d un mal touchant non seulement le corps mais aussi l esprit des personnages Cripure et Antonio souffrent en effet d une faiblesse pathologique d une maladie de la volont Leurs attributs les plus frappants sont leur m diocrit et leur insignifiance Mais les autres personnages du roman n chappent pas cette surprenante pathologie La plupart d entre eux sont des figures de l chec de la d sillusion et de la b tise Ce n est pas un hasard si les deux romanciers vouent un v ritable culte Flaubert Le bovarysme constitue un p le central de leur fiction romanesque Par ailleurs Guilloux et Brancati admira
340. ps qu il d substantialise le r el dans lequel le miracle de la voix se produit pourtant La rupture est donc int rieure qui d chire l tre et l exalte dans le m me temps Bien souvent alors lamour v cu travers l chapp e onirique n cessite le recours des supports d dicaces que sont essentiellement masque statue et miroir pour que s accomplisse tout la fois la cons cration et la d sacralisation de l tre aim Et parce qu elle est transfert pr cis ment la d dicace op r e par l objet transf rentiel renvoie l tre face sa propre image ravivant du m me coup la th matique du regard comme miroir Miroir d une me s vaporant dans l irr alit onirique du chant miroir de l eau originaire qui de ses reflets claire le monde d une double lueur ou encore miroir de l tre qui morcel l infini se perd de se mirer Une po tique de l absence A mi chemin entre narration et r verie entre songe et r alit les uvres aragoniennes apparaissent comme un ensemble complexe du point de vue g n rique Romans r verie romans po me ou songe s partag s les th mes et r f rences s entrelacent sans cesse Les perceptions initiales entre r ve et r alit en engendrant les motifs et images essentiels de la po tique de la r verie associent d embl e repr sentation et id alisation Et le temps et les choses les mots et les tres s vasent t
341. que l gard des aventuri res et cette id alisation de leurs portraits Les crivains voyageurs et auteurs du renouveau la fois amus s et admiratifs de ces femmes uniques et surprenantes n ont ils pas profit de la vogue des vies romanc es dans le monde de l dition Leroy 1999 de l augmentation des r cits de voyage et de l avanc e consid rable du statut de la femme occidentale pour les mettre l honneur Telle est l id e que nous souhaitons d fendre travers l examen de quatre grandes figures deux romanesques Ingrid Ginster Zizi Tricart et deux r elles Tita na Ella Maillart La popularit des aventuri res D s les lendemains de la Grande Guerre les c l brit s du cin ma de la chanson et du sport envahissent les colonnes des quotidiens Les p riodiques sportifs couvrant largement les sports m caniques l un de leur fonds de commerce annoncent r guli rement les d fis relev s en la mati re et les aventuri res connaissent alors un v ritable succ s populaire Aviatrices et automobilistes notamment se voient glorifi es par des articles souvent logieux avec en prime une photographie de leur portrait l image commence s imposer dans la presse et les clich s sportifs accompagnent de plus en plus les r sultats Delporte Il arrive parfois m me que certaines d entre elles La natation dite de marathon dont le nom fut emprunt l athl tisme es
342. que dans les gouts rejets et d jections de la soci t La narratrice ayant pass le plan d une m tamorphose compl te son ind cision quant la forme humaine ou animale qu elle doit envisager la livre donc aux affres de son appartenance ou de son ostracisme d une soci t dans laquelle elle ne peut plus se situer physiquement et g ographiquement La troisi me orientation s ouvre alors vers une tentative de rencontrer un mode de survie acceptable Autrement dit l errance aboutit un lieu de compromis o la narratrice dispose en fonction de son tat de femme ou de truie d une habitation ou d une for t Or si cet aboutissement devait tre envisag l errance se transformerait alors en qu te dont les pr mices s av rent prosa ques Je cherchais du travail p 12 Elle le serait moins si nous envisagions les deux premiers mots de cette proposition Je 256 cherchais qui nous renverrait au compl ment d objet direct dont nous serions nous lecteurs les inventeurs Car au del du comment dont nous sommes t moins la question absente ou presque de l histoire se pose par le pourquoi de la transformation Il y aurait ici autant de r ponses que de lecteurs ce qui en fin de compte traduirait par une vidence ou devrions nous dire truisme le profond g nie de ce roman Conclusion la diff rence de Propp les fonctions dans Truismes ne construisent pas la lin arit du r cit Elles ne s y succ
343. r alisme et romanesque D s lors l amour en investissant tout la fois l espace et le temps les mots et les choses ne peut se lire qu en tant que recr ation recoloration perp tuelle du monde dans un seul tre Ainsi l exploration des passions et d sirs se double t elle tacitement d une enqu te sur l empire des sons images et symboles Les mots en se faisant les messagers du r ve tracent au fil des uvres les voies d une chapp e perp tuelle au c ur d un univers d ternelles m tamorphoses Et l emprise de l imaginaire mesure qu elle s tend d vide inlassablement sur l cheveau universel des signes la langue ardente de l orage intime M tonymies et m taphores de l Autre V ritable catalyseur des d sirs ensevelis l tre aim se pare pour qui l aime d une aura quasi mystique puisqu la fois source et objet de r veries il devient la substance vitale l essence des r ves de ce partenaire la fois imag et imageant Aussi d all gories en hallucinations l amoureux rige en ic ne inconditionnelle cet autre constamment transfigur Tout la fois concepteur et acteur de ses fantasmagories secr tes il trace inlassablement les voies de ses chim res Ench ss au c ur d une 21 A Breton L Amour fou Gallimard Folio Paris 1937 p 115 Cf D Bougnoux la langue ardente de l orage cit in Le malheur d aimer ou l o
344. r alit ne recouvre pas tout fait le m me fourbi pour l enfant l homme religieux et le scientifique Il y a donc une myriade de versions de cette r alit lesquelles en tout tat de cause communiquent s enrichissent s opposent et se Nelson Goodman Mani res de faire des mondes traduit de l anglais par Marie Dominique Popelard Folio essais Gallimard Paris 1992 228 pages page 42 7 Iris Murdoch Litt rature et Philosophie in La tentation romanesque Ecrits sur la philosophie et la litt rature traduit de l anglais par Denis Armand Canal Contretemps La table ronde Paris 1997 377 pages page 36 70 r pondent En somme il s agit du mouvement de la vie elle m me et c est en ce sens bien videment que vivre se confond avec son nonciation La reconnaissance individuelle passe par l adoption d un certain nombre de r gles lesquelles structurent et f d rent telle ou telle version du monde En effet l nonciation est fondamentale dans la construction du r el et de par sa mise en action elle m me elle entra ne n cessairement la conception de ses r gles D ailleurs comme l crit Erving Goffman qui a tent de penser la r alit cette mise en ordre viable dans sa th tralit C est un lieu commun de dire que des groupes sociaux diff rents expriment de fa on diff rente des attributs tel que l ge le sexe la r sidence et le statut de classe et que dans ch
345. r e depuis son d part en d pit du fait que personne ne s en sert 76 Contrairement la consommation de nourriture cette consommation de mobilier est valoris e dans la soci t capitaliste La m re de la narratrice a une manie de la propret Comme LeBesco l a indiqu la propret est li e la minceur comme indice d un citoyen d sirable Dans la maison de la m re tJout est propre sa place parce que la m re passe ses journ es libres faire du m nage 74 75 De plus la m re se lav e lorsqu elle ne sait plus quoi faire cela lui procur e une activit 76 Baudrillard identifie aussi les ablutions comme une sorte de r v rence religieuse de la soci t de consommation Baudrillard 204 Le corps propre est un corps qui s lance vers le salut De cette fa on le corps et la maison de la m re toujours propres constituent des signes comme sa minceur de sa valeur morale et de son identit comme citoyenne id ale Cependant m me si la m re incarne les qualit s d une citoyenne id ale valoris e par l id ologie de la soci t de consommation elle en souffre les cons quences La narratrice dit Je pense souvent que ma m re ne comprend pas sa vie Quelque chose lui a chapp il y a longtemps Elle s est endormie dans les musiques sirupeuses des centres commerciaux qu elle a trop fr quent s 51 Dans cette description de sa m re la narratrice 54 indique
346. ravers le regard et l affectivit des personnages principaux pour devenir sensation vision ou encore projection des fantasmes Si l amour s appr hende g n ralement comme la qu te infinie d une impossible possession peut tre est ce parce que l tre aim en jouant de ses multiples facettes se d robe ternellement l treinte qu il appelle pourtant A la fois immuable et changeant toujours m me et diff rent l amoureux joue en m me temps qu il est jou des reflets variables d une personnalit mouvante les Th tre Roman op cit p 261 7 L Aragon La Mise Mort cit in Aragon romancier d Anicet Aur lien Jacqueline Levi Valensi Paris C D U et SEDES r unis 1989 p 173 8 La mise mort op cit p 186 225 mutations internes relayant les travestissements de l apparence Et ce que la m taphore op re par le langage la m tamorphose le transpose dans l univers concret des songes La r v lation amoureuse en ce qu elle est toujours une d possession en m me temps qu une absorption de l objet d amour se pare souvent d une aura d irr alit que seul l imaginaire semble m me d investir Double polarisation qui si elle d pend intimement de l amant ne participe pas moins de la transmission interne des grandes images symboliques l imaginaire devenant pour l amant l espace privil gi de sa r alit magnifi e puisqu il est ce qui par
347. re Hermine de La Croisi re de Perlette 1700 mille dans la mer Eg e Paris Hachette 1926 Pouillart Raymond Willems Jean Le Sport et les lettres Louvain E Nauwelaerts 1953 Rauch Andr La montagne spirituelle dans les r cits d ascension dans l ouvrage dirig par David Le Breton L Aventure La passion des d tours Paris Autrement 1996 166 184 Rienzi Raymond de L Aventure sur la route Roman d une faible femme et de sa petite auto Paris Flammarion 1925 Rob ne Luc Vers la cr ation d un sport f minin des filles de lair aux a ronautes textes r unis par Pierre Arnaud et Thierry Terret Histoire du sport f minin Paris L Harmattan 1996 tome I 165 184 Schut Pierre Olaf Ottogalli Mazzacavallo C cile Les pratiques touristiques une voie d acc s privil gi e au sport pour les femmes sous la direction de Thierry Terret Sport et Genre Paris L Harmattan 2005 vol I 135 154 31 Souchon Paul La travers e de Paris la nage Les Chants du stade 1923 po mes Paris Editions Jules Tallandier 1943 77 78 Terret Thierry Naissance et diffusion de la natation sportive Paris L Harmattan 1994 Trintzius Ren Deutschland Paris Gallimard 1929 Vibart ric Alain Gerbault Vie et voyages d un dandy r volt des ann es folles Paris Payot 1992 Zimmermann Margarete Entre Caligari et Giraud
348. res de juxtaposer les espaces temps dans l ensemble de l uvre de Monory Notre but est de d gager quelques l ments cl s d une exp rience particuli re de l espace temps qui est sans doute partag e par beaucoup de nos contemporains travers ces trois tableaux Monory essaie de nous transmettre un message l espace et le temps sont des exp riences v cues par les individus conditionn s par leur contexte historique et social En retour par la construction de l exp rience spatio temporelle c est l exp rience de l tre au monde qui est mis en jeu Introduction L exp rience humaine est b tie sur trois axiomes comme le disait Lyotard le sujet le temps et le monde Il le pr cise comme suit Il faut un sujet d abord l instant d un Je quelqu un qui parle la premi re personne Il y faut une disposition temporelle type Augustin Confession XI uvre moderne s il en est o la vue sur le pass le pr sent et le futur est toujours prise du point d une conscience actuelle insaisissable Avec ces deux axiomes on peut d j engendrer la forme essentielle de l exp rience je ne suis d j plus qui je suis et je ne le suis pas encore La vie signifie la 261 mort de ce qu on est et cette mort atteste que la vie a un sens qu on n est pas une pierre Un troisi me axiome donne l exp rience toute son ampleur le monde n est pas une entit ext rieure au sujet il est le no
349. resque disparition vibratoire selon le jeu de la parole si ce n est pour qu en mane la notion pure crit Mallarm dans ce texte fondateur Ce n est donc pas l objet lui m me que le mot fait r f rence mais sa notion pure C est travers le mot l absence m me la notion pure qui est vis e c est dire dans un syst me platonicien l Id e et non la mat rialit du signifi On se trouve donc bien devant un syst me qui remet le langage en question mais aussi la parole du po te un syst me qui interdit en quelque sorte tout panchement lyrique Ce sont les mots eux m mes qui renvoyant leurs concepts tissent le texte et non plus un po te mage tel que le romantisme en a cr entit sensible pure subjectivit Chez Mallarm les mots s allument de reflets r ciproques rempla ant la respiration perceptible en l ancien souffle lyrique Les mots ne sont donc plus anim s par une r f rentialit un monde ext rieur mais s clairent les uns les autres dans une sorte 15 S Mallarm Crise de vers in Igitur Divagations Un coup de d s op cit p 259 16 Jbid p 256 40 de jeu de miroirs un chemin second l int rieur de la composition du texte et de l ordre de la phrase Mallarm va privil gier l usage de mots rares archa ques ou sp cialis s qui ne renvoient dans une premi re lecture rien de v
350. rigine d une po tique du songe dans Aur lien et les derniers romans d Aragon op cit p 86 223 voix faite perception le parcours du songe se prolonge donc de verbes en r ves de m taphores en m tamorphoses Intimement li e l volution des rapports amoureux la d nomination pouse la courbe des sentiments se transformant au gr des inventions de lamant po te De l insignifiance d une d signation de convention la myst rieuse tranget de l appellation intime l imaginaire se d ploie et d vide sans rel che la toile des lettres sur l cheveau des mots Mots qui rev tent dans la rh torique aragonienne une valeur d offrande puisqu ils traduisent le d sir autant que la v n ration et font du nom r investi de l aura du fantasme le symbole inalt rable de l unicit de l tre aim Participant d un double processus d idol trie et d assimilation l auteur de l amour absorbe l autre en m me temps qu il le mythifie Fondu dans le creuset des songes le nom vecteur de l image peut galement exhumer les cendres d un pass enfoui par le biais du souvenir Aussi qu ils conduisent l amoureux sur les sentiers de la r verie ou qu ils lui renvoient en un clair son pass les noms s instituent comme de v ritables s sames du r ve R ve qui s coute autant qu il se dit dans la mesure o le charme des noms passe n cessairement par le grain de la voix Et puisqu
351. riodes distinctes et inconciliables l avant de l errance et l apr s de la coh rence Perception intime et perception externe se conjuguent donc sur le mode du d doublement le temps des horloges tant remplac par celui de la femme sans qui l existence et le temps lui m me cesse nt d tre une trame La femme temps lance donc son appel vers la recr ation infinie du monde et de ses repr sentations Cr ation Recr ation qui passe essentiellement par le langage et les cataclysmes qu il suscite dans la sph re th r e des songes et romances Le sablier invers de l amour magnifi pourrait donc se redresser afin d atteindre par une langue model e au regard de l autre I inatteignable t d un langage enfin vrai Miroir sans tain et vitre bris e Malgr l insaisissable malgr l indicible et l cart infranchissable chaque jour un peu plus profond entre deux amants l amour appara t toujours comme une qu te une tentative r it r e d ouverture de d couverte de l autre Cependant la relation pass e au crible du doute bute inlassablement sur la notion m me de couple la fois espace de fusion et de s paration lieu de la communion comme de l individualit les amants r unis 4 L Aragon Le cahier noir La d fense de l Infini p 212 cit in M C Thietard Le malheur d aimer ou l origine d une po tique du songe dans Aur lien et les derniers ro
352. rmais lui de composer la signification du po me lui de trouver dans l enchev trement complexe et subtil on a vu l importance des sonorit s de l tymologie etc de la langue mallarm enne une ouverture vers le sens On se trouve alors devant une po tique non simplement tourn e vers l acte de l criture et les Po sies de Mallarm bien entendu de m me que ses essais divers se r f rent ce moment de l criture mais galement orient e vers l acte de la lecture Une po tique de l nigme La po tique de Mallarm et l on oublie souvent cette dimension de l uvre est donc bien aussi une po tique de la lecture L invention d un langage nouveau purement po tique place le lecteur au centre m me du texte C est en effet dans la lecture dans l interpr tation que l uvre devient comme on l a S Mallarm Crise de vers in Igitur Divagations Un coup de d s op cit p 252 43 vu tant elle multiplie les possibilit s et les fausses pistes labyrinthique Mais c est aussi le sens ou plut t la qu te du sens qui se retrouve galement mis en avant Pourquoi d s lors Mallarm d robe t il cette signification esp r e On va donc voir pr sent en quoi Mallarm participe la tradition ancestrale de l nigme en po sie Le po me objet clos et parfait renferme en lui m me ce tr sor qu est le sens et le r serve au lecteur qui aura su r
353. rme de Janet la m moire traumatique ou l histoire de l v nement indicible c est plut t une id e fixe qui plane dans un lieu ex tempo et ex spatium Les souvenirs de l v nement ne sont pas encod s comme les souvenirs normaux car ils n existent pas dans la trame historique du sujet Etant non verbaux et non lin aires les souvenirs sont difficilement int gr s dans l histoire d une vie personnelle En effet Janet insiste sur la notion de rupture entre deux entit s m morielles celle qui appartient une histoire et celle qui se voit refuser le droit d acc s Ainsi l exp rience traumatique produit une rupture de sens rupture d ordre herm neutique et ou ph nom nologique sens entendu comme sens de l existence dans la mesure o l existence c est le mouvement par lequel l homme est au monde s engage dans une situation physique et sociale qui devient son point de vue sur le monde ce sens c est le sens de l histoire de son histoire C est ainsi que le trauma signale une rupture du sujet avec le monde c est comme un schisme imaginaire o le monde stable et coh rent d avant le trauma est irr m diablement s par de celui d apr s Voil la raison pour laquelle l v nement est v cu comme une perte de sens une dislocation entre le sujet et son histoire L Jexp rience traumatique dans son surgissement comme dans sa perp tuation provoque un bouleversement
354. roche parfois le roman de Guilloux de Ulysses de Joyce car ces deux textes font le r cit 125 d une journ e de la vie d un personnage En fait cette comparaison rapide fait surtout ressortir tout ce qui oppose Guilloux Joyce Le romancier breton opte pour une progression chronologique du r cit qui se d roule tout entier dans la seule ville de Saint Brieuc et adopte la narration la troisi me personne avec focalisation int rieure On est donc bien loin des stup fiantes innovations de Joyce La force de la composition du Sang noir tient sans doute la virtuosit avec laquelle sont orchestr es les voix des personnages et entrecrois es les intrigues secondaires Mais le d veloppement parall le de diff rents pisodes narratifs n appara t plus cette poque comme une technique nouvelle La structure du Bel Antonio est plus classique encore Brancati s inscrit tr s nettement dans la grande tradition du roman de formation m me s il la subvertit largement et privil gie une construction rigoureuse par chapitre chacune de ces sections tant introduite par deux ou trois citations L encore les v nements sont rapport s en suivant l ordre chronologique la narration est la troisi me personne Alors que d autres r cits de l crivain sicilien ant rieurs au Bel Antonio affichaient une certaine souplesse et une plus grande libert d criture le ton le style et l intrigue de ce roman appar
355. rrative premi re dans laquelle se retrouvent auteur narrateur et personnage et qui loin d ouvrir sur l autre renvoie plut t la qu te paradoxale d une identit qui n est plus que retour sur soi dans la mesure o tout ce qui n est pas moi est incompr hensible Toutefois jusque dans la perte de cette identit qu trop vouloir r fl chir il a finit par user l homme n existe jamais que par l autre Or chez Aragon cet Autre ne se cristallise bien souvent que dans l identit fuyante du sujet r fl chi et ne saurait donc constituer une garantie suffisante la r habilitation du reflet perdu La mise mort se dresse ici comme une uvre incontournable car elle a ceci de particulier de condenser dans le personnage d Anthoine Alfred les trois figures de la d perdition aragonienne l amant l auteur et son texte Le roman comme miroir amour comme roman la vie comme un songe Le roman comme l amour serait donc un genre de suicide dans la mesure o il renonce la vie en m me temps qu il la c l bre D s lors l objet de d sir qu il se cristallise sur le support textuel ou amoureux est n cessairement saisi comme le pendant existentiel de la mort d une mort sublim e par ces r veries qui parcourent l uvre comme une rivi re souterraine et dans le lit de laquelle la circularit des fantasmes d vide l infini l cheveau de l absolu et de ses t n
356. rs Rouges 1984 Jobert Timoth e Ces obscurs objets de d sirs Les sportifs noirs et l hypervirilit l preuve de l histoire dans le champ sportif fran ais 1880 1962 dans l ouvrage dirig par Philippe Liotard et Thierry Terret Sport et Genre Paris L Harmattan vol 2 2005 229 239 Kistemaeckers Henry Aeropolis Roman comique de la vie a rienne Paris Charpentier et Fasquelle 1909 Lacassin Francis L Aventure en bottes de sept lieues Paris ditions du Rocher 2007 Laget Fran oise et Serge Mazot Jean Paul Le Grand Livre du sport f minin FMT ditions 1982 Lenoble Beno t La travers e de Paris la nage Le Tigre du jour 3 juillet 2007 3 Leroy Claude S ries de vies la vogue des biographies romanc es dans les ann es 1920 R cits de vies et m dias sous la direction de Ph Lejeune RITM n 20 Universit Paris X 1999 105 122 30 L Allemande imaginaire sous la direction de Wolfgang Asholt et Claude Leroy Paris Berlin Moscou Regards crois s 1918 1939 RITM n 35 Universit Paris X Nanterre 2006 159 174 Mac Orlan Pierre pr face du livre de Tita na La B te cabr e Aux diteurs associ s 1925 I VT Maillart Ella Bribes de sagesse Paris Actes Sud 2007 Morand Paul Eloge du repos 1937 Paris Arl a 1996 Ouli Marthe Quand j tais matelot Paris Redier 1930 Ouli Marthe Saussu
357. rt de Lisa sa r action initiale renvoie l tat statique de leur situation familiale Quelque chose s est produit quelque chose est finalement arriv IM 199 En effet le non mouvement et le silence se brisent et H l ne en compare les effets un naufrage avec survivants IM 200 Chaque membre de la famille semble prouver une transformation d finitive Bien que cette transformation les extraie de leur silence elle les force galement r valuer la fa on dont ils ont g r leur vie et leur r le dans la famille Lorsque Viviane trouve Lisa pendue dans le grenier c est entr dans sa conscience comme une d charge lectrique une vol e de plombs trouant son corps la couvrant de poudre de cendre de poussi re M 199 Robert est galement boulevers toute sa vie s est r pandue sur le sol les vides les pleins lamour petites doses et il s est mis crier son tour IM 201 Nous remarquons que la r action des parents par rapport au suicide fait cho aux effets d sir s par H l ne mais qu elle n avait su obtenir par ses provocations En effet elle avait d j d clar son d sir de voir exploser le corps de sa m re IM 26 et les enfants avaient tent de sortir leur p re de sa torpeur indiff rente plusieurs reprises Il fallait le suicide de Lisa pour provoquer l effet d sir pour qu ils se rendent compte de leur carence de lamour peti
358. s rig es en mod le d excellence vont susciter au c ur de cette biographite aigu Leroy 1999 106 l int r t de dizaines d auteurs qui trouvent l un sujet d criture nouveau C est une aubaine pour les boulimiques de la publication ou les personnes en mal d inspiration sans compter qu ils n avaient pas besoin de faire de r el effort d imagination ou d ing niosit Charreton 150 tellement leurs prouesses y taient pr pond rante Le tragique accident d avion d H l ne Boucher viendra confirmer cette tendance puisque non seulement l v nement fit couler beaucoup d encre dans la presse sp cialis e et g n raliste mais plusieurs biographies lui furent consacr es dans les mois qui suivirent Il serait vain de vouloir passer en revue l ensemble des aventuri res anonymes ou c l bres mais afin d avoir une vue d ensemble il convient de citer les grands noms qui circulaient dans la presse La figure mythique de l univers a ronautique de la fin des ann es 20 et du d but des ann es trente est sans conteste H l ne Boucher Non seulement elle succ da une lign e de Fran aises d exceptions comme Marie Marvingt Adrienne Bolland Maryse Basti ou Maryse Hilsz mais elle inscrivit son nom au cours d une p riode o se multipliaient les h ros de l aviation avec des r cits comme Vol de nuit d Antoine de Saint Exup ry 1931 La femme la plus vite du
359. s d incongruit s r ciproques mais davantage capable que tout autre de recueillir id es concepts formules toutes les abstractions du monde pour leur donner un visage et un nom et les faire voyager vite tr s vite plus vite que la lumi re Il y a dans cette description haute en couleurs de la fiction une opposition nette la m taphysique et par l la philosophie laquelle a condamn s v rement l art de la fabula Le plus grand mythographe de la cit grecque est bien videmment Hom re Ce dernier a une autorit consid rable Ath nes o il joue un r le de premi re importance dans l ducation Hom re est un po te il repr sente m me lui tout seul l excellence du po me pique La po sie hom rique d passe ce que l on appelle po sie aujourd hui elle englobe tous les genres tous les savoirs et nous semble vertigineuse d obscurit bien des points de vue Malgr cette compl tude de la po sie mythographique quelque chose en nous nous dont l ducation po tique se cantonne la r citation laborieuse de quelques vers dans les petites classes quelque chose donc r siste penser qu un po te aussi oc anique fut il pouvait ainsi enseigner la vertu Dans 16 Alan Pauls Le facteur Borges traduit de l espagnol par Vincent Raynaud Christian Bourgois diteur Paris 2006 188 pages page 170 TT la R publique de Platon Hom re est mis durement en accusation pour
360. s le concept d un infini en acte nerg ia apeiron l int rieur de la nature Erwin Panofsky La Perspective comme forme symbolique et autres essais traduction sous la direction de Guy Ballang pr c d s de la question de la perspective par Marisa Dalai Emiliani Editions de Minuit 1975 p 157 270 les autres espaces temps int rieurement v cus Nous avons un autre espace en profondeur situ droite du tableau l espace du r ve Contrairement l espace de la m moire qui vient loin de l horizon et s ouvre sur le premier plan celui du r ve est circonscrit dans une sorte de volume enferm de trois c t s Par cette composition le peintre met en avant l aspect sc nographique de l espace onirique Nous avons dit l espace du r ve car le temps semble spatialis ici comme d ailleurs dans beaucoup de r ves On peut rep rer trois personnages dans cet espace la voleuse son complice et un autre homme que l on ne peut pas identifier Tous les trois s absorbent dans leur propre activit la voleuse est en train de viser une cible en avant que le spectateur ne peut pas voir son complice assis pr s du comptoir louche sur un coin l homme non identifiable est en train de toucher la fen tre tout en regardant dans la direction du spectateur est ce la m me personne que le complice Ils regardent tous dans la m me direction mais leurs regards ne se convergent pas sur le m me objet
361. s seront nettoy s Je vois maman dans le ventre d un poisson Et je me vois dans le ventre de maman I 130 131 Selon Kennedy the image of concentric circles me in mother in fish in sea corresponds to Jung s theories of the various layers of the psyche Notons que le moi se trouve au centre et c est la m re qui l entoure 92 Nous retenons deux concepts principaux de l tude de Kennedy Premi rement la m re contr le la fille non seulement au niveau physique mais aussi et ce qui est plus important elle l envahit au niveau psychologique Deuxi mement le texte de Chen est riche en significations m taphoriques et symboliques que l crivaine laisse ouvertes l interpr tation du lecteur 90 100 8 En italique dans le texte 183 peut tre conduisait ses lus vers son royaume Je cherchais maman dans l air et elle tait pr sente partout Elle m avait tremp e jusqu aux os Son odeur me hantait dans mon sommeil Je ne supportais pas qu avec le temps elle devienne indiff rente mon absence J aurais aim avant de m engouffrer dans ses tourbillons impr gner son me insensible de ma fureur de bateau 1 99 100 Alors que ce passage est profond ment dysphorique le fait que Yan Zi cherch e sa m re partout I 99 et qu elle ne veut pas qu elle devienne indiff rente s Jon absence r v le l amour qui sous tend sa haine En fait plus loin elle admet qu elle
362. s comprenons qu il s agit l d une sc ne appartenant un pass lointain Freud cit par Alain Bergala nitiation la s miologie du r cit en images Les cahiers de l auto visuel 1977 p 17 271 personnage se livre Chacun est noy dans ses propres exp riences sensorio motionnelles la vigilance de l homme qui louche l absorption extatique de la voleuse dans son attention sur la cible le d calage entre l acte de l homme non identifiable et le point focal de son attention D une part l homme perd la capacit du contact avec les autres dans sa noyade dans les exp riences d autre part il se perd soi m me dans sa course sans arr t vers les exp riences En ce sens l espace du r ve est bel et bien l espace du d sir car le d sir pousse l homme dans sa recherche de diverses exp riences afin d oublier la vacuit de l existence La peinture de Monory est bel est bien la peinture du dandy car le dandy est celui qui se perd dans ses exp riences indiff renci es Il n est pas tonnant que l espace temps onirique et l espace temps mn sique d bouchent sur l espace temps de l tre situ au milieu du premier plan En fait le mot d espace temps n est plus valable dans ce cas car il n y a plus d espace ni de temps l espace temps s efface devant le pur tre La voleuse et son complice se retrouvent dans un lieu qui ne se distingue pas d avec d autres lieux l
363. s et risquant sa vie pour laisser une empreinte dans la litt rature loge de la navigatrice Autres femmes autres portraits les navigatrices m diterran ennes du d but des ann es 20 semblent elles aussi avoir s duit des crivains voyageurs Les cinq gar onnes cheveux courts qui s embarqu rent dans de belles aventures marines bord des voiliers Perlette et Bonita intrigu rent en effet par leur audace Il s agit d Ella Maillart Hermine et Yvonne de Saussure Marthe Ouli et Mariel Jean Brunhes L une de leurs plus remarquables croisi res fut sans doute r alis e bord de la Bonita un cotre long de onze m tres et jaugeant treize tonneaux avec lequel elles reli rent Marseille Ath nes Hermine de Saussure et Ella Maillart amies d enfance d couvrent tr s t t les secrets de la voile sur le lac L man Rejetant le conformisme pleines d nergie elles s amusent tellement qu elles se trouvent peu peu d vor es par le go t du voyage Au m me moment la lecture des terribles t moignages de guerre Les Cf H G Wells L le du docteur Moreau 1896 26 Pour reprendre le titre d un ouvrage de Jean Griffet 23 Croix de bois de Dorgel s ou La Vie des martyrs de Duhamel leur montre le visage de la cruaut Bouvier 119 et la rencontre avec deux jeunes crivains ayant connu les tranch es Jean Bernier et Pierre Drieu la Rochelle viendra confirmer ce d sir de r
364. s que de tr s faibles tirages mais si vous le jugez utile je suis pr t vous aider Heimermann 82 Six pages lui suffiront enjoliver l image de cette jeune femme de vingt sept ans quelques l ments sur sa vie sur son travail de reporter et sur l criture de son roman Pierre Mac Orlan ne consid re pas Tita na comme une dame mais plut t comme une aventureuse une femme non d nu e de charme aux allures de gar on manqu C est galement le sentiment de Joseph Delteil lui aussi lanc par Pierre Mac Orlan qui la pr sente en ces termes Vu Tita na un il de gazelle dans un corps d avion Elle doit faire l amour avec les palmiers Et en 1938 Edouard Helsey ira dans le m me sens lorsque la r daction de Gringoire lui commandera un portrait d elle Un grand gar on sportif hardi franc et cordial plein de pr coce sagacit et de fougue juv nile c est ainsi qu elle m apparaissait En fait Mac Orlan comme bien d autres est tout de suite s duit par la personnalit charismatique la fois trange et mouvante I de celle qui revendique bien souvent la sup riorit de l action sur les mots Berthier 2008 Elle laisse transpara tre une v ritable sinc rit dans ses actes en osant anticipant entreprenant et le futur auteur du Quai des brumes ne s y trompe pas J aime la puissante humeur vagabonde de Tita na parce qu elle est curieusemen
365. sa m re la narratrice commence penser aux histoires qu elle porte dans sa graisse Ces histoires ont rapport sa jeunesse celle de son p re et sa famille paternelle Ce sont des histoires que son p re avait ni es Par exemple elle dit qu elle porte dans sa graisse la famille du Nord 128 et l adolescent gros qu tait son p re 101 Le p re de la narratrice a fait de grands efforts dans son adolescence et durant l adolescence de sa fille de nier ces deux histoires Les soeurs de la m re de la narratrice parlent du miracle de sa transformation 130 il avait maigri et est parti de son village natal pour devenir un succ s 131 De plus il a interdit ses enfants de conna tre sa famille apr s un No l d sastreux 45 Aussi son attitude envers sa propre grosseur a fait qu avant leur divorce la m re de la narratrice a tra n son enfant ob se chez des m decins de sa banlieue cossue qui affirmaient ne pouvoir rien faire tant que l enfant n aurait pas atteint la fin de sa 59 croissance c tait l h r dit un mot qui calme qui vient de Dieu qui apporte la paix et qui l a enferm e dans cette graisse tout jamais 111 Le p re de la narratrice a tent de nier son h r dit mais la soci t de consommation trouve acceptable seulement cette explication pour la grosseur de la narratrice puisque autrement elle aurait t de caract re moral faible Pour d
366. sc ne philosophique ancestrale celle de l all gorie de la caverne au livre VII de la R publique de Platon rituel inaugural et matrice de toutes les formes d id alisme depuis lors Les prisonniers de la caverne ne voient d abord que les ombres puis le feu et enfin sortent de leur antre pour d couvrir les objets sous la lumi re naturelle et le soleil en personne Je ne sais si j ai jamais vraiment bien compris ce mythe Cependant quand je regarde le soleil je suis aveugl e et cet astre n a peut tre jamais fascin que parce qu il permet de marcher dans la lumi re et d avoir chaud Les hommes veulent s approcher du soleil pour mieux l utiliser mais le toucher j en doute ils veulent vivre L esclave des ombres que je suis est donc plus int ress e par ce qui se passe dans la caverne que par l ambition de toucher un jour le soleil de la connaissance absolue et des v rit s ternelles Comme je l ai d j annonc ma cosmogonie ne semble vouloir tre d essence divine et les irr alistes sont un peu les intouchables de notre syst me de pens e Il existe bien entendu de multiples interpr tations et digressions de l all gorie platonicienne qui est un peu il serait bon de se l avouer notre mythe fondateur nous les philosophes N en faut il pas un de toute fa on Pour ma part en bonne l ve je consid re que ce mythe est de toute premi re importance et peut tre vaut il la peine qu on te
367. se base sur cette conception En visitant la tombe de son p re il affirme croire qu on meurt et que c est tout Je n arrive pas envisager la mort autrement que comme la fin E 406 Lorsque Boris parcourt La Bible qui lui est laiss e par son p re il d couvre un passage de L Apocalypse soulign de rouge et marqu d un point d exclamation Ce passage agit comme un r veil de conscience Je connais ta valeur que tu n es ni froid ni chaud Ah si tu tais froid ou chaud Parce que tu es ti de ni froid ni chaud je te cracherai de ma bouche E 411 4 Kokis Sergio La danse macabre du Qu bec p 79 5 Cette vision rejoint celle de Sartre Dans un ouvrage de R gis Jolivet intitul Sartre ou la philosophie de l absurde nous lisons que l homme n est rien de d fini et de d termin Il est pure possibilit c est dire qu il est libre libre de cette libert pure cr atrice des essences et des v rit s dont Descartes faisait le privil ge de Dieu et que Sartre renon ant Dieu place r solument dans la r alit humaine p 43 Kokis comme plusieurs de ses personnages ne croit pas en Dieu Dans L amour du lointain il affirme son ath isme AL 272 et son adh sion la philosophie sartrienne Ma d couverte importante a t cependant le th tre de Sartre et L tre et le n ant que je consid re comme un des textes fondamentaux de la philosophie contemporaine Il
368. se sur les Recours contre les d cisions des f d rations sportives la Facult de droit de l universit de Paris 18 On apprend par exemple dans ce r cit qu deux milles de la c t anglaise le p re de Zizi avait tranquillement pass une amarre sa fille qui se laissait porter 18 ne comptant que sur elle m me elle fait r ellement preuve de courage Elle se place ainsi aux c t s des nageuses de marathon qui particip rent d faut de pouvoir le faire dans des comp titions plus classiques Terret 178 aux grandes preuves en eaux vives Charlotte Bertrand Lily Smith Gertrude Ederl ou encore Annette Kellermann Cette derni re dont la c l brit sera mise en sc ne par le cin aste am ricain Mervyn Leroy se pr senta la premi re dition de la travers e de Paris la nage en 1905 et elle r ussit se classer quatri me avec seulement quatre vingt dix minutes de retard sur le premier le Fran ais Paulus vainqueur en trois heures et vingt neuf minutes L Auto qui lan a cette preuve une poque o les quotidiens bon march montaient des v nements sportifs estivaux en vue d am liorer leur notori t publique Lenoble 3 Paul Souchon en donna un joli po me dans ses Chants du stade consacrera de tr s belles lignes son blouissante performance Dieudonn a su mettre profit cette connaissance du monde sportif et journalistique avec l esprit malicieux et observa
369. social sur l individu T he exploitative social context in which sexual relations actually occur became utterly invisible Psychoanalysis became the study of the internal vicissitudes of fantasy and desire dissociated from the reality of experience Professeure en psychiatrie clinique et sp cialiste en tudes du trauma Judith Herman r it re l importance des m thodes th rapeutiques par les mots mais elle largie le terrain de la compr hension en y soumettant des explications d ordre socio historiques Ses travaux d montrent que le trauma n est pas seulement v cu de l int rieur il ne vit pas seulement une fracture psychique traumatic events have primary effects not only on the psychological structures of the self but also on the systems of attachment and meaning that link individual and community Ainsi nous estimons n cessaire de ne pas ignorer le contexte psychosocial du sujet Car travers les mots de la cure le sujet attentif donner un sens sa propre souffrance comprendre pourquoi a souffre tente d voquer de mettre en sc ne l v nement qui a fond sa d chirure psychosociale 17 S Freud et J Breuer tudes sur l hyst rie p 4 8 J Herman Trauma and Recovery p 14 1 J Herman Ibidem p 51 155 Quoique notre int r t se porte sur les fa ons dont le trauma est intrins quement li aux notions psychosociales de rupture et de catastrophe nous tr
370. sophie au lyc e de Saint Brieuc Georges Palante R solument individualiste une 3 Pour cette question voir Giovanni Morelli Vitaliano Brancati tra fascismo e gallismo Manduria Bari Roma Piero Lacaita 1989 Lire aussi l ouvrage de Gian Carlo Ferretti L infelicit della ragione nella vita e nell opera di Vitaliano Brancati Milano Guerini e Associati 1998 139 poque o l objectivit de la sociologie naissante gouverne le savoir en France Palante est le mod le du personnage de Cripure Auteur d une th se sur Les Antinomies de l individu et de la soci t o il s en prend violemment Durkheim et surtout d un Combat pour l individu Palante fut l ami intime de Guilloux avant de se brouiller d finitivement avec lui Une grotesque affaire de duel finalement vit mina ses derni res ann es et finit par le pousser au suicide Largement oubli Georges Palante s est pourtant fait conna tre au d but du si cle en tant qu essayiste et chroniqueur au Mercure de France La figure de Cripure emprunte Palante de nombreux traits sa difformit son isolement et surtout son individualisme farouche On n a peut tre pas assez insist sur l importance de l enseignement de Palante non seulement sur l uvre mais aussi sur la vie et les convictions de Guilloux Si nous abordons ici ce point c est parce qu il nous appara t d cisif pour mieux comprendre la mise en sc ne historique dans l
371. sque l auteur se rendit notamment Francfort Berlin Dresde et Hambourg au cours des ann es 1927 et 1928 offre la vision nuanc e et non d pourvue d accents critiques Cabanel 3 11 d une Allemagne en plein essor la suite notamment du plan Dawes et des accords de Locarno Comme plusieurs de ses contemporains dont Pierre Drieu la Rochelle Jean Giraudoux Paul Colin ou Ren Jouglet Ren Trintzius est litt ralement fascin explique Hilde Hesse par cette Allemagne am ricanis e mancip e et hyper moderniste 50 Tous les aspects d un renouveau sont voqu s l art l architecture les d cors les relations entre les hommes et les femmes et bien videmment le sport Comme un Paul Morand qui s amuse croquer les portraits des femmes nouvelles d Europe Ren Trintzius essaie de tracer celui de l Allemande id alis e dont Ingrid rompue tous les sports repr sente le prototype Elle fait r guli rement des exercices de culture physique avec toutes 1 Notamment dans Ouvert la nuit ou L Europe galante 13 sortes de sandows et ballons exercicer 49 elle pratique bon niveau le water polo et fait partie de l toile filante un club de nudisme et de danse Andr reconna t bien volontiers les vertus de la gymnastique qu il consid re comme une sorte de mystique de l hygi ne 66 et dont il admire les effets sur le corps d Ingrid et plus particuli re
372. sse inaper u de sa grande s ur En effet parce qu H l ne est elle m me obs d e par la violence parce que ces enfants subissent l agression de leur parents quotidiennement les r seaux de soutien d nergie et d amour familiaux dans lesquels Lisa devrait pouvoir puiser lorsqu elle se sent accabl e n existent point Pour Lisa le manque d int gration familiale le dysfonctionnement familial et surtout la carence parentale constituent les causes principales du suicide Dichotomie explosive d amour et de haine dans L Ingratitude J avais v cu en tant que l enfant de ma m re Il me fallait mourir autrement Je terminerais mes jours ma fa on Quand je ne serais plus rien je serais moi L Ingratitude Dans L Ingratitude le p re est caract ris comme tant faible d esprit et indiff rent sa famille Il tait professeur de sciences politiques avant d tre frapp par un v hicule un accident qui lui te ses habilit s intellectuelles Puisque le p re est demi mort 1 32 la m re prend les r les de matriarche et de patriarche C est ainsi qu elle devient un tyran I 23 aux yeux de sa fille Lori Saint Martin sugg re que c est la violence maternelle qui entra ne Yan Zi vouloir se suicider 2001b 60 Cette violence de la part de la m re na t de son amour pour sa fille pourtant cet amour est malsain elle se comporte la fois comme un amant jaloux et une m re qui
373. st que Zvat est du camp des forts de ceux qui ont acc s la nouvelle J rusalem Heureux ceux qui ont part la premi re r surrection sur eux la seconde mort n a pas d emprise Ap 20 L tape du d collage en avion est capitale pour la m tamorphose ontologique de Steiner Mort et transfiguration C est bien celui ci le sens de cette expression Mort et transfiguration C est ainsi que les gens ont de tout temps pens au dernier soupir de mourants comme un d collage Et c est tout fait juste FB 159 D ailleurs c est b te de craindre la mort puisque nous ne savons rien sur elle Il se peut qu elle soit un voyage uniquement un voyage sans fins et souvenirs amers FB 18 Chevalier Jean et Alain Gheerbrant P lerin Le dictionnaire des symboles p 737 115 163 Il est ind niable que ce voyage ait un rapport avec le salut de l me de Steiner et cette certitude lui permet de mieux cheminer Depuis la mort de Lukas il se r jouit d tre devenu Zvatopluk le p lerin solitaire d autant plus que son nouvel tat lui permet d voluer comme si le monde cesse d exister sa vitesse habituelle pour s couler visqueux et ainsi confondre la perception que le jeune Lukas Steiner a de lui m me FB198 Zvat est le p lerin qui donne une certaine coh rence l unit absente de Lukas Sauf que d tape en tape la joie de cheminer en toute libert appor
374. st une figure de l chec priv e de toute ambition incapable de tirer profit du trouble qu il suscite chez les femmes pour se hisser dans la soci t Cette particularit fait que les personnages de Guilloux et de Brancati ne peuvent tres rang s dans la typologie des h ros du roman r aliste et naturaliste qui subissent certes des d faites mais aspirent au prestige la gloire la richesse ou l amour Louis Guilloux Le Sang noir op cit p 39 7 C est ce que notaient d j Albert Camus et Andr Malraux dans leurs tudes sur Le Sang noir Le romancier de la douleur de Camus et Le sens de la mort d Andr Malraux reproduites par exemple dans l ouvrage collectif de Yannick Pelletier Louis Guilloux Bassac Plein Chant n 11 12 1982 Pour Le bel Antonio on peut voquer les essais de Gian Carlo Ferretti L infelicit della ragione nella vita e nell opera di Vitaliano Brancati Milano Guerini e Associati 1998 de Salvatore Zarcone La carne e la noia La narrativa di Vitaliano Brancati Palermo Novecento 1991 ou encore de Valeria Giannetti Textes provisoires et strat gies de la repr sentation du personnage chez Vitaliano Brancati in Dominique Budor et Denis Ferraris dir Objets inachev s de l criture Paris Presses de la Sorbonne Nouvelle 2001 8 Sur cette question l analyse p n trante que propose Valeria Giannetti d un roman post rieur de Brancati Paolo il c
375. stacle au sens mais comme faisant sens lui m me Toute tentative de clarification serait ainsi sinon enti rement vaine tout au moins limit e vou e un certain chec Les Po sies en remettant en question le mat riau m me de la litt rature le langage cl turent ainsi superbement le XIX si cle et annoncent les avant gardes venir Toutefois si l criture de Mallarm a bien un caract re de rupture et d innovation elle s inscrit incontestablement dans une perspective volutive et pr sente une vertigineuse r flexion sur la question de la tradition On conna t l rudition de Mallarm sa culture profonde des auteurs antiques son amour pour les litt ratures orientales Si une r volution prend forme sous sa plume c est en constant regard des uvres du pass L criture de Mallarm est donc doublement labyrinthique tout d abord par son obscurit dans laquelle il est ais de se perdre mais aussi par ce tissu de r f rences qui se trame toujours derri re le simple texte Les lectures et interpr tations se trouvent multipli es comme autant de chemins qui s ouvrent toujours plus nombreux Je me propose d s lors de voir en l uvre de Mallarm et l on sait l importance primordiale que celui ci attachait la composition l architecture de ses ouvrages une vaste construction labyrinthique dans laquelle l garement du lecteur fait partie int grante du texte un
376. station rapport marque preuve personnel et collectif Ainsi L v nement sera tudi comme une r criture testimoniale du trauma la tentative plus compl te de gestion qui s ouvre vers la collectivit et qui tente de retrouver un sens pour et par l Autre Ernaux pr cise cet effet Et le v ritable but de ma vie est peut tre seulement celui ci que mon corps mes sensations et mes pens es deviennent de l criture c est dire quelque chose d intelligible ef de g n ral 162 mon existence compl tement dissoute dans la t te et la vie des 36 autres Le sujet ne se remet pas de sa d chirure gr ce au renfermement narcissique le t moignage l oblige se d privatiser int grer le corpus m moriel du trauma dans l histoire humaine offrir un corps texte qui fait parler l indicible The bearing of testimony can thus be seen as both cathartic healing ritual and a way of giving meaning to and therefore as a refraiming of the individualized pain the private pain is transformed into political or spiritual dignity L tude de la construction de cette narration soul vera plusieurs questions notamment sur la m thode de l laboration tripartite individu collectivit id ologie Ce travail s appuiera sur cette th orie en l utilisant non pas comme une grille de lecture mais bien comme un mode de pens e et d analyse Il tentera de prouver en quoi la reprise d une m me
377. sture cet irr alisme n cessaire la vue de la fiction l uvre dans notre r alit Ces crits portent l impact de cette qualification 21 Robert Musil L Homme sans qualit s tome I traduit de l allemand par Philippe Jaccottet Editions du Seuil Paris 1956 833 pages page 22 22 Nicolas Bouvier L usage du monde Petite biblioth que Payot Paris 1992 418 pages page 418 82 soustractive comme le M crit dont Christian Prigent dit Le texte de Roche se constitue de fait comme une somme de soustractions La mani re po tique Outre cette qualification soustractive de l espace po tique et cr atif de Denis Roche celui ci dit croire la mont e des circonstances Pour autant il circonscrit cette description des facteurs l acte artistique photographique Il s agit pour lui de la seule possibilit d un exercice esth tique valable De fait en voquant la po sie imminente latente dans toute tentative descriptive des pratiques humaines je trahis moi m me mon propos En effet cette vocation de la po tique du discours a tendance faire oublier la proposition de d part savoir que la r alit n est pas autre chose que cette transmission orale crite implicite de cet usage prot iforme du monde Ainsi la po sie proprement dite l activit artistique dont nous reparlerons videmment tente chaque fois de relater cette exp rience totale du monde Pour autant loin
378. sumption qui est pratiqu par Alice En plus de son mission de t l vision qui place une valeur sur la consommation duqu e elle lave chaque soir son linge du jour et le suspend au dessus de sa baignoire pour ne pas consommer de l lectricit inutilement 91 Ce geste loin d tre un refus des contraintes de la soci t de consommation est au contraire une nonciation de diff rence bas e sur le syst me de signes de la soci t de consommation Enfin Alice est per ue avec d dain par la narratrice parce qu elle a fait des compromis conscients pour atteindre l id al de la soci t de consommation mais n a r ussi qu nuire sa sant et trouver un emploi bien loign de ses pr occupations nobles et culturelles 102 Comme le prouvent videmment ses opinions sur sa m re et Alice la narratrice ne croit pas que la citoyenne id ale de la soci t de consommation est un but d sirable physiquement ou psychologiquement Cependant la narratrice prouve des motions n gatives envers elle m me cause de son non conformisme et parce que les valeurs de la soci t de consommation sont insidieusement enracin es en elle Au fur et mesure que le roman avance la narratrice prouve de plus en plus de m pris envers soi mais elle est aussi consciente de l importance d chapper aux contraintes de la soci t de consommation ainsi que d identifier la source de son internalisation de
379. sur le Rameau d or de Frazer op cit page 21 4 Ibid page 22 68 est un sympt me r v lateur de cette mani re ou plut t de ces mani res de faire des mondes Par la suite quand nous commen ons tre impr gn s de cette fa on de faire nous perdons cette facult de nous tonner cet merveillement que procurent dans les d buts ces monstres fabuleux que sont nos mots les plus ordinaires Parfois seulement et encore faut il tre curieux nous retrouvons cette joie facile en d couvrant d autres cultures d autres fa ons d tre au monde L exp rience artistique est aussi l occasion de retrouver le go t de l tonnement chaque fois mais est ce si vident L homme de la rue cependant ne vit pas dans ce grand fourbi du moins ce n est pas a vivre pour lui comme pour nous tous Comme l crit Ernst Bloch dans Experimentum Mundi Vivre au sens transitif pr suppose la rotation devant notre regard de ce qui peut tre v cu Ainsi nous avons la conscience de vivre une fois seulement apr s avoir int gr un certain ordre une certaine organisation de cet informel monde dont on ne saurait que faire sans les mots les hypoth ses les histoires En amont nous sommes dans le gargouillement de l enfance dans le balbutiement de la vie ce qui ne l est donc pas encore et il est int ressant de noter comment tous points de vue la vie commence quand on sait la prononcer
380. t humaine II Ses mots sont r ellement saisissants On peut dire de notre poque qu elle a conduit l art du reportage aux plus hautes r ussites de l art litt raire Les grands romanciers de 1925 sont presque tous des reporters adroits courageux et d une r sistance physique honorable B raud Dorgel s Morand Helsey Londres Jean Richard Bloch et bien d autres ont cherch et cherchent encore dans le monde le petit d tail humain 1 J Delteil Journal 15 d cembre 1925 77 Helsey Tita na Gr goire 15 juillet 1938 21 qui ranime la flamme litt raire Tita na aussi r sistante qu un homme sait porter le sweater de sports le veston de cuir et les jolies bottes souples de sept lieues que l on trouve au milieu des quipements coloniaux Soit au Maroc soit dans les steppes d sesp r es ou parmi les tziganes candides elle a suivi la m me piste que les hommes les plus boucan s dans les terres o l on ne ment jamais Elle a connu les heures rudes de franc compagnonnage o la galanterie n intervient jamais II IV C est en proposant un premier conte au quotidien La Victoire en septembre 1922 que la s ur d Alfred Sauvy future amie d Antoine de Saint Exup ry de Jean Cocteau et de Jean Prouvost fit ses premiers pas dans le journalisme et choisit pour pseudonyme trois syllabes la sonorit musicale emprunt es la mythologie catalane du XVI si cle Sorte de b
381. t ses cr ations le couple et ses passions De l inqui tante tranget de l uvre la troublante identit de l Autre il n y aurait donc qu un pas que le texte aragonien franchit l envi l artiste et l amant se rejoignant infiniment dans cette lutte ternelle entre Eros et Thanatos Narcisse et Echo le Vautour et Prom th e Parce que malgr les truchements r it r s de l alt rit toute uvre n est jamais qu une tentative narcissique de r appropriation de l identit de son auteur la d marche romanesque demeure profond ment gotiste regard de soi sur soi r cit de soi par soi 51 G Durand Les structures anthropologiques de l imaginaire op cit p 480 Blanche ou l oubli op cit p 374 amp P Verlaine Mon r ve familier in Po mes saturniens 1866 Paris Gallimard Folio Plus Classique 2005 Blanche ou l oubli op cit p 302 S Aur lien op cit p 304 236 le m me y na t toujours du m me La v rit d voil e y est elle m me solitaire et le dialogue bauch ne renvoie qu une criture essentiellement singuli re Reflet de l existence fictionnelle transparence du regard et masque langagier tous convergent en un m me point celui de l auteur par qui tout prend litt ralement sens En ce point galement se retrouvent l amour et le roman Le je se dresse alors sans cesse comme l cho r p t de cette instance na
382. t une forme particuli re de la natation qui consiste r aliser des parcours de grand fond en eaux vives en g n ral sup rieurs trois heures Voir ce sujet l ouvrage de Fran ois Oppenheim Histoire de la natation mondiale et fran aise Paris Chiron 1977 sollicit es par de grands journaux prennent la plume Les sportives m caniques ne sont pas les seules tre cit es puisque les performances extraordinaires et ponctuelles d autres femmes d exception telle Gertrude Ederl sont galement relat es Cette Am ricaine de dix neuf ans est la premi re femme avoir travers la Manche la nage battant du m me coup le record d tenu jusqu alors par un homme en ralliant le 6 ao t 1926 Cap Gris Nez Douvres en quatorze heures et trente neuf minutes L pisode fait grand bruit dans la presse fran aise et britannique et maints journalistes europ ens atteints dans leur orgueil alimentent une querelle pour contester l exploit Fouret De retour New York elle est acclam e par une foule estim e pr s de deux millions de personnes un timbre postal son effigie sera imprim Cet exemple suffit comprendre les principales raisons pour lesquelles les journalistes s emparent de ces figures f minines une premi re ditoriale dans la mesure o les journaux doivent faire du sensationnel pour vendre du papier une deuxi me sociale car le c t risque tout des gar onnes ne peut rest
383. t au profit d une angoisse grandissante Elle l est d autant plus que les modifications corporelles de la narratrice ont trait tant son aspect ext rieur qu sa physiologie de femme L abondance et l absence de r gles rythment les fausses couches depuis la section trois jusqu la section huit o la phase ultime de cette alternance donnera naissance six petites choses sanglantes qui remuaient Truismes p 97 Jusque l s tend galement une interrogation profonde sur la nature de cette 1 Barthes Roland S Z Paris Seuil p 266 5 Darrieussecq Marie Truismes p 13 Pour plus de facilit les renvois Truismes apparaitront d sormais dans le texte sous la forme Truismes num ro de la page 246 transformation dont la narratrice r solument ing nue refuse de partager sa conclusion avec le lecteur Il est encore trop t t pour vous dire ce que j ai vu dans la glace p 44 Cette premi re phase de la transformation aboutit ainsi une m tamorphose compl te de la narratrice en un animal quatre pattes J tais nue sur le carrelage mais ma peau tait devenue si paisse qu elle me tenait pour ainsi dire chaud p 56 qu elle est r calcitrante nommer Et l dans le miroir j ai vu ce que je ne voulais pas voir p 57 Le retour du miroir confirme donc une prise de conscience du passage de l humanit de l h ro ne son animalit encore innommable Comme par e
384. t beau Or la plus l g re r flexion suffirait pour convaincre quiconque a un il du d testable effet produit par de nombreux miroirs sp cialement par les plus grands En faisant abstraction de sa puissance r flexive le miroir pr sente une surface continue 3 Le film de Derek Jarman Wittgenstein traduit de l anglais par Patricia Farrazi ditions de l clat Paris 2005 173 pages pages 97 173 page 172 94 plane incolore monotone une chose toujours et videmment d plaisante Consid r comme r flecteur il contribue fortement x sur 36 produire une monstrueuse et odieuse uniformit Le parcours de Wittgenstein est donc celui d un r veil philosophique qui va de l uniformit glac e la d couverte des diversit s et ce d ploiement lent de la multiplicit est d j pr sent et visible dans le Tractatus logico philosophicus que l on consid re tort me semble t il comme un pur d ploiement m taphysique En effet si l une des premi res propositions 1 13 est Les faits dans l espace logique sont le monde elle prend une toute autre dimension l coute des derni res propositions 5 61 La logique remplit le monde les fronti res du monde sont aussi ses fronti res Si cet ouvrage pr sente l apparence d une m taphysique c est assur ment dans sa forme fantastique au sens borg sien que celle ci prend son sens Probl matique du fait Intr
385. t c tait ce genre d effacement qu elle d sirait depuis le d but Lentement elle s habitue l espace entre deux qu elle occupe et exprime son bonheur d tre maintenant lib r e des contraintes de l existence Quel soulagement enfin de se trouver hors de ce jeu interminable d tre l abri du temps de ce bouillonnement rythm des amours et des rancoeurs des plaisirs et des ennuis des naissances et des morts des parents et des enfants tre l enfant d une femme est donc une chance qui permet de conna tre le bonheur de ne pas l tre Une chance laquelle on doit beaucoup de gratitude 1 132 Dans ce passage le texte semble donner son adh sion la d cision de Yan Zi Sa gratitude envers cette opportunit d prouver le bonheur de ne plus tre la fille de sa m re sugg re qu elle a v cu une transformation identitaire En effet apr s avoir exprim sa gratitude la lumi re envahit tout ivre et triomphante SJon souvenir de sa m re se fonde dans cette lumi re uniforme 1 133 Et puis elle entend une derni re voix humaine le cri d un nourrisson peut tre Maman I 133 Cette fin quivoque peut signifier soit une sorte de renaissance qui la forcera revivre sa vie d ingrate soit une r incarnation qui lui permettra de recommencer neuf encore l ambivalence persiste et nous ne pouvons discerner une position thique par rapport
386. t de cruaut ma tris es les uns envers les autres L ultraviolent comme le non violent sont repouss s dans les marges du vivre ensemble qui comprend une manifestation r gul e de ladite violence Ainsi si nous qualifions les organisations tribales de sauvages nous transmettons nous aussi une certaine pratique de la violence du ch timent et du meurtre Ce constat par certains aspects peu brillants a toutefois l avantage de montrer encore une fois les faiblesses des jugements p remptoires en termes de vrai et de faux de bien et de mal d s lors qu il s agit de pratiques du vivre ensemble On peut donc affirmer sans ambages qu adopter un point de vue irr aliste sur le monde entra ne n cessairement une forme de relativit qui rev t plusieurs formes Ainsi la reconnaissance d une certaine a moralit des pratiques humaines la d pendance du sens du r el vis vis de ces usages la vision de la ritualit qui les instruit L conomie des grandes structures l attention donn e aux descriptions et aux usages la prise en compte de l importance de la simulation fictionnelle dans nos tentatives de compr hension et d int gration est un autre aspect du point de vue relativiste Si nous avons d j voqu assez largement me semble t il ces divers constats mis nu par la prise en compte de la fictionalit l uvre 92 dans nos pratiques quotidiennes du monde la relativit donne voir encore
387. t elle fait preuve Contrairement aux nombreuses bourlingueuses qui cherchent tre ind pendantes et parcourir les cinq continents au gr de leurs envies il faut situer la vaillance d Ingrid sur un autre plan celui de l amour Lorsque Andr apprend qu Ingrid effectue un d fi a rien cause de lui il est doublement surpris Sachez seulement que vous tes un peu responsable de ce raid je crois qu Knesebeck elle ne pouvait plus vivre sans vous quoiqu elle 5 Marie Surcouf la premi re femme fran aise obtenir le brevet de pilote sportif fonda en 1909 la Stella le premier v ritable A ro club sportif f minin Les Stelliennes se distinguaient nettement par leurs qualit s d initiative leur volont et leur m pris du danger 14 ne m ait jamais rien avou 214 lui explique sa tante Ingrid ne supportant plus la situation a ressenti la n cessit absolue d agir sans grande h sitation et d aller jusqu une ventuelle destruction de soi Trintzius parvient mener le r cit de sorte effacer la forme de l exploit pour mieux en manifester l enjeu Le voyage offrant l occasion de prendre du recul par rapport aux v nements cet engagement permet Ingrid de faire le point sur sa vie amoureuse Le dernier paragraphe du roman o elle fait une confidence Andr insiste sur cet h ro sme passionnel et offre une cl de lecture Dans le d sert de Gobi un petit Chinois nous
388. t japonais en Mandchourie se fit rosser par ces joyeux conscrits coup de pieds et de crosses dans l express de Vladivostok Bouvier 125 ou H l ne Boucher trouva tragiquement la mort en testant un Caudron Rafale au dessus de Guyancourt Quelques mois apr s le d c s de la jeune aviatrice Ren Chambe pr cise d ailleurs qu l heure de l effort ou du p ril sa clart bien longtemps soutiendra l me des pilotes de France 9 et il montre quel point il a t sensible son opini tret Au moment o le statut de la femme occidentale 31 Selon Eric Vibart les cinq jeunes filles taient adeptes des th ories h bertistes ce qui explique pourquoi elles portaient la m me tunique que les Palestriennes bord de la Bonita Cf Introduction du livre r dit en 2004 de Marthe Ouli Quand j tais matelot Editions Ouest France 27 volue incontestablement o se multiplient les biographies romanc es et les r cits d aventure les t moignages sur ces sportives de l extr me convergent en un m me point Quelles que soient les intentions de ces auteurs dessiner le portrait de l Allemande moderne lutter contre l eug nisme lancer une jeune reporter ou faire l loge d une navigatrice il plane sur ces portraits enjoliv s ou id alis s un sentiment d amusement et d admiration Ces portraitistes sympathiques viennent compl ter la liste des po tes reporters documentaristes ou p
389. t le cas dans le r cit en question C est gr ce au r investissement narratif que le sujet est capable de comprendre l ineffable v nement Le script qui prend forme articule une esth tique psychanalytique dans laquelle une production artistique est une r ponse curative probante tentant de rem dier aux sympt mes du trauma qui sont des obstacles d ordre existentielles au sujet Notre travail s inscrit dans une perspective lexicologique s mantique et narratologique et s interroge sur l esth tique du trauma narrative mais plus encore de la n cessit de le r crire Elle t chera de montrer comment au travers de la reprise du contenu et de la forme de ce t moignage autobiographique se d gage l expression d une gestion plus compl te du trauma Ce que nous entendons par gestion plus compl te n est que la volont du sujet se r approprier l histoire indicible dans une trame historique qui fait preuve de suture individuelle collective et id ologique Ce sont les trois l ments caract ristiques d une narration qui selon Herman et tant d autres mobilise plus efficacement la liquidation de la charge traumatique et ce sont ces trois l ments qui se retrouvent dans le t moignage autobiographique d Ernaux En effet le t moignage qui vient du mot latin testis qui signifie t moin est une d claration de ce qu on a vu entendu per u servant l tablissement de la v rit atte
390. t traumatog ne conf re au sujet la possibilit d aller au del de la blessure de la d chirure psychosociale Ernaux pr cise en citant Y ko Tsushima dans l exergue de son t moignage autobiographique Qui sait si la m moire ne consiste pas regarder les choses jusqu au bout Penser la m moire selon Ernaux consiste alors revisiter l espace m moriel par l interf rence scripturale r p t e De ce premier constat r sulte le questionnement suivant comment L v nement ou la r criture du trauma de l avortement dans sa production d une narration visant la compr hension plus globale de l indicible module t il le processus de catharsis cicatrise t il la blessure du trauma arrive t il enfin rallier le compr hensible 3 A Ernaux L criture comme un couteau entretien avec Fr d ric Yves Jeannet Paris Stock 2003 p 26 3 A Ernaux Les armoires vides p 181 82 4 A Ernaux L v nement 2000 3 A Ernaux L v nement p 9 161 l indicible L incapacit de faire le deuil du trauma peut tre renvers par l criture mais plus encore par la r criture Par cons quent la retranscription du trauma qui se confirme par l laboration du r cit L Ev nement confirme la d ficience d une narration unique du trauma Afin que la gestion se fasse de fa on plus compl te la narration doit inclure une reconstruction plus d taill e de l v nement comme c es
391. tant mais le monde lui m me Il 4 S Mallarm Sur le Beau et l Utile in Igitur Divagations Un coup de d s Paris Gallimard po sie Gallimard 2003 p 412 5 Je dis une fleur et hors de l oubli o ma voix rel gue aucun contour en tant que quelque chose d autre que les calices sus musicalement se l ve id e m me et suave l absente de tous bouquets Ibid p 259 je souligne Pourrait on voir ici comme une r miniscence de Platon qui de sa R publique chassait les po tes pour n tre qu imitateurs et ne savoir v ritablement construire aucun objet 7 M Blanchot L Entretien infini Paris Gallimard 1969 p 289 36 parlera dans une lettre Verlaine propos de ce Grand uvre architectural et pr m dit du Livre persuad au fond qu il n y en a qu un Par ce Livre par cette explication orphique de la terre et son architecture m me Mallarm deviendrait une sorte de D dale moderne un cr ateur absolu qui produirait l int rieur de l Univers un monde clos et parfait un labyrinthe donc dont il aurait seul la cl La fragmentation du sens On a pu dans cette premi re approche comparer le po me un objet ou une construction Cette derni re image architecturale est particuli rement significative dans le cas de Mallarm qui aura le premier r fl chi la spatialit du po me sa fa on d occuper l espace so
392. tation de soi traduit de l anglais par Alain Accardo Le sens commun Les ditions de Minuit Paris 1973 251 pages page 76 71 certaines de ces fameuses liaisons interm diaires Les comportements que le sociologue d crit correspondent au suivi d une r gle Il s agit en effet d adapter sa conduite en r f rence celle ci Je vais r viser mon comportement d s lors que l on me montrera que je la transgresse En ce sens suivre une r gle pr sente deux caract ristiques majeures l imm diatet et le mim tisme Dans la seconde philosophie wittgensteinienne nous retrouvons ses deux aspects En effet le jeu de langage r gi par une r gle comporte pour tre complet une action correspondante une requ te qui s apparente une r action imm diate D autre part la reconnaissance dudit jeu de langage se fait par mim tisme il s agit des fameux airs de famille Comme Bouveresse en fait la synth se C est la r gle qui cr e le point de vue auquel tous ces cas aussi diff rents que possible d autres gards peuvent tre identifi s et per us comme ayant t trait s de fa on identique Il se trouve que notre fa on d apprendre et de comprendre passe par ce mim tisme que l on trouve ais ment d tecter dans les conduites enfantines De plus nous consid rons avoir compris d s lors que nous entretenons avec ladite r gle une certaine imm diatet Ainsi l instituteur d
393. te autre mani re Par une approche indirecte il fait surgir des parcours individuels de ses personnages toute l horreur du front En ce sens Le Sang noir semble sugg rer que la v ritable atrocit le Mal inassimilable sont toujours Pour une introduction historique voir Jean Jacques Becker La France en guerre 1914 1918 La grande mutation Bruxelles Complexe 1988 et Anne Lebel Bruits de guerre dans la ville Saint Brieuc dans la guerre de 1914 1918 travers Le Sang Noir de Louis Guilloux R alit historique et traduction romanesque in Yannick Pelletier dir Le Mal absolu Actes du colloque Louis Guilloux et la guerre Saint Brieuc ditions Ville de Saint Brieuc 1995 2 Voir Bernard Hue Romans de guerre genre faux Situation de Louis Guilloux par rapport Barbusse E J nger Borgese E M remarque Dos Passos Hemingway in Yannick Pelletier dir Le Mal absolu op cit Voir aussi dans ce m me ouvrage collectif l article de Christian Cavalli L id ologie de la revanche et de la reconqu te De la parole au silence 21 Voir Jean Louis Jacob Convergences et divergences des regards sur la guerre Guilloux Giono Gu henno et quelques autres in Yannick Pelletier dir Le mal absolu op cit 137 dissimul s ils constituent ce qu on ne peut ou qu on ne veut pas voir Le proviseur apprenant que son fils va tre fusill le poilu horriblement d figur
394. te avec elle quelque chose de corrosif et d inqui tant Steiner est maintenant sans d fense face face avec son enfance et doit encaisser ce vide terrible qu il apprend vomir et cracher FB 211 Aussi ressent il l envie subite d en finir avec la vie alors qu il se trouve paralys au beau milieu de la travers e d un pont Une vieille femme l aide reprendre ses esprits et pour la premi re fois de sa vie Steiner conna t la compassion humaine Selon lui ce ne peut tre qu un messager du peintre envoy express ment pour l aider poursuivre sa qu te FB 217 Le pont par son symbolisme n est il pas lieu de passage et d preuve soit la transition entre deux tats int rieurs c est dire entre Steiner le rat et Zvat le p lerin Avant de mourir Steiner grimpe jusqu au promontoire du phare pour br ler son sac dos qui contient son identit G 221 Or l ascension d un mont rec le la valeur sacr e de la transfiguration C est bien sur une montagne que le Christ se transfigure devant ses disciples afin d annoncer sa r surrection d entre les morts C est que le Jugement dernier fait partie des hantises de Steiner Il n est donc pas surprenant qu en d barquant en Europe il s empresse d aller contempler Le Jugement dernier de Bosch Cette longue pr sence devant le triptyque efface d finitivement ce qu il lui reste de doute quant au bien fon
395. tentieusement objective En effet la neutralit objective fantasme philosophique par excellence n en a que le nom car cette posture porte en elle ses pr f rences son go t pour les facteurs raisonnablement efficaces S efforcer de voir est une activit la fois beaucoup moins ambitieuse L objectivit n est elle pas ubris divine d guis e en sagesse et beaucoup plus laborieuse En effet ingrate est la place de celui qui doit se faire l cho discret des pratiques humaines car il s agit bien de voir c est dire de prendre en compte l ensemble des facteurs circonstanciels lesquels circonscrivent une forme de vie parce qu ils en sont l usage le corps m me L exercice de la vision consiste en une transcription des usages du monde et cet exercice est ingrat dans la mesure o il r clame une suspension ponctuelle de lego Ainsi la posture irr aliste qui rend possible la vision n cessite l coulement de ce Soi dans le monde Musil crit 81 Comme la possession de qualit s pr suppose qu on prouve une certaine joie les savoir r elles on entrevoit d s lors comment quelqu un qui f t ce par rapport lui m me ne se targue d aucun sens du r el peut s appara tre un jour l improviste en Homme sans qualit s L homme sans qualit s dont il est question dans le r cit de Musil Ulrich traverse son poque en tra nant une ligne dans l eau ce qui lui permet de voir et d
396. tes doses C t souligne que surtout pour la m re puisqu elle est un agent immobilier qui d place le malaise de la maisonn e sur l difice de la maison elle m me le suicide de Lisa repr sente l chec de l id al 52 Il faut noter que c est En italique dans le texte 194 ici dans le c ur du naufrage que l crivaine cl t l histoire des parents ces personnages n ont pas le droit au r tablissement Cet aboutissement sec et impitoyable repr sente une d sapprobation par rapport au r le qu ils ont jou dans la vie de Lisa En ce qui concerne H l ne la perte de sa soeur repr sente un moment d veil Elle prend conscience du fait que le suicide de Lisa a peut tre d coul de son influence ce qui br lait en elle a peut tre fini par atteindre Lisa IM 201 En effet le suicide de Lisa met en lumi re les cons quences possibles d une vision noire du monde H l ne semble comprendre qu elle a le choix entre le suicide ou le r tablissement Son tiroir cl qui contient des articles portant sur la monstruosit humaine IM 202 reste vide et elle recommence veiller sur son petit fr re Les derni res phrases du roman mettent en relief que ce choix est celui de tout un chacun D abord H l ne reconna t la possibilit de se donner la mort Si je l avais fait se dit elle j aurais choisi le sang Toutefois le roman se termine sur une affirmati
397. teur Pouillart Willems 27 qui le caract rise pour d crire son personnage romanesque et ses p rip ties Pourquoi l auteur a t il choisi une nageuse de marathon plut t qu une autre pratiquante Si l on examine la typologie des sportives qu il pr sente dans son uvre on constate qu il y a d un c t les vraies athl tes celles qui se d pensent sans compter et sont physiquement tr s fortes de l autre celles qui font preuve d imposture dont l enjeu est tout autre les joueuses de tennis par exemple qui ne manient la raquette que pour faire un mariage riche 18 Le choix d une nageuse de marathon s explique donc pour deux raisons d une part sa bravoure puisque s engager dans un d fi maritime en solitaire n est pas chose facile et d autre part l imaginaire sensuel qu elle inspire comme le sugg re l auteur en pr cisant que la moindre comparaison qu on ait pu alors risquer 1 Dans Le Monde des sir nes 1952 son personnage sera interpr t par Esther Williams 2 Dans un film conserv par le fonds Joseph Leclerc de 1931 on peut voir effectivement la travers e avec des dizaines de nageurs et seulement quelques nageuses Les Parisiens sont venus nombreux pour assister cette course une partie regarde le spectacle depuis les quais de Seine et les ponts d autres suivent en barque les athl tes La course est suivie de loisirs nautiques des baigneurs des quipages s
398. through me One for the Road in Plays Four Betrayal Monologue One for the Road Mountain Language Family Voice A Kind of Alaska Victoria Station Precisely The New World Order Party Time Moonlight Ashes to Ashes London Faber and Faber 1998 1993 p 225 203 So morally you flounder in wet shit You know like when you ve Eaten a rancid omelette p 224 227 Le dieu qui est roi et ma tre absolu r gnant sur le cosmos tout entier con u comme Etat fait du roi un tre privil gi soumis ses ordres et qui a pour mission de maintenir l ordre si ce dernier est menac par les forces du mal L ombre du dieu est l Homme et ombre de l Homme ce sont les autres hommes Homme c est le roi qui est le miroir du dieu Se prenant pour le repr sentant de Dieu Nicolas veut faire r gner son ordre en faisant de Victor non pas son prisonnier mais le captif de ses propres p ch s donc porteur d une infection qu il faut purger En position de force Nicolas l lu de Dieu est ma tre de cet espace clos et croit livrer une Guerre Sainte contre les ennemis de Dieu en mettant en cause leur foi Are you a religious man Le microcosme o voluent les personnages de cette pi ce renferme toutes les caract ristiques qu voque Michel Foucault dans Surveiller et punir naissance de la prison 1975 Il est question d un espace clos un espace d exclusion op
399. tions Un coup de d s op cit p 286 Ibid A M Pelletier Fonctions po tiques Paris Klincksieck 1977 p 141 Les trois vers en question tant Et l on ignore mal lu pour notre f te Tr s simple de chanter l absence du po te Que ce beau monument l enferme tout entier l apposition soulign e peut tre rapport e avec autant de vraisemblance au mot monument qui suit qu on crit A M Pelletier in op cit p 141 39 Comment tudier par exemple le Coup de d s en ne tenant compte que du texte lui m me et en oubliant sa disposition typographique Le po me mallarm en est un v ritable jeu de miroirs o chaque lecture renvoie une autre l infini Je me penchera pr sent sur cette id e de fuite constante de la signification dans le langage m me quoi renvoient chez Mallarm les mots du texte Sont ils autant de miroirs vers un sens cach Quelles seraient alors les implications de ce nouveau langage Les mots en miroir Comme on l a vu le texte mallarm en se veut coup du monde ext rieur parfaitement clos se suffisant lui m me dans sa propre r alit On arrive donc un point crucial de la po tique de Mallarm Comment fermer le texte sur lui m me en restant dans le langage par essence r f rentiel C est l tout le d bat de la Crise de vers quoi bon la merveille de transposer un fait de nature en sa p
400. tobiographique L Ev nement Si chez Ernaux la n cessit de r p ter se transpose dans la narrativisation en double d un m me v nement traumatique indicible l avortement c est qu il n est pas suffisant que le trauma soit crit une seule fois il n cessite une r criture une duplication scripturale C est partir de cette constatation que nous nous proposons de penser la n cessit de r crire le trauma comme moyen de le g rer Dans son Histoire H rodote raconte qu un soldat ath nien de la bataille de Marathon nomm Epiz lus tait devenu aveugle la vue de son ennemi un soldat perse pesamment arm dont la barbe ombrageait tout son bouclier que ce spectre le passa tuant violemment d un coup d p e son camarade Or si la vue de ce soldat perse occasionne chez le soldat grec une c cit permanente une blessure corporelle est ce parce qu il y a des v nements qui d passent nos capacit s de gestion et de compr hension Le trauma gr trauma traumatikos blessure est souvent d fini dans la glose m dicale comme tant un trouble H rodote Histoire trad du grec par Larcher avec des notes de Bochard Wesseling Scaliger et al Paris Charpentier 1850 t 2 p 57 58 148 somatique ou psychique plus ou moins durable d termin par une l sion organique ou une motion intense qui pousse parfois le sujet chercher refuge dans l hypocondrie ou l alcoolisme Nous somm
401. tonio ont perdu toute envie de suivre et supplanter un mod le Alors que l imitation se r v lait dans le roman de formation indissociable de l action reprenant ainsi la tradition de l exemplum latin chez Guilloux et Brancati toutes deux apparaissent priv es de sens L o le processus d imitation pr cipitait le h ros du roman de formation dans la vie un vide s est creus pour laisser place un questionnement ultime A quoi bon De ce point de vue Cripure et Antonio constituent deux exemples repr sentatifs d une transformation qui affecte la plupart des personnages du roman occidental du 19 si cle et va s acc l rant au 20 si cle Ext nu par l ennui et l absurdit cherchant par tous les moyens se prot ger de la vie le personnage par procuration choisit le degr z ro de l existence pour n avoir plus d sirer esp rer craindre ou souffrir C est la raison pour laquelle Cripure a renonc ses id aux et ses ambitions de jeunesse et Antonio tout espoir de bonheur Le professeur de philosophie prend pour mod le une figure destin e l chec et au naufrage dont il n est que la r plique et le jeune Sicilien vit ses fantasmes rotiques par l interm diaire de ses amis ou de ses r ves Infirmit et m diocrit Par ailleurs Cripure aussi bien qu Antonio sont des infirmes Il faut rappeler que le protagoniste du Sang noir doit beaucoup 132 Georges Palante
402. toute attente il ne va pas r server ses premiers mots au roman pr f rant davantage croquer le portrait de cette ravissante aventuri re aux yeux de B douine IV Pourquoi un tel choix Apr s la parution de son premier roman en 1923 Simplement Tita na pensait ne pas avoir de difficult publier son deuxi me manuscrit C tait sans compter les critiques des fr res Fischer des ditions Flammarion avec lesquels elle avait sign un contrat de longue dur e Ils n appr ci rent gu re le roman trouvant le style t l graphique et l intrigue trop noire Ils lui demand rent de faire des modifications et d ajouter quelques chapitres Piqu e au vif elle d cida d aller proposer son texte d autres maisons mais accusa une s rie de refus Apr s maintes d marches elle parvint n anmoins d crocher l accord du directeur des diteurs Associ s la condition qu elle souscrive cent exemplaires de luxe et qu elle sollicite une pr face d un auteur de renom Heimermann 82 lisabeth Sauvy tenta sa chance aupr s de plusieurs auteurs dont Ren Boylesve J H Rosny Jean Richepin 20 ou Henri Pourrat mais les r ponses tard rent arriver C est alors que Mac Orlan dans les couloirs de L Intransigeant lui offrit son soutien Il para t que vous cherchez une pr face pour votre dernier roman Je doute que mon nom vous serve beaucoup mes propres livres ne connaissent eux m me
403. tre finalement chass de la cit id ale en ces termes Si donc un homme en apparence capable par son habilet de prendre toutes les formes et de tout imiter venait dans notre ville pour s y produire lui et ses po mes nous le saluerions bien bas comme un tre sacr tonnant agr able mais nous lui dirions qu il n y a point d homme comme lui dans notre cit et qu il ne peut y en avoir Sous une formulation ch ti e et urbaine c est un rejet clair univoque et sans appel qui s exprime Les artistes n auront pas droit de r sidence dans la cit de Platon dans cette bourgade pour philosophes o la m taphysique r gne En effet le reproche majeur fait Hom re et aux artistes en g n ral parmi lesquels le po te est encore le plus respectable est de produire des faux semblants qui caricaturent pernicieusement les id es et par l en souillent la puret La philosophie aime l immuable et la m taphysique plus que tout Ainsi nos outils philosophiques sont bien mal taill s pour penser la fiction pour d crire des pratiques et en d couvrir la ritualit Dans le feu et le soleil Iris Murdoch nous propose un tonnant portrait de Platon en d miurge contrari auquel j ai du mal croire Pour autant philosophe et crivain la fois elle esquisse une description de la tentative tentation artistique fine Le bon artiste humain que Platon consid re en tant que tel comme une vile
404. tres essais Paris Gallimard Folio 1992 p 31 40 47 existence il est lui m me jusque dans sa mat rialit fait de N ant lui m me vaine forme de la mati re Le parcours labyrinthique le processus purificateur lib rateur serait donc dans cette optique et comme dans les labyrinthes antiques ou chr tiens une m taphore du chemin de la vie On est face une po tique de l garement se perdre dans les po mes de Mallarm c est comme dans la symbolique du labyrinthe exister v ritablement Cette volont de voir aussi dans l uvre de Mallarm une po tique de la lecture met donc en avant l aspect grandement ontologique souvent oubli de celle ci Il semble significatif que cette po tique du labyrinthe telle qu on la trouve donc ici soit issue d une p riode mouvement e dans l Histoire des Id es particuli rement en ce qui concerne la po sie Mallarm il le pr tendra plusieurs reprises ne fait que poursuivre l enseignement de Baudelaire il est l or e de ce que l on appelle d sormais modernit un nouveau phare Car cette mise en abyme dans le po me dans la lecture m me du po me de l existence car cette invention d un langage auto r f rentiel cette acceptation de la Mort et de notre N ant ce sont autant de th mes qui importeront dans la po sie du XX si cle Mallarm marque un v ritable tournant Il ma sembl tout au l
405. ts tr sors de m chancet H morro des Il est toujours pr f rable de se faire op rer M re Choisis entre moi et ta m re 7 Siciliens pris un par un ils sont sympathiques Quant l influence de Flaubert sur Guilloux elle impr gne de nombreux pisodes du Sang noir et en particulier cette sc ne bouffonne o Cripure propose son double de rebaptiser sa Chrestomathie du d sespoir Tiens il me vient un nouveau titre Bouclo et P cuporte Autrement dit Boucri et P cupure Nos tr s chers fr res Autrement dit Les T n bres des oubliettes Si Je ferai ce machin Je n ai jamais t un embusqu de l esprit Bien entendu les r miniscences flaubertiennes dans Le Sang noir ne se r sument pas de simples jeux de mots La b tise et l ineptie parcourent tout le roman et il ne fait aucun doute qu il s agit l d un cho Bouvard et P cuchet D s les premiers chapitres du roman Cripure nous laisse entendre que ses r f rences Flaubert ont une importance capitale Si je cite aussi souvent Flaubert c t des autres c est que le cher Gustave qui en tait un de petit bourgeois a t aussi le premier tenter amp m me r ussir parfois cette peinture du Non La question de la stupidit est tout aussi omnipr sente chez Brancati comme le montre le projet de r daction de Paolo il caldo son dernier roman rest inachev Dans
406. tte Armel Le magazine litt raire n 467 septembre 2007 pages 50 51 page 50 74 puisqu il s agit toujours de remonter au point unique de l origine du monde Comme l crit Mirc a Eliade ce propos dans Aspect du mythe Tout mythe d origine raconte et justifie une situation nouvelle nouvelle dans le sens qu elle n tait pas d s les d buts du Monde Les mythes d origine prolongent et compl tent le mythe cosmogonique ils racontent comment le monde a t modifi enrichi ou appauvri Ainsi le r cit mythique a la particularit de lier dans une m me histoire l origine du monde ce vague fourbi et les connaissances que l homme a pu acqu rir sur son milieu C est l usage que l homme socialis fait de ce monde qui est cont dans le r cit mythique usage qui fait cho la situation originelle imagin e Il est int ressant par ailleurs de noter que ces r cits mythiques sous leur forme chant e ont souvent comme le rapporte Mirc a Eliade des fins m dicales Il va de soi qu il ne s agit pas uniquement de chanter pour gu rir mais le chant accompagne un geste gu risseur en racontant comment l homme s est appropri l usage de telle ou telle plante Cet usage des chants mythiques a t l objet et l est encore de fantasmes tout occidentaux sur les gu risseurs et leurs pouvoirs En un sens ce fourvoiement rappelle les remarques de Wittgenstein sur le Rameau d or de Frazer
407. ture philosophique n cessite la fois une grande sobri t afin de se restreindre la description de pratiques sans tomber dans la g n ralisation et une grande flexibilit du regard puisqu il s agit 26 Edouard Glissant Une nouvelle r gion du monde Esth tique I Nrf Gallimard Paris 2006 216 pages page 99 85 de s exercer voir une culture dans son ensemble de l embrasser dans ce qu elle a de plus anecdotique Telles sont peut tre les raisons de la difficult de compr hension de la prose wittgensteinienne laquelle en puisant de toutes parts ethnologie fictive math matiques musique nous oblige sans cesse recommencer chaque fois l effort de compr hension Ainsi Bouveresse dit de lui En d pit de l esp ce de rigueur implacable qui caract rise sa d marche philosophique Wittgenstein s apparente certainement beaucoup plus en fin de compte la cat gorie des philosophes artistes qu celle des philosophes scientifiques L exercice irr aliste qui se manifeste donc de mani re po tique au sens o la po sie nous restitue l homme en son fourbi donne voir la r alit comme usages du monde par une communaut d hommes un moment donn du temps Ainsi la possibilit de voir si elle est de part en part antith orique se doit d tre n cessairement pragmatique En effet comme nous venons de le montrer l approche de Wittgenstein n cessite r p tition et recomm
408. uation avec le cheminement de la narratrice l image de cette progression la tendance g n rale serait de trouver un lieu en rapport avec la nature quand l quilibre de la m tamorphose penche du c t animal et un lieu en rapport avec la civilisation quand le penchant humain s affirme Entre les deux le vague et le flou c toient effectivement des voisinages pour le moins particuliers comme l asile ou les gouts De fait se dessine une topologie qui suit les mouvements d humeur du personnage principal selon trois orientations La premi re orientation de la deuxi me la septi me section limite le champ d action de la narratrice la parfumerie l Aqualand l appartement d Honor et au lieu de vie du marabout La deuxi me orientation de la huiti me la dixi me section un grand nombre de lieux square gouts h tel rue Palais prison La troisi me orientation de la onzi me la quatorzi me section d cline encore d autres lieux chez le marabout dans la cath drale dans la crypte dans les rues chez Yvan l tranger au zoo dans un camion frigo les gouts le mus e d histoire naturelle et finalement la ferme Ces trois orientations d pendent de la premi re fonction et du degr de transformation de la narratrice Si la premi re correspond au lent mouvement v cu de sa m tamorphose la deuxi me plonge figurativement parlant dans des lieux d errance caract ris s allant jus
409. ue jouant au tennis au golf au hockey mais qui aime aussi les choses simples comme les repas sur l herbe le camping et les promenades 117 Parmi ces femmes allant au contact de la nature on peut galement citer Alice Damesme qui a marqu l histoire de l alpinisme f minin en faisant plusieurs grandes courses en t te de cord e et celui d lisabeth Casteret celle de la sp l ologie en descendant dans des grottes inconnues la corde lisse Schut Ottogalli Mazzacavallo 151 Ces aventuri res ont laiss leur nom c t d une autre cat gorie de femmes d exceptions qu on ne peut oublier sorte d avatar exotique de la gar onne les bourlingueuses Berthier 2006 134 Berc es depuis leur plus tendre enfance par des r cits d aventure celles ci voulurent conqu rir leur ind pendance dans un contexte o tout leur semblait permis en partant l autre bout du monde et en racontant leurs p rip ties On pense la femme aux semelles de vent Lacassin 231 Alexandra David Neel qui parcourut l ge de cinquante six ans des centaines de kilom tres sur les terres bouddhistes aux navigatrices de la Bonita Ella Maillart Hermine et Yvonne de Saussure Marthe Ouli mais aussi aux femmes reporters telles que Andr e Viollis Alice La Mazi re Dominique Aucl res ou Tita na la globe trotter pr f r e des lecteurs de Paris Soir Boucharenc 107 Toutes firent preuve de sporti
410. ui passe sauf que les images de la vie et de la mort sont d pass es transfigur es En effet selon Blake l art est l arbre de la vie charg de transfigurer les apocalypses et les r v lations La cr ation r ussit donc d gager la pens e de l emprise concr te des sens et des habitudes car L Apocalypse se situe dans le quotidien dans la mort en vie et il s agit de transformer son univers int rieur pour mieux renverser le flux du temps et triompher de la mort C est que l art s oppose la mort indique judicieusement Ir ne Oore dans son article intitul L itin raire cr ateur dans l uvre romanesque de Sergio Kokis Elle ajoute qu en cr ant le cr ateur se sacrifie enti rement dispara t mais travers sa cr ation il triomphe de la mort Or les images de cadavres et de corps difformes qui renaissent dans les toiles du narrateur du Pavillon des miroirs ne sont elles pas autant de tentatives pour apprivoiser la mort ou mieux de faire la paix avec elle Car au bout du compte la mort sourit gracieusement tous les hommes il ne nous reste qu lui sourire en retour FB 131 Mais encore faut il avoir saisi ce gisement de sens enfoui au plus profond de l tre pour mourir point 27 Paterson Janet Quand le je est un e Autre Reconfigurations p 55 7 Chauvin Dani le Apocalypse Dictionnaire des mythes litt raires p 1
411. ui semble trop saine Plus loin Unless d couvre que la vie n a qu un reflet en elle Nul autre reflet en moi que le tranchant de la folie U 63 D ailleurs Milou reconna t la folie en elle m me et d voile la folie de la m re d c d e Une balade dans la folie avec toi Mamie U 31 M me la plus jeune soeur Red apprivoise la folie en elle et souligne la notion que celle ci fait partie de son identit je sens 173 la folie la vilaine amn sie je sens l humain toxique qui infecte la vie c est mon parfum naturel Identit U 87 De plus la folie de Walter s accro t avec l clatement familial U 17 Milou croit que papa est bien loin de son compte U 85 La folie infiltre les pens es et le comportement de chaque membre de la famille d Unless elle conc de que c est une famille de fous U 56 Puisque tous les membres de la famille reconnaissent en eux la pr sence de la folie ils devraient percevoir le d sarroi de Chut et faire un pas vers lui Cependant le p re ne comprend point son fils et les s urs vitent leur fr re poss d U 57 Juste avant sa disparition de deux semaines lorsqu il demande Unless quand elle viendra le voir la r ponse de celle ci est vasive et n gative Je sais pas je travaille toute la semaine et U 45 Il est clair que la pr sence de Chut inspire aux autres membres de la famille de la m fiance et de la p
412. uis Marin voque l imminence du pr sent qu Isaac ressent l imminence du pr sent au double sens que rec le toute imminence celle d un futur infiniment proche d un possible devenant r el celle d un d sir qui tend vers son accomplissement et d autre part celle d une menace d autant plus mena ante d autant plus pr sent qu elle est la fois ind finie et inexorable Louis Marin d position du temps dans Etudes s miologiques critures peintures Klincksieck 1971 p 290 M me si Isaac chez Caravage est dans la m me situation que l assassin dans la couleur n 1 de Monory le sentiment de la pression que l on a devant le tableau de Caravage n est pas aussi net que dans le tableau de Monory Cela parce que le montage sert ressortir deux temporalit s diff rentes en isolant chaque image composante ce qui ne serait sans doute pas pareil dans un tableau unique o la temporalit reste homog ne ou contagieuse s il y en a deux Il n y a pas d imminence du pr sent chez l assassin de Monory car il est constamment dans le pr sent 267 Trois espaces temps trois r alit s La voleuse n 4 1986 Le tableau intitul la voleuse n 4 fait partie de la s rie hyponyme Dans le premier tableau de la s rie le peintre a inscrit un petit r cit explicatif sous forme d affiche la petite fille et moi nous leur chappons toujours nous
413. un ternel inconnu un Th tre Roman op cit p 274 L Aragon cf titre de l ouvrage Une vague de r ves Seghers 1990 31 A Breton Manifeste du surr alisme cit in M C THIETARD Le malheur d aimer ou l origine d une po tique du songe dans Aur lien et les derniers romans d Aragon op cit p 213 3 La mise mort op cit p 183 3 Blanche ou l oubli op cit p 251 226 tre de fuite s absentant jusque dans sa pr sence Inh rente l tat amoureux cette dialectique de la pr sence absence fait donc du couple le th tre d une trange liaison dans la mesure o l vasion onirique renforce lamour autant qu elle le d truit Les amants c te c te ne s unissent donc jamais totalement une distance demeure toujours entre la vitre et l ab me qui les s pare La th matique du faux miroir prend alors tout son sens dans la mesure o le regard absent ne refl te plus que le drame de l isolement r ciproque La glace sans tain en effet n aura jamais aussi bien rempli son r le qu entre deux amants d sunis par le gouffre de leurs mondes int rieurs Aux d robades effectives se joignent donc jusqu se confondre les chapp es dans l imaginaire et les songes le sommeil l imagination et l absence apparaissant ainsi comme les trois formes d une vasion d clin e l infini Ainsi l arri re texte du discours amoureux se s
414. un d racinement f roce pour sortir de la torpeur et nous red couvrir sinon pour nous abandonner d finitivement 1 12 Il est int ressant de noter que la s paration brutale dans ce passage voque la violence de l accouchement En effet les th mes d accouchement d accouchement d un mort n ou d avortement voire de maternit violente reviennent comme un leitmotiv dans le roman et mettent l accent sur l id e que l identit de la fille est ins parablement li e sa conception dans le ventre de sa m re Si j avais pu choisir j aurais pr f r mourir dans la chaleur discr te du corps maternel Mourir avant l apparition de toute 5 Saint Martin remarque que dans L Ingratitude mother and daughter are so closely bound up that the distinction between one body and the other between matricide and infanticide nearly disappears Paradoxically although violence and rejection dominate mother and daughter love each other and long for dialogue which never comes 2001b 66 Nous remarquons que ce th me du corps partag provoque le sentiment d envahissement qu prouve Yan Zi Je ne vous dois rien maman vous qui avez toujours l ambition de me faire vous ressembler vous qui vivez partiellement dans mon corps sans que je vous aie invit e et d cidez en grande partie mon destin Ah Quel tyran vous tes I 23 Si je t avais connue avant ta naissance me disait elle je me s
415. up plus subtile n anmoins la d ception subie par les enfants s av re profonde et irr vocable Le premier chapitre est intitul La Prison et s ouvre sur la description de la maison familiale Ainsi l crivaine cr e t elle un lien m taphorique entre ces deux endroits et par cons quent instaure dans le roman une remise en question de la famille heureuse de la banlieue L importance de cette m taphore se d voile au cours du roman devenant explicite lors du suicide de Lisa nous y revenons plus loin la premi re page nous rencontrons H l ne seule dans sa chambre nette et lisse qu elle compare son corps L int rieur de son corps doit tre ainsi une chambre carr e contenant des formes g om triques invariables Un lit une commode une biblioth que Pas de salet Rien de criant IM 13 cause du titre du chapitre cette image voque une cellule de prison et implique que l emprisonnement physique qu elle se croit en train de vivre affecte son tat psychologique Sa chambre est au deuxi me tage et telle une prisonni re elle regarde par la fen tre et r ve d une vie fictive Une jeune fille pourrait s arr ter devant la maison et crier Es tu pr te H l ne pourrait alors d valer l escalier sortir et enfourcher sa bicyclette Mais ce n est pas a Rien n est vraiment joyeux et rien n est encore mort Tout est seulement un peu parti disparu d lav
416. uperpose n cessairement l arri re regard de l aim e dans lequel l amant se meurt de ne pas se refl ter Et si les mots ne vont qu mi chemin et reviennent humili s comme d avoir heurt la cloison qui s pare les tres l amour ne se d roule jamais que derri re le miroir C est d ailleurs sur cette distorsion fondamentale que s labore la majeure partie des amours aragoniennes opposant une absence physique habit e et quasi palpable une pr sence lointaine au c ur de laquelle les amants se dissolvent jusque dans l acte d amour Sublimes d vastations L amour donc qu il soit r v ou v cu pose le d sir en tant qu abstraction et lamant dissout dans les brumes de l inaccomplissement n est plus d s lors que le simulacre de ce corps toujours d rob Le sentiment ainsi envisag ne saurait plus s appr hender que sur un plan m taphorique le d sir inassouvi ne s accomplissant pleinement qu en imagination Et c est pr cis ment dans cette zone instable o l objet peut soudainement s vanouir ou bien appara tre de fa on hallucinatoire L expression est de M Proust dans La prisonni re La mise mort op cit pp 168 et 171 3 J Sur Aragon le r alisme de l amour Paris Centurion Humanisme et religion 1966 p 125 37 Blanche ou l oubli op cit p 273 227 que se joue la dimension fantastique ou fantasmagorique de lamo
417. ur Ainsi de sublimation des fantasmes en distorsion temporelle les amoureux aragoniens conjuguent leurs passions sur le mode d une id alisation mat rialisante qui pallie les d faillances effectives d une relation imparfaite et ne s panouit totalement que dans la sph re imaginaire En effet le sentiment de d possession de perte soi m l la prise de conscience de l impossible fusion avec l tre aim g n re in vitablement la douloureuse sensation de ce trou ce manque en sJoi que rien ne semble pouvoir combler Et le d sir qui s vanouit dans cet accolement de faux amoureux n appartient plus la r alit de lamour v cu mais se consume d faut de se consommer dans l irr alit du sentiment r v Dissolution de l aim mais galement de l amant dans la mesure o celui ci ind finiment confront l absence symbolique ou effective prouvera jusque dans l amour physique la sensation d un dessaisissement de soi son identit propre s effa ant dans la d r alisation qu son tour il op re Ainsi hors l accouplement les amants l vent l amour v ritable en tant qu Absolu de l tre l envisagent comme le Souverain Bien qui seul comblerait la br che b ante de l incommunicabilit Aussi qu il se refuse ou se donne qu il emplisse l espace amoureux du trop plein de son absence ou qu il le quitte sur place jamais lamant
418. ur nous logorrh es fumeux et vastes sympt mes de notre difficult appr hender toutes ces diff rences qui ont la f cheuse habitude de rendre pr caire et surtout un parmi les autres notre rapport au monde que l on voudrait vrai unique essentiel Ainsi en de du jugement d ethnologue comme Frazer lequel appr hende les rituels primitifs sous l gide de l erreur Michel Leiris Biffures La r gle du jeu I L Imaginaire Gallimard Paris 1975 302 pages page 13 67 scientifique notre vocabulaire lui m me est le sympt me d un fait de soci t nous envisageons les diff rences culturelles en termes de vrai et de faux En fait c est toute une r flexion sur la diff rence elle m me qui reste en suspens et il est significatif en ce sens que c est dans les Remarques sur le Rameau d or de Frazer que Wittgenstein nonce Toute une mythologie est d pos e dans notre langage S y d cline galement une thique de la diff rence en filigranes laquelle prend parfois cette forme Oui il est important que je doive m approprier m me le m pris que quiconque a pour moi comme une partie essentielle et importante du monde vu de ma place Il est bien trop t t ce jour pour me permettre de commenter ou de d cliner cette formulation diff rentielle et implicite de l thique Cependant il me faut l voquer pour comprendre l importance de sa pr misse Au commencement
419. use de sa nouvelle conscience de son corps que la narratrice examine les causes de son ob sit et de son attitude envers son corps Elle commence comprendre que ses motions n gatives envers elle m me proviennent de l id ologie de la soci t de consommation par exemple elle se rend compte que lorsqu elle est avec Alice qui s est conform e l image de la consommatrice id ale En sa pr sence elle se sen t toujours sale d une salet dont elle ne pourrai t jamais venir bout 92 En plus de se rendre compte que ce sont les valeurs de la soci t de consommation qui provoquent ses motions n gatives elle commence aussi comprendre que c est son p re qui est l origine de l enracinement de ces valeurs en elle Elle remarque explicitement que Pai l impression que mon corps m encombre Je sais d o vient cette impression m me si j arrive presque toujours viter le souvenir Dans le sous sol de la grosse maison de banlieue il y a plein de monde que je n ai jamais vu Ma m re se tient silencieuse dans un coin parce que mon p re lui a dit que son accent tait ridicule il le lui avait dit la veille en m me temps qu il lui a annonc cette r ception En m me temps il m a regard e Il n a rien dit J tais trop grosse plus difficile cacher que l accent tra nant de ma m re Il faut qu il se r signe 59 Pendant la soir e qu elle passe la maison de
420. ussi clair dans la mani re que les th ories de Baudrillard et de LeBesco d velopp es selon une analyse de l occident et des tats Unis respectivement illustrent la soci t qui est pr sent e par Lise Tremblay dans La danse juive BIBLIOGRAPHIE Annesley James Blank Fictions consumrism culture and the contemporary American novel New York St Martin s Press 1998 Baudrillard Jean La soci t de consommation ses mythes ses structures Paris Galimard 1974 Biron Michel L obsc nit du roman contemporain Voix et Images Vol XXIV no 3 Printemps 1999 602 Chartrand Robert L ach vement du p re enfin Le Devoir 27 F vrier 1999 Joubert Lucie Le Monde de Lise Tremblay Montr al le maudite refuge ou no woman s land University of Toronto Quarterly Vol 70 no 3 Summer 2001 725 http proquest umi com ezproxy library dal ca pqdlink index O amp did 372492371 amp SrchMode 1 amp sid 1 amp Fmt 3 amp VInst PR OD amp VType PQD amp RQT 309 amp VName PQD amp TS 12046375 13 amp clientid 15814 LeBesco Kathleen Revolting Bodies The struggle to redefine fat identity Amherst University of Massachussetts Press 2004 64 Mills Jennifer S et al Effects of Exposure to Thin Media Images Evidence of Self Enhancement Among Restrained Eaters Personality and Social Psychology Bulletin Vol 28 no 12 Decembre 2002 1687 1699 Saint Martin Lori The Other F
421. ux attitudes la premi re est celle du cauchemar subi par l h ro ne la seconde la tentative de ma triser cette transformation Si toute cette fonction de transformation est un v ritable cauchemar ce dernier varie en intensit au moment o la narratrice se m tamorphose compl tement en truie C est le pire cauchemar que j ai jamais fait de ma vie p 56 Le r ve sanglant r miniscence d une cliente gorg e p 50 annonce la mort du cochon d Inde de la narratrice p 70 71 et la rupture avec Honor Les r ves et cauchemars d pendent donc directement des v nements v cus par la narratrice Or l pisode de l asile p 101 d une part est un v ritable cauchemar o l on rencontre par exemple des sc nes de cannibalisme temp r es il est vrai par la tentative de l h ro ne de manger des livres derri re les carreaux br ch s du lavabo j ai trouv des livres une infection il y en avait jusque dans mon matelas J ai essay de les manger au d but mais c tait vraiment trop sec p 102 D autre part on ne peut videmment pas ignorer que c est par la lecture que l h ro ne regagne son humanit Je me suis mise lire tous les livres que 5 Todorov Tzvetan Introduction la litt rature fantastique p 29 248 je trouvais Je me reposais mes cheveux repoussaient j avais de nouveau ce r flexe de me mettre sur mes pattes arri res p 103 Et le lecteur de c
422. version du suicide de la part d Unless sugg re qu elle ne sera jamais tent e par cette solution radicale En fait elle adopte une attitude soit incr dule soit moqueuse envers le suicide en g n ral Comme nous l avons mentionn Unless ne croit pas que sa m re se soit suicid e Lorsque Milou met l hypoth se que la m re s est noy e Unless le nie en proposant que sa m re dansait le cha cha cha en Oregon la samba Cuba ou le tango Paris U 180 M me plong e dans sa propre d pression Unless constate que rire fait du bien l o le mal est vif U 180 Il est important de souligner que le texte est marqu par une multiplicit de voix et par cons quent l opinion d Unless n est point la seule porteuse de v rit Pour la benjamine Red le suicide demeure une solution envisageable face ses probl mes Apr s la mort de son fr re elle quitte la maison familiale laisse tomber ses tudes et passe son temps se droguer et se prostituer 192 Cependant bien qu elle envisage le suicide il est clair qu elle d sire lutter contre cette pulsion de mort Le suicide de son fr re lui a appris comment viter cette fin D abord elle se distancie de certains aspects de la soci t Elle dit a son p re La loi les flics et les intervenants t as vu ce que a donn pour ton christ de fils U 83 D ailleurs il est essentiel de noter que c est lamour d Unless
423. vi Confessions d une femme pudique p 99 100 160 l cole priv e faisant des tudes sup rieures Enfin ce qui signale davantage l incompl tude th rapeutique c est l excipit qui se cl t avec le d but de l avortement Les bouteilles de cidre travaillaient la canicule les fusaient a moussait jaune sur la terre de la cave Je ne voudrais pas crever La concierge est toujours en bas le dimanche la Cit une ouverture ou blessure encore b ante car incompr hensible qui n cessite un retour scriptural R crire le trauma une cure plus compl te Malgr le fait que le roman t moigne d une incompl tude th rapeutique les tudes ernaliennes ont n glig de montrer comment le dispositif narratif t moigne de cette insuffisance Alors que notre projet vise moins contourner les critiques ernaliennes il d sire montrer en quoi le dispositif formel de cette premi re criture de l avortement se donne lire comme la gestion incompl te du trauma Il est d sormais impossible de consid rer Les armoires vides sans L v nement crit trente sept ans apr s l avortement ce r cit autobiographique met en sc ne les quelques semaines qui ont pr c d l op ration en plus de d voiler en d tail la sc ne elle m me En effet il y dans ce deuxi me traumatoscript une volont de revoir le trauma de l avortement jusqu au bout comme si la r criture d un v nemen
424. vin qui se r duit la conscience de l humain La perspective ext riorise en m me temps la dur e de la profondeur mn sique jusqu au pr sent de l tre au premier plan L espace temps de la m moire est cens tre la seule r alit car c est la m moire qui permet de construire l identit d une personne L espace temps mn sique sert donc d arri re plan tous 5 Panofsky d veloppe une sorte de petite histoire de la perspective comme forme symbolique il associe l laboration de la perspective la Renaissance avec la rupture d cisive avec la vision aristot licienne du monde l poque En effet dans les ann es m mes o la spatialit de Duccio et de Giotto correspondant la p riode de transition de la scolastique classique tait supplant e par l laboration progressive de la v ritable perspective centrale avec la spatialit infiniment tendue centr e autour d un point de vue pris arbitrairement dans ces m mes ann es la pens e abstraite consommait publiquement et de fa on d cisive la rupture jusque l toujours voil e avec la vision aristot licienne du monde en abandonnant la notion d un cosmos difi autour du centre de la terre consid r e comme une limite absolue et en d veloppant de ce fait le concept d un infini dont il n y a pas seulement un mod le en Dieu mais qui est effectivement r alis dans la r alit empirique c est dire en un sen
425. vit en multipliant les pratiques extr mes et 10 Bulletin des Soci t s F minines Fran aises de Sports et Gymnastique bulletins n 2 et 3 ao t septembre 1920 l Exploit qui vaudra son auteur tel que le souligne Francis Lacassin un prix d athl tisme apr s que Le Matin est donn e la nouvelle en 1925 Celui fera para tre d ailleurs les jours suivants les Souvenirs d une Parisienne au Tibet Elle d crivit ses voyages dans plusieurs ouvrages 11 attir rent le regard attentif de nombreux admirateurs Elles taient pr tes risquer leur vie pour satisfaire ce r ve de transcendance Rauch 166 dont parle Andr Rauch et les propos de la navigatrice Marthe Ouli confirment cet tat d esprit La Mer pour chacune de nous du reste elle repr sente quelque chose de diff rent la lutte incessante de l esprit et du corps contre les l ments la recherche de l aventure ou bien la rivi re qu il faut traverser pour acc der au pays dont on r va depuis toujours 18 L aventure tait pour elles une mani re de donner du piment une existence trop bien r gl e de parcourir des r gions inconnues de c toyer le danger de faire des rencontres avec des bergers des nomades des p lerins ou des moines et de d couvrir des paysages couper le souffle Loin des leurs et pourtant reli es au monde qui les entourait elles v curent des motions intenses et connurent les joies de
426. vivant qui loignait les courants d air Tandis que la flamme se redressait forte de nouveau je pensai que ce geste avait t notre geste tous je pensai tous et je pensai bien ou je sentis bien pendant des milliers d ann es pendant l Age du Feu jusqu ce qu on nous Pait chang par l lectricit Je pense ces objets ces bo tes ces ustensiles qu on d couvre parfois dans les greniers les cuisines les fonds de placards et dont personne ne sait plus quoi ils pouvaient bien servir Vanit de croire que nous comprenons les uvres du temps il enterre ses morts et garde les cl s Seuls les r ves la Edouard Glissant Une nouvelle r gion du monde Esth tique I op cit page 112 87 po sie le jeu allumer une bougie et se promener avec elle dans le couloir nous font approcher parfois de ce que nous tions A 29 avant d tre ce que nous ne savons pas si nous sommes Cette exp rience de la bougie du feu et du soleil d une gestualit la fois retrouv e et r invent e est bien celle du r el celle que l on fait tout le temps et pour tout chaque fois qu on tente de prendre prise sur le monde chaque fois que l on s essaie vivre En cho la bougie de Cort zar n est pas un exemple anodin pioch au hasard parmi le fourbi des ustensiles de cuisine dans les cartons du grenier Non la bougie convoque le monde des ombres la bougie fait rena tre une
427. vons serait d emp cher une quelconque souillure ou infection qui troublerait l ordre du royaume de Dieu par la violence purgatoire Nicolas d peint comme pers cuteur immoral r ve de purger la communaut des l ments impurs qui la corrompent et des traitres qui la subvertissent A ses yeux Victor l intellectuel dissident est porteur d une infection qu il faut compl tement extraire L infection tant un ph nom ne qui se propage rapidement il faut absolument prendre des mesures ad quates l a premi re mesure prendre dans une situation pareille c est videmment d isoler la victime de lui interdire tout contact ave c les membres sains de la communaut Il faut pr venir la contagion Les individus suspects sont aussit t exclus ils s journent sur les marges de la communaut A la diff rence des juifs au Moyen ge Victor n est pas accus d tre porteur d une infection d origine bact rienne telle que la 1 Boireau Op cit p 158 1 to keep the world clean for God One for the Road Op cit p 246 20 Girard Ren Le bouc missaire Paris Grasset 1982 p 28 2 Girard Ren La violence et le sacr Paris Grasset 1972 p 421 208 peste Mais l infection dont cet intellectuel est porteur est d ordre id ologique Nicolas I hear you have a lovely house Lots of books Someone told me some of my boys kicked it around
428. xe des antagonismes d voil s Le sens prend pied l arri re de la vitre sans tain le r el est dans le r ve et la r alit l int rieur du miroir Le fantasme amoureux tendu aux limites les plus extr mes de l univers aragonien ne peut donc v ritablement se comprendre qu au miroir de l imaginaire dans la mesure o c est essentiellement partir de l image que l tre se forme travers ses reflets que la vie se contemple Puisque que chaque personnage vit ses r ves sur le mode d une fantasmatique la fois singuli re parce que r v latrice des traumatismes les plus enfouis et collective puisqu elle soumet le monde son fonctionnement le roman montre magistralement la part de l imaginaire conscient ou inconscient dans la peinture du monde r el Aussi emport dans la spirale confuse des motions et impressions les plus diverses c est finalement dans l absence voire la mort que la passion semble enfin sublim e puisqu en effet embellie et magnifi e par le souvenir les r ves et la puissance recr atrice de la m moire et de l imagination elle se d couvre enfin tandis que le passage du temps vient amplifier la po tique du songe D un songe qui parce qu il emprunte les chemins de la po sie la plus universelle s change et se partage donnant naissance aux r veries collectives 76 Th tre Roman op cit p 430 239 que sont les mythes et les romans Et l amour d
429. z c est par irresponsabilit coupable envers vous m me votre propre salut 202 Pour tre vu comme un individu moral ou sauv il faut donc tre en possession d un corps mince qui est une preuve de d votions r guli res 204 Dans La danse juive le caract re religieux de l obsession de maigrir est pr sent comme th me important Les personnages d Alice du p re de la narratrice et surtout de Mel deviennent vang lisateurs dans leur d sir de perdre du poids pour tre sauv Dans ce projet nous touchons bri vement ce 52 Cette id e celle du r le du corps dans une soci t de consommation ouvre la possibilit de la croyance que the good citizen cannot be ugly and therefore cannot be infected by or infect members of society with dangerous illnesses illnesses that would be marked on their physiognomies Sander Gilman Picturing Health and Illness Images of Identity and Difference cit dans LeBesco 55 Ces maladies ne sont pas seulement m dicales elles comportent tout ce qui peut tre dangereux pour la soci t Puisque l ob sit est identifi e comme laide et amorale dans la soci t de consommation l individu ob se est per u comme citoyen ind sirable il est donc n cessaire de travailler fort avec beaucoup de discipline personnelle pour poss der un corps maigre aux connotations morales positives LeBesco 55 Ces th ories des fondations id ologiques de la soci

Thomas Bauer - Dalhousie University

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