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L`EXPERIENCE DU HANDICAP - Centre de recherche pour l`étude

1. R ponses multiples Malade Incapacit Incapacit Incapacit en quantit en nature en mobilit Oui changement de poste de travail 11 8 13 0 12 6 14 0 Oui am nagement de poste 16 2 17 3 17 2 21 1 Oui am nagement du temps de travail 25 3 28 5 26 4 31 4 Oui assistance mobilit domicile travail 9 1 10 0 9 5 18 4 Oui aide la mobilit au travail 2 9 3 2 3 0 5 6 Oui soutien des coll gues et sup rieur 13 9 14 8 14 6 16 5 Oui autre 4 6 4 4 4 7 5 6 non 46 2 42 8 44 5 36 1 Source CREDOC enqu te emploi 2002 Au terme de cette seconde tape il appara t clairement que les conditions d emploi des personnes ayant un probl me de sant ne sont pas particuli rement faciles elles occupent plus souvent des postes d ouvriers non qualifi s et donc a priori physiquement difficiles elles sont moins bien pay es ont les m mes horaires que les autres Les am nagements restent rares la principale forme tant le temps partiel mais qui n est pas toujours une r ponse satisfaisante tant donn le nombre non n gligeable de personnes souhaitant travailler davantage Les personnes la recherche d un emploi sont confront es des difficult s importantes temps de recherche important bien qu elles soient plus souvent d accord pour accepter un emploi qui ne r pond pas leurs souhaits en terme de dur e de contrat de temps de travail ou de m tier L environnement professionnel
2. Source CREDOC enqu te emploi 2002 Les raisons expliquant cet arr t de recherche d emploi diff rent galement selon le type de population Le sentiment d tre trop g est plus souvent voqu par les personnes malades et se sentant limit es dans leur vie professionnelle Ceci rejoint les constats pr c dents ce public est en effet plus g que les personnes valides et rejoint le constat selon lequel la personne a int gr les difficult s que rencontrent les demandeurs d emploi pass un certain ge Ce sentiment touche autant les personnes malades que les personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle L autre principale raison est l existence de probl mes de sant Alors que seuls 2 des valides voquent cette raison pour expliquer l arr t de recherche d emploi 35 des malades l voquent et les personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle encore plus pr s de la moiti de celles d clarant une limitation en quantit ou en nature de travail et 57 de celles d clarant une limitation en terme de d placements entre le domicile et le lieu de travail 79 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 19 Quelle est la raison principale pour laquelle vous ne cherchez pas d emploi Valide malade Incapacit Incapacit Incapacit en en nature en quantit mobilit Se juge t
3. Les personnes malades et se sentant limit es dans leur travail n ont pas un statut diff rent des personnes valides elles sont aussi souvent salari es que ce soit dans le priv ou dans le public int rimaires ou en CDD La pr carit les touche autant mais pas plus En revanche elles ont une anciennet dans l entreprise plus lev e 62 des personnes malades sont dans l entreprise depuis cinq ans ou plus contre 52 des personnes valides Cela s explique par leur ge mais aussi par les difficult s qu elles rencontrent lorsqu elles veulent changer d emploi comme nous le verrons ult rieurement L anciennet des personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle est proche de celle des personnes malades avec peu d carts entre le type d incapacit s 73 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 On notera toutefois que les personnes ayant d clar une limitation dans leurs d placements entre le domicile et le travail sont plus souvent salari es du public ce constat confirme les carts perceptibles au niveau de la cat gorie socioprofessionnelle plus d employ s de la fonction publique mais n a pas d explications particuli res Parall lement les personnes malades ne b n ficient pas plus souvent d horaires am nag s que les personnes valides au contraire parfois La probabilit de travailler la nuit le dimanche le soir entre 20 heures et
4. Q Globalement coop ratifs R Ils sont coop ratifs oui Et puis je sais pas peut tre qu inconsciemment on se dit elle apprend il faut bien un sujet humain vivant Et puis peut tre qu on se dit peut tre que si un jour elle se retrouve infirmi re et qu elle est confront e un parapl gique peut tre qu elle aura un regard diff rent sur le parapl gique Je sais pas hein Mais il me semble que globalement a passe bien Autre truc aussi au niveau intimit Apr s a d pend de la d licatesse du personnel Je vois par exemple on tait quatre dans la chambre C tait beaucoup quatre dans une chambre M me si c tait des grandes pi ces a fait quand m me beaucoup Mais en m me temps c est g nial c est toujours pareil Surtout quand on est quatre et qu on va bien s entendre Il y avait une fois un mec C tait un t tra je me souviens et en plus il tait d ficient Avec le recul je pense qu il ne s est pas trop rendu compte du truc L infirmi re vient pour lui faire les soins enfin bon le sondage changer la sonde ou je ne sais pas quoi Bon le mec il s est tap une rection Et le mec je me souviens j tais alit ce moment l j avais des petits probl mes de peau je ne sais plus elle n a pas mis un drap sur lui Est ce que c tait parce que il n tait pas un peu neuneu qu ils l ont consid r comme a Est ce que l infirmi re a t prise par un autre truc Et du coup nous g
5. renvoie ce que B Bettelheim d signe comme une situation limite quand tout ce que l on tient pour s r s vanouit et qu on touche le fond La pr sence de l entourage amoindrit certes dans une mesure certaine l impact de ce choc temporairement au moins mais n emp che de toute fa on pas de se laisser envahir par une profonde angoisse dans les moments de solitude comme le raconte notamment le p re de Aude quand il rentrait le soir chez lui seul apr s avoir quitt l h pital et laiss sa famille et qu il se trouvait submerg par le doute Cet v nement a les effets d un s isme sur les certitudes acquises et laisse presque totalement d sempar comme dans le cas de ce que E Goffman appelle les ph nom nes stup fiants astounding complex quelque chose se produit qui am ne les observateurs remettre en cause leur approche g n rale du monde Pour rendre compte correctement de ce qui leur arrive ils doivent invoquer l existence de forces naturelles inconnues imaginer des pouvoirs extraordinaires et par l m me de nouveaux types d agents 1991 p 37 L v nement se traduit autrement dit par une rupture des cadres d apr s lesquels la situation tait initialement envisag e et ne laisse place rien d autre qu une exp rience n gative quand la r alit flotte de mani re anomique C est ce qui s appelle l exp rience n gative n gative parce qu elle s
6. tait sa vie Pour lui il n y a pas de nostalgie de l avant Q Est ce que ces sensations vous les aviez vous aviez le souvenir R Je me rends pas compte en tout cas Non je ne me rends pas compte C est toujours pareil alors je ne sais pas pour les autres traumatis s m dullaires ou accident s de la vie en g n ral comment ils fonctionnent par rapport leur vie Mais a c est peut tre parce qu on vieillit et a on est tous dans le m me cas Mais il y a vraiment une rupture de vie c est s r Et m me au d but o j tais para c est pas une question de m moire qui fout le camps avec le temps Est ce que c est psy c est dire est ce que c est une question de survie du coup on limine oui un certain nombre de souvenirs un certain nombre de choses Ca a toujours t troublant d ailleurs finalement d avoir globalement assez peu de souvenirs de la vie pass e de la premi re vie En tout cas moi jusqu dix neuf ans oui j ai des souvenirs au lyc e des copines des copains mais je sais pas j ai cet esp ce de sentiment un peu troublant que c tait pas ma vie Enfin est ce que c tait bien moi Oui est ce que c tait bien moi Penser des trucs par rapport au fonctionnement que je peux avoir la philosophie de vie que je peux avoir je sais pas fonctionner comme a pas en fauteuil Est ce que c est ma nature ou est ce que c est le hasard qui fait que maintenant c est comme a Et a j ai pas la r ponse
7. troitement m l s Mais l exp rience de la parapl gie de Monsieur Martin peut aussi tre rendue en signalant deux moments d in gales dur es celui de l accueil en tablissements de soins il en a connu trois deux apr s l accident soit un s jour de deux ans et demi un troisi me de six mois du une op ration de l paule et celui de l autonomie une fois repris le cours de la vie La phase d adaptation est plus pr sente en tablissements et la nouvelle vie commence la sortie Cette derni re vision par trop lin aire ne tient pas compte du fait que l accident rendant parapl gique cr e une nouvelle vie et que l adaptation en est la cons quence imm diate et quasi permanente tant par exemple l environnement reste hostile et chez nos contemporains les regards circonspects et les attitudes d routantes 2 L ADAPTATION Au gr d un itin raire non lin aire mais y en a t il qui le soit Monsieur Martin a rencontr de nombreuses difficult s corporelles en premier lieu Les soins dont il a t l objet lui ont fait d couvrir des r alit s humaines professionnelles inconnues notamment en tablissements Il leur a fait face bien s r avec difficult s mais avec une nergie qui n est pas celle du d sespoir Il s est adapt une situation non voulue 2 1 UN TEMPS DE LATENCE ACTIVE Alors que Monsieur Martin devient parapl gique dix neuf ans il signe son premier con
8. 127 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 d moralisant Ou alors on se met une balle dans la t te d s qu on voit le fauteuil parce que c est terrible Moi non je veux dire non Ah merde oui mais bon a continue quoi Parce que franchement si c tait r guli rement le cas on ne peut pas tenir aussi longtemps comme a psychologiquement ce n est pas possible de tenir D ailleurs je pense que ceux qui se foutent en l air les premi res ann es de leur histoire de para c est probablement que a doit tre insupportable cette id e de se voir en fauteuil roulant Moi a n a jamais t bizarrement d ailleurs et c est a qui me surprend aussi c est que a n a jamais t une esp ce d obsession Par contre maintenant avec vingt ans de vie comme a j ai l impression qu il y a moins cette histoire de r ves de se r ver debout avec un rappel du handicap Il me semble que je fais plus de r ves ordinaires C est un peu myst rieux ces r ves On sait bien que c est peut tre une expression de l inconscient Donc c est effectivement plus des r ves ordinaires je n ai pas d exemple pr cis de r ves mais par contre puisque vous me posez la question donc du coup j essaie de faire appel un peu la m moire Il y a longtemps que je ne me suis pas vu en r ve avec une b quille ou un truc comme a Donc a veut dire que quand je fais un r ve et que je me vois en r ve je ne me vois pas en fauteui
9. 19 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 3 LA STUPEUR La quasi totalit des parents interrog s dit le traumatisme que repr sente l annonce qui leur est faite de la d ficience de leur enfant c est l non seulement une vidence que soulignent aussi tous les auteurs qui se sont pench s sur cette probl matique Gardou 1996 Assouly Piquet 1994 mais aussi le d but de la formation du handicap Le cas typique est celui o les parents font cette d couverte d un seul coup tout de suite apr s la naissance comme dans le cas des parents de Nathalie ou bien dans le cours d une proc dure d adoption comme pour Carole et Jean quand pour reprendre les termes du p re la premi re l heureux v nement attendu se transforme en cauchemar La d couverte de la d ficience n est pas toujours seule en cause quelques fois celle ci est m me m connue et il faudra quelques mois ou quelques ann es pour en acqu rir la certitude comme dans les cas de Max et Aude mais les circonstances de la naissance compliqu es par divers accidents m dicaux bouleversent profond ment les attentes des jeunes parents et les plongent dans une terrible angoisse au moins dans l attente d une issue encore incertaine Cet v nement qui provoque de toute fa on l effondrement des attentes normatives ce que tout un chacun dans la m me situation se trouve en droit d attendre l gitimement
10. J suis d sol e madame et puis je vous remercie madame Apr s on est partis Et moi je la remerciais d avoir t naturelle d avoir t spontan e Presque un peu comme le mec du stationnement sauf que lui il tait quand m me un peu en infraction Bon mais c tait tellement le coup des deux minutes ou j en ai pour trente secondes C est tellement marrant tellement classique L c est pareil je trouve que les gens vont regarder un peu comme a devant eux J en ai pour trente secondes Ils pensent que pendant trente secondes la terre elle s arr te de tourner C est leurs affaires qui deviennent prioritaires Q Quand on est handicap est ce qu on a des droits videmment a d passe le caract re des droits sociaux R Enfin au d part oui Honn tement on a tendance sentir un peu qu on est bless de la vie On attend que les gens soient gentils avec nous Tous autant qu on est on a jou avec a Moi combien de fois pendant des ann es j emboucanais les entr es de concert avec un pote valide en disant c est ma tierce personne Donc il me poussait moi je ne peux pas venir au concert sans lui Donc c est un billet pour deux voire m me les personnes handicap es ne payent pas Les tierces personnes non plus Des fois le mec l entr e le vigile n tait pas trop au courant Ca c tait il y a vingt ans a c est fini bien s r Bon OK allez y Ca a fait du bien d ailleurs c est bien C
11. tat les typifications d j construites Pour approfondissements se r f rer Peter Berger et Thomas Luckmann 1966 1996 La construction sociale de la r alit Paris Armand Colin pp 69 127 Anselm Strauss 1959 1992 pour la traduction fran aise Miroirs et Masques Une introduction l interactionnisme Paris M tailli pp 96 99 Cette troisi me alternative est d velopp e plus amplement dans son ouvrage Unending Work and Care Managing Chronic Illness at Home San Fransisco Jossey Bass avec Juliet Corbin 1988 35 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Strauss propose une compr hension de l tre humain comme un perp tuel devenir Elle a pour avantage de permettre d approcher et d appr hender l exp rience v cue par un grand nombre d adultes bless s m dullaires compter du jour de leur accident Nous proposons d exposer ci apr s quelques uns des aspects sociaux initiant cette m tamorphose du rapport soi aux autres et au monde Bien videmment le changement corporel en lui m me et le travail psychique qui en d coule sont eux aussi prendre en compte pour expliquer pareille transformation Mais pour notre part nous nous cantonnerons d velopper une perspective analytique sociologique et ce partir de mat riaux issus d une enqu te de terrain dans un centre de r ducation et de r adaptation fonctionnelles Les implications sociales de l
12. une volont de laisser l enqu t sa propre et libre parole quelles qu en soient les formes r p titions tics de langage phrases non termin es prises par les nonc s Pas d editing La meilleure reproduction possible la meilleure transcription devra inclure le rythme les pauses et les silences les acc l rations l intonation et les r p titions La seconde option et ses modalit s de r alisation peuvent varier selon les chercheurs et la mati re m me des nonc s traduit un souci de lisibilit c est donc travers elle d une part la volont que la parole de l enqu t soit accessible et sans trop de scories et d autre part la prise en compte du lectorat ou du moins la conception que le chercheur s en fait qui interf rent sur le mat riau brut et donc en modifient l ordonnancement Pour ce travail je me situe dans la seconde option dans la mesure o les entretiens ont t liss s Mais d une part les propos de Monsieur Martin constituent l essentiel du document mes propos couvrent moins de place que les siens et d autre part j ai respect en g n ral la continuit de sa pens e ce texte n est pas un montage th matique fait de s lection et d ajouts En cons quence il peut arriver que des redites apparaissent je les ai donc laiss es comme par exemple la narration par deux fois d une rupture sentimentale La voie choisie est donc celle d une s
13. Centre de Recherche pour l Etude et l Observation des Conditions de Vie CheDOC L EXPERIENCE DU HANDICAP OUVRAGE COLLECTIF Alain BLANC Anne FRONTEAU LOONES Eve GARDIEN Pierre LE QUEAU CAHIER DE RECHERCHE N 192 OCTOBRE 2003 D partement Evaluation des politiques sociales dirig par Matthieu ANGOTTI Cette recherche a b n fici d un financement au titre de la subvention recherche attribu e au CREDOC Pour vous procurer la version papier veuillez contacter le Centre Infos Publications T l 01 40 77 85 01 e mail publications credoc fr 142 rue du Chevaleret 75013 Paris http yww credoc fr L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 SOMMAIRE TOMM HON US nn nn AR M Tnt non net ete ttes len tente l ts 5 Pierre Le Qu au PREMI RE PARTIE LES PRINCIPES DE L EXP RIENCE see 11 Gen se d handicap estate den nr nine PAL ete RS dirt en em nat nt D 13 Pierre Le Qu au L accident la m tamorphose de la vie ss 35 Du probl me de sant au sentiment de limitation dans la vie professionnelle DEUXI ME PARTIE UNE HISTOIRE DE VIE L adaptation une nouvelle vie le fatalisme actif de Monsieur Louis Martin Alain Blanc L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 INTRODUCTION Pierre Le Qu au
14. Est tudiant 25 Est actif occup 2 prot g Est actif occup 25 N a pas d emploi car n a 1 N a pas demploi car a pris sa N a pas demploi car a pris sa 16 jamais travaill retraite 20 retraite 13 Est tudiant 9 Est au ch mage Cherche un emploi depuis 19 moins de 3 mois Source CREDOC enqu te emploi 2002 86 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 CONCLUSION L id e de l article tait d utiliser les donn es de l enqu te emploi de l INSEE de mars 2002 et notamment son volet compl mentaire consacr aux personnes handicap es pour comparer le profil et la situation professionnelle de cinq populations les personnes dites valides n ayant d clar aucun probl me de sant les personnes dites malades en ayant d clar un datant de six mois ou plus et les personnes se d clarant limit es dans le travail qu elles peuvent r aliser ou qu elles pourraient r aliser selon qu elles sont en emploi ou non sous trois aspects en nature de travail en quantit de travail et dans leurs possibilit s de d placements entre leur domicile et leur lieu de travail A travers cette comparaison l objectif tait de rep rer les facteurs qui amenaient une personne ayant un probl me de sant se sentir limit e dans le travail Deux principaux ensembles de param tres expliquent l mergence de ce sentiment de limitation Tout d abord un certain nombre de c
15. du flux des changes Cette n cessaire gestion professionnelle des affects est en m me temps admise et crainte L apparente et froide gestion du geste doit se substituer l motion perturbatrice Cette proximit des corps soulign e dans l espace cod du soin en tablissement Monsieur Martin la souligne aussi dans l espace public en l occurrence celui des transports Il n en n a pas la m me perception Q C est quoi le fauteuil pour vous R Ah c est quoi le fauteuil Ben c est une orth se j allais dire Proth se Alors la proth se elle remplace l orth se elle soutient c est a hein Donc ce serait plut t une proth se puisqu elle remplace les jambes bien qu elles soient toujours l pour le d placement C est avant tout quatorze kilos de fer C est 123 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 quand m me treize quatorze kilos de fer Ils sont de plus en plus l gers mais c est quand m me a videmment c est effectivement le moyen de d placement C est quelques fois un truc tr s chiant quand on est devant les escaliers ou dans le sable ou des choses comme a Mais l autre jour je r fl chissais parce que dans un entretien pr c dent j avais voqu le fait que dans le tramway les gens spontan ment il y avait de plus en plus de naturel et de spontan it Et puis je vous avais dit par exemple quand les gens touchent le fauteuil a ne me pose aucun prob
16. la gestion des institutions Le r le des premiers peut tre d crit comme offrant une possibilit d expression de la subjectivit en garantissant pr cis ment le fait que toute nonciation ne provoquera pas d embarras sanctionn On peut m me formuler l hypoth se que leur fonction est pr cis ment d offrir un lieu et un temps d entra nement pour le jeu sur l embarras et la r paration pour parvenir un cadrage acceptable de la d ficience de l enfant Les groupes auxquels on a assist jouent toutefois ce r le de fa on informelle avec donc un r sultat parfois in gal On a ainsi vu la m re de Na ma se faire rabrouer vertement au cours d une r union par le pr sident de l association des parents d l ves de l tablissement comme si ses critiques contre le m decin de l tablissement ne pouvaient pas tre entendues une fois de plus Les ducateurs inform s de la situation de la m re d Aline en revanche sont habitu s ses d bordements involontaires savent comment la g rer et prennent soin de ne pas la froisser Ce qui n emp che pas les autres parents participant la r union de formuler certains reproches quant son attitude hors de sa pr sence bien entendu Ces remarques restent malgr tout empreintes d une vidente compr hension L embarras social rejoue en second lieu quoique sur un mode euph mis la stupeur initiale subie par un individu et met en exergue sa d
17. oppose ce qu elle n est pas savoir une r ponse organis e et soutenue de mani re organis e 1991 p 370 Cette stupeur est proprement parler une non exp rience c est dire qu il s agit d une imposition objective face laquelle un individu ou un groupe ne dispose au moins momentan ment d aucun rep re ou cadre pour lui donner une signification acceptable Cela ne signifie pas que cette imposition soit r ellement nouvelle collectivement il existe donc bien des pr c dents qui permettraient de la saisir mais qu elle est in dite individuellement C est pourquoi elle se traduit notamment par une suspension de l change entre celui qui la subit et son entourage la stupeur est la rencontre avec quelque chose qui n a pas de sens au moins provisoirement et que l on ne peut donc pas partager C est l nous semble t il le principe de la souffrance quivoque si souvent attach e la repr sentation sociale du handicap et qu il s agit de surmonter en laborant de nouveaux cadres Cf le texte de ma contribution au pr c dent cahier de recherche Le sens commun du handicap La compr hension sociale du handicap Cahier de recherche de CREDOC n 182 2003 20 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 3 1 LE FONDEMENT DE LA SOUFFRANCE Les Grecs ont labor une repr sentation extr mement pertinente de la stupeur qui peut nous clair
18. tat corporel qui lui permet progressivement de devenir pr gnante Le patient mesure petit petit les diff rences corporelles advenues au fil des activit s de soins C est dans cette mise en jeu du corps diff rent qu intervient la rupture avec le r seau s mantique usuel avec une part importante des significations ant rieures et ce travers la prise en compte de ces diff rences corporelles que le patient ne s explique pas vraiment qui font pour lui tout au plus l objet de vagues hypoth ses mais qui n cessitent elles des pratiques sp cifiques au quotidien La diff rence corporelle est tout d abord v cue sans qu une compr hension ne soit labor e au del de ce premier aspect de simple diff rence temporaire C est pour a quand il m a annonc a la t trapl gie Au d but je ne pensais pas du tout a M me si C est pas comme si j avais eu un petit doute Mais je ne comprenais pas bien Vu que je ne bougeais pas grand chose de la journ e Q Tu ne t tais pas pos la question de tes jambes Pas autant Marc Bruzstowski 2001 L annonce du handicap au grand accident Pour une thique de responsabilit partag e Ramonville St Agne Er s 7 Situation corporelle se r f re aux significations attribu es au processus corporel un moment donn de la trajectoire par un acteur collectif ou individuel 8 2 2 1 2 R seau s mantique expression couramment utilis e
19. 2 4 1 7 1 3 1 8 0 9 Dont anciennet lt 1 an 3 5 3 8 3 5 2 9 3 8 anciennet d un an moins de 5 ans 15 6 18 8 18 2 17 7 20 7 anciennet de 5 ans et plus 0 0 0 0 0 anciennet non renseign e Temps partiel 15 6 18 3 26 4 24 3 26 9 Parmi les temps partiel Souhaite un temps plein 25 2 27 3 21 0 25 9 17 9 Souhaite travailler plus mais pas temps 7 4 8 1 8 8 8 0 7 6 plein Travail de nuit 5 0 5 2 4 5 4 5 3 8 Habituellement 9 9 10 2 9 8 10 3 9 1 Parfois 85 1 84 7 85 7 85 2 87 1 jamais Travail le dimanche 9 2 10 0 13 0 11 0 8 6 Habituellement 19 2 17 9 17 4 17 3 17 9 Parfois 71 6 72 1 69 6 71 7 73 5 jamais horaire 62 4 60 7 62 5 62 5 64 9 les m mes tous les jours 8 6 10 1 7 8 9 4 8 4 alternance 3 8 28 9 29 2 29 6 28 1 26 7 variables d un jour Pautre Source CREDOC enqu te emploi 2002 Un autre l ment important repose sur le fait que les personnes malades et plus encore les personnes avec incapacit sont moins bien pay es que les valides Alors que 9 des valides ont un salaire compris entre 2 500 et 5 000 francs 10 des personnes malades sont dans cette tranche de revenus 17 des personnes se sentant limit es en terme de quantit de travail 20 en nature de travail et 21 en d placements entre le domicile et le lieu de travail L cart de revenu ne touche pas particuli rement les personnes malades dont la r partition par tranche de salaire reste proche de celle des personnes valides
20. 50 59 ans 16 2 30 5 36 1 34 2 37 3 60 ans et plus 5 1 11 8 15 6 14 3 16 4 TOTAL 100 0 100 0 100 0 100 0 100 0 Source CREDOC enqu te emploi 2002 y De quel type de probl me de sant s agit il La d ficience la plus souvent cit e rel ve de probl mes au niveau du dos ou du cou 29 des personnes malades en parlent Viennent ensuite des probl mes au niveau des membres inf rieurs 17 puis des probl mes cardiaques 16 des difficult s visuelles 15 des probl mes au niveau des membres sup rieurs 13 et des probl mes respiratoires 11 10 des personnes interrog es voquent des troubles de la personnalit troubles psychiques ou d pression Ce pourcentage peut para tre important et renvoie aux propos de personnes charg es de l insertion professionnelle de personnes qui ont le sentiment que ces troubles sont en augmentation au sein de cette population Le fait de se sentir limit es dans le travail peut tout fait alimenter un mal tre ou tout du moins ne rien faire pour y rem dier On notera enfin que 6 d clarent des probl mes de diab te Comme on pouvait s y attendre le sentiment de limitation dans le travail varie selon le type de d ficiences Les personnes se sentant limit es dans leur travail ont plus souvent que les personnes malades d clar avoir des probl mes li s certaines parties externes du corps que ce soit les membres inf rieurs sup rieurs le dos ou des
21. Ah non Je n ai pas le souvenir de a vraiment pas le souvenir de a Je ne pense pas qu il avait ce sentiment l parce qu il tait Alors je ne sais pas si c est le fait de son handicap probablement que oui mais il tait je dirais bien entour Effectivement j ai le souvenir de pratiquement jusqu sa mort de copains qui venaient r guli rement r guli rement le voir Je me rappelle une fois j tais chez lui d ailleurs moi j tais d j en fauteuil Il y a 2 copains lui qui sont venus le voir Et moi j en ai reconnu un parce que j tais all avec lui je me souviens j tais all avec lui voir mon p re l h pital de r ducation quand mon p re tait en r ducation Il nous avait il m avait emmen moi et mon autre fr re d ailleurs pour voir mon p re donc visiter mon p re Il tait tr s marrant d ailleurs Apr s moi je ne l avais plus trop revu pendant quelques ann es Je ne l avais pas trop revu Et je me souviens du choc que a m avait fait quand il m avait vu moi en fauteuil en plus de voir mon p re et moi en fauteuil Je me souviens il avait les larmes aux yeux enfin bon Pourtant c tait un grand gaillard costaud bon L je devais avoir J avais une petite vingtaine tout casser quoi 102 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Et il avait conserv un r seau d amiti fiable R Il me semble que oui Il n avait pas le permis Donc il n avait pas d
22. Elle est en revanche forte pour les personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle 75 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Cet cart subsiste m me au sein des salari s temps plein Au vu du plus grand nombre de personnes travaillant temps partiel parmi celles ayant d clar une incapacit il tait en effet souhaitable de v rifier si les diff rences ne s expliquaient pas par des temps de travail diff rents On peut en revanche expliquer en partie ces carts de revenus par les postes occup s Ces carts sont encore plus lev s ge quivalent Malgr leur ge les salaires vers s aux personnes d clarant une limitation dans le travail sont inf rieurs aux autres Ceci renforce l incitation pour la personne de comparer ce qu elle peut obtenir par le travail d une part et par les diff rentes aides d autre part si elle demande une reconnaissance et arr te de travailler Tableau 15 R partition des populations tudi es par tranche de revenu En valides malade Incapacit Incapacit Incapacit en quantit en nature en mobilit A Moins de 2 500 F 4 5 1 6 5 5 4 4 4 9 B De 2 500 moins de 5 000 F 8 5 9 8 16 8 19 6 20 9 C De 5 000 moins de 7 500 F 20 5 19 2 21 2 22 4 15 2 D De 7 500 moins de 10 000 F 20 1 23 1 27 1 22 4 26 1 E De 10 000 moins de 12 500 F 13 2 15 9 12 4
23. Je ne cherche pas forcement la r ponse d ailleurs et je pense qu il n y a pas peut tre pas de r ponse d ailleurs Mais on est oblig d y penser in vitablement on est oblig de se dire oui mais tiens si j avais t valide est ce que j aurai r agi comme a est ce que je serai comme a maintenant Je ne sais pas si les autres se posent la question 138 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Mais a ne tourne pas une r flexion qui vous rends amer R Non je pense que c est aussi le cas pour quelques copains Non il y a vraiment un moment o on se dit les premiers temps c est difficile bien s r Mais partir du moment o on est autonome m me si effectivement la parapl gie c est gal re Faut pas se voiler la face Il n y a pas de nostalgie de avant il n y a pas de nostalgie Moi je sais qu avant j aimais beaucoup courir en for t j aimais bien courir sur des troncs pied comme a J adorais a C est vrai que a m a fait chier de ne plus pouvoir le faire mais c est un truc auquel je pense jamais J y ai pens les premiers temps quand je voyais quelqu un le faire par exemple alors forc ment c est Mais avec le temps a dispara t Et puis il y a le quotidien qui est parfois dur g rer il y a des probl mes trimbaler Mais il n y a pas cette nostalgie en tout cas il n y a pas en ce qui me concerne d id es obsessionnelles de putain je suis handicap je march
24. L option ici retenue est tout autre radicalement inverse mais compl mentaire la pr c dente En effet fort de connaissances acquises pr alablement une sorte de point de vue sociologique labor au fil de recherches ant rieures je pense qu un individu ici une personne handicap e peut dans son exp rience traduire et exprimer bien s r sa fa on et ici et maintenant des options collectives pratiques et repr sentations m l es La vie de Monsieur Martin comme tout autre d ailleurs n est ni le pur reflet de conditions objectives pas plus qu elle ne se d roule absolument librement dans une trame de la vie collective non contraignante et sur laquelle elle n aurait aucune prise En cons quence couter sa parole pr sentant son itin raire et comme tout autre il n chappe pas aux reconstructions posteriori offre un point de vue certes subjectif mais qui signale et renvoie des options collectives Le corps et la vie de Monsieur Martin sont les siens en eux mais sp cifiquement s inscrivent pourtant des options g n rales la mobilit professionnelle et g ographique des hommes l loge de l adaptation le souci de sant la justification de l exp rience formatrice manifestant l imbrication du social et de l individuel 1 1 LE RECIT DE VIE Apr s une p riode d oubli qui succ da sa justification par l Ecole de Chicago comme m thode sociologique ad quate ses objets pa
25. a mais a illustre un peu le 174 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 propos mais je m embarquais je montais dans ma voiture et il y avait une jeune nana une jeune femme qui tait plus jeune que moi qui comme a qui tait quelques m tres et qui me regardait mais qui me regardait tout fait normalement Puis je vois qu elle me regarde je lui fais un sourire Elle me fait un sourire Puis d un coup elle se sent un petit peu g n e mais l ger l ger Je lui dit tu veux me regarder il n y a aucun probl me Tu peux m me venir si tu veux je t explique je te fais un topo Il n y a aucun souci Et alors l elle s est avanc e vers moi Et on a discut On s est tutoy spontan ment bien que j tais plus g e qu elle Elle m a dit ah ben c est bien ton syst me etc etc C tait un petit change comme a anodin sachant que sur mes deux pieds ce contact l il n aurait pas eu lieu Bien s r il y en aurait eu d autres mais a c est un contact directement li au fait d tre en fauteuil Et puis apr s videmment il y a tous les contacts ordinaires dans le bus dans les magasins dans les restos dans les queues o les gens calculent pas Je veux dire on parle on change mais verbalement quoi Mais je pense que a facilite la relation m me si dans certains cas c est malsain au d part c est dire c est pas malsain quoique si il y a quand m me des gens pour qui c est ma
26. dix huit dix neuf ans Vu d ici oui tr s jeune dans la t te surtout C tait pas un probl me enfin bon voil c est comme a Avant j ai toujours encha n les boulots j ai fait donc deux saisons puis ensuite j ai trouv une place l ann e en tant que cuisinier Q Est ce que a vous parait trange ma question de vous demander pourquoi vous avez mis tant de temps pour trouver non pas une insertion durable parce que a n tais pas vraiment votre probl me mais qu il y ait eu vingt ans pour signer un contrat de travail dur e ind termin e R Non la question ne me surprend pas Mais je crois que je n ai pas de r ponse c est dire que je ne sais pas pourquoi a a pris vingt ans J ai toujours eu l impression d avoir travaill l association apr s a a t un petit peu diff rent c tait des petits bouts quoi Mais surtout surtout l association m me si a ne repr sente que sept huit ans sur vingt ans Mais j ai toujours eut le sentiment de travailler Par contre c est vrai qu apr s le multim dia autant on peut faire du b n volat dans des associations autant avec le multim dia avec ce m tier l on ne peut pas vraiment faire du b n volat quoi part proposer des services comme a faire des sites Web des bricoles des plaquettes et tout a pour des associations chose que j ai faite d ailleurs chose que j esp re encore faire probablement Peut tre que c tait l une possibilit de vrai
27. du probl me de sant doit tre prise en compte Le sentiment de limitation cro t avec l anciennet du probl me de sant notamment les incapacit s de mobilit 45 des personnes d clarant tre limit es dans leurs d placements entre leur domicile et 64 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 le travail ont un probl me de sant datant de dix ans ou plus contre 37 des personnes malades 39 de celles ayant une incapacit en quantit et 42 en nature En revanche au sein des jeunes surtout la part des handicaps de moins de six mois est un peu plus importante parmi ceux ayant d clar une limitation dans leurs d placements entre le domicile et le travail Dans 12 des cas les personnes malades ont ce probl me de sant depuis moins d un an Cette proportion est identique parmi les personnes ayant une incapacit en quantit de travail elle est l g rement inf rieure pour les deux autres types d incapacit s 10 L anciennet du handicap agit donc de deux mani res sur le sentiment de limitation dans le travail Le premier effet est le plus fr quent plus le handicap est ancien plus il s accompagne d incapacit s en raison de complications ou d aggravations du probl me de sant probablement Le deuxi me effet concerne surtout les jeunes les 15 24 ans qui d clarent une limitation dans les d placements ont plus souvent des handicaps de moins de six mois Cet effet peut s
28. enfin chercher un peu le regard et tout a Bon a je pense qu mon avis c est plus le probl me bien que des fois il peut y avoir des petits picotements Et je pense que tout est dans la forme quoi A ce moment l dans la forme dans les mots M me pas forc ment dans le regard de l autre dans la fa on dont il va le dire ou dans la fa on dont l autre va percuter par rapport la r ponse qu on fait Mais globalement globalement je trouve que les gens sont corrects sont bien Oui surtout ils font ce qu ils peuvent Oui c est a Surtout je pense que les gens font ce qu ils peuvent Et surtout c est toujours de la bonne volont Ca part toujours d un bon sentiment C est tr s souvent d plac maladroit mais a part toujours d un bon sentiment Je pense que quand on a compris a eh bien a va mieux Par rapport ses contemporains au quotidien a va mieux parce qu on arr te de mh Par contre il y a en a au bout de vingt ans vingt cinq ans c est toujours mheu voire m me encore plus agressif Q Dans les changes que vous avez avec les gens est ce que vous sentez que le fauteuil est tr s pr sent R Vous voulez dire par rapport aux autres par rapport aux gens ou par rapport moi Q Par rapport aux gens R Non Je pense que les gens ils oublient assez vite le fauteuil Alors une fois de plus bien videmment a d pend des gens et puis a d pend de la personne handicap e M
29. expliquer par des g nes temporaires entra n es par la survenue d un probl me de sant par exemple suite un accident de la route cr ant des traumatismes importants au niveau des membres inf rieurs Cette g ne sera r sorb e le plus souvent gr ce une r organisation de la vie quotidienne et ou une am lioration du probl me de sant Cette notion est centrale apr s un accident lorsque survient une d ficience les gestes faits hier ne pourront plus tre faits demain de la m me mani re Les jeunes semblent avoir le plus de difficult s accepter ce changement Cet apprentissage est d autant plus difficile qu il se couple de l acceptation d un handicap Tableau 6 R partition des diff rentes populations tudi es par anciennet du probl me de sant En Malade Incapacit de Incapacit Incapacit quantit de nature de mobilit Moins de 6 mois 3 6 3 4 3 1 3 8 De 6 mois moins d 1 an 8 6 8 2 7 3 6 9 D 1 an moins de 2 ans 9 9 9 6 8 6 7 1 De 2 ans moins de 3 ans 9 4 8 7 8 7 7 7 De 3 ans moins de 5 ans 13 7 13 1 12 5 12 0 De 5 ans moins de 10 ans 17 7 18 0 18 3 17 5 10 ans ou plus 37 1 39 0 41 5 45 0 TOTAL 100 0 100 0 100 0 100 0 Source CREDOC enqu te emploi 2002 Enfin le sentiment de limitation est plus fort chez les personnes attribuant leur probl me de sant un accident du travail 9 quel que soit le type d incapaci
30. ficiences L enqu te emploi tudi e ici souligne que parmi les actifs occup s les personnes malades sont moins souvent des cadres et plus souvent des ouvriers notamment non qualifi s 20 des personnes malades sont des ouvriers qualifi s contre 17 des valides et 10 des ouvriers non qualifi s contre 8 des valides Elles sont galement plus souvent employ es de la fonction publique 12 contre 11 Cette in galit sociale est encore plus forte parmi les personnes d clarant une limitation dans leur travail Ceci rejoint les propos de P Mormiche Les d ficiences touchent davantage les cat gories ouvri res et d ficience quivalente un ouvrier d veloppera plus souvent un sentiment de limitation dans son travail L cart est significatif pour les ouvriers non qualifi s 12 ou 13 contre 10 et les personnels des services directs aux particuliers Les personnes limit es dans leurs d placements sont plus souvent employ es de la fonction publique 14 contre 11 Y a t il dans ce secteur des am nagements particuliers Les carts entre d ficiences peuvent s expliquer par la pr valence plus forte des accidents du travail pour les cat gories ouvri res plus expos es ce risque professionnel mais galement aux conditions de travail souvent plus difficiles des ouvriers que des cadres qui cr ent au fil du temps une certaine usure de la personne notamment physique probl mes de dos li s au port de charge de trau
31. gal enfin je ne sais pas pr cis ment Enfin voil il reste cette tape l qui mon sens est entrain de se d bloquer enfin de se d coincer et entrain de se concr tiser Q Et lui avec ses copains quand ils jouent et que vous l entendez discuter comment il vous nomme 179 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 R Mon p re Mon p re Il a eu quelques ann es je ne sais pas entre cinq et six ans par l o il avait un petit peu de mal avec a Il ne savait pas si ses copains l cole ou au sport par exemple il fallait qu il dise Louis ou mon papa mon p re Donc je sais que c tait un coup l un un coup l autre Enfin c tait un petit peu comme a un petit peu comme a Mais par contre maintenant depuis on va dire deux petites ann es c est mon p re mon papa Et donc ind pendamment les deux termes l dessus je l entend le dire Je ne sais pas les copains c t ils veulent pour faire marrer faire des machins tiens va demander ton p re Et c est vrai que les premiers temps o j ai entendu a a me surprenait Ca me surprenait bien s r agr ablement mais a me surprenait Je ne me disais pas tiens de qui ils parlent bien videmment Mais a me surprenait Mais par contre maintenant c est clair et net l cole et tout a BIBLIOGRAPHIE y Ouvrages Bertaux Daniel Les r cits de vie Collection 128 Nat
32. il y a un nom pour des gens comme a int ress s par ou sexuellement attir s par les personnes handicap es notamment les femmes particuli rement qui fantasment sur des amput s par exemple Et je ne retrouve pas le nom du truc C est un dr le de nom d ailleurs Mais a sur le moment vingt ans je ne calculais pas a Alors que dire Comment dire Alors effectivement alors sur les probl mes physiques c est dire sur les s quelles on va dire a en ce qui me concerne c est le cas de pratiquement tout les paras il n y a pas d volution Chacun a les troubles qu il a en ce qui me concerne pour tre tr s net il y a des troubles de l rection Je ne veux pas dire qu il n y a pas d rections mais il y a des troubles de l rection des rections un peu limites Donc il y a des techniques pour am liorer l rection des techniques m caniques ou chimiques enfin m dicales par injections ou cachets Bon a c est des trucs qui ne m ont jamais particuli rement int ress s Peut tre parce qu aussi les aventures que j ai pu avoir c tait pas forc ment la p n tration qui tait la finalit de l histoire Donc du coup ce n est pas forc ment une obsession Ce qui est plus difficile dans l histoire c est les troubles de la sensibilit C est a qui est plus d licat parce que du coup le plaisir il est moindre nettement moindre Le plaisir comment physiologique quoi mais il y a d autres formes de plaisir
33. incapacit La probabilit d tre inactif cro t avec l ge elle est plus forte pour les personnes d clarant une incapacit que pour les malades Tableau 9 la situation professionnelle selon l ge et l existence d un probl me de sant En 15 24 ans 25 39 ans 40 49 ans 50 59 ans valide malade incap valide malade incap valide malade incap valide malade incap actif 24 27 21 80 70 56 86 71 55 75 55 42 occup ch meur 5 7 7 7 9 12 4 7 9 4 5 6 PSERE autre 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 ch meur PSERE tudiant 67 56 56 2 2 2 0 0 0 0 0 0 l ve Retrait 0 0 0 0 0 0 0 0 0 7 7 7 autre 3 9 15 10 18 29 9 21 35 13 32 45 inactif TOTAL 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 Source CREDOC enqu te emploi 2002 Guide de lecture incap repr sente l ensemble des personnes ayant d clar au moins une incapacit parmi les trois types v Une prise en compte de leur probl me de sant dans les conditions de travail Parmi les personnes malades qui travaillent un quart environ d clarent b n ficier d une assistance ou d une adaptation de leur poste de travail Cette proportion est l g rement sup rieure lorsqu on ne regarde que les personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle 23 des personnes d clarant une incapacit en quantit de travail 24 en nature et 24 en mobilit contre 22 parmi l ensemble d
34. j l autre ce qui est au del de moi non plus vers le haut vers le soleil de la beaut mais vers le bas l aveuglante nuit du chaos la mort en face 1998 p 105 Une image comme celle que contiennent les mythes est un miroir que l esprit produit pour se saisir lui m me En l occurrence celle de la stupeur travers l histoire de la M duse est un moyen par laquelle l esprit peut envisager sa propre fin la limite au del de laquelle il perd sa ma trise sur le monde et sa capacit donner forme et signification aux choses Elle dit autrement dit l exp rience n gative celle qui se situe hors cadres Le sociologue de terrain habitu rencontrer les publics marginalis s a fr quemment affaire avec la stupeur qui se traduit notamment par une extr me difficult recueillir un r cit puisque celui ci consiste toujours en une mise en forme organis e de l exp rience Parmi les situations les plus remarquables o il a fallu interroger des stup faits on rappellera seulement cette enqu te r alis e aupr s des parents de d tenus frapp s d une h b tude cons cutive au crime commis par le fils ou la fille que rien ne laissait pr sager et que rien ne permet de comprendre Le Qu au 2000 Mais en r alit tout v nement inattendu sans qu il implique la moindre violence objective moins que la violence ne tienne pr cis ment dans ce caract re inattendu peut devenir stup fian
35. l veront sans la couper des liens avec le p re et la fratrie Le second fait est l accident de circulation du p re survenu en 1974 lage de 45 ans n en 1929 alors que Monsieur Martin a 12 ans il restera parapl gique jusqu son d c s l ge de 62 ans 1991 d c s du un accident vasculaire c r bral Monsieur Martin indique des revenus mensuels dont le montant se situe entre 2 280 3 000 Euros 15 000 20 000 Francs Depuis son accident de trajet qui a t reconnu 1981 comme accident de travail il dispose d une rente d accident de travail Elle est vie conciliable et sans conditions de limite avec tout autre revenu non imposable et insaisissable Depuis 2001 il est propri taire de son appartement de 80 m tres carr s qui est situ dans un quartier correct sans tre toutefois r sidentiel d une commune de la banlieue d une capitale d partementale Monsieur Martin aime les voyages notamment l tranger o il est all de tr s nombreuses fois Alg rie Maroc gypte Liban Portugal pour des s jours allant de 10 jours 1 mois Il va au cin ma lit des livres des autobiographies notamment Il est passionn d astronomie et de pr histoire 1 4 LE CONTEXTE FAMILIAL Si l on consid re les trois g n rations grands parents enfants petits enfants la famille Martin fait partie des classes populaires vivant en milieu rural Mais des degr s divers ses membres se
36. montage pour le nettoyage des fen tres est cet gard exemplaire des capacit s d adaptation un apprentissage et une ma trise des situations L exp rience toujours hasardeuse du r el est formatrice Forme aboutie de la d pendance l assignation au fauteuil une hauteur une posture des gestes une mobilit entrav e des activit s modifi es peut constituer en m me temps une ressource qui surprend encore pour ne pas dire enchante Monsieur Martin Les personnes handicap es cause mais surtout gr ce aux handicaps r sultant des d ficiences sont capables y compris sans le savoir a priori elles m mes d inventivit Belle le on que celle de la vie indiscutable ressource Est ce que la sp cificit de Monsieur Martin a une incidence sur sa vie psychique nocturne Quelle est la mati re des ses r ves R Je r ve de quoi Je n ai pas beaucoup de souvenirs de mes r ves J en sais rien de quoi je r ve comme tout le monde De quoi j ai r v cette nuit par exemple je ne sais pas non franchement Je ne sais pas de n importe quoi Par contre je me souviens au d but les premi res ann es par exemple on ne se r ve pas en fauteuil Je ne me suis jamais vu dans un r ve en fauteuil roulant Ca c est s r mais par contre je me suis toujours vu me semble t il m me si effectivement les quelques derniers r ves o c est une impression en fait Je ne me suis jamais vu en fauteuil et je pense que mes
37. n s enfin on se d fendait de regarder on tait un petit peu g n s de le voir dans cette situation l C est vrai qu il y a aussi les soins qui sont fait aux autres cot Alors je sais que dans certains hostos par exemple ils ont des petits paravents qu ils peuvent d placer sur roulettes pour isoler un petit peu quand il y a des soins comme a un peu d licats La n cessit de soins sp cifiques les sondages urinaires peuvent chez les bless s m dullaires tre l occasion d rections r flexes On con oit que cette situation habituellement relevant de l intime choisi soit d stabilisante pour les interactants tant les cat gories collectives de l intimit sont ici boulevers es Cette officialisation probl matique de l intime est aussi signifi e par le rite des visites de l quipe m dicale qui debout regarde un corps nu allong Il n est pas s r qu un drap pudique recouvre cette nudit Mais Monsieur Martin souligne la coop ration des patients qui peuvent accepter d tre les cobayes consentants et informatifs de stagiaires apprenant le m tier sous les yeux d une infirmi re Et l on mesure quel point en un lieu d di au traitement des corps les int ractants doivent pratiquer avec tact la r paration des atteintes subies et tre attentifs l th risation des gestes Le temps m me quelques minutes la d dramatisation l humour sont ici des appuis essentiels permettant la continuit
38. paralytique Paralytique pour moi a sonne un gars qu est dans Lucky Lucke amput qui est sur la petite planche avec ses fers repasser qui avance Voil c est ce genre de trucs Ca c est plut t pour l aspect un peu mis re que les gens ont sur nous Et puis videmment il y a l extr me C est Quels bras vous avez vous tes un super champion Donc l ils voient plus la personne en fauteuil qui va en chier va ramer Au contraire ils voient le mec en fauteuil qui a des bras costauds donc qui doit tre un sportif un champion Ce qui n est pas du tout le cas enfin ce qui n est pas mon cas Donc c est toujours un peu des deux extr mes Soit on est vu comme des grabataires soit on est vu comme des super h ros Ca c est tr s souvent et a fait chier beaucoup de monde Parce qu on est ni grabataires ni des super h ros Ceci dit les m dias dans leurs pr sentations de personnes handicap es dans les missions documentaires globalement c est soit des situations tr s tr s dures de grande d pendance avec aussi le T l thon et tout a Soit au contraire c est des documents des reportages sur les mecs qui ont fait des exploits qui ont gravi une montagne qui ont saut en parachute ou je sais pas quoi Je trouve que les gens mettent vite dans des cases comme a 149 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Et entre grabataire et super h ros ce serait quoi l intitul qu on pourrai
39. pour des salaires moindres Elles rencontrent de grosses difficult s d acc s l emploi lorsqu elles sont au ch mage malgr de moindres exigences Elles semblent la fois n avoir que peu de perspectives en termes de prise en compte de leur probl me de sant au sein de l entreprise si ce n est un temps partiel qui n est pas toujours une r ponse satisfaisante ou de la compassion de leurs coll gues et sup rieur et rencontrer des difficult s importantes pour acc der l emploi du fait de leur ge et de leur probl me de sant Ce contexte explique probablement en partie pourquoi certains pr f rent alors tre inactifs et faire jouer les diff rents dispositifs pour avoir droit des aides compensant leur retrait de la sph re professionnelle et 87 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 officialisant leur incapacit de travailler Le sentiment d incapacit dans le travail est donc fortement influenc par les conditions de travail que les personnes ont ou pourraient avoir Le recours des mod les logits a permis de classer ces diff rents facteurs A d ficience quivalente le fait de b n ficier d une assistance ou d une adaptation du poste de travail pour les personnes en emploi et le fait de le souhaiter pour celles qui n y sont pas est le premier facteur explicatif du sentiment de limitation dans la vie professionnelle Le fait de poss der un titre de re
40. r Et puis d ailleurs que lui soit handicap ou pas Je pense que de voir son fils en fauteuil a doit tre difficile tr s difficile D ailleurs c est plus difficile pour les autres que pour nous souvent Par contre il y a un truc qui est s r enfin qui est s r J ai trois fr res enfin j ai deux fr res on est trois gar ons Pas de diff rence enfin je veux dire pas pas plus d affinit je suis le petit dernier en plus vous voyez pas plus d affinit s entre mon p re et moi que mon p re et mes deux fr res qui sont juste devant moi Non je ne sais pas si dans la famille ce n tait pas quelque chose de pas de classique finalement mais ces histoires de fauteuil roulant un peu comme a d int gr enfin j veux dire de commun En cons quence et Monsieur Martin insiste sur ce point il convient dans un premier temps sorte de protection du groupe primaire que cette situation sociale d favorable et attentatoire aux flux des 117 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 relations normales soit recouverte d une tiquette de discr tion dont la fonction reste pr servatrice Mais second temps Monsieur Martin qui n est pas d muni souligne qu il a t aussi actif dans l initiation de nouvelles relations sociales Ainsi revendique t il la mise en place de distances nouvelles vis vis de ses anciens copains Comme il l indique ils sont sur une autre plan te et lui m me ne go
41. rant Q Mais pour cette personne vous n avez jamais eu de regrets R De regrets probablement probablement que oui 158 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Et quand elle est venue vous voir cinq ans apr s pour elle les choses tait dites ou il y avait ventuellement R Je pense qu on s est pas revus par hasard on s est pas recrois s par hasard C est s r qu on a quand m me cherch le contact II me semble d ailleurs que c est elle qui avait pris le contact avec moi Je pense que quand moi je l ai revue cette poque l j tais avec quelqu un et donc c tait difficile La tentation tait grande pour moi forc ment parce qu il y avait quelque chose qui n tait pas vraiment achev avec elle donc bien s r la tentation tait grande mais j tais avec quelqu un J tais plut t tr s amoureux de la personne avec qui j tais Ce qu il y a c est que quand je l ai revue je me suis dit dans ma t te t es con tu l as laiss e partir C tait une belle femme etc je me suis dit t es con tu l as laiss e partir Alors que Monsieur Martin a pris l initiative de la rupture et la justifie peur de se confronter la sexualit et volont de prot ger Marianne il n en a pas eu sur le moment de regrets Aujourd hui il n est pas s r de penser la m me chose et a un sentiment d inachev Cinq ann es apr s cette rupture Marianne lui a redit la faveur d u
42. re est arriv apr s Donc on a tout re d m nag dans l autre lit pour que j ai une meilleure vue sur l ext rieur Parce que c tait vachement important pour moi tant donn que j tais clou au lit et que je ne pouvais rien faire d autre que de voir les trois branches d arbres qu il y avait par la fen tre je ne voulais pas en rater une miette Ils sont revenus dans la chambre apr s m avoir install et ils ont t un peu tonn s que j ai d m nag Je leur ai expliqu pourquoi ils m ont laiss faire ce que j avais faire ils ont modifi Enfin j ai compris beaucoup plus tard que a avait d modifier pas mal de leurs papiers etc etc parce que j tais pas Q C est dire Ben j tais la 112 porte ils m avaient mis la 112 fen tre et j tais la 112 porte Donc les prescriptions les soins tout ce qui avait en rapport avec moi mon nom n tait plus associ au bon num ro de lit M C 30 ans prof Interm diaire 47 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 UN NOUVEAU TRAITEMENT DE SON CORPS Les n cessit s du traitement du corps engendrent elles aussi des cons quences secondaires mais cependant importantes pour le patient Par exemple il doit s habituer des postures ce qui peut se r v ler tre un v ritable tour de force quand il lui est impossible de s endormir sur le dos ou sur les c t s Ou encore il doit ingurgiter une nour
43. re pu n n en 1960 a fait de la menuiserie mais Monsieur Martin n est pas s r qu il ait eu son BEP car il s est fait renvoy de l cole Il a exerc diff rents m tiers principalement sur les 103 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 chantiers o il tait conducteur d engins Il a arr t pour des raisons de sant le mal de dos Il a trouv un travail dans l usine ou exerce une belle s ur puis est devenu magasinier il conduit un transporteur de palette D une premi re union il a eu une fille Catherine n e en 1987 qui veut se lancer dans l apprentissage de la coiffure et qui r side chez sa m re En seconde noce il a pous No mie qui est actuellement assistante de direction dans une imprimerie sp cialis e dans le multim dia elle travaille dans la vall e o sont n s les enfants Martin lev par une tante la s ur du p re et son mari Ludivine la fille de la famille n e en 1965 a fait un BEP mais Monsieur Martin n en conna t pas la sp cialit Elle a fait un peu de couture de service Dans le commerce de ses beaux parents qui sont traiteurs dans une ville moyenne elle est vendeuse avec son compagnon ils esp rent d ici un ou deux ans assurer la rel ve quant les parents prendront leur retraite Ce couple n a pas d enfants Alors que les parents appartenaient aux classes populaires les trois fr res et la s ur en font toujours par
44. tait bien Ou quand on arrive quelque part en voiture par exemple Ca c est de moins en moins valable Et tant mieux enfin tant mieux en tous cas c est comme a Et donc on 170 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 nous gare au plus pr s du truc etc etc Dans les concerts des fois on a des places juste devant ou alors des fois on a des places o on voit rien enfin bon Mais des fois il y a des minis privil ges comme a il y a des petits privil ges qui en m me temps je pense sont humains Je pense qu il y a peut tre des fois des bourses c est en fonction des gens de certaines aptitudes certains trucs On peut aussi avoir certains petits privil ges sans pour autant tre handicap Maintenant moi je pense par contre je ne consid re pas avoir des droits autres que les droits sociaux etc d avoir des droits particuliers parce que je suis handicap Moi je supporte pas par exemple les gens qui arrivent en fauteuil aux caisses du magasin je suis prioritaire pardon pardon pardon j ai ma carte Alors je comprends que les gens debout qui ont des probl mes de d placement oui eux ils sont vraiment prioritaires s ils ne peuvent vraiment pas tenir longtemps debout Quand on est un jeune parapl gique faut pas charrier Ca c est un truc que moi j ai jamais fait Quand je vois des gens le faire je me dis oui c est pas bon pour notre image C est vrai que les gens aux caisses des maga
45. tait tr s convivial C tait tr s chaleureux quand ils venaient me voir bien s r parce qu en plus sur place on pouvait manger parce qu il y avait une grande salle Alors ma belle s ur mes belle s urs ma tante amenaient des petits plats que j aimais bien des petits g teaux enfin bon tout ce genre de trucs C tait tr s tr s agr able C tait important que devant moi elles n ont jamais manifest quoi que ce soit Je n ai jamais vu pleurer mes fr res par exemple En plus il y avait une esp ce de finalement de fatalisme de se dire bon ben a ne sert rien de se p ter la t te contre les murs de toutes fa ons les choses sont l Maintenant on va faire avec je sentais bien qu ils ont eu peur de me perdre Je le sentais par d pit d expression surtout mon grand fr re qui est plus expressif que Roger Roger est tr s tr s introverti II ne parle pas beaucoup Sinon on n a pas une tendance peut tre non plus exprimer les sentiments comme a On n a pas vraiment grandi comme a quoi Q Et vous vous avez eut peur de les perdre R Peur de les perdre au sens qu ils s loignent de moi ou quelque chose comme a ou moi peur de mourir Q Non non R Non non je crois pas Certes on est une famille un petit peu d compos e enfin un petit peu Je pense que c est peut tre aussi tout a qui fait qu on est tr s tr s tr s unis tr s soud s tr s tr s proches quoi tr s tr s proche
46. te plus les plaisirs d une socialisation la m canique les bo tes de nuit qui pourtant avant l accident constituait son monde L tiquette de discr tion collectivement produite par le cercles des proches puis la distance physique et mentale entre Monsieur Martin et son milieu d appartenance peuvent tre analys es comme le r sultat coh rent de la co production d une interaction qui ne peut avoir lieu et contre laquelle les mots restent impuissants D s lors les comportements individuels les visites qui s estompent et les motions int rieures la g ne la culpabilit la honte ne trouvent pas leur source dans des psychologies individuelles mais dans la situation qui tel tout fait social contraignant s impose ses participants Et mais ce n est pas contradictoire mais compl mentaire Monsieur Martin trouvera hors de ces milieux des lieux o porter sa parole de militant du handicap dans ses actions de b n voles dans les liens avec ses pairs handicap s parapl giques comme lui dans son actuel m tier de porteur d informations aupr s de personnes handicap es dans sa participation ces sessions de formation au sein d une cole d infirmi res dans lesquelles il parle de sa situation sp cifique dans ses dialogues parfois critiques avec le monde m dical qui reste parfois peu sensible aux connaissances qu il peut apporter sur son propre cas dans l acceptation de se livrer au sociologu
47. 13 6 11 3 F De 12 500 moins de 15 000 F 92 8 1 2 4 1 4 2 5 G De 15 000 moins de 20 000 F 7 3 5 8 3 6 4 3 4 7 H De 20 000 moins de 30 000 F 4 8 6 5 3 0 2 4 4 1 I De 30 000 moins de 50 000 F 2 0 1 9 0 0 0 J De 50 000 F et plus 0 4 0 4 0 0 0 W Ne sait pas r pondre 1 9 1 4 0 9 2 3 0 X Refuse de r pondre 7 6 6 3 7 2 7 2 10 4 TOTAL 100 0 100 0 100 0 100 0 100 0 Source CREDOC enqu te emploi 2002 y Une certaine insatisfaction vis vis de l emploi actuel Environ 10 des personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle ont un emploi mais souhaitent en changer Cette proportion qui r v le une certaine insatisfaction vis vis de l emploi actuel est plus forte que pour les personnes malades 9 et que pour les personnes valides 8 La principale raison invoqu e est la crainte de perdre l emploi actuel 26 pour les personnes d clarant une limitation en quantit de travail 29 pour celles d clarant une limitation en termes de nature de travail Elle est galement la principale raison invoqu e par les personnes valides et malades En revanche seules 14 des personnes se sentant limit es en terme de mobilit entre le domicile et le travail voquent cette crainte Pour ces derni res la recherche d un autre emploi est le plus souvent 76 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 motiv e par le souhait de trouver un emploi plus adapt pour des raisons d
48. 1950 Essai sur le don Forme et Raison de l change dans les soci t s archa ques in Sociologie et Anthropologie Paris PUF pp 143 279 21 Marcel Mauss 1936 1950 Essai sur le don Forme et Raison de l change dans les soci t s archa ques in Sociologie et Anthropologie Paris PUF p 258 44 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 connaissances concernant la m decine le r le de m decin celui de patient etc ceci pendant sa socialisation primaire Tous les patients enqu t s avaient re u comme conviction de leurs parents et de leur milieu social environnant que la m decine allopathique pr valait sur toute autre m decine qu une certaine puissance du m decin existait que l hospitalisation dans les situations corporelles d licates s imposait etc Cependant presque aucun d entre eux n avait t hospitalis plus d une semaine et n avait donc eu l opportunit de mettre ses connaissances l preuve de la r alit Or le propre de ces connaissances tr s loign es de ce qui fait l ordinaire du monde de chaque individu est d tre tr s st r otyp Ainsi le bless ne mesure t il pas initialement toutes les implications d une hospitalisation de plusieurs mois pas plus que celles du r le de patient Sa vie quotidienne va tre boulevers e autant par le changement corporel que par l investiture dans un r le de patient comme nous allons le montre
49. 23 8 24 3 Dont changement de poste de travail 4 9 4 7 5 9 4 9 am nagement de poste 4 4 4 5 5 0 7 2 am nagement du temps de travail 7 4 9 0 7 8 11 0 assistance mobilit domicile travail 1 0 1 0 1 1 3 4 aide la mobilit au travail 0 4 0 5 0 5 1 2 soutien des coll gues et sup rieur 8 6 9 8 9 1 10 8 autre 2 7 2 6 3 1 2 8 Source CREDOC enqu te emploi 2002 En grande majorit les personnes malades qui travaillent ne b n ficient pas d emploi assist ou prot g 96 Seuls 1 d clarent occuper un emploi r serv dans la fonction publique 2 un emploi dans le milieu prot g et 1 un emploi en tant que travailleur handicap dans le milieu ordinaire Les personnes se sentent limit es dans le travail b n ficient plus souvent d un emploi assist ou prot g et ceci d autant plus lorsque cette incapacit s exprime en terme de nature du travail 9 ou de mobilit entre le domicile et le lieu de travail 11 L encore le fait d occuper un poste particulier doit contribuer au d veloppement d un sentiment d incapacit s chez la personne qui est sur un emploi aux appellations p joratives Les termes d emploi r serv et de milieu prot g font bien r f rence une certaine compassion les personnes handicap es font l objet d un traitement sp cial et particulier car le milieu ordinaire ne leur convient pas est inadapt ou qu elles ne sont pas en mesure de supporter ses exi
50. Directeur de recherche d partement Evaluation des politiques sociales du CREDOC Universit Pierre Mend s France Grenoble 2 Le pr sent cahier de recherche poursuit la r flexion initi e par un pr c dent dont l objet tait de d crire les grands cadres sociaux et institutionnels qui d terminent la repr sentation sociale du handicap A travers les grilles de la classification internationale du handicap des outils d valuation des m decins ou des professionnels de l assurance ou m me des repr sentations qui guident la perception du grand public ou des intervenants sociaux on a pu voir quels taient quelques uns des raisonnement implicites qui sous tendent l appr hension de cette cat gorie sociale Le projet de cette seconde approche consiste changer radicalement de point de vue et envisager son versant subjectif savoir comment est v cu construit accept ou rejet le handicap par ceux qui le vivent le plus directement L ambition de ces deux volumes est en effet de rendre compte d une interaction entre des individus plac s dans des situations qui sont toutes singuli res et des cadres collectifs qui les transcendent et en d terminent pourtant la signification concr te On peut tout d abord envisager cette interaction la mani re dont G Simmel d crit souvent la rencontre de la subjectivit avec le monde des formes objectives de la soci t moderne comme un conflit une lutte permanente de la
51. Enfin moi j estime que j ai absolument aucun compte rendre qui que se soit M S 36 ans sans emploi M me si des am nagements sont toujours possibles un centre de r ducation reste un centre de r ducation et la marge de man uvre du patient sur son environnement reste en cons quence minime Cet am nagement de l environnement est une source d enjeux et engendre des conflits Nombre de patients explosent de col re la vue d un objet qui a t oubli en haut des tag res le temps de faire la poussi re et parall lement des agents de service hospitaliers expriment leur m contentement face au d sordre qui r gne dans certaines chambres d sordre qui les emp che d effectuer leur travail correctement Il arrive aussi que certains patients refusent que l on passe la serpilli re sur le sol de leur chambre parce qu ils ne veulent pas s entendre dire qu ils pourraient attendre que cela s che avant de circuler nouveau le fauteuil laissant les empreintes des roues Le quotidien est ainsi rempli de ces changes risques autour de la gestion de l environnement L autonomie du patient est parfois gagn e au prix d une lutte contre la gestion hospitali re du territoire Donc deux hommes m ont install dans une chambre sur un lit qui tait un peu comme celui l d o je ne voyais pas trop par la fen tre ce qui se passait Et donc j tais accompagn par ma copine ma m re peut tre mon p
52. IMC M decin kin Non Nathalie 8 ans IMC Employ s Oui Pierre 9 ans IMC M decins Oui Sylvain 8 ans Autisme Ouvrier femme au foyer Non La situation des deux autistes que nous avons rencontr s est au moins aussi diverse alors que Sylvain participe certaines des activit s du groupe dans lequel il est ins r trois jours par semaine dans un IME Jonathan para t infiniment plus distant et ne prononce pas encore la moindre parole m me s il semble accepter la pr sence des autres dans son entourage Il faut incidemment noter que les entretiens ont t pr c d s par des rencontres avec les intervenants et les enfants dans diff rents tablissements de la r gion grenobloise et qu en outre on a particip plusieurs des r unions au cours desquelles se rencontrent les parents dans le cadre du fonctionnement de ces tablissements C est donc quelques unes de ces occasions que l on a pu rencontrer Jonathan et remarquer son trange quoique tranquille pr sence absente C est pourquoi la variable association recouvre t elle d ailleurs des situations assez h t rog nes si des parents sont en effet des militants au sein d une ou plusieurs des grandes associations d int r t national r gional ou local dans le champ du handicap APF AFIPAEIM d autres ne sont membres que de l association des parents propre un tablissement pr cis comme tous les enfants scolaris s
53. Par contre Antoine lui forc ment il est tr s fier de moi enfin il est tr s fier Par exemple il aime bien mettre en avant devant ses copains que je fais de la plong e ou des trucs un peu comme a qu on n imagine peut tre pas Je sais qu il aime bien leur dire quoi Il aime bien leur dire Maintenant lui il m a toujours vu en fauteuil Peut tre que a va se compliquer maintenant qu il a neuf ans Forc ment les choses changent un petit peu mais jusqu maintenant disons dans sa petite enfance le handicap n a jamais pos de limite v ritablement sur les activit s sur les sorties sur les trucs quoi M me tout b b je m occupais de lui des fois la nuit seul Donc lui il m a toujours vu fonctionner avec lui de fa on normale ordinaire Donc peut tre qu il ne sait pas comment un p re valide fonctionne avec son petit L je parle plus d un point de vue concret au quotidien Par contre maintenant il a neuf ans peut tre qu il y aura des activit s physiques des choses qui seront plus difficiles pour moi faire suivre etc Donc a ce sera effectivement voir Ce qui me surprend enfin me surprend c est que chaque fois qu Antoine fait quelque chose une sortie o un truc ou qu il fait un truc avec sa m re il a toujours un r flexe accessibilit C est dire il pense toujours si c est accessible ou pas c est dire regarder Tiens je suis all l tu sais on pourrait y aller c est ac
54. Tant qu il sera investi socialement du r le de patient hospitalis le bless ne pourra pr tendre recevoir l aide d une auxiliaire de vie Le patient se voit donc enferm dans un r le qui implique et l gitime aux yeux d autrui son inaction forc e dans la perspective d un prompt r tablissement Le patient a du temps 1 Jean Pierre Chevance 2002 Le handicap vivre le point de vue de la personne handicap e in D ficiences motrices et situations de handicaps Aspects sociaux psychologiques m dicaux techniques troubles associ s Paris APF pp 63 70 8 R le correspond un type d acteur typification appartenant un stock de connaissances objectiv et commun d une collectivit d acteurs Le r le implique une institutionnalisation des comportements ant rieures sa propre mergence Cf Peter Berger et Thomas Luckmann 1966 1996 La construction sociale de la r alit Paris Armand Colin pp 101 111 41 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 perdre ou disons mieux il doit se reposer pour r cup rer Il est d sinvesti de la majeure partie de son pouvoir d agir dans et sur le monde L encore le changement corporel implique l habituation par la modification in luctable du quotidien un nouveau rapport au temps ELABORATION D UN NOUVEAU RAPPORT AU TEMPS LE TEMPS DES AUTRES Le patient attend donc d autrui la possibilit d ag
55. Un v cu qui se passe de ces cadres n est proprement parler pas une exp rience puisqu elle ne peu d boucher sur une compr hension ni de soi ni de l autre Le handicap met au jour de plusieurs mani res le principe de cette exp rience n gative et son impossibilit L autisme par exemple en repr sente certainement la forme la plus extr me Mais qu il s agisse de parents d couvrant la d ficience de leur enfant ou bien d une personne tentant de surmonter l accident qui a profond ment bouleverser sa vie on peut rendre compte du travail qui est alors effectu pour transformer le non sens pr cis ment en une exp rience Or ce travail n est possible que par une n gociation entre sa propre subjectivit et les formes objectives de la repr sentation sociale du handicap Sous cet angle exp rimenter subjectivement le handicap c est participer sa construction sociale Le cahier de recherche comporte deux parties assez distinctes quand au regard qu elle permettent de porter sur l exp rience du handicap La premi re propose avec des m thodologies diff rentes plusieurs points de vue analytiques sur diff rents publics Les deux premi res contributions exposent les principes du m canisme selon lequel les parents d enfant handicap en premier lieu puis des personnes elles m mes handicap es en second lieu tentent d effectuer cette op ration de r paration symbolique et de n go
56. a des moments on est plusieurs dans la m me situation Je pense qu on serait isol ce serait plus difficile mais on est plusieurs dans la m me situation Donc du coup on se serre les coudes On se fout de la gueule les une des autres Du coup ben les choses passent quand m me plus sympathiquement quoi Alors bon pour revenir un peu sur le corps Q Vous avez appris faire beaucoup plus attention vous m me que vous ne le faisiez auparavant R Oui par la force des choses oui Moi je me suis plant j ai eu un accident j avais dix neuf ans Bon je vivais une vie un peu ordinaire J tais jeune adulte J avais le corps que j avais Je n avais aucun probl me de sant aucune pr occupation Enfin si j avais un petit bout de scoliose quand m me A une poque j avais fait un peu de kin mais c est pas un truc qui m avait affol Par contre apr s oui On est forc ment tr s attentif d abord parce qu on nous fait un peu flipper en r duc notamment sur les questions d escarre qui est quand m me l une des plaies majeures pour les traumatis s m dullaires ou les gens en fauteuil Quand on voit des gens par exemple en r duc on sait que a fait un an qu ils sont plat ventre ou couch s parce qu ils ont des escarres On se dit putain faut quand m me faire gaffe C est vrai que a craint Quand on voit que parce qu on va tre dans une mauvaise position pendant un petit moment ou le pied qui va toucher une partie
57. a fait vingt ans qu ils sont en fauteuil Ils sont toujours aussi hargneux c est dire une place qu est pas r serv e le mec il va griffer la voiture avec une clef C est vrai que des fois c est tentant Surtout quand a se cumule pendant deux trois jours Quand il y a plein de ces petites bricoles qui se cumulent c est vrai qu il y a des fois c est pouh Mais c est vrai que a aussi c est formateur Ca fait travailler la compr hension des autres Oui a fait travailler une certaine philosophie des choses de nos contemporains Moi je pense que je progresse dans ce sens l c est dire que je suis peut tre de plus en plus zen face ce genre de situations M me si certaines restent un petit peu comme a un petit peu difficiles quoi Mais c est rare Enfin moi je trouve presque plus agressif finalement le mec qui va tirer d un coup son gamin pour que je passe alors que je ne vais pas forc ment doubler d ailleurs Ca c est peut tre plus agressif que le mec qui va m envoyer chier parce que je lui fais remarquer que Alors autre truc qui va dans ce sens l Dans le comportement des gens par exemple un lieu type foule Q F te de la musique R F te de la musique alors a moi au centre ville je peux plus par exemple C est trop il y a trop de monde Et puis j ai plein d amis debout c est pareil ils ne peuvent plus non plus aller au centre ville Ou type foire d automne enfin ce genre de lieux Dans la foule c est d
58. agir sa place l am ne r aliser que toute intervention d une aide humaine ne sera jamais qu une approximation de sa volont Plusieurs facteurs interviennent pour parasiter une ex cution parfaite de ses volont s Tout d abord le langage quotidien ne contient pas assez de pr cisions en lui m me pour donner une id e tr s exacte du geste accomplir Le langage semble pr vu pour les situations o la personne est autonome corporellement Le patient s il souhaite plus de perfection dans le geste accompli est oblig de multiplier les d tails et les consignes Il prend alors le risque de se voir endosser le r le de patient p nible avec toutes ses cons quences dans la vie quotidienne Le patient n est pas le d tenteur de la norme des gestes accomplir par les aides soignants m me si ces gestes sont effectu s pour lui Ainsi il est amen renoncer tr s rapidement esp rer une certaine qualit des performances des aides soignants pour pouvoir escompter une qualit des soins et des relations au quotidien Mais d autres raisons expliquent cette inad quation entre la demande et le geste l aide soignant ne comprend pas toujours tr s bien le d sir du patient car soit il interpr te au plus vite pour pouvoir rapidement se consacrer un autre soin soit il prend c ur sa t che et apporte de lui m me des corrections qui lui semblent indispensables Le patient constate donc que l actualisation de ses v
59. agir travers une aide humaine Parce que comme l je sentais rien M me le dos je sentais rien Et je bougeais les bras difficilement J tais vraiment Ha ouais j avais plus de force Du tout Je ne pouvais m me pas tenir une bouteille d eau comme a et faire a Q Tu ne pouvais pas prendre la bouteille d eau ni l ouvrir 14 Jean Marc Botta 1996 Echanges mode d tre et r actions de la personne handicap e in Handicaps Handicap s un regard interrog Ch Gardou ss La dir Ramonville Ste Agne Er s p 232 5 Eve Gardien 2003 La n gociation des significations Le corps dans la relation patient soignant in Handicap revue de sciences humaines et sociales n 98 pp 1 19 16 Aide technique pour personne handicap e tout produit instrument quipement ou syst me technique utilis par une personne handicap e fabriqu sp cialement ou existant sur le march destin pr venir compenser soulager ou neutraliser la d ficience l incapacit ou le handicap D finition norme internationale ISO 9999 Pour ce qui concerne les questions de l adaptation de la personne aux aides techniques lire Pierre Brunelles 1994 Histoires d aides techniques in Handicap et Inadaptations n 62 pp 45 60 ou encore Myriam Winance 2000 De l ajustement entre les proth ses et les personnes interactions et transformations mutuelles in Handicap revue de sciences humaines et
60. aller au bout du truc au bout de la vie sous entendu et je vais essayer tant qu faire d y arriver assez clean Donc maintenant on assure Et en assez peu de temps enfin non en quelques ann es je suis pass d un extr me l autre enfin d un extr me l autre Je ne pense pas maintenant tre l autre extr me au sens de clean clean Mais j assure bien Donc je prends moi m me des rendez vous chez le n phrologue etc etc Donc a c est bien s r important Et quand j ai l occasion de rencontrer des jeunes paras dans une soir e ou chez des copains des trucs comme a je vais leur tenir un discours qui va peut tre les nerver si l occasion se pr sente videmment c est tu fais bien du standing et tu te mets bien debout r guli rement et tu mets bien tes godasses Je ne le dis pas comme a mais je vais dans ce sens l Et je pense que l en tant que vieux parapl gique je pense qu on peut transmettre a On peut inciter quelqu un ne pas faire les conneries qu on a pu faire Q Et on vous coute R Franchement je n en sais strictement rien Je dirais m me la limite je m en fous enfin je m en fous Je donne quelque chose et l autre il en fait ce qu il en veut Il y aurait plein de choses dire sur le m dical et tout a mais bon Q Quoi R Par exemple en g n ral l h pital c est plus simple avec les infirmi res qu avec les m decins par exemple Peut tre que
61. alors apr s quand il faut passer une marche quand il faut rentrer dans une bagnole a en remet une couche Et donc c est les premiers mois les premiers temps Et encore j ai conscience d tre parapl gique donc d tre relativement bas d un point de vue neurologique d tre assez costaud Effectivement cette p riode l que je d cris c est quoi Allez c est une ann e peu pr s Oui moi j ai fait neuf mois de r duc c est peu pr s une ann e Alors j ose m me pas penser aux t tras et autres Ca doit tre difficile Bon a je dirais en gros c est la partie de la mobilit Bien s r j ai pas voqu ce qui change mais a c est peut tre un autre sujet en m me temps le rapport avec son corps L il y aurait beaucoup beaucoup dire Effectivement c est le rapport avec son corps c est dire que en ce qui me concerne on perd le contr le des membres inf rieurs Membres inf rieurs que par ailleurs on ne sent plus plus ou moins a d pend des gens Donc a devient une charge Ces deux jambes qui ne servent rien deviennent quelque chose qui sert rien Et puis qui en plus nous emmerdent Parce 140 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 que quand on fait un transfert il faut les transporter il faut les prendre avec ses mains Donc c est une charge enfin c est une charge Oui c est un truc en plus Puis alors apr s dans certains cas il y a les probl mes les
62. appara t mais celui constitu aussi par une exp rience collective r fract e en lui dont il peut t moigner dont il peut se faire l cho m me s il ne la partage pas totalement Par exemple quand Monsieur Martin voque une rupture sentimentale li e sa situation de personne devenue handicap e il ajoute que d autres personnes dans sa situation ont v cu la m me exp rience Parce qu ils sont des r cits d exp rience soulign par l auteur NDA les r cits de vie portent une charge signifiante susceptible d int resser la fois les chercheurs et les simples lecteurs Parce que l exp rience est interaction entre le moi et le monde elle r v le la fois l un et l autre et l un par l autre travers les yeux du narrateur ce n est pas lui que nous voulons regarder mais le monde ou plus pr cis ment son monde soulign par l auteur NDA je n ai pas d autre ambition En cons quence via le r cit de vie ce n est pas la mythique et fausse transparence du r el qui serait approch e mais l id e que Monsieur Martin s en fait d s lors c est l exp rience du r el corporel par exemple en Monsieur Martin qui appara t dans ses propos Je parage cette id e que le r cit de vie fait souvent glisser vers l illusion du r el 4 n anmoins dans sa vie Monsieur Martin a rencontr du social organis sans lui et hors de lui l institution m dicale et ses lois par
63. arriver une ombre Donc moi j essaie d anticiper toujours un petit peu plus ou moins Et donc je me suis plus ou moins arr t pour laisser passer la personne Et la personne est rest e t tanis e elle ne savait plus quoi faire Elle s est trouv e devant un fauteuil ne savait plus quoi faire alors qu il y avait largement de la place Elle pouvait passer sur l herbe enfin bon Je compatis pour cette personne qui est rest e fig e comme a Mais a a renvoie apparemment la diff rence Encore que a moi je suis tr s tol rant l dessus J essaie d tre tol rant avec tout par rapport a Autre exemple l il y en aurait la pelle mais autre exemple Je me d place en fauteuil devant il y a par exemple un couple qui marche Par exemple un des deux du couple rep re que derri re il y a quelqu un en fauteuil qui voit qu on va doubler Alors combien de fois on voit le mec qui tire la nana d un coup sec par le bras pour faire le passage Et l autre elle sait pas ce qui se passe quoi Ca c est tr s chiant on a envie de dire mais t es con ou quoi Je vais pas te rentrer dedans il y a de la place pour passer C est ce genre de trucs qui est difficile Par exemple un gamin qui vient les petits sont tr s spontan s les enfants videmment qui vient ah j ai des trucs en couleurs quoi vient qui touche les roues comme a L souvent le parent arrive derri re est g n et je comprends Les parents sont l ah excusez
64. aux autres je pense qu il y a des diff rences au m me titre que le fait d tre un peu l aise comme a a veut dire qu on peut voyager plus facilement Voyager plus facilement enfin voyager a veut dire se confronter un petit peu des difficult s des choses du point de vue du handicap Donc du coup a permet de voir comment on fonctionne quelles sont nos limites Donc je trouve que c est important dans la r adaptation On peut dire a comme a quoi Puis il y a aussi l aspect mat riel qui permet d acheter facilement une voiture qui convient de prendre un appartement Ca aide vivre quoi par rapport ceux qui gal rent qui sont oblig s de passer en foyer qui sont oblig s d acheter une voiture compl tement pourrie qui est pas adapt e etc Je pense que oui a doit un petit peu all ger la situation Je sais pas si all ger est le terme le plus ad quat Je pense que oui d j l argent dans la vie a simplifie les choses Vu d un fauteuil roulant je pense que a simplifie encore plus facilement les choses quoi Q Si j ai compris vous avez eu votre accident dix neuf ans et votre premier contrat de travail dur e ind termin e il y a un an R Il y a un an A quarante ans Q Maintenant comment vous expliquez ce temps long pendant lequel vous avez t rentier Vous avez dit avoir t actif avec d autres mais pourquoi tout ce temps 109 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif
65. aux divers dysfonctionnements du corps maladies amputations paralysie douleurs etc tandis que l incapacit englobe toutes les difficult s ou limitations rencontr es dans la vie quotidienne pour faire certains gestes ou activit s r sultant des d ficiences En cela l incapacit renvoie souvent un degr de d ficiences relativement lev Les premi res exploitations de la DARES le confirment C est lorsque des limitations apparaissent ou que des probl mes de sant s accumulent que la situation de l emploi se d grade L incapacit est un stade o le probl me de sant a des r percussions dans la vie de l individu il sent qu il peut moins faire ou qu il ne peut plus tout faire Le probl me de sant devient un frein dans ses activit s N anmoins d ficience quivalente deux personnes ne vont pas avoir la m me perception de cette limitation Suite la d couverte d une allergie la farine un boulanger devra envisager de cesser son activit il ne peut plus faire le m me travail Selon son ge il choisira de se reconvertir ou de partir en pr retraite par exemple La m me d ficience ne posera aucun obstacle dans le travail d un informaticien Si le boulanger confront une difficult importante dans son travail est susceptible de Enqu te men e par des chercheurs de plusieurs organismes CREDES CTNERHI INED INSERM au nom du Minist re de l Emploi et de la Solida
66. avec moi Bien que b n vole Monsieur martin a toujours eu le sentiment de travailler car il tait actif et disposait d un revenu assur Mais sa carri re qu il place sous les auspices du hasard semble centr e sur le handicap dont il est un militant En effet c est sa premi re compagne travaillant comme aide soignante dans une importante association de personnes handicap es qui l engage prendre contact avec elle il y exercera pendant sept ann es Quelques ann es plus tard la d l gu e d partementale de la m me association qu il d signe comme une s ur le met en contact avec la directrice d un nouveau centre d partemental d information destin aux personnes handicap es il y est recrut L itin raire personnel et familial sentimental et professionnel de Monsieur Martin est balis par le handicap Il a su transformer en comp tence les hasards de l existence qui lui ont donn un p re parapl gique une parapl gie et des contacts dans le monde associatif de ce secteur dans lequel il est reconnu et appr ci v 2 1 2 Un corps nouveau Devenu parapl gique dix neuf ans Monsieur Martin h rite d un corps nouveau L tape de la r ducation le confronte la souffrance physique Q Qu est ce que vous pouvez nous dire de cette souffrance physique 111 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 R Je ne sais pas par exemple mon accident je condui
67. besoin d une aide la 60 B n ficiaires de PAAH 42 mobilit au travail pour avoir mobilit au travail pour avoir Probl mes de dos 41 un emploi un emploi Aurait besoin dun 40 D pression 63 Probl mes de dos 56 changement de poste pour Probl me de dos cou 60 Probl mes des membres inf 56 avoir un emploi Epilepsie 56 Troubles de la parole 55 D pression 40 B n ficie d un am nagement 55 Autre maladie volutive 54 Aurait besoin d un 39 de poste Artisan 52 am nagement de poste pour Probl mes des membres 55 d pression 52 avoir un emploi inf rieurs Difficult s visuelles 30 Est au ch mage 30 Est au ch mage 20 Handicap depuis 10 ans ou 29 Travaille temps plein 30 Handicap depuis 6 mois 1 9 cadre 29 A trouv un emploi qui 28 an Le Handicap depuis 5 10 ans 29 d bute plus tard N a pas demploi fin d emploi 9 sentiment Travaille temps plein 29 N a pas d emploi car fin 27 dur e limit e de Difficult s auditives 29 d emploi occasionnel N a pas demploi fin de stage 9 limita ion Est tudiant 28 cadre 27 Handicap depuis 2 3 ans 6 Est actif occup 28 N a pas demploi car n a 26 Handicap depuis 3 5 ans 6 est plus N a pas d emploi car n a 28 jamais travaill Handicap depuis 10 ans ou 6 faible jamais travaill 26 Cherche un emploi depuis 1 26 Handicap depuis 1 2 ans 5 t orient par la 2 ans Handicap depuis 5 10 ans 4 COTOREP vers le milieu 22
68. ce qui est le plus visible sa d marche et son aspect g n ral et le fait qu il ne prononce distinctement de rares mots Si tout se passe bien cependant c est parce que cette pr sentation impose un cadre de tact l euph misme partag qui pr serve chacun Les travailleurs sociaux qu on a interrog s sur ce sujet font souvent allusion un certain d ni de la r alit chez les parents mais l exemple qu on a rappel plus haut montre qu ils y participent galement En r alit le d ni n est pas seulement le fait des parents mais fait l objet d une convention d un accord tacite rendus particuli rement vidents dans les situations o il appara t que personne ne peut tre tout fait dupe L excuse Le proc d de modalisation pr c dent peut tre employ aussi bien pour viter un embarras que pour en r parer un Le second en revanche n intervient qu en amont titre pr ventif en quelque sorte et consiste pr senter des excuses pour la g ne que pourrait occasionn e par le handicap Il arrive en effet parfois que des parents ou d autres membres de leur entourage d ailleurs pr c dent toute question remarque ou malaise suppos s tout en relevant incidemment les leurs en prenant l initiative d informer le public pr sent du handicap de l enfant que celui ci soit ou non d celable Ceux qui ont un enfant dont la d marche est la plus malhabile disent le faire s
69. certaine aisance corporelle par exemple dans l usage du fauteuil ma trise qui peut lui procurer une harmonie r sultant du geste juste et adapt La mobilit en fauteuil une qualit de glisse peuvent tre sources de plaisir R J ai jamais t un adepte de la montagne mais le fait d tre parapl gique a m emb te de ne pas pouvoir aller la montagne Ca m emb te de ne pas pouvoir faire de v lo d aller courir en for t comme je le faisais avant des choses comme a Donc c est la perte de la mobilit de la motricit qui est emmerdante forc ment Je pense qu avec le temps Je me souviens le temps des premi res sorties de l h pital par exemple Voir les gens marcher dans la rue par exemple a faisait a faisait bizarre Comment dire que a faisait bizarre Je ne dis pas que c tait des extraterrestres C tait in vitablement se dire putain je ne pourrais plus le faire ou de voir quelqu un en v lo par exemple Je ne sais pas le sentiment de libert que repr sente ce mode de d placement ou en roller par exemple Ca fait un petit pincement pas un petit pincement Comment dire En m me temps moi quand je vois quelqu un en roller je suis content de voir quelqu un en roller parce que je me dit putain il doit bien s clater Par contre je ne me dis plus maintenant vingt deux ans apr s c est chiant tu ne vas plus le faire Je sens bien la libert que a repr sente le d placement se mouvoir
70. cifiquement li s au handicap Nonobstant ces r serves ces trois techniques de modalisations ont ceci de remarquable qu elles font appara tre de quelle mani re les parents d un enfant handicap n gocient avec les cadres sociaux qui d finissent la d ficience et les repr sentations sociales qui y sont attach es Or il appara t que le handicap est envisag dans le sens commun travers une opposition entre deux p les Pour certains en premier lieu le handicap est envisag comme la cons quence sociale que provoque la rupture introduite par l accident de la d ficience La personne handicap e appartient alors une autre monde que le n tre et il n y a gu re que notre motion qui puisse nous permettre de r duire l cart entre eux et nous Parmi les notions caract ristiques de cet univers de perception du handicap on a notamment trouv la piti et la charit Or c est bien ce type de sentiment ou tout le moins une certaine cl mence que fait implicitement appel celui qui fait semblant ou bien celui qui pr sente par avance des excuses L autre registre de significations du handicap l envisageait en revanche davantage comme une inadaptation de la soci t C est bien ce qui rend possible l gitime m me aujourd hui la modalisation de la revendication CONCLUSION Le cadrage de la d ficience dans l interaction est l op ration par laquelle el
71. copains paras c est le m me cas Mais par contre dans mes r ves il y a toujours un rappel du handicap Il y a toujours un rappel c est dire par exemple tr s souvent je me suis vu avec une b quille C est tr s souvent la b quille qui est l La b quille avec je ne sais pas moi un col du f mur cass par exemple qui me pose des probl mes de marche mais avec une marche quand m me Donc c est soit la b quille soit par exemple une poche urine donc quelque chose qui renvoi au handicap mais toujours la station verticale a c est s r et toujours effectivement un rappel du handicap Les premi res ann es les toutes premi res ann es mais a c est assez vite pass de r ver d avoir r cup r pas forc ment r v d avoir r cup r mais en tout cas de r ver d tre compl tement valide Pas un r ve o il y a eu un miracle qui fait qu il y a une r cup ration et du coup qu on est debout Non une esp ce de r ve que finalement c est pas arriv a c est dire l accident la parapl gie c est pas arriv Avec en plus la conscience pendant le r ve de se dire c est super demain matin je vais marcher Et conscience galement du plaisir que a repr sente l id e de je vais remarcher Sauf que le matin en levant les yeux on voit le fauteuil c t du lit ce qui n est pas Alors apr s je ne sais pas alors peut tre que j ai un esp ce de caract re mais ce qui n est pas un truc qui est finalement
72. d une autonomie relative conduite d une automobile par exemple Toutefois la d pendance ne cesse d tre pr sente l attention aux signes corporels teinte de la peau des jambes par exemple l in luctable assignation au fauteuil qui limite et interdit un type de mobilit la marche en montagne et modifie les formes des relations sociales pique nique en montagne Q Si vous deviez r fl chir sur ce que c est que la d pendance vous diriez quoi votre sujet R Il y a d j la d pendance un fauteuil roulant C est la premi re d pendance c est dire que je suis d pendant de mon fauteuil roulant Il p te je suis dans la merde ce qui s est produit par le pass parce que les fauteuils n taient pas aussi costauds qu ils le sont maintenant Donc il y a a Il y a d pendance sur de v ritables aides techniques Alors aides techniques c est pas vraiment des aides techniques C est des aides m dicales Je sais pas comment a s appelle d ailleurs Maintenant je pense aux questions sphinct riennes urinaires Une d pendance dans certains cas de P nilex par exemple des tuis p niens Donc a c est une d pendance Enfin a procure du confort mais c est une forme de d pendance Tant mieux pour l instant 125 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 en tout cas je ne suis pas d pendant physiquement des autres pour la vie quotidienne pour les actes essentiels de la vie quoti
73. d entendre le mec pisser en trente secondes et lui percuter sur le ventre et pousser donc cinq minutes Moi je n ai jamais eu j ai pas ces trucs l Ca ne me vient pas l esprit C est chacun son truc c est chacun son rythme C est comme a Le fait d tre tenu d avoir une organisation un peu autre donc effectivement prendre plus de temps a contribue aussi peut tre g rer diff remment sa vie A ne pas tre affol par le temps ne pas se stresser En tout cas moi j essaie de fonctionner comme a de me donner du temps pour justement ne pas tre confront un speed du stress Ce n est m me pas tellement de rater des trucs ou pas ce n est m me pas la question mais Donc a a des implications peut tre sur le quotidien C est difficile de l int rieur de le voir enfin de l affirmer en tout cas mais probablement qu il y a des r percussions sur son quotidien en tout cas sur son organisation quotidienne Mais par contre la notion de temps handicap de temps Ca ne me parle pas tellement a ne me parle pas tellement Q Est ce que vous diriez que le handicap vous fait perdre du temps R Est ce que le handicap me fait perdre du temps Des fois je trouve que je vis d j trop vite puis je me dis tranquille Donc je n ai pas le sentiment de courir apr s le temps Bon est ce que je perds du temps Non enfin en tout cas je ne me suis jamais dis Ah oui merde Le fait de m
74. de blinder compl tement le truc Je pense par exemple moi j ai t quelques fois comme d autres d ailleurs cobaye d l ves infirmi res de stagiaires infirmi res pour faire un 121 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 pansement ou pour faire un sondage Et la plupart du temps chez un parapl gique ce qui est mon cas on a des rections r flexe Il n y a pas tellement d rections psychog nes mais elles sont r flexes Quand il y a un contact en g n ral il y a rection Donc forc ment un sondage il y a une toilette il y a la b tadine enfin tout le truc Sauf que il y a une petite stagiaire qu est toute affol e toute flipp e toute inqui te qui passe un examen devant sa chef Et puis nous on est l on attend on est l Et puis au bout d un moment il y a une rection et c est d licat quoi Forc ment c est d licat Et donc moi je me souviens a m est arriv quelques fois a enfin a m est arriv deux fois Une fois je me souviens je bande pas Une autre fois j ai essay du mieux que j ai pu de mettre l aise la fille qui tait l Puisque je voyais que l infirmi re n avait pas l air de percuter de voir ce qui tait entrain de se produire vraiment Soit elle n tait pas attentive je sais pas soit elle voulait voir comment allait se comporter la fille Donc j ai aid la fille je lui ai dit tu vois peut tre que l faudrait attendre un petit peu attendre un petit moment pa
75. de leur situation En cons quence elles peuvent se comprendre comme pouvant intervenir aupr s de sp cialistes en exercice les m decins g n ralistes et en formation les coles d infirmi res Partag e par ses amis parapl giques la position de Monsieur Martin que l on pourrait qualifier de militant du handicap devient d s lors une position collective dont le fondement r side dans l atteinte subie En tant que groupe sp cifique ces militants portent leurs voix pour tre entendus y compris de leurs jeunes et nouveaux amis parapl giques peu au fait des contraintes li es leur atteinte R Tout l heure je disais qu en phase de r ducation c tait important de voir des anciens pour les voir voluer C tait important Donc apr s quand on prend un peu de bouteille un peu de pratique un peu d exp rience on peut transmettre des choses Alors soit dans notre cas c tait une simple observation visuelle d un mec qui monte dans sa voiture et qui redescend Mais a peut tre des relations un peu plus approfondies avec un change verbal de conseils de questions r ponses Alors est ce que c est vraiment 130 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 rapport au fait qu on est expert du truc Pas tellement Je crois que c est surtout par rapport aux m decins Je sais pas moi il y a deux ans je me suis p t le tibia par exemple Donc quand je suis all l h pital heureusement
76. depuis il m a toujours vu depuis il m a toujours vu Il sait tr s bien que je ne suis pas son p re biologique Ca l dessus on a toujours t tr s clairs et tr s nets Il conna t bien s r l existence de son p re biologique qu il a vu quelques rares reprises Moi en tout cas je suis l aise sur ce sujet l II n y a pas de souci l dessus Donc effectivement devenir p re biologique g niteur c est pour la plupart des paras t tras des traumatis s m dullaires Bon il y a vingt trente ans en arri re c tait difficilement concevable Il y avait assez peu de procr ation chez les traumatis s m dullaires videmment l volution de la m decine fait que maintenant il n y a pratiquement pas de limites M me s il n y a pas d jaculation ou de choses comme a il y a toujours des moyens enfin quatre vingt dix pour cent souvent souvent Beaucoup de jeunes couples o il y a un mec para ils ont des enfants maintenant Alors ce qui se passe c est que comme c est m dicalement assist implantation etc c est souvent des jumeaux voire des tripl s enfin c est souvent des grossesses multiples Je pense un mec t tra que je connais lui il a eu une petite fille apr s il a eu des jumelles Je pense un autre t tra des jumelles Souvent des grossesses multiples Bon l je n ai pas de pr cision comme a mais a ce n est pas le propre du handicap bien s r Par contre moi par rapport Antoine Avec
77. des parents interrog s dit avoir re u de l aide et tre accompagn e depuis la d couverte de la d ficience de leur enfant Les seuls parents pr sentant dans leur attitude certains des traits de la stupeur sont ceux de Jonathan Issus de milieux populaires donc ayant une certaine r ticence a priori consulter ou solliciter activement le milieu m dical et vivant en milieu rural c est dire dans un environnement assez pauvre en structure d accueil et d accompagnement ils se sont longtemps occup s seuls de leur fils M me r cemment l autisme de Jonathan connu ils n ont pu se r soudre le placer en internat loin de chez eux aussi ne fr quentait il que l h pital de jour le moins loign de chez lui quelques demies journ es par semaine Cela ne fait qu un an qu il a pu obtenir une place dans un IME une quinzaine de kilom tres de chez lui Ses parents vivent manifestement cette opportunit comme une v ritable lib ration avec un soulagement indescriptible Non d nu d amertume cependant car ils ont en m me temps pris conscience de l aide dont ils pensent maintenant qu ils auraient d b n ficier depuis le d but Ils ont donc travers les preuves que d crit C Gardou et leurs attitude et expression pendant l entretien et leurs interventions au cours d une r union de rentr e de l association des parents de l IME en gardent la trace Le p re surtout reste absolument silencieu
78. des uns des autres Tout en ayant une certaine d licatesse quand quelqu un souffre parce que a fait mal On va rigoler la premi re fois M me l on va rigoler la premi re fois mais on va rectifier le tir Mais le fait de vivre comme a quelque chose de difficile en commun a rapproche vachement les gens quoi Ca rapproche vachement les gens et du coup a fait tomber je pense plein de barri res sociales je sais pas de niveau intellectuel ou je sais pas quoi et du coup je sais pas j ai l impression que a simplifie les relations Je pense une nana qui en plus avait une esp ce de maladie Elle n tait pas traumatis e m dullaire Elle avait une maladie qui avec le recul devait tre une scl rose en plaques mais l poque elle ne le savait pas C tait tout frais Et elle elle tait prof c est dire enseignante Il y avait d autres gars il y avait un chef d entreprise Je n arrive plus trop me souvenir les profils Il y avait quelques trangers Moi je ne savais pas vraiment ce que faisaient les gens d ailleurs C est des fois apr s avec le recul C est peut tre aussi par rapport ce que j avais dans la t te un petit peu les couches sociales etc Et quand j entendais qu un tel il avait fait tel truc ou qu il tait ing nieur ou ci ou l Ah bon Alors que on avait 32 Robert Murphy Vivre corps perdu Terre Humaine 129 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octo
79. dit pour qualifier l tat g n ral de l enfant Et les parents se sont assez volontiers raccroch s des euph mismes comme retard de l veil retard d acquisition etc pour reculer le moment d admettre ce que maintenant ils parviennent tout de m me appeler un retard mental Les parents de Pierre IMC galement ont t dans une situation tr s comparable cette nuance pr s qu ils sont m decins bien que leur sp cialit soit loign e de la neurologie ils ont donc plus videmment particip l entretien de ce qui a posteriori s est bien r v l une illusion celle de voir son enfant se remettre tout fait de ses probl mes Cette situation est particuli rement int ressante dans la mesure o l attitude des m decins n est certes pas enti rement imputable quelque l chet mais au constat m dical tabli et prudent selon lequel il est parfois impossible chez certains enfants de pronostiquer l volution de leur affection ou de leur tat ceux ci tant en partie d termin s par les stimulations qu ils re oivent Cette incertitude m dicale autant que scientifique n est d ailleurs pas indiff rentes notre sujet Le cadrage dans ce cas est lent ou plut t le r sultat d une s rie d ajustements continus et progressifs Chacune de ces tapes n en constitue pas moins une r duction suppl mentaire dans le champ des possibles pour un enfant r duction qu
80. en fran ais des termes de formateur et formatrice expression qui par ailleurs est d usage courant en langage informatique Formateur trice nom et adjectif qui dans une premi re acception rarement utilis e donn e par le petit Robert signifie ce qui donne une forme qui impose un ordre 46 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 patients C est peine si le quart des patients se souvient partiellement de son contenu et peu pr s autant se rappelle en avoir pris connaissance en tout cas aucun ne le respecte dans son int gralit Q Et tu as lu les documents comme le r glement int rieur la charte du patient Oui Oui Ben il faut bien s occuper Il faut bien rire aussi rires Ha ben parce que j ai pass deux ans ici Moi j ai lu la charte du patient et j ai pass deux ans ici Heureusement qu on ne l a pas respect parce que sinon on se serait fait chier rires Attend Faut tre dans sa chambre 11 heures On croit r ver J ai trente six ans il faut que je sois dans ma chambre 11 heures Pourquoi Parce que je suis para Bon je comprend que je suis dans un tablissement public avec d autres personnes et qu il faut donc que je respecte le calme et le repos et les soins des autres personnes a il n y a absolument aucun probl me Mais que si j ai envie d tre dehors une heure du matin en train de bouquiner sous un lampadaire j ai absolument
81. essai de typologie avec une certaine prudence La premi re d un ordre tr s pratique porte consid rer que notre mat riau n est peut tre pas suffisant pour rendre compte de r elles strat gies d adaptation Comme le montre l exemple de E Goffman dans Asiles la description pertinente d une attitude ou d un comportement coh rents et organis s ne peut reposer que sur des observations plus longues que celles que nous avons effectu es Notre analyse quant elle s appuie essentiellement sur un discours On peut cependant remarquer que le contenu de nos entretiens tay par quelques observations permet d tablir quelques hypoth ses qui rejoignent assez logiquement d ailleurs les travaux de E Goffman Notons encore que rien dans la litt rature consult e n infirme toutefois ces hypoth ses Certes C Gardou propose t il d autres types d exp rience comme la r paration par un autre enfant Il nous semble cependant que ce type ne se situe par sur le m me plan que les autres dans la mesure o il ne dit rien de l attitude que les parents peuvent avoir par ailleurs avec leur enfant handicap et qui peut relever de chacun des quatre autres types Il voque galement la n gation ou la minimisation qui consistent ignorer ou diminuer l importance du handicap d un enfant mais ces deux cat gories d crivent moins une strat gie d adaptation qu un proc d de modalisation comme nous a
82. exemple avec lequel il a du composer discuter n gocier C est cette exp rience l unique du r el qui m int resse et non l id e que Monsieur Martin pourrait exprimer la r alit La recomposition du r el laquelle il doit sans doute se livrer mais en toute bonne foi et comme tout le monde en pareille situation fait elle aussi partie de l exp rience de la d ficience connue par lui Le discours biographique et son texte est relation chronologique des faits et description du milieu social du narrateur c est l explicitation de son processus de socialisation En choisissant de pr senter les propos d une seule personne Monsieur Martin devenu parapl gique je n ai pas bien s r l ambition de la moindre repr sentativit comparable celle procur e par l tude d un chantillon tir d une population m re et d ment constitu selon les normes statistiques en vigueur Je ne peux pas non plus me r clamer de l option de la saturation qui consiste apr s tude de nombreux cas proches d gager les lignes de forces d un mod le analytique Ces lignes de forces r sultant de l analyse de r cits de vie peuvent tre globalis es sous la notion de r currence savoir les permanences th matiques que l on retrouve dans les r cits de vie C est l un travail qui reste faire en multipliant les r cits de vie d autres personnes handicap es pour pr cis ment d gager
83. exhaustif Mais cette exposition succincte des transformations de la vie quotidienne du bless permet d j de prendre la mesure de l importance du changement en cours D autres facteurs viendront s ajouter et renforcer cette m tamorphose de la vie ce seront un logement adapter un quipement acheter une insertion professionnelle avec souvent une conversion la clef un statut de handicap d livr par la COTOREP un arr t maladie de plusieurs ann es des changements dans les relations familiales amoureuses ou amicales etc Cette m tamorphose peut tre v cue comme si radicale pour certains qu ils f teront dor navant leur anniversaire la date de leur accident D autres encore se souviennent de leur p riode de r ducation et de r adaptation comme d une renaissance L hospitalisation se r v le tre un formidable temps de socialisation secondaire o de nombreux apprentissages concernant le nouveau potentiel corporel vont tre acquis o une nouvelle compr hension de soi et des autres va se d velopper o un nouveau rapport au monde va tre bauch Lire ce sujet Robert Murphy 1990 Vivre corps perdu Paris Plon ou encore Patrick Segal 1977 L homme qui marchait dans sa t te Paris Flammarion 52 DU PROBLEME DE SANTE AU SENTIMENT DE LIMITATION DANS LA VIE PROFESSIONNELLE Anne Fronteau Loones Charg e d tudes et de recheche d partement Evaluation des Politique
84. explicative A partir du moment o elles b n ficient d une aide particuli re dans leur travail la personne d clare plus souvent tre limit e dans son travail Quand elles n ont pas d emploi celles qui d clarent le plus souvent tre limit es dans leur travail si elles en avaient un sont celles qui auraient besoin d une aide ou d une assistance particuli re La forme prise par cette assistance varie selon le type de limitation de mani re logique Pour les incapacit s en quantit de travail c est l am nagement du temps de travail qui augmente le plus la probabilit de d clarer ce type de limitation suivi du soutien et de la compr hension des coll gues et sup rieurs puis du changement de poste La probabilit de d clarer une incapacit en nature de travail 84 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 est d autant plus forte que la personne a b n fici d un changement de poste ou en souhaiterait un suivi de la majorit de toutes les formes que peuvent prendre cette assistance am nagement de poste soutien des coll gues et sup rieur am nagement du temps de travail autre forme Enfin la probabilit de d clarer une incapacit en d placements entre le domicile travail est d autant plus forte que la personne b n ficie ou souhaite une aide dans ces d placements mais aussi par le souhait d une aide sur le lieu de travail La seconde variable explicative est l
85. handicap apprend videment videment il n y a pas de hi rarchie dans ce que je dis mais videment a apprend la relativit des choses C est dire que du coup naturellement on relativise les choses C est toujours d licat de dire a parce qu on a l impression qu on dit des choses pour se rassurer Oui je veux dire il y a un niveau de priorit s dans la vie de choses qui sont vraiment importantes et d autres qui sont compl tement futiles Et puis entre les deux il y a un petit peu de tout Franchement moi je vois beaucoup de gens debout ou autres mais peu importe qui se noieraient dans un verre d eau qui sont compl tement largu s quand ils sont confront s une situation ou je sais pas quoi Ca a me fait de la peine Je me dis putain les pauvres Voil je me sens fort par rapport a c est dire fort Oui je me sens fort d une certaine fa on Q Est ce que vous voulez dire que c est une preuve qui vous a qualifi R Oui oui oui Je sais plus qui a dit a tout ce qui ne tue pas rend plus fort Mais oui c est exactement a Ce qui ne tue pas peut aussi fragiliser par certains c t s Mais oui je pense que a rend fort Ca peut rendre peut tre particuli rement plus humain d avoir c toy des gens dans des situations tr s extr mes du coup on d couvre le potentiel humain tant de son point de vue que du point de vue des autres On d couvre a Quand on vit quand on a une petite vie tr
86. ils leur accordent Ainsi les patients renversent leur statut d inf rieur en un pouvoir de coercition sur autrui qui s ex cute de bon gr UNE NOUVELLE VIE QUOTIDIENNE LE ROLE DE PATIENT Le changement corporel induit chez le bless le sentiment de ne plus comprendre son propre corps Le patient est au fait de sa propre ignorance et par cons quent s en remet au m decin expert des signes de l anormal corporel Il le m decin me dit alors a va Il te demande Mais Mais au d but toi tu n es pas vraiment au courant de ce qui de ce qui t arrive Et puis ben la limite c est eux qui qui peuvent t informer mieux que toi Enfin mieux que ton corps en tout cas Parce que toi ton corps tu ne le ressens plus Alors il peut t informer de rien du tout quoi sourire Vu qu ils ont l exp rience ouais mon avis c est c est eux d expliquer A la limite d essayer de r pondre des questions qu on ne pose m me pas M F 24 ans prof Interm diaire Or endosser le r le de patient implique bien videmment des pratiques soignants mais aussi la perte d une grande partie des pr rogatives qui lui tait attach de par son r le d adulte beaucoup de d cisions vont lui tre impos es sans que son avis ne soit consult et pris en compte Jusqu alors le patient avait l impression de contr ler sa vie quotidienne Le bless a assimil tout un stock de 20 Marcel Mauss 1936
87. isoler l explication d une variable la variable expliqu e Le principe consiste tudier l influence de diff rentes variables de nature quantitative ou qualitative sur un comportement tudier qui prend deux modalit s La m thode d termine partir d un individu de r f rence choisi arbitrairement l impact d une variation d une variable explicative les autres restant inchang es L individu de r f rence est fictif ses caract ristiques n influencent pas les r sultats obtenus Trois mod les ont t ici tudi s le fait de d clarer une limitation dans la quantit de travail pouvant tre r alis e ou pas celui de d clarer une limitation dans la nature de travail ou pas et enfin celui de d clarer une limitation dans les d placements entre le domicile et le travail ou pas L individu de r f rence est une femme inactive g e de 40 49 ans ayant des probl mes aux membres sup rieurs ne souhaitant pas d am nagement ou d aide pour avoir un emploi sans reconnaissance administrative ayant un handicap depuis 6 mois ou moins Les mod les test s montrent que la probabilit de d clarer une limitation dans la vie professionnelle est d autant plus forte si la personne b n ficie d une assistance ou d une adaptation du poste de travail pour les personnes en emploi ou qu elle en d clare le besoin pour travailler pour celles qui n ont pas d emploi C est la principale variable
88. jeux qui ne d rapent jamais ce qui ne manque pas en principe de faire l objet d un nouveau cadrage plus explicite pour 15 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 que le jeu puisse continuer Ou bien s arr te d finitivement Les plaisanteries ou situations artistiques comme le th tre auquel fait souvent allusion E Goffman sont d autres modalit s courantes o l op ration de cadrage est clairement identifiable ces exp riences ont m me pour objet explicite un jeu sur le cadre en m me temps qu elle y fait montre de la m me vuln rabilit L agencement dont parle E Goffman consiste donc en une r duction des possibles une d termination de la chose et son inscription durable dans un registre de signification Rien mieux que le handicap ne permet de saisir le co t que peut repr senter cette r duction pour le d ficient mais aussi pour ses proches Les m decins repoussent ainsi parfois longtemps le moment de prononcer le mot qui va transformer la perception que l on a de son enfant Il a par exemple fallu qu elle ait 7 ans pour que les parents de Aude entendent prononcer presque par inadvertance par un radiologue au cours d une consultation m dicale banale l expression d IMC Infirme Moteur et C r bral Auparavant bien que prise en charge tr s t t pour de nombreuses difficult s tant motrices qu intellectuelles aucun mot n a t
89. le Mais non au contraire faut le laisser faire c est naturel c est spontan II y a des fois des parents qui disent rien qui laissent leur gamin d couvrir Q Vous pr f rez quoi 166 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 R Je pr f re quand les gens ne disent rien laissent leur gamin venir bidouiller le fauteuil Moi je serais le premier les encourager Mais je comprends de toutes fa ons je comprends pourquoi les gens fonctionnent comme a Quand on arrive quelque part par exemple il y a une double porte la premi re porte est ouverte a passe largement Non il y a quelqu un de bien intentionn qui vient ouvrir l autre porte Alors que a passe largement Ca des fois c est un petit peu irritant C est un petit peu irritant alors si on est bien vir ce jour l pas de probl me a passe Par contre il y a des fois moi je suis plut t quelqu un d assez cool dans mon temp rament un peu comme a mais des fois il y a des changes de regards un peu J esp re qu ils comprennent un peu mon sentiment quand je les regarde Mais je ne dis jamais aux gens vous tes con o quoi Non non II y a des fois c est tentant Il y a des fois c est tr s tr s tentant de dire mais t es nul Pourquoi t as ouvert tu vois bien que a passe etc Ca c est chiant Q Comment on peut trouver la juste mesure R Je d sesp re moi par rapport a Tous ces comportements l ils
90. le sien le point de vue de l administration qui l enferme Cette derni re tactique si elle peut apporter les plus grandes gratifications peut galement co ter celui qui l adopte la d sapprobation de ses co reclus Cette typologie pourrait condition d en adapter les termes d crire galement les tactiques d adaptation des parents d un enfant handicap classiquement identifi es e Le repli sur soi a d j t observ propos du p re de Jonathan mais notre enqu te ne nous permet pas de dire s il se d sint resse autant qu il en a l air en public de son enfant et de son 4 x D LCL A La formulation retenu est celle qu emploi C Gardou dans l ouvrage cit en r f rence m me si lui m me s appuie sur de nombreux autres travaux 26 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 handicap On peut galement admettre que cette tactique d adaptation permet de rendre compte d une attitude voqu e par le p re d Aude Celui ci convient en effet qu il lui arrive parfois d viter de sortir avec sa fille se repliant avec elle dans le cocon familial pour viter les questions g nantes ou les commentaires d sobligeants des autres ou comme il le pr cise seulement leur regard e L intransigeance rejoint en partie la tactique de v rification d crite par C Gardou selon laquelle certains parents effectuent de fr quentes visites de
91. machins enfin bon 114 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Le fait que vos chemins se sont s par s m me si c est momentan ment vous avez mis en avant l explication de la g ne Quel effet a avait sur vous R Alors c est dire que a je l ai su apr s quoi A ce moment l j tais en r ducation je comprenais pourquoi mes potes ne venaient pas me voir parce que j tais loin Ils n avaient pas forc ment il n y en avait qu un qui avait une voiture donc et puis sans compter qu il y en a certains qui sont venus C tait la distance qui faisait que je me disais qu ils ne venaient pas C est seulement apr s coup que j ai su effectivement que a les g nait et comme je pense deux pr cis Pierre et Christian par exemple surtout Pierre d ailleurs Lui alors du coup apr s il se culpabilisait il s est culpabilis d avoir t peu pr sent pendant la phase hosto r duc et tout a Et du coup il avait un peu honte c est lui qui me l a dit de ce comportement de cette habitude cette poque et du coup il n osait plus prendre contact avec moi parce qu il se disait que peut tre je lui en voulais ou que je trouvais que c tait un salaud Ce qui n tait pas du tout le cas moi je m en foutais de tout a je m en foutais mais je ne cherchais pas forcement le contact Et c est vrai que l a c est un changement un changement de vie Enfin je pense que c est une question de
92. minuit ou le samedi et en horaires variables est aussi lev e que pour les personnes valides Malgr leur probl me de sant les conditions de travail sont identiques voire m me plus difficiles que les valides Les personnes d clarant une limitation en quantit ou en nature de travail sont aussi concern es que les personnes valides par le travail de nuit et du dimanche et par des horaires variables Les personnes se sentant limit es en terme de mobilit entre le domicile et le lieu de travail semblent un peu moins souvent concern es par le travail de nuit ou le dimanche et avoir un peu plus souvent des horaires r guliers Le seul cart notable dans les horaires concerne une plus grande part de temps partiels parmi les personnes malades et se sentant limit es dans leur vie professionnelle 18 des actifs occup s malades travaillent temps partiel mais la proportion de personnes subissant ce temps partiel est un peu plus lev e qu au sein des personnes valides 27 souhaitent travailler temps plein contre 25 et 8 travailler davantage sans atteindre un temps plein contre 7 De m me pour les personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle le temps partiel est plus fr quent un quart d entre elles sont concern es mais la part de personnes satisfaites par ce temps de travail est quivalente celles des personnes valides pour les incapacit s en nature elle est plus faible pour les incapacit
93. nous dire ce qui pour nous est en train de se passer 1991 p 54 4 1 MODALISATION ET ADAPTATION La modalisation d un v nement entretient un rapport assez troit avec la notion d adaptation encore qu elle s en distingue L adaptation est une notion qui rend compte d un comportement organis d un ajustement structurel qu une personne ou un groupe produit dans un environnement donn et qui recueille une sorte d acceptation au moins passive de la part de cet environnement Pour expliciter cette d finition on peut rappeler les diff rents types d adaptation que E Goffman d crit dans le milieu des institutions totales que sont les asiles les prisons etc 1968 p 98 et suivantes Sous une contrainte s v re les reclus peuvent adopter quatre types d attitudes qui peuvent leur procurer une certaine satisfaction encore que leur co t soit variable le repli sur soi est la tactique qui consiste ne se pr occuper de rien de ce qui se passe dans l environnement imm diat l intransigeance adopter une attitude d fi vis vis de l institution pour co teuse et risqu e que soit cette tactique elle peut conf rer un assez grand prestige celui qui l adopte y compris aupr s de ses gardiens l installation est ce par quoi un reclus tente de reconstituer les bribes d une existence normale dans l univers carc ral la conversion enfin d crit le point de vue du d tenu qui adopte comme
94. par David Le Breton 38 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Tu ne t tais pas pos cette question l cette poque Si mais quand on t annonce comme a froid Va falloir tre fort Tu ne remarcheras plus que tu n as m me pas un espoir Tu sais Tu te dis elles bougent pas mais bon C est parce que c est les m dicaments qui te chargent Parce que tu as perdu du poids Parce que tes muscles ont fondu Et tout Voil A cause de tes probl mes d escarres M G 24 ans sans emploi Jusqu alors le processus corporel du patient s tait toujours trouv en accord avec l ensemble des significations qui lui avaient t appos es lors de la socialisation primaire il ne posait pas question Il tait rempli de nombreuses significations cons quences de son impr gnation par une symbolique particuli re qui correspondaient et expliquaient la r alit du corps v cu L accident initie une rupture entre le corps bless et le r seau de significations socialement transmis Des sensations tranges ou alors un manque de sensations des dispositions corporelles qui ne font pas sens surviennent Le patient fait alors l exp rience d un corps priv d une partie de la symbolique efficiente qui lui tait associ e Si David Le Breton souligne l aspect d stabilisant du corps handicap pour autrui la dialectique fluide de la parole et du corps se c
95. parti sur au niveau physique 159 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Pour dire que R Oui Q Pour elles a ne posait pas de probl mes R Oui bon c tait peut tre un peu diff rent Alors moi avec le temps avec le temps avec l exp rience je me suis rendu compte vraiment sinc rement je me suis rendu compte que malgr les limitations physiques il tait possible d une part d avoir du plaisir d autre part d en donner Avoir du plaisir effectivement c est quand m me soumis conditions enfin en ce qui me concerne c est quand m me soumis conditions Et les conditions ce moment l elles seront sentimentales Je pense que je n ai pas de particularit Je pense que avec ou sans ces probl mes physiques c est un peu le m me cas enfin c est le cas pour beaucoup de monde m me si ce n est pas une condition d avoir des sentiments Par contre pour moi a l est Et je pense que a l est probablement par rapport au fait que je suis parapl gique Je pense que je serais debout les choses seraient forc ment diff rentes L je pensais tout l heure on a voqu une rencontre un soir comme a une esp ce de pulsion peut tre un acte imm diat ou assez rapide Ca c est exclu enfin maintenant c est plus ou moins exclu Je serais debout peut tre que a se produirait Ca on peut pas le dire enfin on ne peut pas le dire Peut tre on se pose
96. pense que c est me semble t il plus une question d tat d esprit qu une question de parapl gie 152 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Soucieux d autrui Monsieur Martin affine ses rythmes de vie r duisant sa vitesse il sait d finir l impulsion donner au fauteuil pour caler son rythme sur le pas de son interlocuteur Son volution personnelle li e sa sant une op ration de l paule comme date de conscientisation de ce processus diff rentes alertes li es son tat une phl bite l ont conduit n avoir plus envie d tre speed Il trouve normal face un obstacle infranchissable pour lui un escalier que ses amis le laissent seul pour en faire le tour l essentiel tant qu ensuite ils se rejoignent Il souligne aussi le fait que les personnes handicap es elles m mes doivent tre attentives autrui Q Est ce que vous avez un temps que l on pourrait dire sp cifique R Un temps sp cifique qui serait sp cifique la question de mon handicap Un temps sp cifique v ritablement je n ai pas l impression Mais par contre plusieurs petits temps je ne sais pas si a va r pondre votre question Mais en tout cas effectivement dans la mesure o physiquement d j on doit vraiment se prendre en charge donc il y a pas mal de choses faire Il y a un entretien disons du corps physique qui prend du temps des trucs tous b tes se laver les
97. personne en tout cas en phase de r duc aller chez la psy apr s quelques ann es apr s s rement que oui On fait au moins les d marches des tentatives en tout cas En se disant bon peut tre que a va m aider peut tre que a va m aider Mais sur le moment c est vrai que sur le moment enfin dans cette phase l je veux dire on a probablement d autres soucis Ce qu on veut c est s habiller tout seul c est se d merder en bagnole etc Ca je crois qu on n y pense pas franchement on n y pense pas Et puis il n y a pas non plus de choses dans l approche de la personne et dans la mise en place 132 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 d un programme de r duc de r adaptation Il n y a pas une strat gie on va dire qui nous pousse dans ce sens l faire un travail sur soi dans ce que j ai v cu en tout cas non C tait purement il faut des r sultats tout de suite tangibles qu on va voir qu on va pouvoir mesurer c est dire super en deux mois il a fait son transfert voiture etc etc Moi pourquoi pas je verrais bien sous un pr texte de sortir en week end que l tablissement ait par exemple une petite maison quelque part on s y trouve deux ou trois avec deux th rapeutes sous forme de jeu peut tre d engager quelque chose mais peut tre pas de fa on tr s clairement dite d ailleurs Je pense que peut tre a peut tre un piste une possibilit Ou al
98. personne parce qu il y a c est pas facile quand on a des relations des potes m me si on est jeune moi j avais dix huit dix neuf ans Puis apr s moi en fauteuil roulant puis avec toutes les complications toutes les options li es la parapl gie les probl mes urinaires etc enfin les options hein C est difficile d expliquer a surtout vingt ans par exemple des potes qu on met un p nilex avec une poche urine par exemple qu on risque de se pisser dessus que quand on voit une nana on ne bande pas forc ment tout de suite Bon c est difficile quoi c est difficile mais du coup c est difficile pour moi c est difficile Du coup l poque on pouvait les voir plus tard on ne va pas se confronter a tout de suite quand m me Je pense que a a explique en partie pourquoi moi j ai mis de la distance a c est s r Q Sur le moment vous avez senti le besoin de mettre cette distance a n est pas une rationalisation a posteriori R Senti le besoin Enfin a c est fait naturellement tout seul Ca c est fait tout seul Oui parce que la g ne la honte peut tre La honte c est peut tre un peu fort quand m me parce que ce n est pas une question de honte C est une question de g ne je pense Et puis c est aussi une question qu en m me temps enfin je ne sais pas hein je ne sais pas c est compliqu mais comment dire D j les gens nous voyant en fauteuil roulant par exemple se disaient oh la la quelle mis r
99. peu diff rent c est forc ment un peu diff rent L exp rience de Monsieur Martin mais il nous dit que c est la m me pour les parapl giques se caract rise par deux aspects principaux d abord la perte de sensibilit lui est intol rable il ne s y fait pas ensuite il a t surpris de constater que des plaisirs physiques nouveaux pouvaient exister Ses rections sans jaculation ne sont pas psychog nes mais sont r flexes et en passent par le toucher Son apprentissage s est fait en tablissement avec une infirmi re Bien que port par un amour r ciproque et contre son avis il n a pas souhait continuer sa relation avec Marianne la jeune fille qu il connaissait avant son accident C est fr quent dans les couples ou l un des conjoints devient parapl gique Mais sa vie en fauteuil a permis Monsieur Martin de d couvrir surtout l ge venant que les femmes continuaient tre sensibles ses charmes Certes il n a pas pu saisir toutes les opportunit s qui se pr sentaient lui mais quand il a pu avoir le temps d approfondir une relation il s est rendu compte que les femmes rencontr es n taient pas seulement demandeuses de ce qu il croyait tre une virilit purement sexuelle signifi e par la p n tration L amour r ciproque a t pour lui une solution une sexualit devenue non essentiellement m canique et g nitale Il a constat que les femmes pouvaient venir lui malgr
100. pieds etc Donc effectivement a prend du temps plus que si j tais sur mes deux pieds Donc c est effectivement un temps sp cifique en rapport au handicap En dehors de a il y a eu des petites p riodes mais tr s peu de temps sp cifiques mais qui taient r cemment enfin les dix derni res ann es qui m ont t impos es par des probl mes de sant donc hospitalisation op ration et r ducation Ca c tait il y a quatre ans et il y a neuf ans On pourrait consid rer que c est un temps sp cifique par rapport au handicap Sinon en dehors de ces moments l je ne vois pas ce que je pourrais consid rer comme tant du temps sp cifique Q Vous avez le sentiment que le temps dont vous disposez c est le m me que celui de toute personne ou pas Est ce que votre inscription dans le temps ventuellement vos projets est ce que votre temps est le m me que le notre R Il me semble que oui D j par exemple je n ai pas forc ment le sentiment que je vais avoir une esp rance de vie plus courte Ca pourrait influencer sur cette notion du temps et a pourrait en modifier l approche qu on en a Je pense que effectivement quelqu un qui a une maladie volutive par exemple avec peut tre la mort au bout forc ment le temps est diff rent L en ce qui me concerne j ai pas l impression qu effectivement mon esp rance de vie va tre plus courte par cons quent je me vois aller tr s tr s vieux enfin tr s vieux Au qu
101. plus d histoires Donc a c est un peu le d but Bien s r apr s la vie les exp riences font que on se red couvre Je ne sais pas quand on est avec une femme et qu on voit que n anmoins il y a une jouissance importante je pense que a remet les choses en place c est dire qu inconsciemment a Ca remet les choses en place a nous dit que ou a montre que la virilit elle a peut tre d autres formes Je ne sais m me pas ce que a veut dire virilit en fait enfin je vois bien peu pr s ce que a veut dire Q Ca a t un apprentissage difficile long R Oui Difficile Q En terme d image de repr sentation de soi R Oui Q Voir ce que l on peut tre R Oui je ne sais m me pas si c est un travail entre guillemets qui est termin Je ne sais pas si ce n est pas un peu tout au long de la vie que peut tre a se passe comme a C est dire qu il n y a pas eu tellement de rupture entre un contact avec les femmes avant l accident et apr s l accident Il n y a pas eu tellement de rupture Il y a toujours eu une esp ce de continuit contrairement je pense d autres personnes ou pendant des ann es il ne s est rien pass En ce qui me concerne il n y a pas eu vraiment de longue rupture Il y a toujours eu comme a dans mes diff rents parcours il y a toujours eu une relation il y a toujours eu quelque chose J essaie d tre pr cis par rapport cette histoire de
102. pour jouer l autre 1975 p 153 Un peu plus loin dans le m me ouvrage E Goffman ajoute m me plus explicitement encore que le 13 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 stigmatis et le normal sont inclus l un dans l autre idem p 158 C est l un des enseignements que E Goffman tire de sa rencontre avec T Parsons dont le travail a notamment consist tablir une synth se entre E Durkheim et S Freud et qui montre comment l instance de socialisation per ue comme une chose sui generis ne si ge pas dans autre lieu que l en soi individuel Le dialogue avec l alt rit que propose plut t qu elle ne l impose en principe la d ficience est donc aussi un monologue une tension m me entre un soi et un autre int rieurs Et la r solution de cette contradiction multiples facettes on entend par l le moyen de la rendre simplement supportable est en tout cas au principe de l institutionnalisation du handicap c est du moins l angle sous lequel nous allons le traiter ici Objectivement la r solution de cette contradiction prend la forme d une adaptation que l on voudrait ici appr hender moins en fonction du comportement formel des diff rents protagonistes de l interaction qu partir de l op ration mentale qui consiste donner du sens ce qui initialement et subjectivement n en a pas encore Pour reprendre encore un concept propos p
103. pour moins se disperser et mieux ma triser son temps Monsieur Martin veut plus mentalement se concentrer sur ses activit s Son handicap ne lui fait pas perdre du temps Pour Monsieur Martin en mati re de rythme et de temps la diff rence existant entre personnes valides et personnes handicap es est plus de degr que de nature 3 5 LES RAPPORTS A AUTRUI En centres de r ducation Monsieur Martin a c toy des personnes venant de diff rents horizons sociaux et g ographiques des cadres sup rieurs ing nieurs professeurs des africains Mais il y a avait une esp ce d atmosph re un peu particuli re il y avait un concentr d humanit qui tait l et donc ce niveau l je pense que j ai rencontr des gens que je n aurais pas rencontr ailleurs Mais l instar de beaucoup d entre nous mais pour lui de fa on sp cifique l aspect crucial de la vie de Monsieur Martin concerne le rapport l autre sexe Q Comment on existe en tant qu homme apr s l accident R Alors par quoi commencer par rapport a Vous savez qu videmment a c est l un des points probablement les plus d licats C est vrai que c est parmi l une des premi res questions qu on se pose tout de suite apr s l accident D j on constate qu on a des troubles sensitifs de sensibilit donc on se touche et on ne sent rien Ca c est quand m me tr s tr s surprenant Et puis apr s c est comment a va se pas
104. premi re contre les secondes pour continuit d tre La vie dit il se compose pourtant de plus en plus de ces contenus et de ces sollicitations impersonnels qui veulent refouler la coloration et le caract re incomparable de personnes sp cifiques or c est pr cis ment ainsi que pour sauvegarder cette dimension tr s personnelle il faut ext rioriser le plus de singularit et de diff rence il faut exag rer cette ext riorisation simplement pour se faire entendre m me de soi m me 1989 p 250 251 Mais dans le cas du handicap ce conflit prend une valeur paroxystique tant entendu qu il n est gu re dans une soci t comme la n tre d imposition plus grande faite par le collectif une personne que celle qui consiste ne le reconna tre qu partir de ce qui lui fait d faut On pourrait m me lever la notion de handicap sous cet angle au rang de paradigme pour saisir une partie du malaise prouv par tous ceux qui ont le sentiment d tre comme le sugg re opportun ment R Castel inutiles au monde Le pr c dent cahier de recherche consacr cette probl matique notamment gr ce la mise en perspective historique propos e par H J Stiker avait toutefois t aussi l occasion de montrer un certain nombre d volutions remarquables allant pr cis ment dans le sens d une meilleure prise en Pierre Le Qu au ss la dir La compr hension sociale du handicap Cahier de recherche
105. probl mes intellectuels ou psychologiques troubles du comportement d pression troubles du langage En revanche les probl mes de sant qui concernent des parties internes du corps cardiaques pulmonaires digestif sont aussi fr quents parmi les personnes ayant d clar une limitation dans le travail que parmi les personnes malades Les d ficiences visuelles sont m me moins souvent cit es parmi les personnes ayant d clar une incapacit que parmi les personnes malades La personne interrog e avait la possibilit de citer trois d ficiences permettant de cerner son handicap ou probl me de sant et donc le type d obstacles qu elle pouvait rencontrer dans sa vie professionnelle 60 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Ces constats rappellent deux pr c dentes tudes du CREDOC sur les leviers et les freins des employeurs l insertion professionnelle des personnes handicap es mais aussi les travaux r alis s sur les repr sentations du handicap Les entreprises interrog es soulignaient leur souhait d avoir un salari plus qu un salari handicap et donc que le handicap soit transparent La figure de l entreprise citoyenne est peu tenable dans le monde conomique actuel et faire ressortir des diff rences peut tre un facteur de moindre employabilit Ainsi certaines personnes charg es de l insertion professionnelle de travailleurs handicap s ne cachent pas qu e
106. provoqu des rencontres dans un certain nombre d tablissements En gros pour dire que des paras et autres d ailleurs et avec de l exp rience peuvent tre disposition des d butants des nouveaux pour transmettre l exp rience C est pas quelque chose qui d colle vraiment Dans l h pital de r duc o j tais avant il y a maintenant un gars qui faisait du b n volat dans un premier temps et qui a maintenant un poste un peu plus fixe Est ce qu il est pair mulateur officiellement Je ne pense pas Mais en tout cas c est un petit peu sa mission son r le Ce qui est important aussi c est avec les parents Mais je pense que ce truc se passe mieux quand c est informel parce que je me rends compte qu on n arrive pas le formaliser Enfin c est difficile formaliser Quand c est informel a passe Je pense que a passe beaucoup mieux Je pense par exemple j ai fait deux s jours dans le m me h pital Mon deuxi me s jour donc l j tais autonome j ai rencontr des parents qui venaient voir leur fils ou fille nouvellement bless e s rieusement videmment Et donc c tait important pour les parents de voir un un peu plus vieux comme nous de voir un autre un peu plus vieux pour pouvoir se projeter un petit peu pour pouvoir imaginer l avenir de leur fils Donc a oui Et puis galement j ai fait quelques interventions assez r guli rement d ailleurs au niveau des coles d infirmi res par exemple Mais l e
107. qu on d couvre au fil du temps Et c est vrai que l dessus a casse la baraque d entr e quoi Et il n y a pas en ce qui me concerne il n y a pas jaculation il peut y avoir jaculation avec tout une batterie de enfin sous contr le m dical on va dire Je donne un peu en vrac peut tre je sais pas Disons dans les difficult s dans les trucs comme a ce qui est difficile c est d expliquer quand on fait une rencontre Alors c est vrai que quand c tait au tout d but infirmi res tout a c est tr s rassurant On sait que la personne qui est avec nous elle conna t nos probl mes elle sait ce qu il en est donc du coup les choses sont peu pr s spontan es et peu pr s naturelles Par contre quand c est une rencontre d une inconnue l a se complique et l a bloque quoi parce que il va falloir que je lui explique que je bande mal etc etc etc Et l c est difficile surtout quand il peut y avoir des rencontres o il y a un d sir soudain enfin soudain que l acte peut tre imminent L c est difficile parce que du coup a annule un peu ce genre d histoires peut tre de relations Ce qui est frustrant forc ment Ca c est un truc moi qui m a souvent pos probl me avec l ge nettement moins mais au d part a pose probl me Je pense que je l avais dit d j une fois l poque o je me suis plant j avais une petite amie avec qui j tais depuis deux ans Q Marianne R Marianne oui On
108. que des bonnes mes aient pu lui en mentionner l ventualit Malgr des d sagr ments corporels dus l usure luxation chronique de l paule l ge le sport il a fait du basket Handisport il s merveille du potentiel humain Pour qui a d cid de vivre et d assumer sa situation la gestion du quotidien contraint trouver des solutions comme l am nagement minimum de l appartement et une gestuelle adapt e ou l usage d une voiture porte coulissante permettant le transfert fauteuil voiture Et quand les proches restent toujours surpris de ses capacit s il r pond que le temps lui a permis de s adapter Cette relation souple et non conflictuelle l environnement pourtant contraignant se signifie clairement dans son acceptation de nouvelles techniques si son tat le n cessite par exemple l ventuel usage d un fauteuil lectrique ou l achat d une voiture accessible par la porte arri re et permettant l acc s en fauteuil au poste de pilotage Au fond Monsieur Martin fataliste combatif constate qu il ne peut faire autrement que d accepter son sort aussi injuste soit il La lente incorporation que le hasard de la vie lui a impos e est ce point int gr e que son pass de valide dont il se souvient pourtant tr s bien et qui lui fait parfois se demander ce qu il ferait s il tait toujours debout lui appara t comme loign de lui m me tel point qu il ne sait plus si c
109. que je savais tr s bien ce qu il me fallait pas Notamment par exemple les matelas de l h pital G n ralement il y a une super housse en plastique dessus Enfin a a peut tre dangereux Donc j ai demand ce que a change Parce que si j avais laiss faire la prise en charge n aurait pas t terrible enfin n aurait pas t ad quate Parce que eux eux ils ont focalis sur la fracture du tibia peut tre en oubliant le c t parapl gie avec les contraintes li es la parapl gie qui finalement ne sont pas si normes que a Et par contre l des fois a se passe mal au niveau m dical Ca se passe mal parce que un certain nombre de m decins aiment pas bien qu on leur dise moi je sais pour moi c est comme a Ca a t d licat d ailleurs avec le m decin quand je me suis p t le tibia Je pense que je l ai d rang dans sa pratique Enfin oui je pense que je l ai d rang dans sa pratique ou je l ai interpell Parce que je sais pas je le sentais mal l aise devant moi Q Est ce que par exemple on vous a sollicit pour faire des interventions aupr s de jeunes parapl giques ou est ce que vous vous tes propos R Alors on a avec un ami parapl gique qui est pr sident d une association Cet ami a un peu rapport des Etats Unis un concept le pear consulting donc qui a t traduit en fran ais pas la pair mulation mais qui a du mal d coller effectivement Mais on a
110. quoi elle m crivait elle me t l phonait Je l ai vue apr s par contre on s est revu quelques ann es apr s C tait cinq six ans apr s Q Elle a refait sa vie R Oui oui oui elle a un copain et on s est revu je crois son initiative Parce que je crois que c est elle qui avait je sais plus par quel biais elle avait eu mes coordonn es Je sais plus comment a s tait pass Et on s tait retrouv s on avait provoqu un rendez vous On avait encore des choses se dire quoi C est vrai que je pense encore ce moment l on avait encore des sentiments l un pour l autre c est s r Mais par contre finalement j tais content du choix que j avais fait Enfin elle me parlait de la vie avec son ami mais j tais content pour elle quoi Parce que na vement b tement je m tais dit je me disais en tout cas que avec un parapl gique la vie doit pas tre terrible Surtout quand on a dix sept dix huit ans Ceci dit c tait quand m me tr s ambigu apr s quand on s est revus quand m me Q Et est ce que vous avez pens un instant que ce choix pouvait ne pas lui aller Peut tre apr s vous m me vous avez peut tre eu des regrets R J ai pas eu de regrets mais j avais conscience effectivement de lui imposer quelque chose a c est s r Et donc du coup de la rendre malheureuse J allais dire j avais l impression de le faire pour son bien c est un peu con dire mais je pense que c tait aussi pour me p
111. riel ou concret enfin je veux dire du quotidien Non je ne vois pas je ne vois pas ce que vous mettez derri re rythme en fait Q Quand vous cheminez quand vous tes dans la rue quand vous faites vos courses quand vous devait penser l organisation avec autrui de s quences successives votre rythme propre qu est ce qu il implique Qu est ce qu il cr e Est ce que vous avez un rythme qui vous est propre R Alors vous voulez dire par l un rythme de d placement 150 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Une description dans le r el R Je pense qu on a chacun son rythme de vie Actuellement je vis seul m me si j ai Antoine les fins de semaine en garde altern e En vivant seul on peut avoir un rythme perso enfin perso on n est pas soumis un rythme familial ou m me de couple de concubinage etc Oui j ai mon rythme personnel j ai mon rythme C est un peu ce que je vous disais un peu avant c est dire que ce rythme je l affine c est dire que j ai envie de vivre un rythme plus d tendu plus cool plus calme Donc premi re chose Le rythme au sens du d placement g n ralement en moyenne en fauteuil on va plus vite donc c est nous de se mettre Moi quand je me d place avec quelqu un par exemple je pense que naturellement ce n est pas instinctif mais naturellement je me mets au rythme de la personne La personne ne peut pas se mettre mon rythme sauf
112. rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 pieds surtout qu l origine on est des bip des donc on est pas pr vus pour vivre assis Donc c est toujours difficile d essayer de dire au gens que les choses du quotidien que vues de l ext rieur elles paraissent difficiles faire longues etc C est difficile d expliquer aux gens que finalement non quoi C est le quotidien Certaines choses prennent un petit peu plus de temps d autres ventuellement un petit peu moins Et le temps fait que ces choses l on les int gre Q Qu est ce que a serait une adaptation positive dans la vie quotidienne et puis un adaptation plus difficile r aliser Les activit s qui repr sentent aujourd hui des difficult s la cuisine R Il ny en a pas tant que a partir du moment o on volue dans un univers adapt Alors la cuisine puisque vous prenez cet exemple J allais presque dire mauvais exemple enfin bon et mauvais exemple J ai un B E P de cuisinier donc la cuisine d j j avais le feeling et je l ai toujours un peu plus ou moins quoi Je pense tre peu pr s plein de bon sens petite modestie donc je suis plut t organis pour faire de la bouffe J ai une cuisine qui est peu pr s quip e adapt e mais qui n est pas au top de l adaptation telle qu elle pourrait tre con ue par un ergoth rapeute Si alors des moments j ai une casserole de cinq litres d eau bouillante transporter c est plus diffi
113. sentir plus proche de l essentiel tre en fauteuil et Monsieur Martin l a r p t c est ne pas tre la m me hauteur que les valides Ce positionnement potentiellement inf riorisant est pourtant pour lui plus source de rapprochement que d loignement Q Est ce que vous avez remarqu que votre situation est un facteur de rapprochement d loignement de s paration ou pas R Je pense que c est plus un facteur de rapprochement que d loignement Je pense que a d pend de nous aussi bien videmment Ca d pend de nous Mais je pense que a pr te plus facilement au contact Alorsil y a contact et contact Parce que tout l heure quand on a commenc j ai parl de la mobilit Donc de ce qui change dans la vie il y a le rapport au corps Enfin il y a plein de choses qui changent mais le rapport au corps la mobilit Et je voulais un petit peu parler du contact avec l autre de la difficult de la relation avec l autre etc Donc c est sur que l c est un petit peu plus difficile mais oui je pense que a facilite C est pas dissuasif en tout cas Les gens sont curieux On nous aime bien Alors je sais pas quoi trouver comme exemple Je sais pas rester quelque part un moment ou dans les transports en commun par exemple ou dans des lieux comme a Pour un peu qu on soit ouvert je pense que a peut faciliter les relations les rapports avec les autres Par exemple une fois c est un petit d tail comme
114. siduelles les horaires eux sont en fonction du planning du personnel etc Cet agencement des t ches am ne le patient int grer ce qu il nomme le rituel du matin r veil petit d jeuner excr tion douche habillage Son corps de patient est normalis aux exigences du service Ces rythmes sont maintenus dans le temps en grande partie par le personnel qui am nage ainsi son temps de travail le personnel soignant tant par ailleurs lui m me soumis d autres contraintes institutionnelles Mais tout ceci ne se passe pas sans heurt car pour certains il est plus facile d excr ter midi ou le soir et d autres refusent d tre r veill s avant 10 heures du matin quand leurs activit s de r ducation ne d butent qu en d but d apr s midi etc Tr s r guli rement des conflits clatent ce sujet Et les soignants constatent avec amertume que les patients ont un champ de vision r duit leur seule chambre et qu ils ne tiennent compte ni des autres patients ni des contraintes du personnel A contrario les patients sont quant eux persuad s que leur individualit n est pas prise en compte LA PERTE DU CONTROLE DE SON PLANNING Le patient est donc amen changer r guli rement de planning pour des raisons d adaptation la charge de travail des soignants Ses horaires de s ances kin sith rapie ou ergoth rapie sont facilement modifi s lorsque le soignant jusqu alors attitr part soit en vac
115. sont naturels Ils sont spontan s chez les gens Les gens ils r agissent comme ils peuvent et avec ce qu ils sont Moi je comprends que quand je prends un chemin et puis que du coup quelqu un tombe nez nez avec moi a puisse t taniser C est normal C est normal Alors videmment des fois a peut tre dur pour nous Ca c est imparable Je pense que c est imparable Alors ce qui peut se passer je pense que c est l int gration je dirais au fil des g n rations peut tre qui fait que les gens vont c toyer d j l cole les gens en fauteuil etc etc Donc progressivement a va s int grer Les gens vont int grer Mais en m me temps a fait des millions d ann es qu il y a des gens de couleurs diff rentes il y a toujours des racistes Donc je sais pas comment a va le faire Alors que Monsieur Martin s merveille de la candeur enfantine vis vis du fauteuil il est encore heurt par le comportement de personnes lui signifiant qu il d range l ordre de l interaction A tel point du reste c est l exemple du refus de rentrer dans un restaurant car il sait qu il va se faire remarquer ce qu il ne veut pas il passe alors son chemin Il n aime pas se trouver dans la situation o par exc s de z le c est le cas de la porte ostensiblement tenue par une belle me nous lui rappelons sa situation ces gestes qui soulignent inutilement son tat il pr f re la spontan it y compris critiq
116. tait tout jeunes Je pense qu on s aimait beaucoup enfin on s aimait beaucoup Quand je me suis plant elle est venue me voir l h pital Autant je n avais pas trop de difficult avoir une relation avec cette infirmi re par exemple l je n tais pas particuli rement amoureux d ailleurs autant je n avais pas trop de difficult avec elle autant avec Marianne c tait diff rent C est qu il y avait avant et puis ensuite il y avait apr s Et du coup moi j ai rompu Je pense pour deux raisons c est dire peut tre pour ne pas me confronter cette r alit et aussi peut tre pour ne pas lui imposer mon histoire 156 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 ce qui venait d arriver Elle avait dix sept ans Du coup j ai mis un terme notre relation Je ne suis pas le seul fonctionner comme a beaucoup ont fait a Je pense que c est probablement pour ces deux raisons l ne pas se confronter cette r alit c est dire apr s on est en terrain connu enfin connu fa on de parler C est pas tellement la question de comment on va faire apr s mais a sera moins bien a sera moins bon elle sera d ue etc etc Donc a je pense que a fait un peu peur Et puis il y a le fait aussi je pense sinc rement de ne pas imposer l autre ce qui nous arrive Tu n as pas choisi ce qui m est arriv M me si semble t il m me si on tait quand m me jeunes particuli rement elle pa
117. toujours crade Ca prend souvent la poussi re dessous tout a Il y en a qui l ont toujours crade Moi maintenant je deviens quand m me tr s clean avec le temps force de dire ces trucs l pour la sant C est bien Louis c est bien Mais je ne l entretiens pas propre parce que c est mon fauteuil roulant c est avant tout pour le public et l c est par rapport au boulot Mais aussi pour moi c est dire que quand par exemple je suis sur mon canap que je vois mon fauteuil propre je suis content C est con hein Mais je suis content J esp re que je ne vais pas devenir trop maniaque non plus quand m me mais bon donc a s entretient effectivement Ca s entretient mat riellement pour ne pas qu il p te Parce qu effectivement d un moment l autre un petit truc fait que le fauteuil peut casser un axe une soudure bon on ne sait pas bon quand m me maintenant c est moins fr quent de descendre les escaliers mais a m est arriv par le pass d ailleurs j ai descendu une marche et boum le fauteuil il me p te sous le cul Du coup on se sent quand m me vachement pr caire On se sent tr s fragile parce que on est assis par terre et que l c est vous pouvez me porter s il vous pla t Ca fait cul de jatte quoi a fait cul de jatte Donc c est important d avoir un fauteuil en tat de l entretenir effectivement c est quelque chose de pr cieux Mais il n y a aucun sentiment Moi j ai fait partir mon fauteuil a
118. tous plus ou moins sortis flirt avec soit une infirmi re soit une aide soignante rarement avec les autres pensionnaires donc malades handicap es Ca s est produit mais a c est plut t rare Et donc a voil donc en ce qui me concerne cette r ducation entre guillemets a d marr l h pital avec une infirmi re J avais dix neuf vingt ans M me en tant valide je ne sais pas le niveau de performance de chacun ce moment l mais je pense qu dix neuf vingt ans on n est pas des plus exp riment Bon ce qui tait parfaitement mon cas Ca fait peur pour tre clair a fait flipper parce que qu est ce qu elle va penser D abord on pense finalement l autre avant de penser ses propres soucis Puis on se rend compte que l autre il n en pense rien il s en fout enfin visiblement il s en fout Donc a commence l hosto enfin pour moi a a commenc un petit peu l h pital L a rassure sur la capacit de s duction Ca rassure parce qu on se dit tiens finalement je suis peut tre dans cet tat mais les femmes me trouvent toujours s duisant sont int ress es enfin tout a c est une lutte ou elles sont acharn es je ne sais pas Tout en ayant quand m me conscience alors a c est apr s coup que je dis a maintenant tout en ayant quand m me conscience que pour certains cas il y a peut tre une part de curiosit de voyeurisme Je sais qu
119. truc C est que la vie elle est puissante c est dire qu elle l emporte toujours Je ne sais pas comment dire Le fait d tre en vie c est quelque chose de magique Et je ne parle pas parce que j ai surv cu des choses parce que j ai r ellement surv cu des accidents de la vie justement Non c est que la vie c est ph nom nal quoi Donc il ne faut pas passer c t il faut essayer en tout cas de ne pas passer c t Mais en m me temps a c est facile dire en m me temps c est un peu bateau mais c est r el enfin c est r el C est effectivement quelque chose qui percute Q Venant de vous a ne l est pas banal R Enfin quand je dis c est banal effectivement Je comprends ce que vous voulez dire C est banal parce que beaucoup de gens handicap s ou des gens qui se sont sortis de maladie ont tendance dire la m me chose Donc je r p te un petit peu la conclusion laquelle plus ou moins les gens ayant surv cu quelque chose en arrivent Q Vos amis handicap s disent a R Oui oui II me semble que oui tout fait Alors a ne veut pas dire que c est g nial la vie qu on s clate Bien s r il ne faut pas qu il y ait de malentendu l dessus Mais je ne sais pas la lumi re je ne sais pas la lumi re les couleurs de voir des petits tres humains de voir des vieux tres humains Je ne sais pas le cycle de la vie la v g tation la nature oui c est riche 177 L exp r
120. 02 Une m me personne peut cumuler plusieurs limitations ou incapacit s 1 5 million de personnes ont d clar tre limit es dans les trois types d incapacit Un peu moins de 5 millions ont d clar avoir au moins un type d incapacit parmi les trois Parmi les incapacit s deux sont particuli rement li es en nature du travail et en quantit de travail Dans 8 cas sur 10 lorsqu une personne se sent limit e dans la nature du travail qu elle peut r aliser elle se sent galement limit e dans la quantit du travail En revanche l incapacit de mobilit est beaucoup plus restrictive dans 4 cas sur 10 une incapacit en nature ou en quantit se couple avec une incapacit en d placement Figure 1 le recoupement des trois types de limitations Limitation en quantit 3 9 Mio 5 3 Mio Limitation en nature Coi Con Coi 3 2 Mio 0 7 Mio 0 9 Mio 4 3 Mio Limitation en d placements oui un oi Xren oui ou Xoon l 5Mio 17Mio 0 1 Mio 0 5Mio GjiMio 0 8Mio 0 1Mio 4 2 Mio 0 4 Source CREDOC enqu te emploi 2002 57 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 LE ROLE DES CARACTERISTIQUES PROPRES DE LA PERSONNE DANS L EMERGENCE DU SENTIMENT DE LIMITATION DANS LE TRAVAIL Parmi les caract ristiques propres la personne trois seront principalement tudi es l ge le sexe et le type de probl me de sant qui sera lui m me appr hend sous
121. 97 Le musulman est r ellement celui qui a vu la M duse et s en trouve p trifi Ces hommes ajoute encore P L vi sont en voie de d sint gration Ceux l ne valent m me pas la peine qu on leur adresse la parole puisqu on sait d avance qu ils commenceraient se plaindre idem p 95 On sait que c est ceux que pensait tout d abord B Bettelheim le survivant de Buchenwald en observant les autistes et en formulant sa th orie de la situation extr me Cette double r f rence au musulman et l autiste fournit le mod le pour comprendre l abattement dans lequel peuvent se trouver plonger les parents du fait de l accompagnement sans tr ve de leur enfant handicap Or un tel reintement du psychisme et de la sant physique rel ve de trois causes essentielles d apr s C Gardou qui risque la m me double comparaison d abord l absence de possibilit de d tente compte tenu des imp ratifs m dicaux de la responsabilit ininterrompue de soins quotidiens et l exigence de suivi ducatif de l enfant ensuite le sentiment d impuissance face son devenir et le d sespoir li l insignifiance de ses progr s enfin la carence ou l absence d aide de l entourage et plus globalement de la soci t Gardou 1996 p 22 Au cours de notre enqu te nous n avons rencontr personne pr sentant le tableau complet de ces manifestations peut tre parce que la quasi totalit
122. B atrice Coroller Condamn e vivre Albin Michel 1988 4 Yves Lacroix Presque debout 1998 Marcel Nus A contr courant 1999 5 Fran ois Dolsky Comme un pinguoin sur la banquise Balland 1990 Bruno de Stabenrath Cavalcade Robert Laffont 2001 16 Alain Blanc Le t moignage des personnes handicap es une tranget difficilement socialisable in Dire l exclusion sous la direction de Fr d ric de Rivoyre Er s 1990 94 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Si l on accepte l id e que le monde social puisse tre pr sent comme une mosa que et c tait selon Howard S Becker l appr hension qu en avait ses ma tres de l Ecole de Chicago il est alors coh rent d en affiner notre compr hension par touches successives c est dire et notamment par l addition de t moignages biographiques pi ce apr s pi ce le puzzle se constitue A nsi d une part la science sociale montre aux gens les modes de vie de fractions de la soci t avec lesquelles ils n auraient jamais eu de contacts autrement La biographie en tant qu histoire de la personne par elle m me est un message vivant et chaleureux nous racontant ce que nous n avons jamais r ellement rencontr d autre part elle peut tre particuli rement utile pour clairer le c t subjectif de processus institutionnels qui ont fait l objet de nombreuses tudes et de beaucoup d hypoth ses no
123. Ceci dit je trouve que c est quelque chose que dans certains cas on a en fauteuil Bizarrement dans certaines configurations de cheminements avec une petite l g re pente mais tr s tr s l g re qu on voit peine il y a des Ca peut para tre un peu bizarre mais dans certains cas ouais il y a un plaisir Il peut y avoir un plaisir du d placement en fauteuil Dans certaines situations particuli res parfois il y a des rev tements de sol qui sont tr s agr ables Et du coup il y a une esp ce de fluidit du d placement et puis il y a un contact qui n est pas direct puisque c est les pneus et la gomme qui touchent le sol Il y a une esp ce de qualit de glisse qui moi m a surpris tre agr able C est pas le quotidien De temps en temps j ai pu sentir les choses comme a ou comme d ailleurs m me certains types de mouvements faire avec le fauteuil comme a o les choses les gestes s encha nent bien Ca m est arriv que a me surprenne d y prendre plaisir Je m loigne du truc mais Q Pas du tout On peut peut tre continuer une seconde l dessus Il y a un plaisir corporel 144 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 R Oui oui Alors sil est corporel Oui on ne peut pas le dissocier de l espace de toutes fa ons Oui il est corporel Enfin il est plus c r bral que corporel C est pas un ressenti au niveau du corps c est une Je sais pas C est une sensation une impre
124. L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 r fl chir de m diter tout a Et j ai vu que le rythme que la vie que j avais je n en voulais plus enfin je n en voulais plus sous cette forme l Donc l il y a eu une premi re tape j ai chang de boulot ce moment l J ai chang d activit parce que je voulais tendre quelque chose de plus cool Et plus a va plus a va dans ce sens l Par exemple la phl bite que j ai eu au mois de juillet je me dis que je ne l ai pas eu comme a cette phl bite Effectivement il y a eut r ellement des caillots sanguins a aurait pu d ailleurs avoir de f cheuses cons quences mais elles n est pas arriv e comme a n importe quel moment cette phl bite Parce que a priori je n ai aucune raison d en avoir une Je n ai pas eu d alitement rien Et c est peut tre un peu bizarre comme id e mais j ai envie de me dire que c est comme une forme de petit rappel Je pense que si on est attentif aux choses de la vie beaucoup de choses nous indiquent peut tre des directions peut tre une fa on de faire mais sauf qu on n est pas attentif a ces v nements l Moi j essaie d tre je pense que ce n est pas anodin sensible et r ceptif ces choses l Et donc effectivement par exemple la phl bite que j ai eu c est une esp ce de petite piq re de rappel sur un rythme de vie peut tre pas exclusivement sur un rythme de vie C est vrai qu
125. Le r le du monde professionnel dans l mergence du sentiment de limitation dans le travail sera appr hend pour les personnes qui sont en emploi par les postes qu elles occupent le salaire les horaires et les am nagements propos s et par les difficult s d acc s rencontr es par les personnes en recherche d emploi y Une population moins souvent en emploi Alors que pr s des deux tiers des personnes valides sont en emploi seules 55 des malades le sont 38 de celles d clarant une limitation en quantit ou en nature de travail et 26 une limitation dans leurs d placements entre le domicile et le lieu de travail Ce moindre acc s l emploi ne se traduit quasiment pas par du ch mage mais par l inactivit En effet alors que 9 des valides sont inactifs 23 des malades le sont 40 des personnes d clarant une limitation en quantit de travail 38 en nature de travail et 53 en d placement entre le domicile et le lieu de travail Les personnes souffrant d un probl me de sant et encore plus celles d clarant une incapacit sont dans une position de retrait de la sph re professionnelle Tableau 8 R partition des diff rentes populations tudi es par situation professionnelle En valide malade Limitation Limitation Limitation de quantit de nature de mobilit actif occup 64 2 55 1 37 9 37 8 26 0 ch meur PSERE 5 2 6 3 6 6 7 9 5 8 autre ch meur PSERE 0 7 0 7 0 6 0 6 0 4
126. Les crises d pilepsie que connaissent nombre des enfants ayant des troubles neurologiques parmi ceux que nous avons rencontr s ont le m me impact sur leur environnement familial 4 2 VARIATIONS MODALES La modalisation n implique pas quelque attitude plus ou moins ancr e dans une histoire de vie particuli re Il s agit d un proc d employ pour pr senter le sens que l on compte accorder une chose tant entendu que cette inscription de la signification d une chose dans un cadre implique l adh sion un certain code social Chaque cadre d finissant la signification d une chose comporte en effet n cessairement ses r gles tout comme un jeu comporte les siennes Mieux de l inscription d une chose dans un certain cadre d coule un certain nombre d actions pilot es qui en d coulent et s encha nent naturellement C est pourquoi en principe la modalisation pr c de t elle la tactique 28 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 d adaptation L adoption d un syst me r current de cadrage apportant en effet au fil des interactions suffisamment de gratification celui qui en use il peut parvenir se convaincre de l int r t qu il repr sente A la limite dans cette hypoth se la modalisation d une chose si elle est toujours la m me peut tre un indicateur du type d ajustement que l on op re son gard Mais stricto sensu puisque no
127. R Alors je ne sais pas si j avais pr cis ou pas dans les pr c dents entretiens que je n tais pas que je ne suis pas le g niteur d Antoine C est une histoire qui serait surtout tr s longue raconter Mais pour faire tr s court disons Antoine est donc le fils de mon ex donc la femme avec qui j ai v cu six sept ans Moi l poque d ailleurs a a t une des raisons de la rupture je n arrivais pas m engager lui faire un enfant Bien que j avais commenc faire des tests etc pour voir Parce que effectivement techniquement pour faire un enfant c est m dicalement assist Forc ment a change le truc Mais n anmoins j tais un peu jeune je n arrivais pas m engager quoi Elle avait ce d sir de maternit donc elle m a vir quoi pour tre clair Mais bon on est toujours rest s tr s proches fr re et s ur enfin c est une situation un petit peu particuli re Elle a eu Antoine qu elle a fait avec son premier amour tout en sachant que a priori Antoine n aurait pas de p re puisque le g niteur lui n tait pas vraiment OK Mais comme en ce temps l dans cette p riode l on tait quand m me toujours plus ou moins ensemble c tait une situation un peu particuli re Quand je vois d autres couples je me dis que ce n est finalement pas si particulier que a mais bon Donc du coup j ai vu grossir son ventre pendant sa grossesse J ai vu Antoine il avait vingt quatre heures Et
128. a possession d une reconnaissance administrative de son handicap ou probl me de sant reconnaissance COTOREP b n ficiaire d une pension d invalidit titulaire d une rente d accident du travail ou de maladie professionnelle On retrouve le r le de la soci t et du statut qu elle d livre dans le sentiment de limitation dans le travail Le fait d avoir un titre de reconnaissance selon lequel la capacit de travail de la personne est amoindrie m me si ce n est de mani re partielle et temporaire influe sur la perception que la personne a de ses capacit s La troisi me variable est la d ficience Les probl mes augmentant la probabilit de d clarer une limitation dans le travail sont les maladies volutives cancers sida scl roses en plaques l pilepsie les probl mes de dos les membres inf rieurs et les d pressions Cette probabilit sera en revanche faible pour les personnes d clarant des difficult s visuelles ou auditives A contrario le fait d tre dans l emploi de s en sentir proche ou de ne pas se sentir concern par l acc s l emploi diminue fortement la probabilit de d clarer une incapacit dans le travail Il en est ainsi des personnes actives occup es qui n ont jamais travaill des retrait s et des tudiants mais aussi des ch meurs De m me le fait de travailler temps plein diminue la probabilit de d clarer une limitation en quantit ou en nature de trava
129. a situation de d pendance et de l endossement du r le de patient vont tre tout particuli rement approfondies L ENQUETE DE TERRAIN Une ann e enti re a t consacr e un travail d enqu te de terrain dans un Centre de R ducation et de R adaptation Fonctionnelles avec la collaboration des soignants et des patients Cet tablissement ne re oit pas que des patients bless s m dullaire seuls deux services leur sont consacr s soit un total de 32 lits D autres services prennent en charge d autres types de pathologie Nous avons choisi de ne retenir pour cette tude que les patients dont l tiologie de la l sion impliquait une rupture brutale et non pr visible de la socialisation corporelle c est dire les traumatismes m caniques ou circulatoires d origine accidentelle ou cons cutifs une tentative de suicide soit 43 patients hospitalis s durant cette ann e Les l sions m dullaires d origine virale n ont pas t s lectionn es Seul un patient a refus son accord pour des observations de terrain m me s il a tenu exprimer plusieurs reprises son v cu de mani re informelle Par contre plusieurs patients n ont pas t interview s par choix du chercheur pour trois d entre eux qui taient trop proches de leur accident de leur fait pour trois qui ont refus La population de bless s m dullaires ayant particip l enqu te se compose donc de 42 observ s dont 36 ont t int
130. age collectif octobre 2003 n ayant plus d interactions qui les constituent L int riorisation ant rieure de ces r les leur permet n anmoins de subsister tr s fortement pour le patient en effet il s attend pouvoir r endosser ses r les en l tat d s sa sortie du centre sanitaire Mais pendant le temps d hospitalisation il aura jou durablement et bien malgr lui le r le de patient aux yeux de ses proches et il aura acquis de cette sorte de nouveaux attributs C est ainsi que tous les r les qui constituaient sa routine ant rieure son self sont tr s nettement r duits dans leur actualisation et perdent par l m me leur force d impr gnation et de constitution au quotidien du self Les anciens attributs deviennent moins assur s et ce d autant plus que de nouveaux attributs mergent des interactions pr sentes Non seulement son r le de patient occupe tout son temps mais il lui fait progressivement d couvrir d autres aspects de lui m me d autres attributs ou encore provoque une alt ration de ses attributs pr c dents Le patient change pour lui m me et pour ses proches ELABORATION D UN NOUVEAU RAPPORT A L ACTION DANS LE MONDE L autonomie dans l action est troitement li e avec le pouvoir de d cision En effet d s que le patient laisse autrui agir sa place il voit toujours sa d cision partiellement modifi e dans sa r alisation ceci quelles qu en soient les raisons Faire
131. ais l autre soir mon fr re et ma belle s ur la maison Donc on a mang tout a ils ont dormi l Et puis le lendemain matin moi j emmenais Antoine l cole ma belle s ur faisait la vaisselle du soir Elle l a essuy e elle l a rang e Mais elle n a pas du tout pens que j tais assis parce qu elle a rang sur les tag res du haut Alors que a fait quinze ans que je la connais enfin dix ans pourtant c est la famille c est quelqu un de tr s proche quelqu un des plus sensibilis es la question Et du coup elle n a pas du tout percut Et je me suis fait la r flexion merde No mie quand j ai vu le truc l bas en haut je me suis dit merde No mie Et puis du coup je me suis dit est ce que c est parce que elle elle fait un m tre soixante dix Est ce que c est un geste automatique qu elle a fait Et puis je me suis dit peut tre qu ils me voient tellement autonome tellement d merde que d une certaine fa on ils finissent par l oublier par oublier certaines difficult s Alors que je vois mon fr re quand il a fait sa maison par exemple il n a pas oubli que j tais en fauteuil videmment Et a des fois je trouve que c est un peu troublant Je vois par exemple la femme de m nage alors je m loigne s rement de la question mais la femme de m nage Mounia Ca fait maintenant six ou huit mois qu elle travaille chez moi Des fois je me demande si elle a vu que j tais en faute
132. ait longuement plut t que beaucoup en quantit d ouvrages Il lisait longuement mon avis je pense que c tait d lib r il devait le savourer Il devait le savourer le d guster Alors qu il tait plus actif durant les premi res ann es suivant la parapl gie la fin je pense qu il tait fatigu de vivre tout simplement Mais il n a pas eu tellement de cons quences Des probl mes d escarre au d but qui l ont beaucoup emmerd parce qu il est quand m me rest je crois deux ann es plat ventre pour des probl mes d escarres Il n a pas eu de gros soucis moi j en ai d j eu quinze fois plus que ce qu il a pu avoir Notamment des fractures des probl mes de phl bite Sur la fin il tait moins actif Deux accidents c r braux vasculaires ne lui ont pas laiss de s quelles il a vite r cup r Mais l ge passant il avait des chutes de tension Quatre jours apr s un nouvel accident vasculaire c r bral il est d c d Les amis de la famille sont ceux du p re m cano garagiste transporteur garagiste Apr s son accident le p re a continu de recevoir la visite de coll gues de travail par l interm diaire desquels il se renseignait sur la vie de l usine les hommes et les nouvelles machines Il ne se plaignait pas d tre abandonn Q Vous ne l avez jamais entendu voquer ou se plaindre entre guillemets d tre abandonn ou que les copains R
133. ale des signifiants en lien avec l action collective et une foule de menus d tails qui une fois assimil s par le patient sombrent dans l oubli Les interviews d gagent les repr sentations les valeurs et les compr hensions un moment donn de la trajectoire pour chacun des acteurs RUPTURE AVEC LES SIGNIFICATIONS USUELLES DU CORPS La trajectoire classique des patients bless s m dullaires apr s leur accident d bute par un ou plusieurs actes chirurgicaux suivis pour la majorit d entre eux d un s jour dans un service de r animation ou de soins intensifs avec quelquefois un d tour par un service de neurologie ou d une tout autre sp cialit selon les estimations des priorit s Ensuite ils sont rapidement orient s vers un centre de r ducation et de r adaptation fonctionnelles A leur arriv e dans le service les bless s ne comprennent pas leur tat corporel pour ce qu il est r ellement ils ne lui attribuent qu une 4 Trajectoire fait r f rence non seulement au d veloppement physiologique de la maladie mais galement toute l organisation du travail d ploy e suivre ce cours ainsi qu au retentissement que ce travail et son organisation ne manque pas d avoir sur ceux qui s y trouvent impliqu s Pour chaque maladie diff rente sa trajectoire imposera des actes m dicaux et infirmiers diff rents diff rents types de comp tences et autres savoir faire une r partition
134. ales en m me temps que leur proximit diff rente au milieux m dicaux ne sont videmment pas trang res la diff rence de leurs attentes 3 2 FONCTION SOCIALE DE L EMBARRAS Que cela soit par un d tachement trop grand ou bien a contrario par un engagement excessif puisque E Goffman a bien montr que toute interaction r ussie se maintient dans un subtil quilibre toujours instable entre ces deux p les l embarras provoqu par l expression de l moi d une personne dans un collectif est de plusieurs fa ons extr mement r v lateur 23 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Il traduit en premier lieu un malaise ou une souffrance qui r side dans la difficult sortir d une stupeur initiale L embarras pour celui qui le provoque comme pour ceux qui le subissent est de ce point de vue la cons quence sociale ordinaire et imm diate de l exp rience n gative qui exige une r paration au cours de laquelle chacun doit trouver une forme de satisfaction Il s agit donc de sauver l ordre de l interaction le maintien des conventions normatives en d autres termes tout en gratifiant suffisamment le maladroit pour qu il ne perde pas la face On doit alors pr ciser que bien entendu ces observations que nous avons faites n ont pas eu lieu dans le cadre de groupes de parole th rapeutiques mais dans celui de r unions ayant un objet li
135. an it qu on ne peut pas toujours avoir C est imparable quoi je ne pense pas qu il y ai de traitement enfin de traitement c est dire de th rapie par exemple qui puisse r gler cette question puisque de toute fa on c est physique c est m canique c est l Voil a sera toujours comme a Donc ce qui est important c est effectivement c est la rencontre C est je crois que c est l amour qui est important Moi je pr f re ne pas avoir d histoire plut t que l amour ou d avoir une histoire merdique histoire de je sais pas faire comme tout le monde 160 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Est ce que l image que vous aviez de votre virilit a chang R Je ne sais pas probablement Je ne sais pas quelle image j avais de moi par rapport ma virilit par rapport tout a Bon j avais dix neuf ans je n avais pas non plus une vie sexuelle depuis dix ans quand je me suis plant J avais m me d ailleurs une vie sexuelle assez r cente une ann e et demie peu pr s une petite ann e Je ne me suis jamais pos de question en tout cas ce moment l apr s l accident par rapport cet aspect L c est plut t comment je vais faire etc Enfin si en fait on vit les choses mais moi je n ai pas analys ces points l C est effectivement c est je suis un mec diminu oui je suis un mec diminu et donc je n aurais plus d aventures je n aurais
136. ances soit en formation ou encore quand l addition de plusieurs arr ts maladie simultan s modifient l organisation d un service pour permettre une prise en charge minimale de la totalit des patients Les ergoth rapeutes donnent des rendez vous au fur et mesure de l valuation des besoins du patient ce qui implique des horaires variant parfois d un jour l autre et le plus souvent d une semaine l autre Bien que ce rendez vous soit not par crit un certain nombre de patients n arrivent pas le retenir d autres le manquent volontairement En fait il a chang quand ma kin donc M est partie en c tait en vacances en fait au d but Elle est partie quinze jours en vacances donc moi apr s les horaires j avais les horaires des trous des autres kin s Et puis bon a correspondait un peu il y avait toujours des d calages C tait soit un peu plus t t le matin soit un peu plus tard a d pendait M F 24 ans prof Interm diaire 49 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 LA PERTE DU CONTROLE DE LA MISE EN SCENE DE SA VIE QUOTIDIENNE Pas plus qu il ne ma trise son environnement mat riel et technique ou son planning le patient n a pas le contr le sur la mise en sc ne de sa vie quotidienne Il perd par l m me certaines possibilit s de contr ler les impressions que se font les autres interactants son gard Erving Goffman a montr l imp
137. and h pital de la r gion affirme que c est le cas de son fils Si la m re de Jeanne s est remari e depuis et a manifestement trouv un soutien efficace aupr s de son nouveau compagnon celle d Aline reste seule avec sa propre m re Ses interventions dans les diff rentes r unions o il nous a t donn de la rencontrer provoquent souvent comme celles de la m re de Jonathan d ailleurs une certaine g ne qui se manifeste par le silence tr s palpable qui les succ de en g n ral Jusqu ce qu un intervenant se d voue pour la recadrer d licatement Il est vraisemblable compte tenu du r cit qu elle nous a fait des difficult s qu elle a rencontr es qu elle pr sente des troubles psychologiques mais sans entrer dans une hasardeuse tentative de diagnostic il est en revanche patent que son mode d expression traduit une r elle difficult de cadrage des situations et une nette absence de ma trise de son motivit Le ton qu elle emploie traduit ce que E Goffman appellerait un engagement excessif Alors que le groupe des parents par exemple s attache voquer collectivement un probl me li au fonctionnement de l institution o est prise en charge sa fille sur un mode assez g n ral elle intervient pour livrer un ressenti tout fait personnel qui perturbe le cours normal des changes Il faut qu un professionnel de l tablissement prenne alors la parole pour reformuler c
138. anquille je sais pas si on a l occasion tellement d appr hender de sentir d entrapercevoir ces choses l Q Ce serait une occasion de richesse R Oui oui C est vrai que c est toujours difficile de le dire parce que on dit oui les handicap s ils disent que Oui c est vrai des fois j ai tendance dire mais un petit peu comme a c est pas tout fait concret mais je sais pas apr s l accident le fait de se retrouver vivant c est pas tout fait pareil Je sais 173 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 pas le bleu du ciel il n est plus tout fait pareil La lumi re est plus tout fait la m me Et elle est plut t dans le sens qu elle est beaucoup plus forte Je sais pas beaucoup plus vive Je sais pas quoi c est d Je pense que c est une red couverte des choses C est vrai que c est un discours un peu classique que les gens peuvent avoir C est vrai que moi au d part j tais un petit peu sceptique sur ces propos l Il y a plein de gens qui disent Je me disais oui c est pour se rassurer pour faire le malin Et avec le temps honn tement je pense que c est pas une l gende c est pas un leurre C est difficile de faire la part des choses c est dire je serais debout maintenant quarante ans est ce que j aurais pas sous certains aspects sur certains points le m me discours Est ce que c est parce que je suis parapl gique que je dis a Donc a c
139. ans Je ne m amusais pas c tait pas prendre le fauteuil pour s amuser comme le fait Antoine depuis qu il est tout petit Et a je m en souviens tr s tr s clairement en fait quand je prenais le fauteuil de mon p re c tait pour m impr gner de sa r alit Je m en souviens tr s clairement parce que je simulais les choses enfin je simulais les choses c est dire que je simulais par exemple enfin je simulais je ne simulais pas Par exemple j essayais de prendre un verre dans le placard pour voir ce que a donnait la r alit de mon p re Et je me rendais compte que c tait difficile Je me rendais compte que a devait tre gal re pour lui J en avais parfaitement conscience Par contre mon p re n tait pas tr s pour que je prenne son fauteuil que j utilise son fauteuil C tait pas le cas de ma g n ration a c est s r Et puis effectivement mon p re c tait je dirais un vieux de la vieille C tait Oui lui je pense qu il pouvait penser que a portait malheur ou un truc comme a Alors peut tre qu il avait raison finalement vu maintenant Et c est vrai que je me souviens m tre fait la r flexion plusieurs reprises d ailleurs c est quand m me incroyable en me disant putain si un jour je devais me retrouver comme a a doit tre difficile quoi Je me suis fait cette r flexion je devais avoir quinze ans Q Et a l est R On ne peut pas dire que ce soit facile effect
140. ant dans l tat o je suis je n ai plus rien perdre Ca a n a jamais t conscient je ne me suis jamais dit a Mais je pense que peut tre il y a a derri re J en sais rien Et puis apr s avec le temps en ayant un peu les gal res qui peuvent arriver et a va tre difficile de trouver des godasses ah merde etc etc Du coup au bout d un moment on prend conscience que notre corps il est l Donc il est l et il faut en prendre soin Donc au d part un peu limite quand m me L je parle pour moi pas d une 134 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 mani re g n rale chez les paras M me si quand m me d une mani re g n rale chez les paras je pense deux trois potes quand m me c est tellement lourd g rer je pense aux questions urinaires par exemple alors en fonction de chacun soit on se sonde soit on pisse par percussion etc Putain c est chiant et puis en plus c est allure plus ou moins r guli re A des moments on n glige un peu quoi Mais quand on a quelques petites alertes au niveau infection urinaire ou au niveau r nal on commence flipper l Et puis quand on sait que un mec para ah merde Il s est fait op r Ils lui ont vir un rein parce qu il n a pas fait gaffe Ah ils l ont amput du pied parce qu il n a pas fait gaffe aux escarres ah C est quand m me important donc partir de l moi j ai dit moi je veux
141. ar E Goffman ce qui nous int ressera ici consiste rendre compte de la mani re dont une famille parvient cadrer l v nement que repr sente la d couverte et ou la prise de conscience des cons quences de la d ficience d un enfant Cette op ration de cadrage sur laquelle nous allons revenir de fa on plus d taill e ensuite est celle par laquelle une chose parvient une signification suffisamment concr te et partag e pour qu en d coule tout une s rie d actions pilot es c est dire orient es vers une fin admissible dans un contexte social donn et s encha nant dans une suite per ue comme logique ou normale compte tenu de la situation Le cadrage de l v nement d ficience se pr sente donc comme le point de d part de l institutionnalisation concr te du handicap Il se r alise tout d abord dans le sein de la famille mais trouve bien entendu un prolongement dans l difice social global La pr sence du collectif dans ce processus prend deux formes essentielles Les diff rents sch mes ou mod les que la soci t a longuement labor pour saisir un v nement particulier est en premier lieu une des composantes de la mani re dont chaque psych individuelle est form e chacun mobilise donc les mod les sa disposition pour interpr ter singuli rement la d ficience et le handicap Comme l illustre le r le jou par les associations de parents dans la formation
142. ar l haut pour casser la cro te midi il y a un itin raire Faut couper travers la place il y a des escaliers qui montent on arrive sur la place En fauteuil c est r gl donc je suis oblig de faire le tour Moi a ne me pose aucun probl me donc quand on y va deux trois ou quatre que les valides coupent moi je fais le tour Par contre eux a les g ne Ca les g ne de se s parer de moi a moi je m en fous a vraiment G n ralement il y en a un qui reste qui vient avec moi plus ou moins Ca d pend avec qui on est Ca moi je m en fous Ce n est pas un probl me L essentiel c est qu on se retrouve l o on avait pr vu d aller c est dire au restaurant pour manger Maintenant les rythmes de vie en g n ral moi des fois je vois des gens vivre ben a m affole Je me dis comment c est possible de vivre aussi rapidement aussi speed Comment c est possible Et puis m me pour la sant a fait peur pour le c ur pour des choses comme a Moi je me dis faut prendre le temps faut s arr ter un peu Et donc moi je vais vraiment dans ce sens l Et je trouve que le fauteuil peut tre int ressant l dessus enfin l aspect a peut tre int ressant c est dire autant il y a plein de complications autant a va tre gal re enfin a va tre gal re au d part pour s habiller par exemple vous vous allez le faire en trente secondes moi en une minute trente Donc forc men
143. aract ristiques propres la personne explique ce sentiment Les femmes se sentent plus souvent limit es dans leur travail lorsqu on ne s int resse qu aux actifs occup s c est l inverse lorsqu on tudie que les ch meurs ou les inactifs hors retrait s et tudiants Le sentiment de limitation cro t avec l ge mais surtout jusqu 50 ans il d cro t m me apr s 60 ans Les personnes ayant des probl mes de sant li s des maladies graves des parties externes du corps et des d ficiences intellectuelles se sentent plus souvent limit es dans le travail Derri re cet ensemble de corr lations s exprime l attente des personnes vis vis du monde professionnelle et ce que repr sente ne pas travailler Le sentiment de limitation est d autant plus fort chez les personnes pour lesquelles le travail est dans la normalit Ce sont les personnes qui ont le plus de mal supporter de ne pas travailler qui se sentent les plus limit es mais aussi certains probl mes rendent plus difficile l exercice d un activit professionnelle soit parce qu ils d rangent soit parce qu ils demandent des am nagements sp cifiques comme pour les personnes en fauteuil roulant etc Le second ensemble de facteurs concerne l environnement professionnel Les personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle occupent plus souvent des postes relativement difficiles lorsqu elles travaillent beaucoup d ouvriers
144. artenant l esp ce humaine Il ne se reconna t pas tout le temps dans le regard d autrui ces valuations qu il subit d cale la relation En somme Monsieur Martin qui le premier sait qu il a un corps souhaite tre per u comme un humain normal mais il constate fr quemment que sa r alit corporelle prime dans l appr hension qu autrui a de lui V ritable stigmate sa r alit corporelle s impose l interaction 3 4 RYTHME ET TEMPS tre assign un fauteuil roulant red finit les rythmes de vie et organisation dans le temps Q Qu est ce que c est que votre rythme de vie Comment vous faites pour aller votre rythme Qu est ce que vous rencontrez quand vous croisez les autres R Je comprends peu pr s votre question Je ne vois pas comment y r pondre mais c est en parlant que a va Mais en tout cas ce que je sais c est que j ai envie de vivre enfin je vis de plus en plus doucement Pas zen mais de plus en plus calmement mon rythme justement J e pense que peut tre j ai trouv mon rythme l articulation entre mon travail Antoine mes amis Maintenant quand on rencontre mon rythme je ne sais pas Je ne vois pas C est peut tre le terme rythme que je ne vois pas je ne sais pas si je vois une diff rence de rythme c est dire je vis quand m me avec plein de gens tr s speed Moi je connais plein d handicap s galement tr s speed Alors a fait un rythme peut tre mat
145. as acc der aux t l phones qui sont aux bords de l autoroute parce qu ils sont de l autre c t des barri res Donc l on b nit d avoir un portable C est quand m me un ph nom ne qui est nouveau Alors du coup peut tre que c est du masochisme de ma part je sais pas Mais alors du coup il peut vite y avoir un sentiment de pr carit Putain je suis bloqu sur l autoroute tout seul Qu est ce que je fais Et du coup a a tendance d stabiliser Mais en m me temps c est riche d exp rience C est riche d enseignement d adaptation quoi Et c est vrai que moi depuis vingt deux ans que je suis en fauteuil j ai d j v cu des situations comme a un petit peu limite Et du coup a permet de se conna tre On voit comment on r agit comment on se comporte jusqu o on peut aller comment on fonctionne Et moi j ai l impression qu avec le temps et tant mieux je suis rest super zen Alors en m me temps je savais que mon fr re allait arriver pas loin derri re Mon beau fr re j avais une incertitude je ne savais pas si il avait pris l autoroute ou pas Mais c est marrant parce que a c est super bien fait Mon fr re est pass et m a reconnu donc il s est arr t un peu plus loin et puis il est revenu J uste un petit peu avant le d panneur passait de l autre c t Le mec il s arr te il me dit vous avez besoin d un 126 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 coup de main Je
146. as si le fait d avoir vu mon p re parapl gique plut t un peu d pendant je sais pas si a m a aid justement enfin je sais pas accepter mieux tol rer cet esp ce de fatalit Je sais pas mais forc ment a influence forc ment il y a quelque chose quoi La survenue de la parapl gie de Monsieur Martin s est donc d roul e dans un milieu familial qui la connaissait Elle a t collectivement g r e par la fratrie largie aux belles s urs Alors que les d placements taient co teux Monsieur Martin a eu le sentiment d tre soutenu m me si dans sa famille on n exprime pas beaucoup ses sentiments Si l absence de marche est difficilement v cue par la fratrie il ne sait pas si ces fr res ont ce sentiment pour eux ou pour lui R Comment ils ont r agi Je ne sais pas comment dire je sais pas comment directement r pondre a Je ne sais pas si c est le fait d avoir vu notre p re en situation de handicap avant que moi je le sois Mes fr res par rapport moi et peut tre m me moi par rapport mon handicap on a volu un petit peu en terrain 105 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 connu en quelque sorte Et l une fois de plus je pense que l il y a une diff rence avec une autre famille o le handicap survient pour la premi re fois Tout ce qui tait accessibilit toutes ces notions l tous les probl mes m dicaux li s la parapl gie mes fr
147. au petit trot donc c est moi qui m adapte Ce qui ne pose aucun aucun souci C est naturel Par contre il y en a qui n y arrivent pas Je sais qu il y en a qui n y arrivent pas Je connais des gens en fauteuil qui n arrivent pas se mettre au rythme des autres m me au rythme de leur compagne et bien ils n y arrivent pas Ils sont toujours speed en fauteuil ils sont toujours vite dans la manip du fauteuil j entends hein Que moi alors c est vraiment naturel C est naturel II y a des fois je sens Bon quand c est des amis la question elle est r gl e Mais si c est un inconnu quelqu un comme a qu on fait un petit bout de chemin des fois je sens que les gens ils veulent se mettre mon rythme et ils ne savent pas comment se passe le rythme Ils ne savent pas parce qu ils ne se sont peut tre jamais d plac s sur trois cents m tres c t de quelqu un en fauteuil avec qui ils parlent Je comprends bien s r Pour beaucoup de gens a ne leur est jamais arriv Quand a leur arrive forc ment il y a un petit moment de flottement Donc on sent que les gens ils veulent marcher vite ou se mettre au rythme ou je ne sais pas quoi ou proposer de pousser ou Donc a on le sent Mais en tout cas moi naturellement je vais la vitesse des gens Maintenant forc ment quand il y a des difficult s architecturales l les choses changent Quand il y a des escaliers des plans inclin s par exemple ici quand on monte au b
148. au r nal comment a se passe Donc c est moi qui vais voir le m decin c est moi qui lui demande de me prescrire le truc ce qui peut troubler un peu les m decins surtout J ai un nouveau m decin j ai d m nag donc du coup j ai un nouveau m decin dans mon quartier Et de plus le m decin qui me suivait qui tait un super m decin il a arr t son activit il est parti en m decine du travail Donc du coup j ai chang de cabinet m dical Donc j ai pris contact avec un nouveau m decin Le premier a n allait pas donc je l ai c toy une petite ann e J ai pris un autre m decin dans son cabinet qui est plus l coute qui est moins chimie etc Donc voil Je pense en partie l initier la parapl gie ou en tout cas ma parapl gie Ca c est s r je veux dire ils n ont pas la science infuse contrairement ce que certains peuvent croire Donc voil je pense l initier un peu ma situation Et puis bon le m decin dans l coute il voit vite qu on sait de quoi on parle Ca c tait juste par rapport au corps m dical c tait juste pour dire que effectivement il y a des m decins qui sont tr s tr s g n s quand ils sont en face de nous Ils sont tr s g n s d avoir affaire des gens comp tents pas comp tents mais des gens qui connaissent bien leur situation et il y en a certains m me on sent que a les d range Ca les d range dans leur pratique C est moi le m decin c est moi
149. autre 56 d aide Aurait besoin d un 82 forme d aide pour avoir un Aurait besoin d un 82 am nagement de poste pour emploi changement de poste pour avoir un emploi B n ficie d une autre forme 56 avoir un emploi Aurait besoin de soutien des 80 aide Le Reconnu COTOREP 72 coll gues et sup rieur pour Probl mes des membres inf 32 sentiment Aurait besoin d une autre 71 avoir un emploi Autre maladie volutive 52 de forme d aide pour avoir un Aurait besoin d un temps de 79 Difficult s intellectuelles 50 limitation emploi travail am nag pour avoir un A un temps de travail 50 se plus Aurait besoin d un 70 emploi am nag am nagement de poste pour B n ficie de soutien des 77 Reconnu COTOREP 49 fort avoir un emploi coll gues et sup rieur Epilepsie 49 Aurait besoin de soutien des 68 B n ficie d un am nagement 77 Pension d invalidit 46 coll gues et sup rieur pour de poste B n ficie d un am nagement 46 avoir un emploi un temps de travail 72 de poste Pension d invalidit 67 am nag B n ficie de soutien des 45 B n ficie d un changement de 66 Pension d invalidit 70 coll gues et sup rieur poste Reconnu COTOREP 70 Aurait besoin d un 44 Autre maladie volutive 66 B n ficie d une aide 69 am nagement de poste pour Rente AT 65 d placement domicile travail 63 avoir un emploi Artisan 65 Rente AT Troubles de la parole 42 Aurait besoin d une aide la 65 Aurait
150. bre 2003 Cette information d livr e chacun d termine son action en vue de tenir compte du contenu du message sans questionner plus avant la situation Tout au plus c est un des risques majeurs de ce proc d la personne qui est destin e l avertissement peut elle le trouver embarrassant ou tout le moins disproportionn Surtout dans le cas o elle aurait tendance appr hender la situation partir de l euph misme L exemple voqu plus haut d un change entre la m re de Jonathan et son ducatrice est assez r v lateur de ce hiatus possible Toutefois l effort fourni par une personne qui reconna t et annonce avec le tact qui convient est en g n ral suffisamment appr ci par l entourage pour qu elle y gagne une certaine tranquillit d esprit pour la suite de l change La revendication La revendication est un proc d complexe qui emprunte la pr c dente technique sa franchise mais y ajoute un d veloppement qui doit consister ins rer le handicap dans un cadre extr mement large C est d ailleurs le seul proc d que l on peut sans aucun doute attribuer un type de personnes particulier celles qui sont les mieux int gr es dans le milieu associatif Il ne s agit d ailleurs pas seulement des associations qui prennent en charge le handicap mais de tout groupe formel qui directement ou indirectement peut tre l occasion de travailler sur la signification de la d ficien
151. bre 2003 ram ensemble alors a n emp che pas de pouvoir d conner avec un ing nieur la question n est pas du tout l Surtout maintenant avec le temps je pense que c est finalement l essentiel des gens qui reste l Quand on est dans cette merde dans cette situation dans cette souffrance je veux dire l ego enfin l ego tout a c est un peu C est l essentiel des tres qui s exprime quoi Alors videmment un gros con c est un gros con Ca il n y a pas de probl me L dessus a change pas Mais en tout cas je pense que a fait pointer chez les gens probablement plus la part d humanisme Ca doit contribuer ce que cette partie tr s humaine s exprime o pousse ou je sais pas Je pense qu il y a de a Il y a de cette id e l Je crois qu il y a un peu de a Au fond pour Monsieur Martin la parapl gie et une exp rience si forte qu elle galise les situations comme il dit c est l essentiel des gens qui reste Cette exp rience ne peut tre partag e d abord que par des confr res en malheur aussi sp cialis s soient ils les m decins en restent loign s Q Vous avez souffert du manque de mots R D un manque de mots Par contre ce qui est peut tre important c est un peu ce qu on essaie de mettre en place je n y participe pas maintenant un peu plus en retrait c est le fait d tre en contact avec des semblables avec des vieux on va dire Des gens qui sont par exemple des paras mais qui s
152. c est parce que l infirmi re on la c toie plus r guli rement que le m decin L infirmi re est toujours g n ralement g n ralement hein toujours plus l coute plus proche plus peut tre maternelle que le m decin qui d barque dans la chambre avec derri re lui l interne l externe l aide soignante etc Ca c est pas du tout la m me relation ce n est pas le but du boulot non plus Mais c est toujours plus cool j allais dire par rapport aux m decins le petit personnel C est toujours plus sympa plus int ressant M me si moi j ai eu des relations tr s amicales avec des internes par exemple qui sont devenus m decins avec qui je suis rest en contact Mais l c est une relation presque m me plus amicale bien s r que li e au handicap Pour Monsieur Martin qui s y est essay les th rapies psychologiques ne sont pas d un grand secours Il regrette que les images photos vid os ne soient pas plus utilis es pour que les parapl giques puissent mieux prendre conscience de leur corps S il ne d nigre pas le corps m dical il revendique y compris en s opposant ses membres une comp tence d expert de sa situation corporelle m me s il a eu besoin de temps pour prendre la mesure de son corps et de sa gestion que l atteinte impliquait Il se sent enfin proche des infirmi res 2 6 LOGE DE L ADAPTATION 135 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Se retournant sur s
153. ce La religion y participe donc pleinement Les m res de Jean et de Carole sont tout fait exemplaires cet gard puisqu elles agissent la fois dans les deux registres associatifs et le d clarent volontiers avant m me que la question leur soit pos e Cette militance transpara t donc de mille fa ons dans leur propos d s lors qu on aborde le sujet du handicap mais au del il semble qu il y ait peu de sujet qui ne soient pas pour elles l occasion d un d veloppement d o le handicap n est jamais totalement absent Ces femmes ont fait de leur vie un combat une croisade non seulement pour que l enfant qu elles ont adopt soit trait comme un autre mais aussi pour que toutes les personnes handicap es aient leur place dans la soci t Lorsqu elle parle du handicap de leur enfant elle le pr sente sans d tour mais poursuivent immanquablement leur discours de telle sorte qu elles abordent d autres probl mes li s par exemple aux difficult s de prise en charge la condition des personnes handicap es etc Op rant une rapide mont e en g n ralit la d ficience particuli re de leur enfant est vite noy dans une mise en perspective infiniment plus large L assurance de ces deux femmes en m me temps que leur d votion une cause indiscutable les rendent peu vuln rables l embarras Ce qu il peut y avoir d ventuellement perturbant dans leur propos peut
154. ces r currences Il faut donc rester prudent Daniel Bertaux L approche biographique Sa validit m thodologique ses potentialit s Cahiers Internationaux de Sociologie Volume LXIX 1980 p 217 pour les deux citations Jean Peneff La m thode biographique op cit p 135 23 Jacques Chevalier La biographie et son usage en sociologie Revue fran aise de sciences politiques n 1 janvier 1979 p 93 2 Propos s et utilis s par Daniel Bertaux ces deux concepts sont explict s dans plusieurs de ses publications notamment dans son ouvrage Les r cits de vie Collection 128 Nathan Universit 1997 96 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Toutefois fort des connaissances que j ai pr alablement acquises propos du secteur du handicap mais aussi au contact des personnes handicap es une hypoth se raisonnable peut tre faite propos des th mes qu il conviendrait d approfondir et que Monsieur Martin aborde Par exemple la th se que les personnes devenues handicap es ont des itin raires de d classement apr s la d ficience elles chutent socialement Or Monsieur Martin non seulement ne chute pas socialement vis vis de son milieu d origine mais on peut noter sa mobilit sociale de proximit Provenant du milieu ouvrier tant lui m me ouvrier de formation il est aujourd hui revenu et statut et apr s l acquisition de connaissances professionnelle le multi media
155. cessible Il a vraiment ce r flexe et qui en m me temps me parait naturel a me parait m me vident que ce soit comme a Et en m me temps c est un peu touchant enfin oui touchant qu il ait cette esp ce de fibre de conscience des choses Pour l instant je n ai pas encore entendu de r flexions un peu provoc rapport au handicap Je pense que in vitablement il y en aura un jour Ca c est oblig enfin c est oblig je ne sais pas pourquoi mais je pense que c est oblig Q Est ce qu ils plaisantent du handicap les enfants R Oui Q Par exemple R Alors les enfants en g n ral je ne sais pas trop Antoine oui Par exemple avec Antoine on aime bien les BD de Serre Par exemple il y a une BD o il y a un mec qui tient un train comme a qui est fond dans une descente Antoine c est un dessin qui l clate Des fois il se met imaginer il est comme tous les enfants il aime bien les toons il aime bien les cartoons notamment coyote et tout a bip bip Alors coyote il fait des plans la coyote justement qui foirent Alors des fois il imagine coyote en fauteuil par exemple S il a vu coyote faire un truc dans une descente alors il dit il est b te il aurait d prendre un fauteuil a aurait t mieux pour lui etc Il est tr s l aise l dessus Antoine pratique le fauteuil c est dire quand je suis sur le canap des choses comme a Antoine et tous les petits tous les enfa
156. cier avec les cadres collectifs qui d terminent une nouvelle perception de soi de l autre et du monde La troisi me contribution envisage ce rapport dans le seul domaine du travail mais en d crivant tous les aspects de cette questions les d terminants et formes du ressenti du handicap au travail conditions d emploi des handicap s etc Si les deux premiers essais porte sur un mat riau qualitatif la derni re repose sur l exploitation des donn es de l enqu te Emploi de l INSEE La seconde partie propose une lecture originale de l exp rience du handicap partir d une seule histoire de vie Elle permet ainsi de lire le principe d articulation des diff rents l ments d terminant l exp rience du handicap qu on a pu identifi pr c demment tout en consid rant la longue dur e dans laquelle elle s inscrit L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 BIBLIOGRAPHIE Castel R Les m tamorphoses de la question sociale Paris Fayard 1995 Le Qu au P La sociologie de l exp rience in La construction sociale de la pauvret Cahier de recherche n 138 1999 Le Qu au P La compr hension sociale du handicap Cahier de recherche du CREDOC n 192 2003 Maffesoli M La connaissance ordinaire Paris M ridiens Klincksieck 1987 Piaget J L pist mologie g n tique Paris PUF 1970 Simmel G Les grandes villes et la vie de l esprit Philosophie de la mo
157. cile de la soulever et de la poser bien s r Bon je la glisse Il se trouve que j ai encore suffisamment de force pour la porter d une main et la poser sur l vier pour go ter des p tes ou quelque chose comme a Samedi soir la maison il y avait mettons dix personnes J ai fait la bouffe poulet pommes de terres etc J invite spontan ment naturellement En plus ma cuisine j ai pas fait suffisamment assez de travaux encore d adaptation Donc les placards pour les assiettes sont encore un petit peu hauts je peux prendre des assiettes mais c est un peu limite donc j exploite que le bas Je sais qu une fois ma tante est venue manger la maison avec sa fille ma cousine Pourtant elle m avait d j vu voluer en fauteuil mais elle n avait jamais vu chez moi ou alors il y a longtemps le premier appart et elle ne m avait pas vu voluer Elle tait litt ralement scotch e quoi Alors qu elle n a pas de raison de l tre quoi c est normal Donc les d placements dans la cuisine c est un probl me qui est r gl Les d placements au sein de l appartement j ai fait des travaux dans la salle de bain tout a Ca me convient l adaptation que j ai choisi de faire Ce qui est chiant ce que moi je trouve encore de tr s emb tant c est le fauteuil dans la voiture D autant plus que j ai eu pas mal de soucis d paule En tant parapl gique on a peut tre pas besoin de a J ai d j t op r d une paule parce que j avais des luxation
158. clus mais pourtant sur de nombreux points son activit soumise une organisation rationnelle et collective se r v le similaire Le travail du personnel organis pour qu il y est le meilleur rendement possible de l quipe soignante entra ne l imposition de certains rythmes corporels et d une certaine hygi ne de vie pour les patients tout d abord il y a les premiers soins six heures puis sept heures A huit heures viennent successivement le petit d jeuner l excr tion la toilette au lit ou la douche l habillage la r ducation kin ou ergo sans compter les sondages toutes les trois ou quatre heures De plus si le patient doit rester alit son planning se verra ponctu de mise en postures toutes les quatre heures cela de jour comme de nuit pour viter tout risque de d gradation cutan L horaire des repas est impos de m me que le lieu de restauration Pour ses repas dans le meilleur des cas le patient a le choix entre deux menus dans une situation moins favorable il va avoir une alimentation en fonction de sa pathologie et de son traitement m dicamenteux Ainsi il arrive que certains patients ne puissent pas manger sal pendant plusieurs semaines d affil e par exemple L apr s midi est consacr nouveau la r ducation puis arrive le repas du soir en chambre 18 heures au r fectoire 19 heures En g n ral c est C est r veil sept heures sept heures tren
159. connaissance de ce probl me de sant d livr par la COTOREP ou la s curit sociale augmente galement la probabilit de d clarer une telle incapacit La soci t objective et cautionne du ressenti Ces syst mes offrent de plus une compensation financi re l incapacit reconnue d exercer de mani re partielle et temporaire une activit professionnelle facilitant le retrait de la sph re professionnelle Vient ensuite seulement le type de d ficiences Les personnes se d clarant les plus limit es souffrent de probl mes de parties externes du corps jambes dos cou bras mais galement de maladies graves et de d ficiences intellectuelles l oppos les personnes souffrant de d ficiences sensorielles d clarent moins souvent de limitation dans leur travail Aucun indicateur ne permet de conna tre la gravit du probl me de sant et ses impacts sur le travail demand N anmoins cette opposition questionne car elle renvoie de fa on sous jacente aux handicaps plus ou moins bien accept s par la soci t et les employeurs en classant d une part les cas qui d rangent sont craints car mal connus et d autre part les handicaps b n ficiant d une meilleure int gration dans la soci t comme les d ficients sensoriels Enfin le sentiment de limitation dans le travail est particuli rement faible pour les personnes en emploi ou proches de l emploi et pour celles qui se sont retir es de la sph re professio
160. ctobre 2003 R Je ne sais pas l individu que je suis c est dire ma personnalit ma personnalit d j ind pendamment de forc ment du fauteuil Qu est ce qui me d finit Est ce qu il y a une chose qui me d finit plus particuli rement que d autres Je ne sais pas C est vrai que l identit quand on a un accident enfin apr s cette p riode l D j dix neuf ans on est d j je pense en p riode un peu de recherche On est encore un peu entre deux L enfance elle est quand m me bien derri re nous Et puis le monde adulte est devant nous mais on est un peu comme a Forc ment si en plus il y a un tel traumatisme enfin un accident donc traumatisme m dullaire forc ment a ne simplifie pas les choses pour pouvoir se retrouver pour voir qui on est Alors apr s je ne sais pas apr s on grandit on continue grandir on volue on m rit On a des exp riences dans la vie qui font que on se d couvre on se construit enfin on continue Non je pense qu on se reconstruit Je ne sais pas l franchement je ne sais pas En tout cas ce qui est difficile cerner mais je ne sais m me pas si cette r flexion a un sens d ailleurs c est savoir si certains traits du caract re du comportement sont li s au handicap ou sont li s la personnalit qui est l depuis qu on est au monde en quelque sorte Toujours la part des choses de tout a Q Depuis que l on parle j ai le sentiment
161. de peine beaucoup beaucoup de peine Alors c est vrai que moi je souffre dans mon corps bien s r c est c est diff rent quoi Par exemple ma tante je sais que quand elle me regarde a doit tre toujours pareil c est dire vingt ans en arri re a doit tre toujours aussi dur pour elle de me voir comme a en fauteuil Et donc a ne m emp che pas de dormir videmment mais oui c est dur quand on fait de la peine aux autres je veux dire c est pas volontaire mais c est surtout des proches qu on aime quoi Moi j essayais souvent de leur je crois qu il l ont assez rapidement vu quand m me donc du coup forc ment on essaie d tre dynamique quoi il y a une tendance naturelle s apitoyer un peu comme a si en plus on est nous comme a donc forcement du coup a speed un peu pour tre au moins pour para tre bien quoi Et a c est surtout les premiers temps les premi res ann es c est surtout les premi res ann es Q C est quoi para tre bien R Para tre bien je sais pas c est pas se plaindre toutes les quinze secondes parce qu on a mal au dos parce qu on a une contracture parce qu on a une infection urinaire ou parce que hier on s est piss dessus ou des choses comme a Moi je dis a mais en m me temps moi j ai toujours t souriant en quelque sorte Donc j ai pas eu pas beaucoup d efforts faire pour avoir un peu le sourire quoi Mais c est vrai que j ai rarement rarement aupr s de mes proches en
162. dernit Paris Payot 1989 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 10 PREMIERE PARTIE LES PRINCIPES DE L EXPERIENCE L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 12 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 GENESE DU HANDICAP Pierre Le Qu au Directeur de recherche d partement Evaluation des politiques sociales du CREDOC Universit Pierre Mend s France Grenoble 2 1 ARGUMENT DE L ENQUETE Le handicap envisag comme la cons quence sociale d une d ficience quelconque est par d finition une construction sociale qui se produit comme l a fort bien d montr le sociologue E Goffman dans l interaction entre soi et l autre C est pourquoi dans ce travail consacr l exp rience du handicap se devait on aussi de consid rer le r le que joue l environnement familial dans cette laboration En effet la famille la plus proche de celui qui porte une d ficience constitue bien des gards le premier miroir o se forme le handicap non seulement d un point de vue subjectif qui nous int ressera ici principalement le v cu particulier d une famille mais aussi objectif si l on tient compte du r le que jouent les familles dans l institutionnalisation formelle du handicap Subjectivement donc en tant qu elle reste cette instance de socialisation premi re la famille peut tre d crite comme la sc ne in
163. des copains lui qui sont des gens que je connais mais qui sont plus vieux que moi ils ont cinquante cinq ans J en connais certains depuis quelques ann es comme a Et eux ils sont hyper admiratifs de me voir Alors je sais pas ce que leur raconte mon fr re quand ils sont en montagne ou quand ils pique niquent Si de temps en temps ils parlent de moi Je vois bien peu pr s ce que mon fr re leur dit Mais eux ils sont vraiment tr s scotch s quoi Et du coup c est difficile de dire aux gens oui t es admiratif tu me vois monter dans ma voiture mettre mon fauteuil etc a te para t tout insurmontable Moi c est pas insurmontable Toi tu mets tes baskets le matin tu te poses pas de question Tu t assoies chacun a sa technique moi c est cette technique l quoi Alors pour en parler toujours avec un des copains de mon fr re chez qui je mangeais l autre jour il disait mais attend c est pas possible a t emmerde de devoir plier ton fauteuil dans la voiture Je lui ai dit Ecoute a m emmerde pas plus que a puisque de toute mani re j ai pas d alternative Si tu veux que je te dise que a me fait chier d tre en fauteuil bien s r que a me fait chier d tre en fauteuil Ca c est insoluble quoi C est pas insoluble au sens de solution c est que c est l ad vitam eternam de toute fa on M me si on s adapte m me si globalement on peut vivre correctement apr s Bien s r qu on pr f rerait tre sur deux 136 L exp
164. des gens hors quipe c tait un travail d quipe quand m me d une dizaine de personnes mais quand je montais des op rations donc l je travaillais avec beaucoup de b n voles plusieurs dizaines de b n voles pour certaines op rations c tait m me deux ou trois cents personnes il fallait donc coordonner un peu ce travail J avais donc affaire l qu des gens valides J e pense qu eux ne se posaient pas la question de savoir si j tais b n vole ou salari d abord eux ne savaient pas si j tais b n vole ou salari Je pense qu ils ne se posaient pas la question ils se mettaient disposition Non je crois que c tait des relations de travail ordinaires Je travaille ici depuis un an il n y a pas de diff rence quoi Ce truc qui fait que je suis salari ici c est qu on m a hyper bien am nag un poste de travail quip d un bon mat riel tout de suite donc l effectivement je vois la diff rence avec l associatif pur et dur Mais je ne vois aucune diff rence Par contre ce qui tait tr s tr s chaleureux c est quand c tait le pot de d part quand j ai quitt l association Rosine donc a tenu a ce qu il y ait une f te organis e et l j tais tr s surpris de voir d abord le monde qui tait l y compris des gens des b n voles avec qui je travaillais comme a ponctuellement J tais plut t tr s impressionn de voir cette f te de reconnaissance que les gens avaient appr ci le travail
165. deux niveaux de communication compl mentaires comme dans le jeu ou bien dans l exemple fourni par le peintre R Magritte dans son c l bre tableau qui repr sente une pipe et porte l inscription ceci n est pas une pipe Dans le sujet qui nous int resse cette technique renvoie ce qu on dit plus haut et qui rel verait de la n gation nier le handicap ou de la minimisation en diminuer l importance Ces deux cat gories distingu es par C Gardou nous semble toutefois relever d une seule que l on pourrait appeler l euph misation qui consiste voquer le handicap en minorant son importance et en comptant sur la discr tion de celui qui on s adresse pour faire comme si il acceptait cette pr sentation des choses Or la convenance veut qu en effet celui qui la pr sentation du handicap est ainsi faite ne relance pas pour en savoir plus Sauf cr er un terrible embarras En principe cette situation ne concerne pas le face face m dical et la relation avec les personnels qui prennent en charge l enfant On a toutefois pu constater que les intervenants peuvent aussi jouer le jeu lorsqu il s agit d une pr sentation en public Parfois m me l euph misation est leur propre fait lorsque la mani re dont une m re qualifie un peu abruptement les difficult s de son fils La m re de Jonathan propos de son exc s de poids de toute fa on il n y a q
166. dicap environ 9 000 ont en d clar un et ont r pondu au volet compl mentaire Les chiffres ci dessous portent sur les r ponses des 38 000 Un syst me de pond ration calcul par l INSEE assure l extrapolation de cet chantillon l ensemble de l enqu te emploi et de la population fran aise NS En mars 2002 l enqu te emploi comportait un volet compl mentaire de questions relatives l insertion professionnelle de personnes souffrant de handicap ou de probl mes de sant durables dur e sup rieure 6 mois ce qui permettait la fois de d nombrer les personnes concern es et de mieux conna tre leur positionnement sur le march du travail Plus de 9 millions de personnes ont d clar avoir un probl me de sant ou un handicap durant depuis six mois ou plus soit 24 de la population de 16 65 ans Si on compare avec les r sultats de L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 l enqu te Handicap Incapacit s D pendances HID 12 des 17 59 ans d claraient une incapacit fonctionnelle parmi sept domaines lire reconna tre un visage remplir un formulaire simple parler et se faire comprendre entendre ramasser un objet s habiller 5 se sentaient limit es depuis plus de 6 mois dans un genre ou une quantit d activit s La proportion obtenue par l enqu te emploi est donc loin d tre n gligeable et m rite qu on s y attarde Les premiers r sultats pub
167. dienne puisque c est comme a qu on d finit les choses par rapport aux allocations compensatrices Je mesure la chance d tre parapl gique et d tre compl tement autonome globalement pour les choses de la vie ordinaire Donc a je mesure a Je pense bien le mesurer d ailleurs Q Vous n avez pas l Allocation compensatrice R Si Mais c est la s cu qui me la verse Parce qu il y a l Allocation compensatrice pour tierce personne c est l aide sociale Et puis quand on rel ve du r gime de la s cu c est la majoration pour ces tierces personnes l Mais c est effectivement les m mes choses aussi je la per ois Dans la mesure o j ai eu un accident du travail donc je suis 100 Et au niveau s cu la majoration pour tierce personne on la touche ou on ne la touche pas Donc un parapl gique pour la s cu il n a aucun probl me il lui faut M me si moi avec a je r mun re que quelques heures de m nage par semaine Q C est suffisant R Oui J ai une femme de m nage qui vient deux trois heures par semaine En ce moment parce que je vis seul Q Et parmi vos copains connaissances parapl giques c est syst matis cet usage de personnes pour venir faire le m nage R Oui peu pr s oui Parce qu alors ceux qui sont en couple la question elle ne se pose pas forc ment Remarque c est pas parce qu on est en couple qu on n a pas faire du m nage videmment Mais pour ceux que je connais qui viv
168. diff rente des t ches entre ceux qui travaillent y compris le cas ch ant les parents proches et le malade et exigera des relations tout fait diff rentes qu elles soient d ordre simplement instrumentales ou de l ordre de l expression entre ceux ci Concept d taill dans un article d Anselm Strauss 1985 intitul Maladies et Trajectoires avec Shizuko Fagerhaugh Barbara Suczek Carolyn Wiener in La trame de la n gociation Anselm Strauss Paris l Harmattan 1992 pp 143 189 Nous utilisons ce concept de trajectoire pour voquer non pas la maladie du patient et l organisation du travail qui l entoure mais pour souligner le d veloppement du potentiel corporel du patient et l organisation du travail qui l entoure 5 Etat corporel renvoie au corps un moment donn de la trajectoire 37 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 signification tr s g n rique celle d une suite logique mais temporaire de leur accident Ils mesurent tr s mal quelle sera la r alit probable de leur futur et esp rent une gu rison avec restitution ad integrum de leur potentiel corporel ant rieur Le vocable renvoyant la maladie est d ailleurs couramment utilis par ces patients pour qualifier leur tat corporel et non pas celui renvoyant au handicap Ceci souligne bien une compr hension de leur tat corporel comme transitoire curable et impermanant Q Quand tu es arr
169. doc ouvrage collectif octobre 2003 contrainte par la situation on ne peut autrement dit faire avaler n importe quoi n importe qui dans n importe quelle circonstance Mais au del de l interaction pr sente le choix du cadre partir duquel un v nement va avoir une signification ne peut tre effectu que parmi un ensemble pr d termin de possibles Il ne s agit donc que d op rer une s lection parmi un univers circonscrit et bien d limit Sauf accepter l id e de ne pas tre compris et de provoquer l embarras de nos interlocuteurs Le registre musical auquel est emprunt e la notion de modalisation claire sa signification un agent social ne peut au cours d une performance sociale pr senter qu une variation sur des th mes connus et accept s par avance La mani re de cadrer la d ficience en l occurrence ne peut se faire qu en puisant dans le registre des repr sentations partir desquelles un accord peut tre obtenu avec ses partenaires d interaction Cette contrainte est donc la condition partir de laquelle une personne peut compter sur la coop ration de celui ou celle qui elle s adresse Car d un cadre accept d coule une s rie de cons quences tr s concr tes qui manifestent bien comment les partenaires s accordent sur la r alit de ce dont il est question dans leur change la fonction cruciale d une mod lisation crit E Goffman c est de
170. dre compte d une douleur mais tenter de rendre compte des modalit s singuli res selon lesquelles se r alise une connaissance bien des gards ordinaire Ce qui veut dire que la personne handicap e quelle que puisse tre sa d ficience ne conna t pas moins que celles qui ne le sont pas si l on adopte une posture qui fait l conomie d un jugement de valeur sur la port e intellectuelle ou thique de cette connaissance Ce qui importe dans cette perspective c est bien de rendre compte de la fa on dont une personne ou un groupe se construisent et construisent le monde avec les facult s dont ils disposent LA CONSTRUCTION DE LA REALITE Aborder le handicap sous l angle de l exp rience ne doit pas conduire effacer de notre horizon le cadre social global La microsociologie comme celle d E Goffman qui s inscrit dans une approche comme la n tre ici et laquelle il sera plusieurs fois fait allusion dans plusieurs des contributions composant cette recherche est une sociologie qui part du d tail de la vie quotidienne pour appr hender le fonctionnement du tout de la soci t globale Les difficult s quotidiennes associ es au handicap d fini comme la cons quence sociale d une d ficience ne prennent ainsi toute leur signification sociologique que dans la mesure o elles mettent au jour des m canismes de r gulation par lesquels le corps social r agit la menace de ce qu i
171. du CREDOC n 192 janvier 2003 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 consid ration des personnes handicap es Progr s qu on ne saurait dissocier de ceux qui sont accomplis d une mani re g n rale pour une meilleure prise en consid ration de la personne humaine tout simplement Les actions dans ce domaine semblent d ailleurs se multiplier et s acc l rer si l on retient de cette ann e 2003 qu elle a t assez riches en annonces de projets tant au plan national qu europ en Sans pr juger de leur avenir ni statuer sur leur contenu on se contentera de noter que ces annonces manifestent au moins l mergence d un souci et peut tre l amorce de nouveaux chantiers Le CREDOC en participant un nombre croissant d valuation des politiques en faveur des personnes handicap es programmes d insertion mise en place d observatoires peut t moigner sa fa on de ce fr missement quelque chose bouge en effet Et c est d ailleurs pour mieux armer sa r flexion tant conceptuelle que m thodologique sur ce champ d intervention que le projet de ces cahiers de recherche a t avanc UNE NOTION COMPLEXE La notion d exp rience qui fournit son titre cette recherche et laquelle on a d j consacr quelques d veloppements dans les Cahiers de recherche du CREDOC est une notion infiniment plus riche qu il n y para t de prime abord Son usage
172. e assistance ou d une adaptation de leur poste de travail si elles avaient un emploi Cette proportion est l g rement sup rieure lorsqu on ne regarde que les personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle 57 des personnes d clarant une incapacit en quantit de travail 56 en nature et 64 en mobilit contre 54 parmi l ensemble des malades Les carts restent faibles entre ces quatre populations L am nagement du temps de travail est la forme la plus souvent cit e plus du quart mettent ce souhait ce qui renvoie notamment la volont d avoir un temps partiel plut t qu un temps plein pour une partie des personnes malades Sont ensuite voqu s l am nagement de poste et le soutien ou la compr hension des coll gues et sup rieur Si on compare avec les d clarations des personnes qui travaillent le soutien des coll gues est plus souvent une r alit qu un souhait Enfin les personnes se sentant limit es dans leurs d placements entre le domicile et le lieu de travail sont plus nombreuses 82 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 souhaiter une assistance dans ce domaine m me si dans les faits cette aide existe rarement comme les d clarations de celles en emploi le montrent Tableau 22 Pour occuper un emploi auriez vous besoin d une assistance ou d une adaptation de votre poste de travail ceux qui ne travaillent pas
173. e actifs occup s En valide Malade Incapacit Incapacit Incapacit en quantit en nature en mobilit 10 Agriculteurs exploitants 2 3 2 8 5 4 4 0 2 3 21 Artisans 28 33 48 4 1 24 22 Commer ants et assimil s 2 6 2 5 3 4 3 1 2 4 23 Chefs d entreprises de 10 salari s ou 0 6 0 3 0 1 0 2 0 2 plus 31 Professions lib rales 1 4 0 6 0 3 0 2 1 0 32 Cadres de la fonction publique 5 5 4 7 3 2 3 2 3 7 professions intellectuelles et artistiques 36 Cadres d entreprises 8 0 6 0 2 6 2 6 4 3 41 Professions interm diaires de 9 4 8 6 7 9 8 1 10 3 l enseignement de la sant de la fonction publique et assimil s 46 Professions interm diaires 62 5 1 3 3 3 9 4 5 administratives et commerciales des entreprises 47 Techniciens 3 9 3 9 2 5 3 7 2 5 48 Contrema tres agents de ma trise 22 20 2 2 2 4 3 0 51 Employ s de la fonction publique 10 5 11 7 12 0 12 1 14 3 54 Employ s administratifs 9 1 7 4 5 5 5 9 7 1 d entreprises 55 Employ s de commerce 42 3 4 3 4 3 6 3 7 56 Personnels des services directs aux 6 1 7 1 9 2 8 8 6 7 particuliers 61 Ouvriers qualifi s 16 8 20 0 20 3 20 2 17 3 66 Ouvriers non qualifi s 7 5 9 5 12 2 12 5 13 3 69 Ouvriers agricoles 1 0 0 9 1 5 1 4 0 4 TOTAL Source CREDOC enqu te emploi 2002 Ce constat au niveau de la cat gorie socioprofessionnelle est confirm par un ensemble d indicateurs permettant de caract riser l emploi de la personne
174. e d terminantes de la mani re dont les parents exp rimentent la d ficience et le handicap Ce sont d ailleurs surtout les remarques faites par C Gardou qui ont orient notre r flexion concernant le type de d ficience compte tenu du fait que sa nature son point d impact son intensit et son volutivit son symbolisme constituent ses aspects les plus d terminants de son impact sur les parents Gardou 1996 p 15 Bien souvent comme le montre le tableau 1 ce sont des enfants IMC Infirme Moteur et C r bral qui ont correspondu le mieux la diversit de ces crit res tant entendu que sous cette tiquette comme c est le cas du handicap en g n ral est regroup e une tr s grande vari t d affections consid rant donc leur nature leur point d impact leur intensit et volutivit et leur symbolisme Pour le dire succinctement et en n voquant que les cas les plus extr mes notons Que Pierre ne porte pratiquement aucun stigmate physique vident mais qu il pr sente les troubles du langage d un dysphasique s v re qu on a longtemps pris disent ses parents pour une forme de l autisme Son volution est cependant positive et ses parents souhaitent d sormais son int gration scolaire en milieu normal bien que la Commission D partementale Education Sp cialis e CDES ait r cemment conseill une orientation vers un Institut M dico Educatif ME Que Na ma a c
175. e quelle merde etc Moi je me dis en tout cas c est comme a peut tre que j explique pourquoi a peut tre comme a je me dis ce n est pas la peine dans rajouter dans les trucs que les gens ne voient pas au niveau du handicap parce que l ils vont encore plus se dire oh la la l c est carr ment Du coup on n en parle pas oui on n en parle pas L je parle de apr s l accident c est une p riode de quelques ann es Parce que maintenant les choses sont tr s diff rentes on assume mieux les choses il y a moins de probl mes c est des mots qui sortent enfin il y a moins de probl mes c est des mots qui sortent c est diff rent Q Quelques ann es Combien R Apr s l accident Q Oui R C est toujours pareil parce que quand arriv cinq ans de parapl gie par exemple C est avec un copain on faisait ce constat aussi Un copain parapl gique peu pr s la m me p riode ou alors disons arriv dix ans de parapl gie on dit ah oui ben il faut bien cinq ans largement quand m me hein puis arriv quinze ans Ah oui ben il faut bien dix ans quand m me histoire de passer le cap Donc a c est c est cet aspect du temps comme a je ne sais pas Mais bon pour r pondre pr cis ment votre question je dirais je dirais bien cinq six ans Oui sept ans peu pr s 115 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Si vous pouviez caract riser le
176. e 2003 Pendant quelques ann es 1996 2001 il fait beaucoup d actions b n voles la cr ation de sites internet pour des associations mais n occupe pas d emploi pr cis et r mun r s En 2002 une coll gue et amie de la principale association dans laquelle il a exerc lui indique la piste d un emploi possible dans un organisme nouvellement constitu destin assurer l information des personnes handicap es Recrut en 2002 temps partiel 25 heures hebdomadaires il y exerce ce jour automne 2003 Monsieur Martin est le troisi me enfant d une fratrie qui en compte quatre deux fr res plus g s n s respectivement en 1955 et 1960 et une s ur plus jeune n e en 1965 Le fr re a n est mari et a trois enfants deux filles 21 et 18 ans et un gar on 16 ans Le fr re pu n est aussi mari il a une fille 16 ans La soeur vit maritalement et n a pas d enfant Monsieur Martin vit seul et en accord avec la m re biologique qui est son ancienne compagne et selon la modalit de la garde partag e l ve un enfant de 7 ans n en 1994 dont il n est pas le g niteur La vie de la famille Martin a t marqu e par deux faits le premier est le d c s de la m re en 1967 arr t cardiaque l ge de 36 ans n e en 1931 alors que Monsieur Martin a 5 ans En cons quence la derni re n e sera confi e une s ur du p re et son mari ce couple d j un enfant qui l
177. e compensation financi re de ce d savantage Si on avait la possibilit d isoler deux personnes avec des tats de sant quivalents on 70 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 pourrait probablement trouver deux cas o l une continue travailler par choix ou gr ce des conditions de travail am nag es ou plus cl mentes tandis que l autre choisira l inactivit La premi re n aurait pas n cessairement besoin d une reconnaissance contrairement la seconde notamment du fait de la perte de son salaire On retrouve le r le des dispositifs existants dans la d finition de la population handicap e dans une soci t qui selon les aides qu ils offrent suscitent la d marche de reconnaissance d un probl me de sant et donc l obtention d un statut de personne handicap e Tableau 12 Avez vous obtenu une reconnaissance administrative de votre probl me de sant ou de votre handicap R ponses multiples malade Limitation Limitation Limitation de quantit de nature de mobilit Non 77 2 59 5 60 2 46 4 Oui 22 8 40 5 29 8 53 6 DONT 12 3 23 3 23 0 32 8 Aupr s de la COTOREP Dont ROTH 5 8 10 5 10 7 12 8 Orientation milieu prot g 1 2 1 8 2 0 2 4 AAH 4 9 9 9 9 6 16 6 Carte d invalidit 5 4 10 7 10 4 17 6 Aupr s de la CDES 0 7 1 2 1 4 1 9 Suite un accident du travail ou 2 9 4 9 4 8 4 9 une maladie professionnelle Une pension d inva
178. e de travail des priorit s du mat riel disposition etc G n ralement c est au patient de s adapter une planification des interventions aupr s de sa personne planification qui implique une organisation rationnelle du travail collectif et une coop ration entre plusieurs services de professionnels Une gestion par planification implique en toute logique que ses besoins personnels ne seront pas pris en compte au moment o ils se pr sentent Par ailleurs pour ses besoins ou ses envies non planifi s mais acceptables le patient peut escompter le passage et la disponibilit d un soignant bien dispos Par exemple lorsqu un patient t trapl gique demande tre couch dans son lit parce qu il a devant lui deux heures vacantes et qu il se sent fatigu il arrive que les soignants lui refusent ce service parce que cela implique une charge de travail trop importante ou encore parce qu il a d j fait cette demande plusieurs fois cette semaine Le degr de fatigue n tant pas mesurable objectivement les soignants s arrogent volontiers le droit de l valuer De l d coulent videmment d innombrables cons quences importantes dans le d roulement du quotidien 51 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Ce rapide tour d horizon que nous avons entrepris des cons quences de la d pendance corporelle et de l endossement du r le de patient ne saurait tre consid r comme
179. e des week ends costauds mais n anmoins je pense qu elle devait tre amoureuse de moi Moi j tais amoureux d elle Et je l ai un peu vir e c est dire que je ne voyais pas enfin je ne sais pas comment dire je ne voulais pas lui imposer ce qu il m arrivait en quelque sorte J avais l impression enfin c tait aussi peut tre pour me prot ger moi en tout cas j avais l impression que le fait qu elle persiste vouloir rester avec moi puisque visiblement elle avait l air de me dire que le fait que je sois en fauteuil a lui posait pas de probl me Enfin bon a c tait quand j tais en r ducation apr s l ext rieur il aurait peut tre fallu voir la r alit ce que a aurait t est ce que a aurait pas tenu je sais pas En tout cas je pense que peut tre d une part a me faisait un peu flipper peur de me confronter la situation amoureuse on va dire Et d autre part j avais l impression que si elle restait avec moi a allait lui g cher un petit peu sa jeunesse J e pensais qu elle avait enfin il me semblait qu elle avait s rement meilleur compte tre avec 157 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 des valides plut t que d tre avec un mec en fauteuil Parce que la vie serait plus int ressante pour elle Donc du coup on a rompu Q A votre initiative R A mon initiative tout fait Et puis ce qui a t difficile pour elle puisqu elle s est un peu accroch e
180. e dit c est moi ce que j aimerais bien c est qu Antoine choisisse quand il sera plus grand qu il choisisse un p re son p re quand il sera plus grand Moi je lui dis qu il a d j choisi un p re C est un peu d licat Cet aspect l est un petit peu disons pas fini c est en court c est entrain Maintenant les cons quences sur Antoine a c est autre chose Ca d passe largement le cadre de ma situation de parapl gique Ca c est s r bien videmment Mais sinon au quotidien je me sens Par exemple Antoine s est cass la clavicule au mois de juin en faisant du judo il est tomb il s est p t la clavicule C tait vers mi juin C tait vingt heures le soir au judo Donc sa m re l a emmen tout de suite l h pital aux urgences pour une radio etc enfin faire ce qu il fallait faire Et moi je l ai appel le lendemain matin pour je ne sais plus quelle raison elle me dit elle m informe que Antoine c tait cass la clavicule et qu ils taient all s l h pital hier soir en urgence Et j tais donc tr s surpris qu elle ne me pr vienne pas tout de suite Ca m a cass la baraque qu elle ne me pr vienne pas tout de suite Tiens je vais l h pital Antoine s est cass la clavicule tu nous rejoins ou je ne sais pas Apr s je lui en ai parl je lui ai dit Attends a veut dire quoi a Pourquoi tu ne m as pas pr venu Elle m a dit je ne voulais pas que tu te fasses du souci je n
181. e la personne r alise constamment par le simple fait d tre au monde Or cette activit en effet mobilise toutes les facult s humaines la raison tout autant que la volont l imagination la passion etc Elle pr suppose qu il y ait bien un sujet plein et entier pour vivre le monde l interpr ter et produire des formes Cette proposition pour simple et presque vidente qu elle soit dans le registre qui est le n tre ici ne va toujours pas de soi et c est remarquable bien entendu quand il s agit d tudier la mani re dont la soci t traite ses plus mauvais sujets et tout sp cialement les personnes atteintes d une d ficience La notion d exp rience c est ce en quoi r side son int r t P Le Qu au La sociologie de l exp rience in La construction sociale de la pauvret Cahier de recherche n 138 novembre 1999 p 115 137 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 principal met l accent sur un sujet qui est toujours pour le meilleur ou pour le pire producteur de sens Elle rend donc toujours compte d une laboration Cette construction a lieu dans une rencontre avec un objet L exp rience d crit alors moins une chose qu un rapport une relation toujours probl matique entre un sujet et le monde objectif qui l environne dans ses dimension mat rielles et immat rielles Cette relation doit en outre se comprendre comme un change r ciproq
182. e le domicile et le lieu de travail L existence de probl me de sant rend plus longue la recherche d emploi Les personnes se sentant limit es dans leurs d placements entre le domicile et le lieu de travail sont dans une position encore plus difficile l cart n tant pas tr s important en revanche pour les autres types d incapacit s 80 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 20 Depuis combien de temps cherchez vous un emploi ou un autre emploi Valide malade Incapacit Incapacit Incapacit en quantit en nature en mobilit 1 3 mois 5 4 2 2 0 3 6mois 4 4 3 3 10 6 mois 1 an 10 9 4 6 7 1an 1 an et demi 6 2 3 0 0 1 an et demi 2 ans 8 9 8 9 0 2 3ans 17 10 16 11 0 3 ans et plus 49 62 64 69 83 TOTAL Source CREDOC enqu te emploi 2002 y De moindres exigences dans leur recherche d emploi Les personnes malades et encore plus lorsqu elles se sentent limit es dans leur vie professionnelle cherchent plus souvent un emploi temps partiel et sont plus nombreuses accepter un temps complet d faut elle sont galement plus nombreuses accepter un emploi dur e limit e d faut m me si elles cherchent un emploi permanent elles sont enfin plus nombreuses rechercher dans une gamme large d emplois voire n importe quoi On est donc sur une recherche d emploi moins cibl e Ces diff rence
183. e les quatre mois avant m me les six mois avant cet incident je travaillais beaucoup et j avais un rythme un peu plus Parce qu ici au niveau du boulot il manquait une personne J ai chang mon contrat j ai fait plus d heures je ne prenais pas de perm Donc du coup j ai re modifi mon contrat Je m loigne peut tre de la question initiale qui tait quand je croisais les rythmes vos rythmes Je ne vois pas de diff rence Enfin je vois bien la diff rence quand il y a des gens tr s speed d autres tr s cools II y a une adaptation lors des d placements mais j ai une esp ce d adaptation naturelle en ce qui me concerne en tout cas Alors c est vrai que si il y a un projet de voyage ou quelque chose comme a il y a peut tre une organisation qui est forc ment un peu diff rente Quand j ai des rendez vous avec des gens que je passe la soir e chez des amis Je ne vois pas mieux ou plus sur cette notion de rythme de vie 1 Q En fauteuil vous allez plus vite que ceux qui marchent R Globalement oui Alors le probl me c est les trottoirs en d vers Donc l sur les trottoirs en d vers non C est m me gal re Ca fait mal aux bras etc Sinon oui Apr s a d pend a d pend des gens Mais globalement en fauteuil on va plus vite quand bien s r c est plat et quand c est adapt Globalement on va plus vite D s que a descend un peu a va sans dire Deux trois fois j ai fait remarquer des copains paras en
184. e libert de d placement On tait dans un petit village quand m me assez paum dans la vall e quand m me assez paum quoi Je ne l ai jamais entendu se plaindre d tre isol par un manque de relations Je n ai pas souvenir de a en tout cas Et je crois que jusqu au bout peu pr s et j ai r guli rement vu peu pr s les m mes personnes la maison Et je pense particuli rement son copain du village le transporteur qui tait je pense son conscrit Il venait beaucoup plus r guli rement Ils faisaient des sorties ensembles Il l emmenait en voiture ils allaient se balader On ne parlait pas du handicap je n ai pas l impression en tous cas que le handicap tait le centre de la discussion ou le th me r current qui revienne toutes les dix minutes Peut tre que dans les premiers temps probablement Mais je ne sais pas J tais quand m me assez jeune Mais par la suite ce n est pas l impression que j ai Non je pense qu effectivement ils voquaient beaucoup le travail l usine tout a 1 4 2 La fratrie Les deux fils a n s respectivement et aujourd hui agent de ma trise et magasinier exercent dans la production tous deux ont construit leur maison dans le village natal Les deux derniers enfants ont quitt la vall e natale la s ur est vendeuse dans l entreprise artisanale de ses beaux parents Monsieur Martin travaille dans un service d information destin aux personn
185. e m me temps de parapl gie et tout a On voque tr s tr s rarement ces questions l de tiens comment t as volu depuis vingt ans Comment tu te sens maintenant par exemple ou des choses comme a Je pense qu on le sent Je ne sais pas moi on le sent instinctivement intuitivement On n voque franchement jamais ces trucs 118 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q De quoi on parle R Je ne sais pas De quoi vous parlez avec vos potes Vous parlez de boulot vous parlez de la vie On parle beaucoup de d glingue beaucoup du handicap mais on parle du handicap du point de vue social c est dire un peu de lutte le combat de l accessibilit des droits de la citoyennet etc etc Donc a on parle on en parle trop m me avec certains on en parle trop Des fois on dit oui on arr te de parler boulot Mais l aspect comment on vit le truc tout a franchement non Enfin en tout cas moi avec mes potes Maintenant peut tre que eux avec leurs potes d autres potes peut tre que oui Mais sinon on en parle assez rarement Il n y a peut tre pas grand chose dire ou on a peut tre tout dit Et donc on voque la vie le quotidien les femmes tout Quand avec ses amis parapl giques Monsieur Martin voque le handicap c est sur les plans social et collectif les droits l accessibilit En revanche un voile de discr tion recouvre les v cus personnels de la pa
186. e me sortir de la voiture Je me souviens je lui disais Ne me touche pas J e suis comme mon p re C est dire que tout de suite finalement je savais que j tais parapl gique Consciemment je ne mesurais pas toutes les cons quences de la vie mais en tout cas d un point de vue physique je savais que j tais parapl gique J ai senti mes jambes clout es je les touchais je ne les sentais plus Donc bon voil je savais que j tais parapl gique Alors que la plupart des autres personnes qui se retrouvent para ou t tra enfin moi je parle plut t des para la plupart ne savent pas C est pas parce qu on sait que a passe mieux bien videmment En fait a peut tre tout ou rien ce genre de truc C est dire que c est soit Ah non je pourrai pas supporter de vivre comme lui que j ai vu vivre pendant des ann es comme a Donc je me fous en l air tout de suite Je sais pas comment dire a Soit au contraire c est plut t motivant quoi C est vrai que mon p re il avait une cinquantaine d ann e il tait pas actif comme je le suis moi ou comme le sont m me des parapl giques de son ge mais de maintenant C tait quand m me il y a plus longtemps et il avait eu aussi une vie Il y avait peut tre des cueils que je voulais viter quoi C est dire tre plus autonome que ce que pouvait l tre mon p re par exemple Mais a c tait pas conscient bien videmment C tait comme a quoi Alors je sais p
187. e parler de la m me chose mais quelle image souhaiteriez vous que les gens aient de vous R L on en revient un petit peu ce qu on avait commenc voquer l autre jour mais je pense qu on va y revenir sur le regard des autres le comportement des autres Ce qui est toujours emb tant c est que je sais pas comment dire Bien s r ce que je veux pas et ce qu on veut pas c est que quelqu un pense qu on est malheureux qu on est triste et qu on a une vie de merde qu on peut rien faire qu on est compl tement grabataires qu on est paralytiques Et a on le sent dans le regard des gens dans certaines attitudes dans certaines fa ons de faire On a envie de dire au gens Attends c est pas du tout ce que tu imagines Mais bon a on peut pas Donc effectivement moi je voudrais pas ou je ne veux pas a m emb te disons que les gens puissent penser a parce que a d cale totalement le rapport la relation Et puis en m me temps c est leur probl me c est dire que tout d abord je peux pas savoir ce que les gens pensent Je peux me tromper plein de fois bien videmment Mais en m me temps je ne sais pas Quand des gens vous regardent et voient quelqu un en fauteuil un peu tordu qui des fois fait des efforts parce que a monte un peu Ils doivent se dire oulala Putain le cauchemar que a doit tre Et je veux dire je comprends que les gens pensent a Parce que je suppose qu ce moment l ils se d
188. e qui souhaitait s entretenir avec lui et rendre compte de sa situation Monsieur Martin le sens de l humour S il aime citer des sayn tes signifiant que les personnes handicap es sont des personnes dignes d amour capables d humour sur elles m mes il reste dubitatif propos de certains humoristes qui mettent en sc ne et se gaussent de certaines d ficiences dont il conna t lui les cons quences Toutefois on sent chez lui pointer un sens de la d rision Ainsi utilise t il les qualificatifs des z handicap s des d glingu s des tordus voire des d niap s c est dire de personnes lourdement atteintes L accentuation par le vocabulaire de la situation peut tre consid r e comme une d rision protectrice Elle trouve aussi une expression moins outr e quand Monsieur Martin dit parler boulot R Quand je dis on parlait de boulot c est c est de handicap C est dire des fois quand on est on se retrouve surtout ensemble en r union quelque chose comme a quand on est trois quatre d glingu s comme on dit handicap s comme a souvent on parle du handicap de la situation J aime bien quand il y en a un qui dit bon allez on arr te de parler de boulot Je trouvais a marrant l expression 1 R Les amis en question ils se comptent sur les doigts de la main Je parle de semblables de paras On a peu pr s le m me v cu enfin pas le m me v cu mais l
189. e qui vient d tre dit en termes plus g n raux et distanci s comme il convient dans ce genre de situation tout en lui accordant ce qu il faut de reconnaissance pour lui viter de perdre la face La m re de Na ma d clenche elle aussi ce genre d embarras non pas par l expression de son ressenti douloureux mais par celle d un ressentiment tr s manifeste qui se concentre surtout sur les personnels m dicaux et param dicaux elle est elle m me kin sith rapeute mais elle participe tr s peu aux r unions de l tablissement Centre de R ducation Motrice o est scolaris e sa fille Dans l entretien qu elle nous a accord elle laisse entrevoir de fa on infiniment plus explicite encore sa col re contre ceux qui ne font pas ce qu il faut ou bien n en font pas assez La situation de cette femme permet en tout cas de remettre en perspective une des propositions de C Gardou et de consid rer la perception de la carence de l entourage et des institutions comme extr mement relative Alors que certains comme les parents de Jonathan ont manifestement des attentes modestes en la mati re le niveau d exigence presque impos l entourage comme au professionnel par la m re de Na ma et les parents de Pierre est infiniment plus grand La distance sociale et culturelle qui s pare les parents de Jonathan milieux populaires de ceux de Na ma ou de Pierre m decins ou professions param dic
190. e sant 22 ou par le fait de travailler plus 17 Ainsi si on compare les raisons invoqu es par les personnes valides les personnes malades et celles se sentant limit es dans leur vie professionnelle on constate sans surprise que les personnes malades et se sentant limit es cherchent plus souvent changer d emploi pour des raisons de sant mais aussi pour travailler plus et pour tre mieux pay es Le temps partiel plus fr quent pour les personnes malades et se sentant limit es dans leur vie professionnelle ne semble pas toujours un am nagement satisfaisant le salari concern Est ce li la diminution de salaire qui en r sulte Probablement en partie Est ce le reflet d une difficile acceptation du handicap qui restreint sa capacit de travail et lui donne le sentiment d tre dans une position d amoindri Tableau 16 Pourquoi cherchez vous un emploi En valides malade Incapacit Incapacit Incapacit en quantit en nature en mobilit Il existe une crainte ou certitude de 30 27 26 29 14 perdre l emploi actuel D sire trouver un emploi 17 14 10 14 13 correspondant mieux sa qualification ou formation D sire trouver un emploi mieux pay 13 18 15 11 8 D sire trouver un emploi plus proche 3 2 2 3 5 du domicile D sire trouver un emploi plus adapt 1 5 12 9 22 pour raisons de sant D sire trouver des conditions de 8 9 8 7 8 travail meilleures D s
191. e voulais pas que tu t inqui tes Je lui ai dit mais attends quand m me je suis son p re Q Ce sont les mots que vous avez employ s R Oui bien s r Je ne peux pas faire autrement que d employer ces termes l Alors des fois il m arrive aussi le contraire Je ne sais pas sur certains trucs en me disant mais attends tu n es pas son p re Mais tu n es pas son p re au sens biologique quoi Moralement je le suis socialement je le suis Mais il m es arriv de me dire mais attends Alors est ce que je fais a peut tre pour me resituer les choses ou je ne sais pas En tout cas il m est arriv aussi de me dire a Oui voil Q Cette situation ne vous est pas difficile Elle va de soi pour vous R Ouais elle va de soi elle ne m est pas difficile Elle m est difficile par rapport Antoine peut tre parce que pour lui certainement depuis qu on est en garde altern e depuis maintenant trois ans Antoine s y retrouve plut t bien D abord a a t un souhait de sa part C est quelque chose qu il nous a impos donc a fonctionne tr s tr s bien comme a Non je pense qu il reste une tape Il reste dans l histoire dans cette histoire dans ce parcours je pense qu il reste une tape qui est une tape officielle d officialiser administrativement l galement la situation entre son p re l gal Je ne sais pas les termes d ailleurs si a se dit Qu est ce que le p re l
192. ec le temps on s en fout Par contre ce qui ne change pas me semble t il ou qui change peu encore que dans ma ville c est particulier par rapport au reste de la France part quelques grandes villes les gens ils en n ont un peu rien faire maintenant mais c est le comportement des autres C est a qui est difficile C est pas le regard Le regard c est normal qu on regarde Moi le premier je vais voir quelqu un dans la rue qui fait deux cents kilos je vais le regarder Parce que c est pas tous les jours qu on voit quelqu un d norme Si en plus il est noir a fait un truc en plus Et si il boite n en parlons pas Et a c est normal Moi le premier si je vois quelqu un de tr s handicap un profil que j ai rarement vu je vais regarder C est humain Apr s ce qu on met derri re c est autre chose mais a c est les questions de chacun Donc a le regard il est naturel La curiosit elle est naturelle Et le top videmment c est les enfants Alors l dans le top regard et spontan it c est les petits c est les enfants L a fait plaisir Non le plus Le plus difficile c est le comportement C est l attitude Q Par exemple R Par exemple je sais pas Ce matin je suis all la dans la mairie de ma commune J y suis all en tram Je viens il y a des petits chemins comme a pour acc der la Mairie C tait pas tr s grave Il y a une dame qui est rest e t tanis e a tournait un petit peu et j ai vu
193. ec qui avait le pied pos l dessus par exemple Il discutait il se tenait Il avait le pied pos l dessus Q Et a R C est bien Moi je m en fous Et m me apr s quand je bouge je suis soucieux de voir o est son pied quand je vais man uvrer J e pourrais tr s bien tre tr s salaud et bloquer le pied Q Vous voyez a comme un lien et pas comme une irruption R L exemple du pied l dessus c tait une fois se tenir au poign es c est tr s tr s ponctuel enfin tr s rare Non le fauteuil c est pas moi Par contre quelqu un qui s appuierait sur mon paule dans le tram les choses seraient diff rentes ou prendrait appui sur ma t te bien videmment ce serait diff rent Mais les gens qui prennent appui sur le fauteuil moi a me parait naturel Q Et chez vos amis parapl giques c est la m me sensation L T Oui Oui je sais pas trop Je pense que c est quand m me propre ma ville parce qu il y a les transports en communs adapt s accessibles Oui moi je pense deux trois copains Je pense pas en tous cas qu ils prennent a comme une sorte de violation de l intimit ou de son corps ou de je sais pas quoi Franchement je ne pense pas En tous cas en ce qui me concerne c est non au contraire c est quelque chose de positif Dans l espace public la mobilit de Monsieur Martin est limit e par les obstacles et les gens Les obstacles des fils sur le sol et surtout leur addition sont source de difficul
194. el qui devient d ailleurs qui est plus que du personnel ce niveau l et qui deviennent des amis des copains des copines C est peut tre parce qu on sait que ces gens l connaissent plein d autres situations ont vu beaucoup d autres fonctionner comme a Donc c est peut tre un peu plus facile et puis bon je crois que c est une question d affinit de rencontres de gens Q Est ce que depuis cinq ans o vous avez renou avec des personnes que vous connaissiez avant l accident est ce que vous avez pu leur demander pour quelle raison il y a eu ce long d lai Quelle est votre explication propos de ce long d lai et quelle est celle qu ils vous ont donn eux R L explication principale que eux ont pu me donner et l je pense deux copains c tait la g ne de leur part surtout surtout apr s l accident les quelques temps apr s l accident Apr s il y a des choses de la vie qui font qu on se voit moins les gens font leur famille enfin il y a tout a Surtout apr s les copains taient tr s tr s g n s de venir me voir l hosto par exemple Tout d abord j tais loin il y avait la distance g ographique mais il y avait cette g ne je sais pas pourquoi de venir me voir l h pital Par la suite j ai d m nag bien que c tait pourtant pas loin Et puis je pense que bien s r il y a moi qui ai pris des distances parce que assez rapidement j avais un peu le sentiment l impression qu on tait plus to
195. enons mieux qu chaque fois qu un soignant s occupe d un patient et ce d autant plus s il le fait consciencieusement les aspects contractuel et salari de la relation du soignant avec l institution sanitaire n emp chent pas le patient de se sentir redevable car de son point de vue c est lui que l on rend service et c est un autre que ce pr cieux temps n est pas accord Or dans cette thique du don et du contre don Le don non rendu rend inf rieur celui qui l a accept Ceci explique une partie du profond malaise induit par la situation de d pendance Certains patients pour se d fendre de ce sentiment d inf riorit affectent de tenir pour n gligeables le service rendu ou bien ils inventorient la liste de ses imperfections D autres encore choisissent de le consid rer comme un d D autres mais ce sont souvent les m mes en d autres circonstances optent pour une strat gie d utilisation des valides Cette derni re ligne de conduite implique un retournement de l thique du don se pla ant dans la perspective d tre consid r comme inf rieur du fait de leur handicap les patients profitent de la piti qu ils suscitent pour obtenir de nombreux menus avantages et services et par l m me ils rendent corv ables tous les valides qui n osent refuser en raison de la piti qu ils prouvent l gard des patients et donc du statut inf rieur qu
196. ent c est fait c est fait Oui bien effectivement c est pas la peine de se prendre la t te sur quelque chose qui est irr versible qu on ne peut pas changer Donc autant essayer de faire en sorte que a soit plut t blanc que noir hein Et en grandissant en vieillissant c est de plus en plus valable quoi De plus en plus a me colle de plus en plus J e suis de plus en plus en accord avec a L histoire de Monsieur Martin n est pas banale En effet comme lui son p re a t bless m dullaire l ge de 45 ans Monsieur Martin a donc v cu dans une famille ayant connu et g r la parapl gie Monsieur Martin indique que m me si ce n tait pas chez lui conscient l poque il a souhait ne pas g rer la parapl gie de la m me fa on que son p re et tre plus autonome R Donc je pense que a c est quand m me une diff rence enfin une diff rence Je pense que a peut peut tre faire la diff rence je sais pas En tout cas j avais un p re parapl gique Mon p re lui s est plant a eu un accident j avais douze ans Et donc jusqu ce que moi j ai mon accident pendant une p riode de sept ans bien s r je vivais la maison donc je le voyais voluer Forc ment je l aidais Quand j ai eu l accident sur le moment le choc l accident de voiture un peu b te J avais un copain qui tait avec moi qui lui n a pas t bless donc qui a pu sortir de la voiture tout de suite et a essay d
197. ent de leur situation de stigmatis Comme le dit Monsieur Martin dans la file d attente la caisse la personne en fauteuil est assise elle peut donc attendre son tour CONCLUSION Au terme de la pr sentation th matique des entretiens r alis s avec Monsieur Martin je pense que l on peut mettre en avant quatre points suppl mentaires Q Qu est ce que le handicap vous a appris R Que la vie tait fragile et qu en m me temps elle est extraordinaire Je pense que c est la premi re vidence Est ce que c est le handicap ou est ce que c est le fait d avoir fr l la mort et d tre toujours l Je pense que c est plut t videment a Maintenant apr s point de vue handicap pur et dur c est dire le fauteuil etc on apprend forc ment se conna tre Oui on apprend se conna tre m me sur deux pieds Enfin j ai envie de penser qu on apprend plus sur les autres parce que du coup on a Comme les gens n ont pas toujours un comportement pile poil avec nous du coup on d couvre un peu ses cong n res sous un angle qui est pas toujours des plus glorieux Ou alors au contraire on rencontre des gens qui sont extraordinaires d amour de bont Quand je me suis plant dix neuf ans vu d ici j tais un grand gamin Donc j ai d couvert un peu le monde la vie active etc surtout depuis que je suis parapl gique Donc c est pas a qui m a fait d couvrir le monde mais sous un certain angle quoi Qu est ce que le
198. ent dit E Goffman l appelle modalisation Il s agit d op rer une transformation sur un mat riau d j signifiant selon un sch me d interpr tation sans lequel la modalisation serait d pourvue de sens 1991 p 54 C est donc une proc dure par laquelle un v nement change de signification par la mise en vidence le d voilement ou bien la manipulation des cadres dans lesquels il pourrait s inscrire Les interactions quotidiennes fourmillent d exemples mais les rituels et c r monies plus formelles en sont aussi des illustrations frappantes Dans l ordre de la vie courante les plaisanteries et autres mises en bo te d montrent parfaitement ce m canisme Il s agit typiquement de faire croire quelqu un quelque chose qui peut d stabiliser sa compr hension de la situation jusqu ce qu on lui d voile que c est seulement pour rire La manipulation de la r alit n est d ailleurs pas le propre que des situations ludiques quotidiennes elle est m me une pratique politique assez courante il n est besoin que de se rappeler l affaire des armes de destruction massive qui a justifi la derni re campagne guerri re en Irak Mais il n est pas certain que dans ce cas le Pr sident am ricain souhaite lever le voile sur le cadre d finitif qui convient pour appr cier sa juste valeur cet v nement Tandis que les d boires de T Blair somm de se justifier sur ce
199. ent seuls Alors souvent au d but on se d mmerde seul Moi je me souviens au d but le tout premier appartement que j ai pris mais c tait du n importe quoi Mais bon on a besoin de faire a pour voir ce qu on peut faire Et puis il faut qu on se prouve soi m me qu on n est pas compl tement cass On assure Donc je me souviens par exemple d avoir d croch les fen tres pour faire les vitres par exemple Je d crochais la fen tre je la posais par terre Je faisais les vitres je raccrochais la fen tre C tait n importe quoi parce que les fen tres taient tr s lourdes Elles taient en bois en plus elles taient tr s lourdes J aurais pu d abord me la prendre sur la t te J aurais pu me blesser J aurais pu la casser Ca c est jamais pass Bon a c tait la premi re ann e le premier appart que j avais Et m me des t tras des t tras ils essayent de faire un max tous seuls et c est pas souhaitable Donc rapidement on arrive prendre quelqu un c est quand m me mieux Donc moi la d pendance voil peu pr s quoi elle se r sume Autre exemple tout frais hier je suis all voir ma s ur Je suis tomb en panne sur l autoroute Bon c est chiant de tomber en panne sur l autoroute pour tout le monde Mais en fauteuil a se complique un petit peu D j ne serait ce que de sortir de sa voiture quand on est sur la bande d arr t d urgence C est tout b te mais on peut pas sortir de l autre c t On ne peut p
200. er sur ce que peuvent vivre les parents brutalement confront s l v nement de la d ficience avant qu elle ne se transforme en handicap Elle est explicit e dans le mythe de la Gorg la Gorgone M duse que doit vaincre le h ros Pers e pour plaire au tyran Polydectes On se souvient sans doute que ce monstre hideux a l trange propri t de p trifier c est dire de litt ralement changer en pierre celui dont le regard croise le sien Comme tous les monstres dans tous les contes et l gendes Gorg si ge entre deux mondes ou plus exactement t moigne dans le n tre de l existence d un monde au del d o sa forme fantastique et bigarr e Parce qu il proc de de la rencontre de deux univers le monstre est toujours un m lange En l occurrence la g n alogie de la M duse la rattache la Nuit et plus loin encore au Chaos qui a pr c d la s paration des l ments et la mise en ordre du monde Son pouvoir tient donc au fait qu elle laisse entrevoir l imprudent qui l observe fascin quelque chose qui exc de tr s largement les limites du sens et d borde compl tement son entendement une puissance qui indistinctement est source de vie et de mort La M duse repr sente donc de bien des mani res l absolument autre que ne peut affronter l homme sans risquer de s y perdre quand je regarde Gorg dans les yeux dit J P Vernant c est moi que je vois ou plut t ce qui en moi est d
201. erais plus jamais A mon sens a doit tre insupportable et je pense pas qu on tienne vingt ans Franchement je pense pas qu on tienne vingt ans Monsieur Martin n a plus la nostalgie d avant la parapl gie Il se demande m me si c tait sa vie Le deuil de la fonction perdue est donc possible Pour le dire autrement la vie de parapl gique n est pas un ersatz de vie N ayant pas choisi la parapl gie Monsieur Martin s est positivement adapt elle M me s il doit tre vigilant sur la gestion de son tat de sant notamment sa vie n est pas au rabais et il peut apporter sa contribution propre la vie collective justement en s appuyant sur l irr ductible exp rience de sa situation qui recoupe celle de ses pairs 3 UNE NOUVELLE VIE La parapl gie a mis Monsieur Martin dans une situation radicalement diff rente c est une nouvelle vie car au propre et m taphoriquement il n a plus vu les choses de la m me hauteur car il est irr m diablement assis Ce faisant il a rencontr de nouvelles situations la gestion sp cifique de son corps t confront de nouvelles relations intimes avec les femmes et sociales les attitudes d autrui Au bout du compte et malgr ou cause de ces changements il n est pas s r que les d tours auxquels il a eu recours ne lui aient pas permis de se doter d une sorte de s r nit int rieure illustrant une gestion apais e d une condition a priori dif
202. erview s Un sixi me seulement de cette population est compos de femmes La fourchette des ges s tend de 18 70 ans avec une repr sentation massive de la cat gorie des 20 35 ans Les patients sont pour la plupart tr s largement issus des cat gories socioprofessionnelles d ouvrier d tudiant ou de profession interm diaire Dans le cadre de son s jour en centre de r ducation chaque patient est suivi par une quipe pluridisciplinaire compos e d un m decin d infirmi r e s et d aides soignant e s d un kin sith rapeute d un ergoth rapeute d une psychologue et d une assistante sociale Tous ces acteurs ont accept le principe de l observation mis part quelques aides soignantes ce qui nous am ne un total de 38 personnes observ es Ont t interview s en g n ral huit soignants par cat gorie professionnelle le maximum d intervenants lorsque leur nombre tait inf rieur huit soit un total de 35 personnes 36 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Populations d enqu t s BObserv s Hinterview s M decins Infirmiers A soignants Kin Ergo Psycho A sociales Patients L observation et les interviews sont des techniques d enqu te qui se r v lent tr s compl mentaires L observation permet de mettre en exergue les gestes les rythmes les postures les distances entre les corps l apparition verb
203. es ditions Athanor 1993 Mais et le ph nom nes s est amplifi depuis B atrice Coroller une jeune secr taire devenue parapl gique l ge de vingt ans trouve en Albin Michel un diteur g n raliste de renom pour publier son t moignage Preuve suppl mentaire de l apparition de ce cr neau ditorial la collection Handicaps chez Descl e de Brouwer a publi quelques autobiographies de personnes handicap es ainsi que des textes crits par des personnes c toyant de pr s le handicap Enfin et l aussi chez des diteurs de renom d autres personnes handicap es pr f rent quant elles privil gier la forme romanesque m me si elle s appuie sur leur condition de personne handicap e Cette masse documentaire v ritable corpus analysable peut m me faire l objet d une r flexion La pr sente contribution peut constituer une tape suppl mentaire ce processus de publicisation en cours En effet si Monsieur Martin a accept de me rencontrer je ne crois pas qu il ait jamais lui m me pens rendre public son t moignage la d marche de recherche peut donc d boucher sur la publication augmentant ainsi le nombre de r cits centr s sur le handicap 1 L insertion professionnelle des personnes handicap es en France Alain Blanc et Henri Jacques Stiker sous la direction de Collection Handicaps Descl e de Brouwer 1998 12 Andr Trannoy Risquer l impossible Editions Athanor 1993 13
204. es handicap es La fratrie est compos de trois fils et d une fille Monsieur Martin est le troisi me il a deux fr res plus g s et une s ur plus jeune Dominique le fr re a n n en 1955 souhaitait faire une formation en menuiserie mais trop loign e du domicile il n a pu la suivre pour des raisons financi res co ts li s l loignement Il a donc obtenu un BEP m canique Apr s avoir travaill dans une entreprise construisant des maisons en kit il a trouv dans la vall e alpine natale une place dans une entreprise m tallurgique dans laquelle il a fait carri re Dans une autre entreprise et apr s des formations internes il est depuis 2001 agent de ma trise Il veut continuer progresser Avant de reprendre en 2000 une activit professionnelle elle fait du montage la cha ne son pouse pendant dix huit ans a fait des petits boulots parfois r mun r s mais temps partiels elle s est occup e d enfants l cole maternelle Ce couple a eu trois enfants L a n e n e en 1982 fait des tudes de pharmacie la seconde n e en 1985 souhaite devenir ing nieur le dernier n en 1987 est dans une cole d b nisterie et veut devenir compagnon Construite dans la village la maison du couple a t en partie con ue pour tenir compte de la parapl gie de Monsieur Martin la chambre d amis est au rez de chauss e les toilettes sont adapt es au fauteuil Roger le fr
205. es malades Les carts restent faibles entre ces quatre populations 68 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Les deux principales formes prises par cette assistance est l am nagement du temps de travail et le soutien ou la compr hension des coll gues et sup rieur L am nagement de poste ou le changement de poste de travail viennent ensuite Les autres formes sont beaucoup moins cit es L am nagement du temps de travail comme le regard de compassion des coll gues peuvent avoir des effets pervers en objectivant le caract re d viant de la personne Le fait d avoir des horaires all g s ou am nag s est un signe de l amoindrissement de la capacit de travail de la personne 9 des personnes se sentant limit es dans la quantit de travail qu elles peuvent r aliser b n ficient d un am nagement du temps de travail qui ne fait que conforter le salari dans son sentiment d incapacit De m me le regard des coll gues et sup rieur qui comprennent renvoient au malheur et la souffrance de la personne interrog e qui fait preuve d une attention particuli re reflet de son handicap Tableau 10 B n ficiez vous d une assistance ou d une adaptation de votre poste de travail ceux qui travaillent R ponses multiples parmi les oui malade Incapacit Incapacit Incapacit en quantit en nature en mobilit Non 78 2 76 8 76 2 75 7 Oui 22 8 23 2
206. es que le commun des motels ignore Il fait douloureusement l apprentissage d une nouvelle mobilit corporelle la pratique des transferts et doit g rer un corps fragile et pr caire les escarres A la faveur de ses contacts avec le monde ext rieur aux tablissements de r ducation il d couvre les regards scrutateurs de nos concitoyens Monsieur Martin nous dit quel point ils sont importants dans la construction de sa nouvelle identit mieux il les recherche Un corps devenu parapl gique c est un corps qui n cessite des attentions de l coute car il peut produire des d bordements les fuites urinaires troubles spinct riens ou conna tre des troubles li s une mauvaise gestion des vacuations infections Quand ces troubles l ordre des civilit s se produisent Monsieurt Martin rel ve qu ils sont plus facilement accept s quand on est entre pairs qu en pr sence de personnes non handicap es Mais le sentiment de pr carit volue sans dispara tre toutefois avec le d veloppement de l autonomie Puisqu il a appris conna tre son corps Monsieur Martin se trouve dans une position d expert y compris vis vis du corps m dical Militant du handicap il veut faire conna tre son exp rience l inscrire dans les r alit s mentales de nos concitoyens qu il souhaite duquer Alors que selon nos normes communes son corps est objectivement handicap Monsieur Martin prouve n anmoins une
207. est toujours mais avec une tendance penser qu effectivement la situation du handicap oui bien s r a contribu a 1 Q Est ce que vous pourriez dire que le handicap vous a appris parler tre je veux dire parler de soi se comprendre R Est ce que c est le handicap lui m me qui m a appris Ou est ce que c est le fait justement ce type de contact par exemple qui sont directement li s au handicap qui font que on est amen de temps en temps des moments de sa vie a tre confront des interviews par exemple d une infirmi re du sociologue etc etc du coup alors que debout il n y aurait peut tre pas eu ces trucs l Par contre parler de soi ce n est pas C est difficile c est plus difficile C est d licat ce n est pas toujours pr cis Souvent des fois j ai r fl chi ce qu on s est dit je me suis dit merde c est pas comme a que tu aurais d dire c est plut t comme a Ah j aurais d compl ter en disant a Par contre tre forc ment ce que je suis c est aussi par moments par certains aspects c est forc ment en parall le du parapl gique que je suis C est forc ment le parapl gique que je suis qui va parler ou il y a des fois c est Louis tout simplement Bien que non d sir le handicap constitue pour Monsieur Martin une opportunit qui l a instruit et rendu plus fort Sa situation l am ne relativiser beaucoup de choses et se
208. et la mise en valeur de comp tences relationnelles aux marges des professions interm diaires Pour arriver une validation de cette th se une premi re saturation il conviendrait d effectuer d autres r cits de vie avec des personnes devenues parapl giques un ge identique et plus g n ralement d tendre les r cits de vie d autres personnes qui ge gal concernant la survenue de la d ficience sont aujourd hui atteintes d autres d ficiences sensorielles mentales Autres hypoth ses qui pourraient tre test es le tremplin constitu par le passage en tablissement le soutien des pairs dans la prise en charge la reconstruction d une image positive de soi l apprentissage de comp tences relationnelles avec autrui Au fond dans cette contribution et toute chose gale par ailleurs je souhaite me placer dans la mouvance du tr s beau travail de Maurizio Catani qui propose une histoire de vie sociale d une personne Tante Suzanne qui modiste dans la Mayenne l poque de la grande Guerre a pous un horloger parisien Ce n est pas le lieu ici de d tailler les multiples aspects de cet ouvrage modalit s de recueil des informations et leurs justifications th oriques lien entre anthropologie et exp rience individuelle commentaires labor s de s quences d entretiens Selon Catani l histoire de vie sociale est d finie par cinq traits dont trois correspondent mon propre t
209. etc Quand je suis avec Antoine par exemple ou quand on est quand je suis avec une femme on sent Ah ils ont amen un petit Ah tiens il y a une femme C est bizarre On le sent bien a Ca c est marrant Et a je pense que tout le monde peut le sentir Il suffit de se mettre dans un fauteuil L autre fait un peu comme a Et a tout le monde peut le sentir Et a c est int ressant humainement c est s r c est int ressant Avec le temps bien s r on voit pas enfin on voit plus le regard des autres C est s r Par contre j ai conscience quand je rentre dans un lieu un peu limite Tiens une entr e au restaurant par exemple une salle de restaurant rentrer la salle quasiment pleine Il se trouve qu une des tables est libres Donc il y a des fois a passe largement mais il y a des fois o c est pardon pardon Donc l forc ment on est rep r On est rentr dans le restaurant pas tr s discr tement quand m me Ca c est difficile Ca c est difficile au d but Maintenant je m en tape Il y a des fois on aimerait bien quand m me passer inaper u Donc il y a des fois certains lieux certains types de trucs on vite Enfin moi j vite Je me dis C est pas la peine de me faire chier traverser un truc pour aller au restaurant J irais ailleurs ou j irais demain Je sais pas Mais c est pas forc ment des choses qui me freinent quand elles sont sur le moment a c est s r Mais oui le regard des autres av
210. ettre une heure pour tre pr t le matin ou tant de temps pour monter dans la voiture o ainsi de suite ah merde je perd du temps au d triment d autre chose En tout cas c est un truc qui ne m est jamais venu l esprit Et puis finalement le fait de devoir dans certains cas mettre plus de temps pour faire certains trucs on va peut tre consid rer que dans certains cas pendant ce temps l il peut se passer des choses qui ne se passeraient 154 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 pas en temps normal disons qui pourraient tre des rencontres qui pourraient tre de voir des choses Je n ai pas d exemple forc ment tr s tr s pr cis qui me viennent comme a C est plus une esp ce de sentiment d impression que de r alit vraiment Mais enfin je n ai pas l impression de perdre du temps j ai l impression quand m me d avoir du temps oui d avoir du temps Oui voil A vrai dire c est int ressant parce que je n avais jamais pens cette id e de la notion du temps li au handicap En rappelant que le handicap n est pas la maladie Monsieur Martin s inscrit dans la dur e Son tat de parapl gique l oblige s adapter s il sait qu il lui faudra plus de temps pour g rer le quotidien il ne vit pas ce d calage comme une humiliation Mais l objectivit de sa situation ne peut tre qualifi e de positive ou de n gative dans son esprit elle est neutre Comme
211. euil Hachette 1998 Winkin Y Erving Goffman Portrait du sociologue en jeune homme in E Goffman Les moments et leurs hommes Paris Seuil Minuit 1988 33 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 L ACCIDENT LA METAMORPHOSE DE LA VIE Eve Gardien Centre de Sociologie des Repr sentations et des Pratiques Culturelles Universit Pierre Mend s France Grenoble L institutionnalisation de la vie ordinaire en routine quotidienne la stabilisation des attentes r ciproques entre interactants enracine en nous l illusion d une immuabilit d un moi une fois atteint l ge adulte Les th orisations les plus classiques du moi prennent en compte le changement en terme d volution et plus pr cis ment de d veloppement et soulignent par l l aspect cumulatif des acquisitions en se restreignant aux seules p riodes de l enfance et de l adolescence Cette description du d veloppement de l tre humain s chelonne g n ralement en stades ou phases dans un continuum qui implique un ordre de passage d une phase la suivante en fonction d un rythme correspondant bien souvent une chelle des ges biologiques On peut parler aussi d autres conceptualisations du d veloppement du moi conceptions qui stipulent que les fondements immuables de la personnalit sont construits relativement t t dans la vie d un tre humain le reste des changements ult ri
212. eur pour la famille les parents et la personne elle m me D s les premiers stades les troubles du comportement mettent mal l aise et suscitent des comportements de fuite Dans ce regard de l entreprise sur le probl me de sant de la personne outre l employeur le r le de l quipe et des coll gues n est pas minorer Une enqu te de la CFDT avait notamment montr l hostilit que les personnes handicap es peuvent ressentir au sein de l quipe ou tout du moins l attitude timor e des coll gues tr s souvent galement issue d une certaine m connaissance vis vis des cons quences du probl me de sant Lors de l embauche d un travailleur handicap certaines entreprises font ainsi le choix de sensibiliser informer et aider les coll gues mieux conna tre le handicap qu a la personne ses cons quences sur la vie en entreprise et sur ses relations avec ses coll gues ce qui facilite l arriv e de la personne handicap e Une personne sourde d une oreille peut tre ainsi consid r e comme peu avenante si on lui parle souvent du c t o elle entend mal ce qui peut tre interpr t n gativement ou mal compris ne vient que de son probl me de sant sur lequel une certaine information est souhaitable alors 63 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 5 Quelles sont les d ficiences qui suscitent le plus souvent un sentiment de limitation dans la vie profes
213. eurs n tant jamais que des r am nagements superficiels de la personnalit Anselm Strauss quant lui propose une troisi me alternative Il est possible de conceptualiser le d veloppement ou les rapports entre permanence et changements avant et apr s comme une s rie de transformations reli es entre elles Par l acquisition de nouvelles taxinomies de plus en plus complexes et se rempla ant les unes les autres au fur et mesure d une appr hension plus d taill e du monde l acteur modifie sa compr hension et par l m me son comportement La mise en place d une nouvelle terminologie classificatoire implique des volutions de la perception de la m moire de l valuation etc Toute acquisition de connaissances suppl mentaires est donc irr versible et transforme in luctablement la vision de soi des autres et du monde Cette troisi me alternative repose sur le postulat d un changement toujours possible d un changement qui ne serait pas chaotique mais bien structure in proces tout au long de l existence Cette option th orique soutenue par Anselm Le titre choisi est la reprise in extenso d une expression utilis e par un patient bless m dullaire pour qualifier son v cu de changement Institutionnalisation processus consistant en une typification r ciproque et partag e une historicit l origine de la typification et un contr le social ayant tendance maintenir en l
214. eut tre maintenant j assume mieux les choses j assume les choses quoi Monsieur Martin cerne avec pr cision et v rit l une des situations rencontr es par les personnes handicap es situation dont il est pourtant l initiateur involontaire Il signale d abord la g ne qu il ressent chez ses proches Il rel ve ensuite la culpabilit dont quelques ann es apr s des amis lui ont fait part car ils n ont pas pu ou su tre la hauteur de l atteinte subie par Monsieur Martin Face au traumatisme les mots ont manqu tous la d ficience m me quand comme ici elle frappe une famille qui la conna t d j reste peu socialisable Et de m me qu on parlait peu du handicap quand le p re tait l un sch ma identique sera reproduit avec la parapl gie du fils On dirait que le silence est ad quat la gestion de la d ficience Dans la famille on ne parlait pas du handicap du p re R On parlait de quoi On parlait finalement on parlait un peu de tout on parlait pratiquement pas du handicap quoi Il n y avait pas grand chose en dire forc ment Moi j avais tendance un peu essayer de le motiver le p re NDA quoi De le motiver oui de lui faire part des nouveaux mat riaux par exemple des fauteuils ce genre de trucs quoi On changeait pas tellement l dessus comme deux vieux potes qui vont changer sur un truc qu ils ont en commun quoi En m me temps on se voyait pas non plus tr s souvent Q
215. exemple Exemple concret un jour j allais dans une grande surface Je vais pour stationner sur les places r serv es Pas de place libre Je me gare donc un peu plus loin Je reviens C est au m me moment une voiture quitte un des emplacements r serv s et une autre arrive une fourgonnette d un artisan Le mec il sort de la voiture donc videmment sur ses deux pattes et tout C tait midi et demi Le mec il sort de la voiture et moi je passe ce moment l En g n ral j oublie C est bon j ai donn je ne vais pas passer ma vie on va pas passer sa vie militer enfin il faudrait mais bon a va quoi Donc c est de temps en temps Et je dis sympathiquement Bonjours excusez moi vous tes concern par le panneaux En tout cas je m efforce de rester sympa Le gars me dis non je ne suis pas concern par le panneau Je lui dis parce que moi je le suis J ai quand m me gal r pour stationner Il me dit oui je sais mais j en ai pour trente secondes Je lui dit oui mais 168 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 est ce vous croyez que pendant trente secondes la terre arr te de tourner et tout se fige par rapport vous Il me dit oui mais je vais chercher un sandwich Oh puis merde Et le mec il s est cass il s est cass comme a Alors en m me temps a c est un des rares cas J ai trouv le mec tellement gonfl que du coup a passe Parce que c e
216. fait que c est plus difficile avec quels l ments vous pourriez me l indiquer R L il y a beaucoup de choses Il y a d j l aspect physique de red couvrir son corps d nouveau se sentir peu pr s l aise dans son corps Ce qui est pas gagn quoi bien s r Je dirais la souffrance physique qui est au d but qui est lourde qui est difficile qui bouffe beaucoup d nergie Qui aussi en m me temps vite enfin vite ou emp che de trop de prendre la t te avec des choses de la vie sociale tellement on a mal finalement on focalise pas mal l dessus Comment caract riser un petit peu cette difficult pendant cette esp ce de principalement enfin principalement de minimiser les choses du handicap Minimiser c est dire de par exemple de ne pas voquer peut tre les probl mes qu on a que les gens ne voient pas en nous voyant J e pense aux probl me d escarres les probl mes de peau les sensibilit s etc Alors je pense qu il y a principalement a pourquoi a Parce qu on ne l assume pas parce que a fait chier parce qu on va pas comprendre parce qu on pense que l autre il va se dire c est beaucoup plus dur que enfin il est beaucoup plus handicap que ce que j imaginais par cons quent il est un peu plus plaindre etc M me si tout le monde ne fonctionne pas comme a videment il y en a qui n en ont rien foutre et tant mieux Voil peu pr s ce que je peux dire l dessus j ai du
217. fauteuil et je pense un particuli rement qui d ailleurs est d c d maintenant qui tait pourtant jeune plus jeune que moi m me qui avait une attitude avec le fauteuil qui tait pas Alors oui on va plus vite que les autres Quand moi je me d place avec des gens qui marchent je m adapte je me mets au rythme Q C est difficile R Non pas du tout C est spontan C est dire qu on voit bien comment les gens marchent donc moi je vois bien ce qu il faut donner comme impulsion pour tre au niveau Alors l dessus quand il y a une nouvelle rencontre par exemple c est l inverse C est eux qui essayent de s adapter Bon on va pas expliquer les choses mais quand il faut formuler les choses c est moi qui m adapte et basta Comme moi je peux aller plus vite de toutes fa ons Je pense qu il y a des gens en fauteuil qui sont un peu les m mes que ceux que je d crivais tout l heure avec leur caddies en grande surface qui vont man uvrer de fa on extr mement rapide alors qu il y a du monde autour Dans des magasins dans des lieux comme a Et a fait peur aux gens Alors des fois les gens ils se d placent ils reculent Donc je pense que les personnes handicap es ont aussi des choses faire pour pas pour tre mieux int gr es mais pour cohabiter Je ne sais pas comment le dire d ailleurs Moi je suis en tout cas tr s soucieux de a Est ce que je serais soucieux de la m me fa on debout Je ne sais pas Je
218. ffinit s Je me souviens par exemple que avec un infirmier il s appelait Patrick un vieux baba je me souviens on allait de temps en temps au cin par exemple C tait des relations amicales lui il ne faisait pas a dans le but de sortir du centre Enfin je crois pas en tout cas que c tait dans ce but l Une fois on est sortis c tait un grand groupe une pizzeria et ce genre de trucs Il y avait des infirmi res par exemple dans la premi re ville o j tais en tout cas qui logeaient qui taient du sud de la France qui logeaient dans une maison pour le personnel 119 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Quand elles avaient des cong s par exemple qu elles rentraient pas chez elles ou autre on passait du temps ensemble L o c tait encore plus flagrant c tait dans le second centre de r ducation d abord parce que beaucoup de personnel habitait proximit L c est pas un h pital contrairement au pr c dent C est un centre pour nous c tait plus un Club Med qu autre chose d ailleurs C tait bien videmment c tait a avant tout en tout cas pour les comme moi qui sont arriv s r duqu s enfin autonomes disons Parce que l il y avait une vie beaucoup plus riche il y avait un bar un cin ma C tait plus qu un centre de r duc Donc l il y avait encore plus de choses qui facilitaient cette proximit notamment le bar la caf t Apr s le repas de midi on pre
219. ficile du moins selon les crit res des valides que son exp rience lui permet de relativiser 3 1 MOBILITE ET RAPPORT AU CORPS La survenue de la parapl gie c est dire le d finitif passage de la situation debout la position assise en fauteuil roulant a deux cons quences notoires la r duction de la mobilit et la construction d un nouveau rapport au COrps 139 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Qu est ce que le handicap a chang pour vous R Alors on peut peut tre r p ter ce que j ai dit l autre jour mais effectivement tout Forc ment il y a tout qui change Apr s forc ment il y a plein de points diff rents En premier lieu le plus important c est la mobilit la notion de mobilit donc qui forc ment d termine tout ce qu on peut faire dans la vie Ca c est flagrant tout de suite c est dire que en phase de r ducation dans cette p riode l quand on fait par exemple une premi re sortie en ville ou hors du centre en fauteuil on est tr s maladroit parce qu on n est pas hyper autonome D un coup il me semble enfin en tout cas a a t mon cas on a l impression d voluer plus ou moins sur une plan te qui est devenue hostile C tait en ce qui me concerne c tait il y a vingt ans donc les choses ont consid rablement chang Bien qu il y ait encore des r gions de France o l accessibilit c est pas a Donc a a fait une dr le d i
220. financi re du probl me de sant peut inciter se retirer dans l inactivit sans qu il y ait un sentiment de manque ou bien une activit essentielle dans la vie sans quoi l individu aura du mal se r aliser et avoir une place dans la soci t L ge le sexe le type de d ficiences son anciennet sont autant de param tres qui influencent les attentes de la personne vis vis du travail Ne pas travailler est en g n ral mieux accept et tol r pour les femmes et les personnes de plus de 55 ans par exemple Mais ces attentes vont tre plus ou moins facilement satisfaites Il s agit dans un second temps d tudier les conditions de travail de ces personnes si leur probl me de sant est pris en compte et comment si cette prise en compte est satisfaisante quel type de poste elles occupent quel rythme de travail leur est propos quel salaire etc Quel regard portent leurs coll gues et leur sup rieur sur elles et leur probl me de sant Pour celles qui sont la recherche d un emploi rencontrent elles plus de difficult s que les autres pour s ins rer professionnellement Le sentiment de limitation dans le travail d pend ainsi des conditions offertes pour travailler Une personne aveugle se sentira moins limit e pour travailler sur un ordinateur si elle b n ficie d un clavier en braille C est toute la question des am nagements dans le travail au probl me de sant de la fa on dont ils sont
221. ge le probl me de sant s aggrave rendant plus difficiles les capacit s de travail mais galement avec l ge la personne se sent moins employable En effet si parmi les personnes malades qui travaillent la part de celles d clarant une incapacit en quantit de travail par exemple cro t r guli rement avec l ge 18 parmi les 15 24 ans jusqu 44 parmi les 60 ans et plus elle volue de mani re beaucoup plus chaotique parmi celles qui ne travaillent pas Apr s une forte augmentation jusqu 40 ans de 31 parmi les 15 24 ans 70 parmi les 40 49 ans elle plafonne avant de redescendre apr s 60 ans 58 Ces volutions entre incapacit et ge sont valables pour les trois types d incapacit s Outre la gravit du probl me le sentiment d incapacit se d finit galement par rapport ce qui est attendu par les employeurs On verra ult rieurement qu une des raisons avanc es parmi les personnes 59 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 qui se retirent dans l inactivit pour expliquer leur cessation d activit est le fait de se juger trop g es aux yeux des employeurs Tableau 3 R partition des diff rentes populations tudi es par ge En Valide malade Limitation Limitation Limitation de quantit de nature de mobilit 15 24 ans 23 3 9 1 5 8 7 9 4 9 25 39 ans 34 2 24 8 19 9 21 3 18 6 40 49 ans 212 23 7 22 6 22 3 22 7
222. gences Les emplois assist s ou prot g s font figure de voie de garage Le vocabulaire utilis est l encore propre alimenter chez la personne un sentiment d incapacit s 69 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 11 B n ficiez vous d un emploi assist ou prot g En Malade Limitation Limitation Limitation de quantit de nature de mobilit Emploi r serv de la fonction publique 0 7 1 7 1 9 2 4 Emploi dans le milieu prot g 1 8 3 6 3 9 5 9 Emploi de TH en milieu ordinaire 1 4 2 6 2 8 2 8 Non 96 1 92 1 91 4 88 9 TOTAL 100 0 100 0 100 0 100 0 Source CREDOC enqu te emploi 2002 y La reconnaissance sociale du probl me de sant Si elles b n ficient assez rarement d un emploi assist ou prot g les personnes malades ont relativement souvent obtenu une reconnaissance administrative de leur probl me de sant c est le cas d un peu moins d un quart d entre elles Ceci objective en quelque sorte la gravit du probl me d clar de la personne 12 ont obtenu une reconnaissance aupr s de la COTOREP 7 ont droit une pension d invalidit et 3 une rente d accident du travail ou de maladie professionnelle Les personnes ayant d clar une limitation dans leur vie professionnelle poss dent plus souvent une reconnaissance administrative de leur handicap et ceci d autant plus lorsque l incapacit s expr
223. hait sur une histoire sur un flirt D autres ont d bouch sur de vraies histoires d amour avec mariage Je pense un copain Isidore il a connu Corinne qui tait aide soignante Il y en a quand m me pas mal Q Et entre ces personnes il y avait une psychologie les uns et les autres les soignants les pensionnaires on peut penser par exemple au lever quand il y a un touch qui doit exister R Le travail du personnel soignant d avoir affaire des corps un peu bless s voire tordus voire mutil s a peut tre plut t dissuasif qu autre chose Dans quelle mesure a contribue positivement enfin positivement Franchement l je ne vois pas trop Ce qui est certain c est que quand une infirmi re faisait un pansement quelqu un par exemple mon voisin de chambre ou l aide soignante une toilette ou je sais pas c tait toujours des relations conviviales chaleureuses L infirmi re ou l aide soignant n oubliait pas qu il tait ce moment l technicien Ils faisaient des gestes ce moment l codifi s pour certains et qu il fallait assurer Par contre quand on se trouvait la caf t pour boire un caf ou en soir e il n y avait plus cette notion de chacun d un cot de la barri re la blouse blanche etc Les questions du handicap taient compl tement balay es On se trouvait entre globalement jeunes peu pr s en tout cas m me g n ration je dirais faire les cons quoi Et le handicap n tait pas l o
224. han universit 1997 127 p Catani Maurizio Mat Suzanne Tante Suzanne une histoire de vie sociale Sociologies au quotidien Librairie des M ridiens 1982 474 p Coroller B atrice Condamn e vivre Albin Michel 1988 173 p Dolsky Fran ois Comme un pingouin sur la banquise Balland 1990 257 p Duvignaud Jean tudes r unies par Sociologie de la connaissance 1979 286 p Ferrarotti Franco Histoire et histoire de vie Collection sociologies au quotidien M ridiens Klincksieck 1990 195 p Lacroix Yves Presque debout Collection Handicaps Descl de Brouwer 1998 252 p Murphy Robert K Vivre corps perdu Terre Humaine Plon 1990 392 p Nus Marcel A contre courant Collection handicaps Descl e de Brouwer 1999 245 p Pelletier Armand Delaporte Yves Moi Armand n sourd et muet Terre Humaine Plon 2002 460 p Peneff Jean La m thode biographique Collection U Armand Colin 1990 144 p Rivoyre de Fr d ric sous la direction de Dire l exclusion Er s 1999 156 p Segal Patrick L homme qui marchait dans sa t te 1977 316 p Segal Patrick Le cheval de vent 1982 249 p Segal Patrick J en ai r v tu sais 1990 316 p Stabenrath de Bruno Cavalcade Robert laffont 2001 336 p 180 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Trannoy Andr Risquer l impossible Editions Athanor 1993 163 p Y Num ros sp ciaux de revues Soci t s H
225. i une norme tablie entre soignants Un patient consid r comme p nible constatera rapidement que l attente peut s allonger consid rablement entre son appel et l arriv e du tiers escompt ce moment de la trajectoire le patient ressent un profond isolement et une intense impuissance C est pourquoi le moindre visiteur devient souvent l occasion d actualiser ses d sirs d sirs contenus parfois depuis plusieurs jours Le rapport ses proches en visite s en trouve alors boulevers Le visiteur perd son r le pr pond rant de parent ou de proche au profit de celui qui peut permettre l action dans le monde amener des biens mat riels de l ext rieur ou procurer de l argent etc ELABORATION D UN NOUVEAU RAPPORT A SES PROCHES NS Ce r le de patient a ceci de sp cifique qu il va occuper l acteur temps plein envahir tout son quotidien hospitalier et donc rel guer un plan marginal les autres r les qui constituaient jusqu alors sa routine de vie par exemple ses r les de p re de fr re de voisin d ami de professionnel etc Le changement corporel du patient a comme cons quence tr s directe pour lui de voir se restreindre consid rablement le temps d actualisation de tous ses r les ant rieurs Certains r les peuvent m me ne peuvent plus tre du tout actualis s ou encore des pans entiers de la vie de l acteur peuvent dispara tre 42 L exp rience du handicap Cr doc ouvr
226. i s accompagne d ailleurs souvent d une orientation vers ou dans le secteur de l ducation sp cialis e Parfois le cadrage se fait d une fa on infiniment plus brutale comme cela a t le cas pour les parents de Carole et Jean qui ont cette particularit de les avoir adopt s en toute connaissance de cause Cette r duction des possibles plus ou moins progressive ne co ncide pas n cessairement avec une valorisation pr cise une exp rience douloureuse qui serait proche de celle du deuil Gardou 1996 Encore que ce soit le cas le plus fr quent parmi le groupe des personnes que nous avons interrog es Cette expression d signe un processus cognitif qui comporte en effet un volet oppos celui d tre une condition pour d autres possibles Le cadrage d un v nement est autrement dit une op ration complexe qui ouvre autant qu elle ferme Les signes de l agressivit feinte dans le jeu r duisent les risques de m sinterpr tation toujours possibles cependant et ouvrent une s quence d changes dont rien n interdit de penser qu elle soit la base d une satisfaction r ciproque pour les interacteurs qu elle engage Ce sont les parents de Marion qui les soulignent galement dans la situation du handicap les pr cisions apport es sur l tat de sant de leur fille pourtant tr s pr caire et n cessitant des interventions chirurgicales parfois tr s lourdes leur permettent d adapter leu
227. ident de cette phase l la r alit elle doit tre elle est tellement difficile et peut tre insupportable en tout cas intellectuellement insupportable qu effectivement la vie d avant elle est compl tement mise de c t Alors est ce qu elle est mise de c t pour ne pas s effrayer Est ce qu elle est mise de c t pour repartir sur quelque chose de nouveau Parce que peut tre inconsciemment on pense qu il faut devenir quelqu un d autre dans cette situation l Ca franchement je 176 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 ne sais pas Et finalement l je me dis les r flexions que j ai depuis quelques ann es par rapport a c est qu effectivement il y a une continuit Oui il y a une continuit Q Vous n tes donc pas quelqu un d autre R Difficile d tre vraiment formel Pendant effectivement pas mal de temps j ai pu croire qu effectivement on est quand m me tr s diff rent Il y a aussi des choses objectives qui am nent a Je ne sais pas quand on a des contacts avec des copains de l poque par exemple quand on tait jeunes Tr s rapidement a je vous l avait d j dit une fois tr s rapidement on se rend compte qu il y a des chemins des parcours de vie tellement diff rents que du coup il n y a plus de lien il n y a plus de points communs entre ce qu on tait il y a deux ans et puis maintenant Moi a en tout cas a je l ai v cu tr s tr s for
228. ie professionnelle Les personnes d clarant tre limit es dans la quantit de travail du fait de leur probl me de sant ou handicap qu elles peuvent ou pourraient r aliser selon qu elles sont en emploi ou non 43 des malades Les personnes d clarant tre limit es dans la nature de travail du fait de leur probl me de sant ou handicap qu elles peuvent ou pourraient r aliser selon qu elles sont en emploi ou non 45 des malades Les personnes d clarant tre limit es du fait de leur probl me de sant ou handicap dans leurs d placements entre le domicile et le travail qu elles soient en emploi ou non 20 des malades Les personnes malades mais ne d clarant aucune limitation dans la vie professionnelle soit 4 1 millions de personnes 11 des 15 64 ans Cette terminologie reprend celle propos e par la DARES dans la synth se cit e pr c demment Les termes d incapacit s et de limitations seront utilis s de mani re quivalente dans cet article et renverront au deuxi me stade de la cha ne de Wood 56 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 1 les diff rentes populations tudi es effectifs Valides 29 1 76 Malades 9 2 24 TOTAL 38 3 100 Dont parmi les malades Limitation en quantit de travail 3 9 43 Limitation en nature de travail 4 2 45 Limitation en mobilit domicile travail 1 9 20 Source CREDOC enqu te emploi 20
229. ience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Vous tiez comme a avant R Voil exactement C est bien c est exactement pendant longtemps J e retrouve que finalement j tais comme a avant Dans je ne sais pas le contact que j avais avec la nature mais c tait moins fin et moins pr cis que maintenant C est dire que c est comme si avant il y avait une sorte de pressentiment que une esp ce de sensibilit aux choses je ne sais pas aux choses qui nous entourent une esp ce alors de pr disposition je ne sais pas mais une esp ce de pr sensibilit comme a a Par contre maintenant c est confirm en quelque sorte Ce n est pas v cu mais en tout cas c est confirm En fait j tais comme a avant oui D j que j tais comme a je veux dire a a m rit Par contre je pense que l le handicap il est probablement un plus dans la maturit de ce sentiment de cette vision des choses quoi du monde de la vie Non sans mal Monsieur Martin a appris vivre avec son handicap Ayant grandi au contact d un p re devenu parapl gique il est aujourd hui p re d un enfant qui l aide s inscrire dans la dur e Comme il a appris faire avec son handicap il construit les termes d une relation de filiation qui montre que rien n est jamais totalement crit ni donn le corps comme la paternit Q Comment on fait pour tre p re d un enfant quand on est handicap
230. ience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 je crois qu il y avait quand m me un c t je sais pas d risoire comme a je sais pas si d risoire est le terme Et puis c tait une fa on de d dramatiser le truc Donc je pense que ce genre de situation doit permettre de prendre du recul par rapport a C est vrai que quand on est entre personnes handicap es comme a il n y a aucun souci Mais c est vrai que quand on est tout seul avec un groupe de gens valides et puis qu il y aurait les m mes probl mes urinaires l le recul il serait peut tre un tout petit plus difficile prendre J ai eu ce genre d aventures de m saventures m me si pour un gar on c est plus discret c est diff rent Bon a reste bien s r tr s dur m me si l autre voit pas m me si les autres voient pas Je pense que c est humiliant m me si les autres voient pas quoi Mais oui on prend du recul on assimile enfin on assimile on int gre on fait avec Je sais pas comment le dire Mais a reste toujours comment Toujours un peu pr caire Notamment ces questions par exemple urinaires ces questions sphinct riennes a reste toujours un peu pr caire parce qu on sait pas trop quel moment on aura envie de pisser Il y a des risques de fuites en fonction de si on est infect ou pas Mais a apr s on le g re on le g re J e suppose qu on g re a Par exemple un diab tique va g rer ces injections avec tous les pr l ve
231. ier bien s r a le fait chier mon fr re de voir que je ne marche pas de voir que je ne peux pas aller en montagne avec lui m me si je n tais jamais all en montagne avec lui d ailleurs Ca les emmerde quoi Je ne sais pas si a les emmerde pour eux ou si a les emmerde pour moi parce que je ne peux pas le faire Peut tre qu ils se disent a doit tre dur pour lui frustrant Moins maintenant un peu moins maintenant qu au tout d but quoi forc ment La trajectoire de Monsieur Martin prend un second tour curieux le centre qui l accueille a d j re u son p re Et quand une aide soignante se signale lui pour lui demander s il est bien le fils de son p re et qu il r pond par l affirmative Monsieur Martin est mu de l motion qu il note sur le visage de cette femme R Alors mon p re il est venu peu de fois Je ne sais plus combien de temps j ai du le voir peut tre deux trois fois en neuf mois Pourquoi Je sais pas Alors sans compter que l o j tais en r ducation il avait lui m me fait sa r ducation Oui oui C est quand m me troublant c est quand m me fou le Moi je me souviens par exemple quand j allais le voir l h pital gamin douze ans treize ans quatorze ans je voyais des mecs en deux roues par exemple dans le couloir Ils se mettaient sur les roues arri res ils bloquaient les freins pour se mettre en position relax contre le mur Et moi je voyais a quand j avais dou
232. if octobre 2003 L ADAPTATION UNE NOUVELLE VIE LE FATALISME ACTIF DE MONSIEUR LOUIS MARTIN Alain Blanc Professeur Universit Pierre Mend s France Grenoble 2 R C est jamais tout blanc ou tout noir de toute fa on les choses bien videmment Moi j essaie de fonctionner comme a quoi Quand je prends le petit d jeuner avec Antoine vers 8h30 et si il renverse son bol de chocolat bon enfin c est fait c est fait Je veux dire le chocolat il est par terre c est irr versible C est pas la fin du monde donc a sert rien de gueuler ou de se prendre la t te J e pense que au niveau de ma situation finalement c est fait c est fait Oui bien effectivement c est pas la peine de se prendre la t te sur quelque chose qui est irr versible qu on ne peut pas changer Donc autant essayer de faire en sorte que a soit plut t blanc que noir Et en grandissant en vieillissant c est de plus en plus valable quoi De plus en plus a me colle de plus en plus Je suis de plus en plus en accord avec a Cette contribution est essentiellement ax e sur les propos tenus par Monsieur Louis Martin devenu parapl gique l ge de dix neuf ans A partir des entretiens qu il a bien voulu m accorder je propose une r flexion portant sur l exp rience de la situation de personne handicap e Les l ments de cette r flexion apparaissent par l interm diaire de l usage syst matis du contenu m me des entretiens dont la ma
233. ifficile de se d placer On est mi hauteur quand il y a beaucoup de monde on ne voit pas loin Donc c est difficile Donc il faut tre attentif tout a ce qu il y a au sol d j Quand c est un lieu qu on conna t par c ur il n y a pas de probl me On se lib re l esprit par rapport au sol Mais des lieux comme les lieux d exposition qui ont des fois une configuration Des fois il y a des tubes des fils qui passent Des fois il y a des petits seuils Donc il faut toujours tre attentif Ca veut dire qu il faut toujours avoir un champ de vision Et a aussi je trouve que c est formateur Moi je trouve que les gens debout souvent ont des ill res Combien de fois j ai envie de dire aux gens mais putain enlevez vos ill res bordel Je sais pas Des fois j ai l impression que les gens sont tous seuls et qu autours d eux il y a un p rim tre de deux m tres ou trois m tres qui est leur espace qui est infranchissable Alors l exemple c est les supermarch s avec les caddies Je supporte de moins en moins d abord les supermarch s d j et de voir les gens avec leurs caddies Et ils man uvrent 169 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 comme si ils taient tous seuls Et donc moi j ai l impression que les gens ont des ill res Peut tre je suis un peu con ou je sais pas mais moi j ai toujours le souci des autres d j Quand je bouge j ai conscience que quand en fauteuil on piv
234. il Dans ces mod les les variables sociod mographiques sexe ge n apparaissent pas tr s explicatives du sentiment de limitation Il semble que les artisans d clarent un peu plus souvent une limitation en nature ou quantit de travail contrairement aux cadres mais les autres modalit s ne ressortent pas Les conditions de travail sont beaucoup plus explicatives du sentiment de limitation dans le travail 85 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 23 Les principaux facteurs explicatifs du sentiment de limitation Limitation en quantit Limitation en nature Limitation en mobilit Individu de 41 39 30 r f rence intitul intitul intitul Aurait besoin d un temps de 88 B n ficie d une autre forme 93 Aurait besoin d une aide 94 travail am nag pour avoir un d aide mobilit domicile travail pour emploi B n ficie d un changement de 92 travailler un temps de travail 87 poste B n ficie d une aide mobilit 91 am nag Aurait besoin d une autre 85 domicile travail pour Cherche un emploi depuis 2 3 87 forme d aide pour avoir un travailler ans emploi Aurait besoin d une aide la 80 B n ficie de soutien des 83 Aurait besoin d un 84 mobilit au travail pour avoir coll gues et sup rieur changement de poste pour un emploi B n ficie d une autre forme 82 avoir un emploi Aurait besoin d une
235. il On avait besoin de le voir Et donc d s qu il y en avait un qui le rencontrait par exemple qui avait l occasion de discuter un moment avec il tait content de dire aux autres tiens j ai vu machin tu te rends compte il est all en voyage en Argentine Donc du coup a devenait possible pour nous ce genre de plans et ainsi de suite et ainsi de suite Est ce que par contre entre nous c est peut tre plut t le sens de votre question est ce que entre nous on se lamentait sur notre sort Oui on se disait putain a fait chier Je sais pas j ai pas tellement le souvenir de trucs un peu noirs comme a C est vrai qu il y a une concurrence comme dans tout milieu dans tout groupe humain Quel que soit le truc il y a une concurrence Donc a veut dire que par 145 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 exemple un qui r ussissait mieux les transferts que d autres il pouvait se la p ter un peu plus quoi Ce qui pouvait que motiver les autres d ailleurs ou les nerver parce que peut tre certains ne pourraient pas y arriver du fait du niveau neurologique par exemple On ne parlait pas des personnes handicap es On parlait des tordus des d glingues des d niap s Je pense un mec on disait toujours il est d niap lui C est un mec il venait d ailleurs c tait le d niap C est vrai que le terme handicap infirme il n tait pas employ a c est clair D ailleurs j ai l impression
236. ime en terme de mobilit 46 des personnes se sentant limit es dans leurs d placements entre le domicile et le lieu de travail n ont pas de reconnaissance administrative contre 60 de celles se sentant limit es en terme de nature ou de quantit de travail Comme pour le statut de l emploi la possession d un tel titre contribue probablement se sentir limit dans l exercice d une activit professionnelle La possession d une reconnaissance administrative de leur probl me de sant est li e la situation vis vis de emploi 54 des personnes malades inactives poss dent une reconnaissance administrative de leur probl me de sant 16 ont d ailleurs droit l AAH 22 ont droit une pension d invalidit 4 une rente d accident du travail et 9 ont une RQTH A contrario 14 des personnes malades en emploi ont un titre de reconnaissance Les m mes carts peuvent tre constat s pour les personnes avec incapacit On retrouve travers ces chiffres le fait que parmi ces reconnaissances certaines donnent droit des aides et reconnaissent l incapacit partielle et temporaire de la personne exercer une activit professionnelle Qu elle soit plus souvent d tenue par des inactifs s explique probablement par des tats de sant plus d grad s mais aussi par le fait que la soci t cautionne le droit de la personne de se retirer du march de l emploi si elle le souhaite et lui verse m me un
237. imension sociale L incompr hension qui sanctionne l expression enti re d une souffrance devant d autres pourtant a priori suppos s tre dans le m me cas ce qui ne vaut donc pas pour la situation de l entretien redouble celle laquelle doit faire face l individu La petite stupeur qui suit l intervention d sastreuse d une personne prenant maladroitement la parole dans un collectif en d autres termes manifeste et reproduit donc la grande stupeur v cue par elle Cette exp rience n gative seconde traduit galement quel cho re oit dans la soci t la souffrance individuelle Il y a bien un principe de continuit ou un prolongement entre le d sordre concret pour reprendre l expression de H J Stiker que provoque la d ficience dans le corps ou l esprit d un enfant et le d sordre social qu il implique non seulement dans son entourage imm diat mais aussi par ricochet bien au del L embarras en tant qu exp rience n gative c est dire flottement incertain et dangereux de l ordre social explicite la souffrance galement prouv e par le corps social C est pourquoi il exige en effet r paration et c est l la source de l impact contagieux qui structure la repr sentation sociale du handicap et qui fait que dans la vie courante chacun cherche plut t viter la rencontre avec une personne handicap e Une enqu te pr c dente portant sur les repr sentati
238. imitation son corps est aussi le support et le moyen d une relation active avec le monde Un corps handicap ne se r sume pas une entrave r elle Dans sa relative lenteur impos e Monsieur Martin utilise un vocabulaire proche de celui des amateurs de vitesse les jeunes notamment 3 2 LA PROJECTION DANS L AVENIR En centre de r ducation Monsieur Martin et ses amis du m me ge malgr tout confiants souhaitaient surtout recouvrer une certaine autonomie Il se souvient que les r sidents parlaient plus de leur handicap entre eux qu avec les personnes des tablissements Q En quels termes R Alors le terme handicap c est pas un terme qu on employait tellement Il y a beaucoup de mots qui s inventent par exemple les d glingu s Je sais que ma g n ration ma promo c tait les d glingu s les d glingues C est de plus en plus repris d ailleurs J ai une radio l autre jour qui fait l heure d glingue une heure de radio pour les personnes handicap es C est la premi re fois d ailleurs que je vois le terme repris presque officiellement dans un journal Ce qui tait important c est que entre nous entre frais parapl giques d butant dans l histoire on en tait quand m me plus ou moins au m me point Donc on avait assez peu de choses changer par rapport a Par contre quand on rencontrait un vieux quelqu un qui revenait en consult par exemple on savait qu il avait dix ou quinze ans de fauteu
239. importe quoi de se poser ces questions l c est un objet ce n est pas Il y en a qui disent que a porte malheur Ca c est classique Je sais qu il y a des gens qui sont choqu s de voir un gamin jouer avec le fauteuil de leur parent de l oncle ou peu importe Je sais qu il y a des gens que a choque Mais bon apr s tout c est comme a quoi Q Vous l avez entendu dans votre propre famille R Dans ma famille Non Dans ma propre famille non Pas dans ma propre famille mais par contre je l ai entendu par le biais d amis d amis d amis d un copain en fauteuil qui un jour est arriv chez le copain et qui a vu son fils Il venait r cup rer son fils qui tait copain avec le fils de mon ami enfin du copain et qui a t plut t choqu de voir son gamin jouer dans le fauteuil roulant Ah mais descend du fauteuil laisse le Eliot Enfin bon alors qu Eliot il avait dit vas y joue Il tait sur le canap Donc voil nous a ne nous pose aucun probl me vraiment aucun probl me les petits non plus Ils aiment a franchement Ils aiment a Donc c est eux qu il faudrait poser la question savoir comment a te fait quand tu es dans le fauteuil Moi j ai eu mon p re en fauteuil Moi quand j avais quatorze quinze ans il m est arriv aussi d utiliser le fauteuil de m amuser enfin de m amuser Je ne m amusais pas en fait l poque J tais quand m me ado j avais quand m me quatorze
240. ins des r ves maintenant Je ne sais pas En tout cas peut tre que j y fais beaucoup moins gaffe En tout cas c est nettement plus discret a n appara t plus ou pratiquement plus Pendant une bonne partie de ses ann es de parapl gie dix ou quinze ans Monsieur Martin dans ses r ves ne s est pas vue en fauteuil mais en station verticale Cependant il avait toujours une preuve de la d ficience une b quille ou une poche urine Il semble toutefois que cette omnipr sence s estompe et que les r ves soient des r ves ordinaires moins que ce soit Monsieur Martin lui m me qui n y pr te plus autant attention que par le pass Ces r flexions de Monsieur Martin sont importantes En effet comme il semble naturel sa vie psychique est influenc e par sa situation corporelle En cons quence et comme pour toutes les personnes handicap es et plus g n ralement l instar des personnes ayant subi un traumatisme 128 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 r el ou consid r comme tel il ne peut tre per u comme une personne ayant seulement une d ficience sorte de manque corporel purement technique et qu il conviendrait de traiter comme tel Avec ses r ves Monsieur Martin nous transmet le m me message que l anthropologue Robert Murphy qui lui m me devenu handicap en fauteuil cause d une atteinte la moelle pini re qui devait l emporter construit cette id e
241. institutionnelle du champ du handicap elle fait bien exister concr tement une chose en second lieu qui en soi n a pas de sens L accent mis sur le cadrage introduit donc au principe m me de la r alit du handicap et de sa compr hension collective c est dire le sens qu on lui donne dans un contexte social donn et la mani re dont il se trouve du m me coup int gr dans le collectif La description de ces mod les renvoie un cahier de recherche pr c dent P Le Qu au amp alii La compr hension sociale du handicap Cahier de recherche du CREDOC n 182 janvier 2003 14 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 2 LE CADRE DE L ENQUETE 2 1 CADRE ET REALITE La notion de cadre va donc fournir cette enqu te son motif principal de m me que son fil conducteur Elle s inscrit donc tr s clairement dans la perspective trac e par E Goffman dans le dernier et sans doute le plus th orique de ses ouvrages Les cadres de l exp rience 1991 Cet essai d livre plusieurs des cl s essentielles pour comprendre la port e de toute son uvre et qui porte rien moins comme il le souligne lui m me dans son introduction sur la construction sociale de la r alit On se rappelle toutefois que cette probl matique appara t d j tr s explicitement la fin de l ouvrage consacr au stigmate 1975 en particulier dans les deux derniers essais cf notamment le chapi
242. ique de positif de rassurant Ca c est un truc qui revient souvent enfin qui revient souvent De oui de rassurant On m a souvent dit mais c est peut tre plut t ce moment l des amis mais qui seraient peut tre plut t des amies filles Ce serait plut t je suis bien quand je suis avec toi Tu me calmes enfin tu me calmes Oui je suis bien quand je suis avec toi je me sens plus tranquille Ca ne r pond pas directement d ailleurs votre question Mais effectivement j ai rarement entendu de choses et a les amis ne vont pas le dire enfin difficilement des choses qui seraient n gatives du fait du handicap Mais t es con parce que t es handicap ou tu commences nous faire chier avec ton truc 3 7 LA PLACE DANS L ESPACE PUBLIC Diverses sayn tes rapport es par Monsieur Martin montrent que sa pr sence dans les espaces publics les passages pi tonniers les places de parking les grandes surfaces les lieux d exposition peuvent g n rer des troubles du comportement illustr s par des regards insistants ou mal assur s une sur attention Q Est ce que vous avez connu des situations de violence R De violence D agressivit oui De violence violente non D agressivit oui assez rarement quand m me Et souvent agressivit quand les gens sont mis devant leurs contradictions sont mis devant leur non respect d un certain nombre de choses Et l je pense aux emplacements r serv s par
243. ir dans le monde et de pouvoir actualiser ses d sirs et ses volont s Le verbe attendre doit alors tre compris dans ces deux acceptions la fois compter sur autrui pour accomplir une t che mais aussi patienter apr s la pr sence d autrui pour pouvoir la r aliser Le patient peut parfois passer plusieurs heures avant qu une aide soignante n intervienne dans sa chambre quant la solidarit entre pairs elle ne joue qu une fois les premiers liens nou s Autrui prend donc une nouvelle valeur aux yeux du patient et ce d autant plus que le temps que peuvent lui accorder les aides soignantes est limit par une organisation rationnelle du travail qui ne prend en compte que ses besoins primaires et vitaux Le patient apprend alors s organiser pour rentabiliser au maximum le temps qui lui est accord et profiter du moindre passage dans sa chambre pour demander une aide Son temps est devenu le temps des autres Il est la merci de la disponibilit d autrui Cet apprentissage du temps des autres est acc l r par les remarques r it r es du personnel soignant qui lui sugg re de se contenter de ces brefs laps de temps pour la raison tr s compr hensible en soi qu il n est pas le seul patient de ce service et que d autres attendent eux aussi leurs soins Ainsi le patient int gre un nouveau syst me de valeurs celui des soignants dans lequel l utilisation de la sonnette doit tre parcimonieux l exc s tant l
244. ire trouver un emploi dans une 2 2 1 2 3 autre r gion Cherche travailler plus 13 10 15 15 17 Autre 14 12 13 12 10 TOTAL Source CREDOC enqu te emploi 2002 y Les difficult s pour retrouver un emploi Parmi les personnes qui n ont pas d emploi la perte d emploi est plus souvent cons cutive un licenciement pour les personnes malades et celles se sentant limit es dans leur travail En effet si 12 des personnes valides sont sans emploi la suite d un licenciement individuel elles sont 19 parmi les personnes malades et 21 ou 22 parmi les personnes ayant d clar une limitation dans leur vie professionnelle selon le type d incapacit s De m me si 12 des valides ont perdu leur emploi suite un licenciement collectif la proportion est de 15 parmi les personnes malades de 13 parmi 77 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 celles d clarant une limitation en quantit ou en nature de travail et de 15 parmi celles d clarant une limitation en terme de mobilit entre le domicile et le travail On ne sait pas de quel type de licenciement il s agit notamment on igrore la part des licenciements pour inaptitude N anmoins la fr quence du licenciement questionne sur les difficult s de maintien dans l emploi ou dans l entreprise des personnes qui rencontrent des difficult s tenir leur poste Hormis le licenciement l autre raison invoqu e es
245. is jeune mignon bien habill voil quoi Mais je sais pas si j ai calcul Par contre maintenant j ai plus j ai eu pas mal de complications suite des fractures par exemple qui taient suite des chutes en quad par exemple donc un peu baroudeur un peu aventurier Donc des fractures qui ont eu des cons quences sur le squelette notamment des fractures au niveau du col du f mur En plus bon j avais d j une toute petite scoliose avant qui bien videmment ne s est pas arrang e j ai eu des tiges Enfin j ai eu une scoliose quand m me importante Donc c est vrai qu au fil du temps je me suis un petit peu d glingu et c est vrai que mon image Bon me voir un peu tordu comme a c est pas terrible c est pas terrible Mais une fois de plus je sais pas comment dire une fois de plus a fait partie de l histoire C est l a fait chier oui Putain je suis 148 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 tordu Et puis l c est toujours pareil il y a comme pour tout le monde dans la vie il y a des moments o on va bien des moment o on va pas bien Donc quand a va bien il y a pas de probl me et puis en fin de compte quand on est un peu comme a parce que y a des soucis y a ci y a l ce moment l on a l impression de faire que le fauteuil il fait quarante kilos qu on est vachement tordu que etc etc Ca c est un peu comme a Q Alors peut tre une autre fa on d
246. isent pendant quinze secondes si j tais cette place dans cette situation je supporterais pas Sauf qu ce moment l les gens n int grent pas l adaptation le temps qui passe etc II m est arriv bien videmment plein plein de fois de parler avec les gens de leur dire enfin d essayer de leur faire sentir Oui c est difficile oui c est tr s gal re Mais la vie elle est il y a quelque chose de tr s puissant dans cette histoire qui fait qu on trouve un passage on trouve des fa ons de faire Et puis que du coup a reste tr s vivable Mais a de toutes fa ons en tout cas c est imparable Les gens pensent ce qu ils pensent Quelle image je voudrais qu ils aient de moi Bien s r comme tout le monde la plus positive possible II y a des fois je suis tr s surpris d ailleurs Je suis tr s surpris de l image justement que les gens ont qui des fois ne colle pas forc ment avec ma r alit avec ce que je suis Avec des fois un certain bien tre Ce qui colle pas toujours avec ma r alit quoi Q L image qu ils proposent de vous m me comment pourrait on la traduire par des mots Qu est ce qu ils disent travers les exp riences que vous avez pu vivre les sc nes de la vie quotidienne la rue R Faut faire attention parce qu il faut pas g n raliser Bien s r les gens ont une image n gative enfin n gative noire n gative Puis on sent dans les termes le paralytique il y a longtemps que vous tes
247. istoires de vie R cits de vie n 18 1988 51 p Cahiers internationaux de sociologie Volume LXIX 1980 384 p Y Articles de revues Becker Howard S Biographie et mosa que scientifique Actes de la recherches en sciences sociales juin 1986 p 105 110 Bourdieu Pierre L illusion biographique Actes de la recherches en sciences sociales juin 1986 p 69 72 Chevalier Jacques La biographie et son usage en sociologie Revue fran aise de sciences politiques n 1 f vrier 1979 p 83 101 Heinritz Charlotte et Rammstedt Ang la L opproche biographique en France Cahiers internationaux de sociologie Volume XCI 1991 p 331 370 Passeron Jean Claude Biographies flux itin raires trajectoires Revue fran aise de sociologie n XXXI 1 1900 p 3 22 181 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 182
248. it en soi sa quiddit qui passionne les philosophes depuis toujours mais son comment sa guoddit Le concept de cadre qu il dit d ailleurs emprunter G Bateson 1977 d crit une modalit particuli re d agencement des faits en un syst me coh rent d o d coule primo leur signification particuli re et secundo la conduite qu il convient d adopter dans ce contexte significatif Historiquement c est dire dans les travaux de G Bateson mais la r f rence revient plusieurs fois dans l expos de E Goffman le cadre s applique la situation du jeu Lorsqu un individu animal ou humain agresse un compagnon pour de rire il le fait d une fa on telle qu il met en m me temps que les signes d agressivit les l ments d une m ta communication destin s faire comprendre la victime pour de faux que cette agression n en est pas vraiment une afin que l autre ne d clenche qu une riposte ad quate Ces l ments de m ta communication constituent les l ments du cadre jeu qui s impose alors et d termine la suite de l change Tant du moins qu aucun des partenaires ne transgresse les limites du jeu normalement accept es On sait toutefois que chez les enfants en particulier parce qu ils sont chez eux une activit qui occupe une part significative de leur temps et qu elle fait encore bien souvent l objet d un apprentissage rares sont les
249. itiale o se forge une douloureuse contradiction entre l amour inconditionnel port un tre singulier et le monde ext rieur M me dans le cas o la d ficience porte sur la difficult de communication avec l enfant celui de l autisme par exemple les parents peuvent par moment faire abstraction du monde et dans ce face face singulier le handicap se dissout et d une certaine mani re se r sout Bien entendu il ne s agit pas de conf rer au monde une ext riorit autre que m taphorique m me s il est bien per u comme une pression qui vient d ailleurs comme quelque chose d une autre nature que ce qui constitue l intimit du cocon familial il n en est pas moins au c ur des changes entre les diff rents membres de la famille d autres moments et structure m me la psych individuelle E Goffman souligne sa fa on ce paradoxe du stigmate qui suppose ainsi que les deux membres de l interaction y compris le stigmatis partagent une vision commune de la normalit compr hension r ciproque qui est d ailleurs bien au fondement de la souffrance ressentie par lui et comme nous voudrions l ajouter par son entourage imm diat Il est galement probable que le stigmatis comme le normal pr sentent la m me disposition mentale qui est n cessairement la vari t standard dans notre soci t Par suite celui qui sait jouer l un de ces r les poss de tout l quipement requis
250. itient pour le bless un travail de s mantisation La maladie l accident ces formes du possible vont venir modifier les changes Processus corporel corps envisag en terme de devenir d impermanence 1 David Le Breton 1982 Corps et symbolique sociale in Cahiers Internationaux de Sociologie vol LXXII p 225 David Le Breton 1984 L effacement ritualis du corps in Cahiers internationaux de Sociologie vol LXXVII p 281 2 Erving Goffman d veloppe au sujet de cette distance valide handicap quelques r flexions dans son ouvrage bien connu Stigmates Les usages sociaux des handicaps Paris d de Minuit 1975 13 5 2 p x amp r s Travail de s mantisation concept propos par l auteur Travail consistant la reconstitution des manques du r seau s mantique par un processus d laborations et de n gociations collectives de significations entre les diff rents acteurs 39 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 de l homme vivant avec son monde En effet ce n est pas l tat corporel seul qui a chang mais aussi le rapport au monde aux autres et soi m me rapport dont il est le m diateur n cessaire C est seulement quand il prendra en compte que ses transformations corporelles sont partiellement d finitives que le bless peut d buter un long processus de s mantisation de soi des autres et plus g n ralement du monde en
251. iv X tu te sentais comment Dans quel tat silence Je peux pas dire Je peux pas Je ne sais pas du tout C est une p riode de ma vie que J avais conscience je me vois dans quel tat j tais Mais je peux pas te dire dans quel tat J tais dans un tat vraiment mal On va dire mal Ca g n ralise quoi M F 30 ans prof interm diaire Certes quelques patients ont mentionn avoir compris tr s t t dans leur trajectoire qu ils avaient perdu leurs jambes Cette certitude d coulait de la prise de conscience qu ils avaient eu imm diatement apr s l accident d une perte de la sensibilit dans les membres inf rieurs Pour d autres lorsque l annonce du handicap leur est faite d s le centre hospitalier ils retiennent principalement l id e que leurs jambes en cas de parapl gie ou leurs quatre membres en cas de t trapl gie ne seront plus ou peu fonctionnels La compr hension de cette situation corporelle est tr s r ductrice Si cette incapacit motrice s impose comme une r alit premi re d autres s quelles vont r v ler ult rieurement leur importance majeure Mais il est rare que de nouvelles incapacit s soient comprises comme d finitives tout du moins dans un premier temps Ce n est pas parce que le corps impose des contraintes que celles ci sont comprises comme telles Elles ne sont pas encore signifiantes C est la r p tition quotidienne de l exp rience du nouvel
252. iv e 4 4 4 6 4 8 4 9 Maladie professionnelle 12 5 13 8 12 7 9 6 Maladie non professionnelle 49 5 46 1 45 4 46 3 Autres 10 4 8 9 8 8 9 2 NSP 4 0 3 2 3 1 3 3 TOTAL 100 0 100 0 100 0 100 0 Source CREDOC enqu te emploi 2002 Au terme de cette premi re tape le sentiment de limitation est plus d velopp chez certaines personnes comme les hommes lorsqu ils sont exclus du monde professionnel les personnes de plus de 40 ans mais de moins de 60 ans les personnes ayant des d ficiences intellectuelles ou li es aux parties externes du corps ayant des handicaps anciens li s un accident du travail Dans ces profils on peut supposer que ce sont les personnes qui ont le plus de mal supporter de ne pas travailler qui se sentent les plus limit es mais aussi que certains probl mes rendent plus difficile l exercice d un activit professionnelle soit parce qu ils d rangent soit parce qu ils demandent des am nagements sp cifiques comme pour les personnes en fauteuil roulant etc Il est pr sent int ressant de rep rer les conditions d emploi de ces diff rentes populations pour mieux comprendre les obstacles qu elles peuvent rencontrer dans leur vie professionnelle Comment leur probl me de sant est il pris en compte et l est il d ailleurs 66 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 LE ROLE DU MONDE PROFESSIONNEL DANS L EMERGENCE DU SENTIMENT DE LIMITATION
253. ivement d tre parapl gique Mais en m me temps on ne peut pas dire que ce soit difficile au point d tre insurmontable et invivable C est toujours pareil c est l ternel Alors je ne sais pas si c est un dilemme un esp ce de paradoxe Je ne sais pas comment Je ne sais pas ce que c est mais effectivement c est facile et c est pas facile quoi forc ment 1 Q Et est ce que depuis toutes ces ann es vous sentez que le regard d autrui sur vous a volu Enfin globalement dans un magasin dans la rue est ce que vous sentez des diff rences notables R Alors oui Oui je dirais de fa on flagrante Est ce que c est le regard des autres qui a chang sur moi ou est ce que c est moi qui voit diff remment le regard des autres Je pense que la question elle est plut t dans ce sens l Je me souviens la premi re sortie du centre de r duc on tait deux trois fauteuil c tait une catastrophe Effectivement l tout le monde avait le regard braqu sur nous et parce que on focalisait l dessus Moi je vois pas le regard des gens c est dire je ne le cherche pas Je sais que les gens 165 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 regardent Il y a plein de degr s de regards Il y en a qui observent le fauteuil on sent le technicien Ils tournent la t te ils regardent le fauteuil On le sent a on le voit bien Et on sent ceux qui regardent ah putain le pauvre a doit tre difficile
254. ivulgation de savoirs scientifiques en direction du grand public dans sa collection Terre Humaine Jean Malaurie a publi deux ouvrages centr s sur le handicap La France de ce si cle d butant semble plus que par le pass tre soumise des forces groupes tendances dont elle mesurait moins l importance auparavant les d bats actuels sur le communautarisme en font foi L apparition dans l espace public de ces groupes souhaitant Charlotte Heinritz et Ang la Rammstedt L approche biographique en France Cahiers internationaux de sociologie Volume XCI 1991 p 331 370 Daniel Bertaux Les r cits de vie 128 Nathan Universit 1997 Jean Peneff La m thode biographique U Sociologie Armand Colin 1990 Franco Ferrarotti Histoire et histoires de vie Pr face de Georges Balandier Sociologie au quotidien M ridiens Klincksieck 1990 Maurizio Catani Tante Suzanne une histoire de vie sociale Pr face le Louis Vincent Thomas Librairie des M ridiens 1982 10 Robert Murphy Vivre corps perdu 1990 et Moi Armand Pelletier Yves Delaporte Moi Armand n sourd et muet 2002 93 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 l gitimement faire prendre en compte leurs int r ts peut s illustrer par la multiplication de textes et publications officialisant leur sp cificit La validit de l exercice biographique la multiplication des publications et leur m diatisa
255. l Il n y a pas ou peut tre plus de moins en moins ces b quilles ces poches urine qui rappellent que Vous quand vous r vez vous vous voyez debout comment a marche Est ce qu on se voit debout Est ce qu on se voit d abord dans le r ve Je ne sais pas En tout cas il n y a pas ou pratiquement plus de r ves qui sont sur le th me du handicap sur cette histoire Q Et a a dur longtemps R Le fait de syst matiquement enfin pas syst matiquement dans chaque r ve que souvent en tant un acteur important du r ve je ne sais pas si on peut dire a comme a et donc de se voir avec une b quille ou un truc comme a je sais pas a a dur quand m me pas mal Q Combien d ann es R Je ne sais pas une dizaine une quinzaine Q Assez longtemps R Oui assez longtemps Alors peut tre il y en aura d autres des r ves comme a je ne sais pas mais j ai l impression que a s estompe Souvent je pense comme tout le monde bien s r j ai des r ves qui font appel des choses du quotidien qui se sont pass es ou qui vont se passer Voil Je n ai jamais vraiment calcul Ce que je remarque ce que j ai rep r enfin en tout cas dans mes r ves c est cet aspect l c est dire qu on ne voit pas de fauteuil mais il y a toujours un rappel du handicap Ca oui Et puis avec le temps peut tre qu on a tendance Ou peut tre que moi j y fais moins gaffe Peut tre que je me souviens mo
256. l me Ca ne me g ne pas parce que le fauteuil ce n est pas moi Et du coup j ai un peu re r fl chit cette question l Effectivement a ne me g ne pas du tout mais franchement pas mais par contre je ne dirais pas que le fauteuil ce n est pas moi A la r flexion comment dire Bien s r ce n est pas quelque chose de physique c est pas quelque chose d organique Ce n est pas un bout de moi au sens de l individu que je suis mais par contre c est quelque chose qui est d une vitalit extr me C est dire que je me dis que c est peut tre aussi important bon faudrait quand m me pas trop charrier non plus mais c est pas un respiratoire artificiel pour quelqu un qui a des probl mes respiratoires Sauf que lui s il ne l a pas il peut mourir Moi je n ai pas le fauteuil je ne peux pas mourir Je peux au pire me d placer sur le cul par terre etc chose qui s est d j produite Mais c est quand m me quelque chose C est pas un bout de moi c est pas un bout de nous a c est s r mais c est vraiment quelque chose de c est la mobilit C est ce qui permet de vivre de voir les autres de ne pas d pendre des autres Par exemple dans un voyage en avion il y a toujours un petit moment de flottement parce que putain dans quel tat je vais retrouver le fauteuil en arrivant On vous dit le fauteuil ne voyage pas avec vous il voyage en soute Quand on voit les mecs comment ils manipulent le fauteuil quand on sait
257. l semble percevoir comme une menace ou tout le moins un danger Comme le souligne H J Stiker la d sorganisation concr te dans le corps individuel a comme r percussion une d sorganisation symbolique dans celui de la soci t qui appelle r paration C est dans ce m canisme que si ge le commencement de la honte ressentie par les personnes handicap es et leur entourage L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Comme le souligne J Piaget toutefois cette imposition n est pas qu ext rieure soi m me si c est bien ainsi qu elle est exp riment e la soci t c est dire ses normes et ses valeurs est une partie de ce qui constitue intimement chacun de ses membres les normaux comme les handicap s L exp rience individuelle ne parvient son ach vement qu cette condition de trouver une modalit d expression un chemin o elle ne se perde pas trop parmi les cadres sociaux qui d terminent la possibilit d un partage L exp rience subjective est en effet filtr e par le tamis des repr sentations collectives sur ses deux versants L interpr tation est ainsi une op ration qui consiste ramener la singularit d un v nement per u du d j connu travers des mod les labor s collectivement L objectivation de m me n est possible que si elle passe par un langage et un complexe syst me de conventions qui la rendent compr hensible par autrui
258. l sur la vid o sur la photo en tout cas serait int ressant Ca voir Quelle image j ai de moi Q Quand vous vous tes vu pour la premi re fois en fauteuil a vous a fait quoi R J ai pas souvenir de la premi re fois o je me suis vu Parce que je pense que je me suis vu par tapes par petits bouts Par petits bouts un coup dans la salle de bain un peu en kin mais on se voit jamais vraiment en entier Il faut du temps pour se voir nu en entier On va pas arriver en kin poil pour se voir en entier quand m me hein Je peux pas dire ce que a a pu me faire en tout cas j ai pas souvenir que a ait pu me provoquer un choc ou quoi que ce soit Sachant qu on voit les autres aussi donc on se doute bien quoi on ressemble J ai des souvenirs par exemple dans cette phase de r duc C est vrai qu en plus au d but bon c tait il y a vingt piges on est habill fonctionnel Donc pour pouvoir s habiller se d shabiller facilement pour la kin tout a on a des surv tements En plus on n a pas forc ment une tenue Mais moi je me souviens de certaines soir es par exemple o on allait sortir faire une vir e la pizzeria des trucs comme a donc l on s habillait On tait tous habill s pour sortir forc ment Et je me rappelle par exemple une fois j avais une belle tenue j avais un beau pantalon noir enfin bon et je me suis trouv s duisant Donc je pense que a r pond en partie au truc Je me trouva
259. la vid o au moins la photo J avais vu une expo photo enfin j ai vu dans un magazine Je n ai pas vu l expo mais j ai vu des reproductions dans un magazine d un couple Lui il est para elle elle est photographe et elle a fait des clich s de son compagnon des photos artistiques en noir et blanc beaucoup de nus Ah d j les photos superbes Et puis tout un travail sur le corps de son compagnon Et moi j tais merveill de voir ces photos Et j aurais bien aim que ce soit ma compagne pour faire de belles photos Et je me dit que a en phase de r duc a pourrait tre quelque chose qui serait int gr dans le travail Mais bon malheureusement enfin mon poque on va dire a fait un peu ancien combattant mais le travail des professionnels tait bas sur l efficacit de la r duc pas avoir d escarres etc et pas tellement sur tous ces aspect l Donc moi j ai fait un peu de th rapie mais qui visiblement n a pas Les copains pareil Je n ai aucun pote parapl gique qui est en th rapie depuis cinq ans ou en analyse ou je sais pas quoi Ca c est certain 133 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 R Et un petit mot sur les m decins je passe au corps m dical Moi je pense me prendre bien en charge c est dire que je suis mon propre m decin en quelque sorte Je sais par exemple que r guli rement il faut faire des clich s pour voir les reins pour voir au nive
260. le premier f t non directif mais centr sur la vie de Monsieur Martin les autres furent un peu plus d di s tel ou tel th me que je jugeais important mon interlocuteur n en tait pas inform et les d couvrait en d but et en cours d entretien Au total la mati re r sultant de ces dix heures d entretien est constitu e de 103 pages dactylographi es soit un peu plus de 320 000 caract res Monsieur Martin a relu et amend la notice biographique 1 3 que j ai crite suite ces cinq entretiens Je reste seul responsable de l conomie g n rale du texte et du plan th matique de la deuxi me partie du titre de la pr sente contribution du choix des extraits et du contenu des commentaires qui les encadrent L option choisie dans la r daction est celle d avoir recours la citation de larges extraits La richesse des propos tenus leur coh rence interne le souci de construction qui en passe parfois par des digressions signifiantes ont impliqu de laisser de longues plages Monsieur Martin toujours d sireux de cerner les termes de sa propre exp rience et de l impact de sa situation sur autrui Sauf mention contraire signifi e par la convention les extraits cit s le sont dans leur continuit Le signal a deux significations quand il est plac dans l extrait il indique une br ve coupure dans l entretien quelques mots tout au plus quand il appara t entre deux parties d extraits se
261. le regard disons ou le comportement des enfants lui il n est pas du tout en aucun cas il est difficile Parce que il y a un regard tout neuf tout na f tout naturel et donc a passe plut t bien Je sais par exemple que les premi res fois o je prenais Antoine l cole et tout a Ses camarades c tait c est ton papa ben oui c tait ah Par exemple les premi res f tes l cole ou la rentr e Alors la rentr e il y a beaucoup de brassage donc je ne sais pas si forc ment les gamins font attention Mais par contre sur une apr s midi comme la f te de l cole donc les premi res ann es ils ont vu qu Antoine avait un papa en fauteuil Donc il lui ont peut tre pos des questions a je ne sais pas Les premiers temps par 163 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 exemple quand il avait un anniversaire la maison ou des choses comme a Le fauteuil ils voulaient le toucher pour voir Ils voulaient le pousser Ca les enfants ils aiment bien pousser ce qui roule en g n ral ils aiment bien Ce qu ils veulent c est pousser Donc a des fois je les laisse faire Et puis apr s j explique que c est pas toujours agr able d tre pouss comme a surtout par un petit qui fait n importe quoi En tout cas a c est pour les copains d Antoine Parce que Antoine je lui avais pos la question si il avait eu des r flexions du type oui ton p re il est handicap
262. le trouve une inscription dans un contexte significatif et par l se transforme en handicap litt ralement Il s agit donc d une d termination quivoque D une part elle r duit le champ des possibles les autres mani res de d finir la d ficience comme message divin par exemple sont cart es Elle implique donc aussi comme en t moigne les techniques de modalisation l inscription dans un certain ordre normatif Mais d autre part cette r duction est galement une condition pour tablir un pont entre soi et l autre entre sa peine et le monde Le cadrage r alise ainsi d une certaine mani re un change double sens don contre don Le principe de ce m canisme comme l indique E Goffman r side cependant moins dans son versant subjectif que dans une fonction sociale globale l change est in gal Les conventions qui p sent sur le sens et la r alit conf r e au handicap ont pour objet principal le maintien de l ordre social Le cadrage de la d ficience sa transformation en handicap autrement dit vise d abord une r paration collective au cours de laquelle l individu et son exp rience subjective comptent assez peu puisqu il s agit pour eux en fin de compte de se soumettre Cf le texte de ma contribution au pr c dent cahier de recherche Le sens commun du handicap La compr hension sociale du handicap Cahier de recherche de CREDOC n 182 janvier 2003 32 L exp rie
263. les parapl giques en g n ral Q Comment on s adapte R On s adapte parce qu on vit au quotidien des situations des choses On trouve des parades des combines Apr s les choses deviennent quotidiennes et j en suis le premier surpris d ailleurs je pense qu avec des copains on fait peu pr s le m me constat Avant je mettais je sais pas quatre minutes pour m habiller par exemple Maintenant il me faut trente secondes C est s r qu au d but a para t laborieux insurmontable j y arriverais jamais on a mal au dos enfin il y a la totale Et puis je sais pas petit petit petit petit petit petit Et puis au bout d un moment c est devenu la r alit notre r alit le quotidien Donc je pense que c est a l adaptation A partir du moment o les choses deviennent automatiques on les a compl tement int gr es assimil es je sais pas quoi Ca devient le quotidien Donc a plus a plus l quipement enfin plus la voiture etc Et puis apr s il y a l aspect psy ou caract re qui aide aussi Je pense toujours que le fait qu il y ait eu mon p re dans la famille forc ment a m a donn un regard un petit peu diff rent sur cette histoire l sur le handicap Peut tre que inconsciemment a m a motiv tre autonome et plus autonome que lui pouvait l tre C est vrai que moi je vois par exemple mon fr re qui m a emmen en montagne en h lico Il a fait a avec une bande de complices
264. les obstacles concrets les tables et les rites d approche la danse la drague Les ann es passant il s est vu voluer vers plus de s r nit avec le sexe f minin une certaine peur a disparu Bien s r que la virilit de Monsieur Martin en a pris un sacr coup mais il constate en m me temps qu elle peut prendre d autres formes et qu il y a une continuit dans sa vie entre l avant et l apr s accident Il consid re que les ruptures sentimentales qu il a d vivre r sultent plus de la vie en g n ral que de sa situation de personne handicap e 162 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 3 6 LE REGARD ET LES ATTITUDES DES AUTRES Monsieur Martin est autonome Il est m me surpris que ses proches qui le connaissent depuis longtemps aient telle r action en d calage avec sa situation par exemple ranger un endroit inaccessible pour lui les ustensiles de cuisine une fois la vaisselle faite Il constate par ailleurs que les enfants de son environnement notoirement son fils et les copains de son fils ont un rapport ludique du fauteuil ce quoi il ne s oppose pas Ce rapport est diff rent de celui plus respectueux et comme pour s impr gner de ses difficult s que Monsieur Martin avait avec le fauteuil de son propre p re R Alors je ne sais pas comment dire mais finalement des fois les gens finissent par oublier le fauteuil Je vois par exemple c est tout con mais j av
265. les para d ailleurs Il y en a ceux qui n ont pas de fractures en quelques semaines ils sont d j sur le fauteuil Quand j tais alit bien s r on a de la kin d s le premier jour donc on attendait le soir pour mobiliser les membres inf rieurs pour que les articulations ne se bloquent pas Et l c tait au d but c tait insupportable c est dire en fait n ayant pas de sensibilit aux jambes je ne sais pas tirer ou toucher le pied a me tirait de partout Enfin je me souviens pendant quelques temps quelques semaines pour pouvoir me mobiliser un peu il fallait m injecter du fortal qui est je crois un d riv de la morphine enfin c est un opiac quoi Et donc a veut dire que a faisait tr s mal videmment Et a c est pareil quand moi je voyais mes fr res ma famille qui venaient qui prenaient le lit quand j tais alit Donc justement on se d pla ait souvent en lit pour se rejoindre pour aller dans le parc par exemple des choses comme a Et les petits rebords des fois le moindre petit rebord a mettait une secousse dans le lit Et je revois mes fr res en train d essayer de soulever le lit pour minimiser le truc et tout C tait tr s touchant parce qu ils faisaient gaffe parce que a les faisait chier quand je faisais aaaaahhhh quand j avais mal quand y avait une petite secousse La douleur la douleur la douleur Ca tire tellement de partout que au d but on a l impression qu on va pas s en sorti
266. li s par la DARES sur l exploitation de ce volet compl mentaire l enqu te emploi montrent que l acc s l emploi des personnes d clarant un probl me de sant reste identique ge et cat gorie socioprofessionnelle donn celui des personnes n en d clarant pas tant que ce probl me n est pas coupl d un sentiment de limitation dans le travail La part des actifs occup s taux d emploi est quasiment la m me qu elles aient d clar un probl me de sant ou non condition qu elles n aient pas d clar une limitation dans leur vie professionnelle Pour les personnes se sentant limit es dans leur travail le taux d emploi est un peu plus lev 50 pour les ouvriers qualifi s et de 80 pour les autres qu elles aient d clar un probl me de sant ou non Cette notion de limitation tait abord e dans le questionnaire sous trois aspects en termes de quantit de travail en termes de nature de travail et en termes de possibilit s de d placement entre le domicile et le lieu de travail Le sentiment de limitation semble rep rer des probl mes de sant plus graves ou plus handicapants par rapport l environnement de travail Cette diff rence entre probl me de sant et limitation dans une activit avait d j t abord e dans un pr c dent cahier de recherche du CREDOC et renvoie aux deux premiers stades de la cha ne de Wood les d ficiences et les incapacit s La d ficience renvoie
267. lidit 7 2 14 7 14 3 21 8 Une reconnaissance de mutil de 0 1 0 2 0 2 0 2 guerre et assimil Source CREDOC enqu te emploi 2002 vy Des conditions d emploi difficiles pour les actifs occup s Traditionnellement dans les caract ristiques sociod mographiques des personnes handicap es une in galit sociale ressort Les travaux de P Mormiche l INSEE notamment soulignent le r le des in galit s sociales dans le processus du handicap Ainsi y a t il deux facteurs d in galit sociale face aux processus handicapants les d ficiences sont moins fr quentes dans les milieux ais s ou dipl m s et la capacit dominer ces d ficiences la disposition d un environnement mieux adapt y est galement plus forte Ces deux facteurs jouent dans le m me sens si bien qu au total le rapport entre les pr valences d au moins une ou deux incapacit s entre familles de cadres sup rieurs et d ouvriers est de un trois alors que pour les d ficiences il est de 1 2 C est ainsi que les enfants de milieu populaire sont plus souvent en institution et sont plus souvent identifi s comme handicap s et se sentent plus limit s que les enfants de cadres pour lesquels les parents auront davantage de moyens 71 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 financiers et seront plus la qu te d informations sur les am nagements appareillages permettant de pallier les d
268. lles n voquent pas tout de suite le fait que le candidat pr sente un handicap et qu elles n en parlent que si ce probl me est vraiment susceptible de choquer ou de d ranger justifiant le fait de pr venir l employeur avant l entretien Ceci s explique en partie par le fait que l image du handicap dans la soci t et en particulier au sein des employeurs renvoie aux formes extr mes qu il englobe la personne en fauteuil roulant ou malade mentale A ce titre les probl mes qui touchent des parties externes du corps et qui sont donc a priori visibles comme les d ficiences intellectuelles sont les plus susceptibles d tre craints par le monde professionnel contrairement aux d ficients sensoriels pour lesquels l insertion professionnelle pose g n ralement moins de difficult s Certaines de ces d ficiences ont peut tre des cons quences plus fortes sur la capacit de travail Aucun l ment dans l enqu te ne permet d appr cier la gravit de la d ficience notion qui est d ailleurs toujours tr s difficile cerner et d finir m me par les m decins eux m mes Les probl mes des membres inf rieurs affectent ainsi a priori davantage la mobilit 31 des personnes se sentant limit es dans leurs d placement entre le domicile et le travail ont d clar cette d ficience Mais la pr valence de difficult s visuelles est plus faible parmi les personnes se sentant limit es dans leurs d placements e
269. llons le voir La seconde observation est plus th orique et consiste d accord avec E Goffman qui suit en cela la voie compr hensive de M Weber consid rer ces types comme des constructions id ales de simples tableaux de pens e Les exemples que nous donnons n ont donc qu une valeur illustrative car rien n interdit de penser que ces types dans la r alit se recoupent et se m langent La m re de Na ma pour intransigeante qu elle puisse para tre l gard des professionnels de la sant n en essaie sans doute pas moins de s accommoder du handicap d autres moments de sa vie quotidienne les deux attitudes n excluant pas la recherche d une certaine exemplarit par ailleurs D une certaine mani re on peut m me envisager ces types comme diff rentes tapes ou moments que chacun peut conna tre successivement sans qu aucune toutefois ne soit un passage oblig mis part le repli sur soi par lequel presque tout le monde manifestement peut tre tent au moins au d but Il faut enfin garder pr sent l esprit que l volution d une d ficience ne suit pas forc ment une volution lin aire il y a des retours en arri re qui comme le souligne le p re de Marion l occasion de l intervention chirurgicale r cente de sa fille cardiopathe r sonne comme des rappels de l angoisse initiale Et bouleversent bien entendu les ajustements auxquels on tait malgr tout parvenu
270. lsain mais M me si au d part c est vraiment un peu de mis rabilisme un peu ah le pauvre Je sais qu une fois par exemple je suis rentr avec mon fr re ma belle s ur mes neveux c tait mes neveux et mes ni ces qui se produisaient Et puis j arrive la caisse avec ma belle s ur C tait r alis par l association musicale du coin J arrive la caisse avec ma belle s ur Et puis il y avait une nana que ma belle s ur connaissait bien qui faisait la caisse Et puis cette nana dit ma belle s ur oh c est qui en parlant de moi Et puis ma belle s ur elle lui dit c est mon beau fr re c est mon petit beau fr re Pis d un coup elle a eut un air d sesp r Ah en fauteuil roulant un si beau gar on Alors je sais plus mais un truc comme a Et a des r flexions comme a c est souvent C est dire que si on n tait pas beau gar on ce serait beaucoup moins grave Et je sais pas pourquoi mais moi apr s dans la soir e je vais prendre l air et cette nana tait entrain de fumer une clope Du coup j ai rebondi un petit peu je lui ai dit avec le sourire mais un peu quand m me volontairement provoquant j aurais pas une belle gueule ce serait quand m me moins grave si j tais handicap Ah ben non c est pas ce que je voulais dire Alors du coup elle s est sentie mal l aise et je lui ai dit que je m en foutais de ce qu elle disait que c tait la limite spontan et
271. lui dis oui je suis en panne Il me dit OK j arrive Et trois minutes apr s mon fr re arrive derri re Tr s rapidement j tais cern finalement Mais par contre je ne me suis pas affol j ai pas du tout paniqu C est presque un peu l aventure Il y a des fois moi je trouve c est bien des situations quand a ne se passe pas tout fait comme on l a pr vu Quand a reste mat riel videmment bien s r Parce que a permet de se confronter Ca permet de voir Et puis souvent on rencontre J ai remarqu que souvent on rencontre des gens super dans ces situations Le fait d tre en fauteuil peut pour une personne parapl gique entra ner des d pendances La premi re est la d pendance induite par des d r glement corporels par exemple une incontinence urinaire qui n cessite un tui p nien La seconde est celle du fauteuil lui m me sans lequel il n est pas d autonomie La troisi me est celle qui n cessite des aides financi res favorisant l autonomie ce sont les financements des aides domicile procur es par des personnes r mun r es La quatri me est celle relative aux aides que les hasards de la vie quotidienne permet de d couvrir Mais quoi qu il en soit de ces d pendances Monsieur Martin qui en dit bien les contraintes mesure aussi les potentiels qu elles rec lent de la d pendance peuvent r sulter et in galement selon les ges situations et comp tences physiques le cas du d
272. m tallique ou une partie bois et puis qu assez rapidement il va y avoir une rougeur et qu on sait qu une rougeur peut d g n rer avec toutes les cons quences on dit oulah Donc du coup on devient tr s fragile malade hein Ce sentiment effectivement de fragilit de pr carit que a va tre difficile quoi Q Vous avez toujours cette sensation R Non non C est ce que j avais dis effectivement Au fil du temps il y a la th orie bien s r sur les escarres tout a Et puis il y a la pratique de chacun Ce qu on fait chacun de sa vie de comment on volue dans cette histoire Cette p riode l oui c est une p riode d un deux ans Apr s on se conna t on sait jusqu o on peut aller ce qu il ne faut pas faire Et c est vrai que moi maintenant de ce point de vue l j ai pris un certain nombre de risques Et je me rends compte que finalement il n y a pas tant de limites que a Je veux dire moi j ai bourlingu J ai voyag en Afrique en voiture chose qui au d but me paraissait Mais bon j ai camp dormi sur la plage fait des nuits la belle toile en pleine for t Et a c est toutes ces situations l qui peuvent tre un petit peu risque Mais quand on se conna t quand surtout on a envie de vivre donc on fait pas n importe quoi On assume on prend le minimum C est toujours contraignant Ca va tre un truc sous les talons quand on s allonge Mais a a devient la routine Ca devient le qu
273. mal formuler Q Le fait de minimiser c tait une volont vous ne pouviez pas faire autrement R Oui est ce que ce n est pas un peu pour se prot ger Parce qu il y a aussi le fait que je veux dire individuellement enfin individuellement oui il y a aussi le fait finalement que c est en lien avec la fa on dont on int gre en nous C est dire la fa on dont on int gre en nous dont on accepte entre guillemets accepter bon je ne sais pas ce que a veux dire mais on va dire a comme a je dirais plut t int grer assimiler C est s r il y a le fait de ne plus marcher bon a c est le fait de ne plus marcher suite il y a le fauteuil roulant bon ok a c est une chose Mais a c est c est finalement un d tail quoi Enfin c est un d tail oui au niveau de la parapl gie je pense qu effectivement c est pas le plus important Le plus important c est tout ce qui est annexe et donc ce qui ne se voit pas donc les probl mes de sensibilit s par l m me les troubles sexuels c est a qui est le plus difficile dans la parapl gie C est pas le fait de ne plus marcher c est s r que a fait chier de ne pas faire de v lo ou de ne pas aller en montagne Mais l il y a toujours des solutions il y a toujours le mat riel A quarante ans mon fr re m a emmen en montagne en h licopt re l o il va toujours l o il m avait promis de m y emmener donc c est possible C est pas c est pas l que c est le
274. mas respectivement aux livres de Franco Ferrarotti et de Maurizio Catani La validit scientifique de l approche biographique r sulte aussi de l volution du paysage intellectuel et social au sein duquel sans souci hi rarchique on peut mentionner e les strat gies ditoriales revendiqu es par certaines maisons d ditions dont les publications et parfois les collections valorisent les t moignages r cits de vie autobiographies e la perte d adh sion aux paradigmes sociologiques faisant la part belle aux facteurs explicatifs exog nes aux sujets e la sensibilit des lectorats populaires savants aux genres biographiques e la validation de la m thode pratiqu e par d autres disciplines l histoire notamment l histoire orale mais aussi l anthropologie e la multiplication des populations dont les membres sont connus ou non l homme du commun ou la star abord es par le genre et qui ainsi acc dent une plus grande lisibilit collective des militants politiques syndicaux associatifs des professionnels membres du corps m dical des personnes aux itin raires curieux des voyageurs ou tortueux la figure du d linquant des cat gories de d laiss s ch meurs SDF drogu s trangers ou immigrants vivant sur notre sol et bien s r handicap s e une justification de la m thode par des figures l gitimes occupant des postes dans l dition et dont la volont est la d
275. matismes li s la r p tition de certains gestes etc On peut galement se poser la question de l acc s plus limit des personnes touch es par un probl me de sant d autres postes qu ouvriers notamment en raison du fait qu elles ont moins souvent suivi des tudes lorsqu elles ont un handicap de naissance ou que le probl me rencontr les disqualifie ou compromet leur carri re professionnelle En effet quelle place est accord e un salari apr s un accident grave de la vie priv e les m mes chances d volution sont elles gard es Une tude en cours au CREDOC pointe la difficult des personnes lourdement handicap es apr s un accident ou une maladie grave pour retrouver et garder leur emploi difficult qui refl te la fois les craintes des employeurs mais aussi la difficult pour la personne de se projeter dans un avenir professionnel qui demande tre red fini On aboutit ainsi une sorte de paradoxe les personnes se sentant limit es dans leur vie professionnelle sont aux postes les plus physiques Il n est pas surprenant dans ce cadre qu un sentiment d incapacit naisse de l interaction entre des probl mes de sant et des conditions de travail difficiles physiquement 72 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 13 R partition des diff rentes populations par cat gorie socioprofessionnell
276. ment travailler Par contre moi je n ai jamais eu je ne pense pas le souci de m ins rer de me dire il faut absolument un boulot pour tre ins r mais ins r au sens de comment dire au sens de il faut une insertion il faut une insertion sociale C tait plus un besoin de travailler d tre avec d autres d tre actif quoi Mais pas en disant a y est je suis ins r j ai r ussi je suis content etc 110 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q Dans l association pour personnes handicap es o vous tiez quelles taient les relations que vous aviez avec des personnes non handicap es et quelles taient les relations que selon vous elles avaient avec vous R A priori tout fait des relations simples et normales et classiques Effectivement dans l quipe je pense qu il y a un petit peu plus de personnes valides que de personnes handicap es On travaillait vraiment dans un esprit dans un bon esprit d quipe Donc j tais d l gu adjoint donc a veut dire que j tais directeur entre guillemets de la d l gation b n vole Je ne sais pas si les gens sont habitu s dans des associations comme a je pense aux travailleurs sociaux principalement je ne sais pas si ils sont habitu s comme a travailler avec des b n voles mais il n y avait vraiment aucun distinguo dans l quipe J tais respect donc en tant que d l gu adjoint Quand je travaillais avec
277. ments qu il faut faire avant On devient des experts de notre histoire enfin des experts C est un peu pr tentieux mais oui on devient des experts par rapport notre situation a c est s r D ailleurs des fois il m est arriv de rencontrer des m decins qui avaient bien compris a c est dire qu ils ne se posaient pas en toubib qui sait tout mais en toubib qui sait pas tout sur le parapl gique et surtout qui a conscience que chaque cas est diff rent Donc je vous coute Comment a se passe pour vous Donc a c est assez int ressant effectivement on devient des experts On s adapte De toutes fa ons je pense que tout a c est l adaptation qui fait qu on a la capacit de fonctionner diff remment et puis surtout d accepter de fonctionner diff remment Accepter Je sais pas si on accepte parce qu on n a pas le choix donc Mais en tout cas de faire avec oui de faire avec Dans la mesure o il n y a pas quarante milles alternatives Q Pour construire un peu mieux cette id e de l expertise vous auriez d autres exemples que le corps m dical R Oui Q Mais sur quel autre type de relation vous pourriez tre des experts i R Je le vois principalement d un point de vue m dical puisque souvent quand on est confront des m decins ou des soignants en tout cas de mani re g n rale si on y est confront souvent c est parce qu on est parapl gique ou en tout cas c est parce qu on est l ho
278. mment ils ont g r a R Je pense par exemple quelqu un un mec pr cis qui a assez rapidement refus d entr e de faire le cobaye qu il y ait quinze personnes autour de lui qu il soit poil Lui il a clairement affich les choses Vous me respectez moi je ne veux pas que vous enleviez le drap Donc lui il s est un peu impos en quelque sorte Il a donn son mode d emploi Q Il a t accept par le personnel soignant R Oui il me semble que oui Enfin bon a commence dater maintenant Q Les pensionnaires enfin les patients pouvaient n gocier une r gle pour g rer leur situation sans qu elle leur soit impos e par le personnel soignant R Compl tement compl tement Je pense par exemple d j le fait d tre cobaye d une infirmi re a on peut le refuser On nous demande tiens tu vois la petite stagiaire elle doit faire un pansement se trouve que t as un pansement Est ce que tu serais d accord pour qu elle fasse un examen sur toi Actuellement tu as toujours une sonde demeure est ce que tu serais d accord pour que l occasion d un examen enfin d un truc de la pratique de la stagiaire est ce que tu serais d accord pou qu elle te fasse un sondage Donc bon bien s r on est libre de refuser 122 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Q En g n ral on dit oui ou on dit non R En g n ral je trouve qu il me semble que les gens disent oui
279. moins une des trois incapacit s contre 76 des femmes inactives 60 des ch meurs contre 50 des femmes au ch mage A contrario les femmes d clarent plus souvent une incapacit dans le travail que les hommes lorsqu elles travaillent 44 des actives occup es contre 39 des actifs occup s Les probl mes ressentis au quotidien au travers des conditions de travail semblent plus affecter les femmes Ces carts renvoient au r le attendu de chacun des sexes pour un homme ne pas travailler est ressenti davantage comme un handicap que pour une femme ces derni res se retirant plus souvent dans l inactivit lorsqu elles doivent faire face un probl me de sant 58 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 2 R partition des diff rentes populations tudi es par sexe En Valide Malade Limitation Limitation Limitation de quantit de nature de mobilit Hommes 49 8 49 0 45 4 46 9 43 8 Femmes 50 2 51 0 54 6 53 1 56 2 TOTAL 100 0 100 0 100 0 100 0 100 0 Source CREDOC enqu te emploi 2002 v Une population plus g e La probabilit d avoir un probl me de sant cro t avec l ge Les personnes ayant d clar un probl me de sant ou un handicap ont plut t entre 40 et 59 ans 54 30 ont m me entre 50 et 59 ans Les 40 59 ans ne repr sentent que 37 de ceux n ayant pas d clar de probl me de sant A contrario les moins de 40 an
280. mois dans l lectronique mais ses lacunes en maths ne lui permettent pas de la mener terme S installant 1984 dans une capitale d partementale il prend contact via sa compagne qui y travaille comme auxiliaire de vie avec une association s occupant de personnes handicap es pendant 7 ans de 1987 1994 titre b n vole il exercera diverses t ches collectes de fonds sensibilisation du grand public il en sera m me d l gu d partemental adjoint de 1990 1994 Une op ration l paule 1993 ayant n cessit un stage de quatre mois en un centre de r ducation lui font repenser et r orienter son itin raire la suite d une information donn e par un copain t trapl gique il retourne 1995 dans un centre de r ducation d j fr quent pour suivre une formation de six mois centr e sur le multi m dia 33 ans il r alise ensuite diverses missions d int rim notamment une dans une entreprise de la fili re nucl aire 4 mois de stage et deux mois de mission pour des raisons personnelles il ne donnera pas suite une int ressante proposition d embauche manant d un organisme en lien avec cette entreprise Il participe aussi un travail sur CD Rom pour un organisme de l ducation nationale 30 7 Pa ae Daniel Bertaux Fonctions diverses des r cits de vie dans le processus de recherche Soci t s p 22 100 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobr
281. mpression Entre les difficult s de d placement plus et bien s r ce moment l le regard des autres Le regard des autres ce moment l il est flagrant c est dire qu on voit on ne voit que a Parce que je me demande si finalement nous m mes dans le regard des autres on ne cherche pas aussi voir voir je sais pas quoi mais peut tre ce que les gens nous renvoient ou ce que l on repr sente Bon l j ai pas r fl chi a mais a c est vrai que c est tr s tr s tr s tr s difficile C est vrai qu avant de se planter globalement au niveau des d placements on fait ce qu on veut on va o on veut il n y a pas d obstacles Et l par contre il y a que des obstacles Donc quand on voit un endroit tiens j aimerais bien aller l bas je peux pas Ne serait ce que je sais pas s avancer vers un arbre qui bouge enfin forc ment a limite c est frustrant C est difficile quoi C est des grands points qui me viennent par rapport la mobilit par rapport au d placement Q Vous pouvez me citer quelques obstacles par exemple dont le commun des mortels n aurait pas id e R L ce que j voquais l instant a concerne le d but de ma vie de parapl gique Le moindre petit rebord franchir pour prendre un raccourci par exemple devient impossible c est dire qu il faut contourner l obstacle bien videmment les escaliers Donc a c est le plus flagrant Mais des choses plus b nignes
282. multiforme qui en fait d ailleurs une marque de l air du temps ne contribue toutefois pas toujours en laisser percevoir toute la complexit dans le sens noble qu E Morin donne ce terme Dans le langage courant l exp rience renvoie en effet souvent au flou du v cu ce niveau quelque part rarement situ o s enlisent en g n ral nos explications sur le monde tel que nous l envisageons et l prouvons Dans la suite de ce qu on a rappel de G Simmel plus haut on verra toutefois dans la r currence du terme la manifestation criante d un souci de soi et une tentative de livrer une sorte de vision du monde tr s pr caire partir de sa sensibilit Dans la dimension conceptuelle tout a fait rigoureuse qui est cependant la sienne depuis E Kant au moins la notion se pose d ailleurs toujours en m diatrice entre la raison et la sensibilit Le philosophe allemand l envisageait toutefois d une mani re trop r ductrice puisqu il accordait a priori le primat d finitif de la raison sur les donn es de la sensibilit C est la fin du xIx si cle que W Dilthey lui conf re le statut pist mologique qui deviendra le sien dans les travaux de M Weber et de G Simmel Et de tous ceux qui par la suite s inscriront dans la tradition de la sociologie compr hensive Sa valeur tient dans le fait qu elle rend compte de l activit significative au sens plein du terme qu
283. n A1Z 17 contr l es R crit le r cit de vie serait une naration qui a valeur de synth se c est dire qu elle inclut la phase analytique et la d passe en empruntant la forme totalisante d une autobiographie A la lettre le pr sent travail ne correspond pas cette d finition un r cit de la vie de Monsieur Martin serait plus synth tique et crit de ma seule main Toutefois je pense que l organisation th matique le lissage des propos et les commentaires que je propose constituent un effort de narration et d analyse d passant le cadre de l usuelle retranscription Cette organisation de la mati re biographique c est dire la mise en avant d une parole am nag e permet d essayer d chapper l in vitable reconstruction a posteriori laquelle se livre toute personne effectuant un travail de rem moration de son propre itin raire ce faisant le discours qui a le temps de se d ployer de pr ciser de revenir sur tel ou tel point offre une garantie et non pas une certitude de ne pas s entourer d une enveloppe d invention qui limiterait sa pertinence Je ne m connais donc pas les biais oublis gommages conscients ou non auxquels le narrateur peut le livrer Raconter sa propre histoire c est se raconter d abord des histoires Mais lire les propos de Monsieur Martin on verra par ailleurs qu il ne s agit pas non plus pour lui de pratiquer une abs
284. n ont pas d emploi mais ont malgr tout voqu le souhait de travailler dans l enqu te seules 62 des personnes malades d clarent tre en recherche d emploi 55 de celles se sentant limit es en terme de 78 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 quantit de travail 59 en terme de nature de travail et 50 en terme de mobilit entre le domicile et le lieu de travail Les personnes d clarant un sentiment de d couragement sont moins souvent que les personnes malades dans une recherche active d emploi Ainsi alors que 10 des personnes valides ne cherchent plus d emploi ce qui refl te un abandon d finitif de la possibilit de retrouver un emploi 22 des personnes malades sont dans cette position 28 des personnes se sentant limit es en termes de nature de travail 31 en quantit et 37 en d placements entre leur domicile et leur lieu de travail Ceci met bien l accent sur le lien entre retrait de la sph re professionnelle et sentiment de limitation dans le travail Tableau 18 Quelle est votre situation En Valide malade Incapacit Incapacit Incapacit en en nature en quantit mobilit un emploi et n en cherche pas d autre 5 3 3 2 2 trouv un emploi pour plus tard et ne 5 3 2 2 3 cherche plus N a pas commenc ses recherches 9 9 9 8 7 Ne cherche plus d emploi 10 22 31 28 37 Cherche actuellement un emploi 69 62 55 59 50 TOTAL
285. n tant que parapl gique j ai fait trois ann es de suite dont r cemment avec Patricia dans ces modules de l cole de la ville mais l en tant que parapl gique Dire un peu dans les grandes lignes un peu comment a se passe mais surtout r pondre aux questions Parce qu on peut en parler des heures C est surtout r pondre aux questions que les futurs infirmiers infirmi res peuvent avoir se poser Principalement les questions a tourne sur leur pratique eux leur future pratique Quel comportement peut avoir une infirmi re Qu est ce que peut nous apporter une infirmi re pendant la r duc Et puis apr s a d vie sur plein de th mes Donc a c est int ressant moi c est quelque chose que j aime bien faire Monsieur Martin justifie l utilit des pairs Ils permettent que le jeune parapl gique puisse s inscrire dans le temps avoir des projets en voyant des anciens en fauteuil en prenant conseil si la parapl gie est une rupture elle peut avoir une suite Ayant pris de l ge il souhaite maintenant apporter sa contribution aux membres du corps m dical m decins et infirmiers mais aussi aux parents souvent d munis face leur enfant devenu parapl gique 131 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 y 2 5 2 Les professionnels Le cataclysme constitu par la parapl gie peut conduire certaines personnes demander des aides aupr s de professionnels des psychoth rapeutes
286. n tape quelqu un qui est devant nous qui nous tourne le dos et on tape les pieds etc On sent g n ralement Tout de suite les gens vont se retourner pour voir ce qui s est pass Il y a des fois on sent simplement dans la fa on dont la personne bouge je sais pas voir les vibrations je sais pas comment dire au niveau du corps On sent que la personne elle est nerv e par ce qui vient de se produire Et quand parfois elle se retourne et qu elle voit plus bas quelqu un en fauteuil deux fois sur trois elle s excuse Alors que c est moi de m excuser Et l c est pareil dans le comportement les gens a les ah excusez moi Mais a c est fait g n ralement je r ponds non c est moi qui m excuse Et je ne veux pas rentrer dans le d bat je laisse tomber Et un jour deux fois a m est arriv En vingt ans c est quand m me pas beaucoup mais c est vrai qu en m me temps je pense quand m me bien manipuler mon fauteuil donc c est aussi des situations quand m me assez rares Et un jour j avais une petite mamie devant moi Et pareil a a bouscul et a a tap dans les tibias de cette petite dame C tait quand m me pas tr s grave Elle s est retourn e vous ne pouvez pas faire attention jeune homme Je me suis dit elle n a pas vu que j tais en fauteuil quoi Je lui dis oui madame vous avez raison excusez moi Oui mais il faut faire attention parce que moi je peux tomber
287. nait le caf ensemble personnels comme pensionnaires Il y avait des liens naturels qui se cr aient On faisait souvent des bouffes des sorties Je pense Viviane qui avait une maison sur la route Coup de bol elle avait une maison de plein pied donc il n y avait pas de difficult s pour aller chez elle On y allait r guli rement Enfin je dis on des fois on tait deux des fois j tais tout seul des fois c tait les autres Et quand je dis on on n tait pas beaucoup un petit noyau de trois ou quatre Un petit noyau de trois ou quatre avoir des relations avec un petit noyau du personnel Q Et ce qui tait vrai de votre groupe l tait aussi pour d autres groupes R Oui il me semble Alors est ce que c est plus les traumatis s m dullaires donc paras ou t tras Je sais pas J ai tendance dire que oui mais je voyais a de mon petit milieu du groupe un peu du noyau A l tage o j tais il y avait pas mal de paras ou t tras C est vrai qu il y avait un b timent o c tait un peu diff rent Sachant qu il y avait quand m me principalement des paras des t tras sur les deux b timents Mais en tout cas oui c tait le cas pour d autres c tait pas que mon petit noyau moi Il y avait le fait qu on pouvait aussi manger ensemble au restaurant de l tablissement Oui il y avait des relations tout fait amicales qui se mettaient en place Et petit petit dans certains cas et dans pas mal de cas a d bouc
288. nce du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 REFERENCES DES OUVRAGES CITES Agamben G Ce qui reste d Auschwitz Paris Payot amp Rivages 1990 Assouly Piquet C amp Berthier Vittoz F Regards sur le handicap Paris Hommes et Perspectives Descl e de Brouwer 1994 Audet J amp Katz J F Pr cis de victimologie g n rale Paris Dunod 1999 Bateson G Une th orie du jeu et du fantasme in Vers une cologie de l esprit tome 1 Paris Seuil 1977 Bettelheim B La limite extr me in Survivre Paris Laffont Hachette 1979 Crocq L Les traumatismes psychiques de guerre Paris O Jacob 1999 Gardou C Parents d enfant handicap Toulouse Er s 1996 Goffman E Asiles Paris Minuit 1968 Goffman E Rites d interaction Paris Minuit 1974 Goffman E Stigmate Paris Minuit 1975 Goffman E Les moments et leurs hommes Paris Seuil Minuit 1988 Goffman E Les cadres de l exp rience Paris Minuit 1991 Le Qu au P L autre peine Etude exploratoire sur les conditions de vie des familles de d tenus Cahier de recherche du CREDOC n 147 2000 Le Qu au P La compr hension sociale du handicap cahier de recherche du CREDOC n 182 2003 L vi P Si c est un homme Paris Julliard Pocket 1987 Simmel G La trag die de la culture Paris Rivages 1988 Stiker H J Corps infirme et soci t Paris Dunod 1997 Vernant J P La mort dans les yeux Paris S
289. ne rencontre initi e par elle qu il avait fait une erreur Au moment de cette rencontre au caract re ambigu l un et l autre avaient quelqu un dans leur vie Alors Monsieur Martin en fauteuil roulant comment se d brouille t on pour approcher le beau sexe Q Des strat gies R Je sais pas si on en d veloppe c est dire est ce qu ce moment l a va tre plus du visuel enfin du visuel c est dire je sais pas un sourire le regard Je ne sais pas Personnellement je ne crois pas avoir d velopp d autres choses ou avoir trouv des alternatives danser un slow Je ne crois pas qu il se soit pass quelque chose l dessus puisque finalement j ai vingt ans de parapl gie si je regarde un peu toute cette histoire tout ce temps l et toutes les filles avec lesquelles je suis sorti avec qui il s est pass quelque chose avec qui j ai v cu m me pour certaines Finalement c est jamais moi qui suis all vers elles a a toujours t le contraire qui s est pass Et du coup a r glait la question de la drague de l approche de l approche ce n est pas un terme tr s po tique mais bon Donc toujours avec cette esp ce de surprise d tre dragu d tre abord par une femme tout en tant quand m me en fauteuil Ca c est vraiment et m me encore au jour d aujourd hui c est quelque chose qui me reste qui me surprend toujours Q R trospectivement ou dans la vie de tous les jours R R tros
290. nnage sont eux aussi tr s largement radiqu s du quotidien et remplac s par la standardisation du logement et du mobilier hospitalier Nous n envisageons pas cette uniformisation du d cor comme ayant un impact d personnalisant contrairement ce qu Erving Goffman a pu souligner Effectivement ce mobilier permet notre sens par sa relative adaptation l tat corporel du patient une accessibilit de l environnement plus importante qu en milieu de vie ordinaire Cependant le patient perd effectivement l une part de ce qui lui permettait de se pr senter de mani re la plus id ale autrui Enfin force est de constater que le patient a subi une transformation de son apparence physique due au simple fait d une perte de poids et d une fonte musculaire importantes Certains h sitent se reconna tre dans la glace de l ascenseur quand ils croisent leur reflet pour la premi re fois apr s l accident Il faut bien comprendre que cette transformation de l apparence ext rieure va tre d finitivement modifi e avec le passage en fauteuil roulant passage qui va signifier l acc s objectif au r le de handicap dans les interactions quotidiennes A noter aussi que le patient ne ma trise plus aussi compl tement qu avant les informations le concernant Tout d abord son dossier m dical peut contenir des informations le discr ditant tels que les passages l acte et la violence la toxicomanie ou les tr
291. nnelle Ceci souligne le r le du sentiment d exclusion ou de difficult s d accession dans l mergence du sentiment d incapacit Les difficult s d insertion professionnelle contribue l auto attribution de limitations dans le travail alors m me que ces difficult s ne d pendent pas que de la personne mais aussi du contexte conomique et du regard des actifs sur les personnes handicap es au travail et sur leurs capacit s Dans le classement des facteurs explicatifs du sentiment de limitation dans le travail ce qui est propos la personne malade est plus important que le profil m me de la personne Hormis le type de d ficiences le sexe et l ge ont peu de pouvoir explicatif en comparaison des conditions d emploi On retrouve le r le de la soci t et l de l entreprise dans l mergence du sentiment de limitation et donc d incapacit s chez la personne En terme de politique les chiffres semblent montrer le peu de prise en compte des personnes ayant des probl mes de sant au travail qui doivent soit rendre transparent leur handicap et se fondre dans la masse soit se retirer dans l inactivit des revenus de substitution permettant de compenser la perte de revenu 88 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 DEUXIEME PARTIE UNE HISTOIRE DE VIE L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 90 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collect
292. normal qu elle formule a comme a Et du coup on a discut un petit peu Le fait qu on ait discut un petit peu mon avis elle doit plus voir les gens en fauteuil roulant tout fait sur le m me ordre En tout cas je l esp re pour elle Bon moi a me change pas ma vie mais c est surtout pour elle Je veux dire qu elle doit voir les choses un petit peu diff remment Au fond Monsieur Martin dont l atteinte est visible se m fie de toute relation mis rabiliste m me et surtout si elle est port e par les bons sentiments de la caissi re Il lui pr f re l imm diatet saine r sultant d un regard interrogatif mais sans a priori de la jeune fille rencontr e par hasard et pour un moment tr s court Monsieur Martin nous fait toucher du doigt d une part l extraordinaire pr gnance de la compassion suscit e par l atteinte corporelle et d autre part la libert de ton avec laquelle on peut aborder autrui handicap sans sch ma pr con u Mais il est sans doute difficile d chapper aux cadres sociaux la pr sence des personnes handicap es dans l espace public nous oblige cet effort permanent A mi vie Monsieur Martin qui a quarante ans n a plus la nostalgie de l avant ce temps o il tait debout Etait ce encore lui m me Q Quelle est votre identit R Vous avez de ces questions Q Qu est ce que c est qui vous d finit 175 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif o
293. notamment Q Est ce qu on a besoin d tre aid R Je pense que vraiment a d pend des gens Moi j ai fait un petit peu de th rapie J ai consult un petit peu des psy pensant que j avais peut tre besoin d tre aid pensant qu effectivement Enfin comment dire C est dire qu effectivement on n a pas besoin d aller mal pour aller voir un psy On peut tr s bien voir un psy pour aller mieux Le handicap il est l Je veux dire il est l quoi qu on fasse Quarante ans d analyse psychoth rapie on sera toujours le cul dans un fauteuil comme a Maintenant effectivement bien s r que la th rapie la psychoth rapie peut aider comprendre des choses mieux g rer des trucs Donc moi pas Deux ou trois pisodes comme a dans ma vie je me suis dis tiens ben effectivement peut tre si tu t engageais sur une th rapie a irait un peu mieux Tu te sentirais mieux Alors j ai effectivement rencontr des th rapeutes On a travaill un petit peu Ca ne m a jamais v ritablement apport grand chose Q Des s quences longues R Non Ca a t des entretiens Le plus long travail que j ai fait c est huit neuf mois peu pr s Apr s cette p riode l il y a eu des p riodes un peu plus courtes de deux trois mois parce que je ne sentais pas le th rapeute Peut tre que je n ai pas forc ment trouv toujours la bonne th rapie ou la bonne orientation Je ne sais pas quand on voit un psychoth
294. nt Je vois avec mon coll gue l autre jour l C est marrant les gens ont toujours peur d voquer l accident de poser une question rapport l accident J voquais ce qu on allait faire ensemble Et il me dit a va pas tre trop dur pour toi Je lui dit comment trop dur II me dit oui je sais pas de parler de ton accident Je lui ai dit d abord je pense pas que je ne vais pas parler de mon accident pour pas en parler Je lui ai dit non ce ne me pose aucun probl me Et c est marrant les gens ont toujours peur que a d range ou que a fasse mal ou que a r veille des choses Moi en tout cas a ne m a jamais Ben je veux dire c est fait c est fait quoi Donc voil Q Dans votre fort int rieur cette remarque c est fait c est fait correspond une v rit profonde 104 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 R Je sais pas C est jamais tout blanc ou tout noir de toute fa on les choses bien videmment Moi j essaie de fonctionner comme a quoi Je sais pas quand je prends le petit d jeuner avec Antoine vers 8h30 et si il renverse son bol de chocolat et ben oui c est s r que tout de suite a Enfin c est fait c est fait Je veux dire le chocolat il est par terre c est irr versible C est pas la fin du monde donc a sert rien de gueuler ou de se prendre la t te Je pense que au niveau de ma situation finalem
295. ntre le domicile et le travail que parmi les personnes malades alors m me que cette d ficience peut g ner dans les d placements si elle est assez importante Ainsi si on ne peut pas exclure l impact plus fort de certaines d ficiences sur la capacit de travail que d autres le regard que porte l employeur et les coll gues sur cette d ficience est galement prendre en compte dans le sentiment de limitation dans la vie professionnelle Le comportement des entreprises assujetties vis vis de l emploi des travailleurs handicap s dans le Nord Pas de Calais tude sur les freins et facteurs incitatifs l emploi des travailleurs handicap s CREDOC 2001 Structuration de l emploi travailleur handicap dans le d partement du Maine et Loire CREDOC 2001 Cf cahier de recherches CREDOC cit pr c demment 61 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 4 Les probl mes de sant d clar s par les populations tudi es R ponses multiples Malades Incapacit en quantit en nature en mobilit Probl mes au niveau du dos ou du cou y 29 35 comptis arthrose ou rhumatisme Probl mes des membres inf rieurs au 17 24 24 31 niveau des jambes des pieds y compris arthrose ou rhumatisme Probl mes ou difficult s cardiaques 16 16 15 15 circulatoires ou tensionnels Difficult s visuelles 15 9 Probl mes au niveau des membres 13 18 sup rieurs a
296. nts aiment bien jouer avec le fauteuil Pour eux c est comme d une certaine fa on comme une esp ce de skate board une esp ce de truc qui roule Autant les adultes ont vraiment du mal avec ce mat riel autant les enfants n ont vraiment aucun probl me avec a Ils voient un truc qui roule Je ne sais pas quelle est la sensation quand ils s assoient dedans pour s amuser avec parce que c est de l amusement a c est s r En tout cas Antoine lui il aime bien le faire C est rare ce n est pas souvent mais il aime bien le faire Q C est dire que les enfants Antoine inclus quand vous tes assis ailleurs que dans le fauteuil dans l appartement ils peuvent le prendre et s amuser R S en servir Et tous les copains que j ai en fauteuil qui ont des petits dans leur environnement c est le m me topo Tous mes amis en fauteuil ayant des enfants entre huit et vingt cinq ans parce qu il y en a 164 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 quand m me qui ont des grands enfants Je pense Tristan le fils d un ami il a vingt deux ans c est un expert du fauteuil du deux roues de la technique J allais dire il est aussi dou que nous pratiquement l utilisation du fauteuil Effectivement Antoine me demande toujours Je peux prendre ton fauteuil Alors c est vrai que les premi res fois je ne sais pas a interpelle quoi Est ce que c est bien Est ce que ce n est pas bien C est n
297. octobre 2003 R Aucune id e franchement j ai aucune id e Je pense que c est le hasard le hasard de la vie les co ncidences qui font que puisque mon arriv e l association de personnes handicap es c est un petit peu le hasard Certes c est une d marche de ma part de chercher une activit Il se trouve que a a t cette association parce que ma compagne y travaillait l poque Ensuite il y a eu la formation C est pareil je l ai pas cherch e on m en a parl e Donc a s est trouv devant moi et j ai pris au moment o il fallait prendre En m me temps n ayant pas de formation v ritable et n ayant m me pas le bac ce qui ferme quand m me un certain nombre de portes En m me temps je pense que je voyais pas trop ce que je pouvais faire en fait quoi Y a qu partir du moment o j ai commenc faire un peu de multim dia o l je me suis rendu compte que a me plaisait vraiment Y a peut tre que l o je me suis dit que a pouvait effectivement devenir un m tier Mais pourquoi a a mis tout ce temps je crois quand m me que la raison ou probablement l une des raisons principales c est le fait d tre rentier quoi C est dire que y a pas besoin de salaire Donc partir du moment o y a pas besoin de salaire on est libre et donc on peut peu pr s faire tout ce qu on veut comme on veut Quand j ai travaill l association par exemple je travaillais globalement temps plein je travaillais
298. octobre 2003 indiqu e par ailleurs que j ai essay e de construire mais en privil giant les propos de mon interlocuteur 1 2 METHODE DE L ENQUETE Afin de r aliser l enqu te de terrain j ai sollicit une personne de mes connaissances tant depuis vingt ans tr s active dans le secteur du handicap Je lui ai fait part de mon d sir de rencontrer des personnes handicap es pour conduire avec elles des entretiens approfondis Trois crit res taient mis en avant il fallait que ce soit des adultes devenus handicap s un ge d j avanc et tant d une mani re ou d une autre impliqu dans la vie sociale et professionnelle par exemple mais non exclusivement en ayant un travail ou et une famille Je demandais donc cette professionnelle de r fl chir aux personnes qu elle connaissait et de les solliciter en mon nom pour qu ensuite je puisse leur pr senter mon projet C est ainsi que je rencontrai Monsieur Martin Apr s une discussion d environ une heure pendant laquelle je lui expliquai l objectif de l enqu te et sa m thode il me donn t son accord pour un certain nombre de rencontres enregistr es sur magn tophone et dont je ne connaissais pas a priori le nombre elles se sont d roul es hors de son temps de travail Finalement le r cit de vie ci apr s propos r sulte de cinq entretiens approfondis de deux heures chacun s tant d roul s avant trois et apr s deux l t 2003 Si
299. oi je suis peu pr s enfin je pense tre quelqu un d assez ouvert assez spontan plus ou moins oui assez spontan qui globalement pr sente bien Je pense que a joue beaucoup a c est quand m me tr s important Apr s en fonction des situations par exemple il te dit Qu est ce que tu as eu J ai eu un accident Et qu est ce t as Je suis parapl gique Ah a veut dire quoi parapl gique J ai la colonne de p t e J ai une section de la 171 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 moelle pini re Du coup il y a quand m me un certain nombre de cons quences Je ne marche pas Je ne sens plus mes jambes et il y a des probl mes divers Apr s en fonction de qui on a devant nous on d veloppe ou on ne d veloppe pas Ca d pend videmment Et moi tr s souvent je suis surpris de voir que tr s rapidement les gens ils ne font plus cas du fauteuil Ce qui est bien videmment agr able Enfin agr able on r fl chit pas on calcule pas a mais ce qui devient finalement naturel Apr s bon je pense qu il y a des endroits diff rents ma ville c est particulier peut tre je le r p te mais le tramway fait beaucoup de bien par exemple Les gens ont une spontan it dans le tram Tout le monde prend pas le tram d accord mais les gens s appuient sur le fauteuil nous enjambent facilement Souvent moi je vois des gens qui prennent appui l Un jour j ai vu un m
300. olont s n est jamais r alis e parfaitement ni dans les temps voulus Il doit apprendre accepter cet tat de fait Agir est une partie de la d cision en somme Et ne plus pouvoir agir revient tre partiellement priv de son pouvoir de d cision Ainsi lorsque le soignant pense que le patient a perdu son autonomie corporelle mais que son ind pendance psychique est elle int gralement conserv e cela n est pas tout fait exact Son pouvoir de d cision est amput minima par une actualisation imparfaite de sa volont 1 Int riorisation appr hension imm diate ou interpr tation d un v nement objectif en tant que signification exacte c est dire en tant que manifestation des processus subjectifs d autrui qui ainsi deviennent pour l individu subjectivement signifiants Cf Peter Berger et Thomas Luckmann 1966 1996 La construction sociale de la r alit Paris Armand Colin p 178 43 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Ce v cu tr s souvent frustrant est amplifi par l impression d tre redevable vis vis des soignants et ce sans retour possible Marcel Mauss a montr que la dimension de profit mat riel et conomique n est pas toujours l uvre dans les relations sociales mais qu au contraire une thique du don et du contre don est tr s pr gnante Cette thique m le la fois sentiment de libert et sentiment d obligation Ainsi nous compr
301. olution publique pas plus que de se donner le moyen de proposer une image valorisante de 21 SOI Je consid re donc que d une part 1 approche biographique postule la pertinence sociologique de la singularit et que d autre part si l autobiographie exprime le moi intime le r cit de vie propose un moi social cons quence m thodologique si Monsieur Martin a pris le temps de se situer au sein des th mes que le lui proposais c est moi qui les choisissais parce que je les trouvais a priori 1 Howard S Becker Biographie et mosa que scientifique Actes de la recherche en science sociales n 62 63 juin 1986 respectivement p 106 et 107 deux fois pour les trois citations 18 Daniel Bertaux Fonctions diverses des r cits de vie dans le processus de recherche Soci t s n 18 1988 p 22 1 Jean Peneff Le mythe dans l histoire de vie Soci t s n 18 1988 p 14 2 Jean Peneff La m thode biographique Collection U Sociologie Armand Colin 1990 p 86 l Jean Peneff op cit p 10 2 M F Chanfrault Duchet Le syst me interactionnel du r cit de vie Soci t s n 18 1988 p 26 95 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 pertinents Ainsi au long des entretiens lui ai je plusieurs fois demand ce que ses amis parapl giques pensaient selon lui du point que nous venions d aborder Ce n est donc pas le seul moi intime de Monsieur Martin qui
302. on ne le voit m me pas Il faut plusieurs mois avant de se revoir en entier Et je pense que ce serait important dans l image de soi tout de suite de se voir poil sur le fauteuil en entier de voir quoi on ressemble Et l je me dit qu un travail sur la vid o ce serait important Je vois par exemple ici quand j ai commenc travailler ici il y a un ergonome qui est venu qui a film peut tre pour mettre en vidence de mauvaises postures donc au t l phone etc etc L je trouvais a tr s tr s riche et tr s int ressant Ca va je n ai pas besoin de me voir en entier la question elle est r gl e Mais du coup en tout cas je me suis vu fonctionner et du coup simplement de me voir en milieu fonctionner naturellement il y a des trucs que j ai chang s comme a simplement parce que je l ai vu Et je me dis pourquoi en kin c est pas pareil Pourquoi en r duc au d part c est pas pareil Alors comme a on parlait avec Patricia elle me dit mais a a va trop faire flipper des mecs Alors peut tre que pour certains a ne convient pas mais peut tre que pour d autres a pourrait convenir Ne serait ce que de se voir faire un transfert par exemple du coup on pourrait am liorer sa technique et puis en m me temps a commencerait nous approcher sur une image de soi ce qui pourrait peut tre amener sur un travail avec un psy Je trouve dommage qu il n y ait pas ce travail sur
303. on pass Monsieur Martin met l accent sur les difficult s qu il a rencontr es Elles ne sont pas minces Mais simultan ment sa d ficience acquise l ge adulte a t pour lui l occasion de mesurer les extraordinaires surprenantes et non a priori pr visibles capacit s d adaptation dont il dispose R Je crois qu on a un potentiel en tant qu humain l adaptation des situations qui est ph nom nale Sauf que tant qu on n est pas confront des situations on ne s en rend pas compte on sait pas Je pense que c est un peu a qui doit troubler les gens les valides qui nous regardent Moi combien de fois j ai entendu moi votre place je me serai d j mis une balle dans la t te Ca c est un classique de chez classique Moi je r ponds aux gens mais rassurez vous j y ai pens Plus ou moins au d but on y pense Tout le monde y pense on sait que c est une alternative Et je dis aux gens non vous ne le ferez pas vous ferez comme tout le monde vous allez vous adapter et vous allez tre tr s tr s surpris de voir comment on s adapte cette nouvelle vie cette r alit l Q Alors comment on s adapte R Je pense qu on s adapte naturellement Il n y a pas d efforts faire Je ne sais pas comment dire franchement comment on s adapte Je pense que a doit tre d autant plus facile de s adapter en tant autonome en tant globalement autonome comme je le suis en tant que para comme le sont
304. on sens de la sensibilit S il y a vraiment qu un point qui doit rester qui est inadmissible qui est inacceptable dans une vie de parapl gique c est bien celui ci Donc je le mets avant l rection avant l jaculation et tout a C est en partie en lien pour l aspect sexe mais a c est quelque chose qui reste et qui a mon sens restera quelque chose de oui d intol rable d inacceptable Q On ne s y fait pas 161 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 R On ne s y fait pas Alors on s y fait parce qu il faut vivre mais dans la t te ou m me le fait d en parler comme a c est quand m me le point qui ressort Ce n est pas une obsession au quotidien bien s r que non mais je pense que s il y avait un point C est celui ci c est vraiment celui ci Et puis peut tre en deuxi me l aspect purement sexe a veut dire aussi l rection Par exemple on n a pas de enfin en ce qui me concerne on n a pas d rection psychog ne On a une rection mais qui est r flexe qu on provoque par le toucher principalement Et donc il n y a pas cette rection psychog ne Donc par exemple je ne sais pas au d but par exemple en fauteuil les premi res ann es d tre avec d autres jeunes etc c est vrai que le cul ce moment l c est important T as pas vu comme elle est bonne etc etc Elle est bandante a fait bander Oui mais pas moi je veux dire o
305. onc je pense que la r alit c est les deux C est effectivement ces deux choses l Q Le temps du handicap est ce qu il est particulier Est ce que il se diff rencie du notre R Le temps du handicap Quand vous dites le temps du handicap c est le temps consacr aux choses du handicap impos par les choses du handicap Q Et puis aussi ce qu il vous oblige faire que les valides ne peuvent pas conna tre pr voir R Le fait de pr voir effectivement c est dire d avoir une organisation au quotidien de savoir qu il faut une heure pour tre pr t Alors qu en temps normal il faudrait un quart d heure Ca d abord on ne le calcule pas Oui on ne le calcule pas Je ne me dis pas putain j en ai pour une heure alors que je serais debout j en aurais pour un quart d heure et puis m me heureusement Je me rappelle une fois un copain en fauteuil On tait ensemble en formation Il va pisser il va aux toilettes et puis il m a racont a apr s Il va donc aux toilettes pour pisser et en m me temps que lui quelqu un rentre dans les toilettes c t quelqu un de valide C tait un homme qui a urin enfin il a mis trente seconde pour pisser le mec Par contre le copain lui il a mis plus de temps parce qu il faut la percussion en plus donc comme moi Et du coup apr s on a voqu a dix minutes apr s Et il me dit quelle humiliation Vraiment ce moment l a lui renvoyait quelque chose
306. onflits Le risque est de vivre dans un tat d insatisfaction permanent de refuser le besoin d aide et d instaurer une relation charg e de ranc ur de ressentiment et d agressivit avec l autre parce qu il nous renvoie la marque de notre incompl tude L autre devient surtout celui par qui il est possible de faire actualiser sa propre volont dans le monde Par l m me sa pr sence devient indispensable surtout pour les actes vitaux C est pr cis ment par la r it ration de ce nouveau rapport autrui au quotidien qu merge petit petit dans la conscience du patient une certaine compr hension de sa d pendance Tant que le patient reste alit ses possibilit s gestuelles sont extr mement limit es Le panel d activit s qu il peut effectuer sans aide humaine est r duit bien peu d options regarder la t l vision couter de la musique discuter au t l phone lire quelques revues L organisation rationnelle du travail des soignants pr voit que le patient doit tre aid pour les actes vitaux et pour quelques actes quotidiens comme s habiller et se laver Par contre en ce qui concerne la majeure partie de son temps le patient est contraint l inactivit au fond de son lit Sa possibilit d action dans le monde devient alors circonscrite aux seuls passages dans sa chambre d une aide soignante mais cette derni re doit vaquer d autres activit s qui ont la priorit sur son ennui
307. ons sociales du handicap avait permis entre autre chose de montrer que la notion de souffrance tait la cl de sa perception qu il s agisse du grand public ou m me des professionnels Le Qu au 2003 Cette souffrance tait tr s quivoque puisqu elle pouvait aussi bien tre celle suppos e du handicap qui manifestement ne peut pas ne pas souffrir que celle de du corps social quand rencontre le handicap Cette id e que la d ficience est une souffrance prend sa source c est l hypoth se que nous formulons dans la stup faction initiale 24 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 que traversent plus ou moins durablement les parents puis l embarras qui est la r action sociale type son endroit Et c est dans la r solution de cette h sitation non signifiante que la d ficience de transforme en handicap puisque cette notion implique une r paration double sens en cela tient sa fonction sociale globale 4 LA MODALISATION DU HANDICAP Sortir de la stupeur consiste donc r aliser une op ration de cadrage qui suppose d accepter de donner du sens un v nement partir des significations sociales disponibles La compr hension aussi bien individuelle que collective pour ne pas parler d acceptation encore une fois est ce prix Ce processus de cadrage second lorsqu un cadre primaire a t boulevers par un v nement inattendu cette r paration autrem
308. ont paras depuis dix ans depuis quinze ans Ca c est tr s important On appelle a la pair mulation maintenant C est surtout un copain qui essaie de d velopper ce concept et c est important Parce que peut tre qu un pair mulateur comme a exp riment peut tre que pendant cette p riode de r duc cette phase o on est autonome mais toujours dans une structure peut tre qu avec quelqu un comme a peut tre Effectivement moi quand je rencontrais des plus anciens qui revenaient pour un exam ou un truc c est vrai que c tait tr s curieux de les rencontrer de parler un peu avec Parce que les toubibs ils ont l exp rience on sait qu ils ont l exp rience etc mais il n y a pas un v cu c est de la th orie quoi Et puis il y a toujours le sentiment c est dire de toutes fa ons il ne comprend pas ce que j ai etc etc Par contre avec un autre un semblable il comprend donc forcement il sait il a v cu il a travers etc Donc euh effectivement moi j changeais plus facilement avec les anciens qu avec des tous frais comme moi M me je crois que pour certains le fait de savoir que j avais un p re parapl gique pour certains a faisait de moi un ancien Ca veut dire que a faisait de moi quelqu un qui avait un plus par rapport eux qui avait d j une exp rience dans le truc dans l histoire Cette exp rience v cue qualifie les personnes pour qu elles se revendiquent l gitimement comme des experts
309. ontrario a la langue tr s bien pendue malgr quelques difficult s de diction Elle ne souffre d aucun trouble intellectuel au point qu est envisag e autant par ses parents que par les professionnels son orientation vers le milieu scolaire normal m me si elle a quelque mal marcher Qu Aline pr sente quant elle des troubles du langage de la compr hension et de la vue nonobstant des difficult s motrices Elle porte de plus certains des signes physiques de ses affections Prise en charge dans un IME depuis 3 ans son volution para t peu perceptible ses parents Que Max enfin est pratiquement aphasique et sa d marche incertaine d voile tr s videmment ses probl mes moteurs 18 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 1 chantillon des entretiens Enfant Age D ficience CSP Parents Membre d une association Aline 8 ans IMC Employ e Non Aude 8 ans IMC Enseignant artiste Oui Carole 12 ans IMC Cadre m decin Oui Christelle 6 ans IMC Ouvrier femme au foyer Non Jean 7 ans Trisomie Cadre femme au foyer Oui Jeanne 10 ans Maladie chronique Artisan employ e Non Jeanne 9 ans Trisomie Cadre employ e Non Jonathan 14 ans Autisme Artisans Non Marc 12 ans Motricit Infirmier employ e Oui Marion 13 ans Cardiopathie h mipl gie Infirmier pu ricultrice Oui Max 12 ans IMC Ouvrier employ e Non Na ma 10 ans
310. orps cesse d tre douloureux Mais de m me qu il fait face la douleur et aux avanies d un corps meurtri le passage de l tat allong l tat assis sur le fauteuil les troubles urinaires il rencontre une nouvelle situation vis vis de sa famille et de ses proches Q Vous pouvez m en dire un peu plus sur cette phrase c est plus difficile pour les autres que pour soi R Je ne sais pas pour les autres personnes bien s r Pour moi a a t toujours tr s difficile de penser d imaginer la peine de mes proches par rapport mon accident et par rapport ma situation Ca c est quelque choses de de de de difficile encore aujourd hui d ailleurs m me si a fait maintenant plus de vingt ans Moi je me faisais plus de souci d une certaine fa on hein moi je pense que je me faisais plus de souci au d but o j tais en fauteuil pour ma famille mes parents mes fr res mes s urs que finalement pour mon avenir quoi Parce que a me faisait chier de voir qu eux souffraient de cette situation Tu sais quand ils venaient me voir l h pital par exemple ils faisaient mes oncles mes tantes enfin bon ils faisaient des efforts surhumains par exemple pour pas pleurer devant moi par exemple a je le sais je l ai su par la suite Donc le fait d imaginer de se retrouver dans le parking pour prendre leur voiture pour repartir et ce moment l ils devaient se laisser aller enfin Ca a m a toujours fait beaucoup
311. ors ce moment l par le biais d un travail sur l image J insiste un peu l dessus sur la vid o par exemple Je pense que ce serait important Q Expliquez moi R On a un accident on se retrouve en fauteuil On faisait un m tre soixante quinze on ne fait plus qu un m tre trente ou je ne sais pas combien Autant dire que de se voir sur pied devant une glace en fauteuil on ne peut plus D abord pour arriver au lavabo il faut faire comme a Et puis avant de se voir en entier c est quand m me difficile Je pense au centre de r duc ou j tais Je ne sais pas quel niveau c est r v lateur mais dans le hall un immense miroir mais coup Un miroir mais pas jusqu en bas Sachant quand m me que dans cet tablissement il y a deux personnes sur trois qui se d placent en fauteuil roulant On voit bien que le miroir il n a pas t mis pour eux J e trouve que c est pas sain Ils ont modifi le hall II faudra que j aille v rifier l occasion Ils ont chang le miroir mais ce n est encore pas a Le miroir il est un peu plus bas mais il n est pas tr s tr s bas c est dire que si on veut se voir en entier il faut reculer vraiment parce que c est un grand hall Donc il faut vraiment reculer pour avoir une image de soi pour se voir en tout cas en entier Pendant plusieurs mois on ne se voit pas en entier D j j allais dire on perd on a l impression de perdre une partie de son corps en plus
312. ortance d une ma trise des impressions pour une stabilit du self dans les interactions Or le patient qui jusqu alors se voyait investi et adh rait cet investissement d un self sp cifique se trouve dans l impossibilit de mobiliser de nombreuses ressources qui permettraient sa p rennit Par exemple une bonne part de l id e que nous souhaitons donner de nous m me est restitu e dans le port de certains v tements or ceux ci sont pr cis ment mis l cart de mani re temporaire ou non pour des raisons de facilit s de manutention d alitement prolong de risques d escarres etc De m me la coupe de cheveux est rarement rafra chie avant les premi res sorties le rasage d pend bien souvent de la technicit d un tiers l pilation et le maquillage de sa bonne volont De surcro t certains soignants ont tendance faire intervenir leurs propres crit res de jugement esth tique Tout cela fait que les normes du traitement de l apparence du patient sont fonction de la charge de travail de ces m mes soignants et des priorit s qu ils ont tablies du r le propre de chaque profession qui se sent par l m me impliqu e ou non etc De plus tous les apparats usuellement mobilis s pour une pr sentation de soi li s la propri t d un certain mobilier de certains objets et accessoires de telle ou telle voiture tous ces supports mat riels v hiculant des significations quant notre perso
313. orte d interm diaire lissage mais non r criture longues citation des mat riaux liss s commentaires de ma part entre les s quences Cons quence de mon option la longueur de ma contribution Deux lectures de ce texte sont possibles La premi re pour un lecteur press peut se satisfaire des seuls paragraphes de pr sentation et de commentaires que j ai intercal s dans ma contribution La seconde la plus riche consiste prendre le temps de lire les extraits d entretien qui constituent une mati re extr mement fournie sur l exp rience v cue par les bless s m dullaires et au del d eux propos de l exp rience v cue par les personnes handicap es bien qu elles les personnes et les d ficiences ne soient pas identiques Pour faciliter la lecture les extraits d entretien de Monsieur Martin et mes commentaires sont distingu s par l usage de deux polices de caract res Les phrases ou bribes de phrases de Monsieur Martin que j ai soulign es me semblent particuli rement vocatrices de sa situation c est ma fa on d illustrer typographiquement l id e d clairs sur un fond narratif 29 5 r zo x pprap D Simeoni Du r cit de vie comme mise en sc ne du discours Soci t s p 32 99 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 za 30 R 7 obscur que l on trouve dans les r cits de vie Monsieur Martin a eu de tr s riches vocateurs et s
314. ote c est plus que quand on pivote sur les pieds Donc je sais pas je sens les gens qui sont autour de moi donc j adapte ce que je fais en fonction de ce qu il y a autour Et puis quand je regarde l je vois ailleurs aussi Alors des fois j ai l impression que non quand on est debout eh bien du coup on voit l comme a Q Vous avez remarqu qu on ne vous voit pas R C est pas qu on ne me voit pas C est pas le probl me par rapport moi C est que les gens ne voient pas ce qu il y a autour d eux Alors il y a des fois je vois des gens qui font une man uvre avec leur caddie par exemple Mais je m en fous que le caddie vienne me taper l la limite moi je m en fous Mais a peut tre un petit de quatre ans qui peut se le prendre dans la t te Et je l ai d j vu a Et il y a un minimum quand on est dans un lieu public type supermarch C est vrai que des caddies on n en voit pas dans la rue Mais c est pas que les gens ne me voient pas c est que les gens ne voient pas ce qu il y a autour d eux C est a surtout Maintenant franchement moi je trouve a tr s tr s dommage pour eux Oui alors l exemple de la foule Alors il y a la foule on avance Il y a des fois il se peut qu avec les pieds des fois on tape sur les tibias Rarement avec les cale pieds souvent avec la chaussure Ca fait pas mal je veux dire Bon les gens peuvent avoir mal effectivement c est pas la question Mais ce qui se passe ce moment l Quand o
315. otidien Apr s je sais pas si c est int gr assimil Je sais pas comment a se passe mais bon a fait partie de l histoire Nous on dit que c est les options de la parapl gie nous on a pris toutes options Ca veut dire toutes les gal res Q C est facile d introduire une distance vis vis de ces gal res R Oui enfin oui et non Je repense un exemple Par exemple un jour on tait un groupe de trois quatre il y avait une nana qui tait en fauteuil qui ne savait pas trop ce qu elle avait a priori elle devait avoir une scl rose en plaques c tait une prof d universit Elle s appelait Michelle tr s sympathique un peu plus g e que nous Et je me rappelle un soir on avait tra n dans le foyer dans le centre et puis un moment elle avait envie de pisser elle avait des probl mes sphinct riens on en n avait tous d ailleurs mais bon une nana c est quand m me plus difficile parce qu il y a moins de protection c est autre chose Et puis du coup elle s est piss e dessus et puis s rieusement piss e dessus et je me souviens elle avait une salopette en jean et au niveau du dos elle tait tremp e Et c est s r que a peut tre une situation vachement humiliante vachement honte en plus c tait une fille et on tait tous morts de rire y compris elle Pourquoi on tait morts de rire Parce que peut tre a nous faisait chier a nous mettait tendus mais 142 L exp r
316. otidien c est vrai que par exemple le matin il me faut plus de temps pour me pr parer Forc ment on cale sa vie un petit peu en fonction de a c est dire que quelqu un d ordinaire a d pend des habitudes de chacun mais disons une personne qui se doucherait le matin se lever prendre le petit d jeuner la douche on va dire un quart d heure par exemple moi pratiquement il faut doubler ce temps l Donc du coup la variation de la vie se cale en fonction Ce matin par exemple on avait rendez vous ici dix heures Je me suis lev huit heures huit heures et quart pour aller aux toilettes faire la douche etc Tout a a prend un peu plus de temps J aurais t debout je me serais lev neuf heures et quart je pense J aurais gagn une petite heure quand m me Alors a c est quelque chose qui est int gr avec le temps Mais on sait qu il faut un peu plus de temps pour s habiller Il faut un peu plus de temps pour tout faire finalement Mais en m me temps je pense que je ne sais pas je crois qu on l avait un peu voqu l autre jour d ailleurs je me demande dans quelle mesure ce n est pas quelque chose de positif enfin positif c est pas forc ment quelque chose de n gatif ou de positif c est quelque chose de neutre finalement J e pense aussi avec l ge en avan ant en ge forc ment on met un peu plus de temps pour se baisser et mettre ses chaussettes Donc avec le temps on va avoir un rythme de
317. oubles de la personnalit De plus il ne peut dissimuler aux soignants quelles sont les causes de son traumatisme corporel actuel et gu re plus les circonstances de l accident Or ces aspects peuvent se r v ler tr s g nants quand il s agit des suites Erving Goffman 1973 La mise en sc ne de la vie quotidienne deux tomes Paris ed de Minuit LE Erving Goffman 1968 Asiles Etudes sur la condition sociale des malades mentaux Paris ed de Minuit 50 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 d un r glement de compte par balle ou encore lorsque l accident a t directement provoqu par une conduite incons quente en tat d ivresse Mieux encore le patient a perdu toute possibilit de ma triser la circulation des informations le concernant entre ses diff rents groupes de fr quentation Ainsi par exemple ses parents peuvent rencontrer au cours d une visite une relation qu il leur avait toujours cach ou encore sa disponibilit en tant que patient lui interdit d sormais de fixer des rendez vous cloisonnant les diverses sph res de relations qu il entretient De plus comme il partage sa chambre avec un compagnon et que l isolation phonique de la chambre n est pas d une grande qualit il ne peut gu re emp cher que ses conversations t l phoniques ne soient entendues par des personnes trang res et qu ainsi une partie de sa vie ou de ses soucis ne soient mis s
318. ouvent pour pr venir l ventuelle casse que pourrait ventuellement provoquer sa maladresse lorsqu ils visitent des connaissances en particulier Pour des raisons diff rentes les parents de Jonathan et de Sylvain disent tout autant adopter la m me tactique Quand on s adresse son fils on en a fait l exp rience la m re de Jonathan intervient tout de suite avec ce ton direct auquel on a d j fait allusion pour expliquer qu il ne peut pas comprendre ou bien qu il ne r pondra pas Le p re d Aude raconte un pisode du m me ordre qui semble l avoir profond ment choqu et qui a t d terminant selon lui de sa prise de conscience du handicap En visite chez ses beaux parents ceux ci recevaient d autres amis Au moment de pr senter sa petite fille ses h tes celle ci venant de finir sa sieste le ma tre des lieux a pris la peine de les avertir du fait qu elle avait un probl me qu elle ne pouvait pas marcher et qu elle ne parlait pas encore Le p re de Aude avoue qu il se serait bien pass de cette introduction d autant plus que selon lui ses difficult s n taient pas encore perceptibles en raison de son tr s jeune ge ils pouvaient tr s bien ne s apercevoir de rien Les entretiens n ont pas t conduits par celui qui a effectu les observations et les rep rages au d part de l enqu te 30 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octo
319. p Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 c est que effectivement eux d marrant dans leur histoire de para me c toyant me voyant d une certaine fa on Ca ils me l ont clairement dit quand ils m ont vu en tout cas quand ils ont commenc me conna tre un petit peu ils avaient envie de ressembler au parapl gique que j tais dans l autonomie Mais bon a c est quelque chose qui s apprend donc a c est une technique plus ou moins c est des techniques disons Mais aussi dans je ne sais pas l approche du handicap S r nit c est peut tre beaucoup dire mais d approche comme a positive ou je ne sais pas quoi par rapport au handicap Voil pour un peu les amis les proches handicap s Pour ce qui est des valides bon il y a peut tre des diff rents degr s d amis sur le nombre d ann es qu on c toie C est vrai que dans un premier temps ce qui peut revenir c est effectivement c est la notion de courage et l c est le truc un peu classique Puis progressivement avec le temps les gens ils se rendent compte qu on n est pas plus courageux que les autres Q Au hasard des conversations par exemple ou des changes en faisant des choses avec les gens les amis parfois ils envoient des informations pour dire tiens je pense a de toi ou ils le disent Ils font quel portrait de vous R En g n ral ils sont plut t positifs surtout les amis enfin quoique Ils font un portrait de quelqu un de dynam
320. para t donc particuli rement difficile expliquant probablement le retrait dans l inactivit que font certains par choix d couragement ou devant les difficult s rencontr es Cet ensemble d obstacles contribue l mergence du sentiment de limitation dans le travail de la personne Les personnes se sentant limit es sont celles qui ont les conditions les plus difficiles et ou rencontrent le plus d obstacles 83 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 LES PRINCIPAUX FACTEURS EXPLICATIFS DU SENTIMENT DE LIMITATION DANS LA VIE PROFESSIONNELLE Au terme de ces diff rentes analyses de nombreux facteurs semblent contribuer l mergence d un sentiment de limitation dans la vie professionnelle que ce soit au niveau du profil sociologique ge sexe CSP que de la situation vis vis de l emploi en activit conditions de travail cessation ou recherche d emploi difficult s retrouver un emploi ou en changer etc Il appara t donc n cessaire d une part d isoler la contribution de chaque facteur au sentiment de limitation certains facteurs tant en effet corr l comme la CSP et les conditions de travail par exemple et d autre part de classer l importance de ces diff rents facteurs Pour ce faire une m thode d analyse statistique classique a t utilis e la r gression logistique qui permet de raisonner toutes choses gales par ailleurs c est dire d
321. parce qu il y a beaucoup de chaises beaucoup de tables etc donc il y a plein de difficult s et c est dur C est dur on voit une belle fille on aimerait bien parler avec elle Donc c est un peu difficile a La hauteur il y a toujours le probl me de la hauteur bon aussi le probl me du contact physique ne serait ce que se fr ler les paules enfin on voit bien peu pr s les strat gies tout a c est termin Alors je ne sais pas est ce que naturellement on d veloppe quelque chose autre chose Je ne sais pas je ne sais pas Dans un autre moment des entretiens Monsieur Martin est revenu sur cette rupture sentimentale Q Est ce que je me trompe mais apparemment je n ai pas entendu que cette personne tait venue vous voir en r ducation R La fianc e Si elle est venue mais dans le premier centre mais l on parlait de famille C est simple on peut en parler on peut en parler bien s r sans aucun probl me Elle s appelait Marianne Elle est venue me voir plusieurs fois Ce qui tait difficile pour elle parce qu elle tait quand m me jeune on avait trois ans d cart donc elle avait seize ans et demi quand m me Je me souviens elle tait l cole pas l cole h teli re l cole pour faire les bijoux je sais plus o Et donc elle tait interne et elle rentrait chez ses parents elle reprenait le train pour venir me voir elle repartait chez ses parents le samedi soir Ca lui faisait quand m m
322. pectivement mais a continue Mais je pense que a restera un myst re probablement En tout cas de mon histoire de mon parcours j ai v cu avec trois femmes J ai v cu relativement longtemps avec ma derni re compagne on est quand m me rest s sept ans ensemble Les deux autres avant a a t beaucoup plus bref Ca a t une ann e et deux ann es Alors bon les ruptures il y a eu rupture forc ment mais l je suis par contre intimement convaincu que la rupture n est en aucun cas li e au handicap Ca c est certain En tout cas elle n est pas li e avec le sexe Ca j en suis intimement convaincu C est les choses de la vie C est les gens un moment qui se s parent Je vais peut tre redire un tout petit peu mais simplement effectivement autant les femmes de ma vie me semble t il n ont jamais eu de difficult s par contre moi j ai toujours eu de temps en temps des petites difficult s des choses mal v cues L je parle principalement de l acte parce que dans le quotidien Ben le quotidien c est le quotidien hein Au niveau des uvres de la maison il y avait une esp ce de r partition naturelle des t ches L dessus je crois qu il n y pas grand chose dire En ce qui me concerne je suis autonome Je serais t trapl gique ce serait s rement diff rent la relation avec la compagne serait probablement diff rente Mais l dans mon cas sur le quotidien pas grand chose dire J tais
323. per us par la personne elle m me et de la vision qu a le monde professionnel des travailleurs handicap s Ce qui va amener une personne ayant un probl me de sant se sentir limit e dans son travail va donc d pendre la fois de ses caract ristiques propres qui d terminent notamment ses attentes vis vis du monde professionnel et de ce que cet univers va lui proposer L utilisation de mod les logit permettra au final de hi rarchiser ces facteurs Quelles sont les personnes qui se sentent le plus souvent limit es dans leur travail Quel param tre explique le mieux l mergence de ce sentiment l ge le sexe le type de d ficiences le fait de travailler ou non les horaires de travail ou encore les am nagements dans le travail au probl me de sant 55 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 LES POPULATIONS ETUDIEES Cinq populations seront compar es pour mener bien cet objectif Les 15 64 ans se d composent en deux populations Les valides qui ont r pondu non la question avez vous un probl me de sant ou un handicap depuis six mois ou plus soit 29 millions de personnes 76 des 15 64 ans Les malades qui ont r pondu oui cette m me question soit 9 millions de personnes 24 des 15 64 ans Parmi les malades on distingue quatre populations dont trois ont d clar un sentiment de limitation ou ua A 3 d incapacit s dans la v
324. plus Comment dire On se pose peut tre trop de questions et du coup on se pose plus de probl me que finalement on en a surtout au d part c est dire que c est effectivement avec le temps avec les rencontres avec l exp rience on se rend compte que c est diff rent Les choses sont diff rentes mais n anmoins il y a du plaisir Alors qu au d part forc ment on n est pas rassur l dessus donc on complique les trucs On passe s rement cot de relations Je pense tre pass c t de contacts parce que j avais peur de a parce que j avais peur que a foire o je ne sais pas Par contre les rencontres que j ai pu faire o il y a eu j allais dire une histoire d amour tout a toutes ces questions disparaissent parce que les choses deviennent tr s simples Et c est vrai que les femmes elles sont Comment dire Elles sont dou es elles sont d licates en tout cas celles que j ai rencontr es Elles ont une esp ce de feeling ou alors elles ont une fa on d aborder les choses fa on de d couvrir les choses qui doit tre rassurante je sais pas et du coup a passe a passe tr s bien quoi Et puis on se rend compte que nous les mecs on pense qu effectivement les relations avec les femmes c est avant tout le sexe c est avant tout la virilit etc etc Et finalement je sais pas si les femmes c est ce qu elles cherchent forc ment chez les hommes enfin en tout cas dans mon parcours Moi j ai plut t rencontr de
325. pratiques et perceptions de l intimit Comme le dit Goffman les territoires du moi sont mis mal et recompos s R C est quoi l intimit d une personne handicap e Y a plusieurs choses mais comment dire R f rence par exemple un cas que j ai v cu mais que tout le monde finalement a v cu comme a c est dire que alit plat dos bon g n ralement poil enfin nu La visite du toubib la grande visite de semaine les infirmi res tout le personnel les stagiaires etc Q Combien de personnes R Oh dans certains cas huit personnes neuf personnes des fois en comit plus restreint mais des fois quand y avait les stagiaires par exemple ils arrivent on tire le drap et nous on est l allong s poil Alors pour quelqu un qui est hyper pudique ou qui est coinc ou je sais pas a doit tre terrible Moi finalement je pense que j tais assez pudique avant mais je veux dire a d coince tout de suite ce genre de situations a met l aise tout de suite Alors peut tre que j avais pas de pudeur je sais pas comment dire d ailleurs En m me temps alors peut tre je suis bien na f en fait mais en fait a m a certainement beaucoup aid tout a En m me temps a fait partie un peu du truc Je veux dire le fait que tout le monde me voit poil a fait partie de l h pital Moi j ai jamais calcul a m a jamais pos de probl me L o c est plus d licat et l aussi a finit
326. qu effectivement le commun des mortels ne va pas capter par exemple une petite zone de graviers qui reste praticable mais qui devient tr s inconfortable Alors d j que quand on est en r duc c est laborieux de r apprendre d apprendre l autonomie De r apprendre oui de r apprendre l autonomie c est laborieux d abord il y a des douleurs Mais quand on apprend s habiller c est tout con mais mettre ses chaussettes par exemple quand on est rest trois mois alit plat dos avant de pouvoir remettre ses chaussettes en se pliant en deux il y a du boulot Et puis il y a beaucoup de douleurs surtout Et l on se dit putain j y arriverais jamais j y arriverais jamais Donc tout devient laborieux tout devient tr s difficile Se faire un transfert sur les toilettes les premiers temps c est difficile Ca demande beaucoup d efforts C est casse queule Donc du coup on se sent vachement pr caire On se sent fragile enfin je dis on mais non je devrais dire je On se sent effectivement fragile donc tout devient laborieux d j en milieu prot g ce qu est l h pital de r duc Et d s qu on met un pied dehors l il y a l hostilit du milieu ambiant Effectivement on a l impression que c est plus tout fait la m me plan te C est plus tout fait la m me plan te d ailleurs Mais effectivement a devient une esp ce de milieu hostile en quelque sorte D j que c est laborieux de s habiller Mais
327. qu il fait peur tout le monde ce terme y compris ben peut tre vous sociologues ou d autres puisqu on parle de personnes handicap es de personnes en situation du handicap Q Est ce que c tait centr sur le handicap ou au contraire a pouvait d border R Forc ment sur le handicap videmment et bien videmment a d bordait sur d autres choses de la vie quotidienne Maintenant est ce que c tait le handicap qui tait le plus pr sent Moi je pense que a d pend avant tout des gens entre eux Q Par exemple est ce que vous faisiez des projections sur ce que j aimerais faire et pourquoi R Oui Je pense que chacun essayait d imaginer ce que pouvait tre sa vie ce qu il voulait faire de sa vie Je sais qu il y en a qui taient tudiants Ils taient dans une dynamique je pense peut tre au m me titre que n importe quel tudiant Je pense un qui faisait Histoire il faisait des cours d Histoire il aimait beaucoup l Histoire Il voulait faire prof d Histoire Je ne sais pas ce qu il est devenu maintenant parce que j ai perdu le contact Mais je sais qu il se voyait d j lui enseignant Et je me souviens que quelqu un lui avait dit mais tu sais les coles sont peut tre pas toutes accessibles en fauteuil C est vrai qu il y a vingt ans c tait peut tre pas non plus comme maintenant au niveau accessibilit En plus on n avait pas les informations qu on peut avoir maintenant sur les lois sur le
328. qu on d plorait les difficult s qu on pouvait rencontrer chacun son niveau en fonction des s quelles de sa parapl gie J ai pas tellement l impression J ai pas tellement l impression que a c tait un truc qui vraiment c tait une pr occupation comme a tr s tr s importante Est ce que c tait parce qu on tait jeunes et un peu r serv s J e sais pas je me rends pas trop compte Selon Monsieur Martin il y a deux temps dans la r ducation le premier fait suite la survenue de l atteinte les personnes concern es concentrent leurs efforts pour recouvrer une certaine autonomie corporelle et s appuient sur l exp rience des anciens parapl giques le second laisse plus de temps 146 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 pour penser aux projections dans l avenir qu elles concernent la profession l ventualit d une famille 147 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 3 3 L IMAGE DE SOI Devenir parapl gique impose une red finition de sa propre image par t tonnements elle se construit entre la perp tuation l gitime d une identit ant rieure et le positionnement difficile vis vis du monde ext rieur qui dispose de cat gorie analytiques lui permettant d approcher les d ficients Q Quelle image avez vous de vous R Quelle image j ai de moi Difficile Difficile de r pondre Alors a me fait penser tout de s
329. que l atteinte au corps est une atteinte l tre 2 5 LES SOUTIENS Dans son itin raire Monsieur Martin a rencontr deux types de soutiens les pairs et les professionnels Si ceux l constituent un point d appui pour lui m me et ses amis parapl giques ceux ci ne b n ficient pas d un jugement autant favorable v 2 5 1 Les pairs L exp rience de la parapl gie est co teuse on s en doute Dans les centres sp cialis s les personnes accueillies rencontrent d autres mondes la maladie inconnue des personnes provenant d autres horizons que le leur des r alit s corporelles nouvelles et contraignantes des inscriptions diff renci es dans le temps R Quand on vit quelque chose comme a de dur qui est un handicap et qu on est en phase o vraiment on en chie parce qu on souffre physiquement parce qu on a conscience qu on ne marchera plus on n est tous dans la m me gal re Et mon avis quel que soit le milieu duquel on vienne quel que soit le niveau d tudes quel que soit le parcours on est tous sur la ligne de d part en fait A part certains qui se la jouent enfin bon a c est la diversit humaine Mais c est a c est vachement riche parce que on est tous dans la m me gal re Et du coup on devient on se retrouve tous des gens tr s simples Je sais pas comment dire des gens tr s simples c est dire avec pas vraiment de complexes avec pas de probl me de se voir nus de la gueule
330. que vous tes le m me homme c est dire que bien s r il y a un avant il y un apr s mais il me semble qu il y a une certaine continuit R Alors je vais en partie vous rejoindre parce que je commence enfin je commence Il me semble qu effectivement je commence avoir un peu ce n est pas quelque chose qui m obs de la question elle n est pas l mais effectivement je commence avoir un peu plus des l ments de r ponse Ce n est pas des l ments de r ponse Est ce que c est effectivement peut tre la maturit Est ce que c est la quarantaine je ne sais pas En tout cas je me souviens au d but quand j avais vingt et un ans enfin deux trois ann es apr s mon accident J avais tendance dire que quand je regardais avant quand je regardais le Louis d avant l accident je ne me retrouvais pas C est dire qu il n y avait personne quand je faisais appel aux souvenirs un petit peu qui taient pourtant frais quand m me les souvenirs de ma vie ant rieure surtout de mes r flexions d avant de mon fonctionnement avec les autres etc J avais du mal me retrouver c est dire avoir m me des souvenirs comme si naturellement il y avait une tendance occulter mettre de c t sa vie d avant et peut tre par cons quent l individu d avant le Louis d avant Par contre depuis quelques ann es depuis quelques ann es je ne sais pas je retrouve plus facilement beaucoup plus facilement Ce n est v
331. questions des contractures Donc l activit un peu anarchique la moelle pini re en dessous de la l sion qui comme a retrouve une activit un peu autonome et anarchique d un point de vue lectrique Donc on a des contractures Ces jambes qui au d part sont toutes molles toutes flasques et servent carr ment rien dans certains cas en tout cas pour moi un moment elles se remettent bouger mais de fa on anarchique Ce qui est plut t tr s agr able d ailleurs ceci dit Quand on sent vibrer les jambes un petit peu comme a on se dit ah il y a un petit espoir m me si on sait on nous a expliqu ce que c est les contractures mais on se dit ah quand m me Bon c est douloureux Non c est pas du tout douloureux Ca peut tre agr able C est agr able Surtout qu alors videmment au d but a surprend a fait bizarre Et puis avec le temps on se conna t par c ur j allais dire C est dire qu on sait ce qui nous d clenche une contracture C est pas forc ment la jambe qui va partir comme a mais une petite vibration on sait par exemple ce que a veut dire on sait qu on a un point d appui quelque part qui peut tourner en escarre on sait qu on a la vessie qui commence se remplir Donc du coup on a plus la sensibilit plus le r apprentissage des questions sanitaires Enfin moi en ce qui me concerne j ai d couvert Comment dire On a un corps qui est particulier Enfin c est quand m me tr s biza
332. qui vais vous dire que C est quand m me pas vous de me dire que Donc a il m est arriv deux fois de m accrocher avec des m decins qui ne voulaient pas Qui ne m coutaient pas qui n coutaient pas ce que j avais leur dire Si par exemple j avais une jambe enfl e si j avais un mollet enfl ce n est pas parce que j avais fait de longues journ es en fauteuil c est parce qu il fait chaud par exemple c est que c est un enflement qui mon sens n est pas normal Je connais la qualit de ma peau J e sais quand a enfle parce qu il fait trop chaud ou parce que je suis rest trop longtemps en fauteuil Je sais comment c est quand c est enfl ce moment l les jambes un peu lourdes Ca c est classique Par contre l c est enfl mais ce n est pas enfl comme d habitude Quand le m decin insiste sur le fait que non non c est que vous tes parapl gique et chez les parapl giques c est normal Il faut lui dire calmement attendez a fait vingt ans que je suis parapl gique Je sais quand mes jambes enflent Ecoutez moi s il vous pla t II y en a qui ne d mordent pas Donc bon ceux l forc ment ils d gagent C tait le cas du premier m decin l Tant pis restez dans votre truc Si vous ne voulez pas voluer c est votre probl me moi je vais voir ailleurs Et puis alors bien s r que c est important de se prendre en charge au niveau m dical le fait de ne pas avoir d escarres de pisse
333. r UN NOUVEAU RAPPORT A LA VIE ET A LA MORT Si la plupart des patients acceptent au d part de bonne gr ce ce r le de patient il n en est pas moins vrai qu il est difficile pour chacun d eux de renoncer un r le d adulte responsable de ses choix de vie Or une des premi res cons quences tr s directes de l hospitalisation est pr cis ment de destituer le patient de sa possibilit de choisir entre la vie et la mort La situation corporelle qui suit imm diatement son accident est comprise comme n cessitant une action m dicale d urgence une hospitalisation rapide Le temps n est pas la r flexion l laboration consensuelle sur cette situation mais bien l action pour sauver une vie et cela m me si une tentative de suicide est l origine du traumatisme corporel Il n est pas rare qu un bless soit trach otomis d office ou tr s rapidement plong dans un coma artificiel pour r duire des cons quences l sionnelles au niveau de son cerveau par exemple et cela sans lui demander son avis Ainsi la logique sociale est elle de sauver la vie tout prix Un d sir de suicide ult rieur quant lui sera pris en charge par un psychiatre et bien souvent r solu avec un traitement m dicamenteux En effet le psychiatre ou l quipe soignante pourrait se voir jug responsable de non assistance personne en danger au cas o un patient se suicide et si la preuve de son action de soutien n a pa
334. r conduite d une fa on qu ils jugent ad quates la situation Les parents de Jonathan commencent galement au fur et mesure que s accro t leur compr hension de ce que peut supposer l autisme de 16 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 leur fils et qui en v rit reste bien incertain de donner du sens son comportement Mais l interaction avec l enfant n est pas seule en cause et c est leur position dans le monde qui peut aussi devenir moins vuln rable Autrement dit le cadrage par lequel advient le handicap pour co teux qu il soit aux yeux des parents n en est pas moins aussi une condition de possibilit de sa compr hension intersubjective et sociale Il en est alors de l op ration de cadrage comme de la compr hension en g n ral dans le sens que G Simmel par exemple donne cette notion elle est toujours tragique La forme travers laquelle elle se r alise le mot l id e est en effet et par essence inad quate pour saisir la vie telle qu elle est en ce sens elle proc de bien d une r duction Mais elle n en est pas moins le fondement ontologique de l tre ensemble ce qui rend l change et le partage possible Simmel 1988 Le langage auquel s est particuli rement int ress E Goffman illustre particuli rement bien cette trag die puisqu il est la fois condition de l entendement tout en n tan
335. r bien pour ne pas avoir de probl mes urinaires et ne pas avoir de probl mes r naux Donc a c est quand m me des fonctions vitales importantes Donc chose qu on n glige au d part Moi je me suis compl tement n glig pendant dix ans C tait vraiment du n importe quoi tant d un point de vue organique que d un point de vue Les positions je ne mettais pas de chaussures par exemple donc j ai les pieds qui se sont d form s etc Pourquoi a Parce qu l poque je voulais faire provoc donc je mettais deux chaussures de couleur diff rente Donc l a interpellait les gens pis a provoquait un peu pis c tait peut tre une part d originalit enfin l originalit Mais je pense qu il y avait je sais pas si c tait un refus de quoi que se soi une provocation Q Cette fa on de faire c est quelque chose qu on rencontre fr quemment chez les parapl giques R Pas tant que a pas tant que a Il y a beaucoup de paras par exemple qui appliquent bien les consignes de l h pital de r duc vraiment bien les consignes Ils ne se mettront pas en fauteuil s ils n ont pas de chaussures etc Chapeau pour ceux qui y arrivent quand ils le font et ils ont bien raison de le faire d ailleurs Non a fait pas tant que a les mecs sont plut t clean Peut tre que moi j ai pas tout compris de ce qu on m a expliqu au d part Peut tre qu en m me temps il y avait peut tre un cot un peu de toutes fa ons mainten
336. r exemple l tude de la d linquance les r cits de vie jouissent aujourd hui d une l gitimit qui n est plus contest e l acad mie s en est ressaisie puisque le IX Congres mondial de Sociologie Uppsala 1978 comptait un groupe traitant de l approche biographique Depuis le renouveau des ann es 70 la m thode a t utilis e par de nombreux chercheurs Pour s en rendre compte on peut se r f rer parmi d autres l article de Charlotte Heinritz et Angela 7 Alain Blanc Les handicap s au travail Analyse sociologique d un dispositif d insertion professionnelle 2 me dition Dunod 1999 92 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Rammstedt elles pr sentent le grand nombre de travaux sociologiques fran ais s appuyant sur les mat riaux biographiques la bibliographie qu elles citent est indicative de la vari t des usages de cette m thode et de la litt rature scientifique qu elle a sucit e En outre des sociologues fran ais d une part au fait des volutions des sociologies pratiqu es l tranger en Am rique du Nord notamment et d autre part provenant d horizons intellectuels diff rents ont justifi la validit d une telle m thode d sormais consensuelle dans l hexagone on peut citer les nombreuses enqu tes et publications de Daniel Bertaux et Jean Peneff sans oublier les pr faces donn es par Georges Balandier et Louis Vincent Tho
337. r les probl mes urinaires par exemple Ca a fait parti de la r ducation c est quelque chose d assez important Donc soit c est un peu une premi re tape la r adaptation qui est laborieuse entre guillemets qui est difficile Tant d un point de vue psychologique videmment que physique Donc du coup on passe un peu autre chose quoi Et puis en m me temps puis en parall le de a il y a la kin Donc on fait des mouvements on arrive assez rapidement retrouver un peu d autonomie Par contre partir du moment o il yaun peu d autonomie retrouv e du style simplement le truc mais alors vraiment de base c est dire de passer du lit au fauteuil quand on y arrive comme a les premiers jours o on se l ve tout seul c est oufff l on a plus d espoir forc ment L on commence un peu revivre parce que nouveau enfin certaines personnes pourront ventuellement se d placer un peu Donc partir de ce moment l c est un 112 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 ensemble c est un tout quoi Du coup ben la douleur tout naturellement la douleur s estompe quoi Oui moi la douleur elle tait hyper localis e Souvent j avais des copains qui n avaient pas de douleurs part des douleurs musculaires n avaient pas de douleurs violentes L image de la lance sur laquelle repose tout le corps de Monsieur Martin est vocatrice II lui a fallu deux ou trois ann es pour que son c
338. r quoi que c est pas possible Que si on reste dans cet tat la vie sera insupportable C est dire que si on reste dans cet tat de douleur comme a o au moindre mouvement au moindre truc C est pas possible on peut pas vivre comme a C est insupportable Moi je pense qu il m a fallu peu pr s deux bonnes ann es deux trois ann es peu pr s pour que mon corps enfin oui mon corps s harmonise encore un petit peu au niveau de la douleur C est dire qu il y a une esp ce de d abord que cette douleur violente au niveau de la fracture disparaisse Par contre il y a toujours des probl mes de douleur de dos m me encore aujourd hui Bon on a tous mal au dos quoi Apr s une journ e de boulot de douze heures etc c est normal En m me temps y a aussi le fait qu on est avec d autres qui ont plus d rouill qui en chient vachement plus quoi beaucoup plus mal Donc du coup en m me temps a aide a permet de relativiser un petit peu les choses Donc la douleur c est vraiment les premi res semaines tr s tr s violentes et apr s la douleur vient se greffer la mise en fauteuil Commencer s asseoir houla c est tr s tr s difficile sans compter qu on tombe dans les pommes en plus Donc l on se sent quand m me tr s pr caire Puis apr s il y a d autres choses qui prennent un peu le dessus C est dire qui finalement font pas oublier la douleur mais ou alors en rajoute une couche je sais pas comment le dire Aborde
339. raiment pas des souvenirs mais des esp ces d impressions des esp ces de sentiments de quand j tais ado de quand j tais m me plus gamin enfin plus jeune etc Effectivement je retrouve des points des traits du Louis de maintenant et du Louis d avant Par exemple je ne sais pas sur mon c t on va dire je ne sais pas g n reux mon c t on va dire proche des gens enfin oui proche des gens Maintenant je dirais peut tre humaniste du fait de l ge Le c t un petit peu tranquille enfin tranquille c est dire assez calme J e commence effectivement sentir que fondamentalement finalement la parapl gie elle n a pas chang l individu que je suis C est dire elle n a pas chang v ritablement le bagage avec lequel je suis arriv au monde quoi Et a a devient de plus en plus effectivement pr cis Je fais des liens entre maintenant et avant Je me rends compte que non l dessus le handicap n a pas eu d incidence d interf rence Donc a rejoint peut tre un petit peu votre observation Q C est une sorte de r alit int rieure qui se fait jour en vous R Oui et a confirme en m me temps que Alors c est int ressant tout ce qu on a pu se dire parce que du coup quand je vais revoir des vieux copains paras on va pouvoir aborder peut tre des th mes qu on n a pas abord s depuis quelques temps etc Notamment celui ci par exemple Et peut tre a confirme qu effectivement au moment de l acc
340. rapeute quand on voit un psy du coup le psy il a un nouveau client Rarement il l envoie chez un confr re ou rarement il l oriente sur une autre forme de th rapie une th rapie comportementale ou quelque chose comme a assez rarement Il veut se garder son client Bien que je pense que ce n est pas syst matique et il y a forc ment des th rapeutes qui travaillent comme a qui ont d pass ce cap l Donc oui j ai consult J ai fait un peu de th rapie qui ne m a pas r volutionn la t te Ca c est clair Q Et vos copains vos connaissances sont dans cette situation R Assez peu assez peu oui Q Ce n est pas syst matique R Non c est loin d tre syst matique Et puis d j en phase de r duc par exemple h pital tout a au tout d but Bon moi je parle d il y a vingt ans maintenant les choses ont volu probablement les choses ont volu Peut tre que l individu est pris en compte plus globalement diff remment il y a une approche diff rente II y a peut tre plus de place l aspect psy plut t qu l aspect r duc m canique etc Mais moi dans ma p riode de r duc j ai vu une fois la psy de l h pital qui est venue se pr senter moi Bonjour voil je suis la psychologue de l tablissement Ca va Si vous avez besoin de quoi que ce soit je suis votre disposition Mon bureau est ouvert C est vrai que c est sympathique bien s r Et a s arr te l Moi j ai pratiquement vu
341. rapl gie qui ne sont pas discut s on se comprend entre pairs 2 3 EN ETABLISSEMENTS De son s jour en centre de r ducation Monsieur Martin garde de nombreux et vivaces souvenirs De son exp rience deux points forts se d gagent la proximit et l intimit y 2 3 1 La proximit Devenir parapl gique implique l instar du malade de se voir syst matiquement approch et pour son bien par de nombreux professionnels sp cialistes du corps Q Comment peut s llustrer cette proximit R je vais parler de ce que je connais de para et t tra Beaucoup de para et de t tra ont flirt avec du personnel soignant norm ment Avec des infirmi res avec des aides soignantes avec des femmes de m nage enfin agent de service mais aussi avec des internes des externes des kin s Ca je dirais c est le plus flagrant Le personnel infirmier donc en l occurrence principalement infirmi res et aides soignantes c est vrai que moi j ai rencontr des jeunes comme nous qui avait dans les vingt cinq ans Donc hormis l aspect soin c est vrai que il y avait naturellement des relations amicales qui se d gageaient en fonction des affinit s de chacun Et a je pense que a doit tre pareil dans tous les milieux probablement J e pense pas que ce soit sp cifique l h pital ou la r ducation Je pense que a doit tre pareil dans tous les milieux o au bout d un moment on sympathise avec les gens o on a des a
342. ravail Le premier Le r cit est caract ris par la mise en vidence consciente du devenir du narrateur partir d une exp rience qu il juge lui m me capitale et qui a entra n une s paration et un changement ressentis comme tels C est ce qui permet l assomption d un je qui raconte l individualisation le deuxi me La transmission du r cit est ritualis ce fait permet tant l affirmation du devenir individuel que la possibilit de l exprimer socialement le quatri me Le r cit est introduit par une autorepr sentation qui donne les lignes directrices de ce qui sera d velopp par la suite pendant les entretiens qui ont lieu pendant quelques semaines Les deux autres l entretien conduit sa guise par le narrateur le caract re choral de l entretien c est dire l intervention de proches sont absents de mon travail Au fond malgr ces l g res diff rences je partage les deux id es suivantes nonc es par l auteur La question de la v racit du r cit n est pas pertinente Il ne s agit pas de v racit en soi mais de coh rence personnelle et sociale Cette coh rence nonc e par un sujet est bien s r en rapport avec des conditions sociales objectives c est cette coh rence t tonnante parfois plus explicitement 77 Maurizio Catani Tante Suzanne op cit p 30 pour les citations 97 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif
343. rce qu elle avait quand m me deux ans de moins que moi Elle a ne la g nait pas que je sois en fauteuil parce que l amour forc ment Donc a ne la g nait pas en tout cas sur le moment Et si notre histoire avait effectivement continu qu est ce qui se serait pass deux ans apr s trois ans apr s Ca c est autre chose et peut tre aussi que inconsciemment quelque part le fait de mettre un terme cette histoire c tait pour ne pas se casser la gueule quelques ann es apr s parce que peut tre instinctivement comme a on sent que les choses ne vont pas aller loin Et c est vrai que les couples mari s plus g s et mari s ce moment l il n y en a pas beaucoup qui tiennent le choc G n ralement bon je ne sais pas s il y a eu des stats des tudes faites l dessus en tout cas moi dans mon entourage dans ce que je vois je pense qu au moins deux couples sur trois se sont clat s se sont clat s Alors est ce que c est uniquement cause du handicap Ca a reste voir mais quand m me quoi oui Alors apr s autre difficult c est la drague l approche le contact on va dire Autant quand on a vingt vingt deux ans on va dans une soir e on va dans une bo te lieux que je fr quentais relativement bien l poque bon quand on est sur ses deux pattes on peut inviter une fille danser par exemple L a se complique videmment on ne peut pas l inviter danser D j il faut pouvoir l approcher
344. rce que l le sondage il n est pas possible c est dire elle a mis une serviette dessus Et puis ils ont quitt la chambre on revient dans cinq minutes C est dur et puis en fait avec le recul une fois de plus a fait partie du truc quoi Q Pourquoi c est dur R D tre poil devant que des nanas en rection je sais pas c est dur Enfin quand je dis c est dur bon a fait rougir un coup Mais moi a m a pas d prim la t te C est pas ce que je veux dire quoi C est dur parce que c est pas quelque chose dans la vie qu on vit tous les jours quand m me En g n ral les nanas qui nous voient en rection on les a choisi la plupart du temps ou elles nous ont choisi C est pas dans le m me contexte enfin quoi Avec le recul je trouve a dr le pratiquement On n en meurt pas quoi Et puis a oui je trouve que a donne confiance en soi Enfin a donne oui a donne confiance en soi d une certaine fa on Avec le recul comme a en en parlant finalement a fait une histoire de plus J e pense que a renforce la confiance qu on peut avoir en soi A moins qu au contraire a mette un bon coup justement dans la confiance en soi Parce que je ne suis pas quelqu un qui ai une forte confiance en moi Q Et les copains j imagine que la situation dans laquelle vous avez t les copains les autres pensionnaires l ont t aussi R Plus ou moins oui Q Qu est ce qu ils en disaient eux et co
345. rdre du jour Mais je pense Josiane enfin d autres comme a elles avaient tendance un peu nous envoyer chier c tait une r action bien Q Quelles r actions vous aviez ou vos amis pensionnaires par rapport ce genre de r actions R Je sais pas j ai pas trop de souvenirs Je pense que peut tre les premi res fois a devait tre surprenant de se faire rembarrer un peu par rapport son handicap Mais je pense qu on a du vite sy faire Q S adapter R S adapter je pense que a a du vite se faire Et puis de toutes fa ons c tait jamais m chant Et puis a devait tre comme a a devait tre naturel et spontan Mais c est vrai que l c est vrai qu on a envie d tre prot g ce moment l Dans un centre comme a on a affaire des personnels oui certes c est la 120 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 m me g n ration que nous mais pour qui notre d ficience n a aucun secret Et puis c est vrai que les gens enfin les soignants quels qu ils soient sont habitu s enfin habitu s comment dire Ils voient voluer au quotidien des personnes en fauteuil Donc c est pas du tout quelque chose qui les impressionne qui les fascine qui les je sais pas quoi Donc du coup la relation elle est naturelle tout de suite elle est naturelle tout de suite tout de suite Et a effectivement je pense qu en phase de r duc c est bien Par contre apr s quand on sor
346. rejetant les significations caduques et en laborant avec les soignants les r ducateurs et les pairs dans le quotidien de la mise en jeu du corps un ensemble de nouvelles significations significations qu il va n gocier au jour le jour et r ajuster au plus pr s de chaque nouvelle exp rience La nouvelle condition corporelle prend alors sens au fil du temps dans une ess TS laboration collectivement n goci e ELABORATION D UN NOUVEAU RAPPORT A L ENVIRONNEMENT MATERIEL Le seul fait de se tromper de matelas peut provoquer l apparition d un escarre en quelques heures ne laisser qu une bouteille d eau avec une paille sur le chevet risque d tre insuffisant pour que le patient puisse s hydrater quant au t l phone il doit souvent comporter l option main libre pour permettre son utilisation et parfois aussi doit tre positionn dans le lit port e de voix du patient il a fallu inventer toutes sortes de sonnette pour permettre au bless d appeler etc Il ne faut pas oublier que tout objet tenu hors de port e de main ou de t l commande du patient s av re tre purement d coratif Des aides techniques sont donc mises sa disposition Le patient apprend alors ma triser son environnement depuis son lit et plus tard depuis son fauteuil Il acquiert de nouveaux r flexes d action sur le monde ce sont de nouvelles techniques un nouveau rapport l espace ainsi que l habitude d
347. relever d un engagement qui selon le contexte peut tre per u comme excessif Le militantisme du p re de Marion est par comparaison beaucoup plus mod r Membres d associations qui interviennent dans le champ du handicap son action s inscrit selon lui dans la continuit de ses choix professionnels il est infirmier et politiques qu il d signe comme un humanisme de gauche Sa pr sentation du handicap de sa fille est galement assez directe mais lui aussi la prolonge par un cadrage plus vaste o il est notamment question des dysfonctionnements du syst me hospitalier qu il conna t donc un double titre des probl mes li s au financement de la prise en charge du handicap Toute question qui travers autant sa vie professionnelle que militante ou personnelle 31 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Les trois types de modalisation qui viennent d tre voqu s ne recouvrent pas totalement le champ des possibles Rappelons que certains parents peuvent notamment tre suffisamment reint s tant psychiquement que physiquement que c est leur propre tat qui cr e un certain embarras et rend probl matique l interaction Mais nous n avons interrog personne pr sentant de telles caract ristiques D autre part certains probl mes que rencontrent les parents peuvent relever de dysfonctionnements des interactions que tout le monde conna t et qui ne sont pas sp
348. res connaissaient bien Moi je connaissais aussi bon Maintenant comment ils ont r agi je ne sais pas premi re vue comme a je pense celui qui en a le plus souffert enfin le plus souffert c est Roger donc pas mon grand fr re mais l autre Parce qu il voquait par exemple que quelques jours apr s mon accident En tout cas devant moi puisque quand m me pendant un an j ai t pendant deux ans oui deux ans deux ans et demi j tais quand m me en milieu hospitalier c est dire dans un premier temps Et puis ensuite dans le centre de r ducation Donc quand j tais par exemple l h pital bien videmment pour la famille c tait un devoir pour eux de venir me voir r guli rement Donc c tait un coup mon fr re un coup l autre un coup ma tante Donc a L dessus a a bien fonctionn je dirais Q C tait quoi le rythme des visites R C tait hebdomadaire C tait toutes les semaines c tait toutes les semaines Au moins les neuf mois o on tait en r ducation la premi re r ducation c tait bien s r toutes les semaines C tait au minimum deux fois par semaine au t l phone Du centre de r ducation au domiciles familiaux a faisait quand m me deux heures de route En plus je doute que mon fr re avait tellement les moyens pour prendre l autoroute par exemple ce genre de trucs Il ne doit pas prendre tellement souvent l autoroute Mais ils avaient une esp ce de roulement qui
349. reste quoi Si en plus on touche c est int rieur enfin c est int rieur c est des choses importantes Donc a veut dire que je ne sais pas le temps qu il faut pour int grer ces choses l C est s r il va falloir toujours faire gaffe parce que sinon on risque de se pisser dessus etc etc etc Peut tre le temps qu on n a pas un peu dig r a peut tre qu on fait un peu le mort l dessus quoi On cache oui on le cache on ne dit pas Q On cache autrui R Oui Q Mais on ne se cache rien soi R S rement un peu oui S rement un peu Si on cache autrui alors oui cacher ou ne pas dire est ce que c est pareil je ne sais pas Enfin je ne sais pas si c est la m me chose Oui mais effectivement si on cache autrui c est qu il y a des choses que nous on ne veut pas voir ou qui sont trop dures mais souvent on les voit tellement bien que c est trop difficile quoi C est trop difficile Donc je pense que c est un peu en parall le Je pense que effectivement moi je me rends compte l je vous parle globalement sur un p riode de sept ans ans mais en fait c est progressif tout au long de la vie de l volution de son volution avec le handicap avec la maturit tout a quoi Avec des copains qui ont mon ge je suis beaucoup plus l aise 116 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 maintenant qu il y a quelques ann es Les rares fois o je les voyais quoi Parce que p
350. restent faire avant leur lib ration d autres font des plaisanteries sur l aspect carc ral de leur nouveau mode de vie d autres encore mentionnent l ext rieur de l institution comme tant la vraie vie Q Avant ton transfert pour X ils t ont expliqu de quoi il s agissait Oui une prison M G 24 ans sans emploi L usage conventionnel de l environnement est en partie formalis dans le r glement int rieur distribu chaque patient lors de son accueil dans l institution Ce r glement int rieur impose de surcro t bien videmment une gestion des corps sp cifique une vie en institution il faut r duire le volume sonore partir de 21 heures et faire silence 23 heures avoir regagn sa chambre 23 heures et donc suspendre la soir e entre patients cet horaire ne pas faire de r serve de nourriture ou de boissons dans sa chambre ne pas introduire ni consommer d alcool ni de drogue illicite etc Le r glement int rieur contient bien videmment de nombreuses autres interdictions et mesures impos es en vue d une bonne cohabitation de tous et d une bonne r ducation de chacun Mais les points cit s ci dessus sont probablement ceux qui ont le plus de mal tre respect s Dans la r alit ce formatage des comportements tel qu il est r dig dans le r glement est en g n ral lud par les 7 Formatage expression propos e par l auteur qui renvoie l usage
351. rispe soudain se heurte l opacit r elle ou imagin e du corps de l autre et la g ne est d autant plus vive que les caract res physiques du sujet autorisent moins une identification lui cause de son infirmit ou du d sordre de ses gestes que dire de l ins curit provoqu e par un brutal changement corporel pour la personne concern e de fa on si soudaine dans son tre Elle ne se comprend plus elle m me l intelligibilit de son corps s effrite Elle vit le surgissement de l tranget en elle m me Son tat corporel n est plus une routine fonctionnelle un ensemble rassurant d habitudes quotidiennes Il ne fait plus sens et il la confronte au chaos d une multitude de perceptions et de silences d actions et d absences d action tous incompr hensibles Cette perte de significations est ressentie de fa on d autant plus radicale et abrupte que les 42 bless s enqu t s n avaient pas acquis de connaissances s rieuses concernant leur tat corporel actuel au cours de leur socialisation ant rieure Avant leur accident ils ne fr quentaient pas de personnes dans leur situation Pour la plupart le monde des personnes en situation de handicap tait un monde part un monde autre que le leur Ils n ont donc que peu de rep res pour appr hender leur situation pr sente et encore moins pour se projeter dans un futur Ces d buts h sitants dans la recherche de significations corporelles in
352. rite de la MIRE et de la DREES aupr s d un chantillon r pr sentatif de m nages fran ais Ses objectifs sont de mesurer le nombre de personnes handicap es ou d pendantes d valuer les flux d entr es et de sorties en incapacit s et de relever la nature la quantit et les fournisseurs d aides existantes ainsi que les besoins non satisfaits Handicaps Incapacit s D pendance Premiers travaux de l exploitation de l enqu te HID DREES n 16 juillet 2001 La compr hension sociale du handicap cahier de recherches n 182 CREDOC 54 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 se sentir limit dans la nature du travail qu il peut r aliser du fait de son probl me de sant d autant plus s il cherche se reconvertir l informaticien n a aucune raison d avoir ce sentiment Par ailleurs si la femme du boulanger d veloppe cette allergie elle peut choisir de ne plus travailler au magasin et rester au foyer pour s occuper de ses enfants De m me que le boulanger qui prend sa retraite ayant fait le choix de l inactivit il n est pas vident qu elle se sente limit e dans le travail si elle n a plus aucune attente dans ce domaine Ainsi le sentiment de limitation dans le travail semble dans un premier temps d pendre des attentes de la personne vis vis de la sph re professionnelle Que repr sente le travail un moyen d assurer un revenu auquel cas une compensation
353. riture qui lui r pugne Tout cela va avoir des cons quences videntes en terme de retard dans sa prise de poids ou bien en terme de fatigue ajout e De m me l alitement prolong est v cu comme une preuve si prouvante que son impact moral retentit consid rablement sur la r cup ration du patient Nous pourrions bien videmment allonger de mani re tr s cons quente cette liste des effets secondaires imputables la gestion collective et rationnelle des corps en institution mais l n est point notre objet Oui fallait me tourner tout le temps Fallait pas que je reste allong Juste pour manger Donc c est mes parents qui me donnaient manger quoi Et d s que j avais fini de manger tu avais A tu sais montre en main l aide soignante le maton toc toc Oh putain D j Allez hop On se tourne Alors bon tant pis quoi Alors moi j essayais de faire hi Alors il prenait conscience que moi j tais avec mes parents et tout Toujours se tourner Je ne dis pas qu il venait pile poil l heure mais d s qu il voyait que j avais pas sonn Ah bonjour A Ah J avais oubli J y pensais plus Alors voil M G 24 ans sans emploi Si le corps a chang force est de constater que certains facteurs de ce changement sont troitement li s la vie en institution sanitaire L embrigadement du patient n est pas aussi s v re que celui du re
354. rop jeune ou g pour les 11 18 19 17 17 employeurs Pense ne pas avoir l instruction 2 1 1 1 0 Probl mes de sant 2 35 49 48 57 Se heurte d autres difficult s personnelles 1 1 0 0 0 Ne sait pas comment chercher 1 1 0 0 Pense qu il n y a pas d emploi disponible 3 1 2 2 1 proximit Pense qu il n y a pas demploi disponible 2 2 1 0 1 dans son domaine de comp tences N a pas le droit pr retraite 2 1 1 1 2 Pas disponible 12 5 2 2 0 Attend le r sultat de d marches ant rieures 9 3 2 3 1 Ne souhaite pas commencer ses recherches 21 9 4 5 2 imm diatement Ne souhaite pas reprendre un emploi 7 5 4 4 3 autre 28 19 15 17 16 TOTAL Source CREDOC enqu te emploi 2002 vy De plus grandes difficult s pour trouver un emploi Enfin parmi les personnes qui d clarent chercher un emploi et qui ne se sont pas retir es du monde professionnel les recherches sont plus difficiles lorsque la personne a d clar des probl mes de sant et encore plus lorsqu elle se sent limit e dans le travail Ces personnes sont en effet en recherche d emploi depuis plus longtemps que les personnes valides Alors que pr s de la moiti des valides cherchent un emploi ou un autre emploi depuis trois ans et plus 62 des malades sont dans cette situation depuis aussi longtemps 64 des personnes se sentant limit es en terme de quantit de travail 69 en terme de nature de travail et 83 en terme de d placements entr
355. rot ger pour peut tre je sais pas peut tre ne pas me confronter la sexualit tout de suite C est dire tout de suite c est dire quoi dans les six mois apr s mon accident puisqu elle est venue me voir je crois la premi re fois j tais encore alit compl tement donc a faisait dans les trois premiers mois Apr s les autres fois o elle venait j tais en fauteuil puisqu on se baladait un peu dans le parc Donc oui peut tre il y avait aussi pour me prot ger de a Q Votre change que vous avait eu cinq ans apr s R Oui peu pr s Q Est ce qu elle vous a encore reproch cet acte m me si il tait fait pour son bien R On en a reparl oui elle m a dit que j avais t un con que j avais t b te qu elle tait tr s amoureuse de moi que mon handicap ne la g nait pas du tout qu elle s en foutait que je sois handicap Enfin c est pareil l poque elle avait dix sept ans enfin seize dix sept ans on se voyait en milieu confin prot g qu tait l h pital apr s la vie On n a jamais v cu ensemble avec moi en fauteuil donc apr s je sais pas si mon handicap ne l aurait pas g n Mais franchement je la pense sinc re et je pense qu effectivement parce que c est pas la seule fille il y a quand m me des situations qui ont r sist C est pas le handicap enfin c est pas le fauteuil qui est un obstacle majeur de toute fa on sinon ce serait quand m me un peu d sesp
356. rre tout a Bon il y a beaucoup dire l dessus bien s r Et les contractures peuvent tre dans certains cas tr s emmerdantes peuvent emp cher de faire un transfert D j qu un transfert peut tre laborieux si en plus les jambes qui ne servent rien emp chent de faire le transfert Alors je ne sais pas si tout a a blinde finalement Q Un transfert en phase de r ducation a peut prendre combien de temps Et puis maintenant une fois que l apprentissage est fait R En fait bon je noircis peut tre un peu le tableau Parce qu effectivement un para comme moi un transfert voiture alors je sais pas le tout premier que j ai pu faire par exemple Simplement c est se poser du fauteuil dans la voiture hein Q Oui R Je sais pas allez en s y reprenant une ou deux fois en faisant tr s gaffe on va dire une minute Ce qui n est pas beaucoup une minute Bon vous vous mettez trois secondes pour sortir de la voiture Maintenant moi je mets dix secondes c est dire j ouvre la porti re je fais hop je suis dans la voiture Dans de bonnes conditions si vraiment la voiture est gar e en pente en d vers a se complique Alors a au d but je sais pas si on a conscience qu on va optimiser tout a et qu on va devenir performant Je sais pas si on en a vraiment conscience mais en tout cas quand on voit pratiquer quelqu un d autre qui par exemple vient dans l h pital de r duc le centre de r duc q
357. s des fois franchement je les admire quoi Infirmi re 29 ans UN NOUVEAU MODE DE VIE LA PRISE EN CHARGE INSTITUTIONNELLE Le co t de la m dicalisation les besoins en technologies m dicales la division et l organisation du travail soignant la pluralit des personnels qualifi s jug s n cessaires le besoin initial d une surveillance permanente tant que le pronostic vital n est pas assur tout cela explique et valide le choix social d une prise en charge institutionnelle Une hospitalisation de journ e ou domicile ne semble pas souhaitable et l absence de m dicalisation n est m me pas envisageable Mais ce choix d une vie en institution a encore une fois des implications majeures sur les choix de vie du bless A son arriv e le patient est install dans une chambre double sauf s il y a un probl me infectieux Vont s imposer tout d abord lui le mobilier le compagnon la pathologie du compagnon et toutes ses cons quences dans la vie quotidienne la temp rature les odeurs les bruits la lumi re la blancheur des murs l espace restreint l orientation du lit etc Cette liste pourtant incompl te peut sembler fastidieuse et sans le moindre int r t mais l envisager de la sorte serait ne pas comprendre la situation du bless En effet de nombreux patients assimilent l institution sanitaire une prison Certains quand ils ont une date de sortie comptent les jours qu ils leur
358. s difficult s d apprentissage perte des acquis intellectuels et troubles de la m moire 17 ne d clarent aucune limitation dans le travail 62 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 troubles de la parole et du langage 21 d pression troubles psychiques 26 Certaines maladies semblent galement susciter plus souvent un sentiment d incapacit pilepsie 28 maladies volutives de type cancer sida scl rose en plaques 28 Et enfin les probl mes li s aux quatre membres du corps Pour cet ensemble de d ficiences on retrouve la crainte des cons quences mal connues entra n es par ces probl mes de sant C est notamment le cas de certaines maladies comme l pilepsie ou des maladies volutives L employeur craint de devoir face des absences prolong es de la personne ou de se sentir d sarm face une crise d pilepsie sur le lieu de travail par exemple La crainte de l inconnu explique en partie la r ticence des employeurs qui lorsqu ils sont inform s ou sensibilis s par leur vie priv e franchissent plus souvent le cap de l embauche d une personne handicap e Les probl mes mentaux ou psychiques suscitent galement cette crainte quelles sont les cons quences dans le quotidien du travail de tels probl mes Mais aussi la maladie mentale d range et suscite la fois effroi et chagrin Ces personnes n ont pas de chances c est un v ritable malh
359. s t faite Il est donc de la responsabilit de certains personnels d aider continuer vivre Si d aventure quelques patients d pendants voulaient n anmoins arr ter l leur existence il leur faudrait trouver une complicit convaincre un tiers de prendre le risque d tre jug comme meurtrier C est pourquoi un vitement g n ralis de ce d sir de mort est soigneusement pratiqu et par le personnel et g n ralement par les proches Cet vitement prend l allure d un d ni de l existence d un d sir morbide alors que dans le m me temps le patient est aid par le m decin ou le psychiatre Paradoxalement beaucoup de membres du personnel soignant admettent volontiers que s ils se trouvaient eux m me dans la situation corporelle de t trapl gie ils souhaiteraient mettre fin leurs jours Moi t tra comme non Para je pense que ouais Enfin je me dis que a vaut encore Tu peux encore faire plein de trucs quoi Heu t tra o tu ne peux pas te gratter le nez ou tu ne peux pas Enfin t tra comme A non Ca j en ai discut plusieurs fois avec mes parents c est un peu dur pour eux de comprendre Mais je sais pas Quand t es l Enfin non non non Je pourrais pas quoi Parce qu en plus 45 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 ces gens l ils n ont aucun moyen quasiment pour se foutre en l air s ils veulent quoi Et enfin je sais pa
360. s que font les m decins elle ne manifeste aucun signe de d fiance d finitif l gard du monde m dical ou m dico social e Si l installation d signe une attitude qui consiste faire avec il semble alors que ce soit l attitude la plus commun ment adopt e par les parents que nous avons rencontr s e La conversion est sans doute la tactique la moins facilement transposable dans le contexte du handicap sauf si l on admet qu elle rend compte de l attitude des parents les plus militants au sein des associations qui se donnent pour mission notamment de changer le regard de la soci t sur le handicap Les m res de Carole et de Jean sont certainement dans ce cas toutes les deux sont membres de la plupart des associations qui maillent le territoire Rh nalpin dans le secteur du handicap et la premi re joue m me un r le important dans la promotion et la formation un syst me de communication facilit e Il n est pas indiff rent que ces deux femmes affichent par ailleurs tr s clairement leur appartenance la religion catholique D une certaine mani re leur attitude pourrait aussi relever du type de la sublimation qu identifie aussi C Gardou attitude qui rend compte du choix que font les parents qui d cident d appara tre comme exemplaire dans leur t che parentale 27 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Plusieurs raisons militent pour consid rer cet
361. s Sociales du CREDOC ENCADRE METHODOLOGIQUE L enqu te emploi de l INSEE est r alis e chaque ann e depuis 1950 fin mars Son objectif est de comptabiliser le nombre de personnes ayant un emploi le nombre de personnes au ch mage et le nombre de personnes inactives selon les crit res du Bureau International du Travail BIT d en suivre leurs volutions et de conna tre le profil de ces populations Cette enqu te r pond un cadre r glementaire europ en assez pr cis tabli en concertation avec les instituts nationaux de statistique sous la conduite d Eurostat Elle a des quivalents dans la plupart des pays o elle est plus souvent appel e enqu te sur les forces de travail Elle permet d avoir une approche harmonis e du ch mage dit au sens du BIT ce qui enrichit la vision fournie par les seules sources administratives ANPE En mars 2002 un ensemble de questions compl mentaires l enqu te emploi a port sur le rep rage de probl mes de sant au sein des interrog s et sur l impact que ce probl me avait sur leur insertion professionnelle Ce volet de questions a t pos au tiers sortant de l enqu te emploi soit un peu plus de 38 000 personnes Un tiers de l chantillon de cette enqu te est renouvel chaque ann e le tiers sortant correspond aux personnes interrog es pour la troisi me et derni re ann e Parmi les 38 000 personnes interrog es sur la pr valence d un probl me de sant ou d un han
362. s choses comme a On voguait un petit peu vue Mais c est vrai qu on parlait de notre avenir mais je pense que vous prenez un groupe de jeunes de vingt vingt deux ansil parlent ils imaginent leur avenir Les femmes les enfants Q Vous parliez par exemple de femmes de volont d avoir des enfants ou c est quelque chose qui tait loign R Je pense qu on devait voquer a Surtout que d autres venaient pour faire des tests par exemple de procr ation Donc on savait que c tait dans le domaine du possible ce genre de discussions Ayant plus ou moins les uns comme les autres plus ou moins flirt avec quelqu un dans l tablissement Du coup pas trop d inqui tude Je suis pas s r que c tait tellement le sujet principal En tout cas en premi re phase de r ducation a c tait pas trop l ordre du jour tant notre niveau qu au niveau personnel Parce que forc ment sujet plus d licat Et puis je pense surtout dans cette phase l c est pas la priorit quoi La priorit c est l autonomie c est de pouvoir pisser correctement etc Je sais pas maintenant ce qu il en est mais l poque en tout cas c tait pas un truc qui tait abord Alors apr s je pense dans l autre centre de r ducation o l c tait autre chose on tait autonome m me si certains taient encore en apprentissage on va dire d autonomie forc ment on parle sexe bien s r Est ce qu on faisait le constat est ce
363. s chroniques probablement suite une chute au Basket Parce que finalement les autres paras n ont pas plus de difficult s aux paules que a Je sens que c est l paule gauche qui faiblit des fois j ai des douleurs J esp re que a va tenir J ai t op r j ai r cup r int gralement mais je sens que mes paules sont quand m me un peu rouill es Donc le fauteuil dans la voiture commence me poser des petits soucis En plus j ai une porte coulissante qui n est pas de bonne qualit Q Est ce que vous pensez l ventualit d un acc s par l arri re de la voiture R Alors je ne sais pas si a va tre cette voiture l tout de suite ou si a va tre la prochaine Mais en tout cas j aurais aucune difficult passer l dessus tout comme j aurais aucune difficult utiliser un truc lectrique Moi j aurais aucun probl me l dessus d utiliser un syst me lectrique ou un syst me qui se met devant le fauteuil qui pourrait tracter le fauteuil D ailleurs j y pense de plus en plus Je vois ne serait ce que quand je me ballade avec mon fils Antoine lui avec son v lo j ai de plus en plus de mal maintenant lui il grandit donc il va de plus en plus vite et moi j ai quand m me de plus en plus de mal suivre le mouvement C est vrai que je serais debout en v lo comme lui a r glerait compl tement le probl me L il va falloir que je continue m adapter la situation Je ne sais pas comment je vais solu
364. s demeurent quelle que soit la dur e de recherche d emploi En effet le fait de chercher depuis longtemps un emploi rend les personnes moins exigeantes elles sont souvent amen es largir leur recherche 81 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 21 Nature de l emploi recherch Temps de travail Valide malade Incapacit Incapacit Incapacit en quantit en nature en mobilit A temps complet 50 44 32 37 33 A temps complet mais accepterait un 36 36 37 39 35 temps partiel d faut A temps partiel mais accepterait un 6 9 12 10 11 temps complet d faut A temps partiel 7 10 16 14 21 TOTAL 100 100 100 100 100 Dur e du contrat Un emploi permanent 40 37 35 34 35 Un emploi permanent mais accepterait 56 58 60 62 59 dur e limit e par d faut Un emploi dur e limit e mais 2 3 4 3 5 accepterait permanent par d faut Un emploi dur e limit e 2 2 1 1 1 TOTAL 100 100 100 100 100 Profession recherch e Cherche une profession pr cise 56 53 50 51 52 Cherche plusieurs professions 23 22 22 22 24 Cherche dans une gamme large 11 13 14 15 11 d emplois Cherche n importe quoi 10 11 14 12 13 TOTAL 100 100 100 100 100 Source CREDOC enqu te emploi 2002 Y Les am nagements souhait s Parmi les personnes malades qui ne travaillent pas plus de la moiti souhaiteraient b n ficier d un
365. s en quantit 70 et en mobilit 25 Comme pour les autres populations un tiers d entre elles souhaiteraient travailler davantage Globalement on a l impression que les personnes malades ou ayant une incapacit ne b n ficient pas de conditions de travail particuli res si ce n est le temps partiel avec une satisfaction partag e Les postes occup s sont a priori difficiles et physiques davantage d ouvriers Ceci questionne sur l adaptation des conditions de travail leur probl me de sant A d autres postes leurs limitations dispara traient elles Quel est le r le du milieu professionnel dans l mergence de ces probl mes de sant et du sentiment d incapacit dans la vie professionnelle 74 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Tableau 14 Conditions de travail selon les diff rentes populations actifs occup s valides malade Incapacit Incapacit Incapacit en quantit en nature en mobilit Statu 6 3 5 5 5 7 6 6 5 7 Int rimaire apprenti stagiaire 4 2 3 5 4 6 5 1 3 7 Contrat dur e d termin e 66 1 66 6 66 6 65 9 63 3 Salari sauf Etat collectivit s locales 8 4 6 0 6 2 6 6 3 2 Dont anciennet lt 1 an 20 8 17 3 15 2 15 2 14 2 anciennet d un an moins de 5 ans 36 8 43 3 45 2 44 1 43 9 anciennet de 5 ans et plus 0 1 0 0 0 0 anciennet non renseign e 23 5 24 3 23 0 22 4 27 4 Salari Etat collectivit s locales
366. s femmes tr s sensuelles romantiques tr s charnelles plus que simplement des femmes qui veulent se faire p n trer tout prix En m me temps pareil avec l volution en grandissant a rassure de C est rassurant Et puis a confirme des choses qu on pressent Quand j avais vingt deux ans j tais comme tous les mecs je pensais que le plus important c tait de bander dur etc etc Je pense que l je pense qu on se trompe quoi M me si il y a une petite cat gorie de nanas pour qui c est le cas mais je pense que la majorit ce n est pas le cas Je pense que les mecs sont un peu souvent hors sujet quoi c t de la plaque Actuellement je suis seul depuis quelques petites ann es Je vis seul Je vis seul mais j ai des petites histoires des petits bouts comme a Dans cette histoire c est s r que la relation physique elle n est plus du tout la m me Dans toutes mes rencontres il y a eu vraiment deux histoires tr s fortes o l comment dire physiquement c tait beaucoup de plaisir beaucoup de d couvertes enfin vraiment Oui beaucoup de Super histoires quoi Des petites assez moyennes l a du coup a casse la baraque parce que le plaisir il n est pas vraiment l Mais globalement c est quand m me une situation on va dire un peu frustrante forc ment m me avec le temps m me avec le recul parce qu il y a forc ment des choses qu on voudrait faire qu on ne peut pas faire Il y a une spont
367. s les uns des autres Par exemple alors petit symbole pour revenir sur comment mes fr res per oivent a Mon fr re a n qui fait beaucoup de montagne Dominique l poque quand je travaillais l association de personnes handicap es on fabriquait des tee shirts Dessus il y avait un enfant handicap qui tait tr s accueillant qui tendait les bras comme a Moi j en avais revendu la famille videmment Dominique chaque fois qu il va en montagne en randonn e toujours toujours il met ce tee shirt en linge de corps Il l a souvent Quelques fois il m a dit comme a je t emm ne avec moi en montagne quoi Et puis il va r guli rement dans un endroit en montagne il m a dit tu vois je t emm ne un petit peu avec moi avec le tee shirt mais un jour je t y emm nerais Et l ann e derni re pour mes 40 ans il m y a emmen en h licopt re C est dire qu il y a eu toute une organisation de faite avec toute la famille les conscrits pour m emmener en montagne Donc c tait une surprise j tais pas au courant de rien du tout On m a pos un endroit le matin et il y a l h licopt re qui est venu me chercher et qui m a emmen quoi Et qui est revenu me chercher le soir pour me redescendre Mais l j ai vu pleurer mes fr res 106 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 par contre Je les ai vu pleurer Donc l c tait un super anniversaire l vraiment super Et a a le fait ch
368. s sont moins nombreux seuls 9 ont entre 15 et 24 ans un quart ont entre 25 et 39 ans Ces deux tranches d ge repr sentent 58 de ceux n ayant pas d clar de probl me de sant Ces diff rences au niveau de l ge ne sont pas surprenantes et ne font que renvoyer au processus d apparition d un probl me de sant ou d un handicap Hormis les handicaps de naissance c est au cours de la vie que survient le plus souvent un probl me de sant que ce soit de mani re brutale accident de la route de la vie priv e ou du travail ou de mani re plus progressive maladies volutives usure au travail La probabilit de d clarer une incapacit cro t galement avec l ge Les personnes ayant d clar une incapacit sont plus g es que les personnes malades La part des 15 24 ans parmi les personnes ayant d clar une incapacit n est plus que de 6 pour les limitations en terme de quantit de travail de 8 pour celles en nature de travail et de 5 pour celles en terme de mobilit entre le domicile et le travail alors qu elle est de 23 parmi les valides A contrario quelle que soit l incapacit environ un ers a entre 50 et 59 ans contre 16 des valides Les carts entre les types d incapacit restent assez faibles m me si les limitations en terme de nature de travail semblent plus souvent toucher les jeunes Dans l explication de ce lien deux hypoth ses peuvent tre formul es avec l
369. s sp cialistes esp rant toujours obtenir l indication d un traitement plus appropri pour leur enfant La v rification n implique cependant pas n cessairement une attitude de d fiance l gard des institutions m dicale et m dico sociale Elle rejoint toutefois tr s clairement l intransigeance chez les parents de Na ma qui multiplient en effet les consultations avec la m me insatisfaction pour l instant Les parents de Pierre quand ils sont oppos s l orientation en IME de leur fils ont fait montre ce moment l d une franche intransigeance D ordinaire plus accommodant dans leurs propos cette d cision a marqu le seuil de leur r signation au handicap de leur fils Le fait que ces deux familles aient un rapport troit avec le milieu m dical n est pas totalement li cette attitude La m re de Carole galement m decin agit tr s diff remment ainsi que les p res de Marc et de Marion qui sont tous les deux infirmiers D autres parents en outre n ayant a priori aucun rapport avec le milieu m dical ont acquis de telles comp tences sur le handicap de leur enfant que la nuance entre m decin et non m decin peut parfois devenir assez t nue Ainsi la m re de Jeanne appara t elle extr mement comp tente dans le domaine tr s troit de la maladie dite des os de verre qui affecte sa fille Mais si cela lui conf re une certaine capacit critique pour appr cier pense t elle les proposition
370. sa m re on est entrain de l c est tr s personnel mais Comment dire On est entrain de voir enfin c est plus de son c t elle que les choses 178 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 sont moins videntes pour une adoption d Antoine pour que je devienne l galement l galement son p re chose que lui il souhaite Bien s r Q Et comment il vous appelle R II m appelle Louis quelques rares fois papa Mais je sens que du c t de sa m re les choses ne sont pas aussi nettes Les choses du c t de sa m re sont nettes concernant le fait que pour Antoine je suis son p re L dessus il n y a aucune ambigu t Tout ce qui est d cision concernant Antoine l cole le choix du sport etc c est ensemble que nous les prenons je veux dire la signature des cahiers de l cole etc l dessus c est net Il n y a aucun malentendu Par contre que Antoine m appelle papa j ai l impression que pour sa m re c est quand m me moins net Parce que plus petit quand il avait cinq six ans m me peut tre d j un petit peu avant pendant une p riode il m appelait papa spontan ment enfin naturellement bien s r Et je pense que du c t de sa m re on l a un peu dissuad de a et a a m a fait en tout cas beaucoup de mal et beaucoup de peine l poque On l a un peu dissuad pour quelle raison je ne sais pas Je ne sais pas Bon sa m re ce qu elle m
371. sais j ai d rap dans un virage vraiment un accident classique et b b te Aucune aucune douleur c est dire aucune sensation enfin aucune sensation c est dire aucune douleur Quand les pompiers ont commenc me toucher en tant assis au volant je n avais aucune douleur C est d j un peu troublant je trouve je ne sais pas pourquoi Alors je suis arriv un peu p t mais aucune aucune douleur Je ne sais pas une image par exemple en ce qui me concerne en tout cas moi j ai trois vert bres de cass es la neuvi me la dixi me et la onzi me dorsale Donc c est grosso modo au niveau du nombril Pendant trois mois peu pr s trois mois j avais l impression d tre allong sur la pointe d une lance C est dire une lance debout et la pointe et moi d tre en quilibre dessus Ca c est tout fait l impression et la meilleure image que je peux trouver pour expliquer pour essayer de faire sentir aux autres la douleur La douleur tait un point tr s pr cis J ai eu d autres troubles dans l accident notamment une fissure de l aorte qui tait donc finalement plus grave que le probl me de la colonne J ai t op r c ur ouvert j ai eu des douleurs mais des douleurs de cicatrices Enfin c tait rien Apr s il y a la mise en fauteuil parce que je suis rest trois mois alit parce que j ai eu donc ces fractures et des tiges Donc il fallait quand m me consolider un petit peu ce qui n est pas le cas de tous
372. sensible quoi Mais a me touchait de la voir elle mue Mieux que tout autre Monsieur Martin sait qu il est parapl gique Mais au d but de sa carri re avec l aide soignante et vingt ans apr s avec ses fr res qui le f tent il est touch par les motions qu il suscite Sa r alit de parapl gique lui parvient aussi par l interm diaire de tiers il ressent plus l motion qu il g n re chez autrui qu il ne la vit lui m me Sa situation lui chappe pour partie il est l objet de projections qu il ne ma trise pas A mi vie Monsieur Martin qui a quarante et ans en 2003 a d j connu deux vies comptant l une et l autre une vingtaine d ann es avant et apr s l accident Dans sa seconde vie marqu e par la parapl gie il n y a pas eu successivement deux p riodes l adaptation et une nouvelle vie L adaptation est toujours n cessaire et la nouvelle vie a commenc d s l accident Des entretiens il se d gage toutefois que ces deux aspects sont indissolublement li s Avec des importances diff rentes dans le temps ou dans l espace Monsieur Martin doit s adapter en cons quence c est une nouvelle vie aujourd hui stabilis e qui s est impos e lui C est par commodit d exposition que ces deux 107 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 l ments sont pr sent s distinctement alors que dans la vie m me de notre interlocuteur ils sont
373. ser pour la baise enfin pour tre clair et surtout dix neuf ans quoi est ce que je vais bander Parce que effectivement enfin en ce qui me concerne c est une remise en route qui prend du temps c est dire que dans un premier temps on est l h pital on est sond On se pose ces questions l mais ce n est pas forc ment ce qui tout de suite Il y a d autres priorit s ce moment l qui sont des r ducations sphinct riennes de trouver une position assise l autonomie etc N anmoins c est toujours quand m me dans la t te C est un premier point Apr s il y a la surprise oui la surprise de voir Il y a des modifications importantes de son corps il y a une atteinte des fonctions fondamentales donc on vit a comme on peut Et puisil y a la surprise ou le paradoxe je ne sais pas la surprise de voir que finalement les femmes elles visiblement c est pas un aspect qui les rebute Le fait de draguer un gar on qui est en fauteuil visiblement ce n est pas un truc qui pose probl me Ca moi c est un truc qui m a toujours un peu surpris Ca m a toujours un peu surpris a me laisse un peu sceptique L je suis toujours un petit peu en phase d h pital 155 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 en phase r duc puisque en ce qui me concerne et c est un peu le cas de beaucoup de copains de paras en tout cas que j ai pu conna tre a commence l h pital C est dire que on est
374. sins allez y passez devant moi vous tes prioritaire Certes je suis prioritaire mais je ne veux pas de cette priorit Mais si mais si c est pour vous Voyez il y a le panneau l Non mais je suis assis je vais pouvoir tenir beaucoup plus longtemps que vous la caisse Alors il y a des fois ils sourient ah effectivement je n avais pas pens a Bon a aussi c est aussi des fois dans le comportement On y revient C est difficile parce que des fois il y a des grandes gueules Des fois ils me disent tr s fort eh monsieur l passez passez Donc du coup il y a tout le monde qui regarde pour voir ce qui se passe C est moi qui parle l le monsieur Ca faut tre blind Et a je ne l ai pas trop v cu au tout d but en tous cas je n ai pas le souvenir Et a au d but de la parapl gie ce genre de situations c est tr s ah Maintenant a va je m en tape mais bon Q Est ce que le fait de dire qu au d but a marque mais qu apr s on s en fiche Est ce que c est propre vous ou est ce que ce sont des amis des copains paras qui sont dans cette situation R Enfin mon environnement proche les copains paras ou dans la m me situation je pense qu on a pass largement outre ce genre de situations a c est s r Parce que des fois on a cherch des trucs On a d barqu trois en fauteuil dans un tout petit bar par exemple Bon c est aussi chercher un peu la merde
375. sionnelle en quantit en nature en mobilit d incapacit intellectuels troubles de la m moire Troubles de la parole ou du langage 21 D pression trouble de la personnalit 26 autres troubles psychiques 28 Autres maladies volutives y compris 69 64 41 28 cancers non class s ailleurs scl rose en plaque sida maladie de Parkinson Probl mes au niveau des membres 61 64 29 28 sup rieurs au niveau des bras des mains y compris arthrose ou rhumatisme Probl mes des membres inf rieurs au 28 niveau des jambes des pieds y compris arthrose ou rhumatisme Probl mes au niveau du dos ou du cou y 37 comptis arthrose ou rhumatisme Probl mes ou difficult s cardiaques 48 circulatoires ou tensionnels d ficience r nale Probl mes ou difficult s pulmonaires ou 40 48 17 44 respiratoires y compris asthme et bronchites chroniques ENSEMBLE 46 50 Autres probl mes de sant de longue dur e 51 y compris douleurs et asth nies 54 Affections de la peau y compris les 60 d figurations graves et les allergies 61 Source CREDOC enqu te emploi 2002 Guide de lecture parmi les personnes ayant d clar de l pilepsie 28 n ont d clar aucune limitation dans le travail 64 une limitation en quantit de travail 67 en nature de travail et 44 dans leurs d placements entre le domicile et le travail Outre le type de d ficiences l anciennet
376. sociales n 85 pp 11 26 40 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Ha non Du tout J avais une grande paille heu qui sortait et la bouteille d eau tait juste l Je m approchais et avec le pouce je choppais la paille et je la mettais dans la bouche Vraiment j avais aucune force Je ne pouvais rien lever M me un crayon qui ne p se rien je ne pouvais pas le lever Je ne pouvais pas le tenir J avais plus de force dans les bras J avais pas de force du tout Vraiment c est Ca a m a marqu Ca m a marqu quoi Y a de quoi M F 30 ans prof Interm diaire ELABORATION D UN NOUVEAU RAPPORT A AUTRUI LA DEPENDANCE Notre exp rience ordinaire celle d un adulte corporellement autonome nous permet rarement de mesurer quel point ce quoi nous nous identifions et ce quoi nous sommes identifi s par autrui est tr s intimement li notre autonomie corporelle L impossibilit d agir seul sans aide humaine non seulement change l id e que nous nous faisons de notre corps mais aussi celle que nous avons concernant autrui et r ciproquement La d pendance l autre dans la vie quotidienne qu elle soit partielle ou totale est souvent g n ratrice d une angoisse qui s exprime par de l agacement de l agressivit ou de l auto agressivit un repli sur soi et un d sir de se laisser aller La relation a dant aid peut tre source de c
377. sont dot es de conditions de vie signifiant qu ils en sont la lisi re accession la propri t d une maison passage l artisanat m tier dans les services tudes longues et qualifiantes 101 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 v 1 4 1 Les parents La vie de la famille Martin s est d roul e dans un milieu plut t tr s tr s modeste tr s tr s modeste dans un petit village d une vall e alpine Il n y avait pas une vie sociale des plus d velopp es des plus raffin es La m re est femme au foyer Le p re est chef d quipe dans l industrie m tallurgique responsable de la coul e la fonderie Apr s son accident en 1974 l ge de quarante cinq ans qui le laisse parapl gique il n a pas repris d activit et est rest dans la petite maison de plein pied qu il avait fabriqu sur les fondations d une ancienne grange je crois qui appartenait ma grand m re du cot de ma m re En fauteuil il avait quelques probl mes d quilibre quand m me assez pr caire il entretenait les fleurs m me si autour de la maison construite flanc de montagne il y avait des d vers et s amusait sculpter un peu de bois Mais il lisait pas mal Il lisait le journal surtout des revues Je crois que je ne l ai jamais vu avec un roman dans les mains j ai pas de souvenir en tous cas Ce n est pas qu il lisait mal il lis
378. ssion je sais pas c est un sentiment oui je sais pas Et donc c est plus je sais pas c r bral intellectuel je ne sais pas comment le dire Pas corporel pur et dur quoi J ai un plaisir corporel quand je vais dans l eau pas exemple M me avec ce que j ai d crit dans les d placement c est pas v ritablement un plaisir corporel au sens du physique C est plus intellectuel et c est plus par rapport une harmonie des choses Mais a par contre l air sur le visage ou sur le torse en se mettant torse nu on l a en se d pla ant simplement normalement Alors il y a a mais a c est tout le temps Mais a c est pas plus que vous qui marchez ou qui faites du v lo C est pas ce niveau l C est au niveau d une sensation de glisse une sensation de glisse Et puis c est au niveau je dirais d une harmonie de mouvement Je sais pas de s arr ter pr cis ment de descendre de s arr ter pr cis ment en bloquant une roue Et a a fait donc forc ment tourner un petit peu et puis du coup ben je m arr te Peut tre que je ne l avais pas pr vu pas calcul Et j allais dire l c est tr s agr able je ne sais pas pourquoi quoi a tient Malgr le fait que son corps puisse certains moments constituer une charge et g n rer des soucis qu il a appris conna tre Monsieur Martin a r alis les apprentissages lui permettant d assimiler des connaissances qu il peut transmettre autrui Loin de n tre que l
379. st quand m me rare que le mec il devienne un petit peu comme a un petit peu agressif Je me suis fais jeter pareil par un infirmier pour une question de stationnement Oui moi je vais chez un handicap et donc je peux me garer sur la place tu vois Je lui dis attends c est pas parce que tu vas t occuper d un t trapl gique que tu peux occuper l emplacement r serv Oui mais nous on fait comment les infirmiers Je lui dis mais a c est votre probl me les infirmiers vous avez qu demander des places r serv es aux infirmiers C est votre probl me Apr s il a quand m me pris en compte le truc Le mec il faisait un effort quand m me Il y a la mauvaise foi mais l agressivit et la violence j essaie de trouver un exemple de situation comme a un peu extr me J e pense que le mec qui m a un peu envoy chier l c est probablement un des trucs les plus hard les plus violents les plus agressifs en tout cas Donc c est quand m me pas tr s m chant non plus Q Est ce que je dois comprendre que a ne vous a pas atteint fondamentalement Est ce que m me si on va jusqu au bout a ne vous aurait pas un peu plu parce que cette personne vous a trait comme n importe qui R Il y a un peu de a oui Je pense presque il y a un peu de a Q Et c est partag par vos copains ou c est une fa on de r agir qui vous est propre R Je pense que a d pend vraiment des gens Moi je connais des gens
380. sto m me si c est pour autre chose Mais la parapl gie elle est toujours l Donc il y a des mesures prendre les probl mes d escarres les probl mes de matelas particuliers etc Sinon en dehors du truc rapport avec le m dical dans la vie de tous les jours c est dire qu on est un expert pour soi m me c est dire qu on sait comment on fonctionne ce qu on a etc Donc ce qu il faut faire ce qu il ne faut pas faire jusqu o on peut aller Maintenant par rapport aux autres je vois pas Par contre par rapport aux autres parapl giques oui 1 Q Et les associations vous sollicitent R Non Maintenant je suis un petit peu hors du r seau Mais par contre quand j tais dans l association des personnes handicap es on faisait souvent ce genre d interventions dans les coles Moi j adorais avec les petits beaucoup en primaire un peu de coll ge quelques fois au lyc e J ai toujours trouv a tr s int ressant Je pense que c est l une des actions tr s importante que les associations doivent faire pour la sensibilisation pour la rencontre Donc a je pense que c est bien Moi je l ai souvent fait 143 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Deux aspects essentiels caract risent la parapl gie de Monsieur Martin la mobilit et le rapport au corps Un corps parapl gique est moins mobile qu un corps valide dans ses d placements la personne en fauteuil rencontre des obstacl
381. t la perte d un emploi un divorce Sans parler bien entendu des catastrophes plus grande chelle pour lesquelles on mobilise d sormais des quipes psychiatriques pr cis ment charg es de pr venir la sid ration en formant notamment des groupes de parole Audet amp Katz 1999 Les guerres ont t l occasion d identifier maintes fois cette stupeur on l a tout d abord associ au tableau symptomatique de la n vrose de guerre la fin de la Premi re Guerre Mondiale la premi re brutalization d un si cle qui n en va pas manquer avant qu elle ne devienne un l ment d terminant du syndrome de stress post traumatique que les v t rans du Vi t Nam ont rendu c l bre Crocq 1999 Mais la figure paroxystique de cette non exp rience est celle que pr sente un certain type de d port s des camps de concentration de la Seconde Guerre Mondiale Celui qu on appelle le musulman signifie bien qu il ne puisse plus en t moigner lui m me ce que le philosophe G Agamben nomme pr cis ment l int moignable 1999 p 59 Son aspect physique 21 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 qui n est pas sans rappeler certains des visages du peintre et sculpteur A Giacometti est tr s bien d crit notamment par Primo L vi un homme d charn le front courb et les paules vo t es dont le visage et les yeux ne refl tent nulle trace de pens e 1987 p
382. t vie non imposable insaisissable En fait elle n existe pas Donc a veut dire qu elle n est pas imposable donc elle n est pas d clarable Idem pour les documents de la Caisse d allocation familiale etc Et donc moi mon salaire ne change strictement rien dans ma situation financi re C est vrai que l accident du travail c est la meilleur couverture sociale l accident du travail l dessus c est hyper confortable Q Est ce que a voudrait dire que votre situation est diff rente d autres situations rencontr es par des personnes handicap es R Tr s nettement je sais pas mais en tout cas oui Simplement d j lorsque j tais en r ducation quand j ai re u ma notification de la s cu comme quoi j tais en accident du travail Je me souviens l poque simplement la rente que je percevais tait peu pr s trois fois l quivalent de l Allocation d adulte handicap et dans le groupe toute l quipe o on tait en r ducation on avait tous vingt vingt cinq ans on tait tous assez jeunes j tais un des plus riches Ce qui me posait probl me d une certaine fa on par rapport d autres qui avaient 1 500 balles enfin qui gal raient vraiment qui pouvaient pas acheter des voitures qui pouvaient pas trouver un appartement parce ce qu ils avaient pas l apport pour payer la caution etc etc J ai achet une voiture facilement Ca faisait que a me g nait un petit peu par rapport aux autres C tait un pe
383. t on a affaire des gens plut t qu ont pas l habitude donc qui ont leur regard sur l histoire Donc apr s c est diff rent parce qu apr s c est collectif c est dans la soci t c est dans la rue Un petit lieu comme a en r ducation qui est quand m me effectivement tr s prot g Monsieur Martin souligne qu en tablissement il existe un double proximit entre personnes handicap es et professionnels d abord une proximit physique due aux soins corporels qui d ailleurs sont prodigu s avec une grande professionalit ensuite une proximit de socialit et de situation due pour partie leur appartenance une classe d ge homog ne et jeune cette proximit d passe le cadre strictement professionnel et s illustre par des activit s communes repas relations sexuelles sorties En tablissements de r ducation les liens forts qui unissent professionnels et personnes handicap es modifient les relations professionnelles mais ne les limitent pas pas plus qu ils ne les pervertissent en cons quence on peut m me supposer qu ils en sont l une des conditions essentielles de possibilit s Pour le dire d un mot pour franchir les barri res de la proximit il faut pouvoir s aimer pour les professionnels ne pas tre rebut s par un corps tordu et pour les personnes handicap es oser le pr senter y 2 3 2 L intimit La proximit des corps impliqu e par la situation de soins modifie les
384. t s Est ce en raison d une gravit plus forte de ces accidents Est ce li au fait que ces accidents touchent des populations souvent plus g es plus us es par le travail et donc d j plus fragiles Ou ce sentiment s explique t il par les changements qui sont intervenus suite cet accident dans leur vie professionnelle ou encore par une position de retrait adopt e par le salari suite cet accident qu il attribue son travail et aux aides auxquelles il a pu pr tendre rente d accidents du travail pension d invalidit 65 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Elles d clarent aussi plus souvent un probl me de naissance notamment pour les limitations dans les d placements entre le domicile et le lieu de travail 14 des cas et des accidents de la route pr s de 4 contre 2 En revanche leur probl me de sant est moins souvent li que les personnes malades une maladie non professionnelle 46 contre 50 Cette origine reste malgr tout la principale cause de leur probl me de sant Tableau 7 R partition des diff rentes populations tudi es par origine du probl me de sant En Malade Incapacit Incapacit Incapacit de quantit de nature de mobilit Probl me de naissance 10 9 10 8 12 5 13 8 Accident du travail y compris route 6 2 9 1 9 0 9 0 Accident de la route non li au travail 2 3 3 5 3 7 3 9 Accident de la vie pr
385. t s Pour les gens il y a deux types de situations une densit moyenne la grande surface et une forte densit la foule de la f te de la musique Dans les deux cas et ils ne sont pas contraignants de mani re identique Monsieur Martin constate que nos contemporains ont des ill res On dirait pour reprendre une de ses expressions qu ils ont autour d eux un p rim tre infranchissable Quoi qu il en soit de ces difficult s y faire face est formateur En cons quence il revient aux personnes en fauteuil d tre vigilantes pour deux A l gard des personnes en fauteuil les personnes valides sont en g n ral bien intentionn es Et les personnes handicap es ne doivent pas vivre comme une intrusion indue les in vitables rapprochements produits par la vie collective Et Monsieur Martin d insister sur la forme prise par ces changes dont les modalit s doivent contribuer apaiser des relations potentiellement mais pas automatiquement lourdes de tensions Enfin Monsieur Martin accepte les droits sociaux d volus aux personnes handicap es Mais pour lui cela n implique pas que les formes prises par la vie collective par exemple la queue la caisse de la grande surface se traduisent pas une sorte de surprotection des personnes en fauteuil charge ces 172 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 derni res de ne pas en rajouter sur les b n fices qu elles pourraient tirer ind m
386. t c est trois fois plus de temps Mais finalement ce temps il faut en faire quelque chose Du coup les gestes deviennent comment dire L c est plus d licat par contre Je ne sais pas Est ce que c est une question de tournure d esprit ou quoi que ce soit en tout cas j essaie quand je fais quelque chose quoi que se soit d tre pr sent et de ne faire que a c est dire que 100 de mon esprit soit pr sent ce moment l c est dire que a va de quand je fais la vaisselle quand je m habille quand je fais les devoirs avec Antoine quand je suis avec quelqu un J essaie d tre l Le fait d avoir mettre plus de temps pour s habiller peut tre un peu plus de temps pour pr parer le petit d j du coup a impose un rythme Ca impose un rythme qui finalement impose un rythme cool c est dire plus doucement avec des moments la bourre Il y a des moments il faut speeder On se r veille la bourre le matin donc l il faut speeder Donc au lieu de m habiller en une minute trente a va tre en une dix comme vous Mais a j essaie d viter ces moments ces instants l Je n ai plus envie de fonctionner comme a mais a je l ai r alis par tapes Notamment il y a sept huit ans je me suis fait op rer de l paule Je me suis trouv dans le centre de r duc Pendant un mois j avais vraiment le bras bloqu donc j tais en fauteuil lectrique J tais au bord de la mer j avais le temps de 151
387. t choisir R Entre grabataire et super h ros J e sais pas a priori comme a J allais dire mec normal mais normal au sens de humain pas au sens de ce qu on voit Au sens de tre humain normal Ca va de soit Ca va sans dire Mais il y a peut tre des gens qui il faut le rappeler quand m me Mais quand je dis normal c est dire d abord au sens on est de la m me esp ce J ai mes facult s intellectuelles J ai une mobilit limit e certes mais je suis de la m me esp ce que toi j ai les m mes facult s que toi voil Moi j aime bien les termes de maintenant personnes en situation de handicap D ficient moteur a c est des cat gories tre en fauteuil c est d abord constater qu on a chang de taille de hauteur En centre de r ducation le contact avec les autres parapl giques les miroirs am nent se faire une nouvelle image de soi conforme sa propre r alit corporelle L usage de v tements fonctionnels n cessaires la kin n emp chent pas le souci de la pr sentation de soi notamment lors de sorties de l tablissement Toutefois la prise d ge l usure et le manque d attention font que le corps a perdu de sa plasticit Mais le regard des autres reste souvent pr gnant on dirait aid en cela par les media qu il h site entre valorisation et d valorisation entre qualifications extr mes super h ros et grabataire Or Monsieur Martin se d finit comme mec normal app
388. t jamais compl tement exempt d un malentendu On reconna t l du m me coup la marque d un existentialisme auquel E Goffman s est montr sensible pendant son s jour parisien dans les ann es 50 alors qu il r digeait sa th se Winkin 1988 p 78 et qui transpara t chaque fois qu il voque la mani re dont une personne soumet son comportement aux codes expressifs en vigueur 1974 p 36 Le bon d roulement de l change et l ordre social global enfin sont ce prix le sacrifice de la part la plus subjective et la plus authentique sans doute de soi Dans le cadrage du handicap c est l int grit la personne qu est leur enfant laquelle les parents apprennent renoncer au moins en partie pour qu ils puissent eux et lui garder une place dans la soci t Un rejet trop radical du handicap les conduirait accepter une exclusion plus ou moins formelle C est le deal qu impose la soci t dans la n gociation permanente qui constitue sa trame pour assurer sa propre reproduction et qu acceptent bon gr mal gr la plupart des parents une reconnaissance et une aide contre l acceptation du bien fond de la norme C est l aussi leur participation plus ou moins consciente et volontaire la r paration de l ordre que la d ficience de leur enfant met en danger Mais c est aussi le fondement de cette prison symbolique o sont enferm s non seulement les parents mais a
389. t la cessation d activit qui refl te un retrait de la sph re professionnelle pour des raisons de sant 9 des valides 13 des malades 17 des personnes d clarant une limitation en quantit 16 en nature de travail et 20 parmi celles d clarant une limitation en terme de mobilit entre le domicile et le travail A contrario l absence d emploi s explique moins souvent par la sortie des tudes ou par la fin d un contrat dur e d termin e Tableau 17 A la suite de quelle circonstance tes vous sans emploi En valides Malade Incapacit Incapacit Incapacit en en nature en quantit mobilit Fin d tudes 11 3 2 3 3 fin de service national 0 0 0 0 Fin de stage 5 2 3 3 2 Quitt ou perdu un emploi en int rim 8 7 6 6 5 Quitt ou perdu un emploi dur e limit e 27 22 20 22 17 Quitt ou perdu un emploi occasionnel 1 2 2 1 2 Licenciement collectif 12 15 13 13 15 Licenciement individuel 12 19 22 21 21 D mission 9 7 7 7 8 Retraite 0 1 1 0 0 Cessation d activit 9 13 17 16 20 N a jamais travaill 4 3 2 3 2 Autre 4 4 4 4 5 TOTAL 100 100 100 100 100 Source CREDOC enqu te emploi 2002 v La perte d emploi m ne l inactivit Lorsqu elles ont perdu un emploi les personnes malades et celles se sentant limit es dans leur vie professionnelle sont moins souvent dans une recherche d emploi active En effet lorsqu elles
390. te Voil On m am ne le petit d j on m am ne ma petite piq re matinale soupir Donc r veil sept heures trente Apr s apr s d s qu elles sont reparties on se rendort un peu rires jusqu huit heures pour ma part Et soupir on petit d jeune on petit d jeune et on prend notre douche Et donc donc je me douche En g n ral je finis de me doucher sous le coup des dix heures moins le quart et apr s je m habille je me l ve et je pars en kin 23 Erving Goffman Asiles Etudes de la condition sociale des malades mentaux Paris ed de Minuit pp 81 86 48 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 Apr s si j ai un peu de temps je vais en ergo ce qui est plut t assez rare Repas Ensuite j ai soit ergo soit kin d s le d but de l apr s midi Et ma journ e de r ducation se termine vers seize heures dix sept heures Voil Apr s c est c est la bouffe On attend la bouffe Et apr s c est la f te rire Voil c est cool M F 24 ans prof Interm diaire Le patient acquiert donc de nouvelles habitudes de vie chacune d elle est sous tendue par des raisons qui tiennent compte la fois de l organisation institutionnelle et de la logique du fonctionnement corporel par exemple le petit d jeuner est pris avant l excr tion car s alimenter provoque le r flexe excr teur puis la toilette intervient apr s avoir excr ter pour nettoyer les impuret s r
391. tement Et a je pense que a fait aussi partie peut tre d vacuer oui d occulter un petit peu ce moi d avant et puis aussi cette vie d avant donc les copains en font partie Et en fait en fait il y a une continuit c est dire je le sens de plus en plus Bon faudrait peut tre qu on se revoit dans cinq ou dix ans l je serais peut tre plus formel Mais effectivement il y a une connexion Ouais il y a une connexion il y a un lien Il aura donc fallu quelques vingt ans pour que Monsieur Martin retrouve maintenant des souvenirs d enfance enfouis Depuis quelques ann es il per oit une sorte d unit int rieure Il ne me semble pas injustifi d crire qu il est un autre lui m me ni radicalement diff rent ni videmment identique ce qu il f t Une v rit int rieure unitaire pourrait on dire d passe englobe et homog n ise des exp riences pourtant diff rentes En cons quence il exprime un rapport plein et ouvert la vie Q Si vous deviez lancer un message propos de ce que c est que d tre handicap de ce que l on vit ce que l on ressent destination d autres personnes non pas un message politique mais en fonction de votre exp rience est ce qu il y a un l ment sur lequel vous souhaiteriez insister R Je dirais une formule un petit peu classique mais qui est r elle et qui est un peu bateau en m me temps C est une premi re r flexion la louche enfin un premier
392. ti re pr sente un r cit de vie L acc s la r alit connue par les personnes handicap es peut en passer par les illustrations qu elles en proposent la faveur d entretiens approfondis r alis s et qui portent sur leur exp rience nulle autre pareille En cons quence il leur faut du temps des h sitations des approximations illustr ici par l importante pagination de cette contribution pour que peu peu se d gagent des th mes que je r sume et intercale entre les propos de Monsieur Martin En pr alable cette option le lecteur voudra bien trouver quelques remarques portant sur l utilit et la richesse de la m thode globalis e sous l intitul de r cit de vie 91 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 1 LA VIE DE MONSIEUR MARTIN La sociologie se propose de rendre compte descriptions et analyses m l es des multiples agencements produits par les acteurs sociaux et r sultant de la vie collective ici comprise comme construite autour de relations entre ensembles et individus sans hi rarchie a priori entre ces deux niveaux Dans diff rents travaux portant notamment sur les agencements constituant l insertion professionnelle des personnes handicap es en France je me suis appuy sur une sociologie des acteurs collectifs dont les actions et n gociations tant au plan macro que meso sociaux construisaient la r alit d une partie de la vie collective
393. tie mais ont des pratiques signifiant des efforts pour s en d marquer Le changement d appartenance est surtout visible par le choix d tudes longues fait pas les deux filles du fr re a n Monsieur Martin l illustre aussi par ses activit s proches des services et par l option de la s ur de s inclure dans une entreprise familiale En consid rant les trois g n rations de Martin deux grands parents sept fils fille belle fille et gendre et quatre petits enfants trop jeune huit ans le fils de Monsieur Martin n est pas ici compt on constate deux options une ascension sociale de proximit en direction des classes moyennes et un maintien au sein des classes populaires Si les deux a n s n ont pas t g ographiquement mobiles les deux plus jeunes l ont t et leur statut s est am lior y 1 4 3 La famille et le handicap Monsieur Martin n h site pas voquer son accident alors qu il ne semble pas que d autres parapl giques voquent avec la m me facilit cet v nement fondateur R C est plut t mes coll gues de travail qui me parlaient de a Principalement au moment des repas c est dire les moments un peu hors travail Oui un petit peu voqu comme a c est normal C est tout fait normal Qu est ce que t as eu Quand tu l as eu Et comment tu l as eu Mais les gens c est plut t timide Moi ce qui m a toujours surpris c est marrant m me encore maintena
394. timulants clairs En accord avec Monsieur Martin et ce nom propre est un pseudonyme comme tous ceux utilis s toute r f rence pr cise lieux g ographiques noms d tablissements d entreprises de service et de personnes a disparu des extraits d entretiens utilis s Je le remercie vivement d avoir bien voulu me consacrer un peu de son temps Sa parole est profonde sa justesse et sa perspicacit sont grandes Sa grandeur d me son honn tet sur lui m me sa libert de ton ses qualit s de c ur entre autres font de lui un tre de qualit que j ai eu un tr s grand plaisir rencontrer et retrouver au long d entretiens riches d informations professionnelles et pleinement humains j esp re tre digne de sa confiance qui m honore 1 3 NOTICE BIOGRAPHIQUE Monsieur Louis Martin a 41 ans n en 1962 N dans une vall e alpine il va l cole primaire puis au coll ge Il obtient un BEP de cuisinier 1979 II exerce son m tier dans son d partement de naissance il fait d abord deux saisons puis trouve un emploi l ann e dans un h tel A 19 ans en 1981 alors qu il quittait son travail il est victime d un accident de la route les neuvi mes dixi mes et onzi mes dorsales impact au niveau du nombril ayant t cass es il devient parapl gique Il passe ensuite 2 ans et 1 2 en deux centres de r ducation de 1981 1984 Il s essaie ensuite une formation de deux
395. tionner cette question Il y a des v los pour paras mais l pour mes vieilles paules ce ne serait quand m me pas tr s raisonnable Enfin je pense pas que a serait tr s raisonnable Donc oui la voiture principalement J aurais aucun souci sur un truc lectrique L ce qui me pose soucis maintenant c est pas tellement de plier le 137 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 fauteuil et le mettre dans la voiture C est la porte coulissante qui coulisse tr s tr s mal Par contre ce qui est tr s bien c est qu il y a maintenant contrairement il y a quelques ann es il y a plein de v hicules avec des portes coulissantes l arri re c t conducteur Il y en a m me avec des portes coulissantes lectriques d origine Je pense aux Peugeot 806 Citro n Evasion toute cette gamme des quatre m me mod les Donc des portes coulissantes lectriques l arri re choses qu on peut mettre nous sur des voitures adapter sur des voitures mais a reste quand m me un peu de la bricole Contrairement quelque chose de s rie il n y a pas photo Donc je pense que d ailleurs je pr voyais fin d ann e d but 2004 de changer de v hicule En plus du fait de travailler je pourrais avoir des aides de l AGEFIPH Durant ces ann es de parapl gie et deux de ses connaissances sont pass es l acte Monsieur Martin a pens au suicide Mais ce terme de l alternative il le refuse bien qu il ait pu capter
396. tions accrue doivent tre comprises dans le cadre de l clatement du syst me de repr sentation pour les groupes minoritaires la publication du v cu contribue appara tre et se maintenir au sein de l espace public Pr fa ant un ouvrage collectif r unissant des chercheurs sp cialis s Fran ois Bloch Lain figure embl matique du secteur du handicap relevait que dans les ann es 60 et 70 les seuls interlocuteurs de la puissance publique taient les associations trente ans plus tard il se r jouissait de l apparition de sp cialistes en sciences sociales axant leurs travaux sur les personnes handicap es Il y a vingt ans les livres sur le handicap taient rares Aujourd hui dans une grande librairie lyonnaise ils occupent deux m tres lin aires Parmi eux bien s r mais ce n est pas nouveau des ouvrages biographiques qui concernent l ensemble des d ficiences sensorielles physiques mentales Le secteur du handicap comprend de tr s nombreux acteurs pensons la myriade d associations qui le constitue En leur sein mais souvent de fa on confidentielle comme entre pairs l exercice de l criture biographique a exist Mais le monde a chang Quatre exemples pour l illustrer Quand Andr Trannoy fondateur de l Association des Paralys s de France et pendant de longues ann es figure remarquable du secteur crit un r cit de souvenir son livre est publi par Mame 1983 puis repris par l
397. tous les fauteuils qui ont t p t s dans les a roports d j Moi a ne m est jamais arriv tant mieux Mais par exemple je connais plein de gens qui s est arriv en gypte ou au fin fond du monde et ben le fauteuil p t une roue p t e ou les cale pieds devant ah ben il en a perdu un bout Et l c est la gal re Donc a c est tr s instable Moi le fauteuil que j avais avant le cale pied s enlevait quand je prenais l avion j attachais les cale pieds au fauteuil pour tre s r qu ils n allaient pas s enlever parce qu ils peuvent se barrer facilement Donc j attachais vraiment le truc pour tre s r J essayais de dire aux gens faites gaffe Je disais a aux gens qui l a roport font les valises de toutes fa ons ce n est pas eux qui s occupent de a Donc a montre l importance de cet objet parce que c est un objet quand m me C est pas une uvre d art c est pas un membre Je ne sais pas comment les autres en parlent du fauteuil Oui je pense que quand m me c est un objet c est un objet On n en prend pas soin Comme quoi avec le temps si Maintenant j ai toujours un fauteuil peu pr s propre peut tre parce que je travaille maintenant en relations avec le public donc je me dois aussi un minimum de C est vrai que jusqu maintenant je n tais pas f ru du lustrage du fauteuil Mais j ai des copains par contre je pense un pote l Jean Paul par exemple son fauteuil il est
398. tout cas rarement fait tat de mes coups de blues quoi Ca c est s r par choix Oui par choix peut tre aussi parce que dans la famille on ne fonctionne pas tellement comme a on ne fonctionne pas communiquer ses sentiments etc Ca c est pas trop le genre de la maison alors forcement Et puis je pense qu il y a surtout effectivement le choix ou la volont de ne pas les emmerder avec a Parce que peut tre que bon ils ont d j t assez emmerd s avec mon histoire quand c est arriv Finalement ben c est pas la peine de leur en remettre une couche quoi Q Ce n est pas trop lourd g rer a R Je ne sais pas si la famille c est la mieux plac e pour enfin pour entendre les choses oui mais pour aider pour remonter le moral entre guillemets je sais pas On peut dire a diff remment mais pour remonter le moral ou regonfler tout a je suis pas s r que la famille soit la mieux plac e Encore que c est m me pas finalement une question de famille c est une question d individu de personnalit de caract re de personnalit quoi Je trouverais peut tre des oreilles plus attentives hors du milieu familial Des 113 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 proches des amis Des amis voire des parents d amis donc des plus g s Et puis j ai pas t duqu je sais pas si c est une question d ducation mais enfin je vois ma famille c est pas du genre a s taler un petit peu s
399. toutes les semaines de fa on r guli re Je me suis toujours situ comme un salari Dans l quipe on tait un ou deux b n voles et le reste des salari s J ai toujours fonctionn dans un esprit jamais je ne me suis dit moi je suis b n vole eux sont salari s et je pense qu eux m me jamais eux ne se sont dit nous on est salari s toi t es b n vole Sans compter que pendant deux trois ann es j tais d l gu adjoint j tais d l gu adjoint de la d l gation donc les gens me consid raient tout fait comme le d l gu adjoint Je n ai jamais je n ai jamais vraiment r fl chi a pourquoi tout ce temps Moi je trouve que dans ma vie globalement c est toujours c est toujours comment je ne sais pas si c est le destin le hasard je ne sais pas qu est ce qu il faut mettre comme mot l dessus mais c est toujours des rencontres des choses qui ont fait que j ai pris des orientations un petit peu diff rentes Q Est ce que vous avez le souvenir que vous faisiez pareil avant l accident R Je ne sais pas Ce qui a toujours t pareil de toutes fa ons c est que j ai toujours travaill sans compter J ai toujours donn le maximum de moi Je n ai jamais couru apr s le fric ou quoi que ce soit m me d j avant d ailleurs Parce que apr s coup je me suis rendu compte que j tais largement sous pay quand je me suis plant Je ne m en tais m me pas rendu compte J tais tr s jeune
400. trat de travail quarante ans Durant ces vingt et un ans il n a pourtant pas t inactif Titulaire d une rente d accident du travail il est autonome A labri du besoin il a effectu de nombreux voyages l tranger et titre b n vole s est fortement impliqu dans une importante association regroupant des personnes handicap es L obtention d une rente d accident du travail a donn Monsieur Martin une assise financi re qui a largement contribu lui laisser du temps et des moyens dont nombre de ses corr ligionnaires taient d pourvus m me s ils taient atteints d une d ficience similaire Cette p riode est termin e car il est d sormais salari d un centre d partemental d information destin aux personnes handicap es Dans l extrait ci apr s Monsieur Martin se rem more la relative aisance financi re dans laquelle il a t l utilit des voyages dans la phase r adaptative phase dont Patrick Segal parapl gique il a t d l gu interminist riel aux personnes handicap es a largement parl dans ses ouvrages et les hasards qui l ont conduit au m tier qu il exerce en 2003 3l Patrick Segal L homme qui marchait dans sa t te 1977 Le cheval de vent 1982 J en ai r v tu sais 1990 ces ouvrage sont publi s dans Le Livre de Poche 108 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 R Avec l accident du travail la rente es
401. tre intitul Stigmate et r alit p 158 et suivantes Ce dernier opus met en tout cas au jour la perspective r solument ph nom nologique qui est finalement la sienne Cela est tout d abord perceptible au travers de l aurea catena cha ne d or dans laquelle il prend la peine d ins rer lui m me sa recherche c est ce que d note la r f rence aux travaux de E Husserl A Schutz P Berger et T Luckmann pour la ph nom nologie stricto sensu et ceux de G Simmel pour la sociologie compr hensive qui n en est pas tr s loign e Sans parler de l vocation de ses contemporains qui s inscrivent dans un projet comparable G Bateson et H Garfinkel Mais c est aussi remarquable par la teneur de l expos g n ral introductif o il formule l orientation de son projet La question qui l int resse est celle de la constitution de la r alit partag e tant entendu qu on peut en rendre compte en d crivant comment les agents sociaux d finissent entre eux travers des cadres conventionnels les situations qui leur sont donn es vivre Je me propose dit il dans son introduction d isoler quelques cadres fondamentaux qui dans notre soci t nous permettent de comprendre les v nements et d autre part d analyser les vuln rabilit s particuli res de ces cadres de r f rence 1991 p 18 Pragmatique l objet de sa recherche tient donc moins dans la question de la nature de la r al
402. trois aspects le type de d ficiences son origine et son anciennet v L influence du r le attendu de chaque sexe face au travail Aucun cart n a t constat entre les femmes et les hommes sur le fait d avoir d clar un probl me de sant ou de handicap En revanche les femmes d clarent plus souvent se sentir limit es dans leur vie professionnelle que ce soit en quantit de travail en nature du travail ou en d placements entre leur domicile et le lieu de travail Ainsi 23 des femmes malades d clarent tre limit es dans leurs d placements entre domicile et travail contre 18 des hommes Les diff rences entre sexe demandent de tenir compte du du r le social de chacun des sexes notamment au travers la place accord e la situation professionnelle Les femmes d clarent plus souvent que les hommes au moins une des trois limitations lorsqu on ne s int resse qu aux actifs occup s tandis que les hommes se d clarent plus souvent limit s dans leur vie professionnelle lorsqu on tudie que les ch meurs ou les inactifs hors retrait s et tudiants Cela questionne sur le r le de la non appartenance la sph re professionnelle dans l mergence du sentiment de limitation dans le travail C est lorsqu ils sont au ch mage ou inactifs et donc qu ils se sentent et ou se sont exclus du travail que le sentiment de limitation chez les hommes est le plus fort 92 des hommes inactifs d clarent au
403. tte manipulation illustre bien les efforts que peut n cessiter le recadrage d un v nement proprement parler en termes Goffmaniens une manipulation est une fabrication qui n entra ne une modalisation que si elle est d couverte Notons aussi que la modalisation du jeu ou de la plaisanterie permettent aussi de r parer des carts de langage involontaires qui peuvent avoir des cons quences r elles incalculables On peut ainsi s apercevoir en constatant la r action de notre coll gue que la mani re dont on vient de lui faire une remarque sur son travail est plus blessante qu on ne l aurait voulu Il se peut qu on puisse alors s en tirer par un simple je te charrie M me si le doute subsiste au fond il est de bon ton que les interlocuteurs acceptent le changement de cadre c est toujours plus conomique et moins risqu que d entamer un d bat sur les intentions r elles de l auteur de l agression La parole prononc e est bien celle que l on a entendue mais sa signification change radicalement lorsque l on transforme le cadre de son nonciation Il est tout fait important de garder pr sent l esprit que d apr s E Goffman cette alt ration des cadres de perception se fait selon un sch me interpr tatif sur lequel repose la compr hension r ciproque Cela signifie tout d abord que l exercice d une modalisation est donc extr mement 25 L exp rience du handicap Cr
404. tuation extr me quand nous sommes soudain catapult s dans un ensemble de conditions de vie o nos valeurs et nos m canismes d adaptation anciens ne 17 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 fonctionnent plus et que certains d entre eux mettent m me en danger la vie qu ils taient cens s prot ger Nous sommes alors pour ainsi dire d pouill s de tout notre syst me d fensif et nous touchons le fond 1979 p 25 2 2 REMARQUES SUR LE TERRAIN L enqu te s appuie sur un terrain qui compte une quinzaine d entretiens semi directifs qui ont t men s sp cialement dans cette perspective de v rifier un certain nombre d hypoth ses concernant la mani re dont des parents ont r alis ou r alisent encore ce cadrage du handicap de leur enfant Pour se concentrer le mieux possible sur cette probl matique le travail r alis par les parents en faisant donc abstraction du point de vue de l enfant lui m me et de sa participation au processus l interrogation s est d lib r ment limit e au champ du handicap natif c est dire celui avec lequel na t et grandit l enfant et l histoire d enfants relativement jeunes moins de 15 ans Nous avons par ailleurs cherch diversifier les entretiens en fonction de la d ficience de l enfant du milieu social des parents ainsi que de leur implication dans le milieu associatif ces variables pouvant tre par hypoth s
405. tudiant l ve 16 5 5 6 3 5 4 7 2 4 retrait 4 6 9 5 11 6 11 0 12 0 autre inactif 8 8 22 8 39 8 38 0 53 4 TOTAL 100 0 100 0 100 0 100 0 100 0 Source CREDOC enqu te emploi 2002 Cette position de retrait semble m me plus large que la seule sph re professionnelle puisque parmi les 15 24 ans alors que 67 des valides sont tudiants ou l ves seulement 56 des malades et des personnes d clarant une incapacit le sont Aucun cart n est ici noter entre la population d ficiente et ayant une incapacit L encore si elles font moins souvent des tudes cela ne se traduit pas par plus de ch mage mais par plus d inactivit Cela rappelle les difficult s d insertion et de scolarisation des enfants handicap s 67 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 On notera que pour les jeunes malades et ceux d clarant une limitation dans leur vie professionnelle l cart constat dans l acc s l emploi est relativement limit avec les valides voire m me en la faveur des jeunes malades C est surtout apr s 25 ans que les carts dans l acc s l emploi entre population valide malade et avec incapacit se creusent Ainsi parmi les 25 39 ans 80 des valides sont en activit contre 70 des malades et 56 des personnes d clarant une incapacit A contrario dans cette tranche d ge 10 des valides sont inactifs 18 des jeunes malades et 29 des jeunes avec
406. u Liban il n y a aucun attachement il n y a rien rien rien Et je me dis que par contre peut tre que pour un fauteuil lectrique le rapport la relation est diff rente J avais lu une fois un truc d un myopathe qui avait un fauteuil lectrique qui avait chang de fauteuil donc qui avait un fauteuil neuf et qui avait eu plein de merdes avec plein de probl mes I avait encore son ancien fauteuil et il voquait son ancien fauteuil les qualit s de son ancien fauteuil 124 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 C tait un vieux truc d une quinzaine d ann es et le mec il avait une vraie relation avec son fauteuil Et ce que je retiens de ce truc c tait la fid lit son fauteuil c est dire que lui jamais il n avait un probl me de batterie le fauteuil il d marrait toujours bien Et donc il avait un lien particulier avec cet outil avec ce fauteuil lien que je ne pense pas qu on ait en manuel puisque c est nous qui le faisons avancer Donc voil c est un objet c est un objet qui est vital enfin vous voyez ce que je veux dire par vital Monsieur Martin tient deux discours simultan s D une part il souligne que le fauteuil n est pas une extension de lui ainsi dans le tram accepte t il que des personnes prennent appui sur cet outil sans pour autant se sentir envahi il n en va pas de m me si des importuns le touche corporellement Le territoire de son moi est prot g Mais d a
407. u au poids qu il vaut quelque chose L ducatrice C est s r il est fort et il mange bien mais il faudra faire attention justement La relation entre cette m re et les professionnels qui interviennent aupr s de son fils est faite de nombreuses op rations de recadrage sur sa compr hension ses difficult s participer la classe qui semblent fonctionner comme autant d apprentissages Le plus souvent bien entendu ce sont donc les parents eux m mes qui euph misent les troubles de leur enfant et ce titre il convient de remarquer que les notions les plus floues de difficult s ou de 29 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 probl mes sont sollicit es extr mement souvent tout comme des expressions du type il elle a du mal ou bien encore que le cas soit peu fr quent dans notre enqu te des locutions relevant du lexique politiquement correct La m re de Max que l on a rencontr par ailleurs dans son tablissement plusieurs fois pr sente son fils dans l entretien comme ayant des difficult s parler et pr cise qu il n est pas muet C est par ailleurs de cette mani re qu elle dit avoir l habitude d voquer les probl mes de son fils dans la vie courante et son voisinage et que selon elle a se passe toujours tr s bien Dans cette pr sentation de son enfant elle omet de souligner
408. u b te mais y a pas de raison d ailleurs mais c tait comme a Ceci dit j tais plut t tr s g n reux donc beaucoup en ont profit donc c tait tr s plut t tr s bien Par contre je pense qu effectivement a c est s r que a change les choses C est dire que j aurais eu un accident autre que l accident du travail avec bien sur les m mes cons quences la parapl gie Donc avec une Allocation pour adulte handicap ou une petite pension s cu ou un truc comme a je pense que l a aurait chang la donne compl tement Enfin priori Ca aurait chang la donne et je pense que la motivation pour soit une formation soit trouver un boulot elle aurait t probablement l et je pense me semble t il qu ce moment l du coup ma vie aurait probablement t diff rente Alors que l le fait d tre rentier de ne pas avoir de soucis d argent on peut se laisser vivre on peut ne pas avoir cette pr occupation cette inqui tude du lendemain quoi Par contre moi ce que j ai toujours eu besoin c est de travailler d tre actif D tre actif d tre avec d autres Bien videment parce qu vingt ans rentier c est bien Ca laisse beaucoup de gens songeurs r veurs bon ind pendamment de l aspect fauteuil roulant bien videmment Mais en fait c est pas simple Parce que c est bien d avoir un peu de fric d tre l aise Mais a fait pas tout quoi c est s r Donc oui je pense que c est diff rent par rapport
409. u niveau des bras des mains y compris arthrose ou rhumatisme Probl mes ou difficult s pulmonaires ou 1 10 1 9 respiratoires y compris asthme et bronchites chroniques D pression trouble de la personnalit 10 15 autres troubles psychiques Probl mes du syst me digestif et du foie 6 7 d ficience r nale Diab te 6 6 Autres probl mes de sant de longue dur e 8 8 7 7 y compris douleurs et asth nies Autres maladies volutives y compris 4 7 6 9 cancers non class s ailleurs scl rose en plaque sida maladie de Parkinson Affections de la peau y compris les 5 3 d figurations graves et les allergies Difficult s auditives 5 3 Difficult s d apprentissage perte des acquis 2 3 intellectuels troubles de la m moire Troubles de la parole ou du langage 1 2 pilepsie y compris crises 1 2 Source CREDOC enqu te emploi 2002 Guide de lecture 15 des personnes malades ont d clar des difficult s visuelles Pour affiner cette r flexion le tableau suivant compare selon les diff rents types de d ficiences la probabilit pour une personne de ne d clarer aucune incapacit de d clarer une limitation en quantit de travail en nature de travail ou en mobilit entre le domicile et le lieu de travail La part de personnes malades n ayant d clar aucune limitation dans leur vie professionnelle est la plus faible pour les d ficiences mentales ou psychique
410. ue pensons au couple bien intentionn dans la rue Il n est pas s r que l int gration qu il souhaite des personnes handicap es ne se heurte pas des impossibilit s chroniques Monsieur Martin nous dit avoir appris ne pas tenir compte des regards Dans cette s quence appara t pourtant quelque chose d embl matique au d but de l extrait les proches de Monsieur Martin ne voient plus le fauteuil la fin on le lui rappelle trop souvent comment trouver la juste mesure Monsieur Martin est favorablement jug par ses amis parapl giques notamment les jeunes pour lesquels il est une sorte de mod le Pour ses amis valides il est courageux il n est pas s r de partager cette analyse Ses amies soulignent sa s r nit Q Si vous essayez de vous rem morer ce que vos amis handicap s ou non disent de vous sur quoi mettent ils l accent R Ce qui m est peut tre plus facile de r pondre d ailleurs propos de mes amis handicap s Je ne sais pas pourquoi Donc je pense aux quelques amis handicap s que je peux avoir et particuli rement en tout cas les copains parapl giques Il y en a trois ou quatre v ritablement De ses amis l comme j tais para avant eux quelques ann es avant eux je pense deux particuli rement trois m me je suis un peu un mod le C est dire bon moins maintenant videmment m me plus maintenant Donc l image qu ils ont de moi 167 L exp rience du handica
411. ue wechselwirkung si l homme produit le monde dans lequel il vit autant par ce qu il en per oit que par l action qu il m ne son encontre ce monde le p trit en retour d termine ses perceptions informe sa sensibilit fixe ses priorit s Cette interaction n a enfin rien de m canique comme le laissait entendre un certain behaviorisme c est dans l esprit humain qu elle se produit L exp rience comporte en effet deux volets compl mentaires l interpr tation et l objectivation Faire l exp rience qui nous environne consiste donc l interpr ter c est dire lui donner une signification et produire un certain nombre d objectivations pens es discours ou comportements Litt ralement l exp rience v cue renvoie donc au principe de la connaissance humaine par laquelle prennent forme et sens dans le m me temps le sujet l individu et l objet le monde Le sociologue M Maffesoli parle d ailleurs cette occasion de co naissance 1987 mais c est ce que veut galement souligner le psychologue g n ticien J Piaget La connaissance ne proc de en ses sources ni d un sujet conscient de lui m me ni d objets d j constitu s qui s imposeraient lui elle r sulterait d interactions se produisant mi chemin entre deux et relevant donc des deux la fois 1979 p 12 Evoquer l exp rience pour aborder le handicap ne consiste donc pas seulement ren
412. uelques fois dans l ann e bien s r Q Est ce que dans cette situation identique cette exp rience commune m me si la survenue ne s est pas faite au m me ge mais est ce que vous diriez sur le moment avec les souvenirs que vous avez vous diriez que a vous a rapproch Est ce que a a t un terrain de lien avec lui le p re NDA Et puis maintenant comment vous percevez cette exp rience commune et ce que vous en avez fait tout les deux L C Je crois que me semble t il on n en a pas fait grand chose Bon il est d c d maintenant depuis une dizaine d ann e Ca nous a rapproch in vitablement Maintenant est ce qu on a exprim ce rapprochement Je suis pas s r Mon p re c tait quelqu un qui parlait assez peu oui qui parlait assez peu Qui a eu une vie tr s difficile qui tait globalement optimiste mine de rien je dirais C est vrai que je me le rappelle la premi re fois qu on s est vus par exemple tous les deux en fauteuil Il y a eu une fois o il est venu me voir l h pital quand j tais en r ducation donc l j tais encore pas en fauteuil Et puis surtout la premi re fois o on s est vus tous les deux en fauteuil Ne serait ce que se faire la bise tous les deux par exemple Techniquement c est plus pareil Alors c est s r que c est dur et je pense que c tait beaucoup plus dur pour lui que pour moi videment a j imagine que pour lui a a du toujours tre insupportable bien s
413. ui je la trouve comme toi mais moi a ne me fait rien physiquement a ne me fait rien Ca ne me fait pas bander Ca au d but aux copains c est dur de leur dire Ils vont penser que je suis impuissant etc On ne le dit pas d ailleurs enfin on le dit vraiment aux tr s tr s proches et encore on ne le dit pas tout de suite En m me temps on n a pas forc ment besoin ou oblig de le dire mais Donc en deuxi me point a serait effectivement a serait quand m me cet aspect l Et l peut tre que a rejoint la question de virilit videmment Alors si effectivement la virilit pour un mec c est simplement la taille de sa bite et la qualit de ses rections effectivement l dessus il y a un sacr coup qui est pris quand m me Pas sur la taille parce que a ne change pas Oui si effectivement je mets cet aspect en deuxi me point qui est difficile passer a veut dire que ma virilit en a pris un coup mais a veut dire quoi D accord ok mais alors Ca ne me rend pas suicidaire enfin bon a ne m emp che pas de vivre de vivre J ai conscience que bien s r c est peut tre de moins en moins le cas me semble t il que a a pu effectivement me bloquer dans des relations Ca c est s r et donc peut tre de passer c t d histoires de ne pas avoir os effectivement aller un peu plus loin Oui a c est certain Mais a effectivement c est un peu plus ancien maintenant Maintenant c est forc ment un
414. ui arrive avec sa voiture On voit sortir le fauteuil a c est vachement rassurant a fait vachement de bien parce que a nous permet nous de nous projeter dans ce qu on va pouvoir faire Et a fait quand m me du bien Et on est plut t tr s curieux ce niveau l Alors bon il y aurait beaucoup d velopper par rapport au corps videmment C est s rement le point le plus b ton le plus important de ce qui change dans la vie Q Qu est ce qu on pourrait dire R Qu est ce qu on pourrait dire D j qu on apprend se conna tre a c est s r On apprend des choses sur le fonctionnement de notre corps Moi par exemple forc ment quand j tais valide quand j allais pisser par exemple je ne me posais aucune question L du coup a change Il faut tre attentif sa vessie ventuellement des signes ce qui est difficile Ce qui est difficile d un point de vue mat riel en fonction de l o on est de comment a se passe Et puis ce qui psychologiquement est difficile Bien s r Donc il y a plein de fois on se pisse dessus au d but C est une catastrophe quoi C est une catastrophe Mais alors je fais une petite parenth se pour dire que finalement tout a enfin tout a dans le contexte de 141 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 l hospitalisation de la r ducation c est pas triste en fait Ce que moi je trouve un peu paradoxal ou bizarre C est qu il y
415. uil d ailleurs il faut que je lui redise que la vaisselle il faut qu elle arr te de la ranger parce que elle la met trop haut Et en m me temps elle n arr te pas de me dire elle est tr s surprise de me voir vivre enfin de me voir la maison de me voir m occuper d Antoine par exemple et tout a Elle ne comprend pas comment une personne handicap e peut faire a Alors je lui explique que c est rien du tout Je lui dis c est comme a Mais en tout cas elle je crois qu elle n a encore pas vu que j tais en fauteuil Donc elle range les trucs elle ne calcule pas Je lui ai d j dit plusieurs fois gentiment mais a ne rentre pas quoi Pour revenir sur votre question je pense qu effectivement les chos que j ai enfin la fa on dont mes amis me per oivent Ils me per oivent de fa on positive il me semble de fa on positive quoi oui C est marrant parce que c est m me tr s int ressant c est des questions que je n avais jamais calcul es Q La question que je voulais vous poser concerne Antoine votre fils Il y a s rement des enfants qui viennent la maison Comment vous voient ils Comment ses copains font avec vous dans la vie de tous les jours au gr de r flexions R Je pense que je l ai peut tre d j dit dans les entretiens pr c dents je ne sais pas Mais en tout cas autant il y a un regard dans certains cas qui peut tre difficile c est le regard ou le comportement des adultes Autant
416. uite quelque chose Tout de suite en r duc d s qu on est en fauteuil rapidement Bon on est beaucoup moins haut Je me r p te peut tre mais on est beaucoup moins haut Alors c est vrai que dans les salles de bain les glaces sont adapt es donc on voit notre gueule Par contre l o j tais en tout cas il y avait un manque important c tait des miroirs sur pied pour pouvoir se voir en entier Alors il y a a mais dans la salle de kin avec des barri res devant avec quand m me plein d autres reflets parce qu il y a plein de gens dans la salle de kin il y a plein de mat riel Donc c est quand m me pas terrible comme reflet comme image Alors est ce que c est notre image Et il y avait dans cet h pital je sais pas dans quelle mesure c est volontaire ou pas un grand miroir dans le hall mais qui tait quand m me mi hauteur Des travaux ont t faits dans le hall quelques ann es apr s parce que je l ai revu en allant rendre visite des gens Ils ont quand m me laiss le miroir enfin ils l ont mis plus haut Mais n anmoins il n y a quand m me pas une vision compl te sur pied enfin sur fauteuil Et a je trouve que c est important C est important de pouvoir se voir en entier m me si a nous fait un peu flipper de se voir tordu ou de se voir ci ou de se voir l C tait une petite parenth se sur ce petit d tail au niveau des miroirs en phase de r duc Et par ailleurs moi je pense qu un travai
417. ules quelques phrases parasites ont t retir es ce retrait n alt re en rien la continuit du propos Les nonc s des 8 La restanscription des cassettes a t r alis e par Madame Marie Lou Cartier et par Monsieur Julien L vy je les remercie pour la qualit de leur travail 98 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 questions qui apparaissent dans les extraits cit s r sultent parfois de regroupement de questions par souci de lisibilit je ne l indique pas car le sens n est pas modifi Les extraits d entretiens cit s n ont pas t r crits seuls les mots p riph riques l information centrale et traduisant une h sitation dans l expos oral euh bon ben enfin hein je sais pas un petit peu machin etc mais aussi des onomatop es type wah pfff pfou houlala mmh ont t t s de m me que des redondances un adverbe doubl de propos non significatives L option d criture ici retenue est celle d un lissage de l entretien oral pour lui conf rer la lecture une plus grande fluidit Les abr viations para pour parapl gique t tra pour t trapl gique kin r duc consult etc mots d argot ou populaires ont t maintenus En mati re d utilisation des entretiens deux usages nos yeux tout autant valides sont possibles la pr sentation in extenso des extraits ou un travail de r criture La premi re option correspond
418. ur faire part de ses sentiments etc Donc probablement que je suis un peu comme a handicap ou pas En m me temps je sais pas si j ai vraiment eu beaucoup le besoin de parler de parler Je pense que les actions c est plus efficace Enfin les actions les On se confronte des situations Vivre des choses c est plus efficace que peut tre de parler par rapport certains soucis qu on peut avoir ou des choses comme a je sais pas en fait Q Vous parliez l des proches des personnes avec qui vous discutez apr s l accident des proches des amis Ces personnes vous tiez proches avant l accident ou vous l tes devenu la faveur de l accident R Oui la faveur de l accident les gens de vraiment l accident part quelques rares copains et encore copains avec qui on est rentr s finalement assez fra chement il y a seulement quelques ann es I y a quand m me eu une grosse coupure d une quinzaine d ann es peu pr s Oui mais effectivement c est des gens connus apr s le handicap et je pense dans le cadre de la r ducation je pense au personnel soignant par exemple Je pense aux liens qui se tissent avec infirmi res aides soignantes ou kin s Il est pas rare que dans un centre de r ducation un jeune parapl gique ou t tra flirte un peu avec une infirmi re une aide soignante ou une kin ou une stagiaire kin C est assez fr quent dans les centres de r ducation Donc effectivement avec le personn
419. ur la place publique La totalit de sa vie se d roule ainsi sous les yeux et le jugement de l ensemble des soignants et des patients Il n a plus l opportunit de cloisonner son existence en diff rentes secteurs m me s il privil gie la vie nocturne pour chapper en partie cette constante intrusion dans son intimit LA PERTE DE CONTROLE SUR L EVALUATION DE SES BESOINS CORPORELS Pour le patient un autre aspect de la perte de ma trise de sa vie quotidienne s exprime dans l valuation de ses besoins corporels par les soignants Sur beaucoup d aspects le monde m dical d finit normalise rationalise le travail de gestion des besoins du patient d pendant Par exemple les kin sith rapeutes vont proc der au d sencombrement des poumons et les infirmi res vont aspirer les mucosit s par la canule Chaque t che inventori e comme acte soignant est affect e la responsabilit d un certain type de personnel qui a ses horaires de travail ses p riodes d intervention et ses cong s ses difficult s internes au service qui poss de un mat riel performant ou non une formation concernant cet acte ou non de l exp rience etc Si bien que lorsque le patient souhaite obtenir la satisfaction d un besoin quelconque il doit tout d abord en r f rer un type de personnel particulier lequel va valuer sa demande en fonction de ses connaissances et de son exp rience de son temps disponible de sa charg
420. us ne sommes pas dans le cas du syst me ferm des institutions totales notamment on est oblig de faire l hypoth se de la pluralit des univers d interaction possible Autrement dit les techniques de modalisations s excluent encore moins que les tactiques d adaptation puisqu elles sont davantage d termin es par le contexte d une interaction Elles n ont en tout cas formellement rien voir avec l engagement d une quelconque sinc rit profonde on peut m me penser que la modalisation consiste adopter un cadre qui s il procure reconnaissance symbolique r ciproque permet de faire l conomie de la subjectivit authentique Dans le cas qui nous int resse les modalisations du handicap sont les moyens de pr senter son probl me tout en gardant bonne figure et en maintenant les conventions Tout cart involontaire hors de ces chemins trac s entra ne une r paration laquelle doit participer le maladroit toute infraction volontaire une sanction Elles n en montrent donc pas moins les normes qui p sent sur la d finition et la r alit conventionnelle d une chose Trois grands registres de modalisation reviennent le plus souvent dans le discours des personnes que nous avons rencontr es Faire semblant Cette technique est longuement d crite par E Goffman et consiste en m me temps que l on voque ou fait une chose montrer que ceci n est pas la chose Elle suppose donc l adoption de
421. ussi nombre de personnes handicap es L int r t de la question du handicap pour E Goffman r side cependant aussi ailleurs que dans la seule situation des personnes atteintes d une d ficience il met au jour un principe constitutif de l ordre social toujours pr caire et m me une fonction sociale globale si l on suit bien le sociologue am ricain La n gociation entre soi et le collectif se r sout le plus souvent au d triment du premier sauf en effet accepter pleinement l id e de ne faire qu un avec la ge le que constitue la face sociale que la soci t impose chacun Dans tous les cas alors m me que la face sociale d une personne est souvent son bien le plus pr cieux et son refuge le plus plaisant ce n est qu un pr t que lui consent la soci t si elle ne s en montre pas digne elle lui sera retir e Par les attributs qui lui sont accord s et la face qu ils lui font porter tout homme devient son propre ge lier C est une contrainte sociale fondamentale mais il est vrai que chacun peut aimer sa cellule 1974 p 13 On ne saurait dire si les parents de Sylvain aiment leur cellule mais il appara t que le cadrage de la d viance de leur fils dans l autisme les soulage au propre comme au figur d avoir faire face seuls cette exp rience extr me dans le sens que B Bettelheim donne cette notion celle d un isolement radical Nous nous trouvons dans une si
422. ut fait sur la m me plan te C est dire que quand on se voyait quand on s est revus donc apr s l accident quand je suis retourn pendant un temps vivre dans ma famille avant de m installer Donc je les voyais un petit peu les copains mais je sais pas je trouve pas je sais pas J avais l impression qu on avait finalement pas grand chose se dire Je sais pas eux ils avaient des pr occupations de changer le carburateur de leur bagnole pour qu elle aille plus vite ou je sais pas Et a je comprenais plus moi a me paraissait Je sais pas je comprenais plus Ou ils parlaient de la derni re cuite qu ils avaient pris en bo te et bien qu on avait le m me ge je sais pas a me paraissait l ger Peut tre aussi que a me d rangeait je sais pas En tout cas je trouvais qu on tait plus sur la m me longueur d onde quoi voire sur la m me plan te Je sais pas mais bon donc du coup naturellement il y a une esp ce de distance qui se fait Voil Et c est vrai qu il y a quelques ann es y a trois quatre ans par hasard par rapport une soir e d anniversaire je suis tomb sur des copains que j avais aper us quand m me de temps en temps mais comme a O l on s est un petit peu retrouv s je dirais quoi retrouv s et je pense que l c est plus moi qui me fermais ou qui m loignais quoi Donc du coup on a repris des relations amicales On se voit plus r guli rement on fait des sorties des pique niques des
423. utre part il pr cise alors qu il en faisait peu de cas auparavant qu il commence d en prendre soin car cet instrument vital est garant de son autonomie et m dium des perceptions d autrui car il exerce aujourd hui une profession en contact avec du public handicap notamment Au fond Monsieur Martin a fait deux exp riences successives alors qu il a du faire face aux profanations r p t es de son moi quand d muni il tait l h pital une fois reconquise une part d autonomie conf r e par le fauteuil il ne ressent plus ensuite la m me agression quand des rapprochements physiques s op rent dans un lieu public Adolescent valide il se rappelle avoir jou avec c est dire utilis momentan ment le fauteuil de son p re Aujourd hui il ne s oppose pas au fait que chez lui des enfants valides puissent jouer avec cet instrument pas plus qu il n interdisait son fils de grimper sur son fauteuil l outil fauteuil ne constitue pas une barri re infranchissable S il y est tr s et de plus en plus attentif il n en constitue pas pour autant une extension de son moi ce serait plut t un interm diaire au statut ind fini vital mais pas humain 2 4 LA DEPENDANCE Chez Monsieur Martin l exp rience de la d pendance va du plus vers le moins tre durablement alit et m diqu en centre de r ducation est diff rent de la situation vingt ans plus tard de salari en fauteuil jouissant
424. vie diff rent Donc moi j ai ce rythme depuis l ge de vingt ans d j Donc il y a une esp ce de longueur d avance en quelque sorte Mais je ne sais pas comment le dire je ne peux pas bien le d finir le formuler en tout cas 153 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 mais le fait de mettre du temps peut faire un certain nombre de C est bizarre par exemple je mets le fauteuil dans la voiture Ca prend du temps un petit peu de temps a demande des efforts Et il m arrive des fois d y prendre un vrai plaisir Un plaisir de je ne sais pas d harmonie dans les gestes dans les mouvements Je ne sais pas Et du coup je pense que par la m me apr s au quotidien pour d autres choses qui ne sont pas en lien avec le handicap il va y avoir une tendance peut tre prendre du temps pour faire les choses Je crois aussi je ne sais pas comment dire je ne pense pas que ce soit li au handicap a n a rien voir le fait d tre tr s pr sent quand je fais quelque chose tr s pr sent c r bralement Mais par contre moi j ai des soucis avec le temps c est dire que je ne sais pas si la vie elle passe doucement ou elle passe vite C est dire que autant des fois j ai l impression de a fait d j cinq ans a fait d j dix ans Et donc le temps passe fond Et puis des fois j ai exactement le point de vue contraire Donc c est la vie est longue Il y a le temps de le faire Et d
425. virilit C est dire que peut tre d un c t il y a forc ment des choses qui peut tre m emmerdent aujourd hui qui font en partie peut tre ce que je suis maintenant pas forc ment d un point de vue positif d ailleurs Elles sont li es cette question l probablement Seulement moi je ne vois pas vraiment ce que a peut tre C est vrai que depuis peut tre depuis une dizaine d ann es quand une femme m aborde ce n est pas tous les matins non plus allez on va dire que je me sens l aise Ce qui n tait pas le cas bien s r on va dire pendant la premi re d cennie Parce que toujours c est comment je vais lui expliquer Alors qu avec le temps l exp rience la pratique on se rend compte que finalement il n y a pas tellement expliquer Ca peut tre aussi comme a Donc du coup quand je me fait aborder quand j ai l occasion je me sens serein tranquille Alors qu avant ce n tait vraiment pas le cas donc oui il y a une dizaine d ann es Les ann es je m en fous un peu mais bien s r il faut du temps beaucoup de temps Et a reste de toutes fa ons De tous les effets secondaires enfin pas les effets secondaires de toutes les cons quences d une parapl gie la motricit la sensibilit les probl mes d escarres etc bien videmment cet aspect reste le plus sensible le plus d licat Et puis s il y a une chose qui est v ritablement intol rable dans cette histoire c est la question m
426. x en ces deux occasions ses grosses mains d artisan ouvrier crois es entre ses genoux le front baiss un peu absent lui aussi L homme coquille par excellence Il est tr s difficile de restituer la trace des v nements associ s la d couverte du handicap et d en d m ler ses effets chez d autres parents m me s ils semblent pour la plupart s tre remis au moins apparemment du d sarroi initial Deux femmes les m res de Jeanne et d Aline l voquent toutefois sans d tour en soulignant d ailleurs que le p re de l enfant est parti peu de temps apr s la naissance et Cette expression renvoie une des tymologie possible quoique peu vraisemblable selon G Agamben de l expression musulman en usage dans les camps Muschelmann ou homme coquillage qui se replie sur lui m me P L vi fait galement allusion aux hommes coquilles 22 L exp rience du handicap Cr doc ouvrage collectif octobre 2003 la d couverte des premiers probl mes La rupture est en effet une des modalit s possibles de sortie de la stupeur comme en t moigne galement le fait que Carole et Jean ont t abandonn s par leurs parents S il n est pas certain que la premi re l ait t cause de son handicap l enfant est n e au Sri Lanka et ses parents adoptifs ne savent rien de ceux qui l ont mise au monde la m re adoptive du second qu elle a adopt la pouponni re d un gr
427. ze treize ans je trouvais a marrant C tait spectaculaire un petit peu quoi Je connaissais bien le parc parce qu il y avait un grand parc dans l tablissement Et c est vrai que quand moi j y suis all en tant que pensionnaire c est vrai que je suis rest trois mois deux mois et demi alit donc Surtout que je suis arriv en octobre donc c tait l automne donc on sortait pas m me avec le lit quoi Alors on allait des fois sur la terrasse mais simplement l je reconnaissais d j le parc Il y avait des magnifiques c dres j adore les c dres et ils taient encore l bien s r Et ce qui tait plus troublant encore c tait le personnel qui avait connu mon p re qui tait encore l Je me rappelle une fois une aide soignante est venue je me rappelle une grande black Elle savait qu il y avait des nouveaux arriv s dans le service Bon quand ils font la rel ve ils savent Et puis je voyais bien que dans la chambre de quatre elle cherchait quelqu un pr cis ment pis alors elle a dit Martin c est toi Je lui dis ben ouais Moi je connaissais pas Elle dit oh la la mais t es le fils d Arturo Je lui dit ouais et donc elle connaissais tr s tr s bien mon p re Et a c tait tr s C tait touchant quoi C tait touchant D ailleurs c tait touchant parce qu elle avait les larmes aux yeux quoi Moi a me touchait pas par rapport mon p re ou par rapport elle ou par rapport moi Ca me laissait finalement in

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