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Untitled - Christine Marcandier

1. est maladroit sinon rustre Ce faisant il oblige la dame expliciter l vidence en glosant ses propres gestes r p tition de s appuyer avec une distinction dans les mots pr ciosit du tour il vient de me prendre propre conforter Penfant du peuple qu est Jacob dans l id e qu elle est bien une noble dame Madame Le passage au quatri me paragraphe de la sc ne aux r flexions de Jacob donne la cl de sa sollicite mod r e s il n a pris au s rieux l appel au secours de l inconnue c est qu un simple regard l a convaincu que sa vie n tait pas en danger S il pouse en pattie les pr jug s misogynes de son temps sur les pr tendus malaises f minins Jacob juge surtout en connaisseur Le d tail d shumanisant auquel il proc de mentalement je vis une face ronde il s agissait d une quarantaine d id es trahit ses origines terriennes sa capacit de paysan non encore parvenu jauger la sant d un animal et sa valeur marchande Sans oublier Pespoir caress de partager ces repas gr ce auxquels la dame a Pair d tre succulemment nourrie La r currence dans le 1 Superbes monuments que votre vanit Est inutile pouf la gloire Des grands H ros dont la m moire M rite immortalit Que sert il que Paris au bord de son canal Expose de nos rois ce grand original Qui sut si bien r gner qui sut si bien combattre On ne pa
2. ce passage indique une autre parent c est Pall gresse elle m me qui est contenue dans Alicante la syllabe al All gresse de la lumi re du soleil levant all gresse de No l et des Rameaux l Orient lui m me et son of D ailleurs le I d Alicante n est pas seulement celui de ski et lumi re mais celui de J rusalem et de Bethl em Et ces deux noms continuons d couter s ach vent de fa on rare par le m me m que pa wes Est il imprudent d entendre encore dans ce nom d Alicante la fois Ali et cante Puis il faut admettre le pouvoir illimit d affirmation qui est le propre de la po sie et quillustre entre toutes la premi re phrase du livre Oui Orient se trouve dans Alicante Il suffit de P crire Dans cette g ographie impossible et vraie l essentiel s accomplit 165 Litt rature et saveur Ajoutons que la voyelle A six fois r p t e en deux lignes Alicante Orient enfance instant pr cieusement et criante dans d autres pages du livre est celle de Jean A un d tour de route La pens e continue de suivre les images celles qui viennent de Penfance la cr che le b uf et l ne Genet passe de la naissance du Christ la sienne propre la premi re substitue la seconde L une comme l autre fabuleuses c est dire vraies de la v rit absolue des fables Le mot nativit ne s utilise que pour le Christ la Vierge
3. crit qui est de plus longue garde que la parole vive les v nements singuliers que le monde nous offre en abondance x Grace au Ciel si je puis dire s exclama M d Urf nous voici derechef sur le sujet de la singularit S agissant d v nements vous me conc derez je pense qu il s agit l de la plus simple des fa ons d crire et que P loquence n y est au fond que fort peu int ress e le narr ne demande ni disposition ni ornements ce qui est arriv est arriv Il suffit d tre fid le x Bien volontiers r pondit son h te d autant que je me flatte d opposer la simple fid lit de la chronique aux complexit s extravagantes des romans pensant que Dieu avait assez mis en sa cr ation de diversit pour que l on ne se m le point d y ajouter des pisodes qui forcent la cr ance de ceux de celles plut t si Pon dit le vrai que la passion de la lecture conduit avaler de longues et lubriques couleuvres Le serpent mest pas aussi pr sent dans la bergerie que l on veut bien le dire et je puis soutenir je pense qu il est du tout absent de mes prairies r pondit en riant l auteur de PAszr e cependant n y a t il pas quelque m rite a filer une longue intrigue en faisant ing nieusement suivre les actions des divers personnages et les r flexions qu ils font sur ce quoi ils sont sujets Et pour vous dire le fond de ma pens e n y a t il plus de le on voir et
4. m taphysique se trouve soigneusement encadr e D une part la premi re justification donn e dans lEssai l examen pr liminaire des plaisirs de l ordre s appuie sur les conditions empiriques d appr hension d un ouvrage qui compte tenu des limites de Pesprit humain ne peut envelopper une trop grande complexit et doit tre lisible dans un ouvrage o il n y a point d ordre Pame sent chaque instant troubler celui qu elle y veut mettre Pame ne retient rien ne pr voit rien elle est humili e par la confusion de ses id es par l inanit qui lui reste L importance esth tique de l ordre ne tient ni la subordination des beaut s sensibles un ordre id al ni la vocation suprasensible de l me au vrai mais ce qu il lui permet de d passer Vactualit de impression plaisante ou d plaisante pour lint resser v ritablement une exp rience plus d velopp e D autre part l ordre doit tre balanc par la vari t mais une fois encore ce sont les raisons par lesquelles Montesquieu justifie cette dimension qui marquent son originalit et le recentrement qu il op re sur les conditions du plaisir d une me incarn e Il ne s agit pas comme c est le cas dans les grandes m taphysiques de Pordre chez Malebranche ou chez Leibniz et d une fa on moins pr cise chez le P Andr de souligner la productivit de Pordre qui se signalerait par l
5. Cependant il ne serait pas judicieux de lever l ambigu t de ce malaise il constitue essence m me de la tension dramatique mise en place et signe un cart fondamental de Musset dans son rapport Varchi ou George Sand Lorsque Varchi relate l pisode il conclut que Lorenzo se montrait fort pleutre au point de ne vouloir ni porter ni manier les armes ni m me en entendre patler George Sand quant elle traite cet vanouissement sans ambigu t mais l interpr te l inverse de Varchi Lorenzo attaqu par Valori prend une p e mais signe son jeu en apart Qu on me donne une p e A part Imprudent J ai failli me trahir Il prend l p e avec embarras et affecte d h siter part Jouons le r le Il se laisse tomber Musset m nage un suspens du sens essentiel l quivocit de son drame Il faut par ailleurs noter que cet acte divise les spectateurs de la sc ne et illustre le caract re profond ment nigmatique de Lorenzo pour les autres personnages du drame Valori pauvre jeune homme et Alexandre qui ne demandait qu P tre sont convaincus Sire Maurice laisse exploser sa col re double poltron fils de catin et le cardinal r p tant comme une litanie que tout cela est bien fort prend conscience du danger politique que pr sente Lorenzo sur la sc ne florentine et souligne le soup on n cessaire MISE EN ABYME DU DRAME Cette
6. On comprend que Montesquieu nous convie v rifier tous les matins en ouvrant notre fen tre que le climat reste temp r sur notre cap avanc Sinon nous serions contraints d enfermer et d entasser nos piquantes compagnes reines des soci t s monarchiques Quelle angoisse Quand on a d j tant de peine faibles d biteurs avec le harem des id es Que de savants ouvrages ont t consacr s aux fa ons de lire les textes d en effacer l auteur ou de le deviner en filigrane de saisir le mouvement qui les porte de les r f rer aux forces qui les animent de les inscrire dans des ensembles qui leur donnent forme d en rep rer les centres ou de les d centrer voire de les soumettre aux n cessit s imp rieuses la loi d airain du d ploiement de l Esprit Absolu On peut aussi les prendre pour ce qu ils sont des tissages dans le dessein d en rep rer les plis 430 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Jean Goldzink fait observer les plis Dans un autre registre m taphorique il reconstitue la g ologie ou discerne des reliefs des lignes de consistance ou des perspectives insoup onnables Il ne s agit pas pour lui de sauver la coh rence du texte mais d en examiner la condition de possibilit MEMOIRES DE M PATRU Par Max VERNET Queen s University Kingston Canada M moires de M Patru sur le voyage que jeune tudiant il fit en Italie extrait Le hu
7. Puisqu on parle tant et si bien du h tre de nos jours ne serait il pas temps chers coll gues litt raires et th treux de faire un geste en faveur des passions arrach es l ombre des murs en faveur des cr atures surgies de la coulisse et que Vincurie des hommes de th tre condamne depuis si longtemps la psychologie Alors alors oui l explication de texte retrouverait un sens un sens pratique au lieu de n tre qu un exercice Un exercice d vot et non dramaturgique 2 Il oublie ou occulte au sens th tral de lumi re refus e la coh rence des enjeux historiques philosophiques et moraux et en cela rompt avec la lecture Principalement celle des Lumi res hant es par la profondeur de ce comique heurt es par cette mystique express ment dat e de la transparence envieuses de ce Moi Dieu jou par un seul Juste qui foudroie et condamne Il interdit d y voir l exc s la v h mence la radicalit figur es par un corps et une voix sur la sc ne du th tre Or si Pon doit donner quelque cr dit au r le du critique litt raire ce qu on peut mettre en doute on s attachera ce qu il transmette celui qui le lit et qui ne peut qu exiger une efficacit de cette lecture une s rie de rapports que le praticien de th tre et l l ve lecteur n op rent pas 416 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink n cessairement Le critique exprimera ses doutes s il en a et
8. car ils n avaient pas d autres enfants Chr tien de Troyes Le Chevalier au Lion Edition et traduction de David F Hult BN fi 1433 Paris Livre de Poche Lettres Gothiques 1994 p 478 480 v 5343 5369 Litt rature et saveur Lire un roman Le Chevalier an Lion roman que l on d signe souvent du nom de son h ros Yvain est la derni re ceuvre achev e compos e sans doute vers 1177 1181 du Champenois Chr tien de Troyes L extrait que nous tudions se situe la fin du roman qui comporte 6808 vers Il s agit de Pultime aventure du h ros celle qui a lieu au ch teau de la Pire Aventure et qui consacrera d finitivement la valeur du chevalier L pisode tr s long puisqu il s tend des vers 5103 5805 a suscit un tr s grand nombre d tudes du fait notamment de Patelier de tisseuses qu il d crit avant notre passage En effet Yvain accompagn de son lion et d une demoiselle qui il a promis son secours arrive dans un chastel une ville forte et se fait insulter par la population qui cherche en fait comme il Papprend ensuite le dissuader de poursuivre sa route Pers v rant dans son entreprise il d couvre alors dans un enclos trois cents jeunes filles occup es tisser la soie dans des conditions pouvantables Il les interroge et le texte offre alors un tr s tonnant r quisitoire sur la mis re des ouvri res exploit es Ces jeunes filles constituent en fa
9. la th orie du P Andr affirme son originalit et Ch J Beyer on Pa vu y trouvait la raison d un int r t possible de Montesquieu pour PEssai sur le beau Concr tement le beau naturel d signe le monde des formes visibles dans ce qu il poss de tout la fois de plus harmonieux et de plus vari Ainsi se trouve t il tendu entre deux dimensions selon que l on consid re son fondement intelligible Pordre ou ses conditions de manifestation pour un sujet sensible la vari t D un c t les beaut s naturelles imitent le beau essentiel puisqu elles sont gouvern es par des rapports ordre C est ainsi que Malebranche choisit l exemple des intervalles musicaux lorsqu il affirme que les beaut s sensibles trouvent leur raison dans l ordre qui les p n tre et qui repose sur des rapports de grandeur et non de perfection L ordre et la v rit se rencontrent m me dans les beaut s sensibles quoiqu il soit extr mement difficile l homme de l y d couvrir Car ces sortes de beaut s ne sont que des proportions c est dire des v rit s ordonn es ou des rapports justes et r gl s Par exemple une voix est belle lorsque les vibrations ou les secousses que cette voix produit dans lair sont commensurables entre elles Je souhaite signaler au passage sans qu il me soit possible de d velopper ici ce point qui m int resse pas la lecture de PEssai sur le gout que de telles descriptions p
10. tu des premiers paragraphes moins que celui ci ne reparaisse lui aussi pluralis dans le vous qui formule une objection retorse au paragraphe cinq Quoique pr sent dans une incise me dites vous qui Penserre encore dans le discours du je ce vous formule une objection qui lui est clairement attribu e Mais la r futation du je occupe beaucoup plus de terrain et paradoxalement Pinscription explicite d un discours de ladversaire nettement distinct de celui du je On fait une objection quelques th ologiens disent dans les deux derniers paragraphes s accompagne du flou impersonnel du on comme sujet ou de Pind fini quelques qui jette le soup on sur des prises de position qui devraient tre unanimes Inversement le je se d finit de plus en plus fermement face des objections qui se sont d tach es de lui et son cri de triomphe final adress directement Dieu par dessus la t te des sp cialistes officiels que sont les th ologiens prend la forme du discours direct du personnage d une esp ce d apologue Ce n est pas au terme de quelque d duction lin aire qu est ap parue cette d finition de la vertu elle s est impos e d entr e de 384 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink jeu comme une vidence v cue par tout homme vivant en soci t Tout est dit d s le premier paragraphe et la d monstration consiste d velop
11. une reprise une rel ve de la grandeur nergique et arm e des hommes de la Renaissance Cependant ce dernier lien n est il pas de l ordre de la com die que les modernes se jouent S agirait il alors pour Aragon d introduire comme en contrebande une nuance voire une dissonance dans son propre espoir communiste en se masquant derri re ce personnage dont nous avons not combien il lui est proche Apr s tout dans cette page intervient le mot d appareil le contexte et Littr lui conf rent le sens premier de disposition de ce qui a grandeur ou pompe mais le terme a le m rite aussi de s accorder au motif de l architecture sugg rant que Parm e fonctionne comme la charpente pompeuse de la construction sociale cependant pour un homme qui crit a la fin des ann es trente il peut aussi viser par connotation l appareil du Parti ou du pouvoir sovi tique qui n aiment gu re l ind pendance De plus que penser de cette attaque par le biais de la pens e de Mercadier contre la pens e moutonni re des hommes Voire du lien phonique qui se tisse entre rouge et routine Et si c tait de son propre individualisme qu Aragon laissait entrevoir le secret L unique choix passerait il alors entre l esclavage collectiviste d un c t et de l autre le m pris comme r gle des soci t s aristocratiques ou capitalistes fascistes ou nazies Malraux en a parl en 1935
12. 422 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink artificieux et la s duction trompeuse des correspondances Ce qu il y a gagner de cette lecture c est Pacc s la r gle de construction d une pens e aussi bien les modalit s de sa formation que la d finition de ces points d appui les plus fermes Ce n est pas pr cis ment la contradiction g n rale entre science et philosophie dans l uvre de Montesquieu qui int resse Goldzink ni m me puisqu il s en moque la confrontation entre le litt raire et le philosophique Il s agit plut t de Popposition entre Paffirmation d finitive d un droit naturel lois d quit lois naturelles lois morales auquel acc de la raison par ses seules lumi res Burlamaqui et bien d autres avant lui et la prise en compte exclusive des r alit s sociales positives diff rentes avec les principes qui les r gissent Contradiction du devoir tre et de P tre de la valeur et du fait Quitte historiciser la contradiction en affectant la modestie du litt raire devant la froide et impitoyable rigueur du philosophe Pami Jean s exclame Que les Lettres persanes juxtaposent faute de savoir encore les articuler r flexion normative a vis e universelle et mondes sociaux incompatibles passe encore c est un roman Mais le trait Mais le grand uvre Tel d sordre serait indigne de ce monument o se sont install s les philosophe
13. En apparence banale ou d une vidence pleurer cette premi re remarque est d terminante parce qu elle suit le lever de rideau et permet de placer l analyse sur la sc ne Or l explication constate une conduite inhabituelle malade un obstacle la marche tranquille de la sc ne d exposition Elle indique qu un complexe corporel d range la sc ne De l tr s vite comme en profondeur on peut alors trancher cette premi re sc ne du Misanthrope Ce qui s impose d embl e c est un corps un corps qui d range suscite Vinqui tude mais provoque aussi la sollicitude D entr e de jeu on n insistera pas sur le ciselage des formules en trois passes s ches la critique dramaturgique la critique litt raire et la critique morale et philosophique juxtapos es sont d j en action Rousseau est imm diatement convoqu dans lurgence de la p riode et pourra triomphalement revenir ponctuellement au fil du texte ainsi qu en conclusion QUESTIONS ET COHERENCE On peut sans doute tenir compte du lecteur l ve mimer ses uestions les questions qu on lui pose et qu il doit donc se poser q q q P q P 410 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink lui souffler les mots et les interrogations qui lui permettront de chercher les r ponses ou plut t de suivre le fil de celui qui explique Et cela derri re l paule du spectateur des personnages de Moli re lui m me le tout ord
14. G THE LES SOUFFRANCES DU JEUNEWERTHER Par Bernard FRANCO Universit de Paris IV7 Pourquoi me r veiller 6 souffle du printemps Ta voix caressante me dit Je viens charg de la ros e du del Mais le temps est proche o je vais me fl trir et proche est la temp te qui va me d pouiller de mes feuilles Demain viendra le voyageur il reviendra lui qui me vit dans ma beaut son regard me cherchera dans les champs d alentour et ne me trouvera pas Toute la puissance de ces paroles s abatfit sur le malheureux Dans un complet d sespoir il se jeta aux genoux de Lotte lui saisit les mains les pressa sur ses yeux contre son front et elle crut sentir passer dans son me un pressentiment du terrible projet qu il avait form Dans le trouble de ses sens elle lui pressa les mains les pressa contre sa poitrine se pencha vers lui avec un lan de compassion et leurs joues brilantes se tonch rent Le monde pour eux s an antit I l entoura de ses bras la pressa contre sa poitrine et couvrit ses l vres tremblantes et balbutiantes de baisers furieux Werther s oria t elle d une voix etouffee en se d tournant de lu Werther et d une main faible elle carta sa poitrine de la sienne Werther s cria telle et le ton ferme de sa voix r v lait le sentiment le plus noble Il ne r sista pas la laissa s chapper de ses bras et se jeta ses Pieds comme un insens Elle se dressa et dans le trouble le plus
15. Mais attendez Il regarde sa montre J ai encore une bonne heure vous donner J irai vite et cela nous suffira Nous sommes seuls Vous n tes pas une b gueule Litt rature et saveur Vous nimaginerez pas que je veuille manquer au respect que le vous dois et quel que soit le Jugement que vous portiex de mes id es j esp re de mon c t que vous n en conclurez rien contre l honn tet de mes m urs MADEMOISELLE DE LESPINASSE Tr s assur ment mais votre d but me chiffonne BORDEU En cas changeons de propos MADEMOISELLE DE LESPINASSE Non non allez votre train Un de vos amis qui nous cherchait des poux moi et a mes deux grandes s urs donnait un sylphe la cadette un grand Ange d annonciation l a n e et a moi un disciple de Diog ne I nous connaissait bien toutes trois Cependant docteur de la gaze un peu de gaze BORDEU Cela va sans dire autant que le sujet et mon tat en comportent MADEMOISELLE DE LESPINASSE Cela ne vous mettra pas en frais Mais voil votre caf prenez votre cafe Diderot Le R ve de PAlembert pit du troisi me et dernier entretien Paris GF Flammarion dition de Colas Duflo p 169 171 112 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Le s rieux libertin Borden Ce n est pas moi c est ou la nature ou la soci t Fcoutez mademoiselle je ne men laisse point imposer par des mots et je m explique d autant plus libremen
16. cellule id elle au sens de Jean Deprun du discours picurien issue du livre III du De Rerum Natura trouvera son expression po tique la plus intense A la jouissance morbide d Agrippine savourant par avance ce que sera la mort cruelle de S janus v 1538 1558 S janus r pondra par une paraphrase clatante de Lucr ce Neutralisation de toute crainte superstitieuse de la mort par la mise en miroir du temps infini qui pr c de la naissance et de celui qui suivra la vie v 1560 1563 orchestration baroque d une autre grande th matique lucr tienne tant toute r alit aux fantasmes nocifs que les hommes associent 4 la mort v 1565 1578 Par cette revendication ostentatoire de la doctrine picurienne ressaisie en Pun de ses points les plus ouvertement irreligieux S janus pr tendra rivaliser sur sc ne avec les mod les les plus sublimes de lh ro sme moral avec les Catons les plus in branlables v 1579 UN EPICURISME DEVOYE D PLACEMENTS DE QUELQUES PHILOSOPHEMES LUCRETIENS SUR LA SCENE DE LA POLITIQUE BAROQUE S janus h ros picurien Mais en quel sens L picurisme est assur ment pr gnant au sein de ce discours libertin provocateur et pourtant ejfet qui en r sultera sera bien peu picurien du fait de certains d placements et de certaines perversions de la morale du Jardin qu un philosophe picurien ne pourrait en aucun cas reconna tre pour siens D plac s les l ments picur
17. en faire clairement le support du Texte Dans une mise en abyme saisissante Edmond de Goncourt note 4 mars 1888 que Burty vient de confier C ard Je suis en train de lire le Journal des Goncourt dont il m a envoy un exemplaire sur papier du Japon et sur ce beau papier lisse c est une jouissance pour moi comme si je lisais sur des cuisses de femme Voil expliqu e l nigme des collectionneurs qui s arrachent avidement en salles des ventes les exemplaires Hors commerce sur Japon Burty tait comme les Goncourt l un des propagateurs en France des japonaiseries Sa r flexion prouve assez qu il n est point de mode aussi artiste se veuille t elle qui ne soit l origine troitement rotis e Mais l anecdote la plus curieuse du Journal des deux fr res est expos e bien des ann es auparavant Jules et Edmond font la connaissance 7 avril 1862 d un bibliophile rotomane anglais Henkey ou Hankey plus justement I ne vous regarde pas il regarde ses ongles et comme nous regardons un de Sade J attends une peau une pean de jeune fille qu un de mes amis dit m avoir On la tanne Si vous voulez voir ma peau Il ma propos de la voir enlever devant moi Six mots pour la tanner Mais il faut deux femmes c est entre les cuisses et alors vous comprenez il en faut deux Mais cest d sagr able il faudrait enlever la peau sur une jeune fille vivante J ai mon
18. homme mais elle en d place le terrain Elle arrache en effet la notion de substance au contexte scolastique dans lequel elle tait d abord apparue l accident ne peut pas tre plus noble que la substance pour la prendre dans son sens litt ral la swb stance c est ce qui sous tient sub stare offre une stabilit premi re in branlable Ainsi entendu le mot r sonne comme un d ni scandaleux de l exp rience quelle stabilit pr tend on trouver en l homme Bossuet s empare du scandale et le met en sc ne par un r cit R cit clair de la vie humaine minimal r duit ses trois moments essentiels un d but un milieu une fin J entre dans la vie pour en sortir bient t je viens me montrer comme les autres apr s il faudra dispara tre Le pr sent de narration et la parataxe qui distribue les s quences selon une cadence mineure 11 9 2 7 mim tique de l escamotage final produit un effet d vidence qui fait oublier le pos Pourtant sa formulation m me est import e Bossuet la tire d un de ses tout premiers textes la M ditation sur la bri vet de la vie crit alors qu il venait d tre nomm sous diacre de Langres Texte de jeune homme au seuil d un engagement d cisif son titre m me t moignait de l imbrication encore troite de la spiritualit et de la culture scolaire le terme de m ditation signalait ancrage dans la tradition chr tienne tandis que a bri vet de la vie renvoy
19. larticulation du droit naturel avec les droits naturels La pens e n 1928 voque lopposition des premiers temps marqu s par une parfaite galit et une union aussi douce que naturelle entre les sexes et la subordination des femmes aux hommes comme cons quence directe des formes primitives de despotisme et sa g n ralisation par imitation des princes Ces premi res formes de vie sociale s opposent cette esp ce d galit entre les sexes qui r gne en Europe temp r e mais elle se plient aux n cessit s naturelles de la sauvegarde de Pordre social anticipation de Burke Comment se retrouver alors dans cette confusion o s arr te la Nature ou commence lPHistoire et la soci t Qu est ce qui de la Nature demeure et sous quelle forme dans l Histoire survit elle Le Livre XVI convoqu par Goldzink s intitule Comment les lois de l esclavage domestique ont du rapport avec la nature du climat Le statut des sexes est fonction du climat d pendance et polygamie 1 L Int grale Seuil p 1046 2 Echo de La Bo tie ce sont toujours quatre ou cinq qui soutiennent le tyran cing ou six ont eu l oreille du tyran Ces six en ont sous eux six cents qu ils dressent qu ils corrompent aussi comme ils ont corrompu le tyran Grande est la s rie de ceux qui viennent apr s ceux l Et qui voudra en suivre la trace verra que non pas six mille mais cent
20. le rapport des plantes aux l ments la terre l eau la lumi re le rapport des plantes entre elles et des plantes aux animaux il s int resse dans cette partie aux Harmonies humaines des plantes Essayons ici de lire enfin ce texte que tout le monde conna t sans lavoir lu Bernardin de Saint Pierre affirme d embl e la dimension conjecturale de Vinterpr tation de la nature qu il propose Il ne s agit pas simplement d une pose ou d une pr caution rh torique comme on en trouve beaucoup dans les textes du dix huiti me si cle qui s engagent dans une philosophie de la nature mais d une position nonc e d s l tude I et constamment r p t e ses id es ses th ories et m mes ses observations de la nature sont susceptibles d errer D abord parce qu il assure ouvrir une voie nouvelle dans laquelle il ne peut donner que des indications des pistes pour des recherches futures Il se pr sente comme un ignorant qui collecte les premiers mat riaux pour une histoire g n rale de la nature laquelle n est pas encore crite ni notre port e de l le choix de pr senter une succession d des en lieu et place de ce trait g n ral et inaccessible Ensuite parce que la revendication m me de cette ignorance et donc de la possibilit d errer se fait sur le fond d une critique constante de la science dominante comprise comme trop s re d elle m me faiseuse de syst mes absolus qui ne pr sente
21. opina M de Belley Et n est il pas derechef vrai reprit M d Urf que pour qui verrait c te c te un tel homme p n tr de cette foi parfaite et le courtisan dont vous parliez tant t qui tudie son visage et son maintien selon les nouvelles le ons de nos Italiens il ne saurait faire de diff rence et ne pourrait leur qui tude juger de ce qu ils pensent Concedo dit M de Belley mais les hommes pour la plupart et les femmes surtout sont de nature si passionn e qu il est merveille si quelque pli du visage ou geste de la main ne suit les mouvements de l me Ainsi jouons nous notre vie sur un souris ou sur un sourcil Et javais tant de passion de conna tre celui qui est mon guide absolu pour savoir puisque cette m me perfection dans la foi lui interdit de parler jamais de lui m me si cette douceur et cette qui tude taient ce qu il montrait au si cle en r servant pour son priv et pour son Dieu un seul m me de ces mouvements dont nul n est en g n ral exempt que je me r solus Partifice que je vous ai dit afin de guider jusqu son terme le plus intime limitation que je veux de faire de lui et faire de lui le plus int rieur de moi Deus interior intimo meo disait Saint Augustin Mais possible ajouta t il en souriant encore demi Leonide me pardonnera t elle qui passe tout un livre l oreille la fente d un ais pour surprendre les secrets d une conversation de de
22. passait sa port e le jeune homme mais qu il a fallu ce derniers quelques instants pour en d coder le sens A ces mots que j entendis Un mot sur le cheval de bronze On pourrait tre tent de voir dans cette d signation en contre plong e de la statue d Henri IV un reste de rusticit campagnarde chez notre h ros Le passionnant Dictionnaire historique de la ville de Paris d Hurtaud et Magny 1779 invaliderait plut t cette lecture 1 Jean GOLDZINK Histoire de la Litt rature Fran aise XVIIe si cle Paris Bordas 1988 p 119 238 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Avant que de finir cet article PLACE D HENRI IV on remarquera que quoique la statue d Henri IV soit parfaitement belle et que le figure du cheval ait de grands d fauts cependant un usage ridicule fait qu en parlant de ce monument on dit toujours le cheval de bronze sans dire un seul mot de la statue du Grand Henn Et les auteurs de citer une pigramme compos e ce sujet en forme de r flexion d sabus e sur la vanit des monuments dress s a la m moire des hommes Rapport au point de vue du personnage l expression t moigne de la rapidit de son acclimatation sociolinguistique a la capitale Jacob ne maitrise en revanche pas encore les codes de la galanterie R pondre au Ah je meurs de Pinconnue par une question ing nue Est ce que vous vous trouvez mal madame
23. qu il aime ce qu il ne devrait pouvoir aimer On pourrait encore lite ici la d finition d une me d une perversion ou d une psych la repr sentation d un monde galant la figuration d un rapport de libert individuelle et de contraintes sociales et rien de tout cela ne serait faux ou sans int r t Mais ce que l explication imprime telle qu elle est ici pratiqu e par le Prince p dagogue c est avant le 418 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink d bordement herm neutique le souci du texte de th tre de son effectuation sur le lieu de la sc ne C est partir de ce souci que certains joueront que d autres produiront une mise en sc ne et que d autres poursuivront un travail critique Et comme on le sait si le premier pas co te et s il peut para tre trivial il est infiniment n cessaire R SUM Si Le Prince p dagogue se propose l tude dramaturgique d un texte au travers d une explication pr cise et d une paraphrase clairante en s effor ant de pr ter plus d attention au texte de la pi ce qu aux commentaires des commentaires et s il affronte parfois les commentaires des commentaires pour revenir au texte c est pour tenter de privil gier comme le recommande Diderot une critique des beaut s et s interroger sur le malaise qu il croit d celer dans la tradition critique l gard du th tre Ainsi sa pratique d explication et ses
24. site Maurice Silence sire Maurice pesez vos paroles c est moi qui vous le dis maintenant pas de ces mots l devant moi 269 Litt rature et saveur jaime Lorenzo moi et par la mort de Dieu il restera ici Lorenzo ne restera pas ici il devra fuir la sc ne de Florence et s exiler Venise apr s la mort non de Dieu mais du duc Alexandre en avouant son attachement Lorenzo scelle avec une lucidit quivoque son propre destin Ainsi la sc ne 4 de Pacte I est dramatique au sens plein du terme elle installe les tensions qui sous tendront l avanc e du drame et joue des potentialit s du th atre Cette sc ne est aussi la premi re faire appara tre une p e entre le duc et Lorenzo et il est remarquable que ce soit Alexandre qui la mette de force entre les mains de son cousin Musset retravaille ici des motifs tragiques le duc est pr venu de son destin et le refuse Le cardinal et sire Maurice r it reront leurs mises en garde la sc ne 10 de Pacte IV qui pr c de imm diatement le meurtre ils fourniront m me Alexandre des preuves tangibles de la duplicit de Lorenzo Mais le duc poursuivra sa marche inconsciente vers la mort Entre les gants de guerre et ceux d amour Alexandre a d j choisi Cependant Lorenzaccio n est pas une trag die mais un drame loin de s achever sur la mort du tyran et la fondation d un nouvel ordre impos par Lorenzo qui serait l in
25. village nocturne M taphores jeu sur les sonorit s correspondances rythme des phrases caract risent la po sie Ici celle ci est mise au service de la peinture 275 Litt rature et saveur Les couleurs Les couleurs ne sont pas percues objectivement mais int rioris es et transform es D ot la multiplication des m taphores pour exprimer la moindre nuance La superposition des couleurs leur assimilation le passage progressif du rose au rouge incarnat et la couleur d pos e par le peintre rel vent d une technique par touche caract ristique de l impressionnisme Par del la succession de deux paysages diff rents le contraste entre le bleu et le rouge met en valeur chacune des deux couleurs dans un tableau savamment compos Enfin la touche finale de rouge dominante de tout lever de soleil permet d unifier ce tableau La lumi re Plus qu aux couleurs le narrateur est surtout attentif aux lumi res On peut noter la douceur des tons nuage pastel doux duvet voquent un paysage en demi teinte Cette douceur est rehauss e par le flou qui sourd dans les expressions r serves de lumi re clair de lune nacre opaline Douceur et flou caract risent l tat de conscience du narrateur encore demi ensommeill Alternance permanente la description int riorisation Description et int riorisation de celle ci alternent constamment Ainsi dans la construction m me des phrases ch
26. 4 Il arrive toutefois que l enfant malgr tous ses efforts manque le tramway qui en principe lui permet lorsqu il sort du coll ge de rejoindre la propri t familiale o l attend sa m re l agonie Alors fatidique il le met l preuve 348 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink S entrecoupant elles dessinent un texte fragmentaire o par bribes on la devine qui s esquive Figure centrale mais seulement esquiss e elle est inabordable sinon par ses entours Aussi retrouve t on la figure maternelle la lisi re du texte Si belle au milieu de toutes ces fleurs Non Terrifiante sans doute avec son nez en lame de couteau sa peau cartonneuse et grise coll e aux os de la face par la souffrance Mais on avait referm le cercueil avant mon arriv e Restait le parfum lourd et ent tant des fleurs et la fade odeur de la cire fondue qui glissait lentement le long des cierges 139 Innomm e dans cet avant dernier paragraphe elle appara t masqu e pat la souffrance par sa peau cartonneuse et grise coll e aux os de la face et mena ante avec son nez en lame de couteau qui signe et appelle son propre retranchement Et cette vocation n cessairement fantasmatique terrifiante sans doute qui en chasse une autre pioch e ailleurs mais trop mensong re Si belle au milieu de toutes ces fleurs vient se substituer l image absente au
27. EN GUISE D EPILOGUE La singularit du discours de S janus g n reux ath e impr gn de Lucr ce mais si peu picurien en son mode d tre et en ses motivations claire sous son jour le plus cru horizon de crise sur le fond duquel la reviviscence d une politique picurienne consistante put prendre historiquement forme et sens Elle permet de mieux mesurer par diff rence le caract re positif et constructif du mod le utilitariste et prudentiel labor 109 Litt rature et saveur par Gassendi partir des maximes d Epicure consacr es au droit une certaine distance comme l a rappel Gianni Paganini du ctypto ath isme des d niais s et des probl matiques libertines de Vimposture et de mieux comprendre les effets que cette politique reposant sur l flitas aura sur la r flexion morale d un Bernier ou d un Saint Evremond au premier chef un d sir de reconstituer une s curit optimale dans un univers o l instabilit des fondements du politique de ses repr sentations et de son discours est per ue comme un danger pour la libert de chacun o la d mystification des assises religieuses et morales du pouvoir semble le livrer l immanence fluctuante des rapports de force les plus cyniques o la r f rence au Droit et au Juste ne rel ve plus que d une fiction mobilis e l occasion par les passions et les volont s de puissance en concurrence et o l int
28. Ne sera ici cit e que la tentative de la restaurer en Allemagne au Xxe si cle La philosophie aurait pour mission ind passable de penser de tenter de penser la diff rence ontologique entre PEtre et l tre l entre Sein et Dasein Le m me philosophe qui crit le texte Kant et le probl me de la m taphysique crit aussi Sein und Zeit Etre et temps Un kantien ordinaire peut juste titre consid rer qu il s agit bien d un retour une histoire pr critique une n gation de la R volution th orique C est bien s r Heidegger qui op re ce retour qui sans doute signifie une r gression LACLOS LES LIAISONS DANGEREUSES Par St phane PUJOL Universit de Paris X Nanterre La Marquise de Merteuil an Vicomte de Valmont D s que vous craignez de r ussir mon cher Vicomte des que votre projet est de fournir des armes contre vous et que vous d sirez moins de vaincre que de combattre je n ai plus rien dire Votre conduite est un chef d uvre de prudence Elle en serait un de sottise dans la supposition contraire et pour vous parler vrai je crains que vous ne vous fassiez ilusion Ce que je vous reproche n est pas de n avoir point profit du moment D une part je ne vois pas clairement qu il fit venu de l autre je sais assez quoi qu on en dise qu une occasion manqu e se retrouve tandis qu on ne revient jamais d une d marche pr cipit e Mais la v ritable cole est de vous tre laiss a
29. Nizet 1978 390 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink que du fait du dialogue du texte avec l imagerie c est dire en raison de sa capacit faire image avec ou contre d autres images dont les significations id ologiques passent en contrebande le d bat qui oppose les lecteurs de Germinal est inscrit dans la nature du texte la fois lieu d un clich et d un d bat entre des clich s LE TABLEAU DU PEUPLE UN DISPOSITIF EXEMPLAIRE D ELABORATION SYMBOLIQUE La facilit avec laquelle cette sc ne a pu produire des morceaux choisis et devenir le lieu de prises de position id ologiques virulentes tient d abord sa construction L ensemble de la sc ne est vu depuis une grange entre les planches disjointes d une porte charreti re elle avait de telles fentes qu on apercevait la route entre ses bois vermoulus Ces meurtri res de hasard offrent l quivalent d un objectif trou cadre qui permet la sc ne observ e de se d tacher du r cit pour former une image changeable et transf rable qui va se mettre circuler comme un ch elle le fait brillamment dans les manuels histoire des coliers mentionn s par Alain Pag s La vision encadr e feuillette les niveaux de r alit du texte l objet regard semblant appartenir un autre niveau que le personnage spectateur Ensuite et du fait de cette diff rence de niveaux la sc ne est moins ce qui est vu
30. Pexigence d ordre sur le plan culturel symbolique politique social comme l indique sa verticalit et aussi la n cessit de rassemble r l tre de le contenir ce qu indique la formule Citadelle je te b tirai dans le c ur de l homme p 27 De Pautre c t l tendue amorphe anomique d configurante Phorizontalit d voratrice dont limmensit abrite les ennemis Mais en fait il s agit la de p les unis par un lien dialectique et la citadelle a besoin du d sert comme le r v le le narrateur dans son adresse la sentinelle p 305 6 Le d sert pr pare ses armes et inlassablement te revient frapper comme la houle et te p trir et te durcir en m me temps que te menacer Car il n est point distinguer ce qui te 1 Toutes les r f rences renvoient l dition suivante A de Saint Exup ry Citadelle Paris Gallimard collection Folio 1992 Litt rature et saveur ravage et ce qui te fonde Et ton ennemi c est ta forme m me car toblige te construire l int rieur des remparts Cette tension dialectique est reformul e au cours du r cit dans des termes plus abstraits qui proc dent de l anthropologie et de la m taphysique de St Ex d un c t P angoisse de l autre la ferveur et ce qui g n re l angoisse est aussi ce qui entretient la ferveur St Ex concevait ce livre inachev et posthume commenc en 1936 comme un vi
31. Zola Certaines contributions ont rev tu une forme particuli re elles figurent sous le titre VARIA en fin de volume Ce livre est d di Jean et tous ceux qui aujourd hui se lancent leur tour dans l analyse et l histoire des textes JEAN GOLDZINK QUITTE LA PLACE Par Pierre BERGOUNIOUX Toute la litt rature est l pour nous rappeler qu un homme n est pas la somme des attributs quoi un certain formalisme litt raire r duit parfois les personnages mais Vinflexion qu en re oit entourage Celui ci en retour lui conf re l identit crois e la singularit multiple qu on range par commodit sous Parbitraire d un nom Celui de Jean Goldzink d signe un millier d tres dont je ne sais rien pour autant de gens qui Pont connu avant ou apr s ou autrement que la demi douzaine de b jaunes qui surv curent l oral du concours de 1969 sous le pavillon des lettres modernes Je plains nos devanciers mais ceux aussi qui nous ont succ d Le feu XXe si cle a compt dix ans peut tre d esp rance de liesse pure entre l abomination de la d solation qui avait ent n br sa premi re moiti et au del jusqu aux accords d Evian et la rapide retomb e des ann es soixante dix le d senchantement o nous nous n avons plus cess depuis lors de nous enfoncer La g n ration laquelle j appartiens eut Pesprit d attendre la fin de la guerre pour tenter l aventure Elle fut par
32. affalant lentement recouvrant d un uniforme linceul les lauriers touffus les gazons br l s par le soleil les iris fan s et le bassin d eau croupie sous une impalpable couche de cendres l impalpable et protecteur brouillard de la m moire 140 141 A eux trois les derniers paragraphes du Tramway figurent en son seuil une page de deuil Le premier bref est coup Bribe de phrase en suspension interrompue par une incise qui la corrige il est une tentative avort e de n gation de l v nement par la fiction Comme si rien ou presque n avait chang quoi le dernier paragraphe est une mani re de contrepartie Ample d velopp il est l image du voile en suspension sur lequel il se referme il r siste ach vement figure le protecteur 1 Il arrivait toutefois que le narrateur n y trouve que la liseuse au tissu fan sortie parfois tout hasard seule et vide aupr s du bassin si son occupante habituelle avait pr f r rester l int rieur 121 2 Il n est pas rare que le narrateur commence ainsi ses phrases ou ses paragraphes pour circonscrire une impression donner une explication apporter une pr cision ou introduire un point de vue critique Voir par exemple p 109 351 Litt rature et saveur brouillard de la m moire et la marche du temps A la fallacieuse hypoth se d un monde inchang il oppose le souvenir d un mo
33. agit pas pour Genet d orner le r cit de sa vie mais de trouver dans cette fable r crite le sens qui ailleurs fait d faut Il faut observer enfin l insistance du phon me 8 givre jet es image J rusalem J sus neige C est par lui que commencent aussi bien Jean que Genet De m me le e par quoi s ach vent beaucoup de mots est la voyelle finale de Genet Il s agit bien au sens le plus fort d crire son nom Entrouvert le nom d Alicante me r v lait l Orient Il est possible d entrouvrir les noms les mots Plus haut il a t dit qu on pouvait tre pr cipit l int rieur d une image Ce que nomment d crivent ces deux formules c est le travail de la pens e r veuse le travail de la po sie tels que ce texte les accomplit Mais que le nom d Aliconte r v le pr cis ment Orient cela doit tre expliqu Car il ne s agit pas seulement des palmiers qu on trouve aux deux endroits mais du mot lui m me On peut d abord citer le r cit plus d taill qu on trouve la page qui suit de Parriv e Alicante vers Le matin j eus la r v lation de la ville et du nom au bord d une mer tranquille et sy plongeant des montagnes blanches quelques palmiers quelques maisons le port et dans le soleil levant un air lumineux et frais Le rapport entre toutes choses tait l all gresse Au del de Passo nance qui lie Alicante et l Orient
34. apte a juger de la qualit d un vin comme de celle d une interrogation ainsi que le montre la syllepse sur l adjectif Ma foi la question est bonne aussi Le plaisir reste celui de la philosophie Observons que le discours de ma trise ne s inscrit pas dans la g n ralit de l nonc doctrinal mais dans une nonciation subjective Bordeu est invit exprimer sa propre pens e en termes de pr f rences C est bien sur ce mode qu il r pond en reprenant le verbe introducteur je pense que et en proposant un jugement de valeur je suis m content de leurs lois Le je massivement pr sent nous rappelle ce qu est une philosophie en dialogue et non pas en trait C est aussi en vertu de ce choix formel de lexposition philosophique que Bordeu ne r pond pas directement la question il la reformule selon une nouvelle perspective probl matique absente du propos de Julie Le R ve de d Alembert est ainsi d une mani re g n rale mise en sc ne de la pluralit des voix et travail sur leurs modes de composition d agr gation Ici Bordeu complete la question lui donne toute sa r sonance la r flexion sur les changes sexuels est ins parable d une r flexion sut les crit res du licite et de l illicite Ce faisant le m decin donne son orientation th matique l ensemble du troisi me entretien en voquant les lois il pose le probl me des conditions de possibili
35. au fond l criture avec ou sans majuscule la chose au fond est indiff rente se r duit cette r p tition de la Loi l inlassable copie de la Vulgate R v roni en installant sa machine chez des faux monnayeurs nous rappelait d j que la Bible du capitalisme c est l argent C est parce que l criture tourne au sens litt ral la graphie de la machine d lirante de sa nouvelle est si orn e de paraphes si labyrinthique qu elle en devient illisible et requiert les services d un ex g te dipl m autour de la culpabilit que le corps est le support id al du texte L inscription de mort damnation pour les tra tres port e sur le malheureux Durand dans le r cit de R v roni devient dans cette optique l alpha et Pom ga de toute litt rature l inscription de la faute est le ch timent Foucault n expliquait il pas que l Ancien R gime faisait du corps du condamn le lieu d application du ch timent Sous un r gime r publicain le papier seul porte le jugement Ce que soulignent R v roni en crivant un texte que la presse imprime sur l piderme en m me temps que sur la page et tant d autres c est que le papier n est jamais que la m taphore de la peau Une approximation Un pis aller Retour aux faux monnayeurs La morale de Pauliska roman gothique date troitement le texte Dans l re moderne de la mondialisation le probl me que R v
36. chromatiquement En mordant les fleurs et non les fruits le faune songe moins se nourrir qu baiser la nature Il mord travers la fleur la bouche de la nature Il mord la beaut de la nature sa gratuit sa fragilit sa f minit Il fait en quelque mani re c ore la fleur de force par sa morsure Au 1 Par exemple On se sent aux l vres un baiser dans Roman ou dans Soleil et Chair le fr missement d un immense baiser id p 49 et p 23 314 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink sens propre il d flore la fleur Ce bouche bouche ou ce bouche calice sensuel et cru avec la nature est une mani re d embrasser Paube d t Crevant l exquise broderie le faune rompt Phymen de la nature et c l bre bri vement ses noces avec elle La l vre qui clate en rire peut alors tre entendue comme une figure de l orgasme onde de plaisir du rire qui tremble sur les feuilles Tout en mouvement en rapacit en fugacit le faune est le d sir dieu ou le d sir fait dieu Ce texte raconte en acc l r son apparition et son passage L image est celle d une communion et d un festin une sorte de f te pa enne du d sir c l brant la nature comme pulsion Car tel est bien le faune une pulsion de la nature m me Il vient soudain d ranger la lente pulsation du soleil sur les branchages la pulsation naturante du naturel apparent pour lui sub
37. comprendre comment d honn tes gens habill s en bergers se comportent ordinairement que de s tonner des accidents prodigieux qui arriv rent en des contr es foraines Peut tre n y a t il pas plus forain que le Forez encore que vous y fussiez n et 443 Litt rature et saveur les pays se doivent ranger selon les mceurs de leurs habitants autant que par leur lieu Ne disiez vous point Pinstant qu il y avait loin de notre si cle de fer l ge d or de vos bergers x Ah Touch Mais je suis s r qu avec ce que vous avez de connaissance du c ur humain vous n ayez d m l que la paix du Forez n est qu une invention propice la r flexion et au souci de soi que les accidents du monde interrompent et interdisent l ordinaire et que pr cis ment cette contr e n est trang re que de m urs et non point de courage x Jen suis d accord Monsieur plus que vous ne pouvez croire et les particularit s des cas qui me sont confi s dans le secret inviolable du confessionnal sont souvent bien plus d licates que les d bats qu animent vos berg res et bergers Combien de Silvandres ne vois je pas l ann e Combien d Hylas h las Et croyez vous qu il n y ait que C ladon qui ait eu l industrie de se d guiser en fille pour espionner quelque objet de sa passion et jusque dans les lieux r put s inviolables o se r fugient les chastes pouses du Christ Les passions sont de tous les
38. coute ici Voil une heure que nous parlons de toi Sais tu la nouvelle Mon ann on texcommunie en latin et sire Maurice Fappelle un homme dangereux le cardinal aussi quant au bon Valori il est trop honn te homme pour prononcer ton nom 258 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink LORENZO Pour qui dangereux Eminence pour les filles de joie on pour les saints du paradis LE CARDINAL Les chiens de Cour peuvent tre pris de la rage comme les autres chiens LORENZO Une insulte de pr tre doit se faire en latin SIRE MAURICE I s en fait en toscan auxquelles on peut r pondre LORENZO Sire Maurice je ne vous voyais pas excusez m0i j avais le soleil dans les yeux mais vous avez un bon visage et votre habit me parait tout neuf SIRE MAURICE Comme votre esprit je l ai fait faire d un vieux pourpoint de mon grand p re LORENZO Cousin quand vous aurez assez de quelque conqu te des faubourgs envoyez la donc chez sire Maurice TI est malsain de vivre sans femme pour un homme qui a comme lui le cou court et les mains velnes SIRE MAURICE Celui qui se croit le droit de plaisanter doit savoir se d fendre A votre Place je prendrais une p e LORENZO Si l on vous a dit que j tais un soldat c est une erreur je suis un pauvre amant de la science SIRE MAURICE Votre esprit est une p e ac r e mais flexible C est une arme trop vile chacun fait usage des siennes I tire son p e V A
39. couvrir la joie insoup onn e de partir ou encore aux vagabonds En attendant Godot de Beckett incapables de choisir entre Pun et l autre ce qui au th tre quivaut rester Chez Karl Valentin annonce du d part de Heinrich ne fait que pr figurer la seule issue possible l aporie tragique AFRA tr s calme Bon je n ai plus rien faire dans cette maison Je pars Eile sort HEINRICH Afra part eh bien je pars aussi I sort LE P RE S is partent tous les deux eh bien je pars aussi I sort LA M RE en pleurs crie en direction du p re P re Toi aussi tu pars Alors moi non plus je n ai plus rien faire ici Eile sort La sc ne est vide Rideau Ce qui bien entendu est un d nouement possible sur le plan strictement dramatique mais laisserait en suspens dans des conditions r elles un certain nombre de questions comme celle touchant au devenir de la propri t familiale Pour compl te qu elle tente d tre explication qui pr c de laisse n anmoins ouvertes un certain nombre de questions sur 368 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink lesquelles pour diff rentes raisons il convient de ne pas s tendre outrance La premi re a trait au sens profond de la trag die valentinienne qui comme on la parfois sugg r ne cesse de nous chapper L auteur ne souhaiterait il pas sugg rer n anmoins que Pespace familial ob it un fonctionnement rien mo
40. creux L ontologie n est pas la seule partie sans doute fondamentale de la m taphysique tre ce point par Kant interrog e Il conduit la ruine la cosmologie et la psychologie dites rationnelles par la tradition elles sont les parties principales avec la th ologie de la M taphysica specialis dans la mesure o elles pr tendent disserter du monde de l me de Dieu partir de leurs simples concepts sans recours une exp rience possible En montrant la vacuit de l ontologie c est la M taphysica generalis que Kant conduit sa perte Dans Avant Propos aux Heures matinales Mendelssohn appelait Kant le destructeur universel Il faut donc dans la Philosophie critique entendre d sormais pat ontologie nom orgueilleux pompeux selon les traductions de der stolze Name la d nomination modeste de simple analytique de entendement pur Par analytique il faut entendre Pinventaire exhaustif si possible des l ments purs de toute connaissance possible tant bien entendu que nos connaissances possibles r f rent n cessairement lexp rience sensible L ontologie est donc r duite cette r duction est seule capable den garantir la rationalit son statut transcendantal ce terme en kantien signifie ce qui rend l exp rience possible D s lors l ontologie ne peut plus tre ce champ de bataille o se sont affront es les m taphysiques dans leur qu te ent t e
41. dialogues p dagogiques le providentiel face face entre Le Prince p dagogue des ann es de Saint Cloud et celui du Paradoxe des ann es post rieures ah ces Entretiens entre Moi et Moi sur la t te le coeur et le lumbago modulables a volont en p riodes et sous p riodes tels ces praticables d autrefois devant toiles peintes quelle aubaine quelle prescience de effet quelle mise en sc ne de Pespace philosophique Force est d admettre qu a vouloir prosaiquement sans machines ni d cors ni tableaux s miologie pragmatique histoire mat rielle du th tre esth tique th orique et historique etc 406 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink examiner une explication du Prince p dagogue on court au suicide et plus s rement au ridicule Mais ne pr tendant aucune comp tence explicative et mu par le simple devoir universitaire dont apr s tout nous parle aussi l auteur je me risque cette triviale preuve Je me propose de suivre le texte De Chair et d ombre Incipit Paradigme 1995 p 17 25 au fil de sa marche n est ce pas la seule chose faire paraphraser en avan ant au passage quelques r flexions qui parfois peuvent sembler le d border Mais si un article classique passe par un milieu et une fin c est en fonction d un commencement LE TITRE 1 Si louvrage s intitulait simplement Essais sur Moli re Marivaux Challe Rousseau Beaum
42. divin qui m avait donn de si douces esp rances cet homme qui m ritait de vivre toujours je le trouvai mort mon retour en Pi mont Ce jour l pourtant ne se devait pas achever sans qu il fut beaucoup question de Poccupation d crire comme il tait bien naturel entre des personnes aussi f rues de Lettres que l taient M d Urf et M de Belley Et pourtant cela se fit par une rencontre fort curieuse Car sur la mention qui fut faite de l illustre visite que re ut le chateau de Senoy l ann e pr c dente M de Belley se souvint que dans la suite de la Princesse se trouvait M de Gen ve qu il venait pour lors de quitter fort fatigu Annecy en une des fr quentes visites qu il lui faisait M de Belley qui comme on la vu depuis avait M de Gen ve en si grande estime qu il en voulut faire son mod le de vie et appelait son Mentor ne manqua pas den faire un loge d autant plus r v rent qu il craignait lors pour sa sant en effet si d clinante que Dieu le rappela lui deux ans 1 Christine de France se rendant en Pi mont rencontrer son futur poux passe Senoy le 3 octobre 1619 2 Fran ois de Sales v que in partibus de Gen ve r side Annecy note de l diteur Il sera canonis en 1665 439 Litt rature et saveur apr s Mais M de Belley nous confia sur cette admiration qu il avait pour lui un trait bien curieux que quoiqu on puisse juger qu il int resse de
43. e convient il en d finitive d entendre le feuillet la feuille de papier C est la dans l criture que dort le baiser et qu il faut surprendre et susciter son r veil C est l seulement que des noces sont possibles Roland Barthes d signait cette rotique du texte comme la mise en sc ne d une apparition disparition Ce serait donc ici Rimbaud lui m me qui se recueille Qui recueille sa propre semence Son propre baiser d or Sa propre figure et son propre c ur aussi bien Par dela toute lecture sexuelle ce po me qui dit un d sir d amour fait un pas d j vers la voyance et l hallucination simple en voyant un faune l o il n y avait sans doute qu un cureuil en effa ant le sujet lyrique pour lui substituer cette figure po tique qu est le faune 1 Roland Barthes Le plaisir du texte d du Seuil 1973 p 40 ANTOINE DE SAINT EXUPERY CITADELLE Par Guy BARTHELEMY Khdagne lyc e Champollion Grenoble Saint Exup ry f cond par le d sert de l apologue la l gende Dans ce texte consternant qu est C adelle l imaginaire du d sert est pour l essentiel instrumentalis et lamin par une pesante binarit d un c t la citadelle de l autre le d sert D un c t la vocation signifiante de l architecture que le narrateur illustre par cette image du palais de son p re dans lequel tous les pas ont un sens p 35 et qui plus largement renvoie
44. e g n rale celui de voir un grand nombre de choses etc celui de comparer de joindre et de s parer les id es Ces plaisirs sont dans la nature de notre dime ind pendamment des sens parce qu ils appartiennent tout tre qui pense et il est fort indifferent d examiner ici si notre dime a ces plaisirs comme substance unie avec le corps on comme s par e du corps parce qu elle les a toujours et qu ils sont les objets du go t ainsi nous ne distinguons point ic les plaisirs qui viennent Tame de sa nature d avec ceux qui lui viennent de son union avec k corps nous appellerons tout cela plaisirs naturels que nous distingnerons des plaisirs acquis que l me se fait par de certaines liaisons avec les plaisirs naturels et de la m me mani re et par la m me raison nous distingnerons le go t naturel et le go t acquis Dans ce mouvement il est bien vident que Montesquieu met entre parenth ses le beau essentiel objet de Pesprit pur pour le P Andr et connu d abord par l Intelligence divine Seule importe la distinction entre un go t naturel qui signale Paccord plaisant des choses avec la nature des hommes telle qu elle est et un go t acquis qui peut tre guid par les sages galement mentionn s dans les premi res lignes de PEssai et dans le texte central du P Andr Au fond la premi re r f rence l h ritage malebranchien permet de garantir le jugement de go t contre le danger d un rel
45. elle n en convienne pas et qu elle veuille que cette nuit soit la seule 232 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink forc e agir contrairement ce vers quoi la poussait sa nature tr s honn te Lucrezia peut d s lors devenir sujet autonome et agir en fonction de ses propres int r ts tels qu ils peuvent tre d finis en fonction de la situation nouvelle qui est en quelque sorte voulue par le Ciel Voila bien l une occasion au sens machiav lien du terme une situation que la fortune offre qui doit avoir en lui la vertu suffisante pour la saisir Cette situation qu offre la fortune n est pas forc ment bonne pour un regard non vertueux elle peut m me ressembler la pire des situations puisque le chapitre XXVI nonce que si Pon voulait conna tre la vertu d un esprit italien il tait n cessaire que l Italie fat r duite dans les termes o elle est pr sentement et qu elle f t plus esclave que les Juifs plus asservie que les Perses plus dispers es que les Ath niens sans chef sans ordre battue d pouill e lac r e parcourue en tous sens et qu elle e t subi toutes les sortes de ruines La situation de Lucrezia qui est donc l occasion qu elle peut ou non saisir n est gu re diff rente de celle de l Italie a ne pourrait tre pire elle a t contrainte agir contre sa nature tenuta sotto tromp e L occasion est don
46. et d autre part les m canismes ou le syst me des causes les lois scientifiques dont les lois positives sont les effets Ce que Goldzink souligne ici c est que Montesquieu a deux fers au feu il n est pas question de c der sur Pexigence de juger selon la raison la loi positive et de faire le silence sur Phorreur que nous inspirent la torture et l esclavage mais on ne saurait non plus abandonner le terrain au seul jugement normatif Il importe Montesquieu d arracher son objet pour en exhiber la structure et l volution ceux qui se r fugient dans l asile de Pignorance Spinoza en refusant toute l gitimit la recherche des lois n cessaires auxquelles tous les tres sont soumis s en tenir cette seule th se et ses cons quences Montesquieu peut revendiquer au moins autant que Rousseau qui en fut un lecteur attentif le titre de Newton des sciences morales Kant Et comme il faut bien articuler ceci avec cela qui a t tabli c est dire les cinq lois naturelles au sens de lois immanentes aux tres Goldzink est fond soutenir la th se essentielle la claire intelligence du Livre I de L esprit des lois selon laquelle le droit naturel est alors coup en deux En d autres termes Montesquieu se serait m nag la possibilit de penser sinon ensemble au moins conjointement et Pempirique et le transcendantal Le dispositif du Livre I s inscrit 4
47. et dissimule des th ses dangereuses qui mont rien d un jeu En cela la pointe par quivoque est Pun des nerfs les plus actifs d un art d crire libertin P criture des Lettres diverses satiriques et amoureuses ayant constitu cet gard pour Cyrano un champ d exp rimentation hors pair D autres temps forts de La Mort d Agrippine mettent en abyme de la mani re la plus spectaculaire cette pratique libertine de la pointe par quivoque comme art supr me de la dis simulation Ainsi la sc ne III de lActe III Agrippine prise en flagrant d lit de complot contre Tib re Tib re entrant sans tre vu la surprend alors qu elle d crit le meurtre du tyran avec la plus intense d lectation d ploie les ressources d un art de la feinte pour faire dire r troactivement tout autre chose aux mots que Tib re a pu entendre et Tib re appr cie en connaisseur Pesprit de cette cr ation r trospective de sens quivoqu improvis e en un clin d il v 802 La r ponse est d esprit et n est pas mal con ue Ici cependant en ce face face qui loppose T rentius P quivoque ne simule rien ne dissimule rien Elle exhibe surtout chez lath e une jouissance particuli re procur e par le jeu sur les signifiants Jeu o les variations sur rien sur ses diff rentes fonctions grammaticales et sur ses diff rentes significations prennent une telle intensit au fil des r pliques et
48. et plus loin o semblait toujours flotter ce voile Fondu dans le paysage familier qu il traverse puis laisse derri re lui il s en tient finalement aux seuls abords de la b tisse dont on ne voit que le pas les trois marches de briques L il para t ainsi se r signer rester l cart comme s il avait admis Pexclusion dont il a fait l objet durant la maladie de sa m re puis sa mort comme s il avait consenti aux crans interpos s entre elle et lui portes closes silences ou accessoire s postiche s 63 et aux s parations r p t es dans l histoire souvent mentionn es dans le roman A la fin il aurait renonc r parer son viction de la chambre de sa m re moribonde comme il tentait de le faire au d but en se faisant admettre condition de se faire oublier dans la cabine du Wattman Il aurait compris d s lors que le sens ne se trouve pas l int rieur comme d une noix mais l ext rieur Cette fois m me il prend ses distances s loigne va au del de la premi re rampe du sentier puis plus loin et enfin jusqu au bout de Vall e o il reste Son trajet aboutit la station du tramway Au bout de all e bord e de m riers le tramway 1 En particulier cette perruque aux ondulations fig es que non par coquetterie bien s r mais par un souci de d cence et sans doute pour m pargner une vision trop effr
49. font cho l enthousiasme que suscitait au d but de la repr sentation l entr e en sc ne du t nor La r ception singuli re de la jeune femme laisse nouveau place au regard du narrateur dont d sormais l ironie s exerce au del de l imperfection des chanteurs sur l op ra lui m me Les personnages de Lucie de Lamermoor accumulent de mani re d sordonn e des propos o il est question des fleurs de leur tombe de serments d exil de fatalit d esp rances juxtaposant tous les clich s du m lodrame C est ainsi une uvre convenue interpr t e de mani re indigente que le public rouennais r serve un accueil triomphal et Emma Bovary un cri aigu ultime manifestation d un rapport hyst rique la sc ne de th tre Le r cit de ce spectacle provincial qui se joue tant sur la sc ne que dans la salle se cl t en m me temps que Pop ra avec P adieu final des chanteurs et les derniers accords de l orchestre Persiste le cri de Madame Bovaty qui se confond avec les notes finales de Lucie de 158 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Lamermoor offrant Vexpression condens e d une relation fusionnelle avec la repr sentation th trale En brossant un portrait d Emma Bovary en victime de Pillusion th trale Flaubert soumet son personnage une ironie d autant plus cruelle qu elle prend aussi pour objet Pop ra o la jeune femme trouve
50. guli re des id es entre elles peut avoir une si grande influence sur nos actions et raisonnements et nos notions m mes que rien sans doute ne m rite d avantage que nous nous y int ressions La Psychopathia sexualis de Krafft Ebing 1886 est un r servoir d exemples o ont puis la psychanalyse et la psychiatrie En un sens il s agit d un ouvrage sur lassociation des id es tant sont bizarres et inattendues les repr sentations li es l acte sexuel et la sexualit m me si Krafft Ebing suppose une disposition organique aux aberrations puisqu un v nement impr visible des 1 Essai IV XIX 5 2 Ibid H XXII 9 226 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink circonstances sans rapport peuvent se voir par la suite associ es obtention du plaisir Krafft Ebing limite ses commentaires au profit de la description des cas Mais l dition fran aise refondue par Albert Moll 1931 les d veloppe et y ajoute diff rentes observations juridiques et morales Le propos reste assez calme mais s l ve une v ritable col re lorsque son auteur aborde son tour le domaine des coupeurs de cheveux et plus particuli rement des coupeurs de nattes Il ne s agit ici plus de celles que peuvent arborer les Chinois mais de celles des dames et des petites filles Les coupeurs de nattes peuvent eux m mes tre d coup s en deux cat gories les coupeurs de natte but lucratif pour lesqu
51. la fin le jeu entre opposition des personnes je vous et la reprise d un m me verbe je vous d fie de pr voir je pr vois L accusation ne se fait pas longtemps attendre ce que je vous reproche et se d veloppe en deux temps C est d abord la d monstration par d faut ce n est pas qui sous entend une critique peine voil e celle de n avoir pas compris que le moment n tait pas venu Puis vient le temps de la d monstration positive c est de vous tre laiss aller crire La vraie probl matique de la lettre apparait et la question de l criture appara t d embl e li e celle de la rationalit Au passage la Marquise rabaisse une nouvelle fois les pr tentions de Valmont la ma trise Plut t qu un simple terme de jeu les notes des diteurs modernes renvoient au jeu de trictrac le mot amp o er d signe ici une application scolaire des principes et de la langue du libertinage La question rh torique qui va suivre Par hasard esp rez vous prouver cette femme qu elle doit se rendre met en place les premiers l ments d une r flexion suivie sur les moyens et les limites du langage rationnel Comme le montre le paradigme crire prouver v rit P criture est li e au gos la raison Vintelligence Elle s inscrit dans un processus r flexif o la dur e joue un r le d terminant La s rie qui suit faite de parall lisme
52. le caract re propre de chaque monument et dynamis tant par la domination de la verticalit oppos e l amphith tre aux gradins tortueux que par les inexplicables fantaisies Littr ouvrage o l on a suivi son caprice et son imagination en s affranchissant des r gles peindre sans avoir de mod le imiter uvre de l imagination sans r alit chose curieuse singuli re Ici encore pr sence d un l ment dysphorique le spectre noir et d charn teneur fantastique mais provisoirement neutralis par le contexte esth tique Fantaisies se retrouve dans caprices ce qui a t pos se trouve soumis une permanente m tamorphose sous l effet du ciel changeant Notons que caprice d signe aussi un genre musical Composition o l artiste crit au gr de son inspiration sans s assujettir aux formes des diff rents genres Littr 35 Litt rature et saveur La mobilit picturale du paysage le sauve donc du figement Les lignes entrent dans une irrationalit grande rentabilit esth tique o le Paris connu prend des aspects inconnus ce qui annonce le Paris invisible qui deviendra visible par m tamorphose solaire La phrase suivante revient la position de lobservateur devenu centre organisateur au milieu d un espace investi meublent les airs serpentent verbe potentialit mal fique et qui permet de rassembler la ville et la campag
53. lement ils cherchent l un et Pautre s arroger la ma trise du temps Pune pour le ralentir et le contr ler son profit et pour son notre divertissement l autre pour l acc l rer afin de remplacer cette com die galante par un mariage id al ce qui nous pla t aussi mais pose la question du ridicule de la vertu absolue Moli re ne refermera pas la crise d un coup de baguette magique par une fin heureuse de convention il laissera le spectateur aux prises avec l incertitude du destin de C lim ne crisp e sur la dur e et le vide laiss par Alceste parti en qu te d un absolu que le th tre ni le monde ne pourront lui donner Laissez moi l vous dis je et courez vous cacher Alceste qui s est battu pour rester sur une sc ne qu il a souhait vide qui a acc l r les choses pour que tous partent en courant et que C lim ne le rejoigne toutes affaires cessantes et l pouse ira lui m me courir ailleurs nulle part en laissant d autres que lui remplir P chafaud d un th tre qui l a condamn On pourrait dire aussi que cette com die est circulaire comme Le Festin de pierre et qu elle inscrit en son d but les donn es de la sc ne finale pour finalement inverser les propositions celui qui demande qu on le laisse laissera les autres celui qui veut que les autres se cachent parce qu ils se montrent trop finira par se cacher pour avoir trop d voil ses propres contradictions
54. mais destin tre plus longuement d crit dans la suite du roman l autre par l effet d un v nement incertain le perdant L essentiel r side dans la relation qu ils entretiennent Pun avec Pautre le gagnant avec le perdant qui dans un autre tat de choses aurait pu tre le gagnant le jeu ne se concevant qu en pr sence d un enjeu que chacun risque de perdre C est ce qu indiquent dans le texte les constructions en rappel il le banquier ou il le perdant qui mettent laccent sur le pronom personnel ou l usage de Pautre pour renvoyer indiff remment aux deux personnages La relation du gagnant au perdant se traduit dans la syntaxe celui ci des verbes double compl ment appartenant au paradigme de donner celui l le verbe prendre r p t et prolong par ajouter sa propre ration ou mettre dans sa musette avec un renversement le troisi me jour La relation qui lie les verbes est renforc e par Putilisation d un lexique clos quatre jours de rations son morceau de pain noir et sa margarine de charbon le pain sa propre ration la ration de pain et de margarine qu il venait de recevoir pain et margarine la ration Le jeu des d terminants est r v lateur le son et le sa de Italien sont remplac s par des articles d finis qui ne comportent pas de r f rence la personne et m me par un article
55. marchand de peaux Et qu est ce que ce nom d origine qui passe par une transaction financi re Rien pourtant n est ici plus historiquement rigoureux que la fantaisie perecquienne car tout existe et le patronyme allemand et la ville polonaise et l histoire dr le et m lancolique de l achat du nom Une histoire juive comme tout lecteur averti l a compris m me si cela n est dit qu avec retard comme inopin ment car tout ce qui touche la jud it chez Perec rel ve d une criture indirecte L crivain fait allusion ce moment cardinal du juda sme europ en que fut la fixation des patronymes impos e dans un intervalle de temps relativement court entre 1787 et 1812 aux Juifs d Autriche et par contrecoup de Bucovine et de Galicie de France de Prusse et de Russie Obligation fut faite ceux qui n taient pas pourvus d un nom de famille notoire cas fr quent dans des soci t s o quelques exceptions pr s seul le pr nom tait d positaire d une signification religieuse d acqu rir un nom en accord avec l onomastique nationale Les familles ais es de PEmpire des Habsbourg y gagn rent des noms germaniques i respectables voire prestigieux la majorit dut se contenter de 1 Comme s en indigne encore le comte Leinsdorf dans L homme sans qualit s de Robert Musil je n ai rien contre les Juifs Ils sont intelligents laborieux et fid les Mais on a commis une
56. mes Locke le rattache la m lancolie et son tableau contrast Mais il mest pas le simple fait d une alt ration des humeurs Dans une Angleterre peupl e de sectes et de dissidents et o les envoy s de Dieu sont surnum raires la pathologie est sociale En un sens elle est la maladie de la libert de conscience et c est pourquoi la libert de conscience ne saurait tre le rem de et doit elle m me tre soumise un r gime L esprit ici n ob it plus aucune r gle de jugement pour s abandonner la force de la perception Le pr jug lorsqu il est g n ral n ab tit personne titre purement priv Ici Parrogance conduit s ab tir au dessus de tous les autres l amour que les hommes ont pour ce qui est extraordinaire la commodit et la gloire qu il y a d tre inspir et lev au dessus des voies ordinaires et communes de parvenir la connaissance flattent si fort la paresse l ignorance et la vanit de quantit de gens que lorsqu ils se sont une fois ent t s de cette mani re de r v lation imm diate de cette esp ce d limination sans recherche de certitude sans preuve et sans examen il est difficile de les tirer de l Le d lire de enthousiasme qui prend ses perceptions pour autant de v rit s l am ne justifier les suites d id es les plus bizarres odd d s lors que Dieu est de la partie Il participe ainsi d une pathologie plus g n rale la connexion irr
57. o les tribulations d un peuple Pinstabilit politique europ enne et la confusion des langues conjuguent leurs effets Le nom propre n est pas soustrait PHistoire c est m me elle qui en ce sens juda se un nom qui n tait que germanique force de mutilations de l sions le signifiant devient juif c est dire trou repris insolite d plac La fantaisie lettriste peut alors se greffer sur la chronique La phon tique elle m me devient vexatoire ainsi de ce f final un jour remplac par ce signe particulier avec lequel les Allemands notent le double s qui fera t on croire que ce B ce SS allemand est tout fait anodin sous la plume de Perec ainsi de ce a qui Pon avait substitu un h ou Part de trancher les 4 avec un petit 4 augure ou rappel de la grande H de PHistoire dans W Il est vrai que la blessure onomastique de CiNoC n est pas sans rappeler celle de PeReC lui m me celui dont le grand p re 1 Nicole Lapierre rappelle avalanche de noms malsonnants et ridicules donn s aux Juifs galiciens Lapierre Nicole Changer de nom Paris Stock 1999 p 41 283 Litt rature et saveur s appelait David Peretz et vivait Lubartow successivement russe puis polonaise puis russe nouveau Un employ d tat civil qui entend en russe et crit en polonais entendra m a t on expliqu Peretz et crira Perec Encore
58. ou presque n avait chang Non Comme si quelque chose de plus 1 C est dans un ascenseur de l h pital que le narrateur entend cette phrase d abord Qu elle tait belle au milieu de toutes ces fleurs phrase qui pouvait tout aussi bien faire allusion une mari e amie des infirmi res ou une morte sur son lit de morgue 114 puis ces quelques mots si belle au milieu de toutes ces fleurs qui ne pouvaient logiquement dans un tel lieu un h pital que faire allusion une morte reposant la morgue dans une profusion de roses et de chrysanth mes 115 2 Tr s explicitement me demandant de nouveau 27 Je mai jamais compris 48 ou encore On s explique mal pourquoi 58 ex ou plus discr tement travers de nombreuses tournures hypoth tiques ou interrogatives 3 Voir le premier vers du po me Clair de lune de Paul Verlaine dans F es Galantes Paris ditions Gallimard Po sie 1973 1867 p 97 Votre me est un paysage choisi 352 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink gt r pond le narrateur soucieux de ce presque qui change tout Dans criture il retient le peu qui persiste de v nement masqu Restait le parfum lourd attentif ce qui meurt c est dire ce qui vit encore imperceptiblement et qu il continue de chercher dans le somn
59. pr d cesseurs n emporte pas Pauteur imaginer d invraisemblables fictions Hola Monseigneur s exclama M d Urf avec quelque chaleur tous les auteurs ne sont pas si vains Consid rez votre tour s il vous pla t la diversit des personnes qui vous entoure et combien du Savoyard au For zien de lenfant au vieillard du noble au manant la vari t des races des conditions et des climats fait de diff rence entre les personnes et combien la distinction est de nature N avons nous pas exp riment tous les jours dans nos troubles que tel sera brave aux occasions et tel pleutre sans qu il y ait de Pun ni de l autre acte de sa volont Et si la guerre n est pas la mati re des romans que dire de la diversit des sentiments aux rencontres d amour dont avec votre permission je me flatte d avoir d crit ample circonf rence aucun de mes bergers 1 Syntaxe latinisante l accord par le sens rapporte un seul substantif avec un seul verbe ce sont les paroles qui sont dites et les r flexions qui sont faites 446 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink aucune berg re ou nymphe n est semblable Pautre et ce qu une seule personne ne pourrait en trente vies exp rimenter j en fais le tour par personnages singuliers la diversit de exp riences et des natures faisant la diff rence des sentiments Ici M de Belley s arr ta tout court puis sans reprendre sa marche et nous consi
60. r pondit Tout tient dans une sentence de Voltaire tout commentateur de bons mots est un sot Un trait d esprit que vous expliquez quelqu un qui ne le comprend pas devient insoutenable Il en va de m me du comique On donnera des approximations g n rales tristes ou solennelles Je crois que le comique il faut l approcher en parlant d autre chose mais pas directement VOLTAIRE ARC JEANNE D ARC DITE LA PUCELLE D ORLEANS Par Christiane MERVAUD Universit de Rouen Mezerai conte que le prince de la milice c leste lui apparut j en suis fach pour Mezerai et Jen demande pardon au prince de la milice c leste La plupart de nos historiens qui se copient tous les uns les autres supposent que la pucelle jit des pr dictions et qu elles s acomplirent On lui fait dire qu elle chassera les Anglais hors du royaume ils y taient encore cing ans apr s sa mort On lui fait crire une longue lettre au roi d Angleterre et assur ment elle ne savait ni lire ni crire on ne donnait pas cette ducation une servante d h tellerie dans le Barrois et son proc s porte qu elle ne savait pas signer son nom Mais dit on elle a trouv une p e rouill e dont la lame portait cing fleurs de hs d or grav es et cette p e tait cach e dans l glise de Ste Catherine de Fierbois Tours Voil certes un grand miracle La pauvre Jeanne d Arc ayant t prise par les Anglais en d pit de ses pr dictions e
61. re ou du moins m nag e d une mani re plus subtile qui permet au pr dicateur de b n ficier la fois de l vidence du lieu commun et de la surprise de sa mise en sc ne On observe aussi que le texte source a t d coup en deux s quences dans le sermon Or ce qui s intercale entre les deux c est la r criture d un passage de Lucr ce maintenant quitte tous ces biens qui ne sont plus de ton ge et sans regret allons c de la place d autres i le faut Juste mon sens serait ce plaidoyer justes seraient ces blames et ces reproches Toujours en effet la vieillesse de la place au jeune ge qui lexputse et les choses se renouvellent les unes au d pens des autres suivant un ordre n cessaire Personne ne descend dans le gouffre t n breux du Tartare il faut des mat riaux materies pour que croissent les g n rations nouvelles postera saecla celles ci leur tour apr s avoir achev leur vie iront toutes te rejoindre Toutes celles qui Font pr c d ont d j succomb de m me suxwomberont celles qui viendront apr s tot Ainsi jamais les tres ne cesseront de na tre les uns des autres et la vie n est la propri t de personne mais l usufruit de tous vitaque mancipio nulli datur omnibus usu Regarde maintenant en arri re et vois quel n ant Jut pour nous cette vieille p riode de l ternit qui a pr c d notre naissance Voila donc le miroir o la nature nous pr sente ce que n
62. rieur En son Forez int rieur dit incontinent M de Belley Cela nous fit un peu tire mais M d Urf en parut fort frapp Que je vous ai de reconnaissance Monsieur dit il Je r vais en effet mes berg res mes discr tes berg res qui le sont tout autant que le courtisan dont vous parliez tant t Et s il y a bien loin de mes humbles habitants du Forez au saint homme que nous avons lheur de conna tre tous deux du moins la qualit de discr tion qu ils partagent quoique diff rant des uns l autre m y fait voir quelque chose en commun Serait ce dit doucement M de Belley avec un petit sourire qu elles font leur occupation ordinaire de guetter 441 Litt rature et saveur leurs compagnes et de surprendre leurs conversations comme le fit un indiscret v que de notre connaissance Et encore seraient elles plus pardonnables la curiosit tant plus naturelle aux filles Cette fois le rire saisit toute notre compagnie et Mme de Chateaumorand dont je conduisais les l vriers dit mi voix en se penchant vers sa suivante Ouais vous verrez que c est leur exemple qui a corrompu notre v que N est il point vrai cependant reprit M d Urf assez s rieusement que vous estimiez parfaite la foi qui s en remet tellement son Dieu qu elle en est parfaitement tranquille et que son galit d ame ne se montre que par une gale tranquillit du corps Cela est vrai
63. sirs et de questions qui agite l me en toute recherche Et tout cela parce qu on veut une solution les premi res lignes du texte nous font d couvrir un Flaubert qui se saisit du principe de raison pour lutter contre l id ologie scientifique Celle ci se voit reprocher de confondre abusivement la m thode analytique et un r ductionnisme de principe Or l intelligence scientifique des causes d voile la productivit infinie de la nature qui nous livre au fur et mesure que nous avan ons dans son exploration de nouveaux ph nom nes et des processus plus riches qui branlent nos certitudes ant rieures L appr hension des effets laisse ainsi entrevoir l abime d un fondement qui s loigne 149 Litt rature et saveur au fur et mesure que s largit le champ de ce qui est conna tre Car il ne saurait y avoir de pur arbitrage par le fait ou par P vidence partir du moment o le r el lui m me loin d tre fig se d ploie en r ponse une perception de plus en plus fine de ses d tails En un mot Flaubert voit bien 4 contre courant de Popposition sp cieuse entre le calcul et imagination que c est parce que la science imvente la nature qu elle ne peut acc der la totalit du r el La solution sotte pr tention conclure et assurer en un passage subreptice de la raison des effets au fondement et la justification finale de ce qui existe est en contradiction avec Paventur
64. sistiblement le lecteur sa distraction Quant Pami le lecteur de Goldzink lisant l attention partisane et bienveillante en veil il s appr te tout sauf tomber sur un 1 Sur le chapitre 1 du livre 1 de L Esprit des lois de Montesquieu in Analyses amp r flexions sur Montesquieu De l Esprit des lois d Marketing Ellipses 1987 Litt rature et saveur truisme lustr ou un psaume du rituel hagiographique Il ne cessera d y avoir du neuf crire sur Montesquieu cette trange figure qui incite les lecteurs les plus p n trants la r serve a la prudence la modestie sinc res ou simul es depuis Durkheim jusqu Pierre Manent Althusser ouvrait son fameux Montesquieu la politique et l histoire par le m me avertissement je mai pas la pr tention de rien dire de neuf sur Montesquieu pour infl chir radicalement la perspective sur L esprit des lois en clairant les moments d une r volution dans la m thode L audacieuse fondation d une nouvelle science empirique comportait une ambigu t de taille justifiant des lectures tonnamment vari es envelopp e dans l usage du terme loi commandement ou obligation ici n cessit immanente aux ph nom nes l la loi devoir et ou la loi rapport Au terme de son petit livre il revient quand m me au professeur d avoir d finitivement refondu les conditions d une lecture pertinente de l uvre de Montesq
65. souffl s ceux galement que Ricciardo fait valoir aupr s de Catella elle a tout gagner accepter tout perdre et particuli rement sa r putation de femme honn te si elle refuse puis de rappeler le topos d cam ronien de la diff rence entre la iacitura les performances amoureuses du jeune amant et celle du vieux mati on a l une introduction rapide parce qu elle peut tre allusive avant la citation des paroles de Lucrezia qui vont apporter la preuve de la transformation de la jeune femme Lucrezia comprend la situation nouvelle cr e par la qualit des hommes tristes qualit s certes ruse sottise simplicit m chancet mais qui n en ont pas moins contribu modifier la qualit des temps D objet d une coalition humaine qui Pa 1 Mandragola IV 2 Ligurio Che tu te la guadagni in questa notte e che inanzi che tu ti parta te le dia a conoscere scuoprale lo inganno mostrile lamore le porti dicale el bene le vuoi e come senza sua infamia la pu esser tua amica e con sua grande infamia tua nimica E impossibile che la non convenghi teco e che la voglia che questa notte sia sola Que tu la gagnes a toi cette nuit et que avant que tu ne partes tu te fasses connaitre que tu lui montres l amour que tu lui portes lui dises le bien que tu lui veux et comment sans infamie pour elle elle peut tre ton amie et avec grande infamie ton ennemie Il est impossible qu
66. ternit au del de la vie C est cette tension qui op re un tournant qui met fin la lecture de Werther pour sugg rer une identification Par del Parri re plan biographique immanquablement relev par la critique il y a l une fa on d inscrire toute la relation entre Charlotte et Werther dans un univers de fiction po tique la sc ne de la premi re rencontre tait pour sa part plac e sous les auspices de Klopstock L identification ressentie par Werther au texte qu il lit est l objet d un pressentiment vague de Charlotte elle crut sentir dans son me un pressentiment du terrible projet qu il avait form L issue est elle comprise la mort in luctable de Werther est elle accept e par Charlotte Son silence final peut se lire la fois comme un adieu et un refus de l adieu tel que le con oit Werther c est dire un adieu avant le suicide PATH TIQUE ET TRAGIQUE Ce passage des baisers et de la s paration qui repr sente une sorte de sommet de l intensit dramatique est inscrit dans un 182 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink double mouvement contradictoire d effet de r alit et de po tisation La parole d l gu e dans cette partie L Editeur au lecteur et plus encore l effacement du narrateur suppriment toute emphase et par une pr sence plus imm diate des personnages donnent plus d acuit au path tique simple de la sc ne Il serait sans doute
67. tre le sont in galement Les pi ces de Racine le sont tr s peu et Ph dre particuli rement Les personnages sont tr s fermement dessin s mais ils sont sans myst re Ils sont subtils mais pas complexes Leur ventuelle duplicit est expos e et elle n a donc pas tre r v l e Ils sont tout entiers dans leur langue Le psychologue sans patient ira donc voir chez Corneille plut t que chez Racine Dans Ph dre tout est l tout est dit Et Ph dre fille d une figure caverneuse et d un objet c leste n habite rien que la terre Si elle a des secrets elle les avoue des craintes elle les proclame des tourments elle les confie des voiles ils lui p sent Le metteur en sc ne et l acteur n ont pas percer le personnage puisqu il est tout entier dans ses dires ils ont l exposer et le spectateur non plus il n a qu le constater Euripide a besoin d Aphrodite pour innocenter Ph dre et le Neptune de Racine est plus un homme de main qu un dieu Les personnages de Ph dre sont la surface d un monde sans plis ce monde fronti re entre le souterrain et le c leste entre Minos et Pasipha Si la mise en sc ne est un d pliement que faire quand un texte est d pourvu de plis Pourquoi faudrait il mettre en sc ne Ph dre D autre part le drame racinien est souvent consid r comme un pur po me qui en tant que tel n aurait besoin que d tre lu r cit Ce po
68. triques mais aussi encadr e par deux phrases elles aussi sym triques entre elles o les deux personnages sont alternativement sujets et objets des actions Leur r union symbolique n existe que dans le pronom eux ihnen La retomb e en trois temps s effectue travers la r p tition du nom Werther qui traduit lirruption du langage dans cette osmose silencieuse Dans tout ce passage la pr sence effac e peu bavarde du narrateur fonctionne comme une caisse de r sonance elle concentre l effet en vitant toute amplification EQUIVOQUES DU PASSAGE Dans le tissu m me du texte apparaissent bien des tensions et des quivoques nombre de d tails vont dans le sens contraire d une lecture qui ne verrait dans cette osmose qu un mouvement de Werther trop faiblement repouss par Charlotte La r ciprocit des sentiments tout d abord se lit dans le partage des motions lui m me sensible dans la structure des phrases la r partition des pronoms il et elle ainsi que des pronoms objets Deux phrases se r pondent de fa on marquante introduites respectivement par Dans un complet d sespoir et Dans le 178 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink trouble de ses sens Le sujet de l action est Werther dans la premi re Lotte dans la seconde comme pour faire de cette derni re une r ponse une r action Dans chaque phrase trois actions s encha nent selon une
69. unit probl matique et contradictoire du Livre I de L esprit des lois en tenant compte de sa lettre m me Le neuf de cette lecture c est la lumi re jet e sinon sur un grand cart effectu par Montesquieu tout le moins sur son ferme maintien de deux exigences distinctes un doctrinal 428 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink strabisme divergent Il est vrai que les philosophes s attachent fonder lorigine et les fondements et Montesquieu ne conteste pas la pertinence de la d marche il ne souscrirait pas au mot de Kelsen Ils les philosophes ne d duisent pas le droit naturel de la nature humaine telle qu elle est mais de la nature humaine telle qu elle devrait tre ou telle qu elle serait si elle correspondait au droit naturel Au lieu de d duire le droit naturel de la vraie nature de Phomme ils d duisent une nature id ale de Phomme d un droit naturel dont ils supposent l existence Th orie pure du droit p 96 97 mais comme l crit fermement Goldzink Montesquieu travaille aussi pour lui m me Et ce travail de longue haleine dans lequel il s est engag n est autre que la production des lois auxquelles ob issent les lois positives les lois qui r gissent les rapports concrets entre les hommes dans les diverses soci t s o ils vivent Cette perspective nous conduit discerner d une part la loi naturelle et les lois positives
70. 87 Tous les mots ou passages donn s en italique sont extraits du Journal du Voleur Litt rature et saveur Pimportant n est en rien dans les d tails d un vrai voyage L aventure est imaginaire jusqu la d mesure Donc cette page Les palmes Un soleil matinal les dorait La lumi re frissonnait non les palmes Je voyais les premieres Elles bordaient la mer M diterran e Le givre sur les vitres l hiver avait plus de diversit mais comme lui les palmiers me pr cipitaient mieux que lui peut tre l int rieur d une image de No l n e paradoxalement du verset sur la fete Pr c dant la mort de Dieu sur l entr e J rusalem sur les palmes jet es sous les pieds de J sus Mon enfance avait r v de palmiers Me voici aupr s d eux On m avait dit que la neige ne tombe pas Bethl em Entrouvert le nom d Alicante me r v lait l Orient J tais au c ur de mon enfance son instant le plus pr cieusement consew A un d tour de route j allais d couvrir sous trois palmiers cette cr che de No l o je venais enfant assister ma nativit entre le b uf et l ne J tais le pauvre du monde le plus humble mis rable je marchais dans la poussi re et la fatigue m ritant enfin la palme muir pour le bagne pour les chapeaux de paille et les palmiers Elle a Punit forte d un paragraphe qui s tend tout juste entre le mot palme et le mot palmiers Et en m me temps les prin
71. C Mervaud R emploi et r criture 378 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Toute explication de texte est un combat avec lange La t che est singuli rement compliqu e pour ces unit s textuelles mobiles g om trie variable Habituellement un texte appartient une uvre qui serait gravement mutil e sil en tait soustrait Ces textes voyageurs de l uvre de Voltaire ne sont pas obligatoirement polys miques m me s ils re oivent de contextes diff rents des clairages qui les font miroiter mettant en valeur tel aspect au d triment d autres potentialit s Peut tre doit on expliquer ces textes dans leurs apparitions successives marquant ainsi qu ils ne sont pas univoques Au lieu de chercher cerner leur essence il resterait tudier leurs existences et la question de la beaut du texte serait assez accessoire Dans l Introduction aux Questions sur l Encyclop die par des amateurs Voltaire d clarait Quelques gens de lettres qui ont tudi Encyclop die ne proposent ici que des questions et ne demandent que des claircissements ils se d clarent douteurs et non docteurs Les textes itin rants de Voltaire posent maintes questions non r solues ils demandent des claircissements ils laissent penser sur une conception de l uvre et de l criture voltairiennes ils invitent surtout l instar des amateurs rester douteurs dans l
72. Ces pauvres petits tres tremblaient de tout leur corps l aspect de Salviati dont la figure noire et rid e encadr e dans une perruque blanche avait quelque chose des ministres du Tartare Une immense machine lectrique tait au milieu du cabinet 307 Litt rature et saveur C est bien cela que j avais demand baron dit il M d Olnitz vous avez parfaitement saisi la forme de appareil et il est bien ex cut Vous allez en voir les effets ces mots il prend ces petits enfants i les lie avec quatre courroies de cuir aux poteaux qui supportaient la grande roue de verre et en face des coussinets de frottement Il les dispose dos contre dos de mani re que le bas des reins se touche parfaitement et forme un frottoir naturel s par par la seule paisseur de la roue de verre I tourne ensuite la grande roue avec vivacit bient t le mouvement rapide du verre chauffe ces chairs d licates les tincelles jaillissent on reconna t l agitation de ces enfants la cuisson que ce contact br lant leur cause Voyez voyez s criait Salviati ces tincelles Comme le conducteur lectrique se charge du fluide enfantin Que sont vos gaz sans la mati re du feu qui les dilate Je tiens donc le prinape quand vous rampex encore sur les compos s Et que serait ce si au lien de deux enfants d biles je placais pour frottoir deux femmes aux formes saillantes Quelle affluence de magn tisme affluerait alors et porte
73. Dans le texte de Goethe le contraste est soulign par un jeu d assonances opposant les sons a qui accompagnent les notations de passivit Er harrte und 181 Litt rature et saveur bat und harrte aux sons associ s ce mouvement d nergie riss er sich weg und rief C est une fa on de pr senter le suicide de Werther comme Pobjet d une v ritable r solution Loin de traduire une incapacit supporter la souffrance il est expression d une volont il est cet gard ce que Chateaubriand reprochera Goethe envisag comme positivit Dans cette s paration la mort est inscrite dans Pid e d ternit contenue dans les derni res paroles de Werther Pour toujours adieu La structure circulaire du passage lui conf re une sorte de n cessit tragique puisque ces mots de Werther s clairent par l identification au d but du passage aux vers d Ossian domin s par cette dialectique de la mort et de la vie en forme d h sitation ou de dilemme Pourquoi me r veiller au souffle du printemps Tout le paragraphe est construit autour de cette tension entre les images de la vie naissante souffle du printemps voix caressante ros e du ciel et celles de la mort fl trir temp te d pouiller de mes feuilles Le futur des verbes lui m me qui cl t le paragraphe a cette double fonction de sugg rer un avenir et de renvoyer une
74. Garnier 1971 celui de J L Bory brillante satire celui de B d Astorg qui claire les ambig it s id ologiques de St Ex et de son mythe celui de J Ricardou qui r v le son indigence litt raire 2 Qu on songe au r cit de Fromentin Un Et dans le Sahara 1854 ou au po me de Lamartine Le D sert on l immat rialit de Dieu 1856 entre beaucoup d autres 3 Les quatre paragraphes qui font l objet de cette tude sont situ s aux pages 18 19 320 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink provoquent une fuite du texte aux deux sens du terme comme si St Ex lui m me avait senti le besoin d chapper la st rilit didactique de son uvre comme si ces moments de raptus d sertique venaient crever le texte culbutant le registre all gorique pour c der la pression de cet imaginaire d sertique sous le signe de Pexc s et de la terreur g n rant ainsi une uvre habit e par deux paradigmes incommensurables Voici les deux premiers paragraphes de notre extrait Ce fut an cours de l ann e maudite celle que l on sumomma le Festin du soleil car le soleil cette ann e l largit le d sert Rayonnant sur les sables parmi les ossements les ronces s ches les peaux transparentes des l zards morts et cette herbe chameaux chang e en crin Lui par qui se batissent les tiges des fleurs avait d vor ses cr atures et il tronait sur leurs cadavres parpill s comme l enfant p
75. Ossian est l occasion d une v ritable mise en sc ne de la s paration qui manifeste l intensit de la passion La encore l expression de la passion repose sur une tension pr sentant une intensit sans emphase L change prend une forme th trale et insiste autant sur la gestualit que sur les 176 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink discours Le texte souligne m me dans un mouvement descendant le passage du langage au mouvement la puissance de ces paroles s abattit sur le malheureux il se jeta aux genoux de Lotte La traduction s efforce de rendre compte de ce mouvement de chute plus explicite encore dans le texte original fiel ber warf sich nieder Ce mouvement descendant ce glissement du verbal au gestuel correspond au passage d un cercle de fiction celui du texte d Ossian un autre manifest par la pr sence physique des personnages Le r cit la troisi me personne insiste sur la dimension path tique de la sc ne et renforce l effet de dramatisation Ce c t path tique se lit dans la force gestuelle du passage en particulier dans les mouvements de Werther d abord genoux puis debout au moment des baisers de nouveau genoux enfin couch Cette derni re position est la seule ne pas tre pr sent e comme une action mais comme un tat Il tait allong terre Er lag an der Erde et marque ainsi le terme de cette
76. Particle d fini Car ces palmes sont d avance connues Attendues reconnues Non seulement par le narrateur Mon enfance avait r v de palmiers mais par chacun de nous Elles d finissent elles r sument dans notre culture Pailleurs le voyage ce l bas o peut s accomplir la merveille Connotations pr cieuses bien au del du r f rent g ographique Notons par surcro t la f minit du mot De la Guyane par exemple il est dit plus loin dans le livre que c est wn nom f minin Et la f minit se joint le caract re maternel la Guyane est bonne elle impose l image d un sein maternel elle ressemble 4 Vierge m re Cette r verie nous allons la retrouver ici partir des f minines palmes Palmes objet r el objet imaginaire mot fertile Mais ce sont d j 3732 signes Et il est dit qu on doit s en tenir 12000 Donc courons Un soleil matinal Evocation d un paysage un spectacle un moment Mais surtout po tiquement m taphoriquement l id e de commencement de naissance Palmes matinal m a I Donc le mal Toujours pr sent m me s il n est pas nomm In vitable originaire Beau comme le matin ou les palmes Les dorait Dor mati re m taphorique Ce qwa de pr cieux absolument pr cieux par convention par v rit culturelle ce matin l L or qui vient rejoindre et renverser la mis re celle que tra ne de ville en ville le sujet de ce
77. angoiss fr missante et ballott e entre l amour et la col re elle iui dit C est la derni re fois Werther Vous ne me reverrez pas Et jetant sur le malheureux le regard le plus charg d amour elle se b ta dans la chambre voisine et s enferma Werther tendit les mains vers elle mais nosa pas la retenir Il tait allong terre la t te sur le canap et il resta dans cette posture plus d une demi heure jusqu ce qu un bruit le fit revenir lui C tait la servante qui venait mettre la table Il arpenta la pi ce puis lorsqu il se vit de nouveau seul il alla la porte de la chambre et dit voix basse Lotte Lotte Un mot encore un seul Un mot d adieu 1 Elle resta silencieuse I attendit supplia attendit puis il s arracha de ces lieux en s criant Adieu Lotte Pour toujours adieu Les Souffrances du jeune Werther 1772 trad Joseph Fran ois Angellox Paris Garnier Flammarion 1968 p 152 3 Litt rature et saveur Entre path tique et tragique la sc ne de la s paration dans Werther Ce passage est extrait de la partie L Editeur au lecteur qui forme l pilogue du r cit des Souffrances du jeune Werther Le sujet en est la visite que Werther rend a Charlotte visite que celle ci lui avait pourtant interdite Parce qu elle se d roule juste avant No l elle prend une signification quasi religieuse pr te une dimension sacr e au sentiment amoureux Le centre de
78. c t des arts plastiques une Vue la fascination qu elle exerce et le consentement la pulsion scopique qu est l entr e dans le tableau 1 Le paysage et sa fiction un d cor sc nario r current dans Le Doigt de Dien Le Cur de village Les Paysans dans Territoires de l imaginaire Pour Jean Pierre Richard Seuil 1986 p 85 et 94 BARBEY D AUREVILLY LA VENGEANCE D UNE FEMME Par Marie Eve THERENTY Universit de Montpellier LI Cerd J ai souvent entendu parler de la hardiesse de la litt rature moderne mais je n ai pour mon compte jamais cru cette hardisse li Ce reproche n est qu une forfantente de moralit La litt rature qu on a dit si longtemps l expression de la soci t ne l exprime pas du tout au contraire et quand quelqu un de plus cr ne que les autres a tent d tre plus hardi Dieu sait quels cris il a fait pousser Certainement si on veut bien y regarder la litt rature n exprime pas la moiti des crimes que la soci t commet myst rieusement et impun ment tous les jours avec une fr quence et une facilit charmantes Demandez tous les confesseurs qui seraient les plus grands romanciers que le monde aurait eus Sils pouvaient raconter les histoires qu on leur coule dans l oreille au confessionnal Demandez leur le nombre d incestes bar exemple enterr s dans les familles les plus fi res et les plus lev es et voyez si la litt rature qu on accuse tant d
79. certaines de ces formules 1 Ibid p 931 44 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink sont int gr es quasiment telles quelles dans ce texte des Diaboliques et que Barbey pr voit pour son uvre de soufre la m me d fense argumentative que celle pr vue quinze ann es auparavant pour Les Fleurs du mal Il s agit donc bien d une plaidoirie proph tique qui fait irruption au c ur m me de l uvre le ton oral renvoie aux effets de manche des grands avocats de la Troisi me R publique Barbey s objective et se d crit lui m me travers une p riphrase nigmatique et laudative quelqu un de plus cr ne que les autres Il adopte la po tique des plaidoiries travers les structures cliv es les r ticences les corrections le langage familier les antonomases les r f rences isotopiques au crime qui annoncent le climat judiciaire de la r ception moiti des crimes nombre d incestes accuse Le caract re tr s agressif de cet incihit transparait travers la description de la cible les b gueules les religieux la haute sph re c est dire toute la haute bourgeoisie parisienne pr te condamner et faire censurer la litt rature Ce n est pas la lecture aristocratique que Barbey condamne ici mais il annonce une lecture judiciaire de son uvre dont il se d fend en invoquant non seulement la soci t mais aussi les classiques ou des figures h ro ques de la trag
80. cet change est une lecture d Ossian qui s ach ve avec le premier paragraphe de notre extrait Goethe reprend ici un extrait d une traduction du po me Songs of Selma qu il avait produite en 1771 pendant son s jour Strasbourg et qu il femaniera trois ans plus tard Mais significativement ce patagraphe tr s po tique sur lequel d bute notre passage n en est pas extrait et cr e un nouveau cercle de fiction Le lien tabli chez Werther entre les deux positions du lecteur et de amoureux souligne comme au cours de la premi re rencontre avec Lotte le c t litt raire de cette relation Plus encore il esquisse une mise en fiction de l histoire de Werther pr par e du reste par le contexte d un r cit adress par l diteur un lecteur lui m me personnage de l uvre Le passage d crit la derni re rencontre avec Lotte avant le suicide de Werther Il repr sente de ce fait un sommet de la passion o Charlotte r v le ses sentiments presque malgr elle Mais il constitue en m me temps le moment de la s paration d finitive qui scelle le sort de Werther Tout le texte se tisse donc autour d une dialectique de l instantan et de l ternel autour d une tension entre accomplissement la r alisation de Pamour et son expression po tique c est dire sa mise en fiction C est sur ces contradictions que se construit la n cessit de l issue fatale PAROXYSME DE LA PASSION La lecture d
81. chiens de chasse Les phrases suivantes livrent une sociologie de la d charge marqu e elle aussi dans un tel contexte par une distance ironique L nonciation quitte momentan ment le r cit au pass pour deux propositions de type scientifique au pr sent de v rit g n rale La pauvret ne produit pas les m mes d chets que Plaisance chaque niveau a son fumier Au chaos des ordures le narrateur substitue en r action l ordre d un cadastre d risoire Outre que la structure de la ville est d j affaiblie dans la d charge et que les in galit s restant perceptibles ne sont que transitoires et constituent donc un simple retardement de lin luctable indiff renciation le relev est en effet assez sommaire puisqu il n oppose que les rebuts de la pauvret au filon plus cossu de aisance De part et d autre de cette barri re sociale on observe cependant des ph nom nes diff rents Du c t de la pauvret se poursuit l amalgame des diff rents l ments entrem l s Aux d chets organiques que constituent les crevettes se m langent ainsi des d chets inorganiques papiers des billets de cin ma et morceaux de films Les caract risants sont eux m mes pour partie r versibles ce sont les billets qui sont roses mais ce pourrait aussi bien tre les crevettes si aucun adjectif ne propose de rapprochement explicite on cons
82. collective d finissant la patrie la foule m me populaire est un peuple sans patrie un monstre S agissant de la relation du peuple la patrie la r f rence est naturellement Michelet La patrie c est expression mat rielle de la pens e du peuple Or les foules de la Commune comme celles de la R volution furent stigmatis es comme apatrides On leur d nie le droit de repr senter la population car on a le sentiment qu elles sont du populaire classes inf rieures qui a cess de repr senter de correspondre au concept politique de Peuple En rompant cette relation la patrie la foule devient acteur sans l gitimit ni sens et sort du champ de la repr sentation politique 1 Pierre Rosanvallon Le Peuple introuvable Histoire de la repr sentation d mocratique en France op cit p 12 2 Notes in dites de 1839 Cit par Paul Viallaneix in La Voie royale essai sur l id e de peuple dans l uvre de Michelet Delagrave 1959 p 280 3 Viollet le Duc dans son M moires sur la d fense de Paris d nonce une ville cosmopolite dans laquelle une foule sans patrie sans pays et sans tradition dispose audacieusement des lections et se pr vaut des malheurs du pays pour renverser le gouvernement et se mettre sa place Cit par Cesare Lombroso in Le Crime cause et rem des Paris Schleicher 1899 p 70 398 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Tandis que la foule appar
83. comme les melons sont divis s par c tes et semblent destin s tre mang s en famille ily en 58 a m me aux Indes comme le jaca et chez nous la citrouille qu on pourrait partager avec ses voisins Jacques Bemardin Henri de Saint Pierre tudes de la nature tude XT Application de quelques lois g n rales de la nature aux plantes Paris imprimerie de Crapelet chez Deterville an XII 1804 vol Ill p 56 56 Litt rature et saveur Voici un texte que tout le monde connait Quand on voque le nom de Bernardin de Saint Pierre a peine a t on fini de le prononcer il est vrai qu il est long dire Jacques Henri Bernardin de Saint Pierre ou comme dans l dition de 1804 la derni re publi e de son vivant Jacques Bernardin Henri de Saint Pierre et qu on ne sait pas bien comment l abr ger Saint Pierre ou Bernardin puisque de son vivant m me la confusion s est introduite entretenue par lui entre son nom et le dernier de ses pr noms peine a t on fini de le prononcer donc que chacun y va d j de son sourire en coin de connivence intellectuelle pr t verser dans la franche rigolade et s crier d un air aussi hilare qu inform Bernardin de Saint Pierre ah oui les melons manger en famille Bernardin de Saint Pierre n est il pas tout jamais plus encore que l auteur de la pastorale de Paul et Virginie Phomme des melons Pourtant ce texte que
84. comptable des choses C est pourquoi Pappel se r signer l ignorance et rench rir sur la Foi Soyez donc plus chr tienne ne doit pas tre interpr t dans le sens d une pure et simple acceptation des dogmes de la religion au d triment de la science Il s agit bien au contraire d un appel l Intelligence au d sir infini de la V rit o le scepticisme l gard des r ponses est l envers d une intelligence vif parce qu elle est tout enti re l aveu du d sir Le d sir de croire nous sauve et nous justifie contre tout calcul contre tout dogme parce que loin de se consoler de peu il exprime l infini de ce qui nous manque et l exigence qui na t d une ignorance lucide intransigeante qui se sait elle m me et se convertit en critique radicale de tous les faux semblants Il y a la comme un rapprochement entre la qu te mystique et un absolutisme de PEsprit m me ironie l gard de la petitesse m me f rocit 152 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink P gard des illusions de la frivolit et de la gloire Le d sir comme lacune infinie projette chez les mes fortes une n gativit d capante qui passe infiniment toute adh sion toute compromission pour aboutir attitude ferme qui consiste d abord refuser le r el pour ensuite seulement en maintenant une certaine distance l accepter dire oui sans tre dupe Flaubert c est le p
85. contre attaque de la mani re la plus strat gique qui soit en investissant les arguments de l ennemi pour en d placer limpact C est mettre en pratique le principe proclam au d but du Sermon sur la Providence b tir les forteresses de Juda des d bris et des ruines de celles de Samarie 65 Litt rature et saveur Cet emprunt est donc un hommage Le pr dicateur s empare de la puissance motionnelle de largumentaire picurien en feignant d ignorer sa vis e originelle la conversion la vie philosophique conversio ad philosophiam Mais c est aussi un d tournement Penjeu de la conversion est pour lui exactement inverse Lucr ce veut amener son disciple conclure que la mort n est rien en regard de la vie qui est le seul bien dont disposent les humains et dont ils doivent se saisir pleinement Bossuet veut conduire son auditoire la conviction que la vie n est rien en regard de la mort qui ouvre sur l ternit Ainsi en s appropriant les motifs de la culture de Pautre il pratique la pr dication comme un pi ge Il s agit de l obliger concevoir par lui m me ce qu il est si difficile de lui faire entendre NICOLAS BOUVIER L USAGE DU MONDE Par Guillaume BRIDET Universit Paris 13 CENEL Nicolas Bouvier contre les charognards de l criture Accompagn de son ami Thierry Vernet Nicolas Bouvier quitte Gen ve en juin 1953 a bord d une petite Fiat Topolino pour une travers e du conti
86. coup d il sur les plantes nous verrons qu elles ont des relations avec les l ments qui les font cro tre qu elles en ont entre elles lorsqu elles se groupent les unes avec les autres qu elles en ont avec les animaux qui s en nourrissent et enfin avec l homme qui est le centre de tous les ouvrages de la cr ation II 364 L ironie 1 Littr crit jaque pour d signer le fruit du jaguier Terme de botanique Genre de plantes de la famille des urtic es artocarp es Les deux esp ces artocarpus incisa et integrifolia sont connues sous le nom d arbres pain Le fruit du jaquier n a pas de noyau on le mange cuit et la chair en est d un go t compar celui de la pomme de terre ou de la ch taigne dont elle a la consistance 55 Litt rature et saveur de Flaubert qu il convient de lier aussi bien son refus du romantisme et de ce qui l alimente on sait quel profit Lamartine et Chateaubriand ont tir de la lecture de Bernardin de Saint Pierre ne va sans doute pas sans nostalgie envers une uvre qui dans une sorte d innocence de la litt rature a d crit avec constance et obstination un monde notre mesure BOSSUET SERMON SUR LA MORT Par Mich le Rosellini ENS Lettres Sciences humaines Lyon Qu est ce donc que ma substance 6 grand Dieu J entre dans la vie pour en sortir bient t je viens me montrer comme les autres apres i faudra disparaitre Tout nous appe
87. d fini Sil s agit de go t on ne doit r pondre personne par la raison qu il ne faut pas discuter des go ts mais est il question d histoire s agit il de discuter des faits int ressants on peut r pondre au dernier des barbouilleurs parce que l int r t de la 1 Nonnotte Les Erreurs de Voltaire Lyon MDCCLXX t 1 201 209 chap XXII De Jeanne d Arc 375 Litt rature et saveur v rit doit emporter sur le m pris des libelles Ceci sera donc un proc s par devant le petit nombre de ceux qui tudient l histoire et qui doivent juger Ainsi se plaide devant des sp cialistes le proc s de Nonnotte cet ex j suite savant comme un pr dicateur et poli comme un homme de coll ge Les claircissements historiques entendent r futer syst matiquement Les Erreurs de Voltaire La XVIII sottise s ouvre sur une vive attaque qui conditionne la lecture de la suite Que cet homme charitable insulte encore aux cendres de Jean Hus et de J r me de Prague cela est digne de lui qu il veuille nous persuader que Jeanne d Arc tait inspir e et que Dieu envoyait une petite fille au secours de Charles VII contre Henri VI on pourra rire Cette phrase introductive situe cette XVIIe sottise dans le double registre du ridicule et de l horreur Dans Les Honn tet s litt raires comme dans les Eclaircissements historiques r glement de comptes et mise au point historique s inscri
88. dans Le Temps du m pris Drieu la pratiqu On nous pardonnera de les poser une fois de plus durant Pessentiel du XXe si cle inalt rables comme l or ces questions autour des zincs ont agit tant de gens HONORE DE BALZAC LA FEMME DE TRENTE ANS Par G rard GENGEMBRE Universit de Caen ENTRE A barri re d Italie et celle de la Sant sur le boulevard int rieur qui m ne au Jardin des Plantes il existe une perspective digne de ravir l artiste on le voyageur le plus blas sur les jouissances de la vue Si vous afteignez une l g re minence partir de laquelle le boulevard ombrag par de grands arbres touffus tourne avec la gr ce d une all e foresti re verte et silencieuse vous voyez devant vous vos pieds une vall e profonde peupl e de fabriques demi villageoises clairsem e de verdure arros e par les eaux brunes de la Bi vre ou des Gobelins Sur le versant oppos quelques milliers de toits press s comme les t tes d une foule rec lent les mis res du Janbourg Saint Marcean La magnifique coupole du Panth on le d me terne et m lancolique du V alde Gr ce dominent orgueillensement toute une ville en amphith tre dont les gradins sont bizarrement dessin s par des rues tortueuses De la les proportions des deux monuments semblent gigantesques elles crasent et les demeures fr les et les plus hauts peupliers du vallon A gauche l Observatoire travers les fen tres et les galeries du
89. dans sa sp cificit un beau naturel qui conjugue l ordre et la vari t Les empiristes des Lumi res ne se rallient pas cet impressionnant syst me m me s ils en saluent Pimportance et s ils en reprennent nombre de th ses c est par exemple le cas de Diderot qui Particle Beau de l Encyclop die reconna t la place centrale des concepts d finis par le P Andr lordre les proportions les rapports mais lui reproche de n en avoir pas montr la gen se Reste caract riser le type de lecture qui s applique alors PEssai sur le beau et sur ce point lEssai de Montesquieu fournit des enseignements irrempla ables qui nous instruisent aussi bien sur sa situation propre Comment s op re d une fa on g n rale la r ception critique de louvrage du P Andr Il s agit de maintenir certaines descriptions directement pourvues d un enjeu psychologique tout en laissant de c t leur 1 Ibid p 30 2 Ibid p 40 3 Voir en particulier Comique et com die au si cle des Lumi res Paris L Harmattan 2000 4 Le P Andr est celui qui jusqu pr sent a le mieux approfondi cette mati re en a le mieux connu b l tendue et la difficult en a pos les principes les plus vrais et les plus solides et m rite le plus d tre lu La seule chose qu on put d sirer peut tre dans son ouvrage c tait de d velopper l origine des notions qui se trouvent en nous de rappo
90. de leurs causes secondes qui tiennent l ordre la vari t aux contrastes etc Il en r sulte un propos apparemment descriptif mais qui positivement fournit une r flexion empiriste sur le gout les moyens de distribuer clairement ses crit res et ses r gles C est plut t au Diderot de l article Beau de l Encyclop die qu il revient de conduire une lecture critique explicite du P Andr dont Montesquieu par un autre biais a tir les le ons ALFRED DE MUSSET LORENZACCIO Par Christine MARCANDIER Universit Aix Marseille I ACTE I SCENE IV Une cour du palais du duc LE DUC ALEXANDRE sur une terrasse des pages exercent des chevaux dans la cour Entrent VALORI e SIRE MAURICE LE DUG Valori Votre Eminence a t elle re u ce matin des nouvelles de la Cour de Rome VALORI Paul UT envoie mille b n dictions a Votre Altesse et fait les voeux les plus ardents pour sa prosp rit LE DUC Rien que des voeux Valori VALORI Sa Saintet craint que le duc ne se cr e de nouveaux dangers par trop d indulgence Le peuple est mal habitu la domination absolue et C sar son dernier voyage en a dit autant je crois Votre Altesse LE DUC Voil pardieu un beau cheval sire Maurice Eh quelle croupe de diable SIRE MAURICE Superbe Altesse LE DUC Ainsi monsieur le commissaire apostolique il y a encore quelques mauvaises branches laguer C sar et le pape ont fait de moi un roi
91. de Belley montrant bien qu il connaissait les volumes de M d Urf Il n y en avait alors que trois volumes d imprim s et je les savais presque par c ur parce que je les lisais m me au Coll ge La discr te Astr e montre t elle moins d obstination tre cruelle au pauvre C ladon dit il M d Urf repartit qu il avait espoir qu on vit quelque chose de la sorte avant qu il rejoigne le duc de Savoie Turin car il avait quelque peu avanc dans la quatri me partie Toute l assembl e se r cria qu il voul t bien en permettre que nous en eussions la primeur et je me hasardai demander que s il m y jugeait propre il me donn t quelques pages lire l assembl e apr s le souper Voici M Patru r pondit il en se tournant vers M de Belley qui prendra ses licences en droit Paris au retour du voyage que sa m re lui envoie en faire en Italie pour y aiguiser et subtiliser son esprit Vous ne pourriez jeter les yeux sur une personne qui e t plus damour pour les Lettres et il ma donn 435 Litt rature et saveur assez de preuves de sa passion pour Astr e pour que je hasarde que sa voix d avocat quoique non encore rompue aux d clamations du pr toire par les d clamations du pr toire interrompit M de Belley non encore reprit M d Urf en riant rompue aux d clamations puisse rendre agr able a cette compagnie la lecture de l histoire d Astr e mais les berg res
92. de cendres qui consacre la dissolution des corps est aussi l ment fertile qui voile couvre et borde le texte loign e du centre cette vocation finale n en claire pas moins le texte dans son ensemble Elle l enveloppe d un impalpable et protecteur brouillard dont la mati re en dispersion et rendue incertaine par des glissements m taphoriques fine poussi re couche de cendres brouillard de la m moire qui signalent ses propri t s mixtes et sa fonction ambivalente rappelle bien celles de la vapeur suscit e par le sens selon Conrad Cette derni re page montre l criture du Tramway comme un travail de deuil une qu te toujours l uvre Une criture qui prend le relais du tramway de l histoire et par laquelle le narrateur multipliant les arr ts allant d une s rie narrative celle de Penfance l autre celle d un s jour Ph pital d une p riode Pautre d un lieu Pautre parvient finalement approcher sa m re et en garder le souvenir Convaincu de ne pouvoir combler une perte irr m diable le narrateur esquisse une sortie mais non sans retenir ce que personne ne ramassait ces r sidus t moins dune vie qui persiste et qui lui donnent voir ce qu on lui occultait ce peu qui reste et qui fait du texte ce qui lie Une relation qui a force de liaison c est aussi ce que signifie la d dicace du Tramway R a encore Cet autre
93. de faire pousser des fleurs de rh torique Cela ne vous mettra pas en frais Chaque interlocuteur est d sormais bien d accord sur le protocole de l change et tout est par pour Pultime extravagance du R ve de d Alembert D cid ment moins effarouchable que jamais Julie sert son caf Bordeu substance dont il n est pas besoin d avoir fait beaucoup d tudes pour savoir qu il s agit d un excitant ALEXANDRE DUMAS LES TROIS MOUSQUETAIRES Par Sarah MOMBERT ENS Lettres amp Sciences Humaines Lyon Athos fit un pas vers Milady Je vous pardonne dit il le mal que vous m avez fait je vous pardonne mon avenir bris mon honneur perdu mon amour souill et mon salut jamais compromis par le d sespoir o vous m aver jet Mourez en paix Lord de Winter s avan a son tour Je vous pardonne dit il Tempoisonnement de mon fr re l assassinat de Sa Grace lord Buckingham je vous pardonne la mort du pauvre Felton je vous pardonne vos tentatives sur ma personne Mourez en paix Et moi dit d Artagnan pardonnez moi madame d avoir par une fourberie indigne d un gentilhomme provoqu votre col re et en change je vous pardonne le meurtre de ma pauvre amie et vos vengeances cruelles pour moi je vous pardonne et je pleure sur vous Mourez en paix In am lost murmura en anglais Milady I must die Alors elle se releva d elle m me jeta tout autour delle un de ces re
94. des offres de cr dit et d change Gide en cela est parfaitement keyn sien Cela implique que l existence des hommes et la composition des uvres accepte d en passer par un certain composite Bernard devra apprendre boiter dans la vie et pour cela le roman lui m nage une nuit de lutte avec Ange Le roman lui m me d s cet incipit m le tons et rythmes familiarit et pr ciosit allegro et andante Il m le galement humour et fable forte une histoire de faux p re n est jamais anodine et va toujours chercher le lecteur aux entrailles la o cela remue Mais cette histoire est galement tiss e de jeux de mots Profitendieu Caloub bouclait Caloub sera le dernier mot du r cit Tiss e aussi de clins d il ce meuble 173 Litt rature et saveur a secret contient le cceur d une femme dont nous savons depuis Flaubert qu il est un meuble secrets Tent par le d mon Bernard passe par le haut de la console comme le h ros du Diable boiteux d couvrait par les toits le secret des logis Enfin et surtout Bernard va sortir quatre heures comme en fait foi la pendule r par e Une fa on de reprendre le d bat ouvert par Val ry sur la vanit d un genre le roman qui fait sortir les marquises cinq heures Humour ironie clins d il tout cela loigne le lecteur de la croyance naive qui pourrait tre la sienne Lui aussi va devoir avancer sans trop y croire mais en faisant cr dit La
95. des vivants Arturo fait donc dans le ridicule et la fois sublime destin de Sammy une triple d couverte celle du sens m me de l criture celle de linsignifiance de toute vie et celle de l indiff rence de toute fin Rien de vraiment original dans la r v lation qui se joue ici Contenir le d sert tel semble tre ce moment pr cis du livre 1 Ibid p 199 2 Je souligne 3 Ibid p 199 200 4 John Fante Pleins de vie Paris Christian Bourgeois diteur coll 10 18 Domaine tranger 1952 1988 pour la traduction frangaise p 217 139 Litt rature et saveur ce qui sous tend Pactivit litt raire et la constitue en oasis salutaire Et pourtant le d nouement du roman semble invalider cette lecture valorisante de l entreprise litt raire A ce r ve de mise en chec des forces de pulv risation de l tre dont le d sert est la m taphore privil gi e se substitue le geste d Arturo qui laisse les sables du Mojave absorber avaler son ouvrage Tout se passe donc comme si l uvre im fine contestait de l int rieur le sens propos pr c demment Ce jeu de sym trie inverse est le sympt me d un processus plus g n ral de subversion qui tend d nier au d nouement de Demande la poussi re son statut et sa fonction pour l enfermer dans une circularit st rile et signifier au del Pimpuissance m me du geste litt raire LE LIVRE DE SABLE sa
96. deseur son coute Un prodomme qui se gesoit Seur drap de soie et lisoit Une puchele devant li En un rommans ne sai de cui Et pour le rommans escouter Si estoit venue acouter Une dame et estoit sa mere Et li prodons estoit sen pere Et se pooint esjo r Mout de li veoir et oir Car il n avoient plus d enfans Par Ariane SCHREDER ancienne l ve de l ENS Fontenay Saint Cloud Alors il continue jusqu la salle ny trouve personne ni bienveillante ni malvedlante qui leur adresse la moindre parole Ils travers rent toute la maison Tant et si bien qu ils p n tr rent dans un verger Pour ce qui est de l h bergement de leurs chevaux point de discussion ils n en parlerent pas N anmoins ils furent fort bien tabl s par ceux qui esp raient s approprier l un d entre eux Mais je ne sais pas si leur espoir fut bien fond leur maitre est encore en pleine sant Les chevaux ont de l avoine et du foin et de la liti re jusqu au ventre Monseigneur Yvain entre dans le verger avec derri re lui toute son escorte H voit appuy sur son coude un gentilhomme qui tait allong sur un drap de sote et devant lui une jeune fille lisait haute voix un roman je ne sais pas an sujet de qui Et pour couter le roman une dame tait venue s accouder pr s de l c tait sa mere Et le gentihomme tait son p re Ils avaient bien raison de se r jouir en la regardant et en coutant
97. doit il s ouvrir en refusant de c der aux injonctions de la forme pure trop fermer douard ratera son uvre trop ouvrir Passavant sombrera dans la complaisance Fa on pour Gide de dessiner l entre deux dans lequel doit s inscrire la r ussite de son roman Il n y a pas que la tradition du roman r aliste tre cart e Un peu plus bas la r v lation faite c est le roman picaresque ou le feuilleton populaire avec d part sur les routes et recherche du p re voyez Tom Jones qui sont cart s Sur un autre rythme cette fois moins en d sinvolture qu en rejet violent L hypoth se en est h ch e mise en pi ces dans une s rie de phrases br ves ponctuation forte des n gatives des interrogatives des injonctives s rie qui s ach ve sur une sentence sans appel Aussi bien j en ai mon suffisant pour aujourd hui Nous sommes ici au centre de la pr occupation que Gide marque dans son Journal des faux monnayeurs Son roman ne doit pas faire du cabotage le long de c tes bien connues mais d embl e prendre le large R cit r aliste roman picaresque roman feuilleton il y a peut tre encore une autre forme cart e par deux formules Toute recherche oblige N approfondissons pas Ces deux phrases ne peuvent laisser indiff rent le lecteur d un contemporain capital de Gide crivain de la phrase tr pan et de la Recherche Comment crire son premier roman dans une poque ce point marqu
98. duc est autoris e par le pape presque souhait e elle est une arme politique Tant que le duc s amuse il 1 Sire Maurice sert d ailleurs la transition par deux r pliques jouant d un double sens du mot p e celui qui se croit le droit de plaisanter doit savoir se d fendre votre place je prendrais une p e puis votre esprit est une p e ac r e mais flexible C est une arme trop vile chacun fait usage des siennes Il tire son p e 2 C est Lorenzo de M dicis que le pape r clame comme transfuge de sa justice Paul II ne saurait pardonner au mod le titr de la d bauche florentine Les d sordres de la cour irritent le pape J ai dit les d sordres de la cour Altesse les actions du duc n ont d autre juge que lui m me Le Cardinal Cibo dans la sc ne pr c dente excusait de m me le d guisement blasph matoire du duc en nonne 264 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink ne gouverne pas Mais la d nonciation d Alexandre va plus loin encore elle s attaque enfin la d bauche de la cour papale elle m me ses m urs perverties en un crescendo savamment orchestr s achevant sur la d nonciation du b tard du pape le cher Pierre Farn se qui traite si joliment l v que de Fano B tards m urs homosexuelles le Vatican est ici pr sent dans la lumi re crue de sa v rit historique et litt raire dans une perspective
99. e et les mains jointes Alors on vit de l autre rive le bourreau lever lentement ses deux bras un rayon de lune se refl ta sur la lame de sa large p e les deux bras retomberent on entendit le sifflement du cimeterre et le cri de la victime puis une masse tronqu e s affaissa sous le coup Alors le bourreau d tacha son manteau rouge l tendit terre y coucha le corps y jeta la t te la noua par les quatre coins le chargea sur son paule et remonta dans le bateau Arriv au milien de la Lys il arr ta la barque et suspendant son fardeau au dessus de la rivi re Laissez passer la justice de Dieu cria t il haute voix Etil laissa tomber le cadavre au plus profond de lean qui se referma sur lui Trois jours apr s les quatre mousquetaires rentraient Paris ils taient rest s dans les limites de leur cong et le m me soir ils all rent faire leur visite accoutum e M de Tr ville Eh bien messieurs leur demanda le brave capitaine vous tes vous bien amus s dans votre excursion Prodhigieusement r pondit Athos les dents serr es Alexandre Dumas Les Trois Mousquetaires in Les grands Romans d Alexandre Dumas d de Claude Schopp Lafont Bouquins 1991 p 543 545 120 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink L ordre du roman populaire transparence du r cit et exhibition du code dans Les trois Mousquetaires d Alexandre Dumas la mort de Milady Alexandre D
100. e par 172 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Proust En marquant d s le d part son refus d entrer dans de tels domaines Il en ira de m me pour un autre grand romancier de Papprofondissement le Thomas Mann de La Montagne magique publi e un an avant Les Faux monnayeurs auquel la seconde partie de notre roman doit sans doute son titre jusque dans sa d formation orthographique Saas F e Autant de fa ons de nous dire qu il y a au moins une chose qui ne fera pas l objet d un faux monnayage dans Les faux monnayeurs c est la litt rature des autres UN CONTRAT QUI SE RENOUVELLE Bernard doit dire adieu la croyance Que mettre la place La d sillusion Le pessimisme Le texte nous glisse une autre formule faisons cr dit C est cela Les Faux monnayeurs non pas Paffirmation d un nihilisme mais l id e qu entre limpossible talon or et le cynisme il y a autre chose risquer qui s appelle le cr dit De la croyance au cr dit tel est Pitin raire car le roman ne saurait se passer d un minimum de b n volence C est en cela que cette histoire cens e se d rouler avant la Grande Guerre mais crit apr s elle porte bien la marque des ann es 20 et du d bat sur le statut des monnaies Aux tenants de wrion sacr e et du retour P talon or des monnaies et des valeurs s opposent les partisans d une politique de cr dit et d investissement du risque n cessaire
101. effets d chos r ciproques distance vers l article Abb avec lequel d marre all grement La Raison par alphabet comme le s millant abb de la chanson grivoise sur Pair de laquelle Papostrophe Voltaire O allez vous M Pabb Voir les demoiselles compl tera t on et cet eccl siastique d bauch qui se voit rappeler d embl e qu abb signifie p re et que la procr ation est un acte minemment bienfaisant qui rend service l tat un acte de vertu ne montre t il pas d j comment l absence de chastet devient un vice puisque l activit sexuelle de ce c libataire ne peut s exercer qu aux d pens de la paix des familles que la vertu s emploie instaurer 1 Ces remarques ne s appliquent videmment qu l dition de 1769 EMILE ZOLA GERMINAL Par Muriel LOUAPRE Universit de Paris V C tait la vision ronge de la r volution qui les emporterait tous fatalement par une soir e sanglante de cette fin de si cle Oui un soir le peuple l ch d brid galoperait ainsi sur les chemins et il ruissellerait du sang des bourgeois il prom enerait des t tes il s merait Vor des coffres ventr s Les femmes hurleraent les hommes auraient ces m choires de loups ouvertes pour mordre Oui ce seraient les m mes guenilles le m me tonnerre de gros sabots la m me cohue offroyable de peau sale d haleine empest e balayant le vieux monde sous l
102. elle Pinformation m me s il y a une diff rence entre le fait d tre de retour et celui d tre proche C est que le lieu fait pour ainsi dire partie de la nomination il y a quelque chose qui pour tre d fini porte un nom et une localit Cela s appelle Th s e et cela se trouve en ce lieu 292 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Dans la longue tirade des reproches du p re son fils IV 2 v 1050 Tu parais dans des lieux pleins de ton infamie La tournure laisse presque penser que linfamie est une caract ristique du lieu tout autant que d Hippolyte puisqu elle se maintient en dehors de la pr sence de l inf me Hippolyte ne transporte pas son infamie suppos e avec lui elle remplit les lieux o il se trouve Nous pouvons commencer entrevoir pourquoi un lieu peut avoir une pr sence c est qu il n est pas seulement l espace neutre o un corps peut se tenir Le lieu est affect par ce qui s y trouve il peut devenir comme une caract ristique d un corps et peut tre m me un de ses attributs Cette pi ce de Racine construit un monde o un corps fait corps avec son lieu et o corr lativement le lieu est une partie du corps L espace est corporis Or quel est endroit particulier sp cialis pourrait on dire o un corps fait corps avec son lieu o le lieu est lui m me corporis sinon le th tre On aurait donc l un argument puissa
103. elle repr sente L l ve lecteur p n tre le r ve d Alceste sans avoir passer par l inconscient ses pompes et ses uvres mais d un coup par une narration condens e ce que nous avions souhait trop t t nous Pavons maintenant en mieux Rester seul dans la maison de C lim ne en chasser tous les autres et en les chassant chasser C lim ne la coquette hors de C lim ne Faute de faire le d sert autour de C lim ne il ira se cacher en d sert ou le dira Et Pherm neutique s indignent les critiques de bonne ou de mauvaise foi Elle d coule de la concision du propos mais on n oubliera point ni les spectateurs ni les praticiens pourquoi ignorer qu ils r fl chissent aussi Tout contenu abstrait se trouve dans ce qui est crit dans la forme de l adresse et comme les spectateurs du Misanthrope on attendra un peu avant de pouvoir disserter sur la morale comique peut il seulement y avoir une morale dans ce syst me contrast que Rousseau d nonce Cependant d j parce que l exc s des mots appara t dans nonc pataphrastique parce que le temp rament d Alceste et sa v h mence explosent parce qu enfin l irascibilit du personnage affirme purement et simplement sa radicalit le lien entre le jeu et Peffarement moral des Lumi res est tabli BILAN Quand Le Prince p dagogue ne lutte pas contre ses coll gues seul contre tous comment penser sans s opposer c
104. elle vous donne pour rentrer en mati re dans sa phrase de reconnaissance elle ne se serait pas du tout trahie De ce 24 ao t 17 Les Liaisons dangereuses kitre 33 d Gallimard Folio 1972 p 99 101 206 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Relisez votre lettre la le on d criture de Mme de Merteuil ou la critique litt raire de Laclos INTRODUCTION Eprouver la force et le pouvoir du langage afin de s assurer la ma trise du r el tel semble tre l un des enjeux de l intelligence libertine Dans un si cle o la question de la langue appara t plus que jamais au c ur d un d bat sur la v rit et l erreur la raison et le sentiment les mots disent c est selon ce qu on pense ou autre chose que ce que l on pense rebours des cris rousseauistes de la passion les quivoques libertines repr sentent le langage d une nature d voy e puisqu elle se retourne contre la raison et le sentiment eux m mes Dans son dition de la Pl iade Laurent Versini a t le premier remarquer ce que cette lettre devait la Seconde Pr face de La Nouvelle H loise Mais en faisant de Mme de Merteuil adepte de la parole soutenue par l action l h riti re du classicisme face un Valmont plus moderne homme des formes nouvelles de la s duction et de l honn tet ne risque t on pas de r duire la port e du d bat qui traverse la lettre et sous tend
105. en sombre h ros romantique L intervention de milord de Winter tout en reprenant la structure r p titive et la valeur performative de lintervention d Athos avec un triple je vous pardonne la d place sur le terrain politique De Winter beau fr re de la coupable fait entendre la voix de la famille et de la soci t se fait juge des crimes politiques de Milady Enfin en inversant le sch ma r current instaur par les deux premiers juges d Artagnan transforme le pardon en imploration pardonnez moi et replace radicalement le jugement sur le terrain central du romanesque populaire savoir celui de Paventure et de Pamour ce que traduit le changement de lexique fourberie col re meurtre vengeances Les r les red finis madame indigne d un gentilhomme retrouvent la labilit propre au roman o contrairement ce qui se passe dans les univers du drame ou de la trag die politique dans lesquels se situaient les deux premiers accusateurs chacun peut dissocier son r le social et ses actions voire changer de r le au cours de Pintrigue Conform ment sa place centrale dans le quatuor h ro que dont il assure la synth se d Artagnan parle un langage simple du c ur et de l humanit je pleure sur vous ma 122 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink pauvre amie qui incite plus que les emplois codifi s de ses camarades l identific
106. entour du texte sans une majuscule initiale qui aurait signal un commencement et pourvu de l adverbe encore signale en effet d entr e de roman importance que l auteur donne ce qui continue subsiste et 1 Toute vocation finale accorde d ailleurs une importance particuli re aux enveloppes l corce la peau et aux bordures sentier bord de buissons d un bleu p le Vall e bord e de miriers cailles bord es d un rugueux bourrelet brun deux alo s nains aux feuilles bord es de jaune soulignant la qu te de limites et de rep res en ce lieu seuil 355 Litt rature et saveur reste Adress e sa femme elle souligne son r le un r le que son pr nom pris dans son acception commune roue gorge d une poulie rapproche providentiellement de celui de P criture soulever des fardeaux transmettre un mouvement en utilisant des forces indirectes et d placer pour retenir ou relier SPINOZA TRAITE THEOLOGICO POLITIQUE Par Pierre Fran ois MOREAU ENS Lettres amp Sciences Humaines Lyon CHAPITRE VII De linterpr tation de l Ecriture 1 Tous assur ment reconnaissent en paroles que l Ecriture sainte est la parole de Dieu qui enseigne aux hommes la vraie b atitude ou le chemin du salut Mais dans le s faits ils montrent tout autre chose Car le vulgaire ne semble se soucier de rien moins que de vivre selon les enseignements de l Ecriture
107. est donc aussi la belle Place Le blond ne livre pas son myst re crivait Aragon dans Le Paysan de Paris Et le rouge donc Une telle hypoth se a pour elle de supposer que fonctionne dans cette page un proc d qui ne compte pas pour rien dans la richesse et la finesse de l criture d Aragon le jeu sur plusieurs r f rents temporels Ainsi le m pris des batailles contemporaines qu prouve Mercadier ne peut que signifier par del Affaire Dreyfus sa c cit la guerre de 1914 1918 qui s annonce mais elle voque aussi celle de tous les indiff rents de Pentre deux guerres devant larriv e de cette autre temp te lointaine qui clatera en 1939 Selon le m me jeu sur plusieurs bandes temporelles une r verie de 1898 pourrait ais ment 29 Litt rature et saveur renvoyer m me si le personnage n en a par force pas conscience ce qui n explosera qu en 1905 pour advenir en 1917 Il reste il reste que chez Aragon rien n est simple Admettons que le Castel Vecchio renvoie au Kremlin apr s tout c est ce que le texte dit explicitement Mais s agit il d tablir entre eux une opposition irr m diable entre l individualisme des condottieres et le sens communiste de la collectivit Et donc entre l Italie fasciste de l entre deux guerres et la Russie sovi tique S agit il plut t de sugg rer une liaison secr te comme si seule la Russie nouvelle permettait de r ver
108. et pour Dieu ou comme une couleur qui luit dans une prairie Mais ma vacation et celle de M de Gen ve sont du tout contraire une telle vie qui est plus proche de la contemplative des clo tres que de l active de l v ch et c est pourquoi j ai la charge d crire cette diversit des v nements singuliers pour contre butter l exaltation des aventures h ro ques et les grandes passions par lesquelles se distinguent les h ros de roman qui ne sont rois et reines que pour donner leurs sentiments et leurs passions la semblance de la hautesse que nous avons mise en leur condition Dans les histoires d votes cependant la le on a pour th tre la chaumi re du bucheron comme le palais du Prince et la main de Dieu renverse galement les conseils de l un et de Pautre Et contrairement aux bergers et berg res qui sont tous repli s sur un secret qui ne fait qu exciter la curiosit de leurs compagnons et qui les pousse toujours raconter leur histoire bien que leur premi re vertu d t tre la discr tion le secret est ici qu il n y point de secret et que la vie d vote est un livre ouvert Mais combien moins astreignante que ce mis rable secret de passions ou d aventures humaines par lesquelles les romans pensent pouvoir rendre leurs personnages singuliers et qui croyez en le pr tre sorti de son confessionnal sont si communes qu elles ne m ritent point d tre recueillies et si dangereuses que le dev
109. et saveur c ur de son fonctionnement amoureux Du d sir du texte na t le d sir pour l tudiante Ce qui dans un contexte anglo saxon ou puritain on songe au beau roman de J M Coetzee Disgrace serait voqu comme une mal diction appara t ici comme une heureuse disposition assurant au ma tre un renouvellement quasiment infini des ses plaisirs professionnels et intimes m l s La r f rence sous jacente est plut t ici celle du XVIIe si cle fran ais Et le texte un hommage discret aux multiples plaisirs tir s de l exercice typiquement fran ais qu est l explication de textes SALOMON CERTON PESTOIS LASSE SOUS UN ARBRE ESTENDU Par Jean Charles MONFERRAN Universit de Paris IV7 J estots lass sous un arbre estendu J estois lass sous un arbre estendu Ne songeant rien Florine qu en ta grace Le sommeil vient met sa main sur ma face Tout aussi tost j ay ton ris entendu H que de joye et de bien m a rendu Ce doux esclat Je mesveille j embrasse Autour de moy mais je devins tout glace Ne trouvant rien de mon bien attendu Je cherche en vain en vain je me tourmente En vain en l air je mr escrie et lamente Rien qu une Echo ne redonne ma voix H las mon bien n est donc rien que mensonge Helas mon heur ne me vient donc qu en songe En rien aussi desormais je n en vois Salomon Certon Vers leipogrammes et autres uvres en po sie de SCSDR Salomon Certon Secr taire du R
110. fait la plus large place a une rh torique de la dis simulation pour faire cho au r cent ouvrage de Jean Pierre Cavaill Tous les personnages sont plus ou moins les dupes les uns des autres tous simulent et dissimulent tous font du mensonge un usage prot iforme et souvent extravagant La seule figure h ro que qui semble r sister ces jeux d illusion et de duperie est situ e d s les premiers vers dans un pass r volu ostensiblement fantasmatique th tralis par Agrippine sous la forme d hypotyposes r currentes souvenir blouissant dont il est impossible Agrippine de faire le deuil il s agit de Germanicus faisant briller v rit et vertu de par le monde assassin au sommet de sa gloire Mais le paradoxe est bien que Pobsession de venger Germanicus fera de cette image clatante et bonne ce qui motive les strat gies les plus t n breuses cruelles et machiav liques impliquant une virtuosit inou e dans l ordre du mensonge Ces d tournements politiques des l ments pars d un discours picurien ath e s accompagnent alors d une s rie de perversions thiques dont il serait ais de prendre la mesure En ses finalit s l action de S janus ne vise aucun moment une volupt pure pens e sur le mod le d une sagesse de l dolentia et de la anquillitas animi En ses modalit s l action politique de S janus qui comme celle des autres personnages est essentielle
111. fleurs Sur ce lieu pr cieusement sur naturel joue la lumi re solaire qui le recouvre et qui embrasse Le baiser solaire sur les feuilles crin vert tach d or va tre d rang par l apparition d un faune puis reconstitu Les trois quatrains de ce texte voquent trois temps la nature avant le surgissement du faune au moment de son apparition puis apr s lui La structure m trique et la structure syntaxique ne co ncident pas pour mieux mettre en valeur le bondissement de l animal dieu qui cr ve l cran de verdure la fin du premier quatrain Rimbaud recherche la vitesse dans ce cadre champ tre il semble que la po sie et le sujet se jettent le po me est le lieu du jef po tique un lieu jaculatoire Des vers rapides imposent une criture baiser une criture morsure Hormis un point la fin du deuxi me quatrain et deux tirets au premier vers du troisi me ici pas de ponctuation forte il s agit de sugg rer la vitesse de l apparition et de la fuite En son mouvement m me le po me conduit d une po tique des impressions m l es jeu serein du soleil sur la feuill e dans les trois premiers vers une po tique de apparition le calme est soudain rompu tout devient vitesse et voracit On assiste une sorte de viol en tout cas un r veil brusque tout comme va se trouver r veill e au plan s mantique expression clater de 312 Explications et commentaires offerts J
112. formation Il semble alors que l art du romancier pour eux est bien encore du domaine de l loquence et non de ce domaine encore cr er qu est la litt rature 444 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink tant de vraies et si dangereuses Et remarquez quelle est la fa on de proc der de tous ces narr s L auteur a trouv dans la chronique Histoire de quelqu un que nous appellerons Eudore et dont les v nements sont assez curieux pour qu il songe la donner au public La donnera t il pour ainsi dire de source et comme nue Non point Il y ajoutera les descriptions des lieux qu il fera aussi magnifiques que les palais des rois de POrient m me si le pauvre Eudore s tait habitu dans une cabane il donnera Porphelin Eudore peut tre l tait il la chronique n en dit rien une famille et des voisins de simple particulier il le fera riche citoyen et de muet qu il tait dans la chronique il fait Eudore aussi bon orateur que s il e t tudi dans nos meilleures Ecoles afin de lier ensemble les pisodes et lui faire r v ler les passions extraordinaires qui n avaient jamais agit son simple courage Ces discours ne sont au fond que les richesses sur les brouillards de Seine dont son personnage est dot d un trait de plume Ces passions ne sont au fond que des palais magnifiques que Pimagination de l auteur construit sur la cabane du coeur de son personnage Et l habilet de Par
113. grammaire de la po sie po sie de la grammaire Jakobson Il est clair que de telles orientations apparaissent contradictoires avec les directions que trace la pens e du discours que nous avons esquiss e partir de la Note Qu il s agisse de la conception de la langue envisag e dans ce structuralisme litt raire comme structure abstraite g nitrice de l infinit des textes de la situation de la phrase mise dans la langue et dont le discours mimerait l organisation de la grammaire prise comme synonyme du syst me alors que Saussure cherche tenir ensemble la distinction entre langue et discours et le continu qui les lie qu il fait de la phrase l ouverture vers linfini du discours qu il r cuse la grammaire et ses subdivisions traditionnelles 1 CF R Jakobson Probl mes des tudes litt raires et linguistiques dans Questions de Po tique Seuil 1973 p 57 Il est assez piquant de constater que Barthes dans son texte de 1966 pr c demment voqu p 16 qualifie la qu te du mod le de projet assez nouveau 2 T Todorov chapitre Po tique dans l ouvrage collectif Qu est ce que le structuralisme Seuil 1968 p 102 336 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink pour lui substituer les relations du syntagmatique au patadigmatique Sans doute faudrait il montrer que c est avec les concepts du discours c est dire le sens la valeur Phis
114. gratteur de papier un m chant po te qui ne sait seulement pas faire un sonnet Non non je n ai pas encore peur des ombres Eh corps de Bacchus que me font les discours latins et les quolibets de ma canaille J aime Lorenzo moi et par la mort de Dien il restera ta LE CARDINAL Si je craignais cet homme ce ne serait pas pour votre Cour ni pour Florence mais pour vous Dur LE DUC Plasantez vous cardinal et voulez vous que je vous dise la v rit U lui parle bas Tout ce que je sais de ces damn s bannis de tous ces r publicains ent t s qui complotent autour de moi c est par Lorenzo que je le sais I est glissant comme une anguille il se fourre partout et me dit tout N a t il pas trouv moyen d tablir une correspondance avec tous ces Strozzi de l enfer Oui certes c est mon entremetteur mais croyez que son entremise si elle nuit quelqu un ne me nuira pas Tenez Lorenzo para t au fond d une galerie basse Regardez moi ce petit corps maigre ce lendemain dowie ambulant Regardex moi ces yeux plomb s ces mains fluettes et maladives peine assez fermes pour soutenir un ventail ce visage morne qui sourit quelquefois mais qui n a pas la force de rire C est l un homme craindre Allons allons vous vous moquez de lui H Renzo viens donc ici voila sire Maurice qui te cherche dispute LORENZO montant l escalier de la terrasse Bonjour messieurs les amis de mon cousin LE DUC Lorenzo
115. honorer et remercier M d Urf M de Belley dit la messe au chateau et toute la maisonn e et tout le village y furent M d Urf avait fait enfermer ceux qui avaient outrag M de Belley et pensait les faire fouetter dans la cour mais M de Belley ne le voulut point disant qu un homme de 437 Litt rature et saveur peu comme lui Poffense tait sans cons quence et que pour Poffense faite Dieu il n tait pas ma tre du ch timent L apr s midi fut belle et M d Urf pensa se donner du rel che en conduisant ses h tes sur une hauteur d o lon d couvre toute la contr e jusqu au Rh ne Au loin de grands monts du c t du Levant s l vent promptement au dessus d une large plaine unie et de marais dans lesquels s attarde et reprend ici haleine le Rh ne au sortir de la course rapide qui lui fait traverser les montagnes Le soleil au penchant de sa course touchait aux grands monts derri re nous et le calme de cette campagne tait peine troubl par le bruit des derniers travaux de la journ e somma procul uillarum culmina fumant maioresque cadunt altis de montibus umbrae C est ce qui sans doute fit dire M de Belley Le S ran ne vaut il pas le Lignon et le Valromey le Forez et les paysans d ici ont ils envier le calme et la paix de ses bergers et berg res M d Urf fit P tonn Par ma foi Monsieur on dirait que vous n avez pas hier au soir chapp une ban
116. ils poussent en avant leur caravane l o nul effort ne pr vaut contre l inertie de tendue Dans l imaginaire du d sert cette capacit du d sert an antir la relation dynamique et cin tique riche de nombreux liens symboliques avec le processus vital de Phomme l tendue et mettre celle ci sous le signe d une inertie mortif re qui annule la fois le mouvement la vitesse la direction et Porientation joue un r le consid rable Cette pure de d sert qu est la contr e du Miroir devient ainsi une machine entropique comme l indique la r solution n gative de la tension entre l effort l nergie et l inertie La glu de lumi re prolonge travers les jeux sur les tats de la mati re la tonalit mortif re la lumi re l ment sublime qui voque souvent un r el lib r de ses pesanteurs mat rielles notamment dans la symbolique religieuse devient ici mal fique en se condensant par surchauffe au point d atteindre cet tat quivoque qu est la viscosit Devenue mati re paissie et opacifi e elle connote une paralysie mortelle qui vaut aux chameliers d tre par transfert analogique de la dimension spatiale la dimension temporelle engloutis dans l ternit l entrave au processus cin tique horizontal est convertie en un mouvement vertical d engloutissement dans la min ralit incandescente au terme duquel ils seront fondus dans l
117. immorale hardiesse a os jamais les raconter m me pour en effrayer cela pr s du petit souffle qui n est qu un souffle et qui passe comme un souffle dans le Ren de Chateaubriand du religieux Chateaubriand je ne sache pas de livre o l inceste si commun dans nos m urs en haut comme en bas et peut tre plus en bas qu en haut ait jamais fait le sujet franchement abord d un r cit qui pourrait tirer de ce sujet des effets d une moralit vraiment tragique La litt rature moderne laquelle le b gueulisme jette sa petite pierre a t elle jamais os les histoires de Myrrha d Agrippine et d dipe qui sont des histoires croyez moi toujours et parfaitement vivantes car je n ai pas v cu du moins jusqu ici dans un autre enfer que l enfer social et j ai pour ma part connu et condoy pas mal de Myrrhas d dipes et d Agrippines dans la vie priv e et dans le plus bean monde comme on dit Parbleu cela n avait jamais leu comme au th tre on dans l histoire Mais travers les surfaces sociales les pr cautions les peurs et les hypocrisies cela Sentrevoyatt Jules Barbey d Aurevilh La vengeance d une femme Les Diaboliques 1874 Repris dans Barbey d Aurevilly Les Diaboliques Robert Lafont 1981 p 1017 Litt rature et saveur G n alogie de la chambre d chos aurevillienne du salon a la presse Ce texte est l cipif d une des Diaboliques de Barbey d Aurevill
118. inanit Par ailleurs la description de l aim e reste particuli rement floue Lors du r cit de r ve la seule notation sensible concerne son ris ce doux esclat et la description attendue des attraits de son corps se substituent les impressions que la Dame veille chez Pamant Ces 84 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink impressions sont rendues par des substantifs abstraits joie bien ou par un adjectif aux contours impr cis doux En outre si le ris du vers 4 rel ve bien d une observation concr te il n en est plus tout fait de m me pour le syntagme cens le reprendre ce doux esclat exempt de tout compl ment d terminatif le substantif gagne en richesse de sens mais aussi en abstraction L clat de rire se meut en clat en brillance et la saveur concr te dispara t au profit d une impression plus diffuse De fait par un subtil jeu sylleptique ce doux clat peut aussi bien renvoyer au rire de la Dame le d monstratif a alors une valeur anaphorique que d signer celle ci par une sorte de p riphrase m tonymique le d monstratif poss de alors une valeur d ictique Par la suite Pamante ne sera plus d sign e que tr s indirectement par le truchement de substantifs abstraits mon bien mon heur Enfin et surtout les marques de la seconde personne pr sentes dans le premier quatrain ta gr ce ton ris disparaissent de man
119. l abstraction de ce sonnet ne peut tre imput e la seule esth tique mani riste Une des singularit s du po me de Certon est de laisser une place extr mement r duite au songe v 4 6 alors que le r cit de cet pisode constitue l essentiel de la trame des po mes environnants que ceux ci en profitent pour d crire les charmes rotiques de celui ci ou pour opposer Pagr able douceur onirique les d sagr ments du r veil or ici P v nement presque vid de tout contenu sensible est comme vacu au profit d une analyse de l absence D ailleurs la chronologie du r ve n est pas nettement tablie le lecteur peut tout au plus supposer qu il s agit d un r ve fait lors d une sieste et non d un r ve nocturne Or ces d tails anecdotiques qui permettent d ancrer le songe dans une r alit sensible se voient souvent pr cis s dans les po mes de l ge baroque ainsi des r ves du petit matin annon ant la plupart du temps des songes rotiques Parall lement la Dame reste ici d sesp r ment lointaine Si elle est certes d abord d sign e par son nom ce nom ne constitue en rien un d tail pittoresque ou r aliste Pur nom de convention Florine renvoie l univers de la pastorale et poss de en outre une fonction path tique associ e qu elle est d autres lieux de la bucolique le jeune homme assoupi sous l arbre cette appellation pr pare une idylle qui se verra frapp e d
120. l ment de la doxa d poque Que Pon pense au mot de Goncourt qui passera dans la bouche de tous dans les ann es 1880 La sauvagerie est n cessaire tous les quatre ou cinq ans pour retremper le monde Le monde mourrait de civilisation Quand les estomacs sont pleins et que les hommes ne peuvent plus baiser il leur tombe des bougres de six pieds du Nord Maintenant qu il ny a plus de sauvages ce seront les ouvriers qui feront cet ouvrage l dans une cinquantaine d ann es On appellera cela la r volution sociale La conjonction de ces opoi n est cependant pas le fait de Zola ou des Goncourt sans tre non plus directement issue de 1789 Entre la R volution et l criture de Germinal ne s interposent pas seulement ces l ments appel s une belle post rit litt raro m diatique mais un texte qui en constitue la source trois gards en ce qu il a model la perception de la R volution en ce qu il fait partie des lectures de r f rence de Zola en ce qu il a mis en place les l ments de la doxa de la seconde moiti du si cle relatifs au peuple au loup et aux barbares Il s agit des Origines de la France Contemporaine d Hippolyte Taine 1 E et J de Goncourt Id es et Sensations 1866 Le topos deviendra en ce si cle scientifique une loi voqu e par le Grand Dictionnaire Universel du XIX si cle de Pierre Larousse selon lequel l volution s par e des classes socia
121. la critique litt raire de Laclos dans les Liaisons Devant les apories du genre pistolaire sentimental et les efforts trop visibles d ploy s par ces nergum nes du sentiment la formule est encore de Rousseau il s agit de trouver une voie qui tire partie des effets du th tre auquel Laclos s int resse de pr s et qui tienne compte des critiques dirig es contre les artifices du roman Au nom du naturel la litt rature doit mimer une parole sans appr t restituer l motion de la communication imm diate Le d bat est ancien la vraie rh torique se moque de la rh torique Mais l exigence du naturel est r activ e par la r flexion que m nent les philosophes sur la langue des passions et par les th ories linguistiques de Rousseau Le paradoxe est ici pouss son comble la lettre se r fl chit comme refus de la lettre la litt rature comme refus de la litt rature 207 Litt rature et saveur Il s agit pas tant d un scepticisme l endroit de l art qu une r flexion sur les moyens nouveaux que Vartiste doit mettre en uvre pour faire vrai La lettre 33 peut ainsi tre lue comme un moment critique dans le roman En convoquant la figure du lecteur comme caution esth tique elle vise comparer l intention de P crivain et l effet que les lettres produisent Par ce mouvement r flexif de l criture la lettre devient ainsi le th tre de sa propre po tique Il va sans dire que pour
122. la fl trissure de son paule Vautrin tourne en rond sans cesse repris il revient la case d part le bagne m taphore probable du travail de for at auquel tait contraint Balzac Le jour o il efface sous des cicatrices nouvelles la marque du bourreau il reprend une trajectoire rectiligne jusqu la direction de la S ret Et on ne peut s emp cher de voir sur la peau labour e de Trompe la mort alias Pabb Herrera le transfert au moins au sens plastique des brouillons de Balzac pages imprim es des preuves obscurcies de corrections qui les barrent en tous sens 1 Roland Barthes Sade Fourier Loyola 1971 Points Seuil p 129 Barthes r pertorie par ailleurs p 156 les machines sadiennes avant de s int resser aux cha nes que forment si volontiers les corps p 169 dans un syst me libidinal qui n est pas sans voquer la cha ne syntaxique et la rentabilisation la Henry Ford le capitalisme m caniste tant P ultime expression contemporaine du sadisme 2 Apollinaire s Onze mille verges Editions J ai Lu p 97 3 Pour une analyse plus sp cifique de l tre papier et de l criture au fouet voir Jean Paul Brighelli Justine ou le rapport textuel in L Uneb rue n 18 Actes du colloque pour le centenaire de Jacques Lacan 5 6 mai 2001 304 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Le XIX si cle en arrive dissocier la peau de la personne et
123. le c ur de Pautre Mais qui a dit que lamant enfui sentait quelque d sespoir que ce f t Marianne entrelace les logiques rationnelles et imaginatives elle a tant t recours aux arguments rationnels le verbe causer que l on retrouve deux fois dans la m me phrase encore par figure de r ciprocit en est preuve assez claire tant t Papitoiement sensible La lucidit ne lui fait pas d faut elle sait que sa douleur tout ing nieuse qu elle est ne procure pas assez d nergie pour compenser l absence du corps aim Or si la douleur est ing nieuse c est parce qu elle provient de l instance rationnelle r aliste bless e Mais elle ne suffit pas c est pourquoi elle puise dans l imagination par le biais du souvenir regarder ces yeux dans lesquels je voyais tant d amour et qui me faisaient conna tre des mouvements qui me comblaient de joie qui me tenaient lieu de toutes choses L amour est ici du c t du corps si Pon veut le convertir en cas d absence il faut donc soit d velopper une v ritable mystique du c ur comme le fait Elvire cette autre religieuse abandonn e soit contraindre sa raison juger des circonstances en d mystifiant Pamour en exacerbant l orgueil ou encore par un m pris des sens ou de l amant en question Mais en ce dernier cas on comprend que les passions de la raison privent celle ci du plaisir sensuel Marianne quant elle prend parfois
124. le disais personne ne le sait mieux que moi la seule vue d une p e le fait trouver mal Allons ch re Lorenzetta fais toi emporter chez ta mere Les pages rel vent Lorenzo SIRE MAURICE Double poltron fils de catin 259 Litt rature et saveur LE DUC Silence sire Maurice pesez vos paroles c est moi qui vous le dis maintenant pas de ces mots la devant mot Sire Maurice sort VALORI Pauvre jeune homme LE CARDINAL rest seul avec le duc Vous croyez cela Monseigneur LE DUC Je voudrais bien savoir comment je n y croirais pas LE CARDINAL Hum c est bien fort LE DUC C est justement pour cela que jy crois Vous figurez vous qu un M dicis se d shonore publiquement par partie de plaisir D ailleurs ce n est pas la premi re fois que cela lui arrive Jamais il n a pu voir une p e LE CARDINAL C est bien fort c est bien fort Tks sortent Lorenzaccio acte 1 s ne 4 Paris G F 1988 p 187 195 260 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Le th atre et ses doubles Lorenzaccio est un drame inscrit dans l Histoire celle de la Renaissance italienne bien s r mais aussi celle de la France qui vient de porter Louis Philippe sur le tr ne apr s la destitution de Charles X cons quence de la R volution de juillet 1830 C est aussi le drame d une r volution complexe et paradoxale loin de signifier un changement brusque et complet le terme renvoie davanta
125. le discours On sait que le terme discours ne figure pas dans index du Cours de linguistique g n rale Payot 1916 publi par Charles Bally et Albert Sechehaye alors que les textes recueillis dans les Eerits qu il s agisse des documents d couverts en 1996 ou de documents d j connus et souvent publi s renferment plusieurs occurrences de ce terme dans une acception diff rente du classique parties du discours qu il faut rapprocher d autres expressions qui y apparaissent aussi comme le discursif la langue discursive le langage discursif Sans doute ces mentions rapides peu tay es situ es dans des esquisses ne s organisent elles pas dans une laboration th orique suffisamment consistante pour tenir lieu d alternative au Cours ou en tous cas sa lecture structuraliste telle qu elle s est canonis e travers les dichotomies syrchronie diachronie langue paroke syntagme paradigme Mais il s agit d indices suffisamment insistants pour r sister la tentation de consid rer 1 Titre d un article paru dans le Mercure de France en f vrier 1964 repris avec d autres essais sur le m me sujet dans Les mots sous les mots Les anagrammes de Ferdinand de Saussure Gallimard Le Chemin 1971 2 C est sous cette d nomination que ces trois paragraphes sont venus rejoindre le corpus saussutien dont un volet essentiel a paru sous le titre Ecrits de linguistique g
126. le nom de P crivain a t il gard la vague m moire de sa racine h bra que fut ce celle d un trou Le nom de ma famille est Peretz En h breu cela veut dire trou Mais dans les deux cas le r sultat est un air trompeur de familiarit un nom h bra que Peretz qui finit par sonner comme un nom breton Perec un nom commun allemand devenu nom propre juif et qui par une incongruit de l Histoire au terme de ses alt rations recommence sonner comme un nom commun si peu commun toutefois qu il d signe pr cis ment la perte du sens commun Cinoc sinoque En effet il y a de quoi devenir fou Car cette histoire est aussi celle d une mutilation g n alogique au terme de laquelle le plus familier le plus familial devient tranger oncle et tante de Perec ne portent pas le m me nom car les conflits nationaux ont laiss leur marque jusque dans les fratries la n e s appelle Esther Chaja Perec le pu n Eliezer Peretz et le cadet Icek Judko Perec de m me chez les Kleinhof on s appelle Klajnhoff Keinhof Klinov Szinowcz Linhaus La jubilation de l crivain trouvant dans cette diaspora des noms propres de quoi nourrir pour la seconde fois son gout des combinatoires verbales a pour revers la chronique de la fin d un monde a peine contrebalanc e par le fil de plus en plus t nu de la m moire Cinoc se souvenait que son p re lui racontait que son p re
127. lecture et effort contemplatif par del le d sespoir ou la turbulence des passions Il faut travailler tre attentif une page de Montaigne Shakespeare ou Goethe quitte s ennuyer dans un premier temps afin d atteindre le d sceuvrement des passions ainsi que la conscience aigu de l infini du d sir et du n ant de toute satisfaction Et faire le vide par la critique de toute vanit de Pautre c t de cette d r alisation assum e en un lan qui contient la ferveur mystique au m me titre que la contemplation esth tique en spectateur d gag des choses des tres et du monde il y a refuser ef accepter le choix d termin de la v rit nue Le r el ne 153 Litt rature et saveur vaut que d avoir t soumis l preuve de la d rision Intelligence qui s est mesur e l infini de ce qui est par la puissance de la mise en suspens de l irr alisation et enfin de la pure contemplation o Part la religion et la science se confondent surpasse le r el et suffit justifier l existence GUSTAVE FLAUBERT MADAME BOVARY par H l ne KUNTZ Universit de Paris IIT D s la premi re sc ne il enthousiasma Il pressait Lucie dans ses bras il la quittait il revenait il semblait d sesp r il avait des clats de col re puis des riles l giaques d une douceur infinie et les notes s chappaient de son cou nu pleines de sanglots et de baisers Emma se penchait pour le v
128. les besoins de l analyse nous avons lachement r duit les jeux de ces esprits forts un exercice d Ecole pour parler comme Mme de Merteuil Nous dirons pour notre d fense que c est pr cis ment ce quoi l Institution nous a si laborieusement dress LE PROGRAMME DE LECTURE Dans cette lettre comme dans tout le roman il n a pas difficile de voir que le proc s de lecture est fortement dupliqu chaque fois qu un pistolier s attache commenter les lettres qu il re oit il anticipe et oriente le travail du Lecteur en lui soumettant sa propre lecture des faits et une appr ciation singuli re de leur narration Mme de Merteuil lectrice attentive cumule dans cette lettre les fonctions de cteur et de censeur La lettre appara t plus que jamais comme le lieu d un conflit de pouvoir et la Marquise enferme Valmont dans une relation actancielle fauss e Le Vicomte qui p rore et vient chercher la reconnaissance de ses talents libertins est raval au rang d un simple apprenti D s le d but de la lettre Mme de Merteuil impose un syst me d change in gal o le savoir est la clef du pouvoir Plus loin l imp ratif relisez et le pr fixe it ratif renvoient Valmont sa copie Dans cet exercice de style qui ressortit au pastiche le Vicomte a failli Mme de Merteuil va se charger de le lui signifier en accompagnant ses remarques acerbes 1 Dans Les Liaisons dangereuses la relectur
129. lieux et de tous les temps o vivent les hommes Ainsi vous accorderiez que les romans pour peu que l auteur soit habile artisan et qu il ait retir de ses tudes et du contact des hommes quelque science de leur moeurs de leur caract re et de leurs passions touchent au vrai lorsqu ils peignent ces m mes passions au naturel sous Phabit de personnages divers Peut tre en effet un tel argument pourrait il surprendre le jugement de qui ne s est point attach cette mati re Il y faut s il vous pla t une contention d esprit qui si rait mieux au cabinet qu une promenade en bonne compagnie Mais quel besoin avons nous de rajouter encore au monde des passions feintes alors qu il y en a 1 Coeur et courage s emploient encore indiff remment l un pour Pautre note de l diteur 2 D Urf semble ici tre beaucoup plus pr cis que ne dirait une lecture contemporaine Les moeurs le caract re et les passions sont bien les trois sujets d tude et de cr ation que donne Aristote les moeurs c est thos les caract res l etbos ithos au dix septi me comme dans les Femmes savantes et les passions le pathos le premier sujet de la morale l thique les deux autres constituants de l art de l orateur Il faut se souvenir que les trois personnages en pr sence d Urf Camus et le r dacteur des M moires qui crit la sc ne sinon le futur tudiant qui y assiste Patru sont tous trois avocats de
130. lui parlait de cousins qu il avait et qui s appelaient Encore s agit il moins d une tradition vivante que des chos d une m saventure collective d une mauvaise plaisanterie Qui peut dire du reste ce que durera cette transmission O est le fils de Cinoc Le personnage arrive en France dans l imm diat apr s 1 Perec George W ou le souvenir d enfance Paris Gallimard 1975 Deno l Paris Gallimard coll L imaginaire p 52 2 Ibid p 51 3 Ibid p 52 284 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink guerre en 1947 Visiblement seul qu est il rest de sa famille polonaise Rien n est dit tout se devine La diaspora est alors un destin qui inscrit dans la g ographie et l histoire au c ur des familles dans la lettre des noms et au plus intime de lidentit la conscience irr ductible de la porosit des fronti res de la fragilit des tablissements et des impond rables de l Histoire Le on de cet internationalisme par provision il n y a pas de nom propre juste des noms communs toujours conventionnels fluctuants p rissables D cid ment Cinoc bien raison de ne pas savoir prononcer son nom et de trouver secondaire de tenir le prononcer de telle ou telle fa on Justement Qu est ce donc qui fait soup onner que le locataire du sixi me tage est juif sinon la bizarrerie de son patronyme ce je ne sais quoi qui le rend la fois famili
131. m mes s harmonisent cette description est celle du paradis avant la faute Mais d j quelques d chirures de la toile font appara tre l envers du tableau L harmonie est menac e la belle et profonde unit dissimule les t n bres et la mort Apr s la cit c leste la cit d en bas celle de l ombre marqu e d un sceau fatal Eclair e seulement par les lumi res artificielles d un beau monde cupide c est celle qui bient t appara tra aux yeux dessill s d un Rastignac Les rares visions panoramiques de Paris seront d sormais des visions de la m taphore malheureuse Balzac arch ologue de Paris SEDES CDU 1986 p 321 322 33 Litt rature et saveur voyageur le plus blas artiste et voyageur tant des figures minemment romantiques d j voqu es pr c demment dans le roman Soulignons ensuite la mise en place des plans au premier plan une vall e profonde sur le versant oppos les toits domin s par le Panth on et le Val de Gr ce et gauche PObservatoire puis dans le lointain les Invalides une d coupure sur la droite avec le canal Saint Martin et le dernier plan Belleville Entre ces trac s le d tail des l ments du tableau ainsi constitu de La magnifique coupole nuages Une deuxi me partie la ville que Pon ne voit pas entre la Piti et le cimeti re de l Est le P re Lachaise ouvert le 21 mai 1804 les deux appellations sont usit es L
132. mais par Bacchus ils m ont mis dans la main une esp ce de sceptre qui sent la hache d une liene Allons voyons Valori qu est ce que cest WVALORI Je suis un pr tre Altesse si les paroles que mon devoir me force vous rapporter fid lement doivent tre interpr t es d une mani re aussi s v re mon coeur me d fend d y ajouter un mor LE DUC Ow oui je vous connais pour un brave Vous tes pardieu le seul pr tre honn te homme que j aie vu de ma vie V ALORI Monseigneur l honn tet ne se perd ni ne se gagne sous aucun habit et parmi les hommes il y a plus de bons que de m chants LE DUC Ainsi done point d explications SIRE MAURICE Voulez vous que je parle Monseigneur tout est facile expliquer LE DUC Eh bien SIRE MAURICE Les d sordres de la Cour irritent le pape LE DUC Que dis tu la toi Litt rature et saveur SIRE MAURICE J ai dit les d sordres de la Cour Altesse les actions du duc n ont d autre juge que lui m me C est Lorenzo de M dicis que le pape r clame comme transfuge de sa justice LE DUC De sa justice I n a jamais offens de pape ma connaissance que Cl ment VI Jeu mon cousin qui cette heure est en enfer SIRE MAURICE Cl ment VII a laiss sortir de ses Etats le libertin qui un jour d ivresse avait d capit les statues de l arc de Constantin Paul II ne saurait pardonner au mod le titr de la d bauche florentine LE DUC Ah parbleu Alexandre Farn
133. mani re Demande la poussi re est ce livre de sable que r vera Borg s en 1975 livre qui comme le sable n a de commencement ni de fin C est en effet la notion m me de fin qui vole en poussi re avec ce d nouement Tout y est paradoxalement retour l origine L isotopie d un ternel recommencement informe la structure m me du texte Camilla rejoint le lieu auquel dans l imaginaire d Arturo elle n a cess d appartenir Les collines l avaient pr sent Qu elles la cachent bien ces collines Qu elle puisse sen retourner la solitude intime de ces collines Qu elle puisse vivre avec les pierres et le ciel avec le vent dans les cheveux jusqu la fin Qu elle parte comme a 1 Borg s Le Livre de sable Paris Gallimard coll Folio 1975 1978 pour la traduction fran aise p 140 2 Le roman remotive de fa ons multiples le zpos de la femme paysage le recours la comparaison florale qui fait de Camilla cam lia une fille fleur du Vieux Mexique Op cit p 250 p 101 ou l identification constante du corps de Camilla avec un territoire de collines onduleuses et de dunes d sertiques Op cit p 205 p 217 p 237 p 264 par exemple 140 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink De m me le sable gris s boulle tout le temps et se reform e de lui m me derri re chaque pas et la nuit qui pren d fin fait place un jour de
134. ments de la Note Si ce dernier instaure dans la langue une division fondamentale toute diff rente de celle que Saussure a tent e entre langue et parole s il y a pour la langue deux mani res d tre langue dans le sens et dans la forme la langue comme s miotique la langue comme s mantique si la notion de s mantique nous introduit au domaine de la langue en emploi et en action si le s mantique r sulte d une activit du locuteur qui met en action la langue on peut lire dans ces nonc s au del de la d marcation explicite vis vis du couple langue parole du Cours un des d veloppements possibles de la phrase embl matique de la Note selon laquelle la langue entre en action comme discours Mais de quelle action s agit il au juste Face linterpr tation pragmatique o la question consiste savoir ce que l on peut faire en se servant de la parole la question 1 E Benveniste La forme et le sens dans le langage Probl mes de linguistique g n rale 2 Gallimard collection TEL 1974 p 224 225 333 Litt rature et saveur principielle est ici de cerner ce qu on fait dans Pacte m me de parler le probl me de la mise en uvre de la langue comme discours s entend dans les termes de Saussure comme le fait d affirmer un lien entre deux concepts qui se pr sentent rev tus de la forme linguistique C est dans ce fer dans cette mise en rapport entre d
135. mouvoir le balancer de cette presse Je my placai machinalement et j essayai de le tirer mot Plus fort L dit vivement Talbot en mappuyant des coups de corde sur les paules Je poussai un cri de douleur il redoubla Plus for malbeureuse ajouta t il en r it rant ses coups Je tirai en arri re de tout le poids de mon corps et plusieurs reprises Alors un soupir plaintif sortit de dessous la planche Ce mot terrible L mir la presse me saisit comme un trait de feu je l che le balander et tombe sur mes genoux c est assez dit Talbot donnez l impression madame Deux ouvriers levent aussit t la pi ce de laine je vois grand Dieu les cheveux me dressent encore d pouvante je vois l infortun Durand tendu sous la presse que je viens d rangler par une corde attach e au levier Sur sa poitrine est un papier o j ai grav moi m me ces mots mort damnation pour les traitres Jusqu au dernier instant de ma vie ce spectacle affreux sera pr sent ma m moire en ce moment m me il me glace il me donne une fi vre ardente Je devins insens e je saisis dans mon d lire le levier j cartai tout ce qui m entourait mais succombant bient t au nombre la fatigue l horreur je fus li e et remport e dans ma chambre R roni Saint Cyr Pauliska ou la Perversit moderne 1798 ditions Desjonqueres 1991 p 98 Litt rature et saveur R v roni et le body art Rappelons la situati
136. naturaliser le rejet des classes populaires la peur qu on en a et la d fiance P gard des institutions d mocratiques d fiance que Zola a conserv e lui aussi de son exp rience de reporter versaillais lors des d buts de la I R publique Partag entre cette doxa des intellectuels qu il contribue d velopper et une connaissance meilleure et plus juste des m canismes conomiques de leurs b n ficiaires et de leurs victimes Zola cherche r inscrire la doxa dans un moule narratif acceptable pour sa propre thique d o le caract re ind cidable du texte qui nous servi de point de d part Oui le collectif foule est un agr gat dangereux d individu qui ont perdu leur libre arbitre au profit d une force collective qui tient de la pulsion mais ce que d autres d noncent comme une communaut dissoute du fait de la m diocrit des individus qui la composent est en r alit un rassemblement d individus d shumanis s par leurs conditions de travail et c est la d shumanisation seule qui fait le danger des actions collectives Le mal n est donc pas la foule le mal vient de ce qu il puisse exister une foule c est dire des individus d shumanis s L angoisse de la foule peut ainsi tre maintenue et exploit e convertie en fantasme la fois pour les spectateurs bourgeois de la grange et pour cet autre voyeur fascin qu est le lecteur Cette sc ne de Germinal constitue donc un table
137. nove ore e bench to avessi grande piacere e non mi parve buono Ma poi che io me le fu dato a conoscere e che io l ebbi dato ad intendere l amore che io le portavo e quanto facilmente per la semplicit del marito noi potavano vivere felic sanza infamia alcuna promettendole che qualunque volta Dio fa ssi altro di lui di prenderla per donna ed avendo ella oltre alle vere ragioni gustato che diferenzia dalla iactura mia a quella di Nicia e da e baci d uno amante giovane a quelli duno marito vecchio doppo qualche sospiro disse Poi che l astuzia tua la sciocchezza del mio marito la semplicit di mia madre e la tristizia del mio confessoro mi hanno condotta a fare quello che mai per me medesima arei fatto io voglio iudicare che e venga da una celeste disposizione che abbi voluto cos e non sono sufficiente a recusare quello che 1 cielo vuole che io accetti Per io ti prendo per signore padrone guida tu mio padre tu mio defensore e tu voglio che sia ogni mio bene e quel che T mio marito ha voluto per una sera voglio ch egli abbia sempre Fara ti adunque suo compare e verrai questa mattina alla chiesa e di quivi ne verrai a desinare con esso noi e l andare e lo stare star a te e potreno ad ogni ora e sanza sospetto convenire insieme lo fui udendo queste parole per morirmi per la dolcezza Non potetti rispondere a la minima parte di quello che io arei desiderato Tanto che io mi truovo el pi felice e contento uo
138. occupe elle seule la moiti du texte typiquement proustienne cette phrase proc de plus par coordinations que par subordinations et dans sa sinuosit m me capte une infinit de reflets cr e des correspondances et essaie de suivre les mouvements m mes du narrateur C es une longue p riode oratoire en quatre temps dont le premier s ach ve avec le verbe tourna le second avec le nom toiles le troisi me avec le coude de la voie ferr e Une pause plus nette se fait jour alors avec le point virgule et avec la locution conjonctive si bien que sugg re implicitement la r p tition du mouvement d crit 273 Litt rature et saveur dans les lignes pr c dentes En fait le premier temps descriptif est suivi imm diatement de la perception du narrateur Il en va semblablement pour les deux autres temps L imbrication des deux montre dans la construction m me de la phrase la fa on dont Proust int riorise toute description Le jeu des temps correspond galement aux tournants de la phrase L arr t du mouvement D s la premi re phrase la diff rence entre la vitesse du train et celle des barques produit une illusion d optique ces derni res semblent immobilis es elles s vertuent sans avancer En outre Pennui sugg r par expression longs voyages para t immobiliser le temps Le rose est fix mort Le caract re d finitif de la couleur est mis en relief par le f
139. parle 34 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink dans le prologue de a Fille aux yeux d or mais qui ne vaut ici que comme masse opposer aux monuments Ces monuments sont autant de points de rep res et de signes renvoyant la grandeur nationale le Panth on scientifique le Val de Gr ce l Observatoire militaire les Invalides politique le Luxembourg religieuse Saint Sulpice comparer avec la vision de Paris du haut du P re Lachaise Ses yeux s attach rent presque avidement entre la colonne de la place Vend me et le d me des Invalides Le P re Goriot Le narrateur proc de par variations en marquant les diff rences de luminosit de couleur de forme de ligne Utilisation d un lexique architectural coupole d me amphith tre lanterne esth tisation magnifique fantaisies l gante jeux des lignes les courbes des monuments tortueuses fen tres et galeries de couleur noir bleu tres grises de lumi re le jour flamboie anthropomorphisation terne qui assure une transition entre le registre esth tique et Vhumanisation m lancolique orgueilleusement spectre tout conspire constituer le texte en morceau de bravoure pictural Il s agit d animer la disposition qui pourrait tourner l num ration tout en cr ant un tableau la fois composite
140. pas de le dire vertueux pas plus au reste que le refus de l auteur de le dire vicieux sinon vilain Ce que les chr tiens appellent vertus est donc autre chose dons c lestes excellentes qualit s saintet dans la mesure ou tout cela n a pas d incidence sociale mais la certitude que l entr e d un saint Bruno le fondateur de l ordre des Chartreux dans le monde le rendrait vertueux puisqu il y ferait du bien sans doute s effrite dangereusement au paragraphe suivant Pinscription dans des rapports sociaux n est que la condition n cessaire minimale de la manifestation de la vertu temp rance ou chastet ne sont pas forc ment convertibles en vertus sociales mieux ou pire c est le contraire qui peut se produire car remarque l auteur sans illusion sur les relations humaines dans la soci t les d fauts augmentent et les bonnes qualit s diminuent Voila donc entendue la cause des vertus cardinales et th ologales L objecteur va alors attaquer de front la liaison n cessaire et suffisante de bienfaisance et vertu partir des exemples inverses des deux derniers paragraphes Comment dire vertueux des monstres tels que N ron ou Alexandre VI Borgia sous pr texte qu il leur est arriv de r pandre des bienfaits ou objection de Praticien au fait du probl me th ologique de la validit en vue du salut de la vertu des pa ens des pa ens comme Pe
141. peur d tre sujet aux censures de ceux qui ne manqueraient pas de leur rendre leur change s ils produisaient leurs Lettres Ne voyons nous point dans les Saintes Ecritures toutes sortes d exemples d amour et que feront ces repinceurs de vertu au sujet de ceux qu ils jugeraient en leur temps des moins honn tes Tout peut tre tourn au bien comme au mal Aussi reprit M d Urf n est ce pas cette fin que tendent vos crits Et devons nous pas ne pas tre moins impatients de voir quelque nouvelle histoire d vote de votre plume que vous de continuer les aventures de C ladon M de Belley repartit assez brusquement qu il n tait pas raisonnable de placer c te c te les simples histoires remarquables dont il se servait pour tourner au bien la passion naturelle de lire et les r cits 436 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink de longue intrigue par lesquels M d Urf levait le roman dans les Lettres que l Ecole appelle Humaines et que les plus polis honorent du nom de Belles L on ne voit point que l on dresse sur une m me table le festin du prince et la simple ch re du rustique Ce sur quoi il nous pria de lui permettre de se retirer et pour notre part de continuer le souper Le Secr taire de M de Belley qui dinait vis a vis de moi au bas bout dit que M de Belley avait coutume de passer une grande heure en exercices pieux avant de se mettre au lit et qu il n y manq
142. place d autres Mais il d veloppe l id e de Pimplacable succession des g n rations en une v ritable sc ne o les auditeurs se trouvent impliqu s Ici encore la construction s op re graduellement dans le mouvement m me de la phrase Apr s une premi re formulation m taphorique cette recrue continuelle du genre humain qui r f re assez pompeusement le ph nom ne du renouvellement des g n rations la pratique militaire du recrutement le pr dicateur intervient famili rement pour la corriger par sa traduction triviale je veux dire les enfants qui naissent S impose alors au plus pr s de l exp rience commune une sc ne en mouvement command e par la polys mie du verbe s avancent qui permet de figurer le progr s physique et social des g n rations montantes par la progression d une colonne en marche Dans cette repr sentation du cours de la vie humaine auditeur est conduit par le vous qui le solidarise Porateur partager la place de lexclu Le geste d exclusion a beau tre modalis e semblent nous pousser de l paule son agressivit est confirm e par le discours direct qui donne la parole aux jeunes impatients et met l auditoire dans la position du destinataire 62 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Bossuet ne laisse d ailleurs ses auditeurs aucune possibilit de se rassurer sur leur jeunesse car il prend soin de r it rer la sc ne du point de vue inverse ce
143. potentiel hilarant un rapport de convenance entre la taille des fruits et les hommes qui les consomment Si convenance il y a elle doit en effet se lire de fa on privil gi e dans le fruit qui est le but final de la plante Le fruit est le caract re principal de la plante On en peut juger d abord par les soins que la nature prend pour le former et pour le conserver Il est le dernier terme de ses productions II 440 Or les plantes elles m mes sont finalement comme toute la nature et plus particuli rement celles dont nous consommons les production en vue de Phomme Aussi les observations multipli es nous montrent elles que la cerise est conform e pour la bouche la pomme pour la main le melon pour la famille et le jacq fruit du jaquier pour le voisinage Les fruits destin s nourrir l homme comme il est pr cis tout de suite apr s cet extrait sont proportion avec lui Bernardin de Saint Pierre a conscience de la difficult et du risque de ridicule de ses assertions Il reconna t que cette mani re d tudier la nature est m pris e aujourd hui de la plupart des naturalistes III 42 Mais il ne se soucie pas de faire science au sens moderne du terme ni d tre compt au nombre de ces savants qu il a tant d cri du moins il affirme ne pas s en soucier Il veut avant tout c l brer la nature et la Providence qui se laisse d chiffrer travers elle Si nous jetons un simple
144. premier crire des vers lefpogrammes ainsi dicts pource qu en chaque sonnet une lettre est delaiss e notre po me appara t en effet dans le recueil au sein d une s rie alphab tique sous la lettre P dont le sonnet marque la disparition Voila pour l anecdote Mais sauf avoir le gout de la plaisanterie de potache le d tour par la petite histoire n explique gu re le choix de ce po me parmi les trois s ries d alphabeths r dig s par Certon d autant que la contrainte lipogrammatique mise en pratique ici ne met que bien peu en valeur le caract re virtuose du po te l viction du P dans un sonnet d casyllabique soit dans une suite de cent quarante syllabes ne constituant pas loin s en faut une gageure insurmontable en fran ais Si Pon veut tenter d appr cier le choix de Schmidt il semble plus opportun de r fl chir la fa on dont celui ci a int gr ce sonnet dans son anthologie En effet en regroupant les po mes autour de quelques 1 Et comble du lipogramme motiver l omission de la lettre P par l homonymie avec pe omission que le dernier vers viendrait justifier de mani re plus que douteuse 82 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink th matiques ou sc narios de Eros baroque Schmidt invite une lecture comparative des diff rents po mes certains sont manifestement l parce qu ils permettent de montrer un des d veloppements arch typi
145. prisent d abord la rose La diversit n est ni la diff rence ni la distinction Celle l est don de Dieu et celles ci artifices de l homme C est bien ce qui me fit dire tant t que ce qui me poussa pier ainsi M de Gen ve c est qu il apparaissait si singulier de ne pas tre singulier Car le d sir d tre distingu est mettre au rang des passions de l homme et c est ce qui a caus en notre soci t cette minutieuse ordonnance des conditions et des honneurs cette recherche du m rite et cette garde v h mente d un honneur si chatouilleux qu il est la cause de plus de crimes que ne l est la passion de Pamour Le vrai moyen de retourner Pamour de Dieu est d abandonner ce souci de soi et de s en remettre la volont de Dieu comme M de Gen ve le disait dans sa parole sur la statue C est l le vrai moyen d tre soi dans la diversit de la Cr ation Et comment alors direz vous votre 447 Litt rature et saveur secret et le diss minerez vous pour tre l exemple de la vraie vie objecta M d Urf Ne serez vous point muet que dis je muet mais aussi sourd et aveugle occup d un secret que nul ne pourra pattager et peut tre comme Silvandre fuyant la compagnie des hommes et ne se confiant qu un chant qu il se chante lui m me lorsqu il se croit loin de toute soci t Oui peut tre la vraie vie est elle comme un chant qu on ne chante que pour soi
146. qu accueillir dans le sein de leur compagnie ces porteurs de secret qui ne sont singuliers que par leur infortune et les malheureux accidents du monde comme peut tre la charit veut la v rit de la confession pour remettre le p cheur dans le sein de l Eglise Ah Monsieur s exclama M de Belley Dieu m accorde de parler de lettres aussi bien que vous parlez de th ologie Mais ne me faites point fr mir envisager que le roman puisse se guinder penser tre m me Pombre du confessionnal dont linviolable secret prot ge P ternelle part d obscurit en l homme dont se sert le Malin pour les infatigables et monotones trames dont il tente de nous s duire Car la nature en nous tous est si peu diff rente que la charit nous demande d aimer le p cheur comme nous m mes et les passions si semblables en chacun que nous devons nous souvenir que nous y sommes tous galement sujets Ainsi pour ma part je n estime pas que ces passions doivent faire le sujet des narr s n tant que ce qui est le plus commun en l homme et le plus vraisemblable Et je r prouve assez cette science naissante des passions de l homme qui n tant guid e que par la libido sciendi et non par la charit vise la nue connaissance des passions quand ce n est pas leur utilisation politique sans s lever au pardon du p cheur qui a le bien prendre est le domaine r serv de l glise Nos narr s tendront bien mieux a leur fi
147. qui en compte cinq Dans les chambres des 194 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink vergers les fruits le compar sont des globes des lampes des perles des pendeloques les comparants Cette premi re observation met en vidence une structure syntaxique et m taphorique qui se d veloppe dans les douze premiers vers les quatre comparants surimposent ou substituent la repr sentation banale des vergers l image mentale de chambres nocturnes suffisamment clair es pour laisser deviner des pr sences f minines Elle pr pare la lecture des cing derniers vers o les m taphores 7 absentia font directement r f rence l humain Comme ils dorment longtemps sous les mille paupi res vertes Et comme la chaleur par la hate aviv e leur fait le regard avide Une r flexion sur association op r e par cette structure entre les mots fruits globes lampes perles et pendeloques met en vidence la polys mie du vocabulaire qui fait ici la coh sion du po me Dans le contexte du vers 2 le mot globes est d abord lu comme une d signation m tonymique des fruits repris par le mot lampes ce sont des globes des lampes v 4 il voque m taphoriquement des globes lumineux Ainsi deux caract ristiques des fruits pommes p ches ou cerises la rondeur et la couleur se trouvent comme objectiv es par les diff rente
148. r cit d j crit ce que sugg rait peut tre de mani re ironique expression ne sai de cui suit son d sir ou celui de sa dame C est ainsi que 94 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink r tif aux obligations de la coutume et du conte Yvain trouvera une chapp e pour lui et les demoiselles laissant 4 son triste sort la jeune fille trop docile et son p re outrag Si enfin l on se rappelle que l tymologie du mot x renvoie au tissu les tisseuses exploit es peuvent alors appara tre comme une m taphore du travail de P criture dont s affranchit un auteur qui joue dans la variation et dans l affirmation d une composition conjointure nouvelle des traditions et des attentes pour revendiquer un travail qui ne se fonde que sur le d sir Celui du chevalier de la dame mais aussi sans doute de l auteur Ce que revendiquait d j d une autre mani re le prologue du Chevalier de la Charrette roman que Chr tien crivait en m me temps que le Chevalier au Lion Puis que ma dame de Chanpaigne Vialt que romans a feire anpraigne Je Lanprendrai molt volentiers Puisque ma dame de Champagne veut que jentreprenne de faire un roman je Lentreprendrai tr s volontiers CYRANO DE BERGERAC LA MORT D AGRIPPINE Par Jean Charles DARMON Directeur adjoint lettres ENS Ulm S JANUS De courage et d esprit cette trame est tissue Si C sar massacr quelques nouveaux
149. r t d voil comme principe de toute action politique mal compris et mal r gul peut motiver une guerre sans fin de tous contre tous DIDEROT LE REVE DE D ALEMBERT Par Florence LOTTERIE Universit Marc Bloch Strasbourg Suite de l entretien pr c dent Interlocuteurs Mademoiselle de Lespinasse Borden Sur les deux heures le docteur revint D Alembert tait all diner dehors et le docteur se trouva en t te t te avec mademoiselle de Lespinasse On servit Ils parlerent de choses assez indiff rentes jusqu au dessert mais lorsque les domestiques furent loign s mademoiselle de Lespinasse dit au docteur MADEMOISELLE DE LESPINASSE Allons docteur buvez un verre de malaga et vous me r pondrex ensuite une question qui ma pass cent fois par la t te et que je n oserais faire qu vous BORDEU H est excellent ce malaga Et votre question MADEMOISELLE DE LESPINASSE Qne pensez vous du m lange des esp ces BORDEU Ma foi la question est bonne aussi Je pense que les hommes ont mis beaucoup d importance l acte de la g n ration et qu ils ont eu raison mais je suis m content de leurs lois tant civiles que religieuses MADEMOISELLE DE LESPINASSE Et qu y trouvez vous redire BORDEU Qu on les a faites sans quit sans but et sans aucun gard la nature des choses et l utilit publique MADEMOISELLE DE LESPINASSE T chez de vous expliquer BORDEU C est mon dessein
150. rence l ordre et une anthropologie de l inqui tude Je ne 1 Ainsi J Ehrard qui rapproche bon droit les observations de Montesquieu sur la vari t des id es du P Andr L Id e de nature en France dans la premi re moiti du XV IIe si cle Paris Albin Michel r d 1994 p 300 2 Voir J Deprun La Philosophie de l inqui tude en France an XVIIIe si cle Paris Vrin 1979 en particulier p 76 80 245 Litt rature et saveur retiendrai pour commencer qu une th se centrale nonc e par Poratorien lui m me et qui fonde la tentative du P Andr Dans le sentiment du beau Malebranche reconna t la manifestation d un ordre intelligible qui s impose Dieu m me Pourquoi penses tu que tous les hommes aiment naturellement la beaut C est que toute beaut du moins celle qui est l objet de Pesprit est visiblement une imitation de l ordre C est manifestement sous cet horizon que le P Andr produit sa typologie dont Pun des m rites sera de reconna tre au beau naturel une sp cificit et des qualit s propres tout en le r f rant un ordre id al 1 On distingue d abord le beau essentiel ind pendant de toute institution m me divine et qui se rapproche de lordre malebranchien s imposant Dieu m me lorsqu Il pense les rapports de perfection Ce beau essentiel se caract rise avant tout comme chez saint Augustin par une certaine unit originale souveraine t
151. res il crit il est triste quand on s endort dans une bergerie de trouver son r veil les moutons chang s en loups et cependant en cas de r volution on peut s y attendre Op cit p 101 3 Hippolyte Taine Origines de la France contemporaine op cit p 335 395 Litt rature et saveur entre le peuple et la foule et mieux la d composition de Pun par Pautre Il faut voir dans cette d formation une cons quence des terreurs de la Commune l o pr tend agir le peuple observateur ne voit qu une foule dangereuse et avide plac e sous le signe de la f minit hyst rique et castratrice Zola exploite galement cette veine et de Pivrognerie cette fois m le mais d vastatrice et bestiale Si Pon revient notre extrait on note que Zola maintient le vocable peuple mais op re une indiff renciation progressive des acteurs selon un proc d qui lui est familier lorsqu il glisse sur sa pente pique amorc sur le th me du peuple le texte glisse au pronom ind termin on puis au vague terme vicariant ces choses qui ach ve par le biais d un fort neutre pr sentatif le glissement du spectacle en vision de la sc ne vue son quivalent symbolique Voici les acteurs remplac s par des forces innommables Au fil du texte le peuple acteur politique exprimant une volont est devenu foule agr gat irrationnel d individus port s par la folie collective Les histo
152. retour l ordre social et moral troubl par laction perturbatrice minemment romanesque de la femme fatale En tant que tel cet pisode est le morceau de bravoure attendu par la structure manich enne du roman romantique Il n y a donc rien d tonnant ce qu il mette en place le dispositif complet pictural symbolique rh torique etc du jugement 121 Litt rature et saveur Le tour de parole des accusateurs affiche la redondance formulaire du dialogue le plus ostensiblement solennel Athos commence alliant le discours performatif du pardon Je vous pardonne au rythme p riodique de T loquence les compl ments du verbe pardonner font se succ der trois groupes quivalents sur le plan de la syntaxe et du volume syllabique mon avenir bris mon honneur perdu mon avenir souill tous achev s par une finale masculine qui les fait r sonner puis en cadence majeure un quatri me groupe plus long qui amplifie le path tique mon salut jamais compromis pat le d sespoir o vous m avez jet La valeur m taphorique des participes pass s bris perdu souill le m lange intime du registre religieux du salut et du d sespoir romantique la forte pr sence de la premi re personne et l expansion lyrique contribuent donner cette intervention en style formulaire toute la profondeur m taphysique du mal du si cle et donc construire la figure d Athos
153. roni homme du XVIII si cle et de la l gitimit r publicaine se posait encore la distinction entre vraie et fausse monnaie n a plus cours Le jeudi 21 novembre 2002 Ben Bernanke l un des sept gouverneurs de la R serve F d rale am ricaine a clairement nonc que impression suffit fonder la l gitimit Le gouvernement am ricain dispose d une technologie sp ciale appel e planche billets qui lui permet de fabriquer autant de dollars que n cessaire 1 Dans Surveiller et punir Gallimard 1975 2 Voir sur le sujet le film de Peter Greeneway The Pillow book 1996 309 Litt rature et saveur pour un co t peu pr s nul Le capitalisme comme le disait d ja R v roni sous une forme imag e a t il jamais produit autre chose que de l argent Tout comme le papier est l peu pr s de la peau les biens de consommation de l industrie ne sont que les faux fuyants de cet espoir supr me et supr me pens e du mercantilisme faire de l argent Et les ouvriers comprim s dans la chaine productiviste sont les euph mismes du corps pressur par la machine d lirante sadico parano aque Deleuze qui est au c ur d un syst me analys comme n vrose obsessionnelle 1 International Herald Tribune 23 24 novembre 2002 ARTHUR RIMBAUD TETE DE FAUNE Par Jean Michel MAULPOIX Universit de Paris X Nanterre T te de faune Dans la feuill e crin vert tach d or
154. routes Nous retardions de cent ans de mille sur le mouvement g n ral sur celui qui en est ins parable de la pens e Nous avons d br ler les tapes remonter marche forc e au pas de charge le chemin qui nous s parait de la vie du pr sent de Paris de notre propre possibilit du monde entier c est pareil Mais la peine de franchir en peu d ann es des d cennies des si cles tait exaltante dans l exacte mesure o elle tait prouvante tudier sans rel che ni cesse apprendre disputer douter comprendre une f te soup onner enfin de quoi il retourne pressentir la syntaxe g n rale une incroyable f licit Il y a une joie de savoir Un charme sp cial s attache la connaissance approch e On entre bloui clignant des yeux dans la contr e seconde qui double claire celle simplement tendue confuse quoi l on est r duit aussi longtemps que p sent sur le monde et nos corps et nos mes les modes archaiques de production de la vie mat rielle la quasi autarcie des soci t s agraires traditionnelles la mis re de la paysannerie parcellaire Mais il y avait autre chose qui conf rait un attrait proprement inou l tude une aura magique aux parall l pip des de papier qu on appelle des livres et ce fut leur vident rapport soudain la vie notre propre aventure Quiconque a pass par les lyc es de l apr s guerre tait vou la schizophr nie D un
155. s de biais se voient paradoxalement cart s pour leur manque de hardiesse Barbey manie le paradoxe critique avec verve L effet de scandale s exacerbe dans l vocation d un embl me textuel et religieux Barbey invite une relecture inattendue de Ren extrait du G nie du christianisme texte culte des catholiques en m me temps qu il s offre dans cette lecture incestueuse et discordante 41 Litt rature et saveur le plus efficace des paratonnerres Si cette relecture est accept e par le lectorat alors 5 Diaboliques ne peuvent qu chapper la censure de l ordre moral Ce texte ouvertement paradoxal transgressif jusqu au blasph me et la provocation d rangeant pour le lecteur aristocrate qu il place sur la sellette aussi bien comme acteur social que culturel s av re sans doute une captatio benevolentiae efficace le lecteur moustill se demande quelle fiction peut d couler d une telle entr e en mati re Mais au del de la recherche d effets de s duction et d attraction Barbey sp cialiste des ricochets de conversation tente dans cette derni re Diabolique de cerner une nouvelle chambre d cho concurrente de ces salons classiques qu il affectionnait tant une forme moderne de la m diatisation travers un pastiche journalistique La principale rupture dans cet imcpit s av re en effet nonciative L nonciation romanesque troisi me personne e
156. s emploie rappeler que la condition de possibilit du genre sentimental le parler vrai repose sur une construction rh torique Laclos et Rousseau s accordent en effet pour consid rer que si l loquence du corps est premi re et la seule v ritable dans la mesure o l criture est toujours simulacre ce simulacre doit au moins avoir le m rite de toucher au plus pr s la r alit Inspir e de Rousseau la r flexion de Mme de Merteuil a cependant sa logique propre fort loign e de Vid al de sinc rit et de transparence rousseauiste C est l que se r v le le mieux le dispositif dialogique que nous signalions pour commencer Comme l auteur de da Nouvelle H lo se la marquise consid re en effet que le simulacre a ses limites Parce que les passions ont un langage seule la parole r duit l cart entre le mot et la chose C est ainsi que s explique le proc s de l criture comme artifice C est encore reconna tre que lart ne peut pas tout et que comme Pindique le propre Rousseau dans sa Pr face le leurre rh torique de la passion est une usurpation Mais la lettre dit aussi ce que Rousseau refuse de croire savoir qu un simulacre de passion produit le m me effet que la passion r elle ou que la parodie du discours amoureux remplace 216 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink avantageusement le v ritable langage de l amour On per oit imm diatement la cons quence dramatiqu
157. ses connaissances pour peu qu elles lui servent clairer quelques enjeux et surtout il exposera une s rie de rapports dramaturgiques dans les relations des personnages entre eux avec le temps et l espace avec le public historiques du point de vue des r f rences en amont du texte du point de vue des interpr tations post rieures au texte et bien videmment du point de vue d une conscience de l Histoire civile ou publique telle qu elle appara t dans une sc ne donn e moraux et philosophiques enfin religieux aussi parce que le th tre caract rise nomme repr sente et produit une position qu il faut au moins cerner D BORDEMENT L int r t d une explication est non seulement qu elle offre une analyse pr cise de la mani re dont les mots sont agenc s pour la sc ne mais aussi qu elle amorce une interpr tation et qu elle laisse le lecteur suivre son propre parcours pr alablement canalis On peut ainsi conclure la lecture de la lecture ces trois vers que face C lim ne jeune veuve bourgeoise et riche r gnant sur les salons jouissant de sa libert avec d lices en parfaite conformit avec l image de la veuve joyeuse et rou e Alceste au centre d un salon qu il voudrait d sert se morfond temp te et veut installer son implacable vertu dans un monde qui ne l admet pas Alceste a la folie de ceux qui sont pris de v rit dans un univers o elle n a pas cours D
158. singularit d toile filante sur la sc ne tragique du XVI me si cle Il y a des h ros en mal comme en bien La Rochefoucauld M 185 Telle maxime d un h ros malheureux de la Fronde autrement plus h ro que que le S janus de Cyrano fera couler on le sait beaucoup d encre jusqu nourrir des interpr tations forc es pr sadiennes Dans La Mort d Agrippine en un monde o r gne une corruption universelle la figure du h ros sa virt sa grandeur d ame paraissent totalement dissoci es des rep res axiologiques ordinaires Avec Agrippine ou S janus elles semblent se mesurer par del le bien et le mal rep res qui ne semblent valoir d sormais que dans un temps r volu pour ce type de h ros lui m me r volu qu incarne l tat de fantasme Germanicus Sur la sc ne de la prise du pouvoir et de ses coups d Etat P extraordinaire r gne sans partage et on se soucie peu de droit et de morale En pareil contexte la mort de S janus ne pourra appara tre aucun moment comme un ch timent difiant Les surd terminations lucr tiennes du discours de S janus sur la mort d plac es sur la sc ne d une politique baroque du complot et du tyranicide port e au comble de sa noirceur font entendre des harmoniques tranges et finissent par induire des ind terminations de divers ordres Pour le spectateur de la trag die de Cyrano la mort assur ment n est pas rien La mort p se l
159. sous une forme n gative Il ne r sista pas n osa pas la retenir ou passive la laissa s chapper de ses bras 177 Litt rature et saveur Cette expression de sensualit s articule dans le passage selon un rythme qui reproduit le mouvement d une passion refoul e et impossible La manifestation soudaine de la passion est tout d abord d clench e par la fin de la lecture d Ossian comprise comme anticipation Demain viendra le voyageur il reviendra son regard me cherchera dans les champs d alentour et ne me trouvera pas Le futur simple sur lequel insiste dans le texte original la r p tition de lauxiliaire wird sugg re le caract re ternel irr vocable de la s paration En m me temps dans sa valeur proph tique il est comme rompu par le passage brutal dans le paragraphe suivant au pass simple au pr t rit en allemand Celui ci fonctionne comme un retour au pr sent et la pr sence des personnages Une telle structure souligne la valeur tragique du passage la pr sence travers le texte lu d une destin e L expression de la passion y est alors inscrite pr sent e comme une n cessit Elle suit un sch ma de mont e et de retomb e avec une amplification du rythme des phrases jusqu la phrase cardinale Le monde pour eux s an antit qui repr sente une sorte d acm La phrase est non seulement pr c d e de deux phrases parfaitement sym
160. superficiel d tayer cet aspect par une source biographique que la critique a parfois cherch e dans un baiser donn par Goethe Charlotte le 13 ao t et mentionn dans le journal de Kestner Car tout au contraire tire cette sc ne du c t de la mise en fiction Son lien avec la lecture des passages d Ossian traduits par Werther mais aussi le rapprochement qu on pourrait tablir avec le baiser re u par une autre Charlotte dans Les Affinit s lectives premi re partie chapitre 12 Pinscrivent dans diff rents cercles de fiction C est en effet dans un texte la grande force po tique et la valeur clairement symbolique que Goethe d cide d inscrire la s paration de Lotte et de Werther Ce passage tr s romanesque impr gn de path tique est en m me temps le lieu d une n cessit tragique qui s exprime sous deux formes En mettant aussi en sc ne la r v lation des sentiments de Charlotte demeur s cach s jusque l il tisse indissociablement l osmose des deux personnages et l impossibilit de cette union Ici se construit une destin e tragique Non seulement le suicide de Werther devient une n cessit au plan de l intrigue mais il est pr figur sous diff rentes formes par lassociation avec le mod le litt raire d Ossian par le pressentiment de Lotte tay par le rapprochement avec la sc ne o elle d crochait Parme du mur et enfin par l adieu de Werther Par la Goethe joue avec les r
161. t elle pas galement entendre que celui qui crit conna t les choses du monde pourrait tre le conseiller avis d un prince ou d une R publique et saurait employer autrement son talent et ses connaissances MARIVAUX LE PAYSAN PARVENU Par Jean Christophe ABRAMOVICI Universit de Valenciennes Je passai le Pont Neuf entre sept et huit heures du matin marchant fort vite cause qu il faisait froid et n ayant dans l esprit que mon homme Quand je fus pr s du cheval de bronze je vis une femme envelopp e dans une charpe de gros taffetas uni qui s appuyait contre les grilles et qui disait Ab je meurs ces mots que j entends je nr abprochai d elle pour savoir si elle n avait pas besoin de secours Est ce que vous vous trouvez mal madame lui dis je H las mon enfant je n en puis plus me r pondit elle il vient de me prendre un grand tourdissement et j ai t oblig e de m appuyer ic Je l examinai un peu pendant qu elle me parlait et je vis une face ronde qui avait l air d tre succulemment nourrie et qui vue de pays avait coutume d tre vermeille quand quelque indisposition ne la ternissait pas gard de l ge de cette personne la rondeur de son visage la blancheur et son embonpoint emp chaient qu on en p t bien d cider Mon sentiment moi fut qu il s agissait d une quarantaine d ann es et je me trompais la cinquantaine tait compl te Cette charpe de gros taffetas san
162. terrestre qui est ce n ant dont on doit se d tacher pour poss der le vrai bien de l ternit Pour Lucr ce le n ant tait au contraire cette ernit laquelle nous ne participons pas dont nous devons nous d sint resser pour habiter plus pleinement le seul temps qui nous appartienne Dans cette perspective il invitait son lecteur regarder devant lui la succession des g n rations futures comme un r emploi ind fini de la mati re vivante et dissiper par ce moyen la fantasmagorie de l au del personne ne descend dans le gouffre du Tartare Quant au regard derri re soi il devait lui permettre d envisager sans crainte l tendue de temps o il n avait pas t comme un miroir de celui o il ne serait plus La conclusion s imposait nulle age horrible n appata t dans le miroir que la nature nous pr sente de l avenir apr s la mort Bien videmment une telle 63 Litt rature et saveur d monstration ne peut tre int gr e a la perspective chr tienne sans quelque am nagement Bossuet reprend donc le sch ma de Pobservation au dela et en deca du pr sent mais loin de employer apaiser la terreur il s y appuie pour laiguiser Comment D abord en juxtaposant les deux perspectives en avant et en arri re il met ainsi Paccent sur la t nuit de lPespace qu occupe lobservateur Mais surtout en d pla ant subrepticement Pobjet de la vision en arri re ce n est pas comme chez Lucr ce le tem
163. th tre de la cruaut Th tre d ombres de fant mes et de fantasmes th tre de feintes mot cardinal r current de leur discours renvoyant cette po tique de la duperie qu ils mettent en abyme Pun et l autre th tre de simulacres de mensonges et de songes Ici de fa on fort singuli re certains th mes de l analyse libertine du pouvoir flirtent la fois avec le r alisme machiav lien le plus cru et avec le d lire du pur fantasme C est que dans l imaginaire politique en question le fantasme est minemment r el son trop de r alit p se lourdement son efficience est fatale tel point qu il semble parfois absorber l essentiel de l action dramatique La mort d Agrippine maura pas lieu Pas ici en tout cas Mais par l effet de trompe l il qu il instaure d embl e le titre m me La Mort d Agrippine installe le spectateur dans cette logique des phantasmata la mort d Agrippine est un simulacre qui ne cesse de hanter la repr sentation comme son horizon ultime sur un mode subliminal dans le ressassement de la parole obsessionnelle qui la sugg re et la diff re jusqu aux derni res r pliques Faut il s en tonner La figure rh torique la plus caract ristique d Agrippine cet gard ce sera bien 104 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Phypotypose qui peint la mort et rend sa pr sence contagieuse hypotyposes de la mort de Germanicus Ag
164. trop pr s l intimit de ces deux illustres pr lats que Pon doit du tout respecter et dont on doit taire les secrets je relate ici pour la suite qu il eut dans leur conversation Voici ce que M de Belley vantant les vertus du saint que celui ci avait en fort grand nombre et voulant nous montrer quelle tait la profondeur de sa simplicit nous conta Certes en quatorze ans je vous avoue que je n ai jamais rien aper u en lui qui ressentit tant soit peu la singularit Il faut que je vous dise ici puisque nous sommes en particulier une de mes ruses appelez la malice si vous voulez Quand il venait me voir en ma r sidence et y passer son octave ordinaire quoi il ne manquait point tous les ans j avais fait dessein des trous en certains endroits des portes ou du plancher pour le consid rer quand il tait tout seul retir dans sa chambre pour voir de quelle fa on il se comportait en l tude en la pri re en la promenade en la lecture en la m ditation s asseoir se lever crire bref aux plus menues contenances et gestes dont on ne se soucie souvent quand on est seul N anmoins je ne Pai jamais remarqu se dispenser de la plus exacte loi de la modestie tel seul en compagnie tel en compagnie que seul une galit de maintien corporel semblable celle de son c ur Je n ai jamais aper u en lui aucun mouvement extraordinaire ni des yeux ni des mains ni de la t te M d Urf fut que
165. un d sir forcen de se barricader la vaine fureur des gens perdus et d sesp r s qui meurent d envie d atteindre une terre qui ne leur appartiendra jamais John Fante Prologue de Demande la poussi re Op cit p 151 3 Fante Demande la poussi re Op cit p 247 4 Ibid p 264 5 Ibid p 231 137 Litt rature et saveur A Camilla avec tout mon amour Arturo Toujours avec le livre j ai fait une centaine de pas vers le sud est la o tout n tait que d solation De toutes mes forces je l ai jet le plus loin que j ai pu dans la direction qu elle avait prise Sur ce je suis mont en voiture j ai fait d marrer le moteur et je suis rentr Los Angeles Jeter le livre dans le d sert c est donner la mesure de la distance qui s parera jamais Arturo de sa princesse Maya et r duire le possible de amour a Pinsignifiance d une fiction Demande la poussi re a donc bien quelque chose de la ove story malheureuse Pourtant le geste de Bandini ne peut manquer d apparaitre minemment paradoxal puisque le moment de sa cons cration en tant qu crivain est aussi celui qu il choisit pour l guer son livre au d sert Peut tre alors faut il chercher ailleurs que dans la th matique amoureuse la signification de ce geste final qui semble engager non seulement le sens du roman mais s offrir aussi comme une r flexion sur les fins de la litt rature elle m me MIRAG
166. un peu courte sur le plan symbolique quel est exactement le rapport entre la perversion d une machine et la perversion des corps Quelle repr sentation de l crit est ici mise en situation Quelle vision de la litt rature et de l rotisme d fini comme discours sr la chair se d gage de cet usage de la peau des fins d impression Les litt ratures des poques de transition entre deux si cles deux cultures ou m me comme ici entre deux tats du monde ont l ind niable avantage de proc der en affichant leurs codes R v roni apr s Sade d crit la machine sociale via la m taphore d une machine d sirante pour reprendre la terminologie explicite de Deleuze analysant l interaction entre capitalisme et obsession Mais parce qu elle est mise en sc ne dans un texte statut litt raire qui s tonnera que cette machine faire de l argent soit aussi une machine crire Il y a un amont du texte de R v roni un temps artisanal o la peau pouvait tre le support de la fantaisie libertine Et puis il y a un aval o elle devient un objet de consommation et de circulation de masse En amont les litt ratures qui op rent sur les marges des codes comme la litt rature rotique n h sitent gu re faire du corps le lieu du texte On se rappelle Voltaire Lettre Cideville du 20 septembre 1735 qui fonde le lieu commun Que devient donc mon Cideville Et pourquoi ne m crit il plu
167. vet du cr puscule d une jouissance euphorique de P l mentaire la fra cheur du soir le go t de Peau l horreur radicale errance l garement tr s polys mique la mort celle que glose le dernier paragraphe 325 Litt rature et saveur Fondus dans le temps et chang s en sable fant mes bus par le miroir ainsi les ai je moi m me d couverts quand mon p re pour mr enseigner la mort me prit en croupe et m emporta Les trois images qui se t lescopent dans cette phrase intensifient par leur contenu et par leur accumulation le jeu sur les tats de la mati re Les chameliers gar s seront fondus dans le temps et chang s en sable fant mes bus par le miroir Ils sont liqu fi s et litt ralement d sincarn s pour tre absorb s dans le temps image radicale de l an antissement des hommes par une force qui a pur le monde pour n en conserver que l tendue et le Temps au demeurant substituables l un par l autre comme le montrait le troisi me paragraphe Ils sont aussi min ralis s pour tre assimil s au sable selon une nouvelle variante de la logique de contamination qui a t instaur e d s le d but du texte et qu accomplit cette ultime s rie des trois images en lesquelles se heurtent tois tats de la mati re et de l tre radicalement incompatibles mani re po tique et terrifiante de souligner Pextraterritorialit de ce d sert des d serts Voi
168. 0 18 Domaine tranger 1977 1988 pour la traduction fran aise p 37 1 Fante Demande la poussi re p 161 2 Ibid p 252 3 Ibid p 252 4 Ibid p 15 5 Fante lui m me fait de la folie une sorte d horizon esth tique de son roman Donnez moi de la cinglerie Donnez moi le roman branque de celui qui prenait Phumanit en piti in Prologue de Demande la poussi re Op cit p 152 153 6 John Fante Demande la poussi re p 137 7 Ibid p 144 144 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Livr au vent qui en feuillettera les pages aval par les sables le livre sacrifi ravale du m me coup les pr tentions de la litt rature en rappelant qu elles ne sont que pures fictions man es de la seule r alit situ e sous la poussi re celle de la d solation La litt rature n est elle alors qu une autre image du d sert Ne contient elle que le d sert Ne peut elle rien sinon inviter un retour piteux la r alit de la grande ville ce Los Angeles absurde ville des anges o les vivants semblent d j morts Ce serait oublier que le d sert est aussi l espace du silence consolateur et que la silhouette fragile et vanescente de Camilla pourrait tre le symbole de cet unique et infime pouvoir de la litt rature aux yeux de John Fante apporter parfois consolation et beaut beaut comme l amour d une fille dispa
169. 13 9782304024005 livre imprim ISBN 978 2 304 02401 2 livre num rique ISBN 13 9782304024012 livre num rique Jean Goldzink est Pauteur de XVIII SI CLE Bordas 1988 r d Larousse 2000 MONTESQUIEU LETTRES PERSANES Puf 1989 puis VOLTAIRE la l gende de saint Arouet Gallimard D couvertes 1989 STENDHAL L Italie au c ur Gallimard D couvertes 1992 VOLTAIRE entre A et V Hachette Sup rieur 1994 COMIQUE ET COM DIE AU SI CLE DES LUMI RES L Harmattan 2000 MONTESQUIEU ET LES PASSIONS Puf 2001 LE VICE EN BAS DE SOIE Corti 2001 LA RECHERCHE DU LIBERTINAGE L Harmattan 2005 BEAUMARCHAIS DANS L ORDRE DE SES RAISONS Nizet 2008 LA PLUME ET L ID E Le Manuscrit 2008 LA SOLITUDE DE MONTESQUIEU para tre VOUS AVEZ DIT LUMI RES para tre SOMMAIRE AVANT PROPOS Par H di Kaddout sr JEAN GOLDZINK QUITTE LA PLACE Par Pierre BergOuniour sans ETUDES DE TEXTES ue Aragon Les voyageurs de l inp riale Pat Jean Francois Luetttee Balzac La femme de trente ans Par G rard Gengencb eeee inasi Barbey d Aurevilly La vengeance d une femme Par Matic Hive Theret ss Bernardin de Saint Pierre Etudes de la nature Par Colas Duds ncintiih kant nn M aS Bossuet Sermon sur la mort Par Mich le Rosellini se Bouvier L usage du monde Par Guillaume Bidet sin Minis Brunswic contre oubli Par Armelle BihGcatals anciaaccaanhanndandaaanaannnns Certon J estois las
170. 257 Proust A l ombre des jeunes filles en fleurs Par hele n n 271 Perec La vie mode d emploi Par Philippe Zard 444 279 Racine Ph dre Par Jean Loup Rivi re ss 289 R v roni Saint Cyr Pauliska Par Jean Paul Brighel 297 Rimbaud T te De Faune Par Jean Michel Maulpoix ss 311 Saint Exup ry Citadelle Par Guy Barthel eingo ront oenar 319 Saussure III Note sur le discours Par Jean Louis C sss 329 Simon La route des flandres Par Sylvie PatrOn oiia ie e z 339 Simon Le tramway Par Anne Lise Blanneeeeee 347 Spinoza Trait th ologico politique Par Pierre Fran ois Moreau 357 Valentin Soucis de famille Par David Lescot ns 363 Voltaire Am Jeanne d Ar Par Christiane Mervaud 371 Voltaire Dictionnaire philosophique Pat Annie Begg ssxszscesscaxexezssnseszescsiesess ia in iTe 381 Zola Germinal Par Muriel Louaphrreeeeeeeee 389 10 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Le Prince P dagogue par Christian Bi t s s s ss ts st Le pli et Pesprit pat Daniel Saadoun s sss ssst sstsi M moires de M Patru paf Max Vernet siviscadadeeadedslasleel adalat AVANT PROPOS Par H di KADDOUR L tude et Pamiti ont r uni ici les l ves les coll gues les amis de Jean Goldzink L essentiel de ce volume est repr sent par une quarantaine d explications ou commentaires rang s par ordre alphab tique d auteur d Aragon
171. 29 Litt rature et saveur donc simultan ment dans le registre pist mologique et dans celui de la philosophie politique Bien qu incommensurables Pun avec Pautre le Livre I maintient l existence de deux plans la l gitimit de l exigence philosophique d un fondement universel des lois morales et l tude des principes dont d rivent les lois institu es en non ant les fameuses cinq lois naturelles qui constituent un ensemble d exigences que toute soci t humaine a du satisfaire Mais on per oit clairement alors que ce qui est exploit en Poccurrence c est Pamphibologie de l expression droit naturel au moins autant que l ambigu t de la notion de o magistralement d construite par Althusser J Goldzink conclut de cette lecture que le droit est chez Montesquieu une formation de compromis dans tous les sens du terme Non que la voix de la nature ne s y fasse plus entendre mais elle a d se compromettre avec tous les vacarmes du monde Ce qui ne veut pas dire que nous devrions pour autant nous incliner devant des faits que par nature nous jugeons scandaleux et il y a aussi bien des causes naturelles a la transgression des lois Dans un autre sens le droit est galement un compos naturel r sultant de processus naturels dont il s agit de saisir Pesprit Dans la touffeur de ce mois d ao t je m efface et laisse Jean Goldzink le savoureux mot de la fin
172. 3 On suivrait m me les r gles du jeu Partiste d voilant dans ses notes les lois de combinaison de ces mots accessoires et silhouettes o fous les verbes se rapportent pantalon ou jupe des formes parses rassembl es arranger sur des figures et tous les adverbes chapeau pansement b ret etc Dans les m mes notes de 1963 il crit encore Le Plan tarium est le monde du monologue int rieur d un tre et les relations entre des mots des figures des poses et des v tements Autrement dit articulation de ces l ments textuels et visuels permet Fahlstr m de restituer le jeu op r par Sarraute entre les apparences et les tropismes entre le monde objectal du dehors et les mondes subjectifs des monologues et ce passage incessant de la surface du r cit aux sous conversations int rieures des consciences personnages Et puisque l entit maladive du couple petit bourgeois constitue le n ud du Plan tarium puisque Sarraute s attache faire merger les tropismes rances d une 1 Notes sur ADE LEDIC NANDER 2 1955 57 New York octobre 1963 in yvind Fahlstr m Essais choisis les presses du r el 2002 p 107 2 Idem p 107 3 Idem p 106 131 Litt rature et saveur bourgeoisie repli e sur son petit salon et tout comme elle d clarera en 1987 que dans le Plan tarium j ai voulu montrer d abord l apparence les personnages ext rieurs tels que nous nous voyons le
173. 70 d cit e p 185 2 Recherche qui cette fois va bien au del de la critique traditionnelle du romanesque sentimental r p t e dans tous les romans libertins les Liaisons en t te Le jargon libertin qui t moigne d une suspicion g n ralis e l encontre du langage ordinaire affuble le mot rowan d un pith te sentimental Nous avons recens tous les passages o le mot rowan est employ et toujours connot n gativement lettres 2 57 63 79 81 105 110 121 d cit e pages 37 156 165 208 230 302 319 348 m me remarque pour le mot romanesque lettre 141 144 pages 403 408 215 Litt rature et saveur s est int ress au th tre et au drame en particulier sans doute parce qu il r alisait cette criture du mouvement de la gestuelle li e l motion que la lettre 33 appelle de ses v ux Trouver une forme qui produise cet effet entre roman et th tre c est sans doute le v u de Laclos comme de bien des crivains de son temps LE NOMINALISME LIBERTIN Revenons au paradoxe initial La critique de la lettre qui se fait au nom du naturel proc de de deux syst me diff rents le syst me libertin dans lequel la langue orale ou crite est mensonge et duplicit le syst me de Rousseau pour qui la langue orale ou crite doit tendre vers une transparence et univocit originelle La lettre 33 ne pr tend pas faire se rejoindre ces lignes parall les mais elle
174. 9 et on mentionnera l uvre d Henri Meschonnic comme source d inspiration des r flexions ici pr sent es 332 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink travail ind fini du discours dont on se demande s il n est pas par principe r tif la forclusion d une linguistique f t elle de la parole Ce travail est celui du sens qui transforme les concepts vari s pr ts dans la langue c est dire rev tus d une forme linguistique en discours par une op ration un jeu des conditions un moment toutes d terminations qui font Pobjet du questionnement saussurien dans des termes qui voquent certaines laborations th oriques post rieures les op rations nonciatives de Culioli ou les jeux de langage de Wittgenstein rebours de l entreprise structuraliste S il fallait se convaincre de la non homologie de parole et de discours et de la clairvoyance th orique de Saussure au milieu de ses h sitations terminologiques se convaincre de Pefficace propre cette notion la de discours pour penser les textes et la litt rature comme activit d un sujet on pourrait inscrire cette Note sur le discours dans l horizon de prospection que constitue l uvre de Benveniste et horizon de r trospection o s inscrit le travail de Humboldt La reprise correction de la dichotomie saussurienne par Benveniste claire par r currence certains l
175. A moins qu vue de pays la vision des formes g n reuses et du teint vermeil de Pinconnue n ait fait na tre en lui Pheureuse perspective d un succulent mais peu avouable festin sexuel MONTESQUIEU ESSAI SUR LE GOUT Par Andr CHARRAK Universit de Paris I Panth on Sorbonne Dans notre mani re d tre actuelle notre me gotite trois sortes de plaisirs il y en a qu elle tire du fond de son existence m me d autres qui r sultent de son union avec le corps d autres enfin qui sont fond s sur les plis et les pr jug s que de certaines institutions de certains sages de certaines habitudes lui ont fait prendre Ce sont ces diff rents plaisirs de notre me qui forment les objets du L t Montesquieu Essai sur le gout introduction et notes par Charles Jacques Beyer Gen ve Dro 1967 p 38 Litt rature et saveur Le plaisir et l ordre pour une nouvelle lecture de P Essai sur le go t de Montesquieu Les remarques propos es ici visent a clairer la situation philosophique de PEssai sur le go t travers un commentaire de son introduction Bien qu elle soit en apparence fort abstraite cette ouverture condense en r alit une d cision forte de Montesquieu qui le conduit red finir rigoureusement le domaine accessible une enqu te sur le go t et qui est lisible travers la r criture d une source majeure Essai sur le beau du P re Andr Certes tout un monde s pare l
176. Bandini Le d sir de vivre appara t m me premier si Pon se fie aux d clarations de Fante dans son Prologue de Demande la poussi re Reconnaissant la dette qu il doit au norv gien Knut Hamsun Fante y file la m taphore attendue de la faim dont on conna t la fortune chez les crivains am ricains et compare son propre roman La Faim de Hamsun mais ici c est la faim de vivre dans une contr e de poussi re la faim de voir et de faire Arturo est bien le lieu d une d chirure o Paction n est pas la s ur du r ve Or c est pr cis ment cette dualit qui se joue au sein m me de l uvre et du personnage principal qui invite se d fier de lapparente il en son nom m me cette tension douloureuse la reprise d form e de Pitalien autore est contrebalanc e par Vitalianisation du patronyme Banning pour juxtaposer de mani re ironique la figure de l artiste qui chez Arturo n a pas encore fait ses preuves et la fortune et la r ussite de Phineas Banning Stephen Cooper Plein de vie Une Biographie de John Fante Paris Christian Bourgois diteur 2001 p 119 1 Ibid p 263 2 Le titre m me Demande la poussi re est un hommage l uvre de Hamsun Fante reprend en effet de mani re tronqu e l une des phrases du roman intitul Pan Quant l autre il Paima comme aime un esclave comme un fou et comme un mendiant Pourquoi Demande la poussi re du che
177. C est pourquoi la contr e dont il est question spatialement ind finie litt ralement illimit e en raison de la force d expansion et de contamination du mal fice d sertique qu elle parach ve est appel e Miroir car un miroir ne contient rien non plus et les images dont il s emplit n ont ni poids ni dur e Le sable incandescent devient un miroir dans lequel le r el ne subsiste comme dans le ph nom ne de la persistance r tinienne qu l tat d image On voit comment St Ex retravaille aggrave et d tourne le motif isotopique du mirage il ne s agit plus ici du ph nom ne physique de la r fraction ou du processus mental pathologique de Phallucination mais d une d gradation ontologique du r el La troisi me et derni re justification de cette d nomination de Miroir explicite sa charge mortif re avec une image elle aussi isotopique qui introduit le motif de la c cit n e de l intensit lumineuse du d sert car un miroir parfois comme un lac de sel br le les yeux Image oxymorique surtout qui voque la confusion entre l ment de vie l eau vive si importante dans une rh torique chr tienne dont St Ex est souvent tr s proche et le sel qui signifie ici au contraire la st rilit absolue un autre feu d vorateur qui br le les yeux Cet l ment anhydre et mortif re se pr te en outre au jeu au mirage ce pi ge du d sert que th matise le paragraphe s
178. Dans Essai sur l origine des langues le philosophe a cette formule admirable qui a pu inspirer le d veloppement ult rieur de la lettre l on rend ses sentiments quand on parle et ses id es quand on crit Au terme du parcours esquiss par Rousseau on est frapp par la double hi rarchisation qui traverse sans doute l id ologie linguistique des Lumi res le langage est en de du sentiment la parole est au del de l criture Cette id ologie un autre texte de Rousseau va en tirer une cons quence radicale qui constitue peut tre le fantasme ultime de tout romancier celle d une dissolution du roman dans le roman Selon un paradoxe qui illustre l id al fictionnel des Lumi res Rousseau d clare vouloir trouver un langage qui ne soit point une langue crire des lettres qui ne soient point des lettres faire un roman qui ne soit point un roman La r flexion litt raire de la marquise de Merteuil va d abord s articuler autour d une question rh torique celle de la dispositio de la place des mots dans la phrase et de leur agencement L ordre des mots manifeste au lecteur les traces d un travail d un artifice ce nest pas qu on ne se serve des m mes mots On ne les arrange pas ou plut t on les arrange Ainsi l art de l crivain doit faire oublier l artifice Dans ce passage il n est rien jusqu Pinjonction de d part Relisez votre Lettre qui ne soit inspir e de la Se
179. Dans la feuill e incertaine et fleurie De fleurs splendides o le baiser dort Vif et crevant l exquise broderie Un faune effar montre ses deux yeux Et mord les fleurs rouges de ses dents blanches Brunie et sanglante ainsi qu un vin vieux Sa l vre clate en rires sous les branches Et quand il a fui tel qu un cureuil Son rire tremble encore chaque feuille Et l on voit peur par un bouvreuil Le Baiser d or du Bois qui se recueille Rimbaud Arthur Po sies d Po sie Gallimard 1984 p 50 Litt rature et saveur T te de faune d Arthur Rimbaud semble appartenir la p riode heureuse des vagabondages et des fugues de septembre 1871 Mais dans ce po me champ tre et mythologique la fois la figuration du po te et de sa po tique peut tre appr hend e sur des plans plus complexes et plus nombreux que dans d autres vers de la m me poque Derri re ou sous la pi ce d inspiration parnassienne d autres sc nes plus secr tes se jouent UNE SC NE BUCOLIQUE Ce po me constitue en premier lieu une sc ne bucolique Le lieu v g tal est ici un lieu pl nier un espace euphorique tr s color une sorte de paradis v g tal La feuill e constitue un abri form de feuillages Et la r p tition en anaphore assonanc e de cette expression met en valeur l id e d un contenant voire d une paisseur d une abondance d une redondance v g tale feuill e fleurie de
180. E DE FIN Le d nouement de Demande la poussi re op re comme une sorte d illusion la mani re de ces mirages que m nagent les d serts Il appara t en effet doublement vid de sa substance simple reflet invers d un passage ant rieur du livre il est en outre d poss d de sa fonction conclusive Cette derni re page doit tout d abord tre envisag e comme image renvers e de l issue du chapitre XIV ces passages tant tous les deux fond s sur la liaison essentielle des quatre l ments que sont le d sert l criture le silence et la fin En effet le chapitre XIV se cl t sur une piphanie quasi joycienne sollicit par Camilla pour corriger les nouvelles minables et la prose infecte de Sammy Wiggins Arturo se livre dans une fr n sie vengeresse un reintage consciencieux des textes de son rival et 1 Ibid p 66 2 Ibid p 208 138 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink s appr te au petit jour poster le tout agr ment d une lettre assassine quand devant le matin incomparable et le ciel aux couleurs du d sert il est soudain investi d une terrible compr hension celle du pourquoi des hommes et de leur destin path tique Dans l une de ces envol es lyriques o il parvient faire fleurir l apparent d sert de sa prose Fante atteint alors cette improbable po sie de la s cheresse et de la platitude mani re d i
181. ERVATION de l Encyclop die Diderot D Alembert C est Pattention de lame tourn e vers les objets qu offre la nature L exp rience est cette m me attention dirig e aux ph nom nes produits par Part L objet observ ne laisse pas de para tre tel qu il est et c est principalement en cela que observation diff re de l exp rience qui d compose et combine et donne par l naissance des ph nom nes bien diff rents de ceux que la nature pr sente D s lors il n y a rien d tonnant au privil ge de l observation dans les textes de Bernardin de Saint Pierre le refus implicite de exp rience tant ici celui de toute cette science qui ne comprend la nature qu en la d coupant en en dissolvant les l ments en en diss quant les existants au profit de th ories qui aveuglent autant qu elles orientent ceux qui les d fendent Les Ezudes de la nature exposent par opposition des observations multipli es et au premier chef celles de Pauteur lui m me qui se met en sc ne les r alisant comme un observateur non pr venu au cours de ses voyages en Russie ou l le de France aussi bien que dans son jardin Exemplaires et presque ostentatoires cet gard sont les pages consacr es au d but de l tude I la description d un fraisier et des divers insectes qui le fr quentent I 104 113 Mais comme les observations d un seul homme ne sauraient suffire il faut aussi faire appe
182. Jean Genet n a connu ni p re ni m re qu il ignore tout de sa naissance Pour compenser ce manque pour tre pour na tre il crit le Journal du voleur en particulier Loin d tre le r cit troit exact de sa vie ce livre s efforce d tablir sa gende sa gen se mots dans lesquels s nonce l ambition extr me de P criture et o on entend aussi comment ne pas le remarquer les syllabes qui composent son nom Ce refus de la chronique de la pr cision topographique ou chronologique explique que les hauts lieux du r cit soient avant tout des territoires intimes la Guyane r gion de moi m me PEspagne contr e de moi le soleil lui m me c est dans mon corps qu il se levait le bagne videmment Les moments les poques sont pareillement transform s de cette p riode je parle avec motion et je la magnifie De Pun l autre lieux poques le texte va de fa on souple libre selon ce qu offrent sans cesse bien plus que la m moire les pouvoirs des fables et de la po sie A vrai dire dans le cas pr sent le lecteur attentif celui qui cherche cette sorte de rep res peut observer que larriv e Alicante prend place dans un p riple dont les tapes pr c dentes ont t Barcelone et Cadix On trouve m me par exception une date C est pendant l t 1934 que je parcoura s les routes andalouses Mais 1 Jean Genet Journal du Voleur Paris Gallimard coll Folio 1982 p 86
183. LORI Devant le duc l p e nue LE DUC riant Laissez faire laissez faire Allons Renzo je veux te servir de t moin qu on lui donne une p e LORENZO Monseigneur que dites vous la LE DUC Eh bien ta gaiet s vanouit si vite Tu trembles cousin Fi donc tu fais bonte au nom des M dicis Je ne suis qu un b tard et je le porterais mieux que toi qui es l gitime Une p e une b e un M dicis ne se laisse point provoquer ainsi Pages montez ici toute la Cour le verra et je voudrais que Florence enti re y fit LORENZO Son Altesse se rit de moi LE DUC J ai ri tout l heure mais maintenant je rougis de honte Une p e H prend l p e d un page et la pr sente Lorenzo VALORI Monseigneur c est pousser trop loin les choses Une p e tir e en pr sence de Votre Altesse est un crime punissable dans l int rieur du palais LE DUC Qui parle ici quand je parle VALORI Votre Altesse ne peut avoir eu d autre dessein que celui de s gayer un instant et sire Maurice lui m me n a point agi dans une autre pens e LE DUC Et vous ne voyez pas que je plaisante encore Qui diable pense ici une affaire s rieuse Regardez Renzo je vous en prie ses genoux tremblent il serait devenu p le sil pouvait le devenir Quelle contenance juste Dien Je crois qu il va tomber Lorenzo chancelle il s appuie sur la balustrade et glisse terre tout d un coup LE DUG riant aux clats Quand je vous
184. Litt rature et saveur Explications de textes et commentaires offerts 4 Jean Goldzink L Esprit des lettres Collection coordonn e pat Alain Schaffner et Philippe Zard L Esprit des lettres pr sente dans un esprit d ouverture et de rigueur un choix d ouvrages refl tant les principales tendances de la critique en litt rature francaise et compar e Chaque proposition de publication y fait l objet d une valuation par les directeurs de collection ainsi que par des sp cialistes reconnus du domaine tudi Dans la m me collection Agn s Spiquel et Alain Schaffner ed Albert Camus l exigence morale Hommage Jacqueline L vi Valensi 2006 Jeanyves Gu rin ed La Nouvelle Revue fran aise de Jean Paulban 2006 Isabelle Poulin critures de la douleur Dosto evski Sarraute Nabokov 2007 Philippe Marty Le po me et le ph nom ne 2007 Philippe Zard ed Sage de Kafka 2007 Emmanuelle Andr Martine Boyer Weinmann H l ne Kuntz ed Tout contre le r el Miroirs du fait divers 2008 Yves Landerouin et Aude Locatelli ed Musique et litt rature 2008 Jean Goldzink La Plume et l id e on l intelligence des Lumi res 2008 Litt rature et saveur Explications de texte et commentaires offerts Jean Goldzink Ouvrage coordonn par H di Kaddour ditions Le Manuscrit Editions Le Manuscrit 2009 www manuscrit com ISBN 978 2 304 02400 5 livre imprim ISBN
185. Lobstein et pr face de Pierre Janet Payot 1931 Nous citons dans l dition de 1950 p 331 2 Op cit p 831 227 Litt rature et saveur soci t soit moindre que celle caus e par exemple par Jack P ventreur dont le cas est abord page cent cinquante cinq Deuil f tichiste chez l auteur lui m me mais l association au f tiche serait alors aussi culturelle et peut tre plac e g ographiquement pat rapport aux Chinois sur la rive oppos e de l ambivalence Victor N Smirnoff remarquait ce propos La d termination culturelle du f tiche est souvent vidente Le professeur Kraffi Ebing il s agirait plut t de Moll ici pourtant peu enclin s indigner ou s apitoyer devant les perversions les plus atroces n avait pas de mots assez forts pour fl trir les coupeurs de nattes qui par leurs forfaits compromettaient l avenir tout entier de leurs innocentes victimes Mais o sont nos fetichistes d antan On ne rentrera pas dans ce d bat mais on peut supposer quelque affinit aussi entre le surmoi privatif du Docteur Moll et celui collectif des Chinois Tant est trange l association des id es 1 Victor N Smirnoff La transaction f tichique Nouvelle revue de psychanalyse n 2 Automne 1970 p 59 MACHIAVEL LA MANDRAGORE V 4 Jean Claude ZANCARINI ENS Lettres amp Sciences Humaines Lyon CALLIMACO Come io tho detto Ligurio mio io stetti di mala voglia insino alle
186. NE BRUNSWIC A CONTRE OUBLI Par Amelle BIHOCARAIS La soir e s tire tu l coutes mal Mais voil qu il voque une amp udiante qu il a interrog e ce matin m me dans la petite salle de chimie o se d roulent les colles T ai pens toi quoique nous tions sur le premier acte Anne Brunswi Contre Oubli Paris Editions La Fontaine aux Lonps 2000 p 87 Litt rature et saveur Ce bref passage issu d une prose autobiographique contemporaine intrigue d embl e par une syntaxe approximative quoique nous tions on attendrait le subjonctif et une obscurit s mantique chimie acte quel est exactement le sujet de l interrogation De ce contexte n buleux jaillit un aveu trop limpide j ai pens toi dont nous verrons qu il pose des probl mes d interpr tation complexes De quelle nature sont ces pens es que portent je la personne d sign e par tu Sont elles d ordre professionnel comme Pindique le contexte la salle de chimie et l interrogation de P tudiante ou de nature plus intime comme le sugg re la premi re phrase de ce r cit Enfin la concession qui nuance laveu quoique nous tions sur le premier acte devra retenir l attention cette concession laissant entendre qu entre les deux principaux protagonistes de ce r cit on consid rera provisoirement que P tudiante du matin n est qu un second r le il y eut vraisemblablement plusieurs actes dont linterrogation dans la s
187. Si comme le d couvre Arturo au chapitre XII c est toujours la terre que tu traverses la d solation la litt rature est aussi ce jet magnifique et vain vers la o tout mest que d solation La fin sublime de Camilla happ e par les doigts pales de la d solation figure ainsi l in luctable victoire de ce sempiternel d sert qui revenait toujours reprendre son enfant captif qu il soit de chair ou de mots POUR EN FINIR AVEC LA LITTERATURE CETTE TRISTE FLEUR DANS LE SABLE Roman des failles celle dessin e par le s isme du 10 mars 1933 voqu au chapitre XII celle de la raison fissur e des personnages f minins que ce soit le grain et Pair de folle noy e de la myst rieuse Juive Vera Rivken ou les crises et linternement provisoire de Camilla Demande la poussi re est aussi un roman de la faillite des id aux d un retour la poussi re de tous ces mythes la religion Pamour et aussi la litt rature auxquels a cru l crivain en herbe Arturo Bandini et qu il perd d s Page de vingt ans Jeter le livre dans le d sert c est bien sur dire au revoir mais pas seulement Camilla et cet amour impossible qu elle d sincarne Au del de l adieu la muse le d nouement renvoie toute la litt rature la poussi re San Elmo une dalle sculpt e en forme de livre ouvert in Les Compagnons de la grappe Paris Christian Bourgois diteur coll 1
188. Titans lev s par mon crime au tr ne o je pr tends 620 Songent s emparer du pouvoir monarchique J appellerai pour lors le peuple en R publique Etje lui ferai voir que par des coups si grands Rome n a point perdu mais chang ses tyrans TERENTIUS Tu connais cependant que Rome est monarchique 625 Ow elle ne peut durer dans l aristocratique Et que l Aigle romaine aura peine monter Quand elle aura sur soi plus d un homme porter Respecte et crains des Dieux l ffroyable tonnerre S JANUS T ne tombe jamais en hiver sur la terre 630 J ai six mois pour le moins me moquer des Dieux Ensuite je ferai ma paix avec les Cieux T RENTIUS Ces Dieux renverseront tout ce que tu proposes S JANUS Un peu d encens brie rajuste bien des choses Litt rature et saveur TERENTIUS Qui les craint ne craint rien 635 S JANUS Ces enfants de l ffroi Ces beaux riens qu on adore et sans savoir pourquoi Ces alt r s du sang des b tes qu on assomme Ces Dieux que l homme a faits et qui n ont point fait l homme Des plus fermes tats ce fantasque soutien Va va T rentius qui les craint ne craint rien 640 T RENTIUS Mais sil n en tait point cette Machine ronde S JANUS Oui mais s il en ait serais je encore au monde Cyrano de Bergerac La Mort d Agrippine veuve de Germanicus Ade I sene V v 618 642 orthographe et ponctuation modernis es 98 Explications et commentaire
189. Une telle r volution peut tout naivement se produire au niveau apparemment simplet du vocabulaire Mais le poids historiquement re u toujours repris comme lieu d une v rit incontestable peut tre interrog Faire compara tre ce terme devant le tribunal critique de la raison consiste moins expliquer une tradition textuelle qu la faire exploser Ainsi en est il dans la philosophie kantienne du terme ontologie Alors expliquer ici signifie bien clairer et d truire Le texte qu on pr sente ici est extrait de la Critique de la Raison pure de Kant Analytique transcendantale chapitre III intitul Du principe de la distinction de tous les objets en g n ral en ph nom nes et noum nes Dans ce texte s op re une r volution th orique le terme d ontologie change radicalement de sens au point que sa signification habituelle en philosophie est d truite Mais qu est donc l ontologie lorsque Kant la met en cause Il faut rappeler que pour la majorit des historiens de la philosophie l ontologie existe en m taphysique alors m me que le terme n existe pas Il est de tradition d admettre qu on peut d finir d apr s Aristote ce que lui m me n appelle pas ontologie Dans le Livre L 11003 21 de la M taphysique dont le sens premier chez Aristote est simplement ce qui suit les ouvrages qui traitent de la physique on peut lire Il y a une science qui tudie l tre en tant qu tre et ses att
190. a t sur la sc ne litt raro m diatique sym triquement la notion de peuple est violemment attaqu e en usant du recouvrement entre l acception sociologique et l acception politique du terme La d ploration nostalgique du peuple d antan comme communaut sensible chez un Huysmans par exemple se donne pour justification l infamie du peuple actuel c est dire post r volutionnaire Le peuple n est plus ce qu il tait dit on les liens unissant la communaut se sont dissous avec le recul de la foi ou du patriotisme qui soudaient et transcendaient des individus m me m diocres Cette vision est celle de Taine nouveau la r volution est pour lui d abord une foule une cohue qui s agite et crie chacun poussant pouss tous exalt s d abord et se f licitant d avoir enfin leurs coud es franches Attach une vision organiciste de la soci t dont le gouvernement bon ou mauvais coordonne au moins les actions il voit les v nements r volutionnaires comme la d composition d un organisme Par la dissolution de la soci t et par l isolement des individus chaque homme est retomb dans sa faiblesse originelle et tout pouvoir appartient aux rassemblements temporaires qui dans la poussi re humaine se soul vent comme des tourbillons La dissolution de la soci t est un th me en vogue en cette fin de si cle que l on pense au th me d cadent de la d composition ou la fort
191. a combinaison des hypoth ses ou des voies les plus simples et des ph nom nes ou des effets les plus vari s Montesquieu ne reprend pas davantage cela va sans dire une explication anthropologique de la vari t fond e sur la corruption de notre nature comme Mersenne en envisageait assez formellement il est vrai l hypoth se Il est clair dans PEssai sur le 1 Ibid Des plaisirs de l ordre p 846 2 Ibid Des plaisirs de la vari t p 846 3 Pour r pondre la question de savoir si la Nature et les sens se plaisent la vari t et la diversit des objets et pour quelles raisons elle y prend plaisir Mersenne doit se placer dans une situation post lapsaire Il suffit de savoir et d exp rimenter que les objets de nos sens n ont pas ici leur perfection ou que 254 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink gout que la vari t fait objet d un d sir de l me qui sans cela languit car les choses semblables lui paraissent les m mes Mais d une fa on assez remarquable Montesquieu fait de la vari t la condition m me d une appr hension effective de l ordre car elle rel ve des facteurs sensibles affectifs elle procure une impression plaisante qui retiennent l attention et permettent ainsi l me d apercevoir la v rit qu elle vise L me aime la v rit mais elle ne Paime que parce qu elle est faite pou
192. a description de cette ville basse sous le soleil et sa m tamorphose en f erie loquente qui culmine par l harmonie et se termine sur une phrase ambigu La git Lachaise Il existe le chapitre ouvre sur la certitude sur la garantie dun plaisir jouissances d une forme de possession du paysage parisien Le narrateur fait fonction de guide Si vous atteignez La premi re vision sera celle d un paysage verdoyant calme f cond par l eau f t elle brune faut il rappeler ici importance de Peau dans l imaginaire balzacien Comment ne pas insister sur la vall e dont les connotations balzaciennes sont nombreuses Ombre et gr ce de la courbe une ville encore agreste demi villageoises le premier plan est une introduction bienfaisante d finissant un ocus amenus Appr cions le rythme de la phrase Si Gobelins il vise mimer la gr ce d not e et privil gie les segments pairs A remarquer aussi la r currence des nasales des f des b et des v Le versant oppos premi re mais discr te apparition d un motif dysphorique les mis res du faubourg Saint Marceau quartier ouvrier que pr paraient peut tre d j les eaux brunes mais qui est vite compens e par les l vations La compacit du faubourg la multitude sont d sign es par milliers press s foule C est l que vit l anonyme prol tariat dont Balzac
193. a porte ce sont elles qui sortent et le docteur est derri re CALLIMACO Dirigeons nous vers l glise et l nous les attendrons 1 Je traduis stetti di mala voglia par je demeurai insatisfait je crois qu il faut comprendre mala voglia en lui donnant le sens qwa dans les D scorsi I 37 et II proemio la mala contentezza ce m contentement cette insatisfaction qui vient de ce que le d sir d obtenir et d acqu rir est toujours sup rieur la capacit d obtenir essendo sempre maggiore il desiderio che la potenza dello acquistare ne risulta la mala contentezza di quello che si possiede e la poca sodisfazione d esso Discorsi I 37 On serait donc comme pour le changement de nature devant une r alisation sc nique qui permettrait de r soudre une des grandes difficult s de la vie humaine 230 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Une femme si prudente qu elle sait s accommoder cela On conna t la trame de La Mandragore en se faisant passer sur les conseil de Ligurio et avec laide int ress e de fr re Timoteo pour un m decin qui poss de gr ce une potion de mandragore lart de donner des enfants aux couples st riles Callimaco arrivera ses fins et fera sa ma tresse de la belle Lucrezia femme de Nicia le docteur peu rus Cette trame au demeurant est assez mince et le chroniqueur v nitien Marin Sanudo apr s avoir vu la pi ce en f v
194. a son caract re il est assis m me si Pon choisit sans d votion aux didascalies de le jouer debout il se retranche absorbe les regards toute l attention du monde et mobilise l exposition par la qualit de son silence L explication donne donc simultan ment la libert de penser les questions de d border le texte publi et de produire une interpr tation la table c est la dramaturgie sur sc ne c est la com die sur une feuille c est la critique tout en fixant lessentiel Que tout s anime gr ce un paradoxe destin montrer que les hauteurs du th tre culminent dans une interrogation sur Pinanit des mots et sur la n cessit d un impossible silence prononc e par un acteur imagin assis 411 Litt rature et saveur DEPLOIEMENT On pourrait presque s arr ter l ceci pr s que lexplication c est l int r t de la contrainte doit se poursuivre jusqu la fin du d coupage ici par soi m me impos on s interrompra un instant pour m diter sur les bonheurs du d coupage suite occasions darbitrarit s convenues 3 vers 20 vers 25 vers plus et qui font sens quoi qu on en dise Donc Alceste parle enfin se dit on et ordonne le retrait de l autre et de soi L l ve lecteur initi attend que le Prince p dagogue r sume d j la pi ce en une courte formule la fable du Misanthrope repr sente le parcours d un personnage qui souhaite d embl e qu on v
195. adoxe du n gatif de la polygamie et de ce qu elle implique n cessairement la cl ture qui enferme les femmes du s rail donc jaillit la pleine positivit des droits inscrits dans la Nature faut il y voir une anticipation du th me de la ruse de la Raison ou du plan cach de la Nature Rien n est plus oppos a Pesprit de l Esprit des lois qu une telle synth se donnant son sens la plus petite manifestation sociale en l inscrivant selon une n cessit d ductive dans une totalit rationnelle et ce en d pit du fameux Pai pos les principes Comme l crit Goldzink une raison naturelle la finitude physiologique du d biteur masculin conduit Dromulgner des lois de cl ture des femmes par quoi la nature c est dire les rapports d quit ant rieurs toute loi positive les lois morales la pudeur naturelle la reproduction et l ducation des enfants la conservation de l ordre etc parvient obliquement imparfaitement se r ins rer dans une structure sociale qui semble la bafouer monstrueusement sans cesser pour autant d ob ir des contraintes logiques politiques et physiques C est sans doute bien plus du c t d Aristote qu il faudrait se tourner pour intelligibiliser les modalit s d inscription du naturel dans le social que d une pens e qui verrait dans toute soci t une formation apte tre jug e selon l cart la norme transcendante Non que Mon
196. age de sexe f minin qui pourrait tre la narratrice mais qu il n est qu un l ment relatif dans une situation d interlocution Cette premi re phrase marqu e comme nous Pavons vu par la subjectivit de tu qui imprime son point de vue au r cit s inscrit dans la th matique de l ennui r currente dans la litt rature moderne depuis Chateaubriand Levez vous orages d sir s La narratrice s ennuie t elle la mani re romantique Ren ou le Jeune Werher ou la mani re existentientaliste Meursault A moins qu elle s ennuie exclusivement lorsqu on ne lui parle pas d elle C est ce que sugg re clairement la suite du texte Dans cette hypoth se la psychologie l uvre ici serait d inspiration plus classique Parlez moi de moi il my a que a qui m int resse chante Jeanne Moreau mais l id e est d j largement pr sente dans la psychologie d un La Bruy re par exemple 77 Litt rature et saveur 2 La phrase suivante avec ses deux conjonctions de subordination qu il suivies d un pronom relatif o est d une structure moins nette La rupture de rythme dans le r cit marqu e pat Mais voil que devrait amener une phrase br ve et percutante or c est pr cis ment l inverse qui appara t La premi re phrase qui voquant une dur e qui s tire est br ve la suivante exprimant par opposition la dur e l v nement est au contraire t
197. ainsi parler ou si l on veut un bean artificiel qui plait l esprit par l observation de certaines r gles que les sages de la R publique des Lettres ont tablies sur la raison et sur l exp rience Montesquieu r crit de tr s pr s ce passage au d but de son Essai sur le go t mais en biffant la d finition r aliste ontologique des diff rentes beaut s pour ne consid rer que les tats du sujet humain Dans notre mani re d tre actuelle notre me go te trois sortes de plaisirs il y en a qu elle tire du fond de son existence m me d autres qui r sultent de son union avec k corps d autres enfin qui sont fond s sur les plis et les pr ing s que de certaines institutions de certains sages de certaines habitudes lui ont fait prendre La proximit voulue des deux passages ne rend que plus lisible la d marcation frappante op r e par Montesquieu La hi rarchie des plaisirs remplace celle des beaut s ou des objets purs de Pexp rience esth tique que le P Andr fondait sur l ordre intelligible con u par Dieu sur l ordre naturel voulu par Dieu et 1 Essai sur le beau chap I p 91 2 Essai sur le gotit in Montesquieu wvres completes Paris Seuil coll L Int grale 1964 p 845 250 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink sur un ordre artificiel qui devait se conformer aux deux premiers C est pourquoi lessentiel de Essai sur le gout est consacr non point une
198. ais plus profond ment encore qu il est accord une certaine conomie de la cr ation litt raire La d charge constitue une amplification hyperbolique du motif ancien de la vanit en m me temps qu elle donne l occasion l crivain de payer le prix de son uvre loin de tout exotisme facile Comme c est boutiquier ce d sir de tirer parti de tout de ne rien laisser perdre se reproche Nicolas Bouvier la fin de L Usage du monde Rentr en Suisse mais loin de toute logique bancaire de capitalisation et de rendement l crivain met dix ans r diger et faire publier son livre Au temps du voyage succ de une perte de temps salutaire loignant le spectre d une identification aux charognards de la d charge cho amplifi des quelques mois de travail irr m diablement perdus avec la disparition du journal L action du fouilleur de poubelles anonyme si elle ne constitue pas proprement parler une ruse de Phistoire n en appara t pas moins d s lors comme une pr dation n cessaire r tablissant un quilibre de la perte entre le voyageur et les hommes rencontr s qui fournissent la mati re de son livre Dans le confort de son bureau la plume la main les yeux fix s sur la feuille hypnotique Nicolas peut alors selon le mot du po te p trir la boue de la d charge pour la transformer en or po tique Le miracle n a pas lieu Quetta ni Lourdes il a lieu Gen ve Suisse AN
199. ait la topique moraliste antique en reprenant l intitul du plus fameux des trait s de S n que le De brevitate vitae J entre dans la vie avec la loi d en sortir je viens faire mon personnage je viens me montrer comme les autres apr s il faudra dispara tre J en vois passer devant moi d autres me verront passer ceux l m mes donneront leurs successeurs le m me spectacle et tous enfin se viendront confondre dans le n ant Ma vie est de quatre vingts ans tout au plus prenons en cent qu il y a eu du temps o Je n tais pas qu il y en a o je ne serai point et que f ocupe peu de place dans oe grand abime de temps Je ne suis rien ce petit intervalle n est pas capable de me 59 Litt rature et saveur distinguer du n ant o il faut que j aille Je ne suis venu que pour faire nombre encore navait on que faire de moi et la com die ne se serait pas moins bien jou e quand je serais demeur derri re le th tre Ce texte de 1648 est riche d instruction pour notre sermon On y constate notamment que le pos du fheatrum mundi tait introduit d embl e je viens faire mon personnage et d velopp m thodiquement selon le mod le rh torique de amplification Tout au contraire dans le sermon de 1662 Bossuet se garde bien d annoncer le motif mais en pr pare secr tement l apparition qui ne se produit qu la toute fin de la p riode avec le mot h tre La rh torique est ainsi tenue en lisi
200. alle de chimie fut peut tre le premier Reprenons de mani re lin aire la lecture de ce fragment 1 La soir e s tire tu coutes mal frappe d abord Voreille par la presque sym trie rythmique des deux propositions qui font de l ensemble un d casyllabe approximatif Il faudra se souvenir ici que l auteure tant parisienne n est gu re sensible la valeur rythmique des e muets On notera galement le jeu des sonorit s entre soir e et s tire s t la r p tition des consonnes s f concourant l impression de longueur d une soir e marqu e du signe de Pennui Le choix du substantif soir e de pr f rence soir est naturellement tout fait pertinent ici Le lien de causalit entre les deux propositions demeure sous entendu la parataxe absence de lien syntaxique permettant d att nuer ce qui appara t comme une vidence c est parce que la personne d sign e pat le pronom personnel tu coute mal que la soir e s tire Ou plus exactement l affirmation selon laquelle la soir e s tire n exprime que le point de vue subjectif de tu Ainsi en d pit de Papparente objectivit de la premi re proposition il appara t vident que le texte est crit du point de vue de tu Ce qui conduit imm diatement s interroger sur le parti pris nonciatif Pourquoi tu a t il pris la place du je attendu dans 76 Explications et commentaires o
201. allimaco la morveuse la fofolle r pond d sormais du tac au tac prend les op rations en mains alors m me que la veille elle paraissait demi morte C est 1 Agir avec imp tuosit n allait pas de soi pour Callimaco Au contraire les premiers plans qu il avait labor s pour essayer de faire changer de nature Lucrezia allaient clairement dans le sens de la circonspection Au d but de la com die Callimaco tait du c t des sages de notre temps qui estiment qu il faut jouir du bienfait du temps or Machiavel rappelle Prince HII 30 que le temps chasse devant lui toute chose et peut apporter avec lui le bien comme le mal et le mal comme le bien Et c est pr cis ment un commentaire semblable que Ligurio fait au plan de Callimaco on court le risque de faire tous ces efforts pour rien ou pire encore pour quelqu un d autre 1 3 Et il est tout fait notable que Ligurio emploie propos de Callimaco le terme de circonspect respeitivo pr cis ment le mot qui est utilis dans le chapitre XXV du Prince et qui ici prend tout son sens d s lors qu on le met en rapport avec les h sitations permanentes de Callimaco et ce jusqu au d nouement 2 Prince XXV 26 Moi j estime quand m me qu il vaut mieux tre imp tueux que circonspect car la fortune est femme et il est n cessaire si l on veut la culbuter were sotto de la battre et de la b
202. alzacien ou zolien Pourtant dans ce qu il a de plus intime son rythme le roman nous signale discr tement qu il n en sera sans doute pas ainsi Un p re et un fr re au Palais une m re en visite une s ur au concert autant de s quences que n eut pas laiss passer un romancier r aliste autant de sc nes faire chaque fois sur plusieurs pages comme dans I usions perdues o Son excellence Eugene Rougon Et la d couverte de Bernard aurait pu donner lieu cet 171 Litt rature et saveur autre topo du grand roman XIXe la temp te sous un cr ne Il n en sera rien Ces s quences oblig es sont escamot es d s le premier paragraphe entre deux n gation dans la d sinvolture d une succession de points virgules entre Mais non et le d mon pas criture romanesque criture po tique le rythme peut lui seul dire des choses aussi importantes que les mots Cela ne signifie pas que toute relation au monde soit cart e Cette relation fait m me dans le roman lobjet d une th matisation particuli re dont t moigne ici la note sur la fen tre qui malgr son ouverture ne fait r gner qu un suppl ment d inconfort La question de louverture des fen tres sera reprise plus loin au sein du couple La P rouse le mari musicien veut fermer parce qu on ne s entend plus sa femme veut ouvrir parce qu on touffe Le roman doit il comme certains personnages se fermer au r el pour mieux se composer ou
203. ami le docteur Barth vous savez il voyage dans l Afrique et dans les massacres il m a promis de me prendre une pean comme a pendant la vie Et alors ce serait tr s bien Fantasme d un flagellant anglais pl onasme Si peu Goncourt rapporte plus tard que plusieurs internes des h pitaux de Paris ont t sanctionn s pour avoir pr lev de la 1 Edmond de Goncourt Journal Robert Laffont Coll Bouquins 1989 t HI p 105 2 Id t I p 800 Le docteur Barth est tr s probablement lexplorateur Richard Burton qui doit alors se rendre au royaume d Abomey et a promis Hankey la peau de l une des victimes des sacrifices humains que l on y pratique annuellement Burton y assistera 4 tant de massacres que satur de sang il renoncera a honorer sa promesse Mais cette interf rence entre rotisme et colonialisme outre le caract re merveilleusement discontinu du r cit des Goncourt demanderait une analyse plus fouill e 305 Litt rature et saveur peau sur des cadavres en salle de dissection afin de la revendre des telieurs Retour R v roni et parenth se lexicologique Je m y pla ai machinalement dit la narratrice Voila qui ne manque pas d int r t Celle par qui le texte arrive tous les sens du terme est donc femme machine une cat gorie laquelle aurait bien du penser Descartes Elle est partie int grante de la machine donc ni e en tant qu individu P
204. ance infinie que son regard secr te par rapport aux choses et Pindividu particulier coll sa mis rable situation et vraiment ridicule dans sa pr tention la justification d une existence si relative D doublement sans d passement l infinit de la nature la disproportion de l homme ne renvoient pas une quelconque transcendance un possible salut Apr s avoir servi de point d appui une critique des illusions humaines trop humaines de la science le tragique est son tour irr alis selon le point de vue de la pure connaissance Intelligence enfin absolue gr ce un pur Voir qui prouve gr ce l ascension que permet l imagination vers le haut promontoire de linfini la pure jouissance de sa contemplation du Tout par del le n ant qui surgit de P crasement du r el Ce sentiment de mon infirmit de mon n ant me rassure il convient d appr cier le va et vient subtil de Pego m ditatif au moi personnel le premier pousant la diff rence de la nature pour prendre un recul infini sur lui m me avant de se juger comme une apparence d risoire La d rision qui annule le tragique s accompagne d un sentiment de s r nit devant le spectacle de sa propre nihilisation le passage du tragique au d risoire est 151 Litt rature et saveur ins parable d une pens e de survol nous empruntons dessein ce concept forg par Sartre dans Idiof de la famille En s ac
205. anent sur elles et incitent disqualifier leur force philosophique intrins ques elles n en contribuent pas moins donner S janus une certaine grandeur dont Agrippine elle m me finit par prendre acte en d pit de la haine effroyable qu elle lui porte v 1582 86 Belles impi t s loxymore qui r sumera toute une part de la r ception de cette pi ce singuli re n est pas indiff rent cet gard cet ath isme tonitruant qui ne m ne rien rien sinon P chec et la mort n en demeure pas moins beau par certains de ses aspects En ces temps de Fronde ou d imm diat apr s Fronde en ces temps o commence une p riode de retrait pour le libertinage rudit retrait sur lequel toute une historiographie depuis Ren Pintard s interroge cette esth tisation outrance d un matamore de l ath isme et d un picurisme de l chec put susciter bien des effets de clair obscur quant la valeur de S janus et quant aux valeurs dont il se fait le porte parole intempestif Car S janus dans la palette des personnages sombres et venimeux qui peuplent la sc ne d Agrippine Tib re reste bien des gards une figure exceptionnellement brillante par son art du langage et un h ros g n reux jusque dans sa propre perte 107 Litt rature et saveur C est bien cette collusion entre un ethos de g n reux et un discours ath e blasph matoire qui fera sa
206. angue c est dire rev tus d une forme linguistique tels que b uf lac ciel fort rouge triste cinq fendre voir A quel moment on en vertu de quelle op ration de quel jeu qui s tablit entre eux de quelles conditions ces concepts formeront ils fe DISCOURS La suite de ces mots si riche qu elle soit par les id es qu elle voque n indiquera jamais un individu humain qu un autre individu en les pronon ant veuille lui signifier quelque chose Que faut il pour que nous ayons l id e qu on vent signifier quelque chose en usant des termes qui sont disposition dans la langue C est la m me question que de savoir ce qu est le discours et Premi re vue la r ponse est simple le discours consiste fit ce rudimentairement et par des voies que nous ignorons affirmer un lien entre deux des concepts qui se pr sentent rev tus de la forme lnguistique pendant que la langue ne fait pr alablement que r aliser des concepts isol s qui attendent d tre mis en rapport entre eux pour qu il y ait signification de pens e Ferdinand de Saussure Ecrits de linguistique g n rale Paris Gallimard 2002 p 277 Litt rature et saveur Linguistique et litt rature Saussure ou le structuralisme C est Jean Starobinski qui a attir Tattention de la communaut savante en 1964 sur Les anagrammes de Ferdinand de Saussure et plac au d but de sa recherche ce qu il est d sormais convenu d appeler la Note sur
207. ans ce passage ce que fait Elstir dans ses toiles ne pas exposer les choses telles qu elles taient mais selon ces illusions optiques dont notre vision premi re est faite 4 a recherche du temps perdu T1 Pl iade p 838 CONCLUSION Proust nous propose une vision tr s personnelle d un lever de soleil pr sent comme banal cf le r alisme trivial des l ments de comparaison dans la premi re phrase du texte Mais loin de pr tendre une description r aliste il entreprend de peindre un v ritable tableau impressionniste Cette cr ation se marque par le mouvement du texte qui pouse la marche du train et le d fil successif des paysages et par celui du narrateur dont le va et vient permet d unifier les l ments composites du spectacle qui s offre ses yeux Paradoxalement c est gr ce au mouvement que le narrateur peut fixer et immobiliser sur une toile les sinuosit s des diff rents paysages le mouvement dans ce passage sert Pimmuable Mais par del le mouvement c est l criture m me de Proust qui par le jeu des images des m taphores de lalternance tude descriptive int riorisation imm diate transfigure la r alit pour en faire un objet d art GEORGES PEREC LA VIE MODE D EMPLOI Philippe ZARD Universit de Paris X Nanterre Cinoc vint vivre rue Simon Crubellier en 1947 D embl e il posa aux gens de la maison et surtout Madame Claveau un probleme difficile commen
208. ans la sc ne suivante Quant la r action extr mement laconique de Ligurio elle ne saurait surprendre il Pavait pr vu il Pavait dit pr cis ment il test arriv exactement ce que je t avais dit La d monstration avec une allusion la longue tradition comique du mari qui a ce qu il a bien cherch e quel che l mio marito ha voluto per una sera voglio ch egli abbia sempre 1 Mandragola 1 1 Siro Infine e che vi fa sperare Callimaco Dua cose luna la semplicit di messer Nicia che bench sia dottore egli el pin semplice ed el pin sciocco omo di Firenze laltra la voglia che lui e lei hanno di avere figliuoli che sendo stata sei anni a marito e non n avendo ancor fatti ne hanno sendo ricchissimi un desiderio che muoiono Una terza ci che la sua madre stata buona compagna ma l ricca tale che io non so come governarmene A la fin qu est ce qui vous fait esp rer Deux choses Pune la simplicit de messire Nicia qui bien qu il soit docteur est le plus simplet et le plus sot des hommes de Florence Pautre l envie que lui et elle ont d avoir des enfants car voil six ans qu elle est mari e ils n en ont pas encore et comme ils sont tr s riches ils le d sirent en mourir Il y en a une troisi me c est que sa m re a t une joyeuse compagne mais elle est riche si bien que je ne sais comment me gouverner 2 Mandragola IV 2 Ligurio Che ge
209. ans pr avis le texte abandonne son ton de proc s verbal pour op rer un ultime renversement un cart impr vu du c t de laffectif La jubilation destructrice fait soudain place la m lancolie et le tableau de chasse des mots abolis c de P num ration l giaque des mots disparus qui d sormais saurait le sens de wigigraphe schu le v locimane abounas palatines chandernagors Et le tueur de mots de se muer en sauveur de mots P radicateur de devenir conservateur pr servant d une main ce qu il condamne de Pautre Le dictionnaire des mots oubli s de Cinoc n a plus rien voir avec la logique progressiste et rationaliste c est un m morial Comme ces Juifs s farades qui entretenaient pieusement pr s de cinq si cles apr s leur expulsion d Espagne le castillan du 15 si cle voici qu un immigr jud o polonais devient le gardien de la langue de sa patrie d adoption Simple lubie d autodidacte Rien n est moins s r D abord parce que le projet de Cinoc d finit peut tre son insu Pavatar s culier d un ethos profond ment juif 286 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink qui enseigne la saintet du Livre qui est parole divine des mots qui sont des mes et des lettres qui sont l origine du monde La liste de Cinoc n est certes pas une liste de Schindler mais coup s r une urne o ce d vot recueille les cendres cinis des vocables d fun
210. ans sa jeunesse l poque de son grand succ s chez les romantiques et oublier par la suite Le titre de la section de l tude XI laquelle ce texte appartient annon ait une bonne moisson pour qui cherchait quelques exemples de finalisme anthropocentr bien ridicule Harmonies v g tales des plantes avec l homme Ayant d gag dans l tude X les lois g n rales de la nature envisag e comme un tout finalis Bernardin de Saint Pierre 1 Flaubert Bouvard et P cuchet Gallimard Folio 1979 p 474 2 Le chien bien plus intelligent que le singe t moin chaque jour des effets du feu accoutum dans nos cuisines ne vivre que de chair cuite ne s avisera jamais si on lui en donne de crue de la porter sur les charbons du foyer Quelque faible que paraisse cette barri re qui s pare l homme de la brute elle est insurmontable aux animaux C est par un bienfait de la providence pour la s ret commune car que d incendies impr vus et irr parables arriveraient si le feu tait en leur disposition Dieu n a confi le premier agent de la nature qu au seul tre capable d en faire usage par sa raison I 157 les vers sont tout nus parce qu ils n avaient pas besoin d tre v tus dans la substance du bois qui les abrite de toutes parts III 9 49 Litt rature et saveur entreprend en effet d en faire l application aux plantes dans P tude XI Apr s avoir tudi
211. ant comme suite de lentretien pr c dent le dialogue maintient l id e de continuit qui est galement au c ur de la repr sentation mat rialiste de lunivers L importance inusit e dans l ouvrage de la didascalie doit nous arr ter Elle signale d abord la ponctualit du m decin convi deux heures par Julie r v lant le souci de maintenir les conditions d un change complice o il faut r pondre pr sent aux attentes de Pinterlocuteur Mais surtout elle souligne la tension entre une dynamique centrifuge et une dynamique centrip te Une indication spatiale volontairement elliptique ladverbe dehors convoque un hors sc ne myst rieux le lecteur tant libre d imaginer que d Alembert est all retrouver le Diderot du premier entretien Ainsi le dialogue auquel nous allons assister est il discr tement redoubl par celui que tiendront au m me moment les deux philosophes discr tement parce que la circulation de la pens e mat rialiste se fait videmment sur le mode du clandestin du non dit La dramaturgie du R ve de d Alembert joue r guli rement de lopposition entre la publicit possible de la philosophie et son inscription dans un espace intime Le resserrement est en l occurrence celui du t te t te rendu effectif par la sortie des domestiques pour penser les choses interdites mieux vaut rester entre soi Le sommaire narratif On servit Ils parl rent de choses as
212. aque description est aussit t suivie de la mani re dont le narrateur ressent ce qu il voit dans un premier temps il se demande sil a dormi ou non puis chaque modification du paysage succ dent des verbes de sensation ou de sentiment comme je sentais je me d solais La valeur durative des imparfaits s oppose la rapidit du mouvement ext rieur et dilate temporellement les impressions du narrateur De cette mani re il ternise le mouvant Le tableau est donc pr sent sous forme de v cu int rieur Il s agit de percevoir l essence des choses derri re leur apparence en rapport avec l existence profonde de la nature 276 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink La po sie de l criture met en valeur la lumi re et les notations de couleur int rioris es Le narrateur crit par touches lumineuses dans le cadre du tableau ce proc d en peinture est celui des impressionnistes comme le choix du sujet et de certaines images cf les barques dans la peinture de Renoir Il r alise Punit du tableau tout d abord par le mouvement qu il effectue dans le train cf derni re phrase et dernier mot du texte tableau continu ensuite par sa revendication d tre le peintre du tableau qu il crit comme le d note l appropriation du paysage ma bande de ciel rose mon beau matin C est sa perception qui donne r alit l objet enfin par l criture qui r alise d
213. archais R tif de la Bretonne et Goldoni il n y aurait gu re dire sur son titre Car personne ne doute que le th tre soit la mati re principale il accapare le texte si Pon excepte Challe les article disjoints le sont ils vraiment les rares notes 37 m a t il sembl une raret constante dont une interne la citation de Fran ois Regnault p 148 mais je ne suis pas adroit en d nombrement les citations 28 vers de Moli re et plus de 800 lignes que l auteur sollicite pour instruire ses explications Tout autre est le choix du critique De Chair et d ombre ne d signe pas le th atre par son nom ou par une qualit formelle un genre mais tr s exactement par une coordination d gageant en Poccurrence un statut double r f r a la lutte des corps volubiles dans la lumi re 4 me de couverture Contrairement ce qu on imagine parfois par d faut apparemment de r flexion sur la notion de coordination cet ouvrage est bel et bien conforme la th orie pratique en marche expos e dans les explications de texte Le contraire serait videmment surprenant et m riterait alors une s rieuse m ditation dont on ne se dispenserait qu avec quelque l g ret tant il est rarement de bonne m thode de pr ter son tourderie aux grands esprits Mais dira t on avec un louable souci d exactitude textuelle et un bon sens crasant on ne cite presque jamais dans ces articles et fort tard le ca
214. ari pour lintelligence une intelligence pour vivre une intelligence qui est mani re de vivre et d tre au monde Il enjoint sa correspondante de lire Montaigne car lui dit il il la calmera Comme il diagnostique un peu plus loin que l me de sa lectrice souffre contrairement ce que racontent les m decins de convulsions plus que de courbature lire Montaigne consiste faire l apprentissage d un travail de soi Et s il est stupide d accuser P goisme de l auteur des Essais c est parce que Montaigne apprend aussi se d prendre de soi c est dire viser lIntelligence comme une fin en elle m me parce qu elle est un souci du vrai une haine du mensonge un art de rendre la vie plus intense Vous l aimerez vous verrez Mais ne le lisez pas comme les enfants lisent pour vous amuser ni comme les ambitieux lisent pour vous instruire Non Lisez pour vivre Il est important de rapprocher linvitation tre plus chr tienne la critique sceptique du savoir dogmatique qui pr tend poss der la mesure de tout ce qui est et l vocation de cette atmosph re intellectuelle compos e par l manation de tous les grands esprits qu il convient de m nager l me la lecture vaut en effet moins par ses enseignements que comme exercice du regard et de la pens e en compagnie des aristocrates de la pens e Le r el devient alors pr texte mati re pour la
215. arma les jouets qu il a d truits TL absorba jusqu aux r serves souterraines et but leau des puits rares Il absorba jusqu la dorure des sables lesquels se firent si vides si blancs que nous baptis mes cette contr e du nom de Miroir Car un miroir ne contient rien non plus et les images dont ls emplit n ont ni poids ni dur e Car un miroir parfois comme un lac de sel briile les yeux Le texte nous offre une premi re version du sortil ge d sertique une ann e maudite appel e le Festin du soleil pendant laquelle Pastre a d vor ses cr atures La suggestion anthropomorphe que comporte cette derni re formule introduit d embl e le registre approximativement l gendaire de la terreur renforc par la double d signation inaugurale et ses composantes horrifiques notamment celles qui font de Pastre solaire un dieu d vorateur a la mesure de l exc s mortif re qui caract rise le d sert dans cet espace paroxystique la source de vie p 17 18 Lui par qui se b tissent les tiges des fleurs devient force de 1 C est le premier d une s rie de cinq pisodes Je ne peux gu re que signaler es autres histoire du visage sculpt par le vent sur la montagne p 102 103 histoire de la princesse vieillie pendant sa travers e du d sert p 183 185 histoire des nu es d oiseaux p 420 421 histoire de la cit herm tiquement close p 425 et sq 2 On peut illustrer tr s simple
216. articles se veulent la fois analytiques et pol miques donc pr cieux JEAN GOLDZINK LE PLI ET L ESPRIT Par Daniel SAADOUN Lyc e Saint Louis Institut d Etudes Politiques Paris Le XVII si cle ignorait sereinement les lignes de d marcation que les institutions et les doctrines du XIX se sont efforc es de tracer avec les partages de lh ritage qu elles emportent les Belles Lettres d un c t la Philosophie de Pautre Dans l apr s coup cependant nul ne saurait sans p ril n gliger les fronti res qui depuis ont t fix es et sur lesquelles veillent en permanence les gabelous du concept et de la fiction Mais pour qui est habit par Pesprit des Lumi res ces jeux d enfants pr tent sourire on octroie Pun Les Confessions et Les R veries et Pautre Le Second Discours et Du Contrat social Version derni re de l Habeas corpus Comme aurait dit l autre la vraie pens e se moque de la pens e aussi bien que les Lettres sont la d rision de la vraie litt rature Jean Goldzink peut voyager dans l uvre de Montesquieu sans tre soumis quelque contr le d identit il lui est loisible de proposer une r flexion sur Les droits naturels dans l uvre de Montesquieu l uvre dans son int gralit et rien qu elle les textes dont elle est faite Il serait l ger d annoncer du neuf Ironie du c r monial formule protocolaire de la critique ou du commentaire Pantiphrase arrache irr
217. ateau quelques flambeaux qui taient M de Belley et son escorte lequel fut men incontinent en la salle o M d Urf descendit lui faire les honneurs M de Belley qui n avait qu un manteau de voyage et fort m chant au demeurant tait un homme de taille m diocre les cheveux un peu longs sur un visage de m me o l on ne pouvait manquer de remarquer un nez assez important Les yeux vifs et Pair souriant malgr l heure avanc e il s excusa sur son peu de courtoisie qui nous contraignait l attendre Aussi dit il ne m attendais je point ce que Charon me fit l honneur d un passage particulier non point pour me conduire aux Enfers mais pour m en retirer aussi serait il bon peut tre que l v que de Belley f t nomm M de Passelaigue Nous f mes quelque temps rire de son mot sans que je comprisse alors ce que l on a vu depuis que le successeur de M Camus aurait nom M de Passelaigue Je mai jamais pu d m ler si ce fut le simple hasard d une de ces quivoques dont M de Belley tait friand ou s il avait d j en t te celui qui lui succ derait M d Urf nous pressa de passer table Le souper fut tr s agr able quoique bref car M de Belley faisait petite ch re et la conversation fut des plus anim es M de Belley avait des fa ons de parler un peu bien brusques et un langage qui tait plus du bon temps de nos p res que du Louvre On se mit bient t sur le sujet des romans M
218. ation du lecteur Apr s la sentence Mourez en paix prononc e par les juges au nombre de trois comme Eaque Minos et Rhadamanthe juges des Enfers antiques c est au tour de l accus e de prendre la parole Le style formulaire b n ficie de Paura magique des langues trang res deux formules parall les compos es de trois monosyllabes et centr es sur la premi re personne redisent en anglais la n cessit du d nouement fatal L accompagnement narratif apparemment redondant murmura en anglais insiste sur le retour la v rit du personnage en acceptant la sentence qui la condamne l espionne tombe enfin le masque elle revient la parole sinc re et d pouill e du chr tien r sign devant le Jugement c est dire qu elle signe la fin du roman par abandon du r le qui lui a permis d alimenter en p rip ties aventure Par ailleurs la solennit du moment interdit que le narrateur laisse s introduire dans le d nouement le moindre sourire or le jeu sur les langues trang res l anglais assimil au latin a constitu jusqu ici un important ressort comique du roman qu il faut d sormais d samorcer Au prix de la redite le r cit se charge de clore la phase dynamique de l aventure dans le roman pour imposer travers la recherche d une coh rence maximale des signes la monodie du registre solennel C est pourquoi le r cit semble r pugner moins encore qu l habitude la
219. atique pour des temps de crise au demeurant largement refl t s par l id ologie fascisante qui s y affiche culte du chef ethnicisme exaltation du sens du sacrifice anti galitarisme traditionalisme etc Cette perspective va de pair avec une posture didactique qui justifie le recours au registre de l apologue de lall gorie et la structuration du r cit par la binarit Je voudrais dans ces quelques pages m int resser l un de ces rares moments o l imaginaire du d sert dont la f condit litt raire et po tique est bien connue depuis le XIX transcende cette cl ture et prend possession du texte Il se trouve que c est aussi en ces moments que St Ex cesse d tre un crivant Barthes besogneux maniant une langue pateuse et emphatique caract ris e par quelques proc d s inversion th me pr dicat suppression de l article etc cens s composer un idiome qui par son tranget sa solennit servirait la vocation all gorique du r cit pour crire ce que par commodit j appelle des l gendes J entends par l des r cits qui cristallisent un imaginaire du d sert sans commune mesure avec la pesanteur la rigidit de l apologue difiant dont ils suspendent le r gime de lecture grace lintrusion de composantes sc naristiques th matiques et po tiques qui 1 Le plus simple est de renvoyer le lecteur trois articles du volume Les Critiques de notre temps et St Exup ry Paris
220. ativisme int gral en l inscrivant dans un ordre ind pendant des conventions mais cette stabilit n a d sormais plus de sens qu eu gard aux dispositions fondamentales de me humaine c est le sens de la r criture de l Essai sur le beau donn e d s le d but de Essai sur le govt et comme on vient de le voir il 1 Ibid Des plaisirs de notre me p 845 soulign par nous 252 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink n est pas question de sp culer sur les plaisirs d une intelligence toute pure s par e du corps de l homme Il entre d s lors un irr ductible l ment de contingence dans Pexp rience esth tique qui tient la constitution actuelle du corps humain auquel l me est troitement unie Notre mani re d tre est enti rement arbitraire nous pouvions avoir t faits comme nous sommes ou autrement Aussi bien les objets du go t ne rel vent ils plus d une d termination n cessaire de l ordre en soi que Montesquieu ne remet pas en cause mais qui demeure insignifiant pour clairer l ordre factuel que vise le gout naturel Je sais bien que les rapports que les choses ont entre elles auraient subsist mais le rapport qu elles ont avec nous ayant chang les choses qui dans l tat pr sent font un certain effet sur nous ne le feraient plus et comme la perfection des arts est de nous pr senter les choses telles qu elles nous fassent
221. au singulier qui acc de ais ment au rang de clich gr ce un dispositif particulier de focus que nous avons mis en vidence lequel permet d associer au fantasme individuel du personnage voyeur celui du lectorat qui participe sa production L paisseur et lint r t du tableau tiennent moins son surabondant intertexte 1 Dans Germinal il suffit qu un personnage aussi bien l meutier que sa victime soit interpell par son nom pour qu une action violente cesse comme si lindividu reprenait d un coup son humanit en tant dissoci de la foule 400 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink qu sa capacit accueillir un d bat d images c est dire dialoguer avec limagerie issue de la R volution En t moigne Pambiguit de la peinture du collectif meutier qui restitue la tension dans la doxa de l poque entre le peuple mythe collectif en voie d puisement et la foule autre mythe construit partir des d combres du premier et pour en dire lillusoire vacuit Le ph nom ne fournit ainsi un mod le qui pourrait servir l analyse de diverses productions symboliques le mythe n gatif qu est la foule se construit par recomposition des concepts ayant pr lud la naissance du mythe du peuple auquel elle r pond et se substitue ce qui signifie qu la permanence des enjeux qui appellent la fabrication collective du mythe r pond un renverse
222. auliska d rive alors de paulum quantit n gligeable autant que de cette peau lisse sur laquelle s inscrit le ch timent et le r cit Rappelons que la m khan est tymologiquement la fois engin de guerre machine de th tre qui permet au Deus ex machina de s envoler dans les airs ou d apparaitre en majest la fin de la trag die et aussi toute esp ce de combinaison d invention de proc d ou d objet servant tromper Dans le roman de R v roni la machine est effectivement engin de guerre contre r volutionnaire machine tromper fausse monnaie et engin de th tre est ce surinterpr ter que de relever planche spectacle peut tre coups sans parler du rideau ferm de la pi ce de laine Tout se passe comme si la narratrice nous rendait compte d une pi ce qui se joue rideau ferm et dont elle est l actrice involontaire un peu comme ces courtisans de Versailles dont parle Jean Marie Apostolid s dans Le Prince sacrifi et Le roi machine qui se croyaient spectateurs des f tes royales quand ils y taient figurants Dans ce sens peut on aller jusqu dire que c est un spectacle d Ancien R gime que met en place sinon en sc ne le contre r volutionnaire Talbot Toujours est il qu il ne donne voir qu apr s coup s ce que la narratrice n a qu entendu et encore sous la forme d un soupir plaintif Et ce n est plus un dieu qui senvol
223. ayante maman je le sus plus tard s obstinait porter 63 2 Jusqu a la fermeture du cercueil avant s on arriv e 3 Cette viction centrale dans le roman et pour Penfant est significativement relat e dans une parenth se entr une fois l improviste dans la chambre et aussit t chass comme si j avais surpris quelque rite quelque c r monie vaguement obsc ne clandestine ou sacr e comme quelque mise ill gale au tombeau 81 4 Ce souhait ouvre le deuxi me paragraphe du roman Rester dans la cabine par o il fallait d ailleurs passer pour p n trer dans le tramway 12 La cabine du Wattman lieu terrible qui semble tre un seuil entre deux mondes est un lieu de convoitise pour le narrateur enfant obnubil par l id e de s y tenir en d pit de linterdit L infinitif ainsi plac en t te de phrase prend des allures d imp ratif cat gorique 5 C est d abord l int rieur que le narrateur enfant cherche vainement la liseuse de sa m re disparue 68 69 je Pai cherch e d abord dans cette pi ce ou plut t ce salon de laile droite qui communiquait de plain pied avec le jardin par deux portes fen tres et qu on avait am nag pour elle comme une chambre mais je ne Pai trouv e nulle part A l inverse lors du s jour l h pital le narrateur vieilli lorsqu il est encha n s on lit 124 tente de raconter tout ce q
224. bien que de Gen ve et Grenoble Lyon on voyait des uniformes de son r giment dans les bandes de faux sauniers que la Ferme voyait maintenant qu il tait de son int r t de poster des gardes aux limites du Valromey et qu il ne voulait point que son honneur ni le service du duc de Savoie souffrissent aucun dommage par des voleries dont le bruit tait partout en Dauphin Qu il voyait bien qu un jour ils seraient jug s pendre pendre et trangler sur la place du march Qu il M de Saluces e t s informer des noms de ces canailles et qu il les contraignit repasser ce soir m me le S ran pour escorter M de Belley jusqu Senoy o il serait son h te et que lui M de Saluces se m t leur t te tout en uniforme pour prier M de Belley de bien vouloir lui faire l honneur de souper avec nous M de Saluces qui n avait cure faire deux lieues et de passer les eaux de nuit qui sont fort dangereuses voulut y donner quelque suspens mais M d Urf le mena ant des arr ts l envoya faire prompte route Plus de deux grandes heures plus tard comme nous tions assembl s en la salle M d Urf s tant retir pour crire apr s 1 En 1607 Henri IV avait r uni les administrations qui percevaient les gabelle en une seule Grande Ferme 434 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink avoir fait dire qu on ne souperait que fort tard tant la fen tre je vis monter vers le ch
225. bir au fil des cinq para graphes suivants des objections de plus en plus fortes et subtiles que le je auteur de l article balaiera victorieusement Elles sont le fait d une instance de discours qui rev t des formes diverses et entretient avec le je auteur des rapports complexes d une esp ce d inclusion l opposition nettement inscrite de deux discours La question initiale en effet exhibe bien la fois la posture sp cifique du lecteur de dictionnaire consultant ce type d ouvrage pour d couvrir le sens d un mot et celle de l auteur dont l criture suppose ce questionnement Mais ce lecteur loin d tre innocent dispose d un savoir pr alable qui fait d embl e de ces questions des objections il a d j une certaine id e de la vertu parfaitement connue du je auteur dans lequel il est pour ainsi dire inclus et par la d construction de laquelle passe la production de la notion nouvelle Quelle est cette id e d truire A lallusion vague autre chose succ dent les termes pr cis techniques de vertus cardinales et th ologales en m me temps que se d tachent manent en quelque sorte du je un tu puis une question Mais que deviendront les vertus cardinales et th ologales dont la formulation diff re de celle d une objection impliqu e par la r flexion du je et qui amorce un dialogue Pourtant le tu pour ainsi dire s cr t par le je n est pa
226. bolique La constitution d un r seau s mantique permettant linterpr tation du po me s impose ainsi progressivement Ces cinq r seaux lexicaux sont en effet homog nes La polys mie de certains termes connecteurs qui se trouvent l intersection de plusieurs r seaux assure de mani re tr s conomique la coh rence et le pouvoir de suggestion du po me globes et pendeloques valent pour les fruits la lumi re les chambres et la femmes parfum linge et paupi res vertes pour les fruits et la femmes Cette coh rence est renforc e par les quivalences que les m taphores 7 absentia tablissent instantan ment entre Punivers v g tal et l univers f minin le linge est ainsi substitu au feuillage les paupi res aux feuilles les perles les globes et les pendeloques aux fruits Toutes ces m taphores sont rendues lisibles par la m taphore initiale n praesentia v ritable cellule m re qui associe les vergers aux chambres Au terme du po me habitu l ellipse syst matique du compar le lecteur peut ainsi comprendre que le syntagme regard avide d signe la couleur brillante et non plus seulement rose des fruits murs tout en se sentant impliqu dans le texte comme s il tait objet du regard de ces femmes fruits La lecture r trospective multiplie les effets de polys mie et les chos entre les deux univers le rose est la couleur des fruits qui commencent m rir
227. c t l exp rience exigu anachronique de Pautre une litt rature tomb e d on ne savait o du ciel peut tre 16 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink sans le moindre rapport ni avec nos vies ni avec quelque existence que ce put tre des vues des r flexions des sentiments des th ories que les manuels imputaient des gravures en taille douce emperruqu es des portraits d coiff s par les orages d sir s peints Phuile par Girodet Le moyen avec a de s y retrouver dans les deux ordres dont nous relevons celui du monde effectivement prouv dont parle Husserl et puis celui des grimoires o il est susceptible para t il de trouver un reflet de se r v ler pour ce qu il est vraiment Et alors on peut y changer quelque chose agir en connaissance de cause s affranchir des vieilles tutelles devenir soi autant qu il est en nous Une derni re chose qui participe sans doute de la v tust de la grisaille de nos enfances du monde ancien comme hivernal o nous avons commenc C est des messieurs d un certain ge d j qu tait confi le soin de nous instruire figures lointaines exquis ment polic es vieille France pour lesquelles les humanit s constituaient principalement un instrument de distinction Elles leur valaient une indiscutable notori t dans les sous pr fectures o ils exer aient leur suave et b nin magist re Je ne crois pas avoir prouv enn
228. c excellente il faut la saisir et c est pr cis ment ce qu elle fait avec brio en d finissant elle m me les moyens d action n cessaires elle propose Callimaco de devenir le comp re du couple Nicia Callimaco Elle prot ge ainsi sa r putation puisque Callimaco 1 Sur Passimilation possible de ciel et fortune voir Prince XXV 1 Et je n ignore pas que beaucoup ont t et sont d opinion que les choses du monde sont gouvern es de telle fa on par la fortune et par Dieu que les hommes avec leur prudence ne peuvent les corriger ni d ailleurs y trouver aucun rem de et c est pourquoi ils pourraient estimer qu il n y a pas se donner du mal dans les choses mais se laisser gouverner par le sort voir galement l utilisation du terme disposizione en Prince XXVI 11 Qui disposizione grandissima n pu essere dove grande disposizione grande difficult pure che quella pigli delli ordini di coloro che io ho preposti per mira Ici tout est tr s bien dispos et l o tout est bien dispos il ne peut y avoir de grande difficult d s lors que cette maison choisira certains des ordres de ces hommes que j ai propos s pour mod les Les traductions du Princesont tir es de l dition que j ai procur e avec Jean Louis Fournel Paris PUF 2000 2 On remarque la tonalit d clamatoire de cette prise de d cision io prendo per signore patrone gui
229. ce de Paris s il en pure sil en fluidifie les lignes sily allume quelques vitres sil en gaie les tuiles embrase les croix dor es blanchit les murs et transforme l atmosph re en un voile de Laze sil cr e de riches contrastes avec les ombres fantastiques si le ciel est d azur et la terre Jr missante si les cloches parlent alors de l vous admirerez une de ces f eries loquentes que l imagination n oublie jamais dont vous serez idol tre affol comme d un merveilleux aspect de Naples de Stamboul ou des Florides Nulle harmonie ne manque ce concert La murmurent le bruit du monde et la po tique paix de la solitude la voix d un million d tres et la voix de Dien La git une capitale couch e sous les paisibles cypr s du P re Lachaise Honor de Balzac La Femme de trente ans chapitre Le Doigt de Dieu publi en 1831 puis int gr dans La Femme de trente ans en 1832 in La Com die humaine Pierre Georges Castex dir Bernard Gagnebin et Ren Guise pr Biblioth que de la Pl iade tome Il 1976 p 1142 1143 32 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Situ e au d but du chapitre 4 cette description panoramique de Paris r introduit la capitale dans le roman Jusqu ici les descriptions dans le roman concernaient le Paris de la parade imp riale chapitre 1 Premi res fautes la vall e de la Loire par deux fois ibid et la plaine entre Moret et Montereau chapitre 2 Sou
230. ce entre com die et trag die caract res et positions afin que le lecteur l ve maille pas crire dire ou m me jouer des l ves de nos jours deviennent acteurs n importe quel personnage 412 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink MAXIMES L explication de texte on le constate trop souvent ennuie parce qu elle est p le visite de mus e ou de ch teau abandonn mais pas hant elle d signe des formes rh toriques et po tiques des hypallages des pr t ritions des hyperboles et des p roraisons sans envisager leur rapport au sens ni la mise en place des mots sur les planches du th tre Or il est sans int r t de d signer ou ridicule voyez ce bel oxymore droite admirez cette merveilleuse parataxe droite si l on reste sec et si Pon ne concourt pas comprendre et sentir la chair et l ombre Autant rester simple et se m fier des mots doux qui vous placent en sp cialiste pour aller vite et bien vers la situation de lecture qui pr c de celle du com dien Mieux valent les maximes g n rales qu on rapportera au particulier de la sc ne et qui clairent d un coup Maxime g n rale donc Interroger est une des grandes fonctions th trales une des plus vives et la plus n cessaire en situation d exposition Voil de quoi r fl chir appliquer garder en m moire pour d autres textes et de quoi laisser vivre et se d rouler l exp rience ou l preu
231. ce terme que renforce galement sa place centrale dans la s quence descriptive La r p tition introduit cependant une nuance la pr position en disparue le roman se distingue un peu plus de sa forme mat rielle le livre et peut tre aussi linguistique pour sugg rer mais sans doute est ce encore anachronique un genre l essentiel est il d couter rappelons que la lecture se fait encore haute voix un texte en roman ou un certain ype de texte Apparait enfin le troisi me membre de la famille la m re La fin de notre extrait s ach ve sur une sc ne que l on pourrait croire idyllique et pr c de un long d veloppement ironique l encore sur Pamour que ne peut manquer d inspirer cette belle jeune fille et que pourtant elle n inspirera pas Face au trio qwincarnent Yvain sa demoiselle et son lion s en dessine donc un autre suspect plus d un titre Toute la suite du texte insiste sur l accueil excessivement fastueux et la jeune fille m me para t trop attentionn e Com die Le narrateur le sugg re explicitement plus loin Quel est alors dans cette apparente mise en sc ne le sens de ce romman Des romans plus tardifs et notamment les premi res Continuations du Conte du Graal et le Lancelot en prose qui prolongent ou r crivent les romans de Chr tien voquent Paventure d un chevalier qui traverse un ch teau d sert aux salles souvent splendides et qui arrive da
232. celier des Huit Valori commissaire apostolique et Cibo cardinal et me damn e de Rome Cependant Musset voque galement des pouvoirs influents Florence mais absents du th tre Charles Quint C sar et le Pape La vie politique de Florence se situe au 1 En ce sens il s agirait d un de ces n uds coulants que Lorenzo dit en III 3 avoit tiss autout de lt s gt on b tard 2 M 3 3 Comment tre un M dicis question commune a Alexandre batard et Lorenzo moiti de M dicis par sa feinte l chet Comment crire Lorenzaccio storia fiorentina transmise par Benedetto Varchi et l bauche d une Conspiration en 1537 de George Sand Comment r pondre l enjeu d une libert th trale absolue en mettant distance aussi bien les conventions classiques que les manifestes romantiques La question d une r volution possible aussi bien politique que litt raire semble donc centrale 4 Les discours rapport s du pape nouvel indice d un hors sc ne essentiel au drame sont le leitmotiv de la premi re partie de cette sc ne Musset insiste ici sur l influence bien moins spirituelle que temporelle et le pouvoir d immixtion de Paul II aux formules de politesse oblig es lors d une entrevue officielle Paul HI envoie mille b n dictions Votre Altesse et fait les v ux les plus ardents pour sa prosp rit et aux conseils l gers Sa Saintet craint s
233. cette belle horreur Mis a distance par leur constitution en spectacle symboliquement s par s du spectateur bourgeois par le mur trou la fois 4 me mur th tral et accessoire caract ristique du dispositif voyeuriste le monde ouvrier appara t au lecteur comme en un tableau ce qui est spectacle pour le personnage spectateur est pour le lecteur image d coup e dans le tissu du texte et propos e son appropriation Le d fil des gr vistes se d ploie ainsi dans un autre espace textuel il est d une autre nature que la sc ne encadrante au risque de s affranchir des contraintes qui gouvernent le reste du roman C est du reste une habitude de Zola que de se donner des bornes un cadre pour mieux l cher la bride au fantasme la dimension pique du texte le saut dans les toiles prend appui sur un espace soigneusement d limit Le dispositif d encadrement qui permet l insertion du fantasme des personnages et l activit fantasmatique du lecteur dans le r el est renforc par le recours au conditionnel mode clef de la sc ne qui m rite ici son nom d irr el du pr sent Il ne s agit pas tant de construire ce qui pourrait se passer partir de 1 E Zola Germinal op cit p 1436 2 Telle est expression utilis e par Zola propos de Germinal pr cis ment dans une lettre a H C ard du 22 mars 1885 J ai l hypertrophie du d tail vrai le saut dans les toiles sur le trempl
234. cette interpr tation clairante simplement je crois possible de mettre en vidence une r f rence directe au P Andr dans PEssai sur le go t inaper ue dans le travail de Beyer la lumi re de laquelle la coh rence philosophique propre de cet ouvrage appara t beaucoup plus nettement Sur la question esth tique chez Montesquieu on consultera notamment V R Shackleton Montesquieu et les beaux arts Actes du Ve Congr s International de langue et litt rature modernes Florence 1950 et pour une contribution r cente P E Knabe Du rationalisme au sensualisme Montesquieu et son Essai sur le gout in Cahiers Montesquieu E Mass et A Postigliola ds Lectures de Montesquieu Actes du colloque de Wolfenbiittel 26 28 octobre 1989 Napoli Liguori Editore 1993 244 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Montesquieu ou Condillac ou Rousseau s autorisent malgr tout la reprise de certaines descriptions d inspiration malebranchienne et on le verra c est pour partie ce qui se produit d s le d but de PEssai sur le gont D un autre c t on doit rappeler que les meilleurs commentateurs ont aper u l affinit de plusieurs th ses de cet Essai avec la tradition de lesth tique malebranchienne sans se limiter la mention centrale de Pordre et des rapports mais ce qu il faut saisir f t ce par ce d tour demeure la coh rence sp cifique du propos de Montesquieu qui comm
235. ci me semble t il un texte exemplaire en ce qu il nous montre comment une th matique un imaginaire qui traversent une poque une culture viennent sauver quelques bribes d une uvre par ailleurs irr m diable la font clater lib rent fugacement une criture du carcan id ologique d une pens e m canis e par un humanisme aussi sommaire que mal entendu Citadelle je te b tirai dans le corps de l homme et la p dagogie de la binarit Oubliant les r conforts enfantins m nes du Pett Prince de la ferveur St Ex soudain poss d par l imaginaire du d sert d rive vers l angoisse et l exalte po tiquement dans des images horrifiques On ne fait gu re de bonne litt rature avec les bons sentiments l auteur semble s en aviser lui m me dans la seconde l gende de Citadelle p 102 103 laquelle je souhaiterais 1 La formule a t popularis e par le titre du c l bre ouvrage de W Thesiger consacr ses explorations du Sud Est de l Arabie Le D sert des d serts 1959 traduction fran aise 1978 Paris Plon collection Terre humaine mais elle est depuis le XIXe utilis e pour d signer le Sahara Elle m a sembl susceptible de d signer ici cette essence fantasmatique de d sert invent e par St Ex 326 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink mon tour conf rer dans cette conclusion une valeur d apologue voulant sa mani re laborieu
236. cipaux l ments qui la constituent ont d j t ou seront de nouveau d pos s dans le livre ample jeu d chos o le sens s aiguise et s approfondit Autour de ces palmes toute la pens e la m ditation la r verie s organise Il ne s agit pas seulement de Vobjet de ces arbres qui bordent la mer mais du mot lui m me de sa pr sence concr te et de toutes les images et de tous les r cits qu il enferme qu il offre l Evangik en particulier Des uns aux autres le texte patiemment suit les ressemblances Par ce travail par cette criture la fois minutieuse et ardente Jean Genet il faut videmment lui donner son nom invente l essentiel sa naissance Les palmes Phrase nominale et exclamative L ellipse r duit nonc au mot palmes et l article en lequel se joignent ainsi le sens ampleur ind finie du sens et l motion que marque Pexclamation En m me temps le mot impose sa pr sence sonore sensible po tique D une part les sons les quatre phon mes qui le constituent vont tre dans la suite du texte dispers s et repris outre que le a accentu rassemble d j 162 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink PEspagne la Guyane le bagne Il se trouve d autre part charg d une longue m moire faite des phrases des strophes des vers que nous avons lus Baudelaire Verlaine Val ry Saint John Perse Aragon De l l importance de
237. classique et th tre moderne expliquer th tre traditionnel et th tre futur pol miquer sur th tre et id ologie mets royal go teux r gal mais dont l abus risque d occasionner des migraines penser Particulation th tre et roman p te molle et ind finiment mall able Le prince p dagogue parle t il du th tre du roman du dialogue Tout cela a la fois Comment pourquoi dans quelle mesure Aussi solennel que Cyrano mais sans espoir de touche en fin d envoi je peux mon tour nasiller cette grave question la critique th trale nous fabriquerait elle un monstre Th tre et philosophie th tre et religion th tre et sc nographie th tre et posture critique et bien entendu th tre et geste paraissent aussit t en couples conjugalement ind fectibles le corps et le mot la parole et le silence la vue et Poreille Pesprit et la mati re l id e et la sensation le coup de th tre et le tableau et les passions enfin Au cas o par encombrement sur la rampe on souhaiterait plus d azur et de volume en fond de sc ne il suffit d appeler la rescousse la troupe compacte de ses textes dits critiques convoqu s avant et apr s l explication concordent ils sur tout on esp re bien que non ce serait d solant de convoquer les pr faces infatigables lanternes magiques aux sid rations nigmatiques d installer de dos de face ou de profil devant la chemin e
238. comme dans ceux de ses innombrables pigones d j ce n est plus du sang mais de lencre Le fouet ou tout autre instrument propre graver dans le marbre des chairs les mots d une langue in dite est un style un poin on impressionner la mati re Le corps miraculeux de Justine est remis neuf d une page sur l autre Ainsi la page blanche que l auteur inlassablement r installe devant lui et qu il soumet comme la peau de son h ro ne une surcharge de griffures imm diatement ni e par la page suivante 1 Catherine de Sienne s Oraisons trad Lucienne Portier Editions du Cerf 1992 p 30 2 Michelet a Sorci re Garnier Flammarion p 240 3 Michel Foucault op cit p 252 302 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Les machines fouetter qui corchent en quelques instants P piderme entier des patients ou la fatale roue invent e par le bourreau Delcour l image de celle avec laquelle la tyrannie tente d imprimer son texte incroyant sur le corps de Catherine d Alexandrie dans a L gende dor sont des machines crire coupl es avec des photocopieuses Les empilages de corps permettent de fustiger plusieurs paires de fesses en m me temps Ils fonctionnent en somme comme ces proc d s ing nieux dont usaient autrefois les l ves punis pour r diger cent lignes sans s y reprendre cent fois Allons foutre dit il en fureur donne moi donc des
239. communion dans la souffrance Mitleid puisque l adjectif employ wehmitie sugg re au contraire dans cette souffrance sentimentale l id e d une s paration psychologique Il est significatif qu en sens inverse le dernier regard qu elle jette sur lui celui qui marque la s paration d finitive soit le regard le plus charg d amour Au milieu se trouve exprim ce d chirement cette h sitation lorsqu elle m le les deux sentiments ballott e entre Pamour et la col re Les trois exclamations les trois occurrences du nom Werther formul es sur trois tons diff rents expriment par le m me son trois sentiments diff rents La premi re exclamation n en est pas une formul e par un oxymoron o le verbe s cria rief est contredit par la voix touff e mit erstickter Stimme Dans 179 Litt rature et saveur la seconde la force du langage le verbe rufen s crier est r p t est r fut e par la faiblesse du corps d une main faible Cette gradation s ach ve par cette harmonie entre la voix et son contenu entre la parole et le sentiment qui induit la s paration Werther s cria t elle et le ton ferme de sa voix r v lait le sentiment le plus noble Ici s op re un retournement dans le texte qui repr sente la fois le sommet de cette union et la radicalisation de son impossibilit Lotte le formule C est la
240. conde Pr face La Nouvelle H loise Lisez une lettre damour L image de la chaleur artificiellement communiqu e 1 D bat que la litt rature pistolaire a peut tre investi de fa on propre et dont on peut en trouver un exemple dans les Lettres portugaises de Guilleragues D s la lettre 2 la jeune religieuse s interroge sur les limites de l criture pour exprimer la r alit de Pamour il me semble que je fais le plus grand tort du monde aux sentiments de mon c ur de t cher de vous les faire conna tre en les crivant 2 Ibid p 79 3 C est en ces termes que N annonce sa critique Ces lettres ne sont point des Lettres ce roman n est point un Roman Seconde Pr face a La Nouvelle H loise in Rousseau uvres compl tes Gallimard Biblioth que de la Pl iade 1964 t IT p 12 4 Lisez une lettre damour faite par un auteur dans son cabinet par un bel esprit qui veut briller pour peu qu il ait de feu dans sa t te sa lettre va comme on dit br ler le papier la chaleur n ira pas plus loin Vous serez enchant 213 Litt rature et saveur la lettre tout comme la r flexion sur le d sordre qui est la v ritable loquence de amour sont express ment emprunt s Rousseau L loquence de la passion suppose donc le d sordre de la pens e et de expression La logique qui la meut n est pas rationnelle ce d faut de rh torique qui correspond un d faut
241. cons quent que de choses indiff rentes lequel n est pas en bonne orthodoxie mat rialiste un ps mort mais plut t une fermentation momentan ment ralentie ou pour user d un registre m taphorique tr s pr sent dans Le R ve de d Alembert une r sonance affaiblie des cordes sensibles Deux heures et demie s parent cet entretien de la fin du pr c dent Julie qui tient sa question sur le m lange des esp ces ne s est pas arr t e de vibrer et si l cho des paroles de Bordeu est d sormais assourdi il est encore pr sent sa m moire facult dont Le R ve de d Alembert a montr auparavant qu elle garantissait Punit du moi pensant Reprenant sa posture d enqu tante elle est ici vraiment philosophe ce qui n emp che que Bordeu reste d sign comme auctoritas la fameuse question elle ne veut la faire qu a lui La tournure restrictive renvoie aussi Vintimit de l change ce qui n ira pas on le verra sans probl mes La tournure emphatique pat sa familiarit m me Il est excellent ce malaga indique que nous sommes ici dans un cadre amical qui autorise un certain 1 Rappelons que la distinction entre P enqu tant et le dogmatique dans le dialogue philosophique est sugg r e par Diderot lui m me dans son Apologie de l abb Galieni 115 Litt rature et saveur relachement Cependant Bordeu est d abord le connaisseur
242. cordant par l imagination avec linfini Gustave tire un vrai plaisir frapper le monde et lui m me de non tre D s lors la suite du texte livre le sens esth tique de cette asc se le panth isme apparent qui se fait jour ne consiste pas pr server une r alit ne serait ce que fugace la particularit pur chatoiement sur les plis de l infini mais s exercer la repr sentation de soi partir du dehors en effectuant sur le mode imaginaire lexp rience extatique de soi m me totalis comme ce grain de poussi re appartenant la grandeur illimit e qui Penveloppe du point de vue de l infini auquel acc de la vision Qui perd gagne Le d risoire de lexistence magnifie la toute puissance de la conscience imaginante qui arrive se s parer d elle m me pour se voir mais dans un ultime d tachement de soi Car il se pourrait bien qu il n y e t rien du tout derri re le rideau noir Les derni res lignes du texte illustrent par une image pittoresque un lieu commun de la critique sceptique il n est pas possible de mesurer Pincommensurable Les philosophies ne disposent pas de l talon qui leur permettrait d apprivoiser l infini et de ramener ce qui nous chappe une proportion rassurante Mais ce qu il faut relever dans cette critique c est moins le d sir d humilier l Intelligence que celui de ridiculiser la pr tention en finir vouloir conclure par une esp ce de mesure
243. crin ou cette nature sc ne de spectacle est donc propice l accueil d une pr sence mythologique le faune qui n est peut tre qu un cureuil ou un bouvreuil Elle s av re propre convertir le naturel en mythologique l inoffensif en d moniaque Chez Rimbaud le bois est volontiers un cadre favorable aux apparitions de toutes sortes Le faune qui surgit est une divinit champ tre repr sent e velue avec un torse humain des oreilles pointues et mobiles des pieds et des cornes de ch vre C est un satyre compagnon du vieux Pan de Dionysos de Bacchus une figure de lenivrement 1 On se souvient ici du paysage du Dormeur du val de ses incongrus haillons d argent son cresson bleu et ses gla euls 4 p 53 2 Voir la s rie des il y a dans Enfance III in uminations id p 156 313 Litt rature et saveur de la sensualit et de la lascivit Dionysos selon la mythologie a invent l oubli des peines et la communion des hommes et des dieux dans la joie Il est fait directement allusion 4 cette tradition dans le texte avec la l vre brunie et sanglante ainsi qu un vin vieux Cet animal mythologique ancestral est comme le vin qu il donne boire symbole de jouvence Il incarne l nergie naturelle brute la vitalit et l ardeur sexuelle Il repr sente la nature en sa f condit et qui se trouve ici comme f cond e par surprise Il rap
244. crit com sont membres du Syndicat National de l Edition www manuscrit com communication manuscrit com T l phone 33 0 8 90 71 10 18 T l copie 33 0 1 48 07 50 10 20 rue des Petits Champs 75002 Paris
245. ctaculairement des genres universitaires traditionnels et plus tortueusement de l exercice scolaire ou agr gatif avec lequel les adversaires du Prince p dagogue comme il le sait bien ne peuvent manquer de le confondre L ACTION Il me semble assez inutile en tout cas ici d piloguer sur une d finition a priori de l action d expliquer fil apparent de cet article Mieux vaut prouver le mouvement en marchant sans pr tendre 409 Litt rature et saveur videmment tout dire sur trois vers essentiels dans l histoire du th atre Philinte Qu est donc Ou avex vous Adeste Laissez moi je vous prie Philinte Mais encore dites moi quelle bizarrerie Adeste Laissez moi la vous dis je et courex vous cacher Comme le th tre l explication doit d abord surprendre par ses premiers mots son premier objet Une reprise du texte qui fait bloc et ouvre large sur ce que la sc ne d couvre On n attaque pas sut la forme vers ni sur les id es mais sur lattitude du personnage son comportement sur la surprise n cessaire au th tre Donc sur l tonnement du spectateur situ juste derri re le lecteur et c t du com dien On pourrait dire aussi qu on amorce l explication par une remarque dynamique li e au mouvement de l entr e en sc ne sort on entre t on souhaite t on sortir de sc ne La sont toujours les bonnes questions puisqu il s agit ici d une entr e en sc ne
246. cteurs de l Universit et quelques conseillers du Parlement qui ne balanc rent pas la d clarer inspir e soit qu elle les trompat soit qu ils fussent eux m mes assez habiles pour entrer dans cet artifice le vulgaire le crut et ce fut assez Alors commence la chevauch e h ro que de Jeanne sa pr sence au sacre de Reims puis sa capture sa captivit le jugement inique la mort sur le b cher Nonnotte que ce r cit r vulse s attaque des points de d tail 11 entend prouver que Jeanne tait bien une berg re et non une servante sainte Catherine et sainte Marguerite pr f rant sans doute se faire entendre dans un cadre bucolique Puis il cite les actes du proc s r fute trois historiens Rapin Thoiras Enguerrand de Monstrelet Girard du Haillan qui se sont efforc s d affaiblir le merveilleux de cette histoire enfin conclut 1 Essai sur les m urs d R Pomeau Paris Garnier 1963 t 1 750 75 1 374 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink pat un argument d autorit des seigneurs des magistrats des docteurs des gens de guerre des religieux ont reconnu dans ces faits de l inspiration et du miraculeux Voltaire r plique fourbissant ses arguments Son texte sinscrit dans une pol mique et s affiche comme tel Dans Les Honn tet s litt raires il passe en revue ses ennemis qu il fustige d importance le mot honn tet soulignant ironiquement le refus de
247. ction bien plus forte N ron le pape Alexandre V1 et d autres monstres de cette esp ce ont r pandu des bienfaits je r ponds hardiment qu ils furent vertueux ce jour l Quelques th ologiens disent que le divin empereur Antonin n tait pas vertueux que c tait un Stoitien ent t qui non content de commander aux hommes voulait encore tre estim d eux qu il rapportait a lui m me le bien qu il faisait au genre humain qu il fut toute sa vie juste laborieux bienfaisant par vanit et quil ne fit que tromper les hommes par ses vertus je m eerie alors Mon Dien donnez nous souvent de pareils fropons 382 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Machine de guerre contre l glise romaine le Dictionnaire phi losophique ne saurait proposer qui le consulte une ou des d finitions ou encore la m me examin e depuis des points de vue divers en tou te s r nit L article Vertu qui termine cet trange dictionnaire dont Pauteur discourt la premi re personne et apostrophe vigoureu sement son lecteur offre un exemple particuli rement r ussi de P nonciation dont les modalit s sont elles m mes porteuses de sens d un th se ch re Voltaire la d finition tout humaine et sociale de la vertu par la bienfaisance hors de toute perspective th ologique et surnaturelle Enonc e d entr e de jeu Qu est ce que vertu Bienfaisance envers le prochain cette d finition va su
248. d hagiographie chez Perec mais des vies minuscules La fable de ce petit po ak charg par le Larousse d liminer tous 285 Litt rature et saveur les mots et tous les sens tomb s en d su tude n en r capitule pas moins avec lucidit et a chelle d un lexicographe du souterrain ce que fut le rdle culturel conomique ou politique jou par ou assign a tant de Juifs mancip s en Europe Cinoc le d racin est aussi l arracheur de mauvaise herbe agent de modernisation l ouvrier de la rationalisation Ce n est pas tout Dans sa sobri t l histoire laisse sourdre autre chose comme un arri re plan vertigineux Le brave Cinoc se plait se pr senter comme un tueur de mots tandis que le texte solidaire de sa cause se complait a grener la liste innombrable des victimes de l assassin en chambre ces animaux ces lieux ces gloires p rim es ces dieux d chus qu avec probit et application Cinoc s emploie renvoyer leur anonymat et fait s vanouir dans la nuit des temps Comme s il y avait dans la logoclastie de Cinoc une jouissance d purateur de d peupleur une Schadenfreude sinon m me l obscure vengeance de l homme sans nom sur les mots du juif meurtri par l Histoire devenu meurtrier du pass Esquisse d une psychologie du ressentiment commune tous les humili s et offens s aux Cinoc et aux Shylock Pourtant s
249. d rant Je ne veux ici faire ni le p dant ni le th ologien dit il mais il faut bien que je m l ve des propos qui ne seront peut tre pas go t s de tout le monde et cependant n cessaires si je veux donner pleinement mon sentiment sur des mati res qui demanderaient un plus savant que moi Il est vrai que la diversit des hommes semble admirable Et pourtant la bien consid rer et en regard de la bien plus grande diversit des choses du monde la diff rence que nous mettons entre nous n est que le fruit de notre orgueil et vanit et n est nullement de nature C est le Cr ateur qui a mis dans le monde cette diversit pour notre agr ment Voyez les fleurs des champs chacune est en elle m me et ne se soucie nullement si l clat de sa couleur ou la raret de sa teinte la distingue de ses voisines Elle ne se soucie pas non plus si avec celles ci l oeil y pourra contempler un beau tout ensemble ou si la bouqueti re la choisira pour tre Pun des agencements de son bouquet Chacune est partie de la diversit et donc singuli re mais toutes le sont galement chacune demeure en sa singularit comme en son lieu propre dont la distribution fut ordonn e par le Cr ateur et nous ne nous mettons pas notre curiosit rechercher ce qui la fait ainsi Et si nous exaltons au dessus de toutes le lis c est qu il est pour nous l image de la royaut sacr e qui nous devons ob issance comme les Anglais
250. d le faune mord la nature c est sa propre l vre qui clate Comme sil se baisait mordait lui m me ce qui confirme le rapport d inclusion exclusion Mais il appara t du m me coup que cette sc ne symbolique pr sente galement une dimension onaniste En se t vant sous les traits d un dieu bouc c l brant des noces violentes avec la nature Rimbaud exprime en fait la satisfaction ph m re d un d sir demeur longtemps prisonnier de soi Un d sir d pourvu d objet pr cis manifest par la libido flottante des premiers vers rest longtemps dissimul sous la feuill e dans l criture et qui prend brusquement son plaisir avec effroi C est l comme une image d un tremblant et v h ment plaisir solitaire Le texte est le lieu de ce plaisir le secret espace de la jouissance Il dit un d sir effar apeur Un plaisir en douce Bref et brusque T te de faune est un po me o enfouir et lib rer le sexe devenu discours figure T te de faune le sexe 316 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink prend figure et le po te avec lui Le d sir se trouve pris dans un chiasme m taphorique entre le faune et la feuill e un espace rog ne est cr pour sa convenance Le d sir s enferme dans lPantim tath se finale Le Baiser d or du Bois deux B majuscules deux d minuscules Le B buccal du baiser re cueilli le baiser nouveau raval de la m re Ainsi dans la feuill
251. da tu mio padre tu mio defensore o Yon peut voir des r f rences dantesques mais qui reprend galement une terminologie pr sente dans la traduction que Machiavel a faite de Andria qui est mise c te c te 233 Litt rature et saveur aura pour sa part tout int r t maintenir cach e la tromperie qu il a labor e et gr ce la vigueur de Callimaco elle aura un enfant dont elle a aussi envie que son mati pour des raisons d h ritage et de position sociale Cette transformation de la nature de Lucrezia laisse Callimaco sans voix sid r incapable de r action Je ne pus r pondre la plus petite partie de ce que j aurais d sir Au vrai il a de bonnes raisons de rester coi devant la transformation aussi incontestable qu incroyable de Lucrezia n a t il pas devant lui une femme si prudente qu elle sait changer sa fa on de proc der quand la fortune a fait varier les temps Cette sid ration provoque m me chez lui une sorte de r gression vers des r actions Je fus en entendant ces mots sur le point de mourir de joie qui avaient provoqu es en son temps la critique ironique de Ligurio De la m me fa on sa r f rence une b atitude divine fait venir Pesprit une autre pointe ironique de Ligurio Comme si Dieu faisait les gr ces du mal comme celles du bien IV 2 Cette r action de Callimaco annonce par ailleurs P merveillement de Nicia d
252. de de faux sauniers ni eu connaissance de tous les dangers qui menacent aujourd hui le berger comme le voyageur Undique totis usque adeo turbatur agris Le Lignon est aussi loign du S ran que les jours innocents du premier si cle sont loign s de notre ge de fer Et si j ai feint que sous le nom de bergers des personnes qui pour la bont de Pair la fertilit du rivage et leur douceur naturelle vivent avec autant de bonne fortune qu ils reconnaissent peu la fortune demeurent dans le pays de mon enfance c est que les accidents du si cle dont je fus afflig me font leur souhaiter meilleure fortune et plus coite que la mienne J tais si persuad que C ladon n tait autre que 1 Maro Bucolica I note de l dition originale 2 Maro Bucolica I note de V dition originale Ou de Patru Toute la sc ne semble vue a travers la premi re glogue de Virgile y compris le coucher de soleil sur une plaine mar cageuse bord e de hautes montagnes v ci dessus note 4 Mais il est vrai aussi que des environs de Virieu on peut d couvrir en regardant vers Est en direction de Culoz un tel paysage de montagnes surplombant une plaine mar cageuse L allusion aussi un exil dangereux oppos au calme de la vie rustique th me de la premi re glogue n est pas mal venue puisque Honor d Urf est Senoy dans une sorte d exil proche des dangers de la guerre il va y retourner et y mourir bient t au se
253. de la nature mats la ligne de chemin de fer ayant chang de direction le train tourna la sc ne matinale fut remplac e dans le cadre de la fen tre par un village nocturne aux toits bleus de dair de lune avec un lavoir encrass de la nacre opaline de la nuit sous un ciel encore sem de toutes ses toiles et je me d solais d avoir perdu ma bande de ciel rose quand je l apercis de nouveau mais rouge cette fois dans la fen tre den face quelle abandonna un deuxi me coude de la voie ferr e si bien que je passais mon temps courir dune fen tre l autre pour rapprocher pour rentoiler les fragments intermittents et opposites de mon bean matin carlate et versatile et en avoir une vue totale et un tableau continu Marcel Proust A la recherche du temps perdu Paris ditions Gallimard Bibliotheque de la Pl iade T 2 Yombre des jeunes filles en fleurs 1954 p 554 655 Litt rature et saveur Lever de soleil vu d un train INTRODUCTION Pour un lecteur rapide de Proust La Recherche du temps perdu peut apparaitre comme une suite d anecdotes et de souvenirs personnels plac s sous le signe du temps En r alit tout au long de son uvre il veut nous faire comprendre que faire uvre dart c est traduire le livre int rieur que chacun porte en soi et du m me coup d couvrir ce qui nous devrait tre le plus pr cieux ce qui nous reste habitude jamais inconnu notre vraie vie la r alit telle qu
254. de les entendre Ils commandent la pens e du livre Le givre sur les vitres l hiver La phrase qui commence par ces mots se d veloppe suivant une s rie de ressemblances nou es entre elles le glissement d une image une autre des palmes au givre sur les vitres c est le m me dessin pour Penfant du givre a No l non seulement parce qu il s agit de l hiver mais en vertu d une relation plus profonde constitu e par la joie de la f te Plus haut dans le livre Nous avions le verglas le givre car ces l ments s ils indiquent les calamit s voquent des joies dont le signe d tach dans notre chambre nous suffisait de No l et des f tes du R veillon nous ne connaissions que ce qui les accompagne toujours et qui les rend plus douces aux f teurs le gel Notons en passant la consonne initiale de givre joies gel Nous la retrouverons de No aux palmes des Rameaux L Evangile de Jean Le lendemain la foule nombreuse qui tait venue pour la F te apprenant que J sus se rendait J rusalem prit des rameaux de palmier et sortit sa rencontre en criant Hosanna 164 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink La comparaison fonde ici la pens e du texte Elle est le principe de son d veloppement On le verra encore plus loin Cette pens e d autre part s appuie sur la fable majeure de notre culture celle qui raconte la vie de J sus Il ne s
255. de preuves parce que les amants n ont que faire des arguments et des raisons La passion authentique selon Rousseau ne songe m me pas persuader parce qu elle ne suppose pas qu on puisse douter delle Les arguments rationnels ne sont pas de mise dans le discours amoureux D o la question rh torique de Mme de Merteuil en d but de lettre Par hasard esp rez vous prouver cette femme qu elle doit se rendre Ce que Rousseau formulait de mani re paradoxale en affirmant que le v ritable amoureux prouve d autant plus qu il raisonne moins Ou pour dire les choses autrement la faiblesse du langage prouve la force du sentiment m me agit peut tre mais d une agitation passag re et s che qui ne vous laissera que des mots pour tout souvenir Au contraire une lettre d amour a r ellement dict e une lettre d un amant vraiment passionn sera l che diffuse toute en longueurs en d sordre en r p titions Seconde Pr face a La Nouvelle H lo se d cit e p 15 On notera que lexpression briler le papier employ e ici par Rousseau sera r utilis e par Mme de Genlis dans un texte o r sonnent trangement les propos de Mme de Merteuil Il s est tabli parmi les litt rateurs une pr tention la force la grandeur la chaleur Chaque crivain veut br ler le papier et le lecteur reste froid et dit en baillant il y a de l nergie dans ce morceau l a
256. de raconter l histoire ni de relater les grands r cits des grands hommes mais qui se con oit d sormais comme la retranscription d un tat historique du monde organis par la Guerre Froide ou plus tard par le dollar et la CIA 130 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Mais comment jouer au Plan tarium Car c est un jeu Le Plan tarium m me rudimentaire on y joue avec des magnets ces l ments essentiels au vocabulaire plastique de Fahlstr m et tout droit venus de l univers Monopoly des aimants d coup s et color s en plastique vinylique ou en t le que l artiste laisse la disposition du spectateur de l uvre pour les d placer comme des pions sur un panneau m tallique qu on appelait autrefois la toile ou le tableau et pour lequel Fahlstr m adoptera souvent le nom g n rique de peintures variables Un regret cependant l impossibilit aujourd hui dans les mus es ou les galeries dart de jouer avec les magnets de Fahlstr m sur ces peintures variables si mat riellement fragiles et d sormais fig es par les conservateurs de mus es sous une forme invariable Si on le pouvait donc si les mus es nous laissaient faire on jouerait tous ensemble et aussi Pun apr s Pautre au P an tarium On y jouerait comme on veut comme des petites filles avec leurs Barbie d coup es ou a la mani re du puzzle pr cise lui m me Fahlstr m dans des notes de 196
257. demander son amant de l attention une circonspection que l loignement semble rendre incertaine Consid re reviens prestement de ton manqule de pr voyance On appelle parfois cela la captatio benevolentiae Il faut qu on l coute et elle ne cessera de rechercher r ciprocit et contagion partage le plus t nu qui soit entre deux tres s par s et qui puisse continuer de la faire esp rer qu elle jouira d une passion d amour sans l entremise du corps Ainsi la trahison des sentiments a t double tu as t trahi et tu m as trahie par la lettre Marianne se lie son s ducteur Le plaignant apostrophant sous le signe du malheur elle impose le partage des peines et le constitue partie int grante et souffrante de son topique amento d amoureuse conduite C est dire si son propos ne manque pas d ordre et s appuie sur une logique dont l espoir et Pamour seuls procurent le g nie La trahison r ciproque les esp rances la tromperie les projets restent autant de d signations de la facult imaginative celle qui fait que la r alit se d double et peut donc mentir Marianne impose son destinataire le nom d amant le fait qu il sente une passion sans quoi elle ne pourrait nourrir son imagination Aussi ses propres esp rances trompeuses fait elle correspondre un mortel d sespoir qu elle d sire d imaginer 187 Litt rature et saveur dans
258. derni re fois Werther Vous ne me reverrez pas Le nom est prononc pour la derni re fois par Lotte Dans la traduction rapport la proposition qui pr c de il contient la fois un reproche et un avertissement et illustre le sentiment de col re exprim Le texte de Goethe semble plus ambig car il s pare le nom dans une exclamation autonome Das ist das letzte Mal Werther Sie sehn mich nicht wieder Pouvant tre rattach e ce qui pr c de comme ce qui suit la formulation du nom par la note solennelle qu elle apporte souligne sa fonction de parole de rupture Le pr sent verbal sens de futur en souligne du reste la r alit et par la promesse qu il contient le caract re irr vocable Cette signification des derni res paroles de Lotte est comme affirm e par contraste par la derni re supplique de Werther demeur e sans r ponse Lotte Lotte Un mot encore un seul Un mot d adieu Le double sens d une rupture qui contient en elle m me lexpression du sentiment amoureux est contenu dans deux attitudes le silence de Lotte Elle resta silencieuse et le mouvement des mains de Werther Werther tendit les mains vers elle mais n osa pas la retenir On peut y lire a la fois la manifestation d une osmose totale des deux personnages et un cran derri re lequel s abrite Lotte pour se d fendre de ses propres sentiments EXPRESSION DU DESESPOIR Cet espace de s
259. des autres prisonniers permettent de reconstituer Les Allemands sont la fois pr sents et absents Leur pr sence se signale dans le texte pat le biais des rations et de leur attribution son morceau de pain noir et sa margarine de charbon sa propre ration ou dans l allusion au travail forc Mais ils n interviennent pas dans la relation de l Italien et du banquier C est un point qui m rite d tre soulign On se souvient que dans Le Tramway le narrateur voque le cas d un prisonnier que les Allemands avaient promen dans tout le camp tenu en laisse comme un chien par deux autres marchant sur ordre lentement et portant sur la poitrine suspendue au cou par un fil de fer une lourde brique ou un moellon sur laquelle tait crit jai vol le pain de mes camarades Il n y a pas vol ici m me s il y a d placement de propri t L identification des Allemands la loi se refl te aussi dans le fait qu ils n interviennent pas en mati re de jeu Selon Particle 1965 du Code civil correspondant au paragraphe 762 du BGB allemand la loi n accorde au gagnant aucune action pour le paiement d une dette de jeu De l r sulte expression Dette de jeu dette d honneur seul Phonneut peut amener 1 Ibid p 211 2 C Simon Le Tramway Paris Editions de Minuit 2001 p 63 344 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink le perdant payer La loi refuse aussi au perdant
260. die rest es impunies En traquant luniversel travers le mythe Barbey pr tend sans doute rejeter tout risque de censure Dans la derni re nouvelle du recueil Barbey rompt donc avec la forme classique enchass e de la Diabolique pour rechercher travers le pastiche journalistique une autre chambre d chos Il peut ainsi dans une pratique v ritablement contorsionniste se prendre lui m me pour objet de sa propre criture critique montrer la profonde coh rence et la long vit de ses doctrines litt raires Il adopte dans une posture d fensive la forme m diatique de Particle critique jugeant en ce d but de Troisi me R publique pudibonde que la presse constitue le seul contre pouvoir efficace aux instances politiques et judiciaires De fait pour Barbey lattaque viendra aussi de la presse puisque c est le tr s satirique et ath e Charivari qui attirera l attention de la justice sur Les Diaboliques en livrant un pot pourri de citations du recueil sous le titre ironique Chastet s cl ricales L utilisation de la citation r p tition nue du texte original sera suffisante pour faire 45 Litt rature et saveur mettre au pilon Les Diaboliques preuve effective que le texte aurevillien est suffisamment paradoxal et polyphonique pout fournir alternativement son propre r quisitoire et sa propre apologie JACQUES BERNARDIN HENRI DE SAINT PIERRE ETUDES DE LA NATURE Par Colas DUFLO Universit de Picardie Jule
261. dites d Edgar et de Lucie renvoie Madame Bovary son adult re malheureux partir de l entr e en sc ne du t nor dans le r le d Edgar Flaubert met Vaccent sur ce jeu identification Il nous donne voir et entendre l op ra en se livrant un va et vient entre la sc ne et la salle Panalyse du jeu du chanteur succ de la description de l attitude et des sentiments d Emma spectatrice dont l enthousiasme aux raisons toutes personnelles s accorde avec l engouement du public rouennais D s lors le rituel social de Pop ra importe moins que le regard singulier du personnage sur le spectacle Dans Madame Bovary le topos romanesque de la sc ne d op ra tel que Pont trait Laclos dans Les Liaisons dangereuses o sur un mode diff rent Balzac dans La Peau de chagrin est d grad par la m diocrit d une repr sentation provinciale travers le portrait d une h ro ne s identifiant passionn ment l histoire repr sent e Flaubert ouvre en revanche une r flexion sur l illusion th trale Parce qu elle cherche reconna tre sa propre vie dans la fiction qui se d roule sur sc ne Emma devient pour le narrateur objet d ironie Se dessine alors en creux un autre portrait celui de cette spectatrice distanci e que d butante en tudes th trales et lectrice de Brecht j aspirais devenir Madame Bovary l op ra en proie une identification aux limites de l hyst rie est a
262. doit se lire ce d nouement Au chapitre XII se joue en effet une r v lation l image de celle que connut Mallarm 1 La lecture du Discours de la m thode de Descartes o Mallarm fait sienne la notion de fiction prolonge en les approfondissant la fameuse crise de 1866 1868 et cette rencontre essentielle avec le Rien qui est la v rit Mallarm 141 Litt rature et saveur Arturo d couvre que le monde est comme un mythe que la seule r alit existante situ e en deca de l exp rience et des mots est celle de la d solation Ainsi acc de t il cette dimension transparente et plane o il peut entrer en intelligence avec Pessence mythique du monde et effectuer un pas d cisif vers une conscience lucide et d pouill e prise dans l urgence de vivre Arturo n est alors pas tr s loin de ce qui se joue pour Camus dans son essai au titre ici significatif Le D sert Les mythes sont la religion ce que la po sie est la v rit des masques ridicules pos s sur la passion de vivre A sa mani re par l entremise de son personnage Fante entreprend donc comme l auteur de Noces la g ographie d un certain d sert d sert singulier qui n est sensible qu ceux capables d y vivre sans jamais tromper leur soif Car jeter le livre dans Pespace m me de la d solation que symbolise le d sert c est pr cis ment d mythifier toute la litt rature la
263. donne pour finalit le bon usage du corps Se plaire avec soi m me comme Julie devenue capable de poser sans s effaroucher sa main suf sa propre cuisse suppose de se comprendre de s couter La sant est ici la vraie priorit axiologique Je veux qu on se porte bien je le veux absolument entendez vous Ce qui est agr able ne Pest jamais autant que lorsqu il est aussi utile Le troisi me entretien tablit en ce sens une hi rarchie des actes sexuels motiv qu il se trouve par la n cessit d affirmer la possibilit d une morale mat rialiste Peut on fonder la vertu sur la conviction que la nature ne fait rien d incorrect selon la c l bre formule des Essais sur la peinture Et qui peut la fonder dans 113 Litt rature et saveur P conomie interne du dialogue Ces questions sont d autant plus dactualit qu au moment o commence le troisi me dialogue d Alembert s est absent ne restent que Julie dont la bido sciendi a eu le temps de s aiguiser au cours des d bats pr c dents et Bordeu qui revient point nomm pour traiter du m lange des esp ces et de toutes les possibilit s d change sexuel Comment discuter de l imaginable en ce domaine sans glisser dans Pobsc nit Comment jouer avec les registres du dialogue galant sans y tomber tout en continuant de lutter contre les r sistances induites par la circulation d une pens e h t rodoxe En s annon
264. dont on pressent qu elle ne permettra pas de retrouver la premi re bauche d une uvre venir elle r side bien davantage dans le contraste entre P laboration formelle que suppose tout travail d criture et Pabsence de forme laquelle se trouve r duit le tas d ordures entre la sublimation d un travail de Pesprit et la d composition naturelle des mati res La perte du journal est ainsi redoubl e par la menace d une description impossible du lieu m me de sa disparition que la parodie tente seule de conjurer Si Pamalgame immonde menace d annuler la cr ativit humaine et par le biais d une repr sentation de la d charge comme lieu d une d composition quasi stercoraire la renvoie cruellement son origine physiologique et pulsionnelle un autre processus est aussi l uvre social celui l qui met en rapport l crivain voyageur originaire de Suisse et les habitants mis rables des pays travers s Le r cit de la recherche dans la d charge de Quetta se cl t en effet sur une r v lation ironique o il appara t que la main plume n a pas craindre l uvre destructrice de la nature et trouve son salut dans un change de bons proc d s avec les mains de Phomme en qu te d une incertaine subsistance Seul Vinnommable et l informe taient parvenus jusqu ici r duits apr s l ultime nettoyage des vautours une p t e cendreuse acide et morte pleine d ar tes traitresses sur lesquel
265. e la t te inclin e et les mains jointes Si m me les ressources de Milady sont d sormais inefficaces c est que le roman se refuse bien prolonger l aventure L action ne sera plus d sormais que laccomplissement solennel du jugement dans un ultime ralenti narratif qui fixe l image dans la m moire telle une vignette grav e illustrant de fa on transparente attendue le r cit L immobilit de la victime Pomnipr sence du 124 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink visuel alors on vit se refl ta et la redondance pl onastique du style formulaire ses deux bras pr parent cette rupture que la d capitation fait toujours sentir concr tement dans la mati re du r cit dumasien dont elle est un des fantasmes r currents Brutalement d personnalis e par la mort une masse tronqu e le corps son fardeau le cadavre Milady n est plus que le poids mort qui interdit d finitivement au roman la l g ret de l aventure La solennit du r cit se fait l outil d un programme esth tique qui va vers son accomplissement gr ce la succession inexorable des alors et des et qui rythment le r cit mythique Priv du personnage qui lui donnait sa dynamique le r cit d ploie dans un silence d sesp rant la solennit de formules Laissez passer la justice de Dieu qui ne visent plus aucun interlocuteur Et comme l eau qui engloutit le c
266. e s il critique ses adversaires c est en d crivant leur comportement plus exactement la discordance entre leur reconnaissance verbale de l utilit de la Bible et leur conduite qui la d ment La description de cette conduite cependant est diff renci e une phrase rep re simplement le fait que la foule vulgus ne vit pas selon les enseignements de lEcriture la suite distingue ce que font presque tous fere omne et les th ologiens Les premiers donc la grand majorit de la foule font passer leurs inventions commenta pour la parole de Dieu et cherchent obliger autrui vivre comme eux autrement dit au lieu de conformer leur vie la norme qu ils pr tendent reconna tre ils suivent leurs inclinations et travestissent la norme pour se justifier 1 Texte tabli par Fokke Akkerman traduit par Jacqueline Lagr e et Pierre Fran ois Moreau La num rotation des paragraphes vient des diteurs 359 Litt rature et saveur mais en outre suivant ce qui est d ailleurs une des inclinations les plus fortes de la nature humaine tellement forte que l Efhique la reconnaitra aussi chez le philosophe qui veut amener les autres hommes vivre selon la Raison ils utilisent cette norme une fois transform e pour conduire autrui partager leur jugement ainsi cette efficace de la norme qu ils refusent pour eux m mes ils la restaurent pour les autres la lecture de l Ecriture sainte appara t donc
267. e un manque de compassion ou de souci d autrui est d mentie par la proposition du troisi me jour l autre prit la ration de pain et de margarine qu il venait de recevoir et la lui tendit disant Tu le veux Le refus de la proposition par VItalien et l autre Non peut fonctionner comme une justification de la conduite du banquier L Italien est per u comme un personnage sympathique d abord par la souffrance le il s vanouit du troisi me jour qui cl t la s rie it rative ouverte par partir du lendemain la glose qui en est fournie par et quand il put de nouveau voir et comprendre sa r p tition le quatri me jour soulign e par encore une fois Mais la sympathie ressentie pour le personnage qui souffre ne se renverse pas automatiquement en antipathie l gard du banquier lantipathie ne trouvant v ritablement s alimenter que dans les compl ments sans m me para tre voir l autre toujours sans le regarder etc qui indiquent la mani re de faire du banquier L Italien en effet n est pas un personnage de victime innocente telle qu on en rencontre par exemple chez Zola toujours coupl avec le personnage antagoniste Son programme narratif r sum par il vint chaque soir remettre ponctuellement au banquier son morceau de pain noir et sa margarine de charbon n est pas moins r ussi que celui du banquier On peut m me dire q
268. e la lettre va mettre en place les conditions de possibilit d une criture r aliste fond e sur limitation travers le crit re cul du naturel 1 Dans les Liaisons Mme de Merteuil appara t de nombreuses reprises comme un double de l crivain outre qu elle pars me ses lettres de remarques incisives sur le style de ses correspondants quand elle ne cherche pas leur tenir la plume voir parmi d autres la lettre 121 elle affirme d s sa premi re lettre vouloir crire un jour les M moires de Valmont oui dans vos M moires car je veux qu il soient imprim s un jour et je me charge de les crire lettre 2 211 Litt rature et saveur La difficult est que cette r flexion prend place horizon de deux points de vues absolument antagonistes C est m me en apparence ce qui constitue le vrai scandale de la lettre Il faut admettre en effet le jeu dialogique de ce texte qui fait parler en m me temps et au travers d une m me plume la voix des rou s et la voix du sentimental qui fait entendre pour les confondre absolument Mme de Merteuil et Rousseau Cette polyphonie pourrait tourner la cacophonie n tait ce cette v rit l mentaire dans les Liaisons dangereuses le libertin est aussi et d abord un crivain LA CRITIQUE LITT RAIRE DE LACLOS Si la lettre 33 confond avec une formidable habilit les deux registres c est peut tre aussi parce que le roman pi
269. e les circonvolutions d un esprit qui mesure les conditions de sa jouissance plient la phrase la tordent entre n gation et affirmation M me le sublime serait le fruit d un calcul de la raison dans ce personnage troublant Dupe du pr jug qui voudrait que les femmes soient de pauvres plor es qui ne comprennent rien du c ur ou de la raison h ritiers du m pris d une Merteuil cherchant parfois d fendre les droits de la femme au sujet d un texte si brillant la critique s est souvent m prise Marianne sait C est parce qu elle sait et qu elle veut ne pas savoir parce qu elle impose l imagination en conscience dessein qu il faut lui marquer un peu plus de respect et couter cette liminaire recommandation Consid re mon amour PHILIPPE JACCOTTET FRUITS Jacques VASSEVIERE Ancien l ve de l ENS Saint Cloud Les mots en r seaux DENS de Saint Cloud Fontenay Lyon ayant pour mission de former des professeurs de l enseignement secondaire il n est peut tre pas inutile de faire entendre ici des chos du lyc e Le vocabulaire et son usage po tique constituent souvent pour les lyc ens d aujourd hui un obstacle majeur la lecture litt raire et au plaisir qu elle procure Combien de professeurs apr s avoir lu en classe un po me qui les enchante s entendent dire Monsieur on n y comprend rien C est donc dessein qu a t choisi un de ces po m
270. e s agit pas plus d oublier avec le structuralisme la linguistique ou anthropologie structurales Ce dont il tait surtout question dans ces quelques lignes c tait d apaiser Pire anti linguistique et anti structuraliste de mon professeur de litt rature de PENS de Saint Cloud splendide analyste de Beaumarchais en cet an de gr ce agr gatif 1973 plus exactement de lui donner de bonnes raisons de ne pas aimer Barthes Faudra t il dans un autre hommage lui en fournir excellentes de ne pas lui pr f rer Picard CLAUDE SIMON LA ROUTE DES FLANDRES Par Sylvie PATRON Universit Paris Diderot Paris 7 L exception de jeu dans La Route des Flandres Ce court r cit est extrait de la deuxi me partie de La Route des Flandres o se concentrent la plupart des souvenirs de captivit Claude Simon a pass cinq mois au Stalag IV B de M hlberg sur PElbe puis s en est vad Il tient dans une parenth se qui s ouvre sur les d penses entra n es par le jeu en mis rables marks de camp et pour ceux qui n avaient plus de marks en tabac et pour ceux qui n avaient plus de tabac en rations de pain et pour ceux qui n avaient plus leur ration de pain celle du jour suivant et quelquefois du surlendemain et qui se referme une fois le r cit achev C est l adverbe ainsi qui permet de relier Phistoire individuelle du B nois au dernier terme de la concat nation valable pour tous les joueurs du camp Ma
271. e une case en moins de quoi devenir Cinoc en effet Et construire une demeure difier une uvre pour y garder les mots les morts la m re Cinoc ou la diaspora Perec ou la dispersion la disparition et la r manence du signifiant juif dans les lettres fran aises 1 Voir sur la crypte de Perec le livre d cisif de Claude Burgelin Les Parties de dominos chez Monsieur Lef vre Circ 1996 r d 2002 JEAN RACINE PHEDRE Par Jean Loup RIVI RE ENS Lettres amp Sciences Humaines Lyon Th ram ne He depuis quand Seigneur craignez vous la pr sence De ces paisibles lieux si chers votre enfance Racine Ph dre 1 1 v 29 30 Litt rature et saveur Mettre en sc ne disait Georges Pito ff c est d plier Il s agit l sans doute d une des plus br ves et des plus f condes d finitions de la mise en sc ne Une des plus justes aussi car elle sugg re une esth tique rigoureuse un pli ne dissimule rien d autre que lui m me P toffe ne voile pas un objet elle se voile elle m me Le metteur en sc ne n a rien ajouter il doit r v ler ce qui tait l dans les plis Et Pon voit bien qu il y a deux sortes de metteurs en sc ne ceux qui remplissent les poches du texte ceux qui les retournent La faveur du spectateur ira bien entendu ces derniers Encore faut il que le texte port la sc ne soit pli Un examen attentif montrerait que les pi ces de th
272. e Lorenzetta fais toi emporter chez ta m re Les pages rel vent Lorenzo Ainsi cette sc ne met en place les tensions essentielles au drame venir Lorenzo est d finitivement un tre insaisissable pris entre un manque fondamental et une pluralit identitaire tout aussi probl matique jouant l infini des dualit s de son tre jusqu ne plus pouvoir arracher son masque Personnage mouvant fuyant il est Voppos de la puissance de ressaisissement du h ros classique et ainsi personnage m taphore du renouvellement th tral op r par ce drame Il magit pas ici en h ros ne craint pas de se montrer sous un jour sombre dans toute sa laideur morale paradoxal l ment de d finition de la beaut romantique Surtout Musset affirme la confiance absolue du duc en Lorenzo qui peut tout autant tre interpr t e comme un aveuglement que comme une preuve de son rapport ironique l ordre du monde Peut tre Alexandre croit il r gir la sc ne sans avoir conscience du double jeu de son acteur Peut tre se moque t il d un d nouement qu il sait n cessaire Il est toutefois remarquable qu Alexandre n l ve la voix que dans cette sc ne et ne fait montre de son autorit ducale que pour d fendre son cousin L ironie est ici son comble 1 sire Maurice Paix Tu oublies que Lorenzo de M dicis est cousin d Alexandre au cardinal Allons vous me mettriez en col re de nouveau
273. e antique et moderne L OMBRE DE LUCRECE EPICURISME ET POLITIQUE SELON SEJANUS Ces Dieux que l homme a faits et qui n ont point fait Phomme Il faudrait s attarder sur tout ce que ce passage doit aux grands motifs d une litt rature clandestine diffuse en ces ann es de libertinage rudit dont Cyrano condense en ces r pliques certaines argumentations de mani re spectaculaire au premier chef celui des dieux fils des hommes que le vers 638 formule sous la forme d un chiasme devenu c l bre Motif entrelac avec celui de la crainte de la mort et des dieux comme source imm moriale d asservissement et de malheur S janus en quelques pointes bien ajust es se fait l incarnation sur sc ne d une longue et rudite analytique de l imposture dont il faudrait suivre les d veloppements successifs depuis Dialogue sur le sujet de la Divinit de La Mothe Le Vayer o l argumentation selon laquelle les dieux sont des fictions politiques destin es au peuple se faisait entendre fortement jusqu au Theophrastus Redivivus qui quelques ann es apr s la repr sentation de La mort d Agrippine citera pr cis ment les vers 536 640 et fera pour longtemps de cette s quence de vers une sorte d embl me pour la m moire libertine Ces enfants de Veffroi Ces beaux riens qu on adore et sans savoir pourquoi Ces alt r s du sang des b tes qu on assomme Ces Dieux que l h
274. e de Tourvel est l pour le v rifier JOHN LOCKE LE MAGISTRAT CIVIL Par Patrik THIERRY On a r cemment entendu parler d une ville d Orient chez les Chinois qui finalement contrainte de se rendre au terme d un long si ge ouvrit son port aux troupes ennemies tous ses habitants se hvrerent la volont du vainqueur triomphant ils avaient tous remis aux mains de leurs ennemis eux m mes leurs pouses leurs familles leur libert leurs richesses toutes choses enfin sacr es aussi bien que profanes mats quant on leur ordonna de couper les boucles de cheveux dont ils ornaient leur t te selon la coutume de leur peuple il reprirent les armes et briilants de col re ils lutterent farouchement jusqu Vextermination ils supportaient de livrer leurs t tes aux ennemis mais ils ne pouvaient supporter que l on touchat si peu que ce soit leur rite capillaire ancestral Ainsi la vie elle m me et aux solides biens de la nature l opinion unanime et la coutume quasi sacr e d un peuple font facilement pr f rer quelque chose qui n a aucune valeur aucune importance et m me des excroissances du corps Qui voudra bien r fl chir aux mouvements qui agitent nos soci t s sera peut tre bien forc de reconna tre finalement que si chez nous aussi certains ont men s dans une forte tension des esprits de cruels combats les raisons n en taient pas plus graves Jobn Locke Le magistrat civil traduction du latin de Ren F
275. e de ce syst me sur le plan des valeurs les mots sont vides de tout contenu la soci t a perverti la langue au point de mettre en doute la sinc rit de tout langage amoureux C est ce qui permet de comprendre autrement la remarque incisive de Merteuil selon laquelle une fois Mme de Tourvel se sera puis e dans la d fense du mor il ne lui en restera plus pour celle de la chose Cet cart c est le constat id ologique d une soci t o P tre le c de au para tre le discours l id e on pense au d nouement de La Nuit et le moment de Cr billon au moins dites moi que vous m aimez la sinc rit ici n est pas requise le langage de Pamour remplace Pamour v ritable et fournit une caution morale une femme en qu te de respectabilit On verra l l expression d un nominalisme d j ancien que la philosophie empiriste a partiellement ressuscit selon lequel il existe deux ordres de r alit distincts le mot et la chose qui n entrent pas dans un rapport de correspondance id ale mais plut t de division Si Mme de Tourvel est vaincue c est parce qu elle croit naivement la coincidence du signifiant et du signifi Pour les libertins au contraire rien n est univoque Ce qu on appelle le jargon libertin n est donc rien d autre qu un nominalisme radical qui finit par consid rer le mot tout autant que la chose laquelle il renvoie comme fiction Le mot amour g n ra
276. e de la connaissance scientifique Il y a une id ologie de la science qui est autant une mauvaise m taphysique qu une m connaissance de lactivit scientifique Dans ces quelques lignes Flaubert pressent a la mani re de Pascal Pimpossibilit pour la connaissance scientifique de trouver une cl ture rassurante du savoir la nature en son infinit est pr sente en chaque chose par le fait m me que cette chose nous chappe pour appara tre son tour comme un tout tr s compos et se rapporter l infinit de la nature Inversement chaque fait connu ne prend sens que comme l expression d une cause qui le d passe infiniment et annule sa figure propre ses contours d termin s Flaubert maintient ainsi contre Ph g monie born e du fait Pid al d une ignorance qui se sait elle m me ainsi que l image d une totalit d sagr g e par linfini dans la nature tout est en m me temps signifiant et insignifiant Aussi le caract re illimit de la Nature suscite t il une exp rience conjugu e de la diff rence infinie et de l indiff renciation source de lucidit tragique o expression nous sommes condamn s rouler dans les t n bres et dans les larmes n est pas sans voquer la sentence pascalienne Le silence ternel de ces espaces infinis m effraie La suite du texte coupe court au tragique en se livrant une exp rience de linfini beaucoup plus sereine Il s agit moins pour la subj
277. e de la machine mais un homme du 1 L id e a fait son chemin Sous la signature de Florence Dugas a paru en 1997 un curieux r cit rotique intitul Evangile d Eros La narratrice y fait tatouer sur le corps de son amie plusieurs phrases emprunt es Sade Elle la soumet ensuite une sorte de passion christique la cis e d une violence extr me o le corps est soumis toutes les tortures au terme desquelles la porteuse de textes est finalement d pec e et sa peau tann e r utilis e comme sous main celui m me sur lequel s crit le roman 306 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink rang au nom symboliquement populaire qui est dessous qu on le veuille ou non la R volution a eu lieu La machine de th tre fonctionne donc retardement l effet sp cial n est pas sur sc ne ph m re et d coratif comme dans les pi ces machines mais ad vitam puisque jusqu au dernier instant de sa vie ce spectacle affreux sera pr sent sa m moire La m khan fabrique donc du souvenir durable voire ternel capable en ce moment m me dans le temps de la rem moration de glacer et de donner la fi vre la narratrice R sultat pr sent d une action pass e ce qu on appelle le parfait Dans ce sens si la monnaie est fausse le produit de la m khan est lui de la plus pure authenticit il est parfait Donc une machine tromper Pas s r ou a
278. e est par ailleurs un moment oblig de la correspondance Ainsi dans la lettre 23 Valmont explique la marquise Je me suis lev et j ai relu mon p tre Je me suis aper u que je ne m tais pas assez observ que jy montrai plus d ardeur que damour d Gallimard Folio 1972 p 82 208 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink d un petit essai sur le discours amoureux Non sans poser Valmont en disciple maladroit et na f Quelle correction au double sens du terme la Marquise va t elle lui infliger D abord le battre sur son propre terrain c est ainsi qu il faut comprendre Pironie cinglante de l incipit v ritable fess e stylistique que Mme de Merteuil inflige son ancien amant Ensuite le d niaiser c est la d monstration appuy e qui va suivre privil giant la parole vive contre l criture et qui constitue le v ritable enjeu de la lettre Comme il advient souvent chez les correspondants libertins des Liaisons la lettre mise sur un double syst me linguistique de d notation et de connotation Le registre principal ici est celui de la d pr ciation travers l ironie mise en cause implicite et la franche accusation mise en cause explicite Mme de Merteuil va instaurer avec Valmont un rapport ristique complexe la fois rapport de comp tence et rapport de comp tition La lettre s ouvre sur une fausse entr e conclusive d s que et d veloppe u
279. e ici par le couple re igio superstitio Sous la plume de Spinoza le premier terme est neutre la religion peut tre vraie ou vaine alors que le second est toujours n gatif D s la pr face du Trait la superstition a t d crite dans ses causes la condition humaine li e aux al as de la fortune qui engendrent l espoir et la ctainte et dans ses modalit s croyances absurdes confiance mal plac e interpr tation d lirantes des coincidences l absurdit assum e et la haine de la Raison taient mentionn es comme des traits constants Ici elles vont tre reprises presque comme une d finition et la haine de la Raison vient s ajouter la haine de la Nature Le comportement des th ologiens est donc caract ris par un contenu th orique et on peut s attendre ce que ce contenu soit pr cis ment ni par le principe d interpr tation que Spinoza va introduire C est pr cis ment ce qui se passe aussit t apr s ce principe consiste admettre que la m thode d interpr tation de l Ecriture ne diff re pas de la m thode d interpr tation de la Nature mais lui est enti rement conforme C est partir de cet nonc succinct que les diff rents aspects de la m thode vont tre d velopp s Il ne faut pas en sous estimer importance il dit tout simplement qu il existe actuellement au moment o Spinoza crit des r gles prouv es dans les sciences de la nature et qu elles constituent le seul ch
280. e j esp re le montrer dans cette tude r fl chit admirablement le passage d j bien engag avant lui d une h orie du beau une enqu te sur le go t Sans doute n est il pas besoin de pr ciser qu il ne s agit nullement ici de r duire le texte de Montesquieu quelques passages aux accents malebranchiens je crois simplement utile de ne pas ignorer une r f rence tr s pr cise l Essai sur le beau donn e d entr e de jeu car elle permet de rep rer une d marcation pr cise qui selon moi fait Pun des grands int r ts de l Essai sur le go t C est la raison pour laquelle avant de relire les premi res pages de ce texte je rappellerai les principales th ses du P Andr pour mieux situer le sens du rapprochement propos dans la pr sente contribution Il ne faudrait pas g n raliser h tivement les le ons de cette br ve tentative mais elles me semblent manifester Pint r t d une m thode qui si elle ne saurait puiser la cahier des charges d un bon commentaire de texte peut toujours le servir celle des comparaisons textuelles qui mettent bien en relief Poriginalit v ritable des uvres qu on rapproche la nouveaut r elle par exemple des premi res lignes de P Essai sur le goiit Il n est pas question de r sumer ici les principes d une esth tique malebranchienne apr s les travaux majeurs consacr s cette tradition qui ont montr comment elle se constitue entre une r f
281. e l tre mesurable Dans cet arasement de la diff rence essentielle entre tre et n tre pas dispara t l autre diff rence celle de l individualit Ainsi peut s affirmer la r f rence au th tre du monde dans un dernier assaut contre Porgueil humain Par l interm diaire du je exp rimental il s agit de d truire chez l auditeur l illusion de son autonomie on m a envoy de sa singularit faire nombre et jusqu sa croyance en une destin e terrestre le on qui commande toutes les propositions est la version anonyme et d grad e de l instance qui plus haut se nommait nature 64 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink S agissant de la vie mortelle Bossuet peut accepter d abandonner son gouvernement des forces obscures et mal identifi es qui n ont rien voir avec Dieu Puisque son but est de ravaler Pamour propre de celui qui se pense comme individu unique tien n est plus efficace que de le repr senter manipul par un organisateur anonyme et indiff rent La cible est la singularit subjective c est elle que d signe le pronom o mis en position objet d un verbe n gatif et n gateur encore n avait on que faire de moi Le motif du heatrum mundi sert parachever la n gation sous la forme d une hypoth se supposer que celui qui se pense comme sujet absolu et que repr sente le je ne soit pas venu au monde qu il soit demeur dans les coulisses de la cr ati
282. e la lib ration des demoiselles pour lui en substituer une autre en inversant un principe du conte contrairement aux p res abusifs des contes ou du Lai des Deux Amants de Marie de France ce p re n impose pas une preuve impossible pour emp cher le mariage de sa fille ch rie mais profite de cette preuve pour imposer ce mariage Le roman arthurien se construit on le sait sur la prouesse du chevalier qui par ce biais obtient le fief et la femme Mais jamais une coutume ne peut dicter au chevalier l objet qu il doit aimer Or ce p re prend ses d sirs pour des r alit s et croit peut tre que tout advient comme dans les contes o la r ussite de preuve entra ne n cessairement le mariage Dans les romans de Chr tien justement rien n est jamais si simple Yvain qui apr s avoir par sa prouesse mais aussi et la nuance est de taille gr ce aux ruses de la psychologie f minine pous celle qu il aimait et lavoir perdue est bien plac pour le savoir la complexit du d sir cr e les m andres du roman Ce p re est un mauvais lecteur A t il bien cout d ailleurs lui qui semblait pensif appuy sur son coude et qui paraissait se r jouir davantage du spectacle de sa fille en train de lire que du contenu du romman Et se pooint esjo r Mout de li veoir et oir A t il bien compris ce qui distingue le roman du conte Le h ros de roman en effet loin de se conformer un
283. e la veille la fin du sonnet revient la plupart du temps sur la Dame et sur sa cruaut ainsi dans le texte de Jean Mairet d j voqu Or ici la dissipation de la vision ne donne lieu aucun retour sur la Dame et sur son attitude lors de l tat de veille Ce quoi le lecteur assiste c est une des mises en sc ne de l Eros baroque o le sujet lyrique recherche moins les faveurs d une quelconque Dame qu il n est en qu te d un tre imaginaire d un bonheur par essence insaisissable et chim rique Et le songe n est pas la pour s opposer 4 la veille mais pour rappeler n fine que tout n est qu illusion Seule Echo r pond ici la voix qui s crie et lamente or chez Ovide cette voix qu Echo r percute c est bien s r celle de Narcisse ici discr tement endoss e par le po te Dans l univers baroque Narcisse constitue le mod le d un Eros m lancolique o le sujet ne peut jamais poss der l objet de son amour puisqu il d sire une ombre le reflet de son image Le bien attendu n est donc bien que mensonge et heur ne peut venir qu en songe Comment interpr ter d s lors le dernier vers Le po te fait il allusion aux cons quences toujours possibles de la d sesp rance amoureuse devant l absence de laim e A la destin e tragique d un Narcisse devenu tout glace Ou plus s rement et avec une possible ironie son existence chim rique Le sujet ly
284. e le professeur voudrait accomplir le parcours inverse Puis Aragon qui sait bien que V rone se voua longtemps la fabrique de la soie emprunte au lexique du textile pour marquer la transformation r v e qui s y accomplit celle d un bourgeois qui se faufile sans gloire en homme qui pense rev tir taill pour lui Phabit des grands capitaines arrivant Venise Pierre avait d j m dit devant la statue questre du Colleone On songe d s lors a Stendhal qui Aragon consacra un livre La Lumi re de Stendhal celui tout particuli rement des Chroniques italiennes et du culte de l nergie ancestrale se concentrant en un individu d exception comme Napol on Pierre r ve V rone de devenir un vrai homme Ou bien Nietzsche le go t qu il avait de la puissance de la force m me de la brutalit militaire le refus du troupeau des hommes la pens e moutonni re le tout impliquant la sexualisation de rigueur dont les d sirs levaient D un autre c t Aragon condamne son personnage En raison tout d abord c est l vidence tablie avec nettet par la pr face de 1965 de son individualisme sans bornes indiff rent Histoire ainsi Pierre alors que l action de cette page se situe fin f vrier ou d but mars de l ann e 1898 et qu il vient d apprendre le proc s intent Zola se moque bien de l affaire Dreyfus perdant 27 Litt rature et saveur a
285. e naturelle en revanche Pusage que Montesquieu r serve au terme de nature d s le chapitre 2 manifeste l vidence une variation s mantique En effet il s y agit des lois naturelles au sens non plus des principes rationnels absolus qui rendent possible le jugement mais des cinq dispositions naturelles universelles que sont la paix timidit la conservation nourriture la sexualit la sociabilit et la reconnaissance envers le Cr ateur Ce sont donc des lois objectives inscrites dans la nature m me des tres vivants les animaux avec les caract res sp cifiques l esp ce humaine Ce qui permet Montesquieu selon Goldzink de proc der contre le hobbisme des s parations doublement salutaires En effet d une part la recherche philosophique des lois morales absolues quit justice est l gitim e le juste ne se r duit pas au droit positif et d autre part le terrain est d blay pour une enqu te empirique sur les modalit s concr tes d ajustement de la loi naturelle selon les conditions mat rielles le climat dans lesquelles vivent les hommes Tandis que L Althusser s effor ait de rendre compte de la rupture pist mologique accomplie par Montesquieu au terme de laquelle se construisait son objet sp cifique la fois contre les abstractions philosophiques du droit naturel et le statut th ologique de la loi Goldzink n aura eu de cesse de mettre en relief l
286. e nous Pavons sentie Le texte lever de soleil vu d un train extrait de A l ombre des jeunes filles en fleurs traduit bien la mani re dont il ne d crit pas objectivement ce qui se pr sente son regard mais transfigure le monde de la sensation en uvre d art en se servant de l criture pour fixer le mouvement et cr er un tableau impressionniste I FIXER LE MOUVEMENT Le Mouvement Le mouvement du train Le th me du mouvement traverse tout le texte comme le sugg rent d embl e les premiers mots Les levers de soleil dont le pluriel indique une g n ralit r p titive D s la premi re ligne les longs voyages en chemin de fer voquent un mouvement associ harmonieusement celui de la nature le train n du cerveau humain va de pair avec les rivi res comme le montrent le pr sent de v rit g n rale et l emploi du verbe tre Il se d gage une id e de mouvement perp tuel infini que souligne la fluidit de la phrase aux nombreuses liquides l r En outre la r p tition anaphorique de les intervalles r guliers mart le cette phrase au rythme de l avanc e du train La ligne du chemin de fer ayant chang de direction le train tourna donnent aussi imaginer les m andres du parcours Le changement d horizon intervient brutalement et le pass 272 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink simple exprime la rapidit de laction Le membre de p
287. e partie du texte de ne pas avoir damour filial est le fr re d Afra et de Heinrich Voil qui livre une donn e du plus haut int r t tous les personnages de la pi ce sont de la m me famille Que tous les protagonistes pr sents en sc ne appartinssent la m me lign e contribuerait tirer de mani re vidente le texte de Karl Valentin vers la trag die C est d Aristote encore que nous vient cette pr cieuse intuition car qui d autre que lui pour d m ler P cheveau d un pareil morceau dramatique Le surgissement de violences au c ur des alliances comme un meurtre ou un autre acte de ce genre accompli ou projet par le fr re contre le fr re par le fils contre le p re par la m re contre le fils ou le fils contre la m re voil ce qu il faut rechercher nous dit le chapitre 14 de la Po tique traduction Dupont Roc et Lallot ditions du Seuil Telle est la condition requise pour la production des affects tragiques que sont la frayeur et la piti ce titre Soucis de famille est une trag die parfaitement conforme aux pr ceptes aristot liciens Si ensuite on entreprend d y faire la part statistique de la frayeur et de la piti on conviendra ais ment que les v nements qui composent son action s av rent g n ralement moins effrayants que pitoyables Reprenons pr sent le fil de l change dialogu l endroit o nous l avions laiss Apr s l irruption de la M re su
288. e point d exclamation pr cieuse 365 Litt rature et saveur didascalie Pusage des interpr tes traduira non seulement la surprise due l irruption inopin e de celui sur lequel on s appr tait a m dire autant que la culpabilit d tre pris en flagrant d lit de m disance mais aussi le reproche tacite adress a celui qui m rite bien que l on m dise de lui et encore l propos des m disants soucieux de sauver les apparences sans oublier la cordialit l mentaire due qui vous souhaite une bonne journ e Quant la r v lation qui suit ce brutal duel d amabilit s Joseph est revenu elle soul ve un cas de figure dramaturgique pineux diam tralement oppos au proc d du quiproquo qui place d ordinaire le spectateur en surplomb des personnages Or si tous sur la sc ne semblent prendre la mesure d un tel coup de th tre il n en va pas de m me du spectateur qui ignore absolument qui est Joseph Le groupe de r pliques qui suit tend pourtant constituer momentan ment Joseph en foyer central de la crise tel point que la faute inaugurale dont le motif fait jusqu ici d faut pourrait coincider avec ce retour Mais tandis que la r v lation de la cl de P nigme se trouve provisoirement diff r e par un assaut de sentences valeur proverbiales il convient de se reporter la deuxi me partie du texte non reproduite ici et livrant de nouveaux renseignements capitaux re
289. e portrait physique qu Alexandre vient de dresser du personnage peut le laisser penser Lorenzo est un tre puis par les d bauches et fatigu par le double jeu constant qu il doit tenir De plus il est sans doute r ellement impressionn pat les p es ayant besoin de s exercer aux armes avec Scoronconcolo avant de tuer Alexandre S entrainant Lorenzo s vanouit d ailleurs une seconde fois Mais sans doute Lorenzo joue t il ici une com die pr parant alors son meurtre en 1 1 est d ailleurs noter que Philippe Strozzi appelle lui aussi Lorenzo l homme sans p e III 3 2 La l chet du personnage est ici publiquement d montr e L adverbe revient plusieurs reprises dans la sc ne toute la cour le verra vous figurez vous qu un M dicis se d shonore publiquement par partie de plaisir Il n est aucune intimit possible Florence le palais du duc est un espace ouvert public Lorenzo en profite pour fa onner son image 3 II 1 Il s vanouit Cette premi re didascalie est suivie d une seconde d crivant Scoronconcolo lui jett lt ant gt de l eau la figure Une nouvelle fois est ce fatigue physique et nerveuse horreur des armes 267 Litt rature et saveur d montrant publiquement qu il n est pas dangereux cartant toute m fiance son gard En ce sens cette sc ne peut tre mise sur le m me plan que celle du vol de la cotte de mailles II 6
290. e roman aux foules r volutionnaires L Education Sentimentale les historiens estiment que c est Taine qui a fait pour le plus grand nombre entrer une telle image de la foule dans l imagination de tous Pour Zola qui le tint longtemps pour un de ses ma tres l influence est patente qui va jusqu des r f rences directes au texte des Origines Le texte de Germinal d j cit semble ainsi s appuyer directement sur le r cit du premier acte r volutionnaire meute de R veillon dans le Faubourg Saint Antoine Cependant la foule grossit devant la maison R veillon les trente hommes de garde ne peuvent r sister la maison est envahie et saccag e de fond en comble meubles provisions linges registres voitures et jusqu aux volailles de la basse cour tout est jet dans des brasiers allum s en trois endroits diff rents cinq cents louis en or largent comptant l argenterie sont vol s Plusieurs se r pandent dans les caves boivent au hasard des liqueurs et des vernis jusqu tomber ivres morts ou expirer dans les convulsions La forte marque laiss e par Taine dans le texte de Germinal permet de comprendre mieux la dualit des discours mis en place pat Zola Ce que Taine fournit avant tout Zola c est opposition 1 Hippolyte Taine Origines de la France contemporaine Paris Laffont Bouquins 1986 p 80 2 propos du sentimentalisme qui aveugle son sens les philosophes des lumi
291. e temps paragraphe 4 voit infra ce qui constitue une vision ironique et horrifique de P ternit Les chameliers sont litt ralement an antis par leur passage travers le miroir ils y tra nent comme une ombre au soleil le fant me de leur pr sence L entrave cin tique g n re une d corporalisation les voici au royaume des ombre s et des fant mels accord s avec cet univers d color et leur pr sence fantomatique est d j une absence au monde car le d sert est une fronti re de ce monde Il entra ne au del les gar s en leur offrant des leurres les 324 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink chameliers ne reconnaissent pas d abord ce pi ge de la contr e du Miroir ils march ent sur un puits qui n existe pas mortelle illusion Parall lement une s rie de notations renvoyant la perturbation de la dur e vient renforcer la th matisation de lPextraterritorialit morbide du d sert lorsque Pon passe de P vocation d une acc l ration temporelle bri vet du cr puscule fugacit des nuits celle du figement dans l ternit Une ternit qui elle coule la faveur d un transfert d un chiasme alors que lentrave cin tique trouve son ach vement terrifiant dans P vocation de l ternit min rale qui happe les chameliers chang s en sable sym triquement l ternit r cup re une dimensi
292. e tour Ainsi le mot de la com die pourrait tre je ne fais que passer Labiche en a serr la formule de pr s et celui de la trag die ou du drame vais je arriver partir Le vers initial de Ph dre est donc une marque de th atralit mais il y a plus que cela et plus original sur la voie de quoi peut nous mettre une remarque de lauteur anonyme d une dissertation sur les trag dies de Ph dre et Hippolyte l omerture du Th tre Hippolyte dit Th ramine son Confident qu il veut partir de Tr g ne sur quoi ce cher ami lui dit Et depuis quand Seigneur fuyez vous la pr sence De ces paisibles lieux si chers votre enfance Avez vous jamais ou dire Monsieur que les lieux aient une pr sence dit on la pr sence de ces lieux Et la pr sence ne s attache telle pas aux personnes seulement On dit la pr sence d un homme en un lieu et non la pr sence d un lieu un homme et Je soutiens que cette expression ne peut tre re ue Il faut bien reconna tre que anonyme a raison la pr sence dun lieu est assez incorrect et si Cest un tour po tique il est 1 On en trouvera le texte dans l dition que nous citerons des uvres de Racine r alis e par Georges Forestier pour la Biblioth que de la Pl iade Paris Gallimard 1999 2 p 884 291 Litt rature et saveur plut t m diocre Mais anonyme a tort de ne pas envisager que Racine a bien crit ce qu il voulait
293. e tout cela Philinte s tonne Alceste jeune na f sans p re comme les autres personnages cherche donc avec passion la transparence des rapports entre les hommes entre les hommes et les femmes Cette passion de v rit et de transparence le mine l am ne rechercher un but impossible qu il se fixe de mani re irraisonn e Et cette volont d tre vrai c de le pas la passion de vouloir toute la v rit Il est d une certaine mani re trop vrai trop enclin vouloir cette transparence des mots et des choses trop fou de vouloir tre la fois au centre et hors du monde moderne des salons et de la conversation qu il assimile au monde de l hypocrisie et de la dissimulation mais dans lequel il est assis L est la premi re contradiction 417 Litt rature et saveur Ce que veut en principe Alceste est donc un tout indiffractable ind composable d abord pour lui m me Pourtant il aime ce qu il devrait ha r s il n entend pas que C lim ne triche avec la v rit puisqu elle ne doit faire qu un avec lui il la veut n anmoins et occupe les lieux jusqu n en plus pouvoir C est cette seconde contradiction que les premiers mots d signent qui meut et qui choque C lim ne et Alceste convoitent le m me lieu la m me sc ne l une pour la remplir de sa pr sence et de celle des autres l autre pour la vider des autres pour la lib rer au profit de sa passion contradictoire Parall
294. e voix et tropismes Se refusant organiser un r cit d rouler un arrangement de s quences brisant m me toute possibilit de lecture lin aire de l image Fahlstr m tale un ensemble ouvert et pars de figurines et d accessoires vestimentaires qu il collecte aligne et met sous verre la fa on d un entomologiste Autant dire que ces figurines vraisemblablement d coup es dans des Comics n ont pas grand chose voir avec le Pop art quoi on r duit souvent l uvre de Fahlstr m A New York entre mai et octobre 1963 l artiste su dois partage certes avec Warhol ou Lichtenstein des proc dures d emprunt aux images de la culture populaire et les introduit dans le high art de la peinture mais son lan le porte simultan ment dans une exp rience des plus savantes car dans ce Nouveau Roman du Plan tarinm qui lamine de l int rieur les notions de personnages de sujet et d intrigue Fahlstr m puise de 1 Sur ce sujet cf le texte de Mike Kelley Une science du mythe Les cahiers M moire d expo n 3 Institut d Art Contemporain Villeurbanne 2002 p 51 73 Toutefois si les diff rents critiques adh r rent au Pop Art de diverses mani res une chose est s re face la froideur d artistes comme Warhol et Lichtenstein Fahlstr m tait chaud Certains pensaient que Fahlstr m racontait une histoire r trograde anti Pop et qu il habillait d un costume Pop la mode Et
295. ean Goldzink rire avec l image de la l vre qui clate Lieu du surgissement et du d voilement le po me vient dire le il y a de la nature sa manifestation non comme paysage mais comme pulsion et comme force C est ici la nature v nement faune qui d range la nature contemplation feuill e Le faune d chire le tissu visuel de la nature pour en faire saigner l nergie En crevant l exquise broderie v g tale il d pucelle la nature romantique enchant e de ses propres reflets ou jeux de lumi re mais peut tre n est il lui m me en v rit qu un jeu de lumi re parmi d autres Le faune est la t te apparue du corps de la nature Cette nature est d livr e de toute pr sence humaine Elle se montre survaloris e comme surcharg e et toute gorg e d elle m me Artificielle quasiment force de para tre autosuffisante Elle constitue un crin pr cieux o sont plant es des fleurs splendides Elle est une exquise broderie Elle prend ainsi valeur d ic ne crin vert tach d or cet or solaire la sacralise la fin du texte le verbe recueillir confirme cette dimension mystique Ce n est donc pas la nature m ditative ch re aux romantiques humanis e en vallons et en lacs mais une nature revue et corrig e par l influence baudelairienne elle a int gr Partifice une nature sophistiqu e saisie par la voyance hallucinante et hallucin e Cette nature
296. ectivit d une preuve am re de perte de substance que de la possibilit de sortir de soi de devenir la nature en adoptant par 1 Pascal Pens es d Lafuma 201 uvres compl tes collection l Int grale Le Seuil Paris 1972 150 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Pimagination le point de vue de l infini En se hissant une hauteur qui met en suspens les choses et le monde la finitude en ce qu elle comporte d attachement la particularit et de manque de mesure puisque la partie l ve orgueilleusement ses limites Pabsolu en pr tendant juger du sens est oblig e de se d solidariser d elle m me Une forme de panth isme s av re alors li e une posture sceptique qui est moins une attaque contre la connaissance que l aspiration un point de vue d situ nous verrons comment la critique de la connaissance se transforme en irr alisation esth tique Quand je regarde une des petites toiles de la voie lact e je me dis que la terre n est pas plus grande que Pune de ces tincelles Et moi qui gravite une minute sur cette tincelle que suis je donc que sommes nous Flaubert se livre une m ditation au cours de laquelle il gravit les chelons de Punivers pour se regarder lui m me de tr s haut de tr s loin Et il est en m me temps celui qui s vade de lui m me par la puissance de limagination observant son propre personnage travers la dist
297. el ve de la nature et ce qui est imputable la soci t non dans quelque souci de th odic e disculper Dieu de l existence du mal mais pour la claire intelligence de son objet rendre raison de la gen se d une norme particuli re et positive sans perdre de vue Vhorizon normatif universel et c est cette synth se de Ph t rog ne pour parler comme Kant qui est probl matique S agit il alors encore une fois par anticipation de pr parer les grands d bats de la pens e contemporaine comme par exemple la controverse engag e par L o Strauss avec Max Weber sur les faits et les valeurs et les impasses du positivisme sociologique Non pas m me si ce genre d interrogation commence d sormais se former La question que pose Goldzink concerne le statut du jugement a porter sur les diverses manifestations sociales et sur les principes qui pr sident ces jugements lancinant probl me de la coh rence 1 L Strauss Droit naturel et histoire Flammarion 1986 ch II Le droit naturel et la distinction entre faits et valeurs 426 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Reprenons la lecture du Livre XVI et la fameuse analyse du statut des femmes dans les zones chaudes du globe les n cessit s du climat conduisent n cessairement l enfermement des femmes avec les cons quences sur leurs m urs que cet enfermement selon ses degr s entra ne pudeur chastet etc De l le par
298. els Moll n a que du m pris ordinaire et les coupeurs par vocation ventuellement aliment s en nattes d j coup es par les pr c dents Ceux l sont carr ment accus s de mettre la soci t en p ril Le danger que pr sente pour la collectivit ces personnes d ailleurs plaindre est assez grand pour ne pas les laisser circuler librement Toute la piti qu on peut avoir pour un accus lorsqu il est malade ne doit pas faire oublier ce droit qu elle aussi a besoin d tre prot g e Le sujet et le danger ressurgissent cinq cent pages plus loin Ces gens sont tellement dangereux qu il faudrait absolument les interner de facon durable dans un asile jusqu leur gu rison ventuelle Puis la col re nouveau pour Moll pas de piti vient s ajouter la tristesse quand je pense l immense douleur caus e dans une famille o une jeune fille est ainsi priv e de ses beaux cheveux il n est absolument impossible de comprendre que l on ne conserve pas ind finiment de tels gens dans un asile au leu d exposer toujours nouveau des jeunes filles aux m faits de ces dangereux f richistes L exasp ration est elle un effet de la m lancolie que Pon acquiert parcourir un bestiaire qui para t in puisable Il semblerait pourtant que la douleur caus e aux jeunes filles et la 1 Dr R V Krafft Ebing Psychopathia sexualis 16e et 17e dition refondues par le Docteur Albert Moll traduction de Ren
299. emin pour tablir une certitude dans ce que nous appellerions maintenant les sciences humaines La m thode 361 Litt rature et saveur d interpr tation ne se tire pas de rien et surtout pas des herm neutiques ant rieures elle consid re comme un fait tabli la norme de v rit mise au point par les math matiques et les autres sciences et elle l exporte dans un domaine nouveau Mais elle ne peut le justifier qu en montrant dans les comportements qu elle critique la n gation l tat pratique de cette norme de v rit Ainsi non seulement c est l anthropologie qui d tient la v rit de Pherm neutique mais c est en opposant la d marche herm neutique un principe heuristique venu d ailleurs que Pon pourra construire une nouvelle interpr tation KARL VALENTIN SOUCIS DE FAMILLE Par David LESCOT Un salon bourgeois dans une petite ville LE PERE Afia Eh bien personne n aurait pens que a en arriverait la AFRA P re Ce n tait pas ta faute Tu n as pas pu agir autrement Si la m re s en tait un tant soit peu occup e Heinrich n aurait nen pu faire du tout Tais toi voil Heinrich HEINRICH Bonjour LE P RE ET AFRA Bonjour HEINRICH Joseph est revenu LE P RE ET AFRA Quand est il arriv HEINRICH Notre m re a dit qu il est l depuis d j deux jours AFRA C est ce que je vous disais mais vous n avez pas voulu me croire LE P RE I ne ferait s rement pas u
300. emps les yeux de Marianne n ont que des larmes et ne servent qu pleurer sans cesse La douleur sentie par Pabandonn e s exacerbe dans la lettre Cependant n implique pas un retournement des peines mais bien davantage leur sublimation Non seulement souffre t elle de loignement physique de Pabsence mais aussi ch rit elle la douleur que lui a impos e Pamant enfui Marianne joue l amour du sacrifice elle tente le mysticisme de Pamour dans la douleur m me et dans le plaisir sensuel malgr l absence charnelle choses permises par un vident recours l imagination La religieuse emprunte le discours de la passion elle parle une langue universelle et un lecteur ne saurait lire cette phrase sans la reconna tre je vous ai destin ma vie d s que je vous ai vu La passion doit tre prouv e pour tre d fendue et entretenue dans l imagination ainsi aime t on d s le premier regard ainsi envoie t on mille fois le jours ses soupirs distance vers celui qu on aime Marianne s invente en Elvire le temps d une phrase mais elle ne quitte pas la sc ne n fine comme cette derni re elle n en est qu au d but de ses tentatives Marianne ne contrefait rien ni ne s aveugle elle doit trouver le discours qui permette sa passion d esp rer et de survivre en imagination C est pourquoi Marianne va d finitivement rejeter la logique rationnelle et r aliste qui vie
301. en un passage sur lequel je reviendrai 3 Le P Andr d finit enfin le beau arbitraire cr par Phomme arbitraire signifie donc non point capricieux quand il est bien entendu mais d institution humaine et le distingue en trois sortes Il peut tre de g nie c est dire fond sur une connaissance du beau essentiel assez tendue pour en faire un syst me particulier dans l application des r gles g n rales ce que nous admettons dans les arts Telles sont les premi res des deux sortes de r gles employ es en architecture La perpendicularit des colonnes qui soutiennent l difice le parall lisme des tages la sym trie des membres qui se r pondent le d gagement et l l gance du dessin surtout l unit dans le coup d il sont des beaut s architectoniques ordonn es par la nature ind pendamment du choix de Parchitecte Mais avec cette beaut de g nie on n atteint pas encore le domaine de l exp rience esth tique effective qui comprend toute une vari t de styles et de modes Celles ci rel vent du beau de goiit qui est fond sur un sentiment clair du beau naturel ce qu on peut admettre dans les modes avec toutes les restrictions que demandent la modestie et la biens ance Au fond il est permis de dire que c est sous cet angle que Montesquieu va r organiser les descriptions donn es par le P Andr et tout la fois red finir le domaine de sa propre en
302. encore plus loin Les tactiques de Fahlstr m ont plus voir avec les ambitions des artistes conceptuels qu avec celles des artistes Pop trad de l anglais par Anne B chard L aut p 52 53 129 Litt rature et saveur quoi rompre avec les conventions traditionnelles de l image narrative de quoi largir P re du soup on Paire de la peinture D ailleurs dans son compte rendu de la conf rence donn e par Nathalie Sarraute dans une universit de Stockholm en 1960 Fahlstr m comparait d j les tropismes aux drippings de Pollock ou aux fluctuations picturales de Sam Francis Etrangement et par un de ces feed back dont est famili re Phistoire chaloup e du texte et de l image Nathalie Sarraute trouva elle aussi dans la peinture de son temps de quoi faire exploser les traditions du roman Elle regardait avec admiration P vasion de Picasso et comment il avait permis aux peintres de se d livrer du sujet de la figuration de l imitation du r el pour faire sauter d un seul coup tout le vieux syst me de conventions qui servait moins r v ler comme autrefois qu masquer ce qui tait leurs yeux le v ritable objet pictural Et elle d ajouter Comment le romancier pourrait il se d livrer du sujet des personnages et de l intrigue Et donc pour Fahlstr m suivre Sarraute ce sera aller plus loin encore dans Pabolition du sujet et la suppression de la figure dans la destitution de tou
303. enivrements et toutes les angoisses dont elle avait 157 Litt rature et saveur manqu mourir Captive de son identification au personnage de Lucie Emma Bovary s abandonne aux charmes d une illusion r f rentielle o la fiction mise en musique par Donizetti se confond avec sa propre vie L illusion th trale dont la force est soulign e par le verbe charmer employ au sens fort d envouter fonctionne ainsi pleinement Au plaisir de la reconnaissance succ de cependant une exp rience plus douloureuse provoqu e par l cart s parant les amours de Lucie et Edgar de celles d Emma et Rodolphe L adversatif mais introduit une rupture dans le fonctionnement de identification que produit le spectacle d sormais la comparaison de la fiction et de la vie emprunte des voies n gatives L amour de Rodolphe n a jamais t pareil celui d Edgar et son attitude lors de la sc ne de rupture ne peut tre compar e celle du personnage de Donizetti au clair de lune Pamant r el ne sut que dire demain demain associant au clich cr par le d cor un discours la fois insignifiant et mensonger Ainsi lillusion th trale laquelle c de Madame Bovary fait elle finalement appara tre la platitude de sa propre histoire L identification dont Emma ressent les cruels effets contraste avec le plaisir renouvel des autres spectateurs dont les bravos
304. ent et le son ou plut t le langage des cloches elles parlent L ensemble compose donc bien une f erie amalgamant Naples Stamboul et les Florides un compendium d exotisme un d paysement total Le mot fantastique en retire de nombreuses harmoniques s mantiques On peut le tirer vers un fantastique proche du merveilleux mot qui figure dans le texte Il importe de bien souligner le retour du vous qui fait cho au d but et qui int gre le lecteur dans le texte pour le faire participer Vexp tience artistique pour insister sur l extase La phrase suivante est v ritablement conclusive en ce qui concerne la description mais non en ce qui concerne le texte ce concert o s allient bruit du monde et silence de la solitude Dieu et les hommes noter le romantisme digne du Va on de Lamartine r pond une note discordante le verbe g sir les cypr s du cimeti re Si Paris dort l ombre apaisante du P re Lachaise ce sommeil peut 37 Litt rature et saveur voquer la mort et le tableau ressemble alors une vanit La voix de Dieu peut laisser place a son doigt L anaphore la est donc susceptible de nuances le premier est d signation valorisante le second est d signation ambivalente valorisante et inqui tante Morceau de bravoure donc qui compte parmi les grandes pages descriptives de La Com die humaine et qui poss de son autonomie sans pour autant s isoler de la suite p
305. ent faites pour tre saisies par des l vres larges et charnues leurs tendres tiges facilement tranch es par des dents incisives leurs semences farineuses ais ment broy es par des dents molaires D ailleurs leurs touffes paisses et lastiques sans tre ligneuses pr sentent de molles liti res des corps pesants Si au contraire nous examinons les convenances qu il y a entre les arbres et les oiseaux nous verrons que les branches des arbres sont facilement embrass es par les pieds quatre doigts de la plupart des volatiles que la nature a dispos s de fa on qu il y en a trois en avant et un en arri re afin qu ils pussent les saisir comme avec des mains III 6 7 2 Si on tudiait les rapports que les plantes ont avec les animaux on y reconnaitrait l usage de beaucoup de parties que Pon regarde souvent comme des productions du caprice et du d sordre de la nature Ces rapports sont si tendus qu on peut dire qu il n y a pas un duvet de plante un entrelacement de buisson une cavit une couleur de feuille une pine qui mait son utilit III 18 54 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink aussi la forme et la grosseur De ce point de vue il n est pas tonnant que Bernardin de Saint Pierre cherche rep rer dans cette analogie fil e que Flaubert a rendue moins dr le en n en pr levant qu un extrait extrait qu il a d alors d former pour lui redonner son
306. entatif de l ironie romantique mise distance de l ordre du monde soul vement des voiles irritent le pape c est Lorenzo de M dicis que le pape r clame comme transfuge de sa justice Paul HI ne saurait pardonner le pape est scandalis On remarquera d ailleurs que la violence des propos augmente lorsque Valori timide porte parole du pape laisse la parole l nergique sire Maurice qui jamais ne recule devant une injure Sur cette question du hors champ romain cf C Marcandier Colard Premi res le ons sur Lorenzaccio Paris PUF Major 1996 p 66 69 1 La polyphonie du terme ironie doit tre soulign e il s agit dans cette sc ne de Pironie au sens de Witz d un art de la pointe votre esprit est une p e ac r e d une ironie intertextuelle d finie par G Genette Palimpsestes la litt rature au second degr Paris Le Seuil 1982 comme un jeu de r f rences a d autres textes Varchi Sand et d une ironie dans son sens le plus philosophique manifestation d une rupture et d une distance Sans doute Alexandre a t il conscience de la menace que repr sente son cousin comme le montre son pr tendu aveuglement la sc ne 10 de Pacte IV face aux r v lations du Cardinal et de Sire Maurice mais il se moque et s amuse En ce sens P quivocit d Alexandre r pond l ambigu t fondamentale des personnages principaux de la pi ce 263 Litt rature e
307. entiment le libertin d monte l illusoire n cessit de l amour comme une structure litt raire Lisez relisez corrigez tels sont les maitres mots de cette correspondance Ainsi l identit improbable et suspecte de la passion est elle remplac e par une d monstration en acte de sa repr sentation infl chit pourtant ce sch ma en dialectisant le couple passion raison Au rebours de Voltaire Diderot ou Rousseau Mme de Tourvel s en remet Pascal pour qui la passion est contraire l int r t de l individu Elle est d sordre et souffrance et l homme passionnel est son propre bourreau Si la suite lui donne malheureusement raison ce n est pas en vertu de cette morale classique mais de la perversion r alis e par les libertins de cette nouvelle repr sentation des affects pr n e par les Lumi res Dans la lettre 68 Valmont se fera fort de d fendre non sans opportunisme le droit la passion comme raison de vivre et la force du d sir comme sentiment d existence plut t que l apathie sans fin d une liaison seulement sanctionn e par la loi civile et religieuse 219 Litt rature et saveur Mais cette entreprise critique et d mystifiante a son envers ou plut t son endroit R v lant le fonctionnement de la repr sentation du d sir comme structure litt raire Laclos n lude pas la question de la pression effective du d sir de sa r alit L histoire du propre Valmont plus encore que celle de Mm
308. ents religieux ses doutes la font h siter se confesser et communier elle ne se sent pas suffisamment digne pour cela mais ne parvient ni faire taire les questions qu elle se pose sur la religion ni se consoler du manque de ferveur qu elle prouve l gard de l glise et des sacrements Flaubert lui r pond de mani re nette et provocante Perreur est de chercher un juste milieu un accommodement entre la foi et Pemportement mystique d une part et d autre part la raison et les contraintes de la pens e de syst me En un mot il faut trancher et ne point c der sur son d sir Du d sir au vrai la cons quence est bonne a condition de se montrer radical Si vous voulez sortir de l je vous le r p te il faut prendre un parti vous enfoncer r solument dans l un ou dans l autre Il n y a pas de point de vue objectif qui pargne l acte de d cider Ce genre d options fondamentales appelle un ralliement qui engage l tre subjectif de toutes ses forces Soyez avec sainte Th r se ou avec Voltaire Il n y a pas de milieu quoi qu on dise On d signe ici la b tise sous la forme de l che abandon au bon sens digne de M Homais qui se d fend des contradictions quitte renoncer au grand vent des emportements La remarque vaut surtout contre un si cle accus de jouer dans la politique et la science la com die de la positivit et des r ponses en se mentant sur la temp te de d
309. er et impronon able cette inqui tante tranget qui le fait ressembler du fran ais tout en trahissant une origine trang re La jud it chez Perec c est cela rien de substantiel religion langue culture juste un petit signe qui trahit une balafre sur le nom ou quelques cadavres dans le placard Quelque chose qui persiste alors m me que tout semble avoir t perdu corps et bien Qui ne conna t ces blagues juives qui t moignent de la persistance ironique discr te mais ind crottable de Pidentit au moment m me o l on voudrait en abolir la m moire Ce qui est vrai de Cinoc Vest aussi de la po tique de Perec inscrivant dans les interstices de son texte sa m ditation sur les Juifs et les mots Comment n gliger que Cinoc ce sinistr du nom propre est un fonctionnaire du nom commun Contrairement ce que sugg re le blanc entre les deux parties du chapitre le pass familial et la profession pr sente de Cinoc c est toujours la m me et p n trante variation sur la diaspora que poursuit Perec Ce pourrait tre une histoire difiante Celle de Vassimilation fulgurante d un Juif polonais immigr de fra che date vou au service de la langue fran aise par son emploi de lexicographe chez Larousse Mais sur cette histoire qui fut celle de milliers dhommes serviteurs anonymes des institutions h rauts de leur langue d adoption ou fous de la R publique le texte ne fait que glisser Pas
310. ernelle parfaite qui est la r gle essentielle du beau en sorte qu il fournit le fondement de toute harmonie Chez le P Andr il se confond largement avec une sorte de g om trie naturelle qui fait l essence des choses Ainsi existe t il un beau essentiel en musique qui r side principalement dans les arch types math matiques de la th orie musicale dans l id e de l ordre la beaut de Pordonnance du dessin de la pi ce dans l id e des nombres sonores la r gle des proportions et des progressions harmoniques Ce beau essentiel suffirait au fond satisfaire Pame si elle tait s par e du corps mais il ne peut susciter le plaisir des sens qui se portent spontan ment lorsqu ils ne sont pas corrompus vers la beaut naturelle consid r dans la structure des corps il n est pour ainsi dire que le fond du beau naturel un fond qui avec tous ses agr ments plairait a la raison plus qu l il si Pauteur de la nature n avait pris soin de le relever par les couleurs 2 Comme Pont not les commentateurs c est plut t dans sa description du beau naturel que 1 M ditations chr tiennes et m taphysiques M d IV 13 uvres de Malebranche tome X d par H Gouhier et A Robinet Paris Vrin 1986 p 41 2 Essai sur le beau chap I p 14 3 Ibid chap IV p 163 4 Ibid chap I p 15 16 246 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink
311. ers lui que tout converge c est l que Vintrigue peut et doit se d nouer se d faire tre rendue Pindiff rent silence du sable ancestral Adresser une demande la poussi re c est Los Angeles presque fatalement attendre une r ponse du d sert et des fournaises du Mojave C dant ses pulsions autodestructrices la raison alt r e rappel e par sa terre d origine les traits comme un v ritable livre ouvert de mis re et d puisement Camilla s efface Arturo renonce alors son amour en lui adressant un ultime hommage symbolique J ai remont le chemin jusqu la Ford Sur le si ge l exemplaire de mon livre tait toujours la Mon premier livre J ai trouv un crayon j ai ouvert le livre la page de garde et j ai crit 1 Loin de ressortir un pur probl me d efficacit narrative la pauvret apparente du style de Fante cette conomie de moyens qui le caract rise vise aussi et surtout la seule morale de l criture selon Ezra Pound savoir exactitude fonci re de expression cit par Carver De l criture Les Feux Paris Points 1991 p 29 et qui lui accorde selon Stephen Cooper une aura d ternelle pr cision Op cit p 263 2 J intitule donc mon livre Demande la poussi re parce que la poussi re de l Est et du Middle West est dans ces rues et c est une poussi re o rien ne poussera jamais une culture sans racines
312. es concepts isol s dans la langue que r side la signification de pens e le vouloir signifier quelque chose quelqu un Si Benveniste r serve la modalit du signifier la s miotique et celle du communiquer la s mantique Saussure dans ses essais terminologiques semble ne pas s parer les fonctions de repr sentation et de communication et m me la mani re de Humboldt faire d pendre la seconde de la premi re En fait le trait commun aux trois th oriciens semble tre Paffirmation que le discours par ce qu il suppose d encha nements et de liaisons et indissolublement par ce qu il implique d inscription dans une situation est le lieu de la construction du sens C est pourquoi les discussions en apparence techniques sur la phrase comme niveau de lanalyse linguistique sont en r alit d terminantes pour les conceptions du langage Saussure r serve dans le Cours la phrase l tude de la parole et Benveniste en fait une production du discours la phrase expression du s mantique m est que particuli re Probl mes de linguistique g n rale 2 op cit p 225 La th se benvenistienne selon laquelle l id e ne trouve forme que dans un agencement syntagmatique op cit p 226 C est moi qui souligne retrouve aussi par del l intuition laconique de la Note de Saussure affirmation de Humboldt sur cet aspect essentiel du g nie des langues qu il faut pr cis
313. es Questions sur l Encyclop die l exemple de l article Propri t SVEC 2003 01 3 26 1 M XVII 3 VOLTAIRE DICTIONNAIRE PHILOSOPHIQUE article VERTU Par Annie BECO Qu est ce que vertu Bienfaisance envers le prochain Puis je appeler vertu autre chose que ce qui me fait du bien Je suis indigent tu es liberal je suis en danger tu me secours on me trompe tu me dis la v rit on me n glige tu me consoles je suis ignorant tu m instruis je F appellerai sans difficult vertueux Mais que deviendront les vertus cardinales et th ologales Quelques unes resteront dans les coles Que m importe que tu sois temp rant c est un pr cepte de sant que tu observes tu ten porteras mieux et je ten f licite Tu as la foi et l esp rance et je ten f licite encore davantage elles te procureront la vie ternelle Tes vertus th ologales sont des dons c lestes tes cardinales sont d excellentes qualit s qui servent te conduire mais elles ne sont point vertus par rapport ton prochain Le prudent se fait du bien le vertueux en fait aux hommes Saint Paul a en raison de te dire que la charit l emporte sur la foi sur l esp rance Mais quoi n admettra t on de vertus que celles qui sont utiles au prochain Eh comment puis je en admettre d autres Nous vivons en soci t il ny a donc de v ritablement bon pour nous que ce qui fait le bien de la soci t Un solitaire sera sobre pieux Il sera rev tu d un a
314. es lourdes postulations m taphysiques de cet h ritier de Malebranche et les simples descriptions psychologiques qui font lessentiel de Essai publi en 1757 dans le tome VII de PEnodop die apr s la mort de Pauteur et il est devenu habituel de consid rer que Montesquieu applique au malebranchisme une critique de la philosophie premi re bien peu originale en son temps Mais cette interpr tation assez confortable et souvent juste interdit malheureusement de comprendre l op ration par laquelle 1 Dans le pr cieux volume o il a accompagn lEssai sur le go t d une introduction et de notes fort clairantes Gen ve Droz 1967 Charles Jacques Beyer privil gie l influence de Fontenelle sur Montesquieu et il pr cise utilement que les seuls auteurs explicitement discut s sur les questions de go t sont Dubos et Buffier dans les Pens es Toutefois Beyer rappelle en outre que PEssai sur le beau se trouve dans la biblioth que de Montesquieu et il produit une hypoth se parfaitement juste sur l int r t que put y trouver l auteur de I Essai sur le go t On con oit que le beau naturel du P Andr ait int ress Montesquieu pour des raisons analogues celles qui l ont attir vers les id es du P Buffier c tait une mani re d viter Parbitraire pur gr ce la notion de nature tout en gardant le subjectivisme et le relativisme en esth tique p 27 Qu il me soit permis de reprendre mon compte
315. es qui d routent les l ves parce qu il ne se livre pas au premier contact et qu il exige des relectures attentives pour rep rer et appr cier l enrichissement de mots au demeurant banals par leur emploi en figures et en r seaux C est dessein aussi qu il ne fait pas l objet d une explication lin aire mais d une analyse prenant en compte les difficult s de lecture pour organiser observation et l interpr tation du texte Avant d aborder cette tude sous langle privil gi du vocabulaire on pr cisera les notions qu elle met en uvre Le champ lexical ou conceptuel ou notionnel peut tre d fini comme 1 Fruits appartient au recueil Airs Gallimard 1967 repris dans Po sie 1946 1967 collection Po sie Gallimard Cet article s inspire d un rapport de recherche de l Institut national de recherche p dagogique Des mots au discours La place du lexique dans l enseignement du fran ais au lyc e coordonn par Marie Berthelier Romain Lancrey Javal et Jacques Vassevi re INRP 2001 Litt rature et saveur Pensemble des mots du lexique qui font r f rence un m me domaine de la r alit Le rep rage d un r seau lexical ou isotopie lexicale tablit entre les mots d un texte des relations qui sont porteuses de sens cette op ration suppose que les sens d not s et connot s aient t compris elle demande souvent des relectures et engage Vinterpr tation C est aussi le cas du r
316. ese est un plaisant garon Si la d bauche l ffarouche que diable fait il de son b tard le cher Pierre Farn se qui traite si joliment l v que de Fano Cette mutilation revient toujours sur l eau propos de ce pauvre Renzo Mot je trouve cela dr k d avoir coup la t te tous ces hommes de pierre Je prot ge les arts comme un autre et Jai chez moi les premiers artistes de Italie mais je n entends rien au respect du pape pour ces statues qu il excommunierait demain si elles taient en chair et en os SIRE MAURICE Lorenzo est un ath e il se moque de tout Si le gouvernement de Votre Altesse n est pas entour d un profond respect il ne saurait tre solide Le peuple appelle Lorenzo Lorenzaccio on sait qu il dirige vos plaisirs et cela suffit LE DUC Paix tu oublies que Lorenzo de M dicis est cousin d Alexandre Entre k cardinal Cibo Cardinal coutez un peu ces messieurs qui disent que le pape est scandalis des d sordres de ce pauvre Renzo et qui pr tendent que cela fait tort mon gouvernement LE CARDINAL Messire Francesco Molza vient de d biter l Acad mie romaine une harangue en latin contre le mutilateur de l arc de Constantin LE DUC Allons donc vous me mettriez en col re Renzo un homme craindre le plus fieff poltron une femmelette l ombre d un rufian nerv un r veur qui marche nuit et jour sans p e de peur den apercevoir l ombre son c t d ailleurs un philosophe un
317. essorts du romanesque en m me temps qu avec les fronti res du genre dans la mesure o expression du path tique est ins parable de la fatalit tragique GABRIEL DE GUILLERAGUES LETTRES PORTUGAISES Par Florence CHAPIRO Consid re mon amour jusqu quel exces tu as manque de pr voyance Ah malheureux tu as t trahi et tu mas trahie par des esp rances trompeuses Une passion sur laquelle tu avais fait tant de projets de plaisirs ne te cause pr sentement qu un mortel d sespoir qui ne peut tre compar qu la cruaut de l absence qui le cause Quoi cette absence laquelle ma douleur tout ing nieuse qu elle est ne peut donner un nom assez funeste me privera donc pour toujours de regarder ces yeux dans lesquels je voyais tant d amour et qui me faisaient conna tre des mouvements qui me comblaient de joie qui me tenaient lien de toutes choses et qui enfin me suffisaient H las les miens sont priv s de la seule lumi re qui les animait il ne leur reste que des larmes et je ne les ai employ s aucun usage qua pleurer sans cesse depuis que j appris que vous tiez enfin r solu un loignement qui mest si insupportable qu il me fera mourir en peu de temps Cependant il me semble que j ai quelque attachement pour des malheurs dont vous tes la seule cause je vous ai destin ma vie aussit t que je vous ai vu et je sens quelque plaisir en vous la sacrifiant J envoie mille fois le jour mes soupirs vers vou
318. et quelques saints Genet le reprend pour lui Il crit ces mots puis il les souligne ma nativit Tout son pouvoir est l sa ressource sa force J tais le pauvre du monde Retour au voyage je marchais Mais la travers e de l Espagne est en m me temps marche symbolique dans un temps qui n a pas de limites imparfait de l indicatif On passe du Christ l image du bagne Selon une double ressemblance Celle qui unit les palmes de No l et les palmiers du bagne la Guyane imaginaire Celle surtout de l humiliation de m me que l enfant J sus na t dans une table en plein hiver parce que les riches ont refus d ouvrir leur porte Joseph et Marie les criminels sont men s vers le bagne Cette phrase comme d autres nombreuses dans le livre redit la pens e principale cet oxymore in puisable qu elle est et qui se fonde sur l histoire du Christ relue de la fa on la plus rigoureuse c est dans humiliation absolue que doit tre trouv e la grandeur Une formule banale que la langue propose se trouve ici reprise par quoi continue de se d ployer le pouvoir du mot palme m riter la palme Le bagne est cette contradiction m me la fois gloire et ch timent Soulignons enfin importance des sons dans cette phrase De nombreux mots commencent par p ou par m pauvre poussi re palme chapeaux de paille palmiers pour monde mis rable marchais m ritant mi
319. et qu il mest pas plus aventureux de lui pr ter un dessein plut t qu une faute Pour comprendre cette histoire de lieu suivons le mot qui abonde dans la trag die Je n en ferai pas l inventaire mais prenons celui ci IL 1 v 367 Hippolyte demande me voir en ce lieu C est la premi re phrase d Aricie dans Pacte II On comprend qu Aricie s interroge sur le fait qu Hippolyte veut la voir mais Pinterrogation porte galement sur le lieu Hippolyte ne veut pas simplement voir Aricie il veut la voir en ce lieu Le voir n est pas distinct du lieu Si Hippolyte ne voulait que voir Aricie elle aurait dit Hippolyte demande me voir et le po te aurait su faire un vers avec cette seule id e mais non c est en ce lieu qu il veut la voir Ce qui se dira ou se manifestera dans l entretien qu il d sire ne peut se dire et se manifester qu en ce lieu Un peu plus loin Aricie Ism ne en parlant d Hippolyte I 1 v 403 4 Tu vois depuis quel temps il vite nos pas Et cherche tous les lieux o nous ne sommes pas Surprenante formulation positive Hippolyte ne se refuse pas aller o Aricie se trouve il cherche les lieux o elle n est pas ce qui n est pas du tout la m me chose Il cherche un lieu habit d absence Apr s le retour de Th s e none III 3 v 828 Th s e est arriv Th s e est en ces lieux Pourquoi la confidente essouffl e redouble t
320. eur pouss e d bordante de barbares Des incendies flamberaient on ne laisserait pas debout une pierre des villes on retournerait la vie sauvage dans les bois apr s le grand rut la grande ripaille o les pauvres en une nuit flanqueraient les femmes et videraient les caves des riches I n y aurait plus rien plus un sou des fortunes acquises jusqu au jour o une nouvelle terre repousserait peut tre Oui C taient ces choses qui passaient sur la route comme une force de la nature et ils en recevaient le vent terrible au visage Emile Zola Germinal in Les Rougon Macquatt 4 M Paris Gallimard Biblioth que de la Pl iade p 1436 Litt rature et saveur Le peuple d fait un exemple de recomposition symbolique dans Germinal Sil est une sc ne de Germinal qui a connu une belle carri re scolaire c est bien celle o une poign e de bourgeois cach s dans une grange assistent au d fil furieux des gr vistes affam s Alain Pag s a montr combien cette sc ne expurg e de ses l ments explicitement sexuels a fr quemment t utilis e par les diteurs scolaires comme commentaire des le ons d histoire portant sur les mouvements r volutionnaires Confusion facile tant le texte multiplie les r f rences historiques mais confusion quand m me qui efface d un coup toute la duplicit du dispositif zolien Celui ci ne se limite pas en effet aligner une meute ouvri re sur les images des meute
321. eurs paradoxalement la sc ne 4 de Pacte I marque sa premi re r elle apparition la sc ne 1 le montrait de nuit couvert de lt son gt manteau dans la sc ne 2 on l apercevait avec sa robe de nonne au sortir d un bal masqu Absent de la sc ne 3 il semble appara tre enfin visage 1 Revue des deux mondes tome I d Un spectacle dans un fauteuil ao t 1834 261 Litt rature et saveur d couvert Pour autant l vanouissement de Lorenzo se constitue aux yeux du spectateur comme une nigme dans une tension ind cidable sur laquelle repose le drame s agit il ici d une com die du double jeu d un Lorenzo acteur ou d une r elle horreur des armes que cette curiosit monstrueuse apport e d Am rique devra surmonter pour assassiner Alexandre Cette sc ne qui poursuit la pr sentation de Florence de ses diff rentes intrigues et de ses multiples personnages offre un portrait complexe de son h ros im absentia travers les r flexions des courtisans et d Alexandre puis 7 praesentia Mais qui est ce Lorenzo Cette question essentielle au sens plein du terme met en valeur les notions ambigu s qui fondent le drame la r volution la transmission l identit LES COULISSES DU POLITIQUE Dans cette sc ne Alexandre appara t pour la premi re fois dans l exercice officiel de son r le de duc entour des principaux acteurs de la vie politique Sire Maurice chan
322. explosion de la passion Si la th atralit soulignait l aspect dynamique de la passion sa n cessit transpara t dans les expressions de sensualit Tout le passage d crit des manifestations corporelles impossibles r primer ce qui prend un sens particulier pour Charlotte dont les sentiments taient jusqu alors opaques Les signes physiques de la passion sont inscrits dans une sorte de n cessit physiologique ou psychologique Dans un complet d sespoir Dans le trouble de ses sens Les phrases mettent en vidence l int rieur de ce cadre l accumulation de verbes d action par des constructions paratactiques il se jeta lui saisit les mains les pressa elle lui pressa les mains les pressa contra sa poitrine se pencha vers lui La sym trie des phrases pr sente une image de r ciprocit qui pr pare le moment des baisers Le vocabulaire du corps avec la mention des joues de la poitrine des l vres est pr gnant avec une insistance sur les mains qui rappelle la sc ne du bal Le texte est domin par le langage de la passion caract ris en particulier par les verbes serrer presser se jeter ou les adjectifs br lantes ou fr missante Surtout renvoient la passion au sens propre au sens d action du corps sur l me toutes les indications d une r sistance amoindrie la pulsion amoureuse De m me la s paration d avec Lotte est pr sent e
323. f rence pour les scruter pour cerner leurs moindres inflexions et qui autorisent des exercices de lecture convaincants Ce n est pas un beau texte qui aurait sa place toute trouv e dans une anthologie Mais c est un texte que son auteur crut suffisamment important ou significatif pour le faire entrer alors qu il avait par deux fois t utilis dans cet essai de quelques articles omis dans le grand dictionnaire ou qui peuvent souffrir quelques additions ou qui ayant t ins r es par des mains trang res n ont pas t trait es selon les vues des directeurs de cette entreprise immense Ce multi usage serait il preuve d lection ou au contraire d value t il un texte bouche trou Dans ces quelques lignes Voltaire sans surprise se livre une critique ac r e des pr dictions attribu es Jeanne se moque d un miracle qu elle aurait accompli ridiculise les voix qu elle aurait entendues Il refuse toute intervention du merveilleux dans son histoire r cuse celle de Dieu tout autant que celle du Malin selon 1 Ce texte est reproduit par Moland dans les claircissements historiques M XXIV 498 499 seulement signal pour les deux autres oeuvres M XXVI 148 et M XVII 351 2 Introduction aux Questions sur l Encyclop die par des amateurs M XVII 6 373 Litt rature et saveur des juges la condamnant pour fait de sorcellerie Il conclut en citant Les Plaideurs Ma foi ju
324. faisant du boudin M Zola Or on conna t la position probl matique de Barbey sur la presse d un c t elle a fait sa carri re de l autre il n a cess de critiquer ce pouvoir indigne pour lui des salons d antan et de la conversation Au d but d une autre Diabolique Le Dessous de cartes d une partie de whist Barbey voque le salon de la baronne de Mascranny et explique la comme dans les rares maisons de Paris o l on a conserv les grandes traditions de la causerie on ne carre gu re de phrases et le monologue est peu pr s inconnu Rien n y rappelle Particle de journal et le discours politique ces deux moules si vulgaires de la pens e au XIX si cle Alors pourquoi mobiliser cette forme g n rique Pentr e de la derni re nouvelle Beaucoup de critiques se sont tonn s de cet incibit pr tendant dans cette nouvelle ne retrouver la mani re aurevillienne que plus tard lorsque la duchesse prend la parole Il semble pourtant que cet autopastiche fonctionne comme un ricochet discursif ou conversationnel qui introduit la m diatisation au sein de la nouvelle Cet zzcipit est d abord mise en abyme de la fiction mais aussi permet de justifier un m tadiscours glorificateur On voit donc bien qu une caisse de r sonance est introduite au sein du dispositif narratif certes elle est moins explicite que celle des salons mais plus actuelle plus moderne elle est susceptible d engend
325. fferts Jean Goldzink un r cit autobiographique classique tel que Les Confessions de J J Rousseau en ont fourni le mod le pour la litt rature europ enne moderne je forme une entreprise qui n eut jamais d exemple S agit il de lexpression d une modestie d inspiration chr tienne L importance de J ai pens toi dans la suite de ce fragment conduit liminer rapidement cette hypoth se de lecture En place du je attendu on pourrait galement attendre un elle dans une forme autobiographique qui prendrait davantage le masque du roman L emploi de tu mi chemin entre je et elle sugg re un stade interm diaire dans l laboration de la fiction qu il faudra rapprocher du genre revendiqu par l auteure a la premi re page de son livre autofiction Un des enjeux artistiques de ce texte est sans doute d imposer par l exemple une d finition de ce genre dont les fronti res sont pour le moins incertaines A propos de l cart entre tu et elle on se souviendra de la le on d Emile Benveniste qui distingue elle ou il fonctionnant comme pronoms personnels prenant donc la place d un substantif dont le nom pourrait tre nonc dans sa totalit de tu ou je v ritable d ictique dont le r f rent n est intelligible qu en fonction du contexte pr cis de l nonciation Le choix de tu par lauteure implique qu il ne remplace pas un petsonn
326. ffrances inconnues Un changement de r gime descriptif gouverne celle ci elle n est pas li e l arriv e la pr sentation d un personnage sur le lieu Elle fonctionne comme ouverture analogue en cela lincipit de bien des romans balzaciens La Maison du Chat qui pelote Une double famille La Grenadi re B atrix Ferragus etc Apr s cette description apparaitra un je celui du narrateur observateur ph nom ne assez rare dans La Com die humaine comparer avec Facino Cane Nous sommes plac s devant un panorama parisien organis en tableau o comme le remarque justement Jeanine Guichardet semble dominer l impression esth tique d une harmonie sourdement menac e par des notations discordantes manifestant la pr sence du doigt de Dieu qui pr parent la suite dramatique du chapitre La composition du passage est d une efficace simplicit Notons tout d abord Vincipit programmatif avec le point de vue d o la perspective est trac e rive gauche au sud du Paris de P poque d limit par les boulevards int rieurs Entre la barri re d Italie et celle de la Sant une l g re Eminence donc une vue l g rement surplombante position recommand e pour les touristes avec galement attirance de Pint r t du lecteur sur ce qui va suivre une perspective digne de ravir l artiste ou le 1 Unique contemplation heureuse d un Paris r concili o les contraires
327. gards dlairs qui semblaient jaillir d un cal de flamme Elke ne vit rien Elle couta et n entendit rien Elle n avait autour d elle que des ennemis O vais je mourir dit elle Sur l autre rive r pondit le bourreau Alors il la fit entrer dans la barque et comme il allait y mettre le pied Athos lui remit une somme a argent Tenez dit il voici le prix de l ex cution que l on voie bien que nous agissons en juges C est bien dit le bourreau et que maintenant son tour cette femme sache que je naccomplis pas mon m fier mais mon devoir Et il jeta l argent dans la rivi re Le bateau s loigna vers la rive gauche de la Lys emportant la coupable et l ex cuteur tous les autres demeur rent sur la rive droite o ils taient tomb s genoux Litt rature et saveur Le bateau glissait lentement le long de la corde du bac sous le reflet dun nuage pale qui surplombait l eau en ce moment On le vit aborder sur l autre rive les personnages se dessinaient en noir sur l horizon rouge tre Milady pendant le trajet tait parvenue d tacher la corde qui liait ses pieds en arrivant sur le rivage elle sauta l g rement terre et prit la fuite Mais ke sol tait humide en arrivant au haut du talus elle glissa et tomba sur les genoux Une id e superstitieuse la frappa sans doute elle comprit que le ciel lui refusait son secours et resta dans l attitude o elle se trouvait la t te inclin
328. ge une id e de cycle d ternel retour Ainsi dans la pi ce C me succ de Alexandre de M dicis en un cercle vicieux de PHistoire rendu magistralement par la mise en sc ne de Georges Lavaudant la Com die fran aise en 1988 le m me acteur Richard Fontana incarnait les deux r les signifiant Pabsence de r volution radicale malgr les soul vements tudiants et le geste d sesp r d un Lorenzo pierrot lunaire et expressionniste interpr t par Redjep Mitrovitsa La sc ne 4 de Pacte I concentre ces croisements historiques et g ographiques fondant le drame elle expose que toute r volution politique est impossible dans une ville r gie par des metteurs en sc ne sinon invisibles du moins hors champ Charles Quint le pape et Fran ois I En ce sens la r volution se situe ailleurs dans la structure m me de la sc ne en diptyque qui met mal les conventions th trales classiques par exhibition d une violence tout autant verbale que gestuelle et par l ironie fondamentale sur laquelle repose cet change Les r pliques s accumulent le ton monte un jeu hypocrite s expose et pourtant tout dit autre chose une politique dont les ficelles se tirent Rome un meurtre qui se pr pare des acteurs qui jouent tous un autre r le Lorenzo porte son patoxysme cet art du double jeu il ne fait son entr e sur le th tre dans la seconde partie de la sc ne que pour mieux se cacher D aill
329. ge le bachot C est le moment de croire que j entends des pas dans le corridor se dit Bernard It releva la t te et pr ta l oreille Mais non son p re et son fr re a n taient retenus au Palais sa mere en visite sa soeur un concert et quant au puin le petit Caloub une pension le boudait au sortir du lyc e chaque jour Bernard Profitendien tait rest la maison pour potasser son bachot il n avait plus devant lui que trois semaines La famille respectait sa solitude le d mon pas Bien que Bernard etit mis bas sa veste il touffait Par la fen tre ouverte sur la rue n entrait rien que de la chaleur Son front ruisselait Une goutte de sueur coula le long de son nex et s en alla tomber sur une lettre qu il tenait en main Ca joue la larme pensa til Mais mieux vaut suer que de pleurer C est le moment de croire Pexpression est double entente car ce moment crucial pour Bernard est aussi celui du d but de notre lecture Pour Bernard cela ne dure pas D embl e il ne peut plus croire Pourquoi le voulait il Nous l apprenons dans les lignes qui suivent pour viter de se trouver confront la r v lation que son p re n est pas son p re 1 Andr Gide Les Faux monnayeurs in Andr Gide Romans Biblioth que de la Pl iade Gallimard Paris p 933 934 Litt rature et saveur Ow la date tait p remptoire Pas moyen de douter c est bien de lui Bernard qu il s agissait La let
330. ger ma m re Ne pas savoir qui est son p re c est a qui gu rit de la peur de lui ressembler Ne retenons de ceci que la d livrance Ce roman de formation commence l o d ordinaire le h ros ach ve sa formation dans le renoncement au r ve l illusion au naturel d une motion Mieux vaut suer que de pleurer Bernard va quitter le toit familial mais un petit mot met le lecteur gidien en alerte un mot d usage un peu pr cieux le mot puin utilis pour le cadet de Bernard Caloub Ce mot on le trouve dans un dialogue entre un autre puin et son ain dans Le Retour de l enfant prodigue crit en 1907 Pain a rat son d part il revient et c est le puin qui d cide de partir son tour Comme si dans le statut de Bernard malgr sa b tardise quelque chose programmait d j le retour tandis que Caloub est promis une 170 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink libert que marquera la derni re phrase du roman Je suis bien curieux de conna tre Caloub Pour le moment nous sommes simplement dans l lan du premier d part sous les auspices d une force narrative que d testait ici Claudel La famille respectait sa solitude le d mon pas Le d mon de Bernard est certes celui qu on attendrait celui de la curiosit qui pousse fouiller dans les meubles d une m re Bernard replia la lettre Elle tait de m me format que les douze autres du paquet Une faveur ro
331. ges et plaideurs il faudrait tout lier puis se ravise conscient de l ind cence de ce ton d sinvolte et il ajoute si l on pouvait se permettre la plaisanterie sur de telles horreurs Ces courts paragraphes appartiennent la premi re partie d une dissertation qui rel ve les ridicules de cette histoire La seconde partie fera entendre la voix de lindignation sur ce qu elle a d horrible Ce texte a t con u comme une r ponse l abb Nonnotte qui dans ses Erreurs de Voltaire r fute le chapitre LXXX de PEssai sur les m urs De la France au temps de Charles VII De la Pucelle et de Jacques C ur Deux th ses s affrontaient une version laicis e une version cl ricale Dans Essaz sur les m urs Voltaire s tait attach mettre au jour des ressorts purement humains Un gentilhomme des fronti res de Lorraine nomme Baudricourt fut l origine d un exp dient pour tirer Charles VII de P tat d plorable o il tait r duit Il crut trouver dans une servante de cabaret un personnage propre jouer le r le de guerri re et d inspir e L artifice r ussit gr ce la collaboration de lint ress e Jeanne eut assez de courage et assez d esprit pour se charger de cette entreprise Des complicit s plus ou moins tacites permirent au stratag me de s imposer Elle fut examin e par des femmes qui ne manqu rent pas de la trouver vierge et par une partie des do
332. gn e des maux ult rieurs qui avaient d sert le territoire m tropolitain pour ce qu on appelait les colonies le Tonkin l Alg rie dont nous avons quand m me appris en primaire qu elle comportait trois d partements On m a dit que le lait les oranges taient toujours rationn s lorsque nous avons d barqu qu il fallait produire une carte sp ciale pour qu on ait droit aux biberons et aux vitamines C dont je ne garde aucun souvenir Je passe rapidement sur les ann es cinquante le triste le gris la parcimonie d un pays qui se Litt rature et saveur remet lentement de l humiliation de la d faite et de occupation de Pabjection vichyssoise rel ve ses ruines peine se d prendre de son pass rural amorcer la modernisation Lorsque nous sortons du r ve veill tristounet de l enfance pour entrer aux heures adolescentes il se passe ceci que je crois sans exemple ni pr c dent et qui ne se reproduira plus jamais le monde entre avec nous en sa verte jouvence Qui n a pas eu dix huit ans en 1968 ne sait pas ce que sont l ivresse sans vin de la jeunesse ni le primat de la politique ni Pesp rance ni le printemps Nous avons t nous derniers des enfants vieillots les provinciaux surtout des marches touffues du d sert central o s attardaient p le m le le XIX si cle l Ancien R gime la Gaule romaine Nous portions les stigmates d une particularit qui se perp tuait l cart des
333. grande faute en leur donnant des noms mal appropri s Rosenberg et Rosenthal par exemple sont des patronymes aristocratiques vol I Paris Seuil coll Points p 203 282 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink noms ordinaires d signant une qualit une couleur un m tier une chose un lieu Voil pourquoi du nom d origine de l anc tre il ne sera jamais question le nom incongru de Cinoc recouvre un nom d emprunt un nom d achat Kleinhof un pseudonyme qui lui m me cache un nom introuvable Reste cependant l nigme du passage de Kleinhof Cinoc O lon d couvre comment l histoire juive devient une blague juive de g n ration en g n ration de renouvellement de passeport en renouvellement de passeport soit qu on ne graissat pas assez la patte aux chefs de bureau allemands ou autrichiens soit qu on s adress t des employ s hongrois pold ves moraves on polonais qui lisaient et transcrivaient ou qui notaient ce qu ils entendaient soit qu on e t faire des gens qui n avaient jamais besoin de beaucoup se forcer pour redevenir un peu illettr s et passablement durs d oreille quand il s agissait de donner des papiers d identit un Juif le nom n avait rien gard de sa prononciation ni de son orthographe Ironie du sort loin de fixer Pidentit familiale le nom propre devient le marqueur d une identit bless e et subit toutes les avanies d un destin nomade
334. h oricien dans la pr face de ses Entretiens pointus et en tant que praticien hors pair le Sorel de la Biblioth que Fran aise t moignera du fait que cette sp cialit celle de la pointe par quivoque au premier chef restera attach e au nom de Cyrano dans la R publique des Lettres La reprise lexicale devenue c l bre Qui les craint ne craint rien oscillant entre deux sens divergents qui craint les dieux n a rien craindre qui craint les dieux ne craint que des riens ces beaux riens dont il est question au vers 636 donne la syllepse sur rien une fonction d encadrement ironique esth tisant outrance ce morceau de bravoure de l irr ligion moderne sans quivalent sur la sc ne de 105 Litt rature et saveur PAge baroque La reprise anaphorique de rien place l ensemble de la diatribe sous le signe de Part de la pointe par quivoque Or la pointe par quivoque a d j toute une histoire dans la m moire du libertinage elle participe depuis les accusations de Garasse notamment toute une mythologie associ e la pragmatique du discours libertin elle manifeste plus que d autres styl mes un art d insinuer de faire passer des id es h t rodoxes tirant profit du plaisir procur par le trait d esprit d allure joueuse ou mondaine Pointe extr me de Pironie libertine l quivoque simule et dissimule elle simule un jeu verbal sans cons quence
335. h orie saussurienne une linguistique de la langue a ouvert la voie toute de s rie de remises en cause qui se sont traduites par la constitution de nouveaux objets voire de nouveaux champs qu il s agisse de la sociolinguistique de l nonciation de analyse des discours c est au moins autant par comblement des suppos es lacunes du Cours de Saussure que par reprise de traditions plus anciennes ou v ritables innovations conceptuelles que s est tendue la surface d investigation des linguistiques 331 Litt rature et saveur Mais c est pr cis ment au moment o le paradigme structuraliste en linguistique entrait dans une crise qui lui serait a priori fatale que son usage dans les sciences humaines et particuli rement dans la th orie litt raire atteignait son apog e la production quantitative ne valant pas pour autant productivit et efficience Le malentendu structuraliste se formulerait pour l essentiel dans les termes suivants on ne peut penser la litt rature avec les concepts de la langue Corollaire non accessoire Saussure en s inscrivant sa mani re dans la trajectoire inaugur e pat Humboldt et poursuivie par Benveniste ouvre la possibilit d une po tique du discours qui implique de se situer diff rentiellement pat rapport la linguistique de la langue Que nous dit de ce point de vue trop allusivement expos ici la fameuse Note sur le discours La langue
336. h se de lecture d velopp e ici est que cet incipit scandale renforce et modernise la c l bre polyphonie nonciative des Diaboliques et qu elle t moigne d une mise en place d une strat gie de d fense plusieurs ressorts Dans le paysage romanesque de la fin du XIX si cle et m me dans lunivers aurevillien cet imapit s impose comme une provocation Il s agit d un texte qui vise au scandale la transgression aussi bien par les th ses soutenues que par la forme adopt e Toutes les formes de transgressions id ologiques sociale religieuse sexuelle litt raire sont convoqu es dans un texte qui se veut visiblement agression du lectorat de Barbey voire m me 40 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink autoagression Le discours aurevillien s affirme dans cette contorsion dans cette universalisation de l attaque dans ce tournoiement des cibles qui confine l immolation personnelle Ainsi les confesseurs de cette religion catholique dont Barbey s affirme ailleurs comme lun des plus vigoureux d fenseurs sont assimil s dans une incise quasi blasph matoire discours souterrain et autodestructeur de vulgaires romanciers La classe aristocratique lectorat suppos de Barbey est galement remise en question dans sa proximit suppos e avec l inceste qui laisse poindre le clich r aliste flaubertien ou zolien de la d g n rescence sanguine de la noblesse L vocation de li
337. hrase quand je l aper us dans la fen tre d en face implique implicitement un changement de direction du train et marque le tournant de la p riode oratoire dont la sinuosit suit la ligne de chemin de fer Ce tournant est parall le celui du train et se per oit par le changement de temps qui vient ensuite Enfin le deuxi me coude de la voie ferr e sous tend n cessairement un changement de paysage la mobilit du paysage Le paysage lui aussi se meut au rythme du mouvement du train Ainsi les changements de couleur traduisent le lever progressif du soleil L opposition entre les bleus et les rouge d voile la succession de paysages diff rents ce que rehaussent les expressions fragments opposites et l emploi de ladjectif versatile La volont du narrateur tente d arr ter ce mouvement pour unifier ce qui se pr sente comme disparate insaisissable le mouvement des phrases Le texte relativement long est constitu de cinq phrases seulement La premi re d une longueur moyenne mime la marche du train La seconde plus longue suit les circonvolutions confuses d un esprit en train de se r veiller comme le soulignent la parenth se qui interrompt la proposition puis le rythme des r flexions du narrateur Deux phrases br ves se succ dent alors mettant en vidence le parall le entre la description du paysage et Pint riorisation imm diate qu en fait le narrateur La derni re phrase
338. hrastus Redivivus en leur somme de libertinage v 636 640 une partie galement de la sc ne IV de Pacte V v 1558 1579 qui constitue en r alit une reprise et une amplificatio extraordinaire de la m me argumentation issue du livre HI de De Rerum Natura Ot ce morceau de bravoure ath e qui marquera la m moire d un certain libertinage et o clatent au grand jour bien des th matiques qui cheminent alors dans la litt rature des manuscrits clandestins gagne ne pas tre artificiellement isol du mouvement o il se trouve pris et de la trag die politique o il prend sens On s accordera assez facilement voir en S janus caract ris au moment de sa mise mort comme un soldat philosophe un connaisseur de l picurisme et de Lucr ce surtout sans les pr cautions herm neutiques dont Gassendi et d autres avaient us pour r habiliter le Jardin Mais si la pr sence de grandes th matiques picuriennes est ici vidente quel r le joue t elle au juste sur la sc ne tourment e de La Mort d Agrippine Comment 99 Litt rature et saveur s int ore t elle cette trag die de la conjuration et une vision noire s il en fut jamais du politique S janus h ros ath e Certes Epicurien Jusqu a quel point Dans quelle mesure en leurs modalit s et en leurs effets ces vatiations lucr tiennes sur la mort et sur les dieux seraient elles conformes l h ritage de l picurism
339. i nation sociale mais il n affranchira pas la jeune lectrice d une autre forme de suj tion plus sournoise peut tre L ensemble de l pisode est tout fait remarquable en ce qu il m le des l ments r alistes la revendication des ouvri res des l ments mythiques ou folkloriques le tribut un tre mal fique et de mani re tr s att nu e ici la travers e d un ch teau d sert ainsi que des l ments courtois une famille noble une jeune fille une preuve chevaleresque et peut tre des sources livresques le rival de Chr tien Gautier d Arras d crit dans ses romans des sc nes de lecture Mais que vient faire ici ce romman Nous nous proposons de voir comment s inscrit peut tre dans cet extrait une r flexion sur le travail du romancier Notre extrait comporte trois moments Le premier qui fr le le burlesque voque la travers e de la maison par le trio accompagn d une troupe de curieux int ress s le second affiche un souci fortement appuy du narrateur pour les chevaux Le troisi me pr sente la sc ne de lecture au verger Notre extrait d bute par une formulation conventionnelle tant que qui s applique g n ralement au cheminement du chevalier en ext rieur il chevaucha tant que Le roman arthurien ne se soucie en effet gu re de d crire les paysages et ne relate que ce qui se rapporte une aventure En revanche il ne se prive pas touj
340. i re ostentatoire dans la suite du po me comme si la Dame pourtant pos e d embl e comme destinataire du sonnet amoureux devenait un objet de parole et perdait tout statut d interlocuteur le d terminant d monstratif ce doux esclat se substitue ainsi au possessif attendu ton doux clat Bien qu encore quelque peu t nu ici le proc d devient manifeste dans les tercets Certon multiplie les emplois intransitifs de verbes usuellement transitifs vacuant ainsi les marques attendues de la seconde personne j embrasse vs je t embrasse je cherche vs je te cherche Le tu est vacu au profit du je d autant plus insistant que ce dernier est alors le plus souvent d doubl au sein de verbes pronominaux je w veille Je me tourmente Je m crie et lamente Je en vais Cette progressive vacuation de l v nementiel et cette vanescence de la Dame la fois comme personnage et comme destinataire du po me peuvent tre interpr t es de deux fa ons La premi re consiste voir dans ce po me un sonnet amoureux qui dit l exp rience de la perte Pamant s aper oit au r veil que Paim e la pr sence si forte dans le songe est absente A partir de l le po me mime outrageusement l absence et tout concourt souligner de mani re expressive le manque Aux yeux du po te amant le monde sensible dispara t on ne reviendra plus 85 Litt rature et saveur d sormais sur le
341. ide la sc ne et qui finit par la quitter Mais il est trop t t et du point de vue de l explication ce ne serait pas juste ce serait juste termin Il faut poursuivre se placer dans le processus th tral et croiser le double aspect du d sir partir rester tre solitaire tre dans un salon Suite du paradoxe cette fois dans la disposition du discours d Alceste soulign par des points d exclamation et d interrogation que le Prince affectionne et qu il trouve avec d lectation chez ses ma tres que le titre et donc le caract re expriment il fallait bien en re venir au titre non comment d s les premi res lignes qui le misanthrope dira t il qu il hait les hommes sinon aux hommes lui qui est homme Inutile d ajouter que nous sommes au th tre et rappeler la sc ne on manquerait d l gance en tombant dans l abyme Mais utile d affirmer qu il faut l que le com dien module sa mani re et quelque solution qu il choisisse sec noble ou bouffon de Louis de Fun s a une vision romantique de C line a J J Rousseau Comme le lecteur Pexplication imagine et comme Alceste elle ordonne c est en cela qu elle mime le texte et laisse aussi une libert qu elle disparaisse ensuite pourvu que l ordre principiel la modulation soit respect En attendant p dagogie et efficacit obligent on a rappel quelques l ments fermes et g n raux la diff ren
342. iens le sont tout d abord sur une sc ne politique o r gnent sans partage des pratiques ayant bien peu de rapport avec la sagesse du K pos Traditionnellement ces grandes th matiques tenant distance la crainte des dieux et celle de la mort visaient atteindre une ind pendance souveraine P gard des vicissitudes du politique et des troubles de Pame qu il engendre Cic ron du reste n avait pas manqu de relier pol miquement ces positions thiques du Jardin avec un apolitisme foncier de la doctrine ses yeux coupable Ici les 102 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink diatribes picuriennes de S janus prennent au contraire leur sens et leur force dans l imminence de l action politique la plus retorse Et loin d tre l extr me rigueur annexables une politique picurienne semblable celle que Pierre Gassendi en ces m mes ann es r active philolologiquement partir des maximes d Epicure sur le droit un art de la prudence adossant le politique une r flexion sur l litas et Pengagement politique du Sage un calcul des int r ts les saillies picuriennes de Vath e S janus s affirment dans les ressacs les plus al atoires d une politique baroque et de ses coups les plus impr visibles les plus extraordinaires le terme coup revient dans La Mort d Agrippine diverses reprises avec le sens que lui donnait Gabriel Naud Politique qui
343. ientia de Aliquo et Nihilo Ente et Non Ente Re et Modo rei Substantia et Accidente C est avec la philosophie de Christian Wolf que va se r pandre en Allemagne le terme d ontologie dont il est alors admis qu il constitue la premi re et fondamentale partie de la m taphysique Science de l tre de l essence pr alable toute autre forme de connaissance qu elle rend possible et fonde Conna tre un tre quelconque y compris un tre sensible implique qu on mette au jour en quoi comment il participe l tre en g n ral sinon aucun tre ne pourrait avoir le statut de substance L ontologie et il s agit l d une cons quence est au fondement de toutes les connaissances humaines en ce qu elle en contient tous les principes Elle est en ce sens au fondement de ce qu on pourra appeler plus tard une th orie de la connaissance Mais plus encore elle rend possible de penser le rapport entre une essence et une existence dans ce cas minemment privil gi pilier fondateur de toute m taphysique sp ciale qu est l existence de Dieu L examen de essence de Dieu permet d affirmer l existence de Dieu Cet argument qu on rencontre chez Saint Anselme puis chez Descartes pour ne citer qu eux ne porte pas le nom d ontologique C est Kant qui le baptisera ainsi pour en manifester la vacuit 201 Litt rature et saveur On trouve une d finition le texte n est pas sign du terme onto
344. ieravanti n Bologne ou le Milanais Piero Antonio Solario Sur le plan de la conscience du personnage ce rapprochement appara t comme une fausse piste non ce n est pas dans le souvenir du Kremlin que r side le secret du charme prouv par Pierre devant le Castel Vecchio Mais ce mot de secret l nigme sugg r e par les points de suspension il se persuada bien vite qu il n en tait rien le caract re faussement anodin du connecteur d ailleurs que b tirent d ailleurs des architectes venus d Italie autant d indices qui poussent y regarder deux fois De fait comme de juste cette fausse piste se mue en boulevard si Pon tente de deviner la raison pour laquelle Aragon a pr t Pierre ce souvenir et l a fait ici intervenir dans son roman Il suffirait d inverser la perspective le Castel Vecchio ne doit pas renvoyer comme chez Pierre un Kremlin vu dans le pass une enfance bourgeoise mais selon l auteur ce bel avenir et cette mancipation que symboliserait un Caste Nuovo le Kremlin chateau communiste de la Place rouge Id e qu appuierait la pr sence dans la description de la forteresse de V rone du d tail des murs rouges qui renforce encore la continuit entre V rone et Moscou et montre que le rouge fait partie de la beaut ou que la beaut est rouge d ailleurs en ancien russe belle se disait rouge la Place rouge c
345. ieu et Bord qui ont une ind termination gale c est ici ou ailleurs ne sont pas seulement employ s indiff remment le premier dit que mon corps est extensible au lieu qu il occupe le second que ce lieu est une limitation Le lieu qui s indistigue de mon corps est un bord C est pourquoi Ph dre a deux fois besoin du th tre parce que la pratique qui met en uvre un lieu corporis est bien le th tre parce que le lieu du th tre se sp cifie par le bord Ce qui fait th tre est ce qu on appelle commun ment la rampe quelle que soit sa forme sa modalit Le th tre commence par l instauration d une s paration dont on sait qu elle est l argument essentiel des th ories de la haine du th tre Le b timent th tral le plus l mentaire pourrait se r duire un trait qui d limiterait l espace o Pon joue et celui o Pon regarde Le th tre est un bord et l art de la mise en sc ne est une pens e de ce bord Ph dre met donc en jeu le th tre lui m me et va chercher Pextr me de sa le on et de ses pouvoirs Il y a une exp rience de la folie et un abordage de la mort de la folie car un corps sans limite un corps d bordant est celui du psychotique de la mort en faisant de la rampe un pr cipice Par cette pi ce et dans cette pi ce Racine fait une exp dition lointaine aux franges des pays et des tats dont on ne revient pas Il n y a que l Enfer le vrai don
346. ilence cette zone d inaccessibilit cr s par Lotte forment le lieu du d sespoir de Werther Construit en deux tapes clairement articul es tout le passage est plac sous le signe de la passivit de Werther L emploi en deux occurrences d adjectifs substantiv s comme des sortes d pith tes hom riques insiste sur cet aspect Toute la puissance de ces paroles s abattit 180 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink sur le malheureux jetant sur le malheureux le regard le plus charg d amour L emploi du m me terme par le traducteur produit un effet de sym trie et souligne le double mouvement de mont e et de retomb e de l expression de la passion Mais Goethe propose au contraire une gradation entre den Ungl cklichen et den Elenden soulignant une progression dans la d tresse Dans les deux cas c est lorsqu il est objet de l action que Werther est ainsi caract ris Homme de la passion il est celui qui subit et toute son attitude dans la sc ne est enti rement r active Sa passivit on l a not se lit dans des formulations n gatives Il ne r sista pas n osa pas la retenir Tout le texte est tendu entre action et inaction comme le montre le passage du mouvement la position Werther se jeta ses pieds Il tait allong terre Alors que les lignes consacr es aux baisers multipliaient les verbes de mouvement c est ici l im
347. illent un d sir charnel ronds grosse bulle peu pr s de la taille d une groseille app tissants sucr e g n reux ils s offrent au toucher granuleuse et pulpes cras es chair clat e et s ouvrent au regard qui peut voir dedans pourpre granuleuse De m me le grand pin parasol port e de regard laisse appara tre son principe vital De toute la nature mane une impression de vie et de profusion que vient renforcer la multitude des couleurs noires bleu p le presque noire pourpre encore vertes roussi gris soyeux teint de rose brun jaune d or grises blanch tre jaune blanch tre 1 Notons que comme l criture qui s ach ve la liste va du noir la non couleur signe de deuil au blanc r put r unir toutes les couleurs 353 Litt rature et saveur Pourtant il ne reste du pass que r sidus pars olives cras es parsem es figues parpill es parmi les touffes d herbe encore vertes du pr roussi par P t coul e de r sine fine poussi re blanchatre convoit s mais promis sous l effet du temps trop m res d abord avant de finir par peu peu une destruction prochaine L volution des images qui se rapportent la r sine exsudant du grand pin parasol en t moigne la grosse bul
348. imatique saisonnier 3 le motif de lhypocrisie et de la fausse d votion comme solution de dissimulation possible pour le libertin ce sera on le sait Pune des derni res tentations du Don Juan de Moli re 4 la grande th matique centrale tant d gards de l origine politique des religions 5 le jeu sur la preuve physico th ologique v ritable leit motiv de Vironie libertine dans les Lettres diverses satiriques et amoureuses jeu devenu tellement topique que S janus ne laisse m me pas T rentius achever son argumentation ne prend m me pas la peine d attendre en silence que son interlocuteur ait mis en forme son raisonnement comme le fera Don Juan face aux lucubrations m taphysiques de Sganarelle et place imm diatement une botte qui lui permet de couper court T rentius Mais s il n en tait point cette Machine ronde S janus Oui mais s il en tait serais je encore au monde Des th mes plus sp cifiquement picuriens jouent un r le d cisif dans la critique libertine selon S janus De toute vidence 101 Litt rature et saveur ce g n reux a lu Lucr ce d assez pr s A lanalyse des superstitiones et des effets pathog nes de la re gio dont on entend de multiples chos en ces quelques vers se juxtapose ailleurs en guise de contrepoint le leit motiv affirmant que la mort n est rien pour nous Ce sera la sc ne VI de Pacte IV que cette v ritable
349. impossible de l tre La radicale transformation que Kant veut faire subir l ontologie est en terme th orique l heureux quivalent de ce qu il entendra plus tard dans son Projet de paix perp tuelle entre les peuples R duire Pontologie l analytique transcendantale c est aussi bien s r frapper de nullit toute preuve qui n en a jamais t une pour Kant dite ontologique de l existence de Dieu Ce n est pas en examinant l essence de Dieu qu on peut en extraire Pexistence avec n cessit Voil bien encore un songe creux d un 203 Litt rature et saveur concept d une essence on ne peut conclure une existence Lexistence rel ve du fait et tout fait renvoie une exp rience sensible On ne prouve pas que Dieu existe ou ne prouve pas qu il n est pas L ath e convaincu rel ve de la m me esp ce que Pontologiste dogmatique Kant n est pas pour autant sceptique il requiert seulement de savoir raison garder Et c est pourquoi le jugement de Heine qui dans De Allemagne avait caract ris la critique Kantienne de la preuve ontologique de l existence de Dieu comme le 21 janvier du D isme est admirablement erron e On ne peut en kantien couper la t te ce qui n existe qu au titre d une Id e transcendantale La R volution copernicienne a t elle eu pour r sultat de rendre d sormais impossible toute ontologie en philosophie Non l ontologie a la vie dure
350. in de l observation exacte La v rit monte d un coup d aile jusqu au symbole 392 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink instant pr sent que de transf rer dans le futur ce qui s est d j pass En effet la sc ne est nettement inscrite dans un horizon d attente r volutionnaire mis en place la page pr c dente par la hache brandie comme une guillotine par la Marseillaise chant e par les ouvriers L expression il prom nerait des t tes ne se comprend ainsi qu en relation avec le souvenir de exhibition sur des piques des chefs tranch s en 1789 Le conditionnel de Zola projette dans le futur les vignettes historiques re ues du pass Le tableau offert par le d fil ouvrier est donc autant le fruit d un dispositif narratif d encadrement que d un agr gat d images ant rieures repr sentations collectives qui peuvent proc der de productions graphique ou textuelle La compr hension de la duplicit du texte zolien requiert donc que soit pos e la question de la nature et de la source de ces vignettes de cette doxa en image et ce d autant que ce texte on l a vu avec Alain Pag s a t re u au XXe si cle comme l une d entre elles L analyse de son substrat id ologique va montrer qu elles sont le produit d une laboration tardive influenc e par les sc nes d meutes de la Commune INTERTEXTE LE FANTOME DE TAINE En effet le substrat du texte e
351. in de prot ger la semence de chaque plante selon son milieu ou sa destination Rien dans la nature n est sans signification Les coquilles dures des noix servent prot ger les fruits de leurs chutes mais surtout rendent possible le transport des graines des arbres plant s au bord de l eau Ainsi les noix de coco peuvent elles tre transport es d une ile une autre Toutes les parties des plantes ont leur finalit Ce qui nous emp che souvent de le voir est que nous n tudions pas les rapports des l ments de la nature les uns avec les autres On comprendrait mieux les plantes si Pon observait quel usage elles servent aux animaux Ainsi comme le soutenait d j Leibniz dans le Discours de M taphysique la nature nous donne conna tre les fins plus facilement que les causes Elle se d chiffre en tudiant les liens de convenance entre chaque tre et ceux avec lesquels il est le plus particuli rement en rapport sous tous les rapports qui nous sont perceptibles la taille la couleur et Podeur comme on Pa dit mais 1 Si nous jetons un coup d il sur les rapports des gramin es aux quadrup des nous trouverons que malgr leur contraste apparent il y a entre eux une multitude de convenances r elles Le peu d l vation des gramin es les met la port e des m choires des quadrup des dont la t te est dans une situation horizontale et souvent inclin e vers la terre Leurs gerbes d li es sembl
352. ins que transparent que la violence qui y r gne n a d gale que le non dit par lequel elle s exprime et que les circonstances des drames qui s y jouent sont imp n trables y compris pour ses acteurs La deuxi me remarque est une constatation d ordre m tacritique il semblerait qu un texte incompr hensible soit loin d tre inexplicable ce qui est une bonne nouvelle Enfin la derni re hypoth se qu on se contentera d avancer prudemment porte sur l ventuelle dimension comique de Soucis de famille S il s av rait ce qu on ne se hasardera pas affirmer aussi t m rairement que l auteur ait voulu instiller dans sa trag die des traits propres marquer une distance avec le fond de son propos et susciter de la sorte le rire le commentaire qui pr c de s en trouverait partiellement invalid Mais laissons l la chose au simple tat de possibilit car sur le comique il ne nous appartient pas de dire quoi que ce soit Et voici pourquoi Dans un entretien in dit accord en d cembre 2000 D L au sujet du Mariage de Figaro de Beaumarchais J G d clarait Je pense qu il est tr s difficile de parler directement du comique Il est tr s facile d crire sur le tragique Les biblioth ques sont pleines de livres pompeux sur le tragique Mais il est peu pr s impossible de parler ou d crire sur le comique Et comme son interlocuteur se hasarda lui demander pourquoi J G
353. insi devenue un contre mod le suivant une autre forme d identification certes n gative mais n en consistant pas moins c der aux charmes de Pillusion r f rentielle D s lapparition du t nor la premi re sc ne de Lucie de Lamermoor la r action enthousiaste du public n est soulign e que pour mieux tre mise distance L accumulation de verbes juxtapos s en une parataxe asynd tique offre l image d une 156 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink agitation m canique et d sordonn e Les gestes excessifs du chanteur qui incarne Edgar et presse Lucie dans ses bras pour aussit t la quitter puis revenir s inscrivent dans un jeu paroxystique Passant de la col re la douceur infinie il joue de la succession de sentiments violemment antith tiques mettant en uvre un path tique sans nuances Son chant plein de sanglots et de baisers pr te l ironie fortement marqu e dans Poxymore rales l giaques o les cris peu harmonieux de Pagonie entrent en contradiction avec l laboration esth tique du regret amoureux qui conf re sa tonalit dominante l op ra de Donizetti Frappant d une m me ironie la sc ne et la salle enthousiasm e par un pi tre spectacle Flaubert s attache d abord d mystifier la repr sentation de Lucie de Lamermoor donn e Pop ra de Rouen l unisson de ce public provincial que t
354. insi l occasion de trouver un id al politique pour lequel lutter ne prenant parti ni pour le capitaine juif injustement condamn ni pour l Arm e fran aise Mais la disqualification de Pierre emprunte aussi des voies plus subtiles On notera les chos les d rivations encore dirait le rh teur qui relient le gout de la force un alcool trop fort ou la brutalit militaire et cette grappa brutale Pierre qui ne r ve qu individualisme forcen et force solitaire n a m me pas la force de supporter Pivresse de sa solitude Or qu est ce qu un h ros qui ne tient pas Palcool On remarquera le retour de l adjectif propre sa propre sensibilit sa propre solitude dont le sens double a t pr cis deux pages auparavant Dormir seul Seul comme jamais seul comment dire propre Oui c est cela propre d autrui Voil donc un bourgeois qui confond la singularit et hygi ne un h ros qui par souci de soi se refuserait avoir les mains sales en bon r aliste ou en bon sartrien on doutera de son efficacit On rel vera encore ceci Pierre qui vient d oser prendre les chemins de la libert chappant la vile troupe humaine comme au parti de l tat major celui de sa femme Paulette par exemple ce n est point sans dessein ironique qu Aragon nous le montre fascin par un chef d uvre de Parchitecture militaire je souligne qui se trouve
355. iola le jeune v que de Fano Casimo Gheri jusqu ce que mort s ensuive Le pape ne punit pas le crime 3 Le cardinal le r v le la marquise l acte IV sc 4 Alexandre est fils de pape apprenez le 4 Son entr e n est d ailleurs pas pr vue Lorenzo ne figurant pas dans la didascalie initiale listant les personnages sur sc ne Son irruption signe donc une rupture avec les conventions classiques 265 Litt rature et saveur s vanouissant face une p e En somme la structure en diptyque de la sc ne correspond l essence du personnage tre du masque de l ambigu t il mod le son apparence se joue de Pimage que les autres ont de lui travaille sa r putation La d clinaison onomastique autant quidentitaire dont il est Penjeu dans cette sc ne Lorenzo Lorenzaccio Renzo Lorenzetta est l image d un personnage glissant comme une anguille Lorenzo est donc d abord pr sent dans cette sc ne travers les discours de deux personnages Sire Maurice et Alexandre Dans un premier temps Sire Maurice nous offre une image connue de Lorenzo celle du libertin Le lecteur spectateur de Lorenzaccio n en est pas surpris il a d j vu l entremetteur l uvre dans la premi re sc ne de la pi ce et le jeune d bauch d guis en nonne dans la sc ne 2 Mais surtout Sire Maurice voque le pass romain du personnage jusqu ici inconnu du lecteur Cl ment VII a laiss
356. ion dans il le banquier ne bougea pas pat la p riphrase verbale continua de manger et par l adverbe toujours qui insiste sur la continuit de l action de mastiquer redondance galement marqu e au niveau phon tique avec bougea et manger ses machoires mastiquant etc Mais elle doit galement tre interpr t e comme une valuation morale port e sur la conduite du banquier Dans ce domaine le mot salaud est un des mots pr f r s du roman avec dans le domaine intellectuel ou celui de adaptation la r alit le mot idiot Le personnage d valuateur est extrait par le pronom un de la masse anonyme de ceux qui assistaient la sc ne En faisant parler l un d entre eux le r cit fait aussi taire les autres Il carte la possibilit d une valuation d origine diversifi e Un de ceux qui assistaient la sc ne et celui qui venait de parler sont des d signations minimales qui ne permettent pas de caract riser la comp tence bonne ou mauvaise qu a le personnage pour juger 342 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink les actions du banquier Tout se passe comme si Esp ce de salaud n tait l que pour inviter le lecteur s interroger sur le syst me de valeurs du r cit ainsi que sur la valeur du banquier dans ce syst me Sur le plan narratif l hypoth se de la saloperie du banquier assimil
357. ion de mod le copernicien Ce n est plus depuis Copernic le soleil qui tourne autour de la terre mais la terre qui tourne autour du soleil Selon Kant une telle r volution prend sens en philosophie ce n est plus le sujet de la connaissance qui gravite autour d un objet qui lui dicterait ses lois structurales mais bien l objet qui gravite autour du sujet qui le rend connaissable Or le sujet l homme est constitu de telle sorte que sa sensibilit dont les formes intuitives sont constitu es pat l espace et le temps ne peut conna tre que ce qui rel ve de ces formes Nous ne pouvons conna tre que l exp rience sensible et les concepts ont pour fonction d organiser d ordonner cette exp rience Cette connaissance par concepts purs n est donc pas possible elle ne peut tre quillusoire C est de cette illusion qu pu vivre sans le savoir toute m taphysique qui pensait pouvoir penser ce qui est par la pure voie conceptuelle Si l tre que nous pouvons saisir est n cessairement appr hend par notre sensibilit spatio temporelle toute connaissance qui pr tend chapper ces 202 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink conditions qui d finissent la ph nom nalit n est qu une extravagance une r verie d une Raison inconsciente de soi D s lors il faut abandonner la pr tention de pratiquer une science de P tre en tant qu tre l ontologie en son sens classique est un songe
358. ion sup rieure entre m tier et devoir pratique sociale et exigence morale Le ralenti du r cit fortement marqu par une allit ration en liquides glissait lentement le long contribue la th atralisation d une sc ne forte valeur picturale les spectateurs genoux l clairage sous le reflet d un nuage p le la pr minence du sens visuel on le vit et surtout les personnages se dessinaient en noir sur l horizon rouge tre composent une repr sentation m diatis e par les mod les de la gravure en bichromie des images populaires ou du contraste chromatique violent des d cors de m lodrame L illustration et le texte le d cor et le dialogue sont transparents l un l autre C est dans ce d cor lisible jusqu la saturation qu intervient la derni re p rip tie du roman mise au service de la symbolique du d nouement comme le sont les derniers sursauts du m chant dans les fins de m lodrames La tentative d vasion de Milady est condamn e l chec par sa place m me dans le roman qui ne la suscite que pour la mettre au cr dit de la symbolique morale c est pourquoi peine esquiss e par les compl ments circonstanciels pendant le trajet en arrivant sur le rivage terre et les verbes d action sauta prit la fuite elle se fige ajoutant dans le d cor difiant de la sc ne du jugement la silhouette attendue de la p nitent
359. ir e Cette discordance qui peut passer pour une maladresse rel ve peut tre d un jeu de contretemps proche certains gards du jazz La bri vet de l extrait tudi ici ne permet pas de conclure On s attachera donc au sens de cette phrase au premier abord obscure Le personnage d sign par il semble avoir des tudiantes qu il interroge Etudiante et non l ve indique un contexte li l enseignement sup rieur Les colles d signent dans l argot des classes pr paratoires aux grandes coles des interrogations individuelles L interrogation se d roule dans la petite salle de chimie L adjectif petit rappelle le contexte relativement intime de la colle o le professeur se trouve seul avec une tudiante Le souci de la morale publique et surtout la crainte d accusations de harc lement l encontre du corps enseignant ont conduit r cemment l administration stipuler que ces interrogations doivent se d rouler obligatoirement avec les portes ouvertes ou en pr sence d un t moin Le contexte ici n incite pas supposer la pr sence r elle d un tiers Sil y a bien un triangle on verra qu il est imaginaire et que se glisse entre le professeur et l tudiante du matin le souvenir lointain d une autre tudiante qui occupa jadis la m me position La suite du texte laisse penser que l interrogation porte sur une pi ce de th tre ou un op ra pre
360. ir un principe pour guide Ce sera la finalit g n rale l uvre dans la nature qu une Providence soucieuse du bonheur de l homme traverse de part en part Le d but de Etude XI en non ait ainsi l id e directrice Nous ferons VPapplication des lois que nous avons tablies pr c demment et nous en entreverrons une multitude d autres galement dignes de nos recherches et de notre admiration Lecteur ne soyez point tonn de leur nombre ni de leur tendue p n trez vous bien de cette v rit DIEU N A RIEN FAIT EN VAIN Un savant avec sa m thode se trouve arr t dans la nature chaque pas un ignorant avec cette clef peut en ouvrir toutes les portes II 365 C est avec ce principe de de chiffrement du r el Pinterpr tation de la nature comme lecture des intentions de bienveillance de son auteur que tout prend sens C est lui qui a setvi 4 noncer les lois g n rales de la nature d velopp es dans Pimportante tude X l ordre l harmonie la consonance la progression les contrastes les concerts mais surtout au premier chef la convenance On voit par le simple nonc de leur nom que toutes ces lois engagent une esth tisation de Pinterpr tation de la nature et visent noncer une grammaire du monde sensible plut t que les m canismes de sa production Mais surtout toutes insistent sur la mise en rapport des l ments de la nature les uns avec les autres Ils ne
361. is un m me est galement sugg r par le passage de celle du jour suivant et quelquefois du surlendemain quatre jours de rations t il y eut ainsi un B nois un Italien qui joua et perdit quatre jours de rations et partir du lendemain il vint chaque soir remettre ponctuellement an banquier son morceau de pain noir et sa margarine de charbon et pas un mot entre eux simplement 1 Claude Simon La Route des Flandres Paris Editions de Minuit 1960 p 204 205 2 C Simon La Route des Flandres op cit p 204 Litt rature et saveur un acquiescement un imperceptible mouvement de t te de celui qui prenait le pain l ajoutait sa propre ration sans m me para tre voir l autre et le troisi me jour l Italien s vanouit et quand il put de nouveau voir et comprendre l autre prit toujours sans le regarder la ration de pain et de margarine qu il venait de recevoir et la lui tendit disant Tu le veux et l autre Non et toujours sans un regard l autre remit pain et margarine dans sa musette et le lendemain il le perdant les apporta encore C tait la quatri me et derni re fois et dans la journ e au travail il s tait vanoui encore une fois et l autre ne le regarda pas plus que les fois pr c dentes prit la ration et sans mot dire la mit dans sa musette et un de ceux qui assistaient la sc ne dit quelque chose comme Esp ce de salaud et il le banquier ne bo
362. isser tromper la premi re personne dans un tel cadre ne renvoie pas un sujet singulier et le contenu qui s nonce sous l gide du je rel ve de l universel Cette premi re personne cependant inaugure un r gime de la parole en rupture avec le discours d instruction et d avertissement celui de lexp rience Car il s agit bien comme nous allons le voir de faire du discours de pr dication une exp rience pour l auditoire Bossuet est alors engag dans le premier volet d une d monstration en diptyque sous l clairage de la mort l homme apprend conna tre sa double nature il d couvre qu il est m prisable en tant qu il passe et infiniment estimable en tant qu il aboutit l ternit Cette bassesse de l tre mortel le pr dicateur la fermement tablie en faisant parler David travers la traduction 58 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink du septi me verset du Psaume 39 et voici que vous avez fait mes jours mesurables et ma substance n est rien devant vous Et il a dramatis le constat en citant Tertullien De a r surrection de la chair m me le nom de cadavre ne lui demeure pas longtemps il deviendra un je ne sais quoi qui n a plus de nom dans aucune langue Que reste t il donc ajouter Pourquoi cette relance d une question d sormais r gl e Qu est ce donc que ma substance 6 grand Dieu L interrogation relance bien l enqu te sur tre de l
363. it Aragon Poccasion de faire revivre la fuite solitaire de son grand p re maternel Fernand de Biglione qui n d une m re transalpine avait comme fera Pierre lui aussi abandonn sa famille Et ces retrouvailles imaginaires s appuient sur le sombre souvenir que Louis a conserv de son propre s jour Venise en septembre 1928 o l inconduite de Nancy Cunard le poussa une tentative de suicide De l une certaine proximit entre le personnage et le narrateur voire l auteur La voix de ce dernier se devine dans ces deux relatives au pr sent de g n ralit cette grappa brutale qu on boit en Italie et qui est sans nuances pour un Fran ais fait au cognac Impossible de d terminer s il s agit l des pens es de Mercadier endophasie du personnage ou d une pr cision apport e par le narrateur dans un style balzacien introduction par un d monstratif et pr sent de g n ralit On remarquera aussi ce commentaire exclamatif Quelle chose extraordinaire chez cet homme que Mais le plus int ressant tient l emploi du pr sent dans la fin de notre texte Le r cit jusqu alors tait conduit essentiellement imparfait sur fond de quoi se d tachaient quelques verbes au pass simple il se joua encore la com die il se persuada fort vite Quand appara t le pr sent il ne retrouve que de quoi etc il s agit de marquer tout l cart que ressent Mercadier e
364. it es Nous ne saurions donc assez conseiller au lecteur de se reporter l int gralit du texte original Chez Perec maitre du trompe l il le diable le sens la vie et la mort se dissimulent dans les d tails dans langle inf rieur gauche d une lettre h bra que dans la cave d un immeuble ou dans Vobscure existence d un personnage secondaire Non seulement l crivain donne beaucoup de lui m me Cinoc discret locataire du 6 tage chapitre LX du romans mais il en fait la mati re d un saisissant apologue sur la condition diasporique et sur les liens qui unissent dans son uvre jud it m moire et criture Avant d tre un personnage Cinoc est un nom qui pose aux locataires un probl me difficile en raison de sa d sobligeante homophonie avec sinoque Le tableau combinatoire de M Echard est la projection plane g om trique de l embarras social caus par ce handicap patronymique m thode en tout point conforme au constructivisme oulipien de Perec qui consiste d l guer la raison euclidienne la mathesis la solution d un probl me humain Las ling nieuse laboration phon tique de M Echard ne r sout rien n aboutit qu une prolif ration de noms impossibles d avatars exotiques de Cinoc Telle est la premi re diaspora dans le texte la dispersion du signifiant patronymique dans l espace de la page comme dans une grille de jeu de lettres Cinoc n a plus
365. it appr hender le moment de la retrouver demi tendue sur cette liseuse recouverte d une toile de Jouy o de petits paniers fleuris dispos s en quinconces jouaient entre des faisceaux de fines rayures roses v tue de cette robe de chambre de flanelle grise bord e d un galon gris fonc 39 De m me la peau ratatin e et rid e presque noire des figues trop m res rappelle celle cartonneuse et grise de la m re moribonde le lourd parfum des larges feuilles celui lourd et ent tant des fleurs mortuaires et la coul e de r sine mu e en tra n es de larmes figure la blessure que sugg rait seulement la cire fondue qui glissait le long des cierges dans la chambre de la m re morte 354 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Mais cette coul e de r sine observ e o le tramway s arr te c est aussi la vie discr te de la nature qui continue et vient contrarier en la rappelant la mort de la m re d j mat rialis e par la cire fondue qui glissait lentement le long des cierges Ces chos naturels du paysage de l enfance qu ensevelit finalement un uniforme linceul permettent au narrateur d approcher travers des images l v nement brutal la rupture de son enfance et de dire une fois encore son d sir de retrouver sa m re absente A n en pas douter il prend acte d une d gradation la fin du roman Toutefois la couche
366. it du mois comme nous tions la promenade du soir on vint du village mander a M d Urf que quelques soldats avaient pr tendu passer la rivi re avant M de Belley comme il tait d j la barque d Artemare sur le S ran Qu ils lui avaient dit force injures l appelant vescovo del Re et criant qu il n avait affaire sur l autre rive que s ils le rencontraient par les chemins quand ils 1 Pour respecter les r gles de ce volume j ai effectivement pris comme point de d part un texte qui est un passage de L Esprit de Saint Fran ois de Sales de Jean Pierre Camus que l on trouvera dans le livre de Sylvie Robic de Baecque Le salut par l exc s Paris Honor Champion 1999 p 57 58 Ont t aussi utilis s dans le corps du texte le Discours de r ception l Acad mie et les Eclaircissements sur l Histoire d Astr e d Olivier Patru uvres diverses Slatkine 1972 Et la Conference academique sur le diff rent des Belles Lettres de Narcisse et de Phyllarque par le Sieur de Musac Paris Joseph Cottereau 1630 qui est attribu e Jean Pierre Camus Enfin la Pr face au Premier Livre de Astr e L orthographe et la ponctuation contemporaines ont t utilis es partout 2 Jean Pierre Camus le prolifique auteur d histoires d votes fut nomm v que de Belley en 1609 L Ev que vient Virieu en voisin Belley n est distant de Virieu le Grand que de trois lieues mais quoique voisins d U
367. it le tribut annuel vers aux deux fils de netun c est dire du d mon que s est engag fournir le tr s imprudent roi de l Ile aux Pucelles pour obtenir sa propre lib ration et cela jusqu ce qu un chevalier vainque ces diables Mais le seigneur du ch teau dont le lien avec les netuns n est jamais clairement explicit semble bien tre le principal b n ficiaire de ce labeur Traversant la maison la demeure seigneuriale Yvain arrive dans un verger et c est l qu il d couvre une sc ne surprenante un autre titre une famille en train de lire en un romman Yvain recevra par la suite un accueil d une si grande courtoisie notamment de la part de la jeune fille qu il en prouvera de la g ne avant d apprendre le lendemain matin qu il ne saurait partir sans respecter la coutume qui lui impose de combattre contre les netuns Vainqueur c est une autre difficult qu il se heurte alors dans la mesure o le seigneur n gligeant les enjeux originels de P preuve insiste pour lui offrir sa fille et son fief suscitant 90 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Pembarras du chevalier Car Yvain ne cherche qu reconqu rir pat ses prouesses chevaleresques son honneur et sa dame Laudine Au terme d une v ritable joute verbale le seigneur vex renoncera marier sa fille et se contentera de lib rer les demoiselles reconnaissantes Yvain fait ici cesser une al
368. it pat politique du courtisan ou par imitation des fiers courages du Portique mais celle qui n est mue de nulle passion que dis je passion de nulle humeur de nul v nement parce qu elle s en remet du tout son Dieu Mais ne remarquerons nous point que cette admirable d votion poursuivit M d Urf est bien tout ensemble singuli re et tout uniment indiscernable Des plus lev es et cependant si semblable ces mes si simples qu il ne viendrait l id e de personne d en raconter l histoire Unique entre les hommes mais non exemplaire puisqu il faudrait que Pon put la d crire pour la proposer aux m ditations des hommes Cette admirable d votion dont vous parlez a du moins entrain a sa suite bien des c urs repartit M de Belley et premier celui de qui vous parle mais si javais pr senter la post rit un crayon de ce qu est la vie d vote je ne me hasarderai point a crire une vie de Fran ois de Sales qui quoique riche en bienfaits proches des miracles est de peu d int r t au regard de ce qui en est cause et qui est cet esprit dont on le voit anim Possible le meilleur est celui dont on ne peut rien dire ou du moins de qui rien ne se peut conter M de Gen ve coutume de dire Le bien ne fait pas de bruit et le bruit ne fait pas de bien Heureux celui chez qui au milieu des travaux du si cle dit M d Urf avec un soupir r gnent le calme et la paix en son for int
369. l d autres observateurs de la nature Mais o les trouver si beaucoup sont des esprits pr venus comme les botanistes ou les entomologistes qui aveugl s par leur science syst matique ne voient jamais que ce qui int resse le syst me qu ils servent et non la nature qui pr tent attention aux parties sexuelles de la plante mais non sa couleur sa taille ou au lieu o elle pousse Quels sont les bons observateurs de la nature Pline d abord dont l Histoire naturelle doit tre le livre le plus cit 51 Litt rature et saveur des Etudes de la nature mais aussi puisqu on ne peut compter sur les pr tendus savants tous les voyageurs comme le P re du Tertre Histoire des Antilles 1654 ou le P re Charlevoix Histoire et description g n rale de la Nouvelle France 1744 Ils rapportent ce qu ils voient sans connaissances pr alables et sans en tirer de conclusions g n rales Mais comment passer des observations singuli res et r p t es a l affirmation g n rale qui permet de parler de loi de la nature M me si Bernardin de Saint Pierre donne au terme de loi un sens assez loign de celui de la science moderne comme on va le voir le probl me de l induction ne s en pose pas moins D autant que dans son opposition aux mauvais scientifiques Bernardin de Saint Pierre leur fait pr cis ment le reproche de mal g n raliser Pour ne pas tomber dans les m mes travers il importe d avo
370. l heure palissait le visage de Cassandre celui de la Gorgone que ma s ur la fin de sa vie consciente aussi a vu se r fl chir dans le bouclier de Pers e C est le d nouement de Ph dre Troublant car tout ce qui pr c de est un commentaire de Ph dre qui ne fait aucune r f rence implicite ou explicite au destin de Camille Pourquoi Claudel pense t il soudain sa s ur la fin de ce texte sur Racine Il y a l une association plus puissante que toutes les raisons qu il exprime et comme la reconnaissance de ce que Ph dre ne serait pas tant le dessin d une passion amoureuse que la relation d une exp rience des limites On comprendrait alors mieux qu apr s cette pi ce Racine d bord lui m me ait interrompu son aventure dramaturgique Esther et Athalie ont un autre statut et se soit r fugi dans trois girons l institutionnel le conjugal et le religieux 1 Ibid p 466 REVERONI SAINT CYR PAULISKA OU LA PERVERSITE MODERNE Par Jean Paul BRIGHELLI professeur de CPGE Montpellier Deux des ouvriers me conduisirent une des presses dans la salle o s imprimaient les assignats et o plusieurs Allemands travaillaient avec activit Nous sommes accabl s d ouvrage dit Talbot en entrant pardonnez madame ajouta til avec un respect ironique si nous osons r clamer le secours de vos bras mais il nous est indispensable envoyant demain un million en France Veuillez donc simplement faire
371. l noir tragique on comprendra plus tard du jeunot apr s quoi on a affaire dans d autres salles o il fait aussi chaud et c est termin Une autre poque commence dont jose doucement pr tendre au rebours de ce que Nizan proclama un peu vite jadis que c est le plus bel ge de la vie Nous avions vingt ans C tait la derni re des ann es soixante Il n tait nulle part crit que c tait fini Tout semblait neuf encore Pavenir ouvert comme jamais l esp rance intacte De petits hommes aux yeux brid s coiff s de chapeaux coniques en latanier habill s de feuillage comme la for t de Birnam dans Macbeth tenaient t te a l imp rialisme am ricain appuy s par PURSS et la Chine C est pour le Vi t Nam que j ai manifest sur le pav de Paris pour la premi re fois C est Pozzo dans la grande salle parquet e de petits rectangles de bois exotique que nous avons re u la d l gation du Gouvernement R volutionnaire Provisoire laquelle fut solennellement remis dans un drapeau frapp de l toile rouge largent d une importante collecte Ce n est pas tout Le dernier empire colonial celui de Salazar craque de toutes parts en Angola en Guin e Bissau au Mozambique sous la pouss e des mouvements de lib ration nationale escort s pat des tankistes cubains Le cadavre de Guevara est encore ti de Nous ne mesurons pas la signification des incidents qui opposent gardes fronti res sovi tique
372. lacer le mot de Kremlin dans Les Voyageurs de l imp riale roman crit entre 1936 et 1939 paru la fin de 1942 mais dont l action s tend de 1889 1914 et qui ne conduit jamais aucun de ses personnages en Russie Certes P paisseur du livre la libert du genre la souplesse des associations d id es la virtuosit sans limites d Aragon tout cela favorisait cette apparition Mais quand m me la Russie en Italie Moscou V rone le Castel Vecchio qui fait rena tre un Kremlin hors intrigue Voila qui ne laisse pas d tre intrigant Reprenons La page que le lecteur vient de d couvrir se situe dans ce qu Aragon nommera dans Henri Matisse roman un Interm de entre les deux parties de son roman dont il a r am nag la construction pour sa r dition en 1965 et plus pr cis ment a la fin de la premi re des deux sections de cet interm de intitul e Venise Pierre Mercadier le h ros du livre a quitt sa femme et ses deux enfants son m tier de professeur d histoire sa vie de bourgeois demi boursicoteur demi sp culateur pour prouver en Italie le go t de la libert Cette libert c est d abord une profusion de sensations et Aragon s y entend mieux que personne sugg rer que le r el c est toujours fout a et plus encore ainsi la protase de la premi re phrase joue de la vari t des d terminants ces d cors et les fant mes les grands mur
373. latifs Joseph Ainsi ce n est plus de deux jours mais de quinze nous apprend la M re derni re entr e en sc ne que date son retour Plus tonnant encore est Pattitude de Heinrich a c est une surprise Joseph est revenu Cette stup faction prouv e par celui l m me qui annon ait pr c demment le retour de Joseph n est pas sans semer une certaine confusion dans la conduite du drame Confusion encore accentu e par le dialogue qui suit ce retournement d attitude de Heinrich AFRA Est ce que Joseph le sait HEINRICH Joseph doit bien le savoir lui m me qu il est revenu AFRA Mais lui de qui le sait il c est a que je voudrais savoir L amn sie qui semble ainsi frapper les protagonistes porte un coup fatal lid al d unit pr conis par Aristote dans sa Po tique Plus de bel animal si chacun est incapable de se souvenir de ce 366 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink qu il a dit fait ou pens quelques instants auparavant La dialectique temporelle qui organise le d roulement dramatique sur le mode d une suite absolue de pr sents Peter Szondi Th orie du drame moderne n aurait alors plus cours cette progression lin aire se substituerait un mouvement la fois cyclique et r trograde reconduisant chaque moment le drame vers un nouveau commencement Toujours est il que tous les indices concourent prouver que Joseph accus dans la second
374. le groseille qui rappelle Penfant gourmand de figues trop m res devient d jection comme une fiente d oiseau le jaune d or tincelant au soleil vire au blanch tre et la s cr tion vitale cicatrisante ne laisse pas de devenir tra n e de larmes stigmate d une blessure Tous les l ments naturels sont soumis dans ce paysage au travail du temps cras es clat e roussi br l s fan s croupie qui finalement devient menace d uniformit et que le narrateur tout la fois veut montrer et tente de contrer L imparfait duratif sourdait en permanence stagnait en permanence semblait toujours flotter it ratif l occasion le tramway s arr tait illustre la fonction de conservation de ce r cit de d composition qui proteste contre la disparition Et de fait le grand pin parasol couch d vi de sa fonction protectrice et dont le narrateur revoit dans une sensuelle vocation P corce faite d paisses cailles encastr es l une dans l autre en losanges d un gris soyeux teint de rose bord es d un bourrelet brun fait souche dans le r cit Il vient rappeler sensiblement posture formes couleurs l image souvenir de la m re l agonie voqu e bien plus t t dans le texte elle s tait mu e en un personnage d une duret rigide qui chaque jour me faisa
375. le irrigue tout le texte on y trouve successivement docere documentum doctrina edocere L enseignement dont il s agit c est celui qui gouverne la conduite de la vie Ce qui s oppose linterpr tation spinoziste c est moins une autre interpr tation qu une autre fa on de vivre ratio vivendi Elle produit la discorde 1 Et la deuxi me fois aussi quelques lignes plus loin le m me verbe est de nouveau pr cis par la t m rit et en outre l aveuglement 360 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink la haine les querelles d autorit On regarde comment les gens vivent et on observe la discordance avec leur r f rence PEcriture D s lors l interpr tation est moins un principe de lecture qu un principe de justification C est pourquoi il est inutile d voquer tout de suite son contenu ce sont ses cons quences ou plut t ses causes qui sont prises en vue Le discours qui alimente la discorde s oppose celui qui encourage la charit Autrement dit tout se passe comme si la clef de herm neutique r sidait dans l anthropologie On peut d s lors se demander comment Spinoza va introduire son principe d interpr tation c est dire s il va passer abruptement de la description des conduites l nonc th orique des r gles En fait comme souvent dans le TTP ce qui se dit dans un registre pr pare ce qui se dit plus loin dans un autre registre Le proc d pass
376. le plus de plaisir qu il est possible il faudrait qu il y e t du changement dans les arts puisqu il y en aurait dans la mani re la plus propre nous donner du plaisir Mais que les choses soient consid r es dans leur rapport avec nous ne signifie videmment pas qu elles se juxtaposent sans raison On dira si l on veut que dans cette op ration c est le principe m me d une esth tique malebranchienne qui se trouve r cus je crois plus juste et surtout plus simple d observer que Montesquieu comme Diderot d ailleurs retient d une lecture parfaitement assignable de cette tradition l importance de l ordre qu il r duit cependant aux rapports naturels qui organisent empiriquement le plaisir esth tique cet ordre est donc arrach sa justification m taphysique la plus rigoureuse qui le d finit comme l ensemble des rapports n cessaires consid r s par Dieu m me pour caract riser et d crire les d terminations actuelles du plaisir que l homme recherche dans les uvres des beaux arts La justification de l ordre donn e dans l Essai sur le go t est cet gard tr s frappante 1 Ibid 2 Ibid 253 Litt rature et saveur Certes Montesquieu rappelle apr s Malebranche et le P Andr que le plaisir que go te l me aux choses ordonn es dans le sensible est indice d une disposition de sa propre nature qui la porte aimer la v rit Mais cette concession
377. le syst me des lettres Le mode performatif auquel les pistoliers libertins recourent si volontiers dans les Liaisons est le signe d un travail sur la langue o le crit re reste le plus souvent la recherche de l efficacit Jeu la fois social et anti social le libertinage qui ne produit rien est cependant d fini comme praxis L argument pragmatique n est pourtant qu une tape On assiste un glissement capital entre le deuxi me et le troisi me paragraphe d un point de vue purement pratique celui du libertin un point de vue esth tique celui de l crivain Mme de Merteuil appara t progressivement comme une figure embl matique de Auteur dans cette hypostase symbolique on voit ainsi se construire simultan ment une th orie du libertinage une th orie de l criture et une th orie du roman Parce qu elle s int resse en priorit la question de la r ception Mme de Merteuil se convertit progressivement en critique litt raire Les lettres de r f rence lettres 24 et 25 ont r v l une faille qu il s agit de creuser non pour cesser d crire comme elle feint de le dire mais pour interroger le syst me litt raire dans son entier Comme elle le rappelle incidemment Valmont le destinataire d un roman le lecteur a les m mes droits et les m mes int r ts que le destinataire de sa lettre Mme de Tourvel R flexion sur le fait litt raire comme fait social et comme fait esth tiqu
378. lecture n est plus un pacte solennel Balzac Le P re Goriot Ah sachez le ce drame n est ni une fiction ni un roman All is true l est si v ritable que chacun peut en reconna tre les l ments chez soi dans son coeur peut tre Elle est devenue une convention de bonne foi presque amus e toujours solide Elle est de m me nature que celle qui unit la monnaie au pays et le citoyen l tat Bernard Saas F e L tat ce n est qu une convention Quelle belle chose ce serait une convention qui reposerait sur la bonne foi de chacun BERNARD REPLIA LA LETTRE regarder de pr s le paragraphe qui pr c de la derni re phrase de cet incipit on peut se rendre compte d une chose la fois singuli re et symptomatique la majorit des verbes replia refit remit rassujettit recouvrir retomber replacer r parer sont des it ratifs Premier roman mais crit par un homme de la cinquantaine Les faux monnayeurs sont en permanence aux prises avec cette question de la r it ration de la r p tition de la reprise ils en font leur force J cris pour tre relu disait Gide Et dans le roman la question cruciale nonc e par douard dans son journal est bien celle l jusque dans sa dramatisation en tragique moral Le tragique moral qui par exemple fait si formidable la parole vang lique Si le sel perd sa saveur avec quoi la lui rendra t on C est ce tragique l qui m importe
379. les lans de la tentation mystique mais ne parvient pas y adh rer pleinement d o Pissue du roman dans laquelle elle verse dans l orgueil bless et la jalousie intempestive L incipit donne au lecteur la premi re figure d une Marianne qui butte contre l aridit sensuelle de la logique rationnelle et qui pallie ce d faut par un recours flagrant lPimagination Marianne fait tout pour entretenir en mots Pamour de son amant en partage simul ou en souvenir complaisamment voqu Chez Marianne la passion d amour repose sur Pimagination en se confondant avec l espoir de Pamour 1 Ibid Seconde Lettre par exemple dans des propos tels que je ne mets plus mon honneur et ma religion qu vous aimer perdument toute ma vie je sens une profonde disposition vous pardonner toutes vos fautes ou enfin mon amour ne d pend plus de la mani re dont vous me traitez p 79 83 188 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink A partir du H las les preuves path tiques s imposent pour prof rer la menace de mort laquelle donne son indispensable urgence la plainte sans laquelle elle ne saurait avoir d impact sur le destinataire Dans cette longue phrase le lamento joue des intensifs et des restrictifs c est dire des emplois aigus de la langue tre aim serait la seule lumi re son loignement serait si insupportable qu il la feralit mourir en peu de t
380. les conduit lPappauvrissement physique et moral des classes sup rieures oisives qui ont alors besoin de la rudesse du sang populaire pour se r g n rer Voir Grand Dictionnaire Universel du XIX si cle art peuple 2 Dans Le Figaro du 4 avril 1881 Zola criraa propos du volume intitul L Anarchie spontan e Aujourd hui retir dans l histoire comme un rat inquiet il voit 89 travers notre commune de 71 en homme de cabinet que l meute de la rue a terrifi 3 Avouons cependant un ant c dent cit par Taine la Revue politique de l ann e 1791 o Mallet du Pan crit Les Huns les H rules les Vandales et les Goths ne viendront ni du Nord ni de la mer Noire ils sont au milieu de nous 3 394 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Le r cit de la R volution est l occasion pour Taine de mettre en place les l ments d une anthropologie fort pessimiste Phomme n y atteint l humanit que par le miraculeux quilibre de la civilisation vite rompu c dant la place au pur jeu des forces qui gouvernent la vie archa que un fond persistant de brutalit de f rocit d instincts violents et destructeurs qui font de Phomme un loup inquiet vagabond affam et poursuivi Le r volutionnaire tainien oscille ainsi entre le loup alt rit mena ante et le singe caricature d homme version non politique du Barbare Bien que Flaubert ait le premier ouvert l
381. les droits de la femme ou sil s agit bien d une uvre moderne je t cherai de proposer une esquisse de sa logique 1 Gabriel de Guilleragues Lettres portugaises d Fr d ric Deloffre Gallimard coll Folio classique 1990 2 Ibid p 68 3 Ibid p 62 67 L argument fondamental de cette modernit tant que cette trag die ne peut tre qu en prose 186 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Au rebours de deux interpr tations pist mologiques et donc id ologiques majeures qui en disent plus long sur les lecteurs du texte que sur l uvre elle m me je montrerai que cet extrait a tire sa coh rence du fait qu il d gage les trois facult s anthropologiques que repr sentent la raison le c ur et limagination La femme abandonn e travaille toucher celle des facult s qui lui donnera la plus enti re satisfaction b d ment parfaitement l indestructible idole critique faisant de la passion un d sordre L attachante nouveaut de la logique imaginative ne doit pas faire conclure l inexistence de toute logique Marianne nourrit son imagination pour qu elle lui permette de dire et croire autre chose que le jugement que la raison impose D o les atermoiements d une logique rationnelle au profit des divertissements de l imagination D une logique Pautre la religieuse d ploie le spectre multicolore de la passion Marianne commence par
382. les histoires sanglantes de la grandeur italienne ou des aventuriers qui l asservirent il avait bean se so ler avec la peinture de mus e en glise et se passionner pour les grands murs magnifiques et des fresques d labr es il avait beau voir en ce monde trange et luxueux d une beaut d funte le jardin de sa propre sensibilit Mercadier commen ait ressentir sa propre solitude comme un alcool trop fort et plein danalogie avec cette grappa brutale qu on boit en Italie et qui est sans nuances pour un Francais fait au cognac Pourtant a V rone il se joua encore la com die quand il d couvrit le Castel Vecchio cette forteresse des Scaliger chef d uvre de l architecture militaire avec ses chemins de ronde ses murs rouges et ses cr neaux au dessus de Adige tout an bout de la ville I lui semblait que cet art de forteresse tait li des souvenirs profonds de son enfance Chez son beau p re avant 70 il y avait un album avec des vues de Russie et le chateau de V rone faisait rena tre l image des murs du Kremlin que b tirent d ailleurs des architectes venus d Italie Etait ce bien l le secret du charme prouv par Pierre devant le Castel Vecchio Il se persuada fort vite qu il nen tait rien Aragon Les Voyageurs de limp riale 7 uvres romanesques completes 4 2 Gallimard Biblioth que de la Pl iade 2000 p 828 829 Litt rature et saveur Le rouge ne livre pas son myst re Il y a donc r ussi p
383. les la pelle butait Torse nu un b illon sur la bouche le nez sur les culots d ampoules les corces de melon cur es jusqu la fibre les morceaux de journal rongis de b tel et les tampons menstruels a demi calcin s nous retenions notre souffle et cherchions une piste On retrouvait dans ces d tritus comme une image affaiblie de la structure de la ville La pauvret ne produit pas les m mes d chets que l aisance chaque niveau a son fumier et de l gers indices t moignaient jusqu ici de ces in galit s transitoires A chaque pellet e nous changions de quartier apr s les billets roses du cin ma Kristal de vieux morceaux de films entrem l s de crevettes signalerent la boutique de Tellier et le Saki Bar Quelques m tres plus loin Thierry explorait le filon plus cossu du Club Chiltan journaux trangers enveloppes avion paquets de Camel rong s par la fermentation et sondait prudemment en direction de notre hotel Les deux adjectifs nominalis s qui ouvrent le texte Pinnommable et l informe Pinscrivent d embl e dans les deux 68 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink motifs de la privation et de l criture Comment nommer ce qui ne peut l tre donner forme des objets si bien r duits qu ils sont assimil s les uns aux autres dans une p t e cendreuse acide et morte Les rebuts de la d charge ne sont ainsi pas r pertori s au sein d une description claireme
384. lice eh bien il sera saint mats je ne l appellerai vertueux que quand il aura fait quelque acte de vertu dont les autres hommes auront profit Tant qu il est seul il n est ni bienfaisant ni malfaisant il n est rien pour nous Si saint Bruno a mis la paix dans les familles sl a secouru l indigence il a t vertueux sl a je n pr dans la solitude il a t un saint La vertu entre les hommes est un commerce de bienfaits celui qui n a nulle part ce commerce ne doit point tre compte Si ce saint tait dans le monde ferait du bien sans doute mais tant qu il n y sera pas le monde aura raison de ne lui pas donner le nom de vertueux il sera bon pour lu ef non pour nous Mais me dites vous si un solitaire est gourmand ivrogne livr une d bauche secr te avec lui m me il est vicieux il est donc vertueux Sil a les qualit s contraires C est de quoi je ne puis convenir c est un tr s vilain homme Sil a les d fauts dont vous parlez mais il n est point vicieux m chant punissable par rapport la soci t qui ses infamies ne font aucun mal Il est pr sumer que sil rentre dans la soci t il y fera du mal qu il y sera tr s vicieux et il est m me bien plus probable que ce sera un m chant homme qu il n est stir que l autre solitaire temp rant et Litt rature et saveur chaste sera un homme de bien car dans la soci t les d fauts augmentent et les bonnes qualit s diminuent On fait une obje
385. lisant arbitraire n nonce rien de certain Mais la r alit de Pamour est galement d valu e emport e par un scepticisme qui condamne tout sentiment comme une vue de Pesprit Ce nominalisme critique tout comme le refus de lid alisme qui l accompagne rec le pourtant un risque majeur travers le soup on qui p se sur la langue le libertin condamne aussi les valeurs que la langue entend porter 1 Il suffit que Valmont croit de nouveau Pamour pour que le langage perde sa duplicit Aussi peut il avouer dans la lettre 125 je pensais ce que je disais d cit e p 366 217 Litt rature et saveur En cela le libertinage remplit aussi une fonction critique il d signe ce double hiatus entre ce qui se pense et ce qui se dit entre ce qui se dit et ce qui s crit Le premier trouve son origine dans l id al classique de la biens ance que les Lumi res ont commenc de troubler mais que le libertinage r investit des fins propres Lieu id ologique du bon go t et des belles mani res l opposition du penser et du dire renvoie toute une esth tique de la belle nature Le libertinage qui parie sur la duplicit fondamentale de la langue saura en tirer profit Le second cart proc de de lid al classique du naturel auquel s ajoute la r flexion des Lumi res sur l origine des langues Parler et crire renvoient deux vocations fondamentales de la langue moyen et
386. lle la mort la nature presque envieuse du bien qu elle nous a fait nous d clare souvent et nous fait signifier qu elle ne peut pas nous laisser longtemps ce peu de mati re quelle nous pr te qui ne doit pas demeurer dans les m mes mains et qui doit ternellement tre dans le commerce elle en a besoin pour d autres formes elle la redemande pour d autres ouvrages Cette recrue continuelle du genre humain je veux dire les enfants qui naissent mesure qu ils croissent et qu ils s avancent semblent nous pousser de l paule et nous dire Retirex vous c est maintenant notre tour Ainsi comme nous en voyons passer d autres devant nous d autres nous verrons passer qui doivent leurs successeurs le m me spectacle Dieu encore une fois qu est ce que de nous Si je jette la vue devant moi quel espace infini o je ne suis pas si je la retourne en arri re quelle suite effroyable o je ne suis plus et que j occube peu de place dans cet abime offroyable du temps Je ne suis rien un st petit intervalle nest pas capable de me distinguer du n ant on ne ma envoy que pour faire nombre encore n avait on que faire de mot et la pi ce n en aurait pas t moins jou e quand je serais demeur derri re le th tre Bossuet Sermons Le Car me du Louvre dition de Constance Cagnat Deboeuf Gallimard Folio 2001 p 151 152 Litt rature et saveur Une trange rencontre Bossuet lecteur de Lucr ce dans le Ser
387. llence m me si nous sommes invit s l humilit sur le plan pist mologique Mais d autres peuvent se trouver li es Pune Pautre par l arbitraire de la rencontre ou par la coutume qui est un arbitraire fix Si par exemple un homme a souffert d une maladie ou perdu un proche dans une pi ce d termin e il ne pourra plus y entrer par la suite sans tristesse ni angoisse et sans que les id es correspondantes ne lui viennent Pesprit La pi ce elle n y est pour rien L association fortuite entre les id es a t ici consolid e par Pintensit des motions On expliquera ainsi des phobies des extravagances mais aussi de forme de caract re ou de sentiments Mais que dire que lorsque ce qui n tait que des traits d idiosyncrasie se voit incorpor par la coutume et g n ralis par celle ci Soit antipathie pour un homme elle rel ve d une biographie particuli re offens une fois par celui ci un autre pourra y penser et repenser longtemps jusqu ce que l id e de cet homme et le mal subi se r duisent jusqu une seule id e Aussi beaucoup de haines peuvent na tre de sujets forts l gers et presque innocents et les querelles vont leur train dans le monde Mais ce qui tait ranc ur remach e un comportement obsessionnel tait aussi une sorte de coutume priv e La coutume proprement dite peut arriver par des simples mots des r sultats sup rieurs L antipathie pour un peuple ou une
388. ller crire Je vous d fie pr sent de pr voir o ceci peut vous mener Par hasard esp rez vous prouver cette femme qu elle doit se rendre T me semble que ce ne peut tre l qu une v rit de sentiment et non de d monstration et que pour la faire recevoir il s agit d attendrir et non de raisonner mais quoi vous servirait d attendrir par lettres puisque vous ne seriez pas l pour en profiter Quand vos belles phrases produiraient l ivresse de l amour vous flattez vous qu elle soit assez longue pour que la r flexion n ait pas le temps d en emp cher l aveu Songez donc celui qu il faut pour crire une Lettre celui qui se passe avant qu on la remette et voyez st surtout une femme principes comme votre D vote peut vouloir si longtemps ce qu elle t che de ne vouloir jamais Cette marche peut r ussir avec des enfants qui quand ils crivent je vous aime ne savent pas qu ils disent je me rends Mais la vertu raisonneuse de Mine de Tourvel me para t fort bien conna tre la valeur des termes Aussi malgr l avantage que vous aviez pris sur elle dans votre conversation elle vous bat dans sa Lettre Et puis savez vous ce qui arrive par cela seul qu on dispute on ne veut pas c der A force de chercher de bonnes raisons on en trouve on les dit et apr s on y tent non pas tant parce qu elles sont bonnes que pour ne pas se d mentir De plus une remarque que je m tonne que vous n ayez pas fai
389. logie dans Encyclop die dirig e par Diderot et d Alembert Cette d finition rappelle en termes incontestablement wolfiens que l ontologie est la science de l tre consid r en tant qu tre et qu elle est au fondement de toutes les autres parties de la philosophie et de toutes les sciences On sait que beaucoup darticles de Encyclop die restent en philosophie et ailleurs fid les une tradition non mise en question Mais il est plus tonnant que d Alembert dans le Discours Pr liminaire de l Encyclop die reprenne la d finition traditionnelle de l ontologie que ses soucis empiristes pour ne pas dire mat rialistes devraient conduire une analyse critique Il d finit ainsi lontologie science de l tre ou m taphysique g n rale Mais le texte est ambigu N affirme t il pas que les tres spirituels ou mat riels ont des propri t s g n rales comme l existence la possibilit la dur e et que ces propri t s rel vent de l ontologie Le recours la dur e ne met il pas en p ril la notion d tre en tant qu tre Le texte de Kant ici pris en question sinon en explication est donc extrait de la Critique de la Raison pure d s sa premi re dition en 1781 Kant examine le sens du terme ontologie tel que d sormais selon lui il faut le consid rer Cette transformation du sens est en r alit proprement r volutionnaire au sens o la philosophie critique est une R volut
390. lors dans un sens fortement litt raire qui nous arrange bien surtout si l on en revient l tymologie de m khan comme combinaison et invention une machine fabriquer de la fiction Bien s r R v roni n emploie pas directement machine mais presse faut il rappeler que d s ses premiers emplois au XIIe si cle presser est employ transitivement au sens de tourmenter accabler exercer une forte contrainte ce qui je crois convient fort toute personne susceptible de se sentir concern e par l preuve d imprimerie cela va de soi de Pexpression Vers 1200 appara t le sens de comprimer des fruits pour en extraire le jus puis serrer de mani re marquer une empreinte nous y voici Encore faudrait il savoir quel est exactement le jus qui sort de la dessous du rang Mais 6 bonheur presser a aussi dans la langue classique du XVIIe le sens de rendre plus concis Machine litt raire d Ancien R gime la presse produit des haikus sanglants sous forme de slogans contre r volutionnaires Mort damnation pour les tra tres Nous parlions du jus Peu avant la fin du roman Pauliska tombe entre les griffes de abominable Salviati qui a mis au point une machine quasi messm rienne produire de l lectricit Apr s quelques instants de pr paratifs je vis amener les deux enfants d sign s nus g s peu pr s de six ans et d une figure touchante
391. lque temps r ver puis r pondit Certes voici qui est bien singulier et 4 N est il point vrai interrompit M de Belley et toutefois je le trouvais si singulier de n avoir point de singularit que tout me semblait singulier en lui Je n tais en ce temps pas assez avant dans la connaissance des hommes pour que ceci me par t autre chose que jeu de mots et aff terie Mais la suite me montra bien que j avais tort Car M d Urf tout sa pens e continua M de Gen ve n a t il point coutume de dire qu il est en ce monde comme une statue dans sa niche x Si fait r pondit M de Belley et que si on lui demandait pourquoi es tu immobile et ne dis rien la statue r pondrait que telle est la volont de son maitre x En effet et tel est bien l homme que vous guettiez avec tant de curiosit Mais 440 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink remarquez s il vous pla t ce que vous en pouvez dire rien au del de ce que vous dites tant t qui est que vous n en pouvez rien dire Pas de gestes par lesquels il soit possible de d celer une humeur une galit de l me telle que le visage ni le corps ne donnent rien voir C est dit M de Belley l image vivante d une discr tion toute chr tienne Non pas celle qui par tude et effort contient les passions qui l agitent et ne pr sente au monde qu un visage serein et si est au dedans trouble et s dition que ce so
392. lques soupirs elle dit Puisque ta ruse la sottise de mon mari la simplicit de ma m re et la malignit de mon confesseur mont amen e faire ce que de mon propre chef je n aurais jamais fait je veux croire que cela vient de quelque disposition c leste qui a voulu qu il en soit ainsi et je ne suis pas de taille refuser ce que le ciel veut que Jaccepte Je te prends donc comme seigneur maitre et guide tu seras mon p re mon d fenseur et je veux que tu sois tout mon bien et ce que mon mari a voulu pour un soir je veux qu il l ait pour toujours Tu deviendras donc son comp re et tu viendras ce matin l glise et de l tu viendras d jeuner avec nous et il Fappartiendra de venir et de rester et nous pourrons tout moment et sans tre soup onn s nous retrouver tous les deux Je fus en entendant ces mots sur le point de mourir de joie Je ne pus r pondre la plus petite partie de ce que j aurais d sir Si bien que me voil l homme le plus content et le plus heureux du monde et si ce bonheur la mort ou la vieillesse ne venaient pas men priver je serais plus bienheureux que les bienheureux plus saint que les saints LIGURIO Cela me fait grand plaisir de te voir si heureux et il Fest arriv exactement ce que je t avais dit Mais que faisons nous maintenant CALLIMACO Alfons vers l glise car je lui ai promis d tre la et elle nous rejoindra avec sa m re et le docteur LIGURIO J entends du bruit l
393. lus scandaleux de Cyrano dans La Mort d Agrippine Les noces sulfureuses du libertinage et de la g n rosit avaient sans doute t c l br es dans un roman comme le Francion tout particuli rement lorsque le h ros de Sorel participait aux orgies de Raymond et de ses compagnons d niais s Mais g n riquement le type th tral de G n reux avec lequel flirte ici la figure ath e de S janus est aur ol d un potentiel thique et esth tique autrement plus pr gnant dans les imaginations Dans les r cits de Cyrano lui m me il arrivera que le prestige thique et esth tique associ la notion de g n rosit subsiste au c ur de sc nes particuli rement transgressives songeons l pisode o les philosophes lunaires voquent la mort la plus noble leurs yeux par ingestion de l ami et reproduction charnelle visant le faire revivre mais c est bien ici que la g n rosit ath e par effet diff rentiel S janus pouvant se comparer dans son ordre propre tant et tant de h ros vertueux affirmant sur sc ne leur g n rosit semble d fier le plus fortement les grands mod les th traux qui hantent les m moires Et l on est bien loin cet gard de la tentative de conciliation entre vertu pa enne et vertu chr tienne d un La Mothe le Vayer par exemple dans La Vertu des Paiens o Epicure figurait en bonne place malgr les l ments les plus irreligieux de sa doctrine
394. m me au fil des sc nes qui se font cho qu elles finissent par en acqu rir une dimension proprement esth tique celle d une v ritable po tique de la n gation l usage des d niais s Et puis mourir n est rien c est achever de na tre v 609 Cela n est que la mort et n a rien qui m meuve v 1558 Et 106 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink que le coup fatal ne fait ni mal ni bien Vivant parce qu on est mort parce qu on n est rien v 1571 72 Pensez vous m tonner par ce faible moyen Par l horreur du tableau d un tre qui n est rien v 1575 76 Un fait de langue souvent attest Pinstabilit de rien tant t pur instument de la n gation tant t l ment aux contours plus positifs plus proche du sens tymologique de res ces beaux riens qu on adore devient sous la plume de Cyrano une sorte de forme sens du discours ath e figur sur sc ne et le ressort d explorations scripturales sans cesse recommenc es Ce d voiement esth tique des argumentations picuriennes au sujet de la mort peut son tour produire des effets quivoques sur le spectateur D un c t il participe d un chec la d termination de S janus et son m pris de toute crainte le conduisent la mort D un autre c t ces m mes figures picuriennes ont ceci de troublant que quels que soient les soup ons qui pl
395. mais aussi celle de la chair que cache moins de linge la chaleur est celle de P t mais aussi celle du d sir les mots les plus communs chambres globes h te se chargent de sensualit 197 Litt rature et saveur C est donc le r seau s mantique du d sir f minin qui donne au po me son unit et son ses son mouvement et sa signification et qui r gle en profondeur la distribution du vocabulaire Plus pr cis ment il s agit de la naissance du d sir chez la jeune fille parall le la maturation de son corps qui attend impatiemment la saison de Pamour Le po me proc de donc au renouvellement d un motif en l inversant ce n est plus la femme qui est compar e des fruits comme dans le langage populaire mais les fruits qui sont dot s d une sensualit f minine Il se nourrit des repr sentations issues d un certain naturalisme po tique voir la description de la Sarriette et de ses fruits dans Le Ventre de Paris de Zola et devient ainsi une vocation all gorique de la naissance du d sir f minin inscrit dans le contexte plus large de la nature dans Passimilation des fruits aux femmes se lit le d sir de les consommer et m me de voir les femmes s offrir comme des fruits Une lectrice jugera peut tre cette vision bien masculine KANT CRITIQUE DE LA RAISON PURE Par Mich le CRAMPE ENS Lettres amp Sciences Humaines Lyon Distinction de tous les objets en ph nom ne
396. me est musique non pas seulement parce qu il chante mais dans sa composition m me L aveu que Ph dre fait d entr e none suppose une mort cons quente Or Racine disjoint la 1 Ce texte est crit d apr s une conf rence prononc e Munich le 15 avril 2004 Elle tait ponctu e d extraits de Ph dre lus par Nada Strancar Le lecteur pourra envier l auditeur 290 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink confession et la mort report e en fin de pi ce et ce faisant il cr e du temps c est dire musique Il y a donc de forts arguments pour refuser la pi ce toute n cessit de mise en sc ne Cependant Racine n a pas crit un po me mais une pi ce de th tre et il n est pas extravagant de supposer que c est dessein Il faut donc chercher ce qui fait th tre ce qui exige la sc ne requiert des acteurs qui soient autre chose que des d clamateurs Lisons d j le premier vers Le dessein en est pris je pars cher Th ram ne L oxymore dramatique initial arriver pour partir d signe le th tre On peut en effet reconna tre le th tre ce trait toujours ce qui commence par d mentir une situation est un indice certain de th tralit Entrer pour dire que l on part Ph dre parler pour dire que lon va se taire Le Misanthrope commencer pour dire la fin Fin de partie la plupart des pi ces de th tre de toutes les poques sont fond es sur c
397. ment qui s imposent chacun dans l intimit de son corps Ainsi s claire la phrase de transition out nous appelle la mort Il s agit bien sur dans le passage du je au nous d inclure le sujet exp rimental dans une collectivit qui d signe th oriquement la communaut humaine et pratiquement dans Vici et maintenant de l nonciation le groupe des auditeurs Mais il s agit aussi de rappeler chacun d eux sa connaissance intime du travail de la mort D s lors la personnification de la nature n est plus conventionnelle elle est path tique Nul besoin de forcer les effets Quelques l ments suffisent l pith te d envieuse le verbe pr ter dont le s mantisme se trouve renforc par le lexique de la circulation mon taire demeurer dans les m mes mains tre dans le commerce composent un personnage d usuri re dont les pres exigences p sent sur la condition humaine Bossuet transpose ici en termes conomiques la m taphore juridique de Lucr ce a vie n est la propri t de personne mais l usufruit de tous Mais quelle qu en soit la coloration s mantique la transposition m taphorique sert le m me but il s agit de r duire la vie sa composante mat rielle De ce point de vue l homme n est pas le mieux loti des vivants c est ce qu exprime cr ment l expression ce peu de mati re qui vient corriger la formulation topique du don de la vie ce bien qu elle nous a fait E
398. ment aller chercher dans le discours li der Verbundenen Rede au del de la grammaire et du dictionnaire qui sont peine comparables leur squelette mort Cette linguistique du caract re des langues qu il distingue de leur charpente ou structure implique de prendre en compte les discours comme 1 Wilhelm von Humboldt cit par J Trabant Du g nie aux g nes de la langue in H Meschonnic ed E e g nie des langues Presses universitaires de Vincennes 2000 334 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink lieu de lempirique du langage l o se manifeste le Sprachsinn ou sens du langage et donc de s ouvrir vers une recherche que la linguistique n a pas os prendre vers une linguistique du parler cr ateur et tout sujet parlant est cr ateur productif po tique vers une linguistique du caract re cr e par les grands crivains Trabant 2000 p 98 note 5 On sait bien que l enjeu d une lecture non structuraliste de Saussure est de chercher l unit d une uvre sans s accommoder de la th se si pris e dans les ann es 70 80 des deux trois quatre Saussure Peut tre le caract re exemplaire de la Note incite t il faire de la pens e du discours le lieu de convergence probl matique du th oricien de la linguistique g n rale du comparatiste du M moire de Panalyste des l gendes germaniques de
399. ment axiologique On serait tent de voir dans ce processus de constitution de l acteur foule une sorte de pathologie symbolique sur le mod le de celles tudi es dans le champ nosographique par Ian Hacking qui s est en particulier int ress cette fin de XIXe si cle sur un point de fixation auquel une soci t donne la valeur d enjeu essentiel les attentes ou les croyances se renversent en angoisse et en doute et g n rent syndromes ph m res tels ceux tudi s par Hacking le chemin de fer et ses fous voyageurs ou monstres symboliques comme la Foule ici envers et ruine du Peuple d fait 1 Voir I Hacking Les Fous voyageurs Paris Les emp cheurs de penser en rond 2002 VARIA LE PRINCE PEDAGOGUE Par Christian BIET Universit Paris X Nanterre Qui entend s amuser avec Le Prince p dagogue doit se tourner vers la critique dix huiti miste Que d efforts de parades que de postures et de silences pour se d barrasser poliment de cet encombrant critique litt raire fruit d une passion contrari e sans excuses et souvent sans distance Toutes ses piques pol miques banderilles coups droits de fond de cour et tous ses efforts de d bat voire de discussion s rieuse semblent recouverts d un voile pudique par l institution m me On peut certes ordinaire d tour s esquiver par la psycho gen se de l Universit noirs et aust res amphith tres o le rh teur s es
400. ment ce qui est dit ci dessus au sujet de opposition entre le l gendaire et l dification en confrontant notre extrait un autre pisode de terreur celui au cours duquel on ch tie une femme pour une faute qui ne sera jamais mentionn e en l exposant nue dans le d sert l exc s de a souffrance et de la terreur la conduisant opportun ment vers la perception de essentiel Dieu C est peu dire que la perspective difiante dans laquelle est trait e cette anecdote suscite un malaise 321 Litt rature et saveur mort Ce qui s impose ici c est la fantasmatique d une Cr ation d r gl e qui s autod truit qui s auto d vore partir du d sert et de ses sortil ges Le premier d entre eux est encore conforme la r alit objective du d sert c est celui de l tendue la dynamique mal fique du Festin du soleil largit le d sert qui vient ainsi contaminer le monde Le second sortil ge est celui de Pengloutissement qui sera explicit dans le dernier paragraphe de Pextrait voir sfra dans lequel les chameliers sont bus par le miroir an antissement dans une profondeur paradoxale qui illustre une perturbation radicale ontologique du monde La clausule du premier paragraphe d veloppe l image d une nature destructrice dans une tonalit l encore l gendaire qu introduit la figure du souverain d miurge faisant preuve d une cruaut infantile Cette image accentue la
401. ment du temps est voqu de mani re allusive les brumes moins lointaines d signant par m tonymie l automne v 9 10 et la chaleur P t v 15 les vers 11 et 12 montrent aussi les fruits pommes poires arrivant maturit l automne au moment o les feuilles commencent tomber Le relatif effacement des r f rences aux saisons laisse la place l vocation d un temps humain actualis e pat l emploi du mot h te qui contribue personnifier les fruits Le r seau lexical des chambres chambres globes lampes linge est beaucoup plus surprenant comme la m taphore qui l inaugure dans le premier vers et se prolonge dans le reste du po me Il convoque un autre univers de r f rence que celui des vergers celui des humains et voque les activit s auxquelles ils peuvent se livrer dans les chambres la nuit le sommeil v 13 et Pamour le mot linge tant associ par m tonymie au corps d nud voir dans le po me suivant et maintenant je la regarde au milieu de son linge Le r seau lexical de la lumi re globes colore lampes lumi re allume rose pendeloques largement m taphorique prolonge et pr cise la m taphore fil e des chambres des vergers L image des chambres clair es transf re les s mes de sc ne nocturne et d intimit Le r seau lexical de la femme est la fois le moins attendu le pl
402. ment verbale repose elle aussi sur la feinte et sur le mensonge Manipul par Agrippine S janus lui m me use de feintes notamment l gard de Livilla de Tib re et dans une certaine mesure l gard d Agrippine elle m me 103 Litt rature et saveur Il serait d s lors assez facile d num rer les traits qui loignent son propos d une sagesse picurienne authentique l ethos d un soldat philosophe dont l action est en grande part dict e par la logique de vengeance d Agrippine une hantise du pouvoir ou en cas d chec le d sir d une mort aussi glorieuse que possible Pultime d fi de S janus la mort d portera les accents lucr tiens de ses diatribes du c t de ces figures sto ciennes dont P picurisme traditionnellement se gausse enfin la passion assez trouble prouv e pour Agrippine qui sous tend a la fois d sir rotique d sir de pouvoir et d sir de gloire jusque dans Pimminence de la mort Toute une litt rature sur le tyranicide est l arri re plan Mais dans la bouche de Sejanus les enjeux politiques de la mise mort du tyran sont esth tis s outrance si bien que l argument politique s efface au profit de la jouissance macabre que procure le tableau verbal du crime peint et repeint inlassablement tout au long de la pi ce par les hypotyposes sanguinaires d Agrippine Pour S janus comme pour Agrippine la sc ne du politique sera d abord un
403. mer qui signifie certes faire savoir quelqu un mais qu on peut aussi entendre tymologiquement au sens de donner une forme Et c est bien de cela qu il s agit d tacher une motte sur le fond indistinct de la d charge reprendre forme soi m me pour viter d tre assimil aux rebuts qui en sont d pourvus donner forme un nouveau r cit pour annuler la perte du journal Au milieu de l apr s midi Thierry poussa un hurlement et tous les charognards s envol rent la fois It brandissait l enveloppe souill e bouillante mais vide En une heure de travail fr n tique on retrouva encore quatre fragments d chir s de la premi re Page puis les pelles entam rent un agr gat noir et mis rable On s loignait du Lourde s Hotel Inutile de chercher plus loin cinquante grandes feuilles d un papier solide repr sentaient un capital qui n avait pas sa place ici Apr s ce suspens dramatique le dernier mouvement du passage livre l issue de la recherche et op re deux renversements Les verbes l imparfait laissent la place des verbes au pass simple qui orchestrent la d couverte Aux cris des vautours 72 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink marqu s par l animalit r pond le hurlement peine humain de Thierry qui trouve enfin l enveloppe prot geant le journal Les deux jeunes hommes d j assimil s des chiens de chasse sont ils finalemen
404. mier acte Pourquoi se d roule t elle dans une salle de chimie Le texte ne fournit aucune explication de caract re r aliste En revanche la chimie de mani re m taphorique a sans doute son r le jouer dans cette sc ne entre deux voire trois personnages Car si les corps sont s par s par le mobilier scolaire et les usages sociaux le signifiant sugg re une chimie voire une alchimie des sentiments Le mot colle par sa polys mie donne consistance cette interpr tation 78 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink 3 Ce fragment se conclut donc par un aveu J ai pens toi aveu d un trouble la pens e d une autre jeune fille cette ancienne tudiante qu il a pr sent devant lui est venue le troubler agr ablement semble t il pendant son travail du matin Ce souvenir semble intimement li un lieu la salle de chimie un contexte professionnel la colle et m me un texte dramatique Mais l se glisse une pr cision surprenante quoique nous tions sur le premier acte Malgr le recul du temps le souvenir est extr mement pr cis portant sur la page pr cise du texte objet de l interrogation Sans doute faudra t il supposer que le trouble ancien avait surgi pr cis ment l occasion de ce texte Le nouveau texte celui de ce matin n est plus le m me il est issu du premier acte ceci sugg rant la naissance d un autre trouble encore se
405. mille des millions tiennent au tyran par cette fili re Discours de la servitude volontaire Payot Paris 1976 p 212 213 425 Litt rature et saveur en pays chaud esp ce d galit et monogamie en pays temp r domination f minine dans les contr es froides l ge o elles s duisent en pays chauds les femmes n ont acquis aucune maturit intellectuelle et quand elles sont en ge de raisonner elles ont perdu l clat qui leur permettrait de dominer Le climat est il une d termination conforme aux lois naturelles voulues par la raison Montesquieu r pond par la n gative puisque la polygamie effet des pays chauds nuit aussi bien aux rapports entre les sexes qu au rapport parent enfant Et pourtant Il serait vain de soumettre un tribunal transcendant de telles pratiques en m connaissant les m canismes qui les ont produites La causalit mise en vidence par Montesquieu est multiple qui m le la nature le climat et les formes de la vie politique despotisme Tous ces ph nom nes ob issent des lois naturelles proc dent de la nature condition de ne pas simplifier l extr me les donn es comme par exemple lorsque Hobbes donne aux hommes l tat de nature le d sir de se subjuguer les uns les autres attribution qui n est pas raisonnable Il est donc clair et Goldzink est fond s y attarder que cruciale est la question du partage entre ce qui r
406. min et aux feuilles qui tombent demande au dieu nigmatique de la Vie car personne d autre ne sait ces choses voir Pan chap XXXII Paris Le Livre de poche biblio p 115 3 Cet art de la faim auquel Paul Auster a consacr en 1970 un article c l bre voir Le Carnet ronge Paris Le Livre de poche 1992 p 47 60 dont La Faim de Hamsun 1890 marquerait l origine 4 Fante Prologue de Demande la poussi re Grosse Faim Nouvelles 1932 1959 Paris Christian Bourgois diteur 2000 2001 pour la traduction fran aise p 157 136 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink lisibilit du d nouement de Demande la poussi re l image du style de Fante cette simplicit est trompeuse A priori pourtant tout semble vident dans cette derni re page conduite par le barman Sammy Wiggins qui il ne reste que quelques jours vivre et qui s est retir dans une cabane la lisi re du Mojave Camilla Lopez jeune serveuse mexicaine gagne le d sert accompagn e d un jeune chiot Trois jours plus tard alert par Sammy de la disparition de la jeune femme Arturo Bandini homologue fictionnel de Fante et crivain qui vient de publier son premier livre amoureux malheureux de l h ro ne part sur ses traces Quel autre espace que celui du d sert pouvait clore ce roman de la poussi re o Punivers de la di g se croule peu peu sous un nuage de cendres C est v
407. mo che fussi mai nel mondo e se questa felicit non mi mancassi o per morte o per tempo io sarei pit beato che beati pitt santo che e santi LIGURIO Io ho gran piacere d ogni tuo bene ed tti intervenuto quello che io ti dissi appunto Ma che facciamo noi ora CALLIMACO Andi no verso la chiesa perch io le promissi d essere la dove la verr lei la madre ed il dottore LIGURIO Io sento toccare l uscio suo le sono esse che escono fuora ed hanno el dottore drieto CALLIMACO Avvi nci in chiesa e l aspetteremole 1 Nous suivons le texte tabli par Giorgio Inglese pour P dition de la Biblioteca Universale Rizzoli 1980 introduction et notes de Gennaro Sasso Litt rature et saveur Traduction CALLIMACO Comme je te l ai dit mon cher Ligurio je demenrai insatisfait jusqu neuf heures et bien que j eusse pris un grand plaisir cela ne me parut pas bon Mais quand je me suis fait reconna tre et que je lui ai fait savoir l amour que je lui portais et combien il nous tait Jack du fait de la simplicit de son mari de pouvoir vivre ensemble sans supporter aucune infamie tout en lui promettant lorsque Dieu prendrait d autres dispositions l gard de son mari de la prendre pour femme et comme elle avait en plus de ces raisons v ritables gotit la diff rence qu il y a entre coucher avec moi et coucher avec son mari et entre les baisers d un jeune amant et ceux d un vieux mart apr s que
408. mobilit qui domine il resta dans cette posture plus d une demi heure Dans cette dialectique de Pimmobilit et du mouvement ce dernier semble certes avoir la part pr pond rante mais ce n est au d part que de fa on r active Werther ne tend les bras vers Lotte qu en r ponse aux paroles de rupture De m me par contraste avec son immobilit d une demi heure les expressions de mouvements occupent toute la fin du passage Il arpenta la pi ce Goethe sugg re ce mouvement fr n tique par l emploi des particules auf und ab il alla la porte de la chambre Mais la encore ce mouvement semble tre simplement d clench par Pirruption de la servante Enfin une phrase par sa forme scand e met en vidence cette alternance d immobilit et d attitude r active Il attendit supplia attendit Pourtant la fin du passage fait passer Werther d une attitude passive une d termination Cela se lit d abord dans l intensit croissante des verbes qui se rapportent la parole ses paroles suppliantes sont dites voix basse rief mit leiser Stimme ses mots d adieu sont prononc s en s criant und rief Cette gradation appuy e dans la traduction souligne un passage l action dans la description de la s paration C est en particulier le verbe caract risant le d part de Werther il s arracha de ces lieux qui contient cette expression d nergie
409. moins comme une relation simple entre Dieu et l individu que comme un enjeu des relations interindividuelles Comment faut il entendre le presque de presque tous S agit il d opposer cette majorit de la foule aux hypoth tiques hommes honn tes qui vivraient selon les vrais enseignements de la Bible peut tre mais comme on ne parlera pas de ceux l ensuite il vaut sans doute mieux comprendre qu il s agit de faire une distinction entre ces fere omnes qui pourrait on dire travestissent la parole biblique empiriquement et les heologi cit s ensuite qui ajoutent un tour de vis suppl mentaire En effet ils justifient ce que les autres font spontan ment ils inventent une m thode d interpr tation ce dont ils se soucient ordinairement c est de la meilleurs mani re de d former les Lettres sacr es pour en tirer leurs inventions figmenta et leurs th ses et les abriter sous Pautorit divine ce qui caract rise leur d marche c est le manque de scrupules et la t m rit pour interpr ter Ecriture Il faut donc remarquer que la premi re fois que le mot interpr ter survient dans le texte c est pour d signer une mystification raisonn e La suite de ces paragraphes construit sa probl matique autour de quelques notions Les deux premi res sont les oppos s documenta commenta ou figmenta C est donc l id e d enseignement qui intervient donc d embl e pour d signer le contenu de l criture el
410. mon sur la mort Ce mercredi 22 mats 1662 Bossuet entame devant la cour le neuvi me sermon du Car me A mi chemin de la station se profile l chec de la mission de conversion pour laquelle sans doute l a mandat la Compagnie du Saint Sacrement le jeune roi d serte la chapelle du Louvre et avec lui une partie au moins de ceux qui forment la jeune cour amateurs de ballets de f tes et de th atre et peu dispos s a s entendre reprocher ces plaisirs Or le calendrier chr tien a ses imp ratifs le temps de la communion pascale approche et l urgence d une vraie p nitence se fait pressante Choisissant le th me de la mort le pr dicateur r pugne pourtant mobiliser la terreur orchestrer les danses macabres et a faire rougeoyer les flammes de l enfer Il est conscient de la dignit de sa mission fid le au choix d une loquence qui parle au c ur sans c der Poutrance baroque aussi s en tient il Pinstruction chr tienne la rigueur th ologique Le ombean qu il s est permis en ce jour Couvrir devant la cour avec mille pr cautions oratoires n a laiss para tre aucun objet d horreur Il ne contenait qu une le on la mort n est rien seule compte la vie ternelle Mais la le on dans son orthodoxie un peu s che semble ne pas suffire toucher lauditoire C est alors que le je du pr dicateur entre en sc ne Qu est ce donc que ma substance Certes il ne faut pas s y la
411. mpereur Antonin dont la conduite vertueuse constante dict e par la seule vanit donc le souci de son bien propre limitation soi d nonc e chez le temp rant ou le saint s est ramen e tromper les hommes L auteur se tire de ces objections en s en tenant pragmatiquement aux seuls actes des personnages cit s ind pendamment des autres aspects de leurs conduites et de leurs caract res ou de leurs motivations Seuls comptent les r sultats m me ponctuels pour les autres hommes et l vidence massive 386 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink des vertus du divin empereur pa en fait sombrer dans le ridicule et le d risoire l argutie th ologique que l ironie joyeuse de Pauteur feint d adopter pour la minimiser par le terme farcesque de fripon Disqualification des notions de vertu des chr tiens dont il r cup re le lexique le prochain cet article illustre bien la vis e pol mique du Dictionnaire la virtuosit argumentative la bonne information th ologique et lironie d un auteur qui a bien lu Pascal et laisse son lecteur tirer ses conclusions Peut tre celui ci remarquera t il quelques ph nom nes structurels porteurs de sens seul repr sentant de la lettre V et derni re entr e d un dictionnaire alphab tique Particle Vertu se voit doublement mis en valeur et pourquoi une fois parvenu au terme de ouvrage ne pas se retourner pour jouer avec des
412. mportance Le Chinois fait ici office de Persan il serait surpris de nos surplis blancs ou de la coiffure des Quakers L int r t de Locke pour la Chine est bien r el Non seulement il saura se renseigner ici dans le Belum Tartarinm de Martinus Martini mais il correspondra 1 Essai philosophique concernant l entendement humain traduction de P Coste 1729 IL XXXIIL 1 r dition Vrin 1989 p 315 2 Publi en Angleterre en 1655 ou peut tre une dition plus r cente pour des d tails voir les remarques de l dition de Philips Abrams Two tracts on government Cambridge V P 1967 Celui ci note l int r t profond de Locke pour la Chine p 217 223 Litt rature et saveur avec des marchands anglais sur place Et les Adversaria de 1661 largissent la comparaison au Japon et Inde Les Chinois ont agi selon la coutume de leur peuple more gentis Par la leur explosion de col re fournit un bel exemple de la puissance collective ici que peut acqu rir association des id es et des d tours que cette puissance peut parcourir L association peut correspondre deux gen ses distinctes Certaines de nos id es entretiennent une relation naturelle entre elles ainsi celle du soleil et de la chaleur la duret et celle de la pierre C est stabiliser et encha ner correctement ces id es les manipuler sous les cat gories de cause et effet que la raison trouve son office et son exce
413. mposer la puissance et aplomb d une uvre sans doute jug e trop courte Ne nous effrayons cependant pas les notes tiennent la gageure de la bri vet Or les grandes fictions de l ge classique j entends par l les fictions de g nie sont pour la plupart ramass es s ches pointues Elles ne s encombrent pas de d tails elles courent droit au but qu elles ont fix maintenant peu ou prou en regard de la fiction dramatique l impitoyable unit de lieu et de temps En trente et une page n en d plaise la critique rudite Guilleragues donna toute sa puret et son nergie la fiction nourrie tout enti re au sel d une cat gorie anthropologique dont on ne saurait se passer dans une tude classique des passions de l me imagination Dans ces cinq lettres il ne se passe rien Une religieuse abandonn e pur arch type d un imaginaire d poque refusant de renoncer la passion divertissant son c ur et sa raison de la douleur amoureuse et de Vhumiliation de l orgueil livre son imagination une activit industrieuse Pourtant rien ne se passant je maintiendrai que tout est dit sur la logique de la passion Sans avoir recours linconscient pr tendument d sordonn d une Marianne dont on ne conna t presque rien sans investir l explication de notions pist mologiques aussi floues et inad quates que celles de la psychanalyse mais aussi sans se demander pourquoi le texte ne d fend pas
414. n Apprends Nonnotte comme il faut tudier l histoire quand on ose en parler Le texte gagne en respectabilit L attaque contre M zerai et la plupart de nos historiens qui se copient tous les uns les autres para t inspir e seulement par les exigences d une saine critique Ainsi Mezerai conte et le terme est d une propri t remarquable Papparition du prince de la milice c leste rel ve d une activit fabulatrice de la part de Jeanne de la part aussi de son historien Voltaire avait d j relev cette assertion de M zerai dans un article envoy le 30 septembre 1764 la Gazette litt raire la corrigeant par un autre jugement de l historien dans son Abr g chronologique de l histoire de France qui plus prudemment rapportait que Jeanne assurait avoir commission expresse de Dieu Selon une technique prouv e Voltaire intervient la premi re personne dialoguant avec M zerai et avec le prince de la milice c leste dont il remarquera plus loin que Jeanne ne dit mot de ses conversations Il pr voit des objections dans une incise mais dit on et commente ce grand miracle par une exclamation La familiarit du ton contribue cette d mystification Le traitement inflig aux pr dictions ressort du proc d du d menti par les faits comme la terre tremblant de nouveau apr s le bel autodaf de Lisbonne les Anglais que Jeanne devait chasser du royaume y sont encore cinq ans ap
415. n Bordeu affichera donc ce que la rh torique aristot licienne appelle un e hos pour convaincre Porateur se r clame de sa droiture morale j esp re que de votre c t vous n en conclurez rien contre Phonn tet de mes m urs La didascalie Il regarde sa montre vient la rescousse on y retrouve le m decin soucieux de ses malades et de son devoir th rapeutique Cette longue pr caution oratoire d livre galement au niveau r f rentiel le protocole de lecture du R ve de d Alembert si comme le dit ici Bordeu le libertinage de pens e ne conduit pas in vitablement au libertinage des m urs le texte que nous lisons peut se d fendre d appartenir la classe des livres licencieux car Diderot ne savait que trop que pour ses contemporains auxquels il se garda de la faire conna tre quelques proches except s son uvre serait immanquablement catalogu e comme libertine Le s rieux du savant autorise ainsi toutes les explorations m me si elles doivent menacer les biens ances langagi res Bordeu nous avait du reste d j pr venus dans le deuxi me entretien Quand on parle science il faut se servir des mots techniques Nous ne sommes pas dans le registre mondain si hypocrite de la gaze Quand Bordeu affirme Julie Vous n tes pas une b gueule c est autant constat quwinjonction Le m decin refuse ici clairement de s engager dans les ruses de la coq
416. n rale par Ferdinand de Saussure Texte tabli et dit par Simon Bouquet et Rudolf Engler Gallimard 2002 J ai reproduit cette note ci dessus dans la forme ot elle figure p 277 de cet ouvrage forme quasi identique a celle de la p 14 du livre de Starobinski nonobstant quelques variations concernant les capitales et ou italiques et le d terminant des devant rmes 3 paragaphe not de dans l dition Starobinski Puisqu il s agit des brouillons de Saussure en r alit de notes sur un cahier d colier d pos s la Biblioth que Publique et Universitaire de Gen ve je laisse aux saussurologues et aux sp cialistes de la g n tique textuelle le soin de discuter autour de l tablissement du texte sur ces variantes sans doute non insignifiantes Je n explorerai pas davantage ici les avatars de la r ception de cette Note sur le discours dans d autres textes th oriques contemporains 330 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink discours comme un substitut al atoire de parole lui m me pris dans le binarisme in gal du couple qu il forme avec langue D autant que les autres expressions de Saussure rendent cette interpr tation malais e sauf penser que le flou terminologique trahirait une errance pist mologique On peut au contraire soutenir avec les m mes bases que la recherche saussurienne de quelque chose qui serait comme une conceptualisation du disc
417. n Goldzink sorte un avant gout Le temps d un rapide examen visuel tir par la narration r trospective et voil Jacob chang de passant press et ironique en sigisb e plein de sollicitude dont la soudaine inqui tude est un contrepoint comique son manque de r activit initial De m me ses propositions de service tr s l gamment tourn es contrastent avec la tonalit directe presque rustre de son examen mental la forme en est galante agr ment e d une pointe d ironie votre tourdissement peut revenir indiquant la dame que s il n a pas t dupe de son jeu il consent entrer dans la danse Tout en litote je ne refuse pas votre bras et en sous entendu galant vous me paraissez un honn te gar on la r ponse de linconnue sugg re que simultan ment l examen du h ros elle a proc d sa propre valuation et abouti une conclusion convergente D tail vraisemblable conforme la topographie parisienne la rue de la monnaie vers laquelle repartent les deux personnages r pond enfin galement aux espoirs du h ros de tirer profit de cette rondeur par trois fois mentionn e Jou e sur sc ne la rencontre de Jacob et de Mlle Habert se r duirait peu de choses quelques plates politesses chang es suspendues pendant quelques instants par un silence sans doute un jeu de regards Pour le spectateur priv des pens es du h ros le tout constituerait
418. n comprenait sans peine leur impatience voir ce que nous retournions ils n taient pas gates Le second mouvement du passage centr sur le d placement mena ant des vautours ne d veloppe pas une simple notation pittoresque mais introduit un suspens dramatique marqu par un rench rissement du burlesque qui bascule dans une dimension macabre La pr sence insistante de amalgame se fait de nouveau sentir avec les assonances en et en u ainsi que Vallit ration de la dentale t Les deux hommes ne sont plus seulement assimil s aux d chets mais sous le regard des vautours sont transform s en proies mortes La succession narrative semble enregistrer un lien de cause effet comme si lodeur excessivement qualifi e de meurtri re avait fini par les touffer Leur immobilit prometteuse motive en effet le rapprochement de charognards dont la menace para t pressante m me s ils sont tourn s en ridicule Le verbe trotter employ pour d signer leur d placement m inspire d abord gu re d inqui tude tant il se distingue de l approche soudaine qu on pourrait attendre de tels volatiles Le narrateur lui m me montre cependant une certaine ambivalence l gard de leurs cris dont il signale par un oxymore qu ils sont d une douceur c urante C est qu il prouve l gard des vautours une forme de compr hension dangereuse On comprenait sans peine leur impatience voi
419. n propre et se tiendront bien mieux dans cette charit dont je dois faire mon emploi ordinaire s ils se bornent a relater la seule v rit dont je vous prie de remarquer qu elle est double la v rit des occurrences que nous remarquons pour tre propre au divertissement de nos lecteurs et la v rit des tonnants miracles par lesquels aux v nements Dieu renverse le cours ordinaire des choses Que si la faiblesse humaine ne peut se passer d admiration pourquoi ne pas la conduire admirer le vrai la fois dans la diversit de la Cr ation et dans les miracles du Cr ateur et non dans le vraisemblable des actions humaines 449 Litt rature et saveur Monseigneur dit M d Urf avec une sorte de r v rence je le quitte pour cette fois Qui pourrait r sister a tant d loquence appuy e de tant de science Pourrais je cependant plaider coupable et esp rer l indulgence de cet minent tribunal mon roman qui met devant les yeux de ses lecteurs le tableau agr able d une soci t o lamour devra r gner en ma tre ne trouvera t il pas gr ce aux yeux des tenants du Pur Amour M de Belley sourit un petit A tout roman mis ricorde je me suis quelquefois surpris penser que j aimerais tre v que en Forez Sur ce ces deux minents auteurs rejoignirent la compagnie et moi Mme de Chateaumorand et le reste de la promenade se passa en conversations plus galantes Le lendemain assez t t n
420. n singulier redoublement le faune qui est une partie de la nature voire son incarnation virulente baise la nature L allit ration en F faune feuill e fleurs tend fondre dans une m me s rie musicale le faune et les autres expressions de la nature elle le donne comme une m tonymie de celle ci De sorte que l on pourrait dire que amp fils de la nature baise la m re nature Le symbole baise la r alit la partie baise le tout C est l une image du processus po tique tel qu il engage une r bellion de ses l ments internes sous la plume de Rimbaud une synecdoque ou une m tonymie enrag e En lieu et place de la po tique romantique de l inclusion du sujet dans le tout ou du surplomb du sujet par le tout ce texte peut donc tre lu comme un nouvel avatar du ravalement une violence faite la m re la langue la tradition la nature un acte d mancipation et de prise de possession nouvelle Rimbaud substitue sa propre m re autoritaire et trang re une m re fleur docile accueillante et laquelle il fait violence Le po me accomplit une furtive prise de possession Il exprime le d sir comme agressivit ou agression qui f conde Ajoutons que le masculin et le f minin se fondent dans ce po me au moins par l unique rime en euil et en exil du troisi me quatrain Le faune est senti lui m me comme une cr ature hermaphrodite d avant la s paration des sexes une cr ature au sexe double Quan
421. nce par le redoublement de la pr position sur c est de surcro t tout le circuit de la digestion qui se trouve voqu analogue humain de la gigantesque entreprise de d composition des ordures Cette correspondance entre le dehors de la d charge et l int rieur du corps contribue puissamment effacement du journal comme fruit d une l vation propre au travail de Pesprit Reste que ce d but de r cit ne laisse nulle place au drame et se caract rise par des registres h t rog nes transformant la qu te pique en investigation burlesque Les nobles vautours se livrent un nettoyage paradoxal la fois purification de toute chair et transformation en immondices les arr tes sont 69 Litt rature et saveur traitresses ce qui est bien excessif au vu de la modestie de Pobstacle les traces de b tel et les tampons menstruels voquent la couleur rouge d un sang que n a pas vers le moindre combattant en m me temps qu ils orchestrent une rencontre singuli rement d grad e entre cultures orientale et occidentale Le peintre et l crivain ont laiss leur plume et leur pinceau pour tels des boueurs se salir les mains et manier la pelle s ils retiennent leur souffle pour ne pas succomber la pestilence lexpression voque aussi les effets d une motion que ne justifie pas ce d cor piteux leur recherche d une piste semble pour finir les transformer en
422. nceste crime cach par excellence et interdit massif de nos civilisations renvoie galement au tabou de la sexualit Cette provocation s av re d autant plus transgressive qu elle se fait sans les sous entendus et les litotes des romanciers acad miciens Octave Feuillet ou Jules Sandeau elle est au contraire servie par des jurons familiers Parbleu et une blague grivoise qui fait surgir le corps sexu au sein de ce texte th orique en haut comme en bas et peut tre plus en bas qu en haut Le discours machiste la blague de caf mergent dans le manifeste litt raire Toutes ces accusations rehauss es par l utilisation des superlatifs et des indices de la totalisation se font sans restriction et sans pr caution La deuxi me transgression est formelle autant g n rique que critique Le d but de cette nouvelle constitue une subversion par rapport aux formes classiques d rcpit dans la tradition balzacienne descriptive ou 7m medias res ou par rapport la mani re aurevillienne traditionnelle Cette innovation g n rique s accompagne d une remise en cause brutale des pr d cesseurs litt raires Les romanciers libertins du XVIII si cle comme Laclos sont r voqu s par le silence que garde Barbey sur leurs tentatives la litt rature romantique souvent accus e d immoralit est galement ni e les romanciers contemporains de Barbey comme Flaubert ou Les Goncourt au r alisme brutal voqu
423. nd il aurait empli ses deux plateaux ils d borderaient et son travail ne serait pas plus avanc qu au commencement Toutes les philosophies en sont la Elles ont beau se dire Tly a un poids cependant ily a un certain chiffre qu il faut savoir Essayons on largit les balances la corde casse et toujours ainsi toujours Soyez donc plus chr tienne Et r signez vous l ignorance Vous me demandez quels livres lire Lisez Montaigne lisex le lentement pos ment TI vous calmera Et Litt rature et saveur n contez pas les gens qui parlent de son goisme Vous l aimerez vous verrez Mais ne lisez pas comme les enfants lisent pour vous amuser ni comme les ambitieux lisent pour vous instruire Non Lisez pour vivre Faites votre dime une atmosph re intellectuelle qui sera compos e par l manation de tous les grands esprits Gustave Flaubert Correspondance Biblioth que de la Pl iade Gallimard Paris 1980 t2 p 730 732 148 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Marie Sophie Leroyer de Chantepie femme de lettres a n e de plus de vingt ans de Gustave Flaubert entretient partir de 1857 une correspondance suivie avec l auteur de Madame Bovary auquel elle s adresse comme un savant ou un maitre dans la connaissance des passions et des mis res du c ur humain Dans la lettre dont nous tudierons un extrait il r pond Melle de Chantepie qui lui fait part de ses d chirem
424. nde au mouvement constant mais discret olives tomb es coul e de r sine s affalant lentement de chute Il en consigne les imperceptibles transformations d gradations qui tout la fois nient l immobilit et luttent contre une disparition brutale et radicale Au milieu un paragraphe qui montre l preuve du manque exprime des coupures et dit ce qu il en reste une phrase hors de son contexte entendue la vol e par le narrateur vieilli qui la cite tent un temps de lui pr ter un sens Mais le souvenir personnel resurgi Non Terrifiante coupe court la phrase d emprunt et la tentation furtive de substituer une vision romanc e l image absente de la m re Reste un visage maci aux traits ac r s voqu par fragments son nez sa peau la face manque la d pouille de la m re d funte soustraite la vue de l enfant par la censure familiale Le narrateur d s lors semble vou la solitude et un savoir lacunaire dont il a souvent fait Paveu dans le cours du roman Mais cette ignorance ces obstacles n ont pas raison de son imaginaire Et m me ils motivent une fiction qu ils rendent n cessaire une criture vou e la reprise ou presque la correction non l hypoth se sans doute au d tour D rout il prend la voie de la m taphore et projette sa m lancolie en un paysage choisi Comme si rien
425. ndigence miraculeuse C tait a le mutisme absolu la placidit opaque de la nature compl tement indiff rente la grande ville le d sert sous les rues et la chauss e et encerclant ces rues le d sert qui n aftendait que la mort de la ville pour la recouvrir de ses sables ternels Le d sert serait toujours l blanc patient comme un animal attendre que les hommes meurent que les civilisations s teignent et retournent l obscurit Les hommes taient bien braves si c tait a et j tais fier d en faire partie Tout le mal de par le monde n tait donc pas mauvais en soi mais in vitable et b n fique il faisait partie de cette lutte ternelle pour contenir le d sert En regardant au sud en direction des grosses toiles je savais que l bas s tendait le Santa Ana D sert que l bas sous les toiles un homme pareil moi gisait dans une cabane un homme que le d sert avalerait plus t t que mot et ce que je tenais la main c tait son dernier effort l expression de sa lutte contre le silence implacable vers lequel il se sentait pr cipit Assassin ou barman barman on crivain qu importe son sort tait le sort de tous sa fin ma fin et ce soir dans cette cit de fen tres teintes il s en trouvait des millions comme lui et comme moi aussi impossibles diff rencier que des brins d herbe mourante Saisi par ce que Fante nommera plus tard la beaut infiniment douloureuse
426. nds de cette tradition ceux qui en somme instruisent directement la description de Pexp rience esth tique mais il les r inscrit dans un tableau qui les sens sont priv s de celle qu ils auront apr s la r surrection Questions physiques et math matiques Question 46 in Questions inouies Paris Fayard 1985 p 398 1 Essai sur le go t Des plaisirs de la vari t p 846 2 Ibid p 847 255 Litt rature et saveur neutralise les sp culations sur essence du beau pour recentrer Penqu te sur les affections fondamentales suscit es par les produits des beaux arts L ordre conserve alors une importance centrale car il arrache l exp rience du go t au danger du relativisme int gral c est exactement dans le m me sens que Diderot d veloppera son hypoth se des rapports mais l ordre des plaisirs n est saisi qu au plan de l humaine nature sans tre r f r au mod le intelligible du beau essentiel dont parlait le P Andr Bien plus la question n est pas tranch e de savoir si l me peut prouver ses plaisirs propres ind pendamment du corps auquel elle est li e c est dire ind pendamment des sensations Poccasion desquelles elle forge ses id es Plus qu une explication fond e dans la nature des choses PEssai sur le go t a donc charge de produire une classification des rapports et des circonstances qui conditionnent nos plaisirs c est dire un tableau raisonn
427. ne en un singulier paysage comme il est dit juste apr s formule charg e de d signer de mani re redondante la description pr c dente Apr s ce recentrement synth tisant retour la perspective une trou e dans le continu une chapp e vers un lointain Les couleurs sont diff rentes nappe blanche pierres rougeatres Le canal subit lui aussi un processus d esth tisation o peinture et architecture additionnent leurs prestiges nappe encadr par romaines En jouant sur les mots on pourrait dire que le paysage est abondant La focalisation ultime sur le dernier plan met en vidence le point de fuite tout en rassemblant nombre d l ments ant rieurs les collines sont aussi une l vation il y a une masse de maisons les moulins reprennent le caract re bucolique du d but la fusion avec le ciel met le point final harmonie g n rale Cette ville visible compose donc un tableau s duisant Ravissement pour l il attentif et cultiv le paysage est une transfiguration de Paris Paris devient un lieu o les esth tiques classique et romantique se compl tent s harmonisent o Poussin rejoint Delacroix Avec Cependant commence une deuxi me description charg e de prendre en charge le non vu pour le faire sortir du non dit Il faut peindre les choses qui sont derri re les choses r v ler une cit inconnue retrouver une cit perdue Aux l vations
428. ne antiphrase g n ralis e Le persiflage de Mme de Merteuil rappelle la rh torique de l loge paradoxal annonc par Poxymore craignez de r ussir qui suppose une l chet inattendue de la part de Valmont L expression chef d uvre de prudence a pour but de provoquer l ego libertin du destinataire dans la mesure o la prudence renvoie un syst me de valeurs oppos au libertinage Le mode hypoth tique dans la supposition contraire signale une gradation d pr ciative lPhypoth se est irrecevable scandaleuse et pourtant elle para t vraisemblable Derri re l expression chef d uvre de prudence il faut bien lire malgr la circonlocution chef d uvre de sottise D abord utilis contre emploi puis remplac par un pronom adverbial le mot chef d uvre devient litt ralement injurieux La pr t rition je n ai plus rien dire constitue la chute de cette p riode rh torique Elle annonce de fa on contradictoire le parler vrai qui va suivre et le registre th tique de cette Lettre en forme de d monstration On aura not au passage la circularit de cette entr e en mati re vous craignez je crains Les deux verbes n ont pas exactement la m me valeur mais l ironie se cache galement dans cette diff rence de sens La m me circularit se d ploie 209 Litt rature et saveur P chelle de la lettre o l on retrouve au d but comme
429. ne chose pareille HEINRICH Et il a bien raison I ne va pas la m ler une telle histoire LE P RE La il n a pas raison avec l ge on voit plus loin AFRA Comme on fait son lit on se couche c est un proverbe HEINRICH C est vrai mais il arrive qu un proverbe soit d plac LA M RE entrant au p re Bon eh bien Qu en dis tu Nous y voil T a fallu que a en arrive l LE P RE Non Non maman a aurait pu ne pas en arriver la AAFRA Ab et Heinrich que doit il faire maintenant HEINRICH Ce que vais faire Je n ai pas besoin d y r fl chir longtemps je vais voir le bourgmestre et s il me dit laisse tomber je laisse tomber et s il me dit prends l affaire en main alors la je sais ce qu il me reste faire AFRA Heinrich R fl chis bien Tu plonges toute notre famille dans le malheur LE P RE Ha ha Notre faille laissez moi rire I y faudrait quelqu un d autre que monsieur le bourgmestre LA MERE au p re Ca pour faire des grandes phrases tu es toujours l C est pourtant par le bourgmestre que nous avons tout appris Litt rature et saveur HEINRICH donne nerveusernent un coup de poing sur la table Ce nest pas vrai C est une calomnie On n a pas le droit de porter un jugement sur un homme quand on n est pas au courant de l affaire AFRA Tu parles pour toi mais je le connais peut tre mieux que toi et que vous tous et maintenant je peux enco
430. ne se construit pas face la parole apr s avoir t distingu e du langage comme dans le Cours mais se trouve pos e face au discours dans une relation complexe puisque tout en tant autre elle est aussi m me le discours apparaissant comme un mode d existence de la langue celui o elle entre en action Il est vrai que Saussure emploie parfois de mani re synonymique parole et langue discursive Ecrits p 117 Mais on peut pr cis ment en tirer argument pour souligner ce que la pr sentation dichotomique du Cours et les lectures structuralistes ont contribu masquer savoir la finalit fondamentale pourrait on dire unique de la langue d tre la condition de possibilit du discours la langue n est cr e qu en vue du discours non pas au sens o elle en serait le fondement mais plut t le mat riau pour une construction ouverte et en quelque mani re myst rieuse Une chose est de poser dans le Cours la double n cessit d une linguistique de la langue et d une linguistique de la parole pour d velopper la premi re et projeter la seconde autre chose est de sugg rer travers les notations reprises dans les Ecrits le 1 On se reportera pour de plus amples d veloppements aux deux ouvrages que j ai cosign s avec Christian Puech Fondations de la linguistique et Le langage et ses disciplines XIX XX si cles Duculot 1997 et 199
431. nelle en tous les sens du mot On comprend que vers elle comme vers cette m re qu il imagine dans une page du d but du livre sous les traits d une vieille mendiante aillent sans cesse ensemble confondus ses fleurs ses baisers ses crachats Aujourd hui je sais qu la France m attache seul mon amour de la langue francaise mais alors On voudrait ajouter une ultime remarque Cette page et au del d elle le livre entier offre une illustration pr cise de ce qu on nomme aujourd hui avec confusion quelquefois autofiction Car elle ne comporte pas seulement cette part d invention de fiction au sens banal du mot m l e la v rit biographique par quoi on d finit commun ment ce genre Elle s en remet aussi aux mots leur pouvoir elle leur accorde cette initiative sur laquelle Serge Doubrovsky a insist quand il a pour la premi re fois avanc cette notion Fiction d v nements et de faits strictement r els si Pon veut autofiction d avoir confi le langage d une aventure Paventure du langage Rencontres fi s des mots allit rations assonances dissonances 1 Serge Doubrovsky F5 Paris Gallimard collection Folio 2001 p 10 ANDRE GIDE LES FAUX MONNAYEURS Par H di KADDOUR Ecrivain UN PERSONNAGE QUI SE D LIVRE Les Faux monnayeurs commencent in medias res par une s quence imm diatement centr e sur le personnage pris en plein rite de passa
432. nent eurasiatique qui le conduit jusqu en Inde et dont il fait le r cit dans L Usage du monde paru en 1963 Le voyage des deux jeunes hommes a une vidente dimension initiatique mais les kilom tres parcourus ne conduisent vers aucune r v lation Simplement Thierry peint et pour Nicolas il n est pas de voyage sans mise en forme par l criture pas non plus d criture sans formation par le voyage Dans la ville de Quetta au Pakistan un drame survient cependant qui menace ce bel quilibre Alors qu ils se sont absent s de leur chambre le boy du Lourde s Hotel au nom ici bien ironique au moins apparemment jette par inadvertance enveloppe contenant le journal de voyage que r digeait Nicolas Vomir toute la journ e fumer pendant la nuit lire Proust pour retrouver le temps perdu rien n y fait Apr s de vaines recherches les deux amis d cident d attendre un nouveau passage du camion de voirie et de le suivre jusqu la d charge municipale 1 Nicolas Bouvier L Usage du monde 1963 Dessins de Thierry Vernet Paris ditions Payot coll Petite Biblioth que Payot 1992 p 285 Litt rature et saveur Loin de la r volte ou de la plainte qu on aurait pu attendre dans le r cit d un tel pisode l pique chasse au tr sor sur des monceaux de d chets s accompagne de notations burlesques Pour P crivain comme pour l amoureux des lettres la d rision ne r side pas seulement dans une qu te
433. netariet Ordlista So cowboy hat that orange pajama shirt was yellow brown pants all green yellow T shirts be brown shirt short sleeves could olive gray pants dream dark green gray shorts up deep red hat with feather I grey violet pajama pants thought grey violet pajama pants that green scarf he dark grey violet jacket didn t light grey pants have orange pajama pants enough bead bandage time orange red dressinggown He stripted ochre jacket is violet green red slacks always grey green hat 133 Litt rature et saveur overloaded black blindfold with golden necklace work olive gray trench coat be gray green shirt braces has been green pants burning as long as mirror necklace Tve red blouse torn sleeve known light green skirt orange dots him green sweater handbag Catalogue yvind Fahistrim Stockholn Moderna Museet 1979 JOHN FANTE DEMANDE A LA POUSSI RE Par St phane PREZIOSI professeur agr g de Lettres Modernes Contenir le d sert une lecture du d nouement de A oN 1 Demande la poussi re de John Fante Once I asked my father about the gesture of throwing the book into the desert He said It felt like the right thing for Arturo to do It was his way of saying goodbye Propos recueillis aupr s de Dan Fante janvier 2003 L criture ou la vie C est sur cette ligne de faille qu est b ti Pes
434. ns un verger o il devra combattre Les ch teaux d serts assortis d une preuve sont suffisamment r currents dans la litt rature arthurienne mais aussi dans les contes populaires pour que l on puisse se demander si Chr tien ne retravaille pas ici comme il le fait en d autres occasions un motif connu que ces autres textes exposeront de mani re plus brute La foule qui ne parle pas peut alors voquer de mani re att nu e l absence de tout habitant et la travers e de la demeure ici trait e de mani re exp ditive le trajet de pi ce en pi ce tel qu on le trouve dans ces autres textes 93 Litt rature et saveur Autrement dit si l on accepte notre hypoth se le lecteur suivant Yvain et croyant tomber sur une s quence narrative connue tombe sur un roman au sens g n rique du terme mais qui conform ment l esth tique romanesque m di vale se fonde sur la variation plus que sur l invention Certains critiques ont vu dans cette sc ne la d nonciation d un mode de vie seigneurial fond sur lPexploitation Mais Pon ne saurait g n raliser la revendication sociale des ouvri res exceptionnelle tous points de vue Il ne nous semble pas non plus qu il s agisse ici de discr diter l activit de la lecture moins d y voir d j les dangers dont sera victime Don Quichotte En effet ce p re tyrannique semble avoir profit de la coutume institu e dont l abolition devait permettr
435. nt isol e mais signe d une certaine difficult les saisir se trouvent narrativis s et comme dispers s dans un r cit d action l imparfait De nombreuses allusions m tadiscursives inscrivent en outre la litt rature elle m me dans Pespace de la d charge Les corces de melon font penser aux arbres dont on tire le papier leurs fibres voquent la m me mati re ainsi bien sur que les journaux Nul tampon buvard ici mais des tampons menstruels dont le sang a remplac l encre du journal Il n est pas jusqu aux culots d ampoules qui ne puissent eux m mes renvoyer par un jeu la fois homophonique et synonymique la vignette grav e dite cul de lampe situ e la fin des chapitres dans certains ouvrages Le r gne de l amalgame est si bien assur qu il en vient contaminer la syntaxe Il est ainsi difficile de faire le partage entre les groupes nominaux appos s au pronom sujet nous d signant des patties du corps humain et ceux qui d pendent de la pr position sur et qui renvoient divers d chets Les deux hommes la recherche du manuscrit dont l action se trouve rejet e en fin de phrase par deux propositions coordonn es extr mement courtes sont ainsi leur tour non seulement r duits peu de choses mais encore comme assimil s par m tonymie aux d chets qu ils fouillent De la bouche au cul des culots de lampe mis en quivale
436. nt jamais que le squelettique fant me de la nature Enfin pour des raisons m taphysiques Phomme a peu de lumi res la nature est infiniment riche et Dieu peut multiplier les moyens diff rents pour parvenir ses fins C est que Bernardin de Saint Pierre refuse le principe d conomie qui sert de fondement m taphysico m thodologique la science moderne Dieu dans son infinie richesse n a aucune raison de choisir toujours les voies les plus simples les moyens les plus conomiques pour obtenir les effets qu Il poursuit c est Le faire semblable nous et L assujettir la faiblesse de notre raison que de le croire D s lors ce sont les principes les plus g n raux qui risquent d tre les plus garant dans l tude de la nature Quels l ments sont alors notre disposition pour comprendre la nature Un moyen la multiplication des observations Une id e 50 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink directrice tout est finalis en vue du bien en g n ral et du bien de Phomme en particulier Il convient de souligner la distinction entre observation et exp rience La premi re laisse tre la nature quand la deuxi me la bouleverse La premi re est pr te voir les ph nom nes naturels tels qu ils sont alors que la deuxi me est mise en uvre d une th orie d un syst me pr existant Cette distinction est nonc e par M nuret de Chambaud qui commence ainsi Particle OBS
437. nt la tourmenter celle qui d mystifierait les preuves path tiques et les lans imaginatifs empruntant la langue connue mais si douce du c ur et des sentiments Marianne incarne parfaitement ce que la marquise de Merteuil appelle les femmes d lire et qui se disent sentiment dont l imagination exalt e ferait croire que la nature a plac leur 189 Litt rature et saveur sens dans leur t te et qui s abandonnant sans r serve a la fermentation de leurs id es enfantent par elles ces Lettres si douces mais si dangereuses crire Mais chez Marianne cet abandon l imagination et la jouissance de devenir transparente son bourreau victime de son d part d cid demande justement tous les efforts Marianne cherche faire taire la voix de la conscience le jugement de la raison qui rappellent cesse cesse Marianne infortun e de te consumer vainement et de chercher un amant que tu ne verras jamais qui a pass les mers pour te fuir qui est en France au milieu des plaisirs qui ne pense pas un seul moment tes douleurs et qui te dispense de tous ces transports Marianne r pond donc la description de la marquise mais c est paradoxalement en conscience et non par faiblesse Que va donc faire Marianne contre cette raison qui crie la d faite v ritable chronique d une mort annonc e de la passion Comment se d barrasser d un avertissement trop sinc re du jugeme
438. nt qui soutiendrait pourquoi cette pi ce exige la sc ne Ph dre appelle le th tre car elle ne peut se d ployer que dans un espace qui jouera de l indistinction entre le lieu et le corps Le lieu n est g n ralement pas sp cifi dans la pi ce le personnage et le spectateur avec lui est suppos comprendre de quel lieu il s agit Ce peut tre le th tre lui m me ou une localit ext rieure que le r cit permet d imaginer Cependant dans le m me sens Racine donne souvent un autre nom au lieu autre nom qui le d finit plus pr cis ment non dans sa localisation mais dans sa nature Les paisibles lieux dont parle Th ram ne sont nomm s autrement par Hippolyte dans sa r ponse cinq vers plus loin Cet heureux temps nest plus Tout a chang de face Depuis que sur ces bords les Dieux ont envoy La Fille de Minos et de Pasipha 293 Litt rature et saveur Le lieu dont la pr sence est crainte est donc un bord et un bord n est pas un lieu paisible A chaque fois que le mot bord est employ il d signe une cat gorie particuli re du lieu en tant qu il est mena ant Il est le seuil du pire la fronti re de Pirr versible ce avec quoi il rime ais ment la mort J ai demand Th s e aux Peuples de ces bords O l on voit lAch ron se perdre chez les Morts 1 1 Ariane ma S ur De quel amour bless e Vous mourites aux bords o vous frites laiss e I 3 L
439. nt rationnel Le texte pousse la religieuse vers Punique recours qui lui reste si elle d sire de jouir encore de la passion Sans le corps puisque Pautre a quitt le Portugal sans le c ur puisqu elle ne tient pas jusqu au bout la tentation mystique sans la raison qui lui impose d abandonner ses espoirs Marianne n a d autre choix que de puiser son roman et sa volupt dans la facult imaginative Elle ne le prof re que trop clairement Non je ne puis me r soudre juger si injurieusement de vous et je suis trop int ress e vous justifier je ne veux point imaginer que vous m avez oubli e Et pourquoi faire de vains efforts pour ne me plus souvenir de tous les soins que vous avez pris de me t moigner de amour La logique se d ploie avec tant de n cessit et de beaut qu on se trouve bien en mal d en dire quelque chose Le texte chappe ici il s lance au del de nous Marianne sait rationnellement que Pamant l a quitt e et ne l aime plus voire ne l a jamais aim e Mais son int r t c est dire le calcul de la raison contre la passion serait justement d imaginer que la passion exist t toujours La 1 Choderlos de Laclos Les Liaisons dangereuses d Laurent Versini Gallimard coll Biblioth que de la Pl iade 1979 Lettre LXXXI p 170 2 Ibid 190 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink derni re phrase de notre extrait est ce titre superb
440. nte questa Or per l allegrezza or pel dolore costui vuol morire in ogni modo Quelles dr les de gens Tant t par all gresse tant t par douleur celui ci veut mourir toute force 234 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink d agir politique s est d roul e exactement comme pr vue d s lors que Callimaco a sur les conseils de Ligurio abandonn la th se selon laquelle il faudrait jouir du bienfait du temps il beneficio del tempo qu il a agi avec virt s est montr impetuoso et non plus rispettivo l issue tait in luctable du moins au th tre Lucrezia qui est une femme et on remarque ici qu elle agit exactement comme le fait la fortuna celle ci en effet comme c est une femme est amie des jeunes gens parce qu ils sont moins circonspects plus fougueux et mettent plus d audace a la commander accepte d tre l amie de Callimaco Les r pliques finales tissent le lien avec les sc nes venir Callimaco qui d sormais ob it aux ordres de Lucrezia je lui ai promis d tre l et elle nous rejoindra avec sa m re et le docteur se dirige vers l glise Il ne reste donc plus qu faire appara tre la nouvelle Lucrezia apr s lui avoir donn la parole C est ce qui se passera dans la sc ne suivante V 5 o la r action de Nicia lorsqu il d couvre cette nouvelle Lucrezia est tr s semblable celle de C
441. ntre la grandeur pass e et la petitesse des batailles contemporaines Mais le deuxi me verbe au pr sent Il ne reste plus que ces traces magnifiques etc se situe moins nettement dans l orbite des pens es du personnage rien n interdit de le rapporter aussi la voix du narrateur Et il faut d s lors toute 26 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink la nettet de l incise pense Mercadier pour que la sentence finale soit assign e au personnage Que s agit il de faire comprendre par ces effets de surimpression entre deux voix Ceci qui est simple et d ailleurs connu Aragon et Mercadier ont une sensibilit commune et c est donc une partie de lui m me qu Aragon blame en Mercadier Sensibilit po tico m lancolique la Barr s avec son go t marqu pour Part et la mort la beaut d funte d ailleurs c est exactement sur tels de ses titres de 1891 Le Jardin de B r nice troisi me volet du Cu te du moi ou de 1922 Un jardin sur l Oronte que se construit la m taphore du jardin de sa propre sensibilit dans une phrase o on l a vu les rythmes importent pastiche d une prose po tique la Barr s Le nom des Scaliger forme transition vers des r veries d h ro sme viril Jules C sar Scaliger fut au d but du XVI si cle un condottiere de l p e avant de se faire gladiateur des lettres selon la formule de D sir Nisard Pierr
442. nutilement voudrions nous y suppl er par Lettres on crit des volumes et l on explique mal ce qu un quart d heure de conversation suffit pour bien entendre sur la forme quand Valmont avoue la marquise le soin qu il a mis sa derni re lettre destin e Mme de Tourvel j ai tach d y r pandre ce d sordre qui peut seul peindre le sentiment J ai enfin d raisonn le plus qu il m a t possible car sans d raisonnement point de tendresse et c est je crois pour cette raison que les femmes nous sont si sup rieures dans les Lettres damour La critique du roman dans la lettre 33 op re ainsi une mise jour du fonctionnement romanesque de la repr sentation du d sir et de la passion Mais on ne comprendrait pas la port e de cette entreprise si Pon ne percevait qu elle est express ment associ e la recherche d une nouveau discours du d sir et si l on veut d un nouveau romanesque C est la le on de Rousseau C est peut tre aussi une influence du drame bourgeois mesure que l on avance dans le si cle le th tre sera de plus en plus consid r comme le lieu o la contagion du sentiment est la plus imm diate et la plus efficace Malgr l ironie de Valmont l gard des tableaux du drame bourgeois comme v hicule d un discours moralisateur on peut relire le pastiche du tableau dramatique la lettre 21 Laclos 1 Lettre 42 d cit e p 121 et lettre
443. objet de communication l expression de la pens e rationnelle et l expression des sentiments Le c ur et Pesprit C est donc aussi cette figure de cart que la lettre interroge Ecart qu il ne faut pas comprendre comme un d faut de rationalit parce que la langue n est pas seulement le lieu des malentendus CONCLUSION Le roman libertin constitue une forme de surench re au regard de la double critique qui p se ordinairement sur le genre romanesque Pour les moralistes bourrus la fiction serait l art du mensonge un divertissement qui loigne le lecteur de ses premiers devoirs en l abandonnant aux s ductions de imaginaire Le roman un registre des mauvaises m urs du si cle un espace o le conflit du d sir et de la loi ne se r soudrait qu au prix de nombreux manquements la morale 1 On pourrait recenser tous les auteurs l ge classique du chevalier de M r Rousseau qui ont comme le dit Vaumori re nonc le pr cepte d crire comme on parle Lettres sur toutes sortes de sujets 1 re d en 1680 r d en 1714 Id al esth tique classique que Voltaire synth tisera ainsi Quelqu un a dit autrefois qu il faut crire comme on parle le sens de cette loi est qu on crive naturellement Dictionnaire philosophique article Style 2 Dans le roman de l ge classique le passionnel se d finit par contraste avec le rationnel le raisonnable le logique Le
444. oi Sedan Jean Jannon 1620 p 30 1 Le texte est reproduit dans l anthologie d A M Schmidt L Amour Noir po mes baroques avec une pr sentation de Jacques Roubaud Slatkine Gen ve 1982 1959 p 111 Litt rature et saveur On est en droit de s interroger sur les raisons qui ont pu amener Albert Marie Schmidt int grer son anthologie de po mes baroques un tel sonnet la simplicit de prime abord un peu fade Il n y a pas l un de ces diamants les plus tincelants et les plus sombres de cette version baroque de l eros m lancolique que Jacques Roubaud admire dans le floril ge de Schmidt Le po me n a pour lui ni la notori t de son auteur Salomon Certon n en 1550 est un obscur ronsardisant dont l uvre r dig e dans le dernier tiers du XVIS si cle sera publi e en 1620 ni la grandiloquence path tique du versant noir du baroque ni exactement la subtile discr tion parfois teint e d humour que Pon se pla t trouver chez des crivains comme Saint Amant ou Th ophile L attrait d A M Schmidt pour l uvre de Salomon Certon est sans doute d abord celui d un collectionneur amateur de jeux formels c est comme ami de Queneau et comme un des premiers membres de l Ouvroir de Litt rature Potentielle que Schmidt s int resse Certon et y reconna t un plagiaire par anticipation de POulipo Bien avant Perec Certon est en effet un des premiers auteurs fran ais le
445. oir gratignant avec ses ongles le velours de sa loge Elle semplissait le c ur de ces lamentations m lodieuses qui se trainaient l accompagnement des contrebasses comme des cris de naufrag s dans le tumulte d une temp te Elle reconnaissait tous les enivrements et toutes les angoisses dont elle avait manqu mourir La voix de la chanteuse ne lui semblait tre que le retentissement de sa conscience et cette illusion qui la charmait quelque chose de sa vie Mais personne sur la terre ne l avait aim e d un pareil amour I ne pleurait pas comme Edgar le dernier soir au clair de lune lorsqu ils se disaient demain demain La salle craquait sous les bravos on recommence la strette enti re les amoureux parlaient des fleurs de leur tombe de serments d exil de fatalit desp rances et quand ils pouss rent l adieu final Emma jeta un cri aigu qui se confondit avec la vibration des derniers accords Gustave Flaubert Madame Bovaty 1857 Paris Librairie G n rale Fran aise Le Livre de Poche 1983 p 257 258 Litt rature et saveur Madame Bovary a l op ra ou comment devenir une spectatrice distanci e Emma Bovary est convalescente apr s une grave maladie dont son mati ignore les raisons la jeune femme a t abandonn e par son amant Rodolphe Pour la divertir Charles Pemm ne a Rouen assister une repr sentation de Lucie de Lamermoor Mais Vop ra de Donizetti qui met en musique les amours inter
446. oir du pasteur d mes est de les en garder avec autant de vigilance que les bergers r els et de fantaisie prot gent leur troupeau du loup Mme de Chateaumorand ce point me regarda comme pour dire 6 l ennuyeux pr cheur et s carta doucement des deux devisants pour aller se joindre au reste de la compagnie Il aurait fallu que je la suive mais j avais trop d int r t la conversation de ces deux savants en lettres pour ne pas me hasarder a lui faire attendre un peu ses l vriers Tant de s v rit est elle n cessaire Monseigneur et nul roman ne trouvera t il grace a vos yeux Je suis certain que vous n avez pas manqu de remarquer que ceux qui arrivent en Forez ont bien quelque histoire secr te qui les tourmente et que ce n est qu une 448 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink fois qu ils ont pu se confier l amiti des bergers et berg res qu ils peuvent faire de la paix du Forez leur demeure Et qu en retour la paix du Forez ne d pend que du secret de la fontaine d Amour lequel tant r solu signifiera que cette paix si d sirable et qui h las ne r gnera que dans ma contr e imaginaire ne s tablit qu une fois faite la r v lation de tous les secrets Peut tre pourrait on sans offenser la religion hasarder que ma berg re est l oreille la fente d un ais comme le pr tre l oreille la grille du confessionnal la curiosit de mes berg res ne vise au fond
447. olent silence du jardin 121 ou au pied du grand pin parasol dont le tronc pench par le vent presque couch sa base se laisse scruter d couvert larbre imparfaitement recouvert non pas exactement d corce mais d paisses cailles encastr es l une dans l autre exprime un suc subtile Entre deux d entre elles sourdait en permanence une coul e de r sine qui formait d abord une grosse bulle peu pr s de la taille d une groseille d un jaune d or tincelant au soleil et dont la base se couvrait d une sorte de taie avant de finir par s couler en une longue tra n e de larmes grises peu peu blanchatre comme une fiente d oiseau 140 Si les minuscules manations de l t finissant rest es inaper ues Personne ne ramassait les olives tomb es personne non plus ne faisait attention aux figues parce qu inutilisables corrompues cras es trop m res la peau ratatin e et rid e dont la base se couvrait d une sorte de taie d jet es par le temps taches noires chair clat e comme le pin par le vent font l objet de l vocation finale du Tramway c est qu elles ne sont pas perdues toute valeur ni indiff rentes tous les regards Infimes elles plaisent aux petits les enfants et les fourmis sont friands de ces fruits qui s abiment au point de se les disputer Charnus ils ve
448. omme a faits et qui n ont point fait l homme Des plus fermes tats ce fantasque soutien Va va T rentius qui les craint ne craint rien 100 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink On est frapp cependant dans ce cas pr cis par la vitesse allusive des enchainements par la quasi absence de transition par la puissance suggestive des sous entendus et des sauts logiques Comme si ces l ments de la critique libertine taient devenus tellement topiques qu il suffisait d en juxtaposer quelques expressions pour en figurer implicitement l ensemble Comme si pour camper la posture libertine face l posture th ologico politique il suffisait d exhiber quelques pointes brillantes de Piceberg d un discours clandestin le recours l criture pointue et ses saillies discontinues tant tout au long de la pi ce le mode d affirmation privil gi du libertinage de S janus Le spectateur de 1653 ne pouvait qu tre sensible la rapidit de la concat nation des th matiques sulfureuses ici esquiss es Effet de rapidit produit par une s rie de glissements intempestifs entre 1 Pesquisse d un d bat sur les formes de gouvernement l argumentation topique de T rentius n est pas sans rapport avec celle que Cyrano reproduit dans la lettre Contre les Frondeurs 2 la crainte de la punition divine imm diatement tourn e en d rision le foudroiement tant ramen a un ph nom ne cl
449. on fortuite et pens e comme un recueil princier de lecteur p dagogue 3 L auteur d finit lui m me son ouvrage comme un commentaire laborieux de textes et son travail comme une constante paraphrase et non pas en accord avec la tradition comme un ouvrage de recherche appartenant au genre s rieux Contrairement au titre cette d finition humblement arrogante n aurait en apparence pas de valeur programmatique forte Elle semble se poser en retrait par rapport la coordination et ainsi par rapport au titre Cette coordination o l on va redessiner le champ th tral pour donner toute sa place au genre interm diaire ou scolaire ou honn te et sympathique Mais commentaire dans la langue classique d signe aussi toute intervention critique sur un texte Le terme pourrait donc avoir trois niveaux de sens 1 exercice scolaire explication de texte 2 paraphrase n cessaire analyse au fil de l uvre 3 discours profond ment s rieux glose encore d finir et imposer mais travail en apparence pas assez fondamental pour constituer une reconnaissance universitaire Il y a par cons quent une tension Pouverture de cet ouvrage entre sa d finition g n rique d une part son titre son parcours et son commentaire venir d autre part Cette tension sourde fait signe souterrainement vers les explications de texte pr alablement pratiqu es avec le public qui tenteront de se d marquer spe
450. on le cours des choses n en aurait pas t chang La reformulation de 1662 la pi ce n en aurait pas t moins jou en effa ant la modalisation initiale moins bien jou radicalise encore le constat ce n est pas le talent qui est mis en cause dans sa singularit essentielle c est l tre m me C est donc une chute particuli rement violente que la circonstantielle postopos e quand je serais demeur derri re le th tre impose des auditeurs qui se per oivent comme les acteurs les plus importants sur le th tre du monde L enjeu du r emploi par Bossuet d un texte mat rialiste semble maintenant plus clair Quand il s adresse aux chr tiens ti des de la cour pour les presser de se convertir la v ritable foi il sait qu il ne s avance pas sur un terrain vierge de toute influence Il y a dans la culture contemporaine une autre voie que la conversion chr tienne pour chapper la crainte de la mort c est Padh sion raisonnable un picurisme renouvel qui invite jouir en paix d une existence d livr e de la transcendance divine et de la culpabilit Dans la France des ann es 1660 et tout particuli rement dans lentourage du jeune Louis XIV cette option pouvait prendre la forme de l ath isme provocateur ou d un d isme feutr voire d une pratique catholique de fa ade Bossuet ne se leurre pas quand il redoute les progr s du libertinage dans les esprits Aussi m ne t il sa
451. on 4 ceux qui ont peu fr quent R v roni Saint Cyr 1767 1829 La sc ne se passe en Pologne c est a dire partout La belle et malheureuse forc ment puisqu elle est Polonaise Pauliska est chass e de son chateau par des Russes d vastateurs Oblig e d errer dans cette Europe hant e par la R volution fran aise elle tombe sous la coupe de faux monnayeurs internationaux install s a Bude dans les caves a demi creus es sous le Danube d un ancien couvent de Cordeliers Le souterrain c est la forme endoscopique de la cage C est PEnfer moins sa profonde justice Ces conspirateurs pr tendent l asservir leurs d lassements Le premier la gagner par tirage au sort est le jeune Durand honn te homme forc comme elle de travailler sous la coupe de Talbot linfime forc ment puisqu il est Anglais Surpris durant leur vasion l un est emmen par ses anciens complices et la narratrice contrainte travailler la presse Talbot projette d branler la confiance en la R volution en diffusant des courriers mensongers et de noyer la France sous un d luge de faux assignats pour entra ner la nouvelle monnaie r volutionnaire dans une d b cle inflationniste Limprimene note Michel Delon que les Lumi res saluatent comme l invention hb ratrice par excellence capable de faire passer l humanit des cydes de l histoire r p titive a la lin arit progressive de l accumulation es
452. on cin tique inqui tante probl matique paradoxale avec cette image de la coul e lourde d une hantise de contamination de d bordement qui rejoint analogiquement image initiale premier paragraphe de l largi ssement du d sert Est ainsi constitu un au del du monde o la diff rence entre le min ral et le liquide s annule comme s y annule la couleur cette autre qualit primordiale de la r alit C est donc seulement la faveur d une illusion que l homme comme ici les caravaniers peut penser avoir une place en cette contr e ils se r jouissent de la fra cheur du cr puscule quand d sormais elle n est plus qu inutile sursis un sursis comment par l image ironique elle ne r introduit Phumain que pour signifier sa destruction de ces nuits qui bient t passeront sur eux comme battements de paupi re et qui ouvriront sur Phorreur de la marche la mort entrav e et cependant trop rapide comme le sugg re la tension dans le texte entre l enlisement entropique dans Pespace et lacc l ration temporelle C est encore Vironie qui conduit le narrateur souligner l h t rog n it de l Homme et de la Cr ation lorsqu il dit dans une antiphrase que pour les chameliers tomb s dans le pi ge et ainsi condamn s mort justice est faite On retrouve l encore un opos de la litt rature d sertique dans le d sert l homme bascule instantan ment bri
453. onn dans un faux dialogue Car on ne pr te pas au lecteur un r le on ne lui souffle pas les r ponses on le met dans l embarras de ne pas trouver le mot qu il faudrait et dont il sait bien que Le Prince p dagogue le prononcera avant lui Faux dialogue des Salons longuement pratiqu par l un des Ma tres du Prince Diderot bien plus que Voltaire on Paura compris Tout doit donc tre engag dans les premiers mots de l explication par l vidence du texte en action par la notation paraphrastique des l ments qui engagent le n ud du rapport des personnages et l essence du r le titre Si bien que le critique se trouve en position de d bordement en tat de produire le jaillissement des formules Alceste est un Autre nigmatique qui requiert l attention et a toute l gitimit pour poser des questions toutes simples venues du texte et qui s adressent au lecteur au critique au metteur en sc ne et aux com diens L interpr tation tant affaire priv e dans son d tail elle est n anmoins soumise l laboration d une coh rence parfaitement d cidable les tenants de nd cidabilit exasp rent Le Prince p dagogue qui ne cesse de rompre des lances sur leur cu Alceste doit donc avoir son poids ses passions son action proprement dite spatiale textuelle et dramaturgique situ e dans un rapport Pautre aux autres et au spectacle dans un temps donn Bien qu il mait encore rien dit il
454. ons priv es plut t que la reconnaissance publique pour une religion la reconnaissance publique pour personne et le si ge de la cit sera lev D un texte l autre la querelle porte sur les indiff rents res adiaphoras ces choses qui sont elles m mes ni bonnes ni mauvaises mais auxquelles les hommes s attachent souvent pour de mauvaises raisons faut il prier Dieu debout ou genoux et habill de noir ou de blanc peut on tre couvert l int rieur d un lieu de culte Ici le long d tour par l exotisme capillaire permet de reprendre pied sur le territoire du bon sens Car y a t il plus de raison de s entretuer pour une natte de cheveux que pour convoquer Swift le petit ou le gros bout d un uf pour le petit ou le gros bout de l uf qui pour un surplis blanc ou un habit noir Porter un v tement long ou court la ville ou au culte tre assis ou debout l int rieur d une maison ou d une glise sont en soi des choses indiff rentes tout ce qui concerne le temps le lieu apparence ou la posture du corps se distingue des tats int rieurs 222 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink du sujet Au temple cela rel ve du culte ext rieur et pourra ainsi manifester par accord sur certaines conventions nos dispositions envers Dieu A c t des choses r ellement indiff rentes Locke place les dogmes sp culatifs la Trinit la Transubstantation qui n ont pa
455. ont coutume de se coucher avec le soleil et il y a longtemps a cette heure qu elle sommeille avec toutes ses compagnes Au demeurant les romans sont pour M de Belley de peu d int r t M de Belley se r cria qu en effet il avait eu l occasion de s lever contre ces petits ouvrages vains et creux qui courent l Europe mais qu rebours il reconnaissait le m rite des ouvrages de bon style comme l taient ceux de M d Urf et que si P v que devait remontrer l auteur que l entretien ordinaire de ses bergers et berg res ne quittait gu re le sujet de Pamour le simple particulier qu il tait notre table avait nagu re montr trop d attachement aux livres pour ne pas en excuser la lecture Lorsque j avais votre ge et votre occupation dit il se tournant vers le bout de table o j tais je confesse que jen faisais mon entretien ordinaire avec mon cher Montaigne Mais je quittai la fr quentation de Pun et de l autre sans grand peine lorsque je promis Dieu d avancer en ce si cle la cause de son amour dont Pamour humain n est que l image et pr figuration Sur un murmure d approbation qui se fit autour de la table M de Belley reprit Aussi ne tiens je point la lecture de romans o est d peint Pamour comme de soi r pr hensible et ne suis pas de Pavis de cette Acad mie de Puristes dont les arc boutans font professions de reprendre tout le monde ne faisant presque rien de
456. orps r ifi de Milady le r cit se referme sur le miroir devenu sinistre de sa propre dynamique pass e C est pourquoi le d nouement accepte une coda grin ante Le roman de cape et d p e contrairement au m lodrame n est pas tendu vers le path tique pour le path tique les larmes ne sont qu un de ses outils le sublime n est pas son registre ultime ni l dification du lecteur son objectif principal C est pourquoi en attendant l pilogue qui posera les jalons de la relance du cycle romanesque avec Vingt Ans apr s le r cit s attarde indiquer comment doit tre lue la sc ne de l ex cution de Milady Sur le mode de lPhumour volontiers noir du roman populaire romantique le narrateur figure l erreur qui consisterait ne pas prendre en compte le d crochage de tonalit de la fin du roman Deux univers romanesques se t lescopent celui dynamique et bonhomme du roman d aventures dont la familiarit est soulign e leur visite accoutum e et l univers du roman noir qu a introduit la solennit du jugement capital Le d calage est complet entre le registre lexical l ger auquel emprunte le capitaine des mousquetaires pour d crire leur derni re aventure amus s excursion et le caract re sinistre des actions que nous avons lues L ironie noire d Athos indique bien qu il faut lire 125 Litt rature et saveur ce d nouement comme une aventure sinistre et un noir diverti
457. osent le probl me de savoir de quelle op ration rel ve l appr hension de ces rapports de grandeur qui bien s r chappent l intuition mais qui semblent pourtant la d terminer Malebranche dispose avec la doctrine des jugements naturels d un instrument efficace pour r soudre cette difficult et le syntagme se retrouve dans l Essai du P Andr le beau naturel se d voile un jugement naturel conforme la raison 1 Op cit 14 p 42 2 Qu il me soit permis de renvoyer mon livre Raison et perception Fonder l harmonie au XVIe si cle Paris Vrin coll Mathesis o j ai t ch de montrer que ce probl me constitue Pun des principaux points de discussion de Phypoth se diderotienne sur le beau comme perception des rapports On pourrait d ailleurs suivre l histoire de ce probl me au moins jusqu Kant propos de la musique voir la fin du 51 de la Critique de la facult de juger 3 Essai sur le bean p 28 247 Litt rature et saveur Mais chez cet auteur le beau naturel n est pas la simple imitation des relations d ordre il se distingue par la vari t dont la gamme des couleurs est au fond m tonymique C est par leur clat qu il a trouv le moyen d introduire dans l univers un nouveau genre de beaut qui nous offre partout un spectacle si brillant et si diversifi On sait que la vari t jouera un grand r le dans PEssai sur le gout
458. ourdement sur l ensemble de la repr sentation sur la m moire des personnages sur leurs motivations sur leurs jugements et leurs valeurs la catastrophe annonc e par Nerva Tib re ne sera que le dernier avatar de cette importance d vorante de la mort Dramatiquement dramaturgiquement m me dans la mise en sc ne de ses feintes successives Agrippine jouit par avance de la mort venir de ses interlocuteurs elle ne vit plus que pour accomplir le sc nario d un change mort contre morts contre celle de Germanicus celles de Tib re et de S janus d t elle mourir elle m me pour parvenir ses fins Et S janus quelles que soient ses d clarations mat rialistes est pris dans cet engrenage de la passion destructrice lui m me mettra en sc ne sa propre mort sur un mode h ro que qui donnera Agrippine sa seule et ultime satisfaction v 1580 1584 Comme si en derni re instance 108 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink c tait par sa mort de g n reux et par l image qu il en laisse que S janus d voilait son ultime valeur L thique de la g n rosit est tr s pr sente de bout en bout mais c est en ces derni res sc nes de d fi la mort qu elle sintensifie Faire d un ath e d fiant ouvertement le Ciel et l id e m me d immortalit de Tame un g n reux suscitant Padmiration de ses pires ennemis tel est le geste sans doute le p
459. ours traverse ces fragments d criture et lire les formulations successives et a priori d concertantes eu gard a la vulgate comme des approximations au sens d approches de ce qui serait penser dans le continu de la th orie qui n est pas seulement linach vement empirique de P uvre N est ce pas Saussure lui m me qui ne cesse de nous alerter sur la difficult qu il y a 4 trouver les mots justes pour dire la th orie ce dont Starobinski s est avis en commen ant son livre sur les anagrammes 1971 p 13 par cette autre note de Saussure Quand il s agit de linguistique cela est augment pour moi du fait que toute th orie claire plus elle est claire est inexprimable en linguistique parce que je mets en fait qu il n existe pas un seul terme quelconque dans cette science qui ait jamais repos sur une id e claire et qu ainsi entre le commencement et la fin d une phrase on est cinq ou six fois tent de refaire texte interrompu Parmi les multiples enjeux que porte ce regard de Saussure vers le discours il faut distinguer par commodit m thodologique les probl mes disciplinaires internes aux sciences du langage et les questions aff rentes la relation entre le structuralisme linguistique et le structuralisme litt raire m me si le point de vue pist mologique devrait en r alit embrasser les deux ordres de pr occupations C est que la r duction structuraliste de la t
460. ours d voquer la magnificence de salles travers es La sale constitue g n ralement aboutissement de ce trajet of ici le chevalier ne s y arr te pas La proposition relative du troisi me vers voque une foule silencieuse presque absente La demeure est travers e sans que s y attarde le chevalier ou le narrateur lequel use de la m me formule conome que dans le premier vers tant que 91 Litt rature et saveur Et l on arrive dans un verger Le narrateur se jouant ici des attentes du lecteur s autorise une digression burlesque sur le sort des chevaux L ironie est perceptible dans linsistance du texte qui consacre huit vers ceux ci dans l emprunt au registre juridique de l expression tenir plait et dans le fait que le narrateur feint sachi s de r pondre aux inqui tudes du lecteur lequel on le suppose attend plut t qu on lui d crive une sc ne d amour ou on le verra de combat les deux tant li s et constituant justement l essence du genre romanesque tel qu il na t alors La formule hyperbolique qui noie les chevaux dans la liti re pr figure l exc s de courtoisie dont feront preuve gard d Y vain les chatelains Cette digression ironique attise donc la curiosit du lecteur principe la encore fondateur de l esth tique romanesque et le texte reprend l o il nous avait laiss s dans le verger tout en retardant toujours l info
461. ous nous rassemblames en la cour pour la conduite de M de Belley qui allait rejoindre son v ch Son train pouvait pr ter rire n tant que de deux mules sur Pune desquelles M de Belley montrait une moiti de jambe hors de sa robe et l autre mont e par son secr taire dont la coiffe tait h riss e de plumes qu il avait pass es dans ses cheveux Apr s toutes les politesses du d part alors que M de Belley passait la poterne Mme de Chateaumorand dit mi voix sans s adresser nul en particulier mais assez haut pour que tous lentendissent Voici un bien singulier v que En effet Madame mais la France et l glise s en trouvent mieux que de tous les pr lats qui assi gent le Louvre Ce n est pas ce qui me le fait dire repartit Mme de Chateaumorand Savez vous que votre complice en litt rature n a qu un seul cale on que son domestique fut hier tard laver cette fontaine Comment l avez vous commen a M d Urf qui s arr ta soudain consid rant Mme de Chateaumorand un large rire commen ant de para tre sur son visage Vous n avez point os dit il finalement Si fait Monsieur je le fis loger en la chambre d Argus Le rire qui les prit dura jusqu ce que M de Belley e t disparu Comme elle pouvait lire sur mon visage mon ignorance Mme de Chateaumorand me prit un peu part Jurez moi dit elle que vous garderez secret ce que je vais vou
462. ous r serve l avenir apr s la mort Y voit on appara tre quelque image horrible quelque sujet de deuil N estc pas un tat plus paisible que n importe quel sommeil Surprenante r f rence pour un pr dicateur chr tien que le po te picurien embl me de la pens e mat rialiste au XVII si cle que Moli re apr s d autres s est appliqu traduire D autant que ce qui est en jeu dans ce passage du De rerum natura est le c ur 1 De rerum natura L IL v 962 975 trad A Ernout Les Belles Lettres 1975 4 tirage 60 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink m me du syst me mat rialiste d Epicure si la Nature prend la parole au livre HI c est pour affirmer le principe mat riel de l existence de tous les tres et ses corollaires l autonomie et l ternit de la mati re Or dans son r emploi Bossuet n att nue en rien le contenu du message il n intervient que sur la forme dans le souci semble t il encore d loigner la rh torique Effa ant Paspect formel de la prosopop e a nature est sujet grammatical mais c est un nom commun il n en retient que les verbes d claratifs Toutefois la locution verbale nous fait signifier qui redouble le verbe simple vous d clare relie implicitement la repr sentation figur e l exp rience v cue quels peuvent tre en effet ces signes par lesquels la nature rappelle aux hommes ses exigences sinon ceux du vieillisse
463. ousculer 27 Et l on voit qu elle se laisse vaincre par ces hommes l plut t que par ceux qui proc dent avec froideur et c est pourquoi toujours comme c est une femme elle est l amie des jeunes gens parce qu ils sont moins circonspects plus fougueux et mettent plus d audace la commander 235 Litt rature et saveur donc juste titre mais sans conna tre les vrais attendus de cette renaissance que Nicia incite Lucrezia entrer dans l glise cat lui dit il aujourd hui c est comme si tu renaissais Ce qui se joue dans cette nouvelle naissance c est de fait le passage d une nature une autre en fonction de la qualit des temps Il y a donc dans cette sc ne une fa on de jouer avec la politique avec le langage de la politique avec les th ses avanc es par Machiavel dans Le Prince ou les Discours ce jeu avec la politique que l on pourrait ais ment mettre en vidence dans bien d autres passages de La Mandragore est un ingr dient du comique de cette pi ce faite pour faire rire comme le rappelle le prologue L auteur n est pas tr s fameux mais si vous ne riez pas il veut bien vous payer boire Toujours dans le prologue Machiavel explique aux spectateurs qu il crit pour rendre son triste temps plus doux en riant et en faisant rire La r ussite sur sc ne des m thodes pr conis es par Ligurio conseiller de Callimaco ne laisse
464. par le titre n est pas rempli c est qu il y a eu d viation du projet ou effet de leurre ou construction tortueuse ou toute autre hypoth se qu on voudra Mais le fait demeure qu on ne saurait mettre la chose au jour sans d abord tirer au clair la question de la coordination et son effet positif ou d ceptif sur la r ception Manquer la coordination comme manquer le De inaugural c est manquer le projet refuser de se faire l ve lecteur de bonne foi autrement dit ne pas accepter d entr e de jeu et sans m me le savoir le pacte critique qui est au c ur de l exercice d explication Et qui consiste proposer au lecteur des nonc s avec lesquels au travers des coordinations et des juxtapositions il put sympathiser par opposition ceux des universitaires traditionnels Ce qui nous conduit la construction de l ouvrage proprement parler sa composition 2 La composition d signe videmment un essai qui n appartient aucun des deux genres canoniques puisqu il passe g n ralement pour un entra nement scolaire Elle ne peut 408 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink s inscrire pour un lecteur universitaire averti on s effraiera l id e qu il en vaudrait deux que dans le sillage de l preuve dite de concours De Chair et d ombre ne saurait s accorder avec la formule imm moriale de la th se classique ni de l essai d sinvolte Il se donne avec obstinati
465. par un trou qu un trou elle m me dans le continuum du roman Plut t que d coup e par les bords de Porifice objectif elle se d tache comme un morceau d une mati re autre corps tranger au narratif vis vis duquel son destin est de s affranchir ici sous forme de opos Ce dispositif d encadrement par ailleurs proc d r current chez Zola avait d j t utilis un peu plus haut dans Germinal dans une sc ne qui pr pare et oriente celle de la grange On y voit au d but de la gr ve C cile Gr goire et son promis l ing nieur Paul N grel pier par le trou de serrure les ouvriers venus en d l gation pr senter leurs requ tes 1 E Zola Germinal op cit p 1316 391 Litt rature et saveur Tks touffaient des rires ils parlaient tr s bas les voyez vous oul J en vois un gros avec deux autres petits derri re Hein Ils ont des figures abominables Mais non ils sont tres gentils Il s agit de la r plique sur le mode l ger de la sc ne de la grange Les ouvriers offrent un spectacle au bourgeois ils sont soumis une lecture binaire abominables gentils la fois morale et esth tique Devant la grange le d fil des ouvriers sera explicitement rattach la tradition rh torique de la belle horreur au quels visages atroces balbuti par Mme Hennebeau r pondra le oh superbe de Lucie et Jeanne remu es dans leur gout d artiste par
466. pas port leur main sacril ge3 Mais l ambition et le crime ont eu finalement tant de puissance qu on fait consister la religion non pas tant dans l ob issance aux enseignements de l Esprit saint que dans la d fense d inventions humaines bien plus que la religion est plac e non dans la charit mais dans la diffusion des discordes parmi les hommes et dans la propagation de la haine la plus insens e masqu e sous le nom fallacieux de z le divin et de ferveur ardente A ces maux vint s ajoutert la superstition qui enseigne aux hommes m priser la nature et la raison et n admirer et ne v n rer que ce qui les contredit Litt rature et saveur Lune et l autre 1 aussi n est il point tonnant que des hommes afin d admirer et de v n rer davantage l Ecriture s efforcent de l expliquer de telle sorte qu elle paraisse contredire absolument la nature et la raison c est pourquoi ils r vent que les plus profonds myst res se cachent dans les Lettres sacr es ils s puisent scruter ces absurdit s en n gligeant le reste qui est utile tout ce qu ils forgent ainsi dans leur d lire ils Vimputent enti rement l Esprit saint et s efforcent de le d fendre de toute la force et de toute la vigueur de leurs affects5 Car les hommes sont ainsi faits ce qu ils con oivent par l entendement pur ils le d fendent par la raison et l entendement seul et au contraire les opinions qui viennent des affects de leur dime c est par eux aus
467. pelle le temps jeune barbare primitif de Phumanit Il est aussi une figure grimacante asociale lib ratrice de l ordre impos Dionysos enseigne aux hommes les arts qui naissent du d lire Que fait le faune Il base Se retrouve ici le baiser dont on sait importance chez Rimbaud Il devient ici un baiser morsure puis un baiser rire Le baiser encadre le texte il est l solaire endormi sur les feuillages avant l apparition du faune il est l sanglant quand surgit animal il est l recueilli reconstitu apr s son d part Il est attendu pressenti d sir par la nature endormie comme par la Belle au bois dormant Il est ce baiser qui r veille la merveille qui rompt le sortil ge Le texte va du baiser dort au Baiser d or Le texte accomplit et survalorise ce baiser jusqu en son d tail phon tique travers la s rie allit rative en B et et D Le baiser morsure se trouve en quelque sorte enfoui d s le premier mot du texte dans il revient l initiale des trois premiers vers Dans Dans De une impatience d j se laisse pressentir dans le pseudo sommeil de la nature Si l itin raire du texte conduit d un baiser endormi un baiser magnifi c est par la gr ce d une soudaine morsure Celle ci introduit la rupture la diff rence dans la similarit Fleurs rouges et dents blanches imposent dans la feuill e un violent contraste de couleurs L acte est exalt
468. per et surtout selon une strat gie qui rappelle ce que Pascal entendait par l ordre du c ur la digression sur chaque point concernant la fin pour la montrer toujours revenir obstin ment sur l id e qu il n est pas de vertu sans bienfaisance en Penvisageant sous les clairages divers que permettent les objections successives lesquelles cherchent au nom de ce que les chr tiens entendent par vertu contester le caract re suffisant de la bienfaisance Aussi est ce ces vertus cardinales et th ologales que s attaque le deuxi me paragraphe pour les carter non parce qu elles seraient contraires a la vertu c est dire des vices mais parce qu elles sont autre chose temp rance et prudence par exemple parmi les premi res excellentes qualit s bonnes pour la sant et la conduite foi esp rance et charit des dons c lestes propres assurer le salut Elles ne peuvent qu tre b n fiques mais sans m riter le nom de vertu puisque le bien qu elles apportent reste limit celui qui en est dot Conclusion parfaitement entendue par l adversaire qui avance alors le cas limite du solitaire qui le retrait du commerce des hommes interdit la bienfaisance mais dont la sobri t la pi t les mortifications semblent bien m riter le nom de vertu Voltaire le lui refuse sans pour autant disqualifier les qualit s de Permite mais il les fait relever de la saintet relation
469. ple est en effet lourdement charg et obscurci par la confusion entre la cat gorie sociale les masses populaires et la cat gorie politique ensemble des membres de la communaut politique exprimant la volont nationale Ces deux acceptions sont simultan ment convoqu es par la remarque de Ping nieur N grel sa position d interm diaire entre les corons et les bourgeois politiquement socialement et humainement lui permet de superposer par Vironie le vocabulaire des bourgeois Hennebeau le peuple quivaut la canaille aux non poss dants et la phras ologie de ceux qui se veulent ses repr sentants ainsi Lantier qui souffre de voir ses compagnons chapper son autorit et s enrager en dehors de la froide ex cution des volont s du peuple telle qu il avait pr vue Or si le r f rent sociologique savoir la cat gorie sociale des classes populaires est ais d finir il en va bien autrement du r f rent d sign par l acception politique du terme Ce principe politique d affirmation de la supr matie de la volont g n rale est en effet une fiction r pondant une fonction la notion de peuple remplit une fonction avant que d tre remplie par un sens explique ce propos Nelly Wolf Selon Pierre Rosanvallon la d mocratie s inscrit en effet dans un r gime de la fiction sociologiquement en reformant symboliquement un corps artificiel de peuple et techniquement en abstracti
470. plications et commentaires offerts Jean Goldzink Oui c est plut t sous cette forme que l on se souvient du texte de Etude XI Mais cette phrase n est pas de Bernardin de Saint Pierre Elle est de Flaubert citant et d formant Bernardin de Saint Pierre dans le Sottisier de Bouvard et P cucher I le cite en bonne compagnie F nelon Descartes Montesquieu Bossuet Imagine t on que la post rit n ait retenu de ces auteurs que les aneries que Flaubert y est all chercher Il faudrait d ailleurs se demander pourquoi Flaubert cite les tudes de la nature pr s d un si cle apr s leur premi re publication une date qui co ncide plus ou moins avec le moment o l on cesse de les r diter il y a eu des r ditions constantes au cours du dix neuvi me si cle en int grales ou en morceaux choisis puis une baisse progressive du nombre des r ditions dans le dernier quart du si cle et aussi pourquoi il cite ce passage du tome III Parce qu apr s tout pour la franche rigolade il y avait mieux trouver chez Bernardin de Saint Pierre sans aller chercher si loin comme par exemple lorsque celui ci explique que les chiens n ont pas Pusage du feu car il y aurait des incendies partout ou que les vers sont tout nus parce qu ils n ont pas besoin de v tements moins que Flaubert se soit content de la table des mati res pour aller chercher des b tises dans un texte qu il avait pu lire d
471. plus qui commenc e On ne modifie donc pas le d sert la litt rature ne saurait laisser de trace rien maura eu lieu que le lieu L espace et le temps sont ceux de la r p tition cr tes et monticules se succ dent n en plus finir s tendent sans fin L histoire d Arturo elle m me s annule dans un retour l identique si le moteur d marre c est pour le ramener Los Angeles et ses h tels poussi reux qui ouvraient le livre L infinit du d sert se mue alors en une esp ce de mod le esth tique consacrant l absence de fin La borne derni re de P uvre est comme ensevelie sous les sables d sertiques refermant le livre sur lui m me Ainsi Padresse Camilla et l vocation de la page de garde tendent elles m tamorphoser l excipit du roman en un nouvel incipit la derni re page est en fait la premi re l pitaphe une pigraphe J ai trouv un crayon j ai ouvert le livre la page de garde et j ai crit A Camilla avec tout mon amour Arturo La circularit que dessine Pouvrage tant sur le plan structurel que di g tique semble replier le livre sur lui m me moins pour le constituer en uvre imputrescible que pour circonscrire pr cis ment son statut de simple objet tournant vide inapte agir sur le r el La boucle que dessine l uvre figure aussi un z ro LA LYRE ENSABL E Et c est la lumi re d une autre piphanie m nag e par le roman que
472. pour que les spectateurs le sachent a leur tour Mais dites moi ce que vous avez que je ne sais pas qui vous emp che de jouer votre r le d homme et d acteur qui est de vous parler de vous lier de faire le lien Si Philinte et Alceste paraissent sur le th tre pour ne pas repr senter une sc ne d exposition c est donc qu il y a pour Moli re non seulement un coup de surprise jouer mais aussi Pid e que Philinte doit deviner qu Alceste recommence se conduire de mani re d r gl e en homme singulier et que bien videmment et comme chaque soir on re joue la fable d un Misanthrope dont la fonction et le caract re sont d tre bizarres On le voit le principe de l explication est la fois lin aire et cumulatif L explication de texte donc entasse de mani re coh rente des remarques qui dans chaque phrase donnent des informations capables d initier plus que de proposer une herm neutique en m me temps qu une interpr tation pratique pour P l ve lecteur comme pour le com dien et dans le fil continu de la pratique explicative permettent de relier ces informations d j interpr t es pour aller vers la production d une signification plus vaste portant sur les diff rents aspects de la sc ne tudi e et bient t vers toute la com die Et comme ce syst me lin aire cumulatif et feuillet doit ignorer l ennui induire Pattention et la sympathie du lecteur Vinterroger afin
473. pourquoi toutes sont finalement aussi pour lui Ainsi les gramin es conviennent aux quadrup des et les 1 C est par une suite de ces convenances avec l homme que la nature a donn aux oiseaux qui vivent loin de lui des cris aigus rauques et per ants mais qui sont aussi propres que leurs couleurs tranchantes les faire apercevoir de loin au milieu de leurs sites sauvages Elle a donn au contraire des sons doux et des voix harmonieuses aux petits oiseaux qui habitent nos bosquets et qui s tablissent dans nos habitations afin qu ils en augmentassent les agr ments autant par la beaut de leur ramage que par celle de leur coloris Nous le r p tons afin de confirmer la v rit des principes d harmonie que nous posons c est que la nature a tabli un ordre de beaut si r el dans le plumage et le chant des oiseaux qu elle n en a rev tu que les oiseaux dont la vie tait en quelque sorte innocente par rapport l homme comme ceux qui sont granivores ou qui vivent d insectes et elle l a refus aux oiseaux de proie et la plupart de ceux de marine qui ont pour l ordinaire des couleurs terreuses et des cris d sagr ables II 248 249 53 Litt rature et saveur arbres aux oiseaux La question de la duret des fruits est un bon exemple de cette convenance universelle Bernardin de Saint Pierre a longuement expliqu pr c demment dans l tude XI de quelle fa on la nature a pris so
474. pouss e d shumanisante l uvre dans le texte avec l assimilation hommes jouets aux antipodes de l humanisme exup rien mais en conformit avec une obsession qu on rep re par exemple d s 1939 dans Terre des Hommes chapitre 4 Phomme vit dans un monde st rile et hostile que Pavion lui a r v l Avant l avion Phomme tra ait des routes qui reliaient un lieu fertile un autre il balisait en somme l koum ne et vitait le reste avec l avion ce reste tend passer au premier plan Le lecteur de Fromentin sait bien ce que signifie le motif de la d coloration qui appara t dans le deuxi me paragraphe dans Un t dans le Sahara il est question de la couleur du vide que rev t le d sert et qui renvoie comme ici a un tat limite de la substance dont on sait que la couleur est Pune des qualit s imm diatement perceptibles et Pune de celles qui permettent Phomme de s orienter dans le monde o elle cr e des discontinuit s visibles La d perdition de la substance est inscrite dans la fantasmatique de l absor ption qui ruine la beaut du monde celle de la dorure des sables pour engendrer le vide le blanc aux connotations mortif res tr s videntes le soleil vide le r el en le pompant et donc en le d colorant 1 Nous sommes ici tr s loin de la mi vrerie du Petit Prince 322 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink
475. pr c dentes r pondent les hauteurs de la Piti un h pital et du 36 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink P re Lachaise Envers du paysage donc monde englouti id e pr sente dans pr cipice de l la comparaison avec Oc an que le romancier doit montrer qu il doit faire acc der l existence litt raire Or Pannonce d un paysage fun bre sinistre est d mentie par la suite et restera comme potentialit Le spectacle se trouve plac Punisson de la ville visible par effet de la lumi re Le potentiel n gatif est provisoirement occult par le soleil qui efface les ombres mal fiques Ce potentiel sera r activ plus avant dans le chapitre Le doigt de Dieu est sugg r mais pas encore montr Morceau de bravoure dans le morceau de bravoure une longue phrase entreprend donc de c l brer la beaut de ce Paris inconnu mais en le d r alisant pour le transmuer en pur spectacle Engloutie sous les flots de lumi re cette face de la capitale est pur e Le mouvement de la phrase est marqu par l anaphore en s il et une gradation jette allume gaie embrase blanchit qui culmine avec transforme et cr e Paris est bien recr cette gradation des verbes r pond le paradigme de la lumi re et de la couleur id alisantes or et azur blancheur et gaiement S y ajoutent la l g ret a rienne les lignes fluides la gaze le fr missem
476. prennent sens que rapproch s 52 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink les uns des autres et lus ensemble comme les lettres qui composent un mot Le rapport de convenance entre les tres est la premi re perception de notre raison le premier sentiment que nous cherchons satisfaire en examinant la nature Or ces convenances de la nature sont essentiellement pour l homme au sens o lui seul leur est sensible C est pourquoi les fleurs les plus parfum es qui sont voqu es juste avant l extrait tudi ici c est en ce sens qu il faut entendre le mot bouquet au milieu du premier paragraphe sont toutes port e de la main de l homme Car Phomme tant le seul animal sensible leur parfum il serait absurde qu elles lui soient inaccessibles De m me c est dans tous ses aspects sensibles que la nature est faite pour l homme Ce qui est vrai pour Podeur l est aussi pour la couleur de belles pages sont ainsi consacr es aux couleurs des oiseaux dans l tude X ou m me pour la grandeur Ainsi les arbres fruitiers sont faciles escalader parce que leur rapport nos besoins est tel qu ils doivent P tre Il n y a pas une seule plante sur la terre qui mait quelques rapports avec les besoins de l homme IH 63 Cette finalit n est pas d ailleurs seulement anthropocentr e dans la nature tout convient m me si l homme seul per oit ces convenances c est
477. proche des sonnets romains de Du Bellay D ailleurs Alexandre n est il pas lui m me qu un b tard fils du pape Cl ment VII En somme Rome ne serait qu une r plique de Florence pour ce qui est de la d bauche Ainsi cette sc ne est bien une lev e des masques des hypocrisies jusqu aux v rit s les plus scandaleuses mais elle offre galement un nouveau regard sur Lorenzo d abord voqu par les autres personnages avant de faire une entr e remarqu e LORENZO PERSONNAGE ET ACTEUR GLISSANT COMME UNE ANGUILLE La structure m me de cette sc ne est l image de la personnalit double du personnage Lorenzo est d abord voqu par le duc Sire Maurice Valori et Cibo travers des propos extr mement n gatifs la limite de injure Il est lexcommuni le mod le titr de la d bauche florentine Puis Lorenzo entre en sc ne par les coulisses sortant de ombre Lorenzo para t au fond d une galerie basse montant l escalier de la terrasse D s lors il devient personnage part enti re mais hypocrite au sens th atral du terme il est acteur se mettant lui m me en sc ne en 1 Par ailleurs cette repr sentation du duc en d bauch rapproche Alexandre des figures de Don Carlos amoureux de Do a Sol au d but de Hernani 1830 ou de Fran ois ler peint par le m me Hugo dans Le Roi s amuse 1832 2 Varchi rapporte d j que Pierre Farn se b tard de Paul III v
478. ps d avant la naissance sym trique dans sa vacuit imaginaire du temps d apr s la mort mais le temps pass depuis la naissance et irr m diablement perdu jusque dans la repr sentation que le sujet s en fait puisqu il n y a pas laiss de trace o je ne suis plus Cette tendue est mesurable c est une suite et non un espace infini mais elle prouve la labilit de ce qu on a cru pouvoir nommer substance elle inspire donc l effroi et non l apaisement quelle suite effroyable La terreur revient au c ur m me de l exp rience que Lucr ce pensait propice son limination Mais si Bossuet d ploie l immensit temporelle qui entoure la vie individuelle comme un abime effroyable son but ultime n est pas de raviver la crainte de la mort chez ses auditeurs Ce qu il entend produire c est le d go t du temps terrestre dans lequel est engag le corps et l aspiration l tendue infinie offerte la vie de ame qui peut seule se nommer ternit Je ne suis rien est la conclusion logique que le pr dicateur tire du d tournement du texte de Lucr ce La consid ration du temps dans son infinitude a servi annuler le temps limit de l existence humaine Le constat en est nonc plus abruptement encore que dans la m ditation premi re un si petit intervalle n est pas capable de me distinguer du n ant le n ant n est plus une perspective o i faut que j aille il est un absolu qui assi g
479. qu il r ponde de lui m me il doit permettre encore au praticien d esquisser l id e une mise en sc ne L criture de Pexplication doit se mettre au service du th tre et du texte en changeant d aspect de figures stylistiques et en surprenant elle aussi TECHNIQUE ET TOTALISATION Apr s tout cela il n y a finalement plus qu ouvrir le commentaire et laisser s ouvrir le texte en le pla ant sur sc ne Constater que cette entr e tourdissante vaut bien qu on la commente en partageant l tourdissement tout en faisant preuve de raisonnable distance Empathie sympathie explication sympathie empathie 414 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink On peut maintenant peindre les caract res on en sait assez et proposer le cadre des r les Pun varie l autre r p te Pun joue la souplesse Pautre la raideur On convoquera limp ratif la v h mence de l h mistiche et Pon d bordera encore au moyen du texte Et courez vous cacher devient la prolepse de toute la com die C est un ordre impossible qui condense le noyau de la pi ce venir Nous n y tenions plus Dans Panalyse du second h mistiche du troisi me vers et d j essouffl s par la pr cision des remarques le ralentissement du propos les arr ts sur les r pliques 4 r pliques en intertitre 4 paragraphes nous apercevons violemment et comme la h te de quoi la pi ce est faite et ce qu
480. qu te Quoiqu il en soit dans l Essai sur le beau c est donc avec le go t que l on acc de au domaine sp cifique de la cr ation artistique de sorte que toutes ses nuances r pondent aux vari t s de la beaut naturelle qui en ouvre la gamme et tout la fois en 1 Ibid p 16 Soulign par nous 2 Ibid p 39 3 Ibid p 30 4 Ibid p 39 40 248 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink prescrit la norme Le P Andr se r f re Vitruve pour donner un exemple de cette beaut arbitraire et tout la fois fond e en nature Telles sont par exemple les r gles du second type qu on a tablies pour d terminer les proportions des parties d un difice dans les cinq ordres d architecture toscan dorique ionique corinthien composite Le beau arbitraire peut enfin tre non plus seulement d institution mais bien de caprice quand il r p te Parbitraire m me n tant fond sur rien il ne doit tre admis nulle part si ce n est peut tre sur le th tre de la com die Dois je rappeler aux lecteurs de J Goldzink que la com die dans les textes du XVIII si cle et sans doute depuis Aristote porte toujours leur limite les crit res de l esth tique philosophique C est ainsi que le P Andr tout la fois reconduit toutes les beaut s au mod le d un ordre intelligible connu par l Intelligence seule et s efforce de penser
481. que sa subversion presque imm diate dans l introduction de l Essai sur le gout Sil nous faut consid rer les conditions r elles de notre exp rience en effet que pouvons nous dire sur ce beau qui pla t esprit pur P Andr sur les plaisirs que me tire du fond de son existence m me Montesquieu La jouissance de l me s par e du corps nous demeure largement inconnaissable ce qui signifie pr cis ment que si nous pouvons bien identifier des plaisirs proprement intellectuels ceux qui tout simplement signalent la conscience que Pesprit humain poss de de son 1 Ibid 2 Ibid 251 Litt rature et saveur existence et de son exercice c est a dire d abord des op rations de la r flexion nous ne pouvons d cider sur le point de savoir sils sont ou non li s au fait que l me est unie un corps Par suite en un passage tr s frappant qu il faut citer en entier Montesquieu remplace la division ternaire qu il a provisoirement admise par une r partition binaire rassemblant en une m me cat gorie les objets qui relevaient pour le P Andr du beau essentiel et du beau naturel Lime ind pendamment des plaisirs qui lui viennent des sens en a qu elle aurait ind pendamment deux et qui lui sont propres tes sont ceux que lui donnent la curiosit les id es de sa grandeur de ses perfections l id e de son existence oppos e au sentiment du n ant le plaisir d embrasser tout d une id
482. quel le jour passe en produisant d inexplicables fantaisies apparait comme un spectre noir et d charn Puis dans le lointain l l gante lanterne des Invalides flamboie entre les masses bleu tres du Luxembourg et les tours grises de Saint Sulpice Vues de l ces lignes architecturales sont m l es des feuillages des ombres sont soumises aux caprices d un ciel qui change incessamment de couleur de lumi re on d aspect Loin de vous les difices meublent les airs autour de vous serpentent des arbres ondoyants des sentiers campagnards Sur la droite par une large d coupure de ce singulier paysage vous apercevez la longue nappe blanche du canal Saint Martin encadr de pierres rougedtres par de ses tilleuis bord par les constructions vraiment romaines des Greniers d abondance La sur le dernier plan les vaporeuses collines de Belleville charg es de maisons et de moulins confondent leurs accidents avec ceux des nuages Cependant il existe une ville que vous ne voyez pas entre la rang e de toits qui borde le vallon et cet horizon aussi vague qu un souvenir d enfance immense dt perdue comme dans un pr cipice entre les cimes de la Piti et le faite du cimeti re de l Est entre la souffrance et la mort Elle fait entendre un bruissement sourd semblable celui de l Oc an qui gronde derri re une falaise comme pour dire Je suis la Si le soleil jette ses flots de lumi re sur Litt rature et saveur cette fa
483. quera qu Arturo insiste lui aussi sur ce lien essentiel entre Camilla et univers nocturne Quand je pensais elle 142 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Eurydice Camilla serait alors consid rer comme une figuration toujours fuyante de l inaccessible C tait inutile Comment s y prendre pour la chercher Et puis d abord pourquoi la chercher Qu est ce que je pouvais lui apporter sinon un retour la sauvagerie brutale qui l avait d truite pour commencer Je suis rentr l aube Triste dans l aube Mais il appara t plus juste d interpr ter cette fin comme un renoncement allant jusqu saper les fondements de l entreprise litt raire Ce qu exhibe la derni re page du roman c est la ruine le r ve litt raire effondr Jeter le livre c est aussi rendre les armes dans cette lutte contre le silence abdiquer c est t moigner que la litt rature ne peut contenir le d sert mais qu elle est contenue par lui c est se rendre l vidence que l espace litt raire est celui de la d faite Les modalit s de la disparition de Camilla doublent ce geste de reddition elle est moins rendue au d sert qu l espace m me de la fiction Sa marche finale vers la solitude intime de s collines qui lPabsorbent appara t comme la r alisation d une des deux nouvelles publi es par Arturo Les Collines perdues et le chiot qui Paccompagne n est pa
484. ques du motif d autres au contraire permettent d ouvrir des perspectives de montrer la vari t des traitements possibles Le sonnet de Certon est assur ment de ceux ci plac dans une section intitul e la dame en r ves il pr sente certaines originalit s qui ne deviennent manifestes que par comparaison avec d autres pi ces Depuis les travaux de Gis le Mathieu Castellani notamment on sait que le motif ronsardien de la dame vue en r ve devient particuli rement pr gnant partir des ann es 1585 et conna t alors deux inflexions qui d une certaine mani re radicalisent des tendances d j attest es chez Ronsard Dans bon nombre de po mes r alistes ou polissons le songe amoureux devenu pr texte voquer les images et les bonheurs du plaisir sensuel se transforme nettement en songe rotique C est le cas du rondeau grivois uvre d un anonyme qui jouxte quasiment notre texte Je songeais cette nuit que nue entre deux draps Je go tais les plaisirs qu on go te entre vos bras ou du dernier po me de Panthologie sonnet aussi cru que subtil de Th ophile de Viau Je songeais que Philis des enfers revenue Le po me de Certon n est assur ment pas de ceux l quand bien m me on se risquerait lire dans le dernier vers l vocation d une jaculation solitaire provoqu e par la force voluptueuse du r ve ce vers nest pas en effet sans rappeler certaines formulations partic
485. qui a pay toute action pour obtenir la restitution de l enjeu Encore faut il que le paiement ait t fait volontairement comme dans le cas de PItalien Tu le veux et l autre Non et qu il n y ait pas eu de la part du gagnant dol supercherie ou escroquerie ce qui est impossible dans le cas du banquier le chef de jeu donc le tenancier ou banquier Les donn es du r cit coincident avec la formalisation des cas de droit Il en ressort que lobligation de PItalien l gard du banquier n est fond e que sur un acte de la volont La conduite de VItalien peut finalement tre rapproch e de celle du prisonnier juif qui le jour du Yom Kippour lui qui n avait probablement jamais pratiqu se fit porter malade pour ne pas travailler et non seulement resta toute la journ e sans rien faire ras de pr s sans manger ni toucher une allumette mais encore fut assez fort pour obliger ses semblables limiter La r gle la prescription sont une fa on d chapper la d ch ance et Phumiliation li es la condition de prisonniers pour Georges et son ami Blum il y en a une autre qui r side dans le travail de Pimagination Dans le roman de Claude Simon lintermonde du camp mest pas un autre monde c est le monde dans toute sa violence mais aussi avec sa part de r v lation 1 Simon La Route des Flandres op cit p 205 On le retrouve dans L Acacia Paris Edi
486. r ceux qu crivit Pierre Mac Orlan que ce soit sous son v ritable nom Pierre Dumarchey a Comtesse au fonet 1908 ou les Grandes flagell es de l histoire 1909 ou sous des pseudonymes sans quivoque comme Sadie Blackeyes Baby douce fille 1912 Pierre du Bourdel Mademoiselle de Mustelle et ses amies 1911 ou Sadinet Petites cousines 1919 303 Litt rature et saveur sublim du travail dans la mesure o elle Paccomplit et l exon re en m me temps la limite mais nous avons vu que les litt ratures les plus r v latrices sont justement celles de la limite entre deux cultures ou entre deux genres ou entre dicible et indicible le fouet produit litt ralement du texte lisible I lui remit la verge en lui commandant d en fustiger d abord l Allemande pour l habituer Son membre plac derri re le gros cul de la patiente s tait quill mais malgr sa concupiscence son bras retombait rythmiquement la verge tait tr s flexible le coup sifflait en l air puis retombait s chement sur la peau tendue qui se rayait Le Tatar tait un artiste et les coups qu il frappait se r unissaient pour former un dessin calligraphique Sur le bas du dos au dessus des fesses le mot putain apparut bient t distinctement Mais c est l une exp rience plus symbolique ou symboliste que r aliste Les critures sur la peau sont d ordinaire d une lisibilit peu imm diate tant qu il est reconnaissable
487. r le petit bois noir d limite le cadre du tableau comme le prouve la fin du texte la course d une fen tre l autre permet de rentoiler les fragments intermittents et opposites Lorsqu il colle ses yeux la vitre le narrateur tente vainement de p n trer dans le tableau Un paysage m taphorique L adjectif chancr s dans l expression nuages chancr s s emploie surtout pour un v tement On a donc ici invention d une correspondance caract ristique de la cr ation po tique depuis Baudelaire De m me doux duvet comme celui qui teint les plumes de Vaile comporte m taphore allit ration en d comparaison et correspondance entre oiseau et mati re Dans le membre de phrase couleur m tait ni inertie ni caprice les termes d signant des traits de caract re humains sont appliqu s a la couleur Outre la correspondance en peinture le mot caprice d signe un dessin bizarre ou original s cartant des r gles et des conventions ordinaires L auteur joue volontairement sur l ambigu t de ce mot Les m taphores toits bleus de clair de lune lavoir encrass nacre opaline de la nuit ciel sem de toutes ses toiles ne renvoient pas des couleurs v ritables mais traduisent l impression produite par le paysage sur le narrateur La succession de taches de lumi re les allit rations en l en r et en sy montrent la paisible harmonie du
488. r On trouve plusieurs a is rable marchais bagne Le II s entend huit fois dans les articles d finis ainsi que dans p s bumble mis rable Ces r p titions donnent la parole sa consistance sonore sa densit sa vigueur Mais surtout elles diffusent elles 166 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink diss minent le mot principal tous les phon mes dont il se compose le mot en qui se rassemblent les significations majeures palmes La comparaison joue dans ce texte un r le primordial Ou plus largement toutes les ressemblances entre les choses entre les mots Ainsi passe t on des palmiers aux palmes du givre d Alicante l Orient du jour des Rameaux la gloire du bagne Trajets instantan s du sens L oxymore si on d tache la notion de son troite d finition rh torique d finit cette pens e qui dit Pidentit de P t et de l hiver de la mis re et de la grandeur de J sus et de celui qui crit ce livre Mais la comparaison n efface jamais la diff rence L cart demeure au moment m me o il s annule c est l oxymore lui m me Le texte nonce limpossible En lui advient ce qui n est pas ce qui ne peut pas tre la naissance m me de Jean Genet Pouvoir tonnant et sans cesse tremblant de l criture Agilit qui ouvre les fables les images les mots La po sie comme pens e Ma victoire est verbale la langue donc Genet se fie Langue mater
489. r par e par toute une s rie de notations Si le point de vue est attribuable un observateur anonyme qui peut se confondre avec chacun des lecteurs la pr sence discr te d un narrateur se fait sentir tant par Pinsistance sur la beaut dont il on est idol tre que par la virtuosit affich e Ce narrateur va devenir par la suite un voyeur ainsi qu un personnage passif du drame Son r le est celui d un artiste qui se met en sc ne mais aussi celui d un garant de la fiction Le roman prend donc une v racit en r v lant les drames cach s le narrateur fait entrer le roman dans la modernit On pourrait terminer sur la valeur de quasi manifeste de cette page valeur confirm e par la page suivante Ne vise t elle pas en effet l gitimer et magnifier Paris comme lieu esth tique autant que romanesque Paris comme Yvetot vaut bien Constantinople Le v ritable exotisme s y d ploie par de tous les prestiges Paris la ville aux cent mille romans comme dit Balzac dans Ferragus Ici Phorrible drame va contraster d autant plus fortement avec un cadre esth tis et po tis On rejoindrait l analyse faite par Jeannine Jallat qui nous laissons le soin de conclure Fond du paysage et fond de la r verie si c tait la m me chose A ce sc nario r p titif il suffit d un d cor d un crime cach et d un regard qui les lie Balzac semble interroger ici l imaginaire de ce qu on nomme du
490. r reux Biblioth que de Philosophie politique et juridique Universit de Caen 1984 p 5 7 Litt rature et saveur Locke a la Chine Locke r dige en 1660 deux trait s l un en anglais l autre en latin o il discute de l autorit du magistrat civil en mati re de religion Il s oriente clairement alors vers des solutions autoritaires appuy es sur une Eglise tablie Mais la Lettre sur la tol rance crite pr s de trente ans plus tard qui s pare les Eglises de l Etat et retire ce dernier toute capacit dans ce domaine hors le maintien de l ordre public passe au contraire pour un manifeste en faveur de la libert de conscience Pourtant la liste des pr occupations n a pas vraiment chang e se d barrasser des d bats sectaires et des querelles fratricides entre chr tiens ne pas entretenir un espace potentiel de guerre civile faire que les hommes puissent vaquer en paix leurs autres affaires Cela suppose dans un premier temps que l Eglise anglicane mette un minimum d ordre dans les choses de la religion et impose des r gles de conduite quant au culte et certains points de dogme Elle sera pour le reste compr hensive suffisamment pour que les carts entre protestants soient permis mais restent contr l s Et par la suite le souci de m nager un espace de libert suffisant pour que diff rentes Eglises puissent trouver leur place d s lors qu elles sont consid r es comme des associati
491. r s sa mort La preuve a t administr e elle l est moins propos de cette lettre que Jeanne aurait envoy e alors qu elle ne sait pas crire et qu elle pourrait avoir dict e Enfin Voltaire ridiculise un miracle celui de la d couverte d une vieille p e rouill e puis ironise sur les saintes jaseuses 1 M XXIV 503 phrase qui n a pas t reproduite dans les Questions sur l Encyclop die 2 M XXV 213 377 Litt rature et saveur Ce texte illustre Pune des constantes de la pens e historique voltairienne On la dit justement La philosophie se mesure chez les historiens au statut de la fable mythes de fondation miracles desseins providentiels des h ros des rois et des pr tres A la barbarie cl ricale et gothique s opposent la lucidit critique et le raisonnement Cette page sur Jeanne qui fait entendre la voix de la philosophie dans l histoire ins r e dans les Questions sur l Encyclop die est alors mise en perspective Elle prend place dans le large tour d horizon d une oeuvre alphab tique Jeanne d Arc dite la Pucelle d Orl ans sans la pr sence grima ante de Nonnotte et sans la cohorte des cr dules doit r v ler son vrai visage L article s appr cie alors l int rieur des r seaux des Questions sur l Encyclop die Il joue son r le parmi de grandes figures historiques d Alexandre Th odose tout un ensemble d articles dans lesquels Voltaire
492. r ce 71 Litt rature et saveur que nous retournions ils n taient pas gat s Le burlesque peine ici a conjurer la tentation d un laisser aller terminal devant une investigation vou e l chec et plus encore au spectacle de d chets qui pr figurent le destin de tout tre vivant L image selon laquelle les vautours projettent sur le sol une ombre de la taille d un veau figure certes de mani re mena ante Pobjet qui apaiserait leur faim Mais elle insiste contradictoirement sur le caract re inoffensif de charognards assimil s de jeunes ruminants dont la lenteur est proverbiale en m me temps qu elle fait allusion aux motifs de la perte et de l criture Elle voque en effet le v lin cette peau de veau mort n utilis e comme support d criture Le passage de vautour veau actualise en outre par le retranchement syllabique le motif de la disparition du journal et d autant plus que ce dernier contenait pr cis ment le r cit d un tour d un voyage Telle est la raison pour laquelle le mouvement de d fense mis en uvre par les deux hommes consiste tr s pr cis ment envoyer vers les vautours une motte bien dirig e qui les informe de leur erreur A la pr sence de l innommable et de l informe mentionn e d s le d but du passage et qui menace de r duire n ant la pr sence humaine et scripturale r pond par une figure d rivative le verbe infor
493. r conna tre et pour voir il faut donc qu elle puisse voir et que la vari t le lui permette c est dire il faut qu une chose soit assez simple pour tre aper ue et assez vari e pour tre aper ue avec plaisir Ce n est donc pas simplement le domaine g n ral de l enqu te que Montesquieu a red fini travers une d marcation du P Andr dans cette op ration remarquable il a requalifi des concepts fondamentaux de Pesth tique classique l ordre et la vari t en leur donnant une justification proprement empiriste Sans doute ces explications ne sont elles pas toujours originales le statut de la vari t par exemple fait l objet de multiples hypoth ses depuis lAbr g de musique de Descartes jusqu VEnqu te de Hutcheson mais on ne peut qu tre saisi par la coh rence irr prochable de ces pages encore plus frappante lorsqu on les compare l h ritage de Malebranche r capitul dans PEssai sur le beau puis subverti au d but de PEssai sur le go t A Poccasion d une comparaison textuelle mon sens peu r cusable j esp re avoir montr comment Montesquieu sous Papparence d une description relativement neutre des plaisirs naturels de l me prend pr cis ment position par rapport certaines th ses malebranchiennes qui l guent aux Lumi res une th orie coh rente de l ordre dans les arts L auteur de l Essai sur le go t r cup re les aspects les plus f co
494. ra l ouvrier des temps modernes Cet extrait de Pauliska est aussi bien s r m taphore des comportements sexuels assujettir l autre c est au fond l encha ner un texte l obliger l crire et le lire Si Merteuil subjugue Valmont c est en l obligeant recopier le petit mod le pistolaire de rupture et non en voquant un r chauff dont Phypoth se tient du badinage bien plus que de la volupt Ainsi Pinfame tortionnaire oblige Pauliska comprendre a lettre son avertissement pr c dent attendu disait Talbot qu il fallait faire g mir la presse G mir la presse Ce mot me fit trembler Ce mot terrible g mir la presse me saisit comme un trait de feu Les autres passages en italiques Donnez l impression madame mort damnation pour les tra tres insistent assez sur la fonction m talinguistique C est qu il s agit de faire analyser Pauliska le texte comme texte Inutile d invoquer lhyst rie Le Bernin et Sainte Th r se on sait que le discours rotique est le cadre g n ral dont le discours mystique n est qu un pan dissoci Sainte Catherine de Sienne remercie Dieu d avoir marqu de mani re ind l bile le corps de son Fils sur la Croix en ces termes L autre rem de pour ce mort crit elle ce fut de conserver les cicatrices dans le corps du Verbe pour que continuellement elles crient mis ricorde devant toi pour nou
495. rait dans nous avec la sant la force et le d sir Demain nous ferons cette superbe exp rience Comme le lecteur s en doute ou l esp re Pauliska elle m me fera les frais de cette exp rience Reste tirer la conclusion industrielle reste inventer la vraie machine crire sur la peau Reste en aval de Pauliska Kafka Michel Delon invite lui m me comparer R v roni et l auteur du Proc s Dans la colonie p nitentiaire 1919 met en sc ne une machine perfectionn e qui inscrit inlassablement le ch timent sur le corps du condamn jusqu ce que mort s en suive R v roni en tait inventer la machine crire une r volution industrielle plus tard dans cette apr s guerre qui tout comme la r volution de 1789 vient de signifier tous la fin d un monde Kafka d code son fonctionnement Ou plut t il le pervertit Ce qui chez R v roni tait une sc ne sadique assumons au nom de la concordance des faits litt raires ce que ce terme en 1798 d anachronique devient chez Franz K un fantasme masochiste Sur un mod le jud o calviniste le XIXe si cle marchand vient de r inventer la culpabilit g n ralis e Que nous dit Kafka Qu crire c est inlassablement r crire la culpabilit en inscrivant sur la peau le commandement transgress 1 Pauliska Desjonqu res p 189 190 308 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Il nous r p te qu
496. rale quand elle est tragique et qu elle donne Vhorreur des choses qu elle retrace On y reconna t galement l isotopie diabolique ou la m taphore du rideau cela s entrevoyait caract ristiques des textes programmatiques L allusion notamment l enfer social fonctionne comme un indicateur de m tadiscours et invite une lecture ouverte En effet outre la pr face de la premi re dition l intertexte le plus probant de cet iepit est un article r dig le 24 juillet 1857 pour Le Pays article o Barbey d fendait vigoureusement le sulfureux Baudelaire cit en justice pour Les Fleurs du Mal Barbey y militait pour une uvre dont la force est elle seule la garantie de Peffet moral crite rebours de l esprit de ce temps affadi et d bilit et qui peut le sauver en l arrachant par Vhorreur sa l che faiblesse Il diff renciait d un c t Pimmoralit par d faut de sensibilit de Pautre la moralit inattendue involontaire peut tre mais certaine qui sortira de ce livre cruel et os Ce livre sera moral sa mani re et ne souriez pas cette mani re n est rien moins que celle de la Toute Puissance Providence elle m me qui envoie le ch timent apr s le crime la maladie apr s l exc s le remords la tristesse l ennui toutes les hontes et toutes les douleurs qui nous d gradent et nous d vorent pour avoir transgress ses lois On voit bien que
497. rand d senchantement tandis que l t d autrefois planait toujours au droit de PEcole o 19 Litt rature et saveur nos successeurs circonspects d couvraient en entrant dans Pantichambre du jugement un blanc bec cavali rement assis la place de l examinateur avant de s aviser avec un sursaut mal r prim que c tait l examinateur en personne On n applique pas toujours ni tout le principe de m diocrit ce qui m arrive est la loi g n rale et r ciproquement Il tait r confortant de supposer que ce qui avait t persistait aux lieux que nous avions quitt s par la force des choses et que si pat extraordinaire notre chemin nous y ramenait nous les retrouverions intacts avec ceux qui leur taient indissolublement associ s Parce qu alors quelque chose de nous m mes tait l abri du passage de la d sillusion un peu de nos vingt ans et ce qui va de pair en s ret sous l il noir qui nous avait d abord examin s Jean Goldzink quitte la place laisse oubli la poussi re descendre sur les heures dont je lui avais confi sans le lui dire la garde Tu as commis une tr s grave faute Jean et nous aussi n en pas douter Nous avons laiss le temps passer ETUDES DE TEXTES ARAGON LES VOYAGEURS DE L IMPERIALE Par Jean Fran ois LOUETTE Universit de la Sorbonne Paris IV7 I avait beau se monter la t te avec ces d cors successifs et les fant mes du pass
498. ransportent les r les du t nor Emma Bovary porte un regard attentif sur le chanteur se penchant pour le voir et re oit le spectacle avec une violence d mesur e dans une attitude proche de l hyst rie elle gratigne avec ses ongles le velours de sa loge Cette attention passionn e exc de les m rites esth tiques de Pop ra de Donizetti interpr t Rouen comme une suite de lamentations m lodieuses se trainant laborieusement Compar e des cris de naufrag s dans le tumult d une temp te la musique qui ravit Emma tend a la cacophonie le chant devient cri tandis que Paccompagnement orchestral est d grad en tumulte C est que le plaisir pris par la jeune femme la repr sentation de Lucie de Lamermoor est moins esth tique qu affectif Il si ge dans le c ur du personnage dont l investissement dans un spectacle qui la charme est manifest par la multiplication des marques de troisi me personne D s lors le regard critique que le narrateur porte sur la repr sentation s efface derri re le point de vue r ducteur d Emma nettement signal par une modalisation empruntant une tournure restrictive la voix de la chanteuse ne lui semblait tre que le retentissement de sa conscience Parce qu elle per oit le spectacle sur un mode partiel la jeune femme est enferm e dans une logique de reconnaissance qui lui fait retrouver sur sc ne tous les
499. rarement les personnages jusque sur leur lit de mort et l important est cependant la fin laquelle tournent les actions de hommes et non ces actions elles m mes C est pourquoi leur sens n est pas dans la description mais dans leur fin et ce sont des exemples que nous narrons et non des faits quand bien m me nous pr tendrions ne suivre que la v rit pure Il faut avouer Monseigneur que P loquence ne vous fut pas enseign e en vain et voici deux pr ches en une journ e Ce saint homme dont nous parlions tant t m a souvent dit que j avais la parole trop facile et il ajoutait Prenez garde que la passion ne s y r fugie ou dans P criture Je crois qu il dit vrai Ce n est pas ici que vous trouverez de semblables admonestations reprit M d Urf surtout au moment o vous accordez au roman la permission de dire la v rit Non point Monsieur non point s il vous pla t Consid rez que les narr s sont bien des choses arriv es et que chacun pr sent a ou a pu alors exp rimenter Mais que les paroles ou les r flexions que les acteurs ont pu dire ou faire ne furent pour la plupart transmises par nul t moin et sont ce que Pauteur pense que les acteurs devaient dire ou ressentir en l occasion selon sa litt rature et selon sa science de la nature humaine Les actions sont donc vraies les paroles et les sentiments ne sont au mieux que vraisemblables quand la furie de faire mieux que ses
500. re d orf vrerie que sont Typhon et Le N gre du Narcisse Dans Entretien avec Claude Simon propos recueillis par Christian Michel et Richard Robert Scherzo n 3 avril 1998 p 7 Sous la premi re pigraphe du Tramway on en lit une deuxi me emprunt e celle l Proust Litt rature et saveur Difficile toutefois de ne pas s autoriser d abord un d tour qu en d pit de la prescription ou peut tre cause d elle on ne r siste pas faire mu par la tentation d aller voir l int rieur Et en effet au c ur du roman c est une disparition qu on trouve celle de la m re du narrateur Invisible et inexprimable comme semblent l indiquer la coupure typographique qui en pr c de la mention les trois points de suspension qui la figurent sans la formuler et le recours une m tonymie qui la sugg re sans la dire simplement quand je suis revenu pour les grandes vacances apr s P ques la liseuse n tait plus l je me rappelle que sans tien dire je Pai cherch e 68 Au centre donc l adverbe simplement l indique pas d analyse possible un v nement brut le constat d une absence et le silence de Porphelin laiss sans explication comme si rien ou presque n avait chang priv de sens D ailleurs la qu te entreprise par Penfant qui s est tu n a d abord abouti qu au pourrissoir du c t du bois de pins une voie sans i
501. re en Pologne son p re quelque part en RDA dans l entourage de Walter Ulbricht Il pr parait ce moment pr cis deux articles de fond sur le PSU de Rocard dont la phras ologie gauchiste pouvait d concerter Quelque chose d amer d un peu d sesp r jusque dans le rire sardonique que lui inspiraient le monde universitaire la critique acad mique les jeux formels du structuralisme Jamais je n ai tant appris qu en ce lieu ce temps o il tait permis des cr tins ruraux d entrevoir ce qui se passe sur la terre de former des pens es qui soient contemporaines de vivre au pr sent Il me semble parfois que ces ann es ont dur proportion de ce qu elles nous ont apport qui est immense et parfois qu elles ont pass comme un souffle que nous entrons aussit t dans l re d solante univers d sastreux qui leur ont succ d Je prends cong un beau matin de mes petits camarades de Jean sans bien comprendre que c est fini qu ils se peut que nous ne nous revoyions plus de ce c t ci de la tombe On ne pense pas tellement la tombe vingt quatre ans Ensuite eh bien on a enseign puisque c est cela qu on nous avait pr par s D autres ann es se sont ajout es celles qu on avait eues dans nos thurnes avec la libert absolue d tudier d y voir clair d avancer Chose trange jai suppos que j tais seul en butte aux tribulations et aux traverses de lapr s au g
502. re vous d voiler quelque chose Le bourgmestre n aurait absolument rien su si notre m re notre propre m re ne le lui avait pas dit HEINRICH ET LE P RE constern s M re est ce vrai La m re est assise la table et pleure le visage dans ses mains HEINRICH se l ve Dieu vous garde LE PERE ET AFRA M re Heinrich s en va LE P RE autoritaire Heinrich Tu restes ici Et tout de suite HEINRICH Je pars LE P RE Tu restes sinon montrant la m re je la chasse Extrait Karl Valentin Soucis de famille 1943 in La Sortie au th atre et autres textes Traduction de Jean Louis Besson et Jean Jourdheuil Editions Th trales 2002 p 74 75 364 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Inexplication de texte D embl e la courte pi ce de Karl Valentin intitul e Soucis de famille se situe sur le terrain privil gi du drame bourgeois ce salon que Diderot a voulu substituer aux lieux conventionnels et ind termin s de la trag die classique d sireux comme le dit Dorval dans les Entretiens sur le Fils naturel de transporter au th atre le salon de Clairville comme il est Mais cette indication inaugurale ne donnera pas lieu ult rieurement 4 un d veloppement notable de ce lieu bourgeois il nous est dit rien de plus qu il est meubl d une table sur laquelle le p re donne nerveusement un coup de poing laquelle la m re s assoit pour pleu
503. redondance s miotique la notation d attitude l illustre de fa on exemplaire puisqu elle ajoute une vocation g n ralisante un de ces regards clairs qui l image conventionnelle de l il du griffon ou du mauvais il de la jettatura jaillir d un ceil de flamme Le narrateur pr f re ici Poriginalit de son r cit la s curit d un code s miotique partag avec le lecteur excluant tout risque d erreur dans le d chiffrement des comportements des personnages Les r f rences culturelles mobilis es par la mise en sc ne vont dans le m me sens Le dispositif narratif reprend ouvertement le sch ma du passage sur l autre rive des vangiles ou plut t des Enfers virgiliens avec la travers e fluviale d ment monnay e sur une barque conduite par un nocher myst rieux L explication 123 Litt rature et saveur historique selon laquelle la Lys marquant la fronti re naturelle du territoire francais les mousquetaires se mettent a couvert de la justice royale passe ici totalement au second plan Le point de vue romanesque qui exalte les ressorts politiques et les haines priv es l uvre dans les actions laisse place un registre de lecture sup rieur majoritairement mythique Athos en appelle au jugement divin que l on voie bien que tandis que le bourreau pat le geste fortement th atralis de jeter Peau le salaire qui r tribue son service instaure une distinct
504. religion par exemple Elle op re par ducation la consolidation insensible des m mes associations Ainsi soutenus par la r p tition et le consensus les associations les plus impr visibles en deviendront banales au point de paraitre naturelles comme les comportements 224 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink qu elles commandent Aussi laffirmation qu il existe une loi naturelle accessible la raison et donc tous les hommes se heurtera toujours la bizarrerie des m urs Le Chinois peut ici constituer le mod le de ce qui est ancestral la toute puissance de la coutume la fois v n ration et amn sie quant celle ci lui fait associer son honneur quelques cheveux et renoncer pour cela la vie et aux solides biens de la nature Mais on ne peut mettre tout un peuple aux petites maisons Si la folie se d finit simplement comme l opposition la raison elle est bien s r la chose la mieux partag e Ce renoncement montre en tout cas puisqu on ne na t pas fou que la coutume peut d tourner et utiliser son profit Pamour de soi On s aime toujours en aimant ses pr jug s au d triment de ceux des autres Et si ces pr jug s sont en partage Pamour de soi y gagne encore par les autres On aura donc des hommes la fois raisonnables lassociation des id es fonctionnant par ailleurs normalement mais qui tirent l occasion leur tranquillit d tre stupides Ainsi le
505. rencontre chez Saint Simon et recherch e Mais lisons plus avant Quelle chose extraordinaire chez cet homme que le go t qu il avait de la puissance de la fore m me de la brutalit militaire quand elle se perdait dans le pass quand elle n tait plus l appareil de cette soci t o il se faufilait jaloux de son ind pendance mais comme un v tement abandonn par de grands capitaines d funts et qui lui semblait taill pour lu pour ses r ves C tait qu alors la violence arm e tait l expression d individus pensait il dont les d sirs levaient et menaient des arm es faisaient liti re de la pens e moutonni re des hommes de la routine de la vie Dans le d cor du Castel Vecchio il ne retrouve que de quoi mieux mesurer son m pris des batailles contemporaines Ce n est pas lui qui trouverait un id al dans la d fense de Dreyfus ni dans celle de l tat Major Il ne reste plus que ces traces magnifiques des temps anciens de l nergie ancestrale comme des temp tes au lointain L homme moderne pense Mercadier n a le choix qu entre l esclavage et le m pris R alisme de la profusion r alisme de la confusion r f rentielle ou verbale et aussi r alisme de la d sillusion Car la libert Pierre l avait v cue d abord comme une enivrante ouverture arrivant Venise il se grisait d une po sie de souvenirs facile comme une ivresse d ap ritifs on sait l tymologie de ce dernier mot Pui
506. renvoyer sa seule r alit poussi reuse la faire retourner son lieu d origine celui de la fiction o elle s vanouit tel un mirage Sur toute cette d solation r gnait une supr me indifference juste une nuit qui prenait fin et un jour de plus qui commen ait et pourtant l intimit secr te de ces collines leur merveilleux silence consolateur faisaient de la mort une chose de peu d importance Vous pouviez toujours mourir le d sert demeurerait l pour cacher ke secret de votre mort resterait l apr s vous pour recouvrir votre m moire de vents sans ge de chaleur et de froid Au fond Phistoire de Camilla et d Arturo semble repenser le mythe d Orph e Dans une optique blanchotienne on pourrait interpr ter le jet du livre dans le d sert comme une m taphore de Pincapacit de l criture atteindre la beaut qu elle vise Nouvelle Correspondance Lettres sur la po sie dition de Bertrand Marchal Paris Gallimard coll Folio 1995 p 298 1 Fante Demande a la poussi re p 159 2 Camus Noces suivi de L t Paris Gallimard coll Folio 1959 p 63 3 Ibid p 69 70 4 Eurydice est pour Orph e l extr me que Part puisse atteindre le point profond ment obscur vers lequel Part le d sir la mort la nuit semblent tendre Blanchot Le Regard d Orph e L Espace litt raire Paris Gallimard coll Folio Essais 1955 p 225 On remar
507. rer et encore qu on y entre et que tous finiront par en sortir Le dialogue entre le p re et sa fille Afra d bute abruptement et sans pr paration ce qui tendrait tirer la sc ne vers la tranche de vie ch re au m connu Jean Jullien dans sa p riode naturaliste Pourtant la sc ne crite par Karl Valentin n est l vidence pas plus un drame bourgeois qu une tranche de vie naturaliste m me si elle leur emprunte l occasion quelques traits distinctifs dont il faut bien avouer qu ils nous garent plus qu ils ne nous clairent Mieux vaut donc se r signer comme le pr conise Michel Vinaver pour sa m thode de la lecture au ralenti suivre avec patience et abn gation la progression de laction en recensant informations et v nements Il est d embl e question d une faute aux cons quences consid rables personne n aurait pens que a en arriverait l ce n tait pas ta faute Conform ment au principe de condensation inh rent la concentration impos e par les contraintes dramatiques l vocation du personnage de Heinrich est imm diatement suivie de son apparition Sa premi re parole bonjour relativement pauvre sur le plan de la charge r f rentielle n en contribue pas moins exacerber extr me la tension instaur e par l change qui pr c de C est cette charge motionnelle que renforce encore la riposte l unisson des deux protagonistes bonjour L
508. rer des effets d chos plus retors quand on comprend que le sujet absent masqu pour mieux se montrer de ce discours apolog tique c est Barbey lui m me et plus pr cis ment les Diaboliques Le jeu de r les cr ainsi permet Barbey d assumer une position ext rieure une position d avocat de la d fense par rapport son uvre Yvan Leclerc dans Crimes crits La Litt rature en proc s au XIX si cle Plon 1991 a montr que le paratexte des Diaboliques et 1 Jules Barbey d Aurevilly Les Diaboliques dition Robert Laffont 1981 p 934 43 Litt rature et saveur notamment la pr face de la premi re dition taient enti rement tourn s vers les poursuites judiciaires venir Cet zrcpif est aussi un palimpseste une pi ce masqu e pour un dossier d autod fense o Barbey adopte le point de vue ext rieur du critique et tente en utilisant le langage journalistique pratiquement titre invocatoire de s approprier l influence d mesur e du quatri me pouvoir sous la Troisi me R publique Ce texte redouble donc le paratexte des Diaboliques on retrouve entre la pr face et cet inapit certaines formules Pidentique Les Diaboliques ont pourtant t crites par un moraliste chr tien mais qui se pique d observation vraie quoique tr s hardie et qui croit c est sa po tique lui que les peintres puissants peuvent tout peindre et que leur peinture est toujours assez mo
509. res M me de seconde main sous forme de citation Goldzink rel ve un certain usage f cond parce que probl matique des arguments philosophiques dans les Le tres persanes y appara t le philosophe galant Poullain de La Barre qui met le droit naturel du c t des femmes et la domination masculine dans l institution sociale Il ne suscite que le scepticisme de Rica Il en va de m me pour le droit naturel de r sistance question devenue classique depuis Locke et les apories qu il entra ne ou bien l on r siste et alors c est le plus fort qui l emporte et qui impose son droit la valeur s vanouit et s efface derri re le fait ou bien il y a un droit naturel qui r git en l absence de toute r gle positive les rapports entre les hommes Autre difficult s il y a un droit naturel se d fendre contre la tyrannie il y en a un aussi pr server la soci t on ne se d fait pas ais ment de Hobbes Donc non seulement Montesquieu aborde de mani re oblique la question traditionnelle des rapports entre droit positif et droit naturel mais par surcro t il jette le lecteur dans le plus profond embarras sur le sens donner au droit naturel quand il sait d j parce qu il conna t la fin de cette histoire que les th ses de Montesquieu seront fermement tablies d s l ouverture de L esprit des lois Dire qu il n y a rien de juste ni d injuste que ce qu ordonnent ou d fendent les loi
510. rf et Camus appartiennent pratiquement des pays diff rents d Urf l ancien ligueur est au service de la maison de Savoie avec laquelle sa famille est depuis longtemps li e et Camus a t nomm un dioc se qui pris sur les terres des Savoie vient d tre rattach au royaume Litt rature et saveur iraient la charge Gen ve il e t se garder d eux Que M de Belley qui revenait d Annecy n tant que lui second avec son secr taire sur deux mules avait remontr qu il y avait en la barque de quoi passer tout le monde l Esprit Saint requ rant peu de place Ce que les soldats n avaient voulu accorder pour ce que leurs chevaux taient charg s de faux sel qu ils voulaient que nul ne vit et que l v que avait d se r soudre attendre dans la cabane du passeur que la barque retourn t au matin M d Urt montrant tous les signes d une violente col re fit mander M de Saluces son capitaine lui disant ce qu il avait appris et que le capitaine tait loin d ignorer le profit du faux saunage lui revenant pour mi partie M d Urf lui dit qu il avait jusqu ici montr de d plaisir ce que certains soldats et m me officiers dit il se tournant brusquement vers M de Saluces de son r giment allassent faire trafic de sel pour ce qu il fallait bien que les soldats oisifs dans les temps de paix se donnassent quelque carri re de peur qu ils fissent pire mais qu il savait
511. rgit en paroles mais non sans brutalit la figure du bourgmeste all gu e par Heinrich qui il semble mettre en mains une douloureuse alternative d un c t prends Vaffaire en mains de Pautre laisse tomber mais d fi e par le P re victime d une hybris coupable qui lui d nie le pouvoir de plonger son foyer dans le malheur D tenteur du pouvoir civil il est apparemment le plus 367 Litt rature et saveur haut plac dans la petite dont il tait question lors de la premi re didascalie le bourgmestre n en est pas moins dot dune impressionnante ommiscience relative aux tracas de ses administr s ce qui n est pas tonnant pour autant qu on admette qu au th tre voir savoir et pouvoir vont de pair Encore qu en ce qui concerne le bourgmestre la question fasse d bat entre les locuteurs engag s dans des arguties qu avec la meilleure volont herm neutique il est bien difficile de tirer au clair Le morceau ainsi d coup s ach ve sur la premi re menace de d part de Heinrich somm au contraire par le P re de rester Grande affaire dramatique en effet que celle de rester ou de partir comme d ailleurs que d entrer ou de sortir Qu on se souvienne de L once et L na qui dans la pi ce de B chner croient partir mais reviennent ce qu ils avaient fui pour y rester ternellement Qu on pense aux personnages de la Cerisaie de Tchekhov attach s corps et me rester avant de se d
512. ributs essentiels C est partir de ce point que va se perp tuer l id e d une science de l tre en tant qu il est La question d Hamlet Etre ou ne pas tre serait elle avant la lettre d ordre ontologique Etrange insistance des philosophes de leurs historiens tout se passe comme si une science pouvait exister sans avoir de nom d termin voil de quoi interroger scandaliser 200 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink un linguiste Les choses peuvent sans doute exister avant les mots qui les d signent Mais quand on les dit leur d signation par le langage n est elle pas n cessaire On peut sourire la lecture du dictionnaire de Lalande sorte de cat chisme couronn par PAcad mie fran aise et dont lutilit reste toujours active Ontologie partie de la philosophie qui sp cule sur tre en tant qu tre selon lexpression d Aristote Soit mais justement Aristote n emploie pas le terme d ontologie Ce mot ontologie semble bien avoir t employ par des penseurs allemands au XVII si cle Une de ses premi res apparitions attest e se trouve en 1646 dans la M faphysica de J Clauberg L ontologie est appel e la science qui contemple l tre en tant qu tre c est la science catholique au sens o ce terme signifie universel On a pu relever dans un in dit de Leibniz cf L Couturat Opuscules et fragments in dits non dat le terme d ontologie Sc
513. riens connaissent bien notamment depuis les travaux de Susan Barrows ce mythe qui se met en place la fin du XIXe si cle d un peuple perdu devenu foule dangereuse Cependant parce que Zola dans Germinal est sensible ce glissement de valeur mais sans toutefois pouvoir l assumer id ologiquement le texte de Germinal qui nous int resse permet de mettre au jour les m canismes m mes par lesquels les l ments d un syst me de repr sentation se d font en changeant de valeur L ENVERS DU PEUPLE LA FOULE C est bien autour de cette opposition du peuple et de la foule que se joue la duplicit du texte zolien Le terme est d embl e utilis avec une nette distance louverture de notre sc ne Prenez vos flacons la sueur du peuple qui passe murmura N grel qui malgr ses convictions r publicaines aimait 1 L insistance la fin du si cle sur le r le des femmes et de l alcoolisme est selon Susan Barrows sp cifique la foule fin de si cle comme illustre Piconographie de la Commune riche en photomontages et modelages photographi s accr ditant le mythe des P troleuses 396 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink plaisanter la canaille avec les dames C est sur ce mot que se joue la multiplicit des lectures un mot par lequel un personnage qualifie un autre personnage appelant d un coup sur la sc ne du roman un mythe politique et des images Le terme de peu
514. rier 1522 la r sumait ainsi c est la com die d un vieux docteur florentin qui avait une femme ne pouvait pas avoir d enfant etc Le ef cetera dit bien le caract re de lieu commun du d nouement La force du texte provient en effet non de cette intrigue bien maigre mais d une ma trise langagi re qui joue un r le d terminant pour la caract risation des personnages et d un jeu de citations de clins d il d emprunts la com die latine et la nouvelle florentine notamment Boccace d une part et aux textes politiques de Machiavel lui m me d autre part Dans la sc ne que nous venons de lire c est pr cis ment le cas la r action de Lucrezia montre qu il y a au moins un endroit la sc ne th trale o la sagesse la prudence la vertu permettent de saisir une occasion et de changer de nature Dans la premi re sc ne de la pi ce Callimaco d finit l enjeu de l entreprise qu il m ne il s agit justement de faire changer la nature de Lucrezia En effet la premi re raison des difficult s qu il prouve mener cette guerre de conqu te est la nature tr s honn te de la jeune femme Cette capacit de changer de nature avec les temps et avec les choses est pr cis ment ce qui permettrait un homme prudent de ne pas changer de fortune et d arriver ses fins c est dans ces termes que Machiavel explicite sa position dans le chapitre XXV du P
515. ries que l auteur a d bit es Chez les commentateurs des oeuvres dites de vieillesse du patriarche de Ferney c est plut t la g ne qui pr vaut cet gard Meister lorsqu il dirigea en absence de Grimm la Correspondance litt raire mit l accent sur la dimension p dagogique de la r p tition dont un militant des lumi res ne peut n gliger Vefficacit condition qu elle ne devienne point lassante Notre propos plus modeste ne sera pas de nous interroger sur des causes mais de tenter d analyser des cons quences en s int ressant aux effets produits par la mobilit sur un texte itin rant Faut il sans autre forme de proc s l expliquer dans son contexte d origine Le sens est il affect par ces migrations Poser de telles questions para t relever d une curiosit tout au plus bonne ravir des rudits Or cette pratique du transfert et du transplant de textes affecte une uvre majeure les Questions sur l Encyclop die quantitativement et qualitativement Ce br viaire de la pens e voltairienne recueille maints textes ant rieurs emprunte des crits divers et qui prennent place dans cette uvre alphab tique aux c t s d articles in dits r dig s pour r pondre Encyclop die on pour composer la propre encyclop die du patriarche de Ferney Ainsi l article Arc Jeanne d Arc dite la Pucelle d Orl ans publi dans cet ouvrage en 1770 avait d j paru a deux reprises en 1767 au ti
516. rince et on sait que cette hypoth se est exprim e pour m moire car nous dit alors Machiavel on ne trouve pas d homme si prudent qu il sache s accommoder cela Or le r cit que fait Callimaco de la nuit qu il a pass e avec Lucrezia semble bien indiquer que quelque chose s est d roul qui ressemble fort un tel changement de 231 Litt rature et saveur nature en fonction de la qualit des temps et que faute de trouver un homme assez prudent pour changer sa fa on de proc der en fonction de la vari t des temps Machiavel a mis en sc ne une femme si prudente qu elle sait s accommoder cela Callimaco commence par rapporter bri vement la discussion qui a abouti la transformation de Lucrezia en reprenant de fa on r sum e les indications que lui avait donn es Ligurio en IV 2 on remarque aussi les r f rences la nouvelle de Catella et Ricciardo de Decameron III 6 C est pr cis ment l existence de ces textes ant rieurs connus des spectateurs et des lecteurs qui permet d aller vite de ne pas insister et de ce fait de laisser de c t les r actions probables de surprise et de col re de Lucrezia celles l m mes probablement que Boccace attribue Catella qui affirme dans un premier temps vouloir se venger tout prix Il lui suffit d noncer qu il a avanc de vere ragioni ces raisons ces arguments vrais sont sans aucun doute ceux que Ligurio lui avait
517. rippine ne se lasse pas de la r p ter de l amplifier de la savourer mais aussi de la mort de S janus lui m me A bien des gards la rh torique libertine de la pointe pat quivoque mise en spectacle dans cette sc ne et ailleurs par S janus faisant voir dans la mort rien d autre qu un rien pout nous inspirant une peur nourrie par ces beaux riens qu on adore est la r ponse stylistiquement la plus efficace ce gout immod r pour les hypotyposes pour les tableaux de la mort dont Agrippine est friande Equivoques nihilistes contre hypotyposes superstitieuses Sans doute mais la contagion des fantasmes pathog nes n pargne pas S janus quelle que soit la distance d esprit fort qu il manifeste leur gard Dans cette mesure m me l picurisme n est pas seulement ici perverti thiquement et politiquement de fa on plus globale c est toute une esth tique du personnage et l art verbal qu il mobilise qui jurent avec la pens e du Jardin qu elle soit antique Epicure Lucr ce ou moderne Gassendi Ce qui peut conduire a s interroger sur la nature des effets produits par ce type de discours libertin l h tel de Bourgogne ou sur quelque autre sc ne aux alentours de 1653 LE DEMON DE L EQUIVOQUE LE RIEN DANS TOUS SES ETATS S janus int gre les philosoph mes picuriens une rh torique de la pointe dont Cyrano est reconnu comme ma tre en tant que t
518. rique se dissipe en m me temps que l objet fallacieux de sa qu te qui mest peut tre que son reflet parce qu il est lui m me l instar du monde un simple songe une vaine illusion un mirage Les recherches formelles de S Certon pour cr er un sonnet cho lipogrammatique expliquent partiellement la pr sence de ce po me dans l anthologie Outre P exercice de langage le fin connaisseur de la Renaissance qu est A M Schmidt y a vu un sonnet qui s int grait de plein droit dans le champ de la po sie baroque et dans les th matiques de Pamour noir mais qui par son brouillage continu et son estompage des rep res les plus 87 Litt rature et saveur imm diats clamait une voix singuli re sinon insolite en tout cas l g rement d cal e par rapport aux r cits de r ve les plus s duisants de l automne de la Renaissance d lib r ment lascifs ou fonci rement noirs CHRETIEN DE TROYES LE CHEVALIER AU LION Lors va tant qu i vient en la sale N i treuve gent boine ne maleil Qui de riens les mete a raison Tant trespassent de la maison Qu il vinrent en un vergier Ains de lors chevax herbegier Ne tinrent plait ne ne parlerent Et sachi s bien les establerent Chil qui Pun en quident avoir Ne sai s il cuidoient le voir Encor est leur seigneur tout sain Li cheval ont avaine et fain Et la litiere jusqu au ventre Mesire Yvains el vergier entre Et apr s lui toute sa route Apuy voit
519. rle point d Henri quatre On ne parle que du cheval Pierre Thomas HURTAUT Nicolas MAGNY Dictionnaire historique de la ville de Paris et de ses environs Paris Moutard 1779 t IV p 47 2 Voir Jean Christophe Abramovici vanouissement de l inconnue Revne des Sciences humaines L vanouissement coord Paule PETITIER para tre 239 Litt rature et saveur roman de lPexpression vue de pays traduit d ailleurs cette connaissance instinctive que Jacob a des corps et de la m canique animale talent sur lequel il va forger sa carri re libertine Le second temps de examen portant sur l habit plut t que le corps vient corriger l impression premi re quand le visage annon ait une femme qui savait vivre sa parure d note l absence de toute recherche sans fa on uni qui se dit de ce qui est sans ornement et Paust rit dans la couleur et la raideur des tissus je ne sais quelle r forme d vote uniforme Jacob en conclut qu il doit s agir d une de ces femmels directeur sous entendu de conscience qui telle la Lady Lindon de Bary employaient un pr tre pour leur servir de compagnon et de pr servatif la corruption du monde Jouisseur Jacob rejette ces sortes de femmes l ces figures l dans une r action instinctive primaire et infantile Discr tement le plus que parfait ne m avait jamais plu sugg re toutefois entorse que Jacob est
520. rmation essentielle qui nous permettra de recomposer la sc ne Apparait d abord une posture apuy deseur son coute qui voque souvent dans cette litt rature un personnage perdu dans ses pens es Puis est voqu un prodomme terme qui pr sente favorablement le personnage n tait ce d tail le drap de soie qui rappelle le p nible labeur des ouvri res Enfin le contre rejet et lisoit qui met en relief cette activit inattendue accro t encore la curiosit du lecteur en retardant l objet et le sujet du verbe Cette jeune fille cultiv e lit en un rommans Rappelons que le terme d signe l poque tout r cit en langue vulgaire et non un genre quoique justement celui ci commence prendre forme Le mot plac la coupe 4 4 n est pas impos par la rime et peut surprendre Gautier d Arras avait galement d crit des sc nes de lecture mais il avait employ les termes livre ou brief L expression ne sai de cui a pu pr ter confusion le sens moderne de je ne sais qui semble anachronique au Moyen Age le nom introduit par la pr position de dans le titre des uvres le Roman de Troie de Clig s renvoie au sujet ou au h ros non l auteur Mais que vient faire ici cette trange cheville 92 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink La r p tition du mot romman confirme le caract re significatif du choix de
521. roit il il resserre son criture sa pratique et ouvre les esprits sur ce qu ils auraient d lire et qu ils entrevoient brutalement On me 415 Litt rature et saveur reprochera sans doute entre autres objections bienvenues mon quasi silence sur la m thodologie de lexplication de texte telle qu elle est pratiqu e ici C est que ce point rebattu plus que de raison souffre aux yeux de l int ress d un double d savantage 1 Il enferme les explications dans une technique st rile juste capable de convenir aux demandes scolaires formul es par Padministration qui en assure la tutelle qui font de l tude de texte un glossaire appliqu sans raisonnement ni perspective Or telle n est pas la vocation de l explication du th tre vu ou imagin Et quelles que soient les bonnes intentions y en a t il au moins force est d admettre que l accent mis constamment sur la technique s che sur le commentaire inlassablement redoubl du commentaire m thodologique sert de caution et de masque au refus non moins obstin mais plus cauteleux de lire le th tre d faut de le jouer Peut tre ai je tort mais il ne me semble pas que l application d un glossaire jette une grande lumi re sur le travail que j ai tent de d crire en m inspirant un peu si peu d une autre id e du Prince p dagogue plus simple citer qu imiter la critique des beaut s emprunt e son ma tre Diderot
522. royaume d en face compte beaucoup de papistes qui sont aussi gens intelligents Habitu s constamment depuis qu ils ont commenc penser croire qu un certain homme qui gouverne leur Eglise est infaillible ils sont pr ts admettre contre le bon sens qu un m me corps peut se trouver en plusieurs endroits la fois Le papiste peut tre par ailleurs pond r et aimable et attach aux solides biens de la nature Plus grave est le cas de ceux qui se croient personnellement infaillibles puisque Dieu les a visit sans autre fa on d nonc s dans le chapitre de P Essai IV XIX que Locke consacre l enthousiasme Pareille assertion inspiration directe permet de renoncer l exercice de son propre jugement Elle attire tous ceux qui sont incapables de justifier leurs actions et leurs opinions par la voie des arguments et de la raison Toute opinion si absurde soit elle qui leur passe par Pesprit est justifi e par avance 1 Essai IL XXIII 7 et I XIII 4 2 De lerreur Essai IV XX 10 endroit o Costes remplace les Romanistes intelligents par des Luth riens de bon sens et la Transsubstantation par la Consubstantation 225 Litt rature et saveur L enthousiasme n tant fond ni sur la raison qui voudrait des preuves ni sur la r v lation divine qui ne saurait se contredire de Pun Pautre rel ve de la suffisance de certains au cerveau surchauff et imbus d eux m
523. rt d ordre de sym trie car du ton sublime dont il parle de ces notions on ne sait s il les croit acquises et factices ou s il les croit inn es Encyclop die art Beau t II 1751 p 175 col a b 249 Litt rature et saveur fondement m taphysique ainsi r duit on l interrogation sur la nature du beau une enqu te sur les modifications affectives qui nous le signalent et qui d finissent le go t L ouverture de l Essai sur le go t effectue d une mani re remarquable une telle r duction que l on peut rep rer par une comparaison textuelle pr cise qui donne son occasion mon article Certes Montesquieu laisse de c t la d finition des trois sortes de beaut s que le P Andr pensait partir de l ordre mais il en reprend le sch ma tripartite du point de vue du sujet de Pexp rience esth tique Consultons les deux textes au chapitre III de PEssaz le P Andr rappelle le syst me qu il a mis au point et applique aux ouvrages de Pesprit il distingue donc un beau essentiel qui plait l esprit pur ind pendamment de toute institution m me divine un beau naturel qui plait l esprit en tant qu uni au corps ind pendamment de nos opinions et de nos gotits mais avec une d pendance n cessaire des lois du Cr ateur qui sont l ordre de la nature ce sont les lois de l union en vertu desquelles l me prouve un plaisir li an bon tat du corps un beau arbitraire si j ose
524. rue 1 Ibid p 162 GUSTAVE FLAUBERT LETTRE A MADEMOISELLE LEROYER DE CHANTEPIE Par Annie URBANIK RIZK professeur de premi re sup rieure lyc e Auguste Blanqui et Hadi RIZK professeur de chaire sup rieure lyc e Henri IV Croisset 6 juin 1857 Et tout cela parce qu on veut une solution Oh orgueil humain Une solution le but la cause Mais nous serions Dien si nous tenions la cause Et mesure que nous irons elle se reculera ind finiment parce que notre horizon s argira Plus les t lescopes seront parfaits et plus les toiles seront nombreuses Nous sommes condamn s rouler dans les t n bres et dans les larmes Quand je regarde une des petites toiles de la voie lact e je me dis que la terre west pas plus grande que l une de ces tincelles Et moi qui gravite une minute sur cette tincelle que suis je donc que sommes nous Ce sentiment de mon infirmit de mon n ant me rassure I me semble tre devenu un grain de poussi re perdu dans l espace et pourtant je fais partie de cette grandeur illimit e qui menveloppe Je n ai jamais compris que cela f t d sesp rant Car il se pourrait bien quil n y e t rien du tout derri re le rideau noir L infins d ailleurs submerge toutes nos conceptions Et du moment qu il est pourquoi y aurait il un but une chose aussi relative que nous Imaginez un homme qui avec des balances de mille coud es voudrait peser le sable de la mer Qua
525. rvice du Roi de France qu il a explicitement oppos aux charmes de l utopie rustique qu il cr e dans l Astr e 3 l Astr e Premi re partie Livre premier Slatkine Reprints 1966 p 9 438 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink notre h te et que la fable n tait si contraire la r alit que je me hasardai lui demander s il n tait pas vrai qu il f t C ladon que le grand Enric f t Henry le Grand et ainsi des autres personnages de ma connaissance Il me r pondit d un air un peu s v re que c tait bien peu que dix neuf ans pour me confier tant de secrets d une si haute importance Car ajouta t il il y a des Princes et des Princesses il y a des Rois et des Reines qui montent sur notre Th tre et je ne puis vous entretenir de leurs passions sans vous d couvrir beaucoup de choses dont peut tre l ge o vous tes vous auriez peine de vous taire Je vous promets qu votre retour je vous donnerai tout ce que vous souhaitez Et toutefois lui r pondis je je n aurai alors que vingt ans Cela est vrai reprit il en m embrassant mais avec les lumi res et les inclinations que vous avez ce n est pas peu qu une ann e de Pair d Italie Je pensais d j tenir cette clef si ardemment d sir e je croyais d j savoir tous les myst res de l ing nieuse tromperie de Climanthe et de Pimmortelle fontaine de la v rit d Amour Mais cet homme
526. s les voil condamn s le faire dispara tre ou le justifier C est ainsi qu il y a comme pour toutes les grandes uvres une histoire des lectures philosophiques ou une histoire philosophique des lectures de L esprit des lois C est pr cis ment celle l que Goldzink entend ne pas continuer tout en la respectant m me s il feint de renvoyer dos dos Althusser le marxiste la pr sence du droit naturel dans l uvre mest qu un reste id aliste in vacuable et Lanson le radical socialiste Montesquieu demeurant attach l id e de droit naturel affronterait par anticipation le positivisme juridique et ses cons quences d sesp rantes T m raire va t il s engager d couvert sur le th tre d op ration depuis longtemps balis par les philosophes Le dispositif strat gique qu il adopte va 1 J J Burlamaqui Principes du droit naturel 1748 2 G Lanson D terminisme historique et id alisme social dans L esprit des lois Revue de m taphysique et de morale 1916 423 Litt rature et saveur consister sur la question prise en exemple de l galit des sexes mobiliser un extrait des Leftres persanes 1721 Lettre XXXVIII une pens e n 1928 sur le caract re naturel de certains interdits et le livre XVI de L esprit des lois 1748 On aura relev au passage apr s les pr cautions oratoires le pied de nez adress aux gardiens des temples philosophiques et litt rai
527. s Est ce Th mis est ce V nus Qui l a rendu si difficile Soit que d un vieux papier timbr 1 Ibid p 14 2 Expos d bat du 16 novembre 1971 t l chargeable sur www webdeleuze com 299 Litt rature et saveur Tu d brouilles le long grimoire Soit qu un tendre objet ador Lui de une douce victoire L faut que loin de m oublier T m crive avec all gresse Ou sur le dos de son greffier Ou sur le cul de sa ma tresse Abh datez du cul de Manon C est de l qu il me faut crire C est le vrai tr pied d Apollon Rempli du fen qui vous inspire crivez donc ces vers divins Mais en commen ant votre pitre La plume chappe de vos mains Et vous foutez votre pupitre M me situation quivoque chez Gr court Pupitre posth 1746 ou Laclos Lettre 46 des Liaisons la femme pupitre devient un lieu commun de la litt rature rotique dans ces poques archaiques o rotisme et litt rature se pratiquaient encore la main Tous ces textes repr sentent le stade le plus ancien de la litt rature a la plume la trace manuscrite sur le corps du pupitre nous ram ne l re du scribe R v roni lui en est a impression m canique industrie supplante l artisanat d Ancien R gime et le grand ordonnateur de la c r monie est un Anglais le tra tre par excellence certes dans cette p riode r volutionnaire mais aussi par m tonymie celui par lequel la r volution indu
528. s attache pourchasser les contes de vieilles d noncer des l gendes combattre des r putations usurp es Il prend place galement dans la th matique si riche du refus de Pirrationnel et du suprarationnel d Apparition qui renvoie en note Vision et Vampires Miracles Proph ties Les ph nom nes de communication avec l au del rel vent pour Voltaire du genre de la friponnerie ou du genre de la folie les miracles ou les pr dictions violations des lois immuables de la nature sont de l ordre des impossibilit s L enjeu de ce texte est alors diff remment accentu dans les Questions sur l Encyclop die centr sur l esprit d affabulation probl me autrement important que des querelles avec un abb Nonnotte Ainsi le m me texte transf r et transplant bien que reproduit la lettre pr s n est il ni tout fait le m me ni tout fait un autre pour le lecteur Il veille des harmoniques qui varient selon louvrage dans lequel il est greff Le texte migrant d sar onne y compris lorsqu il ne subit pas de m tamorphose 1 J Goldzink Voltaire Portraits litt raires Paris Hachette 1994 p 97 2 12 M XX 582 3 La question des textes transf r s mais galement celle des textes r crits dans les Questions sur l Encyclop die est d importance Elle n a gu re t tudi e jusqu alors Sur l article Propri t voir
529. s ch ant cette chair et cette ombre apparemment si 407 Litt rature et saveur loin d un texte support d incessantes et impr visibles m tamorphoses formelles Si cette objection a le m rite involontaire de rappeler que la compr hension d un texte ne s offre pas au d compte des mots ni aux trivialit s du sens commun tels le baton dans l eau ou la course du soleil me permettra t on n anmoins de la juger frivole et m me d une pr occupante futilit Car enfin d s qu un ouvrage et d autant plus dans la critique contemporaine s intitule De Chair et d ombre P l ve et le lecteur sont dans obligation dy rapporter les actes et propos du critique De faire effort pour en deviner la signification de s en saisir comme d un fil d Ariane pour tenter de d chiffrer ce que dit et fait le r dacteur aux prises ici avec ses fant mes ses peurs bref aux prises avec soi m me Inscrite dans le titre la condition contradictoire et coordonn e tendue entre deux p les la condition de b tard ne d finit peut tre pas tout l tre du personnage on ne tirera le bilan qu apr s le cours ou Passoupissement du Ile acte ou encore dans l apr s coup encore obscur et agit d une repr sentation th trale et sans doute m me dune lecture t te plus repos e mais il en constitue n cessairement une composante d terminante la premi re qui s impose au destinataire Si le programme de lecture impliqu
530. s dans ta 301 Litt rature et saveur lumi re j ai vu que tu les as conserv es par ardent amour et elles ne sont pas g n es ni elles ni la couleur du sang par le corps glorieux et elles ne g nent pas ce corps Les stigmates sont le verbe crit sur le Verbe incarn Lecture imm diate et sans ambigu t Voir la l gende de Saint Fran ois Plus quivoque l avatar du stigmate dans le r cit rotis ainsi les faux fabriqu s par le r v rend P re Girard sur le corps de Catherine Cadi re dans Th r se philosophe ces faveurs cruelles de P poux c leste commente Michelet dans a Sorci re inutile d invoquer les Kama Soutra pour rappeler que Pamour s crit toujours en cicatrices Artisanat pourtant artisanat toujours dans cette histoire exemplaire de 1730 Girard fait fabriquer par un artisan une couronne d pines d acier pour sa p nitente et sur sa face sanglante il imprime des V ronique vendues des personnes de pi t La parodie du trafic des reliques tant d cri par Luther trouve dans les crits rationalistes du Marquis d Argens ou de Michelet un cho rotico commercial r jouissant Apr s le pur artisanat Dans la plupart des romans du XVIII me si cle les machinations l emportent sur les machines note Foucault avec pertinence l tape m canique Sade deux ans avant R v roni Ce que le bourreau tire de sa victime dans les romans du Divin Marquis
531. s sous un arbre estendu Par Jean Charles Monferran ss Chr tien de Troyes Le chevalier au lion Par Atiane Schred r sis eienn En ENEE Cyrano de Bergerac La mort d Agrippine Pat Jean Charles Darmon ssnsssssssmtinnsun Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Diderot Le r ve de d Alembert Par Florence Loft Ann in Rennes Dumas Les trois mousquetaires par Sarah Mombert penaren nn ne Mure Fahlstr m Planetariet Par Jean Max Collard Fante Demande la poussi re Par Stephane PreZIOSL e nn nnentannhninrs Flaubert Lettre Mademoiselle Leroyer de Chantepie Par Annie Urbanik Rizk et Hadi Rizk eee Flaubert Madame Bovary Pat H l ne Kun 6 Genet Journal du voleur Parl an Renaud Gide Les faux monnayeurs Par H di Kaiddo t ss Geethe Les souffrances du jeune Werther Par Betnatd rageceee iii Guilleragues Lettres portugaises Par Florence Chapito ssssssssssssssssssnssssnsnsnst Jaccottet Fruits Par Jacques Vassevi re p Kant Critique de la Raison pure Par Michele Erapreee Laclos Les liaisons dangereuses Par St phane Pu Locke Le magistrat civil PA Patick PCR ne me Machiavel La mandragore Par Jean Claude Zancari iiii Marivaux Le paysan parvenu Par Jean Christophe Abramovici Litt rature et saveur Montesquieu Essai sur le go t Par Andre T E 243 Musset Lorenzaccio Par Christine Marcand eee is
532. s v rit de sentiment v rit de d monstration attendrir raisonner est construite la fa on d un syllogisme On peut s en tonner au moment o il s agit de persuader de Pinad quation d un langage cart sien en amour on est frapp par la forte structuration logique du discours Quand vos belles phrases produiraient l ivresse de Pamour Le mot produire 1 Dans le syst me libertin Poccasion et le moment sont synonymes voir La Nuit et le Moment de Cr billon ils d signent l instant pr cis o la d faite de l autre est possible lorsqu il qu il c de Pappel de sa propre sensibilit 2 Pour s en convaincre il suffit de lire la lettre 106 Vous n avez pas le g nie de votre tat vous n en savez que ce que vous avez appris et vous n inventez rien Aussi d s que les circonstances ne se pr tent plus vos formules d usage et qu il vous faut sortir de la route ordinaire vous restez court comme un colier 210 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink prendre au sens classique est une fa on de rappeler que la rh torique est l art de bien dire de parler de mani re persuader Littr Mais on peut entendre aussi une production qui renvoie l activit d crivain con ue selon Laclos sur le mod le bourgeois de lactivit conomique On pourrait dans cette perspective relever l importance donn e au crit re pragmatique dans
533. s d embl e celui de l interlocuteur voire de l adversaire c est cette esp ce de tu g n rique qui sert proposer un exemple et qui vient donner corps au ce qui abstrait de ce qui me fait du bien Le 383 Litt rature et saveur je est son prochain et ce tu s emploie combler les divers manques dont doit souffrir le je en autant d actes que celui ci dit incontestablement vertueux Le tu apostroph dans le paragraphe deux garde cette valeur g n rique mais il est surtout pris partie dans un pseudo dialogue o le je confisque sa parole d veloppant Vamorce sur laquelle s est conclu le paragraphe pr c dent et il incarne maintenant le d tenteur et le d fenseur des vertus cardinales et th ologales le chr tien qui Saint Paul a parl C est un personnage de ce genre qu il faut attribuer la deuxi me objection qui ouvre le paragraphe trois encore qu elle ne jouisse pas d un statut vraiment ind pendant du discours du je Au reste ce long paragraphe central ne comporte aucune inscription de linstance objectrice le tu a disparu relay dans sa fonction d incarner les exemples par une figure d sign e la troisi me personne un solitaire ce qui cr e une certaine dis tance par rapport au je locuteur lequel au reste parle surtout au nom de la soci t de la communaut humaine il use d un nous qui a peut tre absorb le
534. s estendu entendu attenda enfin et surtout retour de certains mots tous r unis par une assonance en je vent v 2 13 bien v 5 8 12 et avant tout ren qui appara t dans chacune des strophes v 2 8 11 14 a chaque fois avec un r f rent diff rent et assure comme un refrain la fin des trois derni res strophes contrariant ainsi la structure dynamique du sonnet par sa r p tition La seconde fa on de lire le sonnet s appuie sur une lecture radicale de l nonciation si le tu ne r appara t pas dans le po me c est que la femme laquelle s adresse le po te s est n cessairement vanouie avec la Dame du r ve parce que ces deux figures n en font qu une d s le deuxi me vers Florine notons que ce pr nom n appara t qu la suite du verbe songer est d j une cr ature de l imagination un fant me auquel le po te donne corps et le po me dit alors moins exp rience de l absence que la poursuite perp tuelle chez le sujet d une illusion d une chim re 86 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Dans ce cadre l abstraction et la d r alisation entrevues sont encore plus l gitimes puisque elles se conforment somme toute un objet vanescent ombre ou idole selon les mots de Th ophile Ce qui accr dite aussi cette lecture c est que dans les po mes sur la Dame en r ve qui insistent sur la discordance entre la douceur du songe et l amertume d
535. s et les sentiments des personnages l exception de ceux qui s expriment par le biais du discours direct Il ne livre que des notations renvoyant un tat du corps Italien s vanouit ou une attitude g n rale Pautre ne le regarda pas plus que les fois pr c dentes compatibles avec la perspective de narration adopt e Comme souvent dans La Route des Flandres le r cit est 340 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink focalis par Georges comme l indique la locution modalisante quelque chose comme C est m me une r alisation extr me de la focalisation interne le r cit se contentant de d crire ce que voit Georges ou ce qu il se rappelle avoir vu C est encore comme indice de focalisation qu on peut interpr ter la mention de l il du banquier qui s accompagne d une mont e des adjectifs la fin du texte Ceux ci appartiennent un ensemble homog ne qui renvoie la notion d impassibilit froid mort parfaitement inexpressif parfaitement froid Ils disent Pinutilit de toute tentative pour deviner la pens e ou les sentiments du banquier partir de sa physionomie Les personnages n ont pas de nom propre moins de consid rer que l Italien fonctionne ici de mani re analogue Ils sont d sign s par le r le qu ils remplissent dans l histoire Pun par une sorte d encha nement n cessaire le banquier d j mentionn
536. s ils vous cherchent en tous lieux et ils ne me rapportent pour toute r compense de tant d inqui tudes qu un avertissement trop sinc re que me donne ma mauvaise fortune qui a la cruaut de ne souffrir pas que je me flatte et qui me dit tous moments cesse cesse Marianne infortun e de te consumer vainement et de rechercher un amant que tu ne verras jamais qui a pass les mers pour te fuir qui est en France au milieu des plaisirs qui ne pense pas un seul moment tes douleurs et qui te dispense de tous ces transports desquels il ne te sait aucun gr Mais non je ne puis me r soudre juger st injurieusement de vous et je suis trop int ress e vous justifier je ne veux point n imaginer que vous m avez oubli e Ne suis je pas assez malheureuse sans me tourmenter par de faux soup ons Et pourquoi ferais je des efforts pour ne me plus souvenir de tous les soins que vous avez pris de me t moigner de l amour Gabriel de Guilleragues Lettres portugaises d Fr d ric Deloffre Gallimard coll Folio classique 1990 p 75 76 Litt rature et saveur C est un texte presque sans auteur et d une simplicit a en d concerter plus d un Il n est pas tr s long en effet Qu en dire qui ne soit d j de trop Dans l dition de Fr d ric Deloffre la pr face critique occupe deux fois plus de place que le texte lui m me et nous ne tenons pas encore compte du dossier v ritable arsenal cens i
537. s vraiment de solution et ne valent donc pas la peine que lon s tripe Reste ces principes qui concernent la vie en soci t et le Salut Le Christ nous a fourni un code moral qui appelle une adh sion raisonnable et garantie par la Divinit existence de Dieu ne se range pas dans les dogmes sp culatifs Les chr tiens pacifiques n auront pas de mal s accorder sur les points fondamentaux de la moralit et s y conformer Mais il y a peu de chr tiens pacifiques c est dire peu pr s raisonnables et pas mal de coupeur de cheveux en quatre D o vient cela Ici les Chinois peuvent aider et alerter si l on veut bien frotter coutume contre coutume Car I1n y a presque personne qui ne remarque dans les opinions dans les raisonnements et dans les actions des autres hommes quelque chose qui lui paraisse bizarre et extravagant et qui l est en effet Chacun a la vue assez perante pour observer dans un autre le moindre d faut de cette esp ce si il est diff rent de celui qu il a lui m me et il ne manque pas de se servir de sa raison pour le condamner quoiqu il y ait dans ses opinions et sa conduite de plus grandes irr gularit s dont il ne s aper oit jamais et dont il serait dificile pour ne pas dire impossible de le convaincre L anecdote chinoise de 1660 valide d j la remarque Les raisons de nos luttes intestines peuvent tre bien diff rentes et les d fauts en cons quence mais galement sans i
538. s Verne Je peux me tromper dans quelques unes de mes observations mais quand elles sont multipli es sur le m me objet et attest es par des hommes dignes 57 de foi et sans esprit de syst me j en peux tirer des cons quences g n rales qui ne doivent pas tre indiff rentes au bonheur du genre humain en lui montrant des intentions constantes de bienveillance dans l Auteur de la nature Les vari t s de leurs convenances se pr tent des lumi res mutuelles les moyens sont diff rents mais la fin est toujours la m me La m me bont qui a plac le fruit qui devait nourrir l homme la port e de sa main y a d mettre aussi son bouquet Nous remarquerons ici que nos arbres fruitiers sont faciles escalader et diferent en cela de la plupart de ceux des for ts De plus tous ceux qui donnent des fruits mous dans leur maturit et qui auraient t expos s se briser par leur chute comme les figuiers les matiriers les pruniers les p chers les abricotiers les pr sentent peu de distance de terre ceux au contraire qui produisent des fruits durs et qui n ont rien a risquer dans leur chute les portent fort lev s comme les noyers les ch taigniers et les cocotiers n y a pas moins de convenance dans les formes et les grosseurs des fruits Il y en a beaucoup qui sont taill s pour la bouche de l homme comme les cerises et les prunes d autres pour sa main comme les poires et les pommes d autres beaucoup plus gros
539. s ce sera la so lerie de peinture Mercadier s tait voulu amateur et collectionneur en sa jeunesse Mais si lon file la m taphore voici que menace la gueule de bois Mercadier commen ait ressentir sa propre solitude comme un alcool trop fort Analysant les tats d me du protagoniste le r alisme aragonien proc de volontiers en recourant au mode d ceptif le r el ce serait toujours moins que l on ne croyait syndrome de la belle Lamiel de Stendhal avec son fameux ce n est que a D o dans notre page le retour de la n gation dite exceptive outil syntaxique privil gi des sentences d sillusionn es il ne retrouve que de quoi mieux mesurer son m pris des batailles 25 Litt rature et saveur contemporaines il ne reste plus que ces traces magnifiques des temps anciens L homme moderne n a le choix quentre Pesclavage et le m pris insertion dans la soci t ou la s paration hautaine Occurrences auxquelles on pourrait ajouter il se persuada fort vite qu il n en tait rien en laissant le pronom et les points de suspension sugg rer combien Mercadier penche vers un nihilisme m lancolique dans lequel le temps d fait s gr ne Cette m lancolie de Pierre Aragon en un sens la partage Il est temps de souligner que l auteur raconte l exp rience de son personnage dans une perspective ambivalente D un c t l criture de ces pages italiennes fourn
540. s d buts peut tre plus vanescent Ce trouble pourquoi lui en fait il justement confidence elle Savait elle que cette premi re explication de texte sans doute inscrite dans un pass lointain avait marqu si durablement limaginaire de son ancien professeur Si elle Pignorait Paveu est de nature flatter sa coquetterie En revanche si elle le savait P vocation d une jeune tudiante venue occuper symboliquement sa place a sans doute pour fonction de piquer sa jalousie Le lecteur est conduit formuler diverses hypoth ses n excluant pas une strat gie amoureuse complexe o plusieurs intentions seraient poursuivies simultan ment Il faudra conclure sur le r le du lecteur qui semble central dans le projet litt raire de ce texte Confront un r cit si lacunaire quel est ce texte dramatique quel lien existe t il entre les deux protagonistes principaux dans le temps du r cit et dans le temps voqu par le souvenir comment ce lien a t il volu comment l aveu fait il avancer la situation le lecteur est n cessairement conduit formuler de multiples hypoth ses et mobiliser sa propre exp rience du rapport ma tre l ve du rapport amoureux et de la litt rature On retiendra une autre conclusion concernant le ma tre mais d une port e plus g n rale explication de texte au c ur de la 15 8 p gt pratique professionnelle du ma tre appara t concomitamment au 79 Litt rature
541. s dire jusqu apr s ma mort et celle de M de Belley Je jurai tremblant de ce ma jeunesse ne pourrait peut tre pas soutenir un secret aussi grave Il y a dans notre ch teau une chambre constitu e de telle sorte qu une galerie secr te permet de voir tout ce qui s y passe et que les seigneurs de Senoy ont utilis e pour 450 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink diverses fins tant politiques qu amoureuses Et pour ce qu elle a t surveill e par tant de regards nous l avons nomm e la chambre d Areus J ai hier soir pass quelque temps dans cette galerie manuscrit com Editions Editions Le Manuscrit Le Manuscrit www manuscrit com Depuis 2001 les ditions Le Manuscrit www manuscrit com ont par Poriginalit de leur formule ouvert un nouvel espace de publication dans le paysage de P dition Grace un savoir faire unique qui associe culture traditionnelle de l dition et ma trise d innovations technologiques majeures les ditions Le Manuscrit www manuscrit com garantissent la disponibilit permanente des textes sous un double format le livre papier et le livre num rique pour une souplesse totale d dition qui inscrit le livre dans la culture du d veloppement durable Un catalogue ouvert aux diff rents domaines ditoriaux litt rature g n rale recherche universit Europe propose travers le monde un fonds de plus de 7 000 r f rences et r
542. s et chinois sur l Oussouri et se r percutent jusque dans les murs de l cole o le PC et les maoistes changent invectives et horions C est 4 ce moment qu appartient pour moi Jean Goldzink de ces heures qu il tire son tre quitte exister pour d autres sous d autres modalit s que je leur abandonne bien volontiers Je ne c derais pour rien au monde le pr jug que g n ration apr s g n ration nous partageons savoir que les quelques ann es que nous avons pass es PENS furent les plus hautes de son histoire 18 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink parce qu elles taient les meilleures de notre h gire les plus folles les nonpareilles On s est familiaris avec lassistant au regard sombre chemise bleu lavande pantalon clair de toile crue qui nous avait plus ou moins trill s dans la chaleur de cet t comme il n y en aura jamais plus Je lui suis redevable d avoir t a la mesure de ce temps jeune ouvertement communiste dans sa vie et son enseignement attach r unir ce qui pour nous par le pass existait l tat s par le monde opaque d un c t de l autre les livres al atoires d sincarn s en l air quoi se ramenait enseignement de la litt rature Lui m me habit d un pass dont nous avons devin peu peu le poids la cruaut la mort aux trousses de Penfant juif qu il avait t dans la France p tainiste sa m
543. s et noum nes Lanalytique transcndantale a donc cet important r sultat de montrer que l entendement ne peut Jamais faire a priori qu anticiper la forme d une exp rience possible en g n ral et que qui n est pas un ph nom ne ne pouvant pas tre un objet de l exp rience il ne peut jamais d passer les bornes de la sensibilit dans lesquelles seules les objets nous sont donn s Ces principes sont simplement des prinapes de l exposition des ph nom nes et le titre pompeux d une ontologie qui pr tend donner des choses en g n ral une connaissance synth tique a priori dans une doctrine syst matique vg le principe de causalit doit faire place au titre modeste d une simple analytique de l entendement pur Critique de la Raison pure 1787 traduction A Tr mesaigues et B Pacaud Paris PUF 1950 p 222 Litt rature et saveur Kant le d placement de l ontologie On ne peut pas expliquer un texte L auteur qui l a produit sait il ce qu il a fait En admettant que oui par optimisme qui oserait affirmer que le lecteur ou pire le commentateur le sache mieux plus lucidement que son auteur il reste que certains textes parce qu ils sont en tat d innovation conceptuelle et donc n cessairement en pol mique eu gard des traditions qu ils ont Pambition de d passer peuvent pr tendre la fois une mise en question de ce qu ils examinent et audacieusement la mise en lumi re d un sens nouveau
544. s fa on une cornette unie un habit d une couleur l avenant et je ne sais quelle r forme d vote r bandne sur toute cette figure le tout soutenu d une propret tir e quatre pingles me firent juger que c tait une femme directeur car elles ont presque partout la m me fa on de se mettre ces sortes de femmes la c est l leur uniforme et il ne m avait jamais plu Je ne sais qui i faut s en prendre si c est la personne ou l habit mais il me semble que ces figures l ont une aust rit critique qui en veut tout le monde Cependant comme cette personne ci tait fraiche et rago tante et qu elle avait une mine ronde mine que j ai toujours aim e je m inqui tai pour elle et lui aidant se soutenir Madame lui dis je je ne vous laisserai point l si vous le voulex bien et je vous offre mon bras pour vous reconduire chez vous votre tourdissement peut revenir et vous aurez besoin d aide O demeurez vous Dans la rue de la Monnaie mon enfant me dit elle et je ne refuse pas votre bras puisque vous me loffrez de si bon a ur vous me paraissez un honn te gar on Le Paysan parvenu 1734 35 d Michel Gilot Paris Flammarion coll GF 1965 p 137 Litt rature et saveur Anatomie d une rencontre libertine Jacob et Mademoiselle Habert Le Paysan parvenu et La Vie de Marianne sont deux romans des premi res fois des premiers apprentissages qui s interrompent et s ach vent a
545. s fin mai ajoutera encore en 1963 celui qui n tait pas seulement artiste mais galement essayiste critique dart adepte de la po sie concr te critique litt raire et d j auteur en novembre 1960 d un premier article sur le roman de Sarraute dans le journal Expressen Et encore traducteur depuis la publication en su dois des crits du Marquis de Sade jusqu aux tableaux Monopoly qui tenteront de retranscrire en peinture le 1 Merci Nadine Pouillon conservatrice au Mus e national d art moderne de ses pr cieuses explications techniques et de sa visite guid e dans la salle Fahsltr6m du mus e au 4e tage du centre Pompidou 2 Notes sur ADE LEDIC NANDER 2 1955 57 New York octobre 1963 in yvind Fahlstr m Essais choisis les presses du r el 2002 p 106 3 Romanen som lupp Expressen Stockholm 6 novembre 1960 Le roman comme loupe texte traduit par Gunilla de Ribaucourt et publi dans yvind Fahlstr m Essais choisis les presses du r el 2002 p 53 54 Litt rature et saveur syst me conomique mondial l uvre enti re de Fahlstr m peut se lire comme une vaste entreprise de traduction On pourra donc en dire autant de l ensemble du Plan tarium effectu en 1963 alors que Fahlstr m vit d sormais aux Etats Unis cette constellation d l ments disparates de silhouettes de listes de mots d accessoires vestimentaires d coup s dessinent une tentative encore in di
546. s glossolalies et des anagrammes Sil est hautement significatif de remarquer le continu instaur par Humboldt entre linguistique et litt rature continuit qu on ne peut seulement r duire une figure historiquement marqu e celle de la philologie du XTX si cle en r alit l enjeu d une pens e de la litt rature et des discours dans la th orie du langage est sans cesse reconduit Il l est aussi chez Saussure si l on veut bien entendre que la langue n est cr e qu en vue du discours et que c est le discours qui ne cesse de transformer la langue C est donc avec les concepts du discours et non avec ceux de la langue que doivent tre approch s les textes et sp cifiquement les textes litt raires Or qui ne voit aussi que ce qu on a pris coutume d appeler le structuralisme litt raire qui s est d clin travers les diff rents courants de la narratologie une facette de la s miologie un aspect de la po tique s largissant ou se contractant en science des textes ou en grammaires textuelles a recherch un mod le qui rende compte de lessence des ph nom nes et mette la r alit des textes des r cits en particulier dans un rapport de d rivation la g n ralit du type C est Roland Barthes celui de l Introduction Panalyse structurale des r cits Communications n 8 1966 qui fournit Pexemple canonique de la d marche en r f rence a Propp L vi Strau
547. s images qui se succ dent dans la m taphore fil e Les mots se chargent d un sens double et m me triple dans le cas de pendeloque d j dot d un double sens lexical selon qu il est employ au singulier Pierre pr cieuse en forme de poire qui pend une boucle d oreille ou au pluriel Cristaux attach s un lustre Cette polys mie suscite dans Pesprit du lecteur des images de bijoux f minins comme perles de lumi re comme globes et lampes et par la forme de poire du bijou de fruits Le vocabulaire s organise ainsi en cinq grands r seaux lexicaux troitement articul s Le r seau lexical des fruits qui 1 Dictionnaire Lexis Larousse 1992 195 Litt rature et saveur d veloppe le titre vergers branche herbe mais aussi parfum a surtout une valeur r f rentielle Il se prolonge de mani re plus allusive et m taphorique avec les globes et les paupi res vertes qui font r f rence aux feuilles des arbres fruitiers Le po me n est pas une le on de choses il m le plusieurs domaines de la r alit et laisse percevoir travers Punivers de la nature celui des hommes Le r seau lexical du temps la course du temps la hate longtemps est naturellement associ au pr c dent dans la mesure o le po te voque la maturation des fruits il a donc aussi une valeur r f rentielle Toutefois le d roule
548. s magnifiques et des fresques d labr es pour indiquer cette richesse h t rog ne que per oit Mercadier d une tape italienne Pautre R alisme de la profusion laquelle tourne souvent la confusion carnavalesque le monde devient un trange vertige r e o est ce les villes se transforment en d cors successifs tel celui du Castel Vecchio o Pierre n chappe pas la com die en enfilant le costume des capitaines d antan le pr sent est hant par le pass grandeur et servitude voisinent la beaut touche la ruine les ruines ont leur beaut Il n est pas jusqu aux niveaux de langue qui ne se m langent se monter la t te nous dit Littr est figur pour s exalter et familier comme la m taphore se so ler avec la peinture Mais dans lexpression d une beaut d funte le 24 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink participe noble est pr f r morte ladite expression s ins re d ailleurs dans tout un ensemble de cellules m triques d allure classique il avait beau voir en ce monde trange et luxueux d une beaut d funte le jardin de sa propre sensibilit enfin elle se relie par la d rivation qui rattache beaut au tour il avait beau un rythme anaphorique ternaire Entre ces deux p les pla ons une tournure comme faire liti re basse par son r f rent mais sentie comme vieillie on la
549. s offerts Jean Goldzink Le libertin la politique et la mort selon Cyrano de Bergerac remarques sur quelques belles impi t s Un fou nomm Cyrano fit une pi ce de th tre intitul e La Mort d Agrippine o S anus disait des choses horribles contre kes dieux Sercy qui limprima dit Boisrobert qu il avait vendu l impression en moins de rien Je men tonne dit Bo sroberf Ah Monsieur reprit le libraire ily a de belles impi t s Ces propos de Sercy rapport s par Tallemant sont l une des rares traces qui nous restent de la r ception de l unique trag die de Cyrano probablement jou e en 1653 l H tel de Bourgogne Si Pon en croit Gu ret dans sa Guerre des Auteurs Anciens et Modernes 1671 ces m mes impi t s firent d fendre Agrippine qui sans trente ou quarante vers qui blessent les bonnes m urs aurait diverti longtemps le public et tiendrait encore sa place sur le th tre Longtemps les impi t s en question qu on les trouv t belles ou non contribu rent la fois la notori t de la pi ce et sa m connaissance lors que La Mort d Agrippine est voqu e pat l historien de la litt rature ou des id es ce sont du reste ces quelques extraits qui sont g n ralement cit s au premier chef la sc ne V de Pacte II o figurent les vers sans doute les plus scandaleux ceux qui seront repris quelques ann es plus tard par les auteurs du Theop
550. s positives c est dire qu avant qu on e t trac de cercle tous les rayons n taient pas gaux Il n emp che qu il s en faut de beaucoup que dans les affaires humaines les choses soient aussi parfaites que dans la sph re platonicienne des essences math matiques La fiction litt raire pose donc sa fa on romanesque la question philosophique Ajoutons m me que d s les Lettres persanes Montesquieu semble bien r pondre ne serait ce qu en concevant non pas un mais des droits naturels l objection fameuse que Kelsen adressera aux doctrines du droit naturel dans sa Th orie pure du droit 424 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Selon la doctrine du droit naturel il y a au dessus du droit positif imparfait et cr par les hommes un droit naturel parfait absolument juste tabli par une autorit surhumaine Il en r sulte que le droit positif tire sa justification et sa validit de sa correspondance avec le droit naturel Si tel tait le cas P laboration du droit positif ne serait qu une activit ridicule comparable un clairage artificiel en plein soleil L argument positiviste est formel qui feint la simplicit la ou r gne la complexit en tout cas chez Montesquieu Ce que Goldzink sugg re fermement c est que la pens e de Montesquieu avec ses r serves ses doutes et ses audaces s est d j tablie dans le roman pistolaire pour affronter cette nigme
551. s r volutionnaires mais met en dissonance deux traitements historiques de l meute et par cons quent deux points de vue contradictoires sur la nature de ces rassemblements Cette duplicit qu une lecture didactique du texte efface certains critiques en ont montr leur corps d fendant Pefficacit en se sentant oblig s de d noncer le suppos racisme de classe de Zola bourgeois haineux qui repr senterait ici la vision tendancieuse d un peuple d grad tel est le propos d une monographie d j ancienne de Paule Lejeune On serait tent de juger qu il s agit d une banale divergence interpr tative imputable aux options id ologiques des uns et des autres Ce serait r duire une fois de plus le texte de Zola au statut d objet transparent soumis passivement aux lectures critiques alors que la vari t de ces lectures ne se con oit au contraire que si Pon met au jour le pi ge herm neutique sur lequel est fond ce passage ainsi que son substrat textuel dont les enjeux vont bien au del de la simple id ologie zolienne S il y a la tableau du peuple portrait charge pour les uns conforme limagerie r volutionnaire pour les autres la question de la valeur reconnue au peuple est pourtant seconde Elle n a de pertinence 1 A Pag s La Bataille litt raire essai sur la r ception du naturalisme l poque de Germinal Paris S guier 1989 2 P Lejeune Germinal un roman anti peuple Paris
552. s sans voquer Le Petit Chien qui riait titre de la seconde nouvelle Ainsi se confondent r el et fictionnel La derni re page tourn e ponctue cette mise en sc ne finale en avalant d finitivement le fant me de Camilla au moment pr cis o le lecteur ferme le livre Mais il demeure que la disparition de la jeune mexicaine signifie surtout la mort de la litt rature elle m me A ce titre l abandon du livre sur le si ge du mort qui pr c de au chapitre XIX le legs final au d sert fonctionne comme un signe doublement annonciateur c tait toujours de nuit Je l attendais comme on attend la lune Demande la poussi re p 208 209 1 Stephen Cooper Op cit p 264 2 On ajoutera que dans le texte am ricain Fante utilise galement le terme wasteland pour d signer l espace de la d solation synth tisant par l m me la r alit du d sert du Mojave et la litt raire Terre Gaste royaume d infertilit 3 Fante Demande la poussi re p 269 4 On notera que Fante aime lier symboliquement la litt rature et la mort pour figurer l insignifiance m me de l activit litt raire Que l on pense par exemple lP vocation de la pierre tombale de la vieille Loretta Stevens la biblioth caire de 143 Litt rature et saveur Le livre dans le sable la lyre dans la poussi re t moignent donc de P quivalence entre le r el et la fiction tous deux vou s au n ant
553. s topiques du premier quatrain arbre ou le pr nom de la belle qui en d pit de leur caract re conventionnel renvoyaient encore au monde ext rieur la Dame avec laquelle on conversait aussi comme si l vanouissement de la figure onirique de Florine entrainait n cessairement celle de la Florine r elle et le po te galement dans un bel effet de r sonance du premier vers et du dernier Pamant initialement tendu immobile finit par s en aller et le po me raconte cette triple disparition Le sonnet est une d ploration une lamentation qui ne peut que dire et redire Pabsence cette r p tition sans fin de la perte tant symbolis e par Echo Pamante malheureuse de Narcisse cette voix mutil e qui ne peut que redoubler les sons Par Pallusion au mythe Certon fait entendre la voix des po tes l giaques celle d Ovide bien s r celle aussi de Du Bellay France France respons ma triste querelle Mais nul sinon Echo ne respond ma voix Regrets IX mais pointe surtout ce qui constitue la figure essentielle de son po me la r p tition quasi choique Incessamment en effet la voix du po te se redouble ou redonne en cho anadiplose et anaphore Je cherche en vain en vain je me tourmente En vain J times bris es aux vers 2 et 3 Ne songeant rien Le sommeil vend aux vers 5 6 et 7 H que de joie Ce doux clat Autour de mo saturation sonore de certaines rime
554. s uns les autres et au dessous cette vie souterraine Fahlstr m a dispos la surface de ses panneaux tout un petit th tre des apparences silhouettes et st r otypes jupes et chapeaux aux corps interchangeables clich s sociaux d coup s dans des magazines de P poque Un jeu social a la fois psycho drame et th atre de marionnettes mascarade de paroles de gestes mondains de faux airs de non dits tal s sous le faux plafond du plan tarium Ainsi consid r e la version de Fahlstr m est au fond un syst me d criture Avant d tre les pi ces d tach es d un puzzle tous ces l ments pars forment en fin de compte une grammaire un vocabulaire voire un alg bre simples membres de phrases signes images constitutifs d une nouvelle criture visuelle qui refuse de parler tout ensemble les langues mortes du roman balzacien et de la figuration traditionnelle R sum de l pisode jouer au Plan tarium c est le raconter A charge pour le spectateur de ces peintures variables d amalgamer librement ces magnets d organiser lui m me un r cit de se constituer ses propres personnages Une invitation a manipuler le monde Un jeu fixe et variable a la fois fixe comme le texte de d part cf extrait en annexe dont Fahlstr m d compose et num rote chacun des mots comme autant de pions placer sur le damier de la toile mais variable autant qu il y aura de spectateurs susceptibles de
555. sainte presque tous nous le voyons cherchent a faire passer leurs inventions pour parole de Dieu et s appliquent uniquement sous pr texte de religion contraindre kes autres penser comme eux Nous voyons disje que ce dont les th ologiens se soucient ordinairement c est de la meilleure mani re de d former les Lettres sacr es pour en tirer leurs inventions et leurs th ses et les abriter sous l autorit divine n est rien qu ils ne fassent avec moins de scrupule et plus de t m rit que d interpr ter les Ecritures c est dire la pens e de l Esprit saint si quelque chose les pr occupe ce n est pas la crainte d attribuer quelque erreur l Esprit saint et de s loigner du chemin du salut c est d tre convaincus d erreur par d autres de voir ainsi leur autorit foul e aux pieds et d tre m pris s Mais si les hommes pronon aient du fond de l me le t moignage qu ils portent en paroles sur l Ecriture ils auraient alors une tout autre r gle de vie tant de discordes n agiteraient pas leurs esprits ils ne se combattraient pas avec tant de haine bien loin d avoir ce penchant aveugle et t m raire interpr ter l Ecriture et forger des nouveaut s dans la religion ils n oseratent embrasser comme doctrine de l Ecriture rien qu elle ne leur enseigne tr s clairement enfin ces sacril ges qui n ont pas craint de falsifier l Ecriture en plusieurs passages se seraient bien gard s d un tel crime et ny auraient
556. sant le social pour le rendre gouvernable par des lois universelles En cette fin du XIXe si cle le principe politique consacre la puissance d un sujet collectif dont le principe sociologique tend 1 E Zola Germinal op cit p 1435 2 Ibid p 1412 3 Nelly Wolf Le Peuple dans le roman fran ais de Zola C line Paris Presses Universitaires de France 1990 4 Ibid p 14 397 Litt rature et saveur dissoudre la consistance et r duire la visibilit Alors que le mod le monarchique s loigne et que les oppositions s affaiblissent la R publique doit renoncer se d finir par rapport lPAncien R gime et conna t une p riode d affaiblissement marqu e notamment par la flamb e boulangiste qui affecte au premier chef la fiction essentielle qu est le peuple Le sentiment tr s partag d un essoufflement de la R publique s exprime particuli rement chez les crivains par un malaise face au nombre le pouvoir donn au nombre par la d mocratie menace Pindividu en mettant en danger l identit La peur de la foule qui appara t dans les romans de l poque traduit cette crise la foule devient un acteur angoissant de la vie sociale lorsque le nombre semble menacer l individu Cette volution s appuie sur deux discours alors que le peuple renvoyait une mystique de Punion la foule est d finie comme un agr gat d individus alors que le peuple tait une personne
557. sc ne est en d finitive un jeu de th tre dans le th atre mise en abyme du drame et cho pr paratoire de la sc ne du meurtre en effet la didascalie initiale plante un d cor d j th tral une terrasse qui est comme une tribune une sc ne Des spectateurs en nombre sont pr sents des pages exercent 1 Th tre complet de Musset Paris Gallimard Pl iade traduction de Simon Jeune 1990 p 828 2 Une conspiration en 1537 pi ce reproduite dans La Gen se de Lorenzaccio de Paul Dimoff Paris Droz STFM 1936 p 97 98 268 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink des chevaux dans la cour certains Valori Sire Maurice le cardinal Cibo commentent le spectacle de l vanouissement par des r pliques qui vont de la cr dulit la col re Lorenzo est Pacteur principal de cette sc ne encadr e Il parle peu deux courtes r pliques se concentre sur son jeu de sc ne Quant Alexandre metteur en sc ne il appelle le public pages montez ici toute la cour le verra et je voudrais que Florence enti re y f t donne par moment des ordres fournit l accessoire Pacteur il prend l p e d un page et la pr sente Lorenzo commente l action Regardez Renzo je vous en prie ses genoux tremblent il serait devenu p le s il pouvait le devenir s amuse lui m me beaucoup du jeu de son acteur et fait tomber le rideau ch r
558. se et terne nous expliquer que la logique est inutile St Ex pr tend crire une historiette dans laquelle le vent sculpterait de mani re impr visible un visage sur une montagne mais le raptus d sertique op re nouveau et ce nest plus du tout cela qu il raconte l criture flambe au grand soleil saharien et ce qu il r invente son corps d fendant c est quelque chose comme l histoire du Sphinx de Gizeh Abou el Oul en arabe le P re de la Terreur celui qui incarne ou est par excellence susceptible de provoquer la terreur U n visage noir sculpt dans le roc furieux sous la profondeur d un ciel pur et ouvrant la bouche pour maudire p 103 La terreur nait du vide du d sert et y ram ne les hommes effar s devant cette figure d moniaque qui accapare un ciel coup sur vide de Dieu ils s engouffrent dans l Etendue o les attend ce que nous savons D cid ment entre le Sphinx et le Petit Prince St Ex n a pas fait le bon choix 1 Comme le rappelle Flaubert dans une lettre c l bre du 15 janvier 1850 Louis Bouilhet FERDINAND DE SAUSSURE III NOTE SUR LE DISCOURS Par Jean Louis CHISS Universit Paris 3 Sorbonne Nouvelle La langue n est cr e qu en vue du discours mais qu est ce qui s pare le discours de la langue ou qu est ce qui un certain moment permet de dire que la langue entre en action comme discours Des concepts vari s sont l pr ts dans la l
559. se les attachait qu il n avait pas en d nouer qu il refit glisser pour ceinturer comme auparavant la liasse Il remit la liasse dans le coffret et le coffret dans le tiroir de la consok Le tiroir n tait pas ouvert il avait livr son secret par en haut Bernard rassujettit les lames disjointes du plafond de bois que devait recouvrir une lourde plaque donyx T fit doucement pr cantionneusement retomber celle ci repla a par dessus deux cand labres de cristal et l encombrante pendule qu il venait de s amuser r parer La pendule sonna quatre coups T l avait remise l heure Mais il est parfois trop facile de lui r sister et Bernard en tant que personnage romanesque est dot par surcro t d un d mon beaucoup plus efficace qui le m nera beaucoup plus loin c est celui du bon motif qui permet de se lib rer en toute bonne conscience des r gles de la vie sociale et familiale Il n a pas embl e d cid de forcer la console de sa m re cela ne se fait pas Il a simplement voulu r parer une pendule C est en cours de route d j trop tard pour la morale qu il a p ch C est gr ce cet ordre du bon motif que le Diable et la bido sciendi peuvent agir dans le roman et faire des histoires tandis que de l uvre de Dieu il ne peut y avoir que des tableaux UN ROMAN QUI PREND LE LARGE Paris une famille bourgeoise un roman familial tout serait en place pour un r cit r aliste une reprise du mod le b
560. seau s mantique ensemble de termes qui dans un texte donn comportent un ou des s me s commun s sans appartenir n cessairement un m me champ lexical produit d une activit de lecture il met en vidence des l ments de signification plus abstraits qui structurent un texte de fa on originale Monsieur on n y comprend rien Le d sarroi du jeune lecteur na t ici du caract re elliptique et allusif du po me dont le vocabulaire pour Pessentiel renvoie d autres r alit s que celle des fruits C est Peffet de la m taphore originale du premier vers que prolonge une s rie de m taphores i absentia Dans les chambres des vergers ce sont des globes suspendus que la course du temps colore des lampes que le temps allume et dont la lumi re est parfum On respire sous chaque branche le fouet odorant de la h te L ellipse syst matique du compar donne ainsi au po me un aspect lapidaire et m me myst rieux pour qui n aurait pas vu dans le titre le premier mot du po me Toutefois la reprise dans la troisi me phrase du pr sentatif qui lance si Pon peut dire la premi re fournit un appui int ressant Ce sont des perles parmi l herbe de nacre mesure plus rose que les brumes sont moins lointaines des pendeloques plus pesantes que moins de linge elles ornent Elle permet opportun ment au lecteur de recomposer mentalement les m taphores dans les trois premi res phrases de ce bref po me
561. sement que les mains qui ont d rob le papier appartiennent l un des nombreux habitants vivant dans la pauvret et fouillant les poubelles la recherche d un capital monnayable Comme indique clairement ce dernier mot le journal n a pas t d rob au nom dun int r t pour la chose litt raire mais pour une valeur change consid r e comme sup rieure l usage particulier qu en avait fait le diariste Le sort dramatique des pr cieuses feuilles livre ici toute l ambigu t de la position sociale d un crivain voyageur comme Nicolas Bouvier affectant de vivre dans des conditions comparables celles de la plupart des habitants des pays qu il traverse sans pouvoir cependant chapper sa condition ais e d homme blanc La pratique scripturale est ici renvoy e son statut d activit sinon pr datrice au moins oisive impliquant de 73 Litt rature et saveur poss der un minimum de capital capital de temps libre celui du voyage et capital mat riel le papier que ne poss dent pas ceux qui sont quant eux r duits hanter l espace de la d charge pour tels de mis rables vautours humains se constituer un maigre capital de survie Si le passage par Quetta constitue incontestablement le pire moment de ce r cit de voyage sans pour autant donner lieu une dramatisation c est d abord qu il inspire un sentiment d quoi bon devant le r gne universel de la mort m
562. sentiel de l uvre narrative de John Fante c est cette fracture qui l zarde l ensemble de l difice romanesque le menace chaque page d un effondrement d finitif dans lequel s abimerait la l gitimit m me de l entreprise litt raire Cette m ditation sur le 1 John Fante Demande la poussi re Traduit de l am ricain par Philippe Garnier chapitre XIX et dernier Paris Christian Bourgois coll 10 18 Domaine tranger 1939 1986 pour la traduction fran aise p 270 272 2 Fils de John Fante et auteur de romans dont Les Anges n ont rien dans les poches 1994 et En crachant du haut des buildings 1997 3 Ainsi Arturo Bandini h ros d une t tralogie La Route de Los Angeles 1985 Bandini 1938 Demande la poussi re 1939 et R ves de Bunker Hill 1982 inscrit Litt rature et saveur bien fond de criture atteint l un de ses points extr mes dans le d nouement de son chef d uvre Demande la poussi re Plus que dans tout autre roman de l auteur italo am ricain Pappel de la vie concurrence sans rel che l criture et les r ves de gloire litt raire Si le th me essentiel du livre est bien le d sir force est de constater avec Stephen Cooper qu il s agit d un d sir tiraill entre deux postulations contradictoires le d sir avant tout d crire et le d sir fou d aimer et d tre aim en retour qui finira par causer la perte d Arturo
563. sez indiff rentes jusqu au dessert nous apprend que les forces physiques ont t restaur es pour bien penser il faut que le corps soit dattaque car c est par lui que passe la hardiesse des conjectures Si Pon peut assimiler ce d but une sc ne d exposition c est au sens o on y retrouve la tension 114 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink caract ristique entre r cit et action Vindication didascalique r pond en effet ici le dynamisme d une prise de parole i medias res qui dit aussi ce que doivent tre les conditions optimales de change intellectuel La modalit injonctive de la r plique de Julie r v le son ardente curiosit double imp ratif Allons docteur buvez suivi d un futur valeur d ordre vous me r pondrez ensuite Le malaga et la philosophie savoir et saveur se conjuguent ici pour rappeler que le mat rialisme est aussi un h donisme L impatience est galement perceptible dans hyperbole une question qui m a pass cent fois par la t te mais tout cela ne doit pas nous tonner la situation correspond bien au temps de la digestion dont le lecteur se souvient qu elle est dans le premier entretien entre Diderot et d Alembert le processus biologique qui sert d illustration l hypoth se de la continuit entre sensibilit inerte et sensibilit active De m me le diner est un ps de repos o on ne parle par
564. si qu ils les d fendent Spinoza uvres II Trait th ologico politique Paris PUF 2007 P F Moreau d p 277 279 358 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Pr lude Pinterpr tation Spinoza consacre le chapitre VII du Trait th ologico politique a Pinterpr tation de Ecriture C est un des chapitres qui a t le plus comment autant dans ses cons quences que dans sa d marche Son plan est tr s clair Spinoza commence par noncer les r gles constituant sa m thode qui permet d interpr ter Ecriture par elle m me comme on interpr te la Nature en ayant recours uniquement aux forces de la lumi re naturelle mais sans pr juger de l accord de ses contenus avec la Raison 5 9 puis il num re les difficult s que l on rencontre dans la mise en uvre de cette m thode 10 18 enfin il critique les conceptions oppos es la sienne celles qui jugent l Ecriture au dessus de la lumi re naturelle celles qui au contraire pr tendent que ses enseignements se reconnaissent ce qu ils s accordent avec la Raison celles enfin qui veulent tablir la validit de leur lecture sur Pautorit d une tradition 19 22 Il vaut la peine de regarder de pr s les premiers paragraphes qui introduisent au raisonnement et l expos des r gles Il est remarquable que Spinoza ne commence pas par critiquer les m thodes existantes on a vu qu il ne le fera qu la fin du chapitr
565. sortir de ses tats le libertin qui un jour d ivresse avait d capit les statues de Parc de Constantin Est ce l r ellement libertinage ou ivresse Lorenzo se r v le surtout ici dans toute sa fonction de subversion au del de lPanecdote historiquement attest e par Varchi il s agit du premier geste criminel du personnage qui mutile d capite des hommes de pierre avant de s attaquer un homme de chair de l uvre de jeunesse d un artiste du crime prot g par son m c ne de cousin moi je trouve cela dr le d avoir coup la t te tous ces hommes de pierre Je prot ge les arts comme un autre et j ai chez moi les premiers artistes de Italie Quant au duc il pr sente son cousin en deux temps d abord dans un portrait en retrait Lorenzo est absent puis le montrant du doigt alors qu il appara t au fond du th tre Il se targue d ailleurs d tre le seul r ellement conna tre le jeune d bauch Voulez vous que je vous dise la v rit quand je vous le disais personne ne le sait mieux que moi et affirme avec force que Lorenzo n est pas l tre dangereux que lui pr sentent Sire Maurice ou Cibo il serait en fait un l che le plus fieff poltron une femmelette l ombre d un ruffian nerv et m me un d lateur se faisant passer pour lami des R publicains ces Strozzi de l enfer pour mieux d noncer leurs complots au duc Lorenzo appara
566. souffle seul devant son micro ou par la psychanalyse des cr atures Mais Le Prince p dagogue paradoxalement ami de la bienfaisance et c ur 6 combien g n reux a lui m me offert ses l gataires g n s une issue bien plus confortable En flanquant ses essais publi s d explications de textes rest es fameuses ou inversement redoubl es par une pratique p dagogique en r gle il leur d ploie dans les salles aux murs humides et d sert s un de ces vastes champs o Pesprit aime s brouer Pourquoi alors ne 1 Ce texte se pr sente d abord comme une parodie centon de Particle de J G Le fils naturel acte I ou la vertu critique l preuve du th tre il commente ensuite l incipit de louvrage De chair et d ombre Essais sur Moli re Marivaux Challe Rousseau Beaumarchais R tif de la Bretonne et Goldoni Paradigme 1995 la mani re de l auteur Toute honte bue et toute l gitimit d funte Le titre en pourrait galement tre La vertu critique a l preuve du th atre N de Ch B Litt rature et saveur pas pousser la porte rev che ouvrir au soleil les fen tres caill es pourquoi ne pas r ver et revivre ce que cette demeure abandonn e passionn ment habit e par le Prince p dagogue fut pour lui et pourrait redevenir si d autres en tombaient amoureux Sous la caution du Ma tre et dans ses pas on peut ainsi sans truelle ni pinceau disserter sur th tre
567. souvenir manquant on avait referm le cercueil avant mon arriv e Par son absence la m re du narrateur hante aussi le paragraphe final du roman qui se rapporte la ligne narrative de Penfance et s attache a la m lancolie des fins d t 131 qui plane sur le jardin d sert de la maison familiale o plersonne ne ramassait les olives tomb es de l arbre et dont les pulpes cras es parsemaient de taches noires les trois marches de briques par lesquelles tournant brusquement droite se terminait la premi re rampe du sentier bord de ces buissons d un bleu p le personne non plus sauf les enfants ne faisait attention aux figues trop m res la peau ratatin e et rid e presque noire la chair clat e pourpre granuleuse et sucr e parpill es quelques m tres plus loin parmi les touffes d herbe encore vertes du pr roussi par P t et qu il fallait dans Podorant et lourd parfum des larges feuilles disputer aux fourmis 139 140 La le narrateur lui m me s efface devant les choses derri re un collectif les enfants et dans des tournures de la s paration le r duit hors de souffle d avoir couru 31 voir dispara tre au loin la motrice comme si le tramway lui m me s escamotait avec une sorte de ricanement moqueur et m chant 33 349 Litt rature et saveur impersonnelles qu il fallait disputer aux fourmis aurait on dit
568. ss et aux formalistes russes avec comme toile de fond le couple langue parole qu il faut bien consid rer comme le v ritable catalyseur du d veloppement du structuralisme litt raire si Pon en 335 Litt rature et saveur juge par la revendication en 1928 de R Jakobson et J Tynianov d une application de ces deux cat gories linguistiques langue et parole au sens de l Ecole de Gen ve la litt rature Et l on voit bien le b n fice heuristique pour la narratologie de cette dichotomie appr hend e comme g n ral vs particulier o comme virtuel vs r l chaque uvre particuli re serait la manifestation d autre chose plus pr cis ment la manifestation d une structure abstraite beaucoup plus g n rale dont elle n est qu une des r alisations possibles La scientificit structuraliste issue de la linguistique structurale et de la r activation par Barthes du projet saussurien d une s miologie g n rale investit les tudes litt raires fran aises sur la base de transferts conceptuels fonctionnant l analogie Phomologie la m taphorisation il en est ainsi de l emploi r it r du terme langue dans la langue du r cit Barthes op ci p 9 du rapport homologique chez le m me Barthes entre phrase et discours de l inflation du terme grammaire dans les entreprises structuralistes grammaire narrative Todorov grammaire logique Br mond
569. ssement C est dans cet ultime retour sur lui m me o apr s avoir impos le recours transparent au code il en suscite la conscience critique que le roman dumasien atteint pleinement son objectif de roman populaire Apr s avoir d ploy l encombrant arsenal d esth tiques univoques celle du roman d aventures puis celle du m lodrame apr s avoir tendu au lecteur le pi ge de l adh sion n autorisant aucun cart entre le texte et sa lecture il d montre lPinad quation de ces interpr tations et sugg re un double jeu d stabilisant Comme Athos successivement h ros de l aventure et metteur en sc ne du d nouement m lodramatique le lecteur doit tre la fois pleinement dans le code et hors du code Les dents serr es il reconna t finalement s tre prodigieusement amus se faire peur FAHLSTROM PLANETARIET Par Jean Max COLLARD Ut pictura nouveau roman sur un diptyque d Oyvind Fahlstr m Dr le d endroit pour une rencontre c est pourtant sous cet univers factice sous ce faux plafond astronomique avec sa fausse fourrure de nuit et ses faux astres que deux ceuvres distinctes se donnent rendez vous et se retrouvent partager un m me titre Le Plan tarinm Un roman d une part sigl Nouveau et publi par Nathalie Sarraute en 1959 et d autre part un diptyque d Oyvind Fahlstr m ma derni re grande uvre Le Plan tarium laquelle je travaille depui
570. ssue o l enqu te est rest e vaine et m me l sans en avoir Pair fai cherch si je pouvais en voir des morceaux mais je n ai rien trouv 70 Avec Le Tramway V crivain adulte reprend la qu te de Penfant rest sans voix la poursuit la prolonge et la publie Il fait de image absente de la m re disparue le point de convergence du texte et l enveloppe de deux voies narratives Deux voies entre lesquelles le narrateur et avec lui le lecteur va et vient qui n ont apparemment pas d autre lien que lui mais qui comme le tramway de l histoire lui permettent parfois de rejoindre sa m re 1 C est dans cette liseuse qui permettait qu on la transporte de la chambre au jardin que la m re moribonde est g n ralement voqu e dans le texte 2 Au silence de l enfant correspondent d ailleurs les h sitations du narrateur qui souligne sans cesse les limites de son savoir et les insuffisances du verbe en particulier lorsqu il se rappelle sa qu te dans cette pi ce ou plut t ce salon 68 69 et voque la liseuse en bois noir b ne suivant l ombre de ces arbres dont je ne sais pas exactement le nom moiti cypr s moiti c dres au feuillage un peu lugubre vert sombre si toutefois on peut appeler feuilles ces courtes brindilles 69 3 Pune renvoie l enfance du narrateur l autre un s jour que le narrateur vieilli a fait l h pital
571. st double On y trouve des l ments emprunt s la doxa bourgeoise du moment que Pon reconna t notamment aux pr occupations hygi nistes la peau sale et l haleine empest e associant un s me de mauvaise hygi ne celui du vecteur physique de communication qui renvoie l angoisse de la contamination Autre l ment d poque Passimilation du peuple la sauvagerie qu incarne au cours du si cle la figure du loup que l on y voie la vie sauvage au fond des bois selon les auteurs Pembl me de la Nature ou de Palt rit Ici deux images se superposent selon que l on place Paccent sur le p le nature ou sur la notion d autre de la civilisation la 1 Les yeux br laient on voyait seulement les trous des bouches noires chantant la Marseillaise dont les strophes se perdaient en un mugissement confus accompagn par le claquement des sabots sur la terre dure Au dessus des t tes parmi le h rissement des barres de fer une hache passa port e toute droite et cette hache unique qui tait comme l tendard de la bande avant dans le ciel clair le profil aigu d un couperet de guillotine E Zola Germinal op cit p 1436 393 Litt rature et saveur menace sera le loup ou le barbare Celui ci est voqu directement la pouss e d bordante comme implicitement avec le fil de leffraction qui parcourt le texte coffres et femmes ventr s caves vid es C est l encore un
572. stituer la pulsion ou l impulsion brusque le naturel d range la nature transforme son r gime son rythme sa vibration La morsure hyperbole du baiser assure la fusion du d sir et de la sensation elle accomplit le d sir UNE SCENE SYMBOLIQUE Cette sc ne champ tre et sensuelle est donc une sc ne symbolique Comment ne pas percevoir en ce faune une projection fantasmagorique de Rimbaud lui m me et en sa morsure une figure de sa po tique Le faune manifeste une violence singuli re exerc e sur des l ments multiples et paisibles il repr sente la singularit comme irruption et comme violence au sein du m me Cette violence est d abord celle d une figure dans les deux sens du mot le faune n est d abord qu une qui se montre et c est galement une m prise une m taphore de l cureuil ou du po te le nom autre donn Il est l autre en sa force sa promptitude le being beauteous le surgissement de P tranget Cet autre du sujet c est pr cis ment le d sir Le faune signifie le d sir comme monstruosit il se montre il est trange montrer du sujet d bordant du sujet vif du sujet ou sujet vif sujet sur le vif 1 Voir Aube dans uminations id p 178 2 Voir le po me des M uminations portant ce titre id p 162 315 Litt rature et saveur Symbolique cette sc ne champ tre pr sente une curieuse dimension oedipienne On y observe en effet u
573. stolaire est le lieu o Laclos fait se rejoindre la th orie linguistique des Lumi res de Rousseau en particulier et sa propre pratique d crivain L intertextualit rousseauiste joue ici un double jeu Dans PEssai sur l origine des langues Rousseau explique la naissance de la parole comme tant tributaire du d sir Il s agit alors de d crire un processus historique avec le temps le langage substitue aux sentiments les id es il ne parle plus au c ur mais la raison Ce que Rousseau d crit pour le d plorer constitue pourtant Pune des conqu tes de l ge classique avec l av nement des id es claires et distinctes le langage doit parler le plus directement possible la raison Dans ce syst me de repr sentation l crit est du c t de la g om trie de l ordre de la sym trie Ce more geometrico travaille tout le XVIII me si cle Mais les Lumi res en interrogeant les fondements sensibles de la connaissance vont chercher r interpr ter la parole comme le lieu de v rit en dehors de toute phras ologie Dans ce jeu de polarit s instaur par la lettre criture raison parole sentiment on peut donc reconna tre les termes d un d bat 1 Essai sur l origine des langues chapitre De l criture d tablie par Jean Starobinski Gallimard Folio Essais 1990 p 73 212 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink d j ancien r activ par Rousseau
574. strielle arrive 1 Voltaire Correspondance Bibioth que de la Pl iade tome I p 632 2 Notre tonnement sera d autant plus grand de lire sous la plume de Jean Goldzink Le Vice en bas de soie ou le roman du libertinage Jos Corti 2001 p 32 Contrairement a Sade ce ne sont pas les corps qui chez Laclos donnent lieu au travail le plus int ressant mais bel et bien les lettres Le libertin a la Cr billon ou la Laclos ne travaille que dans la perversit morale il n crit pas m me le corps la violence qui habite C est faire bon march du fait que la lettre ou la peau c est exactement la m me chose dans limaginaire comme dans la r alit Les litt ratures pornographiques qui ne prennent pas de gants avec les fantasmes sont fort claires sur ce point comme on peut le voir 300 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Et l on se prend r ver la jolie planche que composerait dans un Suppl ment in dit P Encyclop die cette presse imprimer sur les corps On voit d s lors que notre texte est m taphore de l ternel support du texte la peau e des bouleversements sociaux vus travers les mutations techniques L h ro ne narratrice est esclave statut soulign par les coups de corde qui lencouragent travailler comme vont l tre le prol taire et l crivain de feuilleton son complice et partenaire en esclavage est instrumentalis comme le se
575. structure paratactique avant de d tacher apr s un et qui fonctionne plus comme une distinction que comme un lien une proposition o l agent de l action est diff rent il s agit de Lotte dans la premi re phrase et elle crut sentir passer dans son me rupture qui est soulign e avec bien plus de force dans le texte original par inversion qui met en avant le pronom au datif und ihr schien eine Ahnung Significativement dans la phrase suivante le sujet n est pas Werther mais un pluriel leurs joues brulantes sur ce point o s corne la sym trie s op re le glissement vers l instant des baisers L effet de sym trie le plus fort encadre n anmoins la phrase Le monde pour eux s an antit elle lui pressa les mains les pressa contre sa poitrine trouve un cho direct dans il Pentoura de ses bras la pressa contre sa poitrine La sym trie s appuie sur la signification symbolique des l ments du corps si les bras repr sentent la version protectrice de la notation sensuelle que forment les mains la poitrine comporte en elle m me cette double signification Elle est Pattribut de la f minit mais fait galement de Lotte une figure maternelle lorsqu elle serre Werther qui s est jet ses genoux L attitude de Charlotte n chappe alors pas l ambigu t Son premier mouvement est un lan de compassion qui ne doit pas se comprendre au sens de
576. strument d une fatalit sup rieure la pi ce conna tra un acte suppl mentaire o nous assisterons l chec d une r volte collective et un retour au m me Le drame se d finit d s lors comme la mise en chec de la trag die MARCEL PROUST A L OMBRE DES JEUNES FILLES EN FLEURS Par Mich le BEGUIN Inspection p dagogique r gionale Versailles Les kevers de soleil sont un accompagnement des longs voyages en chemin de fer comme les ufs durs les journaux illustr s les jeux de cartes les rivi res o des barques s vertuent sans avancer un moment o je d nombrais les pens es qui avaient rempli mon esprit pendant les minutes pr c dentes pour me rendre compte si je venais ou non de dormir et o l incertitude m me qui me faisait me poser la question tait en train de me fournir une r ponse afirmative dans le carreau de la fen tre au dessus d un petit bois noir je vis des nuages chancr s dont le doux duvet tait dun rose fix mort qui ne changera plus comme celui qui teint les plumes de l aile qui l a assimil ou le pastel sur lequel l a d pos la fantaisie du peintre Mais je sentais qu au contraire cette couleur n tait ni inertie ni caprice mais n cessit et vie Bient t s amoncelrent derri re elle des r serves de lumi re Elle s aviva le ciel devint d un incarnat que je t chais en collant mes yeux la vitre de mieux voir car je le sentais en rapport avec l existence profonde
577. sur le point de faire ces principes les huiti me et neuvi me paragraphes constituent la relecture une fausse d lib ration visant rendre moins choquante aux yeux du lecteur la rapidit avec laquelle sur un seul coup d il le h ros s est d cid r pondre aux sollicitations de la dame Ainsi le neuvi me paragraphe en revient il au premier jugement et la mine ronde ajoute la rondeur du visage une nuance de g n ralit un trait moins distanc et plus humain Rench rissant sur l adverbe succulemment et ladjectif vermeille qui pouvait Page classique autant qualifier une bonne sant que la qualit d un vin fraiche et ragoutante assimilent d finitivement l inconnue un plat all chant Les sc nes suivantes confirmeront l intuition de Jacob sit t arriv chez Mile Habert il est r gal aux cuisines Ah le bon pain Je n en ai mang de meilleur de plus blanc de plus ragoutant qualit s dont le visage de la propri taire lui avait donn en quelque 1 FURETI RE Dictionnaire universel 2 La face fait juger du sexe de l ge de la beaut du temp rament de la sant ou de la maladie On juge la mine la physionomie d une personne de ses bonnes ou mauvaises qualit s Tr voux 3 C est une bonne qualit au vin d tre rouge et vermeil Tr voux 240 Explications et commentaires offerts Jea
578. syst me id ologique des Lumi res 218 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Immoral par principe le roman du libertinage cultive et accuse des fautes dont toute fiction se rendrait par essence honteusement coupable au yeux des esprits chagrins Le roman pistolaire de Laclos qui pervertit la vocation premi re de la lettre en tant qu elle est cens e exprimer l imm diatet des sentiments ajoute encore la culpabilit originelle du genre romanesque Ici le d bat est ailleurs du moins en apparence Car en r fl chissant sur les limites du simulacre c est dire de la fiction litt raire Laclos met jour le lien complexe entre la passion amoureuse et sa repr sentation Il n est pas difficile de comprendre pourquoi l auteur a choisi d associer le personnage du libertin la r v lation et la mise en sc ne du fonctionnement du d sir dans le roman Personnage cynique revenu de tout et notamment des pr jug s li s l amour le rou incarne cette figure critique que la philosophie des Lumi res convoque ailleurs sous les traits de son double positif le nai ou l homme naturel Au passage s explique aussi le choix du roman pistolaire pour interroger la mythologie amoureuse de ses contemporains En se livrant une critique syst matique du romanesque au sein d une forme le roman pistolaire que le XVIII si cle lui m me a lue comme tant la plus apte dire les mois du s
579. t d une morale sexuelle mat rialiste Ce qu il voque dans cette r plique ce sont deux des trois codes sur l harmonie desquels le Suppl ment du voyage de Bougainville fait reposer le bonheur humain Reste a parler du dernier le code de la nature c est bien l affaire du mat rialisme La relance de Julie permet de pr ciser la place de la nature Celle ci n est pas axiologiquement neutre en invoquant l utilit publique Bordeu lie le naturel au social Contrairement ce qui se passe chez Sade la morale sexuelle du mat rialiste ne se fonde qu avec pour horizon Pordre collectif de la polis L entretien va donc proposer une hi rarchie des actes sexuels en fonction des 1 Peut on d ailleurs en ce qui concerne Sade parler de morale sexuelle alors qu il s agit toujours pour lui d arracher le sexe Pordre des lois de loi 116 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink crit res de lutile et de l agr able Au sommet ce qui rel ve des deux Ph t rosexualit procr atrice mais rien n est condamnable en soi pas plus la masturbation utile que lhomosexualit agr able La hardiesse m me de Bordeu peut donc se r clamer express ment des m urs Il y va d abord de la justification de la situation actancielle Nous sommes seuls Un homme et une femme sont enferm s pour parler de sexe mais nous ne sommes pas pour autant chez Cr billo
580. t pass simple n apparait pas et le texte d marre sur un discours quasi journalistique En t moignent l adresse injonctive au lecteur demandez avec son anacoluthe ou encore l utilisation de syntagmes qui renvoient au moment pr sent litt rature moderne On constate surtout la pr sence insistante d un je qui n h site pas se poser en sp cialiste litt raire en recourant des maximes d finitives la litt rature n exprime pas la moiti des crimes que la soci t commet myst rieusement et impun ment Un examen des articles de Barbey prouve que ce prologue constitue quasiment un pastiche de sa propre uvre critique La hardiesse par exemple est la qualit qu il avoue rechercher en litt rature il fustige constamment les romanciers dits r alistes comme Flaubert et Zola qui il refuse l tiquette de novateurs En t moigne la pointe jubilatoire de cet article sur Le Ventre de Paris paru dans Le Constitutionnel du 14 juillet 1873 Toujours est il voici la nouveaut que nulle part et dans aucun livre la charcuterie n a t trait e avec cette importance et d crite avec autant de science technique et de connaissance du m tier Oui C est la charcuterie c est la cochonnaille qui entre toutes les 42 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink victuailles de la terre est la chose sacr e pour M Zola Il croit dire le dernier mot de l art en
581. t ainsi comme un tre que l on ne peut d finir que 266 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink pat la n gative par le manque il est sans honneur sans courage et sans virilit Il marche dans Florence sans p e de peur d en apercevoir l ombre son c t l Lorenzo est ici f minis Pextr me dans son portrait comme dans son nom plus tard ou dans la description de ses accessoires ses mains ne manient pas P p e mais l ventail A ce portrait moral succ de un portrait physique a la fois cynique et tendre Regardez moi ce petit corps maigre ce lendemain d orgie ambulant Regardez moi ces yeux plomb s ces mains fluettes et maladives peine assez fermes pour soutenir un ventail ce visage morne qui sourit quelquefois mais qui n a pas la force de rire Une m me litanie du manque sous tend cette description Lorenzo est un tre non seulement d bauch mais d truit par la d bauche conservant cependant sur son visage la grimace railleuse de l ironie L vanouissement final de Lorenzo viendra parfaitement illustrer ces deux portraits pourtant a priori antith tiques Renzo ne peut r pondre au duel que lui propose Sire Maurice chancelle puis glisse terre tout d un coup Le poltron agit en femmelette et appelle le sobriquet de Lorenzetta Mais que penser de ce soudain malaise Est ce com die publique ou vanouissement r el L
582. t de ses miracles soutint d abord dans son interrogatoire que Ste Catherine et Ste Marguerite l avaient honor e de beaucoup de r v lations Je m tonne qu elle n ait rien dit de ses conversations avec le prince de la milice c leste Apparemment que ces deux saintes aimaient plus parler que St Michel Ses juges la crurent sorci re elle se crut inspir e et c est le cas de dire Ma foi juge et plaideurs il faudrait tout lier Le texte figure dans les trois ouvrages suivants 1 Les Honn tet s litt raires 1767 XXII honn tet 2 claircissements historiques a l occasion d un libelle calomnieux contre l Essai sur les m urs et l esprit des nations ajout de 1769 la XVIIIe sottise 3 Questions sur l Encyclop die 1770 article Arc Jeanne d Arc dite la Pucelle d Orl ans Litt rature et saveur Un texte itin rant de Voltaire sur Jeanne d Arc Dans les Oeuvres de Voltaire nombre de textes sont repris parfois modifi s parfois purement et simplement recopi s Des unites textuelles voyageuses sont ainsi d plac es dans d autres contextes Cette circulation s accentue au fil des ans On l explique en se r f rant des cat gories psycho biographiques et on brandit le spectre du radotage D s le XVIIe si cle la polygraphie voltairienne tombe sous le coup de cette critique Diderot ouvre le ban en s en prenant aux Lettres d Amabed rab chage de toutes les vieilles polissonne
583. t devait on prononcer son nom videmment la concierge n osait pas l appeler Sinoque Enfin Monsieur Echard montra qu ily avait lieu de choisir entre les vingt prononciations suivantes Sinoss Sinok Stnotch Sinoch Sinots Tstnosse Tsinok Tsinotch Tstnoch Tsinots Chinosse Chinok Chinotch Chinoch Chinots T chinosse T chinok T chinotch T chinoch Tchinots fol Le patronyme d origine de sa famille celui que son arri re grand pere un bourreher de Szezyrk avait officiellement achet au Bureau d tat Civil du Palatinat de Cracovie tait Kkinhof mais de g n ration en g n ration de renouvellement de passeport en renouvellement de passeport le nom n avait rien gard de sa prononciation ni de son orthographe et Cinoc se souvenait que son p re lui racontait que son p re lui parlait de cousins qu il avait et qui s appelaient Klanhof Keinhof Klinov Szinowex Linhaus etc Comment Kleinhof tait il devenu Cinoc Cinoc ne le savait pas pr cis ment De toute facon il tait vraiment secondaire de tenir le prononcer de telle ou telle fa on Cinoc exer ait un curieux m tier Comme il le disait lui m me il tait tueur de mots il travaillait la mise jour des dictionnaires Larousse Mais alors que d autres r dacteurs taient la recherches de mots et de sens nouveaux lui devait pour leur faire de la place liminer tous les mots et tous les sens
584. t devenus eux m mes des vautours Le d tour pat la description des charognards et de la menace qu ils font peser sur leurs proies potentielles appara t ici a posteriori comme une mani re pr ventive d viter cette identification mals ante A cette pr dation tout juste sugg r e r pond cependant une pr dation bien r elle L enveloppe en effet est souill e bouillante mais vide La conjonction de coordination mais est dot e d un sens argumentatif tonnant dans la mesure o la conclusion implicitement sugg r e par les deux premiers adjectifs qui reprennent le motif de la corruption pr sent dans l ensemble du texte tait bel et bien cette disparition Mais la conjonction peut aussi prendre une valeur de correction Contrairement ce que lon aurait pu attendre le manuscrit a en effet chapp au pourrissement de la d charge et sa disparition trouve une autre explication Inutile de chercher plus loin cinquante grandes feuilles d un papier solide repr sentaient un capital qui n avait pas sa place ici Ce n est pas l entropie naturelle qui a fait son uvre c est la mis re conomique et sociale Si aucune pr cision n est donn e quant l emplacement de enveloppe dans lespace de la d charge sa seule pr sence rappelle les enveloppes avion du Cub Chiltan et rapproche implicitement le voyageur au long cours des habitants de Quetta vivant dans laisance on peut imaginer inver
585. t doublement pervertie elle devient moyen de diffuser de fausses nouvelles de battre de la fausse monnaie technique de d sinformation et de guerre conomique et machine de mort raffinement de torture Certes la presse est une machine surcharg e d id ologie comme commence l tre dans ces m mes ann es la machine vapeur Pune et l autre marquent le passage d finitif d une soci t artisanale une soci t industrielle De l objet fait main on passe la s rie la reproduction uniforme et indiff renci e qui 1 Michel Foucault Un si cruel savoir Critique n 182 Juillet 1962 repris dans Dits et Ecrits 1 Gallimard 2003 p 243 Le philosophe y analyse certains aspects des machines de R v roni dans Pau iska en particulier la machine extraire des fluides lectriques de l abominable Salviati vers la fin du roman 2 Ibid p 250 3 Michel Delon Pr face l dition Desjonqu res 1991 de Pawliska p 16 298 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink caract rise l re moderne Michel Delon note que R v roni ancien l ve de l cole de M zi res auteur en 1803 d un Essai sur le perfectionnement des Beaux Arts par les sciences exactes dont il dit justement qu il est le c t lumineux de l imaginaire de R v roni dont Pauliska est la version t n breuse n est pas tranger Peuphorie technologique Mais son analyse est
586. t la chute qui fait entendre non seulement la teneur des exigences de la nature mais jusqu la forme r p titive dans laquelle elles s noncent eXe en a besoin pour d autres formes elle la redemande pour d autres ouvrages ach ve de ruiner le sentiment de la valeur singuli re de Phomme sa substance que la 61 Litt rature et saveur noblesse du vocable semblait parer d une dignit particuli re s est r v l e n tre que mati re et comme telle elle n a de valeur dans la logique aristot licienne que par sa forme L individu humain n est qu une possibilit parmi d autres sa singularit est engloutie dans Panonymat des autres formes et des autres ouvrages On saisit Pint r t de l emprunt le pr dicateur sait reconna tre efficacit argumentative d une philosophie attach e d truire les illusions dont se bercent les humains Que ces illusions dans optique picurienne englobent la croyance religieuse ne semble pas le g ner Par quel retournement dialectique fait il servir Papolog tique chr tienne la force corrosive de lanalyse mat rialiste C est ce que nous fait percevoir la lecture du paragraphe suivant Ce paragraphe poursuit en effet exploitation de la veine lucr tienne Bossuet reprend sous la forme du constat toujours en effet la vieillesse c de la place au jeune ge qui l expulse Vinjonction que formulait la Nature au vieillard trop obstin vivre allons c de la
587. t on peut ramener une pi ce comme Ph dre dit Claudel dans sa Conversation sur Jean Racine et il suppose que a a d lui roussir la perruque p 463 Dans le 1 Ce texte de 1955 command par Jean Louis Barrault se trouve dans Paul Claudel uvres en proses Biblioth que de la Pl iade Paris Gallimard 1965 294 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink m me texte il compare Macbeth et Ph dre et soutient qu il s agit de la m me atmosph re Ph dre est une atmosph re elle toute seule Il dit atmosph re n est ce pas exactement la m me chose que ce que j essayais de d signer par lieu corporis Cet air qui enveloppe un corps qui s incorpore aussi ces manations quasi humorales La pr sence d un lieu en somme Mais il y a plus troublant Apr s avoir cit une r plique de Cassandre dans Agamemnon Claudel crit Que de fois n ai je pas pens ces vers effrayants en regardant l image de ma s ur Camille d c d e apr s trente ans de captivit l h pital psychiatrique de Montfavet Associ e celle de combien d autres douloureux Poe Baudelaire Nerval et combien encore Ph dre de m me c est en vain qu elle demandera rien d humain dans un corps corps impuissant la gu rison de la plaie originelle Aux derni res lignes de la trag die se tourne vers nous un visage que p trifie la m me horreur qui tout
588. t que je suis net et que la puret connue de mes m urs ne laisse prise d aucun c t Diderot Le R ve de d Alembert Pour entrer dans l enqu te mat rialiste et plus forte raison pour accepter d en suivre les tours et d tours sans r sister leur hardiesse ventuelle ce que Le Neveu de Rameau appelle justement libertinage des pens es il convient de se mettre en condition Ainsi qu en t moigne le sommeil agit de d Alembert au d but du deuxi me entretien le mat rialisme n est pas une philosophie reposante mais celui qui en est saisi se trouve immanquablement en tat de jouir Non seulement d Alembert fort aise de ses conjectures sexuelles rit dans et par le r ve mais il finit par penser avec ses doigts je ne sais o il avait cach sa main Julie pratique son tour ce que Jean Claude Bourdin appelle des exp riences de pens e sur son propre corps dont elle teste les extensions sensibles La conversation est ainsi un plaisir mais non au sens o elle s assimilerait la l g ret de la prop deutique mondaine m nag e par les Entretiens sur la pluralit des mondes de Fontenelle Bordeu si capable de rire et de r ver soit il pr serve le s rieux du savant et n oublie pas qu il traite de sujets graves horizon desquels se trouve tout de m me l ath isme Et puis il est m decin La discussion sur la sensibilit propri t g n rale de la mati re se
589. t saveur Musset fid le la perspective g n rale de Lorenzaccio d crit ici le pouvoir par ses coulisses Il d voile Pinterdit nous fait p n trer par effraction dans une entrevue officielle et soul ve le masque rapportant dans toute leur crudit la violence et l insolence des rapports verbaux entre ces hauts dignitaires Les r pliques ne sont faites que d insultes et d antiphrases ironiques comme dans cette adresse du duc Valori Vous tes pardieu le seul pr tre honn te homme que j aie vu dans ma vie Cette mani re d apparier le blasph me par le juron et le compliment antiphrastique accentue la juxtaposition ironiquement oxymorique des mots pr tre et honn te homme On comprend que l affrontement verbal puisse se transformer en affrontement direct physique la fin de la sc ne Les masques sont ici lev s par Alexandre qui n a de cesse de d noncer les contradictions des ordres du pape celui ci qui condamne et excommunie Lorenzo pour avoir mutil les statues de Parc de Constantin se prend d fendre un monument pa en des statues qu il excommunierait demain si elle taient en chair et en os De m me la papaut octroie la paternit de la d bauche florentine Lorenzo fermant les yeux sur les activit s douteuses du duc Or si les condamnations papales reposaient sur de v ritables motifs religieux elles toucheraient galement Alexandre Mais la d bauche du
590. tate aussi une analogie entre la texture des films et celle de la carapace des petits crustac s dans le nom du Sak Bar on retrouve de la m me mani re une partie des lettres composant le nom du cin ma Kristal Pun devenant ainsi l anagramme partiel de l autre Du c t de l aisance semble au contraire r gner une relative distinction 70 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Seuls sont voqu s les d chets du Cub Chiltan qui se trouvent ainsi s par s des autres et jusque dans la ponctuation elle m me qui les isole clairement entre deux longs tirets Les trois l ments mentionn s journaux trangers enveloppes avions paquets de Camel sont de surcro t purement inorganiques poss dent la noblesse du papier et appartiennent l espace culturel occidental De quel c t de cette barri re sociale le diariste contradictoirement boueur et sociologue retrouvera t il son pr cieux journal La chaleur l odeur meurtri re et surtout les vautours emp chaient d tre son affaire sit t qu on sinterrompait pour souffler appuy s sur les pelles ils trottaient vers nous tromp s par cette immobilit prometteuse avec des cris d une douceur c urante jusqu ce qu une motte bien dirig e les informe de leur erreur D autres planaient lentement an dessus de nos f tes projetant sur notre tranch e une ombre de la taille d un veau que nous pr ferions ne pas perdre de vue O
591. te c est qu il ny a rien de si difficile en amour que d crire ce qu on ne sent pas Je dis crire d une fa on vraisemblable ce n est pas qu on ne se serve des m mes mots mats on les arrange pas de m me on plut t on les arrange et cela suffit Relisez votre Lettre il y r gne un ordre qui vous d c le chaque phrase Je veux croire Litt rature et saveur que votre Pr sidente est assez peu form e pour ne pas sen apercevoir mais qu importe l effet nen est pas moins manque C est le d faut des Romans Auteur se bat kes flancs pour s chauffer et le Lecteur reste froid Heloise est le seul qu on en puisse excepter et malgr le talent de Auteur cette observation m a toujours fait croire que le fond en tait vrai Il n en est pas de m me en parlant L habitude de travailler son ogane y donne de la sensibilit la facilit des larmes y ajoute encore l expression du d sir se confond dans les yeux avec celle de la tendresse enfin le discours moins suivi am ne plus ais ment cet air de trouble et de d sordre qui est la v ritable loquence de l amour et surtout la pr sence de l objet aim emp che la r flexion et nous fait d sirer d tre vaincues Croyez moi Vicomte on vous demande de ne plus crire profitez en pour r parer votre faute et attendez l occasion de parler Savez vous que cette femme a plus de force que je ne croyais sa d fense est bonne et dans la longueur de sa Lettre et le pr texte qu
592. te de traduction d un Nouveau Roman Une traduction qui mirait plus du fran ais au su dois ni d une langue une autre mais du textuel au plastique de la litt rature aux atts visuels Adaptation du livre de Sarraute remake en image fixe Le Plan tarium de Fahlstr m est une op ration de bascule une exp rience limite qui voudrait introduire dans la peinture la violence th orique et formelle de cette nouvelle modernit litt raire Ut pictura Nouveau Roman Mais comment traduire Le Plan tarium Je veux dire comment traduire un roman o Nathalie Sarraute fait exploser plus encore que dans ses pr c dents la voix atrophi e du narrateur accentue la perte d autorit de linstance narrative et continue son g nocide des personnages pour mieux faire merger les tropismes ces flux de conscience verbaux ces sous propos que les individus se tiennent eux m mes Un roman qui fait dispara tre le Moi sans jamais perdre de vue la capacit sonder des psychologies ordinaires Et encore je veux dire comment faire entrer tout cela dans une seule image une seule peinture qui ne serait pas seulement le choix d un pisode du Plan tarium mais Le Plan tarium tout entier Telle est au fond ici la seule v ritable pr occupation de Fahlstr m Premier constat Le Plan tarium de Fahlstr m est un diptyque Au centre trois panneaux verticaux soud s et qui forment une large surface picturale fond bleu parcour
593. te peinture d histoire D o cette image explos e ce r cit d membr d compos travers panneaux toiles et esquisses et vid de toute s quence narrative Explosante fixe Le Plan tarium ne se raconte pas Il se joue 1 Quand il songe Sarraute en 1960 Fahlstr m compare d j les tropismes aux fluctuations cosmiques de Pollock ou Sam Francis trangement et par un de ces feed back dont est famili re l histoire chaloup e du texte et de l image Nathalie Sarraute trouva elle aussi dans la peinture de son temps de quoi faire exploser les conventions du roman Elle regardait avec admiration l vasion de Picasso et comment il avait permis aux peintres de se d livrer du sujet de la figuration de limitation du r el pour faire sauter d un seul coup tout le vieux syst me de conventions qui servait moins r v ler comme autrefois qu masquer ce qui tait leurs yeux le v ritable objet picturall L Ere du soup on Ce que voient les oiseaux in uvres compl tes Gallimard Biblioth que de la Pl iade 1996 p 1616 Et elle Rajouter Comment le romancier pourrait il se d livrer du sujet des personnages et de l intrigue Et donc pour Fahlstr m suivre Sarraute ce sera aller plus loin que Picasso dans l abolition du sujet et la suppression de la figure Et ouvrir la voie au renouvellement imm diat d une peinture d histoire qui n aurait justement plus pour t che
594. tesquieu s interdise de juger mais il d montre dans son frayage th orique que son analyse n est pas offusqu e par la consid ration de la norme puisque loin de la perfection et Pharmonie du supra lunaire elle s affronte la complication des choses terrestres et la contingence irr ductible qu elles enveloppent Il ne s agit donc ni d pouser sans le dire Partificialisme d un Hobbes ni de tomber sous le coup de la critique du positiviste Kelsen mais de reconstituer le cheminement sinueux impr visible et paradoxal de la nature dans les institutions sociales Pour nous lecteurs l affaire consiste y voir clair enfin sur ce qu il convient d entendre par Nature sous la plume de 427 Litt rature et saveur Montesquieu Est ce la lecture transversale de l uvre conduite par Goldzink sur exemple des rapports entre les sexes qui lui permet de reconstituer au plus pr s ce qu il appelle le remaniement du droit naturel moderne chez Montesquieu En tout cas rien n est plus tranger ses conclusions que les th ses sommaires et simplificatrices que l on trouve sous la plume des partisans ou des adversaires traditionnels du droit naturel Qu on en juge sur pi ces si les Lettres persanes et le Livre I de L esprit des lois conservent certains traits des doctrines du droit naturel selon lesquelles les principes d quit de justice et de morale sont d ductibles de la raison ou de la lumi r
595. th orie m taphysique du beau mais une description des caract res empiriques qui suscitent les plaisirs de l me A Pontologie de l ordre se substitue comme r f rence de l enqu te le sujet humain affect de diff rents plaisirs Les sources du beau du bon de l agr able etc sont donc dans nous m mes et en chercher les raisons c est chercher les causes des plaisirs de notre me C est relativement ces affections et non plus selon les arch types con us par Dieu que se distinguent les objets de exp rience esth tique Ce sont ces diff rents plaisirs de notre me qui forment les objets du go t comme le beau le bon Pagr able le na f le d licat le tendre le gracieux le je ne sais quoi le noble le grand le sublime le majestueux etc Toutefois la r f rence au texte du P Andr signale combien les descriptions qu il a donn es des diff rents rapports qui conditionnent le sentiment du beau demeurent valables nous allons voir que PEssai sur le go t fait une grande place a l ordre mais en produit une requalification profonde et son corr lat traditionnel la vari t m me s il convient de les redistribuer selon le point de vue d une me incarn e engag e dans une existence typiquement humaine Auparavant on doit consid rer que la reprise manifeste de la tripattition l gu e par le P Andr en m me temps que sa r criture du point de vue du sujet sensible impli
596. tions de Minuit 1989 p 373 2 Ibid p 207 Ce fait est galement rappel dans L Acacia op cit p 345 CLAUDE SIMON LE TRAMWAY Par Anne Lise BLANC Universit de Toulouse I Le Mirail Etude de texte de Comme si rien ou presque navait chang a Pimpalpable et protecteur brouillard de la m moire Le Tramway Patis ditions de Minuit 2001 pp 139 141 pour lui le sens d un pisode ne se trouve pas l int rieur comme d une noix mais l ext rieur et enveloppe le conte qui l a suscit comme une lumi re suscite une vapeur Joseph Conrad Telle est la premi re phrase que Claude Simon a choisie pour pigraphe de son dernier roman Une phrase de Conrad qui lui donne litt ralement l occasion de le mettre au dessus de Proust et qui ainsi plac e en exergue d termine sa propre port e Plus largement elle nous invite a explorer les entours du texte sonder ses bordures scruter ses marges pour en approcher le foyer Aussi nous conduit elle tout naturellement sur les derni res lignes du Tramway la recherche d un sens 1 Dans un entretien r cent Claude Simon d clarait Je place Dosto evski au dessus de Proust qu en d pit de quelques r serves je place lui m me tr s haut Toutefois on n a mes yeux jamais pouss aussi loin ni aussi haut Part du roman et celui de la prose que Conrad ne l a fait avec ses deux chefs d uv
597. tisan ne sert qu y m ler les blandices o se prennent les courages les plus faibles pensant que pour tre semblables ces vaines h ro nes il leur faut du tout se livrer quelque grande passion comme nos jeunes gentilshommes simaginent qu ils galeront les incroyables faits d armes que les h ros accomplissent pleine page Que ne nous dit il cet auteur ce qui arriva enfin Eudore quand les passions du si cle Pabandonn rent en quelle disposition il fut devant son Dieu la fin de cette vie dont il faut rendre compte Ces richesses en fit il don aux pauvres Cette habilet de discours la mit il au service des humbles aupr s des grands de son royaume Et s il fut agit et tourment de quelque passion pour une dame un malheur lui tant arriv ne serait il pas aussi beau et d un aussi habile crivain de nous faire pleurer avec lui et r fl chir sur les v nements singuliers qui suivent pour les hommes les conseils les plus 1 On dit d une somme qui n a pas de garantie solide l quivalent de notre ch que sans provision qu elle est sur les brouillards de Seine 2 Conseil en langue du dix septi me encore s oppose bien comme ici v nement Le conseil est la d lib ration qui pr c de une action l v nement est le r sultat ultime de cette action souvent comme ici dans la phrase de Camus inattendu 445 Litt rature et saveur raisonnables Mais les romans ne suivent que
598. tomb s en d su tude Quand il prit sa retraite en 1965 il avait fait dispara tre des centaines et des milliers d outils de techniques de coutumes de croyances de dictons de plats de jeux de sobriquets de Litt rature et saveur poids et de mesures I avait fait s vanouir dans la nuit des temps des cohortes de g ographes de missionnaires d entomologistes de Dieux et de d mons Qui d sormais saurait ce qu avait t le vigigraphe Qui se souviendrait du v locimane Cinoc se mit trainer le long des quais fouillant les tals des bouquinistes feuilletant des romans deux sous des essais d modes des guides de voyages p rim s Enfin quand il eut puis les ressources de sa biblioth que de quartier il alla s enbardissant s inscrire Sainte Genevi ve Cinoc d cida de r diger un grand dictionnaire des mots oubli s pour sauver des mots simples qui confinnaient encore lui parler En dix ans il en rassembla plus de huit mille an travers desquels vint s inscrire une histoire aujourd hui peine transmissible Georges Perec La Vie mode d emploi romans Hachette 1978 p 360 363 280 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Cinoc ou la Diaspora Variations sur un chapitre de La Vie mode d emploi Le commentaire qui suit ne tient pas compte des importantes coupures op r es en vertu des contraintes ditoriales dans les quatre pages c
599. toricit le sujet qu on peut traiter les textes et chercher quelque chose de la sp cificit de la litt rature Evidemment tout n est pas donn de ce point de vue dans la Note et ce qu elle implique avec d autres travaux d une lecture non structuraliste de Saussure Il y aurait dire par exemple de la th orie du sujet parlant quand Saussure crit un autre individu veuille lui signifier quelque chose C est moi qui souligne La question de la volont ou en termes ph nom nologiques de lintentionnalit doit tre revue dans les termes pist mologiques de l poque et en relation avec un couple conscient inconscient qui n est pas celui de la psychanalyse C est d ailleurs Saussure lui m me qui un peu plus loin affirme que le lien entre les concepts dans le discours se fait par des voies que nous ignorons L essentiel reste ici lexercice de la critique pour la conceptualisation de relations entre linguistique et litt rature pour lesquelles la notion revisit e de discours est un op rateur de passage Il ne s agit pas de faire chorus avec les d tracteurs z l s du structuralisme homog n isant des th ories diff rentes pour condamner une poque qui a pourtant jou son r le dans la modernisation intellectuelle de la France y compris dans des tudes litt raires que le d mon de la th orie suivant la formule d Antoine Compagnon avait malheureusement pargn ees il n
600. tout individuelle Dieu comme les vertus th ologales au nom d une distinction d ordres implicite dans la formulation restrictive de Pobjection n admettra t on de vertus que celles qui sont utiles au genre humain En effet si dans le c l bre sch ma pascalien l ordre de Pesprit n est rien du point de vue de celui de la charit c est ici la conduite du saint ermite qui n est rien aux yeux de la communaut humaine Finalement condition d amputer la charit de sa dimension surnaturelle Saint Paul qui la met au dessus d esp rance et foi s accorde avec le monde qui n estime pas le saint vertueux et ils ont tous deux raison L adversaire tente alors de prendre l auteur au pi ge d un rai sonnement supposant admis comme pr misse que gourmandise ivrognerie impuret sont des vices soit le contraire de vertus En 385 Litt rature et saveur d coulera n cessairement la conclusion qu un solitaire qui ne se livre aucun de ces exc s est vertueux mais pour l auteur intemp rance ou d bauche solitaire ne sont que des d fauts particuli rement infames certes et non des vices puisque comme son antonyme vertu cette notion exige l existence de rapports sociaux et emporte avec elle de ce fait la possibilit de sanctions Ce n est pas le cas des pratiques si d shonn tes fussent elles de cet infame solitaire qui ne regardent que lui L absence de ces d fauts ne permet
601. tout le monde conna t puisque chacun le cite n est pas si l on en croit Pabsence de r dition des Etudes de la nature depuis la fin du dix neuvi me si cle des plus fr quent s dire vrai si l on invitait chacun r pondre honn tement en linterrogeant seul seul hors l imposture mutuelle o nous vivons tous peut tre avouerait il que ce texte m me qu il prend si grand plaisir citer il ne l a jamais lu D ailleurs la r flexion ce n est pas exactement sous cette forme qu il s en souvenait Il lui semblait qu il y avait quelque chose de plus d cisif dans la fameuse phrase sur les melons que ce prudent semblent destin s ou cet hypoth tique pourrait quelque chose de disons plus manifestement ridicule quelque chose comme Le melon a t divis en tranches par la nature afin d tre mang en famille la citrouille tant plus grosse peut tre mang e avec les voisins 1 Nous donnons toutes les r f rences dans Jacques Bernardin Henri de Saint Pierre Etudes de la nature Paris imprimerie de Crapelet chez Deterville an XII 1804 5 vol Nous indiquons d abord le tome en romains puis la page L orthographe est modernis e mais pas la ponctuation Nous pr parons en ce moment une dition critique des tudes de la nature para tre aux Publications de l Universit de Saint Etienne dans la coll Lire le dix huiti me si cle 48 Ex
602. toute civilit Aussi l abb de Cavayrac Jean Jacques Lefranc de Pompignan ma tre Abraham Chaumeix La Beaumelle composent ils une galerie de portraits au vitriol Celle ci s enrichit d une XXII honn tet en 17 points infligeant une le on ce cher Nonnotte au petit Nonnotte l ex r v rend p re ex j suite Nonnotte dont les b vues ou ignorances sont comment es avec hargne Dans ce contexte l argumentation de ces paragraphes qui mettent en cause pr dictions miracles mission dict e par des voix c lestes il renvoie au texte absent de Nonnotte plus encore au cuistre qui en est l auteur et auquel il faut prouver que Jeanne tait une idiote hardie qui se croyait inspir e une h ro ne de village qui on fit jouer un grand r le La lettre du texte importe moins que l intention pol mique qui Paimante En 1769 selon une technique qui s apparente au coupe coll ce m me texte est appel a la rescousse pour grossir la XVII sottise de Nonnotte des Edaircissements historiques Auparavant cette sottise tait indigente elle portait sur la date de naissance de Jeanne d Arc et donnait lieu discussions vetilleuses La charge de la XXII honn tet autrement riche de substance est alors transf r e D s 1767 Voltaire pr tendait clairer le publie qui aime l histoire sa dissertation trouve tout naturellement place dans un ouvrage dont le dessein tait ainsi
603. tre le mot est r p t une forteresse Voil donc quoi r vent les hommes libres Pierre c ur de pierre s extasie devant des murs le mot intervient par trois fois Sa vie ult rieure le vouera d ailleurs non sans ironie dramatique au confinement que ce soit l cole Robinel au bordel des Hirondelles ou Saint Cloud dans la maison de Dora Enfin on admirera la finesse que met Aragon d finir et railler l attitude de touriste qui est celle de Pierre un touriste c est un homme qui s exalte devant un monde qui pour lui devient th tre pass et beaut le retour anaphorique du tour concessif impose le jeu sur les mots un touriste c est un homme dupe du beau voir Une telle vision esth tique ou esth tis e du monde condamn e chez Pierre comment d s lors ne pas s tonner qu elle s appuie sur un souvenir d enfance pr t au personnage qui voque le Kremlin Pr cisons La logique du texte tablit une continuit forte dans l esprit de Pierre entre le Castel Vecchio et les murs du Kremlin deux spectacles le chef d uvre d un 28 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink att de forteresse et un album avec des vues deux r alisations de l architecture italienne puisque le savoir r aliste 4 r el a se sal voque allusivement ces architectes venus d Italie qui b tirent le Kremlin sans doute au XV si cle F
604. tre tait adress e sa m re une lettre d amour vieille de dix sept ans non signee Que signifie cette initiale Un V qui peut aussi bien tre un N Sied il d interroger ma m re Faisons cr dit son bon gotit Libre moi d imaginer que c est un prince La belle avance si j apprends que je suis le fils d un croquant Ne pas savoir qui est son p re c est a qui gu rit de la peur de lui ressembler Toute recherche oblige Ne retenons de ceci que la d livrance N approfondissons pas Aussi bien j en ai mon suffisant pour aujourd hui Le d but du roman de Gide se pr sente comme le sym trique de ce que chez Freud et dans la vie on appelle roman familial D ordinaire les enfants croient que papa n est pas papa qu il n est pas ce sous chef de l adjoint au secr taire de d l gation c est un prince un aventurier etc Il para t que a aide franchir un cap Puis des pas de parents dans le corridor ram nent les enfants la r alit Ici nous sommes dans un roman donc si Pon en croit ce que rapporte Stendhal dans un miroir main gauche pour main droite dans le sym trique de lexistence et Bernard n a rien a croire Il est renvoy a sa r alit qui est notre imaginaire c est vraiment un fils adult rin Ce qui pourrait tre une catastrophe va tre saisi comme une chance par le personnage dans une s rie de questions br ves d exhottations et d aphorismes sans appel Sved i d interro
605. tre de XXIe honn tet dans Les Honn tet s litt raires puis comme ajout en 1769 a la XVIIIe sottise de Nonnotte des Ecaircissements historiques publi s en 1 Diderot Oeuvres compl tes ed Ass zat t V1 367 Diderot reconnaissait parmi ces vieilles polissonneries l ongle du lion caduc 372 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink 1763 Une dissertation sur la Pucelle ne peut laisser indiff rent de la part de celui qui rima 8561 d casyllabes sur les aventures h roi comiques d une fille du peuple qui sur intercession divine sauve la France est br l e vive avec la b n diction de l glise et qui sera finalement canonis e au XX si cle Ma Jeanne disait Voltaire Ses plaisanteries sur le pucelage de cette belle fille plantureuse lui valurent maintes frayeurs alors que se multipliaient ditions pirates et copies falsifi es de ce divertissement aristocratique de tonalit quasi canularesque Or le texte sur Jeanne d Arc inser dans trois ouvrages diff rents Les Honnetet s litt raires les Eclaircissements historiques les Questions sur l Encyclop die se situe dans un registre tout autre Des vers truff s de mots d esprit d allusions coquines de r f rences parodiques avaient assur la r putation sulfureuse du po me voltairien Les quelques lignes que nous nous proposons d tudier n ont rien voir avec les morceaux de bravoure qu on lit de pr
606. ts Comment ne pas soup onner dans les marges silencieuses du texte la pr sence d autres cendres d autres fant mes d autres hantises Cinoc d pose dans son dictionnaire des mots simples qui continuaient lui parler comme d autres gravent dans le marbre le nom des parents morts sans s pulture ou gr nent rituellement la liste des disparus Sous les mots les morts n est ce pas l le sens cach de cette histoire aujourd hui peine transmissible D autant que le jeu de miroir entre Cinoc et Perec donne ici toute sa mesure La fin du chapitre 60 consacre la co ncidence entre le grand dictionnaire des mots oubli s et le roman qui en propose un chantillon de trois pages et de trente mots L uvre de Perec se fait alors elle m me mus e c notaphe ce qu elle n a en r alit jamais cess d tre Comme La Disparition comme Les Revenentes comme W autant de livres crits pour E c est a dire pour eux le b timent de La Vie mode d emploi abrite un tombeau dans sa crypte un deuil en ses fondations Tout lecteur de Perec sait qu il manque un chapitre au roman qui correspond une cave dans le coin inf rieur gauche du plan de limmeuble C est la place des absents et surtout celle d une m re morte Auschwitz quand son fils avait six ans Cyrla Perec n e Schulevitz s tonnera t on que parmi les mots de la tribu figure une schu le Une cave absent
607. tte histoire L or se trouve aussi par effet de rime dans bordaient et plus loin dans Orient Il offre enfin pour peu qu on suive la l gende comme font les enfants la figure des Rois Mages qu appelle un peu plus bas P vocation de No l et de la cr che Importance de Por dans le 163 Litt rature et saveur livre Exemple Mais c est l imagination amoureuse des fastes royaux du gamin abandonn qui me permit de dorer ma honte Qu Je n insiste pas sur les caract res que la Guyane poss de et qui la font appara tre la fin sombre et splendide ses nuits ses palmes ses soleils son or La mer M diterran e Tout pr s des palmes dans le paysage dans le texte a mer Et ces syllabes ma anal ter M diterran e ou et lumi re premi res dorait ne frissonnait Puis le I panes matinal soleil Et foison le m le a le t le e Soit au del de Phomophonie mer m re l anagramme insistante de maternel Et c est pr cis ment l autre extr mit de cette mer Pextr mit orientale l o le soleil se l ve o le jour na t que s accomplira dans quelques instants dans quelques lignes la naissance celle du Christ celle de Genet Il suffira d un voyage d un transport verbal Le mal la m re Il s agit d eux ensemble Le mal maternel en tous les sens possibles de la formule Si ces deux mots ne sont pas crits on ne cesse
608. u il doit sa r ussite la lisibilit et la coh rence de celui du banquier celui qui prenait le pain Sur l axe innocent vs coupable l Italien est aussi difficile situer que le banquier C est un joueur avec tout ce que cela comporte de passion froide et d int r t En refusant la proposition du banquier il se d finit lui m me par rapport une norme qui est celle de la dignit synonyme ici de honneur Dette de jen dette d honneur c est bien ce que dit le Non de Pltalien Le 1 C Simon La Route des Flandres op cit p 204 343 Litt rature et saveur personnage de I Italien est il celui qui incarne le syst me de valeurs du r cit autrement dit les valeurs cautionn es par le r cit ou plus largement le roman de Claude Simon Il est permis d en douter dans la mesure o honneur s accompagne ici de la n gation de Pinstinct de survie penser aux valeurs s res num r es par Georges la fin de sa lettre sur le bombardement de la biblioth que de Leipzig Un personnage comme Georges pourrait juger que l Italien est un idiot 3 C TAIT LA QUATRI ME ET DERNI RE FOIS ET DANS LA JOURN E AU TRAVAIL IL SETAIT VANOUI ENCORE UNE FOIS Les trois sc nes se d roulent dans des limites pr cises de temps et de lieu chaque soir l heure de manger dans une baraque de prisonniers que sa couchette et par extension celles
609. u de personnages blancs seuls ou en groupe sur lesquels on fixe de petits aimants m talliques et color s en forme de pantalons jupes chapeaux 1 Pour un regard d ensemble sur l uvre d yvind Fahlstr m cf notamment le catalogue r trospectif Fahlstr m Another space for painting Museu dArt Contemporani de Barcelona 2001 2 Propos emprunt a Michel Cournot dans un compte rendu du S ence et E e est l publi dans Le Monde du 23 avril 1993 128 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink bonnets et parapluies c t sur un panneau de format r duit une liste num rot e de petits magnets rectangulaires o sont inscrits des mots ranger dans les cases du bas ou disposer au dessus de mani re former un texte continu ou des fragments de phrases Deux images ou plut t deux syst mes qui se juxtaposent mais ne se suivent pas ne forment pas une s quence narrative comme dans les diptyques anciens C est plut t l id e d un arrangement construire d un tableau faire partir des l ments dispos s sur le panneau d c t D ou la sensation d une d composition de la composition Deuxi me constat Le Plan tarium de Fahlstr m ne raconte pas le Plan tarium de Sarraute et l on n y retrouvera donc ni les histoires et pas davantage les personnages Alain ou Gis le peine entr apercus sans visage et sans v ritable tat civil qui ne sont plus chez elle qu
610. uait jamais o qu il f t Et revenant sur le sujet de l criture il dit plaisamment que pour sa part il serait bien aise que les oeuvres de l v que sortissent de sa propre plume M de Belley ayant accoutum de les lui dicter Et montrant le doigt m dian de sa main droite qui tait tout tors d avoir tenu la plume voici dit il la s re marque de mon emploi notre v que a maintenant pris l habitude de dicter tout cheval estimant que le temps qu il passe sur les routes de son dioc se durant ses visites ne doit point tre perdu pour le service de Dieu Ainsi chevauchons nous aux deux saisons de printemps et d automne lui dictant et moi crivant vous pouvez imaginer comment faisant tant usage de plumes que toutes les oies du Bugey s enfuient au son de sa voix Il m apprit ensuite la prodigieuse quantit d histoires que M de Belley mettait au jour sans compter les lettres et mandements ordinaires sa vocation C est aux jours de canicule quand il ne peut tre par les chemins que s exerce plus volontiers sa rage d crire et il ne se passe alors gu re de jours que nous ne noircissions trente grandes pages Tout plaisant qu il tait ce secr taire ne mentait point et l on a vu depuis de par le monde voler les bataillons de ces recueils d Histoires Devotes par lesquelles M de Belley s efforcait de contre butter celles des auteurs de la sorte de son h te d alors Le lendemain pour
611. ucc dent rapidement les ordres et les menaces les d sordres de la cour 262 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink moins autant dans un hors sc ne romain que sur le th tre de la ville Alexandre d ailleurs conscience de la relativit de son pouvoir C sar et le pape ont fait de moi un roi il n est qu un instrument une hache et non un sceptre Ainsi il se doit de trouver une voie m diane entre les ordres de Rome et les menaces populaires qu voque Valori le peuple est mal habitu la domination absolue ce sera celle d un exercice libre de son corps dans la d bauche le pouvoir limit de d fendre son cousin Lorenzo et la pratique r currente d une ironie cynique et du rire compensation de son manque de pouvoir politique Alexandre se moque de tout de Sire Maurice qu il salue en louant la croupe de diable de son cheval de Valori dont il souligne Phypocrisie fondamentale est on honn te parce que l on refuse de prononcer certains noms du pape un plaisant gar on Les didascalies de la fin de la sc ne le montrent riant riant aux clats commentant lui m me son rire trouvant dr le lt s gt les actes de d capitation de son cousin Mais le rire d Alexandre mest pas l ger il est celui du cynisme du m pris de Pironie d nonciatrice Le duc est en ce sens au m me titre que Lorenzo un personnage repr s
612. ue je pouvais voir l ext rieur 125 350 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink s arr tait Au terme du parcours pourtant il se retourne et semble tent de revenir lorsqu il consid re du portail Pall e p n trant dans les jardins Mais il n esquisse alors qu une image furtive et g n rale de ces jardins d une liste de pluriels r capitulative les lauriers touffus les gazons br l s par le soleil les iris fan s d o se d tache seul le bassin d eau croupie aupr s duquel aux f tes du 15 ao t dans son dernier t maman agonisait lentement 89 Et le paysage s efface finalement avec le texte sous un uniforme linceul de poussi re blanch tre Dans des vasques de terre cuite deux alo s nains aux feuilles bord es de jaune couronnaient les montants du portail entr e de Pall e p n trant dans les jardins o en septembre l poque des vendanges stagnait aurait on dit en permanence entre les lauriers dans Pair immobile la fine poussi re blanch tre soulev e par l auto de quelque visiteur ou simplement la s cheresse tait telle les sabots des lourds percherons et les roues cercl es de fer des charrettes Comme si quelque chose de plus que P t n en finissait pas d agoniser dans P touffante immobilit de Pair o semblait toujours flotter ce voile en suspension qu aucun souffle d air ne chassait s
613. uetterie son interlocutrice est pri e de rester philosophe et non de jouer la grande sc ne de la pudeur effarouch e propre aux marquises des romans cr billoniens C est pourquoi le mouvement de recul de Julie mais votre d but me chiffonne se solde par une riposte s che dont l efficacit est au demeurant imm diate comme en t moigne la vigoureuse d n gation de la jeune femme Celle ci 1 Ce que pr cise d embl e Bordeu en parlant de Pacte de la g n ration 117 Litt rature et saveur prouve visiblement le besoin de se fabriquer une conduite libertine tr s propre engager Bordeu poursuivre puisqu elle d finit sa position en partant d une anecdote gaillarde elle sera donc au moins fictivement l pouse potentielle d une disciple de Diog ne le philosophe qui s avance nu Dans ce contexte nouveau du dialogue la r serve finale Cependant docteur de la gaze un peu de gaze appara t plut t comme une ironie Julie est dans le registre de la parodie de la coquette puisqu elle vient ostensiblement de renoncer ce r le Bordeu prend acte sa concession est toute oratoire car le sujet et son tat en tant qu ils rel vent de la science ne sauraient jamais tre obsc nes mais toujours au service d une v rit sinc rement recherch e Julie soulignera du reste elle m me le statut sp cifique de la langue savante sur laquelle il n est pas n cessaire
614. ugea pas continua de manger son il froid mort se posant un instant sur le visage de celui qui venait de parler parfaitement inexpressif parfaitement froid puis se d tournant ses m choires mastiquant toujours pendant que deux ou trois types aidaient l Italien regagner sa couchette en titubant 1 ET IL Y EUT AINSI UN BONOIS UN ITALIEN QUI JOUA ET PERDIT QUATRE JOURS DE RATIONS Ce qui frappe c est d abord l apparente autonomie du r cit pas de je a fortiori de tu des formes verbales au pass simple et limparfait des expressions non d ictiques qui ont pour point de rep re le jour o lItalien a contract sa dette P gard du banquier 4 partir du lendemain le troisi me jour le lendemain etc Il progresse par accumulation de segments narratifs plus ou moins d velopp s de sc nes c est bien ainsi qu on peut les d finir abstraction faite du caract re it ratif de Pune d entre elles Sa particularit est d tre constitu d une seule phrase avec une sur repr sentation de la conjonction et et un emploi inhabituel des parenth ses qui lui donnent un caract re parl Pourtant personne ne parle ici s il y a des traces de subjectivit elles ne sont pas assum es par un narrateur les v nements semblent se raconter eux m mes pour reprendre la formule d Emile Benveniste Le r cit est enti rement retenu en ce qui concerne les pens e
615. ui pareil celui qu ils nous ont dispens cinq heures par semaine tout au long de sept ann es Ensuite tout va tr s vite Les plus volu s de mes condisciples entrebaillent des livres sulfureux dangereux qui ont en commun de ne surtout pas figurer au programme Lautr amont et Trotski William Burroughs et Karl Marx Nos petites copines d cole maternelle r apparaissent un beau matin en mini jupe et maxi jambes avec de jolies bottines blanches au bout La France s ennuie titre L Aurore en avril 1968 puis c est le mois de mai Un an plus tard nous nous retrouvons quelques uns confluant de toutes les provinces avec une forte majorit de gommeux des grands lyc es parisiens aux portes de Valois pour passer oral Les ettres modernes d couvrent dans une salle du deuxi me tage un gars dont ils se demandent pendant une fraction de seconde s il ne se serait pas par hasard tromp d heure ou d endroit vu qu il vient peine d aborder la trentaine et qu un professeur de lettres et a fortiori un examinateur quand il y va d une affaire aussi grave se recommande par les traits classiques 17 Litt rature et saveur que j voquais la soixantaine bourgeoisement soign e un rapport ext rieur tout formel la mati re enseign e Il y a un temps pour chaque chose Tout le monde sait pour avoir pass par l qu on a quelques instants pour pr parer P preuve Puis c est le moment sous l i
616. uieu Il n y a certes rien de neuf interroger la coh rence d une uvre dont l auteur repr sente selon le mot de Aron le dernier des philosophes classiques et le premier des sociologues Innombrables sont les commentaires ambitieux ou minutieux qui s attaqueront aux hiatus et discontinuit s aux nigmes voire aux apparentes contradictions de L esprit des lois uvre inaugurale en ce qu elle met en place les fondements d une science qui ne sera baptis e qu au si cle suivant la sociologie tout en demeurant parce quelle demeure captive des repr sentations conservatrices de la classe laquelle appartient Montesquieu sans pour autant comme on va le voir avec Goldzink renoncer au concept du droit naturel mais au point de rejeter radicalement les concepts des doctrines contractualistes qui tiennent le haut du pav de ce temps Et pourtant n est ce pas courir un risque neuf que d interroger une pens e en voyageant d une r gion l autre de Poeuvre sautant par dessus les poques sans m conna tre les incommensurabilit s puisque Goldzink s interdit les d tours 1 Durkheim La contribution de Montesquien la constitution de la science sociale 1892 2 P Manent La cit de l homme Librairie Arth me Fayard 1994 3 L Althusser Montesquieu la politique et l histoire Paris PUF 1959 4 R Aron Les tapes de la pens e sociologique ditions Gallimard 1967
617. uivant de l extrait Les chameliers lorsqu ils s garent s ils se prennent ce pi ge qui jamais n a rendu son bien ne le reconnaissent pas d abord car rien ne le distingue et ils y tra nent comme une ombre au soleil le fant me de leur pr sence Coll s cette glu de lumi re ils croient marcher engloutis d j dans l ternit ils croient vivre Ils poussent en avant leur caravane l o nul efort ne pr vaut contre Vinertie de l tendue Marchant sur un puits qui n existe pas ils se r jouissent de la fraicheur du cr puscule quand d sormais elle n est plus quinutile sursis Ils se plaignent peut tre 6 najs de la lenteur des nuits quand les nuits bient t passeront sur eux comme battements de paupi res Et sinjuriant de leurs voix gutturales cause de tendres injustices ils ignorent que d j pour eux justice est faite Tu crois qu ici une caravane se h te Laisse couler vingt si cles et reviens voir 1 D autant plus qu une autre des l gendes de Citadelle p 102 103 a pour d cor une mine de sel saharienne 323 Litt rature et saveur On assiste un approfondissement du mal fice avec la th matique de l gar ement Cle pi ge qui n a jamais rendu son bien accomplit le fantasme de l absorption de l avalement combin ici au motif de Pentrave cin tique les chameliers qui s garent dans cette contr e sont coll s cette glu de lumi re et
618. uli rement crues du Ronsard des Amours de 1552 1553 sur la dispersion de sa semence on ne saurait voir dans le po me la moindre c l bration de la chair ou une v ritable rotisation du songe Ce dernier se rapproche davantage de la seconde mani re que le motif conna t l automne de la Renaissance celle d une po sie o Paccent est mis sur l cart qui s pare la douceur du r ve de Pame re r alit et sur la d convenue qui en r sulte Dans Panthologie le texte de Jean Mairet qui pr c de celui de Certon oppose ainsi l affabilit de la femme r v e la cruaut de la Dame r elle selon un sch ma d ceptif bien attest Le sonnet raconte ici le passage d un endormissement heureux un r veil malheureux 83 Litt rature et saveur le r cit bascule vers le milieu du second quatrain comme le souligne le passage brusque au pr sent de narration Je m esveille encore renforc par leffet prosodique des deux c sures arr t v 6 7 sont ainsi oppos s Pheur du songe et le d sespoir de la veille Punion des amants et lexp rience de Pabsence C est replac dans ce cadre que le sonnet de S Certon peut d sormais surprendre tant l vocation de la Dame et celle de P v nement narr restent abstraites et floues Certains verront l un des traits marquants de la po sie mani riste qui repose sur Pabstraction et qui l oppos du path tique baroque recherche la discr tion Mais
619. umas n est pas un auteur pour explication de texte Outre son statut de romancier populaire qui Vexclut du panth on scolaire sa prose a la r putation de se pr ter malais ment la lecture intensive qui est celle du commentaire et d appeler au contraire une lecture extensive de pur divertissement L exp rience qui consiste commenter un extrait de son uvre ici l pisode de la mort de Milady dans Les trois Mousquetaires peut n anmoins tre tent e avec profit Elle met au jour un paradoxe qui n est pas d nu d enseignement pour le lecteur puisqu elle prouve que l criture romanesque peut tre la fois transparente et consciente de ses propres proc d s qu elle peut appeler dans le m me temps adh sion et la distance critique de son lecteur Fortement m diatis par la superposition de codes esth tiques pr existants ici le discours religieux Pesth tique de la gravure le path tique etc le d nouement du roman populaire est en m me temps le lieu o s exhibent et o fonctionnent plein les conventions du genre auquel il appartient Seuil final du livre le d nouement n a pas seulement pour fonction de mettre fin au r cit et d en parachever la coh rence s miotique mais il assure aussi la sortie du livre le retour au paratexte et la conscience du genre et de ses conventions L ex cution de Milady sanctionne la fin des Trois Mousquetaires la sortie de aventure et le
620. un miroir de sa propre vie l instar du public rouennais Emma est transport e par un op ra conforme Pesth tique convenue du m lodrame et que dessert une interpr tation paroxystique en m me temps que maladroite Madame Bovary fait ainsi l exp rience d une identification totalement ali nante sa projection affective dans l histoire amoureuse mise en musique par Donizetti lui interdit tout jugement esth tique Cet investissement passionn dans la fiction repr sent e sur la sc ne de th tre atteint son point culminant avec le cri final du personnage l exact oppos du regard critique parce que d tendu du spectateur brechtien La sc ne d op ra de Madame Bovary tout enti re plac e sous le signe de la m diocrit ne saurait constituer un moment d initiation sociale comparable celui v cu par Rapha l dans La Peau de chagrin Pourtant elle marque dans lapprentissage amoureux d Emma une tape en forme de d sillusion et ouvre pour le lecteur sensible l ironie flaubertienne une r flexion sur les dangers de identification Ainsi une pi tre repr sentation de Lucie de Lamermoor devant un public d pourvu de tout sens esth tique peut elle se faire cole du spectateur ou de la spectactrice plus encline dit on c der l illusion th trale comme la lectrice Pillusion romanesque JEAN GENET JOURNAL DU VOLEUR Par Jean RENAUD kbh gne lyc e Camille Gu rin Poitiers On sait que
621. un nom mais vingt autant dire qu il n en a plus aucun D ailleurs apprend on bient t le principal int ress ne savait pas lui m me qu elle tait la mani re la plus correcte de prononcer son nom comme si ce nom n tait pas le sien n tait pas son nom propre Cinoc donc ne se prononce pas ne veut rien dire n appartient aucune langue comme l Odradek de Kafka Un nom obtus c est du chinois du chinok du chinetoque Ou de l h breu 281 Litt rature et saveur La cl de P nigme n est d pos e ni dans la loge de Mme Claveau concierge tymologique ni dans les d frichements savants de M Echard essart vers dans les graphies foresti res deux personnages qui portent bien leur nom mais dans les recoins de l Histoire europ enne De l espace il faut passer au temps de la logique la g n alogie Le patronyme d origine de sa famille celui que son arri re grand p re un bourrelier de Szczyrk avait officiellement achet au Bureau d tat Civil du Palatinat de Cracovie tait Kleinhof La remont e aux origines cependant ressemble un canular quel rapport entre Kleinhof et Cinoc et qu est ce que cette ville polonaise au nom lui m me impronon able mais qui s en tonnera t on rime avec cirque et sonne l oreille d un Fran ais comme le d but d une circoncision logique quand Panc tre est bourrelier
622. une banale et prosa que rencontre libertine o par un muet consentement deux personnages d cideraient de passer ensemble un moment probablement sans lendemain En d autres termes si dans ses romans comme dans ses pi ces Marivaux parle du m me monde met en sc ne ses faux semblants joue toujours de l arf entre signes et sens mots et intentions tre et para tre les proc d s litt raires utilis s dans l un et l autre cas renvoient de cet cart des images tr s diff rentes Quand la repr sentation th trale laisse l acteur la libert d accorder plus ou moins ses r pliques ses mines aux attitudes de son corps le roman accompagne la sc ne de l interpr tation qu en fait dans le moment ou dans le temps de l criture le petsonnage narrateur Mais loin que cette voix suppl mentaire dissipe les zones d ombre elle concourt plus souvent renforcer Pambiguit du texte formant autour du r citant un halo de 241 Litt rature et saveur myst re Dans la rencontre de Jacob et de Mlle Habert o le regard sur le corps est pourtant l objet premier des pens es du h ros la na vet de son point de vue comme la r currence du s me culinaire font cran cette dimension libertine qui s imposerait au spectateur de la sc ne aucun moment Jacob ne s interroge sur la pr sence d une femme au petit matin et en habits de nuits en pleine rue quelques pas de chez elle racolerait elle
623. une de la notion d autonomisation mise l honneur par Paul Bourget Le th me est partout mais pris en mauvaise part Ce que l on per oit comme une autonomisation croissante de Pindividu par rapport au collectif revendiqu e s agissant d crivains est alors stigmatis on invente une identit collective pour les classes qu on souhaite contenir et qu on d nomme la 1 L expression nostalgique d un sentiment d incapacit faire communaut n est pas une invention du XXe si cle comme l a montr Jean Luc Nancy et peut m me appara tre comme constitutive d une conscience occidentale qui s est construite hors du mythe et dans la nostalgie de la parole de la communaut cens e s y fonder Cf Jean Luc Nancy La Communaut d s uvr e Paris Christian Bourgois diteur 1986 et Claude Millet Le L gendaire au XIX si cle Paris Presses Universitaires de France 1997 2 Hippolyte Taine Origines de la France contemporaine op cit p 350 3 Paul Bourget Essais de psychologie contemporaine Paris Lemerre 1883 399 Litt rature et saveur foule laquelle se constitue pr cis ment en discipline au m me moment avec Tarde et Le Bon Romanciers et th oriciens dans le m me temps et s empruntant les uns aux autres cr ent donc l acteur foule au moment o l on h site admettre que tous les hommes puissent valoir la m me chose De foule il mest r ellement question que pour
624. unit 5 000 auteurs publi s dans toutes les langues Chaque livre est prot g selon le code de la propri t intellectuelle et les droits d auteurs r mun r s V ritable diteur de marques les ditions Le Manuscrit www manuscrit com et leurs comit s de lectures sp cialis s cr ent des collections prestigieuses en partenariat avec les universit s centres de recherches institutions fondations et acteurs de la soci t civile Par un r f rencement cibl les ditions Le Manuscrit www manuscrit com assurent aux ouvrages une diffusion internationale dans les librairies r f rencement Electre Dilicom Titelive et sur les principales librairies en ligne Amazon AbeBooks Alapage Chapitre Un r seau de partenaires attentifs libraires biblioth ques m diath ques m dias s associent aux ditions Le Manuscrit www manuscrit com pour favoriser la d couverte des talents Prix du Premier Roman Le Manuscrit Prix du Sc nario du Film de Femmes la transmission des savoirs et promouvoir les titres et les auteurs aupr s d un large public Dynamique et innovant le site manuscrit com par un acc s gratuit et privil gi la publication propose une plateforme de contenus interactive et r unit autour des blogs d auteurs des sources d informations sur la vie culturelle ainsi qu un espace de rencontre privil gi entre auteurs lecteurs et partenaires actifs Les ditions Le Manuscrit wwwmanus
625. us signifiant et le mieux repr sent parfum perles pendeloques linge paupi res vertes dorment hate regard avide Chacun de ces mots se charge de connotations rotiques sensualit parfum nudit moins de linge et par m tonymie perles et pendeloques ces bijoux tant associ s des parties du corps f minin fortement rotis es poitrine et oreille d sir hate regard avide Cet 196 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink rotisme se diffuse au mot globes qui r active une m taphore commune et m me populaire le po me travaille des lieux communs en associant les fruits d sign s par leur qualit essentielle la rondeur et les seins La m me association vaut pour les pendeloques pesantes qui voquent la f minit non seulement par m tonymie ce genre de boucles d oreille est un bijou f minin mais aussi m taphoriquement par leur forme de poire le po me actualise ainsi les deux sens lexicaux du mot pendeloques bijoux cristaux d un lustre et Penrichit de deux autres sens pat la double m taphore des poires et des seins Seuls les deux premiers r seaux lexicaux sont r f rentiels au sens o ils d veloppent le th me des fruits annonc par le titre les trois autres invitent lire dans ce po me autre chose qu une vocation de la maturation des fruits et engagent une lecture sym
626. uteur a du g nie Mme de Genlis Souvenirs de F licie Paris 1804 p 121 1 Si la proposition selon laquelle Auteur se bat les flancs pour s chauffer et le Lecteur reste froid reprend la probl matique de Rousseau l image a pu tre inspir e de la lecture de F nelon Dans le deuxi me dialogue des Dialogues sur l loquence Pun des interlocuteurs d clare Rien ne semble si choquant et si absurde de voir un homme qui se tourmente pour me dire des choses froides pendant qu il sue il me glace le sang 2 Toujours dans la Seconde Pr face Pun des interlocuteurs d nonce les auteurs de romans qui n ont que le jargon par des passions Pour Pamant v ritable en revanche Pamour n est qu illusion Il s exprime par figures et en effet son loquence est dans son d sordre d cit e p 15 3 Seconde Pr face d cit e p 15 214 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink On voit comment Rousseau op re un renversement dans Pordre de la pens e classique l efficacit de la communication est inversement proportionnelle sa rationalit C est bien l argument employ par Mme de Merteuil et l origine de la critique litt raire de Laclos On remarque au passage que cette d monstration sera suivie d effet sur le fond lorsque Valmont explique la Pr sidente de Tourvel la n cessit qu il prouve de lui parler et Pimportance d un entretien i
627. utur ne changera plus choquant dans un texte fondamentalement au pass et par le pr sent de v rit g n rale qui suit La course du narrateur pour avoir une vue totale et un tableau continu r v le sa volont d arr ter le mouvement Et la ma trise de ce dernier qui lui chappe dans le train il Pobtient dans l criture Proust ne se contente pas en effet de d crire un paysage mouvant Le mouvement de ses phrases et plus particuli rement celui de la derni re reproduit la fois les changements de paysage dus aux sinuosit s de la ligne de chemin de fer et les tats d me successifs qu entrainent chez lui de tels changements Sa course d une fen tre l autre se justifie par son d sir de ressaisir dans son unit le tableau qui se d ploie devant lui D s lors le th me du mouvement omnipr sent dans tout le passage ne prend son sens que dans la mesure o paradoxalement il permet d unifier visuellement et par Pinterm diaire de l criture les l ments disparates du paysage afin de cr er un tableau dont le narrateur serait le peintre 274 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink IL LA CREATION D UN TABLEAU IMPRESSIONNISTE Proust ne se contente pas de d crire comme un romancier du XIXe si cle le panorama qui s offre ses veux Il le transforme en un tableau impressionniste D limitation du cadre du tableau Le carreau de la fen tre renforc pa
628. ux de vos berg res Monseigneur s exclama M d Urf votre confesseur devrait surveiller vos lectures Mais nous avez mis sur 1 Camus confond deux pisodes L onide passe tout le livre six de la premi re partie surprendre le r cit de l histoire de Diane plus tard l oreille la fente d un ais pendant dix huit pages elle surprend la conversation o Climanthe expose sa ruse Polemas 442 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink une mati re de grande importance pour nos romans qui sont pourtant de peu d importance interjeta M de Belley Soit mais s il vous pla t Monseigneur passez moi pour l heure Pune de mes deux passions qui est d ctire et je ne m enquerrai point ce qui vous fait composer et avouer tant d ouvrages x Je n cris vous le savez que parce que vous et vos semblables crivez On voit par toute l Europe voler de ces romans non pas tous aussi c l bres et aussi relev s que les v tres Monsieur mais tous d pourvus des le ons qui pourraient tourner au bien toutes ces fables vaines En r compense la garde des mes n exige pas que l on compose de longs ouvrages de pesante lecture pour d tourner du mal nos ouailles par pr ceptes et d monstrations les exemples sont de bien meilleur efficace rebroussant au bien la passion de la lecture C est pourquoi il me semble que j atteindrai au blanc plus facilement en recueillant par l
629. ux qui voient passer c est dire dispara tre les autres devant eux seront vus leur tour dans la m me posture d autres nous verrons passer et cela dans un infini mouvement de substitution comme le laisse entendre la chute finale qui doivent leurs successeurs le m me spectack Le terme de spectacle op re alors la jonction du passage avec son hypotexte de 1648 mais il s est mancip du opos et se charge dans ce contexte d une ironie am re Le pr dicateur en souligne la valeur affective par une plainte exclamative Dieu qui n appartient aucun texte source mais assure la scansion path tique du discours Pinterrogation qu est ce que de nous est en effet la reformulation encore une fois famili re et apitoy e de l enqu te initiale 6 hommes venez apprendre ce que c est que l homme Ainsi formul e la question n appelle pas de r ponse elle la contient La suite confirme donc le n ant de la vie humaine Bossuet a suffisamment dramatis la situation d nonciation pour n avoir qu reprendre litt ralement le texte de 1648 Mais ce faisant il continue suivre la d monstration de Lucr ce et c est par rapport au texte du De rerum natura qui sans doute fournissait d j sa mati re secr te la m ditation du jeune sous diacre qu il faut lire ici le sermon La d monstration du n ant ne porte pas sur les m mes objets pour Bossuet et pour Lucr ce Pour Bossuet c est la vie
630. ve Le texte de Moli re imm diatement s accorde Comme si tout cela tait p dagogiquement pens il n en est peut tre rien est ce un r flexe Le Misanthrope ne vient pas comme un p le exemplum de la maxime Le Prince na rien d un d Aubignac ou pire d un Bossuet mais appara t dans un rapport dialectique elle elle le cr e et il l a cr e si bien que Misanthrope devient l embl me la th orie en marche et la r alit m me de linterrogation th trale ayant t pr c demment ceux de la surprise th trale autre fonction essentielle et compl mentaire de linterrogation Il est alors temps de caract riser cette sc ne d exposition d en montrer la singularit Pour qu elle soit singuli re on rappellera le cas g n ral qu au besoin le lecteur pourra retenir Mais il faut aussi que le discours critique comme il en a intention et la pr tention le terme ici est neutre soit singulier et simultan ment s adresse tout utilisateur de lexplication N gation cette sc ne d exposition n est pas une interrogation sur l avant pi ce Affirmation mais elle est une interrogation sur l tre l d un personnage On surprendra en redoublant la mise par une sorte 413 Litt rature et saveur d hypotypose qui rend pr sente lexplication par un recours au style direct mais sans guillemets trop vulgaires Non pas dites moi ce que vous savez ce que je sais aussi
631. vec l installation de leur h ros leur propos Jean Goldzink parlait il y a quelques ann es de la surprise des aubes En son hommage on reviendra sur l une des aubes les plus surprenantes du Paysan parvenu o Jacob croise sur son chemin l une des femmes par lesquelles il commencera parvenir Le roman de Jacob commence peine son mariage avec Mlle Genevi ve vit de justesse gr ce la mort providentielle de leur ma tre l a d j camp en h ros s ducteur et sans scrupules D cid s journer Paris plus qu il n avai t r solu d abord Jacob se rend aussit t chez ma tre Jacques cuisinier originaire de son village dans l espoir qu il Paide se fourrer quelque part La premi re phrase du texte prolonge cet autoportrait du h ros entreprenant trop press par l heure matinale le froid et ses ch teaux en Espagne pour pr ter attention aux aventures du chemin Peu son r le de h ros il rate presque l occasion de secourir linconnue en d tresse le malaise de cette derni re n appara t qu au terme d une phrase o prime l enregistrement m canique des impressions visuelles dans Pesprit de Jacob tandis qu il avance vers son but Seul l appel au secours explicitement path tique le sort de sa torpeur et le fait r agir s arr ter peut tre revenir sur ses pas imparfait qui disait sugg re la fois que la femme s est exclam e au moment pr cis o
632. venir jouer leur propre partition de Poeuvre A chacun d inventer alors de nouveaux nouveaux romans d articuler sur le panneau ses propres monologues laide des 188 l ments verbaux et visuels mis par lartiste la libre disposition du spectateur Jouer au Nouveau Roman a consiste donc manipuler le nombre la fois ouvert et restreint des pi ces d membr es et parses qui le constituent en essayer les combinaisons infinies en r articuler librement le discours 1 Nathalie Sarraute Qui tes vous Conversations avec Simone Benmussa Lyon La Manufacture 1987 p 105 132 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink s inventer des histoires construire des sc narios pour d autres Plan tariums Fin de partie Autrement dit encore le narrateur du nouveau Plan tarium de Fahlstr m uvre pionni re de linteractivit et de l esth tique relationnelle c est vous c est moi M tamorphose en nous laissant jouer avec des objets et des mots sur ce puzzle o une constellation de personnages r activer attendent ce grand enfant hyperactif qu est le spectateur de l uvre Fahsltr6m se d place insensiblement de Nathalie Sarraute Michel Butor progresse de l clatement des voix la fabrique partag e de l uvre de la suppression de l intrigue la dissolution de Pauteur Nouveau roman nouveau titre La Modification du Plan tarium ANNEXE Extrait de Pla
633. vent dans des ouvrages compos s de courts chapitres li s pat un dessein d ensemble que marque la num rotation des honn tet s ou des sottises Cette composition permet d accumuler des r ponses sur des points bien cibles Le texte concernant Jeanne d Arc l un des plus longs entrait dans des num rations or il se voit arrach son contexte pol mique comme si son sens n tait pas puis par les circonstances qui Pavaient vu naitre Ce texte est devenu article des Questions sur l Encyclop die et Pon trouve trace de ce transfert d lib r dans la Correspondance de Voltaire qui crit son libraire Cramer en mars 1770 On avait oubli d envoyer l article Arc Jeanne d Arc dite la pucelle d Orl ans qui doit tre plac avant l article Ardeur La signification de cette page d passerait elle sa premi re fonction celle d une r plique Ou bien serait elle susceptible d assumer d autres fonctions 1 M XXIV 483 2 M XXIV 497 498 3 D 16232 Nous renvoyons l dition Besterman de la Correspondance de Voltaire Gen ve Oxford 1968 1977 376 Explications et commentaires offerts Jean Goldzink Le portrait de Jeanne en idiote hardie qui fut le jouet de manigances politiques avant d en devenir la victime se voit accorder une chance d tre lu autrement Voltaire supprime toute r f rence son duel avec Nonnotte Plus de mise en garde plus d admonestatio
634. verges d s qu il en est arm il tend la m re sur le dos de mani re ce que son gros ventre se trouve absolument pr sent il tablit ensuite sur le ventre les quatre enfants par chelons ce qui lui donne flageller de suite un ventre et quatre culs il flagelle la fois en remontant avec la rapidit de la foudre et le ventre le plus dur le plus blanc et les huit fesses les plus app tissantes Manie du fouet les romans de Sade lancent une mode qui conna t son paroxysme avec les romans anglais des ann es 1900 Le XTX si cle industriel est tout entier obs d par cette furie fustigatrice Ce gout si particulier na t de la manie d crire dont elle est la m taphore la plus achev e et la plus lisible Barthes notait d j que le mod le de PEros sadien est le ravail non sans quelque quivoque sur l tymologie Lrorgie est organis e distribu e command e surveill e comme une s ance d atelier sa rentabilit est celle du travail la cha ne Ce qui est d crit est en fait une machine la Machine est embl me 1 Voir l extraordinaire toile de Lelio Orsi Mod ne Galleria Estense vers 1560 L uvre est analys e avec pertinence par Lionello Puppi es Supplices dans l art trad D A Canal et O Planchon Larousse 1991 p 108 109 2 Sade Histoire de Juliette sixi me partie Biblioth que de la Pl iade tome HI p 1198 3 Je pense en particulie
635. y La vengeance d une femme derni re nouvelle du recueil paru en 1874 Ce prologue appel sans fard l immoralit romanesque illustre l nigme litt raire que constitue l criture aurevillienne fruit subversif d un crivain catholique et conservateur Il existe il est vrai une continuit th matique entre cet appel l immoralit ou la moralit tragique de la fiction et la nouvelle qu il est cens introduire On conna t sans doute cette histoire d crivant un crime de l extr me civilisation Le dandy Robert de Tressignies suit une prostitu e magnifique qui le conduit jusqu sa demeure mis rable dans le Paris de la monarchie de Juillet Apr s Pamour elle lui d voile son identit elle est la duchesse de Sierra Leone et c est pour se venger de son mari un orgueilleux et impitoyable grand duc d Espagne qu elle recherche la d gradation Or cette nouvelle au lieu de d buter comme la plupart des autres Diaboliques dans un salon Le dessous de cartes d une partie de whist un boudoir Le plus bel amour de Don Juan ou une diligence Le rideau cramoisi c est a dire une quelconque chambre d chos h rit e du XVIII si cle o un narrateur principal waestro de la conversation raconte son auditoire captif une histoire particuli rement atroce commence par cette introduction la premi re personne matrice exacte d articles critiques de Barbey L hypot
636. z ro En dehors de la pr cision apport e par un B nois un Italien autrement dit un habitant de B ne incorpor dans un r giment indig ne et qui 341 Litt rature et saveur se retrouve prisonnier avec les Fran ais l Italien est r duit son r le de perdant Il n offre plus de ressources narratives d s lors qu il s est acquitt de sa dette et qu il a regagn le mot est dans le texte sa libert par rapport au banquier Commenc dans l affirmation s che de existence d un joueur particuli rement endett le r cit s ach ve sur une h sitation qui donne peut tre entendre autre chose Elle porte sur le sujet du g rondif en titubant Qui titube en effet dans l histoire c est Italien Mais dans la phrase en raison des contraintes li es a Pemploi du g rondif ce sont les deux ou trois types qui lui pr tent assistance Quant au mot types il est vraisemblablement emprunt au vocabulaire de Georges c est celui qu il emploierait pour parler de ses compagnons de captivit 2 ET UN DE CEUX QUI ASSISTAIENT LA SC NE DIT QUELQUE CHOSE COMME ESP CE DE SALAUD Malgr Pabsence de point d exclamation Esp ce de salaud a la syntaxe et la valeur performative d une injure adress e au banquier En tant que telle elle est disqualifi e par la r action ou plut t l absence de r action du banquier indiqu e de mani re redondante par la n gat

Untitled - Christine Marcandier

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