Jean-Louis BAUDOUIN, Rapport de synthèse
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1. Rappelons titre de simple illustration qu il y a peine quelques si cles celui qui se suicidait tait priv de s pulture religieuse et que dans certaines civilisations on faisait m me un 2009 10 40 R D USS Rapport de synth se 369 proc s son cadavre Plus pr s de nous n oublions pas que jusqu r cemment et encore l heure actuelle dans certains cas la m decine traditionnelle faisait peu de cas des d sirs et v ux du patient relatifs l administration du traitement m dical L acharnement th rapeutique favoris par une relation dominante du m decin envers son patient lui tait le pouvoir de contr ler son corps donc sa vie sa sant et m me sa mort Les choses ont effectivement chang La la cisation croissante des rapports humains la reconnaissance par les tribunaux de l importance des droits individuels la protection accord e au principe de l autod termination par les textes l gislatifs internationaux Oviedo et nationaux et l mergence de la notion jurisprudentielle de consentement libre et clair ont encourag cette transformation et contribu donner la personne humaine une ma trise sur son corps et partant un pouvoir d cisionnel sur sa destin e Ce pouvoir n est cependant pas absolu et si la personne humaine a la ma trise sur son corps elle n en a pas pour autant la pleine propri t Il est d abord limit par l ordre public qui d finit selon chaque pays les l2. galit bas e sur les besoins et non sur la capacit de payer Il est donc fondamental d instaurer un syst me de contr le des prix surtout pour les m dicaments garantissant une justice pour tous d en assurer une distribution g ographique ad quate et de r duire ce qui semble l heure actuelle poser partout un probl me majeur les d lais d attente tre soign trop tard n est pas tre bien soign S agissant en troisi me lieu du contr le de la qualit des soins celui ci varie l encore selon chaque pays et les ressources disponibles Par contre tous luttent contre la fraude dont la vente de m dicaments sur Internet est la forme la plus r cente Acc s et qualit des soins passent n cessairement par un remboursement ou une prise en charge globale ou partielle par l tat des co ts de sant Diff rents syst mes existent cet gard Parfois l tat les assume au complet en mettant en place un syst me de s curit sociale universelle Parfois n en payant qu une partie il oblige chacun contracter une assurance maladie compl mentaire aupr s d un organisme public ou semi public Parfois enfin il laisse l individu enti rement libre la responsabilit de contracter une assurance aupr s de l industrie priv e Devant l explosion des co ts la France en est un bon exemple avec ce que l on a appel le trou de la s curit sociale chaque tat a mis en place des m canismes de contr le a pri
3. Peut on au nom du bien tre g n ral disposer de produits individuels du corps humain librement de fa on collective sans l autorisation et le consentement de l individu comme ce fut le cas dans l affaire Moore aux tats Unis Le droit des brevets comme nous l avons vu prouve d ailleurs de s rieuses difficult s r guler l utilisation de la mati re vivante Accorder un brevet sur le vivant n est ce pas sanctionner son entr e dans la sph re conomique et ouvrir largement la porte la commercialisation de la personne C est pourquoi les r ponses du droit varient beaucoup m me d ailleurs pour les esp ces v g tales et animales et donnent la nette impression d un certain caract re artificiel fond sur l utilitarisme Doit on aller plus loin et autoriser des manipulations g n tiques pour viter la transmission de d ficiences ou de maladies L ADN de certains individus peut il lorsque n cessaire pour la sant ou la sauvegarde des autres devenir en quelque sorte partie du patrimoine commun de l humanit et tre ainsi revendiqu titre de bien collectif Ce sont l des controverses que tous les pays auront r soudre et dont la r ponse devra probablement tre puis e en partie du moins dans le nouveau droit international de la sant 372 Rapport de synth se 2009 10 40 R D U S Il reste int ressant de constater donc qu l extension du contr le de l individu sur son propre corps qui est
4. au cours de ces quatre jours de travail rel ve sinon de l inconscience du moins de l audace Je sollicite donc d avance votre indulgence pour les propos qui vont suivre La difficult de faire cette synth se tient deux facteurs Le premier est le regroupement contraint mais n cessaire l int rieur dun m me th me de quatre sujets fort diff rents les uns des autres Ceux ci en effet n ont entre eux que des liens tr s flous et la recherche de points communs ou de certaines lignes de force universelles comporte le risque de conf rer mes propos un certain parfum d artificialit Le second facteur est que l enseignement du droit et son clairage sur l ensemble de ces probl mes et m me son r le sont encore incomplets relatifs et mal d finis La science juridique dans un cadre conceptuel plus large est souvent rel gu e en droit de la sant un r le de simple piph nom ne Les questions pos es par le droit de la sant notre poque et l examen critique des conflits controverses et parfois m me des nigmes qu elles soul vent rel vent en toute priorit du domaine de la philosophie et de l thique et non du droit Ainsi jai t particuli rement frapp de la chose lors de nos discussions et la lecture de cette partie des rapports sur le statut juridique de l embryon Si dans plusieurs pays le droit pr voit une r glementation et en g n ral ne reconna t la personnalit qu la naiss
5. de l utiliser sans pour autant exiger un acte volontaire et consensuel mais tout en respectant videmment la sauvegarde de la vie et de la sant du donneur Peut tre donc faudra t il que le droit apr s une s rieuse r flexion thique et philosophique pr alable fond e sur les nouvelles r alit s du droit de la sant clarifie mieux le statut du corps trace certaines limites ne pas d passer identifie un noyau dur de valeurs universelles non n gociables et mette ainsi fin certaines ambigu t s porteuses de controverses et de d sillusion x x 2009 10 40 R D USS Rapport de synth se 381 Le droit de la sant dans ses aspects contemporains et je terminerai l dessus pour ne pas abuser de votre patience me para t donc partag entre deux visions du corps humain La premi re refl te clairement l go isme ou plut t l gocentrisme et tend vers un contr le de plus en plus tendu de l homme sur son corps et donc sur sa destin e La seconde traduit le devoir de solidarit d entraide et de charit humaines envers l autre devoir bas sur l altruisme c est dire sur le souci de l autre C est donc mon avis beaucoup plus par un compromis qu il faudra tenter de r concilier d une fa on acceptable pour tous gocentrisme et alt rit D ailleurs le probl me de l euthanasie montre bien que toute solution ne rel ve qu accessoirement du droit parce qu elle est in vitablement en symb
6. que l euthanasie active m dicalement contr l e a d sormais acquis ses lettres de cr ance par sa cons cration officielle dans trois pays europ ens par la Colombie et quelques tats des tats Unis Les tudes belges et n erlandaises sur le sujet montrent que le syst me de contr le mis en place pour viter les erreurs argument dominant des opposants fonctionne bien et que s ils existent les cas de bavures sont rares sinon inexistants L argument donc de la pente glissante ou du d rapage invoqu pour l carter dans toutes les hypoth ses a d sormais moins de poids qu on pourrait le croire Certes cependant certains d rapages restent possibles et il faudra tre vigilant L explosion des co ts de la sant et la pression conomique qui en r sulte risquent de favoriser des programmes d euthanasie pour certaines cat gories de personnes plus vuln rables dont le maintien en vie ob re les finances de l tat Ceci obligerait donc se prononcer sur la qualit de vie de l autre Mais qui est l un pour en d cider et juger la vie de l autre La cons cration de l euthanasie par la Belgique la Hollande le Luxembourg et la Colombie est un tournant important Jusqu ici le droit de mourir s analysait simplement comme un simple droit libert soit la facult de mourir en paix dans le respect de ses propres choix et dans la dignit La reconnaissance de l euthanasie active a institu un v ritable droit c
7. RAPPORT DE SYNTH SE CONGR S DE L ASSOCIATION HENRI CAPITANT 2009 JOURN ES SUISSES 7 12 juin 2009 par Jean Louis BAUDOUIN En septembre 1975 notre association tenait ses journ es annuelles en Belgique sur le th me Le corps humain et le droit Lorsque pour pr parer ce rapport de synth se jai t conduit relire les actes de cette rencontre j ai t frapp de constater combien beaucoup des interrogations du droit et des pistes de r flexion de l thique quelque 34 ann es de distance restaient sinon identiques du moins fort semblables Certes on ne s interroge plus gu re de nos jours sauf dans quelques rares pays et pour des raisons essentiellement religieuses sur les cons quences juridiques de l ins mination artificielle h t rologue Par contre les applications m dicales de la g n tique qui l poque en taient leurs d buts ont pris une place importante dans notre r flexion collective Par contre aussi la d finition du statut juridique du corps humain et la tendance sa patrimonialisation et sa commercialisation sont aujourd hui comme ils taient alors d importants sujets de pr occupation Avocat conseil Fasken Martineau DuMoulin et professeur associ la Facult de droit de l Universit de Montr al 366 Rapport de synth se 2009 10 40 R D U S Faire la synth se d une mati re aussi diversifi e et aussi riche que celle que nous avons examin e et discut e
8. acc s aux soins de sant sont tous les deux en r alit dans le premier cas directement dans le second indirectement des manifestations du questionnement sur le statut du corps humain puisqu en d finitive ce probl me reste au c ur m me de nos interrogations et est en quelque sorte le passage oblig de notre r flexion collective La difficult de d finir ce statut est due en partie la vision analytique binaire du droit et son d sir irr sistible de tout faire entrer dans des cat gories juridiques connues et pr tablies le vrai le faux le l gal et l ill gal la culpabilit et l innocence Or chercher qualifier le statut du corps est se heurter deux r alit s apparemment contradictoires Le corps dans son int gralit est ce que l on est c est un tre il est donc sujet de droit La chose est indiscutable Cependant l poque moderne avec les conqu tes de la science le corps entendu cette fois ci dans ses diff rentes composantes est aussi devenu ce que l on a il est aussi avoir et peut donc pr tendre au statut de bien La summa divisio de Gaius reprise par Justinien entre personnes et choses para t donc d sormais difficilement applicable ou en tout cas n est certainement plus tanche Le droit moderne devra sans doute dans l avenir remettre en question ce qui jusqu r cemment apparaissait tre des dogmes intangibles et faire preuve d imagination pour ne pas s enferm
9. ance il vite toutefois toujours de trancher la v ritable question philosophique de son statut La loi ou parfois la jurisprudence dictent des r gles souvent issues d un compromis politique et utilitariste parfois contestable tout en abandonnant au philosophe et l thicien le soin d valuer et de juger les questions fondamentales qui normalement devraient logiquement pr c der et sous tendre l intervention du droit 2009 10 40 R D USS Rapport de synth se 367 Par contre deux fils conducteurs deux l ments ou deux axes de r flexion me sont apparus la lecture des rapports et l coute de nos discussions Le premier est la r appropriation par l homme du contr le sur son corps gouvernance qui s exerce la fois sur la gestion de son existence mais aussi sur l apprivoisement de sa mort L Organisation mondiale de la sant OMS a propos une d finition tr s large de la notion de sant en la reliant directement au concept du bien tre global de la personne Or tre ma tre de son corps c est se donner la possibilit d atteindre ce bien tre physique et moral mais selon ses propres crit res et ses propres exigences puisque bien videmment le bien tre de chacun les conditions minimales de vie tant acquises demeure toujours un choix et une v rit particuli re et personnelle La sant pour chacun d entre nous toute chose tant gale est donc un concept essentiellement subjectif dont
10. au fond une forme de narcissisme s oppose la revendication plus g n rale et encore mal d finie d un droit d acc s au corps de l autre lorsque le bien de l autre ou l int r t commun est en jeu Je ne pense pas que l on puisse totalement exclure l id e dans l avenir qu au nom de la solidarit humaine la gouvernance de la personne sur son corps se voit imposer des limites cette fois ci dans l int r t commun et donc que l individualisme c de en partie du moins sa place une forme d entraide forc e Il en est par contre autrement de la ma trise de l homme sur sa mort Le combat du malade pour se r approprier compl tement sa mort est loin d tre termin l heure actuelle du moins dans nos pays on meurt la plupart du temps intub gav perfus anesth si dans l anonymat d une chambre d h pital dans la solitude et loin de tout ce qui faisait la vie Comme l ont montr nos discussions sur le sujet dans nos soci t s d velopp es l individu a t expropri de sa mort par la science m dicale La progression des m urs cet gard est int ressante observer L ensemble des pays sous une forme ou une autre reconnaissent maintenant l obligation pour le m decin de respecter les volont s de fin de vie exprim es tant t dans le cadre d un mandat d inaptitude comme c est le cas au Qu bec ou en Suisse tant t en donnant un effet juridique contraignant aux directives antic
11. er dans ce dilemme 380 Rapport de synth se 2009 10 40 R D U S Ainsi l inali nabilit du corps humain n est plus de nos jours une valeur aussi absolue puisque organes cellules somatiques ou germinales une fois d tach s peuvent tre transig s avoir une valeur en eux m mes et servir l autre Jusqu ici heureusement le principe de la gratuit a pr valu En sera t il cependant ainsi dans quelques ann es lorsque les forces du march et les int r ts commerciaux auront cr des pressions politiques suffisamment fortes Pour sa part l indisponibilit du corps ou de ses parties est aussi remise en question par la science moderne L affaire Moore aux tats Unis est une illustration loquente de ce ph nom ne Il n est donc pas impossible d imaginer avec les promesses de la science que le patrimoine g n tique individuel puisse devenir patrimoine biologique commun de l humanit et donc disponible pour tous au nom de la solidarit et de l entraide humaines sans que l individu n en puisse conserver la ma trise Cette indisponibilit autrefois bas e sur la religion le serait d sormais peut tre davantage sur le souci collectif de la sauvegarde et du maintien de l esp ce humaine Enfin il n est pas certain non plus que la r gle de l inviolabilit du corps humain ne puisse pas elle aussi tre remise en cause Si le corps peut tre utile l autre pourquoi ne permettrait on pas la limite
12. imites de l acceptable Ensuite par le principe de la dignit de la personne humaine auquel m me sur son propre corps l individu ne peut contrevenir La dignit humaine n est pas seulement une valeur individuelle Elle est aussi une valeur collective Attaquer celle ci c est enfreindre le caract re sacralis du corps C est en son nom qu il y a quelques ann es on a interdit ce spectacle d gradant du lancer du nain Enfin plus r cemment en raison de l mergence de la g n tique par l imp ratif nouveau de la protection de l int grit de l esp ce qui justifie l interdiction du clonage non th rapeutique de la cr ation de chim res de manipulations g n tiques et aussi l interdiction dans certains pays de breveter le vivant Le pouvoir de l homme sur son corps a deux dimensions principales La premi re se situe dans le cercle de la vie la seconde dans celui de la mort 370 Rapport de synth se 2009 10 40 R D U S S agissant de la vie les quelques constatations suivantes peuvent tre faites La premi re est que tous les pays sans exception admettent d sormais que l individu puisse dans certaines limites disposer de son vivant des parties de son corps qui ne sont pas essentielles sa survie Dans ce sens le corps ou du moins ses parties n est plus envisag seulement comme un sujet de droit mais plus comme un objet de droit objet cependant dot bien videmment d un statut particulier La scie
13. iose avec la vision morale philosophique et sociale qua chaque soci t de la valeur de la vie humaine Eh bien mes chers amis il faudra donc que dans quelque 35 ans d ici l Association Capitant tienne de nouvelles Journ es sur ce m me th me en esp rant toutefois que l on pourra constater alors un plus grand progr s dans la r flexion collective que celui qui s pare nos Journ es anciennes de 1975 de celles que nous venons de vivre
14. ip es comme en Espagne L acharnement th rapeutique est d sormais presque universellement condamn comme contraire au droit l autod termination Le premier devoir du m decin n est donc plus de sauver la vie tout prix mais plut t de respecter la libert de choix de son patient Par contre nombreux sont les pays la diff rence des Pays Bas de la Belgique du Luxembourg et de la Colombie qui refusent de consacrer l ultime cons quence logique de cette 2009 10 40 R D USS Rapport de synth se 373 r appropriation et de reconna tre non plus un simple droit de mourir dans la dignit mais un v ritable droit la mort par la d criminalisation de l aide au suicide et la l galisation de l euthanasie active volontaire et m dicalement contr l e Ce refus illustre bien le contraste entre deux visions philosophique et thique divergentes sur l exercice du pouvoir de l homme sur sa destin e S agissant en premier lieu du suicide assist la tentative de suicide rat n est plus sanctionn e par le droit p nal comme ce fut le cas pendant longtemps Par contre un nombre important de pays continuent p naliser l aide ou l assistance au suicide On ne peut s emp cher de souligner un certain paradoxe puisqu il s agit d un cas o la loi punit la complicit d un acte qui lui m me n est plus criminalis Ce paradoxe est plus apparent que r el pour deux raisons La premi re est que moralement
15. la satisfaction d pend en grande partie de la volont individuelle et n est plus laiss e aux seules contingences du hasard ou aux despotismes de nos soci t s Au cours des r centes ann es le droit de la sant a consid rablement largi le droit de regard et le contr le de la personne humaine sur son sort et replac la volont individuelle au c ur du processus de d cision Le second fil conducteur est d un tout autre ordre Le droit de la sant moderne est aussi en qu te de moyens d assurer une distribution plus quitable des soins tant sur le plan national qu international Il ne s agit plus simplement de permettre l homme de s panouir en lui donnant un contr le accru sur son corps mais plut t de r pondre une inqui tude et une sollicitation universelle devant les diff rences scandaleuses qui s parent par exemple sur ce point comme sur bien d autres les pays riches et les pays pauvres Dans cette hypoth se la mission du droit comme r gulateur social n est plus gocentriste mais altruiste La sant est vue comme une valeur globale C est la collectivit donc l ensemble de l humanit qui en est la r f rence oblig e et qui doit s en trouver mobilis Le droit doit d sormais 368 Rapport de synth se 2009 10 40 R D U S s efforcer d assurer une distribution quitable de ressources sanitaires au niveau mondial et tenter ainsi d effacer ou au moins de r duire les in galit s choquan
16. nce a en effet progressivement d montr que d sormais mon corps pouvait tre utile d autres Le corps fait plus que donner la vie il la sauve parfois Tous les pays r glementent donc les pr l vements pour les greffes d organes tant sur l tre vivant que sur le cadavre Dans cette derni re hypoth se on distingue d ailleurs une nette diff rence entre ceux qui favorisent la formule d inclusion il faut que l individu ait librement consenti au pr l vement sur son cadavre pour que celui ci soit autoris et ceux qui au contraire au nom de la solidarit collective pr sument de ce consentement en l absence de directives contraires L Espagne qui il y a d j plusieurs ann es a mis sur place un programme int gr de concertation psychologique et sociale avec les familles des donneurs a fait cet gard uvre de pionni re Ce contr le s exerce aussi sur les cellules reproductrices du corps humain Le don de gam te qui a pris beaucoup d importance avec le d veloppement de la procr ation m dicalement assist e soul ve une s rie de questions thiques importantes se rapportant directement la perp tuation et l int grit de la race humaine On sent d ailleurs combien le droit reste perplexe et h sitant face la l galisation de certaines pratiques et la sollicitation toujours plus forte de satisfaire le d sir d enfant Doit on par exemple permettre l ins mination post mortem Est il l gitime de
17. ndant pour le moment plus un id al atteindre puisque sa r alisation d pend de la disponibilit de ressources humaines et financi res suffisantes et qu cet gard l in galit demeure malgr de nombreux efforts et n est probablement pas pr te de dispara tre En premier lieu l acc s aux traitements m dicaux chirurgicaux ou autres pr suppose la reconnaissance juridique d un droit d tre soign dans des conditions d centes eu gard aux moyens disponibles et met en cause leur disponibilit et le contr le de leur qualit Tous les pays sans exception pr voient donc un corpus plus ou moins impressionnant de lois et de r glements sur l acc s des malades aux services de sant et le contr le de la qualit des soins Partout cependant ces textes en admettent le caract re essentiellement relatif qui reste soumis aux contingences des conditions sociales politiques et conomiques nationales particuli res Il s agit l de diff rences 2009 10 40 R D USS Rapport de synth se 377 porteuses d in galit s qu il para t impossible d carter On peut seulement esp rer parvenir dans le futur assurer tous et partout un acc s physique une accessibilit conomique notamment par une distribution quitable des services et une qualit de soins minimalement acceptables En second lieu s agissant de la disponibilit des autres soins et des m dicaments celle ci suppose la reconnaissance d une
18. oppement des m dicaments g n riques et l imposition de licences obligatoires qui permettent une plus grande accessibilit aux nouvelles mol cules et une diffusion plus large meilleurs co ts Le probl me est particuli rement important lorsque la d couverte se rapporte la mati re vivante Celle ci quelle qu en soit la forme cellules lign e g n tique peut elle tre prot g e par brevet L encore le droit est h sitant Certains pays optent pour la brevetabilit pour permettre d encourager le d veloppement scientifique D autres au contraire sur une base thique sy opposent en invoquant le principe de la non commercialisation du corps humain et de ses parties 2009 10 40 R D USS Rapport de synth se 379 Ce bref tour d horizon montre donc bien combien le droit a encore de grands progr s faire pour assurer un acc s universel aux soins de sant et aux m dicaments et combien les garanties donn es par les textes internationaux et nationaux restent souvent illusoires en pratique Les efforts pour supprimer les in galit s les plus flagrantes travers la plan te sont cependant nombreux et encourageants mais doivent n anmoins tre appr ci s dans une perspective long terme L OMS en a fait d ailleurs l un des objectifs du prochain mill naire Ces deux aspects du droit de la sant moderne soit l appropriation par l homme d un plus grand contr le sur son corps et l universalisation de l
19. ori touchant donc l acc s au syst me et a posteriori c est dire portant sur le type la fr quence et la qualit des soins 378 Rapport de synth se 2009 10 40 R D U S Le contr le de l acc s aux soins rencontre cependant certains probl mes communs Le premier est celui du traitement des maladies rares ou dites non rentables parce que la recherche pouvant mener une th rapie n est pas payante pour l entreprise pharmaceutique Ce probl me est universel et je pense existera toujours puisque le d veloppement de la recherche scientifique s oriente tout naturellement vers les maladies ou affections les plus r pandues comme le cancer ou les maladies cardiovasculaires Le second touche la brevetabilit des techniques de diagnostic et des techniques chirurgicales Tr s rares sont les pays qui leur reconnaissent un droit au brevet Le troisi me sur lequel on doit insister davantage est celui cette fois ci de la brevetabilit des m dicaments Celle ci est admise en r gle g n rale dans tous les pays m me si l tendue de la protection ainsi conf r e varie grandement La gestion de la relation entre le droit de propri t sur un m dicament qui conf re un monopole d exploitation source de profits et l int r t public d y avoir un acc s un co t acceptable reste difficile g rer et fait partout l objet de solutions de compromis Un r sultat positif de la r flexion collective est cependant le d vel
20. permettre un droit l enfant du mort Doit on plus g n ralement reconna tre un droit l enfant et l galiser ainsi toutes les techniques pour produire ce que Genevi ve D laissi de Parseval a appel l enfant proth se en occultant du m me coup les droits DE l enfant et en faisant clater 2009 10 40 R D USS Rapport de synth se 371 le concept de la famille traditionnelle Doit on favoriser le diagnostic g n tique pr implantatoire dans le seul but d avoir l enfant parfait qui satisfasse pleinement les d sirs de ses parents La s lection par diagnostic pr natal nous fait d ailleurs courir le risque d eug nisme Demandez vous si nous serions tous ici aujourd hui si l homme de N andertal avait dispos du diagnostic pr natal et de l interruption volontaire de grossesse Ce type de dilemme ne rel ve pas vraiment de la science juridique L interrogation et la solution de ces probl mes doivent tre avant tout thiques philosophiques et sociologiques Le droit peut tout juste esp rer en pr venir certaines d rives En plus des organes et des cellules germinales c est aussi toutes les cellules humaines avec le d veloppement de la g n tique qui sont porteuses d espoir pour le traitement de certaines maladies La controverse entourant l heure actuelle la collecte et l utilisation des cellules souches en est une illustration Peut on permettre de breveter le vivant et cr er ainsi un monopole d utilisation
21. r ance Le m decin qui accepte de participer cette proc dure lorsque toutes les conditions pos es par la loi 2009 10 40 R D USS Rapport de synth se 375 sont r unies a donc d sormais sous r serve de l objection de conscience l obligation de donner la mort ou d aider l individu le faire Le r le traditionnel du m decin strict sauveur de la vie est d sormais remis en cause En guise de conclusion ce premier volet sur les nouveaux aspects du droit de la sant permet de mettre en vidence que la r flexion thique sur le sujet reste h sitante pluraliste pour ne pas dire clat e et est encore loin d tre compl t e D un c t comme on a pu le constater le droit l autod termination et donc le contr le que l individu peut exercer sur son propre corps est d sormais bel et bien accept C est la libert retrouv e et la cons cration de la gestion individualis e de la destin e humaine D un autre c t les avanc es de la m decine et de la science ont d montr que le corps humain cette fois ci le corps de l autre tait aussi source de bien tre et donc que le principe de la solidarit humaine pouvait imposer des limites l individualisme Le droit ne s int resse donc plus d sormais seulement au corps que l on est mais aussi au corps que l on a C est galement au nom de cette m me id e d entraide entre les hommes que le droit mais cette fois ci dans un contexte inte
22. rnational plus large recherche les moyens d assurer chacun une accessibilit accrue au syst me de sant et aux m dicaments Le droit moderne de la sant a volu et la protection de celle ci est devenue aussi une responsabilit collective un 376 Rapport de synth se 2009 10 40 R D U S imp ratif humanitaire reconnu par des textes internationaux et prise en charge par des organismes comme l OMS Si elle n entend pas rester un simple v u pieux cette responsabilit l gard de l autre suppose tout en tenant compte des grands carts financiers et conomiques qui s parent les diff rents pays du monde un acc s global et minimal aux soins de sant et aux m dicaments et un contr le efficace des co ts garants de cette accessibilit universelle Des diff rences tr s importantes et des in galit s criantes s parent les pays d velopp s et ceux qui sont en voie de d veloppement donc principalement ceux du Nord et ceux du Sud pour reprendre une expression bien connue Cette disproportion a t r v l e de fa on incontestable il y a quelques ann es par la pand mie du sida qui la diff rence d autres affections comme le paludisme ou la fi vre jaune ne conna t pas de fronti re En outre les statistiques g n rales sur l expectative de vie des ressortissants des pays du tiers monde r v lent un cart choquant avec celles des pays d velopp s La protection universelle de la sant reste cepe
23. tes l re de la mondialisation des rapports humains m me si parfois pour le faire il doit enlever la personne une partie de la gouvernance de son propre corps Tels sont mon avis les deux aspects nouveaux du droit de la sant moderne qui ressortent de ces Journ es Ils peuvent para tre contradictoires premi re vue puisque l un est empreint d individualisme sinon d gocentrisme parce que tourn vers l individu alors que l autre est au contraire r solument porteur d altruisme et tourn vers la collectivit humaine C est donc en tenant compte de ces deux aspects que je me permettrai de vous pr senter maintenant les quelques r flexions que m ont inspir es ces Journ es k Le principe g n ral de l autonomie individuelle comme cons quence directe du droit l autod termination sur son corps est probablement l une des plus grandes conqu tes de l individu sur sa destin e Pendant longtemps le corps de l homme ne lui appartenait pas vraiment pour des raisons culturelles sociologiques et surtout religieuses Le corps tait en effet consid r comme le r ceptacle mortel de l me qui elle immortelle devait tre rendue Dieu D s lors il lui tait difficile sinon impossible d exercer un libre pouvoir sur celui ci car disposer de son corps c tait aussi dans une certaine mesure disposer de son me L homme tait d poss d de son corps par volont divine
24. toutes les soci t s r prouvent et fustigent le suicide comme constituant un acte socialement r pr hensible et donc moralement condamnable On peut donc consid rer l acceptation de l aide du suicide m me pour le malade en phase terminale comme une contradiction id ologique La seconde est que l aide au suicide ne se d roule pas toujours dans le cas du malade en phase terminale dont les souffrances physiques ou morales sont devenues insoutenables On se souviendra cet gard du scandale provoqu en France il y a quelques ann es par la publication d un livre intitul Suicide mode d emplo et on ne peut qu applaudir au combat men actuellement contre les diff rents sites Internet qui proposent sur le Web tous et sans distinction divers moyens de mettre fin ses jours La solution est peut tre comme certains l ont compris de d criminaliser cette aide mais uniquement dans l hypoth se du malade en phase terminale et de continuer la sanctionner dans les autres cas 374 Rapport de synth se 2009 10 40 R D U S Le d bat est videmment encore plus vif et plus d licat dans le cas de l euthanasie active volontaire et m dicalement assist e On peut penser personnellement ce que l on veut sur cette question qui n est certes pas nouvelle L opinion que l on s en fait et le sentiment individuel d pendent avant tout en effet de ses propres convictions morales et religieuses Il n en reste pas moins
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