Écrire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes
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1. Les professions terme sociologique ou les m tiers terme ergonomique de l interaction et en particulier de l ducation vivent une situation paradoxale de tension entre un id al de scientificit et la r alit d un syst me contr l par le politique mais sans contr le des pratiques Plus sp cifiquement dans le monde de l ducation un id al de scientificit esp r e attendue recherch e financ e et institutionnalis e circule depuis un si cle l origine il semble que les p dagogues et psychop dagogues du d but du XX aient con u la qu te de scientificit en ducation en r ponse la VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 11 critique des socialistes scandinaves et britanniques qui reprochaient l cole d avoir essentiellement pour fonction de fabriquer des cur s et des ouvriers Leur id e tait que si l cole se construisait sur une connaissance scientifique de l enfant et des m thodes d ducation devenant ainsi objective elle pourrait organiser ses activit s au b n fice du d veloppement de l enfant et chapperait la critique de l utilitarisme social Ainsi d s 1889 Binet avait cr avec Vaney un laboratoire de p dagogie exp rimentale l cole de la Grange aux Belles alors que Clapar de cr e en 1912 l Institut Jean Jacques Rousseau l Universit de Gen ve Des ouvrages comme Les id es modernes sur les enf2. y retrouver Il y a donc une inversion dans l criture par rapport l ex cution de la recherche on annonce la perspective de la recherche le paradigme dont on se rapproche et l essentiel de la m thodologie dans l introduction de m me que l on crit le chapitre m thodologique avant de pr senter les analyses et le traitement des donn es alors que tant la perspective que la m thodologie n auront t identifi es qu une fois la recherche termin e Tenir une planification pr alable dans une recherche exploratoire adh rer a priori un paradigme c est se contraindre d fendre des choix pr matur s qui emp cheront l ouverture la surprise la d couverte l innovation D s lors je ne peux que conseiller aux coll gues qui dirigent des tudiants de ne pas exiger de ceux qu ils encadrent de r pondre ce qui est impossible Et si par malheur un professeur ou un jury demandait un tudiant d identifier l avance son paradigme et de fixer rigoureusement sa m thodologie avant de passer sur le terrain je conseille cet tudiant de faire plaisir au professeur ou au jury en leur donnant ce qu ils veulent mais de n en faire rien de ne pas se sentir engag par une planification qui ne tiendra pas l preuve de la r alit et de rester pour tre efficace Jullien 1996 2005 ouvert aux opportunit s qui ne manqueront pas de se pr senter L environnement de recherche des t
3. crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes Jean Marie Van der Maren PhD Universit de Montr al R sum la suite du rappel d une pr sentation faite il y a 20 ans les questions de l unit de la science de la place de l pist mologie et de la m thodologie dans l criture de la recherche sont discut es Je traite ensuite des tensions sur l criture r sultant de l environnement universitaire de la recherche pour mettre en vidence la diff rence entre deux s ries de questions paradigmatiques les unes relevant d une th orie de la connaissance les autres d une th orie de l action On propose enfin de r soudre le paradoxe des paradigmes sur l criture dans les m tiers de interaction dont l ducation en privil giant une criture pertinente la culture de l action Mots cl s CRITURE RECHERCHE DUCATION PARADIGMES SCIENTIFICIT PROFESSIONNALIT Introduction Il y a 20 ans d j lors du congr s de l ACFAS de mai 1990 l Association pour la recherche qualitative tenait un colloque sur crire la recherche Le th me du colloque de 2010 allait plus loin qu une r flexion sur l criture puisqu il traitait des d fis de l criture en recherche qualitative Un texte crit l poque Van der Maren 1991 portait sur les n cessit s pist mologiques de l criture la n cessit de mat rialiser les v nements dans des traces communicables
4. efficacit exige du praticien qu il dispose d un cadre d analyse directement applicable les relations entre les indicateurs partir desquels il g re l action doivent pr senter des relations claires avec les mod les de l action En outre le cadre de l action doit r pondre des normes souvent implicites qui expriment les valeurs avec lesquelles le praticien engage sa responsabilit il y a l une thique quasi d ontologique Il en d coule que le praticien attend et recherche des mod les d action caract ris s par sept traits Les mod les d action doivent tre coh rents sans contradictions majeures consistants sans failles sans hiatus et complets efficaces certifiant le succ s situ s adapt s sinon adaptables la situation confront e thiques conformes au syst me de valeurs disponibles sans investissements majeurs en moyens en temps en nergie et en formation et justifiables en cas de mise en cause Cette attente que nous avons aussi 18 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 observ e chez les chercheurs lorsqu ils sont praticiens de la recherche correspond ce qu Ochanine 1978 avait d crit propos des images op ratives Ces images comportent des consignes et des expos s clairs laconiques simples ne comportant que les l ments utiles l action ad quats la t che permettant d apprendre l ex cution des actions par leur r alisation efficaces m me s
5. alit finalisent organisent et rendent la v rit de la th orie des l gitime l action hypoth ses Quelle pr cision doivent avoir les Quelles mani res d agir quelles r gles concepts quelles connexions de l art respecter pour que l action soit doivent ils avoir entre eux pour reconnue comme professionnelle que le discours soit tenable coh rent et consistant admis comme th orique Quelles instrumentations sont Quels usages sp cifiques des outils efficaces permettent de fournir g n raux et sp cifiques du m tier et de soutenir des hypoth ses permettent l efficacit et l efficience de l action Quelles formes de pr sentation Quelles mani res d intervenir de doivent exprimer les hypoth ses montrer l action et d en parler formules phrases clefs sch mas indiquent la recevabilit de l action et etc et les soutenir tableaux contribuent la respectabilit du graphiques illustrations par des m tier et son d veloppement extraits par des vid os praticiens de l interaction et que ces questions ne sont pas les m mes que celles auxquelles doivent r pondre les productions de la recherche lorsqu elle est valu e selon le mod le scientiste dominant D s lors les chercheurs vivent un paradoxe la mani re d une injonction paradoxale comme la d crivaient Watslawick et ses coll gues 1986 ils posent un type de questions pour r pondre un autre type de
6. avec les enseignants Dans V Dupriez amp G Chapelle Eds Enseigner pp 189 201 Paris Presses Universitaires de France Van der Maren J M amp Yvon F 2009 L analyse du travail entre parole et action Recherches qualitatives Hors s rie 7 42 63 VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 23 Vanhulle S amp Lenoir Y 2005 L tat de la recherche au Qu bec sur la formation l enseignement vers de nouvelles perspectives en recherche Sherbrooke Editions du CRP Van Maanen J 1991 Quelques notes sur les normes et les formes d criture en sciences sociales Recherches qualitatives 5 15 33 Watslawick P Beavin J H amp Jackson D D 1986 Une logique de la communication Paris Seuil Jean Marie Van der Maren est licenci en p dagogie et docteur en psychologie de l Universit Catholique de Louvain Maintenant retrait il a enseign l Universit de Montr al de 1974 2010 surtout les questions de m thodologie de recherche et de communication p dagogique en enseignement universitaire Il a cr avec quelques coll gues l Association pour la recherche qualitative en 1985 Il a publi deux ouvrages aux PUM et chez De Boeck M thodes de recherche pour l ducation 7996 et Recherche appliqu e en p dagogie 1999 2003 Pendant qu il assumait la direction du d partement d administration et fondements de l ducation 2001 2009 il
7. de la science et r clament d y mettre bien des b mols VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 7 Ayant atteint l ge de la retraite j aime beaucoup ce que Daoust 1989 p 77 pensait l ducation il crivait la p dagogie est un art un grand art qui a eu le malheur de se prendre pour une science Je comprends que les jeunes coll gues qui essayent de se faire une place et un statut dans l Universit prouvent quelques difficult s avec cet nonc surtout si leur universit pr tend comme elles le font presque toutes maintenant tre une universit de recherche en oubliant que la fonction premi re et historique des universit s n est pas la recherche mais l enseignement La place de l pist mologie dans l criture d un rapport de recherche Un certain nombre de coll gues confondant pist mologie et paradigme demandent leurs tudiants qui d butent en recherche d identifier leur pist mologie Or cela comporte deux erreurs la confusion voqu e et le moment de poser la question Qu est ce que l pist mologie C est une branche de la philosophie l tude critique de la connaissance qui s interroge sur le rapport des nonc s production de la recherche empirique et de l esprit la r alit ou la v rit La v rit existe t elle Non r pond Kahn 1989 elle comporte toujours une part de mensonge la v rit pure
8. ils sont incomplets ou d form s d un point de vue th orique Comme enseignant et comme consultant en m thodologie de la recherche combien de fois n ai je pas entendu les chercheurs me demander en deux mots quoi faire comment le faire simplement sans avoir suivre une nouvelle formation peu de frais et rapidement La culture des professionnels de la pens e et de ceux de l action Il en d coule que l efficacit de l action et dans l action d un groupe d artisans des membres d un m tier ou d une confr rie professionnelle r pond la culture de ce m tier Cette culture se marque dans le partage par la communaut des praticiens du m tier de quatre l ments 1 une thique soit les valeurs et la conception du r le professionnel qui fondent l action comme participant une uvre commune 2 une esth tique soit les r gles de l art qui permettent de reconna tre les gestes qui contribuent une uvre reconnue comme professionnelle 3 une pragmatique soit les outils et les modalit s de leur utilisation sp cifique concourant l efficacit dans la r alisation d une activit professionnelle commun ment reconnue comme telle 4 une rh torique ou les mani res de se montrer et de se dire le m tier ainsi que d exposer le m tier aux autres dans la promotion et le d veloppement de la profession Ainsi c t des questions paradigmatiques auxquelles doivent r pondre les produi
9. questions dont les r ponses seront existenciellement sans rapport les unes avec les autres C est ainsi que l on voit le d calage entre l criture de la recherche et le d roulement de la recherche et que plusieurs jeunes chercheurs ne savent plus s ils doivent d crire ce qu ils ont fait ou r crire ce qu il convient d crire propos de ce qui a t 20 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 fait Plusieurs par exemple Schwint 2002 dans ses conclusions Barbier amp Galatanu 2004 Desgagn amp Bednarz 2005 Saujat 2007 Van der Maren amp Poirier 2007 s interrogent sur la n cessit d un recadrage des questions passant du mod le de la connaissance au mod le de l action La dynamique des sciences d objets de la nature disait Dilthey est pol mique par rapport des questions plut t pist mologiques confrontant la validit des discours une r alit techniquement construite La dynamique des sciences de sujets morales selon Dilthey est pol mique d un point de vue id ologique confrontant ses productions des repr sentations humainement mentalement construites De toute fa on tant les unes que les autres sciences d objets et sciences de sujets ne produisent que des nonc s hypoth tiques c est dire provisoires relatifs conditionnels et conjecturaux qui se mettant l abri du parapluie du m taparadigme de la connaissance ce qui peut donner l illusion d une u
10. terminant entre autres le paradigme auquel il a adh r ou le plus souvent duquel il s est approch C est aussi la fin de la recherche qu une interrogation pist mologique a sa place et que dans une section souvent appel e discussion et limites de la recherche il convient de s interroger sur l apport de ce qui a t fait la connaissance soit comme critique de connaissances ant rieures soit comme apport de connaissances nouvelles Plusieurs r torqueront qu il n est jamais n gatif de prendre conscience des perspectives des a priori avec lesquels on travaille Oui mais d une part une fois que le travail a t fait pas avant qu il ne soit fait et d autre part une condition que les perspectives au pluriel avec lesquelles on m ne les recherches s adaptent aux situations nouvelles que l on rencontre Les id es doivent s adapter aux r alit s des situations selon le principe de double coh rence de Rescher Van der Maren 2003a Malherbe 1981 et non l inverse ce qui ne serait pas autre chose que de la rigidit mentale Malheureusement il y a aussi des int grismes m thodologiques et paradigmatiques qui ne valent pas mieux que les int grismes religieux et qui n ont pour effet que de bloquer le d veloppement de connaissances nouvelles crire le chapitre m thodologique Annonc dans ce qui vient d tre crit propos de la place de l pist mologie le chapitre qui
11. validit de l exhaustivit du rapport la r alit la v rit de la th orie des hypoth ses Th orique Quelle pr cision doivent avoir les concepts en s mantique intention et en extension quelles connexions doivent ils avoir entre eux pour que le discours soit tenable coh rent et consistant admis comme th orique Instrumental Quelles instrumentations techniques de collecte de technique mat riel proc dures d analyse et de traitement des donn es modalit s de lecture des r sultats sont efficaces permettent de fournir et de soutenir des hypoth ses Morphologique Quelles formes de pr sentation doivent exprimer les syntaxique hypoth ses formules phrases clefs sch mas etc et les soutenir tableaux graphiques illustrations par des extraits par des vid os Le probl me comme annonc provient du fait que les r ponses ces questions ne d pendent pas d un absolu externe aux diff rents milieux de la recherche savante ou d un tiers arbitre mais elles d pendent des croyances des id ologies plus ou moins partag es par les valuateurs de la recherche Ainsi il n est pas rare que les membres d un jury ne s entendent pas compl tement sur ce qu il faut faire ou crire et que leurs d lib rations se terminent par des compromis dont l tudiant ne sera pas au courant Lors des comit s de promotion et dans les discussions de couloir il est assez fr quent d en
12. 6 dans un rapport o il con oit la profession d enseignant dans une perspective applicationniste technocratique le Conseil sup rieur de l ducation du Qu bec constate que si les enseignants sont ouverts la recherche il n y a pas assez d interfaces et que les deux professions celle de chercheur et celle d enseignants se sont d velopp es en s ajustant leurs r alit s propres En fait on peut penser que les r ponses des enseignants l enqu te sur laquelle se base le rapport du Conseil sup rieur de l ducation ont t remplies de d sirabilit puisque d s les ann es 1990 les programmes de formation des enseignants du primaire minist re de l ducation du Qu bec 1994 et du secondaire minist re de l ducation du Qu bec 1992 imposaient de consid rer la recherche comme composante d une des comp tences n cessaires de la profession enseignante La succession des avis du Conseil sup rieur de l ducation 2004 2006 montre bien qu il reste un cart important entre l id al et la r alit puisque les recommandations continuent de sugg rer au ministre d augmenter le soutien l organisation de l interface entre la recherche et la pratique L id al et la r alit des rapports entre recherche et pratique enseignante semblent donc encore sous tension Trois ordres de tension nous semblent devoir tre consid r s L id al et la r alit des m tiers de l ducation
13. REN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 21 Clapar de E 1931 L ducation fonctionnelle Neuch tel Delachaux et Niestl Conseil sup rieur de l ducation du Qu bec 2004 Septembre Un nouveau souffle pour la profession enseignante Avis au ministre de l Education Conseil sup rieur de l ducation du Qu bec 2006 Mars Le dialogue entre la recherche et la pratique en ducation une cl pour la r ussite Rapport annuel sur l tat et les besoins de l ducation 2004 2005 Daoust G 1989 L homme des sciences de l ducation existe t il Prospectives avril 71 83 De Bruyne P Herman J amp de Schoutheete H 1971 Dynamique de la recherche en sciences sociales Paris Presses Universitaires de France Delbos G 1983 Savoir du sel sel du savoir Terrain 1 Rep r http terrain revues org index2781 html Delbos G amp Jorion P 1984 La transmission des savoirs Paris ditions de la maison des sciences de l homme Desgagn D amp Bednarz N 2005 M diation entre recherche et pratique en ducation faire de la recherche avec plut t que sur les praticiens Revue des sciences de l ducation 31 2 245 296 Huberman M 1982 L utilisation de la recherche ducationnelle vers un mode d emploi ducation et recherche 4 2 136 152 Huberman M 1983 R pertoires recettes et vie de classe comment les enseignants
14. a uvr la mise au point d une conception de la formation professionnelle des directions d tablissement s appuyant sur une conception ergonomique de la formation Ceci l a conduit s interroger sur le rapport entre le discours et la r alit ainsi que sur les possibilit s de formulation des savoirs pratiques qui soient pertinentes la formation et au perfectionnement professionnel en ducation
15. adigme auquel ils adh rent en r ponse aux questions que pose l pist mologie 8 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 Mais encore l adh sion un paradigme ne peut tre un choix pr alable et permanent L enqu te men e sur la dynamique des pratiques de 30 chercheurs en ducation Van der Maren 1989 1990 montre que les adh sions paradigmatiques ne se sont pas r v l es d terminantes des choix d objets et de m thode de recherche alors que c tait l hypoth se organisatrice du cadre conceptuel de cette enqu te Par contre ce sont le contact avec les probl mes du terrain ainsi que les connaissances th oriques et instrumentales qui organisent les plans de recherche Ce que l on retient de cette enqu te et ce que j ai t m me d observer comme accompagnant des chercheurs titre de consultant en m thodologie c est que en dehors des rares recherches vraiment v rificatives dans la plupart des recherches men es en ducation la conduite de la recherche s adapte au contexte des situations dans lesquelles les probl mes sont pos s aux possibilit s d acc s au terrain aux conditions de recueil des donn es et la ma trise ainsi qu l accessibilit des outils et des techniques de traitement des donn es Il en r sulte que c est la fin de la recherche que le chercheur peut reconna tre ce qui a effectivement t r alis et r pondre aux questions de l pist mologie en d
16. ant soi m me Or bien peu d enseignants aspirent la folie bien que plusieurs fassent des burn out Les r f rences th oriques et la pratique Si l on peut s adonner la recherche en vue de plusieurs finalit s ces derni res ne sont pas n cessairement en comp tition Les grands objectifs dans la recherche universitaire sont souvent de documenter les v nements les pratiques ou les mod les puis comprendre ce qui se passe ou encore prouver la valeur d un dispositif souvent en vue de convaincre ou d valuer et de contr ler afin de ma triser le syst me et ses r sultats Pour fr quents et louables que ces objectifs puissent tre leur d marche de recherche repose sur une prise de distance un regard ext rieur aux v nements Cette prise de distance dans la pratique des sciences de l ducation et des m tiers de l interaction qui sont souvent con us comme des domaines d application se r alise le plus souvent en s appuyant sur des concepts et des mod les extraits des disciplines contributives en particulier sur les concepts et mod les fournis par les versants doux soft plut t que par les versants durs hard de ces disciplines Ainsi les emprunts se feront plus au courant interactionniste de la sociologie qu aux courants quantitatifs de la sociologie comparative on y emprunte plus la psychanalyse ou la psychologie humaniste qu la psychologie exp rimentale la philosophie
17. ants Binet 1911 et Psychologie de l enfant et p dagogie exp rimentale Clapar de 1905 ou L ducation fonctionnelle Clapar de 1931 t moignent de ce souci de sortir l ducation de sa d pendance des pouvoirs religieux ou industriels en la b tissant sur des fondements scientifiques en particulier sur la connaissance scientifique de la psychologie de l enfant et de la psychologie de l apprentissage Un si cle plus tard on peut parfois se demander si le noble objectif des p res des sciences de l ducation n a pas eu en m me temps un effet pervers celui de sortir l ducation de la main des ma tres d cole pour en confier le sort aux sciences sociales et leur volet des politiques ducatives dont elle ne devrait plus tre qu un domaine d application Plus r cemment l obligation de scientificit est devenue une exigence constitutive de la professionnalit du m tier tre une pratique professionnelle fond e sur des connaissances sp cifiques homologu es et scientifiquement fond es Vanhulle amp Lenoir 2005 Mais devant cet id al la r alit ducative appara t comme un syst me contr l par le politique C est le politique qui en d finit les finalit s g om trie variable en fonction du parti au pouvoir qui d termine les moyens admis par l approbation minist rielle des curriculums des manuels et mat riels d enseignement qui d limite les ressources par les allocations
18. ate que l on cite dans les cours d histoire mais qui ne sert gu re de cadre de partir de Platon pour analyser les situations ducatives Il est vrai que la plupart des coll gues ne savent m me pas ce qu est le Ratio Studiorum des J suites au complet Ratio atque Institutio Studiorum Societatis lesu 1599 ni comment il a t labor Pourquoi John Dewey Friedrich Fr bel Maria Montessori C lestin Freinet que l histoire de l ducation ne peut plus ignorer ne pourraient ils pas aussi bien servir aux chercheurs que Piaget Freud Rogers Goffman ou von Glasersfeld comme cadre d analyse des pratiques comme instrument d une prise de distance de leurs propres anticipations Mais 1l est une autre finalit possible aider se mettre la disposition d un processus de d veloppement professionnel contribuer la mise au jour des savoirs professionnels que construisent ceux qui sont dans l action quotidienne plut t que dans l laboration de mod les de compr hension ou m me d explication de l action En effet que peuvent faire les praticiens de l ducation de la s mantique d intelligibilit de l action Barbier 2000 ou d un point de vue scolastique Bourdieu 1994 Il importe de se rappeler que pour n importe qui dans la vie quotidienne la narration d une action dans le contexte de sa situation est plus parlante qu une th orie explicitant l action C est la diff rence d eff
19. budg taires et qui exige une reddition de comptes par l valuation des performances scolaires confront es l obligation de r ussite si ce n est l obligation de moyens Il est aussi remarquable que les instructions minist rielles tout en d finissant les finalit s et les moyens ne disent pas aux enseignants comment utiliser les moyens pour atteindre les finalit s avec les ressources allou es En cons quence sans doute de cette absence de pr cision sur les mani res d agir on note que ce contr le politique reste du moins au Qu bec un contr le externe par comptes rendus sans contr le des pratiques par inspection directe ce qui permet quand m me aux enseignants de faire un peu comme ils le veulent une fois la porte de la classe ferm e 12 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 Il y a donc l une tension entre un id al de fondation sur la science et une r alit gouvern e par le politique peut on servir deux ma tres la fois Watslawick Beavin et Jackson 1986 nous avaient appris que lorsqu une personne est confront e une double contrainte deux ma tres en contradiction trois solutions s offrent devenir fou en essayant de satisfaire les deux la fois sacrifier celui qui est moins mena ant l id al de la science et suivre docilement celui que l on craint et qui paie la r alit du politique ou devenir d linquant en ne tenant compte d aucun des deux ma tres et en se satisfais
20. ensions sur l criture Ces pr alables tant pos s crire une th se ou un article qui pr sente les r sultats d une recherche suppose que les r sultats de cette recherche et leur interpr tation seront diffus s et utilis s au del du milieu universitaire Or il y a d j pr s de 30 ans Huberman 1983 constatait que les r sultats de la recherche n taient pas utilis s par les professionnels de l ducation Plus il crivait que les praticiens utilisent peu la recherche ducationnelle parce 10 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 qu elle est peu utilisable comme telle Huberman 1982 p 136 Il sugg rait six exigences auxquelles devraient r pondre les chercheurs souhaitant voir leurs travaux utilis s proposer des solutions aux probl mes 1 qui n exigent pas de r organisation majeure 2 qui peuvent tre modifiables et adaptables aux conditions locales 3 qui enrichissent les possibilit s instrumentales des praticiens 4 qui sont valid es par les praticiens 5 qui prennent en compte la vision de l ducation et les contraintes des praticiens Enfin la sixi me contrainte propos e tait que les chercheurs devaient rester en contact avec le terrain pour assurer le service apr s vente Cependant malgr les strat gies de communication que proposait Huberman il ne semble pas que les professionnels de l action ducative aient mieux ou plus utilis les r sultats de la recherche En 200
21. et analysables ainsi que la possibilit de discuter la d marche et de contester l interpr tation des r sultats et sur quelques strat gies d criture Les strat gies propos es taient les suivantes 1 utiliser un style d criture qui correspond au style des lecteurs 2 crire en s appuyant sur les crits des autres et propos de leurs crits 3 crire avec des alliances dans une communaut de recherche 4 distiller le doute externe et interne 5 s inscrire dans une culture professionnelle en proposant des outils la disposition de ceux qui doivent r soudre les probl mes pratiques Le propos actuel s inscrit dans la suite de la derni re strat gie propos e il y a 20 ans en la pr cisant crire dans le cadre de la culture particuli re la profession qui nourrit la recherche par les probl mes qu elle pose et par les RECHERCHES QUALITATIVES Hors S rie num ro 11 pp 4 23 LES D FIS DE L CRITURE EN RECHERCHE QUALITATIVE ISSN 1715 8702 http www recherche qualitative qc ca Revue html 2011 Association pour la recherche qualitative 4 VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 5 donn es que le chercheur peut y recueillir Or cette proposition pose un d fi l criture des tudiants de ma trise ou de doctorat et aux jeunes professeurs chercheurs encore en qu te d un statut institutionnel dans la mesure o la culture universitaire pri
22. et entre une pr sentation et une repr sentation de pratique Van der Maren amp Yvon 2009 dont tout r dacteur d une recherche qualitative a l intuition lorsqu il se rend compte qu il doit illustrer les interpr tations conceptuelles qu il fait de ses r sultats par des extraits d entrevue par des narrations de situation On peut alors poser plus loin la question des mots utilis s dans l criture de la recherche et de leurs r f rences pourquoi n utiliserait on pas directement les cat gories usuelles les mots des praticiens Van der Maren 2003a Van der Maren 2003b Les mots des chercheurs seraient ils meilleurs que les mots des praticiens Il ne le semble pas lorsque l on constate la polys mie des concepts comme construction repr sentation ou comp tence qui ne voient leur intention d limit e que lorsqu on les confronte leur extension c est dire l ensemble des situations dans lesquelles un auteur ou un groupe d auteurs les utilise Avec une ironie orientale Messadi 2010 p 72 nous rappelle que les mots ne sont que des substituts l affam ne peut manger le mot poulet 14 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 Les raisons et les destinataires Au del des finalit s de chaque recherche les raisons que les chercheurs ont d entreprendre une recherche sont aussi des lieux de tensions qui ont leur impact sur l criture de la recherche En effet les raisons de l en
23. fond s et scientifiquement valid s sont inefficaces et en tous cas non exploit s par les praticiens alors que de nombreux nonc s sans validit scientifique tablie sont pris s par les praticiens qui y trouvent une efficacit Une explication de cet tat de fait tient ce que l efficacit recherch e par tout praticien assimilable un artisan r side dans la prise en compte de la culture du m tier ou de la profession ou de son paradigme tel qu il r pond un autre m taparadigme que celui des chercheurs partir des travaux initi s par Delbos Delbos 1983 Delbos amp Jorion 1984 et bien illustr s par la th se de Schwint 2002 nous avons relev quatre p les qui tout en tant assez parall les ceux de la recherche visant le d veloppement des connaissances savantes en diff rent profond ment entre autres par l importance centrale du premier p le une thique de l action Parall lement au m taparadigme de la connaissance on observe un m taparadigme de l action voir le Tableau 3 Ce qui int resse le praticien de l action En effet ce qui int resse le praticien en tant qu artisan tel que le d finit Pitcher 1997 et qu elle l applique aux enseignants c est avant tout ce qui r pond son obligation de rendre des comptes au plan de l efficacit et au plan de l thique les deux tant li s Le praticien celui qui est engag dans un monde pragmatique et non pas scolastique vi
24. gagement dans une recherche ne sont pas sans rapport avec les destinataires anticip s avec les lecteurs pr vus ou potentiels du rapport de la recherche La liste des raisons peut tre longue tout comme la liste des destinataires Pour les premi res notons obtenir un dipl me qui procure un acc s un poste ou une profession ou tenir et maintenir un statut social dans un d partement en tant identifi comme chercheur plut t que comme professeur ou encore obtenir les lignes du curriculum vitae indispensables une promotion Mais cela peut tre aussi satisfaire une curiosit un besoin une exigence de savoir une pulsion pist mophile moins que la recherche ne soit une chappatoire qui prolonge l adolescence en permettant de ne pas s engager dans l action etc En ce qui concerne les destinataires ils peuvent tre les membres d un jury universitaire obtention du dipl me les coll gues maintien du statut les organismes subventionnaires nombre de lignes dans le CV donnant l argent pour engager des tudiants et le pouvoir de diriger une quipe les patrons sous ministres directeurs g n raux de commissions scolaires administrateurs universitaires qui pourraient proposer ou nommer de nouvelles fonctions les fournisseurs de service diteurs concepteurs de mat riels etc Notons aussi que dans les possibilit s de cette liste figurent rarement les enseignants les professionnels du m tier car
25. herm neutique qu la logique cognitive Voil un autre paradoxe pourquoi cette analyse distanc e ne s est elle pas faite et ne pourrait pas se faire partir des discours propres au domaine de l ducation Pourquoi en vertu de quel discr dit le discours des auteurs pourtant cit s dans les histoires de l ducation ne sert il pas de cadre de r f rence l analyse des dispositifs des pratiques des curriculums des formes de l ducation contemporaine Pourquoi les cantonne t on dans les cours d histoire et philosophie de l ducation Une grande confusion se manifeste l chez les chercheurs en ducation et dans quelques autres domaines d application La prise de distance exig e par la r flexion pist mologique n est pas une prise de distance par rapport au domaine par rapport l objet ou par rapport au probl me Si cela devait tre le VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 13 cas que feraient la psychologie ou la sociologie emprunter la m canique c leste Ce qui est essentiel ce qui est demand c est une prise de distance par rapport aux a priori aux pr conceptions par rapport aux cadres pr ts porter qui emp chent le chercheur de voir ce qu il y a de nouveau d tranger de surprenant et de riche dans l environnement qu il pourrait voir lorsqu il se d barrasse de ses ill res Pas besoin pour ce faire de remonter Socr
26. ils ne sont pas souvent des destinataires payants Or certaines raisons de l engagement en recherche ne conduisent pas toujours produire des crits dont la forme correspond celle attendue par les destinataires Les tensions du mod le de l valuation des crits de recherche pr cis dans les questions pars dans les r ponses La plupart des destinataires voqu s valuent les crits de recherche partir du mod le qu ils connaissent le mieux et qui est le plus r pandu dans la soci t celui de la connaissance savante Pour le chercheur qui crit un projet ou un rapport de recherche moins de vouloir inconsciemment son projet rejet ou son rapport dormir sur une tablette la prise en compte de ce mod le devient essentielle Dans les sciences sociales les paradigmes de recherche pr tendent tous r pondre aux quatre questions paradigmatiques qui composent le m taparadigme tel que propos par De Bruyne et al 1971 Les p les de la recherche cens e contribuer au d veloppement de la connaissance savante et leurs questions sont pr sent s dans le Tableau 2 VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 15 Tableau 2 P les paradigmatiques et questions m thodologiques selon le mod le de la construction des connaissances savantes P les Questions m thodologiques pist mologique Quelle est la r ponse cr dible admissible aux ontologique questions de la
27. leadership 2 d Montr al ditions Qu bec Am rique Prigogine I amp Stengers I 1979 La nouvelle alliance m tamorphose de la science Paris Gallimard Saujat F 2007 Enseigner un travail Dans V Dupriez amp G Chapelle Eds Enseigner pp 179 188 Paris Presses Universitaires de France Schwint D 2002 Le savoir artisan L efficacit de la m tis Paris L Harmattan Van der Maren J M 1989 Dynamique des pratiques de recherche en ducation Rapport de recherche adress au CRSHC subvention 410 86 0250 Universit de Montr al Van der Maren J M 1990 Enqu te sur les pratiques de recherche en ducation au Qu bec synth se et conclusions Dans G R Roy Ed Contenu et impact de la recherche universitaire actuelle en sciences de l ducation pp 1059 1065 Actes du 2 congr s des sciences de P ducation de langue fran aise du Canada Sherbrooke Editions du CRP Van der Maren J M 1991 crire la recherche n cessit pist mologique ou strat gique Recherches qualitatives 5 35 41 Van der Maren J M 2003a La recherche appliqu e en p dagogie Des mod les pour l enseignement 2 d Bruxelles De Boeck Van der Maren J M 2003b Une formation professionnelle et scientifique en ducation est elle possible Revue des sciences de l ducation 29 467 476 Van der Maren J M amp Poirier L 2007 Produire des savoirs en p dagogie
28. nit de la science sont de mauvais guides pour l action D s lors si les recherches qualitatives de type exploratoire veulent produire autre chose que des discours utiles l ext rieur des pratiques professionnelles d o elles tirent leurs donn es si elles veulent tre reconnues connues et utilis es comme base de la professionnalit des pratiques professionnelles o elles puisent leurs donn es alors les recherches qualitatives r alis es dans le domaine des m tiers d interaction ont int r t s approprier les questions m thodologiques pos es dans le cadre d une th orie de l action et y conformer leurs th mes et leurs modalit s d criture Au moins alors la pol mique sera pragmatique R f rences Atlan H 1979 Entre le cristal et la fum e Paris Seuil Barbier J M 2000 S mantique de l action et s mantique de l intelligibilit des actions Dans B Maggi Ed Mani res de penser mani res d agir en ducation et en formation pp 89 104 Paris Presses Universitaires de France Barbier J M amp Galatanu O 2004 Les savoirs d action une mise en mot des comp tences Paris L Harmattan Bourdieu P 1994 Raisons pratiques Sur la th orie de l action Paris Seuil Binet A 1911 Les id es modernes sur les enfants Paris Flammarion Clapar de E 1905 Psychologie de l enfant et p dagogie exp rimentale Gen ve K ndig VAN DER MA
29. osent sciences nomoth tiques et sciences id ographiques ou singularisantes Cette opposition pourrait tre sch matis e selon le tableau 1 dans lequel nous pr f rons la distinction entre objet et sujet Quelle que soit actuellement la position dominante du d bat il me semble que l on doit au moins consid rer plusieurs paradigmes c est dire des ensembles de conceptions se rapportant quatre questions le rapport des donn es et des r sultats la r alit versus la v rit la formulation des th ories les caract ristiques de l instrumentation et les modalit s d exposition des r sultats et de leur interpr tation la preuve Posons que les sciences sociales appliqu es impliquent l tude par un sujet intentionnel le chercheur des rapports entre d autres sujets intentionnels c est dire les sujets de la recherche dont les interactions fournissent les traces qui font l objet de la recherche ducation service social intervention psychologique m decine familiale etc En ce qui concerne 6 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 Tableau 1 Caract ristiques contrast es des sciences de l objet et des sciences du sujet Sciences de l objet de la nature Sciences du sujet de l humain ou morales objet simple comme un syst me clos dans un environnement vid programmation et r p tition pr diction homog n isation statique et ordre structure e
30. pr sente la m thodologie ne peut sauf dans le cas de la recherche v rificative tre crit que lorsque la collecte des donn es et leur traitement sont termin s Dans le cas de la recherche v rificative le plan de la VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 9 recherche doit tre nonc avant d entreprendre la collecte des donn es et il doit tre respect tout au long de la recherche il peut donc et doit tre crit avant la collecte des donn es Dans ce cas il est en effet essentiel d annoncer selon quelle strat gie les hypoth ses d duites vont tre mises l preuve et de ne pas arranger les choses lorsque ce qui est attendu ne se pr sente pas Mais dans le cas de la recherche exploratoire il est essentiel si l on souhaite d couvrir de nouvelles choses d tre ouvert ce qui va se pr senter d avoir un esprit et une approche ouverte disponible l accueil de l impr vu En cons quence si la d marche est ouverte et si comme c est tr s souvent le cas la richesse de lunivers perturbe nos anticipations la planification de la recherche devra tre modifi e parfois plusieurs reprises et elle ne pourra tre fix e et d crite qu une fois la d marche termin e videmment lors de la r daction finale du m moire de la th se du rapport de recherche ou de l article il faudra annoncer au d but ce qui a t fait afin que le lecteur puisse s
31. t contr le g n ralisation information objet d termin contingence r versibilit et monotonie temporelle galit des intervalles et discontinuit Le cristal Scolastique Les id es la parole sujet complexe comme syst me ouvert dans un environnement riche changement et adaptation esp rance d sir diff renciation mouvement et d sordre potentialisation et stimulation exception relation sujet intentionnel responsabilit irr versibilit et diversit des dur es variation des intervalles et continuit La fum e Henri Atlan 1979 Pragmatique Pierre Bourdieu 1994 La r alit le corps Didier Schwint 2002 de tels domaines de recherche il nous para t de plus en plus vident qu une distinction s impose par rapport la conception rationaliste et cart sienne de l unit de la science Ne pas reconna tre cette diff rence et vouloir jucher nos travaux au niveau d une science nomoth tique c est l vidence ne r aliser qu une caricature de l image de la science et faire rire de soi par les chercheurs des disciplines de la nature D autant plus que m me dans les sciences de la nature le d bat est aussi ouvert et qu c t de ceux qui pr ne l unit d autres comme Prigogine et Stengers 1979 ou Atlan 1979 insistent tout comme l a fait Van Mannen 1991 sur le caract re mythique de l image positiviste
32. t des contraintes et des exigences fortes D une part l action se d roule en temps r el ne laissant que peu de temps des d lib rations conscientes car la somme de vigilance n cessaire la gestion de l action n en laisse pas beaucoup pour le recul n cessaire la prise de conscience de l action De plus l artisan ne peut tre qu opportuniste s il veut maintenir un minimum de sant mentale il tente non pas de faire le mieux mais de seulement bien faire en tenant compte des ressources disponibles et du VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 17 Tableau 3 Les m taparadigmes de la connaissance et de l action p les et th mes de questions M taparadigme de la connaissance M taparadigme de l action P le Th mes des P le Th me des paradigma questions paradigma questions tique tique pist molo Rapport des thique Valeurs gique concepts la r alit conceptions du r le ontologie la v rit Th orique Signification des Esth tique R gles de l art les s mantique th ories mani res d y faire Instrumental Instruments et Pragmatique Modalit s situ es technique modes d utilisation des d investigation outils Morphologi Styles de Rh torique Mani res de se dire que mod lisation et et de dire les formes syntaxique d exposition des d action du m tier r sultats contexte de l action D autre part l
33. tant inacceptable il n y a que la v rit qui blesse D s lors quelle part de v rit l esprit et la recherche peuvent ils acc der Y a t il un rapport entre cette part de v rit et la r alit comme y a t il un rapport entre les id es et la r alit entre le g n ral ou l universel et le particulier ou le singulier Ne faut il pas repenser ces rapports en envisageant la richesse des diff rences et des cultures comme des ressources que l uniformisation menace Jullien 2008 Voil les questions de l pist mologie Mais l pist mologie en tant que discipline critique des sciences et de la pens e n apporte pas de r ponses Ce sont les chercheurs et les penseurs qui ont apport des r ponses en instaurant des mod les de penser et de r aliser des recherches qui ont t identifi s en tant que paradigmes Ces paradigmes sont les r ponses partag es par des communaut s de chercheurs apport es de mani re organis e un ensemble de quatre th mes De Bruyne Herman amp de Schoutheete 1971 Chacun de ces ensembles de r ponses se pr sente en succession temporelle ou en opposition locale et agit comme culture de la profession de chercheur du moins comme culture de la production de la recherche permettant ceux qui partagent un paradigme de se reconna tre et d appr cier leurs travaux et leurs crits Les tudiants ne peuvent donc pas tablir leur pist mologie mais ils peuvent d terminer le par
34. tendre les coll gues diverger sur la qualit scientifique des travaux d un tel ou d un autre quitte ce que en vue d un retour d ascenseur on finisse par s entendre pour accorder la promotion lors du vote bizarrement unanime malgr tout ce qui a t dit Les comit s de lecture des revues savantes les experts des organismes subventionnaires comptent aussi r guli rement un membre ou plusieurs membres qui refusent compl tement un texte ou un projet alors que les autres le louangent Les auteurs d articles 16 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 savent bien qu un texte refus par un comit sera accept par un autre Les commanditaires politiques administrateurs minist res ne voient pas une production du m me il que les commanditaires commerciaux fabricants de mat riel cela sans compter les divergences qui apparaissent dans les m dias ou entre les associations de parents et les syndicats etc Pour sortir des tensions qui r sultent de l parpillement des r ponses ces quatre questions pourtant pr cises le chercheur qu il soit chevronn ou d butant est contraint de choisir Mais le choix doit il se limiter aux destinataires habituels doit il sacrifier au mod le dominant Le conflit des paradigmes L observation de ce qui se passe couramment dans la pratique de la plupart des m tiers de l interaction et certainement en ducation montre que de nombreux nonc s empiriquement
35. ts de la recherche on rep re une autre s rie de questions auxquelles tentent de r pondre les artisans les praticiens dans la r alisation de leur activit Notons bien ici la diff rence entre les produits de la recherche dont l criture r pond aux questions types du m taparadigme de la construction des connaissances et l activit de recherche En effet selon certains Schwint 2002 la pratique du m tier de chercheur est tr s proche du m tier d artisan et les questions qui s y posent sont typiquement celles qui correspondent au m taparadigme de l action Cela correspond bien aux demandes que formulaient les chercheurs qui nous consultaient voir le Tableau 4 Sortir l criture de la recherche du paradoxe paradigmatique Il devient vident l analyse de l activit de recherche en sciences sociales appliqu es les m tiers de l interaction et en ducation que les questions que posent les praticiens de la recherche sont semblables celles que posent les VAN DER MAREN crire en recherche qualitative et le conflit des paradigmes 19 Tableau 4 Les questions m thodologiques dans la culture savante et dans la culture de l action Questions du d veloppement des Questions de l efficacit de l action connaissances Quelle est la r ponse admissible quelles valeurs adh rer de quelles aux questions de la validit de responsabilit s t moigner qui l exhaustivit du rapport la r
36. utilisent l information ducation et recherche 5 2 157 177 Jullien F 1996 Trait de l efficacit Paris Grasset Jullien F 2005 Conf rence sur l efficacit Paris Presses Universitaires de France Jullien F 2008 De l universel de l uniforme du commun et du dialogue entre les cultures Paris Fayard Kahn J F 1989 Esquisse d une philosophie du mensonge Paris Flammarion Lessard H bert M Goyette G amp Boutin G 1997 La recherche qualitative Fondements et pratiques Montr al ditions Nouvelles AMS Malherbe J F 1981 pist mologies anglo saxonnes Paris Presses Universitaires de France Messadi G 2010 Rams s II l immortel Tome 3 Paris L Archipel 22 RECHERCHES QUALITATIVES HORS S RIE 11 Minist re de l ducation du Qu bec 1992 La formation l enseignement secondaire g n ral orientations et comp tences attendues pp 27 28 Gouvernement du Qu bec Minist re de l Education Minist re de l ducation du Qu bec 1994 La formation l ducation pr scolaire et l enseignement primaire Orientations et comp tences attendues p 29 Gouvernement du Qu bec Minist re de l Education Ochanine P 1978 Le r le des images op ratives dans la r gulation des activit s Psychologie et ducation 3 63 65 Pitcher P 1997 Artistes artisans et technocrates dans nos organisations R ves r alit s et illusions du
37. vil gie des modes d criture qui s inscrivent dans une mythologie scientiste que d non ait John Van Maanen 1991 lors de la conf rence d ouverture du colloque de 1990 Aussi en pr alable au d veloppement du propos sur le conflit des paradigmes qui embarrasse l criture des jeunes chercheurs je dois traiter trois questions qui furent abord es lors des discussions du colloque de 2010 la question de l unit ou de la diversit des sciences la place de l pist mologie le moment de l criture m thodologique Questions pr alables mais essentielles L unit de la science On peut poser la question de diff rentes mani res y a t il une ou plusieurs sciences Y aurait il une seule norme scientifique mais avec plusieurs modalit s paradigmatiques Qu est ce que la science et quelles sont les caract ristiques que doit manifester tout ce qui se pr tend scientifique Cette question n est pas nouvelle et comme le rappellent Lessard H bert Goyette et Boutin 1997 elle fut l objet de d bats au tournant des XIX et XX si cles C est le courant positiviste qui la suite de Comte pr ne l unit m thodologique et ontologique de la science il n y a qu une science et qu une m thode propre produire des nonc s scientifiques Par contre un philosophe comme Dilthey 1833 1911 catalogu d antipositiviste distingue les sciences de la nature et les sciences de l homme alors que d autres opp
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