« HABITER L`INHABITUEL »
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1. ce qui se passe autour de lui C est dans cet tat d esprit qu il r a lise l ensemble de ses travaux et plus particuli rement ses vid os dont les s quences tir es du r el nous en r v lent l tonnant potentiel po tique et humoristique L attention qu il porte aux gestes du quotidien une sc ne fugace ou une situation inattendue nous montre que le spec tacle le plus touchant et trange peut surgir tout instant et en premier lieu dans la rue Il cherche aussi cr er ou modifier des espaces en jouant souvent avec la notion d chelle dimensions inattendues d objets de sculptures de micro architectures en impliquant le spectateur dans une confrontation entre la r alit physique et l illusion visuelle d doublement et d tournement d l ments architecturaux et fonctionnels L exposition est elle m me con ue comme une succession de synopsis de s quences narratives qui constituent la trame po tique et cin matographique d une lecture potentielle de ce b timent Le d placement dans ses multiples formes est au c ur du geste artistique d Eric Hat tan car c est justement le mouvement et ce qu il implique aussi bien pour le corps que pour l esprit qui int resse plus que tout l artiste Comme des carnets de notes visuelles ses vid os capturent des instants d compos s parce que isol s des oiseaux batifolant dans l eau un chien qui marche des 5 pi tons qui traversent Mais il montre aussi ce qu i2. PASCAL NEVEUX HABITER L INHABITUEL L espace de notre vie n est ni continu ni infini ni homog ne ni isotrope Mais sait on pr cis ment o il se brise o il se courbe o il se d connecte et o il se rassemble On sent confus ment des fissures des hiatus des points de friction on a parfois la vague impression que a se coince quelque part ou que a clate ou que a se cogne Nous cherchons rarement en savoir davantage et le plus souvent nous passons d un endroit l autre d un espace l autre sans songer mesurer prendre en charge prendre en compte ces laps d espace Le probl me n est pas d inventer l espace encore moins de le r inventer trop de gens bien attentionn s sont l aujourd hui pour penser notre environnement mais de l interroger ou plus simplement encore de le lire car ce que nous appelons quotidiennet n est pas vidence mais opacit une forme de c cit une mani re d anesth sie C est partir de ces constatations l mentaires que s est d ve lopp ce livre journal d un usager de l espace Georges Perec Pri re d ins rer Esp ces d espaces 1974 ET Hattan qui vit et travaille entre B le et Paris investit pour trois mois les deux grands plateaux d exposition lui permettant ainsi de pr senter pour la premi re fois Mar seille un corpus de travaux important qui dialogue et fait cho avec subtilit l criture et l identit archite
3. cturale de notre b timent r cemment inaugur Cette invitation fait suite plusieurs visites d Eric Hattan Marseille depuis 2006 qui a suivi nos diff rentes phases de pr paration de construction puis de d m nagement de nos activit s du quartier du Panier au c ur du quartier de la Joliette galement invit par le Frac Provence Alpes C te d Azur dans le cadre des 30 ans des Frac et de l exposition Les Pl iades pr sent e aux Abattoirs Toulouse en 2013 Eric Hattan conna t bien les Frac leur mode de vie et leurs missions Redoutable scrutateur de notre quotidien fin analyste de nos habitudes et usages il prend avec cette proposition artistique possession des lieux et nous invite red couvrir le temps d une exposition les espaces que nous occupons avec une tr s grande acuit et singularit Cette exposition est une invitation donn e au visiteur lui m me faire le travail de discernement en fonction de l acuit et de la dis ponibilit de sa perception en fonction de sa capacit per sonnelle distinguer ce que l artiste signifie en exposant telle ou telle installation tel ou tel objet pour mieux nous 2 saisir des espaces dans lesquels nous sommes amen s cir culer et poser notre regard Prendre possession de l espace est le geste premier des vivants des hommes et des b tes des plantes et des nuages manifestation fondamentale d quilibre et de dur e La preuve premi re d ex
4. e et nous donne voir le temps et l nergie d pens s cette t che laissent pressentir l enjeu d un tel projet C est sans doute ce prix que se d m le petit petit le rapport entre les lieux du quotidien et le regard que nous portons sur eux Plus que l image c est donc la question du regard que pose Eric Hattan travers ses propositions perecquiennes Par ses pratiques exp rimentales de l espace d exposition et ses multiples r flexions sur sa dimension infra ordinaire Eric Hattan met l preuve l vidence du regard habitant PAscAL NEVEUX a dirig le FRAC Alsace S lestat de 1999 2006 et dirige depuis sept ans le FRAC Provence Alpes C te d Azur Il pr side depuis 2013 l association Marseille Expos r seau regroupant une tren taine de lieux d art contemporain et de galeries sur Marseille 8 ERI HATTAN est n en 1955 en Suisse et vit et tra vaille entre B le et Paris Il r alise et participe de nom breuses expositions individuelles et collectives l chelle nationale et internationale Une bio bibliographie d taill e est consultable sur wwwhattan ch Cette publication para t l occassion de l exposition Eric Hattan Habiter l inhabituel au FRAC Provence Alpes C te d Azur Fonds R gional d Art Contemporain Marseille du 1 f vrier au 4 mai 2014 L ensemble des droits est d tenu par les auteurs photo Eric Hattan Nicola von Senger Graphisme Hans Werner Holzwa
5. e qu ils r gissent consciemment ou non nos vies L espace est un doute il me faut sans cesse le marquer le d signer il n est jamais moi il ne m est jamais donn il faut que j en fasse la conqu te disait Georges Perec D crire la banalit d un espace public quel qu il soit les lieux communs de la vie de tous les jours et les routines de la perception ordinaire n est pas une exp rience qui va de soi Qu y a t il donc dire de ce qui se donne comme insi gnifiant et anodin Quel int r t peut on trouver obser ver les faits et gestes d une rue qui n a en apparence rien de surprenant d exceptionnel ou d exemplaire Comment rendre compte de ce qui est tellement familier qu on ne le voit ou ne le remarque pas Comment rendre visible ce qui rel ve du fonctionnel et de l esth tique d un b timent C est de telles questions que nous convie Eric Hattan dans ses diff rentes propositions artistiques Cette entre prise est d autant plus risqu e peut tre m me p rilleuse qu elle d stabilise nos habitudes perceptives et questionne l vidence de notre familiarit au monde Sous couvert d un simple exercice de style ne s agit il pas d interroger l ar ri re plan visuel de nos modes d habiter L hypoth se est bien hardie sans doute m me d mesur ment ambitieuse Pourtant l acharnement d Eric Hattan r aliser ces inven taires infra ordinaires la pr cision et la syst maticit des contraintes qu il se donn
6. es usagers de l espace que nous sommes Que ce soit dans la pratique de la sculpture de la vid o ou par ses interventions dans l espace public Eric Hattan s at tache r v ler par des moyens discrets et souvent avec ironie des d tails de notre environnement On pourrait presque dire que c est simplement par des d placements ou par des d tournements d objets qu il modifie de fa on sen sible notre perception du banal de notre quotidien L exposition labor e pour le Frac fonctionne comme un dispositif o ses propres productions dialoguent avec l ar chitecture du Frac et ses espaces int rieurs et ext rieurs constituant une proposition spatiale o le visiteur est invit d ambuler tout en prenant conscience de ce qui se joue dans et en dehors du b timent Pour Eric Hattan l art est une tentative de comprendre et de compl ter la relation qu il entretient avec son environnement En affirmant le caract re peu spectaculaire de ses propositions artistiques il tente de provoquer l attention du spectateur et l invite ainsi porter un regard nouveau sur la r alit qui l entoure Tra vail d infiltration par excellence d observation m thodique cette exposition est galement l occasion de montrer pour la premi re fois Marseille l installation Beyroots acquise 4 en 2011 par le Frac et qui constitue la pi ce centrale de l ac crochage pr sent au Plateau 2 Eric Hattan est toujours extr mement attentif tout
7. istence c est d occuper l espace Il s agit donc de prendre conscience de ce qui nous entoure et d y penser de faire penser en faisant voir une mani re de faire appara tre ce qui g n ralement se soustrait au regard et n existe que par sa dimension fonctionnelle Blocs secours portes coupe feu grilles de ventilation etc sont autant d l ments techniques devenus le temps de l exposi tion des l ments esth tiques d une exposition faisant cho l infrastructure du b timent ses r seaux ses circuits ses flux l instar de tout organisme vivant L invention d un espace est pour Eric Hattan un processus qui rel ve de la production de non v nements po tiques de pr sences indicielles qui deviennent les outils et les codes d une stra t gie d exploration et de narration renouvel e des espaces qui s offrent notre coute notre attention Une explo ration de l espace mise en pratique en travaux pratiques m me sur ces deux plateaux d exposition Cette r flexion sur l espace ce lien entre le regard et le lieu est une atti tude r currente dans toutes les productions d Eric Hattan qui n ont pas tant pour objectif de d livrer une quelconque v rit ou analyse critique sur telle ou telle architecture sur 3 tel ou tel espace public ou priv que d en r v ler surtout l infra ordinaire l infra sensible ce qui fait sens au premier regard et qui pourtant n est plus aussi vident que cela pour tous l
8. l s est pass comme des traces du temps cette fois ci qu il r v le dans des maisons des voitures ou des terrains abandonn s Artiste de l existant Eric Hattan produit toujours ses uvres partir d un l ment r el point de d part qui emporte le spectateur vers un inconnu r v lateur Regarde de tous tes yeux regarde c est ce que pointe la c l bre citation tir e du roman Michel Strogoff de Jules Verne plac e en t te de La vie mode d emploi de Georges Perec c est aussi ce quoi nous invite Eric Hattan travers cette exposition Les espaces sont multiples changeants fluctuants et ont tous besoin de limites d obstacles de fronti res qui les font exister L espace est en fait compos de vide et si nous proje tons notre regard vers l infini bleu du ciel alors il est impos sible de prendre pleinement conscience de cet espace C est le nuage ou l oiseau qui permettent de sentir cet espace d apparence infinie et de convenir de l loignement du soleil par exemple Se confronter un nouvel espace vierge public de travail de vie etc est toujours source d inspira tion et de changement changer d espace c est aussi refaire sa vie Mais en quoi ces esp ces d espaces pour reprendre l expression de Perec sont ils si importants question ner Simplement pour leur haute importance politique au sens tymologique du terme Priv s ou publics les espaces 6 se construisent dans nos t tes mesur
9. rth Berlin Impression CCI Marseille L exposition est r alis e en partenariat avec le Consulat g n ral de Suisse Marseille Elle b n ficie du soutien de Pro Helvetia Fondation suisse pour la culture Marseille janvier 2014 Le Fonds r gional d art contemporain est financ par la R gion Provence Alpes C te d Azur et le minist re de la Culture et de la communication Direction r gionale des affaires cultu relles Provence Alpes C te d Azur Il est membre de PLATFORM regroupement des Fonds r gionaux d art contemporain et membre fondateur du r seau Marseille Expos fondation suisse pour la culture prshelvetia R gion F Eu g he tidgonosse Il A Consulat g n ral de Sunsa Marsuilu Provence Alpes C te d Azur
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