A propos de Crack Capitalism de John Holloway
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1. mais dangereuse tout de m me De son c t Serge Halimi crivait dans Le Monde diplomatique d ao t 2006 soit un an avant la parution du livre de John Holloway Apr s une dizaine d ann es la rh torique des solutions partielles des communaut s en r seau du changer le monde sans prendre le pouvoir commence lasser Pourquoi tant de mises en garde avant m me que les lecteurs de langue fran aise aient pu avoir acc s au livre d Holloway Il fallait en juger par soi m me Ce livre tait incontes tablement pol mique et visait pro voquer des d bats La critique du bi lan des r volutions et des organisa tions du mouvement ouvrier au XXe si cle pouvait tre jug e exp di tive et excessive Mais au del de cet effet estomaquant je d couvrais avec bonheur que l auteur s inscrivait en fait dans le courant critique des pen seurs de l cole de Francfort qui a pris naissance en Allemagne dans les an n es 1920 dans le d cours de la r vo lution des conseils de 1918 et de son chec Theodor W Adorno Max Hor kheimer Walter Benjamin Herbert Marcuse Ernst Bloch et plus tard Os 36 CARRE ROUGE N 48 MARS 2013 car Negt et Jean Marie Vincent ont mis en uvre dans leurs essais et ana lyses une pens e critique cherchant d busquer les processus ali nants et mortif res d identit d identification et de classification g n r s par la so ci t capitaliste et relay2. un effort de pen s e th orique pour comprendre com ment casser la dynamique du capital L approche la plus fr quente d analy se du capitalisme consiste mettre au jour ce qui constitue sa force Hollo way propose une approche inverse consistant rep rer ses fragilit s ses fissures ses failles susceptibles d tre transform es par nos actions en br ches s largissant se multipliant et pouvant ventuellement se re joindre Il est clair que ces br ches peuvent aussi se refermer sous le poids de la r pression du d courage ment ou des d saccords internes entre ceux qui les ont ouvertes Nous nous heurtons aussi aux obstacles des formes de militantisme qui prati quent fort peu une politique de l coute des autres et construisent des petits mondes autor f rentiels qui ignorent ou m connaissent de ce fait les potentiels subversifs existants dans le monde Mais dans certains cas m me si une br che s est referm e une exp rience a eu lieu laissant une trace restant parfois une source d inspiration tou jours vivante comme la Commune de Paris ou Mai 68 Les moments de f tes collectives comme les pisodes de catastrophes o s exprime la soli darit entre les tres humains r v lent que d autres relations sociales existent qui n ob issent pas aux lois de la valeur et de la concurrence entre individus Dans la texture globale du capitalis me il existe donc d s maintenant des espac
3. un vif int r t pour la pens e critique et notamment pour celle de Marx L accueil favorable que re oit d ores et d j Crack Capitalism aupr s d un certain nombre de personnes impli qu es dans diverses luttes et inter ventions est d j un indice que la te neur des d bats dans l espace fran ais est en train de changer Il faut dire que l impact de la vague r volution naire dans les pays arabes du mouve ment des Indignados en Espagne du mouvement des Places en Gr ce et d Occupy Wall Street aux tats Unis par exemple am ne reconsid rer notre compr hension du capitalisme et les voies et moyens de le d truire et de le d passer Le lecteur de Crack Capitalism appr ciera d autant plus la pertinence des th mes abord s que ces th ses ont t r dig es avant que n clatent ces mouvements Si ce livre peut se retrouver en phase avec les pr occupations actuelles des anticapitalistes c est parce que lair du temps a chang en quelques an n es pr sent l air du temps sent de plus en plus la poudre la r volte Pin dignation la d sob issance la volon t de tout changer et de tout transfor mer dans nos relations sociales et dans nos vies quotidiennes REJOIGNENT Le livre commence par un constat nous voulons rompre avec le capita lisme le d truire car il d truit l hu manit mais nous ne savons pas comment faire C est cela m me qui fonde la n cessit d
4. E ROUGE N 48 MARS 2013 39 ponse seulement des millions d exp de l mancipation riences Cela fait cho cette pens e Pour nous le communisme n est pas de Marx qui rompt avec toute miseen un tat de choses qu il convient d ta formules a priori de la r volution et blir un id al auquel la r alit devra se conformer Nous appelons communis me le mouvement r el qui abolit l tat actuel des choses Le 8 mars 2013 40 CARRE ROUGE N 48 MARS 2013
5. ELLES LUTTES Situons bri vement le parcours de John Holloway Il a enseign Edim bourg et particip de la fin des ann es 1970 au d but des ann es 1990 de nombreux d bats avec d autres pen seurs marxistes non conformistes sur la nature de l tat et ses rapports avec le capital Puis il s est install en 1991 au Mexique o il enseigne toujours l universit libre de Puebla En 1994 le soul vement zapatiste clatait au Chiapas et allait nourrir et stimuler sa r flexion ainsi que celle d un certain nombre d intellectuels et de militants de par le monde Ses th ses ont t d battues dans de nombreux pays Ce ne fut donc gu re le cas en France o historiquement la croyance dans les vertus de l intervention de l tat pour introduire des changements sociaux de m me que la croyance dans les vertus d un parti d avant garde pour guider les prol taires vers la conqu te du pouvoir restaient encore tr s en racin es Aujourd hui le paysage commence se modifier La conception consid rant que le prol tariat est a priori le sujet r volutionnaire par excellence un sujet qu il faudrait tout de m me qu un parti tienne par la main a per du de sa force de conviction La no tion d auto mancipation a parall le ment beaucoup progress et se concr tise dans de multiples exp riences y compris de luttes ouvri res Le rejet des formules convenues s ac compagne nouveau d
6. ITE T RE Jos Chatroussat Comment allons nous en finir avec le capitalisme Telle est la question laquelle nous sommes confront s avec le dernier livre de John Holloway Crack Capitalism ditions Libertalia juin 2012 traduction de Jos Chatroussat Par son questionne ment l auteur veut contribuer r soudre ce probl me qui tour mente une grande partie de l humanit I d veloppe ses r flexions en 33 th ses avec une ardeur et une passion qui rom pent avec la r serve acad mique ou une froideur militante qui ventuellement en imposent mais nous laissent de marbre Cependant ce livre qui s adresse un large public mobilise les ressources de la th orie critique et des sciences humaines Tout en tant illustr de nombreux exemples concrets et port par un style imag il demande ind niablement un effort au lecteur Et cela d autant plus qu il risque de heurter certaines cultures politiques et bien des routines intellectuelles qui perdurent au sein des mouvements s affirmant anticapitalistes ou r volution naires propos de Crack Capitalism de John H CHANGER LE MONDE SANS PRENDRE POUVOIR ARE YOU JOKING MR HOLLOWAY Ce livre se situe dans le prolongement de Changer le monde sans prendre le pouvoir le sens de la r volution au jourd hui d Syllepse Lux 2007 tout en ayant son ind pendance propre un peu comme une fille par rapport sa m re pour reprendre l image de l auteur
7. Revenons un instant sur le scandale provoqu par la m re Pour cer olloway tains le titre m me suffisait indi quer le caract re provocateur ou far felu de son propos comment diable pourrait on changer le monde sans acc der au pouvoir soit par la voie des lections soit par la voie insur rectionnelle Pour moi m me qui suis responsable de la traduction de son dernier livre Crack Capitalism je dois dire que dans un premier temps n ayant pas eu en mains ni la version originale datant de 2002 ni sa traduction qui n a t effectu e qu en 2007 la cri tique de Changer le monde sans prendre le pouvoir par Daniel Bensa d m avait pr venu d favorablement CARRE ROUGE N 48 MARS 2013 35 l gard de John Holloway dont je n avais encore rien lu Toutefois un paradoxe pour ne pas dire une contradiction sautait aux yeux dans la critique par Bensa d de ce penseur d origine irlandaise dont la r flexion tait nourrie par l exp rience des zapatistes D une part il tait pr sent comme un auteur plu t t inconsistant son livre n tant que le sympt me d une crise passag re du mouvement altermondialiste une sorte de maladie de croissance b nigne d autre part Bensa d mettait en garde contre une argumentation pou vant d sarmer pratiquement et th o riquement les militants La pens e d Holloway tait l vidence futile le degr z ro de la strat gie
8. capital il est abstrait Pour d gager cette double nature du travail Holloway d cide d appeler le faire ce travail concret et nos activi t s utiles qui n ont pas pour fonction de cr er et de valoriser le capital En r alit c est peine si ce faire affleure la surface et peut tre reconnu et pris en compte par nous tellement le travail abstrait ali n et ali nant en vahit tous les recoins des relations so ciales et de notre esprit Il y a donc une lutte sourde ou ouverte entre notre faire concret ou travail concret ax sur le qualitatif le po tentiel cr atif et le travail abstrait ax sur le quantitatif et nourrissant le capital Notre activit vitale produi sant des valeurs utiles ou d sirables est constamment touff e refoul e plac e dans une relation de non iden tit d inadaptation et d antagonisme avec le travail abstrait LA GRANDE CLOTURE DU TRAVAIL ABSTRAIT Je mwai indiqu que quelques l ments de la probl matique propos e par Holloway Le lecteur d couvrira com ment le processus d abstraction des rapports humains et de la nature consid r e comme un objet de m me que le processus de personnification des choses qui assigne chacun un masque de personnage sont des pro cessus propres au capitalisme qui se sont constitu s historiquement et ont envahi tous les domaines Ces proces sus forgent des r les des identit s ri gides ce qui entra ne des s para
9. es qui sont aussi des moments o nous ne nous conformons pas la logique du capital o nous expri mons notre profonde inadaptation cette logique du toujours plus et du toujours plus vite Dans ces inter stices nous agissons contre et au del du capital nous refusons et nous cr ons les l ments d un monde nou veau Cela change notre rapport au temps La r volution n est pas repor t e plus tard dans un futur ind ter min Nous avons la commencer ici et maintenant dans notre fa on de vivre de lutter de nous organiser d affirmer nos dignit s et de cr er d autres relations sociales John Hol loway rejoint ici Raoul Vaneigem qui parle d une r volution sans nom comme tout ce qui jaillit de l exp rience vivante Or autour de nous dans nos vies m me nous voyons qu il y a de multiples refus individuels ou collectifs La jeu ne fille qui pr f re lire un livre dans un parc plut t que d aller au travail ou l ouvrier qui son poste de travail imagine une m lodie ou un rap qu il jouera avec ses amis au week end CARRE ROUGE N 48 MARS 2013 37 n ob issent pas la logique du syst me Ces simples refus et cr ations sont aussi des br ches Nous n avons pas les classer a priori par ordre d importance et en faire la th orie au del du raisonnable Les br ches sont mouvantes et ne tracent pas une voie royale Elles se heurtent des difficult s et des contrad
10. ictions Mais c est bien sur elles et sur leur compr hension que nous devons compter La transformation r volutionnaire n est pas une affaire de sp cialistes qui sa vent et qui se sacrifient Elle concerne les gens ordinaires qui en cr ant des br ches fixent eux m mes leur propre agenda sans se conformer celui des gouvernants et des capitalistes La Bo tie nous avait pr venus dans son Discours de la servitude volontaire que le pouvoir qui nous domine n existe que gr ce notre ob issance L acte initial de toute mancipation est la d sob issance un pouvoir Et c est cette id e forte que Holloway d veloppe pour nous convaincre que si nous admettons que nous fabri quons jour apr s jour le capitalisme nous pouvons donc aussi le d faire NOUS SOMMES ENGLUES DANS LA SYNTHESE SOCIALE DU CAPITALISME Nous nous heurtons une difficult majeure qui fait que les br ches exis tent au bord de impossible et qu il n y a aucun mode d emploi pr tabli suivre pour nous d barrasser du ca pitalisme Nous refusons les crit res du capitalisme mais nous sommes galement oblig s de nous plier au r gne de largent pour survivre Nous int grons les crit res du capitalisme dans notre t te comme une seconde nature Le syst me nous am ne nous dessaisir de notre pouvoir de faire les choses autrement humaine 38 CARRE ROUGE N 48 MARS 2013 ment en un pouvoir sur nous m mes nous obligea
11. ion mon taire et que personne ne contr le se sont ils construits histori quement et se perp tuent ils jour apr s jour LE CARACTERE DOUBLE DU TRAVAIL John Holloway nous invite lire ou relire Marx de ses crits de jeunesse jusqu au livre I du Capital Il pr cise l gard d un public qui pourrait tre r ticent que c est chez Marx qu on trouvera les l ments d cisifs pour comprendre ce syst me de domina tion tr s sp cifique Cela le conduit s interroger avec insistance sur le d veloppement de Marx concernant la double nature du travail et d en d ve lopper ensuite toutes les implications Que ce soit sur cette question ou sur celle du f tichisme de la marchandi se bien des commentateurs marxistes ont rapidement gliss sans chercher p n trer la signification de ces pas sages Or Marx est explicite dans une lettre Engels o il affirme que parmi les meilleurs points qu il a mis en viden ce dans Le Capital le premier consti tuant le pivot de sa critique est le sui vant 1 le caract re double du tra vail selon qu il s exprime en valeur d usage ou en valeur d change Toute l intelligence des faits repose sur ce la Pour Marx le travail n est ni unitaire ni une pratique transhisto rique Dans la mesure o il produit des valeurs d usage le travail est concret et dans la mesure o il pro duit des valeurs d change qui vont leur tour produire le
12. mme ou d une s rie de recettes anticapita listes Au passage il proposait une cri tique convaincante des th ses de Hardt et Negri dans Empire qui elles par contre avaient eu honneur d ac c der l espace francophone Tout en tant d accord avec eux sur plusieurs points il critiquait leur approche an ti dialectique et anti humaniste qui sous tend leur construction d un pa radigme simplificateur en l occurren ce l Empire versus la Multitude comme l affrontement de deux blocs oppos s ayant chacun sa coh rence propre Contrairement Hardt et Ne gri Holloway refuse tout paradigme et pense le capital comme rapport contradictoire comme lutte de classes Dans Changer le monde sans prendre le pouvoir Holloway ne se contentait pas de critiquer radicalement l tat comme cristallisant un type de rela tion sociale capitaliste particulier Il remettait en cause les institutions telles que les partis pr tendant l exercice du pouvoir leur fonction nement hi rarchique et leur corpus id ologique tuant dans l uf les aspi rations mancipatrices Cela ne pou vait donc pas transporter de joie les admirateurs de Chavez les nostal giques de l tat providence vou lant le faire rena tre de ses cendres ni les th oriciens de la LCR s engageant dans la construction d un Nouveau Parti Anticapitaliste SE POSER DE NOUVELLES QUESTIONS ET CHERCHER UN NOUVEAU LANGAGE POUR DE NOUV
13. nt faire et produire des choses insens es et ou nuisibles mais qui valorisent le capital Ce pou voir de domination sur nous se struc ture en un ensemble d abstractions r elles qui semblent ne pas pouvoir tre remises en cause La critique th orique s av re donc n cessaire pour d voiler ce qui est ca ch derri re ces abstractions ce qui existe derri re des formes qui se pr sentent comme fixes objectives et in contestables Il faut proc der l ins tar de Marx la critique de la mar chandise de la valeur du travail de l argent et de l tat Holloway crit par exemple L tat se pr sente com me tant le point central de la coh sion sociale mais en fait l tat d pend de largent et a peu d influence sur son mouvement C est l existence de l argent qui rend le capitalisme si g latineux et si spongieux L argent est une fine toile d araign e dans laquelle nous sommes pris au pi ge Quand nous la frappons elle ne vole pas en clats mais elle enro be nouveau notre poing se moquant de nous p 122 Il s agit de d pouiller largent et l tat de leur prestige dominateur et de ne pas perdre de vue un instant qu ils ne sont que des produits humains qui nous nient en tant qu tres auto nomes mais que nous pouvons en re tour nier et ne plus produire Mais comment ce r seau d change de choses et ce tissage de rapports hu mains frapp s du sceau de l abstrac t
14. r s par un travail qui est insens Il mine leur sant et les conduit de plus en plus vers la d pression et parfois le suicide tandis que tous ceux qui le peuvent cher chent le fuir et essaient de vivre au trement En d autres termes l aboli tion du capital n est pas possible sans l abolition du salariat C est ce qui l gitime et m me impose une critique du travail qui aille le plus loin possible et mette en vidence non seulement toutes les manifesta tions de la crise du travail abstrait mais en m me temps les possibilit s diverses de cr ation et de d passe ment du capital qu elles nous offrent NOUS SOMMES LA CRISE DU CAPITALISME ET NOUS EN SOMMES FIERS Le point fort de John Holloway dans son travail th orique de conceptuali sation est de constamment partir de nous les tres humains qui vivons tous au sein m me du capitalisme et non pas dans un rapport d ext riorit avec lui comme le pensent en g n ral les militants anticapitalistes Le levier de mancipation r side dans le fait que nous ne convenons pas aux exi gences exorbitantes du capital nous sommes inadapt s ce syst me de domination et d exploitation ce qui nous donne une chance d en finir avec lui gr ce un flux de r bellions multiformes et d autres fa ons de fai re Sa critique ad hominem partant de nous gens ordinaires permet la fin l auteur d avancer des formulations in dite
15. s d rangeantes et finalement porteuses d espoir telles que Nous sommes les forces de production notre pouvoir est le pouvoir du faire Nous sommes la crise du capitalisme et nous devrions en tre fiers Nous sommes l mergence d un autre monde peut tre PAS DE REPONSE SEULEMENT DES MILLIONS D EXPERIENCES Mon souhait est bien s r que ce livre soit lu appr ci et discut car il est un des rares livres publi s en fran ais depuis cinq ans qui aborde explicite ment les probl mes de l auto manci pation en s appuyant la fois sur les exp riences en cours et sur les res sources th oriques fournies par Marx et un certain nombre de penseurs cri tiques qui ne sont pas toujours tr s connus en France Il suffit de consul ter l abondante bibliographie pour s en convaincre Que ce livre soit lu et critiqu dans un esprit qui ne soit pas soup onneux ou d daigneux bref dans un esprit ou vert et non sectaire permettrait d avancer ensemble sur les chemins difficiles de l mancipation Chacun appr ciera les th ses d Holloway sa convenance mais en ayant l esprit qu il n y a manifestement pas de solu tions d tenues par des experts des dirigeants ou des organisations sp ci fiques qu il n y aurait qu appliquer Holloway reprend la d marche des zapatistes qui consid rent qu en nous interrogeant nous marchons Com me il le dit il n y a pas de bonne r CARR
16. s par les th orisations bourgeoises Leur dialectique n gative est une logique de dislocation pour re prendre les termes d Adorno qui se refuse laborer une synth se conceptuelle totalisante et harmo nieuse comme chez Hegel ou Lukacs Ils consid rent que les exp riences sensibles d bordent toujours les formes sociales capitalistes marqu es du sceau du f tichisme de la mar chandise Face l emprise prot ifor me du monde bureaucratique et cho sifi de la valeur d change gommant les diff rences et uniformisant les comportements et les productions hu maines l enjeu est de ne pas s incliner devant les faits tablis de ne pas laisser le g n ral soumettre ou nier le particulier de rechercher et mettre au jour les potentiels de contestation et de cr ativit En sui vant chacun sa fa on cette d marche exigeante ces penseurs s en sont pris la rigidit des concepts et des repr sentations labor s par les marxismes pr tendument orthodoxes versant dans le scientisme et l cono misme Pour sa part Holloway dans Changer le monde sans prendre le pouvoir branlait les certitudes constituant le fond intellectuel des militantismes sectaires Il s appuyait sur Marx pour mettre en cause toute forme de rh to rique politique centr e sur l tat qu elle soit r formiste ou avant gar diste r volutionnaire et toute forme de d clinaison d un progra
17. tions des d finitions et des classements hi rarchiques Ils cr ent des formes d termin es de sexualit de langage ou de perception du temps C est ce que l auteur d veloppe en consid rant que le travail abstrait enferme la fois nos corps et nos esprits En reprenant les recherches d anthro pologues et de l historien Edward P Thompson il montre que le temps du capital est un temps devenu ho mog ne abstrait et mesurable par les horloges C est le temps de exploita tion du travail salari Ces processus constamment renouve l s pour assurer la p rennit du capi tal tendent constituer une totalit coh sive laquelle m me le mouve ment ouvrier n a pas chapp dans ses repr sentations en particulier cel le du travail La th orie marxiste tra ditionnelle a le plus souvent aboli l antagonisme entre le faire ou tra vail utile et le travail abstrait qui va lorise le capital Ce qui a abouti un auto enfermement du mouvement ouvrier consid rant en soi le travail comme positif et r duisant la lutte contre le capital une lutte entre le capital d un c t et le travail de l autre Or le travail et le capital sont intimement li s et ne sont pas conce vables l un sans l autre La crise de Pun est aussi la crise de l autre La cri se du travail abstrait s exprime tr s prosa quement et quotidiennement par le fait que les travailleurs sont de plus en plus c u
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