Texte - Sciences, Philosophie, Histoire – UMR 7219, laboratoire
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1. Une deuxi me raison nous fait choisir cette entr e dans le projet d ensemble il permet d aborder plusieurs des points que nous avons identifi s comme pertinents pour l histoire du structuralisme Indiquons en deux celui des pratiques d abstraction celui des fronti res du structuralisme qu on lui assigne ou qu il se reconna t Premier point c est le plus vident on dispose dans ce cas d une s rie longue pr sentant les diff rents cas de figure passage aux structures partir d un travail d Elie Cartan qui n est ni structural ni nous l avons montr con u dans un cadre ensembliste invention de structure reconnaissance du r le d une structure dans des probl mes o on ne la faisait pas classiquement intervenir La longueur de cette s rie permet de travailler sur p riodisation Ehresmann n agissant pas dans le m me contexte dans les ann es 30 r criture directe des notions de Cartan les ann es 50 reprises abstraites et recherche d intrins qu it dans un cadre encore ensembliste puis partir des ann es 60 travail avec et sur le langage des En comparant en particulier sa notion d espace fibr avec celles de Seifert et Threlfall de Hopf de Whitney et de Steenrod Cf chapitre 14 de Chorlay 2007 31 Nous disposons pour caract riser ces reformulations d l ments de comparaison de long terme puisque nous avons travaill dans notre th se sur l histo2. d intrins qu it des notions d autre part le mode d criture qui change de mani re radicale de Cartan Ehresmann puis au sein de l uvre d Ehresmann une comparaison entre les mani res dont Ehresmann et Lichnerowicz exposent la g om trie diff rentielle permettra ici de nuancer l id e d un d veloppement n cessaire et lin aire vers moins de formules Sur un autre plan la question du calcul permet de revenir sur le travail d Elie Cartan Il s agira ici et cela n a rien de paradoxal de partir du mode d limination des calculs mis en uvre par Ehresmann pour mieux caract riser la mani re dont Cartan d veloppe ses concepts non pas en d pit mais dans et par le calcul Cela apportera un clairage sur ce que nous avions identifi dans le troisi me axe g n ral de recherche en effet Cartan n volue pas dans des math matiques peu conceptuelles ou peu architectur es mais il travaille dans un cadre qui est celui mis en place dans le dernier tiers du 19 si cle de ce cadre dont Poincar est un repr sentant minent et que nous avons rapidement esquiss en voquant la centralit des notions de groupe et d invariant et Klein chapitre 2 Poincar chapitre 3 Hermann Weyl chapitres 9 et 11 ainsi que sur la notion de groupe de Lie telle que Lie lui m me la met en place chapitre 6 32 On s en convainc ais ment en contemplant le sch ma propos la 5 page du diaporama r
3. es 1920 th orie des connexions et des espaces g n ralis s th orie des groupes et alg bres de Lie On pourrait rendre compte du travail de Cartan dans cette p riode comme d un simple enrichissement progressif Nous intervenons ce sujet aux rencontres 2009 de l Americal Mathematical Society What is at stake in Weierstrass criticism of Riemann s function theory Special Session on History of Mathematics 2009 AMS MAA joint Mathematics Meeting Washington D C 5 8 January 2009 Ainsi deux textes tr s proches sur beaucoup de points celui de Hasse sur les m thodes modernes en alg bre Hasse 1986 et celui de Bourbaki sur l architecture des math matiques Bourbaki 1948 mettent respectivement l accent sur la puret des m thodes et sur les d marches transversales garantes de l unit des math matiques 7 Nous sommes intervenu sur ce point dans le cadre du Workshop Mathematical Understanding Universit Paris 7 d partement HPS 9 13 Juin 2008 avec un expos sur Making Sense of it with Structures the case of Charles Ehresmann Tappenden 2005 Tappenden in Ferreiros amp Gray 2006 Tappenden in Mancosu 2007 Soumis la Revue d Histoire des Math matiques le 3 mars 2008 Renaud CHORLAY Mars 2009 18 du questionnaire prise en compte progressive du r le de la topologie de la vari t dans la structure de son groupe d holonomie passage de probl mes
4. abstraction au sens classique d oubli des contenus sp cifiques Reconna tre ensuite qu une structure g n rale intervient dans une situation particuli re ainsi apr s avoir voqu l introduction des espaces fonctionnels et des nombres p adiques Bourbaki y voit autant de moments d cisifs dans le progr s des math matiques de tournants o un clair de g nie a d cid de l orientation nouvelle d une th orie y r v lant une structure qui ne paraissait pas a priori y jouer un r le Bourbaki 1948 43 Inventer de nouvelles structures enfin Les structures ne sont immuables ni dans leur nombre ni dans leur essence il est tr s possible que le d veloppement ult rieur des math matiques augmente le nombre des structures fondamentales en r v lant la f condit de nouveaux axiomes ou de nouvelles combinaisons d axiomes et on peut d avance escompter des progr s d cisifs de ces inventions de structures Bourbaki 1948 45 Quant savoir comment on m ne bien ces belles t ches ce type de texte ne nous le dit gu re on s y tient aux crit res pragmatiques a posteriori de f condit l vocation de doigt d un chercheur de grande exp rience ou aux consid rations psychologiques en termes d intuition Cette relative incapacit aborder la question du comment est d autant plus frappante que les auteurs de ces textes sont eux m mes engag s dans l abstrac
5. de temps diverses depuis quelques ann es un d bat en 1825 la chambre des communes sur les tarifs d assurance maladie des soci t s d entraide ouvri res jusqu pr s d un si cle analyse de la r ception en Allemagne dans la seconde moiti du 19 si cle des statistiques sociales la fran aises On retrouve au passage les formes d additivit foucaldiennes Foucault 1969 163 Renaud CHORLAY Mars 2009 16 moment proprement historique et dont le mouvement naturel est centrifuge pour engager un dialogue avec certains secteurs de la r flexion pist mologique ou philosophique nous y sommes d j engag s et comptons poursuivre Pr venons d embl e une confusion possible Depuis une trentaine d ann e se d veloppe dans le monde de la philosophie analytique une position qui se nomme structuralism quoique le lien avec la math matique des structures soit r el les questionnements sont de nature ontologique ou fondationnelle ce titre il n entre pas dans notre projet d y contribuer directement Les liens sont par contre nombreux qui peuvent se nouer entre notre travail et la famille de recherches qui dans la philosophie des math matiques anglo saxonne se reconna t sous l tiquette de philosophy of mathematical practice les math matiques y sont interrog es philosophiquement moins comme syst me id al que comme activit pratiqu e par les math maticiens Ceci
6. du c t du style structural Mais il ne s agit pas de transposer et le jeu des carts est cet gard plus stimulant que handicapant L analyse en termes de formation et stabilisation d un style collectif de raisonnement invite au travail sur la longue dur e et nous ouvre deux pistes d articulation Premi rement elle invite sur la fin de la p riode 1860 1960 int grer l mergence du langage et de la th orie des cat gories comme tape caract riser et non comme v rit enfin r v l e du structuralisme Deuxi mement elle invite comparer le style de raisonnement structural d autres styles concurrents avec lesquels elle cohabite ou qu elle a pu historiquement clipser c est plut t vers le d but de notre p riode d tude la deuxi me moiti du 19 si cle que nous sommes alors renvoy s Signalons qu un travail comparatif utilisant une opposition entre style abstrait et style concret a t men sous forme d tude de cas par M Epple Epple 1997 ce style abstrait partageant certains trait du style de raisonnement par les structures que nous cherchons d crire 3 2 Un dialogue avec la philosophy of mathematical practice Le rejet de l approche par les vertus comme angle d attaque ne signifie pas le rejet de principe du questionnement pist mologique On peut ici aussi chercher compl ter un premier micro pouvant recouvrir des chelles
7. fait par Cartan lorsqu il d montre Si le premier th or me de Cousin est vrai pour D D est un domaine d holomorphie c est dire le domaine total d existence d une certaine fonction holomophe Cartan 1934 1286 Renaud CHORLAY Mars 2009 12 d marche Les paradoxes apparents au niveau des vertus renvoient une s rie de pratiques de bricolage et d hybridation L tude s en trouve d log e du niveau purement pist mologique et replac e dans le champ de l histoire l utilisation du d j l renvoie un tat des lieux perp tuellement produit l activit n est plus avant tout la synth se d un divers id al mais le travail de reprise la r criture orient e vers la r solution de probl mes 2 3 De Visomorphisme aux morphismes Cet axe de recherche trouve son origine dans le constat suivant la notion d isomorphisme a t utilis e explicitement et consid r e comme pist mologiquement fondamentale bien avant que la notion g n rale de morphisme ne soit constitu e Ce constat qui appelle un travail de p riodisation conduit donc la question comment les isomorphismes sont ils devenus des cas particuliers d une notion plus g n rale et ce titre premi re de morphisme Le travail d histoire est sur cet axe encore plus que sur les autres enti rement devant nous donnons deux pistes Premi rement la notion d homomorphisme est pr sente assez t t dans le d v
8. th ories distingu es la fois par leur maturit et une richesse contentuelle d coulant d un ancrage empirique de l autre un programme visant la mise au point d un arsenal technique permettant de fonder les math matiques dans leur ensemble comme syst me syntaxique aux propri t s raisonnables Cette vari t des sens de l introduction d axiomes dans des th ories qui s en passaient jusque l fort bien nous l avons tudi e dans des cas particuliers par exemple celui des axiomes relatifs la notion de vari t diff rentiable Les m mes axiomes introduits par Veblen et Whitehead en 1931 peuvent successivement tre regard s 1 comme exemple de syst me d axiomes tudier en tant que tel se posent donc des questions de consistance d ind pendance etc 2 comme axiomes capturant le c ur conceptuel d une th orie m re et ouverte dans un travail de synth se didactique des apports r cents de Weyl E Cartan Hopf Veblen Eisenhart Schouten etc 3 comme d finition axiomatique d un type d objets propos desquels tablir quelques grands th or mes de structure tout en commen ant constituer la bo te outils sans laquelle la d finition demeure lettre morte Ces trois temps sont repr sent s respectivement par Veblen et Whitehead en 1931 V amp W 1931 par les m mes en 1932 V amp W 1932 enfin par Whitney Whitney 1936 Sur la base de ce premier ll Sur ce travail voir n
9. 2009 14 La pr sentation des axes de recherche confirme ce qui transparaissait dans l expos des motifs notre approche du structuralisme comme objet d histoire ne postule pas l unit s culaire d un projet structuraliste pas plus qu elle ne vise caract riser une nature du structuralisme Le travail ne peut au contraire dans un premier temps que proc der de mani re centrifuge utiliser des comparaisons syst matiques pour mettre au jour la sp cificit de pratiques de recherche et de synth se pour identifier les articulations temporaires entre des d bats pist mologiques des programmes de recherches des r seaux institutionnels et des modes d criture pour souligner l h t rogen se de ce qui se donne pour pur etc Il ne s agit pas l d une posture de soup on ou d une r action au ton volontiers dogmatique de certaines pr sentations des math matiques des structures La question est de m thode il faut d abord distinguer pour que la question des articulations r elles puisse tre ensuite abord e et l on n a pas supposer a priori que tout doive finir par tre articul au sein d un ensemble unitaire Les m taphores wittgensteiniennes de la tresse solide sans qu un seul fil la parcoure enti rement du jeu dont on applique les r gles sans devoir d abord les expliciter et de la ressemblance de famille conservent cet gard leur valeur antidogmatique Des histor
10. Epple s adresse autant aux philosophes des math matiques qu aux historiens Unfortunately questions of mathematical pragmatics are still rather unexplored in recent philosophy of mathematics Epple 1997 197 S Cf Hacking 1991 et Hacking 2008 Renaud CHORLAY Mars 2009 15 conditions de validit Son travail sur l histoire des statistiques lui permet d illustrer le d veloppement long terme d un style de raisonnement sp cifique int grant un sch ma macro historique des tudes de micro histoire sur des pisodes importants Les deux temps ne sont pas contradictoires moyennant une th se d autonomisation des styles envers les conditions particuli res d mergence ou de premi re formulation Loin de clore facilement le d bat cette th se d autonomisation ouvre un champ d tude historique celui des techniques d auto justification et de stabilisation d un style La finesse conceptuelle dont il n est pas lieu de rendre ici compte et la r ussite historiographique ne doivent pas masquer les difficult s de ce que serait une transposition notre probl matique propre les chelles de temps sont diff rentes la question de l objectivit fondamentale chez Hacking est peu transposable aux math matiques pures au 20 si cle la richesse d interaction dans le d veloppement historique des probabilit s et statistiques avec les questions sociales et techniques est sans quivalent
11. Renaud CHORLAY Mars 2009 1 HISTOIRE DU STRUCTURALISME PERIODES PRATIQUES STYLES R sum Ce projet vise l tude du structuralisme en math matiques comme ph nom ne historique sur la p riode 1860 1960 Il cherche d passer deux modes de lecture plus classiques une lecture th matis e par les acteurs des phases tardives de ce mouvement et centr e sur l analyse des vertus pist mologiques de la m thode structurale des travaux d histoire qui soit portent sur des structures particuli res plus que sur le structuralisme soit abordent la question du structuralisme mais se restreignent au cas de l alg bre Nous proposons une analyse en termes de pratiques plut t que de vertus et une extension du corpus au del de l alg bre Notre travail sur l histoire des th ories g om triques nous permet d identifier une s rie d axes de recherche relatifs 1 au sens des m thodes axiomatiques 2 au structuralisme comme d marche sp cifique orient e vers la r solution de probl mes et 3 la comparaison des modalit s pist mologiques et historiques de th matisation des notions d isomorphisme d une part de morphisme d autre part Le point 1 est en partie un travail de synth se les points 2 et 3 constituent un travail largement original L entr e par les pratiques et la recherche des diff rences sp cifiques ont par nature des effets centrifuges Sans que nous visions le moins du monde une
12. ace m trique ensemble ordonn Si l on s en tient au cas de l Architecture des math matiques ce n est pas ici le lieu d une comparaison des textes deux autres types d l ments viennent caract riser cette m thode moderne Tout d abord une s rie de caract risations n gatives dessinant la figure nouvelle par ce qu elle n est pas ou ce avec quoi elle ne souhaite pas tre confondue elle se veut le contraire du calcul toujours qualifi d aveugle de brut ennemie du fait isol ou particulier elle ne souhaite pas tre r duite l armature d une logique formelle unit d un squelette sans vie Bourbaki 1948 47 Ensuite une longue s rie de vertus pist mologiques lui sont associ es cette m thode moderne fournit l intelligibilit profonde des math matiques Bourbaki 1948 37 en exhibant les structures transverses aux disciplines classiques elle construit les bons cadres de formulation et d attaque des probl mes elle substitue au chaos des connaissances dispers es d une math matique en croissance rapide de grands axes d organisation permettant une vue d ensemble elle permet enfin une merveilleuse conomie de pens e et de travail en vitant de devoir refaire dans chaque contexte des raisonnements fondamentalement identiques Caract risation minimale syntaxique d signation d un ext rieur du structuralisme liste de vertus ce qu on fait c
13. alis par Andr e Ehresmann et J P Vanbremeersch l occasion du centi me anniversaire de la naissance du ma tre http pagesperso orange fr vbm ehr ChEh articles ehr ehresmann PDF Renaud CHORLAY Mars 2009 20 Quelque riche que nous semble ce sous projet il ne constitue clairement qu une pi ce d un ensemble beaucoup plus vaste Du point de vue chronologique il met principalement en lumi re la seconde partie de notre p riode d tude 1860 1960 Les questions de pratique des probl mes et du sens de la d marche axiomatique n y semblent pas centrales Du point de vue disciplinaire enfin l alg bre la th orie des nombres l analyse fonctionnelle ou m me la g om trie alg brique n y jouent vraisemblablement que des r le au mieux mineurs Renaud CHORLAY Mars 2009 21 Bibliographie Bourbaki N 1948 L architecture des math matiques in F Le Lionnais ed Les grands courants de la pens e math matique Cahiers du Sud 1948 pp 35 47 Cartan H 1934 Les probl mes de Poincar et de Cousin pour les fonctions de plusieurs variables complexes CRAS 199 1934 1284 1287 Chorlay R 2007 L mergence du couple local global dans les th ories g om triques de Bernhard Riemann la th orie des faisceaux 1851 1953 Th se d histoire des math matiques Universit Denis Diderot Paris 2007 Corry L 1996 Modern Algebra and the Rise of Mathematical Structure Science Networks Historical Studie
14. centr s sur les alg bres de Lie et leurs repr sentations lin aires des probl mes int grant les questions de topologie et de g om trie des groupes Lie notion d invariant int gral d un espace homog ne progressivement mise au service de l tude de la topologie th me approfondi par de Rham Nous montrons toutefois que cet enrichissement passe par une discontinuit en 1925 qu on peut en premi re approximation d crire comme la substitution d une polarit local global une polarit infinit simal fini Cette tape dans l uvre de Cartan est mise en relation avec les travaux contemporains de Hermann Weyl et Otto Schreier Par ailleurs nous abordions plus succinctement dans notre th se la mani re dont Charles Ehresmann l ve de Cartan prolonge les travaux de son ma tre au d but des ann es 1940 en proposant sa notion d espace fibr Une tude s rieuse de la trajectoire d Ehresmann appelle un approfondissement consid rable de ces premiers travaux nous n avons pour l instant gu re tudi l uvre d Ehresmann au del de 1950 nous avons principalement tudi les aspects topologiques laissant jusqu ici de c t les aspects diff rentiels connexions feuilletages jets structures infinit simales nous n avons pas du tout abord les reformulations et les prolongements dans le langage des cat gories qui constituent la seconde partie de l uvre math matique d Ehresmann
15. d exposition comme mani re de r diger des trait s jug s selon les go ts tr s propres ou trop propres comme art d apr s coup de profilage de r sultats obtenus ailleurs et par d autres moyens Les exemples que nous citions plus haut rev tement en th orie des groupes de Lie groupes topologiques en th orie des nombres etc montrent pourtant combien la d marche structurale a aussi t un ars inveniendi dont les ressorts n ont gu re t tudi s comme nous le d velopperons plus loin nous souhaitons mettre au centre de l tude la dialectique des probl mes et des structures Quatri mement l tude de Corry pr sente une g n alogie conceptuelle se d ployant dans un pur espace de pens e et d criture Ainsi le succ s du manuel d alg bre de van der Waerden n a pas a tre valu autrement que comme succ s intellectuel Il semble que ses seules qualit s sont la fois causes et garantes de sa diffusion d une diffusion qu on ne se donne pas les moyens d valuer quantitativement n1 d tudier en termes de r ception 2 Axes de recherche Cette r flexion sur les apports de lectures et travaux classiques nous permet de pr ciser notre projet de recherche sur le structuralisme en math matiques comme objet d histoire Nous proposons un changement de corpus et d axe de questionnement Le corpus est largir en termes de disciplines au del de l histoire de l alg bre abst
16. dans La pens e sauvage de Levi Strauss Levi Strauss 1962 S On serait plus proche de la v rit en parlant de d isomorphie plut t que de d isomorphisme en l occurrence d hom omorphisme c est moins un type d application qu une relation d quivalence qui est central dans cette perspective Renaud CHORLAY Mars 2009 13 son questionnement vers la recherche de th or mes d isomorphismes alors que ces questions demeurent largement absentes par exemples en topologie en g om trie diff rentielle ou en analyse fonctionnelle Ces s ries de diff rences ouvrent des pistes pour comparer et articuler le d veloppement des m thodes structurales dans les diff rentes branches des math matiques Deuxi mement des indices pour l instant purement pist mologiques nous permettent de conjecturer une p riodisation de la question La notion d isomorphisme peut en effet renvoyer un r seau de notions d j bien constitu la fin du 19 si cle groupe relecture en termes de groupes des notions d invariant alg brique diff rentiel int gral relecture en termes de groupes et d invariants de l architecture des g om tries programme d Erlangen analogie entre groupes de Galois et rev tement chez Poincar par exemple formulation technique en termes de groupes et d invariants de la question de l intrins que Si l on ne r clame pas de lien technique mais qu on constitue l
17. e qu on rejette ce qu on gagne faire ainsi Face ces descriptions qu on les juge enthousiasmantes ou sch matiques on peut envisager au moins deux projets qui ne sont pas le n tre On peut chercher approfondir la question de la caract risation du structuralisme en cherchant pr ciser sa nature cerner son unit Pour ce faire on pourrait par exemple envisager d utiliser de mani re r currente au sens de Bachelard les notions de la th orie des cat gories d une th orie des cat gories vue Bourbaki fait sienne la formule de Dirichlet substituer les id es au calcul Bourbaki 1948 47 Les deux aspects peuvent tre conjoints moins que jamais la math matique est r duite un jeu purement m canique de formules isol es Bourbaki 1948 43 gt Ce th me de l intelligibilit est aussi celui mis en avant par Weyl We are not very pleased when we are forced to accept a mathematical truth by virtue of a complicated chain of formal conclusions and computations which we traverse blindly link by link feeling our way by touch We first want an overview of the aim and the road we want to understand the idea of the proof the deeper context Weyl 1932 453 MacLane et Bourbaki se r pondent sur ce point The emphasis on mathematical structure has served wonderfully to organize much of mathematics and to clarify some previously confused topics such as Galois theory matri
18. e r seau au niveau de l histoire des id es la notion d isomorphisme peut tre rapproch e du renouveau des m thodes axiomatiques au moyen des th mes communs d indiff rence envers le sens vis et d autonomie du syntaxique Non seulement on peut tudier ces aspects en restant au 19 si cle mais on peut aussi rendre compte dans leur solide insertion dans un cadre pr ensembliste structur par la notion de grandeur variable ainsi que par les pr sentations par g n rateurs et relations Ce point permet aussi de soulever la question du r le de la structure de groupe parmi les structures alg briques on peut faire l hypoth se selon laquelle c est le m me changement de configuration d ensemble qui d une part fait int grer les groupes la liste des structures alg briques et qui d autre part fait de l isomorphisme un cas particulier d homomorphisme la question est d autant plus int ressante qu elle traverse le bloc alg brique alors que le point pr c dent concernait l articulation de ce bloc aux disciplines non alg briques 3 Th mes de m thode 3 1 Un outil int grateur la notion de style de raisonnement 8 Nous interviendrons sur ce point dans l expos Structures without morphisms dans le cadre du workshop Category Theory and Related Fields History and Beyond R Kr mer C MacLarty M Wright org MFO Oberwolfach 15 21 f vrier 2009 Renaud CHORLAY Mars
19. e synth se r cente est disponible dans le Oxford Handbook of Philosophy of Mathematics and Logic de S Shapiro Hellman 2005 Pour une critique math maticienne de ces questionnements MacLarty 2007 gt Pour un panorama r cent cf Mancosu 2007 La question de l abstraction de ses modalit s de sa valorisation ou de sa d valorisation dans des cultures pist mologiques constitue un nouvel axe de recherche pluriannuel pour l quipe REHSEIS UMR 7596 CNRS Paris 7 Ce travail transversal fait suite celui sur une autre cat gorie pist mique celle de g n ralit Sur ce dernier th me un ouvrage collectif est en pr paration dont nous sommes l un des trois responsable aux c t s de Karine Chemla et David Rabouin Handbook on Generality in Mathematics and the Sciences nous y donnons un chapitre Questions of Generality as Probes into Nineteenth Century Analysis Renaud CHORLAY Mars 2009 17 Deuxi mement la question du structuralisme rencontre de mani re privil gi e les th mes qui sont ceux du second type de questionnement pr sent plus haut celui relatif aux normes rationnelles de choix et d valuation qui sous tendent l activit math maticienne Nous ne pouvons gu re d passer ici le stade de l allusion en voquant trois de ces th mes 1 celui de la puret des m thodes Detlefsen 2007 dont le lien avec les versions programmatiques du structuralisme demeurent la
20. eloppement de l alg bre abstraite par exemple dans l A gebraische Theorie der K rper de Steinitz Steinitz 1910 alors que jusqu assez tard du c t des th ories g om triques on n voque que les isomorphismes Certes on y tudie des applications remarquables quoique non inversibles mais qu elles ne sont pas vues comme des cas particuliers d une m me notion transdisciplinaire de morphisme Ainsi en 1936 Hopf peut il encore distinguer deux traditions de recherche en topologie la topologie de la forme qui n utilise que la notion d isomorphisme et la topologie de la repr sentation qui tudie les d applications continues classes d homotopie d applications entre vari t s compactes recherche de plongement dans les espaces euclidiens etc Hopf 1936 Ainsi nous avons tudi en d tail le changement de cadre r alis par Steenrod en 1942 lorsqu il a red fini les classiques grandeurs tensorielles de la g om trie diff rentielle comme des sections de fibr s tensoriels et ces sections comme des cas particuliers d application entre ensembles Steenrod 1942 On peut souligner une autre diff rence entre l alg bre et d autres branches des math matiques pures Depuis la fin du 19 si cle l alg bre abstraite ordonne largement ques p p g g 14 Ce bref projet n est pas le lieu d une discussion sur l histoire de cette notion Signalons en le point de d part
21. es derived from his experience Weyl 1932 454 10 Plus que jamais intuition r gne en ma tresse dans le gen se des d couvertes Bourbaki 1948 Renaud CHORLAY Mars 2009 6 pense aux fibr s principaux et associ s chez Ehresmann 1941 1942 ou aux id aux de fonctions holomorphes chez Cartan 1940 44 anc tres des faisceaux analytiques coh rents reconnaissance du r le de structures dans des domaines o elles ne semblaient pas a priori devoir jouer de r le utilisation des rev tements pour d montrer des r sultats de th orie des alg bres de Lie par Weyl en 1925 introduction des groupes topologiques et des mesures de Haar en th orie des nombres par Chevalley et Weil 1 2 Une approche historique centr e sur l histoire de l alg bre On le devine dans la liste d exemples que nous venons de donner notre projet d histoire des pratiques de pratiques dans lesquelles des math maticiens reconnaissent explicitement partir de la fin des ann es 1920 une nouvelle mani re ne se limite pas au cas des structures alg briques Pour cerner cet aspect du projet nous nous appuierons de nouveau sur un texte en l occurrence la monographie de Leo Corry Modern Algebra and the Rise of Mathematical Structure Corry 1996 La seconde partie de l ouvrage traite des premi res formalisations math matiques de la notion de structure chez Ore Bourbaki puis dans les premi res ann es de la th o
22. et am ne gommer les sp cificit s qualitatives inint grables la s rie longue Deuxi mement le corpus tudi par Corry reprend celui que van der Waerden et Noether d signent eux m mes dans les ann es 1920 comme eur pass celui r unissant leurs mod les et leurs anc tres Il ne reste du coup rien dire sur les autres pas d ext rieur pas de concurrents juste des formes moins achev es de soi m me pas de controverses pas d effets Renaud CHORLAY Mars 2009 8 d viction Troisi mement apr s que l tude initiale de Corry sur Dedekind a pr sent assez en d tail les travaux de recherche sur les nombres alg briques et plus rapidement ceux sur les corps de fonctions alg briques l ouvrage porte largement sur des textes de synth se manuels articles bilans ou textes programmatiques Ce type d tude est d ailleurs parfaitement justifi si l on met plut t l accent sur l image of knowledge les textes de synth se constituant un l ment cl pour sa formation sa diffusion synchronique et sa transmission diachronique Le lien avec le body of knowledge s en trouve toutefois rel gu au second plan sinon pour souligner la relative autonomie des deux plans d volution et peu de pistes sont donn es pour l tude des pratiques d abstraction de reconnaissance et d invention de structure Le risque est de contribuer renforcer l image du structuralisme comme simple m thode
23. et de recherche en soulignant les apports mais aussi les limites de deux approches classiques du structuralisme en math matique 1 1 Une lecture math maticienne centr e sur les vertus pist mologiques Nous entendons ici par lecture math maticienne ce qu on trouve dans une s rie de textes textes programmatiques analyse des travaux conf rences de vulgarisation articles pol miques souvenirs etc r dig s par des math maticiens qui informent et conditionnent l acc s ces questions pour le lecteur du 21 si cle Qu on pense par exemple aux pr sentations des m thodes modernes en math matiques de Hasse en 1930 Hasse 1986 ou de Weyl en 1932 Weyl 1995 L architecture des math matiques dessin e par Bourbaki Bourbaki 1948 ou plus r cemment au bilan propos par MacLane MacLane 1996 Il ne s agit pas seulement d en appeler ici au d passement de ces textes l objectif va de soi mais aussi de montrer comment leur difficult saisir certains aspects dessine en creux des chantiers de recherche Renaud CHORLAY Mars 2009 3 Ces textes s accordent sur une caract risation minimale de la d marche structuraliste tudier les cons quences de syst mes de relations explicites axiomes portant sur des ensembles d l ments dont la nature n a pas tre prise en compte cette caract risation s accompagne bien s r d exemples paradigmatiques groupe corps esp
24. h orie des Renaud CHORLAY Mars 2009 11 fonctions analytiques par Serre et H Cartan en 1952 nous avons identifi un usage indirect consistant associer au th or me conjectural une propri t elle m me reli e d autres par des th or mes d montr s Dans notre analyse des articles de Henri Cartan de 1940 et 1944 dans lesquels il introduit un programme d tude globale des id aux de fonctions holomorphes structure qu il introduit cette occasion nous avons aussi distingu trois fonctions remplies par diff rents probl mes des probl mes cibles farget problems des probl mes internes inner problems et des probl mes pochoirs template problems Si la premi re fonction celle de cible n est en rien sp cifique la d marche structurale les deux autres le sont et donnent les premiers l ments d une meilleure compr hension des modes r els de gen se de structures partir de probl mes La distinction fournit aussi un outil analytique de comparaison et de p riodisation un m me probl me pouvant changer de fonction au cours du d veloppement de la th orie Une autre partie de ce travail sur l mergence de la structure de faisceau nous a aussi conduit emprunter l anthropologie culturelle la notion de bricolage Nous entendons par l un mode de r solution de probl me un mode instrumental de r solution de probl mes par assemblage d l ments d j l d l ment
25. iciellement contradictoires Un exemple suffit Bourbaki vante l aspect transversal de la m thode axiomatique seule capable d assurer l unit retrouv e de math matiques menac es par une expansion rapide et centrifuge au m me moment Hasse voit dans les m mes m thodes un moyen pour autonomiser l alg bre par rapport au reste des math matiques et la d tacher d une alg bre classique trop li e aux nombres complexes et l analyse Ensuite et surtout parce que l invocation de ces vertus nous semble peu sp cifique au structuralisme rares sont somme toute les math maticiens ayant d clar pr f rer les r sultats isol s les calculs aveugles et les expos s confus On retrouve quasiment mot pour mot des expressions de Bourbaki MacLane ou Hasse chez des auteurs qu on ne souhaite pas ranger du c t structural chez Poincar par exemple On cherchera plut t saisir la sp cificit d une approche structurale ou d approches structurales en les comparant d autres approches concurrentes qui ne se r clament pas moins de l intelligibilit profonde et de la vue d ensemble Il ne s agira donc pas de pr ciser le sens vis des vertus voqu es mais ventuellement d tudier dans quelle mesure leur mention de fait permet d identifier des r seaux ou de cerner des lieux de d bat gt A propos de la m thode axiomatique Son trait le plus saillant est de r aliser une con
26. iens des math matiques contemporaines tel Moritz Epple ont pu chercher en d river des pistes de m thode pour asseoir une perspective pragmatique Epple 1994 On ne peut toutefois faire l conomie d une r flexion sur les pistes d int gration d articulation et de saisie des formes de cumulativit on trouve de telles pistes dans des travaux qui n ont rien de dogmatiques ou de r ccurents Un exemple riche est ainsi fourni par le travail r cent d Olivier Darrigol en histoire de la physique qui propose un mode d articulation d ensembles th oriques complexes en termes de modules Darrigol 2008 Pr sentons ici bri vement une autre approche d ailleurs nullement exclusive de l approche modulaire La notion de style de raisonnement de Ian Hacking nous semble fournir une piste prometteuse Elle a d abord le double avantage de partir des m mes options g n rales de m thode et d avoir contribu produire des travaux historiques importants en l occurrence en histoire des statistiques et probabilit s Hacking 1990 H ritier en cela de Foucault Hacking caract rise des styles de raisonnements qui sont des entit s collectives par opposition aux styles individuels le style de Proust de Matisse etc styles qui dessinent simultan ment le type d objet sur lequel les nonc portent la forme de ces nonc s et leurs 17 Notons que dans cette s rie de textes aux ambitions clairement m thodologiques
27. ire longue de la notion de vari t chez Riemann chapitre 1 Neumann Renaud CHORLAY Mars 2009 19 cat gories Cette s rie longue permet aussi de travailler sur un aspect sp cifique de la pratique math matique moins que de bricolage ou d hybridation il s agit ici de longues s ries de reprises et de r critures Les outils pour analyser cette pratique ne nous sont pas encore connus Deuxi me point ce cas permet d tudier ce que nous avons d crit dans la premi re partie de cet expos comme les limites et l ext rieur du structuralisme Une premi re limite est celle de l abstraction plus pr cis ment de l abstract nonsense Il ne s agit pas ici d valuer mais de mettre au jour les syst mes collectifs de jugement et leur volution historique Le cas d Ehresmann pourra ici tre rapproch d autres cas o les limites d une certaine abstraction l gitime ou fructueuse ont pu sembler avoir t franchies par exemple celui de Dedekind lorsqu il introduisit la structure de Dualgruppe cf Corry 1996 chap 2 3 Ce travail d histoire sur les limites de l abstraction l gitime fait clairement partie de ceux qui peuvent servir de point de dialogue avec les philosophes de la pratique math matique Une seconde limite est celle du calcul qu on a vu syst matiquement rejet dans les textes promouvant les m thodes modernes On devra ici distinguer d une part le souci partag
28. king I 2008 Style pour historiens et philosophes trad V Guillin in J F Braunstein L histoire des sciences m thodes styles et controverses Vrin Paris 2008 Hafner J Mancosu P 2007 Beyond Unification in Mancosu 2007 pp 209 247 Hasse H 1986 The Modern Algebraic Method trad A Shenitzer du texte de 1930 Mathematical Intelligencer 8 2 1986 18 23 Hellman G 2005 Structuralism in S Shapiro The Oxford Handbook of Philosophy of Mathematics and Logic Oxford University Press Oxford 2005 Hilbert 2004 David Hilbert s Lectures on the Foundations of Geometry 1891 1902 M Hallett et U Majer editeurs scientifiques Springer New York 2004 Hopf H 1936 Quelques probl mes de la th orie des repr sentations continues L enseignement math matique 35 1936 334 347 Kr mer R 2007 Tool and Object A History and Philosophy of Category Theory Birkhauser Boston 2007 Levi Strauss C 1962 La pens e sauvage Plon Paris 1962 Mac Lane S 1996 Structures in Mathematics Philosophia Mathematica 3 4 1996 174 183 Renaud CHORLAY Mars 2009 22 MacLarty C 2007 What Structuralism Achieves in Mancosu 2007 pp 500 522 Mancosu P 1996 Philosophy of Mathematics and Mathematical Practice in the Seventeenth Century Oxford Univesity Press New York 1996 Mancosu P 2007 The Philosophy of Mathematical Practice Clarendon Press Oxford 2007 Poincar H 1908 L avenir des math mati
29. omie de pens e consid rable Les structures sont des outils pour le math maticien On pourrait donc dire que la m thode axiomatique n est autre que le syst me Taylor des math matiques Bourbaki 1948 42 Ainsi dans sa conf rence au congr s international des math maticiens de 1908 Les seuls faits dignes d attention sont ceux qui introduisent de l ordre dans cette complexit et la rendent ainsi accessible Poincar 1908 169 et quelques lignes plus loin Pour obtenir un r sultat qui ait une valeur r elle il ne suffit pas de moudre des calculs ou d avoir une machine mettre en ordre les choses ce n est pas seulement l ordre c est l ordre inattendu qui vaut quelque chose Poincar 1908 170 Renaud CHORLAY Mars 2009 5 La recherche de sp cificit nous semble devoir tre conduite en se penchant sur les pratiques plut t que sur les vertus En un sens cet aspect des pratiques est un angle mort pour les textes que nous lisons dans ce premier temps Certes ces textes voquent les pratiques mais ces vocations ne nous semblent gu re d passer des g n ralit s Le travail du math maticien semble recouvrir trois t ches sp cifiques la nouvelle approche abstraire reconna tre et inventer des structures Abstraire tout d abord isoler quelques traits simples et communs de nombreux probl mes ce travail nos auteurs le d crivent comme une phase d analyse et d
30. otre expos En quel sens Veblen et Whitehead fondent ils la g om trie diff rentielle s minaire Riemann J J Szczeciniarz org REHSEIS ENS avril 2009 date pr ciser Renaud CHORLAY Mars 2009 10 travail on cherchera pr ciser ces trois types d usage on cherchera surtout utiliser cette distinction comme outil de comparaison et de p riodisation pour d autres structures Cette tude est combiner un travail d histoire des id es math matiques relatif la distinction progressive des d marches fondationnelles et structuralistes outils partag s projets diff rents Loin des doxographies et des m taphores de la prise de conscience cette tude d histoire des id es math matiques doit s articuler sur des programmes de recherches sp cifiques et historiquement situ s analys s en termes d ancrage institutionnel et de culture de travail Ce type d approche que nous avons tent dans la troisi me partie de notre th se propos de la distinction entre local et global n a pas notre connaissance t mis en uvre pour la distinction entre d marche fondationnelle et m thode structurale 2 2 Des probl mes aux structures Nous abordions au point pr c dent un aspect de l tude pragmatique du structuralisme celui relatif au sens donn par les acteurs un type de gestes th oriques Aux raisons de faire et au discours r flexif sur ces raisons rele
31. ques Atti del IV congresso internazionale dei matematici vol 1 Roma 6 11 Aprile 1908 Accademia dei Lincei Rome 1909 pp 167 182 Steenrod N 1942 Topological Methods for the Construction of Tensor Functions Annals of Mathematics 43 1 1942 116 131 Steinitz E 1910 Algebraische Theorie der K rper Journal f r die reine und angewandte Mathematik 137 1910 167 309 Tappenden J 2005 Proof Style and Understanding in Mathematics Visualization Unification and Axiom Choice in K Jorgensen P Mancosu S Pedersen eds Visualization Explanation and Reasoning Styles in Mathematics Synthese Historical Library Springer Dordrecht New York 2005 pp 147 213 Veblen O Whitehead J H C 1931 A Set of Axioms for Differential Geometry Proc NAS 17 10 1931 551 561 Veblen O Whitehead J H C 1932 The Foundations of Differential Geometry Cambridge Tracts in Mathematics and Mathematical Physics 29 Cambridge UP London 1932 Weyl H 1919 Die Idee der Riemannschen Fl che 2 Auflage Teubner Leipzig 1919 Die Idee der Riemannschen Flache R Remmert ed Teubner Archiv zur Mathematik 5 Teubner Leipzig 1997 Weyl H 1995 Topology and Abstract Algebra as Two Roads of Mathematical Comprehension trad A Shenitzer du texte de 1932 Amer Math Monthly 102 5 453 460 et 102 7 646 651 Whitney H 1936 Differentiable Manifolds Ann Math 37 3 1936 645 680
32. raite tout en conservant les bornes chronologiques choisies par Corry disons 1860 1960 Nous proposons un double d centrement du questionnement des vertus vers les pratiques des pratiques de synth se didactique vers les pratiques de recherche et de r solution de probl mes Renaud CHORLAY Mars 2009 9 Pr sentons trois axes de recherches non ind pendants qui s appuient sur les premiers r sultats obtenus depuis notre th se sur L mergence du couple local global dans les th ories g om triques de Bernhard Riemann la th orie des faisceaux 1851 1953 2 1 Axiomes et d finitions axiomatiques Comme on l a vu le moment de la d finition axiomatique d une structure est largement regard comme caract ristique de la d marche structuraliste Un questionnement centr sur les pratiques permet dans un premier temps de souligner la diversit des sens donn s ce moment par les acteurs eux m mes Plusieurs travaux ont montr la grande diversit des sens possibles du passage une formulation axiomatique Ainsi si l on prend le cas de Hilbert Corry Corry 2004 ou Michael Hallett Hilbert 2004 ont montr combien ses travaux sur les fondements de la g om trie ou de la physique taient entrepris dans un esprit diff rent de celui qui anime partir de 1925 le programme formaliste de fondement des math matiques d un c t un travail de mise plat et d analyse conceptuelle de certaines
33. recouvre deux grands types de questionnement l un plus proche des sciences cognitives et de la philosophie de l esprit qu on pense aux travaux de Marcus Giaquinto sur la visualisation n est pas non plus celui avec lequel nous envisageons un dialogue direct L autre porte sur la mani re dont les math maticiens font et justifient des choix par exemple de m thode valuent des r sultats ou des preuves selon des crit res qui ne se r duisent pas la validit ou la rigueur Notre projet d histoire du structuralisme nous semble porteur de deux formes d interventions dans ce champ philosophique Premi rement la r flexion sur les m thodes de l histoire nous a conduit dans le champ de la pragmatique bricolage conceptuel r criture usage des probl mes modes d abstraction autant de termes qui d signent la fois des outils pour l historien au travail et des concepts clarifier un niveau sup rieur d abstraction 21 L ann e 2008 2009 est pour nous une ann e de confrontation directe entre histoire et philosophie des math matiques dans le cadre d une bourse de post doctorat associ e la chaire d excellence senior ANR du professeur Mic Detlefsen projet deals of Proof http www univ nancy2 fr poincare idealsofproof 2 Un panorama des travaux de cette ligne de recherche peut tre trouv dans le num ro sp cial de Philosophia Mathematica 3 vol 4 1996 consacr au structuralisme Un
34. rgement d m ler 2 celui de la compr hension math matique mathematical understanding d ailleurs troitement li dans la tradition analytique celui de l unification Hafner amp Mancosu 2007 3 celui de l valuation des d finitions et des cadres question du proper better setting questions de fruitfulness naturalness of definitions dont les questions font directement cho sur un plan philosophique aux pratiques d invention de modification et de stabilisation de structures Sur ce dernier point nos pr occupations d historiens rencontrent directement celles dont les travaux r cents de Jamie Tappenden du c t de la philosophie sont porteuses 4 Un sous projet moyen terme Elie Cartan et Charles Ehresmann L tude de l articulation des travaux d Elie Cartan 1869 1951 et Charles Ehresmann 1905 1979 nous semble un bon point d entr e pour la mise en ceuvre de ce projet de recherche pour deux raisons elle s appuie sur un premier travail portant sur Elie Cartan elle croise plusieurs des axes de recherche g n raux identifi s plus haut Premi rement ce sous projet s appuie en le d passant de beaucoup sur un premier travail dont l essentiel se trouve dans notre article Passer au global le cas d Elie Cartan 1922 1930 Nous y tudions les modalit s d irruptions de probl matiques globales dans les th ories dont Elie Cartan est l un des pionniers dans les ann
35. rie des cat gories Ces questions ont depuis t compl t es dans le beau travail de Ralf Kr mer sur l histoire de la th orie des cat gories Kr mer 2007 quoiqu il ait laiss de c t l apport d Ehresmann En termes de corpus et de p riode d tude c est toutefois sur la premi re partie de l ouvrage de Corry que s articule notre projet Corry y tudie l histoire des structures alg briques de Dedekind jusqu la Moderne Algebra de van der Waerden 1930 On peut souligner plusieurs points que nous souhaitons retenir de cette approche Ce travail marque une tape dans l historiographie en ceci qu il ne pr sente pas l histoire d une structure alg brique particuli re histoire de la notion de groupe de corps d id al d espace vectoriel mais s attaque au probl me historique sp cifique de la red finition disciplinaire de l alg bre comme tude des structures alg briques tude du structuralisme en alg bre donc et non plus histoire des structures de l alg bre ou de l accumulation de connaissances alg briques appel es de toute ternit se couler un jour spontan ment dans un moule structural Sa description est appuy e sur la distinction utile et robuste entre body of knowledge comme ensemble de connaissances th or mes etc et image of knowledge comme ensemble de cat gories de classement des connaissances mode de s lection des questions l gitimes ou non importante
36. s enfin utilis s dans une large mesure ind pendamment de la nature qui leur tait jusque l reconnue ou du mode d emploi qui leur tait assign depuis leur premi re mise au point Cette notion nous a ainsi permis de mieux d crire le parcours des partitions de l unit sur la p riode 1937 1955 Nous avions d ailleurs d j point ce type de ph nom ne dans notre th se sans alors avoir explicitement recours la notion de bricolage Ainsi dans notre analyse de l d e de surface de Riemann de Hermann Weyl nous avons montr l importance du r le des m thodes alg briques de Dedekind et Weber th orie des corps de fonctions dans la refonte propos e par Weyl de la th orie riemannienne des fonctions alg briques d une variable complexe en particulier dans la distinction entre fonctions et diff rentielles Au del des nombreuses tudes de cas mener en termes de bricolage la notion elle m me nous semble permettre de lever deux des paradoxes apparents des descriptions usuelles d une d marche structuraliste d marche qui 1 se donne la fois comme fabula rasa par son moment inaugural de la d finition axiomatique et comme analyse d un contenu math matique riche et divers qui 2 atteint une certaine transversalit en purifiant sa 12 Soumis Archive for History of Exact Sciences le 19 11 2008 13 Un exemple peut aider nous qualifions d indirect l usage du 1 probl me de Cousin
37. s 17 Birkh user Boston 1996 Corry L 2004 David Hilbert and the Axiomatization of Physics 1898 1918 Kluwer Dordrecht 2004 Darrigol O 2008 The Modular Structure of Physical Theories Synth se 162 2 2008 195 223 Detlefsen M 2007 Purity as an Ideal of Proof in Mancosu 2007 pp 248 277 Epple M 1994 Das bunte Geflecht der mathematischen Spiele Mathematische Semesterberichte 41 1994 113 133 Epple M 1997 Styles of Argumentation in Late 19 Century Geometry and the Structure of Mathematical Modernity in M Otte amp M Panza eds Analysis and Synthesis in Mathematics Kluwer Dordrecht 1997 pp 177 198 Ferreiros J Gray J 2006 The Architecture of Modern Mathematics Oxford University Press Oxford 2006 Foucault M 1969 L arch ologie du savoir Biblioth que des sciences humaines Gallimard Paris 1969 Gray J 1992 The Nineteenth Century Revolution in Mathematical Ontology in D Gillies ed Revolutions in Mathematics Clarendon Press Oxford 1992 pp 226 248 Gray J 2004 Anxiety and Abstraction in Nineteenth Century Mathematics Science in Context 17 2 2004 23 48 Hacking I 1990 The Taming of Chance Oxford University Press Oxford 1990 Hacking I 1991 Statistical Language Statistical Truth and Statistical Reason The Self Authentification of a Style of Reasoning in E McMullen ed Social Dimensions of Sciences University of Notre Dame Press 1991 pp 130 157 Hac
38. s ou non etc distinction emprunt e Yehuda Elkana Il peut ainsi d crire des configurations particuli res par exemple celle repr sent e par Heinrich Weber qui Renaud CHORLAY Mars 2009 i tudie les corps de mani re abstraite dans des travaux de recherche mais int gre les connaissances r centes dans un cadre classique lorsqu il r dige son Lehrbuch der Algebra 1895 Corry peut ainsi articuler une accumulation continue du c t du body of knowledge et des discontinuit s dans limage of knowledge Troisi me point enfin dont nous souhaitons souligner l int r t l approche structurale n est pas uniquement d crite en termes de noyau dur caract ristique et minimal du type tude d contextualis e des cons quences d axiomes simples portant sur des objets auxquels on ne suppose pas de nature propre la gamme des pratiques typiques dans lesquelles Corry saisit la marque d une approche structurale est largie pour englober l tude syst matique des situations en termes de sous structure d extension et de quotient en termes de structures produit au sens informel et de suites de composition en termes enfin de th or mes d isomorphismes sur le mod le du th or me de structure des groupes ab liens de type fini En nous appuyant sur ce travail ant rieur nous disposons ainsi d l ments clefs qui nous permettent de d gager l essentiel de notre projet il s agit de reprendre le m me
39. synth se identifiant une nature du structuralisme des r flexions de m thode permettent la fois de d passer l impression d clatement et de contribuer au dialogue avec la communaut des historiens et des philosophes des sciences Ainsi la notion de style de raisonnement fournit elle une piste d int gration et un point d ancrage dans les d bats m thodologiques contemporains Ainsi le travail d histoire sur les pratiques math matiques permet il d approfondir le dialogue que nous avons engag avec la communaut internationale qui se penche sur la philosophy of mathematical practice En vue de la r alisation de ce projet d ensemble nous identifions un sous projet engager rapidement celui de l tude de la trajectoire de r criture qui lie Elie Cartan et Charles Ehresmann Renaud CHORLAY Mars 2009 2 Plan 1 Motivations 1 1 Une lecture math maticienne centr e sur les vertus pist mologiques 1 2 Une approche historique centr e sur l histoire de l alg bre 2 Axes de recherche 2 1 Axiomes et d finitions axiomatiques 2 2 Des probl mes aux structures 2 3 De l isomorphisme aux morphismes 3 Th mes de m thode 3 1 Un outil int grateur la notion de style de raisonnement 3 2 Un dialogue avec la philosophy of mathematical practice 4 Un sous projet moyen terme Elie Cartan et Charles Ehresmann Bibliographie 1 Motivations Cernons dans un premier temps le proj
40. tion la reconnaissance et l invention de structures dans des contextes et selon des proc d s dont l analyse historique peut rendre compte de la sp cificit abstraction chez Weyl en 1913 avec sa notion de surface de Riemann i e de courbe analytique complexe invention de structure qu on 7 Sur ce point les termes de Weyl et de Bourbaki se r pondent One separates in a natural way the different aspects of a subject of mathematical investigation makes its accessible through its own relatively narrow and easily surveyable group of assumptions and returns to the complex whole by combining the appropriately specialized partial results This last synthetic step is purely mechanical The great art is the first analytic step of appropriate separation and generalization Weyl 1995 454 Sous quelle forme va se faire cette op ration trouver les id es communes plusieurs th ories C est ici que la m thode axiomatique va se rapprocher le plus de la m thode exp rimentale Puisant comme elle a la source cart sienne elle divisera les difficult s pour les mieux r soudre Bourbaki 1948 38 Ainsi chez Weyl Perhaps the only criterion of the naturalness of a severance and an associated generalization is their fruitfulness Weyl 1932 454 If the process is systematized according to the subject matter by a researcher with a measure of skill and sensitive fingertips who relies on all the analogi
41. type de travail sur la m me p riode 1860 1960 mais en tendant le corpus au del de l alg bre en y incluant topologie g n rale et alg brique analyse fonctionnelle g om tries alg briques et diff rentielles th orie des groupes de Lie Cette description de nos objectifs ne tient toutefois qu en premi re approximation et demande imm diatement tre pr cis e Pour affiner nous voulons montrer 1 que l tude d autres champs que celui de l alg bre permet de soulever des questions importantes que Corry ne traite pas Plus sp cifiquement 2 l approche de Corry par sa m thode m me s interdit l acc s certaines questions Nous traiterons le point 1 dans la deuxi me partie de la pr sentation de ce projet Abordons ici les critiques de m thode L approche n est pas exempte de t l ologie non par na vet pist mologique mais par construction Corry se fixe un point d arriv e la Moderne Algebra de van der Waerden et tudie le pass en fonction de ce point d arriv e Ceci qui a quatre cons quences Premi rement les l ments sont ordonn s selon deux chelles lin airement gradu es selon le degr dont ils s cartent du point d arriv e selon la mani re dont ils apportent des r sultats ou m thodes appel es figurer dans l tat final la mise en s rie lin aire si elle permet de dessiner le mouvement sur une grande p riode invite peu aux comparaisons transversales
42. vant de l histoire des id es s ajoutent des mani res de faire L tude des structures est d crite par exemple chez Bourbaki avant tout comme un moyen pour r soudre des probl mes l efficacit de cette d marche repose sur le fait que les structures simples et g n rales sont elles m mes abstraites partir de probl mes nombreux et contextualis s Nous avons commenc tudier d un peu plus pr s cette myst rieuse dialectique des probl mes et des structures dans l article From Problems to Structures the Cousin Problems and the Emergence of the Sheaf Concept Retenons ici non pas les aspects particuliers cette histoire mais quelques distinctions que nous avons introduites cette occasion Soit un th or me d montr pour une certaine classe de fonctions et un certain type de domaine en l occurrence des fonctions m romorphes de plusieurs variables complexes et des polycylindres Nous avons distingu un usage direct et un usage indirect du probl me associ Chercher tendre le th or me une classe plus large de fonctions ou de domaines constitue un usage direct dans les ann es 1930 cet usage est attest chez Oka pour le second probl me de Cousin chez tous les sp cialistes de la th orie des fonctions de plusieurs variables complexes pour le premier probl me de Cousin Face la difficult d attaque du probl me direct jusqu l introduction de la cohomologie des faisceaux en t
43. x calculation differential geometry and algebraic topology MacLane 1996 183 l intuition d sormais domine d un seul coup d ceil d immenses domaines unifi s par l axiomatique o jadis semblait r gner le plus informe chaos Bourbaki 1948 43 Renaud CHORLAY Mars 2009 4 comme v rit d un structuralisme enfin pleinement conscient de lui m me On peut et ce serait un autre projet envisageable centrer l tude sur les vertus en consid rant que ces textes les voquent sans les d finir Cela ouvre sur un travail en deux temps D abord un travail d analyse pist mologique cherchant pr ciser les notions d intelligibilit de compr hension de bon cadre d unification d conomie de pens e etc Ce terrain de recherche est actuellement r investi par une certaine philosophie anglo saxonne des math matiques nous y reviendrons plus loin 3 2 Dans un second temps un travail d valuation du structuralisme poss de t il les belles vertus qu il affiche Si oui peut on en rendre raison Ces t che de d finition et d valuation ne sont toutefois pas celles que nous nous fixons directement Nous souhaitons dans un premier temps mettre entre parenth ses la question des vertus pist mologiques qui ne nous semble pas fournir un point d entr e bien clairant D abord parce que les m mes exemples techniques et les m mes vertus peuvent tre mises au service de projets peut tre superf
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